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DEUXIEME LEON

Cambriel Cours de Philosophie Hermtique ou Alchimique en dix neuf leons 2

Cours de philosophie hermtique

ou

dalchimie

en dix-neuf leon,

Traitant e la thorie et de la pratique de cette science, ainsi que de plusieurs autres oprations indispensables, pour Parvenir trouver la Pierre Philosophale, ou transmutations mtalliques, lesquelles ont t caches jusqu ce jour dans tous les crits des philosophes hermtiques.

Suivies des explications de quelques articles

Des cinq premiers chapitre de la gense,

par Mose ; et de trois additions

prouvant trois vie en lhomme,

animal parfait,

Ouvrage nouveau et curieux, et trs ncessaire pour clairer tous ceux qui dsirent pntrer dans cette science occulte, et qui travaille lacqurir ;

ou chemin ouvert

celui qui veut faire une grosse fortune.

Par L. P. Franois Cambriel,Dr Saint-Paul de Fenouillet, dpartement des Pyrnen Orientales ; N la Tour de France, le 18 novembre 1764 ; et ancien fabricant de draps, Limoux, dpartement de lAude.

Dominus memor suit nostri ;

Et benedisit nobis.

Ouvrage fini en janvier 1829, et du rgne de Charles X,

Roi de France, la cinquime.

Premire Edition.

PARIS.

1843.

L

AUTEUR na pas cru devoir faire prcder dune prface, ce Trait et Cours dalchimie, ni devoir dire les raisons qui lont oblig le rendre public.

Il na pas cru non plus devoir le ddier personne ; ne dsirant pas, comme nombre dauteurs, se faire prner ni appuyer par le crdit de quelque grand personnage.

A qui pourrait-il ddier cette cl dalchimie, pour donner une marque de sa reconnaissance ? A un homme !.. il nen a trouv aucun qui ne ft incrdule, dur, inhumain, fourbe et flatteur : tous nont cherch qu le surprendre, pour lui enlever le secret des secrets.

Il na toujours trouv que des hommes peu ports laider ou lui tre utiles, pour finir son travail alchimique : il na donc aucune marque de reconnaissance donner personne.

Pour remplir justement et compltement ce devoir sacr de reconnaissance, il doit ddier Dieu, auteur de tout don, ce prsent trsor de philosophie hermtique : science quil ne tient que de lui seul.

Les envieux, aprs avoir lu cet ouvrage, se mettront en colre ; parce quils nauront pas pu parvenir eux-mmes ce degr de bonheur, et ils croiront ne pouvoir pas mieux se venger de leurs infructueuses recherches quen invectivant la crature favorise et en faisant passer la science hermtique pour fausse ; ils se desscheront de rage ! ils mourront !.. Et lalchimie restera.

Mais le philosophe reconnaissant, qui a toujours mis sa confiance en Dieu, et qui ne la obtenue qu force de persvrance et de prires, len remerciera et le bnira tous les jours de sa vie, de ce quil a bien voulu lui donner une aussi grande marque de son amour. De lavoir sorti de ltat dhumiliation, de misre et de privations dans lequel il tait rest grand nombre dannes, et de lavoir fait triompher de tous ses ennemis, ainsi que de tous les hommes orgueilleux et parents incrdules qui lavaient compltement mpris, abandonn !

Si quelque amateur dalchimie, aprs avoir attentivement lu les dix-neuf leons suivantes, en formant le cours complet, le reconnat pour un... (comme il pourra en juger par la thorie et la pratique que son ouvrage renferme) et dsire lui parler, quil veuille sadresser limprimeur du prsent, qui lui donnera son adresse, ou M. Rivet, rue Judas, n 8, Montagne-Sainte-Genevive.

ABRG DU GRAND UVRE.

C

ELUI qui, par un travail un peu long et fatigant, pourra parvenir extraire des mtaux, leur terre rouge feuilleet saura, par un moyen naturel (connu aux seuls philosophes hermtiques), la joindre leau mercurielle purifie, pour la rendre toute, terre fluidificante ; et que pour finir et complter son uvre, il pourra, par le moyen du feu, et par sa vertu, congeler et rendre en pierre ces deux eaux runies : celui-l peut se vanter davoir fait une grande dcouverte ; davoir trouv une chose trs prcieuse, et dune plus grande valeur que tout lor du monde, et que toute autre chose : puisquil aura trouv la mdecine universelle (principe de tout ce qui a vie) avec laquelle il peut se tenir toujours en bonne sant, et prolonger ses jours de beaucoup.

Les moyens de parvenir obtenir cette prcieuse dcouverte sont compltement montrs et expliqus dans les dix-neuf leons suivantes : il faudra donc les lire, et les relire souvent, et avec beaucoup dattention.

Premire Leon.

E

N juin 1819, Louis-Paul-Franois Cambriel fit insrer, dans les Petites Affiches, un avis, semblable celui qui est la fin du prsent trait, intitul (Offre dun grand bnfice), et il en reut, en rponse la lettre dont copie est ci-aprs :

Signe, E. B. K.

Paris, le 19 juin 1819.

Monsieur,

Une personne qui a quelques notions de chimie, ayant pris connaissance :

1 De lavis insr sous le n 8056 des Petites Affiches du 18 courant, offre de faire la somme demande ; mais elle y met pour condition, que le bnfice propos, ne soit que du remboursement du principal prt : plus une somme gale au principal : le tout obtenir dans deux ans ;

2 Que lauteur de la dcouverte nonce, dans une lettre quil adressera Mr E. B. K., chez le limonadier du caf des Arts, n 9, rue du Coq-Saint-Honor ; lobjet prcis de sa dcouverte, ainsi que les principes chimiques sur lesquels elle repose ;

3 Le prteur sengage ds prsent, et il est prt mettre sous la meilleure forme ledit engagement, pour la sret de lauteur de la dcouverte, et ne pas faire maintenant, ni lavenir, et sous aucun prtexte, aucune rvlation, aucun emploi de ladite dcouverte

3 Si sous ces clauses, lauteur veut rpondre la personne susdite, il peut adresser sa lettre comme ci-dessus : et si aprs les premires ouvertures, les auteur et prteur conviennent entre eux des susdites propositions ; ils pourront se mettre en communication personnelle et intime.

Jai lhonneur de vous saluer,

E. B. K.

Copie de la lettre de Louis-Paul-Franois Cambriel Mr E. B. K., quil a cr tre un philosophe hermtique, en rponse la sienne du 19, et par laquelle, il veut lui prouver, quil est dans le cas de remplir loffre quil a faite par des Petites Affiches.

Paris, le 24 juin 1819.

Monsieur,

Je mempresse de rpondre la lettre que ma fait lhonneur de mcrire Mr E. B. K., et je tcherai (quoique nayant jamais appris la chimie dans les coles) de lui prouver la possibilit de la transmutation mtallique, tant discrdite.

Je crois que (si jai bien pris le sens de sa lettre) cest tout ce quil exige de moi ; du moins quant prsent, sauf remplir notre premire vue toutes les autres conditions quil pourrait dsirer.

Lobjet et la dcouverte mme, est comme je le dis ci-dessus, la pierre philosophale, laquelle je suis parvenu, avec laide de Dieu, le secours dun ami, et par un travail pnible et continu pendant vingt-sept ans (1).

II sagit de faire par un travail de vingt-quatre mois, une poudre rouge comme le coquelicot ou poudre de projection qui, comme la fleur cailler le lait, opre sur le mercure vulgaire chauff dans un creuset, le mme effet que la fleur cailler fait sur le lait : et dans une heure, une pince de cette poudre rouge comme une prise de tabac mise dans ledit creuset (dans lequel on aura mis quatre livres de mercure), le caillera ou le fixera et le rduira en or le plus fin vingt-quatre carats et plus, ce qui paratra extraordinaire, mme impossible, quoique naturel et trs vrai.

Pour faire cette poudre rouge de projection, il faut (ce qui paratra impossible tout homme, quand il jugera de lalchimie comme en jugent le commun des hommes) parvenir force de travail mollifler et rendre en eau, par une solution naturelle, une pierre, qui, quoique compose de deux, mme de trois, nest toujours quune, et laquelle par une destruction ritre : lavages, sublimations, mmes distillations, donne le soufre rouge ou corps fixe, coagule essentiel (ou le livret dor du Trvisan, philosophe hermtique) qui se rduit en eau par ladite solution. Ce qui nous donne leau double, leau anime, le rebis des philosophes hermtiques, enfin le mercure philosophal.

Mais on ne peut parvenir acqurir cette eau divine quen mettant le corps fixe dans sa propre terre ou molle montagne, dont parle Sendivogius autre philosophe hermtique (bien prpare par un long et pnible travail), et aprs avoir beaucoup souffert par le feu des cuisines. Alors seulement on est parvenu faire remonter leau vers sa source et faire rentrer lenfant dans le ventre de sa mre.

La fable nous apprend que Vulcain surprit dans son filet Mars et Vnus en adultre. Si le philosophe hermtique ne fait pas comme Vulcain, et sil ne lemploie pas dans son opration, jamais il ne parviendra obtenir la pierre des philosophes, dont il ne saurait se passer.

II faut donc quil tende son filet, et quil sache profiter du seul moment propice pour surprendre et attraper les adultres, parce quil doit savoir quil ny a quune heure pour cela, laquelle passe il ne faut pas en attendre une autre sa place (dit Zachaire, autre philosophe hermtique de France). Alors on nattrape plus rien, et les amoureux se dtruisent et svaporent.

Quand une fois leau anime est faite, et quelle a acquis sa perfection par lunion des lments principiants, et le pouvoir de revenir en terre par la vertu quelle a acquise, produite aussi de lunion qui sest opre naturellement des lments principis, contenus et cachs dans les natures, et par lalliance du feu naturel avec le feu innaturel, laquelle alliance nous a procur leau tant dsire, renfermant en elle un troisime feu, nomm feu de contre nature, portant avec lui tous les principes de la vie, acquise et manifeste par leffet de la fermentation ; enfin leau double et la runion premire des eaux suprieures avec les eaux infrieures contenues dans les mtaux. Et comme tout dans ce monde manifeste ses qualits par lodeur qui sen exhale, que la rhue et la ros rpandent une odeur diffrente, que lail et loignon rpandent une odeur trs forte, de mme notre eau rpand aussi une odeur trs forte qui annonce sa perfection et sa fin, ce qui nous rjouit. Et cest alors et ces signes que nous sommes convaincus que cette eau parfaite nous donnera dans lespace de neuf mois lenfant tant dsir qui viendra avec des joues trs vermeilles, et qui chassera dans une heure la lpre des mtaux (aprs quil aura pris un peu de force) en les rendant semblables lui et clatants comme lui.

Cest l la vritable poudre de projection, qui, sa sortie, rendra des services bien plus grands en gurissant les cratures malades, et leur rendant la vigueur de la jeunesse. Cest l le vritable ennemi de toutes les maladies dont lhomme se trouve attaqu, soit par celles produites par sa mauvaise manire de vivre, soit par celles quil apporte en naissant ou originelles, lesquelles ne nous viennent ainsi quaux mtaux qu cause de la premire dsobissance. Ce qui ne serait pas, si notre premire mre, Eve, stait contente de ne manger que du fruit de larbre de vie, au lieu de manger et de sunir celui qui devait la conduire la mort.

Cet arbre de vie qui porte de si bon fruit, nest produit que de cet arbre double, nomm larbre de la science et dalliance, du bien et du mal ou compos de deux, lun bon, lautre mauvais ; lun fixe, lautre fuyant ; lun dur, lautre cassant ; lun blanc, lautre rouge ; lun mle, lautre femelle ; enfin matire et forme. Et tout cela cependant ne fait quun, et nest produit que dun ; mais en lui sont les deux natures, les trois principes, les quatre qualits, et contient aussi en lui le principe universel, cet esprit divin dont le Tout-Puissant sest servi pour former et crer toutes choses, qui, lors de la sparation du premier chaos dont il faisait partie, et daprs lordre et volont du Tout-Puissant se mouvait sur les eaux infrieures, et ne demandait qu excuter et remplir la bndiction et volont du Crateur : crotre et multiplier.

Mais avant que dobtenir ce cher enfant, il faut que notre uvre passe par toutes les couleurs, que la putrfaction fasse paratre la noire (marque certaine de la russite), et que la blanche, la verte, la jaune et la rouge se succdent, et que dans lintervalle de lapparition de toutes ces couleurs, et avant la deuxime et dernire runion des eaux suprieures des mtaux avec les eaux infrieures (qui avant taient spares par le firmament des philosophes hermtiques), la rose de mai vienne humecter notre embryon et le disposer cette parfaite runion, do rsultera la mdecine universelle ou panace et la poudre de projection.

Voil, mon cher monsieur, ce quun philosophe hermtique peut crire de sa science pour rpondre lhonneur de votre lettre.

Jy ajouterai cependant que, si on ne sait pas unir les corps parfaits par le nombre mystrieux des philosophes (2) louvrage ira fort mal, et il y aura ou trop, ou trop peu de scheresse, et le mariage (pour former cette union) ntant pas fait selon les rgles de la nature, le produit ne remplira jamais les dsirs du philosophe labourant, il y sera donc pour la perte de son argent, de sa peine et de son temps.

Si ce que jai dit est un peu trop obscur, et quon ne puisse pas bien se fixer pour commencer, quon fasse le dur mol et le mol dur.

Ou bien : quon prenne la terre fixe ou lor mle, et quon lui fasse des ailes pour la rduire en eau volatile ; puis, que par un long temps on parvienne fixer cette eau volatile, et la rendre en terre comme nous lenseigne notre pre Herms ( quoi on parviendra en lui administrant une chaleur au mme degr quest celle de lhomme).

Ou bien, quaprs une longue coction on parvienne lui couper les ailes et lempcher de voler, alors on verra la fin de son ouvrage, et il ne faudra quen augmenter la quantit et la vertu, quoi on parviendra en la remettant plusieurs fois dans la mme terre do elle a pris naissance.

Les dsirs du philosophe labourant seront alors accomplis, puisquil possdera tout.

Et si Dieu, trs bon et trs grand, donne lhomme (comme jen suis convaincu par moi-mme) (3) une aussi grande marque de son amour, quil len remercie toujours. quil lui en rende de continuelles actions de grce, et quil tche de sen rendre toujours digne par une bonne conduite, en tendant une main secourable tous ceux qui en auront besoin et qui le mriteront. Lou soit Dieu tout puissant qui nabandonne jamais celui qui met sa confiance en lui.

Si par ma prsente rponse (quoique trs embrouille et trs claire en mme temps) jai pu satisfaire la personne qui a eu la bont de mcrire, quelle veuille me rpondre et me donner son adresse, ainsi que le jour et lheure auxquels je pourrai avoir une confrence philosophique avec elle ; par ce moyen, il me sera facile daplanir les doutes qui pourraient rester (que je nai pu claircir par la prsente), et parvenir fixer son opinion sur celui qui a lhonneur dtre son trs humble serviteur,

Louis CAMBRIEL.

l. Je commenai mes recherches alchimiques la mme anne que le gnral Buonaparte revint dEgypte, et dtruisit le Directoire qui avait pris pour principe dappauvrir et daffaiblir la France, et dhumilier les Franais que ce grand homme, avant son dpart pour lEgypte, avait laisss couverts de gloire. Aprs trois ans passs environ, ce grand homme tant arriv Paris par miracle, fit cesser le mal, toutes nos dfaites, et rejeta avec usure, sur tous nos ennemis coaliss, les humiliations dont ils nous avaient abreuvs pendant son absence. II fut nomm premier consul, monta une forte arme, et redonna la France, que le malheureux Directoire avait rduite deux doigts de sa perte, sa premire gloire, et comme nation le premier rang. Il traversa le mont Saint-Bernard avec la forte arme quil avait rassemble au camp de Dijon, attaqua et dtruisit larme autrichienne la bataille de Marengo. Victorieux comme il lavait toujours t, treize ou quatorze places fortes dItalie lui furent remises, et nous. Franais, nous fmes pour la deuxime fois matres de ce beau pays. Aprs celle grande victoire, je me rendis pour la deuxime fois Paris pour y continuer mon ouvrage alchimique, et jy restai assez longtemps pour tre tmoin du grand amour et confiance que les Franais avaient pour ce grand gnral, dont la majeure partie la portrent jusqu le proclamer empereur des Franais, titre dont il stait rendu digne. Je fus prsent son couronnement, son mariage avec Marie-Louise dAutriche, jy tais aussi pendant que ce gnral (valeureux comme il ny en a jamais eu) a remport nombre de victoire sur les armes de Prusse, dAutriche et de Russie, et mis les Franais un si haut point de gloire, que la France, qui avait t vendue, trahie par le Directoire, fut si agrandie par lui-mme que ses limites allaient depuis Naples, Trieste, Venise, Rome, Gnes, jusque et y compris la Hollande, et un tel point de prosprit et de gloire, que toutes les nations dsiraient dtre nos allies et nos amies, et souhaitaient faire partie de ce vaste empire. Triomphante et richissime, la France navait t porte ce haut point de triomphe que par le courage, le talent et lamour que ce grand gnral portait aux Franais, et auquel ils devaient leurs richesses, et quune trop forte ingratitude envers lui nous prouve combien le Franais est lger et peu reconnaissant. Il avait combl de fortune la ville de Paris, et quand les ennemis coaliss se sont prsents sous ces murs, cest cette mme ville qui la abandonn.

Il na t trahi en France que par ceux quil avait trop combls de biens, et par les Anglais chez lesquels il stait rendu, et ce par labus des lois tablies dans ce pays, quils nauraient jamais transgresses, et desquelles le plus pauvre matelot anglais aurait joui, furent mconnues par cette nation en faveur de lhomme qui stait mis avec trop de confiance entre leurs mains, et que par suite de cet abus fut dport lle de Sainte-Hlne, o il y fut continuellement maltrait par le gouverneur Udson Low, et dans laquelle il a fini ses jours

1 Mon dsir moi est que Dieu le rcompense de tout le bien quil nous a fait, ainsi que de celui quil avait lintention de nous faire. Amen.

La veuve du marquis Duchilau, ancien amiral de France, ma racont plusieurs fois lanecdote suivante :

Lorsque lempereur Napolon se rendait en Angleterre, accompagn de plusieurs de ses gnraux, il crut prudent de les laisser pendant 48 heures, et de se rendre, sans leur faire part de son dessein, avec un seul deux dans une campagne o stait retir le marquis Duchilau, ancien amiral de France.

Ce dernier fit quelque difficult de le recevoir, cause des Bourbons auxquels il tenait beaucoup ; mais, voyant que Napolon persistait vouloir lui parler, il y consentit.

Etant ensemble, lEmpereur lui dit : Honnte amiral, la confiance que jai en vous ma fortement port, avant de me rendre en Angleterre, venir vous consulter pour savoir de vous, qui avez combattu pendant nombre dannes cette nation et qui la connaissez parfaitement, si je dois me mettre ou non entre leurs mains, et si on me fera jouir de lavantage de leurs lois, notamment de celle de lhabeas corpus 7 cest ce que je dsire savoir ; jai laiss mes amis pour venir vous consulter sur ce que je dois faire : parlez-moi franchement.

En homme franc, lui dit lamiral, je vous dirais que vous ne devez pas vous rendre chez des gens qui abuseront de votre confiance. Vous tes leur ennemi, ne comptez pas sur leur gnrosit ; renoncez votre projet, tel est mon conseil : je ne saurais vous en donner un meilleur. Que ferai-je donc ! o dois-je me rendre, dites-le moi ? II faut vous rendre Bordeaux. Je vais vous donner une lettre pour un capitaine de vaisseau ; cest un homme qui me doit la vie ; sans moi, il aurait t pendu. Changez de costume et rendez-vous promptement chez lui. Je le charge de vous conduire en pleine mer et de vous mettre dans le premier vaisseau que sans doute il trouvera : lequel vous transportera en Amrique, vous seulement. Cest un homme discret, vous navez rien craindre ; il fera tout pour moi, en reconnaissance du service que je lui ai rendu : cest le seul moyen de vous mettre labri des Anglais, qui ne suivront aucune loi en votre faveur.

Napolon reut avec plaisir ce conseil et quitta lamiral, trs dcid le suivre. Sil lavait suivi, que de dsagrments il se ft pargn. Sans doute, ceux qui laccompagnaient crurent trop la gnrosit anglaise et le portrent sen aller Londres, comptant toujours sur lentire excution de leurs lois.

Franais crdules et confiants, fiez-vous cette nation ! comptez sur la gnrosit anglaise !..... Cest Sainte-Hlne quon vous en donnera des preuves ! cest dans cette le que le gouverneur en a fait compltement jouir lempereur Napolon.

2. Ce nombre nest quun assemblage de V C et V.

3. Jamais je ne serais parvenu trouver les oprations ncessaires et indispensables pour faire la pierre philosophale, et me procurer la mdecine universelle (moi qui ne connaissais rien en chimie). Si Dieu, qui dans tous les temps de ma vie, ma donn des marques de son amour, ne mavait inspir en trois diffrentes fois, et quatre annes de distance dune inspiration lautre, la manire de bien faire lopration alchimique que jignorais, et que je naurais jamais pu trouver de moi-mme, si une voix forte (qui toujours tait prcde dun fort coup de vent mon oreille droite), et que pour la premire fois jai fort bien entendue, tant dans mon lit & sept heures du matin (rflchissant sur mon ouvrage que je ne pouvais continuer) ne mtait venue redresser en me disant : Il faut sy prendre de telle manire. Je suivais linspiration, et lopration que jignorais se faisait parfaitement bien.

Cette inspiration qui fut la premire, ne me vint quaprs avoir t consulter les trois plus grands chimistes de Paris, qui ne purent me donner le moyen que je leur demandais. Cela marriva dans

la maison de madame la veuve Brocard, rue des Boucheries-Saint-Germain Paris.

La deuxime inspiration, fut prcde comme la premire, par un fort coup de vent mon oreille droite : ce fut en plein midi, et dans le fond dune diligence, entre Lyon et Paris, o je me rendais pour y continuer mon ouvrage alchimique. Je fus averti de cette manire : Tu le trompes, les livres hermtiques disent comme cela.

Et la troisime inspiration, qui fut plutt une vision, vint mclairer quatre ans aprs dans la maison de madame la veuve Maon, rue Mazarine, n 60, au jeu de paume. Lopration et la perfection du travail que je faisais se prsenta devant mes yeux, et mon odorat, par lodeur qui sen exhalait, me prouva (comme il est dit dans Nicolas Flamel de Paris) quelle tait bonne et bien faite, et me donna la conviction que jtais parvenu la fin de la premire partie de mon ouvrage alchimique ou de la pierre du premier ordre, ce qui me rjouit beaucoup. Jai donc raison de dire, que je suis convaincu par moi-mme de lamour que Dieu accorde ses cratures.

Pour convaincre ceux qui me liront, que je ncris aucun mensonge dans ce prsent Trait dalchimie, je joindrai la note ci-dessus une autre grande marque damour que Dieu a eu la bont de maccorder pendant mon enfance, de laquelle je nai parl personne, et que je crois tre oblig de faire connatre mes semblables.

Tableau fidle principe premier ce qui a t cr,

des perfections de Dieu, crateur de lunivers, et de mouvement, par consquent de la vie, de tout mis la vue des hommes par sa crature.

Louis-Paul-Franois Cambiel.

Plusieurs de ceux qui liront ce tableau, pourront et croiront avoir le droit de dire que ce tableau nest pas fidle comme je le dis.

Comment ledit Cambriel a-t-il pu supposer et se convaincre de la vrit des perfections du Tout-Puissant ? A-t-il t au ciel ? Quelque esprit cleste la-t-il instruit ? Cela ne parat pas possible.

Je rpondrai ces observations que je dis la vrit, mais que je ne veux pas dire comment je lai apprise cette vrit.

A une poque de ma vie, Dieu qui ma toujours donn des marques de son amour, a voulu que je fisse le tableau fidle de ses perfections corporelles quant la vue, mais spirituelles quant lui.

Il a voulu que jen fusse convaincu moi-mme, pour pouvoir convaincre ceux qui me liront, que Dieu est comme lhomme, comme sa crature.

Nous sommes donc, comme il est dit dans les Ecritures-Saintes, crs limage et la ressemblance de Dieu, et nous devons nous en glorifier, et ne pas en douter par trois raisons : la premire, parce que lenfant ressemble toujours en tout & son pre ; la deuxime, parce que nous avons t crs immortels comme lui ; et la troisime, parce que notre corps est plus parfait dans son intrieur que dans son extrieur, et que nous avons eu en nous un corps immortel, lequel nest devenu mortel que par la premire dsobissance, une me immortelle, faisant partie de la divinit mme, et un esprit terrestre, alliant lme cleste au corps terrestre formant la crature, et unissant par sa mdiocrit le haut avec le bas, le cleste avec le terrestre.

DIEU EST dune taille et corpulence comme pourrait tre lhomme le plus parfait, ayant six pieds six pouces de taille, proportionn dans toutes les parties qui le composent, mais toujours en plus de perfections que lhomme le plus parfait que je lui compare.

Il est majestueux, sa peau est de la couleur de la flamme dune bougie ; ses pieds, ses genoux, ses cuisses, ses mollets sont si parfaits, que quoique jen dise, je serai toujours en dessous pour en pouvoir reprsenter la perfection.

Les ongles de ses pieds sont dune beaut incomparable, le plus bel ivoire ne peut pas leur tre compar.

Les mollets de ses jambes sont si beaux, si parfaits, et comme il est tout esprit, je voyais travers comme travers le cristal le plus clair.

Mais ce quil y a de plus beau dans toute cette beaut de perfections runies, cest larrangement des muscles qui le forment. Ils sont arrangs comme des petites poires, de trois en trois, deux haut et un bas ou au milieu des deux premiers, et dans chaque muscle on ne voit quun mouvement continuel de rayons de lumire gazeux, qui se croisant dans tous les sens et sans se sparer, montant et descendant, forment et font apparatre un million de perfections dans lintrieur de chaque muscle.

De cette manire, que le Tout-Puissant, daprs mon ide, mon jugement, daprs ce que jai vu, est tout mouvement, sans cependant se bouger, tout perfections, tout vie.

Il est principe de mouvement, par consquent principe de la vie de tout ce qui a t cr, et de tout ce quil voudra crer encore. Telle est mon ide sur les perfections de Dieu, et on ne pourra se faire un tableau plus fidle, plus vrai de ce que javance, quen examinant les perfections intrieures de sa crature, de ses enfants.

Daprs le tableau fidle des perfections de Dieu, nous ajouterons trois mouvements.

Le premier mouvement est Dieu mme, crateur de lunivers. Il est le principe premier de la chaleur, et la chaleur le principe de la vie de tout.

Le deuxime est le mouvement lmentaire. Il est multipliant, et aid par les rayons solaires ou troisime mouvement, il met en fermentation toutes les semence; des trois rgnes, et ne se manifeste que par leurs productions et croissance ; il participe et dpend du premier, il sera tant que le monde durera.

Le troisime mouvement est le mouvement des rayons du soleil, aidant et fortifiant toute crature affaiblie par la vieillesse.

Le premier mouvement est ternel comme Dieu, son principe.

Les deux autres en dpendant ne seront que tout autant que le Crateur tout puissant le voudra. Ce qui fixera la fin des temps et le commencement de lternit.

Le froid, produit du repos, est loppos des deux derniers mouvements ; il est le principe de la mort, et la dmontre partout o il domine.

Deuxime Leon.

P

assant un jour devant Notre-Dame de Paris, jexaminais avec beaucoup dattention les belles sculptures dont les trois portes sont ornes, et je vis lune de ces trois portes un hiroglyphe des plus beaux, duquel je ne mtais jamais aperu, et pendant plusieurs jours de suite jallais le consulter pour pouvoir donner le dtail de tout ce quil reprsentait, quoi je parvins Par ce qui suit, le lecteur sen convaincra, et mieux encore en se transportant de lui-mme sur les lieux.

A lune des trois grandes portes dentre de lglise Notre-Dame, cathdrale de Paris, et sur celle qui est du cot de lHtel Dieu, se trouve sculpt sur une grosse pierre au milieu de ladite porte dentre, et en face du Parvis, lhiroglyphe ci-dessus, reprsentant le plus clairement possible (pour ceux qui savent expliquer les hiroglyphes) tout le travail, et le produit ou le rsultat de la pierre philosophale. Cet hiroglyphe a t sculpt lors de lrection de cette belle glise, fonde par Guillaume, vque de Paris, et je vais expliquer le mieux quil me sera possible pour me rendre utile, et aider les amateurs de la philosophie hermtique, et me faire connatre mes semblables.

I

Au bas de cet hiroglyphe, qui est sculpt sur un long et gros carr de pierre, se trouve au ct gauche du ct de lHtel Dieu, deux petits ronds de pleins et saillants, reprsentant les natures mtalliques brutes ou sortant de la mine (quil faudra prparer par plusieurs fusions et des aidants salins).

II

Du ct oppos sont aussi les deux mmes ronds ou natures, mais travailles et dgages des crasses quelle apportent des mines, lesquels ont servi leur cration.

III

Et en face du ct du Parvis, sont aussi les deux mmes ronds ou natures, mais perfectionns ou totalement dgags de leurs crasses par le moyen des prcdentes fusions. Les premires reprsentent les corps mtalliques quil faut prendre pour commencer le travail hermtique.

Les deuxime travailles, nous manifestent leur vertu intrieure, et se rapportent cet homme qui est dans une caisse, lequel tant entour et couvert de flammes de feu, prend naissance dans le feu.

Et les troisimes perfectionnes ou totalement dgages de leurs crasses, se rapportent au dragon babylonien ou mercure philosophal, dans lequel se trouvent runies toutes les vertus des natures mtalliques.

Ce dragon est en face du Parvis et au-dessus de cet homme qui est entour et couvert de flamme de feu, et le bout de la queue de ce dragon tient cet homme, pour dsigner quil sort de lui et quil en est produit, et ses deux serres embrassent lathanor pour dsigner quil y est ou doit y tre mis en digestion, et sa tte se termine et se trouve dessous les pieds de lvque.

Il ne faut pas croire que ce soit un cadavre dans une bire, si ctait ainsi il serait couch plat, au lieu que celui-ci est presque droit et est entour et couvert de flammes de feu (1).

Je dirai donc que de cet homme qui pris naissance dans le feu, et par le travail des aigles volants reprsents par plusieurs fleurs formes de quatre feuilles jointes dont est entour le bas de sa caisse, et est produit le dragon babylonien dont parle Nicolas Flamel, philosophe hermtique de la ville de Paris ; ou le mercure philosophal.

Ce mercure philosophal est mis dans un uf de verre, et cet uf est mis en digestion ou en longue coction dans lathanor, ou fourneau termin en rond ou vote, sur laquelle sont placs les pieds de lvque, et dessous lesquels (comme je lai dit) se trouve la tte du dragon (2) De ce mercure il rsulte la vie reprsente par lvque qui est au-dessus du dit dragon.

Et pour prouver que cest rellement cela, je dirai que si ctait un vque (et non un ressemblance ou dmonstration de la vie), on laurait plac de manire que ces pieds fussent poss plat et sur un terrain plat, et non sur la vote ou dme qui couvre lathanor. Il est donc reprsent comme sortant de lathanor ou fourneau de lampe, dans lequel le mercure philosophal a t mis en digestion.

Cet vque porte un doigt sa bouche, pour dire ceux qui le voient et qui viennent prendre connaissance de ce quil reprsente : Si vous me reconnaissez et devinez ce que je reprsente par cet hiroglyphe, taisez-vous ! Nen dites rien ! Il a donc reprsent tout ce qui tait ncessaire, ainsi que toutes les oprations manuelles pour pouvoir parvenir faire la pierre philosophale ; mais il na rien reprsent de ce qui regarde la multiplication de cette divine pierre. Comme lui je me tairai, je nen dirai rien.

Je dirai seulement que le rsultat de louvrage de lalchimie est la vie mme, et que cette vie est reprsente (comme il est dit ci-dessus) par lvque qui est plac sur la vote de lAthanor.

La pierre philosophale (qui nest aujourdhui regarde que comme une folie aux yeux dun grand nombre dhommes) ne peut se faire que par la runion du sang (ou esprits mtalliques) contenu dans les natures. Pour lobtenir, il faudra (comme il est dit par Nicolas Flamel) gorger, assassiner plusieurs innocents (3) pour tirer deux, et le pousser de puissance en acte, ce sang vital dont nous avons besoin, lequel nous devons mettre (aprs quil aura t spar et bien dpur de ses parties charnelles ou terrestres) dans des bouteilles long col, pour parvenir obtenir de lui la panace et la poudre de projection que nous dsirons, laquelle nous ne pourrons possder quaprs avoir gorg plusieurs innocents.

(1) Il faut que je fasse observer tous ceux qui voudront pntrer dans ce qui est cach en cet homme, que sur la caisse dans laquelle il est entour et couvert de flammes de feu, sont sculpts en long les quatre lments, et au ct droit ou derrire la mme caisse sont sculptes aussi en long les natures qui les contiennent. Il est donc produit de ces deux natures qui contiennent les quatre lments.

(2) Autour de cet Athanor (qui est port sur quatre colonnes et o est cramponn le dragon babylonien) se trouve sculpt en long les deux natures, et dessous les trois principes, et devant la quintessence des quatre lments, et le mercure philosophal (reprsents par ce dragon qui les contient), lequel par leur union en a t produit.

(3) Je parle des mtaux ayant vie.

Troisime Leon.

M

de Gabriac, sous-prfet du Vigan, dpartement du Gard, tant Paris, allait chaque soir la socit de M. le ministre, le comte de Cases. L se trouvaient runis plusieurs solliciteurs de places, et en attendant de les obtenir, ils sentretenaient toujours de la pierre philosophale et des moyens de grossir leur fortune ; got que le besoin fait natre chez tous les hommes. Il me fit part de leur conversation, et me dit : II ny a que vous qui puissiez me dire les preuves que je dois fournir pour me dfendre, et pour prouver lun, lexistence de la pierre philosophale ; lautre, qui nen doute pas, ce que cest que la transmutation mtallique ; lor potable, et autres termes qui nous embrouillent, et qui portent le plus grand nombre de cette socit douter de la vrit de cette science. Puisque la vrit nest quune, et quen lisant les livres hermtiques, on y voit que les philosophes traitant de cette science, se servent de plusieurs noms au lieu de ne se servir que dun seul pour exprimer la mme chose. Cest ce qui fait quon sgare en causant de cette science, et quon finit par en douter. Quant moi, jy crois fermement par tout ce que vous mavez dit dans le temps. Je lui rpondis tout ce que je vous dirais pour convaincre ces Messieurs de la vrit de la pierre philosophale ; vous loublieriez : je vais vous crire une lettre avec laquelle vous vous dfendrez, et vous en prouverez la ralit, ainsi que les grandes vertus quelle a en elle. Ce que je fis de suite.

A M. de Gabriac, sous-prfet du Vigan, dpartement du Gard, prsentement Paris.

Paris, le 2 fvrier 1820.

Monsieur,

Vous trouverez ci-bas les termes techniques dont les philosophes hermtiques de tous les pays se sont servis, et quils ont gnralement reconnus entre eux pour dsigner (quoique en des langues diffrentes) le travail hermtique et son produit, dit gnralement pierre philosophale, ou pierre occulte : et autant que mes connaissances dans cette science me lont pu permettre. Qui sont :

1 Pierre philosophale, ou pierre occulte ;

2 Mdecine des trois rgnes, ou mdecine universelle ;

3 Transmutation mtallique ;

4 Or potable, ou panace.

Premier tat

Par le mot pierre philosophale, ou pierre occulte : ces mmes chimistes, dans tous leurs ouvrages traitant de cette science, ont entendu dsigner les matires et les oprations que ncessite la chimie hermtique, dont le but est dobtenir. par un travail long et fatigant, une poudre rouge (dans laquelle rside la vertu de fixer le mercure), ou un or exalt : comme serait leau-de-vie rduite et pousse aux trois-six ; eu gard au vin, son principe ou vhicule.

Deuxime tat

Cette poudre rouge a plusieurs noms et proprits, et dans le deuxime tat parfait (qui est toujours, ainsi que nous lavons dit, un or exalt), prend celui de mdecine des trois rgnes, ou de mdecine universelle : et est gnralement reconnue ainsi par tous les philosophes hermtiques.

Troisime tat et premier emploi

Quand le commun des hommes parle de la pierre philosophale, on entend parler de la transmutation mtallique, ou de llvation des mtaux ordinaires en or parfait. Les philosophes hermtiques ne dsignent cette opration, ou premier emploi, que par le mot transmutation mtallique. Et cest toujours cette mme poudre rouge (qui alors prend le nom de poudre de projection, ou de mdecine des mtaux) qui est le principe et le ferment de la transmutation mtallique, laquelle conserve toujours le nom de mdecine des trois rgnes, ou de mdecine universelle. Cette opration ne demande quune heure.

Quatrime tat et deuxime emploi

Dans le deuxime emploi elle prend le nom dor potable et de panace, ou de mdecine universelle des animaux et des vgtaux. Et cest toujours cette mme poudre rouge ( un degr connu aux seuls philosophes hermtiques), quon dlaye dans un demi-verre deau, ou autre vhicule, et quon donne au malade (ou quon verse sur la racine de la plante), par la vertu de laquelle on parvient le gurir de quelque maladie quil se trouve attaqu : ce qui parat impossible quoique trs vrai.

Dans ce quatrime tat et deuxime emploi, le malade est guri dans un jour ou un mois, suivant la gravit de la maladie.

Cette divine panace fait encore plus : elle met lhomme g, dcrpit, qui en use pendant un temps connu aux seuls philosophes, dans un tat de sant et de force compltes ; elle lui rend sa jeunesse et sa fracheur, et elle le rtablit dans un tat parfait : cest--dire dgag de tout germe de maladies.

Dans ce quatrime et mme tat, employes sur le vgtal, certaines plantes poussent dans vingt-quatre heures, feuilles, fleurs et fruits en parfaite maturit : ce qui doit tre regard comme un miracle de la nature.

Donc les mots :

1 Pierre philosophale, ou pierre occulte ;

2 Mdecine des trois rgnes, ou mdecine universelle ;

3 Transmutation mtallique ;

4 Or potable, ou panace : sont les mmes et dsignent le travail et le produit du magistre des philosophes hermtiques, ou du grand uvre : la chose mme et ses vertus.

Il nest donc pas tonnant que les hommes qui ignorent le travail de lalchimie confondent les mots dont les adeptes se servent et se serviront toujours pour dsigner la pierre philosophale et sa vertu dans le rgne ou elle est employe. Cela ne peut tre exactement expliqu et dsign que par les vrais philosophes hermtiques. Toute autre personne (quoique trs savante dans les autres sciences) ne peut que sgarer dans celle-ci, de laquelle les philosophes hermtiques nont crit et parl que par des nigmes, et dune manire toujours trs obscure. Voil, mon cher monsieur et ami, ce que je puis vous dire pour claircir et bien appliquer chaque tat et emploi de la pierre philosophale ses noms propres (ainsi que les vertus de la mdecine universelle) confondus gnralement par tous les hommes.

Je vous salue,

L. CAMBRIEL. Quatrime Leon.

De la fermentation mtallique, de ses besoins, et des grands avantages quelle produit.

S

ans la fermentation, la semence des mtaux nacquerrait pas la vertu de se multiplier : elle est donc indispensable. Cest elle qui, dans le rgne vgtal dveloppe et manifeste la vertu vitale et vgtative : sans cette vertu aucun des deux rgnes vgtal et animal ne pourrait ni natre, ni se multiplier. Le rgne minral ny parvient que par laide et le secours de lartiste, dont il ne peut se passer, nayant pas de mouvement visible.

Il faut donc que lartiste, labourant luvre dalchimie, ne manque pas la fermentation, et ne croie pas pouvoir sen passer. Il doit se convaincre que tout sperme, toute semence, de quelque rgne quils soient, ne peuvent produire leurs semblables, et pousser leur germe qu laide de la putrfaction qui met la semence mme de pouvoir se dvelopper. Il faut que lartiste examine le grain de bl et des lgumes, il faut que lartiste examine le grain de bl et des lgumes, qui quoique que mis en dans la terre, qui est leur matrice, leur mre: sils ne sy gonflent et ne se pourrissent pas, jamais leur germe vital ne poussera, ne se manifestera pour produire leurs semblables et les multiplier. Un homme savant, labb Sausse, chapelain de Louis XVIII, roi de France, dont je fis de la connaissance, travaillait depuis plus de trente annes la pierre philosophale: il tait comme le plus grand nombre des chercheurs qui se figurent toujours avoir russi ou esprent dy parvenir. Cet abb tait parvenu rassembl beaucoup de rayons du soleil cleste, ayant la couleur et la scheresse de la forme mtallique. Surpris dune pareille ressemblance avec le livret dor du Trvisan je me pus mempcher de lui tmoigner mon tonnement de sa dcouverte; le reconnaissant le plus avanc de tous ceux qui travaillaient dcouvrir la pierre philosophale, et celui qui sen tait le plus approch: de quoi et il fut trs satisfait.

En homme vrai, je ne pu mempcher de lui dire: mon cher abb, cest parce que vous avez trouv cela, que vous ne parviendrez pas finir la pierre philosophale.- Et pourquoi non, me rpondit-il, si comme vous le dites, jai dj les rayons solaires, qui sont la forme et le mle, sans lesquels on ne peut fconder la matire fminine pour parvenir faire la pierre philosophale. Je lui dis, vous vous trompez: - et pour vous convaincre, mon cher abb, que vous tes dans lerreur, faites bien attention ce que je vais vous dire. La pierre philosophale ne peut se faire sans le mle et la femelle mtallique ( et des aidants ) qui en sont les deux natures. Mais il faut, comme au rgne animal, que ses deux natures oprent conjointement, et unissent leurs feux dans la mme seconde pour produire lenfant orifique qui doit sortir delles; et que lunion de leurs semences, il rsulte un troisime produit que nous nommerons humide radical; aprs quil aura t nettoy t de ses impurets et quil leur aura acquis par la fermentation la vertu dsire, sans laquelle la semence masculine et la matire fminine restent froides et engourdie, et ne peuvent manifester la vie qui est en elles; ni cette vertu multiplicative qui nest visible aux philosophes hermtiques que par les yeux de lesprit de limagination.

Ce que je vous dis mon cher abb, vous contrarie; mais je me suis fait un devoir de dire la vrit, et je ferais toujours de mme.

Pour vous donner une preuve de ce que je vous dis, et de la sincrit de mes observations je vais vous en faire un tableau facile.

Supposons quun homme se fut mis dans lesprit de pouvoir parvenir engendrer son semblable, en sy prenant autrement que lon ne doit sy prendre naturellement, et que pour y parvenir, il ft all Versailles chercher et se procurer de la semence masculine, laquelle il aurait bien reu et mise dans une bouteille. Et pour se procurer la matire ou semence fminine, il fut all la chercher Fontainebleau. Et quayant port Paris et dans son logement, les semences des deux natures, il se fut figur en obtenir un enfant par leur runion seule sans cette vertu indispensable, essentielle pour lengendrement, qui ne peut, comme nos lavons dj dit, y tre introduite par la fermentation, laquelle ne se manifeste quaprs lunion des deux semences mises dans la mme seconde, dans la matrice de leur rgne (1).

Cest donc la fermentation qui ajoute cette confection ou compost; cette vertu gnrative et multiplicative qui ne peut y tre ajout que par cette seule matire. Alors seulement cette runion des deux semences se nomme premire matire.

Convaincu par mon observation quil tait dans lerreur, et quil tait bien loin davoir ce quil dsirait; il me pria, me supplia de lui dire et de lui donner le moyen de pouvoir parvenir bien faire cette runion, pour obtenir cette vertu que lon ne peut avoir autrement. Je lui rpondis que jtais venu pour le voir, que je ne lui demandais aucun de ses secrets, et que je ne pouvais pas lui donner le mien.

Ce qui le dsola et le dgota pendant plusieurs mois du travail alchimique.

Je lui des; cependant, travaillez toujours, ne vous cartez jamais du rgne mtallique, suivez la nature qui, toute puissante quelle est, ne peut rien faire, rien produire dans aucun des trois rgnes sans la vertu fermentative qui est des moyens dont elle se sert: lequel dans le rgne animal seulement (aprs avoir donn aux natures lexistence, la vie temporelles, la seule que la nature leur donne), (2) les facilite, les aide, et met mme de pouvoir delle-mme parvenir se multiplier. Ce qui narrive pas de mme aux autres deux rgnes, puisquils ont besoin dtre aids par lhomme. Cest donc la fermentation seule qui la procure cette vertu, et qui facilite la forme mtallique renferme dans les mtaux (aprs quelle en est extraite et mise dans sa propre terre ou matrice), le moyen de manifester le pouvoir que Dieu lui a donn de fconder la matire fminine, de la faire crotre et de la faire multiplier. Mais il faut distinguer le degr de cette fermentation, et pour ne pas sen carter dans ce travail, il faudra bien rflchir sur ses trois diffrents degrs; lesquels sont trs bien expliqus dans le 3e volume des Fables gyptiennes et grecques dvoiles, par Pernety.

La note ci-dessus me fait natre le dsir de voir rendre par le gouvernement une ordonnance qui dfinit expressment denterrer personne sans que la putrfaction du corps se fut manifeste. Alors on serait bien convaincu que les lments terre et eau qui constituaient le corps, se sont spars de ceux air et feu qui lanimait, et quil ny a plus en lui de vie terrestre, vgtative, laquelle servait de lien et unissait le corps matriel prissable avec lme immortelle, divine, ainsi quil a t dit ci-dessus.

Par cette prcaution lhomme ne serait pas expos tre enterr vivant: ce qui arrive quelques fois ceux qui meurent subitement par quelque attaque dapoplexie ou autre.

On a vu des hommes quon a exhums vivre encore plusieurs annes en bonne sant, ainsi que dautres qui, ayant t enterr vivants, ont t trouvs stant rong et mang les poings.

Il y a 80 ans dans un hpital de village, un malade quon crut trpass et sur lequel on avait jet un drap, fut visit six heures aprs par une dame charitable qui lui jetait de leau bnite dessus: celui-ci lui dit: quelle bonne me vous envoie ici pour me rendre la vie!Ce qui tonna beaucoup la dame charitable.

Une autre rsurrection ou empchement de mourir moins ancienne est arrive au sieur Candy, lyonnais, lors de son premier voyage Paris, il tait g alors de 18 ans, et avait une danseuse de lOpra pour matresse: une maladie le prend, il devint si mal que les assistants le voient mort. Sa bonne amie, dsole de sa perte, va trouver M. Leriche, marchal-ferrant et philosophe hermtique, rue du Faubourg Saint Antoine, prs de lAbbaye, quelle savait avoir fait revenir dautres personnes la vie; le sollicite, le prie de venir donner ses soins, ses secours son ami dcd; il le lui promet, et se rend de suite la maison du mort. Etant au moment de monter lescalier, une personne qui le descendait lui dit: M. Leriche, il est inutile de monter, il est mort depuis six heures. Puisque je suis ici, rpondit M. Leriche, je vais monter; ce quil fit: vit le cadavre, le toucha et le trouva froid dans toutes les parties de son corps, sauf au creux de lestomac o il trouva encore un peu de chaleur: alors il dit, il y a encore de lespoir. Vite, il fait faire un grand feu, prpare le tout, donne ses soins, chauffe le corps et loint en entier de la mdecine universelle dissoute dans de lesprit de vin, et une heure et demi aprs avoir opr de mme, prsente un miroir la bouche du prtendu mort, lequel fut couvert et tach de son haleine et souffle: ce qui lui fit dire, il vivra. Fait chauffer le lit, et quand le malade eut donn une plus forte marque de retour la vie, il ly fit mettre dedans. Continue lui administrer intrieurement un peu de mdecine universelle quil lui fit avaler, et lhomme quon eut enterr dix huit heures aprs fut rtabli en vie. Depuis il se porte bien, et aucune maladie srieuse ne la atteint. Il a 84 ans, et habite pour la deuxime fois Paris depuis 40 ans. Son corps sans doute fortifi par la mdecine universelle; fut mis et se tient encore dans un tat de sant parfaite (3). On peut se convaincre de la vrit de ce que javance en se transportant place du Chevalier du Guet, N 6, ou ledit ressuscit demeure. On le trouvera exerant le mtier de mcanicien, et on saura du sieur Candy lui-mme la vrit; il se fera un plaisir de la raconter, il y ajoutera mme des choses trs curieuses et relatives ma narration concernant M. Leriche, marchal-ferrant et philosophe hermtique, ainsi que le motif qui causa la mort du fils de ce dernier.

Si le corps du sieur Candy et t sans une petite partie de cette vie terrestre vgtative, la vie cleste ny et pu rester, et la mdecine universelle qui lui fut administre par le philosophe net rien opr: parce quil est de principe fondamental que la vie nopre que sur la vie en laugmentant, et jamais sur un corps mort, par consquent priv de cet esprit terrestre, lmentaire, ou premire vie.

1. On reconnat la fermentation bonne et vritable dans le rgne mtallique, par lodeur forte qui sen exhale. Et dans le rgne animal, elle se manifeste chez les femmes, nouvellement fconde, par une envie de cracher, et quelque fois de vomir continuelles; par des faiblesses et des maux destomacs, occasionns par les vapeurs qui slvent dans leur matrice; enfin, par une indiffrence totale delles-mmes et de tout got prcdent.

2. Lhomme a deux vies en lui: la premire, terrestre et vgtative (de laquelle je traite), par consquent sujette prir: elle lui vient de ses pre et mre. La deuxime, cleste, divine, par consquent ternelle, comme son auteur. La premire finit un jour par la sparation des mmes lments qui lont produite; ce que je nomme mort corporelle, ou cessation de vie visible. La deuxime, que lauteur de toutes choses envoie la crature aprs quelle a t conue et forme dans la matrice humaine, par la vertu de la semence masculine, est immortelle. Elle part de ce foyer de lumire pour venir sunir ce corps nouvellement form; et pour le faire participer la gloire cleste, comme crature forme limage et la ressemblance de Dieu; et pour nous faire, des petits Dieux, sans cependant que cette sparation de la lumire et don de Dieu diminue en rien sa puissance, sa vertu, sa perfection. Elle est comme une bougie allume qui ne perd jamais sa clart, quoiquelle donne et communique sa lumire un million dautres bougies; qui comme la premire, peuvent la communiquer, la multiplier linfini. Telle est lide que jai pu me faire de la Divinit; laquelle tant toute lumire, nen perd jamais une tincelle quelques dons quelle en fasse. La premire vie de lhomme est un esprit terrestre, la deuxime est un esprit cleste. Toutes les deux constituent par leur runion un corps animal parfait. Et quoique le corps de lhomme soit anim clestement, il est condamn finir. Cependant le corps matriel de lhomme ne laisse pas que de garder toujours en lui une petite partie de cette immortalit que Dieu accorda la nature humaine lors de la cration; et que nous navons perdue que par la premire dsobissance, laquelle petite partie dimmortalit se montre (quand le corps de lanimal, parfait ou imparfait est mis dans la terre), par la production que tout le corps mort manifeste par leffet de la corruption, soit en vers qui ont vie, soit en herbes, dont dautres animaux se nourrissent, ce qui a donn naissance la mtempsycose. Limmortelle ne quitte le corps de lanimal parfait et ne se spare pas de lui; tant que celui-ci garde en lui une petite partie de cette vie terrestre, vgtative ou premire vie, qui est le rsultat et production du deuxime degr de la fermentation ou de la putrfaction des semences qui la contenait; et un esprit produit par les lments, lequel sert de milieu entre le corps matriel humain, et lme divine qui lui donne la perfection. Cest donc cet autre esprit terrestre (que lon nomme, dans tout animal imparfait, iustinel), qui unit le corps humain matriel, prissable, avec lme divine, ternelle: le haut avec le bas, le cleste avec le terrestre, ce qui ne se voit que dans le rgne animal, et en lhomme seulement. Les autres animaux nayant que la vie vgtative, et esprit terrestre, ou instinct, sont privs de cet avantage.

3. Le corps du sieur Candi, par la grande vertu de la mdecine universelle, fut si fortement dpur de tout germe de maladies, et tellement fortifi, que dans les deux voyages quil fit en Turquie et en Egypte, quelques annes aprs, il y fut atteint deux fois de peste (ayant t mis avec des pestifrs), et il en fut guri sans prendre aucun remde. Il a encore tous ses cheveux noirs, quoique g de quatre-vingt-quatre ans.

Cinquime Leon.

Des principes visibles ncessaires pour luvre, de la destruction desquels on compose un chaos.

Premier Chapitre.

I. Le sel, le soufre et le mercure mtallique. Ils doivent tre purifis par eux-mmes.

II. Le mle, la femelle, et le sel nitre fondant et dpurant. Lisez avec sagesse.III. La pierre des philosophes ou leur compos. Fondement de la pierre philosophale. Dtruisez, dpurez et unissez, alors vous aurez la pierre des philosophes.IV. Le chaos humide, ou tous les lments seront confondus. Desschez-le; faites les sortir par ordre, et faites en une nouvelle pierre.La matire premire de la pierre philosophale ne sobtient que par lunion des esprits contenus dans les corps mtalliques: je veux dire, que la perfection de la chose qui pourra parfaire toutes choses vient de lunion et de la purification des esprits contenus dans les productions laisses imparfaites par la nature.

Cest donc dans les corps parfaits que tu trouveras, si tu sais ouvrir les mtaux, cette semence premire, contenant lesprit universel de la pierre philosophale. Que Vulcain soit de la partie, il te sera utile; mais cependant mfie-ten, car il pourrait abuser de ta confiance si tu la lui accordais entirement; sois donc trs rserv avec lui.

Deuxime Chapitre.

Des trois manires doprer, ncessaires pour parvenir parfaire luvre hermtique.

On parviendra finir cette divine uvre, en suivant exactement les trois manires suivantes doprer:

La premire consiste rduire une pierre, ou lor philosophique, en eau: parce que dans toute gnration les semences de tous les trois Rgnes, ne reprsentent quhumidit et tiennent plus de llment de leau, que des trois autres.

La deuxime consiste parfaitement dpurer le produit des matires, principe; de toute salet.

Et la troisime consiste faire la coction du mercure philosophal dans un vaisseau rond long col, hermtiquement ferm, par lixation et assation.

Quand les mtaux philosophiques, le soleil et la lune, seront rduit en eau mercurielle et quon aura bien nettoy cette eau de toutes fces, on la mettra en digestion dans un athanor et on y administrera le feu convenable, en se conformant la troisime manire doprer. Tout consiste donc rduire les mtaux philosophiques en eau, et puis, par une longue digestion, rduire cette eau en pierre, do elle a pris son origine: voil sa fin.Troisime Chapitre.

Do il faut partir pour commencer le travail dalchimie.

La meilleure manire de procder, pour arriver avec moins de difficult trouver la pierre philosophale, cest de partir dun principe connu, pour pouvoir arriver linconnu que nous cherchons: qui est la mdecine universelle et la poudre de projection; et ce sera toujours en vain quon travaillera pour y arriver, si lon part dun principe inconnu.

Il faudra donc partir dun bon chemin, qui est le principe connu, pour pouvoir arriver au but inconnu auquel on dsire parvenir. Le bon chemin nest gure suivi. Plusieurs ce ceux qui travaillent la pierre philosophale se figurent quils y arriveront sans connatre les principes ncessaires, ou les deux serpents hermtiques qui seuls contiennent et sont la base de la semence premire des mtaux. Le connu, sont le mle et la femelle mtalliques; linconnu, cest la mdecine universelle et la poudre de projection. Et cest o veulent arriver les chercheurs sans prendre aucune peine: quoi ils ne parviendront jamais, tant quils ne partiront pas du principe connu qui est le seul moyen pour pouvoir arriver linconnu, qui est louvrage fini.

Quatrime Chapitre.

Des deux voies: sche et humide.

Quand les philosophes hermtiques parlent de deux voies, pour faire luvre, ils nentendent pas quil faille en choisir une des deux, comme font beaucoup damateurs qui se figurent que lune est plus longue que lautre. Mais bien, ils montrent que louvrage doit se commencer par la voie humide, en rduisant les mtaux philosophiques en eau; et quil faut le continuer et finir par la voie sche, en rduisant cette eau (qui est devenue premire semence) en pierre. A quoi on parvient par le moyen du feu extrieur qui aide et excite le feu intrieur, ou de contre nature, et le mer mme de rduire cette eau en pierre, en la desschant par sa chaude vertu.

Mon but, en faisant ce Cours dalchimie, na pas t de mettre les amateurs dans lerreur; diffrent dans ma manire dcrire, de celle de mes prdcesseurs, je ne prsenterai pas deux voies, comme ils ont fait, ou bien deux chemins diffrents pour arriver au mme rsultat: mais bien un seul. Et quoique les philosophes disent quil y a deux voies ou moyen pour y arriver, il ne faut pas cependant prendre pour vrai tout ce quils disent: ils ont des raisons pour parler ainsi; ils ne peuvent ne doivent sexpliquer clairement, parce que la science doit tre tenue cache. Moi-mme je la cache aussi; et quoique cela, je suis trs convaincu que je mexplique trop clairement: ce qui me fait craindre quun jour mes semblables me feront des reproches de ce que jai crit.

Cinquime Chapitre.

Des oprations ncessaires pour parvenir bien faire la sparation, et runion des principes pour luvre.

La fusion, les mariages, la pulvrisation, la distillation, le blanchiment, la sublimation et la calcination, ainsi que la sparation et runions des principes, ne dsignent pas toujours une entire opration de luvre; mais bien une partie, et sont indispensables pour parvenir la bien finir. Donc le vaisseau, le mle et la femelle, le corps et lesprit, la chose sche qui doit tre ramasse et ce qui doit la contenir, ne sont pas toujours des choses spares: les philosophes hermtiques savent les unir et les sparer suivant le besoin du moment. Mais parce que le travail est trop long en faisant les oprations ci-dessus sparment; et quon pourrait labrger de beaucoup en faisant deux oprations en mme temps, et quon pourrait labrger encore davantage en faisant trois ou quatre par une seule ( quoi je suis parvenu, aprs avoir travaill longtemps pour en trouver le moyen qui ma bien russi). Jinvite ceux qui travaillent et cherchent dcouvrir cette belle science, trouver ce moyen; et sils y parviennent, alors il leur sera facile de faire parfaitement le magistre. Mais il faut quils fassent attention que les chaux, mtaux, sels, esprit et soufres, que pendant quatorze ans jai quelquefois prpars et purifis sparment (ce qui mobligeait me servir de plusieurs fourneaux en mme temps), ne se sparent et ne svaporent pas; je les avertis de ne faire sous le vase, les contenant, quun feu qui convienne aux diffrentes matires y runies. Voil le seul moyen dabrger et de le bien faire.

Sixime Leon.

Premier Chapitre.

Montagne philosophique.I

l est essentiel de la voir ou de se la reprsenter, et plus encore dy pouvoir monter. Il faut donc que, pour pouvoir achever louvrage hermtique (qui est un don de Dieu), le philosophe parvienne y faire monter, promener et sauter ses aigles volant. Cest sur cette montagne, que les aigles ou oiseaux hermtiques se dpouilleront de leurs mauvaises plumes et y acqureront un plumage tout blanc, un peu dor en dedans. Amenons-y donc nos oiseaux; faisons-les y monter par gradation, et ne permettons pas quils sloignent les uns des autres. Si nous parvenons pouvoir leur faire parcourir ladite montagne jusqu son sommet et les en faire descendre lentement, nous serons bien prs de la fin de notre ouvrage (puisque alors seulement ils seront parvenu blanchir parfaitement leurs ailes, qui serviront de draps et de lit dans lequel doivent coucher les poux hermtiques, (Apollon et Diane), et notre bonheur nen sera que la suite et la fin; cest par la patience et laide de Dieu quon y parviendra.

Deuxime Chapitre.

Des chaos mtalliques contenant les principes de luvre.

Les alchimistes, pour ne pas sgarer dans le long travail du grand uvre, sont obligs reconnatre et composer plusieurs chaos, et se diriger daprs le nombre. Et cest presque toujours de leur destruction, composition et coction dun seul, que doit sortir leur lixir (leur mdecine); lequel ne peut tre parfait sil ne runit en lui les quatre qualits des lments, ni nous donner cette mdecine divine, quaprs avoir pass par toutes ses couleurs, dont chacune marque la dnomination dun lment particulier dont il doit tre compos. Les premiers se composent de la destruction des corps ou mtaux parfait, du soleil et de la lune, qui dans cette opration doivent tre dtruits sparment, et les autres, aprs avoir t runi en un seul corps. Les seconds se composent de la parfaite purification des premiers et de leur union avec leur esprit. Les premiers sont ordinairement secs, chauds. Les seconds sont presque toujours humides. Et cest de leur parfaite purification, alliance et runion des quatre lments, que dpend la russite de notre ouvrage hermtique.

Troisime Chapitre.

Aigles volants de luvre.

Nous diviserons les aigles volants en plusieurs parties.

Les premiers comme prparatoire,

Les seconds comme essentiels,

Et les troisimes comme finales: par consquent indispensables.

Par ce dtail nous pourrons parvenir convaincre les amateurs labourant luvre, comme nous le sommes nous-mmes, que louvrage de lalchimie ne saurait parvenir sa perfection sans ces trois manires doprer. Elles doivent donc tre gales, progressives et lentes. Enfin, il faut que le philosophe hermtique, labourant, se pntre bien que la russite de son ouvrage alchimique en dpend.

Quatrime Chapitre.

Conduite et proportion garder pendant la pratique.

En employant les matires, on fera bien attention la quantit, qualit et puret; et on suivra par entier, demi, fraction, etc., augmentations, additions, lavages, regrattement des crasses, et on nemploiera que de leau pure, nette, et lon fera scher la pte blanche au soleil et sur du papier blanc trs propre.

On fera beaucoup dattention aux dtonations que notre matire occasionnera par la sparation des principes (sparation ncessaire) que le feu sera faire, et lon aura soin de ne le pousser toujours que jusqu la fusion, ou bien quelquefois la parfaite siccit de la matire restant dans le vase servant lopration: cest essentiel. Et on se rendra compte de la perte, diminution, ou augmentation de la matire restante, par le moyen des balances dont on ne pourra se passer et qui doivent tre toujours en permanence.

Septime Leon.

Premier Chapitre.

Des lments principiants et des lments principis.L

es philosophes hermtiques, diffrents des philosophes de lcole et des chimistes, nadmettent et ne reconnaissent que quatre lments: la terre, leau, lair et le feu; et sont convaincus que ce sont les lments principiants. De ces quatre lments principiants, il en rsulte les lments principis, ou les trois principes, qui sont: le sel, le soufre et le mercure. Et de ces trois runis, le mercure parfait, ou la premire matire des mtaux.

De ces trois principes, (quil nous arrive souvent de toucher avec nos mains), la nature en forme les deux natures; le mle et la femelle, et ces deux derniers, dans quelques oprations du travail hermtique, manifestent le sel et le soufre mtalliques, dont ils sont composs; et joint avec le mercure, ils sont le fondement de notre uvre. Ils sont donc seuls suffisants pour procrer leurs semblables, et pour les multiplier linfini, ainsi que Dieu la voulu. Dans ces deux natures, qui contiennent les principes de notre uvre, se trouvent les qualits et les vertus des quatre lments principiants, de mme que celles des trois principes, ou des lments principis.

Ces deux natures nexistant plus, ayant chang de forme, ne font plus partie de larbre gnalogique hermtique, de mme que dans la Gense, Can et Abel sont mis dans loubli, quoiquils aient t ncessaires, ayant t reconnu pour le fondement et la souche de la postrit humaine. Les ntres le sont aussi de la postrit mtallique et alchimique Quelle injustice de les oublier?

Deuxime Chapitre.

Des corps et des esprits ncessaires pour faire luvre.

Sans les corps mtalliques, nous naurons jamais lme ou les esprits vitaux ncessaires. Cest donc des corps quil faudra les sortir, et pour les sortir, il faudra les ouvrir: et par cette opration nous nous convaincrons de la vrit de la science.

Sans lextraction des esprits contenus dans les premiers corps, qui en les sortant par laide de Vulcain, en forment quelque fois un nouveau: lunion essentielle et parfaite desdits esprits principes, qui y sont cachs, davec ceux qui en sont spars, ne se ferait jamais, et la premire matire des mtaux nous manquerait.

Il faudra donc, pour obtenir cette premire matire des mtaux, rduire tous les nouveaux corps en esprit, en eau, et par ce moyen nous cacherons, tous ceux qui en sont indignes, le moyen de trouver et de voir la vrit de lalchimie, et puis nous corporifierons ces esprits runis.

Dtruisez, formez, purifiez et unissez. Ce sera donc par lunion des esprits tirs de corps parfaits, que nous parviendrons faire les miracles dune seule chose, comme nous la montr notre pre Herms.

Troisime Chapitre.

Des feux en gnral et des sublimations.

Il y a trois feux intrieurs, et trois feux extrieurs, ou trois manires de les employer ou de sen servir, et deux de les unir.

Il y a aussi trois sublimations, ou trois manires de les faire.

Il y a aussi trois manires de diriger les feux.

De leur union et de leur direction et emploi, dpend la russite de louvrage hermtique.

Huitime Leon.

Premier Chapitre.

Trait du sel, premier principe, par ordre de travail.L

e sel, qui est gnralement reconnu pour tre le premier principe dans notre uvre, se trouve toujours invisible, ou nest vu que par les yeux de limagination, quoique rel, except que, par un coup de maladroit, (et au moment de sa formation) lartiste ne le rende visible; il nous est toujours plus favorable quand il est invisible. Mais ce quil y a difficile comprendre, cest que, de trois principes essentiels, dont deux sont toujours visibles et palpables, le sel, ne ltant pas, et ne devant pas ltre, puisquil nest produit que par la destruction corporelle de ses frres, soit mis au premier rang, joue (quoique se tenant toujours cach derrire le rideau philosophique), le premier rle, et devienne lobjet indispensable de notre uvre; il le faut ainsi, puisquil est reconnu pour principe fondamental, dans toutes les oprations philosophiques; que de deux, il en doit toujours tre produit un troisime, qui devient lui-mme premier, et alors il est dpositaire des vertus de ses pres et mre, pour les reprsenter au besoin.

Ce sel ne peut tre mieux reprsent, que comme celui qui pousse sur la terre, et quon voit bien souvent dans les caves quand on y descend, qui nest quun nitre propre la fabrication de la poudre canon.

Nallez pas croire pour cela que celui dont je traite soit le nitre commun, ni le sel marin, ni le sel de tartre; celui dont je traite, quoique vgtal, animal et minral, tient plus ce dernier rgne, puisquil en est la base, et quil est toujours incombustible; avantage que nont pas les autres sels. Il faut donc le trouver incombustible et propre se rduire en eau mercurielle, do il est tir; parce quil est aussi de principe fondamental, que pour parvenir la transmutation mtallique, il faut que les principes corporels servant notre uvre, redeviennent ce quils taient avant; cest--dire, quil faut quils changent de forme et redeviennent eau.

Il faut donc travailler la matire jusqu ce que nous en ayons extrait ce sel invisible, qui nest quun esprit mtallique, quil faudra dgager de ses impurets, pour quil conserve en lui cet amour pour ses frres, et ne puisse pas devenir ingrat de la vertu quil aura de fixer; avantage quil ne tiendra que deux. Ce ne sera donc que quand il sera rduit en mercure, quil pourra manifester sa vertu. Alors, de concert avec le soufre et le mercure, avec lesquels il devra tre uni, il pourra tre regard comme tant en chemin dacqurir par la coction, le pouvoir dexercer sa puissance; laquelle, la poudre de projection dont il sera partie essentielle, contiendra parfaitement.

Deuxime Chapitre.

Trait du soufre, deuxime principe: par ordre de travail.

Le soufre a t regard pour le deuxime principe dans louvrage dalchimie; ses vertus sont de donner la matire liquide, la forme et la couleur. Il est dun rouge terne, et tach de blanc; il se rduit facilement en poudre, cause de sa scheresse, mais travaill jusqu plus quil ne faut, il redevient mtal, mallable.

Malheureux est lartiste, quand il le pousse ce point, qui est la preuve de son ignorance, de son peu dexprience et la perte de son temps. Dans cet tat il ne peut nous tre utile, ayant repris sa forme corporelle, qui lui a fait perdre la vertu et lavantage de pouvoir revenir dans ses premiers principes. Ce sont des esprits liquides, quil nous faut, (mais non des corps) ou des produits les ressemblant et pouvant le devenir.

Troisime Chapitre.

Trait du mercure; troisime principe: par ordre de travail.

Le mercure, qui est reconnu pour le troisime principe de luvre, pourrait tre mis le premier, puisque ce nest que par lui que le philosophe hermtique parvient ouvrir le mtal, et rendre linvisible visible, et que ce nest aussi que par son moyen, que lunion des autres deux principes se fait. Cest donc lui qui reoit les autres deux, et qui les nourrit; cest lui qui est le vase dans lequel ils se baignent: il est donc eau; et cest dans cette eau que le grain fixe est mis pour sy putrfier, et quil pousse son germe.

Observation.

Lorsque jai trait des trois principes, sel, soufre et mercure, je nai pas entendu parler de ceux dont nos deux natures sont formes par la nature; mais bien de ceux (quoique les mmes) qui dans le cours du travail, ( commencer du premier mariage, jusquau deuxime, ou pour mieux dire, jusqu leau double) forment la terre feuille; do est produite la terre des feuilles.

Neuvime Leon.

Premier Chapitre.

Premire nature du feu chaud.L

e mle a toujours t regard, par tous les philosophes hermtiques, pour la premire nature sans laquelle la matire froide, ou la femelle, ne pourrait tre fconde. Il faut donc le choisir sain et vigoureux; il est de trs grand prix quand aucune imperfection ne diminue pas en lui la qualit de vertu prolifique, ou desprit formateur ncessaire pour travailler la matire menstruelle minrale et pour parvenir la perfection dsire. Il faut ouvrir ce mle, sans cependant le tuer (parce que rien de mort ne peut servir notre uvre), et tirer de lui son sang ou cette forme, et cet esprit, ou feu naturel chaud duquel nous ne pouvons nous passer. On y parvient facilement, mais non sans peine. Notre mle est rude et bien souvent intraitable; mais nous parvenons ladoucir en lui donnant une femelle belle, jeune et tendre, laquelle il se rend. Cest un amoureux passionn pour le beau sexe; la lui promettre et la lui donner, cest le seul moyen dadoucir en lui ce quil a de rude et farouche: il est indomptable sans cela. Diffrent de lhomme, il est amoureux mme dans lge dcrpi; et le sperme chaud qui est en lui ne diminue pas de force ni de vertu, quelque vieux quil soit. On peut donc le prendre tout ge, pourvu quil soit beau, bien fait et dgag de son rude poil. Il faudra lui donner une femme: parce que rien dans ce monde ne vient dun mle sans lunion avec sa femelle. Cest de cette deuxime nature que nous allons traiter au chapitre suivant.

Deuxime Chapitre.

Seconde nature, ou feu froid et humide.

La femelle a t regarde, par tous les philosophes hermtiques, pour la deuxime nature (elle contient le feu innaturel froid); ses qualits sont dtre froide et humide, quoique chaude par temprament; ses menstrue sont trs corrosives. Il faut la choisir belle, brillance, peau blanche. Quoique trs amoureuse, elle est bien souvent indiffrente et volage. Ce dfaut, qui est naturellement trop attach en elle, ne lui permet pas bien souvent de sunir son poux; elle le repousse. Dlicate comme nos petites matresses; pleine de prtentions et dorgueil le mari quon veut lui donner ne saurait lui plaire: mais en lhabillant et le rendant beau, elle se laisse approcher. Et quoiquil y ait entre eux un amour naturel et aimantin, on ne saurait parvenir les unir, si Vulcain, qui est lentremetteur de nos beaux mariages, ne se trouvait humili et son amour propre bless de ne pas russir faire ce beau lien; duquel, comme de celui de Dejode, il en doit natre les plus beaux enfants. Il faut donc quil use de finesse, quil leur mnage une, et mme plusieurs entrevues; quoi il parvient par quelques petits mensonges pardonnables celui qui, comme Vulcain, a daussi bonne intentions. Il parvient unir nos beaux poux et a soin de ne leur laisser que ce quils ont de plus beau en vtements, et les allie si fortement que leurs vertus opposes (froide et chaude), il en fait un produit qui est de trs grand prix, et duquel le philosophe hermtique et expriment sait tirer le plus grand parti pour louvrage philosophique. Vulcain quoique boiteux (tant mal accoutum en fait de femmes, ayant pous Vnus la plus belle), devient un tre craindre; il pourrait fort bien se rendre amoureux de lobjet alli et mettre la division dans notre beau mnage. Pour donc prvenir ce malheur, le philosophe labourant a soin de ne jamais le laisser seul: soit avec la femme, soit avec le mari. Cette prcaution nest pas la prcaution inutile, si lon veut la paix et si lon veut tre certain que notre poux puisse se convaincre dtre le pre de lenfant que sa femme mettra au monde, et quil puisse aussi tre assur que son enfant, pour lequel il a sacrifi son existence entire, jouira non dune vie valtudinaire, mais bien de la longue, vigoureuse et puissante vie quil lui a donn et communique en le formant. Parce que, comme je lai dit ci-dessus, elle est trs volage, et cela lui sied un peu; cela ranime les soins de son maris; cela lui donne comme une espce dautorit sur lui, qui cependant doit finir par tre cde en entier au mari: parce quil est de principe fondamental que la forme doit lemporter sur la matire, et cest mme de droit. Et pour que tout cela se fasse avec ordre et que tout soit bien observ, et que le produit soit de bon acabit et de bonne espce, il faudra avant tout faire laver nos mtaux dans un vinaigre trs aigre, ou, dfaut, dans de lurine du vieux Saturne ou bien dans celle dun jeune enfant; dans laquelle ils se plairont et se dpouilleront de leur pch originel, et seront rendus plus propres devenir et se montrer parfaits.

Dixime Leon.

De la pierre des philosophes et de la pierre philosophale.

D

eux pierres, commencement et fin de louvrage philosophique, embrouillent tellement les amateurs de cette science quils ne savent pas laquelle des deux est la bonne; ils sen forment milles ides. Pour ne pas les tromper dans leurs recherches et en mme temps leur rendre facile le moyen dy parvenir, je leur dirai que lune et lautre sont ncessaires et quon ne peut pas sen passer. La premire, qui est la pierre des philosophes, nous trace le chemin pour arriver la pierre philosophale, et ne sen spare point; elle est le principe de louvrage dalchimie, comme lautre en est la fin.

Jy ajouterai, pour claircir ce que jen ai crit ci-dessus et pour aider les amateurs labourant dans la science hermtique, que la pierre des philosophes est si ncessaire pour faire la pierre philosophale, quon ne peut sen passer et quon ne peut y suppler par autre chose.

Il faut donc que le philosophe labourant, fasse comme le serrurier qui est oblig de faire une cl pour ouvrir la serrure quil doit faire en mme temps. De mme le philosophe labourant doit imiter le serrurier; il doit commencer par faire une cl pour ouvrir la serrure hermtique; et cette cl essentielle, qui nest autre chose que la pierre des philosophes du premier ordre, quand elle sera bien faite, lui servira et le mettra mme de pouvoir visiter tous les cabinets intrieurs cachs aux commenants et amateurs de lalchimie), et lui procurera le moyen douvrir et de fermer volont, ou de se reprsenter la partie la plus secrte de la philosophie: et alors il parviendra bien plus facilement faire la pierre philosophale, laquelle seule il vise.

Il faut donc, je le rpte, quil fasse comme le serrurier: quil commence son ouvrage alchimique par cette cl, qui, quoique ntant pas faite daucun mtal (mais bien de lunion et confusion, ou mlange des quatre qualits des lments mtalliques), lui devient indispensable pour y russir.

Il est vrai quil est trs facile de trouver cette cl essentielle, et quil ny a que les vrais adeptes qui la reconnaissent et la trouvent bien plus facilement quand ils veulent sen servir, que ceux qui en sont les amateurs; quoique ceux-ci passent souvent leur vie entire la chercher par une lecture continuelle des livres hermtiques. Toute autre personne, quoique possdant de grandes connaissances, sy trompera toujours: tant la nature la si fortement cache dans ses cabinets.

Rflchissez sur ce que jai dit ci-dessus, et nemployez jamais de principes ni de matires dun rgne tranger celui que vous voulez lever et pousser sa perfection.

Onzime Leon.

Premier Chapitre.

De la sublimation et lessive hermtique.L

a sublimation, selon Geber, philosophe hermtique, est llvation qui se fait par le feu dune chose sche: en sorte quelle sattache au vaisseau. Comme il ny a que les philosophes qui comprennent Geber et qui, par leurs connaissances voient ce quil a voulu dire dans ce peu de mots; que dailleurs ils connaissent et ont tenu dans leurs mains la chose sche et le vaisseau: ce nest donc pas eux quil a cach cette opration de lalchimie; mais bien aux commenants.

Pour leur parler avec moins de finesse, je leur dirai que la sublimation est une opration par laquelle le philosophe ( lexemple de la femme qui fait la lessive) nettoie, lave, purifie, spare et dgage enfin son linge philosophique de toutes salets, htrognits et ordures, et le dispose par ce travail recevoir la perfection. Sa perfection consiste le rendre blanc, si le linge est fond blanc; ou bien le rendre rouge, si le linge a t naturellement teint de cette couleur. Si le teinturier (je veux dire le philosophe) a bien su connatre lheure et le moment de lui communiquer et lui unir lune de ces deux couleurs, et de mme toutes les deux en mme temps, le rsultat ne peut tre que blanc ou rouge.

Deuxime Chapitre.

Des feux intrieurs contenus dans un des derniers chaos.

Nous avons trait dans un chapitre prcdent des trois feux; de la manire de les diriger et de les unir: mais comme nous navons pas tout dit et que nous ne nous sommes pas assez tendus, nous y ajouterons le chapitre suivant. Les philosophes hermtiques reconnaissent trois feux dans leur ouvrage, lesquels ne sont visibles quaux yeux de limagination: par consquent spirituels. Le premier est le feu naturel masculin, formateur, agent. Le second est le feu innaturel fminin, matriel, patient. Et le troisime est le feu de contre nature, produit par lunion des deux premiers, toujours dispos se putrfier une chaleur convenable: par consquent procrer lenfant philosophique. Et lon peut dire que ces trois feux sont ensemble contenants et contenus; et quils ne peuvent tre sortis dautre part que du soleil et de la lune, pour par leur union, les soins et le travail de lartiste, former et composer la pierre des philosophes du premier ordre, de laquelle ils sont seuls les principes. Ce troisime feu est le feu philosophique; il est minral et pas toujours gal; il est lme de notre pierre philosophale, tant compos comme il est dit ci-dessus, des deux feux joints.

Douzime Leon.

De la terre feuillete et de la terre des feuilles.

L

a terre des feuilles est tout ce que le philosophe labourant se propose dobtenir; parce que cette terre renferme en elle tout ce quil faut pour luvre et le sel, le soufre et le mercure en son la base et le fondement, et que la purification et le dgagement des superfluits de la terre feuille sest opre par les aigles volants de Philalte, et les proportions des principes constituant le mercure philosophal y ont t observes par le conseil du cosmopolite.

Il faut donc aspirer premirement possder la terre feuille, puisquelle contient tout et que nous pouvons tout avoir par elle, et que cest aussi par elle que nous obtenons la terre des feuilles tant dsire. Mais pour y parvenir, nous avons beaucoup de travail faire, de soucis et de chagrins supporter; beaucoup derreur rparer, et beaucoup doprations recommencer avant que de parvenir la fin.

Aussi, ce nest pas sans une grande raison que les philosophes hermtiques ont dit: quheureux et trs heureux tait celui qui Dieu donnait les connaissances ncessaires pour dcouvrir le travail et les oprations de la science hermtique, puisque ce don tait une trs grande marque de son amour et que rien au monde ne pouvait lui tre compar.

Cette terre feuille ne se trouve pas sur la terre: il faut que le philosophe la rende manifeste en la crant, ou pour mieux dire en la sortant de l o elle est. Notre pre Herms nous en donne le moyen, quand il nous dit que cest la terre qui a t ramasse. La nature ne peut pas nous la donner delle-mme; il faut que lhomme favoris de Dieu y mette les mains, et que ce produit divin soit le rsultat de son travail (avec lequel seul il parviendra faire la terre des feuilles). Les mtaux et les minraux, les sels, les soufres et les mercures y concourent mutuellement et saident de mme; lartiste dpure, dgage, unit, broie, spare, distille, pulvrise, amalgame, ptrit et est dans son ouvrage (qui est aussi celui de la nature) comme un gnral darme, plein de zle et de courage, se portant partout o sa prsence se trouve ncessaire, soit pour encourager, soit pour changer les ordres donns ou pour tout autre travail que le moment exige.

Vulcain ny joue pas le plus petit rle, puisquil est trop souvent la cause de la joie ou du souci de lartiste; mais lamadouant et se tenant toujours auprs de lui, on en tire ce quon dsire; et quoiquil soit notre ami, quand nous sommes prsents, nous devons le craindre; il est comme les hommes daujourdhui qui donnent toujours tort labsent et qui labandonnent: il faut donc ne pas le quitter.

Les vases et les manires de les placer, contribuent beaucoup la russite, et la saison quand il faut unir notre mle avec sa femelle, ny contribue pas moins. Tout ce que je dis doit tre observ, ainsi que de prendre bien soin que nos jeunes poux entre tout nu dans leur lit, pour que rien dimpur ne puisse salir ny empcher leur progniture.

Leur chambre coucher doit tre divise en quatre parties: dont trois pour les parents ascendants, et la quatrime pour leur lit qui doit tre compos de terre et deau; et les draps doivent tre faits de feuilles dargent que les aigles volants auront ports dans leur bec, et qui par leur union, formeront lesdits draps dans lesquels nos jeunes poux seront bien envelopps. Serait-ce une fatalit pour lartiste, que davoir une femelle pour premier enfant, au lieu dun mle quil dsire.(1)

Dans louvrage de Dieu notre crateur, le mle fut avant la femelle, et elle ne fut faite et cre que dune partie du mle; dans le ntre, qui est en petit limage du grand uvre de Dieu, toute la femelle peut se rduire en mle si lon veut.

Dans son grand ouvrage Dieu cra la femme de lhomme; dans le ntre, qui en est une petite image, la femme devient homme selon la volont de lartiste. Comme il fut de la volont de Dieu de faire la femme de lhomme, Dieu les cra immortels; notre ouvrage ou son produit, qui sont les enfant hermtiques, le sont aussi. Dieu leur ordonna de crotre et de se multiplier; les ntre croissent et se multiplient linfini, ce qui prouve que notre ouvrage vient de Dieu et touche dun bout le ciel et de lautre la terre: il est donc terrestre et cleste. Attachez-vous donc, hommes incrdules, possder un aussi grand trsor; puisque le possdant vous navez plus rien dsirer sur la terre. Travaillez, cherchez, ne vous rebutez pas et ne sortez pas du rgne que vous voulez lever: parce que rien ne samende que dans son semblable et avec lui-mme, jamais avec un autre.

Si vous dcouvrez une partie de ce que je dis ci-dessus, vous pourrez y parvenir; mais ce ne sera pas sans beaucoup de peine: si vous ntes pas dcids en prendre, ne commencez pas chercher. Cette science ne sacquiert pas sans peine; vous y parviendrez et lobtiendrez avec moins de difficults, si vous savez le moyen et le lieu o vous pourrez trouver la terre rouge feuille, ou bien do il faut la sortir pour par elle en faire la terre des feuilles: cette dernire ne saurait se faire sans la premire; quand on la, la disposition seule suffit; et, jointe avec sa mre, elle vous donnera leau double: la bont de laquelle vous reconnatrez lodeur forte qui sen exhalera, ainsi qua lamour quelle a pour ladite mre avec laquelle elle se plat, sunit et se marie naturellement. Lexprience dmontrera, lartiste labourant, la vrit de ce que javance.

1. Ici je nentends parler que de la poudre de projection, que je personnifie, comme devant servir transmuer les bas mtaux en argent ou en or.

Treizime Leon.

Premier Chapitre.

Des semailles des philosophes, et du temps propre les faire.D

e mme que les laboureurs des champs, le philosophe hermtique est oblig de travailler la terre philosophique pendant cinq mois, pour la disposer et prparer recevoir le grain formateur. Cette prparation et disposition ne peut se faire quen amendant cette terre par un long travail, et en tant toutes les superfluits qui la rendent hydropique et vnneuse. Le temps le plus propre pour faire ces semailles, est le mme que celui du laboureur des champs, ou tout autre temps qui nous donnerait une chaleur ou temprature gale.

Deuxime Chapitre.

Solution de la terre philosophique.

La solution est la rduction de la terre des philosophes, en eau. Mais avant de dire la manire de la faire, examinons ce qui suit. Locan lmentaire nourrit le poisson quil tient en son sein; de mme locan philosophique, cette mer des sages, nourrit aussi le poisson des philosophes. Si tu peux parvenir jusque l, la solution te sera aussi facile faire, comme il te serait facile de rduire la glace en eau do elle a t forme.

Par cette opration (qui nest quune liqufaction des corps) les esprits mtalliques se poussent au plus haut degr de perfection: lun donnant et communiquant sa vertu et ignit; et lautre en la recevant; et ces esprits tant homognes, ils samendent tellement par cette union, quils en sont rduit de puissance en acte, et sont tout fait dgags des liens qui les tenaient garrotts et les empchant dagir.

Cest ici que lon peut trouver et bien dmontrer aux incrdules, combien est grand le pouvoir que Dieu a donn lhomme philosophe hermtique; puisquil imite et fait de mme que son pre, Dieu tout puissant: Qui convertit petram in stagna, et rupem in fontes aquarum.

Troisime Chapitre.

De la nourriture et des naissances de lenfant hermtique.

Comme lenfant animal se nourrit dans le ventre de sa mre de la mme matire ou sang menstruel dont il a t form, de mme aussi lenfant mtallique se nourrit dans le ventre du mercure qui est sa mre, sa propre terre; de ce mme mercure qui a servi sa formation. Et cet enfant, qui dans sa premire naissance nest produit que des seuls mtaux parfaits, ne peut tre ne peut se rendre visible quaprs avoir t son pre (qui est un vieillard sain et vigoureux) toutes ses forces, et lavoir fait succomber, en lui enlevant toute sa vertu prolifique et sen tre empar. Aussi, dans cet engendrement, il faut que le pre (plein damour pour son enfant, duquel il fait toujours partie essentielle) disparaisse; que sa forme corporelle soit change en spirituelle, pour quil ne fasse pas partie de larbre gnalogique hermtique. Il faut enfin quil devienne principe de lui-mme; quil rentre dans la matrice minrale, pour sy nourrir du mme sang menstruel dont il a t form (ou bien de ce mme sang qui la dtruit pour en faire un autre lui-mme, et quil y croisse en force et en vertu, ce qui nous prparera la deuxime naissance de lenfant mtallique hermti