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VIVRE LA NATURE I DÉCOUPAGES DECOUPAGES VIVRE LA NATURE CHATEAU-D'OEX - CE QUE NOUS APPRENNENT LES DÉCOUPAGES Une bonne vie doit être cultivée Pourquoi les découpages aux ciseaux nous tiennent-ils tant ä coeur? Nous avons rendu visite ä la découpeuse Marianne Dubuis qui vit et travaille ä Château-d 1 0Ex. Au Pays d'Enhaut, le découpage aux ciseaux est profondément enraciné depuis des générations dans l'art populaire. Texte: HERBERT GRIJBER Contrairement aux spécialistes, le public croit souvent qu'un découpage aux ciseaux se fait ä partie d'une seule feuille pliée. Un peu comme sur une gravure sur bois, nous discernons sur un découpage un sujet noir en parfaite netteté sur fond blanc. Les motifs ä gauche de l'image sont identiques avec ceux de droite et, selon le. pliage de la feuille avant le découpage, c'est éga- lement le cas pour le haut et le bas. Ce dédoub- lement est épatant. l'oeil se promène d'un côté ä l'autre, du sujet de gauche ä celui de droite, et se prend au jeu du miroitement. Il 1 existe bel et bien un art qui rend la dishar- monie visible, qui montre les cassures, un art qui burine et creuse, qui accuse et condamne. Ce n'est pas ä cet art qu'aspire Marianne Dubois. Elle n'entend pas déranger mais bien au contraire ouvrir ä travers son art le coeur des spectateurs. Le découpage est une affaire de coeur. Au cours de la conversation, Marianne Dubuis ne cesse de rappeler cet aspect ä ses yeux essentiel, même si ce ne sont pas les termes qu'elle utilise. Ce qui lui importe, c'est la joie, la beauté. Et la beauté peut se nicher dans un bouquet de fleurs. Elle ne perd pas pour autant de vue les problèmes de notre époque. Mais, dans son tra- vail, elle ne se fixe pas ä ces idées. Ces travaux dégagent bien plus un sentiment de sensualité et d'épanouissement. C'est pourquoi les couples dans ses images se font face. D'où l'absence de toute intention de suggérer le désamour, la traî- trise ou l'amour refroidi. Comme un mandala Les découpages réussis se distinguent par leur équilibre bienfaisant. Ils plaisent. Certains sont circulaires avec un ultime cercle formé d'ornements qui encadre l'image, d'autres sont carrés ou rectangulaires, eux aussi artistique- ment encadrés. C'est surtout cette simplicité qui tape aussitôt ä Nous voyons une image équilibrée et l'aspect symétrique a moins la fonc- tion d'un diktat que d'une sorte de balance. Cette expression harmonieuse invite ä s'y plonger — et lorsque le découpage aux ciseaux est réussi, sa contemplation se rapproche de la méditation et le découpage devient comme un mandala. MARIANNE DUBUIS, DÉCOUPEUSE AUX CISEAUX Vivant ä Château-d'OEx, Marianne Dubuis a dessiné dès son enfance et continue de le faire jusqu'à ce jour. Ce n'est toutefois pas comme dessinatrice ou peintre qu'elle apparaît en public mais comme découpeuse aux ciseaux (www.mariannedubuis.ch). Aujourd'hui, beaucoup de ses oeuvres sont exécutées ä la demande de particuliers ou de sociétés. Elle a ainsi conçu une ligne d'emballage de luxe pour le chocolatier Cailler. Des musées suisses et internationaux ont montré ses travaux. Le Musée du Pays-d'Enhaut ä Chäteau- d'CEx en présente quelques-uns dans le cadre d'une exposition permanente. Signalons que les prochaines journées du découpage aux ciseaux se dérouleront les 15/16 juillet ä Château-d'CEx. Du découpage plié tradition- nel (à droite) au découpage aux ciseaux complexe mul- ticolore: Marianne Dubuis dans son atelier. Mais il existe aussi d'innombrables découpages composés de centaines et parfois même de milliers d'élément découpés individuellement qui sont ensuite collés un ä un sur le papier. C'est un travail au millimètre près qui demande beaucoup de concentration. Ce n'est qu'en assemblant d'innombrables petits bouts de papiers qu'on voit par exemple apparaître une façade de maison avec des fenêtres, portes, bal- cons et escaliers extérieurs. Il faut par ailleurs assortir chromatiquement les petits morceaux. Lors de notre visite, Marianne Dubuis travail- lait ä une oeuvre de 70 x 100 cm. On découvre dans cette image, qui raconte au fond une seule histoire, de nombreux arbres feuillus entre dif- férents immeubles. En regardant de plus près, nous voyons que les petites feuilles de l'arbre, un peu plus foncées que la couronne, sont con- stituées d'innombrables petits bouts de papier collés. A cet instant au plus tard, on imagine le temps énorme que nécessite la réalisation d'une telle oeuvre. Cela peut durer des semaines, voire des mois — et Marianne Dubuis travaille de six ä sept jours par semaine, ä raison de six heures par jour. Un esprit vif, un coeur sensible Qu'est-ce qu'un découpage aux ciseaux réussi? Pour Marianne Dubuis, qui exerce le métier de découpeuse professionnelle depuis 38 ans, le secret réside dans les émotions. Elle désire communiquer de la joie en tant qu'artiste. Elle estime que c'est un vrai cadeau de pouvoir effectuer un travail qui fait plaisir. Elle évoque le terme d'énergie positive. Exprimer la joie de 20 Ami de la Nature • 212017 1 4v ,: ,e e , ,t,.ii„e N i. :: .5o 114„ , .,, m 4" « .4 p x 1 4 » - i4r 4 4m : 1 lie » ;. e,t ir .:1,1 I— , ret .-..n .4- e e r .re m 4 , i : , r ,,, i , . ter ' m 4 -s . x , i " t , , . . .1 ;z: LAt 7 .„.IA A ,, o f 0, ii n lei %,e ( #•• 5, -- 1 1.7 :11 :. l e i tl i .ii ! if ..-' 1 K i I % ife It.14 .4 3 5 .; ie. —:- t ta ( reçi , e 1; ,,, ; stg i r - , ,,,,, - 4 , :e,, Ir of VA e- lu r, 44 0, ( (A zb- ge ,i t4 1 t L i e ite, s I ø le 3 ( ( ' 4. oe e `, 4 M re4 j ( ;`-, 4 +3 , ley ( :, " 4 : 0 , l ek ,...., . . , , - s I , 4 ' s \% . --- , f •Ne I . 4 4% Ir. 4,0 1 . 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VIVRE LA NATURE I DÉCOUPAGES DECOUPAGES VIVRE LA NATURE

CHATEAU-D'ŒX - CE QUE NOUS APPRENNENT LES DÉCOUPAGES

Une bonne vie doit être cultivée Pourquoi les découpages aux ciseaux nous tiennent-ils tant ä coeur? Nous avons rendu visite ä la

découpeuse Marianne Dubuis qui vit et travaille ä Château-d10Ex. Au Pays d'Enhaut, le découpage aux ciseaux est profondément enraciné depuis des générations dans l'art populaire.

Texte: HERBERT GRIJBER

Contrairement aux spécialistes, le public croit souvent qu'un découpage aux ciseaux se fait ä partie d'une seule feuille pliée. Un peu comme sur une gravure sur bois, nous discernons sur un découpage un sujet noir en parfaite netteté sur fond blanc. Les motifs ä gauche de l'image sont identiques avec ceux de droite et, selon le. pliage de la feuille avant le découpage, c'est éga-lement le cas pour le haut et le bas. Ce dédoub-lement est épatant. l'oeil se promène d'un côté ä l'autre, du sujet de gauche ä celui de droite, et se prend au jeu du miroitement.

Il

1 existe bel et bien un art qui rend la dishar-monie visible, qui montre les cassures, un art qui burine et creuse, qui accuse et condamne.

Ce n'est pas ä cet art qu'aspire Marianne Dubois. Elle n'entend pas déranger mais bien au contraire ouvrir ä travers son art le cœur des spectateurs.

Le découpage est une affaire de cœur. Au cours de la conversation, Marianne Dubuis ne cesse de rappeler cet aspect ä ses yeux essentiel, même si ce ne sont pas les termes qu'elle utilise. Ce qui lui importe, c'est la joie, la beauté. Et la beauté peut se nicher dans un bouquet de fleurs. Elle ne perd pas pour autant de vue les problèmes de notre époque. Mais, dans son tra-vail, elle ne se fixe pas ä ces idées. Ces travaux dégagent bien plus un sentiment de sensualité

et d'épanouissement. C'est pourquoi les couples dans ses images se font face. D'où l'absence de toute intention de suggérer le désamour, la traî-trise ou l'amour refroidi.

Comme un mandala

Les découpages réussis se distinguent par leur équilibre bienfaisant. Ils plaisent. Certains sont circulaires avec un ultime cercle formé d'ornements qui encadre l'image, d'autres sont carrés ou rectangulaires, eux aussi artistique-ment encadrés. C'est surtout cette simplicité qui tape aussitôt ä Nous voyons une image équilibrée et l'aspect symétrique a moins la fonc-tion d'un diktat que d'une sorte de balance. Cette expression harmonieuse invite ä s'y plonger — et lorsque le découpage aux ciseaux est réussi, sa contemplation se rapproche de la méditation et le découpage devient comme un mandala.

MARIANNE DUBUIS, DÉCOUPEUSE AUX CISEAUX

Vivant ä Château-d'Œx, Marianne Dubuis a dessiné

dès son enfance et continue de le faire jusqu'à ce jour.

Ce n'est toutefois pas comme dessinatrice ou peintre

qu'elle apparaît en public mais comme découpeuse

aux ciseaux (www.mariannedubuis.ch). Aujourd'hui,

beaucoup de ses œuvres sont exécutées ä la demande

de particuliers ou de sociétés. Elle a ainsi conçu une

ligne d'emballage de luxe pour le chocolatier Cailler.

Des musées suisses et internationaux ont montré

ses travaux. Le Musée du Pays-d'Enhaut ä Chäteau-

d'CEx en présente quelques-uns dans le cadre d'une

exposition permanente. Signalons que les prochaines

journées du découpage aux ciseaux se dérouleront les

15/16 juillet ä Château-d'CEx.

Du découpage plié tradition-nel (à droite) au découpage aux ciseaux complexe mul-

ticolore: Marianne Dubuis dans son atelier.

Mais il existe aussi d'innombrables découpages composés de centaines et parfois même de milliers d'élément découpés individuellement qui sont ensuite collés un ä un sur le papier. C'est un travail au millimètre près qui demande beaucoup de concentration. Ce n'est qu'en assemblant d'innombrables petits bouts de papiers qu'on voit par exemple apparaître une façade de maison avec des fenêtres, portes, bal-cons et escaliers extérieurs. Il faut par ailleurs assortir chromatiquement les petits morceaux. Lors de notre visite, Marianne Dubuis travail-lait ä une oeuvre de 70 x 100 cm. On découvre dans cette image, qui raconte au fond une seule histoire, de nombreux arbres feuillus entre dif-férents immeubles. En regardant de plus près, nous voyons que les petites feuilles de l'arbre, un peu plus foncées que la couronne, sont con-stituées d'innombrables petits bouts de papier collés. A cet instant au plus tard, on imagine le temps énorme que nécessite la réalisation d'une telle œuvre. Cela peut durer des semaines, voire des mois — et Marianne Dubuis travaille de six ä sept jours par semaine, ä raison de six heures par jour.

Un esprit vif, un cœur sensible

Qu'est-ce qu'un découpage aux ciseaux réussi? Pour Marianne Dubuis, qui exerce le métier de découpeuse professionnelle depuis 38 ans, le secret réside dans les émotions. Elle désire communiquer de la joie en tant qu'artiste. Elle estime que c'est un vrai cadeau de pouvoir effectuer un travail qui fait plaisir. Elle évoque le terme d'énergie positive. Exprimer la joie de

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VIVRE LA NATURE I DÉCOUPAGES

DÉCOUPAGES I VIVRE LA NATURE

Papier, crayon, ciseaux,

couteau, pincette, colle —

travailler avec des matières

pauvres. A ne pas oublier:

fantaisie, un œil pour le

détail et beaucoup de temps

et de patience.

vivre est moins pour elle une question de savoir-faire technique (découper, coller, etc.) mais du cœur — et en conséquence du contenu, respecti-vement de l'histoire que raconte le découpage.

C'est pour cela également qu'elle aime beau-coup les découpages aux ciseaux de Jean-Jacob Hauswirth (né en 1809 près de Saanen). Non pas parde qu'ils sont découpés parfaitement, mais parce qu'ils sont imaginatifs, pleins de force, de profondeur et d'humour — bref: parce qu'ils sont empreints de chaleur humaine et l'expression d'un esprit vif. Si nous voulons en savoir plus, c'est ä nous d'y regarder de plus près. Nous verrons alors dans cet ensemble harmonieux les différents symboles, la poésie et la force — nous distingueront alors dans ce bouquet les fleurs individuelles.

Signalons que Jean-Jacob Hauswirth est aujourd'hui considéré comme le père du décou-page aux ciseaux suisse. Ses travaux ont la cote et sont la fierté de grands musées. Hauswirth

a pourtant vécu dans la misère et la solitude jusqu'à l'âge de 63 ans en tant que travailleur journalier ainsi que charbonnier. Ces découpa-ges aux ciseaux ne valaient pas grand-chose. Il les vendait à des prix dérisoires ou les échange-ait contre un repas chaud ou un gîte.

Feu ou cendre?

Une ambiance paysanne romantique, la pléni-tude, l'acte sensé, la joie conviviale — voilà ce qu'expriment ä merveille les découpages aux ciseaux de Marianne Dubuis. Il serait tentant de désigner précipitamment ce type d'images comme étant des représentations nostalgiques et idéalisées. Mais alors, on ne les aurait pas comprises. On n'aurait pas vu que le banc sous le pommier est un symbole de confiance, on n'aurait prêté attention ni au pont surplombant le ruisseau (le fleuve de la vie), ni les 12 motifs floraux dans le cadre rond de l'image évoquant le cycle astrologique. Et Ibn aurait sans doute ignoré les extrémités du tableau qui nous

rappellent pourtant de manière humoristique que le bien-être et la beauté nécessitent toujours de l'entretien.

L'art de Marianne Dubuis consiste ä exprimer la valeur profonde de la simplicité. Dès son enfance, elle a aiguisé son regard. En tant que dessinatrice, elle a appris ä représenter sous forme d'histoires imagées ce qu'elle voyait et ressentait. D'où le côté narratif de tous ses découpages: beaucoup parlent de la vie rurale, des enfants, des parents et grands-parents, le tout niché entre la grande attente et l'éphémère. D'autres nous parlent de la vie d'un individu et, selon l'histoire, de tristesse profonde et de guérison.

Le découpage aux ciseaux est une forme artis-tique pratiquée depuis des centaines d'années. Contrairement par exemple ä l'Allemagne où Goethe s'est occasionnellement lui aussi distin-gué comme découpeur de silhouettes, le «style suisse» a intégré des motifs concernant l'alpage

et la vie de berger. Marianne Dubuis possède elle aussi sa propre expression manuscrite bien que ou justement parce qu'elle traite volontiers des scènes de la vie rurale. Même dans cette atmosphère intemporelle, la vraie vie contemporaine transparaît. Elle cite ä ce propose le grand compositeur Gustav Mahler: «La tradition est la transmission du feu et non l'adoration de la cendre.» a

NATURA TRAIL PAYS-D'ENHAUT

La Fédération Suisse des Amis de la Nature publie cet

été un nouveau guide de randonnée en format poche

pour le Natura Trail Pays-d'Enhaut. On trouve une

description de la randonnée en altitude du Col des

Mosses vers Château-d'CEx ainsi que de la randonnée

en vallée tout aussi facile de Rougemont ä Château-

d'CEx. Rougemont rend hommage ä son plus célèbre

découpeur aux ciseaux Louis Saugy (1871-1953) ä

travers un chemin thématique. Jean-Jacob Hauswirth

(1809-1871), quant ä lui, considéré comme le père

du découpage suisse ä tendance folklorique, vivait

seul dans un dénuement extrême dans la gorge de

Pissot, trois kilomètres au sud de Château-d'CEx. Le

guide Natura Trail Pays-d'Enhaut (CHF 5.- hors frais de

port) peut être commandé sur www.amisdelanature.

ch/shop ou par téléphone au 031 306 67 67. Pour les

membres FSAN, le payement est facultatif.

Une nouvelle œuvre naît:

découper, coller, assembler

(à droite). Image au milieu:

travail de Jean-Jacob Haus-

wirth, père du découpage

aux ciseaux traditionnel

suisse.