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Vintage | Rencontre: David Servé Lorsqu’on parle de véhicules d’avant-guerre, deux obstacles viennent à l’esprit: l’investissement financier et les contraintes d’utilisation. David Servé propose sa solution: la Lanchester Super Sport. Amours d’avant- guerre 102 | MONITEURAUTOMOBILE.BE 1620 | 3/2/2016 Texte Benoît Lays | Photos Jeroen Peeters Toute copie non autorisée est strictement interdite sans le consentement écrit préalable de Produpress SA/NV.

MA Itw David Servé

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Vintage | Rencontre: David Servé

Lorsqu’on parle de véhicules d’avant-guerre, deux obstacles viennent à l’esprit: l’investissement fi nancier et les contraintes d’utilisation. David Servé propose sa solution: la Lanchester Super Sport.

Amoursd’avant-guerre

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Texte Benoît Lays | Photos Jeroen Peeters

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Ses grands yeux cachés derrière

ses lunettes à monture épaisse

donnent à David Servé l’air d’un

adolescent jouant dans l’atelier

de son paternel. Un antre rempli

de pièces de carrosserie en alu-

minium, de découpes de bois ou

encore de vieux volants, pendus

aux murs, qui vous plongent dans

un autre siècle. Charmé par l’am-

biance, vous vous laissez captiver par les anecdotes

d’un homme visiblement à l’aise dans son bleu de

travail. A 56 ans, David possède de solides connais-

sances en matière de patrimoine automobile, mais

aussi de pilotage dans des rallyes historiques.

«J’ai participé au Liège-Rome-Liège en 2000, à

l’époque d’Alain Defalle, sur une petite Triumph

TR3 absolument pas préparée pour cela, mais qui

sortait de restauration. J’ai beaucoup appris, d’autant

que c’était ma première expérience en rallye de régu-

larité. Je suis revenu l’année suivante avec la même

voiture, mais nettement mieux préparée. Mais j’ai

aussi particulièrement apprécié le SeaSun Rally de

Pierre Barré, qui nous emmenait chaque année dans

des endroits différents. Nous sommes allés en Corse,

en Sardaigne, à Majorque ou encore en Slovénie. J’ai

détruit ma TR3, alors je me suis offert une Apal, qui

marchait vraiment très fort. Malheureusement, elle

a également été victime de ma fougue. Et puis je suis

tombé amoureux des voitures d’avant-guerre et j’ai

acquis une Daimler de 1935.»

Mais très vite, il prend conscience des inconvé-

nients liés à ce genre de véhicule.

«Les prix sont prohibitifs, et ce depuis la bulle spé-

culative de la fin des années 80. Depuis lors, il est il-

lusoire de vouloir s’acheter une Bentley, une Dela-

haye ou une Aston Martin d’avant-guerre. Le tarif

va au-delà des 250.000 € et seuls les plus fortunés

peuvent s’en offrir. Sans compter qu’une fois acquise,

une avant-guerre vous oblige à passer par des spécia-listes, qui facturent leurs pièces et leurs services à prix

d’or, sans parler du temps qu’ils exigent pour effec-

tuer leurs travaux.»

UNE IDÉE EN ORConscient de tous ces inconvénients et après avoir

lui-même expérimenté pareille déception, notre

Géo Trouve-Tout s’est lancé dans l’amélioration de

«UNE FOIS QUE L’ON A GOÛTÉ À CELA, TOUT PARAÎT INSIPIDE. LES VOITURES ACTUELLES, MAIS AUSSI LES ANCÊTRES PLUS RÉCENTS.»

1| Son antre rempli de pièces en alu, de

découpes de bois ou de vieux volants vous

plonge dans un autre siècle.

2| «Pour chaque voiture, je pars d’une épave que je

démonte pour n’en garder que le châssis, qui est

sablé.»

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1| David a très vite remarqué que la longueur des moteurs de l’époque correspond à celle des blocs Triumph des années 60...

2| La position dans le cockpit est plutôt agréable et l’on vit véritablement en symbiose avec la voiture.... et la nature

3| La pose de la nouvelle sellerie en cuir est réalisée par la compagne de David.

ce châssis Daimler que le spécialiste de l’époque lui

avait rendu dans un état inqualifiable.

«Et je me suis très vite rendu compte que cela

n’avait rien de très compliqué. J’ai rapidement ven-

du la première construite. L’important, c’est de partir

d’un châssis en croisillon comme celui des Daimler

et des Lanchester. D’abord pour une raison de rigidi-

té, mais aussi parce que l’arbre de transmission passe

au-dessus. Le châssis est suspendu au pont, ce qui

abaisse fortement le centre de gravité et permet aus-

si de ne pas avoir de tunnel de transmission. A l’ar-

rière, le col de cygne passe sous le pont et permet de

créer une carrosserie très enveloppante.»

Mais les atouts des châssis Lanchester ne se li-

mitent pas à cela. En fait, David remarque très vite

que la longueur des moteurs de l’époque correspond

à celle des blocs Triumph des années 60. Une coïn-

cidence qui lui permet d’implanter des 6 cylindres

en ligne équipés de leur boîte de vitesses pour offrir

à ses modèles une fiabilité inédite.

«Lorsque je participe à des rallyes avec une de mes

Super Sport, je me félicite toujours d’arriver le soir à

l’étape, d’éteindre le moteur et de pouvoir aller boire

des verres avec mes amis. Il n’y a pas de partie de mé-

canique interminable comme sur une avant-guerre

classique. J’ai ainsi parcouru près de 20.000 km avec

une Lanchester et j’ai juste dû faire les appoints

d’huile. Elles sont extrêmement fiables et solides.»

VOITURES À VENDRESculpteur de formation, David se lance à temps plein

dans l’automobile en 2012 et il ne le regrette guère. Il

déborde d’idées et chaque solution apporte une plus-

value à la création suivante. Ainsi, vous êtes sûr de ne

jamais rencontrer deux modèles identiques.

«Pour chaque voiture, je pars d’une épave que je

démonte pour n’en garder que le châssis, qui est sa-

blé. Dès qu’il revient je le transforme, je le rigidifie,

je modifie les supports du moteur, je transforme la

direction et le système de freinage. Une fois que le

moteur est inséré dans l’auto, je peux attaquer la car-

rosserie. Lorsque tout est terminé, qu’elle est sur ses

roues, je la démonte entièrement. La carrosserie est

mastiquée et peinte, le moteur et la boîte sont en-

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POUR UNE LANCHESTER, IL FAUT COMPTER 700 HEURES DE TRAVAIL, JUSTIFIANT UN TARIF DE PLUS OU MOINS 70.000 €.

En parler, c’est bien, mais pour mieux appuyer ses dires, notre touche-à-tout n’hésite pas à sortir un des ses bolides pour nous emmener en balade.

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4| Le charme d’une sportive d’avant-guerre, c’est avant-tout une simplicité et de la rusticité.

5| Sculpteur de formation, David s’est vite senti très à l’aise dans le quotidien d’un carrossier à l’ancienne.

voyés en Angleterre, tandis que le cardan est envoyé en Pologne; j’assemble une moitié d’arbre de trans-mission de Daimler/Lanchester avec la moitié d’un Triumph et c’est à l’Est qu’ils affi nent les réglages. Une fois de retour, je remets tout dans la voiture avec révision du train avant et de la direction. Je place de nouveaux joints et un circuit électrique tout neuf et puis l’auto part à l’atelier de peinture. Enfi n, il y a la pose de la nouvelle sellerie en cuir réalisée par ma compagne. Evidemment, chaque voiture est diff é-rente, puisque je me sers de mes erreurs pour amé-liorer ma technique. Seul le bouchon du réservoir est commun à tous les modèles. En gros, il faut comp-ter 700 heures de travail, ce qui justifi e un tarif tour-nant aux alentours de 70.000 €.»

SENSATIONS GARANTIESPour mieux appuyer ses dires, notre touche-à-tout nous emmène brièvement à bord d’un de ses bo-lides. La position dans le cockpit est plutôt agréable et l’on vit véritablement en symbiose avec la voiture.

«Une fois que l’on a goûté à cela, tout paraît insi-pide, non seulement les voitures actuelles, mais aussi les ancêtres plus récents. Il faut prendre conscience qu’on roule dans un engin avec lequel on n’a pas droit à l’erreur. Lorsque je suis dans la circulation actuelle, il faut imaginer que tout peut arriver, donc je me retiens fortement. Ce sont ses limites. Par contre, dans les campagnes, lors des rallyes, je me lâche et je prends véritablement du plaisir. En montagne, je m’amuse vraiment tout en conduisant en connais-sance de cause. Il y a tellement de couple que je ne dois pas souvent changer de vitesse. Je peux conser-ver le troisième rapport, même dans les épingles.»

Entre deux créations, David s’occupe de demandes plus spécifi ques, comme cette TR3 ayant entière-ment brûlé et dont il répare le châssis ou encore cette carrosserie inédite, en aluminium, qu’il crée entière-ment sur un châssis de Jaguar des années 50, sans oublier une Rolls-Royce Phantom III de 1937 qu’il s’apprête à transformer également en Special his-toire de venir taquiner les Bentley au pedigree parfois discutable.

«Cela peut paraître un peu fou de s’attaquer à une telle référence, mais dans les faits, à l’époque, le constructeur fournissait le châssis et sa mécanique à des carrossiers, qui étaient totalement libres dans leur interprétation. C’est exactement ma démarche. Je crée des carrosseries inédites sur des mécaniques des années 30 et cela est parfaitement autorisé par

les organisateurs de rallyes d’ancêtres. Mes voitures ont les papiers des années 30 et sont immatriculées comme telles. Dans le cas de la Rolls-Royce, elle pos-sède un moteur identique à celui qu’on trouve dans les Bentley. Mais mon anglaise est absolument au-thentique et la voiture de grands prix que je vais créer en conservera tous les éléments. Il s’agira d’une voi-ture d’époque, qui devrait revenir à 150.000 €, avec des papiers de 1937, et non de 1956 comme les Bent-ley qui pullulent dans les rallyes historiques.»

On vous l’a dit, les idées foisonnent dans le cerveau de ce génie unique en son genre!

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