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ACADEMIE DES SCIENCES DE L'U.R.S.S. INSTITUT D'ECONOMIE MANUEL D'ECONOMIE POLITIQUE La portée internationale d’un manuel marxiste d’économie politique « Je pense que les camarades ne tiennent pas suffisamment compte de la portée d'un manuel marxiste d'économie politique. Ce manuel n'est pas seulement nécessaire à notre jeunesse soviétique. Il l'est surtout aux communistes de tous les pays et à ceux qui sympathisent avec eux. Nos camarades à l'étranger veulent savoir comment nous avons fait pour secouer le joug capitaliste, réorganiser l'économie du pays dans l'esprit du socialisme, pour gagner l'amitié de la paysannerie ; comment nous avons fait pour qu'un pays hier encore misérable et faible se transforme en pays riche, puissant ; ce que sont les kolkhoz ; pourquoi, malgré la socialisation des moyens de production, nous maintenons la production marchande, l'argent, le commerce, etc. Ils veulent savoir tout cela et bien d'autres choses, non point par simple curiosité, mais pour apprendre de nous et utiliser notre expérience dans leur propre pays. Ainsi la publication d'un bon manuel marxiste d'économie politique a-t-elle une importance non seulement nationale, mais encore une immense portée internationale. Il faut donc un manuel pouvant servir de livre de chevet à la jeunesse révolutionnaire non seulement à l'intérieur du pays, mais aussi au-delà de ses frontières. Il ne doit pas être trop volumineux, sinon il ne pourra pas être un livre de chevet, et l'on aura de la peine à l'assimiler, à en venir à bout. Mais il doit contenir toutes les choses essentielles concernant aussi bien l'économie de notre pays que celle du capitalisme et du système colonial. Certains camarades ont proposé, au cours des débats, d'inclure dans le manuel plusieurs nouveaux chapitres, les historiens : sur l'histoire, les hommes politiques : sur la politique, les philosophes : sur la philosophie, les économistes : sur l'économie. Mais cela aurait fait prendre au manuel des proportions illimitées. Naturellement, il ne faut pas le faire. Le manuel utilise la méthode historique pour illustrer les problèmes d'économie politique mais cela ne veut pas encore dire que nous devions faire du manuel d'économie politique une histoire des rapports économiques. Il nous faut un manuel de 500, de 600 pages au plus. Ce sera un livre de chevet en matière d'économie politique marxiste, un excellent cadeau aux jeunes communistes de tous les pays. Du reste, étant donné le niveau insuffisant de la formation marxiste de la plupart des Partis communistes étrangers, ce manuel pourrait être d'une grande utilité aussi pour les cadres communistes plus âgés de ces pays. » J. Staline Les problèmes économiques du socialisme, février 1952. Cet ouvrage, traduit du russe, a été publié dans son texte original sous le titre : POLITITCHESKAIA ÉKONOMIIA (Outchebnik) (Gossoudarstvennoié Izdatelstvo, polititcheskoï litératoury, Moscou, 1955.) Cet ouvrage est idéal pour assimiler les bases de l’économie politique marxiste-léniniste. Publié juste avant l’expurgation des œuvres de Staline, il contient les enseignements essentiels de l’expérience de l’édification du socialisme en URSS. Il comporte néanmoins quelques erreurs (comme l’appréciation anti-matérialiste du régime social en Yougoslavie et en Chine) ou omissions (concernant les apports de l’ouvrage de Staline « Les Problèmes économiques du socialisme en URSS », à l’exemple de l’absence du thème de l’introduction de l’échange direct de produits entre l’industrie et les kolkhozes), illustrant le début du triomphe de l’influence révisionniste au sein du PCUS. Cette version du manuel ne comporte cependant pas encore de modifications importantes touchant à la base de la compréhension de l’économie politique du socialisme telles qu’elles seront introduites dans la 3 ème édition du manuel en 1958, consécutivement à l’introduction en 1957-1958 des premières réformes du « socialisme de marché » dans l’économie soviétique. V.G., le 05/02/2006 Edition électronique réalisée par Vincent Gouysse à partir de l’ouvrage publié en mars 1956 aux Editions Sociales, Paris. Texte conforme à la 2 ème édition de 1955. WWW.MARXISME.FR

MANUEL D'ECONOMIE POLITIQUE

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Il nous faut un manuel de 500, de 600 pages au plus. Ce sera un livre de chevet en matière d'économie politique marxiste, un excellent cadeau aux jeunes communistes de tous les pays. Du reste, étant donné le niveau insuffisant de la formation marxiste de la plupart des Partis communistes étrangers, ce manuel pourrait être d'une grande utilité aussi pour les cadres communistes plus âgés de ces pays

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  • ACADEMIE DES SCIENCES DE L'U.R.S.S.INSTITUT D'ECONOMIE

    MANUEL D'ECONOMIE POLITIQUELa porte internationale dun manuel marxiste dconomie politique

    Je pense que les camarades ne tiennent pas suffisamment compte de la porte d'un manuel marxisted'conomie politique. Ce manuel n'est pas seulement ncessaire notre jeunesse sovitique. Il l'est surtout auxcommunistes de tous les pays et ceux qui sympathisent avec eux. Nos camarades l'tranger veulent savoircomment nous avons fait pour secouer le joug capitaliste, rorganiser l'conomie du pays dans l'esprit dusocialisme, pour gagner l'amiti de la paysannerie ; comment nous avons fait pour qu'un pays hier encoremisrable et faible se transforme en pays riche, puissant ; ce que sont les kolkhoz ; pourquoi, malgr lasocialisation des moyens de production, nous maintenons la production marchande, l'argent, le commerce, etc.Ils veulent savoir tout cela et bien d'autres choses, non point par simple curiosit, mais pour apprendre de nouset utiliser notre exprience dans leur propre pays. Ainsi la publication d'un bon manuel marxiste d'conomiepolitique a-t-elle une importance non seulement nationale, mais encore une immense porte internationale.

    Il faut donc un manuel pouvant servir de livre de chevet la jeunesse rvolutionnaire non seulement l'intrieur du pays, mais aussi au-del de ses frontires. Il ne doit pas tre trop volumineux, sinon il ne pourrapas tre un livre de chevet, et l'on aura de la peine l'assimiler, en venir bout. Mais il doit contenir toutes leschoses essentielles concernant aussi bien l'conomie de notre pays que celle du capitalisme et du systmecolonial. Certains camarades ont propos, au cours des dbats, d'inclure dans le manuel plusieurs nouveauxchapitres, les historiens : sur l'histoire, les hommes politiques : sur la politique, les philosophes : sur laphilosophie, les conomistes : sur l'conomie. Mais cela aurait fait prendre au manuel des proportions illimites.Naturellement, il ne faut pas le faire. Le manuel utilise la mthode historique pour illustrer les problmesd'conomie politique mais cela ne veut pas encore dire que nous devions faire du manuel d'conomie politiqueune histoire des rapports conomiques.

    Il nous faut un manuel de 500, de 600 pages au plus. Ce sera un livre de chevet en matire d'conomiepolitique marxiste, un excellent cadeau aux jeunes communistes de tous les pays. Du reste, tant donn le niveauinsuffisant de la formation marxiste de la plupart des Partis communistes trangers, ce manuel pourrait tred'une grande utilit aussi pour les cadres communistes plus gs de ces pays.

    J. Staline

    Les problmes conomiques du socialisme, fvrier 1952.

    Cet ouvrage, traduit du russe, a t publi dans son texte original sous le titre : POLITITCHESKAIAKONOMIIA (Outchebnik) (Gossoudarstvennoi Izdatelstvo, polititchesko litratoury, Moscou, 1955.)

    Cet ouvrage est idal pour assimiler les bases de lconomie politique marxiste-lniniste. Publi juste avantlexpurgation des uvres de Staline, il contient les enseignements essentiels de lexprience de ldification dusocialisme en URSS. Il comporte nanmoins quelques erreurs (comme lapprciation anti-matrialiste du rgimesocial en Yougoslavie et en Chine) ou omissions (concernant les apports de louvrage de Staline LesProblmes conomiques du socialisme en URSS , lexemple de labsence du thme de lintroduction delchange direct de produits entre lindustrie et les kolkhozes), illustrant le dbut du triomphe de linfluencervisionniste au sein du PCUS. Cette version du manuel ne comporte cependant pas encore de modificationsimportantes touchant la base de la comprhension de lconomie politique du socialisme telles quelles serontintroduites dans la 3me dition du manuel en 1958, conscutivement lintroduction en 1957-1958 despremires rformes du socialisme de march dans lconomie sovitique.

    V.G., le 05/02/2006

    Edition lectronique ralise par Vincent Gouysse partir de louvrage publi en mars1956 aux Editions Sociales, Paris. Texte conforme la 2me dition de 1955.

    WWW.MARXISME.FR

  • 2Sommaire :Prface de la premire dition (p. 5)

    Prface de la deuxime dition (p. 6)

    Introduction (p. 7)

    PREMIRE PARTIE Les modes de production prcapitalistes (p. 12)

    Chapitre I Le mode de production de la communaut primitive : L'apparition de la socit humaine Les conditions de la vie matrielle dans lasocit primitive. Le perfectionnement des instruments de travail Les rapports de production dans la socit primitive. La division naturelle du travail Lergime de la gens. Le droit maternel. Le droit paternel Les dbuts de la division sociale du travail et de rechange L'apparition de la proprit prive etdes classes. La dsagrgation de la communaut primitive Les reprsentations sociales l'poque primitive Rsum (p. 12)

    Chapitre II Le mode de production fond sur l'esclavage : La naissance de l'esclavage Les rapports de production de la socit esclavagiste. Lasituation des esclaves Le dveloppement de l'change. Le capital commercial et le capital usuraire L'aggravation des contradictions du mode deproduction esclavagiste La lutte de classe des exploits contre leurs exploiteurs. Les rvoltes d'esclaves. La fin du rgime de l'esclavage Les conceptionsconomiques de l'poque de l'esclavage Rsum (p. 19)

    Chapitre III Le mode de production fodal : L'avnement de la fodalit Les rapports de production de la socit fodale. L'exploitation du paysanpar le seigneur La ville mdivale. Les corporations. Les guildes des marchands Les classes et les castes de la socit fodale. La hirarchie fodale Le dveloppement des forces productives de la socit fodale La naissance de la production capitaliste au sein du rgime fodal. Le rle du capitalmarchand L'accumulation primitive du capital. Lexpropriation violente des paysans. Laccumulation des richesses Les rvoltes des serfs. Lesrvolutions bourgeoises. La chute du rgime fodal Les conceptions conomiques de l'poque fodale Rsum (p. 28)

    DEUXIEME PARTIE Le mode de production capitaliste (p. 45)

    A Le capitalisme prmonopoliste (p. 45)

    Chapitre IV La production marchande. La marchandise et la monnaie : La production marchande est le point de dpart et le trait gnral ducapitalisme La marchandise et ses proprits. Le double caractre du travail incorpor dans la marchandise Le temps de travail socialement ncessaire.Le travail simple et le travail complexe Lvolution des formes de la valeur. Le caractre de la monnaie Les fonctions de la monnaie Lor et le papier-monnaie La loi de la valeur est la loi conomique de la production marchande Le caractre ftiche de la marchandise Rsum (p. 45)

    Chapitre V La coopration capitaliste simple et la manufacture : La coopration capitaliste simple La phase manufacturire du capitalisme Lemode capitaliste du travail domicile Le rle historique de la manufacture La diffrenciation de la paysannerie. Le passage de lconomie fonde sur lacorve lconomie capitaliste La formation du march intrieur pour lindustrie capitaliste Rsum (p. 57)

    Chapitre VI La phase du machinisme sous le capitalisme : Le passage de la manufacture lindustrie mcanique La rvolution industrielle Lindustrialisation capitaliste le dveloppement des villes et des centres industriels. La formation de la classe des proltaires La fabrique capitaliste. Lamachine comme moyen dexploitation du travail salari par le capital La grande industrie et lagriculture La socialisation capitaliste du travail et de laproduction. Les limites de lusage des machines en rgime capitaliste Rsum (p. 64)

    Chapitre VII Le capital et la plus-value. La loi conomique fondamentale du capitalisme : La base des rapports de production en rgime capitaliste La transformation de largent en capital La force de travail en tant que marchandise. La valeur et la valeur dusage de la marchandise force de travail Laproduction de plus-value est la loi conomique fondamentale du capitalisme Le capital en tant que rapport social de production. Le capital constant et lecapital variable Le taux de la plus-value Deux moyens d'augmentation du degr d'exploitation du travail par le capital. La plus-value absolue et la plus-value relative La plus-value extra La journe de travail et ses limites. La lutte pour sa rduction La structure de classe de la socit capitaliste. L'Etatbourgeois Rsum (p. 73)

    Chapitre VIII Le salaire : Le prix de la force de travail. La nature du salaire Les formes principales du salaire Les systmes de salaires desurexploitation Le salaire nominal et le salaire rel La baisse du salaire rel en rgime capitaliste La lutte de la classe ouvrire pour l'augmentationdes salaires Rsum (p. 84)

    Chapitre IX L'accumulation du capital et la pauprisation du proltariat : La production et la reproduction La reproduction capitaliste simple La reproduction capitaliste largie. L'accumulation du capital La composition organique du capital. La concentration et la centralisation du capital L'arme industrielle de rserve La surpopulation agraire La loi gnrale de l'accumulation capitaliste. La pauprisation relative et absolue du proltariat La contradiction fondamentale du mode de production capitaliste Rsum (p. 93)

    Chapitre X Le cycle et la rotation du capital : Le cycle du capital. Les trois formes du capital industriel La rotation du capital. Le temps de productionet le temps de circulation Le capital fixe et le capital circulant Le taux annuel de la plus-value. Les mthodes d'acclration de la rotation du capital Rsum (p. 102)

    Chapitre XI Le profit moyen et le prix de production : Les cots de production capitalistes et le profit. Le taux du profit La formation du taux moyendu profit et la transformation de la valeur des marchandises en prix de production La baisse tendancielle du taux de profit Rsum (p. 107)

    Chapitre XII Le capital commercial et le profit commercial : Le profit commercial et sa source Les frais de circulation Les formes du commercecapitaliste. Les Bourses de marchandises Le commerce extrieur Rsum (p. 114)

    Chapitre XIII Le capital de prt et l'intrt de prt. La circulation montaire : Le capital de prt L'intrt et le bnfice d'entrepreneur. Le tauxd'intrt et sa tendance la baisse Les formes de crdit. Les banques et leurs oprations Les socits par actions. Le capital fictif La circulationmontaire des pays capitalistes Rsum (p. 119)

    Chapitre XIV La rente foncire. Les rapports agraires en rgime capitaliste : Le rgime capitaliste de l'agriculture et la proprit prive de la terre La rente diffrentielle La rente absolue. Le prix de la terre La rente dans l'industrie extractive. La rente sur les terrains btir La grande et la petiteproduction agricole L'aggravation de l'opposition entre la ville et la campagne La proprit prive de la terre et la nationalisation de la terre Rsum(p. 126)

    Chapitre XV Le revenu national : Le produit social total et le revenu national La rpartition du revenu national Le budget de l'Etat Rsum (p.137)

    Chapitre XVI La reproduction du capital social : Le capital social. La composition du produit social total Les conditions de la ralisation dans lareproduction capitaliste simple Les conditions de la ralisation dans la reproduction capitaliste largie Le problme du march. Les contradictions de lareproduction capitaliste Rsum (p. 143)

  • 3Chapitre XVII Les crises conomiques : Le fondement des crises capitalistes de surproduction Le caractre cyclique de la reproduction capitaliste Les crises agraires Les crises et l'aggravation des contradictions du capitalisme La tendance historique du dveloppement du capitalisme. Le proltariat,fossoyeur du capitalisme Rsum (p. 149)

    B. Le capitalisme monopoliste ou imprialisme. (p. 157)

    Chapitre XVIII L'imprialisme, stade suprme du capitalisme. La loi conomique fondamentale du capitalisme monopoliste : Le passage l'imprialisme La concentration de la production et les monopoles. Les monopoles et la concurrence La concentration et les monopoles dans les banques.Le nouveau rle des banques Le capital financier et l'oligarchie financire L'exportation des capitaux Le partage conomique du monde entre lesunions de capitalistes. Les monopoles internationaux L'achvement du partage territorial du globe entre les grandes puissances et la lutte pour un nouveaupartage La loi conomique fondamentale du capitalisme monopoliste Rsum (p. 157)

    Chapitre XIX Le systme colonial de l'imprialisme : Le rle des colonies dans la priode de l'imprialisme Les colonies, rserves de produitsagricoles et de matires premires pour les mtropoles Les mthodes d'exploitation coloniale des masses laborieuses La lutte des peuples coloniaux pourla libration nationale Rsum (p. 170)

    Chapitre XX La place historique de l'imprialisme : L'imprialisme, dernier stade du capitalisme L'imprialisme, capitalisme parasite ou pourrissant Limprialisme, prlude de la rvolution socialiste Le capitalisme monopoliste d'Etat La loi de l'ingalit du dveloppement conomique et politiquedes pays capitalistes l'poque de l'imprialisme et la possibilit de la victoire du socialisme dans un seul pays Rsum (p. 177)

    Chapitre XXI La crise gnrale du capitalisme : L'essence de la crise gnrale du capitalisme La premire guerre mondiale et le dbut de la crisegnrale du capitalisme La victoire de la Grande Rvolution socialiste d'Octobre et la scission du monde en deux systmes : capitaliste et socialiste Lacrise du systme colonial de l'imprialisme L'aggravation du problme des marchs, la sous-production chronique des entreprises et le chmage chroniquede masse L'aggravation des crises de surproduction et les modifications dans le cycle capitaliste Rsum (p. 185)

    Chapitre XXII L'aggravation de la crise gnrale du capitalisme. Aprs la deuxime guerre mondiale : La deuxime guerre mondiale et la deuximephase de la crise gnrale du capitalisme La formation de deux camps sur la scne internationale et la dsagrgation du march mondial unique L'aggravation de la crise du systme colonial de l'imprialisme L'accentuation du dveloppement ingal du capitalisme. L'expansion de l'imprialismeamricain La militarisation de l'conomie des pays capitalistes. Les modifications dans le cycle capitaliste L'accentuation de la pauprisation de la classeouvrire des pays capitalistes Le renforcement de la domination des monopoles dans l'agriculture des pays capitalistes et la ruine de la paysannerie Rsum (p. 195)

    Thories conomiques de l'poque du capitalisme : L'conomie politique bourgeoise classique La naissance de l'conomie politique vulgaire L'conomie politique petite-bourgeoise Les socialistes utopistes Les dmocrates rvolutionnaires en Russie La rvolution accomplie par K. Marx etF. Engels en conomie politique Le dclin de la science conomique bourgeoise. L'conomie politique bourgeoise contemporaine La critique petitebourgeoise de l'imprialisme Les thories conomiques des opportunistes de la IIe Internationale et des socialistes de droite contemporains Ledveloppement par Lnine de l'conomie politique marxiste du capitalisme. L'laboration d'une srie de nouvelles thses de l'conomie politique ducapitalisme par Staline (p. 207)

    TROISIME PARTIE Le mode de production socialiste (p. 223)

    A. La priode de transition du capitalisme au socialisme (p. 223)

    Chapitre XXIII Les principaux traits de la priode de transition du capitalisme au socialisme : La rvolution proltarienne et la ncessit d'unepriode de transition du capitalisme au socialisme La dictature du proltariat, instrument de la construction d'une conomie socialiste La nationalisationsocialiste Les types d'conomie et les classes dans la priode de transition. L'alliance de la classe ouvrire et de la paysannerie L'apparition des loisconomiques du socialisme Les principes fondamentaux de la politique conomique pendant la priode de transition du capitalisme au socialisme Rsum (p. 223)

    Chapitre XXIV L'industrialisation socialiste : La grande industrie, base matrielle du socialisme. La nature de l'industrialisation socialiste Lesrythmes de l'industrialisation socialiste La mthode socialiste d'industrialisation. D'o viennent les ressources ncessaires l'industrialisation socialiste Les grands travaux. L'assimilation de la nouvelle technique et le problme des cadres De pays agricole arrir, l'U.R.S.S. se transforme en puissanceindustrielle avance Rsum (p. 237)

    Chapitre XXV La collectivisation de l'agriculture : La ncessit historique de la collectivisation de l'agriculture. Le plan coopratif de Lnine Lesconditions pralables la collectivisation intgrale La collectivisation intgrale et la liquidation des koulaks en tant que classe L'artel agricole, principaleforme de l'conomie collective L'U.R.S.S., autrefois pays de petites exploitations paysannes, devient le pays de l'agriculture la plus grande et la plusmcanise du monde Rsum (p. 245)

    Chapitre XXVI La victoire du socialisme en U.R.S.S. : L'affermissement du mode socialiste de production Les changements intervenus dans lastructure de classes de la socit La disparition de l'ingalit conomique entre les nations L'U.R.S.S. entre dans la phase de l'achvement de l'dificationde la socit socialiste et du passage graduel du socialisme au communisme Rsum (p. 254)

    B. Le systme socialiste d'conomie nationale (p. 263)

    Chapitre XXVII La base matrielle de production du socialisme : Les principaux caractres de la base matrielle de production du socialisme L'industrie socialiste L'agriculture socialiste Les voies du progrs technique en rgime socialiste La rpartition gographique de la productionsocialiste Rsum (p. 263)

    Chapitre XXVIII La proprit sociale des moyens de production, base des rapports de production en rgime socialiste : Le systme socialisted'conomie nationale et la proprit socialiste Les deux formes de proprit socialiste La proprit personnelle en rgime socialiste Le caractre desrapports de production socialistes Rsum (p. 272)

    Chapitre XXIX La loi conomique fondamentale du socialisme : Le caractre des lois conomiques en rgime socialiste Les traits essentiels de la loiconomique fondamentale du socialisme La loi conomique fondamentale du socialisme et le dveloppement de la production socialiste La loiconomique fondamentale du socialisme et l'accroissement du bien-tre des travailleurs Le rle conomique de l'Etat socialiste Rsum (p. 280)

    Chapitre XXX La loi du dveloppement harmonieux, proportionn, de l'conomie nationale : La ncessit d'un dveloppement harmonieux del'conomie nationale en rgime socialiste Les traits et les exigences essentiels de la loi du dveloppement harmonieux de l'conomie nationale La loi dudveloppement harmonieux de l'conomie nationale et la planification socialiste Les avantages de l'conomie planifie Rsum (p. 289)

    Chapitre XXXI Le travail social en rgime socialiste : Le caractre du travail en rgime socialiste Le travail, devoir des membres de la socitsocialiste. La ralisation du droit au travail La rpartition selon le travail, loi conomique du socialisme La coopration socialiste du travail L'mulation socialiste L'augmentation constante de la productivit du travail, loi conomique du socialisme Les sources et les rserves de l'augmentationde la productivit du travail Rsum (p. 299)

  • 4Chapitre XXXII La production marchande, la loi de la valeur et la monnaie en rgime socialiste : La ncessit de la production marchande en rgimesocialiste; ses particularits La valeur d'usage et la valeur de la marchandise dans l'conomie socialiste Le caractre de l'action de la loi de la valeur enrgime socialiste La monnaie et ses fonctions dans l'conomie socialiste Rsum (p. 310)

    Chapitre XXXIII Le salaire en rgime socialiste : Le salaire et la loi conomique de la rpartition selon le travail Les formes du salaire. Le systmedes tarifs L'augmentation constante du salaire rel en rgime socialiste Rsum (p. 318)

    Chapitre XXXIV La gestion quilibre et la rentabilit. Le prix de revient et le prix : La gestion quilibre et la rentabilit des entreprises Lesfonds des entreprises. Les fonds fixes et les fonds circulants Le prix de revient de la production Le revenu net de l'entreprise d'Etat. Le revenu netcentralis de l'Etat Le prix dans l'entreprise industrielle d'Etat Rsum (p. 326)

    Chapitre XXXV Le systme socialiste d'agriculture : La place et le rle de l'agriculture socialiste dans l'conomie nationale Les stations de machineset de tracteurs, base industrielle de la production kolkhozienne L'exploitation collective des kolkhoz. La planification de la production kolkhozienne Lesformes socialistes d'organisation du travail dans les kolkhoz. La journe-travail La production kolkhozienne. Les revenus des kolkhoz La rentediffrentielle en rgime socialiste La rpartition de la production et des revenus des kolkhoz. Le bien-tre croissant de la paysannerie kolkhozienne Ledveloppement des sovkhoz et les moyens d'lever leur rentabilit Rsum (p. 337)

    Chapitre XXXVI Le commerce en rgime socialiste : La nature et le rle du commerce en rgime socialiste Les formes du commerce en rgimesocialiste Les prix et les frais de circulation dans le commerce d'Etat et le commerce coopratif Le commerce extrieur Rsum (p. 354)

    Chapitre XXXVII Le revenu national de la socit socialiste : Le produit social total et le revenu national en rgime socialiste L'augmentationconstante du revenu national en rgime socialiste La rpartition du revenu national Rsum (p. 363)

    Chapitre XXXVIII Le budget d'Etat, le crdit et la circulation montaire en rgime socialiste : Les finances de la socit socialiste Le budget del'Etat socialiste Le crdit en rgime socialiste Les banques dans la socit socialiste La circulation montaire en rgime socialiste Rsum (p. 368)

    Chapitre XXXIX La reproduction socialiste : Le caractre de la reproduction socialiste La richesse nationale de la socit socialiste. La compositiondu produit social total Le rapport entre les deux sections de la production sociale La formation et la destination des fonds sociaux en rgime socialiste L'accumulation socialiste. L'accumulation et la consommation dans la socit socialiste Rsum (p. 378)

    Chapitre XL Le passage graduel du socialisme au communisme : Les deux phases de la socit communiste La tche conomique fondamentale del'U.R.S.S. La cration de la base matrielle de production du communisme Comment disparatra la diffrence essentielle entre la ville et la campagne Comment disparatra la diffrence essentielle entre le travail intellectuel et le travail manuel Le passage au principe communiste : De chacun selon sescapacits, chacun selon ses besoins Rsum (p. 388)

    C. L'dification du socialisme dans les pays de dmocratie populaire (p. 400)

    Chapitre XLI Le rgime conomique des pays europens de dmocratie populaire : Les conditions pralables de la rvolution dmocratique populaire Le caractre de la rvolution dmocratique populaire Les classes et les types d'conomie L'industrialisation socialiste La transformation socialistede l'agriculture L'lvation du bien-tre et du niveau de vie culturel des travailleurs Rsum (p. 400)

    Chapitre XLII Le rgime conomique de la Rpublique populaire de Chine : Les conditions pralables la rvolution populaire en Chine Lecaractre de la rvolution chinoise Les transformations agraires rvolutionnaires. La nationalisation socialiste Les types conomiques et les classes dansla Rpublique populaire de Chine pendant la priode de transition Les voies de l'industrialisation socialiste en Chine La transformation socialistegraduelle de l'agriculture L'lvation du niveau de vie matrielle et culturelle du peuple chinois Rsum (p. 412)

    Chapitre XLIII La coopration conomique des pays du camp socialiste : La naissance et l'affermissement du march mondial des pays du campsocialiste Le caractre des relations conomiques entre les pays du camp socialiste Les formes essentielles de coopration conomique des pays du campsocialiste Rsum (p. 428)

    Conclusions (p. 435)

  • 5Prface de la premire ditionCe manuel d'conomie politique est l'uvre collective des conomistes K. Ostrovitianov, del'Acadmie des Sciences de l'U.R.S.S., D. Chepilov et L. Leontiev, correspondants de l'Acadmie desSciences de l'U.R.S.S.; I. Laptev, de l'Acadmie Lnine des Sciences agricoles de l'U.R.S.S.; duprofesseur I. Kouzminov; L. Gatovski, docteur es sciences conomiques; P. Ioudine, de l'Acadmie desSciences de l'U.R.S.S.; A. Pachkov, correspondant de l'Acadmie des Sciences de l'U.R.S.S.; V.Peresleguine, candidat s sciences conomiques. La slection et la prsentation des donnesstatistiques ont t faites avec le concours de V. Starovski, docteur s sciences conomiques.

    Lors de la mise au point du projet de cet ouvrage, un grand nombre d'conomistes sovitiques ontapport, sur le texte, de prcieuses observations critiques et d'utiles suggestions, dont les auteurs onttenu compte par la suite.

    La discussion conomique organise par le Comit central du Parti communiste de l'Union sovitiqueen novembre 1951 a eu la plus grande importance pour la mise au point de ce manuel : au cours decette discussion, laquelle des centaines d'conomistes sovitiques prirent une part active, le projetde manuel d'conomie politique prsent par les auteurs fut l'objet d'un ample examen critique. Lespropositions formules la suite de la discussion ont grandement contribu en amliorer la compo-sition et en enrichir le contenu.

    K. Ostrovitianov, D. Chepilov, L. Leontiev, I. Laptev, I. Kouzminov et L. Gatovski ont procd lardaction dfinitive. Conscients de l'importance d'un manuel marxiste d'conomie politique, lesauteurs s'appliqueront amliorer le texte du prsent ouvrage en tenant compte des observationscritiques et des propositions qui leur seront faites sur cette premire dition. Ils prient donc leslecteurs de faire parvenir leurs apprciations et suggestions l'Institut d'Economie de l'Acadmie desSciences de l'U.R.S.S., Volkhonka, 14, Moscou.

    LES AUTEURS.

    Moscou, aot 1954.

  • 6Prface de la deuxime ditionLa premire dition du Manuel d'conomie politique , publie la fin de 1954 un tirage de plusde six millions d'exemplaires, a t rapidement puise. En plus de l'dition russe, le manuel a tdit en un grand nombre de langues des peuples de l'U.R.S.S., ainsi que dans plusieurs paystrangers. Une deuxime dition tait ncessaire. En prparant cette dition, les auteurs se sontpropos de complter l'ouvrage par des thses et des faits nouveaux illustrant l'essor constant del'conomie socialiste en U.R.S.S. et dans les pays de dmocratie populaire, ainsi que l'aggravation dela crise gnrale du capitalisme.

    Les auteurs se sont efforcs de tenir compte au maximum de l'exprience de l'tude de l'conomiepolitique dans les tablissements d'enseignement suprieur, les coles et les cercles du Particommuniste, ainsi que de l'tude individuelle d'aprs ce manuel. Au cours de l'anne qui vient des'couler, ce manuel a t discut dans de nombreuses chaires d'conomie politique. Les auteurs ontreu galement un grand nombre de lettres de lecteurs qui proposaient des amliorations au texte. Enmars-avril 1955 a eu lieu une large runion d'conomistes : travailleurs scientifiques, professeurs,directeurs d'entreprises de Moscou, Leningrad, Kiev, Minsk, Riga, Tallin, Vilnious, Tbilissi, Erevan,Bakou, Tachkent, Achkhabad, Stalinabad, Alma-Ata, Sverdlovsk, au cours de laquelle il a t procd un examen complet de la premire dition du manuel.

    Les auteurs ont fait une tude minutieuse des critiques et suggestions de toutes origines, qui leur ontt communiques et ils ont cherch utiliser tout ce qui tait susceptible d'amliorer ce manuel.Nanmoins, ils ont jug ncessaire de s'en tenir au mme type d'ouvrage, destin un large public, etde n'en pas augmenter sensiblement le volume. La deuxime dition de ce manuel a t mise au pointpar K. Ostrovitianov, D. Chcpilov, L. Lontiev, I. Laptev, I. Kouz-minov et L. Gatovski et pour laslection et la prsentation des donnes statistiques par V. Starovski.

    Les auteurs remercient toutes les personnes qui par leurs critiques et leurs suggestions ont contribu cette deuxime dition. Ils ont l'intention de poursuivre l'amlioration de ce manuel et prient leslecteurs de leur faire part de leur opinion et de leurs suggestions l'Institut d'Economie de l'Acadmiedes Sciences de l'U.R.S.S., Volkhonka, 14, Moscou.

    Moscou, septembre 1955.

  • 7IntroductionL'conomie politique fait partie des sciences sociales (Economie politique vient des mots grecs okonomia et politia . Le mot okonomia se compose lui-mme de deux mots : okos (maison, mnage), et nomos (loi). Politia signifie organisation sociale. Le terme d'conomie politique n'est apparu qu'au dbut du XVIIe sicle.). Elle tudie les lois de la productionsociale et de la rpartition des biens matriels aux diffrents stades du dveloppement de la socithumaine.

    La production matrielle constitue la base de la vie de la socit. Pour vivre, les hommes doiventavoir de la nourriture, des vtements et d'autres biens matriels. Pour se procurer ces biens, ils sontdans l'obligation de les produire, dans l'obligation de travailler. Les hommes produisent les biensmatriels, c'est--dire luttent contre la nature, non pas isolment mais en commun, en groupes, ensocits. C'est pourquoi la production est toujours et quelles que soient les conditions une productionsociale, et le travail une forme d'activit de l'homme social.

    La production des biens matriels suppose : 1 le travail de l'homme; 2 l'objet du travail et 3 lesmoyens de travail.

    Le travail est une activit rationnelle de l'homme au cours de laquelle celui-ci modifie et utilise pourla satisfaction de ses besoins les objets fournis par la nature. Le travail est une ncessit naturelle,une condition absolue de l'existence des hommes. Sans lui, la vie humaine serait impossible.

    Est objet de travail tout ce quoi l'homme applique son travail. Les objets du travail peuvent tredonns directement par la nature : ainsi, l'arbre que l'on abat dans la fort, le minerai que l'on extraitdu sol. Les objets du travail qui ont dj t soumis l'action d'un travail, comme le minerai l'usinemtallurgique, le coton la filature, les fils l'usine textile portent le nom de matires premires.

    Les moyens de travail dsignent toutes les choses l'aide desquelles l'homme agit sur l'objet de sontravail et le modifie : ce sont avant tout les instruments de production, ainsi que la terre, les btimentsd'exploitation, les routes, les canaux, les entrepts, etc. Parmi eux le rle dterminant appartient auxinstruments de production. Ces derniers comprennent les instruments varis que l'homme utilise dansson travail, depuis les grossiers instruments de pierre des primitifs jusqu'aux machines modernes. Leniveau de dveloppement des instruments de production donne la mesure du pouvoir de la socit surla nature, la mesure du dveloppement de la production. Ce qui distingue entre elles les diffrentespoques conomiques, ce n'est pas ce qu'elles produisent mais la manire de produire les biens mat-riels, les instruments de production dont elles se servent.

    Les objets du travail et les moyens de travail constituent les moyens de production. S'ils ne sontassocis la force de travail, ceux-ci ne peuvent rien crer par eux-mmes. Pour que le processus dutravail, le processus de cration des biens matriels puissent commencer, la force de travail doits'associer aux instruments de production.

    La force de travail est la facult que l'homme a de travailler, la somme des forces physiques etspirituelles grce auxquelles il est capable de produire des biens matriels. La force de travail estl'lment actif de la production; c'est elle qui met en uvre les moyens de production. Avec le progrsdes instruments de production se dveloppent aussi chez l'homme l'aptitude au travail, le savoir-faire,l'habilet, l'exprience de la production.

    Les instruments de production l'aide desquels les biens matriels sont produits, les hommes quimettent en uvre ces instruments et produisent les biens matriels, grce une certaine exprience dela production et des habitudes de travail, constituent les forces productives de la socit. Les masseslaborieuses sont la principale force productive de la socit humaine toutes les tapes de sondveloppement.

    Les forces productives traduisent les rapports des hommes avec les objets et les forces de la naturedont ils se servent pour produire les biens matriels. Cependant, dans la production les hommesagissent non seulement sur la nature, mais aussi les uns sur les autres.

    Ils ne produisent qu'en collaborant d'une manire, dtermine et en changeant entre eux leursactivits. Pour produire, ils entrent en relations et en rapports dtermins les uns avec les autres,

  • 8et ce n'est que dans les limites de ces relations et de ces rapports sociaux que s'tablit leur actionsur la nature, la production. (Karl Marx : Travail salari et capital, suivi de Salaire, prix et profit,p. 31, Editions Sociales, Paris, 1952.)

    Les rapports sociaux dtermins des hommes entre eux dans le processus de la production des biensmatriels constituent les rapports de production. Les rapports de production comprennent : a) lesformes de proprit des moyens de production; b) la position des divers groupes sociaux dans laproduction qui en dcoule et les rapports entre eux; c) tes formes de rpartition des produits quidpendent de la proprit des moyens de production et de la position des hommes dans la production.

    Le caractre des rapports de production est dtermin par celui de la proprit des moyens deproduction (terre, forts, eaux, sous-sol, matires premires, instruments de production, btimentsd'exploitation, moyens de transport et de communication, etc.) : ou bien cette proprit est celled'individus, de groupes sociaux ou de classes qui s'en servent pour exploiter les travailleurs, ou biencelle d'une socit dont le but est de satisfaire les besoins matriels et culturels des masses populaires.L'tat des rapports de production montre comment les moyens de production, et par consquent lesbiens matriels produits par les hommes, sont rpartis entre les membres de la socit. Ainsi, c'est laforme particulire de la proprit des moyens de production qui constitue le trait dterminant desrapports de production.

    Les rapports de production dterminent aussi les rapports de rpartition qui leur correspondent. Larpartition constitue le lien entre la production et la consommation. Les produits fabriqus dans lasocit servent soit la consommation productive, soit la consommation individuelle. Laconsommation productive, c'est l'utilisation des moyens de production en vue de crer des biensmatriels. La consommation individuelle satisfait les besoins de l'homme en nourriture, vtements,logement, etc.

    La rpartition des articles de consommation individuelle qui ont t produits dpend elle-mme de larpartition des moyens de production. Dans la socit capitaliste les moyens de production, et parsuite les produits du travail, appartiennent aux capitalistes. Les ouvriers sont privs des moyens deproduction, et pour ne pas mourir de faim, ils sont obligs de travailler pour les capitalistes quis'approprient les fruits de leur travail. Dans la socit socialiste les moyens de production sontproprit sociale. Aussi les fruits du travail appartiennent-ils aux travailleurs.

    Dans les formations sociales o existe la production marchande, la rpartition des biens matrielss'accomplit par l'change des marchandises. Production, rpartition, change et consommationforment une unit o le rle dterminant appartient la production. Les formes dtermines derpartition, d'change et de consommation ragissent leur tour activement sur la production,favorisant ou freinant son dveloppement. L'ensemble des

    rapports de production constitue la structure conomique de la socit, la base relle sur quois'lve une superstructure juridique et politique et laquelle correspondent des formes deconscience sociale dtermines. (Karl Marx : Contribution la critique de l'conomiepolitique, Prface. Voir Marx-Engels : Etudes philosophiques, p. 73, Editions Sociales, 1951.)

    Une fois venue au monde, la superstructure ragit activement son tour sur la base dont elle acclreou entrave le dveloppement. La production prsente un aspect technique et un aspect social. L'aspecttechnique de la production est tudi par les sciences naturelles et techniques, telles que la physique,la chimie, la mtallurgie, la mcanique, l'agronomie, etc. L'conomie politique tudie l'aspect socialde la production, les rapports des hommes entre eux dans la production sociale, c'est--dire lesrapports conomiques.

    L'conomie politique, crivait Lnine, ne s'occupe nullement de la production , mais bien desrapports sociaux des individus dans la production, de la structure sociale de la production. (V.Lnine : Le dveloppement du capitalisme en Russie , uvres, t. III, p. 40-41 (4e d. russe).

    L'conomie politique tudie les rapports de production dans leur interaction avec les forcesproductives. Les forces productives et les rapports de production forment un ensemble qui est le modede production. Les forces productives sont l'lment le plus mobile et le plus rvolutionnaire de laproduction. Le dveloppement de la production commence par des changements dans les forces

  • 9productives et, avant tout, par le changement et le dveloppement des instruments de production; deschangements correspondants se produisent ensuite dans les rapports de production. Les rapports deproduction entre les hommes, dont le dveloppement dpend de celui des forces productives, exercent leur tour une puissante action sur les forces productives.

    Celles-ci ne peuvent se dvelopper pleinement que si les rapports de production correspondent l'tatdes forces productives. A un certain degr de leur dveloppement, les forces productives dpassent lecadre des rapports de production existants et entrent en conflit avec eux. Les rapports de production,de forme de dveloppement des forces productives qu'ils taient, deviennent leurs chanes.

    C'est pourquoi les anciens rapports de production sont tt ou tard remplacs par de nouveauxrapports qui correspondent au niveau de dveloppement et au caractre des forces productives de lasocit. Un changement de la base conomique de la socit entrane un changement de sasuperstructure. Les conditions matrielles du passage des anciens rapports de production desrapports nouveaux apparaissent et se dveloppent au sein mme de la vieille formation. Les nouveauxrapports de production donnent libre cours au dveloppement des forces productives. La loi de lacorrespondance ncessaire entre les rapports de production et le caractre des forces productives estdonc une loi conomique du dveloppement de la socit.

    Dans une socit qui repose sur la proprit prive et l'exploitation de l'homme par l'homme, lesconflits entre les forces productives et les rapports de production se manifestent par la lutte desclasses. Le passage de l'ancien au nouveau mode de production s'accomplit alors par une rvolutionsociale. L'conomie politique est une science historique. Elle tudie la production matrielle dans sesformes sociales historiquement dtermines, les lois conomiques propres aux diffrents modes deproduction. Les lois conomiques expriment l'essence des phnomnes et des processus conomiques,le rapport interne de cause effet et d'interdpendance qui existe entre eux.

    Les lois du dveloppement conomique sont des lois objectives. Elles naissent et agissent sur la basede conditions conomiques dtermines, indpendamment de la volont des hommes. Les hommespeuvent connatre ces lois et les utiliser dans l'intrt de la socit, mais ils ne peuvent pas abolir oucrer des lois conomiques. L'utilisation des lois conomiques dans une socit de classes a toujoursun contenu de classe : la classe d'avant-garde de chaque formation sociale utilise les loisconomiques dans l'intrt d'un dveloppement progressiste de la socit, tandis que les classes quiont fait leur temps s'y opposent. Chaque mode de production a sa loi conomique fondamentale qui enexprime l'essence et en dfinit les principaux aspects et les principales lignes de dveloppement.L'conomie politique

    tudie d'abord les lois particulires chaque degr d'volution de la production et de l'change, etce n'est qu' la fin de cette tude qu'elle pourra tablir les quelques lois tout fait gnrales quisont valables en tout cas pour la production et l'change. (F. ENGELS : Anti-Dhring, 2e partie, ch.I, p. 179, Editions Sociales, Paris, 1950.)

    Par consquent, le dveloppement des diffrentes formations sociales obit tant aux lois conomiquesqui leur sont propres, qu' celles aussi qui sont valables pour toutes les formations, comme, parexemple, la loi de la correspondance ncessaire des rapports de production et du caractre des forcesproductives. Les formations sociales ne sont donc pas seulement spares par les lois conomiquespropres uniquement au mode de production considr; elles sont aussi relies l'une l'autre par deslois conomiques valables pour toutes.

    L'conomie politique tudie les types fondamentaux de rapports de production que connat l'histoire :la communaut primitive, l'esclavage, la fodalit, le capitalisme, le socialisme. La communautprimitive est un rgime social antrieur l'existence des classes. L'esclavage, la fodalit et lecapitalisme sont des formes diffrentes de socits fondes sur l'asservissement et l'exploitation desmasses laborieuses. Le socialisme est un rgime social qui a mis fin l'exploitation de l'homme parl'homme.

    L'conomie politique tudie l'volution de la production sociale, des formes infrieures aux formessuprieures ; l'apparition, le dveloppement et la disparition des rgimes sociaux fonds surl'exploitation de l'homme par l'homme. Elle montre comment toute la marche de l'histoire prpare la

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    victoire du mode de production socialiste. Elle tudie, ensuite, les lois conomiques du socialisme, leslois de la naissance de la socit socialiste et de son dveloppement vers la phase suprieure ducommunisme.

    Ainsi, l'conomie politique est la science qui traite du dveloppement des rapports des hommes entreeux dans la production sociale, c'est--dire des rapports conomiques des hommes. Elle faitapparatre les lois qui rgissent la production et la rpartition des biens matriels dans la socithumaine aux diffrents stades de son dveloppement. La mthode de l'conomie politique marxiste estcelle du matrialisme dialectique. L'conomie politique marxiste- lniniste applique les principesfondamentaux du matrialisme dialectique et du matrialisme historique l'tude du rgimeconomique de la socit.

    A la diffrence des sciences de la nature, telles que la physique, la chimie, etc., l'conomie politique nepeut recourir, pour tudier le rgime conomique de la socit, des essais, des expriences delaboratoire faites dans des conditions artificielles, liminant les phnomnes qui empchent l'examend'un processus l'tat pur.

    L'analyse des formes conomiques, signalait Marx, ne peut s'aider du microscope et des ractifsfournis par la chimie ; l'abstraction est la seule force qui puisse lui servir d'instrument. (K. Marx :Le Capital, livre I, t. I. Prface de la premire dition allemande, p. 18, Editions Sociales, Paris,1947.)

    Tout rgime conomique offre une physionomie complexe et contradictoire. Une tude scientifiquedoit aller au-del des apparences superficielles que prsentent les phnomnes conomiques et,s'aidant de l'analyse thorique, mettre en vidence les processus sous-jacents, les traits conomiquesfondamentaux qui expriment l'essence des rapports de production considrs, et faire abstraction destraits secondaires. Cette analyse scientifique conduit aux catgories conomiques, c'est--dire auxnotions qui sont l'expression thorique des rapports rels de production de ta formation socialeconsidre, tels que, par exemple, la marchandise, la valeur, la monnaie, la gestion quilibre, le prixde revient, la journe-travail, etc.

    La mthode de Marx consiste s'lever progressivement des catgories conomiques les plus simplesaux plus complexes, ce qui correspond au mouvement ascendant de la socit voluant des formesinfrieures aux formes suprieures. Dans cette tude des catgories de l'conomie politique, larecherche logique se double d'une analyse historique du dveloppement social.

    Marx, analysant les rapports de production capitalistes, commence par dgager le rapport gnral leplus simple et le plus frquent : l'change d'une marchandise contre une autre. Il montre dans lamarchandise, cellule de l'conomie capitaliste, le germe des contradictions du capitalisme. Partant del'analyse de la marchandise, il explique l'apparition de la monnaie, retrace, le processus de latransformation de l'argent en capital, dvoile l'essence de l'exploitation capitaliste. Il montre commentle dveloppement social conduit inluctablement la chute du capitalisme, la victoire ducommunisme.

    Lnine a indiqu que l'expos de l'conomie politique devait caractriser les priodes successives dudveloppement conomique. Aussi le prsent cours examine-t-il les principales catgories del'conomie politique marchandise, valeur, monnaie, capital, etc. dans l'ordre historique o ellessont apparues aux diffrents stades de l'volution de la socit humaine. C'est ainsi qu'on trouveradj des notions lmentaires sur la marchandise et la monnaie dans les chapitres consacrs auxformations prcapitalistes. Mais ces catgories sont examines plus fond dans la partie o esttudie l'conomie capitaliste volue, o elles atteignent leur plein dveloppement. Le mme ordred'exposition est suivi pour l'conomie socialiste. Dans la partie consacre la priode de transitiondu capitalisme au socialisme, il est donn une notion lmentaire de la loi conomique fondamentaledu socialisme, de la loi du dveloppement harmonieux, proportionn de l'conomie nationale, de larpartition selon le travail, de la valeur, de la monnaie, etc. Mais l'tude complte de ces lois et de cescatgories est aborde dans la partie consacre au Systme socialiste d'conomie nationale .

    L'conomie politique, la diffrence de l'histoire, ne se propose nullement d'tudier l'histoire dudveloppement de la socit dans toute sa diversit concrte. Elle donne des notions fondamentales

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    sur les traits essentiels de chaque systme d'conomie sociale. A ct de l'conomie politique, il existed'autres disciplines scientifiques qui tudient les rapports conomiques dans les branchesparticulires de l'conomie nationale, sur la base des lois dcouvertes par l'conomie politique :l'conomie de l'industrie, l'conomie de l'agriculture, etc.

    L'conomie politique s'occupe non de problmes nbuleux, dtachs de la vie, mais de problmes relset brlants s'il en est, qui affectent les intrts vitaux des hommes, de la socit, des classes. La chutedu capitalisme et la victoire du systme socialiste d'conomie sont-elles invitables ? Les intrts ducapitalisme sont-ils en contradiction avec ceux de la socit et du progrs humain ? La classeouvrire est-elle le fossoyeur du capitalisme ? Est-elle appele librer la socit du capitalisme ? Atoutes ces questions et d'autres questions semblables les conomistes donnent des rponsesdiffrentes selon les intrts des classes dont ils se font les interprtes. On s'explique ainsi qu'iln'existe pas l'heure actuelle une conomie politique commune toutes les classes de la socit, maisqu'il en existe plusieurs : l'conomie politique bourgeoise, l'conomie politique proltarienne, et enfincelle des classes intermdiaires, l'conomie politique petite-bourgeoise.

    Il est donc absolument faux de prtendre, comme certains conomistes, que l'conomie politique estune science neutre, qu'elle n'est pas une science de parti, qu'elle est indpendante de la lutte desclasses sociales et sans aucune attache, directe ou indirecte, avec un parti politique quelconque.

    Peut-il exister une conomie politique objective, impartiale, qui ne craint pas la vrit ? Sans aucundoute. Ce ne peut tre que celle de la classe qui n'a pas intrt dissimuler les contradictions et lesplaies du capitalisme, voir se perptuer l'ordre capitaliste, de la classe dont les intrts seconfondent avec ceux de l'affranchissement de la socit asservie par le capitalisme, de la classe dontles intrts sont aussi ceux du progrs humain. Cette classe, c'est la classe ouvrire. Aussi seule uneconomie politique qui dfend les intrts de la classe ouvrire peut-elle tre objective etdsintresse. Cette conomie politique est celle du marxisme-lninisme.

    L'conomie politique marxiste est un lment essentiel de la thorie marxiste-lniniste. Les grandsdirigeants et thoriciens de la classe ouvrire, Karl Marx et Friedrich Engels, ont t les fondateursde l'conomie politique proltarienne. Dans son ouvrage gnial, Le Capital, Marx a mis en lumire leslois qui rgissent la naissance, le dveloppement et la chute du capitalisme ; il a apport ladmonstration conomique de la ncessit de la rvolution socialiste et de l'tablissement de ladictature du proltariat Marx et Engels ont formul dans ses grandes lignes la thorie de la priodede transition du capitalisme au socialisme et des deux phases de la socit communiste.

    La doctrine conomique du marxisme a t dveloppe dans les ouvrages de Lnine, fondateur duParti communiste et de l'Etat sovitique et gnial continuateur de l'uvre de Marx et d'Engels. Lninea enrichi la science conomique marxiste d'une synthse de l'exprience acquise dans les conditionsnouvelles du dveloppement historique en crant la thorie marxiste de l'imprialisme; il a montr lanature conomique et politique de l'imprialisme et fourni les premiers lments de la loi conomiquefondamentale du capitalisme moderne; il a labor dans ses grandes lignes la thorie de la crisegnrale du capitalisme; il est l'auteur d'une thorie nouvelle, acheve, de la rvolution socialiste; il adonn une solution scientifique aux principaux problmes de l'dification du socialisme et ducommunisme. S'appuyant sur les ouvrages fondamentaux de Marx, Engels et Lnine, qui ont cr uneconomie politique rellement scientifique, Staline, le grand compagnon d'armes et le disciple deLnine, a formul et dvelopp un certain nombre de thses nouvelles. Les dcisions du Particommuniste de l'Union sovitique et des partis communistes frres, les travaux des compagnonsd'armes et des disciples de Lnine et de Staline, dirigeants de ces partis, ne cessent d'enrichir lathorie conomique marxiste-lniniste de dductions et de thses nouvelles en partant de la synthsede la pratique de la lutte rvolutionnaire et de l'dification du socialisme et du communisme.

    L'conomie politique marxiste-lniniste est une arme idologique puissante entre les mains de laclasse ouvrire et de toute l'humanit laborieuse qui luttent pour s'affranchir de l'oppressioncapitaliste. Ce qui fait la force et la vitalit de la thorie conomique du marxisme-lninisme, c'estqu'elle arme la classe ouvrire et les masses laborieuses de la connaissance des lois du dveloppementconomique de la socit, qu'elle leur donne de claires perspectives et la certitude de la victoiredfinitive du communisme.

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    PREMIRE PARTIE :LES MODES DE PRODUCTION PRCAPITALISTES

    CHAPITRE I LE MODE DE PRODUCTION DE LA COMMUNAUTEPRIMITIVE

    L'apparition de la socit humaine.L'homme est apparu au dbut de la priode actuelle de l'histoire de la Terre, dite priode quaternaire,qui compte selon les savants un peu moins d'un million d'annes. Dans diffrentes rgions d'Europe,d'Asie et d'Afrique au climat chaud et humide vivait une espce trs volue de singes anthropo-morphes dont l'homme est descendu la suite d'une longue volution qui passe par toute une srie destades intermdiaires.

    L'apparition de l'homme a marqu un tournant dcisif dans le dveloppement de la nature. Ce tournants'est opr lorsque les anctres de l'homme se sont mis confectionner des instruments de travail.L'homme commence se distinguer foncirement de l'animal au moment o il se met fabriquer desinstruments, aussi simples soient-ils. On sait que les singes se servent souvent d'un bton ou d'unepierre pour abattre les fruits de l'arbre ou se dfendre quand ils sont attaqus. Mais jamais aucunanimal n'a confectionn mme l'outil le plus primitif. Les conditions d'existence incitaient les anctresde l'homme fabriquer des instruments. L'exprience leur suggra qu'ils pouvaient utiliser des pierresaiguises pour se dfendre en cas d'attaque ou pour chasser. Ils se mirent confectionner des outils depierre en frappant une pierre contre une autre. Ceci marque le dbut de la fabrication des outils. Etc'est par la fabrication des outils que le travail a commenc.

    Grce au travail, les extrmits des membres antrieurs du singe anthropomorphe sont devenues lesmains de l'homme, ainsi qu'en tmoignent les restes du pithcanthrope (tre intermdiaire entre lesinge et l'homme) trouvs par les archologues. Le cerveau du pithcanthrope tait beaucoup moinsdvelopp que celui de l'homme, mais dj sa main se distinguait relativement peu de la mainhumaine. La main est donc l'organe, mais aussi le produit du travail. A mesure que les mains sedchargeaient de tout emploi autre que le travail, les anctres de l'homme s'habituaient de plus en plus la station verticale. Quand les mains furent prises par le travail, s'accomplit le passage dfinitif lastation verticale, ce qui joua un rle trs important dans la formation de l'homme.

    Les anctres de l'homme vivaient en hordes, en troupeaux; les premiers hommes aussi. Mais entre leshommes un lien tait apparu, qui n'existait pas, et ne pouvait pas exister, dans le rgne animal ; ce lien,c'tait le travail. C'est en commun que les hommes fabriquaient des outils, en commun qu'ils les met-taient en uvre. Par consquent, l'apparition de l'homme a aussi marqu le dbut de la socithumaine, le passage de l'tat zoologique l'tat social.

    Le travail en commun a entran l'apparition et le dveloppement du langage articul. Le langage estun moyen, un instrument l'aide duquel les hommes communiquent entre eux, changent leurs ideset parviennent se faire comprendre. L'change des ides est une ncessit constante et vitale ; sanselle les hommes ne pourraient se concerter pour lutter ensemble contre les forces de la nature, laproduction sociale elle-mme ne pourrait exister.

    Le travail et le langage articul ont exerc une influence dterminante sur le perfectionnement del'organisme de l'homme, sur le dveloppement de son cerveau. Les progrs du langage sonttroitement solidaires des progrs de la pense. Dans le processus du travail, l'homme tendait lechamp de ses perceptions et de ses reprsentations, il perfectionnait ses organes des sens. A ladiffrence des actes instinctifs des animaux, les actes de l'homme au travail prirent peu peu uncaractre conscient. Ainsi, le travail est

    la condition fondamentale premire de toute vie humaine, et il l'est un point tel que, dans uncertain sens, il nous faut dire : le travail a cr l'homme lui-mme. (F. Engels : Le rle du travail

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    dans la transformation du singe en homme , Dialectique de la nature, p. 171, Editions Sociales,Paris, 1952.)

    C'est grce au travail que la socit humaine est ne et qu'elle a commenc se dvelopper.

    Les conditions de la vie matrielle dans la socit primitive. Le perfectionnement desinstruments de travail.

    L'homme primitif dpendait dans une trs large mesure de la nature environnante ; il taitcompltement cras par les difficults de l'existence, de la lutte contre la nature. Ce n'est qu'avec uneextrme lenteur qu'il est parvenu dompter les forces de la nature, par suite du caractre rudimentairede ses instruments de travail. Une pierre grossirement taille et un bton ont t ses premiers outils.Ils continuaient en quelque sorte artificiellement les organes de son corps, la pierre prolongeant lepoing et le bton le bras tendu. Les hommes vivaient en groupes comptant au plus quelques dizainesde membres : un nombre plus lev d'individus n'aurait pu trouver se nourrir ensemble. Quand deuxgroupes se rencontraient, des conflits clataient parfois entre eux. Beaucoup de ces groupes mouraientde faim ou devenaient la proie des btes froces. Aussi le travail en commun tait-il pour les hommesla seule possibilit et une ncessit absolue.

    Longtemps l'homme primitif a surtout vcu de la cueillette et de la chasse effectues collectivement l'aide des instruments les plus simples. Les fruits du travail en commun taient de mme consommsen commun. La prcarit de la nourriture explique l'existence chez les hommes primitifs ducannibalisme. Au cours des millnaires, les hommes ont appris en quelque sorte ttons, par uneexprience trs lentement accumule, fabriquer les instruments les plus simples, propres frapper, couper, creuser et excuter les autres actions peu compliques auxquelles se rduisait alors presquetoute la production.

    La dcouverte du feu a t une grande conqute de l'homme primitif en lutte contre la nature. Il ad'abord appris se servir du feu allum fortuitement : il voyait la foudre enflammer un arbre, ilobservait les incendies de fort et les ruptions des volcans. Le feu obtenu par hasard tait longuementet soigneusement entretenu. Ce n'est qu'aprs des millnaires que l'homme pera le secret de laproduction du feu. A un stade plus avanc de la fabrication des instruments, il nota que le feus'obtenait par le frottement, et il apprit le produire.

    La dcouverte et l'usage du feu permirent aux hommes de dominer certaines forces de la nature.L'homme primitif se dtacha dfinitivement du rgne animal; la longue priode de la formation del'homme avait pris fin. La dcouverte du feu modifia profondment les conditions de sa vie matrielle.D'abord, le feu lui servit prparer les aliments et en augmenter ainsi le nombre : il put dsormais senourrir de poisson, de viande, de racines et de tubercules fculents, etc., en les taisant cuire. Ensuite, lefeu commena jouer un rle important dans la fabrication des instruments de production ; d'autre partil protgeait du froid, ce qui permit aux hommes de se rpandre sur une partie plus tendue du globe.Enfin, il permettait de mieux se dfendre contre les btes froces.

    Longtemps la chasse resta la principale source de moyens d'existence. Elle procurait aux hommes lespeaux dont ils se vtaient, les os dont ils faisaient des outils, une nourriture carne qui influa sur ledveloppement ultrieur de l'organisme humain, et surtout du cerveau. A mesure qu'il se dveloppaitphysiquement et intellectuellement, l'homme devenait capable de produire des instruments de plus enplus perfectionns. Il se servait pour chasser d'un bton bout aiguis. Puis il fixa ce bton unepointe de pierre. Il eut ensuite des lances pointe de pierre, des haches, des rcloirs, des couteaux, desharpons et des crochets de pierre, instruments qui permirent de chasser le gros gibier et de dvelopperla pche.

    La pierre est reste trs longtemps la principale matire dont on faisait les outils. On a donn le nomd'ge de la pierre l'poque o prdominent les instruments de pierre, et qui s'tend sur des centainesde milliers d'annes. Plus tard l'homme apprit fabriquer des outils en mtal, en mtal natif pourcommencer, et d'abord en cuivre (mais le cuivre, mtal mou, ne pouvait tre largement utilis pour lafabrication d'outils), puis en bronze (alliage de cuivre et d'tain) et ensuite en fer. A l'ge de la pierresuccde l'ge du bronze, puis l'ge du fer.

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    Les traces les plus anciennes de la fonte du cuivre remontent, dans l'Asie antrieure, aux Ve-IVe millnairesavant notre re ; dans l'Europe mridionale et centrale, aux IIIe-IIe millnaires. Les premiers vestiges du bronzedatent en Msopotamie du IVe millnaire avant notre re. Les traces les plus anciennes de la fonte du fer ont tdcouvertes en Egypte et en Msopotamie et se situent 2.000 ans avant notre re. En Europe occidentale, l'ge dufer commence environ 1.000 ans avant notre re.

    L'invention de l'arc et des flches marqua une importante tape dans l'histoire du perfectionnement desinstruments de travail. Dsormais la chasse fournit en quantits accrues les moyens d'existenceindispensables. Les progrs de la chasse donnrent naissance l'levage primitif. Les chasseurs semirent domestiquer les animaux : le chien d'abord, puis la chvre, les bovids, le porc et le cheval.

    L'agriculture primitive constitua un nouveau progrs considrable dans le dveloppement des forcesproductives de la socit. En rcoltant les fruits et les racines, les hommes primitifs avaient remarqudes milliers de fois, sans comprendre pourquoi, que les graines tombes terre se mettaient germer.Mais un jour arriva o leur esprit tablit un rapport entre ces faits, et ils commencrent cultiver lesplantes. Ce fut le dbut de l'agriculture. Longtemps les procds de culture restrent des plus primitifs.On ameublissait le sol au moyen d'un simple bton, et plus tard, d'un bton bout recourb : la houe.Dans les valles des cours d'eau, on jetait les semences sur le limon dpos par les crues. Ladomestication des animaux permit d'utiliser le btail comme force de trait. Par la suite, quand leshommes apprirent fondre les mtaux, l'emploi d'outils en mtal rendit le travail agricole plusproductif. L'agriculture reut une base plus solide. Les tribus primitives devinrent progressivementsdentaires.

    Les rapports de production dans la socit primitive. La division naturelle du travail.

    Les rapports de production sont dtermins par le caractre, l'tat des forces productives. Dans lacommunaut primitive, la proprit commune des moyens de production constitue la base des rapportsde production. La proprit commune correspond alors au caractre des forces productives, lesinstruments de travail tant trop primitifs pour permettre aux hommes de lutter isolment contre lesforces de la nature et les btes froces.

    Ce type primitif de la production collective ou cooprative, crit Marx, fut, bien entendu, lersultat de la faiblesse de l'individu isol, et non de la socialisation des moyens de production.(Brouillon d'une lettre de Marx Vra Zassoulitch : K. Marx et F. Engels : uvres, t. XXVII, p.681 (d. russe).)

    D'o la ncessit du travail collectif, de la proprit commune de la terre et des autres moyens deproduction, ainsi que des produits du travail. Les hommes primitifs n'avaient pas la notion de laproprit prive des moyens de production. Seuls quelques instruments de production, quiconstituaient en mme temps des moyens de dfense contre les btes froces, taient leur propritindividuelle et taient utiliss par certains membres de la communaut.

    Le travail de l'homme primitif ne crait aucun excdent par rapport au strict ncessaire, autrement ditaucun produit supplmentaire ou surproduit. Il ne pouvait donc exister ni classes ni exploitation del'homme par l'homme. La proprit sociale ne s'tendait qu' de petites communauts plus ou moinsisoles les unes des autres. Ainsi que l'a fait observer Lnine, le caractre social de la productionn'englobait que les membres d'une mme communaut. Le travail, dans la socit primitive, reposaitsur la coopration simple. La coopration simple, c'est l'emploi simultan d'une quantit plus ou moinsgrande de force de travail pour excuter des travaux du mme genre. La coopration simple permettaitdj aux hommes primitifs de s'acquitter de tches qu'il aurait t impossible un homme seuld'accomplir (par exemple, la chasse aux grands fauves).

    Le niveau extrmement bas des forces productives imposait la division d'une maigre nourriture enparts gales. Toute autre mthode de partage tait impossible, les produits du travail suffisant peine satisfaire les besoins les plus pressants : si un membre de la communaut avait reu une partsuprieure celle de chacun, un autre aurait t condamn mourir de faim. Ainsi la rpartitiongalitaire des produits du travail commun tait une ncessit.L'habitude de tout diviser en parts gales tait profondment ancre chez les peuples primitifs. Les voyageurs quiont sjourn dans les tribus se trouvant encore un stade infrieur du dveloppement social ont pu le constater. Ily a plus d'un sicle le grand naturaliste Darwin, accomplissant un voyage autour du monde, rapportait le fait

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    suivant : on avait fait cadeau d'un morceau de toile des indignes de la Terre de Feu ; ils le dchirrent enparties absolument gales pour que chacun en et autant.

    La loi conomique fondamentale du rgime de la communaut primitive consiste assurer auxhommes les moyens d'existence ncessaires l'aide d'instruments de production primitifs, sur la basede la proprit communautaire des moyens de production, par le travail collectif et par la rpartitiongalitaire des produits. Le dveloppement des instruments de production entrane la division du travaildont la forme la plus simple est la division naturelle du travail d'aprs le sexe et l'ge : entre leshommes et les femmes, entre les adultes, les enfants et les vieillards.Le clbre explorateur russe Mikloukho-Makla, qui a tudi la vie des Papous de la Nouvelle-Guine dans laseconde moiti du XIXe sicle, dcrit ainsi le travail collectif dans l'agriculture. Quelques hommes alignsenfoncent profondment des btons pointus dans le sol, puis d'un seul coup soulvent un bloc de terre. Derrireeux, des femmes s'avancent genoux et miettent l'aide de btons la terre retourne par les hommes. Viennentensuite les enfants de tout ge qui triturent la terre avec leurs mains. Quand le sol a t ameubli, les femmespratiquent des trous l'aide de btonnets et y enfouissent les graines ou les racines des plantes. Le travail a doncun caractre collectif et est divis d'aprs le sexe et l'ge.

    Avec le dveloppement des forces productives, la division naturelle du travail s'affermit et se stabilise.La chasse est devenue la spcialit des hommes, la rcolte des aliments vgtaux et le mnage celledes femmes, d'o un certain accroissement de la productivit du travail. Le rgime de la gens [Nom latin de la communaut runissant des membres unis par les liens du sang. Au pluriel : gentes ; de l l'adjectif : gentilice. (N.T.)]. Le droit maternel. Le droit paternel. Tant que l'humanit nes'tait pas entirement dtache du rgne animal, les hommes vivaient en troupeaux, en hordes,comme leurs anctres immdiats. Par la suite, quand une conomie primitive se fut constitue et que lapopulation eut augment peu peu, la socit s'organisa en gnies .

    Seuls des hommes unis par les liens du sang pouvaient, cette poque, se grouper pour travaillerensemble. Le caractre primitif des instruments de production ne permettait au travail collectif des'exercer que dans le cadre restreint d'un groupe d'individus lis entre eux par la consanguinit et la vieen commun. L'homme primitif considrait d'ordinaire comme un ennemi quiconque n'tait pas li luipar la parent consanguine et la vie en commun au sein de la gens. La gens s'est d'abord compose dequelques dizaines d'individus unis par les liens du sang. Chacune de ces gentes vivait replie sur elle-mme. Avec le temps, l'effectif du groupe augmenta et atteignit plusieurs centaines d'individus ;l'habitude de la vie en commun se dveloppa ; les avantages du travail collectif incitrent de plus enplus les hommes rester ensemble.Morgan qui a tudi la vie des primitifs, dcrit le rgime gentilice encore en vigueur chez les Indiens Iroquois aumilieu du sicle dernier. Les principales occupations des Iroquois taient la chasse, la pche, la cueillette desfruits et la culture. Le travail tait divis entre les hommes et les femmes. La chasse et la pche, la fabricationdes armes et des outils, le dfrichement, la construction des cases et les travaux de fortification taient le lot deshommes. Les femmes s'acquittaient des principaux travaux des champs, levaient et rentraient la rcolte, cuisaientla nourriture, confectionnaient les vtements et les ustensiles d'argile, cueillaient les fruits sauvages, les baies etles noisettes, rcoltaient les tubercules. La terre tait la proprit de la gens. Les gros travaux : coupe du bois,essouchage, grandes chasses, taient excuts en commun. Les Iroquois vivaient dans ce qu'ils appelaient de grandes maisons pouvant abriter vingt familles et plus. Chaque groupe de ce genre avait ses entreptscommuns o taient dposes les provisions. La femme qui se trouvait la tte du groupe distribuait lanourriture entre les familles. En cas de guerre, la gens lisait un chef militaire qui ne bnficiait d'aucun avantagematriel et dont le pouvoir prenait fin en mme temps que les hostilits.

    Au premier stade du rgime gentilice, la femme occupait une situation prpondrante, ce qui dcoulaitdes conditions de la vie matrielle d'alors. La chasse l'aide d'instruments des plus primitifs, qui taitalors l'affaire des hommes ne pouvait assurer entirement l'existence de la communaut, ses rsultatstant plus ou moins alatoires. Dans ces conditions, les formes mme embryonnaires de la culture dusol et de l'levage (domestication des animaux) acquraient une grande importance conomique. Ellestaient une source de subsistance plus sre et plus rgulire que la chasse. Or, la culture et l'levageprimitifs taient surtout le lot des femmes restes au foyer pendant que les hommes allaient lachasse. La femme joua pendant une longue priode le rle prpondrant dans la socit gentilice. C'estpar la mre que s'tablissait la filiation. C'tait la gens matriarcale, la prdominance du droit maternel.

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    Avec le dveloppement des forces productives, quand l'levage nomade (pturage) et l'agriculture plusvolue (culture des crales), qui taient l'affaire des hommes, commencrent jouer un rledterminant dans la vie de la communaut primitive, la gens matriarcale fut remplace par la genspatriarcale. La prpondrance passa l'homme qui prit la tte de la communaut. C'est par le pre ques'tablit dsormais la filiation. La gens patriarcale a exist au dernier stade de la communautprimitive.

    L'absence de proprit prive, de division en classes et d'exploitation de l'homme par l'homme rendaitimpossible l'existence de l'Etat.

    Dans la socit primitive,... on ne trouve pas encore de traces de l'existence de l'Etat. Nous yvoyons la domination des usages, l'autorit, le respect, le pouvoir dont jouissaient les chefs duclan; nous voyons que ce pouvoir tait reconnu parfois aux femmes la situation de la femme neressemblait pas alors celle qu'elle occupe aujourd'hui, prive de tous droits et opprime mais cette poque nous ne voyons nulle part d'hommes levs un rang spcial et se distinguant desautres pour les gouverner et qui systmatiquement, continuellement dans les intrts et les buts dugouvernement, possdaient un appareil de contrainte, un appareil de violence. (V. LENINE : Del'Etat , L'Etat et la rvolution, pp. 112-113. Editions Sociales, 1947.)

    Les dbuts de la division sociale du travail et de l'change.

    Avec le passage l'levage et la culture du sol apparut la division sociale du travail : diversescommunauts, puis les diffrents membres d'une mme communaut commencrent exercer desactivits productrices distinctes. La formation de tribus de pasteurs a marqu la premire grandedivision sociale du travail. En se livrant l'levage, les tribus de pasteurs ralisrent d'importantsprogrs. Elles apprirent soigner le btail de manire obtenir plus de viande, de laine, de lait. Cettepremire grande division sociale du travail entrana elle seule une lvation sensible pour l'poque dela productivit du travail.

    Toute base d'change fit longtemps dfaut entre les membres de la communaut primitive : le produittait tout entier cr et consomm en commun. L'change naquit et se dveloppa d'abord entre lesgentes et garda durant une longue priode un caractre accidentel. La premire grande division socialedu travail modifia cette situation. Les tribus de pasteurs disposaient de certains excdents de btail, deproduits laitiers, de viande, de peaux, de laine. Mais elles avaient aussi besoin de produits agricoles. Aleur tour, les tribus qui cultivaient le sol ralisrent avec le temps des progrs dans la production desdenres agricoles. Agriculteurs et pasteurs avaient besoin d'objets qu'ils ne pouvaient produire dansleur propre exploitation. D'o le dveloppement des changes.

    A ct de l'agriculture et de l'levage, d'autres activits productrices prenaient leur essor. Les hommesavaient appris fabriquer des rcipients en argile ds l'ge de la pierre. Puis apparut le tissage lamain. Enfin, avec la fonte du fer, il fut possible de fabriquer en mtal des instruments de travail (araire soc de fer, hache de fer) et des armes (pes de fer). Il s'avrait de plus en plus difficile de cumulerces formes de travail avec la culture ou l'levage. Peu peu se constitua au sein de la communaut unecatgorie d'hommes exerant des mtiers. Les articles produits par les artisans : forgerons, armuriers,potiers, etc., devenaient de plus en plus des objets d'change. Les changes prirent de l'extension.

    L'apparition de la proprit prive et des classes. La dsagrgation de la communaut primitive.

    Le rgime de la communaut primitive atteignit son apoge l'poque du droit maternel; la genspatriarcale renfermait dj les germes de la dsagrgation de la communaut primitive. Les rapports deproduction, dans la communaut primitive, correspondirent jusqu' une certaine poque au niveau dedveloppement des forces productives. Il n'en fut plus de mme au dernier stade de la gens patriarcale,aprs l'apparition d'outils plus perfectionns (ge du fer). Le cadre trop troit de la proprit commune,la rpartition galitaire des produits du travail commencrent freiner le dveloppement des nouvellesforces productives.

    Jusque l, l'effort collectif de quelques dizaines d'individus permettait seul de cultiver un champ. Dansces conditions, le travail en commun tait une ncessit. Avec le perfectionnement des instruments deproduction et l'lvation de la productivit du travail, une famille elle seule tait dj capable decultiver un terrain et de s'assurer les moyens d'existence dont elle avait besoin. L'amlioration de

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    l'outillage permit donc de passer l'exploitation individuelle, plus productive dans les nouvellesconditions historiques. La ncessit du travail en commun, de l'conomie communautaire se faisait demoins en moins sentir. Si le travail en commun entranait ncessairement la proprit commune desmoyens de production, le travail individuel requrait la proprit prive.

    L'apparition de la proprit prive est insparable de la division sociale du travail et du progrs deschanges. Ceux-ci se firent au dbut par l'entremise des chefs des communauts gentilices (anciens,patriarches) au nom de la communaut qu'ils reprsentaient. Ce qu'ils changeaient appartenait lacommunaut. Mais avec le dveloppement de la division sociale du travail et l'extension des changes,les chefs des gentes en vinrent peu peu considrer le bien de la communaut comme leur proprit.

    Le principal article d'change fut d'abord le btail. Les communauts de pasteurs possdaient degrands troupeaux de moutons, de chvres, de bovins. Les anciens et les patriarches, qui jouissaientdj d'un pouvoir tendu dans la socit, s'habiturent disposer de ces troupeaux comme s'ils taient eux. Leur droit effectif de disposer des troupeaux tait reconnu par les autres membres de lacommunaut. De la sorte le btail, puis peu peu tous les instruments de production devinrentproprit prive. C'est la proprit commune du sol qui se maintint le plus longtemps.

    Le dveloppement des forces productives et la naissance de la proprit prive entrana ladsagrgation de la gens. Celle-ci se dcomposa en un certain nombre de grandes familles patriarcales.Du sein de ces dernires se dgagrent par la suite certaines cellules familiales qui firent desinstruments de production, des ustensiles de mnage et du btail leur proprit prive. Avec lesprogrs de la proprit prive les liens de la gens se relchaient. La communaut rurale, ou territoriale,se substitua la gens. A la diffrence de celle-ci, elle se composait d'individus qui n'taient pasforcment lis par la consanguinit. L'habitation, l'exploitation domestique, le btail taient laproprit prive de chaque famille. Les forts, les prairies, les eaux et d'autres biens restrent propritcommune, de mme que, pendant une certaine priode, les terres arables. Celles-ci, d'abordpriodiquement redistribues entre les membres de la communaut, devinrent leur tour propritprive.

    L'apparition de la proprit prive et de l'change marqua le dbut d'un bouleversement profond detoute la structure de la socit primitive. Les progrs de la proprit prive et de l'ingalit des biensdterminrent chez les divers groupes de la communaut des intrts diffrents. Les individus quiexeraient les fonctions d'anciens, de chefs militaires, de prtres mirent leur situation profit pours'enrichir. Ils s'approprirent une partie considrable de la proprit commune. Les hommes quiavaient t investis de ces fonctions sociales, se dtachaient de plus en plus de la grande masse desmembres et formaient une aristocratie dont le pouvoir se transmettait de plus en plus par hrdit. Lesfamilles aristocratiques devenaient aussi les plus riches, et la grande masse des membres de lacommunaut tombait peu peu, d'une manire ou d'une autre, sous leur dpendance conomique.

    Grce l'essor des forces productives, le travail de l'homme, dans l'levage et l'agriculture, lui procuraplus de moyens d'existence qu'il n'en fallait pour son entretien. Il devint possible de s'approprier lesurtravail ou travail supplmentaire et le surproduit ou produit supplmentaire, c'est--dire la partiedu travail et du produit qui excdait les besoins du producteur. Il tait donc profitable de ne pas mettre mort les prisonniers de guerre, comme auparavant, mais de les faire travailler, d'en faire des esclaves.Les esclaves taient accapars par les familles les plus puissantes et les plus riches. A son tour, letravail servile aggrava l'ingalit existante, car les exploitations utilisant des esclaves s'enrichissaientrapidement. Avec les progrs de l'ingalit des fortunes, les riches se mirent rduire en esclavage nonseulement les prisonniers de guerre, mais aussi les membres de leur propre tribu appauvris et endetts.Ainsi naquit la premire division de la socit en classes : la division en matres et en esclaves. Ce futle dbut de l'exploitation de l'homme par l'homme, c'est--dire de l'appropriation sans contre-partie parcertains individus des produits du travail d'autres individus.

    Peu peu les rapports de production propres au rgime de la communaut primitive se dsagrgeaientet taient remplacs par des rapports nouveaux, qui correspondaient au caractre des nouvelles forcesproductives. Le travail en commun fit place au travail individuel, la proprit sociale la propritprive, la socit gentilice la socit de classes. Dsormais l'histoire de l'humanit sera, jusqu'l'dification de la socit socialiste, l'histoire de la lutte des classes.

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    Les idologues de la bourgeoisie prtendent que la proprit prive a toujours exist. L'histoire dmentcette assertion ; elle atteste que tous les peuples ont pass par le stade de la communaut primitive, quiest fonde sur la proprit commune et ignore la proprit prive.

    Les reprsentations sociales l'poque primitive.A l'origine, l'homme primitif, accabl par le besoin et les difficults de la lutte pour l'existence, ne s'tait pasencore entirement dtach de la nature environnante. Il n'eut pendant longtemps aucune notion cohrente nide lui-mme, ni des conditions naturelles de son existence.

    Ce n'est que peu peu qu'apparaissent chez lui des reprsentations trs limites et primitives sur lui-mme et surles conditions de sa vie. Il ne pouvait encore tre question de conceptions religieuses, que les dfenseurs de lareligion prtendent inhrentes de toute ternit la conscience humaine. C'est seulement par la suite quel'homme primitif, incapable de comprendre et d'expliquer les phnomnes de la nature et de la vie sociale, se mit peupler le monde d'tres surnaturels, d'esprits, de forces magiques. Il animait les forces de la nature. C'est cequ'on a appel l'animisme (du latin animas : me). De ces notions confuses sur l'homme et la nature naquirent lesmythes primitifs et la religion primitive o l'on retrouvait l'galitarisme du rgime social. L'homme, qui ignoraitla division en classes et l'ingalit des fortunes dans la vie relle, ne hirarchisait pas non plus le mondeimaginaire des esprits. II divisait ceux-ci en esprits familiers et trangers, favorables et hostiles. Lahirarchisation des esprits date de l'poque de la dsagrgation de la communaut primitive.

    L'homme se sentait intimement li la gens ; il ne se concevait pas en dehors de celle-ci. Le culte des anctrescommuns tait le reflet idologique de cet tat de choses. Il est significatif que les mots moi et mon n'apparaissent qu'assez tard dans la langue. La gens exerait sur chacun de ses membres un pouvoirextraordinairement tendu. La dsagrgation de la communaut primitive s'accompagna de la naissance et de ladiffusion de notions centres sur la proprit prive, ce dont tmoignent loquemment les mythes et les idesreligieuses. A l'poque o s'tablirent les rapports de proprit prive et o l'ingalit des fortunes commena s'affirmer, on prit l'habitude dans de nombreuses tribus, de confrer un caractre sacr ( tabou ) aux biens ques'taient attribus les chefs des familles riches (dans les les du Pacifique le mot tabou s'applique tout ce quiest frapp d'interdiction, soustrait l'usage gnral). Avec la dsagrgation de la communaut primitive etl'apparition de la proprit prive, l'interdit religieux consacra les nouveaux rapports conomiques et l'ingalitdes fortunes.

    Rsum

    1. C'est grce au travail que les hommes se sont dgags du rgne animal et que la socithumaine a pu se constituer. Le travail humain est avant tout caractris par la confectiond'instruments de production.

    2. Les forces productives de la socit primitive se trouvaient un niveau extrmement bas, lesinstruments de production taient extrmement primitifs. D'o la ncessit du travail collectif, dela proprit sociale des moyens de production et de la rpartition galitaire. Sous le rgime de lacommunaut primitive, l'ingalit des fortunes, la proprit prive des moyens de production, lesclasses et l'exploitation de l'homme par l'homme taient inconnues. La proprit sociale desmoyens de production tait limite au cadre restreint de petites communauts plus oumoins isoles les unes des autres.

    3. La loi conomique fondamentale du rgime de la communaut primitive consiste assurer auxhommes les moyens d'existence ncessaires l'aide d'instruments de production primitifs,sur la base de la proprit communautaire des moyens de production, par le travail collectif et par larpartition galitaire des produits.

    4. Pendant longtemps les hommes, qui travaillaient en commun, accomplirent le mme genre detravail. L'amlioration progressive des instruments de production contribua l'tablissementde la division naturelle du travail selon le sexe et l'ge. Le perfectionnement ultrieur desinstruments de production et du mode d'obtention des moyens d'existence, le dveloppement del'levage et de l'agriculture firent apparatre la division sociale du travail et l'change, la propritprive et l'ingalit des fortunes, entranrent la division de la socit en classes et l'exploitation del'homme par l'homme. Ainsi, les forces productives accrues entrrent en conflit avec les rapports deproduction ; en consquence, le rgime de la communaut primitive fit place un autre type derapports de production, la socit esclavagiste.

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    CHAPITRE II - LE MODE DE PRODUCTION FOND SURL'ESCLAVAGE

    La naissance de l'esclavage.

    L'esclavage est, historiquement, la premire et la plus grossire forme d'exploitation. Il a exist chezpresque tous les peuples.Le passage du rgime de la communaut primitive celui de l'esclavage s'est d'abord produit dans les paysd'Orient. Le mode de production fond sur l'esclavage tait prpondrant en Msopotamie (Sumerie, Babylonie.Assyrie, etc.), en Egypte, dans l'Inde et en Chine du IVe au IIe millnaire avant notre re. Au Ier millnaire avantnotre re, il rgnait en Transcaucasie (Ourartou) ; depuis les VIIIe et VIIe sicles avant notre re jusqu'aux Ve etVIe sicles de notre re, il a exist au Khorezm un puissant Etat esclavagiste. La civilisation des pays de l'Orientantique, o rgnait l'esclavage, exera une influence considrable sur les peuples europens. En Grce, l'apogedu mode de production bas sur l'esclavage se situe aux Ve et IVe sicles avant notre re. Par la suite, l'esclavagese dveloppa en Asie mineure, en Egypte, en Macdoine (du IVe au Ier sicle avant notre re). Il atteignit sonplus haut degr de dveloppement Rome, du IIe sicle avant notre re au IIe sicle de notre re.

    L'esclavage revtit d'abord un caractre patriarcal, domestique. Les esclaves taient relativement peunombreux. Le travail servile ne constituait pas encore la base de la production et ne jouait qu'un rleauxiliaire dans l'conomie dont le but restait de subvenir aux besoins de la grande famille patriarcalequi n'avait presque pas recours aux changes. Le matre avait dj sur ses esclaves un pouvoir illimit,mais le champ d'application du travail servile restait limit.

    Le passage de la socit au rgime de l'esclavage s'explique par le progrs des forces productives, ledveloppement de la division sociale du travail et des changes. Le passage des outils de pierre auxoutils de mtal ouvrit au travail humain des domaines nouveaux. L'invention du soufflet de forgepermit de fabriquer des instruments de fer d'une solidit encore inconnue. La hache de fer renditpossible le dfrichement des terrains couverts de forts et de buissons et leur mise en culture; l'araire soc de fer permit de cultiver des superficies relativement tendues. L'conomie primitive fonde sur lachasse cda la place la culture et l'levage. Les mtiers firent leur apparition.

    Dans l'agriculture, qui restait la principale branche de la production, les procds de culture etd'levage s'amliorrent. De nouvelles plantes furent cultives : vigne, lin, plantes olagineuses, etc.Les troupeaux s'accrurent rapidement dans les familles riches. L'entretien du btail rclamait toujoursplus de bras. Le tissage, l'art de traiter les mtaux, la poterie et les autres mtiers se perfectionnrent.Le mtier, qui tait auparavant une occupation annexe pour le cultivateur et l'leveur, devint pourbeaucoup une activit autonome. Le mtier se dtacha de l'agriculture.

    Ce fut la deuxime grande division sociale du travail.

    Avec la division de la production en deux branches essentielles : l'agriculture et le mtier, apparat laproduction directe pour l'change, sous une forme encore peu dveloppe, il est vrai. L'lvation de laproductivit du travail augmenta la masse du surproduit, ce qui, en raison de l'existence de la propritprive des moyens de production, permit une minorit de la socit d'accumuler des richesses et,grce elles, d'assujettir la majorit laborieuse la minorit exploiteuse, de rduire les travailleurs enesclavage. Dans les conditions de l'esclavage, l'conomie tait avant tout une conomie naturelle. Onentend par conomie naturelle une conomie dans laquelle les fruits du travail ne font pas l'objetd'change et sont consomms dans l'exploitation mme. Mais en mme temps l'change sedveloppait. Les artisans produisirent d'abord sur commande, puis pour le march. Beaucoup, du reste,continurent longtemps encore cultiver de petits lopins de terre pour subvenir leurs besoins. Lespaysans, qui vivaient pour l'essentiel en conomie naturelle, se voyaient pourtant obligs de vendreune partie de leurs produits sur le march pour acheter des articles aux artisans et payer les impts.Ainsi une partie des produits du travail des artisans et des paysans se transforma peu peu enmarchandises.

    La marchandise est un produit fabriqu non pour tre directement consomm, mais pour tre chang,vendu sur le march. La production pour l'change caractrise l'conomie marchande. Ainsi, lasparation du mtier d'avec l'agriculture, l'apparition du mtier comme activit autonome marquaientla naissance de la production marchande.

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    Tant que l'change ne fut qu'occasionnel, on changeait directement un produit du travail contre unautre. Mais quand les changes prirent de l'extension et devinrent rguliers, une marchandise sedgagea peu peu, contre laquelle on changeait volontiers toute autre marchandise. C'est ainsiqu'apparut la monnaie. La monnaie est la marchandise universelle qui sert valuer toutes les autresmarchandises et joue le rle d'intermdiaire dans les changes.

    Le dveloppement du mtier et de l'change eut pour consquence la formation des villes.Celles-ci sont apparues ds la plus haute antiquit, l'aube du mode de production esclavagiste. Laville se distingua d'abord fort peu du village. Mais peu peu le mtier et le commerce s'yconcentrrent. Par le genre d'occupation de leurs habitants, par leur mode de vie, les villes sediffrencirent de plus en plus de la campagne. Ainsi commena la sparation de la ville et de lacampagne et se dessina leur opposition.

    A mesure que la masse des marchandises changer augmentait, les limites territoriales de l'changes'largissaient elles aussi. Des marchands apparurent qui, pour raliser un gain, achetaient lesmarchandises aux producteurs, les amenaient sur des marchs parfois assez loigns du lieu de laproduction, et les revendaient aux consommateurs.

    L'extension de la production et des changes accrut l'ingalit des fortunes. La monnaie, les animauxde tra