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ugiés et des personnes déplacées internes en Afrique de l’Ouest : Sénégal, Côte d’Ivoire et Libéria REPUBLIQUE DU SENEGAL Un Peuple Un But Un Foi Université Cheikh Anta Diop de Dakar INSTITUT DES DROITS DE L’HOMME ET DE LA PAIX * * IDHP * * La portée des mécanismes de protection des réfugiés et des personnes déplacées en Afrique de l’Ouest : cas de la Côte d’Ivoire, du Libéria et du Sénégal IDHP 3 ème Promotion Années universitaires 2007 - 2010 Sous la direction de : Mamadou BADJI Maître de Conférence agrégé des facultés de droit Présenté par : Yatma NIANG Mémoire de Master de Recherche en droits de l’Homme et Paix

Master 2 IDHP Recherche Droit de l'homme et paix Yatma NIANG 15 février 2010 corrigé après soutenance

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    REPUBLIQUE DU SENEGAL Un Peuple Un But Un Foi

    Universit Cheikh Anta Diop de Dakar

    INSTITUT DES DROITS DE LHOMME ET DE LA PAIX

    * * IDHP * *

    La porte des mcanismes de protection

    des rfugis et des personnes dplaces

    en Afrique de lOuest : cas de

    la Cte dIvoire, du Libria et du Sngal

    IDHP 3 m e

    Promotion

    Annes universitaires 2007 - 2010

    Sous la direction de :

    Mamadou BADJI Matre de Confrence agrg

    des facults de droit

    Prsent par :

    Yatma NIANG

    Mmoire de Master de Recherche

    en droits de lHomme et Paix

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    Luniversit nentend donner aucune

    approbation, ni improbation aux

    opinions mises dans ce mmoire ;

    elles doivent tre considres comme

    propre leur auteur.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page - 2 -

    Ce mmoire est ddi

    ma Grand-mre, une longue vie et sant

    Khady SAM NIANG

    aux membres de Sukyo Mahikary Afrique

    aux talibs de la Daara khidmatoul Khadim

    aux tudiants de Capacit en droit

    tous les membres de lamical des tudiants de lIDHP

    et de lassociation MAITRILEX

    la petite Julie et sa grand-mre

    Yacine HABIBAH Barakah Abdoulaahi et sa mre

    Shandaneeby Asha BALOOH

    Mamy NDIAYE Yaye Ndiogane

    Au Professeur

    Mamadou Badji Matre de Confrences agrg

    notre directeur de recherche

    FSJP - UCAD

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    Remerciements

    Aux professeurs de lenseignement technique

    Monsieur Mamadou MBOUP - ASAFIN

    Monsieur Moussa FAYE, Assane CISS

    Lyce Delafosse

    A tous les membres du rseau

    ADA - WARIPNET - RADDHO

    Mme Benedicte Voss - HCR

    Messieurs Sadikh NIASSA & M. Chabeau - WARIPNET

    Messieurs Abdoulaye SECK & Dame SALL

    Amnesty International

    Remerciements aux Matres de la

    Facult des Sciences des Sciences juridiques et politiques

    qui nous ont accompagns dans la passionnante aventure

    qui nous a ouvert les portes de la lumire

    Aux Professeurs

    Mamadou BADJI et Seydou NOUROU TALL

    Pr Amsatou SOW-SIDIBE

    Pr Ndiaw DIOUF

    Au Colonel Cheikh Tidiane DIOP

    Directeur des programmes de lIDHP

    ***

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page - 4 -

    Sommaire

    Introduction 1

    1re Partie UNE INSUFFISANTE PROTECTION DES DROITS DES

    REFUGIES PAR LA RECEPTION DES NORMES DE

    PROMOTION

    7

    Chap. 1er La protection normative interne 7

    Section 1 Les garanties constitutionnelles 7

    Section 2 Lencadrement lgislatif et rglementaire 13

    Chap. 2 Le dispositif institutionnel 18

    Parag.1 Les organes nationaux de reconnaissance des rfugis 18

    Parag.2 Linsuffisante protection par la reconnaissance 26

    2me Partie DE LINFLUENCE DES REGLES DE PROTECTION DES

    REFUGIES SUR LA SITUATION DES PERSONNES

    DEPLACEES

    41

    Chap. 1er Les critiques de la dfinition plurielle des PDI 41

    Section 1 Les personnes au dplacement programm 42

    Section 2 Le dplacement spontan dict par lurgence 48

    Chap. 2 La question de la soumission des PDI

    la condition des rfugis

    54

    Section 1 Linsuffisante protection des droits des rfugis et des PDI

    par le droit interne dualiste

    55

    Section 2 Le recours aux mcanismes de maintien de la paix 71

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page - 5 -

    Sigles et abrviations

    AJAC Association des Jeunesses agricoles de la Casamance

    CADHP Charte africaine des droits de lhomme et des peuples

    CADHP Charte africaine des droits de lhomme et des peuples

    CEDEAO Communaut conomique des Etats de lAfrique de louest

    CEDH Cour europenne des droits de lhomme

    CICR Comit international de la croix rouge

    CNAMS Centre national dAction antimines du Sngal

    CNE Commission nationale dligibilit au statut de rfugi au Sngal

    CPI Cour pnale internationale

    DIDH Droit international des droits de lhomme

    DIH Droit international humanitaire

    DSR Demandeur (s) de statut de rfugi / Demande de statut de rfugi

    HCR/UNHCR Haut-commissariat de l'ONU pour les Rfugis /

    United Nations High Commission for Refugees

    LRRRC Liberia Refugee Repatriation and Resettlement Commission / Commission

    librienne de rapatriement et de rinstallation des rfugis

    MFDC Mouvement des forces dmocratiques de la Casamance

    OIM Office international des migrations

    ONU Organisation des Nations Unies

    OUA/UA Organisation de lUnit Africaine / Union Africaine

    PARI Point dAccueil pour Rfugis et Immigrs de Caritas Sngal

    PDI Personnes dplaces lintrieur de leur propre territoire

    PIDCP Pacte international relatif aux droits civils

    et politique des Nations Unies de 1966

    PIDCP Pacte international relatif aux droits civils et politiques

    RCI Rpublique de Cte dIvoire

    SAARA Service dAssistance et dAide pour les rfugis

    et les Apatrides en Cte dIvoire

    UEMOA Union conomique et montaire de lAfrique de lOuest

    UNRWA U.N. Relief and Works Agency, Agence de Secours

    et d'Actions de l'ONU aux rfugis palestiniens

    WARIPNET West African Refugees and Internally displaced Persons Network

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    INTRODUCTION

    Si nous sommes lavenir et que nous sommes entrain de mourir, il ny a

    plus davenir . Tel est le cri de cur dun enfant soldat, pour marquer

    le dsarroi rsultant de son enrlement. Les enfants ne constituent pas

    les seules victimes ; dautres individus qui, tous fuyant les zones de

    conflits, nen restent pas moins des victimes, les rfugis et les

    personnes dplaces internes objet de cette tude.

    Trois instruments juridiques internationaux permettent de dfinir le

    rfugi : la Convention de lONU de 1951 et le protocole de 1967 relatif

    au statut des rfugis, la Convention de lOUA de 1969 rgissant les

    aspects propres aux problmes des rfugis en Afrique, ainsi que la

    Dclaration de Carthagne de 1984.

    Pour les textes de lONU, est considre comme rfugie toute personne

    qui, craignant avec raison dtre perscute du fait de sa race, de sa

    religion, de sa nationalit, de son appartenance un certain groupe

    social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la

    nationalit, et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut plus se

    rclamer de la protection de ce pays.

    La Convention de lOUA, en son article premier, largit cette dfinition

    et y inclus toute personne qui, du fait dune agression, dune occupation

    extrieure, dune domination trangre ou dun vnement troublant

    gravement lordre public dans une partie ou la totalit de son pays

    dorigine ou du pays dont elle a la nationalit, est oblige de quitter sa

    rsidence habituelle pour chercher refuge dans un autre endroit

    lextrieur de son pays dorigine ou du pays dont elle a la nationalit.

    Pour la Dclaration de Carthagne de 1984, la dfinition du concept de

    rfugi dont lapplication est recommander dans la rgion pourrait, non

    seulement englober les lments de la Convention de 1951 et du

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 2

    Protocole de 1967, mais aussi stendre aux personnes qui ont fui leurs

    pays parce que leur vie, leur scurit ou leur libert taient menaces par

    une violence gnralise, une agression trangre, des conflits internes,

    une violation massives des droits de lhomme ou dautres circonstances

    ayant perturb gravement lordre public.

    La dfinition des personnes dplaces est pose par les principes

    directeurs relatifs au dplacement des personnes lintrieur de leur

    propre pays de 19981. Les personnes dplaces l'intrieur de leur

    propre pays sont des personnes ou des groupes de personnes qui ont t

    forcs ou contraints fuir ou quitter leur foyer ou leur lieu de rsidence

    habituel, notamment en raison d'un conflit arm, de situations de

    violence gnralise, de violations des droits de l'homme ou de

    catastrophes naturelles ou provoques par l'homme ou pour en viter les

    effets, et qui n'ont pas franchi les frontires internationalement reconnues

    d'un Etat . Cette dfinition est reprise par larticle 1(k) de la Convention

    de lUnion Africaine sur la protection et lassistance aux personnes

    dplaces en Afrique adopte le 22 octobre Kampala (Ouganda)

    appele Convention de Kampala 20092.

    Les rfugis se distinguent des personnes dplaces internes par le fait

    que ces derniers nont pas franchi la frontire de leur propre Etat pour

    chercher asile ailleurs. Dautres mouvements de population,

    notamment les migrations internes, les migrations internationales et le

    tourisme qui est une migration de plaisance ne sont pas ngligeables.

    La migration est dfinie comme un transfert passager ou durable du

    lieu de vie au-del des frontires. Son processus comporte plusieurs

    phases, entre la dcision de dpart, le transit, larrive et lintgration

    1 Principes directeurs relatifs au dplacement de personnes l'intrieur de leur propre pays, Extrait du

    document E/CN.4/1998/53/Add.2, fvrier 1998.

    2 Convention de lUnion Africaine sur la protection et lassistance aux personnes dplaces en Afrique

    (Convention de Kampala) du 22 octobre 2009 ; Voy. Annexe 2.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 3

    dans le nouveau pays ou le retour au lieu dorigine3. Lattrait des pays

    riches est favoris par les disparits conomiques lorigine des

    migrations internationales, et la disparit rgionale dans un pays peut

    crer un mouvement interne, les migrations internes, fond sur les

    mmes motivations.

    Les migrants continus de relever de la protection de leur Etat par

    lintermdiaire des missions diplomatiques et suivant les rgles dfinies

    par le droit international public. La protection des rfugis et des

    personnes dplaces incombent des institutions spcialises tel que

    dfini par le droit international des droits de lHomme (DIDH) et le droit

    international humanitaire (DIH).

    La distinction entre la migration, dune part, et la notion de rfugis et

    de personnes dplaces, dautre part, tient aux difficults conomiques

    dans le pays dorigine qui ne sont pas encore retenues par les

    instruments internationaux comme un motif de perscution fond. La

    doctrine du droit international considre quil est trop tt pour se

    prononcer sur la question de lassimilation des migrants conomiques

    des rfugis du fait du dplacement volontaire et de labsence de

    reconnaissance juridique du motif conomique comme une

    perscution4.

    La perscution nest pas seulement dfinie comme une motivation du

    dpart forc. Des personnes parties volontairement comme migrants

    peuvent ne plus se rclamer de la protection de leur Etat par suite

    3 Minh NGUYEN, Droit public des trangers, Prsence activit conomique et statut politique, Staempfli

    Editions SA Berne 2003, p.21.

    4 Le Professeur J. Ziegler dfend la thse contraire et milite en faveur de lextension de la protection en admettent

    les rfugis de la faim , la faim comme motif de perscution. Pour Didier AWADI, Il ne faut pas se leurrer,

    si tant de jeunes bravent la mort pour quitter le pays, ce nest pas parce quils sont persuads que le paradis existe, quil sappelle Europe , et quil les attend les bras ouverts, mais cest aussi parce que chez eux, dans leur propre pays, la situation politique laisse malheureusement dsirer par Yasrine MOUAATARIF, Musique :

    Dakar contre limmigration de la honte, Jeune Afrique N2378 du 6 au 12 aot 2006, pp.76-77.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 4

    dvnements survenus dans leur pays dorigine : cest le cas des

    rfugis sur place.

    La mise en uvre du DIDH incombe, pour la protection des rfugis au

    HCR, alors que le DIH fait intervenir notamment le CICR qui soccupe

    de la protection des civils sans distinction aucune de leur statut ds

    lors que des besoins en assistance humanitaire sont ncessaires la

    sauvegarde de la dignit humaine et au rtablissement des droits.

    La protection entendue comme cadre juridique, activit concrte ou

    protection-assistance5, se fait par la mise en uvre des instruments de

    promotion des droits de lhomme et notamment par linstitution de

    mcanismes conventionnels.

    Les mcanismes conventionnels internationaux de protections des

    rfugis sont au nombre de deux. Dune part, le Haut-commissariat de

    l'ONU pour les Rfugis (U.N. High Commission for Refugees) organe de

    mise en uvre de la Convention de 1951 et l'Agence de Secours et

    d'Actions de l'ONU (U.N. Relief and Works Agency, UNRWA),

    organisation fonde, en 1949. Ces deux mcanismes se distinguent par

    leurs effets sur la situation des personnes concernes, comme le fait

    observer Daniel PIPES6 : la dfinition du Haut-commissariat aux

    rfugis fait disparatre la population des rfugis au fil du temps par le

    retour lEtat dorigine ou par la rinstallation dans un Etat tiers; celle

    5 Voy. sur les dfinitions de la protection SOUSSAN Judith, MSF et la protection : Une question rgle ?,

    CRASH/Fondation - Mdecins Sans Frontires, Discours et pratiques autour de la protection des civils, Avril

    2008, pp.7-11. (148 p.)

    6 La dfinition de l'UNWRA inclut les enfants des rfugis, les petits-enfants et les arrire-petits-enfants, y compris

    les Palestiniens qui ont abandonn leurs maisons en 1967, l'ensemble atteignant, par cumul, 4,25 millions de

    rfugis ; Voy. Daniel PIPES, La maldiction du statut de rfugi, New York Post du 19 aot 2003, Version

    originale anglaise: [UNRWA:] The Refugee Curse, http://fr.danielpipes.org/1216/la-malediction-du-statut-de-

    refugie.

    En juin 1967, au terme de la guerre des Six-Jours, Isral s'empare de territoires peupls par 1,5 million d'Arabes :

    la pninsule du Sina, la bande de Gaza, la Cisjordanie, la partie est de Jrusalem et le plateau du Golan en Syrie.

    Des milliers de Palestiniens, qui vivent dans ces rgions, sont contraints de trouver refuge dans des camps de

    rfugis mis en place par l'ONU notamment en Jordanie ; Microsoft Encarta 2009.

    Voy. Aussi La question palestinienne, in Aider les rfugis, UNHCR en bref, 2006, p.13

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 5

    de l'UNRWA l'accrot sans limite en y intgrant les enfants des rfugis

    sur plusieurs gnrations, pour en faire 4 millions aujourdhui dans le

    monde.

    La situation des rfugis objet de cette tude ne prend pas en compte

    les rfugis palestiniens ; il sagira de rapprocher les instruments de

    protection des rfugis relevant du HCR la situation des personnes

    dplaces internes.

    La protection est subordonne la reconnaissance par lEtat du statut

    de rfugi, ce qui est tout autre avec la dfinition qui ne confre

    demble que des droits qui pourront tre remises au cause en cas de

    non reconnaissance. Ds lors la dfinition du rfugi peut tre remise

    en cause et paralyse la mise en uvre de lengagement de lEtat partie

    la Convention instituant la protection des rfugis. Sagissant des

    personnes dplaces interne, les Pr-requis conus pour lassistance

    des rfugis leur est difficilement applicable pour plusieurs raisons,

    notamment limpossibilit pour lEtat de les considrer demble comme

    telle. De telles observations dgages par les participants du sminaire

    organis par le WARIPNET ont guid notre choix traiter ce sujet pour

    approfondir la rflexion. Ce sminaire, avec la participation des

    reprsentants du HCR, dAmnesty International, de Caritas - PARI et

    plusieurs autres ONG, ayant pour thme Le systme dasile au

    Sngal : thorie et pratique , sest tenu les 14 et 21 avril 2008 au

    Centre de Bopp. Les mesures de mises en uvre des normes

    internationales institues soit par les traits ou incorpores dans le

    droit positif des Etats constituent les mcanismes de protection.

    Cette tude vise la porte des mcanismes de protection des rfugis et

    des personnes dplaces internes dans les Etats de lAfrique de lOuest

    o seront analyses les lgislations du Libria, du Sngal et de la Cte

    divoire, qui constituent le Cadre gographique. Trois Etats membres de

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 6

    la CEDEAO, organisation qui promeut la poursuite dune politique

    comme en matire de maintien de la paix, de la stabilit par la

    coopration et lharmonisation des systmes juridiques.

    Il sagira de sintresser leffectivit des mcanismes juridiques de la

    protection dans lordre interne au Sngal, en Cte dIvoire et au

    Libria; en dautres termes, lencadrement de la protection des droits

    des rfugis et des personnes dplaces internes par le droit positif des

    Etats cibls reflte-t-il une relle application des normes internationales

    de protection des droits de lhomme ?

    Les mcanismes institutionnels nexistent que pour les rfugis au

    niveau international, la situation des PDI restant rgit par le droit

    commun des droits de lhomme et le DIH, mais aussi par le droit

    interne des Etats dbiteurs dune obligation de protection pour leurs

    nationaux.

    La protection des droits des rfugis stend tout le processus

    dexil allant de ladmission la frontire, au sjour dans lEtat daccueil,

    lassistance humanitaire, et enfin, lencadrement du retour par le

    rapatriement librement consenti. Cette protection ne diffre pas celle

    retenue pour les PDI si on envisage lencadrement du retour et

    lassistance la reprise des activits dans la localit dorigine en vu de

    solutions durables.

    Ainsi, importe-t-il de partir de la situation des rfugis et denvisager

    ltude des personnes dplaces internes en sintressant la mise en

    uvre par les Etats des instruments de protection des rfugis en tant

    que celle-ci font apparatre une insuffisante protection des droits des

    rfugis par la rception des normes de promotion (1re Partie) ; mais

    malgr cette insuffisance, une influence des rgles de protection des

    rfugis sur la situation des personnes dplaces tend assimiler les

    droits de ces dernires ceux reconnus aux rfugis (2me Partie).

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 7

    PREMIERE PARTIE :

    Une insuffisante protection des droits des rfugis

    par la rception des normes de promotion

    La rception seffectue dans lordre juridique interne des Etats par

    ladoption de textes qui constituent la protection normative (Chap. I), et

    par la cration des organes de mise en uvre de cette protection ou

    dispositif institutionnel (Chap. II).

    CHAPITRE I :

    La protection normative interne

    La protection par la lgislation des Etats sopre par les garanties

    constitutionnelles (Sect. 1), mais aussi travers lencadrement lgislatif

    et rglementaire (Sect. 2).

    Section 1 Les garanties constitutionnelles

    Le droit international universel renvoie aux rgles internationales

    protgeant la dignit humaine dans toutes ses composantes (Parag.1).

    Il sagit du droit international des droits de la personne humaine et du

    droit international humanitaire, normes rgissant la protection des

    rfugis et des personnes dplaces lintrieur de leur propre pays7.

    De telles normes sont incorpores dans les Constitutions des Etats

    travers le droit des traits (Parag.2).

    7 Labrviation PDI sera utilise pour la suite de cette tude.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 8

    Parag. 1) Les normes du droit international universel

    La rception par les Etats des normes du droit international universel

    fait appel aux procdures dadhsion contenues dans les traits et la

    procdure prvue par la constitution de lEtat.

    Pour les traits, lappartenance lorganisation ddiction de la norme

    suffit parfois rendre ses rgles drives obligatoires pour les Etats-

    parties et rgir la situation des particuliers, rgles de self-executing o

    la rciprocit est anantie8. Les procdures dans les constitutions des

    Etats se rapportent la ratification autorise par le Parlement alors que

    lacceptation de la nouvelle rgle suffit la rendre directement

    applicable une fois le nombre de ratifications obtenu ds lors que lEtat

    en est signataire.

    Les 4 Conventions de Genve tant ratifies par la plupart des Etats,

    ces ratifications et ladhsion au C.I.C.R., organe dpositaire des

    Conventions de Genve, imposent ceux-ci lapplication, notamment

    les coutumes du droit international humanitaire et les rgles du

    C.I.C.R.

    Le droit international humanitaire qui rgit aussi la protection des

    populations civiles en cas de conflit arm na pas manqu de prvoir la

    protection des rfugis et des personnes dplaces lintrieur de leur

    propre pays considres comme ne prenant pas ouvertement les armes,

    mais les Conventions de Genve de 1949 et leurs protocoles

    additionnels renvoient pour cette protection aux dispositions

    particulires les rgissant.

    La Convention des Nations de 1951 prcite et son protocole, ainsi que

    la Convention de lOUA rgissant les aspects propres aux rfugis en

    Afrique de 1969 sont ratifies par la plupart des Etats de lAfrique de

    8 Voy. Eric DAVID, Opposabilit du droit international coutumier aux acteurs non tatiques, in DIH

    coutumier : Enjeux et dfis contemporains, pp. 81-88. Voy. aussi, Diplomatie et droit de lhomme, La Documentation franaise, p.27.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 9

    lOuest, notamment par le Sngal, la Cte dIvoire et le Libria, et sans

    rserve.

    Sagissant des PDI, leur protection par leur propre Etat est dfinie par

    le droit positif, la lgislation de lEtat, et ils peuvent se rclamer de la

    protection internationale ds lors que les normes du droit international

    des droits de lhomme et du droit international humanitaire, normes

    universelles, invitent les Etats assurer la protection de leurs propres

    citoyens dplacs ou de solliciter lintervention dorganes

    internationaux, le cas chant.

    Des principes directeurs issus de la pratique de lassistance

    humanitaire tendent rgir la situation des PDI. Les Principes

    directeurs relatifs au dplacement de personnes l'intrieur de leur

    propre pays constituent les textes de base de leur protection, mais il

    existe aussi des principes directeurs concernant la fois la question

    des rfugis et les PDI, notamment les Principes de Pinheiro sur le droit

    la restitution des logements et des biens des rfugis et des personnes

    dplaces9.

    Les principes directeurs, pour carter la question de leur incorporation

    formelle dans le droit interne, empruntent la valeur juridique de la rgle

    contraignante prcise et interprte ; les principes directeurs sont des

    sources dinterprtation du DIH et peuvent tre perus comme des

    coutumes du DIDH, tant dgags par les organes de mise en uvre de

    ce droit notamment dans les zones de conflits.

    En dehors des principes directeurs, lUnion Africaine a dict un

    mcanisme de protection des personnes dplaces lintrieur de leur

    propres pays, la Convention de Kampala, Convention de lUnion

    9 Principes concernant la restitution des logements et des biens dans le cas des rfugis et des personnes

    dplaces, appels Principe de Pinheiro (Paolo Sergio PINHEIRO), Commission des droits de lhomme, 28 juin 2005, E/CN.4/Sub.2/2005/17

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 10

    Africaine sur la protection et lassistance aux personnes dplaces en

    Afrique.

    Ce texte reprend la plupart des rgles dgages par les principes

    directeurs, mais nimpose pas une obligation dincorporation dans le

    droit interne, ni nadmet de rserve sa ratification10 par un Etat

    membre, le nombre de ratifications ncessaires son entre en vigueur

    tant de 15.

    Une fois lexpos des normes fait, importe-t-il de sintresser au cadre

    de la rception de normes protectrices des droits des rfugis et des

    personnes dplaces, mme si lobligation den dicter nest pas

    obligatoire.

    Parag. 2) La rception constitutionnelle des normes

    internationales

    Les prambules et principes gnraux du droit constitutionnel ont pour

    finalit, comme les traits, dassurer la rception des rgles quils

    rappellent ; ainsi, le dbat sur la supra ou infra place occuper

    nentame pas leur appartenance au droit interne de lEtat ds lors que

    la plupart des traits ont fait lobjet de ratification.

    Le prambule de la Constitution ivoirienne et du Sngal rapporte

    lattachement aux principes des droits humains fondamentaux11 qui

    sont repris dans le corpus des constitutions en droits individuels et

    droits collectifs, et en principes fondamentaux de la Constitution.

    10

    Voy. Articles 17 et 21 de la Convention de Kampala

    11 Le prambule de la Constitution ivoirienne prcise que la RCI: Proclame son adhsion aux droits et liberts

    tels que dfinis dans la Dclaration universelle des Droits de l'Homme de 1948 et dans la Charte africaine des

    Droits de l'Homme et des Peuples de 1981 ; Exprime son attachement aux valeurs dmocratiques reconnues

    tous, les peuples libres, notamment : le respect et la protection des liberts fondamentales tant individuelles que

    collectives . Pour le Sngal, avec une longue numration de traits, on note notamment : son adhsion la Dclaration des

    Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 et aux instruments internationaux adopts par l'Organisation des

    Nations Unies et l'Organisation de l'Unit Africaine, notamment la Dclaration Universelle des Droits de

    l'Homme du 10 dcembre 1948, la Convention sur l'limination de toutes les formes de discrimination l'gard

    des femmes du 18 dcembre 1979, la Convention relative aux Droits de l' Enfant du 20 novembre 1989 et la

    Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples du 27 juin 1981 .

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 11

    Le constituant librien aborde dans le mme sens. The Liberia

    Constitution adopted on January 6, 1986,

    dispose en son Article 34 (f): The Legislature have the power () to

    approve treaties, conventions and such other international agreements

    negotiated or signed on of the Republic

    Les Constitutions de la Cte dIvoire et du Sngal12 en leurs articles 87

    et 98 identiques reprennent en civiliste confirm que : Les Traits ou

    Accords rgulirement ratifis ont, ds leur publication, une autorit

    suprieure celle des lois, sous rserve, pour chaque Trait ou Accord,

    de son application par l'autre partie .

    Au Sngal les articles 95 98 de la Constitution de 2001 pose la

    ncessit dune loi de ratification, la modification avant toute

    ratification de la Constitution pour les traits qui lui sont contraires,

    mais une absence dobligation de saisine du Conseil constitutionnel

    dcoulant de larticle 95 ivoirien nest pas retenue au Sngal, cette

    saisine ouverte aux mmes organes reste facultative.

    En dehors des deux Etats, Sao Tome & Principe et lErythre, tous les

    Etats africains ont Sign ou Ratifi, la Convention africaine sur les

    rfugis. Le Sngal, Etat signataire, a ratifi le 01 avril 1971 son

    instrument de ratification dpos le 21 mai 1971. Le Libria, signataire,

    a ratifi le 10 octobre 1971 et dpos son instrument le 07 fvrier 1972,

    enfin la Cte dIvoire a procd la ratification le 26 fvrier 1998 et le

    20 avril 1998 au dpt de son texte ratifiant la Convention de 196913.

    Les normes incorpores dans les constitutions et garanties par une loi

    qui prvoient des organes de mise en uvre sintressant gnralement

    aux taches de souverainet qui relvent du pouvoir discrtionnaire de

    lEtat, donc dune volont politique des gouvernants pour leur

    12

    Loi N2001-03 du 22 janvier 2001 portant Constitution de la rpublique du Sngal adopte par rfrendum le 7

    janvier 2001; Loi N2000-513 du 1er

    aot 2000 portant Constitution de la Rpublique de Cte dIvoire adopte par rfrendum le 23 juillet 2000.

    13 Cf. www.africa-union.org, dernier mise jour 26 mai 2007.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 12

    application. Les normes protgeant les droits humains ne peuvent

    relever de cette logique, lobligation de dapplication rciproque tant

    carte.

    Concrtement, seule la Cte dIvoire a expressment intgr la

    protection par le droit dasile dans sa Constitution. En effet, larticle 12

    de la Constitution ivoirienne de 2000 dispose :

    Aucun Ivoirien ne peut tre contraint l'exil.

    Toute personne perscute en raison de ses convictions politiques,

    religieuses, philosophiques ou de son appartenance ethnique peut

    bnficier du droit d'asile sur le territoire de la Rpublique de Cte

    d'Ivoire, sous la condition de se conformer aux lois de la Rpublique.

    Les normes constitutionnelles font gnralement intervenir des lois

    dapplication. La protection sur la situation des rfugis est-elle

    effective au niveau des normes infra constitutionnelles des Etats

    cibls ?

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 13

    Section 2 Lencadrement lgislatif et rglementaire

    La mise en uvre dun trait comportant des incriminations ratifi dans

    lordre interne est subordonne la ncessit dune loi dapplication en

    matire pnale, thse jurisprudentielle raffirme par la Cour de

    cassation sngalaise dans son arrt du 20 mars 2001 concernant

    laffaire Hussein Habr14 qui veut une disposition conventionnelle fasse

    lobjet dune rception par la loi, traduction au niveau opratoire de la

    garantie rsultant de la ratification ou intgre dans la Constitution. La

    norme internationale peut elle-mme carter la prise dune loi

    dapplication ou ne pas en faire une obligation15 ? La Convention des

    nations Unies de 1951 relative au statut des rfugis et la Convention

    de Kampala de 2009 sur les PDI en Afrique vont dans le mme sens en

    ninstituant pas une obligation de lgifrer mais en invitant les Etats

    fournir notamment au HCR dans la forme approprie les informations

    et les donnes statistiques demandes relatives notamment aux lois, et

    dcrets, qui sont ou entreront en vigueur en ce qui concerne les

    rfugis16 (Parag.1), mais les Etats peuvent envisager dallier dans un

    cadre unique les rfugis et les autres catgories de personnes

    similaires notamment les personnes dplaces internes (Parag.2).

    14

    La Cour confirme la dcision de la chambre daccusation de la Cour dappel de Dakar, Arrt n135 du 4 juillet 2000, et considre que le droit positif sngalais ne renferme lheure actuelle aucune incrimination de crime contre lhumanit, en vertu du principe de lgalit des dlits et des peines affirm par larticle 4 du Code pnal, les juridictions sngalaise ne peuvent matriellement pas connatre de ces faits ; Voy. aussi Lawyers

    Committee for Human Rights, Confrence pour la mise en uvre du statut de la cour pnale internationale au Sngal : rapport final, Dakar, 23-26 octobre 2001, pp.7-8 (31).

    15 Voy. Supra page 3 sur le principe de self-executing ; Art. 35(2) (a,b,c) et lart. 36 de la Convention relative au

    statut des rfugis. Art.2 (2) et art.3 du protocole de 1967 relatif au statut des rfugis.

    16 La communication des lois et rglement vise favoriser leur mention dans les rapports annuels sur la situation

    des droits humains dans un Etat des divers organes de lONU. Art. 35(2) (c) et lart. 36 de la Convention relative au statut des rfugis.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 14

    Parag. 1) Lencadrement lgislatif et rglementaire des

    rfugis

    La loi sngalaise sur les rfugis est la Loi n68-27 du 24 juillet 1968

    portant statut des rfugis et son dcret dapplication Dcret N78-484

    du 5 juin 1978 relatif la Commission des rfugis ont connu plusieurs

    modifications17.

    Labsence de loi en RCI nempche pas la prise en charge des rfugis,

    leur reconnaissance au mme titre que le Sngal et la Libria. Face

    lafflux des rfugis, pour permettre aux autorits locales dassurer la

    rgularisation du droit dasile, des arrts ont institu au niveau des

    dpartements des commissions dpartementales constituant la

    reproduction lchelle de la collectivit du modle de linstance de

    reconnaissance au niveau national.

    Les commissions dpartementales et une Commission Nationale pour

    lligibilit ont t institues par des arrts du Ministre des Affaires

    trangres. La Commission nationale pour lligibilit rsulte de lArrt

    No. 46 du Ministre des Affaires Etrangres du 1er fvrier 2007 portant

    cration, organisation et fonctionnement de la Commission nationale

    dligibilit au statut de rfugi18.

    Le Dcret N98-645 du 25 novembre 1998 donne comptence au

    Ministre de lintrieur et de la Dcentralisation la gestion des rfugis,

    17

    La loi sngalaise sur les rfugis est la Loi n68-27 du 24 juillet 1968 portant statut des rfugis, (J.O.R.S. du

    17 aot 1968, p.1032) ; la Loi n75-109 du 20 dcembre 1975 abrogeant et remplaant larticle 3 de la loi n68-27 du 5 aout 1968 portant statut des rfugis. Les rglements complmentaires sont constitus des : Dcret N76-

    14 du 9 janvier 1976 relatif la commission prvue l'art.3 de la loi n68-27 du 5 aot 1968 portant statut des

    rfugis ; Dcret N78-484 du 5 juin 1978 relatif la Commission des rfugis ; Dcret N85-1155 du 5

    novembre 1985 abrogeant et remplaant larticle premier du dcret n76-14 du 9 janvier 1976 relatif la commission prvue l'art.3 de la loi n68-27 du 5 aot 1968 portant statut des rfugis ; Dcret N87-39 du 13

    janvier 1987 modifiant le dcret n76-14 du 9 janvier 1976 relatif la commission prvue l'art.3 de la loi n68-

    27 du 5 aot 1968 portant statut des rfugis ; Dcret N98-1582 du 30 dcembre 1998 modifiant le dcret N78-

    484 du 5 juin 1978 relatif la Commission des rfugis ; Dcret n 2003-291 du 8 mai 2003 portant cration du

    Comit national charg de la gestion de la situation des rfugis, rapatris et personnes dplaces.

    18 Arrt No. 46 MAE/AGH/SDAH/SAARA du 1 fvrier 2007 portant cration, organisation et fonctionnement de

    la Commission nationale dligibilit au statut de rfugi [Cte d'Ivoire], No. 46 MAE/AGH/SDAH/SAARA, 1 February 2007, available at: http://www.unhcr.org/refworld/docid/49fff7572.html [accessed 26 December 2009]

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 15

    et le Dcret N2000-84 du 16 fvrier 2000 cre le Service dAssistance et

    dAide pour les rfugis et les Apatrides (SAARA).

    Le SAARA regroupe les comptences techniques des services de lEtat et

    constitue une interface entre les ministres techniques concerns par le

    programme dinsertion des rfugis.

    Lintrt des commissions dpartementales est de permettre aux

    rfugis de sadresser linstance de leur point dentre19 sur le

    territoire, les Zones dAccueil des Rfugis, et aux rfugis urbains de

    sadresser la Commission nationale Abidjan. Ce modle de

    reprsentation locale existe aussi au Libria, contrairement au Sngal

    o seule une commission sigeant Dakar est seule habilite

    connatre de lligibilit au statut de rfugi.

    Une mme loi peut prvoir en plus des rfugis dencadrer la prise en

    charge des personnes dplaces, apatrides et des rapatris, tous

    considrs comme des catgories mixtes20.

    Parag. 2) Lencadrement lgislatif et rglementaire des PDI

    Au Sngal la condition des personnes dplaces internes et des

    rapatris sngalais nest pas rgi par les mmes textes que celle des

    rfugis21, mais la lgislateur a tent de regrouper leur gestion par une

    instance commune travers le Dcret n 2003-291 du 8 mai 2003

    portant cration du Comit national charg de la gestion de la situation

    des rfugis, rapatris et personnes dplaces. Ce dcret sintresse la

    19

    Voy. lArrt du 29 octobre 1991 sur la Commission d'agrment des rfugis libriens dans le dpartement de Danane. Arrt du 29 octobre 1991 sur la Commission d'agrment des rfugis libriens [Cte d'Ivoire], 29

    October 1991, available at: http://www.unhcr.org/refworld/docid/3ae6b4d94.html [accessed 26 December 2009]

    20 Les rfugis et les migrants voyagent souvent cte cte, empruntent les mmes itinraires, utilisent les

    mmes modes de transport et ont recours aux services des mmes trafiquants dtres humains pour tenter datteindre les mmes pays de destination. Ils forment ainsi ce que lon appelle des mouvements migratoires mixtes ; Jeff CRISP in Rfugi ou migrant ? Pourquoi cette question compte, Refugi magasine, UNHCR, N

    148, Vol.4, 2007, pp.7-11

    21 Voy. Infra la pluralit de dfinition des PDI : Chapitre 2, section 1.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 16

    gestion du flux migratoire, mais des lois ont toujours exist pour les

    questions des rfugis, de telles lois instituant une Commission

    nationale dligibilit statuant sur les demandes doctroi de statut de

    rfugi au Sngal.

    Malgr ce souci dunification, la situation est rgie, du fait de la loi, par

    un clatement des instances de protection : la Commission nationale

    dligibilit qui dpend du Comit national charg de la gestion de la

    situation des rfugis, rapatris et personnes dplaces22, le Ministre

    des affaires trangres et enfin, le Ministre des sngalais de

    lextrieur. Les sngalais rfugis dans la sous rgion, notamment en

    Gambie et en Guine, tant pris en compte par les ministres prcits

    pour lassistance leur retour ou par le Comit. Lclatement rend cette

    rforme inoprante23 du fait de limpossibilit de regrouper des

    problmes nayant pas une mme cause : lexpulsion des migrs

    sngalais et la situation des rfugis et des personnes dplaces

    internes.

    La loi du Libria repose sur le regroupement des questions communes

    lies lasile en confrant une seule instance les prrogatives

    sattachant la protection des rfugis et des personnes dplaces

    internes : the Liberia Refugee Repatriation and Resettlement Commission

    (LRRRL)24. Cette structure rsulte dune loi de 1993, An act to make

    22

    Le Comit national charg de la gestion de la situation des rfugis, rapatris et personnes dplaces fait partie

    des services de la Prsidence contrairement lorgane quil a remplac le Haut commissariat aux personnes dplacs et aux rapatris qui tait un service rattach au Secrtariat du Gouvernement dpendant du Premier

    Ministre.

    23 La rforme visait prendre en charge les sngalais victimes de mesures dexpulsion dans des conditions

    douloureuses , rgler les problmes de migrs, et mettre fin la multiplication des structures dintervention, certaines de ces structures dintervention sont restes ltat embryonnaireconfines des missions mal dfinies aussi convient-t-il aprs un tel constat, dans le souci dune gestion cohrente, de regrouper lensemble des structures existantes en un comit national dot de moyens humains, financiers et matriels pour lui permettre

    de faire face convenablement aux situations durgence. Cf. rapport de prsentation du Dcret n 2003-291 du 8 mai 2003 portant cration du Comit national charg de la gestion de la situation des rfugis, rapatris et

    personnes dplaces.

    24 La Commission librienne de rapatriement et de rinstallation des rfugis (LRRRC) est linterlocuteur de lEtat

    librien dans ses relations avec le HCR, mais aussi avec les autres instances de lEtat qui traitent des questions

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 17

    provision for refugees and to establish the Liberia Refugee Repatriation

    and Resettlement Commission (LRRRC) appele aussi The Refugee Act,

    199325.

    The Refugee Act, 1993, semble sintresse aux rfugis seulement, mais

    envisage les personnes dplaces et apatrides travers les attributions

    de The Commission. The functions of the Commission shall be to

    formulate policy on matter in the country, to exercise any other powers

    and to perform any duties that may be assigned to the Commission by or

    in terms of this Act or by Executive directive, to assist the secretariat in

    soliciting international assistance for refugee related activities in the

    country26.

    Ainsi, in soliciting international assistance for refugee related activities in

    the country, la LRRRC peut ainsi conclure des accords concernant le

    retour et la rinstallation aussi bien pour les personnes dplaces

    internes que pour les libriens rfugis en exil.

    The Refugee Act a aussi institue an Asylum Committee of the

    Commission27 charg de la reconnaissance du statut de rfugi au

    Libria.

    A travers les lois et rglements qui soumettent des organes tatiques,

    la CNE au Sngal, The LRRRC au Libria, ainsi que la CNE ivoirien et

    ses commissions dpartementales, la condition juridique des rfugis,

    et de manire incidente celle des PDI, un examen du fonctionnement

    des organes de la reconnaissance participe de la mesure de leffectivit

    des mcanismes de protection des rfugis.

    connexes lasile, le Bureau de l'immigration et de naturalisation (the Bureau of Immigration and Naturalization - BIN) et les autorits locales des communauts o les rfugis ont choisi de s'intgrer localement.

    25 Refugee Act, 1993 [Liberia], 19 January 1994, available at:

    http://www.unhcr.org/refworld/docid/3ae6b4f31c.html [accessed 26 December 2009]

    26 The Refugee Act, 1993 in Section 5.1(a)(b)(c).

    27 La Commission (LRRRC) est compose dun Comit dasile, Asylum Committee, et dun Comit dAppel,

    Appeal Committee.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 18

    CHAPITRE II :

    Le dispositif institutionnel

    Lapplication des textes fait appel des institutions ou organes habilits

    reconnatre aux demandeurs dasile la possibilit de faire une

    demande de statut de rfugi (Sect. 1), mais fait ressortir une

    insuffisante protection des droits par la reconnaissance statutaire de

    rfugis (Sect. 1).

    Section 1

    Les organes nationaux de reconnaissance des rfugis

    Les modalits de la reconnaissance du statut de rfugi (Parag.1)

    peuvent donner suite une contestation et ouvrir un contentieux de la

    reconnaissance du statut de rfugi (Parag.2).

    Parag. 1 Les modalits de la reconnaissance du statut de rfugi

    Des organismes nationaux existent au Sngal et au Libria comme

    prvu dans leurs lgislations. Pour la Rpublique de Cte divoire, des

    personnes peuvent aussi tre reconnues comme ayant le statut de

    rfugi. Lexamen des modalits de la reconnaissance imposent une

    visite de ces institutions tatiques (A) o on note la prsence du HCR

    (B).

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 19

    A. La reconnaissance du statut de rfugi par des institutions

    tatiques

    Le LRRRC est une commission administrative autonome dote de la

    personnalit morale, de lautonomie financire et ses

    attributions englobent toutes les questions concernant des rfugis et

    des personnes dplaces, les rapatris et dautres personnes relevant de

    laide humanitaire.

    As clearly stated, LRRRC is the lead entity of the Government of Liberia

    on all matters relating to refugees, internal displacement, returnees,

    repatriation, resettlement and reintegration. The Commission is UNHCRs

    counterpart in Liberia. Its jurisdiction also encompasses the National

    Disaster Relief Commission within the Ministry of Internal Affairs28.

    La reconnaissance du statut de rfugi au Sngal rsulte de la loi

    portant cration de la Commission nationale dligibilit (CNE) et qui en

    fixe sa composition. La CNE est une commission interministrielle, les

    agents qui y sigent ont dautres fonctions quils exercent titre

    principal ; ce qui rend non permanentes ses activits.

    Un secrtariat permet la rception des DSR, et selon le dcret de 1978,

    la commission se runit sur convocation de son directeur toutes les fois

    que le nombre et lurgence des affaires examiner lexige

    Les membres de la LRRRC travaillent de manire permanente, et cet

    organe admet pour son fonctionnement les avis des ressortissants

    libriens de la diaspora qui peuvent aussi participer aussi au

    financement de ses projets.

    Ces membres sont composs des reprsentants des ministres

    techniques, mais cest le directeur excutif qui assure son

    28

    www.lrrrc.org

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 20

    fonctionnement, la prsence des membres statutaires ntant pas

    toujours requise, ceux-ci pouvant tre suppls.

    La saisine de la LRRRC est ouverte tous rfugis et personnes

    dplaces libriennes et les rfugis en asile au Libria travers ces

    diffrents organes : the Executive Director charg des affaires des

    rfugis, of the Repatriation and resettlement Commission assist dun

    dput.

    There shall be an Executive Director responsible for directing the affairs

    of the Refugee, Repatriation and Resettlement Commission, assisted by a

    deputy. The office of the Executive Director shall be a public office and

    part of the Public Service.

    Le LRRRC est une invention du laboratoire juridique et politique de

    lAfrique, le Libria, en ce sens quelle peut conclure des accords

    internationaux pour la protection des libriens relevant de sa juridiction

    la place de lEtat. La LRRRC peut en effet confrer ou refuser le statut

    de rfugi au DSR.

    Au Sngal, la CNE rend un avis, il appartient au Prsident de la

    Rpublique daccorder le statut de rfugi. Cependant, en cas davis

    non favorable, la loi permet au CNE de refuser loctroi de ce statut sans

    se rfrer lautorit hirarchique en motivant son avis notifi

    lintress, selon lart.10 du dcret de 1978.

    Il sensuit louverture des voies de recours pour le DSR dont la demande

    est rejete, de telles voies de recours sont inexistantes lorsque la

    reconnaissance dpend dune pluralit dinstitutions tatiques comme

    cest le cas en Cte dIvoire.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 21

    B. La reconnaissance par le HCR en Cte dIvoire : une

    application directe de la norme internationale

    Labsence de lois ne constitue pas un obstacle ds lors que la

    convention de 1951 est aussi dote dorgane dapplication, le HCR.

    En Cte dIvoire, ladmission et protection intgrale des rfugis a

    toujours prvalu avant le conflit des annes 2000. Il sagissait dune

    option du Sage de Yamoussoukro qui rendait inutile linstitution dun

    organe ds lors que ladmission la frontire comme rfugis suffisait

    tre ligible lassistance de lEtat.

    Nous entretenons les meilleures relations avec tous les Etats africains.

    Nous navons jamais demand un centime lONU pour nos rfugis. Ils

    sintgrent dans la vie. Ils sont accueillis en frres. Soit par les ivoiriens

    ou leurs frres qui les ont prcds chez nous29.

    Aprs 2000, avec le conflit, la reconnaissance prima facie par le HCR

    facilite la tche de mise en uvre de la Convention par lEtat ivoirien

    qui accorde aussi sa protection. La dtermination collective prima facie

    permet de considrer comme groupe des rfugis des personnes

    franchissant une frontire la lumire des circonstances qui les avaient

    conduit quitter leur pays dorigine30.

    Le caractre territorial de la dcision accordant le statut fait que le

    rfugi ne pouvant se prvaloir de son statut dans un autre Etat. Ainsi,

    les droits dcoulant de cette reconnaissance ne seront opposables qu

    lEtat daccueil et au HCR.

    La DSR individuelle non accueillie par le HCR nouvre pas une voie de

    recours, seules les dcisions des instances tatiques peuvent faire

    lobjet dune rvision travers le contentieux de la reconnaissance.

    29

    M. L. DIA, Houphout ou la philosophie du comportement, Essai le Politicien, pp.68-69.

    30 HCR, Introduction la protection internationale des rfugis, Module de formation, RDL juin 1992, p.35.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 22

    Parag. 2 Le contentieux de la reconnaissance

    Le contentieux est ouvert contre les actes dfavorables manant des

    autorits de la reconnaissance du statut de rfugi. Ce contentieux se

    dveloppe en deux phases ; un recours administratif et un recours

    juridictionnel.

    Le contentieux obit aux mmes rgles de procdure, un recours

    administratif pralable est institu comme une condition de recevabilit

    du recours en annulation juridictionnel.

    Dans le contentieux administratif au Libria linstance de

    reconnaissance de DSR, la LCCCR, dispose dune hirarchie

    fonctionnelle interne : the Asylum Committee and the Appeal Committee,

    le comit dasile et le comit dappel. Les appels contre les dcisions

    dfavorables du Comit dasile sont ports au niveau du Comit dappel

    disposant de pouvoir de rexamen des faits et de rformation en droit.

    Dans le systme sngalais, le recours hirarchique31 ne peut tre

    adress quau Prsident de la Rpublique ds lors que la CNE est un

    organe interministriel soumis lautorit du Prsident. Les recours

    adresss par les DSR contre les actes dfavorables de la CNE peuvent

    aussi tre rforms par le Prsident de la Rpublique.

    Cest le Prsident qui accorde par dcret le statut de rfugi aprs un

    avis favorable de la CNE32, mais cest la CNE qui paralyse le DSR en

    mettant un avis dfavorable rejetant la demande.

    Au Sngal comme en Cte dIvoire, il existe un recours gracieux, qui

    nest pas un appel33 , port devant la mme autorit qui a rendu la

    31

    Art. 73-1 de la Loi N 2008-35 du 8 aot 2008 portant cration de la Cour suprme du Sngal..

    32 Art1cle 3 de la loi N68-27 du 24 juillet 1968 modifi par la loi N75-109 du 20 dcembre 1975 portant statut

    des rfugis.

    33 Lappel tend reformer ou annuler une dcision dune juridiction du premier degr, la saisine de lautorit

    hirarchique en vue de la rformation dune dcision administrative est considre par la doctrine comme un appel ; le caractre administratif apprci par rapport lordre interne devient une dcision faisant grief de lEtat

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 23

    dcision faisant grief pour un second examen. En matire de

    reconnaissance de rfugi, cest la Commission nationale dligibilit

    que doit revoir sa dcision. La composition de la CNE ressaisit en appel

    est critique par les ONG34 qui considrent que celle-ci doit tre

    compose autrement pour revoir sa note compte tenu du fait que cette

    commission ne respecte pas les prescriptions de la loi qui prvoit une

    motivation35 de ses conclusions, les motivations reprenant la formule :

    la Commission Nationale dEligibilit au Statut de Rfugis a mis un

    avis consultatif dfavorable au motif que vous ne remplissez pas les

    critres relatifs la dtermination du statut de rfugi36.

    La prsence dun conseil durant la procdure et lobligation de

    motivation font tat de la conformit de la loi sngalaise qui en ces

    points est conforme aux principes du droit international, mais nest pas

    effectivement applique.

    Dailleurs la question du choix du conseiller est discute en droit

    internationale entre les tenants de la prsence dun avocat comme

    conseil en plus de la prsence dun interprte, et ceux qui considrent

    la possibilit du demandeur de pouvoir sentretenir avec des

    reprsentants du HCR ; lintrt tant dobtenir des informations fiables

    ds lors que celle-ci est prise et remet en cause les droits fondamentaux. De mme le terme jurisprudence en droit

    international humanitaire nest pas le mme quen droit processuel o il peut dsigner une dcision administrative ritrant un prcdant dans une mme matire. Les ONG utilisent indiffremment ces deux termes repris par la

    doctrine humanitaire. Voy. Art. 73-1 de la Loi N 2008-35 du 8 aot 2008 sur la Cour suprme qui institue une procdure particulire quant aux dlais du recours contentieux, de deux mois six mois, en fonction de lacte implicite ou explicite de rejet manant de lautorit saisie du recours administratif.

    34 Waripnet, Rapport annuel sur lasile au Sngal, 2007.

    35 Le dcret N78-484 du 5 juin 1978 prvoit la prsence dun conseil lalina 3 de larticle 8 et la motivation

    larticle 10.

    36 Paragraphe 21 du Rapport sur lasile au Sngal, ADA-WARIPNET, dcembre 2007.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 24

    sur la situation du pays dorigine et du bien fond des motifs du

    demandeur de statut de rfugi37.

    Toutefois, ladmission au statut de rfugi sest rvle, travers les

    tudes ralises38, probante par la prsence de conseiller que par

    lautoreprsentation.

    Ainsi les autorits sngalaises doivent appliquer la lgislation en

    vigueur concernant la prsence dun conseil ds lors que la loi admet la

    prsence du conseil indpendamment du reprsentant du HCR, et la

    motivation conforme la protection dans la procdure favorisant un

    lappel, un rexamen de la demande39.

    En Cte dIvoire, le Dcret de 2007 sur la Commission des appels permet

    aux membres de la Commission nationale pour lligibilit de revoir les

    dclarations bases sur de nouvelles preuves, la reconnaissance

    reposant sur les critres dgags par le HCR.

    Au Libria, The Appeal Committee est compose autrement, et pour sa

    saisine, lappel doit tre port dans les 14 jours suivant la dcision de

    the Asylum Committee auprs de lUNHCR qui transmet le dossier en y

    adjoignant son avis40.

    37

    Martin JONES, La dtermination du statut de rfugi : trois dfis, Revue Migrations Forces n32, mai 2009,

    pp.53-54.

    38 Une tude a dcouvert que les rfugis qui taient reprsents durant la DSR de lUNHCR jouissaient dun taux

    de reconnaissance double par rapport aux rfugis non reprsents ; Mike Kagan Frontier Justice: Legal Aid and

    UNHCR Refugee Status Determination in Egypt, Journal of Refugee Studies 19:1, mars 2006 ; Voy. Martin JONES, op.cit., p.54.

    39 La ptition rfugis sans papiers soumise la signature des citoyens sngalais pour le rseau Waripnet en

    2008 illustre le manqu de volont des autorits dappliquer les textes, cette ptition visant garantir la fourniture des documents administratifs, les cartes didentit et titre de voyage toute personne reconnue comme rfugi, prvus par la loi aux rfugis, larticle 12 du dcret de 1978 relatif la Commission nationale des rfugis.

    40 Voy. The Refugee Act, 1993, Section7(6)).

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 25

    Le recours contentieux est ouvert en cas de confirmation du rejet de la

    DSR par linstance dappel. The Supreme Court doit tre saisie suivant

    la dcision de non admission au statut de rfugi41.

    Labsence de drogation dans les procdures de DSR fait que beaucoup

    de personnes la demande rejete ne soient pas en mesure de mettre

    en uvre les voies de recours. Ainsi, mme si lexemple du Libria qui

    confre une autonomous agencies, la LRRRC, la reconnaissance de

    statut est plus protecteur, laccord du statut ne fournit pas une

    protection efficiente, les procdures ntant pas maitrises par les DSR.

    41

    Art. 66, The Liberia Constitution : The Supreme Court shall be () final appellate jurisdiction in all cases whether emanating from courts of record, courts not of record, administrative agencies, autonomous agencies or

    any other authority; The Refugee Act, 1993, Section 7(7) ; Article 92 alina 3 de la Constitution du Sngal de 2001.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 26

    Section 2 Linsuffisante protection par la reconnaissance

    La reconnaissance confre le statut de rfugi qui met la charge de

    lEtat des obligations reconnaissant des droits aux rfugis dits

    statutaires, obligations parfois non respectes entranant la paralysie

    de lacte de reconnaissance (Parag.1), un retour lapplication des

    droits dcoulant du bnfice de lasile qui pose la question de la remise

    en cause de la dfinition du rfugi (Parag.2).

    Parag. 1) De la paralysie de lacte de reconnaissance

    La reconnaissance du statut de rfugi confre des droits ou fait peser

    des obligations lEtat et/ou au HCR. Mais, des droits sont accords

    tenant au statut, durant la procdure de DSR, droits qui ne sont pas

    dfinitivement acquis faisant apparatre une application non uniforme

    des droits accords (A), et des rponses nationales diversifies la

    situation du DSR (B).

    A. Lapplication non uniforme des droits accords

    Par la reconnaissance les rfugis vont relever du mandat du HCR

    conformment au Statut du HCR, mais ne peuvent imposer dobligation

    lEtat accordant lasile quen cas de reconnaissance de celui-ci ; le

    HCR faisant bnficier au rfugi ou au groupe dune assistance

    humanitaire.

    La reconnaissance du statut de rfugi une personne ou un groupe

    comme rfugis engage lEtat garantir les droits plus favorables, le cas

    chant, contenus dans sa lgislation sur les rfugis42, dans la

    Convention de 1951 et du protocole de 1967, et dans la Convention de

    42

    Art.6 de la loi N68-27 portant statut des rfugis au Sngal. The Refugee Act, 1993, Section 3.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 27

    lOUA de 1969. Mais un certain nombre de garanties doivent tre

    maintenue pour le DSR.

    Au Libria, les personnes reconnues comme rfugi vont relever du

    domaine ratione personae du Refugee Act, et cette reconnaissance va

    tre tendue aux membres de leur famille.

    En effet, in The Refugee Act, 1993, Section 11: The Minister responsible

    for the administration of, the Immigration Act shall endeavour to ensure

    that members of the family of recognized refugee are permetted to enter

    Liberia and, subject to the provisions of this section, to remain therein.

    The provisions of this section recognize le droit dentre au Libria,

    davoir des cartes didentit de rfugi, dy rester aussi longtemps que le

    statut sera maintenu, dy rester aprs le mariage et la sparation la

    majorit, dy rester aprs le divorce, la sparation de corps ou le dcs

    de la personne bnficiaire tuteur ; lattachement avec la personne

    tuteur nempche pas un membre de sa famille de faire une demande

    spare de statut de rfugi.

    Au Sngal, selon les droits accords tant notamment loctroi de

    larticle 8 de la loi de 1978 sur les rfugis, Les bnficiaires du statut

    de rfugi reoivent le mme traitement que les nationaux en ce qui

    concerne laccs lducation, les bourses, le droit du travail et les

    avantages sociaux .

    Dautres obligations simposent comme en dispose larticle 12 du Dcret

    78-484 du 5 juin 1978 relatif la commission des rfugis : Au vu du

    dcret dadmission au bnfice de rfugi, le Ministre charg de

    lIntrieur dlivre lintress les documents suivants : un certificat de

    rfugi ; une carte didentit de rfugi ; un titre de voyage conforme au

    modle vis larticle 28 de la convention de Genve du 28 juillet 1951.

    Cette disposition est trs critique par les ONG, notamment le

    WARIPNET et le Comit des Reprsentants des Rfugis au Sngal

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 28

    (CRRS), du fait de son inapplication43 constitutive dune violation de

    larticle 27 et 28 de la Convention de 1951 relatif au statut des rfugis,

    les dispositions de ces articles faisant de la dlivrance de carte

    didentit et de titre de voyage des obligations.

    En Cte divoire, la carte didentit de rfugi vaut titre de sjour44, et

    les passeports sont accords en cas de dplacement ltranger45. Des

    droits sont aussi accords pendant la procdure de DSR.

    B. Les droits protgs pendant la procdure de DSR

    La protection durant la procdure est diffrente de la protection

    rsultant du droit dasile, mais emprunte celui-ci ses garanties,

    notamment la protection par principe de non refoulement, le droit de

    sjour et la libre circulation.

    Aux rfugis bnficiaires de lasile doivent tre appliques les

    stipulations du paragraphe 1er de larticle 31 de la Convention de 1951 :

    Les Etats contractants n'appliqueront pas de sanctions pnales, du fait

    de leur entre ou de leur sjour irrguliers () sous la rserve quils se

    prsentent sans dlai aux autorits et leur exposent des raisons

    reconnues valables de leur entre ou prsence irrgulire.

    Le paragraphe 3 de larticle 2 de la Convention de lOUA de 1969

    stipule : Nul ne peut tre soumis par un Etat membre des mesures

    telles que le refus d'admission la frontire, le refoulement ou l'expulsion

    qui l'obligeraient retourner ou demeurer dans un territoire o sa vie,

    43

    Une ptition des ONG et associations de la socit civile invite le Ministre respecter les engagements de lEtat du Sngal dcoulant de la reconnaissance et de dlivrer les documents viss larticle 12 du dcret de 1978.

    44 Article 8.5 de la Loi N2004-303 du 3 mai 2004 portant modification de la loi N2002-03 du 3 janvier 2002

    relative lidentification et au sjour des trangers en Cte divoire.

    45 Voy. Conception du Gouvernement ivoirien sur lorientation du programme dintgration locale des

    rfugis, 2008.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 29

    son intgrit corporelle ou sa libert seraient menaces pour les raisons

    entrant dans la dfinition du rfugi.

    La thse du caractre obligatoire de cette disposition est discute par la

    doctrine qui loppose lexistence dun pouvoir discrtionnaire de

    lEtat ; mais, la proclamation du caractre humanitaire de lasile dans le

    prambule de la Convention africaine et la primaut de lesprit de la

    Charte africaine font que ce principe acquis la valeur dune rgle

    coutumire46.

    En Cte dIvoire, ladmission au bnfice de rfugi suffisait mettre en

    uvre la protection et lassistance, sous le Sage de Yamoussoukro,

    mais depuis lanne 2000, et suite au conflit, la distinction entre DSR et

    bnficiaire du droit dasile est la rgle. Au Sngal, o cette distinction

    est observe, une mme protection est prvue implicitement travers

    larticle 5 de la loi de 1978.

    Au Libria, The refugee act 1993, In Section 8 notwithstanding the

    provisions of any other law, any person who has applied in terms of

    section seven for recognition of his status as a refugee and every member

    of his family, shall have to remain within Liberia. The terms of section

    seven sattachant toute la procdure de recognition of refugees, de la

    saisine de the Asylum Committe la prise dune dcision dfinitive.

    La protection durant la procdure et par loctroi du statut de rfugi est

    collective au Librien, par lextension sur la famille du rfugi

    statutaire, et en Cte dIvoire par ltablissement des Zones dAccueil de

    Rfugis, mais individuelle au Sngal.

    La protection collective favorisant le regroupement familial et un

    traitement global des flux de rfugis. 46

    D'ORSI, Cristiano, La Convention de lOUA rgissant les aspects propres aux problmes des rfugis en Afrique : une analyse critique, Florence Septembre 2005

    http://www.iue.it/RSCAS/Research/SchoolOnEuro-MedMigration/2005PDFs/2005PaperD'Orsi.pdf

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 30

    Le statut de rfugi accord fait de la personne un rfugi de droit pour

    lEtat daccueil, et non pour lEtat dont le rfugi est le ressortissant et

    la communaut internationale proccupe par les questions de lasile et

    des migrations ; la pratique ayant impos la distinction entre le

    demandeur dasile, le rfugi et le demandeur de statut de rfugi.

    Ainsi, ce statut ne remet-il pas en cause la dfinition du rfugi ?

    Parag. 2) La remise en cause de la dfinition du rfugi

    Loctroi du droit dasile et labsence de DSR peuvent aussi tre

    envisags, de mme le cas du DSR en cas dpuisement des voies de

    recours ou de non respect des dlais ; ces situations se ramenant

    sinterroger sur le sort de la personne, la situation juridique en

    labsence doctroi de statut de rfugi. Autrement dit, le refus de loctroi

    du statut de rfugi impose-t-il le droit commun de limmigration ?

    Mise part la protection durant la procdure, deux situations peuvent

    tre envisages comme rponses ; dune part, la survivance du droit

    dasile, et dautre part, la non dfinition de la perscution.

    A. La survivance du droit dasile

    Le droit dasile fait peser des obligations sur lEtat47 laccordant qui

    simpose le droit la libre circulation, le choix de la rsidence, mais

    aussi les obligations contenues dans lart.1348 du PIDCP et qui

    protgent la personne contre lexpulsion.

    47

    Art.14 de la DUDH de 1948, lart.12 et 13 du PIDCP de 1966.

    48 Selon lart.13 du PIDCP de 1966 : Un tranger qui se trouve lgalement sur le territoire dun Etat partie au

    prsent Pacte ne peut en tre expuls quen excution dune dcision prise conformment la loi, et, moins que des raisons imprieuses de scurit nationale ne sy opposent, il doit avoir la possibilit de faire valoir les raisons qui militent contre son expulsion et de faire examiner son cas par lautorit comptente, ou par une ou plusieurs personnes spcialement dsignes par ladite autorit, en se faisant reprsenter cette fin .

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 31

    La CEDEAO comme lUEMOA admet lintgration rgionale notamment

    par la libre circulation des personnes. Mais les instruments

    dintgration renvoient une multiplicit de lgislations des Etats

    daccueil pour la condition des personnes physiques et une loi unifie

    pour toute la sous rgion pour les personnes morales, et lencadrement

    de la libre circulation des personnes physiques nintgre pas les

    mouvements collectives, ni le dplacement motiv par la contrainte49.

    Ainsi, un encadrement communautaire par un protocole ne serait-il pas

    mieux appropri pour dcider de la citoyennet pour les rfugis non

    reconnus comme tel par les Etats membres ?

    Le droit dasile nimplique pas seulement la rentre, mais aussi

    lencadrement du sjour dans lEtat par le droit interne du fait du

    caractre pacifique et humanitaire de lasile.

    La survivance du droit dasile simpose dans des situations o la

    distinction DSR et rfugi nest pas opre :

    - en cas de perte du statut de rfugi ;

    - pour la mise en uvre de lassistance humanitaire ncessaire aux

    programmes de rapatriement et durant le sjour dans lEtat daccueil.

    1. Lassistance humanitaire

    Lassistance humanitaire durant le sjour dans lEtat daccueil opre

    par le CICR ne tient pas compte de cette distinction, mais se base sur le

    critre du besoin daide. Les conditions dintervention du CICR sont

    poses par larticle 9 de la 1re Convention de Genve de 1949, le

    consentement de lEtat et de toutes les partie au conflit, la mise en uvre

    49

    Les organismes dintgration OHADA, UEMOA, CEDEAO visent expressment les groupements conomiques, les socits et lactivit conomique des personnes physiques, la protection des droits de lhomme ny ont quune place limite.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 32

    de la responsabilit de protger 50, et la neutralit et limpartialit du

    CICR qui rendent favorable son action.

    Le HCR peut mettre en uvre cette assistance en cas de mandat,

    critre de lalerte, pour lassistance aux rfugis au statut non accord.

    Les programmes de rapatriement sont gnralement ngocis avec le

    HCR, lEtat daccueil et lEtat originaire, programmes encadrant le

    retour massif comme le rapatriement librement consenti pouvant tre

    observ pour tout le monde, sans distinction entre rfugis statutaires

    et bnficiaires de lasile.

    2. La perte du statut de rfugi

    La perte du statut de rfugi soit par la clause de cessation ou suite

    une sanction contenue dans la loi interne nouvre pas droit une

    nouvelle DSR. Une sanction pnale entrane automatiquement la

    dchance du statut et saccompagne dune expulsion du territoire de

    lEtat daccueil.

    En cas de dtention du rfugi ou de DSR au Sngal, une mesure

    dexpulsion peut tre prononce51. Lexpulsion dcoule de la dtention

    suite la condamnation une peine privative de libert et non de

    linfraction lorigine de cette dtention. Ce qui fait de cette expulsion

    une peine complmentaire celles prvues par la loi, le Code pnal,

    notamment, toute infraction commise ayant entran une dtention

    pour un rfugi ou un DSR en violation de larticle 32 de la Convention

    de 1951 et une violation du principe de la lgalit des peines et de

    lgalit devant la loi.

    50

    Les Conventions de Genve sont un droit pour la tempte qui sapplique lorsque les conditions requises pour le respect des droits de lhomme viennent de cesser dexister ; Voy. A. Pasquier, in RICR juin 2001, Vol 83 n842 pp.311-321 ; Voy. aussi Diplomatie multilatrale franaise : la responsabilit de protger et pour le renforcement

    du DIH, Diplomatie et droit de llHomme, La Documentation franaise, p.175

    51 Article 4 de la loi sngalaise de 1978 prcit. Larticle 244 du Code pnal envisage aussi lexpulsion pour le

    vagabond tranger lorsque le vagabondage est juridiquement constat.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 33

    Le lgislateur librien ne fait pas de la dtention une condition de

    lexpulsion, mais impose la dtention en cas de dcision dexpulsion, les

    causes dexpulsion52 retenues tant, celles de la convention de 1951

    reprises aussi par le lgislateur sngalais.

    Aucune mesure dexpulsion contre un bnficiaire de statut de rfugi

    ne peut tre mise en excution pendant le dlai du recours pour excs de

    pouvoir, ni en cas de recours, avant la fin de la procdure. Les mmes

    dispositions sont applicables aux personnes qui ont lobjet dun refus

    dadmission au bnfice de ce statut, ou dune dcision constatant la

    perte dudit statut pendant le dlai du recours pour excs de pouvoir

    contre ladite dcision, ni en cas de recours, avant la fin de la

    procdure53 , prcise le lgislateur sngalais.

    En cas dexpulsion, la personne peut saisir directement la Cour

    suprme54 dun recours pour excs de pouvoir. Le caractre suspensif

    du recours est coupl par la mise en uvre dune procdure expditive

    o la personne concerne pourra saisir directement la Cour suprme

    dans les quarante huit heures, et la Cour statut dans les huit jours sur

    la dcision administrative et en prsence de lintress. La mesure

    dexpulsion pralable ce recours est prononce aprs avis de la CNE

    devant laquelle lintress aura prsenter sa dfense.

    La consultation de lautorit librienne, the Executive Director of

    LRRRC, aprs information du reprsentant du HCR est retenue avant

    toute mesure dexpulsion. Cependant, il faut noter que la mesure

    52

    Article 5 loi sngalaise de 1968 prcite.

    53 Article 5 de la loi N68-27 du 24 juillet 1968 portant statut des rfugis au Sngal.

    54 Voy. les articles 73-3 et 77 de la Loi organique N2008-35 du 8 aot 2008 portant cration de la Cour suprme

    du Sngal ; la saisine directe, prvue par larticle 77 de la loi organique sur la Cour suprme, se fait par simple requte, avec ou sans ministre davocat, mais requiert pour la Cour une expertise pralable : elle devient comptente et la requte devient recevable.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 34

    dexpulsion ne peut concerner les membres de la famille du bnficiaire

    de statut de rfugi, celle-ci tant une sanction pnale individuelle.

    Les Etats sont tenus conformment larticle 33 de la Convention de

    1951 de ne pas refouler la personne sur les frontires dun territoire o

    sa vie ou sa libert serait menace en raison de sa race, de sa religion,

    de sa nationalit, de son appartenance un certain groupe social ou de

    ses opinions politiques.

    Larticle 4 de la loi sngalaise prcite dispose in fine que la dcision

    dexpulsion doit accorder aux intresss un dlai raisonnable pour leur

    permettre de chercher se faire admettre rgulirement dans un autre

    pays.

    Le Liberia reprend ce dispositif55 en accordant un dlai de 90 jours

    pouvant tre tendu par lautorit excutive de la LRRRC, the Executive

    Director, lorsquil existe des raisons probables de lacceptation de

    ladmission de la personne dans un Etat de son choix.

    Durant la priode dattente dadmission dans un Etat tiers, les droits

    tenant du bnfice de lasile sont ressuscits. Quid de la personne qui

    ne dispose pas de moyens, de possibilits de se faire admettre dans un

    Etat tiers ?

    Seul le droit de chercher asile est consacr, lEtat a le droit daccorder

    lasile, mais lindividu ne jouit daucun droit en bnficier56. Cette

    impossibilit nest-elle pas constitutive dune perscution pouvant

    entraner un impossible mouvement secondaire du fait de la loi de lEtat

    daccueil, perscution portant atteinte la dignit humaine et

    constituant une violation des rgles la Convention de lOUA qui fait

    55

    The Refugee Act, 1993, Section 16(4)(5).

    56 L. A. Malone, les droits de lhomme dans le droit international, Nouveaux horizons, juin 2004, p.42. Voy.

    aussi Articles 13 et 14 DUDH, Dclaration sur lasile territorial de 1967.

  • Rfugis et des personnes dplaces internes en Afrique de lOuest : Sngal, Cte dIvoire et Libria Page 35

    obligation aux Etats daccorder lasile ? Mais quest-ce que la

    perscution ?

    B. La non dfinition de la perscution

    Des instances nationales instituent des discriminations entre les DSR

    en labsence de dfinition de la perscution par la Convention de 1951

    et du protocole de 1967, et par la convention de lOUA de 1969. Une

    discrimination favorise par la prsomption traduite en soupon dans

    les flux mixtes de rfugis. Les flux mixtes tant constitus en Afrique

    des prsums combattants et personnes vulnrables, et en Europe, de

    demandeurs dasile et migrants conomiques.

    Ainsi, la demande individuelle fait peser sur la personne une

    prsomption dintgration force dans la communaut daccueil,

    prsomption assimilant le DSR un migrant conomique ds lors que

    la demande nest pas faite dans un Etat frontalier avec lEtat dorigine

    du prsum rfugi. Cette prsomption est aussi traduite en soupon

    dinfiltration dans les Etats ayant des frontires communes.

    Des lments objectifs ou des considrations politiques sont pris par les

    autorits de reconnaissance pour rejeter la demande sans examens des

    motifs allgus par le DSR tenant aux circonstances de son dpart.

    En France par exemple, le visa daccs en France par le bnfice de

    lasile subit le durcissement des exigences poses aux demandeurs

    dasile, et une fois arrive en France ; autrement dit la notion de pays

    sr dvelopp par les pouvoirs publics franais rend impossible loctroi

    du statut de rfugi.

    La notion de pays sr ne prend pas en charge les rfugis sur place ; le

    rfugi sur place demandant la conversion dun sjour en

    reconnaissance de statut de rfugi du fait de la situation dans le pays

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    dasile et de la crainte lie lappartenance une communaut

    religieuse ou ethnique.

    La notion de pays de provenance sr applique actuellement par les

    pays de lUnion europenne travers un rgime dasile europen

    commun,57 sest dveloppe par llection de certains Etats numrs

    sur une liste comme non producteurs de rfugis. Ainsi, un DSR

    provenant desdits Etats ne peut voir sa demande agre durant la

    priode dligibilit de son Etat dorigine.

    Le droit dasile a permis, la sortie de la seconde guerre mondiale, le

    retour des dplaces dorigine europenne avant dtre tendu aux

    autres communauts. Cinquante aprs, lEurope vide ce droit de toute

    sa substance en dplaant le contenu des notions et du support de la

    dtermination de la perscution de lindividu vers lEtat, favorable au

    refus de laccueil fond sur le critre de la provenance de pays srs.

    Cette notion est trs critique en Europe, par lONU, lAmnesty

    International et la doctrine ; notion critiquable, la situation de rfugi

    sapprciant sans aucune considration de loption politique de lEtat

    daccueil.

    En se basant sur la situation dans lEtat dorigine, la doctrine dfend

    une extension des fondements de la contrainte lgitime pour y associer

    les rfugis de la faim et les rfugis cologiques, extension des motifs

    de perscution contenus dans la dfinition de la Convention.

    57

    Voy. la Directive 2004/83/CE du Conseil du 29 avril 2004 concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prtendre au statut de

    rfugi ou les personnes qui, pour dautres raisons, ont besoin dune protection internationale ; Pour le concept de

    pays dorigine et le concept de pays tiers sr, Voy. les articles 31 larticle 27 de la Directive 2005/85/CE Du Conseil de lEurope du 1er dcembre 2005 relative des normes minimales concernant la procdure doctroi et de retrait du statut de rfugi dans les tats membres.

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    La faim comme motif de perscution dfendue par le Pr J. ZIGLER58 est

    rfutable ds lors que les Etats de provenance ne dveloppent pas une

    culture paysanne favorable au dveloppement de lagriculture

    concurremment la disparition des industries manufacturires, les

    potentialits agricoles tant mal utilises. Et les Etats ctiers ne

    rinvestissent pas les capitaux gnrs par les licences de pche dans

    la surveillance des ctes quand bien mme que le pillage des ressources

    serait une des causes de la pauvret.

    Les populations provenant des zones arides ou submerges,

    considres comme rfugis cologiques pourraient tre mieux assistes

    par la suppression des marchs de droits de polluer leur conversion en

    investissements productifs capables de fixer les populations, les

    retombes des droits de polluer la place de lautre narrivent jamais

    aux mains de ceux qui souffrent des catastrophes naturelles, de la

    dgradation insidieuse du cadre de vie.

    Cette thse de rfugis de la faim serait acceptable en dfinissant les

    rfugis de Ziegler par un dplacement des lieux de la perscution en y

    associant la crainte de perscution dans le pays daccueil, dans les

    Etats qui accueillent mal ; la population carcrale des nombreux

    centres de dtention administrative, ces prisons pour trangers

    indsirables, non admissible lasile et lassistance en tant que

    travailleurs migrants nen seront pas moins qualifis des rfugis de la

    faim.

    58

    Pour le Pr J. ZIEGLER, il sagit dElargir la dfinition des motifs de perscution retenues par la Convention des Nations sur les rfugis de 1951 en y incluant les rfugis de la faim ; le gouvernement italien y est favorable,

    et des groupes en Espagne dfendent ce principe de non refoulement des rfugis de la faim ; Professeur Jean

    ZIEGLER, Table ronde sur le Conseil des droits de lHomme, Salle des Actes du rectorat, IDHP-UCAD, 25 mai 2009.

    Dans le cadre de la 5me session du Conseil des droits de l'homme du 11 au 18 juin Genve, le Professeur Jean

    Ziegler avait demand ses membres d'laborer une nouvelle norme internationale pour le non-refoulement

    temporaire des refugis de la faim.

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    Les rfugis de la faim proviennent des Etats aux conomies mines par

    les pays auxquels ils viennent rclamer rparation par lintgration

    dans leur march plus quappauvri et incertain.

    Ne pas admettre les rfugis de la faim et les rfugis cologiques serait

    discriminatoire59 du fait que la fuite des cerveaux concernant les

    rfugis intellectuels est admise sans aucune difficult60, notamment en

    France avec limmigration choisie, les personnes tant dune mme

    provenance.

    Une dfinition unanime de la perscution travers une rvision de

    larticle premier de la Convention de 1951 sur les rfugis serait une

    fine-fleur, les menaces la dignit et la paix constitutives de motif de

    perscution ne rsultant plus des guerres et conflits, mais de facteurs

    nouveaux : le pillage des ressources naturelles et la libre circulation des

    biens.

    La dfinition dune protection subsidiaire ou dappoint pourrait

    contribuer au recyclage des personnes aux emplois les plus adapts

    leurs occupations dorigine et permettre daccorder ce quon pourrait

    appeler le droit au sjour ds lors que les reconductions massives

    peuvent dune certaine manire tre des motifs de perscution.

    59

    La suppression de la mention de la profession dans les titres de voyage vise empcher la discrimination fonde

    sur la profession.

    60 Un constat : De nombreux flux de migrations illgales proviennent de pays dAfrique subsaharienne et vont vers

    lEurope par lAfrique du Nord. Au cours de leur voyage vers lEurope, beaucoup de migrants se retrouvent immobiliss dans les pays de transit, sans espoir rel de retour. Tandis que la traite et le trafic des personnes sont

    llment visible des migrations illgales, la fuite du capital humain (la fuite des cerveaux) cause par les

    politiques de recrutement des pays dvelopps est un lment tout aussi srieux des flux lgaux : Voy. Louis MICHEL, Coopration Europe-Afrique au Mali, in revue Migrations forces, N32 mai 2009 p.62

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