Memoire Lbo en Difficulte Antoine Pepin

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    MEMOIRE - MASTER 1 FINANCE

    Anne universitaire 2011 - 2012

    Ralis et prsent par Antoine PEPIN

    Sous la direction du Professeur Hubert de LA BRUSLERIE

    LBO EN DIFFICULTE : DIAGNOSTICS, INTERVENANTS ET SOLUTIONS

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    REMERCIEMENTS

    Je souhaiterais remercier tout particulirement mon tuteur de mmoire Monsieur le Professeur

    Hubert de la Bruslerie pour l'aide efficace qu'il m'a apporte et les conseils aviss quil m'a

    prodigus tout au long de mon travail.

    Llaboration du prsent mmoire ma galement fourni lopportunit de travailler avec tous

    les intervenants financiers associs aux oprations de LBO, aussi bien dans les phases

    prparatoires que dans lidentification et la rsolution des difficults rencontres : banquiers,

    avocats daffaires, experts comptables et commissaires aux comptes, directeurs financiers,

    managers de transition, administrateurs judiciaires, prsidents de chambre honoraires au

    tribunal de Commerce de Paris.

    Je tiens remercier, pour leurs conseils aviss, leurs suggestions et le temps significatif quils

    mont consacr, les professionnels trs expriments suivants :

    David BRAULT, ancien directeur financier et dirigeant fondateur dObjectif Cash, principal

    cabinet spcialis dans la direction financire oprationnelle et le management de transition (il

    a men depuis 10 ans plus de 400 missions, en France et linternational, avec une quipe

    dune soixantaine de collaborateurs. La plupart de ces missions a t ralise dans des

    participations de fonds dinvestissement, supportes par des LBO, sous-performantes en

    termes de gestion de cash et souvent en crise de trsorerie)

    Philippe DE NERCY, banquier chez BNP Paribas, anciennement head of leveraged finance

    en Espagne et spcialiste des refinancements des LBO

    Pascal FERRON, expert comptable et commissaire aux comptes, prsident pour la France du

    cabinet daudit international Baker Tilly

    Jacques GOYET, avocat et prsident du directoire de Bignon Lebray & Associs (cabinet

    prsent Paris, Lille, Lyon, Marseille et Shanghai, qui runit prs dune centaine de

    professionnels, organiss en 8 ples dexpertise dont le ple Fusions, Acquisitions et Droit

    des Socits Entreprises en difficult).

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    Jacques Goyet intervient dans des oprations de fusions-acquisitions, de restructurations et de

    haut de bilans de socits cotes et non cotes. Cette activit lamne conseiller aussi bien

    des actionnaires privs que des socits dinvestissement ou des industriels.

    Laurent LE GUERNEVE, administrateur judiciaire et associ au sein de lune des

    principales tudes dadministrateurs judiciaires franaises, la SCP Valiot-Le Guernev-

    Abitbol. Laurent Le Guernev a t entre autres en charge de la sauvegarde dEurotunnel.

    Bernard SOUTUMIER, prsident de chambre honoraire au tribunal de Commerce de Paris

    et ancien directeur gnral au sein de grands groupes industriels internationaux.

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    TABLE DES MATIERES

    REMERCIEMENTS 2

    INTRODUCTION 6

    LANNONCE DU PLAN 8

    LA DEMARCHE ADOPTEE 9

    I. LE LBO : UN MODE DE FINANCEMENT DACQUISITION DENTREPRISES

    QUI NEST PAS SANS RISQUES 10

    A. Dfinition du LBO, ses formes et les 4 effets de levier 10

    1. LBO et private equity 10

    2. Dfinition 10

    3. Approche historique du LBO 17

    4. Typologie et acteurs du LBO 18

    B. Le LBO comme outil de restructuration et transformation dune socit cible 22

    1. La cible idale dun LBO 22

    2. Ltablissement du business plan et de la stratgie 24

    C. Le LBO sappuie sur un montage complexe 27

    1. Evaluation et ngociation du prix de laffaire 27

    2. Structuration du financement, subordination et rle des covenants 28

    D. Le LBO : une opration non sans risques 36

    1. Les risques inhrents au recours une holding 36

    2. Lacquisition dune cible avec effet de levier nest pas neutre en termes oprationnels. 37

    II. DIAGNOSTICS DU LBO EN DIFFICULTE ET FRAGILITES INTRODUITES

    DANS LENTREPRISE RACHETEE 39

    A. Etat des lieux des LBO : une crise discrte 39

    1. Des acquisitions de plus en plus chres et des performances qui rgressent 39

    2. Linquitude lie aux comportements des nouveaux acteurs et lmergence de critiques 40

    3. Pas de risque systmique mais des menaces 42

    B. Typologies de LBO en difficult 43

    1. Une problmatique triple : financire, juridique et humaine 43

    2. La bonne fin remise en cause 43

    C. Le non respect de la trajectoire assigne par le business plan des LBO 45

    1. Des business plans trop optimistes 45

    2. Dcrochage, accident, dgradation 46

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    D. Les situations de non-respect des covenants bancaires et leur impact sur les relations avec les parties au

    LBO 47

    1. Bris de covenants sans que la socit ne cesse d'tre bnficiaire 48

    2. Constat simultan du non-respect des covenants et d'une situation dficitaire: le cumul des difficults 50

    E. Lapparition dune nouvelle tendance chez les banques : la prise de contrle 54

    1. La crainte dtre assimiles des dirigeants de fait 54

    2. La prise de contrle par les banques : le cas Monier 54

    III) LES SOLUTIONS POUR REDRESSER LE LBO EN DIFFICULTE : LA

    SECURISATION DU MONTAGE, LA GESTION DES TURBULENCES, LES AIDES

    A LA RENEGOCIATION ET LES ALTERNATIVES 56

    A. La gestion du LBO en amont des difficults et limportance du management 56

    1. Scuriser lacquisition 56

    2. Prvoir la sortie, le coup daprs 58

    3. Le dfaut danticipation et linefficacit des alertes comme explication des checs ? 61

    4. Le management en place est-il capable de grer les transitions et turbulences ? 62

    B. Les procdures amiables et collectives comme aide la rengociation 66

    1. LBO et Droit franais 67

    2. Les procdures amiables : linitiative du dbiteur, confidentielles et volontaires 68

    3. Les procdures collectives au service du LBO 73

    4. Lapparition de procdures semi-collectives, la Sauvegarde financire acclre 78

    C. La possibilit de recours une approche plus stratgique : le LBU 80

    1. Combinaison des approches stratgique et financire 80

    2. Un montage efficace et peu risqu 81

    D. La remise en cause du modle LBO 82

    1. Le modle du LBO a encore de lavenir 82

    2. Mais pour combien de temps ? 82

    CONCLUSION 84 Les enjeux 84

    Les leons 85

    ANNEXES 87 Le groupe Bollor et leffet de levier juridique 87

    Fonds dinvestissement et principales oprations 88

    Lvaluation des socits cibles par la fonction Score 89

    Exemple de structuration dun montage LBO 90

    Statistiques du LBO en France 92

    BIBLIOGRAPHIE 93

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    INTRODUCTION

    Dans le milieu des annes 1980, des montages, en provenance des Etats-Unis et

    rapidement apprcis des investisseurs, ont merg en France, permettant un repreneur

    ayant des capacits de financement limites par rapport la valorisation dune socit, de

    prendre le contrle de cette dernire.

    Ces oprations, connues sous lappellation de LBO (leveraged buy-out) ou oprations effet

    de levier, ont dabord rpondu la problmatique de renouvellement de la population des

    chefs dentreprises familiales et de rallocation dactifs dans le cadre de grands groupes

    (Carrefour avec Picard, Accor avec Courtepaille).

    Aujourdhui, le LBO est dfini comme le rachat dune entreprise considre saine, financ

    partiellement par de la dette, dans un cadre juridique particulier, en associant les dirigeants

    des investisseurs spcialiss. Ladjonction de leverage rend compte de laspect essentiel

    du mcanisme, leffet de levier. Plusieurs modes de transmission existent mais recouvrent les

    mmes caractristiques communes : une holding de reprise acquiert une socit ( la cible )

    grce de lendettement, la contrle ainsi de faon indirecte et ralise des conomies dimpt

    grce la dduction, de son rsultat global, des frais financiers dcoulant de lemprunt. Pour

    reprendre une clbre formule, il sagit pour la holding de contrler sans argent et

    demprunter sans surface .

    Fleuron de lindustrie du Private Equity, le montage LBO repose sur la capacit de la cible

    verser des dividendes la holding de reprise. Il fonde sa stratgie sur la viabilit de belles

    entreprises, susceptibles de dgager davantage de cash-flows durant la priode de dtention,

    afin que le risque de non-remboursement de la dette soit acceptable. La valorisation de la

    cible est directement corrle limportance de ses cash-flows futurs. A fonds propres

    constants, le montant de la dette dacquisition (porte par la holding) sera dautant plus lev

    que la rentabilit prvisionnelle de la cible sera forte.

    Le march du LBO se caractrise par sa sensibilit la situation macro-conomique, que cela

    soit laversion pour le risque, la pnurie de liquidits ou bien encore le resserrement de laccs

    au financement de sources bancaires. Il a t particulirement impact par la crise de ces

    dernires annes.

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    La croissance du march sest accompagne dune sophistication du mcanisme : le montage

    type se dcline dsormais en situations particulires, ce qui ncessite, de fait, un encadrement

    accru par le biais de rglementations spcifiques. Lensemble de ces contraintes va dans le

    sens de la prservation de lquilibre entre capital et dette, entre actionnaires et prteurs,

    majoritaires et minoritaires, dans loptique du maintien ou du dveloppement dune activit

    conomique relle.

    Lanalyse de lopration par lapproche de ses leviers permet de bien saisir les enjeux de la

    sophistication du montage et de faire apparatre ses points de tension. Dfini par Jensen

    comme lantidote des dfauts de la grande socit cote, et larchtype dune structure de

    gouvernance efficiente , le LBO est cependant crateur de risques juridiques et conomiques.

    En effet, la reprise dentreprises saines nempche pas des rats et il ne faut pas occulter le

    fait quune entreprise sous LBO fait face des contraintes fortes.

    Depuis la fin de lanne 2011, lindustrie du Private Equity traverse une crise sans prcdents

    marque par un resserrement du crdit, dit credit crunch , qui rappelle douloureusement

    lanne 2009 durant laquelle de nombreux fonds dinvestissement ont perdu jusqu

    lintgralit de leur investissement (en fonds propres).

    La reprise conomique rcente a occult le fait que de nombreux LBO ntaient pas viables

    financirement. Historiquement, avant la crise du LBO, le systme cible + holding

    dmontrait toute son efficacit en matire de financement dacquisition dentreprises. Les cas

    de LBO en difficults montrent les limites de lopration et, selon lAFIC (Association

    Franaise des Investisseurs en Capital), 22,8% des entreprises sous LBO en 2010 nont pas pu

    respecter leurs covenants financiers (clauses incluses dans un contrat de prt qui peuvent

    entraner le remboursement anticip du prt). Plus inquitant encore, les dernires annes ont

    t marques par lmergence de LBO dits zombies, car concernant des entreprises dont la

    valeur est devenue largement infrieure celle de leur dette et dont les actionnaires nont plus

    gure despoir de rcuprer leur mise.

    Dans ce contexte,

    Quels sont les lments de fragilit dun LBO et les principales crises auxquelles il peut

    tre confront ?

    Comment alors redresser la situation par le dploiement de solutions prennes ?

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    LANNONCE DU PLAN

    Le prsent mmoire vise non seulement dterminer les fondamentaux dune opration de

    LBO mais aussi ses zones de fragilit, expliciter les difficults rencontres par les

    intervenants et les solutions mises leur disposition.

    La premire partie tentera de lgitimer le montage LBO, de le replacer dans le contexte

    conomique et financier des dernires annes, de prsenter la problmatique des financements

    structurs, tout en mettant en lumire les risques associs et la complexit de la

    documentation financire. Viendra ensuite lexpos de notre seconde partie, rvlatrice des

    problmes et situations de crises auxquels font face certains LBO. Nous commencerons par

    un tat des lieux du LBO, avant daborder les diffrentes situations de crise par ordre de

    gravit. Nous associerons chacune delles le positionnement et les ractions des principaux

    cranciers, tout en identifiant les possibles conflits dintrt de nature complexifier les

    restructurations subsquentes. Nous expliciterons ensuite le large spectre des solutions qui

    existent pour redresser un LBO, en tentant de dterminer les plus appropries. Nous

    terminerons notre tude en traitant de lavenir possible du montage.

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    LA DEMARCHE ADOPTEE

    Il existe une abondance de chiffres sur lactivit des LBO. Pour autant, toutes ces donnes ne

    prsentent pas des gages de fiabilit parfaite. La grande opacit qui caractrise ce milieu ma

    conduit mener lenqute auprs des acteurs du LBO, adopter une dmarche empirique

    afin didentifier non seulement les failles du systme mais aussi les voies damlioration, dans

    un contexte de droit en constante volution.

    Le culte du secret qui entoure les LBO trouve largement son origine dans lampleur des

    enjeux financiers concerns, la multiplication des acteurs et intervenants, et dans des

    situations de difficults extrmes la ncessaire confidentialit associe au droulement des

    procdures relevant du tribunal de commerce. Jai malgr tout eu la grande opportunit de

    suivre plusieurs dossiers, dexaminer la situation juridique, conomique, sociale et financire

    dentreprises en difficult, ainsi que les dispositions prises pour y remdier.

    Compte tenu de la confidentialit rappele ci dessus, il ne m'a pas t possible de citer la

    plupart des noms des socits concernes. Je n'ai pu le faire que lorsque ces socits ont

    diffus de l'information dans les mdias.

    Je dois admettre trs volontiers que cest aussi grce au support clair de plusieurs dcideurs

    trs expriments, couvrant tout le spectre des problmatiques de LBO, que jai pu mener

    bien mon tude. Ce mmoire se veut la fois une synthse des informations offertes par les

    professionnels qui mont consacr une partie de leur temps, ce qui implique une certaine

    fidlit aux paroles prononces, mais galement une prise de recul permettant de dgager des

    tendances, sil sen prsente, et des prconisations dbouchant sur des pratiques pertinentes.

  • 10

    I. LE LBO : UN MODE DE FINANCEMENT DACQUISITION DENTREPRISES

    QUI NEST PAS SANS RISQUES

    A. DEFINITION DU LBO, SES FORMES ET LES 4 EFFETS DE LEVIER

    1. LBO ET PRIVATE EQUITY

    Lorsquelle se trouve confronte aux contraintes et limites poses par les sources

    traditionnelles de financement, une entreprise peut trouver une alternative de financement

    auprs dacteurs du Capital Investissement ou Private Equity. Une opration de Private Equity

    peut intervenir tout au long de la vie dune entreprise. Elle vise prendre des participations

    dans les fonds propres de socits non cotes et constitue une classe dactifs part entire. On

    distingue cinq grands types doprations correspondant aux cinq grandes tapes du cycle de

    vie des entreprises : la cration, le dmarrage de lactivit, le dveloppement, la maturit et le

    dclin.

    Quand une entreprise atteint sa maturit, quelle bnficie dun management expriment,

    dun historique de performances stables et dun positionnement de premier plan sur son

    march, se pose la problmatique de la transmission de lentreprise. Les oprations de Capital

    Transmission les plus clbres sont les rachats avec effet de levier ou LBO.

    2. DEFINITION

    La technique du LBO est communment dfinie comme une opration par laquelle une ou

    plusieurs personnes prennent, par lintermdiaire dune ou de plusieurs holdings, le contrle

    dune socit ayant une activit industrielle ou commerciale ( la cible ), en finanant la plus

    grande partie de cette acquisition par un emprunt, lequel est ensuite rembours grce aux

    remontes de trsorerie provenant de la cible. Lemprunt est ainsi utilis comme un levier

    pour rentabiliser linvestissement dacquisition.

    2.1. Le LBO : un outil de transmission

    La transmission dune entreprise reprsente une rupture importante et lentreprise est un actif

    dont il convient dassurer la survie et qui doit tre valoris au mieux dans lintrt du cdant.

  • 11

    Le LBO constitue souvent une solution une succession familiale ou une cession par un

    groupe dune division. Cette opration peut galement permettre de sortir une socit de la

    bourse quand elle est mal valorise ou lorsque la cotation fait peser dimportantes contraintes

    sur la socit.

    Le LBO est ralis autour du management actuel ou avec laide dune nouvelle quipe

    dirigeante. Il est financ en capitaux propres par des fonds spcialiss et repose sur des dettes

    aux priorits de remboursement diffrentes.

    Une entreprise sous LBO nest pas foncirement diffrente des autres dans le sens o elle est

    confronte aux questions entrepreneuriales fondamentales : comment gagner et fidliser les

    clients, comment sassurer dune position concurrentielle favorable, comment gnrer un

    bnfice distribuable tout en continuant dinvestir ?

    La diffrence rside, en fait, dans le type dactionnariat et le poids de la dette.

    2.2. qui sappuie sur une holding dacquisition

    Principe et constitution dune holding

    Lachat est ralis par lintermdiaire dune holding qui, quelque soit le contexte, est

    constitue et dtenue par les fonds et les managers qui rentrent dans le capital. Vritable

    coquille financire, cette holding sendette afin dacqurir lentreprise cible : on y loge la

    dette.

    Les excdents de rsultat de la socit cible remontent ensuite la holding sous la forme de

    dividendes, afin de rembourser les intrts et le capital emprunt. Les banques prennent en

    garantie les titres acquis par la holding et exercent un contrle attentif sur le droulement des

    oprations. En France, contrairement aux Etats-Unis, la loi interdit de rembourser la dette

    dacquisition par apprhension des actifs de la cible ou par constitution de garantie reposant

    sur ces actifs. Le montage se heurte la ncessit pour la holding de reprise de dtenir 95% de

    la cible si elle souhaite lancer une procdure de retrait obligatoire permettant de quitter la

    Bourse et instaurer une intgration fiscale (voir effet de levier fiscal).

    Il peut tre envisag de crer une cascade de socits holdings dans le but de dmultiplier la

    force de contrle du montage. Un investisseur cre une holding dont il dtient 51% et qui

    sendette pour dtenir une holding 51% elle-mme endette pour dtenir 51% dune autre

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    socit. Linvestisseur dtient alors le contrle dune socit en ayant investi une trs faible

    part des capitaux dont elle dispose.

    Le montage LBO mobilise de nombreuses parties prenantes et certaines vont participer

    minoritairement au capital de la holding, dite New Co . La prsence de minoritaires impose

    de rgler initialement les dcisions et situations auxquelles les actionnaires pourraient avoir

    faire face. Dans ce contexte, le pacte dactionnaires organise le pouvoir et les relations entre

    les parties et cre un statut dactionnaire impliqu.

    Schma simplifi du montage financier LBO

  • 13

    Quelle forme juridique de la holding pour rpondre aux attentes du montage ?

    Faire le choix de la socit par actions permet de runir des acteurs poursuivant des objectifs

    financiers diffrents. Dans cette optique, la holding de reprise prend presque toujours la forme

    dune socit anonyme ou dune socit par actions simplifies (SAS). La socit en

    commandite par actions (SCA) nest pas adapte aux oprations de LBO car les investisseurs

    en capital nont aucun droit, et en particulier pas celui de sanctionner une gestion inadquate

    de lentreprise. Par ailleurs, les capacits dmission et le droit linformation de lassoci

    sont limits dans une SARL.

    Au contraire, la SAS et son absence de soumission un cadre juridique obligatoire,

    permettent une grande libert dorganisation des relations entre actionnaires en prvoyant des

    clauses dagrment ou dexclusion, et les clauses statutaires ne peuvent tre adoptes ou

    modifies qu lunanimit des associs. Son inconvnient principal se situe dans

    linterdiction pour la SAS de faire appel public lpargne. Or, les investisseurs considrent

    cette opration comme une voie de sortie avantageuse. Enfin, la constitution de la holding en

    SCA ou SAS permet la stipulation dune clause de variabilit du capital et ainsi un

    accroissement instantan de la liquidit du capital, une caractristique propre attirer de

    nouveaux investisseurs.

    2.3. et 4 effets de levier

    Le principal intrt dune acquisition par LBO rside dans le fait quelle conjugue des effets

    de levier, quelle joue leffet de levier au-del des limites bancaires usuelles, lobjectif tant

    damplifier et dacclrer la rentabilit naturelle de linvestissement.

    Certains des leviers vont directement gnrer un accroissement de la performance financire

    (leviers primaires). Dautres contribuent indirectement et plus marginalement la

    performance ; ces leviers sont secondaires. Lengagement de ces leviers impose une

    structuration.

    Leffet de levier de la dette et laugmentation du multiple taient par le pass les leviers

    majeurs de cration de valeur. La performance de quelques LBO a engendr un got prononc

    pour leffet de levier avec parfois des ratios capital sur dette de 1 sur 200. Ce gigantisme a eu

    pour consquence dentraner le lgislateur limiter certaines oprations.

  • 14

    Dans le contexte actuel, la croissance de lEBITDA est devenue dterminante alors que la

    hausse des taux dintrt, la rarfaction du crdit et les perspectives conomiques peu

    favorables diminuent leffet de levier de lendettement.

    Le levier augmente la volatilit et le niveau de risque de la valeur des fonds propres. Cela

    explique pourquoi les fonds ont des objectifs de TRI (Taux de Rendement Interne) lev.

    Effet de levier financier

    Dans la thorie financire, leffet de levier rend compte dun phnomne simple : si la

    rentabilit conomique dun investissement est suprieure au taux dintrt des emprunts, le

    propritaire dune entreprise a tout intrt faire financer cet investissement en augmentant

    lendettement de sa socit.

    Appliqu au LBO, leffet de levier financier reflte le fait que le rendement dun investisseur

    qui acquiert une entreprise sera, toutes choses gales par ailleurs, dautant plus important que

    le montant de capital quil aura investi pour cette acquisition sera faible. Il permet donc

    linvestisseur dacqurir une entreprise sans en avoir les moyens, tout en transfrant le

    maximum de risque au prteur.

    Lexprience a montr aux banquiers quil est fondamental que lengagement de chacun soit

    important : accepter un levier trop important revient, pour le banquier, prendre un risque

    dinvestisseur sans pouvoir en esprer la rmunration.

    Entre linvestisseur qui cherche naturellement rduire sa mise de dpart et le banquier qui

    doit limiter son risque, le levier correspond bien au point dquilibre des forces en prsence.

    Le montage de lopration doit rester Investment Grade (notation comprise entre AAA et

    BBB- selon lagence de notation Standard & Poors).

    Effet de levier fiscal

    Leffet de levier fiscal rsulte des moyens mis en uvre permettant de minimiser le cot

    dopportunit fiscal du LBO, en palliant lexistence simultane dun dficit fiscal dans la

    socit holding et dun rsultat imposable dans la cible.

    Aprs lacquisition, la cible devra remonter des dividendes la Newco pour que celle-ci

    puisse rembourser sa dette dacquisition. Le groupe aura alors le choix, sur le plan fiscal, de

    rester dans le rgime mre-filiale ou dopter pour le rgime dintgration fiscale.

  • 15

    Ces deux systmes fiscaux varient selon le montant de la participation de la holding dans la

    socit cible.

    Rgime mre-fille ou

    Si la holding dtient au moins 5% du capital de la cible, elle a la possibilit dopter pour le

    rgime, optionnel, mre-fille. Dans ce cas, les dividendes que la holding recevra et qui lui

    seront verss par la cible sont dfiscaliss. Ils ne rentrent pas dans lassiette de limpt sur les

    socits (IS) que celle-ci doit payer puisque ces dividendes proviennent dun rsultat qui a

    dj subi lIS. La holding va pouvoir apprhender les bnfices de la fille en exonration

    dimpts sur les socits, sous rserve de la rintgration dans son rsultat imposable au taux

    de droit commun dune quote-part de frais et charges gale soit 5% du montant total des

    dividendes soit au montant rel si ce dernier est infrieur.

    Intgration fiscale

    Introduite en France en 1988, lintgration fiscale permet au groupe constitu de la holding et

    de la cible de bnficier dune conomie dimpt de par la diminution de lassiette fiscale du

    montant des intrts de la dette dacquisition. Dans ce montage, les charges financires lies

    la dette viennent en dduction, pour le calcul de limpt du groupe, du rsultat avant impt de

    la cible : il y a confusion des rsultats des structures. LEtat prend donc en charge une partie

    du remboursement de la dette dacquisition. Lconomie dimpt gnre est gale au taux

    dimposition de lIS multipli par le montant des charges financires.

    Pour que le groupe bnficie dune pleine conomie dimpt, le rsultat avant impt de la

    cible doit tre suprieur aux charges financires du holding.

    Le montage lpreuve de lamendement Charasse

    Lamendement Charasse a pour objectif de limiter la cration artificielle de charges financires

    chez le holding dans le cadre du financement doprations dacquisition soi-mme. Cet

    amendement fait suite lclosion de montages juridiques dune grande complexit ayant pour

    seul but fiscal de dgager des liquidits par le biais dune vente lui-mme des filiales dun

    groupe. Parce que ladministration fiscale, le seul perdant dans le montage, ne voulait plus

    supporter le cot de ces rachats, les intrts des emprunts ayant servi lacquisition doivent tre

    rintgrs dans le rsultat taxable du groupe, les titres des filiales entrant ensuite dans le groupe

    intgr.

  • 16

    Effet de levier juridique

    Leffet de levier juridique consiste dmultiplier le contrle dun actionnaire par la mise en

    place dune succession de holdings et renvoie la notion de cascade de holdings. Grce

    cette technique, de nombreux entrepreneurs1 ont pu constituer des groupes de taille importante

    avec un apport de capitaux personnels limit.

    Certains LBO ont t monts grce cette technique, avec parfois la mise en place de dettes

    dans les holdings intermdiaires, ce qui dmultiplie la puissance financire de lactionnaire

    majoritaire.

    Lexprience douloureuse de la crise a mis un terme quasi complet aux montages de ce type.

    Effet de levier social

    Les leviers agissent en cascade sur toutes les strates de lorganisation. Leffet de levier social

    concerne le rle jou par les repreneurs dans lopration de LBO. Initi par un investisseur, le

    LBO sollicite la fois les managers et les principaux actionnaires.

    Il ncessite lintervention de nombreux acteurs dont les objectifs et le niveau dexposition au

    risque peuvent diffrer, mme si lintrt de tous converge dans la russite de lopration.

    Le levier social sappuie sur la capacit des investisseurs rallier les managers. Lquipe

    dentrepreneurs doit tre comptente, complmentaire et motive. Il est important que les

    repreneurs dtiennent une part du holding afin quils ne ragissent pas en salaris mais en

    capitalistes contraints au succs.

    1 L exemple du groupe Bollor figure en annexes.

    Pour une socit dont le prix est de 300 000, les repreneurs ne disposant que de

    75 000, dcident de les apporter la cration dune premire socit holding. Avec un

    crdit bancaire de 75 000, cette dernire pourra apporter la somme de 150 000 au

    capital dune holding intermdiaire. Ensuite, cette seconde holding contractera un crdit

    bancaire de 150 000, qui pourra lui permettre de racheter lintgralit du capital de la

    socit cible.

  • 17

    3. APPROCHE HISTORIQUE DU LBO

    Le LBO est n aux Etats Unis dans les annes 1960 et sest surtout dvelopp dans les annes

    1980. Il connait trs vite un grand succs avec le rachat de RJR Nabisco par KKR en 1988

    pour 25 milliards de dollars. Mais le dbut des annes 1990 est difficile tant les entreprises

    sont fragilises dans un contexte de rcession conomique (crise des Junk Bonds ). Malgr

    ces difficults, le LBO se rvle un placement rmunrateur pour les investisseurs mais aussi

    les prteurs.

    LEurope suit avec retard les Etats-Unis. En effet, ce nest quau cours des annes 1980 que

    lEurope, et surtout le Royaume-Uni, se sont lancs dans le mouvement. Le phnomne est

    encore plus rcent en France bien que, ds le milieu des annes 1980, le fonds LBO France ait

    mis la main sur Darty. Le march du LBO a connu une forte et rapide expansion du fait de la

    hausse de la capitalisation boursire de la place de Paris et de la prsence de liquidits

    abondantes.

    Initialement, les fonds de LBO se focalisaient sur la problmatique de succession dans les

    petites entreprises et la rallocation dactifs pour les plus importantes. Les montants mobiliss

    taient peu significatifs mais, trs vite, la tendance sest inverse, entranant avec elle une

    croissance accrue des oprations. La taille des entreprises nest dsormais plus un obstacle.

    Les fonds se multiplient sur le territoire franais sous limpulsion du succs conomique des

    oprations, de la modernisation du contexte rglementaire en France, de la

    professionnalisation des acteurs et de lafflux des capitaux dans les annes 2000.

  • 18

    4. TYPOLOGIE ET ACTEURS DU LBO

    4.1. Les diffrents LBO

    Plusieurs modes de transmission sont apprhends par la notion de LBO. Il nen existe pas

    une forme unique mais une dclinaison en de multiples variantes.

    Les LBO adosss sur le management

    - Le LMBO (Leveraged Management Buy-Out),

    Plus communment appel MBO , le LMBO est une opration de rachat dune entreprise

    dans laquelle des banques et investisseurs extrieurs financent lquipe de management en

    place dans loptique dacqurir la socit qui les emploie.

    Lopration est monte par le personnel de la socit rachete. Le cas typique dun LMBO est

    celui o un groupe industriel cde ses cadres dirigeants une de ses business units (on parle

    alors de spin off ). Deux facteurs sont dterminants dans la russite dun LMBO : lquipe

    dirigeante et la socit cible. Le fonds peut nanmoins devenir rapidement majoritaire et de

    nombreux LMBO sont de faade, le Fonds agissant masqu par les cadres. Le LMBO

    prsente des limites parmi lesquelles la capacit des cadres mobiliser du financement pour

    leur apport en fonds propres (dits equity ) et lentente et la coopration entre les cadres.

    - Le LMBI (Leveraged Management Buy-In)

    Lopration ne se fonde pas sur les cadres en place mais sur un ou plusieurs nouveaux

    managers qui sont recruts spcialement pour lopration laquelle ils participent

    financirement en prenant une partie du capital de la New Co. Le management prend en main

    la gestion de la cible avec une double logique dactionnaire et de manager. Ces oprations ont

    tendance tre inities par des repreneurs qui dposent leur offre sans obtenir la certitude que

    le propritaire sera effectivement vendeur. Parce que les nouveaux actionnaires cherchent

    maximiser la valeur de lentreprise, laccent est mis sur les cash-flows. Il existe un risque

    important de vives tensions avec lencadrement en place et les LMBI ncessitent un quilibre

    entre la socit cible et lassociation repreneur-investisseur.

    La transaction doit tre ralise dans un esprit qui prserve la prennit et lindpendance de

    lentreprise, tout en lui apportant les moyens pour un dveloppement fort et un renforcement

    de sa position. Le LMBI est trs souvent un pari sur un homme.

  • 19

    - Le BIMBO (Buy-In Management Buy-Out)

    Le BIMBO est une opration hybride, car y participent la fois lquipe dirigeante en poste et

    des managers extrieurs. Le capital de la New Co est dtenu par certains cadres en place

    lorigine dans la cible et/ou plusieurs cadres recruts pour lopration et qui y investissent.

    Les LBO adosss sur les cdants

    Dans une opration de LBO, le cdant peut devenir actionnaire de la holding de reprise. Cela

    permet de rduire le risque de transmission et autorise une sortie plus en douceur du vendeur :

    la sortie dfinitive sera ultrieure. Pour linvestisseur, cette continuit vite les difficults de

    la transmission mais il est ncessaire de cadrer la prsence du cdant afin quil ne bloque pas

    les changements oprationnels induits par le LBO.

    - Le VBO (Vendor Buy Out)

    Le vendeur est actionnaire minoritaire aux cts dun Fonds dinvestissement. Il investit en

    dettes par le biais dun crdit vendeur subordonn important.

    - LOBO (Owner Buy Out)

    Cette opration, caractristique des socits familiales, revient une vente soi-mme. Elle

    permet, en effet, un actionnaire de raliser la vente de son entreprise tout en la conservant.

    Le cdant constitue alors une holding dont il dtient le capital (parfois avec un fonds

    minoritaire) et vend sa socit la holding afin de disposer des fonds pour souscrire le capital.

    La holding sendette auprs de cranciers financiers, souvent de manire plus raisonnable que

    dans les LBO classiques. La difficult rside dans la recherche de lavantage de lintgration

    fiscale alors quil ny a pas de rel changement de contrle.

    Certains LBO peuvent galement sappuyer sur les marchs financiers (oprations de Public

    to Private, Private Investment in Public Equity, Reverse LBO) mais elles scartent de la

    stricte dfinition du Private Equity, qui raisonne sur des actions non cotes.

    4.2. A la base des oprations, le fonds dinvestissement

    Dans une opration de LBO, les dirigeants sont associs des investisseurs spcialiss et

    professionnels sur un horizon de temps dfini.

  • 20

    Au premier rang des investisseurs figurent les fonds dinvestissement2 (APAX, 3I, SIPAREX,

    KKR, LBO France). Ces derniers prsentent une large palette de comptences : stratgie,

    ingnierie financire, excution des transactions, juridique, management, dveloppement,

    Les critres de diffrenciation

    Le premier critre de diffrenciation des fonds LBO est lorigine des fonds grs. Ces fonds,

    investis dans les oprations de Private Equity, nappartiennent pas linvestisseur en capital

    dont le rle sapparente celui dun gestionnaire. Lorigine des fonds influence la politique de

    gestion de linvestisseur, mais aussi les objectifs et exigences de rendement.

    Une segmentation peut ainsi soprer entre :

    - Les fonds indpendants : ils lvent les capitaux quils grent auprs de tiers

    - Les fonds captifs : filiales de groupes dont la quasi-totalit des capitaux grs provient

    de la maison-mre.

    - Les fonds semi-captifs : filiales dun groupe, ils lvent des capitaux auprs de tiers et

    oprent comme les fonds indpendants.

    - Les fonds publics : leurs capitaux proviennent majoritairement dorganismes publics.

    Le second critre de diffrenciation des fonds est la taille des socits susceptibles dtre

    reprises, taille qui sapprcie par le chiffre daffaires et la valeur dentreprise. On distingue

    communment : le small cap (valeur dentreprise infrieur 100 000 000), du mid cap

    (valeur comprise entre 100 000 000 et 500 000 000) et du large cap (suprieur

    500 000 000). Une telle segmentation conditionne lorganisation interne ainsi que le montant

    des capitaux levs.

    Dautres critres permettent de distinguer les fonds comme la part du capital de la socit qui

    est acquis chaque opration, le montant unitaire moyen que le fonds investit ou la

    spcialisation sectorielle.

    2 Les principaux fonds dinvestissement, classs en fonction de la taille des socits reprises, ainsi que leurs oprations majeures de ces dernires annes figurent en annexes.

  • 21

    Limportance des chiffres

    Maximiser la rentabilit de linvestissement est lobjectif affich du LBO. Il sagit pour

    linvestisseur de raliser un taux de rendement interne (TRI) de lordre de 20%, ce qui

    correspond un multiple de son investissement de 2 5 sur une dure de 3 7 ans.

    Linvestisseur achte en premier lieu des perspectives, de la croissance, des rsultats stables

    ou des effets de synergie. En tant quopration de transmission, le LBO se doit dtre tourn

    vers lavenir, de crer de la valeur autour de trois variables cl (laugmentation du multiple,

    lamlioration de lEBITDA et la diminution de la dette nette) et de trois leviers

    stratgiques (la croissance de lactivit, le recentrage et la diminution des cots).

  • 22

    B. LE LBO COMME OUTIL DE RESTRUCTURATION ET TRANSFORMATION DUNE

    SOCIETE CIBLE

    WARREN BUFFET

    La nature des leviers utiliss par lentreprise sous LBO et ses caractristiques propres

    linscrivent dans une squence de transformation stratgique. Les oprations de LBO

    rpondent des problmatiques varies (problmes de succession, dallocation dactifs, de

    restructuration du capital,) mais toutes les socits ne sont pas ligibles. Les investisseurs

    vont, par exemple, viter de slectionner une cible dont lactivit repose trop sur la

    personnalit du dirigeant cdant car, lorsque ce dernier aura quitt lentreprise, le repreneur

    risque de se heurter des difficults.

    Le financement par LBO est litiste et les entreprises cibles sont slectionnes par les fonds

    selon des critres exigeants. La russite d'une opration de rachat par effet de levier doit

    remplir des conditions essentielles:

    La capacit de la cible dgager des cash-flows disponibles pour rembourser la

    dette et les intrts,

    L'investissement d'une quipe dirigeante motive et comptente,

    La possibilit d'augmenter la valeur de la cible :

    - en interne par synergies sur les cots, la restructuration, l'innovation et la cration

    nouveaux couples produits/marchs,...

    - en externe par la croissance externe, la cession d'actif ou par fusion.

    1. LA CIBLE IDEALE DUN LBO

    La cible idale dun LBO doit tre une cash-cow, c'est--dire une socit mre, de croissance

    moyenne, qui gnre un cash suprieur ses besoins et cre de la valeur sur un march stable.

    Si la croissance est trop forte, des besoins supplmentaires de financement (BFR et

    investissements) risquent de mettre en pril le remboursement de la dette dacquisition.

    Its far better to buy a wonderful company at a

    fair price than a fair company at a wonderful price.

  • 23

    Les besoins en cash ncessaires pour dvelopper lactivit doivent tre rduits. La cible idale

    aura un cash conversion cycle court.

    La structure de cots, c'est--dire la rpartition entre cots fixes et cots variables, est un autre

    dterminant dans le choix de la cible. De mme, les variations de cash-flows sur lanne

    doivent tre prvisibles et values lors des due diligences pr-acquisition. Une activit

    saisonnire pour laquelle les ventes et les approvisionnements sont concentrs sur une courte

    priode est susceptible de mettre en danger le montage et une trop forte variation du BFR

    selon les priodes peut empcher la remonte de trsorerie.

    Pr-audit ou due diligences prliminaires : plan for the worst, hope for the

    best

    Les due diligences pr-acquisition visent porter un il critique, stratgique et conomique

    sur le positionnement de la cible au sein de son environnement. Elles sont menes dun point

    de vue la fois externe (environnement de la cible) et interne (valuer la cible au sein de son

    environnement).

    Lanalyse externe comprend deux tapes : la description du secteur et de ses facteurs cls de

    succs et lanalyse des forces concurrentielles du march. On distinguera ainsi cinq types

    dindustrie : les industries mergentes, les industries en transition vers la maturit, les

    industries en dclin, les industries fragmentes et les industries multinationales. Ces industries

    prsentent des profils et enjeux stratgiques diffrents. Alors que dans une industrie

    mergente, lenjeu est de verrouiller laccs la technologie et le rseau de distribution, il est

    de parvenir crer des conomies dchelle dans une industrie plus fragmente.

    Une fois ltude du secteur industriel termine souvre une phase danalyse interne de la cible.

    Lanalyse stratgique permet au repreneur de valider la stratgie qui a t conduite jusquici

    par les dirigeants de la socit. Il en dduira les zones de risques ainsi que les opportunits de

    dveloppement. Michael Porter identifie trois grandes stratgies pouvant tre menes par une

    socit, savoir la domination par les cots, la diffrenciation et la focalisation.

    Les due diligences reposent avant tout sur lexamen de la situation financire de la cible et sur

    lidentification des risques propres lacquisition. La comptabilit ne donne quune indication

    globale de la performance et toute mesure de performance doit rapporter les rsultats de

    lentreprise aux capitaux engags pour les gnrer.

  • 24

    Lvaluation de la cible accorde une grande importance limpact du risque et les

    investisseurs utilisent plusieurs ratios afin de mesurer lendettement de la cible (fonds

    propres/capitaux permanents, dettes financires/CAF,...). Il sagit de dterminer la faisabilit

    de lopration de levier. La fonction score (Conan Holder3), plus labore, est prcieuse car le

    score obtenu par la firme donne une indication quant la probabilit de sa dfaillance.

    Quid de lvaluation du capital humain ?

    On voque bien souvent le capital financier, industriel mais peu le capital humain. Ce dernier

    recouvre lensemble des comptences et des savoir faire qui sont disponibles dans

    lentreprise.

    Un des risques fondamentaux et une raison dchec dans une opration de LBO est de dtruire

    ou sous-utiliser le potentiel humain. En charge de la gestion oprationnelle de lentreprise

    cible, le candidat repreneur idal a une exprience de direction gnrale dau moins 5 ans. Il

    est choisi pour ses qualits de matrise de soi et son aptitude grer des situations de crise,

    rsister la pression que reprsente lendettement de lopration et valuer les besoins

    futurs de la socit.

    Parce quun LMBI est un pari sur lhomme, le repreneur doit justifier lopration et garantir

    sa russite.

    2. LETABLISSEMENT DU BUSINESS PLAN ET DE LA STRATEGIE

    Condition sine qua none du montage, les cash-flows doivent tre suffisants pour garantir la

    fois le remboursement des dettes du LBO et le retour sur investissement exig par les

    investisseurs. Lanalyse de la cible doit donc permettre dvaluer le Cash Flow Available for

    Debt Service (CFADS), le flux effectivement disponible pouvant tre vers la holding et la

    partie verse aux actionnaires (Free Cash Flow for Shareholders).

    A la base du plan de financement qui sera bti en vue de lacquisition, le business plan mont

    par le repreneur a pour objectif de garantir aux investisseurs une visibilit sur cinq ans.

    Souvent rsolument optimiste, il nest pas systmatiquement en accord avec la ralit

    conomique.

    3 Voir annexes : application de la fonction score aux entreprises cibles

  • 25

    Parce que les performances passes naugurent en rien des performances futures,

    linvestisseur se tournera vers lanalyse du business plan qui est lexpression chiffre dune

    stratgie, aussi bien un projet quune ambition.

    Parce que cest un projet, il doit montrer des adquations entre les fins et les moyens, entre le

    profil de lentreprise et son environnement. Parce que cest une ambition, il permet de

    positionner lentreprise dans son espace concurrentiel en termes de modalits de

    dveloppement, de croissance et de rentabilit. Le business plan couvrira non seulement les

    aspects comptable et financier, mais aussi stratgique, technique, juridique et social de

    lentreprise. Il doit faire preuve de concision et de clart de telle sorte que lopportunit que

    constitue le projet apparaisse vidente. Le business plan est indispensable pour obtenir le

    financement dune banque. Elaborer un business plan, obtenir linformation, nest pas

    toujours une tche aise. Parfois, les informations sont obtenues sans lautorisation du cdant,

    par lintermdiaire de dmarches auprs du Tribunal de commerce.

    Les 7 points cls du business plan

    Identifier les produits et charges dexploitation (par ligne de produits,

    clients,) afin de connatre la formation et lvolution des rsultats et les

    cash-flows induits. Essentiel, ce point garantit la viabilit du montage. Les

    apporteurs de fond examineront trois questions en priorit : le montant des

    cash-flows existants, leur dcomposition et la crdibilit des projections.

    Identifier les facteurs de sensibilit et dlasticit du cash-flow par lanalyse

    des performances historiques tout en distinguant les facteurs rcurrents de

    ceux qui sont exceptionnels

    Analyse dtaille des performances rcentes pour dceler une potentielle

    rupture de tendance par rapport lhistorique

    Assurer la cohrence des hypothses financire, humaine, industrielle,

    Construire un modle de prvisions synthtique et comprhensible par tous

    Effectuer une analyse de sensibilit des facteurs cls pour construire

    plusieurs scnarios

    Valider la cohrence globale des prvisions ralises

  • 26

    Avant de communiquer les contrats, il est dusage de faire signer par le repreneur un accord

    de confidentialit portant la fois sur lexistence des ngociations et les informations

    recueillies.

    Parce que lquilibre dun LBO est dpendant de la capacit de lentreprise gnrer de la

    trsorerie et du rsultat pour satisfaire aux contraintes de remboursement de la dette ainsi

    quaux ncessits internes lies au dveloppement de lentreprise, le business plan

    conditionne la faisabilit du montage.

  • 27

    C. LE LBO SAPPUIE SUR UN MONTAGE COMPLEXE

    1. EVALUATION ET NEGOCIATION DU PRIX DE LAFFAIRE

    Le repreneur est assist de son conseil tout au long de lopration, de lvaluation de la

    cible jusqu la ngociation du prix de cession.

    LBO et multiples

    La valeur de la cible doit tre distingue de son prix : la valeur dcoule uniquement de

    lutilisation de mthodes dvaluation alors que le prix rsulte dune transaction. La valeur

    peut donc ne pas correspondre au prix rellement pay par lacqureur. On distinguera deux

    modes de cession : lorsque lacqureur prend linitiative de proposer au cdant dacqurir la

    cible et lorsque le cdant prend linitiative de vendre sa cible en faisant appel au march.

    La russite de lopration de LBO dpend avant tout du prix dentre ; une des prrogatives

    est dviter un rachat trop cher. Dans lvaluation de la cible, il est commun dopposer

    lapproche patrimoniale, selon laquelle la valeur des actions de lentreprise est gale celle de

    son patrimoine net, et lapproche par les flux, selon laquelle la valeur de la cible est fonction

    des flux financiers futurs que lentreprise pourra gnrer.

    Dans leur valuation, de nombreux fonds utilisent des multiples, associs des indicateurs

    comptables tels que lEBE, lEBIT, lEBITDA, le BPA (bnfice par action), le PER (Price

    Earning Ratio), ou dautres indicateurs (les sites Internet sont valoriss en fonction de leur

    trafic). Le choix du multiple est fondamental : le chiffre daffaires est un multiple

    compltement inadapt car il oublie la notion de rentabilit. Cette valuation a comme

    avantage de constituer une valorisation relative qui rsulte dune comparaison avec le march

    mais cette comparaison au march peut se transformer en pige lorsque le march est en

    pleine bulle (euphorie Internet des annes 2000, impact ngatif de la crise partir de 2008).

    Lvaluateur va chercher rcolter des informations provenant de cessions antrieures

    dentreprises identiques ou de valorisations de socit cotes.

  • 28

    2. STRUCTURATION DU FINANCEMENT, SUBORDINATION ET ROLE DES

    COVENANTS

    Dans le cadre dune opration de LBO classique, le financement de la holding dacquisition

    est double : il seffectue la fois par apport en capitaux propres et par la voie de lemprunt.

    Les techniques de financement se sont perfectionnes au fil du temps et sont maintenant dune

    grande diversit.

    Les ressources du plan de financement

    Les ressources du plan de financement sont de deux types : remonte du cash gnr par la

    cible (les distributions de dividendes) et financements manant des partenaires financiers

    (investisseurs et banquiers).

    2.1. La remonte des cash-flows et le risque dabus de biens sociaux

    La remonte des cash-flows de la cible vers la holding prend la forme juridique dune

    distribution de dividendes. Par ailleurs, si au moment de lacquisition la cible dispose de

    trsorerie, elle la remontera vers la holding dacquisition.

    Lutilisation des actifs aux dpens de la socit cible peut constituer un abus de biens sociaux,

    le principal obstacle la libert de gestion des repreneurs, et faire supporter un effort financier

    particulirement lourd. La Cour de Cassation estime quil y a abus de biens sociaux lorsque

    lintrt poursuivi dans les oprations nest pas celui du groupe mais celui du dirigeant

    repreneur, qui fait emprunter des fonds par sa holding afin de prendre le contrle dune

    socit cible, alors que cette holding ne dispose pas de ressources suffisantes pour effectuer

    les remboursements. Pour sexonrer de cette accusation, le dirigeant devra apporter la preuve

    de trois lments principaux : la prsence dun intrt de groupe, dune contrepartie quilibre

    et labsence de mise en pril de la socit prteuse.

    Des situations rptes dabus de biens sociaux dans un pass rcent font quaujourdhui, les

    dispositions des contrats dendettement sont examines avec grand soin.

  • 29

    2.2. Les financements manant des partenaires financiers

    Le montage dune opration de LBO ncessite un savoir-faire particulier, ce qui explique que

    des fonds dinvestissements se spcialisent dans ce type doprations. Les fonds de LBO

    apportent des capitaux propres mais loutil principal de financement consiste en une dette

    bancaire senior qui peut tre complte par une dette junior et/ou par une dette mezzanine. La

    dette leve auprs des banques est consentie Newco pour financer lacquisition de la cible.

    Dans certains cas, le fonds peut descendre une partie de la dette au niveau de la cible dans une

    opration dite de debt push down ; un montage qui est surtout utilis par les socits cotes.

    Larrt rendu par la Cour de Cassation le 10 juillet 1995 dans laffaire du LBO Delattre-Levivier

    illustre la notion dabus de biens sociaux. Alors que lexpert nomm par le tribunal concluait que la

    holding et la cible constituaient un groupe de socits, certains faits lont conduit reconnaitre labus

    de biens sociaux :

    - Leffort financier consenti par la cible navait pas t fait dans lintrt du groupe, mais

    seulement en vue de permettre la holding dacqurir les titres de la cible

    - Ce sacrifice prsentait des risques trop importants au regard de la fragilit financire de la

    holding, dont lendettement tait dj lourd

    - Cet endettement avait empch la cible deffectuer les investissements ncessaires

    - Leffort de la cible tait dnu de contrepartie suffisante

    Holding

    Banque Cible

    1. Distribution

    des dividendes

    2. Prt garanti sur les actifs de la cible

    Debt push down

  • 30

    a) Le financement par fonds propres

    Il est ncessaire de capitaliser le holding de reprise un niveau suffisant pour que les

    banquiers donnent leur accord de principe sur loctroi du financement. Le fonds dispose

    rarement de moyens suffisants pour constituer lapport en fonds propres. Il apporte des

    capitaux propres reprsentant de lordre de 30% 50% du financement total contre seulement

    20% en 2007. Pour faciliter la remonte de cash, une partie des capitaux propres peut prendre

    la forme dobligations convertibles subordonnes (ou mme de TSS : titres super-

    subordonns) dont la conversion devient effective en cas de difficults financires de la

    socit. On parle alors de quasi fonds propres.

    Sur le plan financier, lapport en capital est le plus risqu, du fait du risque de non-restitution

    des fonds en cas de liquidation judiciaire. Linvestisseur en capital exigera une rentabilit plus

    leve quun prteur ordinaire : plus le risque est lev, plus le financement sera coteux.

    b) Le recours lendettement et la rduction des conflits dagence

    Dirigeant de la socit dinvestissement Carlyle

    La technique du LBO utilise un endettement lev pour financer son actif.

    Selon la thorie dveloppe par Jensen (1986), cette dette reprsente une contrainte efficace et

    impose aux dirigeants de mieux grer les actifs de lentreprise dont ils deviennent

    systmatiquement actionnaires directement ou via des intressements. Le dirigeant, mis sous

    tension par un endettement lourd et motiv participer la plus-value finale, va tenter de

    grer le plus efficacement possible lentreprise et amliorer sa valeur.

    Il est particulirement intressant pour les banques de participer des oprations de LBO car

    elles prtent des taux suprieurs ceux du march et parce que leur dette sera rembourse en

    priorit sur les autres dettes dites subordonnes, tout en bnficiant de garanties spcifiques.

    Cheap debt is the rocket fuel. Try to get as much as you

    can, as cheaply as you can and as flexible as you can

  • 31

    Les oprations de LBO constituent une opportunit trs attractive mais rserve seulement

    quelques intervenants du fait de la spcialisation et de lextrme professionnalisme impliqu

    par ce type de transmissions.

    Pour les petites oprations (infrieures 10M), la dette est contracte auprs dune unique

    banque, souvent la banque de la cible, mais pour les plus importantes, la mise en place du

    financement est bien plus complexe.

    Le principe du LBO repose sur la mise en place dune dette senior par opposition la dette

    mezzanine qui la subordination confre un caractre junior. Le levier financier recherch

    ncessite diffrents niveaux de financement aux niveaux de risque croissants.

    Ces financements peuvent tre complts par un crdit vendeur (le vendeur de la cible nest

    pas pay de lintgralit du prix immdiatement) et par des oprations de titrisation dactifs de

    la cible comme les crances ou les stocks si ceux-ci disposent dun march.

    Spcificits dune dette senior

    La dette senior, contracte auprs des banques, se prsente sous la forme dune dette moyen

    terme (5 7 ans) structure par tranches : A,B,C typiquement (+ tranche D / second lien). Elle

    est dclare senior dans le sens o elle sapprcie par la priorit dans son remboursement par

    rapport aux autres modes de financement. La diffrence essentielle entre une dette bancaire

    classique et une dette senior LBO provient du fait que la prise de risque est de nature trs

    diffrente. La dette LBO ne procure aucune contrepartie lentreprise en termes de rsultats

    mais appauvrit la socit ce qui la rend vulnrable aux alas de la conjoncture.

    La mise en place dune dette senior LBO nest jamais similaire dune opration une autre et

    le montage doit tenir compte des caractristiques de la socit cible, de tous les paramtres

    affectant la capacit de remboursement. Ainsi le financement senior peut prvoir des lignes

    supplmentaires destines au financement de besoins particuliers de la socit cible :

    financement de lactivit (lignes de BFR, dcouverts bancaires,), financement

    dinvestissements, financement de la croissance externe (build-up), lignes adosses une

    cession ultrieure dun parc immobilier,

    Au cours de larrangement entre tablissements financiers, le chef de file a parfois recours

    une syndication au march, mais garde le plus souvent 10 20% de la dette son compte.

  • 32

    Le financement des LBO les plus importants est le fait dun nombre restreint dintervenants

    de la place (nous tudierons lexemple de BNP Paribas) qui entretiennent des relations

    privilgies avec les fonds dinvestissement. On constate, par ailleurs, un diffrentiel de

    marge bancaire important pour le financement dune PME et de grandes entreprises.

    Positive and negative covenants

    Inclus dans lacte de prt, les covenants contraignent les emprunteurs au respect de certaines

    normes financires et comportementales et font du banquier senior un vritable partenaire de

    lentreprise. Le but pour le banquier, tant donn le caractre particulier de son financement,

    est dtre tenu inform de lvolution de lentreprise et de dfinir un cadre contractuel.

    On y trouve des clauses varies qui vont au del de simples ratios financiers (Dette nette /

    EBITDA < 5, FCF / Service de la dette total > 1,1,) :

    - Les clauses dinformation :

    Lemprunteur sengage fournir au banquier ses comptes annuels certifis ainsi que ceux de

    ses filiales, indiquer toute modification ou vnement pouvant affecter sa situation.

    - Les clauses de limitation dendettement :

    Lendettement supplmentaire de la Newco est prohib, et celui de ses filiales est plafonn.

    Cette limitation vise vite de masquer une situation qui se dtriorerait ainsi que toute

    croissance non matrise. Les banques, aujourdhui, estiment que ce nest pas elles seules

    dassumer la croissance et que les actionnaires doivent participer cet effort.

    - Les clauses de limitation dinvestissement :

    Ces clauses sont fondes sur le plan prvisionnel dexploitation et cherchent cadrer la

    politique de dveloppement du groupe, en interne comme par croissance externe. Il sagit de

    faire comprendre au dirigeant quune opration de LBO nest pas sans contrainte.

    - Les clauses de non-alination des biens du groupe :

    Ces clauses vitent que la socit puisse cder des actifs et donner des biens en garantie qui

    rduirait, pour le banquier senior, la substance de sa garantie.

  • 33

    - Les clauses de non-versement de dividendes et dexcess cash flow

    Lemprunteur ne peut pas rmunrer ses actionnaires tant que le prt senior nest pas

    rembours. Lemprunteur devra utiliser tout ou partie de lventuel cash flow supplmentaire

    dun exercice pour rembourser par anticipation la dette senior.

    - Les clauses de modification de lactionnariat de lemprunteur :

    Il est essentiel pour la banque davoir le choix de sortir ou non de lopration en cas de

    changement dactionnaire avant le remboursement complet de sa dette. Toute modification de

    lactionnariat peut dclencher lexigibilit anticipe.

    Les bris de covenants associs un contrat revtent une importance variable : une distribution

    de dividendes non autorise pourra tre synonyme de poursuites alors quun non-respect de

    ratio ne sera pas forcment sanctionn (voir II.). Ils nimpliquent pas forcment une

    dfaillance de lentreprise ou une impossibilit de respecter lchance.

    Les financements mezzanines : caractristiques et intrts de la subordination

    Dans le cadre du montage, il existe un niveau dengagement que les banques ne voudront pas

    dpasser. Ce niveau dendettement maximum pourra tre complt par lintroduction dun

    financement mezzanine qui prsente lavantage dtre subordonn, c'est--dire interpos entre

    les capitaux propres et la dette senior (financement dune dure typique de 10 ans).

    Linvestisseur sera incit recourir un financement mezzanine afin dobtenir une structure

    de montage plus souple et une diversification de ses financements.

    Les principaux covenants associs une opration de LBO

    - Non-distribution de dividendes ou assimils de la part du holding

    - Limitation de lendettement et des investissements

    - Contrle de la croissance externe

    - Interdiction de donner des garanties, consentir des prts et de

    souscrire de nouvelles dettes

  • 34

    Ce financement est rembours aprs le dsintressement complet des prteurs senior (en deux

    ou trois annuits aprs la dernire chance de la dette senior) et comporte un droit sur le

    capital.

    Le caractre subordonn de cette dette la rend plus risque que la dette senior. En contrepartie

    de ce risque plus lev, le prteur mezzanine va pouvoir exiger une rmunration plus

    importante : par exemple, intrts cash (Euribor + 4,5%) et intrts capitaliss (4,5%).

    Les instruments les plus utiliss dans le financement mezzanine sont les obligations bon de

    souscription dactions (OBSA) et les obligations convertibles en actions (OCA). Pour mettre

    ce type de titres, il faut que la socit holding soit une socit par actions ayant deux annes

    dexistence et ayant tabli des bilans approuvs par les actionnaires.

    Une OCA, mise par la holding de reprise et non convertie, sera rembourse comme un

    emprunt ordinaire. Les OBSA, quant elles, comprennent une partie dette ainsi quune partie

    donnant accs au capital. Leur rmunration se compose donc dune rmunration sous forme

    de coupons et dun droit sur le capital : le kicker. Les prteurs mezzanine bnficient donc

    dun rendement complmentaire confr par les BSA, qui leur donnent accs une partie de

    la plus-value du fonds LBO. Il a cependant t observ que ceux-ci ne donnent accs qu une

    part minoritaire du capital.

    Parce quil comporte des aspects qui lapparentent une dette et dautres aspects qui

    lapparentent des fonds propres, le financement mezzanine est bien un financement

    intermdiaire.

    Dans un contexte daccs difficile aux marchs de capitaux, la dette mezzanine est de plus en

    plus prise. Par ailleurs, il nest pas rare dobserver sur certaines transactions large cap

    une substitution de la dette mezzanine par des obligations High Yield.

    Formalisation de la subordination de la dette : la convention de subordination

    Dans un montage LBO, prteurs mezzanine et senior se consultent afin dharmoniser leurs

    contrats avant la signature dfinitive, notamment les clauses dexigibilit anticipe. La

    subordination est un lment essentiel de leurs relations.

    Sa formalisation prendra souvent la forme dune convention qui lie emprunteur et prteurs

    dans une relation tripartite. La convention de subordination tablit notamment que tant quil

    existe une somme due au titre du prt prioritaire senior, lemprunteur et les prteurs

  • 35

    subordonns sinterdisent de verser et de recevoir tout autre paiement quun paiement

    dintrt.

    En cas de difficults rencontres par le LBO, de redressement ou de liquidation judiciaire, les

    prteurs subordonns cderont et transfreront par avance toutes sommes qui pourraient leur

    tre attribues au prteur prioritaire.

    Remboursement de la dette et garanties de plus en plus fortes exiges par les

    prteurs : la barrire de larticle L.225-16 du Code de Commerce

    Avec larrive de ladite crise financire, les banques ont renforc leurs critres doctroi de

    crdit et se montrent trs slectives sur les dossiers, ce qui conduit logiquement rduire le

    volume global des montages LBO. La viabilit des oprations est conditionne par la capacit

    de la cible gnrer des cash-flows en vue de rembourser le capital et les intrts de la dette.

    Le remboursement de la dette est une contrainte forte ce qui explique que le financement

    dopration de LBO soit considr par le banquier comme un investissement particulirement

    risqu. Plus le volume de la dette reprsente un montant lev et plus le banquier cherchera

    se prmunir dun risque de non-remboursement (do de nombreuses clauses contractuelles et

    la syndication laquelle sajoute parfois la titrisation de la dette).

    Aprs un ralentissement du march du LBO, la slectivit des dossiers par les fonds et par les

    banques de financement sest accrue. De nombreux fonds sont en cours de leve ou doivent

    entrer en leve de fonds mais, dans un contexte de raret de la liquidit, lchec est de plus en

    plus envisag.

    De ce fait, le banquier exigera systmatiquement des garanties en contrepartie de son

    financement. Or, contrairement aux rglementations anglaises et amricaines, qui permettent

    en autorisant des garanties consenties sur les actifs de la cible de scuriser des oprations plus

    risques, le droit franais interdit toute socit, par larticle L.225-16 du Code de

    Commerce, de donner ses actifs en garantie des engagements financiers pris pour lacquisition

    de ses propres actions.

    Aujourdhui, les banques ne veulent plus se limiter aux actifs de la Newco : le nantissement

    des comptes des actions dtenues par la holding nest plus considr comme suffisant. Elles

    exigent dornavant une garantie portant sur les socits actionnaires, sur les fonds

    dinvestissement : cest le Double Luxco .

  • 36

    D. LE LBO : UNE OPERATION NON SANS RISQUES

    1. LES RISQUES INHERENTS AU RECOURS A UNE HOLDING

    Lutilisation dune holding dans le cadre dun LBO nest pas une opration dnue de risques.

    Ces risques trouvent leur origine dans les relations avec les actionnaires minoritaires de la

    cible, ladministration fiscale, ou les partenaires financiers de la holding.

    Dun point de vue juridique, la responsabilit des repreneurs peut tre engage dans deux cas :

    lappauvrissement de la filiale et la fusion prmature entre la holding et la cible. Si les

    prlvements de la holding sur la filiale deviennent excessifs et quils mettent en danger

    lquilibre financier de cette dernire, les actionnaires minoritaires pourront invoquer devant

    la justice labus de majorit. Afin de limiter ce risque, il convient de procder une gestion

    adapte des distributions de dividendes.

    La fusion entre la holding et sa filiale constitue laboutissement habituel de lopration de

    transmission mais une fusion prmature peut tre sanctionne. Pour constituer un abus de

    majorit, la dcision de fusionner doit tre contraire lintrt gnral de la socit :

    prjudiciable aux minoritaires et procder de lintention des majoritaires de savantager.

    Ladministration fiscale interviendra plutt en cas dabus de droit ou dacte anormal de

    gestion (abus de bien social). Lacquisition dune socit suivie dune fusion avec sa holding

    peut tre constitutive dun acte anormal de gestion si la fusion est effectue peu de temps

    aprs.

    La socit cible peut galement ne pas raliser les performances conomiques et financires

    qui ont t envisages dans le plan de financement soit en raison dalas tenant la situation

    conomique gnrale ou au march, soit en raison de la mauvaise estimation de sa valeur. Au

    final, si la constitution dune holding, la base du montage LBO, prsente des avantages

    indniables du point de vue financier ou fiscal, il apparait essentiel de prendre en compte le

    scnario de lchec du plan de financement dans le montage juridique.

  • 37

    2. LACQUISITION DUNE CIBLE AVEC EFFET DE LEVIER NEST PAS NEUTRE EN TERMES OPERATIONNELS.

    Sous LBO, le mode de gestion de la cible va voluer pour sorienter vers une stricte logique

    de performance financire. La gestion courante est optimise, un systme de reporting trs

    prcis est mis en place ; confiance et transparence avec les sponsors deviennent

    indispensables alors que lhorizon de dcision est resserr du fait dun objectif de sortie

    moyen terme.

    Il apparait quil ny a pas dopration de LBO russie sans un vritable partenariat gagnant-

    gagnant et que ce dernier peut tre gnrateur dinstabilit (le LBO nest quune tape,

    absence de politique de trs long terme) ou dune atmosphre tendue.

    La finalit nest pas toujours le dveloppement proprement dit de lentreprise mais plutt le

    dtournement de la cration de valeur de la firme vers les apporteurs des fonds propres. Les

    entreprises reprises sont mises sous pression. Louvrage de rfrence Vernimmen dfinit

    dailleurs le LBO comme une diminution des fonds propres de lentreprise, la cration dune

    situation dendettement sans raison conomique fondamentale . La recherche doptimisation,

    par effets de levier, comporte de plus en plus un risque de rupture et le stress gnr par la

    dette peut tre un mauvais stress.

    2.1. La difficile conciliation des intrts des diffrents acteurs

    Mcaniques complexes et oprations denvergure, les LBO font se rencontrer de nombreux

    acteurs. Alors que les investisseurs professionnels (les fonds) investissent dans une optique de

    rendement attractif, les banquiers financeurs mettent la disposition des fonds et cherchent

    minimiser le plus possible les risques pris ; les mezzaners se distinguant par leur degr

    daversion au risque. Enfin, les managers offrent des comptences et leurs qualits

    oprationnelles.

    2.2. explique le recours au management package ou plan dintressement

    Si linvestisseur en capital apporte les fonds ncessaires au dveloppement de lentreprise,

    cest bien le management qui porte le projet. Un systme dintressement motivant permet de

    fidliser le management (managers cl et principaux cadres de la socit) et de le rcompenser

    pour les efforts entrepris. Lincentive la russite du projet de LBO prend la forme

    dinstruments daccs au capital (obligations convertibles, BSA, stock-options).

  • 38

    Il est calcul comme une rtrocession de la plus-value du fonds en fonction du TRI atteint ou

    alors sur la base du multiple du montant investi par le fonds.

    La tendance est de plus en plus laccroissement de la gnrosit des fonds (prime la

    gestion) : les rtrocessions sont plus leves et les seuils de dclenchement plus bas. La

    structure permet aux managers dobtenir un multiple dinvestissement et un TRI suprieurs

    celui du fonds, avec un effet dacclrateur. Au cours des dernires annes, certaines quipes

    de management dentreprises sous LBO ont fait de trs bonnes affaires. Il tait plus ais et

    plus rapide de faire fortune dans un LBO comme membre de lquipe dirigeante que comme

    cadre dirigeant dans un grand groupe, si bien quil existe dsormais parmi les directeurs

    financiers un vritable fantasme pour le LBO.

    Pourtant, de nombreuses oprations ont rencontr et rencontreront des difficults.

  • 39

    II. DIAGNOSTICS DU LBO EN DIFFICULTE ET FRAGILITES INTRODUITES

    DANS LENTREPRISE RACHETEE

    A. ETAT DES LIEUX DES LBO : UNE CRISE DISCRETE

    Alors que le modle postule la bonne sant de la cible, les cas de LBO en difficult montrent

    les limites de ces oprations. En effet, nombreuses sont les socits achetes il y a quelques

    annes et aujourdhui en situation dlicate : parce que les holdings se sont endettes sur la

    base dune valeur des actifs qui est aujourdhui remise en cause et pour certaines ne sont plus

    capables de respecter les engagements pris auprs de leurs cranciers.

    Plus de 814 milliards de dollars de dettes LBO doivent arriver maturit dans le monde au

    cours des six annes venir. La France4, avec 71 milliards de dollars de dette LBO d'ici 2016

    et 8 milliards en 2011, occupe la troisime position en Europe (sources cabinet Freshfields

    Bruckhaus Deringer). Les socits concernes sont, bien souvent, en mauvaise sant.

    Lagence de notation Fitch Ratings a tabli, en mars 2010, que 62% des socits europennes

    sous LBO taient nots B- ou moins, une notation qualifie de trs spculative.

    La situation inquite et les LBO zombies, auparavant invisibles, se multiplient. Condamns

    dun point de vue comptable, ils continuent survivre en payant simplement les intrts de la

    dette, nhsitant pas sous-investir dans les entreprises quils dtiennent.

    1. DES ACQUISITIONS DE PLUS EN PLUS CHERES ET DES PERFORMANCES QUI

    REGRESSENT

    Selon les secteurs, les multiples dEBE sont passs dune moyenne de x5 ou x6 une

    moyenne de x7 x8 en seulement quelques annes. Dans le mme temps, les leviers de dette

    senior sont passs de plus de 5 fois lEBITDA 3,5 fois au maximum. Les acquisitions

    dentreprise sont donc de plus en plus coteuses et de moins en moins finances par de la

    dette. Nous avons montr quil est dusage, dans le cadre dun LBO, de mesurer la

    performance de lactivit partir du taux de rentabilit interne (TIR) car ce dernier permet

    lgalisation de la valeur des montants investis et de la somme actualise des flux de trsorerie

    gnrs par linvestissement.

    4 Des statistiques du LBO en France figurent en annexes.

  • 40

    Le niveau de ce taux dpend donc grandement du niveau des flux de revenus ; ces derniers

    tant de deux ordres, les dividendes (remontes des socits cibles) dune part et les plus-

    values dautre part.

    Lessentiel de la performance dpend du niveau de la plus-value ralise au moment du

    dnouement de lopration. La priode de rfrence va donc fortement jouer sur la

    performance.

    Ainsi lachat dune socit en 2007 sur la base dune forte valorisation, a toutes les chances de

    se solder fin 2011 par un TRI ngatif en raison de la baisse de valeur des titres par rapport

    leur valeur dachat. A lhorizon 2013, il se peut que selon lvolution de la socit et de

    lconomie, le TRI de cette opration redevienne positif.

    Il est souligner que les rgressions enregistres par les LBO en 2008 et 2009 sont clairement

    lies une nette baisse des prix des entreprises. Ce nest pas tant la crise financire en elle-

    mme qui a constitu une menace pour les socits sous LBO, mais plutt la crise

    conomique qui la suivi : la dgradation de la rentabilit conduisant inexorablement un

    renchrissement des conditions demprunt, une hausse du degr dexigence des covenants.

    2. LINQUIETUDE LIEE AUX COMPORTEMENTS DES NOUVEAUX ACTEURS ET LEMERGENCE DE CRITIQUES

    La structuration des montages rcents a t impacte par lmergence de prteurs non

    bancaires, la multiplication des instruments de dette et laugmentation, toutefois lgre, de la

    part de la dette remboursable in fine. Les hedge funds font dornavant de lombre aux fonds

    de Capital Investissement et encouragent les financements de maturit longue ainsi que

    laugmentation des effets de levier, ce qui accroit dautant les chances de faire face des

    difficults du ct de la cible.

    De par sa nature, et qui plus est en priode de fragilit de lconomie mondiale, le modle

    LBO a t ouvertement critiqu. Dans le mme temps, les montages se sont sophistiqus et

    lacquisition schelonne de plus en plus sur plusieurs tapes. Le nombre de LBO secondaires

    (technique consistant cder lentreprise sous LBO un autre fonds, qui met en place un

    nouveau montage) a mme atteint la moiti du nombre des transactions en Europe ; un

    mcanisme critiqu car ne partant pas dune intention pertinente damliorer la situation de la

    socit.

  • 41

    Une reprsentation limite au seul aspect financier dnonce les faits que :

    - Le LBO est court-termiste , privilgie les intrts des actionnaires aux dpens dune

    stratgie industrielle plus long terme.

    - Le LBO participe la destruction de lemploi, ce dernier faisant office de variable

    dajustement pour optimiser la rentabilit.

    - Le LBO peut tre lorigine dattitudes spculatives qui concourent la formation de

    bulles financires.

    Face au dveloppement des LBO, une contestation organise du modle est mme ne : le

    Collectif LBO . Ce collectif dfinit le montage comme tant une vritable infection, tudie

    les cas les plus svres et envisage les consquences ngatives du LBO, savoir :

    - Le resserrement de la gestion qui conduit sans cesse rengocier avec les fournisseurs

    qui se voient contraints de faire plus defforts.

    - La recherche de meilleures marges et de cash-flows levs peut entraner des

    rductions deffectifs et un recours plus important la sous-traitance, pouvant affecter

    ngativement lemploi.

    - Loptimisation de la gestion et une stricte gestion des cots font craindre des

    politiques salariales restrictives.

    En 2012, la cration de valeur dun LBO semble rsider de plus en plus dans laptitude des

    managers, leurs conseils et dans une moindre mesure les investisseurs, augmenter la

    performance de lentreprise acquise. Si le projet de LBO aboutit et si la stratgie mise en

    uvre sinscrit dans le temps, alors le LBO prend toute sa lgitimit conomique.

  • 42

    3. PAS DE RISQUE SYSTEMIQUE MAIS DES MENACES

    Les critiques ont beau tre fondes, il apparait quil ny a pas de risque systmique des LBO

    et 7 LBO sur 10 nont pas de problmes de dette (donnes 2011). Lobservation sur les

    priodes rcentes semble tmoigner que les logiques conomiques qui ont sous-tendu les

    dossiers reposaient sur des bases saines, lgitimant ainsi la mise en place du montage.

    Au sein dun march extrmement cyclique, le LBO reste une classe dactifs apprcie par les

    investisseurs. On ne peut, par contre, ngliger certains lments qui devraient peser

    ngativement sur lactivit des LBO :

    - La forte diminution des leviers dendettement

    - Le ralentissement des leves de fonds au niveau mondial

    - La slectivit croissante des dossiers

    - Lexistence dun mur de dettes chance 2012-2013 qui risque de se cumuler avec

    les difficults actuelles de certaines banques.

    - Les contraintes apportes par Ble III (pour les banquiers) et Solvency 2 (pour les

    socits dassurance)

    Parce que plus du tiers des fonds investis proviennent des assureurs et des banquiers, les

    sources de financement pour la reprise dentreprises risquent de se tarir. Ni le FSI (Fonds

    Stratgique dInvestissement), dont les moyens sont limits, ni les particuliers qui prfrent

    limmobilier ou lassurance-vie ne constitueront des voies de recours.

  • 43

    B. TYPOLOGIES DE LBO EN DIFFICULTE

    1. UNE PROBLEMATIQUE TRIPLE : FINANCIERE, JURIDIQUE ET HUMAINE

    Le montage LBO sapplique thoriquement une cible en bonne sant, cense le rester et

    amliorer sa situation. Il se fonde donc sur une hypothse optimiste.

    Cependant, plusieurs cas de difficults, de gravit diffrente, sont envisageables et peuvent se

    cumuler ; leffet de levier, en cas de difficults de la cible, assurant une contagion immdiate

    de la holding. Le systme cible + holding est plus facilement vulnrable que la cible, en ce

    sens que la non-ralisation des objectifs du business plan peut entraner rapidement la

    dfaillance sur le remboursement de la dette LBO, alors mme que la cible est encore

    bnficiaire.

    Compar au cas de difficults dune entreprise classique, le LBO prsente des spcificits du

    fait de limportance de lendettement financier et de la dpendance de la holding des

    remontes de la cible et de linvestissement personnel des dirigeants.

    Des dcalages, positifs comme ngatifs, peuvent apparatre entre le prvisionnel dorigine et

    le ralis . Ces dcalages, lorsquils sont positifs, peuvent entraner, par le jeu de la

    documentation bancaire, des amortissements anticips de la dette (clauses dexcess cash-

    flow). Les dcalages ngatifs sont plus problmatiques, car ils affectent la capacit de

    lemprunteur honorer sa dette.

    En outre, la problmatique nest pas exclusivement financire, elle est galement juridique et

    surtout humaine.

    2. LA BONNE FIN REMISE EN CAUSE

    Un LBO en crise se matrialise par lincapacit de la socit holding rembourser la dette

    dacquisition, des free cash-flows durablement infrieurs aux prvisions. Cela signifie que

    non seulement linvestissement ralis na pas atteint la rentabilit escompte mais aussi

    (dans la mesure o la transaction a t en grande partie finance par concours financiers

    externes) que lquilibre de lopration risque dtre boulevers et donc la bonne fin du LBO

    remise en cause. Lchec du LBO ne se traduit pas forcment par une faillite ou une cessation

    dactivit.

  • 44

    Un scnario rcurrent implique que les fonds et les managers actionnaires perdent leur

    investissement et que la banque devienne propritaire de lentreprise avant de chercher la

    revendre dautres investisseurs ou un industriel.

    La pire issue reste la cessation de paiements (incapacit de faire face au passif exigible avec

    lactif disponible), mais cette situation est rare dans la mesure o la dette aura la plupart du

    temps t ramnage, ou le taux aura t diminu, en fonction de la nouvelle donne

    conomique ayant justement conduit la crise du LBO.

    Parce quil est impratif de dterminer quel niveau se situent les difficults et si les crises

    sont passagres, cette partie vise mettre en vidence les droutes des LBO ainsi que leurs

    raisons. Parmi ces dernires, il est commun dvoquer une mauvaise estimation du march de

    la cible, des due diligences incompltes, une quipe de management insuffisamment prpare

    ou une dette mal calibre.

    Nous aborderons les situations de crise par ordre de gravit.

  • 45

    C. LE NON RESPECT DE LA TRAJECTOIRE ASSIGNEE PAR LE BUSINESS PLAN DES

    LBO

    1. DES BUSINESS PLANS TROP OPTIMISTES

    Au cours des dernires annes, de nombreuses entreprises sous LBO ont prsent les

    caractristiques suivantes :

    - Rentabilit positive

    - Trsorerie prserve

    - Mais la socit accuse un retard par rapport son plan de dveloppement daffaires.

    Ceci nest pas vritablement une surprise car certains business plans la base de montages

    financiers ont t raliss avant 2008 et le ralentissement conomique a rendu obsoltes les

    prvisions de chiffre d'affaires ou les modles de croissance. Or, le business plan se doit

    dtre cohrent (avec la structure de lentreprise et son march) et raliste.

    Une des principales causes dchec du LBO est un business plan irraliste qui a tendance

    surestimer les cash-flows ou a prvu ds lorigine un niveau de dette trop lourd (qui ne

    produit pas un effet de levier mais un effet de massue) ou encore qui na pas correctement pris

    en compte les variations du BFR au cours de la priode de remboursement de la dette.

    Surtout pour les grands LBO (portant sur des cibles dune valeur suprieure 200 millions

    deuros), les considrations lies au montage financier ont pris le pas sur celles tenant au

    projet entrepreneurial. Cela a engendr des business plans dont lambition tait

    proportionnelle limportance du levier et des plans dintressement exponentiels incitant le

    management entrer dans la logique dun dveloppement rapide assorti dune revente dans

    les meilleurs dlais. Invitablement des dcalages futurs sont apparus dans les business plans

    sous forme dun BFR trop important, de marges dcevantes, ou dune croissance en de des

    prvisions.

  • 46

    2. DECROCHAGE, ACCIDENT, DEGRADATION

    En cas de non-respect du business plan initial, il est commun de distinguer plusieurs

    situations :

    Le dcrochage : lorsque la cible ne dgage pas les performances prvues, les remontes de

    cash sont plus faibles que prvues et la valorisation infrieure aux prvisions.

    Laccident : du fait dun problme conomique, la socit traverse des difficults qui mettent

    en pril sa situation financire et affecte sa profitabilit

    La dgradation : la cible voit sa performance dorigine se dgrader, le changement de

    contrle na pas les consquences escomptes et ne permet pas de freiner la dgradation

    rgulire de la situation financire.

    Le repreneur de lentreprise devra agir vite car sa crdibilit sera inversement proportionnelle

    aux carts entre les prvisions et les ralisations. Dans ce contexte, information et la

    transparence revtent une importance capitale. Il faut amener les dirigeants repenser leur

    modle conomique et les sensibiliser la remise en cause de celui-ci. Cette sensibilisation

    passe par la rcriture dun prvisionnel fiable, sur une priode plus courte et dont la visibilit

    sera suffisante. Ce document servira de rfrence pour les discussions avec les partenaires

    externes dont le banquier. Le dirigeant doit tre capable dexpliquer son bilan et le non-

    respect du business plan pour anticiper les ractions de la communaut financire.

    2.1. Que va faire le banquier ?

    Les banquiers mettent laccent sur le signal dalerte que constitue la non atteinte du business

    plan. Ceux engags dans la dette senior, aprs la rception des tats financiers, vont examiner

    les diffrences entre les chiffres raliss et ceux attendus. Ils avaient, en effet, tudi le

    financement de lacquisition sur la base des rapports daudits et dun prvisionnel.

    Ils retiennent comme critre majeur la capacit de rsistance de lentreprise et vont

    ractualiser leurs simulations en tudiant limpact de la non ralisation du business plan sur le

    modle de lentreprise au travers de crash tests qui mettent en scne diffrents scnarii

    dgrads pouvant altrer les comptes de la socit. Cela peut consister prvoir par itrations

    successives une croissance moindre que celle annonce par le management.

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    Cette analyse permettra de comprendre et de valider les options prises par la direction tout en

    anticipant certaines dcisions qui permettront d