Menton et Cocteau

Le groupe « Visites culturelles » a fait sa première sortie le 26 octobre à Menton, ci-dessous quelques -uns des

membres, nous étions 34.

Visite guidée du nouveau musée Cocteau, dû à l’architecte Rudy Riciotti, inauguré en

novembre 2011 et qui abrite l’exceptionnelle collection de Séverin Wunderman.

Nous y avons découvert, avec une guide passionnante, les nombreuses facettes du talent de Jean Cocteau. Cocteau

a aimé Menton et sa région, il y séjourna longuement à partir des années 20 et surtout de 1950 quasiment jusqu’à sa

mort le même jour que Piaf, le 11 octobre 1963.

(Photo de Philippe Halsman)

Les photos étaient interdites dans le musée, voici cependant quelques clichés pris sur le net…

Eugène, de 1913

Déjà célèbre comme poète à 18 ans, Cocteau va avoir un choc artistique à la représentation du Sacre du printemps

de Stravinsky en 1911, C’est alors que surgit son personnage d’Eugène (un de ses 4 prénoms). Il écrit « Un Eugène

était là, sans que je me souvinsse l’avoir jamais dessiné, debout, l’œil fixe, la bouche sournoise, la manche courte ». Il

publiera en 1915 « Les Eugènes de la guerre » et en 1919 Le Potomak où les Eugènes s’opposent à leurs ennemis

jurés les Mortimer, petits bourgeois provinciaux…

Jean Cocteau a produit une œuvre graphique immense, « ce que Cocteau n’écrit pas il le dessine. Les phrases qui

courent sur ses dessins jouent un rôle ornemental…elles sont toujours porteuses de sens ».

Comme ci-dessous, dans cet auto portrait de 1925, après la mort de son grand amour Raymond Radiguet, qu’il cite

avec Ronsard, Mozart, Uccello, et Saint Just, ces hommes qui chacun à leur manière ont bouleversé leur domaine.

Après ce dessin, Cocteau intégrera souvent des étoiles dans ses dessins et peintures…

Cocteau s’est aussi réapproprié les grands mythes grecs, comme Œdipe (Les œuvres de Freud commencent à être

connues) et Orphée, tant dans ses dessins que réalisateur de cinéma (Orphée (1950), Le testament d’Orphée (1960)

Orphée et Eurydice de 1926

Au noir et blanc se mêlent le brun et le bleu. La terre rejoint le ciel, le monde des vivants celui des amis disparus (les

étoiles), Orphée est représenté sans sa tête pour ne pas voir Eurydice, seul le rayonnement issu de leurs mains

permet d’envisager une lueur d’espoir.

Cocteau a côtoyé toute l’élite intellectuelle et artistique du 20ème siècle et notamment Picasso avec lequel les

rapports connurent des hauts et des bas, sa peinture fut influencée par Picasso comme le montre cette peinture de

Madame Favini de 1953.

Décodons le tableau, Mme Favini, richissime veuve, s’était épris de Cocteau (le livre à la main), elle voulait même

s’installer proche de lui, sur la riviéra (le tableau avec le bateau), elle n’écoutait que du Schoenberg (son attitude

penchée avec la main sur l’oreille), a ses pieds, sa fille, qui furieuse de la voir dilapider sa fortune, la chasse à coup de

Fly -Tox…

Voilà pour le musée, nous avons également visité le Bastion, l’ancien musée Cocteau qui abrite essentiellement des

crayons à la cire très colorés et de splendides céramiques.

Proche du musée du Bastion, le monument dédié à Jean Cocteau , « Je reste avec vous »….

Une des mosaïques réalisée par Cocteau sur les murs du Bastion…on reconnaît le costume des pêcheurs de

la côte d’azur, surgissant de la mer nourricière et abreuvés de soleil.. .

La musée conserve aussi la série de 21 dessins de style burlesque, les Innamorati, que Cocteau exécuta en

1961, constitué de saynètes qui représentent deux amoureux , un pêcheur et une jeune femme.

Innamorati - Le pêcheur endormi

Salle des mariages de la mairie de Menton

C’est en 1958 que fut inaugurée la salle des mariages de Menton décorée par Cocteau, non seulement les

peintures murales, mais aussi les chaises, le tapis, les candélabres…

Le décor iconographique représente les fiancés en costume de pêcheurs….dans une noce de village

Et sur l’autre mur le mythe d’Orphée….Eurydice est entraînée à droite vers la mort par deux femmes

et à gauche, Orphée malheureux, laisse tomber sa lyre.

Et enfin pour terminer avec Cocteau et la région de Menton, la villa Santo Sospir à Saint-Jean-Cap-Ferrat.

La villa Santo Sospir appartenait à Francine Weisweiler que l’on voit ici au centre entourée de Cocteau (son amant)

et d’Edouard Dermit (dit Doudou), l’amant puis le fils adoptif et le légataire de Cocteau, il fut également l’amant de

Francine…curieux ménage à trois.

La villa Santo Sospir

Tout l’été de 1950, Jean Cocteau a travaillé sur des échelles, sans aucune maquette préalable. Après avoir dessiné au

fusain, le poète a rehaussé ses dessins de couleurs : un ouvrier italien lui préparait des poudres de couleur délayées

dans du lait cru. C'est ce qu’on appelle des fresques a tempera. Cocteau écrira : « il ne fallait pas habiller les murs, il

fallait dessiner sur leur peau, c'est pourquoi j'ai traité les fresques linéairement avec le peu de couleurs qui

rehaussent les tatouages. Santo Sospir est une villa tatouée ».

Le magnifique décor du salon avec le soleil

Francine prenant son bain de soleil

Dans la salle à manger l’original de la tapisserie de Judith et Holopherne et ci-dessous le détail de

la tête d’Holopherne coupée par Judith (Manufacture d’Aubusson)

Toutes les chambres ont bien sûr été décorées, voici celle de Francine

Et pour terminer ce court voyage avec Cocteau un de ses poèmes

« Mes calembours furent ceux de l'oracle grec.

J'ai tordu le poème et fait un masque avec.

J'ai chanté le sommeil et la fuite des muses.

Du théâtre j'aimai les surprenantes ruses.

L'amour n'en parlons plus, car c'était du joli!

Et la douleur borde mon lit. »

Clinique de 1941