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GRETHA UMR CNRS 5113 Université Montesquieu Bordeaux IV Avenue Léon Duguit - 33608 PESSAC - FRANCE Tel : +33 (0)5.56.84.25.75 - Fax : +33 (0)5.56.84.86.47 - www.gretha.fr Mesurer les inégalités économiques Patrick MOYES Université de Bordeaux GREThA UMR CNRS 5113 Cahiers du GREThA n° 2009-06

Mesurer les inégalités économiquescahiersdugretha.u-bordeaux4.fr/2009/2009-06.pdf · Mesurer les Inégalités Économiques Résumé Cetarticleprésentelamanièredontestappréhendéelamesuredel’inégalitédesrevenus

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GRETHA UMR CNRS 5113 Universit Montesquieu Bordeaux IV

Avenue Lon Duguit - 33608 PESSAC - FRANCE Tel : +33 (0)5.56.84.25.75 - Fax : +33 (0)5.56.84.86.47 - www.gretha.fr

Mesurer les ingalits conomiques

Patrick MOYES

Universit de Bordeaux GREThA UMR CNRS 5113

Cahiers du GREThA

n 2009-06

Mesurer les Ingalits conomiques

Rsum

Cet article prsente la manire dont est apprhende la mesure de lingalit des revenusen conomie. Nous rappelons les proprits minimales que tout indice dingalit doitsatisfaire en insistant sur la distinction entre les indices dingalit relative et les indicesdingalit absolue. Nous prsentons ensuite lapproche thique de la mesure des ingali-ts et en dduisons les familles dindices dAtkinson-Kolm-Sen (AKS) et de Kolm-Pollak(KP). La recherche du consensus nous amne dans un troisime temps introduire lescritres de Lorenz relatif et de Lorenz absolu. La ncessit de mesurer la contribution lingalit totale de telle ou telle composante du revenu ou de telle ou telle partie de lapopulation nous conduit en dernier lieu examiner les proprits de dcomposition desindices.Mots Cl : Indices dIngalit, Proprits Minimales dun Indice dIngalit, Mesurethique de lIngalit, Courbes de Lorenz, Dcomposition de lIngalit.

Measuring Economic Inequalities

Abstract

We give in this note an overview of the way income inequality is approached in economics.We first recall the basic properties that any inequality index is required to possess andwe insist on the distinction between the indices of relative inequality and the indices ofabsolute inequality. We present next the ethical approach to inequality measurement andwe derive the Atkinson-Kolm-Sen (AKS) and the Kolm-Pollak (KP) families of indices.The search for a consensus among general classes of indices leads us to the criteria ofrelative Lorenz and absolute Lorenz dominances. Finally we briefly discuss the prop-erties of decomposablity that allow one to measure the contribution to overall incomeinequality of the inequality attached to a particular subgroup of the population or to aparticular income source.Journal of Economic Literature Classification Number: D30, D63.Keywords: Inequality Indices, Minimal Properties for an Inequality Index, Lorenz Curves,Ethical Inequality Indices, Decomposition of Inequality.

Patrick Moyes/Mesurer les Ingalits conomiques

1. Introduction

Il est peu de questions qui suscitent autant de discussions et de controverses dans la socitque celle des ingalits. Si tous les acteurs saccordent reconnatre que trop dingalits peutremettre en cause la cohsion sociale, par contre les avis divergent en ce qui concerne, tantles moyens mettre en uvre pour rduire celles-ci, que les instruments pour les mesurer.Cet article prsente la manire dont lingalit est apprhende par les conomistes ainsique les instruments qui ont t dvelopps au cours des quarante dernires annes pour lamesurer. Lexpos ne prtend pas tre exhaustif du fait des limites despace imparties etdes prfrences de lauteur mais il devrait toutefois prsenter lessentiel de la contributionde lconomie normative la mesure de lingalit.

Lconomiste est parmi dautres spcialistes des sciences sociales appel donner son avissur des questions aussi diverses que: (i) lingalit des revenus est-elle aujourdhui plus im-portante en France quau Royaume-Uni? (ii) lingalit des rmunrations en France a-t-elleaugment au cours des trente dernires annes? (iii) cette augmentation a-t-elle t plus fortedepuis le dbut des annes 2000 quau cours de la dcennie prcdente? (iv) lintroductiondun revenu minimum garanti assorti dune augmentation du taux marginal dimposition pourles hauts revenus se traduit-elle par une diminution de lingalit des revenus disponibles? (v)laugmentation des ingalits est-elle galement rpartie dans la population ou touche-t-elle telgroupe social plutt que tel autre? (vi) les ingalits de revenus que lon observe aujourdhuitrouvent-elles leurs origines dans les ingalits des rmunrations du travail ou plutt dans lesingalits des revenus du patrimoine?

Les rponses aux questions prcdentes ncessitent que lon prcise le concept dingalit quest-ce que lingalit et que lon dfinisse des mesures de lingalit appropries. Leconcept dingalit qui peut varier dans le temps et entre les cultures est prcis par lesproprits que doivent satisfaire les mesures de lingalit. On distingue les proprits denature thique ou normative, qui font intervenir des jugements de valeurs, et les propritsde nature plus technique, qui sont davantage lies des considrations pratiques. 1 Lesdeux premires questions ainsi que la quatrime ncessitent seulement que lon soit capabledordonner les situations du point de vue de la plus ou moins grande ingalit. Pour rpondre la troisime question il faut pouvoir comparer des diffrences dingalit ou tout le moinsconsidrer queffectuer de telles comparaisons a un sens. La cinquime question suppose quelon soit capable de dcomposer lingalit totale en la somme des ingalits des diffrentsgroupes qui constituent la socit, cependant que la dernire question a trait limportancerespective des diffrentes composantes du revenu dans lingalit du revenu total.

2. Le Concept dIngalit en conomie

Avant de se lancer dans la construction dindicateurs sophistiqus, il faut insister sur le faitque les enseignements que lon pourra en tirer dpendront dans une large mesure de dcisionsqui se situent en amont du choix de lindicateur. Le meilleur indicateur pourra conduire des conclusions dnues de sens si lon ne prend garde dans un premier temps rflchir auchoix des variables pertinentes, celui des units dtentrices de revenu, ainsi qu la priodedobservation.1 La distinction entre ces deux types de proprits nest pas toujours aussi aise quelle peut sembler de prime

abord.

1

Patrick Moyes/Mesurer les Ingalits conomiques

Les variables pertinentes On assimile traditionnellement les ingalits conomiques cellesayant trait la distribution des revenus dans la socit. Lhypothse implicite lorigine decette manire de procder est que le revenu dcrit lensemble des opportunits, qui soffrent auxagents conomiques, ces derniers tant libres de choisir celles quils prfrent parmi celles-ci. Lerevenu constitue de ce point de vue pour les agents un vecteur essentiel de leur bien-tre et cest ce titre que la rduction des ingalits de revenu participe celle des injustices. Ceci impliqueque la notion de revenu retenue doit tre suffisamment exhaustive et intgrer toutes les sourcesde revenu des agents, quils sagissent des rmunrations du travail (salaires), des revenusfonciers (loyers) ou encore du produit dactifs financiers (revenu dun portefeuille dactions).De mme il parat prfrable dutiliser le revenu aprs acquittement des diffrents imptsdirects (cotisation sociale gnralise (CSG), impt sur le revenu des personnes physiques(IRPP)) et aprs transferts (aide aux logement, allocations familiales).

Les units dtentrices de revenu Dans la mesure o on conoit le revenu comme un facteuressentiel du bien-tre, il parat naturel de sintresser aux personnes ou individus qui composentla socit. On est alors confront au fait quil est gnralement difficile sinon impossible pour des raisons techniques (collecte des informations) mais aussi lgales (loi informatique etliberts) davoir accs des donnes individuelles. Trs souvent, il est seulement possibledobtenir le revenu dun ensemble dindividus, tel que le mnage (enqutes de consommation)ou le foyer fiscal (fichiers de ladministration fiscale). Il est alors ncessaire dajuster lesrevenus obtenus dans la mesure o on conoit bien que la composition du mnage ou du foyerfiscal interviendra dans la dtermination du bien-tre de chacun de ses membres. On conoitaisment quun couple avec deux enfants ait davantage de besoins quun couple sans enfant.En effet le couple sans enfant devra mobiliser moins de ressources que le couple avec enfantspour garantir chacun de ses membres un niveau de vie comparable celui dont bnficiechacun des membres du second mnage. La pratique courante consiste ajuster les revenusobservs au moyen dchelles dquivalence de manire prendre en compte les diffrences debesoins lis la taille et la composition du mnage ou du foyer fiscal.

La priode dobservation Enfin le choix de la priode au cours de laquelle sont perus lesrevenus est particulirement importante. Doit-on sintresser la distribution des revenus aucours dune anne donne ou sur une priode plus longue pouvant aller jusqu la dure devie de lindividu? La distinction entre court terme (anne) et long terme (cycle de vie) nestpas neutre, tant en ce qui concerne les rsultats obtenus, que leur signification. Ainsi, uneforte ingalit au sein dune mme classe dge naura pas la mme signification selon quelleest transitoire ou permanente. De mme, la comparaison des ingalits de revenu entre laFrance et le Royaume-Uni une mme date nous renseigne peu sur le caractre plus ou moinsgalitaire de ces deux socits.

3. Quelques Indicateurs Usuels

Une distribution de revenu pour une population de n individus est une liste x : = (x1, . . . , xn),o xi est le revenu de lindividu i. La moyenne de x est note (x) = (x1 + x2 + + xn)/n.La fonction quantile de x note Q( ; x) associe chaque fraction p de la population le revenuQ(p; x) dtenu par celle-ci. Suivant les valeurs de p auxquelles on sintresse, on obtientdiffrents quantiles. Ainsi les quartiles correspondent au cas o p prend les valeurs 0.25, 0.50,0.75 et 1.00: ceci revient diviser la population en quatre groupes deffectifs gaux et

2

Patrick Moyes/Mesurer les Ingalits conomiques

Figure 1: Fonction Quantile

1

2

4

5

7

Q(p

;X)

1/6 3/6 4/6 5/6 1

p

associer chaque groupe le revenu moyen du groupe. Les quintiles sobtiennent en divisant lapopulation en cinq groupes de mmes effectifs, les dciles en considrant dix groupes de mmeseffectifs, et ainsi de suite. 2 Nous avons reprsent dans la Figure 1 la fonction quantile dela distribution x = (1, 2, 2, 4, 5, 7). Un indicateur dingalit est une application continue Iqui associe toute distribution x un nombre rel I(x) reprsentant le degr dingalit dansla distribution x. Nous donnons ci-dessous les dfinitions des indicateurs de pauvret les pluscouramment utiliss dans la littrature: le rapport interdcile ID, la variance V , le coefficientde variation CV , le coefficient de Gini G et les deux indices de Theil T1 et T2.

ID(x) = Q(1.0; x)Q(0.1; x)

V (x) = 1n

ni=1

[ xi (x) ]2

CV (x) = V (x)(x)2

G(x) = 12n2(x)

ni=1

nj=1| xi xj |

T1(x) =ni=1

xi(x) ln

xi(x)

T2(x) = ni=1

ln xi(x)

2 Cette manire de procder entrane une perte dinformation et ce, dautant plus, que le nombre de quantilesconsidrs est faible.

3

Patrick Moyes/Mesurer les Ingalits conomiques

Le Tableau 1 indique le degr dingalit dans sept pays mesure partir des indices dingalitprcdents. 3

Table 1: Ingalit dans 7 Pays

Pays IDV CV G T1 T2

1. Allemagne 14.2906 8982.51 0.4650 0.2495 10.0362 10.50672. Canada 19.0711 12146.61 0.5265 0.2818 12.7267 13.46833. Royaume-Uni 19.7136 12567.14 0.6162 0.3180 16.3122 16.39944. tats-Unis 50.2918 19901.44 0.7041 0.3478 20.3373 21.25555. Sude 13.9472 7743.71 0.4323 0.2322 8.7354 9.14006. Norvge 14.2026 10004.28 0.4248 0.2225 8.2171 8.40577. Finlande 9.2321 7604.81 0.4299 0.2278 8.3743 8.3665

4. Proprits dun Indicateur dIngalit

Le Tableau 1 montre que le classement des pays du point de vue de la plus ou moins grandeingalit nest pas insensible au choix de lindicateur retenu mme sil met en vidence unecertaine stabilit. Au vu de ces rsultats on peut se demander si certains indicateurs ne seraientpas plus pertinents que dautres. Afin de juger de la plus ou moins grande pertinence dunindicateur, nous introduisons un certain nombre de conditions raisonnables que tout indicateurdingalit devrait vrifier. Ces conditions indiquent de quelle manire un indicateur dingalitdoit ragir des modifications particulires de la distribution des revenus.

Par dfinition les dtenteurs de revenu sont considrs comme tant identiques tousgards sauf naturellement en ce qui concerne le revenu. Il ny a donc pas lieu de traiter ceux-cide manire diffrente: ainsi les distributions x = (2, 7, 9, 3) et y = (7, 3, 2, 9) devraient-ellestre considres comme quivalentes du point de vue de lingalit, ce que traduit la conditionsuivante.Symtrie (S). Lingalit nest pas modifie lorsque deux individus changent leurs revenus.Considrons maintenant les distributions y = (7, 3) et x = (7, 3, 7, 3). La distribution xsobtient partir de la distribution y en reproduisant celle-ci deux fois lidentique: on ditque x est une rplication de y. On convient habituellement quune telle opration ne modifiepas lingalit ce que lon exprime au moyen de la condition ci-dessous.Principe des Populations (PP). Lingalit nest pas modifie par une rplication desrevenus.Aussi naturelles paraissent-elles, les deux conditions prcdentes ne sont toutefois pas spci-fiques la mesure de lingalit. Lide dingalit ou plus exactement de plus ou moinsgrande ingalit est troitement lie la notion de transfert progressif. Nous dirons que ladistribution x rsulte de la distribution y au moyen dun transfert progressif, sil existe deuxindividus i, j et un montant de revenu tels que:

xh = yh, pour tout h 6= i, j;(1a)

xi = yi + ; xj = yj ;(1b)

3 Il sagit de la distributions des revenus aprs taxation et transferts des mnages corrigs de la taille familialeselon la formule y/

m, o y et m sont respectivement le revenu et le nombre de personnes dans le mnage.

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0 < 5 (yj yi)/ 2.(1c)

Le transfert progressif consiste prendre du revenu un individu pour le donner un individumoins riche en veillant ce que lindividu initialement dfavoris ne devienne pas plus richeaprs transfert que lindividu initialement favoris. Le cas limite est celui o les deux individusimpliqus dans le transfert se retrouvent dans la mme situation: leurs revenus sont gaux.Ainsi, la distribution x = (1, 5, 6, 9) sobtient-elle partir de la distribution y = (1, 4, 7, 9) aumoyen dun transfert progressif impliquant les individus 2 et 3. Si lon considre quune telleopration rduit lingalit, alors on doit souscrire la condition ci-dessous.Principe des Transferts (PT). Un transfert progressif rduit lingalit des revenus.Les trois conditions prcdentes supposent implicitement que les distributions ont mmemoyenne. Une permutation laisse la somme des revenus inchange ainsi que la taille de lapopulation, de mme quun transfert progressif dans la mesure o ce qui est pris lindividuriche est donn lindividu pauvre. Si la rplication modifie bien la taille de la population,par contre elle ne change pas la moyenne de la distribution. La reconnaissance du fait queles distributions peuvent avoir des moyennes distinctes est traditionnellement prise en comptepar lide que ce sont les parts du revenu total dtenus par les individus qui importent et nonle revenu en lui-mme. Implicitement ceci revient imposer la condition suivante.Invariance la Multiplication (IM). Lingalit nest pas modifie si on augmente ousi on diminue tous les revenus dans la mme proportion.On pourrait linverse la suite de Kolm (1976) considrer que ce sont plutt des variationsde mme montant absolu qui laissent lingalit inchange.Invariance la Translation (IT). Lingalit nest pas modifie si on augmente ou si ondiminue tous les revenus dun mme montant.Enfin il est habituel dimposer la condition suivante qui revient normaliser les indicesdingalit.Normalisation (N). Lingalit est nulle lorsque tous les revenus sont gaux.On qualifie dindices dingalit relative les indicateurs vrifiant les conditions N, S, PP, PTet IM. Si on substitue la condition IT la condition IM dans la liste prcdente, alors onobtient les indices dingalit absolue. 4 Tous indicateurs dingalit introduits plus hautvrifient les conditions S et PP. La variance, le coefficient de Gini ainsi que les deux indicesde Theil traduisent une diminution de lingalit suite un transfert progressif et satisfontdonc la condition PT. Un transfert progressif entrane une diminution du rapport interdcileuniquement dans le cas o le bnficiaire du transfert appartient au premier dcile et/ou ledonateur appartient au dernier dcile. Le rapport interdcile, le coefficient de Gini et lesdeux indices de Theil sont des indices dingalit relative, alors que la variance est un indicedingalit absolue.

5. LApproche thique de lIngalit

La discussion prcdente montre que lapprciation de lingalit est un exercice normatifqui repose sur des jugements de valeurs. la suite de Kolm (1969), on sest orient vers

4 La condition IT combine avec la condition PT implique que lingalit saccrot lorsque tous les revenusaugmentent dans la mme proportion. Cest du reste ce constat qui est lorigine de la suggestion de Kolm(1976) de substituer la notion dingalit relative celle dingalit absolue.

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Patrick Moyes/Mesurer les Ingalits conomiques

une approche indirecte consistant dduire lindicateur dingalit dune fonction de bien-tre social. Soit Wu(x) =

ni=1 u(xi) le bien-tre que la socit retire de la distribution

x = (x1, x2, . . . , xn). La fonction de bien-tre socialWu rsume la manire dont un observateurbienveillant value la distribution x. On assimile communment la fonction u une fonction

Figure 2: Construction de lquivalent gal

KF

I

XX

A

J

X

L

E

HD

C GO

M

Rev

enu

de 2

Revenu de 11

2

dutilit: u(xi) peut sinterprter comme le bien-tre de lindividu i dans la situation x tel quilest peru par lobservateur bienveillant. 5 Ce dernier est une construction de lesprit dontla raison dtre est de runir ce quil y a de commun en chacun de nous quant la maniredont nous apprcions le bien-tre social. On convient traditionnellement que le bien-tre dela socit augmente avec le revenu de ses membres ce qui quivaut poser que la fonction uest strictement croissante. On suppose encore que lobservateur bienveillant a de laversionpour lingalit ce qui se traduit par le fait quun transfert progressif a pour effet daugmenterle bien-tre social, ce que garantit la concavit de u. Lquivalent gal de la distribution x not Eu(x) reprsente le revenu quil faudrait donner chacun de ses membres pour que lasocit atteigne le mme niveau de bien-tre que dans ltat x. Formellement, on a

(2)ni=1

u (xi) = nu(Eu(x)

),

do on tire lexpression de lquivalent gal

(3) Eu(x) = u1(

1n

ni=1

u (xi)),

o u1 est linverse de la fonction dutilit u. La Figure 2 illustre la construction de lquivalentgal pour la distribution x = (x1, x2) = (1.25, 4.75) et la fonction dutilit u(s) = 1/s. Le

5 Il serait plus juste dinterprter la fonction u comme une norme sociale reprsentant les valeurs communesqui simposent aux diffrents membres de la socit.

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Patrick Moyes/Mesurer les Ingalits conomiques

segment DG reprsente lensemble des distributions dont la somme des revenus est gale celle de la distribution x. La courbe dindiffrence sociale HK est constitue par lensembledes distributions qui engendrent le mme bien-tre social que la distribution x reprsente parle point X. Le maximum de bien-tre pour la socit correspondant au point M est atteintlorsque chaque individu reoit la moyenne de la distribution (x). On vrifie que lquivalentgal Eu(x) mesur par la longueur du segment OA est infrieur la moyenne des revenus (x)correspondant au segment OC. On peut montrer que Eu(x) 5 (x), quelque soit x, ds lorsque u est concave. La diffrence IAu (x) = (x) Eu(x) gale au segment AC reprsentela perte sociale occasionne par lingalit. En dautres termes, cest le revenu moyen que lasocit aurait pu conomiser si les revenus avaient t galement distribus entre ses membres.Si on rapporte la perte moyenne au revenu moyen, alors on obtient la part du revenu totalIRu (x) = 1 (Eu(x)/(x)), que la ralisation de lgalit aurait permis dconomiser.

Dune certaine manire IAu et IRu peuvent sinterprter comme des mesures de laversionpour lingalit de lobservateur bienveillant. Pour une distribution ingale x donne, lesquantits IAu et IRu augmentent avec la concavit de la fonction u. Ceci est illustr dansla Figure 3 pour les fonctions dutilit u et v o u est plus concave que v. 6 Les courbesdindiffrence sociale correspondant aux fonctions dutilit u et v et passant par le point Xsont notes HK et RS, respectivement. On vrifie graphiquement que Eu(x) < Ev(x), ce quigarantit que IAu (x) > IAv (x) et IRu (x) > IRv (x).

Figure 3: quivalents gaux pour u et v

X

K

H

N

A

S

L

B

E

DR

C GO

F

M

Rev

enu

de 2

Revenu de 1

X2

X1

Par construction IAu et IRu vrifient les conditions N, S et PP, de mme que la conditionPT ds lors que la fonction dutilit u est concave. Par contre IAu et IRu ne peuvent pas treconsidrs comme des indices dingalit relative ou absolue dans la mesure o rien nepermet daffirmer quils vrifient lune ou lautre des conditions IM et IT. On montre (Kolm

6 La fonction dutilit u est plus concave que la fonction dutilit v si la fonction compose u(v1) est concave.

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Patrick Moyes/Mesurer les Ingalits conomiques

(1976), Atkinson (1970), Ebert (1988)) quune condition ncessaire et suffisante pour que IRuvrifie la condition IM est que la fonction dutilit ait la forme

(4) u(s) =

s1

1 , 0 5 6= 1

ln s, = 1,

ce qui, en reportant dans la dfinition de IRu , donne la famille des indices dingalit ditedAtkinson-Kolm-Sen (AKS)

(5) I(x) =

1

1n

ni=1

(xi(x)

)1 11 , 0 5 6= 11

ni=1

(xi(x)

) 1n

, = 1.

Le paramtre reprsente le degr daversion pour lingalit des fonctions dutilit AKS.Lorsque = 0, il ny a pas daversion pour lingalit: la manire dont les revenus sontdistribus nimporte pas et I(x) = 0, quelle que soit la distribution x. Lorsque = ,laversion pour lingalit est maximale et seule importe la situation de lindividu le pluspauvre: I(x) = 1 (min{xi}/(x)).

De mme pour que IAu puisse tre considr comme un indicateur dingalit absolue, ilfaut et il suffit que la fonction dutilit soit de type exponentiel, soit

(6) u(s) =

1 es, 0 < ,

s, = 0,

(Kolm (1976), Ebert (1988)) ce qui, en reportant dans la dfinition de IAu , donne la familledes indices dingalit dite de Kolm-Sen (KP)

(7) I(x) =

ln(

1n

ni=1

e[(x)xi])1

, 0 < ,

0, = 0.

Le paramtre mesure le degr daversion pour lingalit des fonctions dutilit KP. Lorsque = 0, on obtient I(x) = 0: la manire dont les revenus sont distribus nimporte pas. linverse, = traduit une aversion extrme pour lingalit, auquel cas seule la situation delindividu le plus dfavoris est prise en compte et I(x) = 1 (min{xi}/(x)). 7 Le Tableau2 indique le degr dingalit dans nos sept pays mesure partir des indices AKS et KP pourdes valeurs particulires de laversion pour lingalit.

6. Le Critre de Lorenz

Les Tableaux 1 et 2 montrent que le diagnostic en matire dingalit dpend largement duchoix de lindice retenu et donc des jugements de valeurs quils contiennent. Le fait que lon7 La fonction de bien-tre social que nous avons retenue est une spcification parmi dautres et le principe

de construction des indicateurs prcdents peut sappliquer dautres formes fonctionnelles. Ainsi il estpossible de construire des gnralisations du coefficient de Gini prenant en compte la plus ou moins grandeaversion pour lingalit de lobservateur bienveillant (Donaldson and Weymark (1980)).

8

Patrick Moyes/Mesurer les Ingalits conomiques

Table 2: Ingalit dans 7 Pays selon I et I

Pays 0.5 2.0 3.5 .0002 .0005 .0008

1. Allemagne .05047 .20221 .35669 .25974 .44635 .545722. Canada .06373 .25205 .42697 .33808 .52501 .614093. Royaume-Uni .07959 .27937 .42433 .34257 .49704 .574224. tats-Unis .09945 .37117 .59694 .46477 .64467 .722585. Sude .04428 .17978 .33096 .22435 .41010 .519756. Norvge .04086 .16372 .29848 .25505 .45165 .556227. Finlande .04167 .15547 .25480 .20510 .35010 .43025

adhre aux conditions qui sous-tendent les indices AKS ou KP par exemple ne suffit pas liminer tout dsaccord. Ainsi, suivant le degr daversion pour lingalit, un pays peut treconsidr comme plus ingal ou moins ingal quun autre.

Plutt que de nier la possibilit dopinions antagonistes, ne peut-on au contraire reconnatrecette diversit? Une manire naturelle de procder serait de dclarer quune distributionest moins ingale quune autre si tous les indices dingalit vrifiant un certain nombre deconditions minimales concluent en ce sens. Le classement des distributions rsultant de cetteapproche en terme de consensus ou encore de dominance va naturellement dpendre delensemble des indices retenu. Par exemple, on peut choisir la classe des indices dingalitrelative vrifiant les conditions S, PP, PT et IM, que nous avons discutes plus haut. Si onnote I R cette classe, alors la recherche du consensus consiste poser que la distribution xest moins ingale au sens de lunanimit au sein de cette classe si

(8) I(x) 5 I(y), pour tout I I R.

Par dfinition on ne pourra jamais trouver deux indices dingalit relative qui classeront demanire oppose les distributions x et y. Mais ce consensus a un prix: le classement obtenuest partiel et dans certains cas prcisment ceux o il ny a pas unanimit de points de vue il ne sera pas possible de conclure dans un sens ou dans lautre. cette difficult sajoutele fait que la condition (8) est impossible vrifier en pratique tant donn que la classe I Rcomprend une infinit dlments. 8

Le critre de Lorenz relatif permet de vrifier sil y a unanimit de points de vue en ce quiconcerne le classement de deux distributions en terme dingalit relative. La courbe de Lorenzrelative LR(p; x) de la distribution x indique pour chaque fraction des p 100% individus lesplus pauvres la part du revenu total quelle dtient. 9 Nous avons reprsent dans la Figure 4la courbe de Lorenz relative de la distribution x = (1, 2, 2, 4, 5, 7). On dit que la distributionx domine la distribution y au sens du critre de Lorenz relatif si la courbe de Lorenz relatif dela distribution x est nulle part situe en-dessous de celle de la distribution y, ce qui sexprimeformellement par

(9) LR(p; x) = LR(p; y), pour tout 0 5 p 5 1.

8 Ceci se comprend aisment ds lors quon ralise que, si lindice I appartient la classe I R, alors il en estde mme pour lindice f(I), o f est strictement croissante.

9 Formellement, la courbe de Lorenz (relative) sobtient en intgrant la fonction quantile pralablement divisepar le revenu moyen, soit donc LR(p; x) =

p0 (Q(p; x)/(x)) dq, avec 0 5 p 5 1.

9

Patrick Moyes/Mesurer les Ingalits conomiques

Figure 4: Courbe de Lorenz Relative

0

0.05

0.24

0.43

0.67

1

LR(p

;z)

1/6 3/6 4/6 5/6 1

p

On peut montrer que les conditions (8) et (9) sont quivalentes: on est donc assur que, si ladistribution x domine la distribution y au sens du critre de Lorenz relatif, alors lingaliten x ne sera jamais suprieure lingalit en y, et ce quelque soit lindice dingalit relativeretenu. Dans le cas contraire o les courbes de Lorenz relatives se coupent, on pourra toujours

Table 3: Classement selon le Critre de Lorenz RelatifPays j

Pays i 2 3 4 5 6 7

1. Allemagne 1 1 1 0 0 02. Canada # 1 # 0 03. Royaume-Uni 1 0 0 04. tats-Unis 0 0 05. Sude 0 06. Norvge #7. Finlande

trouver deux indices dingalit relative, qui classeront les distributions x et y en sens oppos.Lapplication du critre de Lorenz relatif la comparaison de nos sept pays donne le classement(partiel) indiqu dans le Tableau 3. La prsence du symbole 1 signifie que le pays i dominele pays j et celle du symbole 0 que cest le contraire. Nous utilisons le symbole # pourindiquer que les pays i et j ne sont pas comparables. Il ressort du Tableau 3 que les tats-Unis sont domins par tous les autres pays. Il sensuit que, quelque soit lindice dingalitrelative choisi, lingalit aux tats-Unis ne pourra en aucun cas tre infrieure lingalitdans les autres pays et dans certains cas elle sera suprieure. Par contre le critre de Lorenzrelatif ne permet pas de trancher dans le cas du Canada et du Royaume-Uni ou encore dansle cas de la Norvge et de la Finlande. Il sera donc toujours possible de trouver des indices

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dingalit relative classant de manire oppose le Canada et le Royaume-Uni ou la Norvgeet la Finlande. On vrifie par exemple en se reportant au Tableau 2 que le Canada est moinsingal que le Royaume-Uni lorsque = 2.0 alors quon obtient la situation inverse lorsque = 3.5. De mme, la Norvge est-elle moins ingale que la Finlande pour = 0.5 mais plusingale que cette dernire ds lors que = 2.0.

Lapproche prcdente se transpose sans difficult au cas des indices dingalit absolueprconiss par Kolm (1976). La courbe de Lorenz absolue LA(p; x) de la distribution x

Figure 5: Courbe de Lorenz Absolue

0

0.42

0.92

0.83

0.58

LA(p

;z)

1/6 3/6 4/6 5/6 1

indique le revenu quil faudrait en moyenne pour garantir aux p 100% individus les pluspauvres le revenu moyen de la socit. 10 La Figure 5 illustre la construction de la courbe deLorenz absolue dans le cas de la distribution x = (1, 2, 2, 4, 5, 7). On peut montrer alors quele classement des distributions rsultant de lunanimit au sein de la classe I A des indicesdingalit absolue est identique au classement engendr par le critre de Lorenz absolu dfinipar

(10) LA(p; x) = LA(p; y), pour tout 0 5 p 5 1.

Le classement de nos sept pays par le critre de Lorenz absolu est indiqu dans le Tableau 4.La substitution du critre de Lorenz absolu au critre de Lorenz relatif modifie le classementdes pays mme si ce changement nest pas dramatique. Ainsi, les tats-Unis sont toujoursdomins par tous les autres pays alors que que la Sude et la Finlande font toujours partie despays les plus galitaires. Il faut remarquer lascension de lAllemagne, qui domine maintenantla Norvge, cependant que le Canada et du Royaume-Uni ne sont toujours pas comparables.On vrifie ainsi dans le Tableau 2 que le Canada est moins ingal que le Royaume-Uni lorsque = 0.0002 alors que la situation inverse prvaut lorsque = 0.0005.10 La courbe de Lorenz absolue sobtient en intgrant la fonction quantile laquelle on a soustrait le revenu

moyen, soit donc LA(p; x) = p

0 (Q(p; x) (x)) dq, avec 0 5 p 5 1.

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Table 4: Classement selon le Critre de Lorenz AbsoluPays j

Pays i 2 3 4 5 6 7

1. Allemagne 1 1 1 0 1 02. Canada # 1 0 0 03. Royaume-Uni 1 0 # 04. tats-Unis 0 0 05. Sude 1 #6. Norvge 07. Finlande

7. La Dcomposition de lIngalit

On est souvent amen sintresser la relation entre lingalit totale celle qui a trait lamanire dont le revenu total est distribu entre tous les membres de la socit et lingalitentre les diffrents groupes constituant la socit ou au sein de ces mmes groupes. Parexemple, on souhaite connatre la part de lingalit des revenus du travail qui est imputable lingalit des rmunrations entre hommes et femmes. Cette question est troitement lie la proprit de cohrence en agrgation (CA), qui requiert que lingalit dans lensemble de lapopulation ne saurait diminuer suite une augmentation de lingalit dans un des groupes.Cette condition est en fait viole par un grand nombre dindices dont le coefficient de Gini.Supposons pour simplifier que la population totale soit partage en deux groupes mutuellementexclusifs nots A et B comprenant respectivement nA et nB individus. Soit respectivementxA et xB les distributions des revenus des groupes A et B et soit x = (xA; xB) la distributionpour lensemble de la population. Les revenus moyens des distributions xA et xB sont notesA et B. La proprit CA est en fait quivalente la condition suivante.Dcomposabilit Additive en Groupes (DAG). Pour toute distribution x = (xA; xB),on a

(11) I(xA; xB) = wAI(xA) + wBI(xB) + I(A, B).

La condition DAG exprime le fait que lingalit totale est gale la somme des ingalits dansles groupes I(xB) et I(xB) pondres par les facteurs wA et wB dpendant uniquement destailles et des moyennes respectives des sous-populations A et B, laquelle sajoute lingalitentre les groupes I(A, B). On montre alors (Shorrocks (1980)) que les seuls indices dingalitvrifiant les conditions N, S, PP, PT, IM et DAG sont une constante multiplicative positiveprs identiques au coefficient dentropie gnralis dfini par:

(12) I(x) =1

n( 1)

ni=1

[(xi(x)

) 1

],

o est un nombre rel.Une seconde application de la mesure des ingalits porte sur la manire dont les diffrentes

composantes du revenu contribuent lingalit du revenu total. Par exemple, on souhaiteraitsavoir quelle va tre lincidence sur lingalit du revenu total dune modification particulirede la grille des salaires ou dun changement de la fiscalit du rendement des actifs financiers.Supposons pour simplifier quil y ait seulement deux sources de revenus et soient x1i et x2i les

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Patrick Moyes/Mesurer les Ingalits conomiques

revenus que lindividu i retire des sources de revenu 1 et 2, respectivement. Les distributionsdes revenus provenant des sources 1 et 2 sont notes x1 = (x11, . . . , x1n) et x2 = (x21, . . . , x2n).La distribution du revenu total est alors x = x1 + x2. Considrons un indice dingalit I etnotons S1 et S2 les contributions respectives lingalit du revenu total I(x) des sources 1et 2. Il parat naturel de requrir que la somme des contributions puise lingalit totale, cequi quivaut poser:

(13) I(x) = S1 + S2, pour toute distribution x.

Supposons maintenant que lon assimile la contribution dune source de revenu la rductiondingalit du revenu total qui rsulte de llimination de lingalit au sein de la source derevenu en question. Si on note x1 et x2 les distributions des sources 1 et 2 o tous les individusreoivent le revenu moyen de la source, alors ceci scrit:

(14) S1 = I(x) I(x1 + x2) et S2 = I(x) I(x1 + x2).

Les deux conditions prcdentes impliquent que lindice dingalit doit possder la propritsuivante.Dcomposabilit Additive en Sources (DAS). Pour toute distribution x = (x1; x2), ona

(15) I(x1 + x2) = I(x1 + x2) + I(x1 + x2).

Onmontre alors (Shorrocks (1982)) quil nexiste pas dindice dingalit vrifiant les conditionsN, S, PT et DAS. Il rsulte des proprits de la variance que

(16) V (x1 + x2) = V (x1) + V (x2) + Cov(x1,x2),

o Cov(x1,x2) est la covariance des distributions x1 et x2. On en dduit que, si les sources derevenus sont indpendantes, alors Cov(x1,x2) = 0 et V (x1 + x2) = S1 + S2, avec S1 = V (x1)et S2 = V (x2). La variance vrifie les conditions N, S, PT et DAS sous la rserve expresseque les diffrentes sources de revenu soient indpendantes, ce qui constitue dans la pratiqueune restriction trs contraignante.

8. Dveloppement Rcents

On peut faire remonter la fin des annes 60-dbut des annes 70 le naissance de la thoriemoderne de la mesure de lingalit en conomie normative avec les contributions de Kolm(1969), dAtkinson (1970) et de Sen (1973). Les quarante dernires annes ont t marquespar un certain nombre davances dont le prsent article donne un aperu. La thorie de lamesure des ingalits nen prsente pas moins un certain nombre de limites dont des travauxplus rcents se sont faits lcho.

La premire difficult concerne le caractre difficilement irrductible du bien-tre individuelau seul revenu de ce dernier. Nous avons insist sur le fait que lenvironnement familial traditionnellement pris en compte au moyen dchelles dquivalence joue un rle important.En supposant que cette technique dajustement du revenu reflte correctement la maniredont le partage des ressources au sein du mnage affecte le niveau de vie de chacun de sesmembres, il nen demeure pas moins que certains facteurs ne sont pas pris en considration.Par exemple la sant de lindividu ou la proximit de biens publics sont autant de facteurs

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qui contribuent au bien-tre individuel (voir par exemple Gravel, Moyes, and Tarroux (2008)).Cette reconnaissance plaide pour une approche multidimensionnelle des ingalits o le revenuconstitue une dimension essentielle mais parmi dautres.

Une seconde difficult tient au principe des transferts, qui traduit lide mme de rduc-tion des ingalits. Selon ce principe, toute redistribution dun individu plus riche vers unindividu plus pauvre rduit lingalit au sein de lensemble de la population, et ce quelles quesoient les positions sur lchelle des revenus des individus participant au transfert. Un certainnombre dtudes base de questionnaires ont montr que ce principe considr comme uneproprit minimale pour un indicateur dingalit tait trs loin de faire lunanimit auprsdes personnes interroges (voir notamment Amiel and Cowell (1999)). Ce constat a conduit proposer des conditions alternatives au principe des transferts plus aptes faire lobjet dunconsensus et examiner leurs implications pour la construction dindices dingalit (voir parexemple Magdalou and Moyes (2009)).

References

Amiel, Y. and Cowell, F. A. (1999). Thinking About Inequality. Cambridge University Press,Cambridge.

Atkinson, A. B. (1970). On the measurement of inequality. Journal of Economic Theory, 2,244263.

Donaldson, D. and Weymark, J. A. (1980). A single-parameter generalization of the Giniindices of inequality. Journal of Economic Theory, 22, 6786.

Ebert, U. (1988). Measurement of inequality: An attempt at unification and generalization.Social Choice and Welfare, 5, 5981.

Gravel, N., Moyes, P., and Tarroux, B. (2008). Robust international comparisons of distribu-tions of disposable income and regional public goods. Economica. Published online DOI10.1111/j.1468-0335.2008.00688.x.

Kolm, S.-C. (1969). The optimal production of social justice. In J. Margolis and H. Guitton,editors, Public Economics, pages 145200. Macmillan, London.

Kolm, S.-C. (1976). Unequal inequalities I. Journal of Economic Theory, 12, 416442.Magdalou, B. and Moyes, P. (2009). Deprivation, welfare and inequality. Social Choice andWelfare, 32, 253273.

Sen, A. K. (1973). On Economic Inequality. Clarendon Press, Oxford, first edition.Shorrocks, A. F. (1980). The class of additively decomposable inequality measures. Econo-metrica, 48, 613625.

Shorrocks, A. F. (1982). Inequality decomposition by factors components. Econometrica, 50,193211.

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