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Michel Huglo, article extrait du Dictionnaire de la Musique. Science de la Musique : technique, formes, instruments. Sous la direction de Marc Honegger. Paris : Éditions Bordas, 1976. tome I (AK) ISBN 2-04-005140-6 tome II (LZ) ISBN 2-04-005585-6 _________________________________________ Cette copie numérique a été mise en ligne avec l’accord des Éditions Bordas http://www.editions-bordas.fr Elle est hébergée par Archivum de Musica Medii Aevi (Musicologie Médiévale – Centre de médiévistique Jean Schneider, CNRS / Université de Lorraine). L’édition de référence demeure protégée par la loi sur les droits d’auteur. Ce fichier est destiné à un usage strictement personnel à l’exclusion de toute fin commerciale. Archivum de Musica Medii Aevi http://www.univ-nancy2.fr/MOYENAGE/UREEF/MUSICOLOGIE/AdMMAe/AdMMAe_index.htm _________________________________________

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Michel Huglo, article extrait du

Dictionnaire de la Musique. Science de la Musique : technique, formes, instruments. Sous la direction de Marc Honegger. Paris : Éditions Bordas, 1976.tome I (AK) ISBN 2-04-005140-6tome II (LZ) ISBN 2-04-005585-6

_________________________________________Cette copie numérique a été mise en ligne avec l’accord des Éditions Bordashttp://www.editions-bordas.frElle est hébergée par Archivum de Musica Medii Aevi (Musicologie Médiévale – Centre de médiévistique Jean Schneider, CNRS / Université de Lorraine).L’édition de référence demeure protégée par la loi sur les droits d’auteur.Ce fichier est destiné à un usage strictement personnel à l’exclusion de toute fin commerciale.

Archivum de Musica Medii Aevihttp://www.univ-nancy2.fr/MOYENAGE/UREEF/MUSICOLOGIE/AdMMAe/AdMMAe_index.htm_________________________________________

C H A N T G A L L I C A N . L e cht g., par analogie au -> chant ambrosien ou mi lanais , pourra i t se définir comme le chant propre à l'église des Gaules avant la

réforme l i turgique imposée dans l ' E m p i r e franc par Pépin le Bref (t 768) et par Charlemagne. E n fait , i l n'a jamais existé une l i turgie et u n cht g. mais des liturgies et des répertoires de genre gal l ican : sous le terme de « gal l ican », au sens large, on regroupe les rites non romains en usage au-delà de l a péninsule Italique ; dans u n sens plus précis, i l faut entendre par liturgies gallicanes l 'ensemble des rites, organisa­tion des lectures et des chants propres aux grandes églises métropolitaines de l a Gaule Cisalpine et de la Germanie (Toulouse, L y o n , A u t u n , Tours , Sens, Rouen, C a m b r a i , Trêves, Mayence, Cologne, etc.). Cet ancien r i te gal l ican n 'a r ien à v o i r avec l a Uturgie néo-gallicane forgée de toutes pièces dans l a 2*"̂ moitié du xv i ie s. par des prêtres érudits.

Les différences q u i dist inguent les anciennes liturgies gallicanes de l a romaine se relèvent n o n seulement dans les usages mais aussi dans le style euchologique. A R o m e , le style des collectes et des préfaces de l a messe est d'une rigoureuse précision dans sa formulat ion théologique et d'une stricte concision dans le choix d u vocabulaire ; par contre, dans les l ivres gallicans, les oraisons et « contesta­tions » (ou préfaces) développent u n thème sous tous ses aspects, avec accumulat ion de figures de rhétorique (répétitions, redondances, métaphores, antithèses, etc.) et à l 'a ide d ' u n vocabulaire très riche. Dans le domaine d u chant, on constate q u ' i l n'a pas existé u n cht g. mais u n ensemble hétéroclite de pièces q u i se rattachent — par opposi t ion à l a « romana canti lena » — à l a famil le des l i turgies gallicanes. L e cadre q u i permet de déterminer l a fonction l i turgique des chants de la messe est fourni par les deux lettres attribuées par u n manuscr i t d ' A u t u n à St G e r m a i n , évêque de Par is : l 'auteur y décrit l 'ordonnance de l a messe gallicane sans oublier les pièces de chant. Les écrits de Grégoire de Tours (t 594) font parfois al lusion à telle ou telle pièce de chant.

Les chts g. ne sont pas conservés dans u n ou plusieurs manuscri ts notés q u i auraient survécu à l ' imposit ion de l a l i turgie et de l a cantilène romaines. Abolis par cette subst i tut ion des l i turgies à la fin du v i i i " s., les plus beaux ont survécu en s ' in trodui -sant dans les manuscrits grégoriens. L a s i tuat ion se présente donc i c i comme en Ital ie d u S u d , où les pièces du répertoire p r i m i t i f de l'église de Bénévent ont pénétré sous forme de doublets dans les manus­crits de chant grégorien, écrits et notés par des mains bénéventaines. L a cr i t ique doit donc s'efforcer de faire u n t r i dans cet ensemble de pièces transmises par les manuscrits notés et dist inguer les pièces d u fonds p r i m i t i f grégorien et celles q u i y furent i n t r o ­duites après l ' i m p o s i t i o n officielle de l a fin d u viii« s. Dans ce groupe des pièces ajoutées au cours d u ix« et du xe s. une nouvi_!l._ sélection s'impose : les compositions romano-franques d'une part et de l'autre les anciennes pièces gallicanes. M a i s cette analyse d u répertoire est très délicate dans sa réali­sation concrète.

L e premier critère de sélection est d'ordre paléo­graphique : l a comparaison des graduels entre eux (et ultérieurement l a confrontat ion des antiphonaires). Les pièces q u i appartiennent à tous les témoins d'origines diverses font part ie d u « fonds p r i m i t i f » grégorien. L e « résidu », c.-à-d. les pièces q u ' o n trouve isolément dans telle o u telle région seulement,

sont à soumettre au verdict de la cr i t ique interne. C'est ainsi que l'oiïertoire de St Et ienne Elegerunt, q u i ne fait pas part ie d u fonds p r i m i t i f (au 26 d é c , les plus anciens manuscrits grégoriens indiquent l'offertoire In virtute), présente dans son texte et dans sa mélodie plusieurs indices q u i dénotent son origine gallicane : l 'offertoire Elegerunt qui figure encore au G r a d u e l r o m a i n (mais sans ses anciens versets) est donc u n ancien « sonus » ou pièce ornée accompagnant l a solennelle procession des oblats. S u i v a n t l a remarque de W a l a f r i d Strabon (v. 830), c'est d'après le vocabulaire et l a mélodie (« verbis et sono ») que l ' o n peut déceler les anciennes pièces de cht gal l ican. E n effet, le vocabulaire et les expres­sions d u texte sont les mêmes que dans l'euchologie gallicane (G. M a n z , cf. Bibl iogr.) et l a version scrip-tura ire est celle des traduct ions latines parfois anté­rieures à la Vulgate de St Jérôme. E n f i n , lorsque le texte d'une pièce de chant rencontre des parallèles dans les antiphonaires hispaniques ou milanais, c'est u n nouvel indice en faveur de son origine gall icane : te l est justement le cas de l'offertoire Elegerunt. Malheureusement, l 'affectation l i turgique des pièces a insi identifiées n'est pas toujours établie ; c'est là u n écueil q u i empêche de bien connaître les différents genres l i turgico-musicaux de l 'ancien rite gal l ican. Cependant, i l n'est pas tout à fait impossible de déceler quelques tra i ts propres aux divers genres de cht gal l ican.

L a psalmodie gall icane ne comportai t pas de médiante au m i l i e u d u verset, mais une simple pause, comme à M i l a n et en Espagne. E n outre, on prat iquai t l a psalmodie à deux teneurs, celle d u 2" membre du verset étant plus basse d ' u n degré que celle du premier : ainsi dans le t o n pérégrin, qui ne faisait pas partie de r « octoéchos » l a t i n , pour le Ps. 113 In exitu. I l faut mentionner encore 1' « a l le lu ia t i cum » ou psaumes des laudes (Ps. 148-150), antiphonés avec l 'a l le lu ia , qui se chantai t à l'office d u m a t i n . A la différence de l'office r o m a i n , l'office gal l ican ut i l i sa i t les hymnes métriques. A i n s i l ' h y m n e d u lucernaire ou petit of&ce précédant les vêpres :

^ • • • •

I n - v e n - t o r r u - t i - l i , D i u b o - o e l u - n i - nis. qui c c r - t a v i - a - b w

t e m - p o - n di - vî - dit. m e r - l o a o - l e clia-«* i a - g r u - i i h o r - r i - d u a

^ • • - . - ^ ^ lu - cem rcd - de m - h , O u n - t t , fi - <h - Il - b w .

Comme autres hymnes gallicanes, on peut encore mentionner Christe qui lux es et dies pour compiles, Mediae noctis tempus est pour les nocturnes, Veni, Redemptor gentium pour Noël. E n f i n , l 'hymne en prose Te Deum : sa mélodie, construite sur une échelle défective, peut se réduire à une psalmodie ornée à deux teneurs, d u moins au début. De même, le Gloria in excelsis {n° X V de l 'ordinaire d u Graduel romain) , q u i a une structure mélodique identique, faisait jadis part ie de l'office des laudes d u rite gal­l i can. L'office gal l ican comportai t encore des antiennes aux mélismes chargés, souvent terminées par , u n

A lleluia dont le « neuma » se développait n o n pas sur la i inale -a, mais sur voyelle la médiane -e-, comme dans l 'ancien -> chant mozarabe. C 'est le cas dans l 'antienne à la Cro ix , O crux benedicta, quae sola... aile- (mélisme d'env. 50 notes)- luia. O n u t i l i ­sait aussi les antiennes à versets, comme à M i l a n : i l en reste plusieurs exemples dans l a série des antiennes pour le « M a n d a t u m » d u jeudi saint. E n f i n , i l faut relever l'usage fréquent des « preces » l itaniques, genre propre aux l i turgies gallicanes (Gaule, Espagne et Germanie) : elles sont caracté­risées par le dialogue entre le diacre q u i formule l ' intent ion de prière et l a foule q u i répond par une demande très courte, p.ex. << Rogamus te R e x seculo-r u m », Ces << preces », dont certaines viennent d'Espagne, ont été maintenues longtemps dans les manuscrits en notat ion aquitaine. — V o i r également l 'ar t . C H A N T M O Z A R A B E .

B i b l i o g r a p h i e — H . L E C L E R C O , a r t . G a l l i c a n e ( L i t u r g i e ) , in

D i c t . d ' a r c h é o l o g i e c h r é t i e n n e e t d e l i t u r g i e V I / i , 1 9 2 4 . ; A . W I L -

M A R T , a r t . G e r m a i n d e P a r i s ( l e t t r e s ) , ibid. ; F . C A B R O L , L e s o r i g i n e s

d e l a l i t u r g i e g . , in R e v u e d ' H i s t . e c c l . X X X , 1 9 3 0 ; A . G A S T O U É ,

L e c h t g . , ibid. X L I - X L H I , 1 9 3 7 - 3 9 , t i r é à p a r t G r e n o b l e 1 9 3 9 ;

G . M A N Z , . A u s d r u c k s f o r m e n d e r l a t e i n i s c h e n L i t u r g i e s p r a c h e , in

T e x t e u . A r b e i t e n , i . B e i h e t t , B e u r o n 1 9 4 1 ; J . Q U A S T E N , O r i e n t a l

I n f l u e n c e i n t h e G . L i t u r g y , in T r a d i t i o I, 1 9 4 3 ; P - S A L M O N , L e

l e c t i o n n a i r e d e L u x e u i l , in C o l l e c t a n e a b i b l i c a l a t i n a V I I , R o m e

1 9 4 4 ; R . G R I F F E , A U X o r i g i n e s d e l a l i t u r g i e g . , in B u l l , d e l i t t é r a ­

t u r e e c c l é s i a s t i q u e L U , 1 9 5 1 ; M . H u G L O , L ' a u t e u r d e l ' E x u l t e t

p a s c a l , in V i g i l i a e c h r i s t i a n a e V I I , 1 9 5 3 ; d u m ê m e , D i e G e s à n g e

d e r a l t g a l l i k a n i s c h e n L i t u r g i e , in G e s c h . d e r k a t h . K i r c h e n m u s i k ,

K a s s e l , B V , 1 9 7 2 ; B R . S T A B L E I N , a r t . G a l l i k a n i s c h e L i t u r g i e ,

in M G G I V , 1 9 5 5 ; L e s p r e c e s d e s g r a d u e l s a q u i t a i n s e m p r u n t é s

à l a l i t u r g i e h i s p a n i q u e , in H i s p a n i a S a c r a V I I I , 1 9 5 5 ; R . J . H E S -

l î E R ï , L e c h t d e l a b é n é d i c t i o n é p i s c o p a l e , in M é l a n g e s M g r M .

A n d r i e u , n " s p é c i a l d e l a R e v u e d e s S c i e n c e s r e l i g i e u s e s , S t r a s ­

b o u r g 1 9 5 6 ; C . G i N D E L E , D i e g a l l i k a n i s c h e n « L a u s p e r e n n i s « - K l o s t e r

u . i h r O r d o o f f i c i i , in R e v u e B é n é d i c t i n e L X I X , 1 9 5 9 ; G . O U R Y ,

P s a l m u m d i c e r e c u m a l l é l u i a , in E p h e m e r i d e s l i t u r g i c a e L X X V I ,

1 9 6 5 ; H . A N G L E S , S t C é s a i r e d ' A r l e s e t l e c h t d e s h y m n e s , in

M a i s o n - D i e u n ^ 9 2 , 1 9 6 7 .

M . H U G L O