22
MÉMOIRE De: L'incubateur d'entreprises agroalimentaires de Mirabel (IEAM) 9850, rue de Belle-Rivière, Mirabel (Québec) J7N 2X8 Téléphone: (450) 434-8150 poste 5764 [email protected] À: La Commission sur l'avenir de l'agriculture et de l'agroalimentaire québécois Par: Monique Paquette, coordonnatrice Christine Ferland, ex-incubée Ann Lévesque, incubée Thème: Le démarrage de nouvelles entreprises agricoles, est-ce possible? Où: Lachute, 5 juin 2007

MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

  • Upload
    others

  • View
    1

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

MÉMOIRE

De: L'incubateur d'entreprises agroalimentaires de Mirabel (IEAM) 9850, rue de Belle-Rivière, Mirabel (Québec) J7N 2X8

Téléphone: (450) 434-8150 poste 5764

[email protected]

À: La Commission sur l'avenir de l'agriculture et de l'agroalimentaire québécois

Par: Monique Paquette, coordonnatrice

Christine Ferland, ex-incubée

Ann Lévesque, incubée

Thème: Le démarrage de nouvelles entreprises agricoles, est-ce possible?

Où: Lachute, 5 juin 2007

Page 2: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

Madame, Messieurs les commissaires,

Le Conseil d'administration, la coordonnatrice et la clientèle de l'Incubateur d'entreprises

agroalimentaires de Mirabel (IEAM) souhaitent partager avec vous l'expérience unique que nous

vivons depuis septembre 1998 concernant le support au démarrage de nouvelles entreprises

agricoles dans la région de Mirabel.

La présentation sera faite par Monique Paquette coordonnatrice depuis la mise en place de

l'organisme, ex-productrice agricole et mère de 3 fils producteurs agricoles; elle sera

accompagnée de mesdames Christine Ferland et Ann Lévesque, clientes de l'Incubateur.

1. HISTORIQUE ET MANDAT

L'Incubateur est né d'une concertation régionale suite à une problématique identifiée au

milieu des années 1990 principalement par des représentants du Centre de formation

agricole de Mirabel (CFAM) et du MAPAQ régional concernant le manque

d'encadrement des finissants dans les programmes de formation agricole (DEP, AEC,

DEC, ASP Lancement d'une entreprise) qui veulent démarrer de nouvelles entreprises

agricoles.

Page 3: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

Le comité provisoire chargé d'étudier la question a décidé de mettre en place un organisme à but

non lucratif dont le mandat serait d'encadrer des personnes formées en agriculture durant les

périodes allant du pré-démarrage (1-2 ans avant) au démarrage (5 ans après) de leurs entreprises.

2. CONSEIL D'ADMINISTRATION ET PARTENAIRES

Le conseil d'administration de l'Incubateur est composé de partenaires qui endossent la

mission de l'organisme et qui la supportent d'une façon ou d'une autre:

- Le Centre de formation agricole de Mirabel

Fournit gratuitement un bureau pour la coordonnatrice avec service de secrétariat,

téléphone, télécopieur, ordinateur, salle de réunion, etc..

Fournit gratuitement du terrain de la ferme-école pour la localisation des infrastructures

de l'IEAM soit 2 serres de production et 10 parcelles totalisant 6 hectares de terre drainée

et irriguée.

Fournit gratuitement l'accès à l'eau d'un puits et l'usage de certains équipements et

machineries agricoles.

Collabore avec les professeurs dans le cadre des programmes de formation

professionnelle et technique à la mise en place et à l'entretien des avoirs de l'Incubateur:

exemple, ce sont les élèves du DEP en production horticole qui ont construit les serres, ce

sont les élèves du DEP en mécanique agricole qui font l'entretien et la réparation du

tracteur et de la machinerie ou encore ce sont les étudiants du DEC en technologie de la

Page 4: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

production horticole et de l'environnement qui règlent certains problèmes de drainage,

compaction, techniques de production dans nos serres et nos champs.

- Le Ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation

Finance en partie le fonctionnement de l'organisme dans le cadre de son programme.

Appui au développement et à l'adaptation de l'agriculture et de l'agroalimentaire.

Analyse et commente les plans d'affaires déposés par les incubés, incubées.

- Le CLD de Mirabel

Finance la mise en place et l'amélioration de nos infrastructures dans le cadre du

programme Pacte rural: la construction de 2 serres style Ovaltech de Harnois de 96' x 32'

avec bâtisses attenantes qui servent de pouponnières, la remise en culture d'une parcelle

de terrain non cultivé depuis l'expropriation de Mirabel, l'achat d'équipements agricoles,

etc.

Supporte plusieurs de nos incubés avec les programmes de "Jeunes promoteurs" et

Soutien au travailleur autonome" d'Emploi-Québec.

- La ville de Mirabel

Loue au CFAM le terrain de la ferme-école pour 1 $ par année ce qui permet à

l'Incubateur d'avoir des parcelles de terre à offrir gratuitement aux incubés.

Page 5: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

- Le CLE de Ste-Thérèse

Finance l'embauche d'un agronome conseiller technique pour un contrat de 80 heures par

année pour le suivi des productions, des récoltes, de l'organisation du travail, de

l'établissement des priorités, des contacts et sources d'information.

Finance l'embauche d'un technicien pour l'utilisation sécuritaire et fonctionnelle des

équipements et de la machinerie du CFAM et de l'IEAM pour un contrat de 70 heures par

saison

Finance la coordination de ces 2 emplois à temps partiel

- Autres membres du CA

La Financière agricole du Québec, le syndicat de base de l'UPA Sainte-Scholastique-

Mirabel et le Collège Lionel-Groulx apportent aussi un appui important comme

partenaires au niveau du réseautage, de la formation et de l'information.

- Autres partenaires financiers

L'IEAM a bénéficié depuis son implantation de subventions importantes du ministère des

Affaires municipales et de la Métropole via le volet développement de la Métropole et

aussi de l'ex-conseil régional de développement des Laurentides (CRÉ).

Page 6: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

3. LE FONCTIONNEMENT

Le Conseil d'administration se rencontre 5 fois par année comprenant l'assemblée

générale annuelle. Des comités ad hoc sont formés pour analyser et prendre position sur

certaines questions. Le CA embauche une personne 2 jours par semaine pendant 10 mois

pour exécuter les mandats de l'organisme et offrir les services aux incubés(es). Le budget

de fonctionnement est d'environ 25 000 $ par année.

4. LA CLIENTÈLE

Notre clientèle est principalement composée de gens formés en agriculture non issus du

milieu agricole qui veulent démarrer de petites entreprises généralement biologiques,

faire la transformation de leurs produits dans certains cas et dans tous les cas avoir un lien

direct avec leurs consommateurs pour leur mise en marché.

L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à

leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent ou louent leur propre fonds

de terre. La moyenne d'âge est d'environ 35 ans. La première année peut servir à

expérimenter ses techniques de production, de gestion et de mise en marché et aussi

valider son intérêt, sa passion pour la profession d'agriculteur(trice). À la deuxième

année, les incubés(es) doivent déposer un plan d'affaires.

Page 7: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

5. L'OFFRE DE SERVICES.

Depuis la mise en place de l'organisme, l'Incubateur grâce à ses

partenaires offre une multitude de services à sa clientèle:

Consultation et encadrement professionnel au niveau de la technique, de la gestion, du

financement, de l'analyse du plan d'affaires et de la mise en marché. (Cette année l'IEAM

travaille à la mise en place d'un marché public biologique sur le site de la ferme-école,

lieu de production de certains incubés).

Possibilité d'occuper des espaces de terrain, de serres, de bâtisses de l'IEAM, du CFAM

ou d'ailleurs.

Utilisation de la machinerie de l'IEAM ou du CFAM.

Réseau de contact avec des fournisseurs de biens, de services et de conseils techniques.

Support moral et suivi individuel.

Programme de main-d'œuvre étudiante avec Placement carrière été.

Accès à un bureau, téléphone, télécopieur, photocopieur, ordinateur, internet au CFAM.

Recherche de programmes de financement et de programmes de formation.

Accès au centre de documentation et occasionnellement au personnel du CFAM.

Invitation à des colloques, symposiums, journées d'étude, visites d'entreprises.

Page 8: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

6. RÉSULTATS

Depuis le début de ses opérations, l'Incubateur a accompagné une vingtaine de diplômés

d'écoles d'agriculture qui souhaitent développer de nouveaux produits souvent

biologiques, produire des aliments sains tout en protégeant l'environnement et vivre de

l'agriculture.

Les projets d'entreprises sont souvent innovateurs et demandent plusieurs années de

recherches et d'expérimentations surtout au niveau des techniques de production. Très

souvent, l'expérience nous a démontré que la demande pour ces produits dépasse la

capacité de production de nos incubés et pour répondre à la demande croissante, il faut

investir, augmenter la production, engager de la main-d'œuvre, réorganiser sa mise en

marché, en résumé, gérer la croissance ce qui n'est pas évident parce qu'en fait, cette

clientèle est encore à la phase démarrage.

C'est ainsi qu'après la 3e année, plusieurs abandonnent l'idée d'avoir leur propre

entreprise parce que financièrement ils n'ont pas obtenu les résultats escomptées et qu'ils

ne peuvent plus compter sur le salaire du conjoint ou les économies accumulés.

En agriculture, il est extrêmement difficile pour quelqu'un qui démarre une nouvelle

entreprise d'atteindre la rentabilité les premières années et quoiqu'on en pense, les

programmes d'aide à cette relève ne s'appliquent généralement pas.

Page 9: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

Couvés par l'incubateur les 2-3 premières années, nos incubés ont de la difficulté à

passer à l'étape de l'entreprise viable et rentable; alors ils quittent la production pour

occuper de bons emplois connexes à l'agriculture puisqu'ils sont formés en rêvant d'y

revenir un jour lorsqu'ils auront gagné leur vie et celle de leur famille.

7. CONCLUSION

De par son mandat, l'IEAM veut aider des personnes qui par choix et par passion se sont

orientées vers l'agroalimentaire; elles ont d'abord investi quelques années en formation

agricole, ensuite mobilisé l'entourage à leur projet d'établissement et suivi les étapes qui

mènent au démarrage.

Que manque-t-il à cette clientèle pour passer du rêve à la réalisation de leur projet?

Je laisse à deux représentantes de nos incubés le soin de raconter leurs expériences et de

proposer leurs pistes de solutions.

Monique Paquette

Coordonnatrice de l'IEAM

Page 10: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

FERME Semi-SédenTerre Le projet de la ferme Semi-SédenTerre a commencé lors de la rencontre d’Ann Lévesque et de

Martin Dostaler en 2003. Ces 2 personnes se sont croisées car elles étaient toutes les deux en

stage sur la même ferme (la ferme Cadet-Roussel) pour obtenir une expérience concrète en

agriculture biologique. Depuis ce temps, ces 2 jeunes passionnés de l’agriculture écologique

n’ont jamais quitté ce domaine. Ils ont effectué un autre stage de 6 mois à la ferme biologique

(La Rosée) et Martin y occupa un emploi l’année suivante pour toute la saison.

Ann travaille depuis l’automne 2004 pour le réseau d’agriculture soutenu par la communauté

(ASC) d’Équiterre. Ann et Martin ne sont pas directement issus d’une famille d’agriculteurs

toutefois, leurs parents et grands-parents l’étaient. Les raisons pour lesquelles ils ont choisi le

métier d’agriculteur sont liées à leurs valeurs environnementales, sociales et leur amour de la

terre. Selon eux, l’agriculture biologique est un mode de vie et un moyen concret pour

sauvegarder l’environnement et la ruralité tout en contribuant à la santé de la population et des

campagnes.

En 2006, une occasion s’offre à eux soit celle de joindre l’Incubateur d’entreprises

agroalimentaires de Mirabel (IEAM) pour partir le projet de la ferme Semis-

SédenTerre. L’IEAM leur permet d’avoir accès à un fonds de terre et à des services facilitant le

démarrage de leur entreprise agricole. L’IEAM leur offre une serre, un espace chauffé et

lumineux pour partir leurs semis, l'accès à de l’équipement et de la machinerie agricole de

location ainsi qu’à un appui technique en agronomie et en démarrage d’entreprise.

Page 11: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

La ferme est membre de l’IEAM pour la somme de 150$ par année et peut cultiver sur le site

pour une durée maximale de 5 ans. La ferme Semis-SédenTerre est à sa deuxième année

d’opération et cultive pour 50 familles de juillet à fin septembre par l’entremise des paniers ASC.

L’IEAM donne un véritable coup de main à cette jeune entreprise. Avec les investissements du

départ, la ferme ne dégage pas encore assez de revenu pour payer des salaires à quiconque.

Comme toutes les entreprises agricoles membres de l’IEAM, la ferme Semis-SédenTerre cultive

en régie biologique. Elle partage entre les membres la certification et les frais qui en découlent.

La demande de certification conjointe entre les membres de l’IEAM diminue les coûts liés à la

certification et par ce fait même, les coûts d’opération d’une ferme en démarrage.

La majorité des ventes de la ferme Semis-SédenTerre sont réalisées par l’entremise des paniers

ASC. L’agriculture soutenue par la communauté (ASC) est un partenariat entre une ferme et un

groupe de consommateurs. Les citoyens s’engagent financièrement auprès de la ferme au

printemps pour une livraison de 12 paniers hebdomadaires de fruits et légumes à partir du début

juillet jusqu’à la fin septembre. En revanche, la ferme produit une très grande gamme de fruits et

légumes pour les nourrir pendant toute cette période. La ferme est membre du réseau québécois

des projets d’ASC d’Équiterre. Cet organisme assume la coordination du réseau d’ASC au

Québec. Il permet d’avoir accès à une multitude de services relatifs à ce mode de mise en

marché alternatif et d’échanger avec les autres fermes biologiques participant au mouvement de

l’ASC.

Page 12: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

La durée maximale du partenariat avec l’IEAM est de 5 ans. Devant ce constat, la ferme est à la

recherche d’une terre à vendre ou avec location de longue durée. La ferme a de la difficulté à

trouver une terre d’une vingtaine d’acres et plus à vendre ou à un prix abordable. Les terres avec

des bâtiments sont vendues, pour la majorité, à des prix inaccessibles pour la jeune relève

agricole de première génération. Il est cependant possible d’acheter une petite terre sans

résidence toutefois l’institution financière demandera à l’acheteur une mise de fond se situant

entre 25 à 50 % la valeur du fonds de terre. À moins d’avoir de l’aide financière de la famille

immédiate, il est difficile pour la relève agricole de financer une mise de fond trop élevée.

Malgré leur attachement aux Basses-Laurentides, la ferme Semis-SédenTerre envisage de

s’établir loin des grands centres urbains car la spéculation foncière est moins prononcée là-bas.

En payant moins chère leur terre, les 2 jeunes pourront vivre de l’agriculture plus rapidement

sans avoir à travailler à l’extérieur de la ferme pour payer leurs dettes. La ferme doit trouver des

solutions pour diminuer son endettement lié au démarrage si elle veut être viable

économiquement en peu de temps. Ann et Martin ne sont pas fermés à l’idée de louer une terre

avec un bail à long terme si le contrat de location les protège du danger de perdre l’accès à la

terre à court et moyen terme. Ils sont également ouverts à de nouvelles initiatives qui leurs

permettraient de cultiver, le temps qu’ils voudraient, sans avoir à prendre en charge le fardeau

des paiements trop lourds liés à l’achat du fonds de terre.

Étant donné que la ferme est locataire, elle n’a pas encore fait une demande de financement

auprès de la Financière agricole du Québec (FADQ). Ils ont toutefois contacté la FADQ à

maintes reprises pour s’informer sur les différents modes de financement. Ann a le droit à une

prime à l’établissement de 30 000$ car elle détient une formation universitaire en environnement

Page 13: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

et en agriculture écologique de McGill. Martin est chef cuisinier de formation mais n’est pas

admissible à cette subvention malgré son expérience terrain, ses connaissances dans le domaine,

son professionnalisme et son amour du métier. D’ici 5 ans, la ferme espère accéder à la totalité

de sa prime à l’établissement car celle-ci envisage de générer un emploi à temps plein pour

qu’Ann puisse vivre exclusivement de la ferme.

L’IEAM permet à la ferme Semis-SédenTerre de se faire une solide expérience en agriculture.

Depuis 2 ans, Ann et Martin apprennent le métier d’agriculteur tout en se bâtissant une clientèle.

D’ici la fin du partenariat avec l’IEAM, la ferme aura accumulé des actifs (outils, machineries,

capitaux, etc.) qui lui permettra de faciliter son transfert vers un nouveau lieu de cultures.

Malgré la rareté des terres à prix abordables et réalistes pour permettre le démarrage d’une ferme

de première génération, Ann et Martin sont tout de même positifs à l’égard du futur. Leur

conviction et détermination à pratiquer l’agriculture biologique leur porteront sûrement fruits. Si

le Québec veut encore des fermiers d’ici 10-20 ans, il faudra que ce dernier se questionne si

l’entrée dans ce secteur est viable et réalisable pour la jeunesse. Ann et Martin sont deux jeunes

qui attendent (et qui sont même déjà en action) juste pour ça. Pourront-ils réaliser leur rêve

jusqu’au bout pendant qu’ils sont encore jeunes ou devront-il attendre leur retraite pour qu’il se

concrétise?

Page 14: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

RECOMMANDATIONS

La CPTAQ, le MAPAQ et la FADQ doivent reconnaître qu’il est possible de vivre du

maraîchage biologique diversifié sur une petite superficie de terre. En effet, seulement 4

hectares peuvent suffire pour le démarrage d’une production en ASC rentable, qui pourra

nourrir 210 familles.

Faciliter au sein de la CPTAQ, le morcellement des terres à l’intérieur de la zone verte

pour permettre la production agricole sur de petites superficies et à la relève agricole de

s’y installer.

Enlever les terres agricoles de la spéculation foncière.

Diminuer la mise de fonds demandée (de 25 à 50%) lorsqu’il s'agit de l’achat d’une terre

agricole sans bâtiment pour que les fermes agricoles de première génération puissent en

acquérir plus facilement financièrement.

Multiplier les projets d’incubateurs d’entreprises agroalimentaires à grandeur du Québec

ou du moins dans les secteurs où l’on enseigne l’agriculture pour permettre à la relève

non familiale (ou de 1ère génération) de démarrer en agriculture et d’acquérir une solide

expérience dans ce domaine.

Financer les projets d’incubateurs d’entreprises agroalimentaires déjà existants.

Développer des alternatives à l’achat d’un fonds de terre pour la relève agricole telles que

les fiducies foncières, les baux de 100 ans ou à long terme, les projets de valorisation des

terres en friche et des coopératives de travail et solidarité.

Page 15: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

Le développement de fiducie foncière agricole doit être favorisé pour préserver les terres

agricoles périurbaines de la spéculation et de permettre à la relève de les cultiver sans

avoir à porter le fardeau financier lié à l’achat d’un fond de terre.

Un bonus de 5 000 $ à l’établissement pour les fermes biologiques doit être

établi par la Financière Agricole du Québec pour encourager les bonnes pratiques

agricoles et stimuler l’offre québécoise en aliments biologiques.

Une redevance devrait être accordée aux agriculteurs qui protègent les variétés anciennes

(végétales et animales), façonnent le territoire, rehaussent les saveurs de notre terroir et

contribuent à éduquer la population au monde agricole soit via l’agrotourisme, les

marchés publics et l’ASC.

Un programme doit être établi par le MAPAQ pour rembourser les coûts

reliés à la certification biologique spécialement pour les fermes en démarrage.

Appuyer financièrement la création et le maintien des initiatives de circuits courts de

mise en marché tel que les kiosques à la ferme, les marchés publics, le réseau québécois

des projets d’ASC, les marchés de solidarité, etc.

Éduquer les citoyens sur les vrais coûts des aliments pour permettre aux agriculteurs de

vendre leurs aliments à un juste prix.

Enlever l’agriculture de l’OMC et miser sur la souveraineté alimentaire du pays.

Valoriser les métiers d’agriculteur et d’ouvrier agricole auprès des jeunes et moins

jeunes.

Rédaction : Ann Lévesque, 23 mai 2007

Page 16: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

Mémoire IEAM Témoignage de Christine Ferland, ex-incubée Le Jardin des Saveurs Cher président, cher(e)s commissaires,

Le témoignage qui suit est le récit des difficultés que mon mari et moi avons vécues dans

l’établissement de notre entreprise agricole au cours des cinq dernières années. Mon but est de

faire connaître les embûches que connaissent les jeunes de la relève agricole non issus du milieu

agricole. C’est aussi de partager avec vous les problèmes rencontrés par les producteurs de

produits du terroir et de produits spécialisés. Comme vous pourrez le constater, quelques-unes

des problématiques soulevées dans mon témoignage rejoignent l’ensemble de la relève agricole

et soulèvent des questions fondamentales pour l’avenir des marchés de niche au Québec.

Les années de préparation

J’ai gradué de l’université McGill en agronomie en 1999 avec mon conjoint Jérôme Plante qui

graduait simultanément du programme de Génie Agricole de la même université. Au cours de

l’été 1998, nous avons travaillé sur une ferme de la Nouvelle-Écosse récemment établie dans la

production de légumes de spécialités biologiques. C’est ainsi qu’est né notre rêve de devenir

agriculteurs. Non seulement ces gens avaient réussi mais eux aussi n’étaient pas issus du milieu

agricole. En terminant nos études, nous avons été embauchés par une entreprise du Michigan,

près de Détroit. Les agronomes sont plus rares là-bas et le salaire est meilleur. Surtout, ils ont de

l’équipement à la fine pointe de la technologie. C’est dans les 15 acres de serres de POST

GARDENS Inc. que j’ai fait mes premières expériences en gestion de personnel et en production

serricole. Mon mari était alors en charge des équipements et des bâtiments. Au bout d’une année,

nous étions de retour au Québec. Nous étions maintenant convaincus que nous avions les

capacités pour gérer ce type d’entreprise. Le problème, c’était le capital de départ. Nous étions

jeunes, avions des prêts et bourses à payer. Nous avons vite compris que nos emplois en

agriculture, bien que passionnants, ne nous permettraient pas de ramasser les fonds nécessaires ;

c’est navrant mais je ne vous apprends rien. Jérôme avait de l’expérience en climatisation,

chauffage et en génie du bâtiment pour avoir travaillé pour mon père qui avait une entreprise de

distribution dans ce domaine. Il s’est facilement trouvé un emploi dans ce secteur. Pour ma part,

je savais gérer des employés et j’avais de la facilité avec les chiffres. Par un coup de chance

Page 17: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

inespérée, j’ai été engagée par Telus, division systèmes nationaux comme adjointe du directeur

des ventes et directrice des ressources humaines pour le bureau de Montréal pour un

remplacement. J’avais performé à l’entrevue malgré le fait que je n’avais pas de diplôme en

administration ou en commerce.

L’achat de la ferme

Après plusieurs mois de travail, presque 2 ans, nous avions amassé assez de fonds pour acheter

une fermette à Mirabel. Mais pas question de passer par La Financière agricole. Leur premier

argument était simple ; nous n’avions pas de chiffre ou de plan d’affaire. C’était vrai. Par contre,

nous avons eu droit à plusieurs autres arguments tels que le peu d’expérience en agriculture. Ce

qui se traduit, si on lit entre les lignes, par pas de parents en agriculture. C’est vrai, je ne conduis

pas de tracteur depuis que j’ai 12 ans mais de là à dire que je n’ai pas d’expérience en

agriculture… Pas non plus de garanties, ce qui veut dire, pas la terre ou le quota des parents pour

garantir les prêts. Nous avons donc été voir la banque et avons acheté une maison avec un très

grand terrain. C’est beaucoup plus facile à financer ! La même valeur, la même maison, le même

terrain sauf que l’on ne disait pas que c’était pour faire de l’agriculture. Le banquier était rassuré,

nous avons eu notre première hypothèque. Le choix de Mirabel s’imposait à cause de

l’Incubateur d’entreprises agroalimentaires de Mirabel (IEAM) et du Centre de formation

agricole de Mirabel (CFAM). Enfin, de l’espoir. À partir de ce moment, tout se bouscule.

L’IEAM est un tremplin puissant et en un rien de temps, nous avons un plan d’affaires construit

avec l’aide du CLD et révisé par Monique Paquette, coordonnatrice de l’IEAM. Nous avons du

support technique des enseignants de l’école, nous avons des installations et de l’équipement

pour produire, nous avons de l’aide des élèves de l’école pour la récolte. Nous obtenons les

subventions pour le démarrage d’entreprise du CLD et d'Emploi-Québec comme le Soutien au

travailleur autonome et Jeunes Promoteurs pour l’achat d’équipement. Dans la région de

Mirabel, tous les intervenants locaux sont sensibilisés à l’agriculture grâce au CFAM et à

l’IEAM. Pour avoir vérifié auprès des CLD dans d’autres régions, je sais que ce n’est

malheureusement pas toujours le cas.

Nous gagnons ainsi plusieurs prix au concours québécois en entrepreneurship et plusieurs autres

concours reliés à l’entreprenariat. La production de légumes de spécialité en serre va de mieux en

Page 18: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

mieux. Nous avons maintenant 2 ans de production et nous avons développé un marché auprès

des chefs cuisiniers de renom tel que Normand Laprise du Toqué et Anne Desjardins de L’eau à

la bouche. Nos revenus pour la superficie cultivée sont impressionnants. Près de 40 000$ dans

une serre de 3000 pieds carrés et un espace de terrain équivalent. Mais nous occupons toujours

des emplois à l’extérieur. Moi comme représentante d’une meunerie de la région et mon conjoint

comme spécialiste en économie d’énergie pour des firmes d’ingénierie en génie du bâtiment.

Nous étions à l’époque comme toutes les petites entreprises agricoles qui ont des productions

marginales et qui paraissent dans la Terre de chez-nous et la Presse dans le cahier du samedi.

L’avenir nous appartenait. Nous avions peu de dépenses, beaucoup de revenus par pied carré et

encore l’énergie du départ.

Le démarrage, le vrai !

En 2004, un complexe de serre de la région a été mis en vente. La terre et le complexe de serre

ont besoin d’améliorations mais le prix semblait raisonnable. Avant de faire une offre, nous

avons contacté une personne ressource très importante pour nous à la Financière agricole

rencontrée sur le conseil d’administration de l’IEAM. Très rapidement au téléphone, il a estimé

la valeur de l’entreprise agricole en vente, nous a indiqué les montants qui seraient attribués pour

l’achat d’une telle propriété. Nous avons fait l’offre, elle a été acceptée. Nous avons eu le

financement et nous avons emménagé. Pour la plupart des entreprises en démarrage, c’est ce

point qui est le plus difficile. Mais lorsqu'une entreprise fonctionne déjà et que l’on a des

personnes ressources d’un tel calibre, nous avons plus de chances de notre côté. Et encore là,

cela n’a pas été facile. Jérôme a dû effectuer plusieurs coups de téléphone pour faire aboutir le

dossier. C’était à la limite du harcèlement mais il ne lâchait pas prise. C’est en grande partie

pourquoi nous avons obtenu des résultats.

Nous avions un choix, essayer de vivre de l’agriculture ou continuer à cultiver à petite échelle en

travaillant à l’extérieur. Ici je fais une pause…. Oui, nous aurions pu décider de ne pas investir et

de prendre 10 ans pour bâtir notre entreprise. Mais ce n’était plus du jardinage que l’on voulait

faire. De plus, c’est épuisant d’avoir plusieurs emplois à la fois. Les bases semblaient solides, les

chiffres et l’expérience étaient là. Nous avons décidé de bouger…

Page 19: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

Mais nous n’étions plus dans le petit nid douillet de l’IEAM et pour notre entreprise il s’agissait

d’une deuxième vie complètement différente de ce que nous avions vécue. En rétrospective, nous

croyons qu’il s’agissait du vrai démarrage de notre entreprise. Nous avons alors réussi à obtenir

la prime à l’établissement de mon conjoint. Un tour de force si on n’en croit ce que racontent

plusieurs jeunes agriculteurs. Mais le montant attribué a été littéralement englouti dans

l’amélioration du complexe de serre. Une goutte dans l’océan et le travail n’était pas complété.

L’aide au démarrage ressemblait à un rêve flou. Mais nous sommes vite retombés dans la réalité.

Nous avions fait des dépenses énormes comparativement à nos revenus et nous réclamions la

taxe sur les équipements subventionnés à l’aide de la prime à l’établissement. Les gens du

ministère du revenu ont donc décidé de nous faire une visite et de venir vérifier notre entreprise.

Ils ont retenu pendant près de 8 mois un montant de 10 000$ en retour de taxes. Ce montant

représentait pour nous un fonds de roulement essentiel. Après une longue bataille de chiffres,

nous avons récupéré presque la totalité du montant. L’anxiété et la perte de temps qu’avait

engendré cette aventure commençaient à laisser des séquelles. Alors il a fallu comprendre que

nous étions dans la cour des grands, dans la même catégorie tout d’un coup que tous les

producteurs déjà établis. Gérer les ventes, la distribution des produits et la production biologique

de variétés de tomates anciennes en serres étaient un défi de taille. Trop gros pour nos deux

épaules… Avec l’arrivée de notre petite fille, nous avions moins de temps et les semaines de 70 à

80 heures de travail devenaient impossibles. Les problèmes étaient complexes, bien que tous

deux compétents nous avions fait appel à l’agronome au club d’encadrement pour les

producteurs de tomates en serre. Mais comme le représentant n’arrivait pas a être reconnu par le

réseau agri-conseil de notre région, nous avons reçu une facture pour la totalité de ses services…

Après 2 années de production dans le complexe de serre, j’ai décidé d’arrêter mais mon conjoint

ne voulait pas lâcher. Nous étions tous les deux épuisés et financièrement c’était difficile. J’ai

décroché un poste d’enseignante au CFAM. À la fin de la deuxième année, il devait emprunter

de l’argent pour le roulement de l’entreprise. Même si les améliorations avaient augmenté la

valeur de l’entreprise, ni la banque ni la Financière agricole n’étaient prêtes à se mouiller

davantage. C’est le père de Jérôme qui a finalement accepté de refinancer en hypothéquant sa

maison. Au cours de cette dernière année, les choses roulèrent plus rondement. La popularité de

l’entreprise aidant, le kiosque du Marché Jean-Talon et le site Internet étaient beaucoup

Page 20: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

fréquentés mais la culture de variétés anciennes de tomates n’est pas simple et la production a

souffert de maladies oubliées depuis longtemps. Nous arrivions à peine à joindre les deux bouts.

Ayant déjà bénéficié du soutien aux entreprises en démarrage, nous avons dû nous rabattre sur le

PCSRA et sur le programme Options. Mais notre entreprise passait entre les fentes du système.

Trop petite pour bénéficier de support financier et trop différente pour être comparée au modèle

en place. Nous n’avons pu bénéficier d’aucune aide financière mise en place pour les

agriculteurs. Nous avions 4 employés qui travaillaient pour nous et qui payaient leur impôt

comme tout le monde. Nous avions une clientèle établie et les distributeurs commençaient à nous

approcher sérieusement. Mais il fallait vivre, manger, se soigner et prendre soin de notre enfant.

Le temps et l’argent manquaient mais le potentiel était là. Que pouvions-nous faire de plus, la fin

de l’année arrivait et l’idée d’emprunter de nouveau de l’argent à la famille n’était plus une

option valable. Alors, quand ce n’est plus possible d’avancer, bien que l’agriculture soit une

passion, il faut avoir le courage de prendre une décision. Nous avons donc mis l’entreprise en

vente. La ferme a rapidement été achetée et les nouveaux propriétaires en prendront possession

au cours de l’été 2007. Nous n’avons pas fait faillite, les banques et La Financière agricole n’ont

pas perdu un sou dans notre aventure. Le prix de vente nous a permis de limiter les pertes et nous

remboursons tranquillement le montant restant de l’emprunt fait auprès du père de Jérôme. C’est

à contrecœur que Jérôme s’est trouvé un emploi comme ingénieur en efficacité énergétique. La

deuxième semaine de travail, il a été appelé comme consultant en géothermie pour un producteur

de concombres en serre sur la Rive-Sud de Montréal. Imaginez sa douleur. Quelle ironie. C’est

pourquoi c’est moi, Christine, qui vous écrit ce récit. J’ai mon poste d’enseignante au CFAM

avec des gens du milieu agricole et j’arrive à me contenter de ne plus avoir mon entreprise

agricole mais il n’y a aucun doute dans mon esprit que mon conjoint aurait préféré être

agriculteur toute sa vie. Il en parle régulièrement et refuse de croire qu’il va passer le restant de

sa vie dans son bureau d’ingénieur.

Les constats

Premièrement, les gens formés ayant la capacité de produire et de gérer une entreprise ne

poursuivent pas en agriculture car la qualité de vie n’y est pas. Mon mari et moi gagnons

de très bons salaires et avons le temps de prendre soin de notre famille depuis que nous

avons cessé d’opérer la ferme. Si les mécanismes de soutien au revenu des agriculteurs

Page 21: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

auraient été accessibles, nous aurions probablement poursuivi notre production Les

productions spécialisées, biologiques ou du terroir devraient bénéficier d’une grille de

calcul à leur échelle. Les productions innovatrices ne sont pas soutenues et les producteurs

qui continuent de produire des cultures non rentables sont soutenus ( grandes cultures ). Ce

que nous suggérons est un juste milieu. Si une partie des sommes n’est pas investie dans

des productions d’avenir où la rentabilité est potentiellement meilleure, c’est l’ensemble de

l’agriculture qui court à sa perte. Mais nous n’avons pas le poids des syndicats des

producteurs de lait ou d’œufs, que pouvons nous-faire pour avoir notre part du gâteau ?

Deuxièmement, le financement des entreprises agricoles est difficile et dans plusieurs cas

pratiquement impossible. Si les banques ne partagent pas les risques et que La Financière

agricole se blinde de garanties à chaque fois qu’elle autorise un prêt, c’est le jeune en

situation précaire du démarrage d’une nouvelle entreprise qui les assume seul. La

Financière agricole devrait être le premier partenaire des entreprises agricoles et savoir

estimer et à la limite accepter de partager les risques pour favoriser la venue d’une

nouvelle relève. Mais nous avons dû nous battre pour obtenir du financement et utiliser

toutes les ressources à notre disposition. La banque qui finance l’achat de notre nouvelle

maison en banlieue nous a offert de payer notre hypothèque sur 40 ans …Nos hypothèques

pour l’entreprise agricole étaient sur 15 ans et ce n’était supposément pas négociable. Et

oui, les marchés financiers s’adaptent à la nouvelle réalité et à la mondialisation. Et le

financement en agriculture lui ?

Troisièmement, la prime à l’établissement ne peut constituer en elle-même toute l’aide

fournie au démarrage. Le montant n’est pas perdu, la valeur de l’entreprise augmente et

assure un développement économique supérieur. L’agriculture est un secteur primaire et

les investissements requis dans ce domaine sont énormes pour obtenir un retour sur

l’investissement. Donc plus d’argent et de support financier dans les premières années de

la production seraient nécessaires. Plafonner les prêts à 5%, ce n’est plus à jour dans la

nouvelle économie. Il faut revoir les mesures en place pour les gens de la relève et bonifier

les programmes, offrir des congés d’intérêt et du capital patient, étaler les paiements sur

Page 22: MÉMOIRE - caaaq.gouv.qc.ca · L'incubateur compte 10 entreprises en démarrage présentement, qui sont en moyenne à leur 2 1/2 année de production. Sept d'entre eux possèdent

une plus longue période, subventionner partiellement l’amélioration des infrastructures,

etc…

Dernièrement, la production de légumes spécialisés biologiques suscite souvent des

réactions. Nos clients trouvent ça rafraîchissant tandis que certains de nos amis

agriculteurs trouvent que c’est de la folie. Et ce l’est. Nous nous sommes fait dire que nous

courions à notre perte. Faire de l’agriculture est assez dur, faire de la recherche et du

développement des nouveaux produits, c’est de la pure folie. Voici l’aide que nous aurions

aimé obtenir :

Un programme d’aide et de soutien financier aux entreprises qui font de la recherche et du

développement en agriculture géré par le même organisme qui administre l’ensemble des

mesures de soutien à l’agriculture. C’est une façon d’assurer le développement de

l’agriculture par les agriculteurs. C’est responsabiliser et récompenser les producteurs pour

le développement de nouvelles techniques au lieu de remettre l’ensemble de l’argent à des

intervenants extérieurs. Encore là, une part du gâteau.

Pourquoi faire compliquer quand on peut faire simple ? Parce que nous n’étions pas en

mesure d’acheter une entreprise plus conventionnelle avec quota par exemple. Nous ne

sommes pas des maniaques de la complexité, nous aurions été heureux d’acquérir une

entreprise déjà existante. Mais les mesures financières en place pour démarrer de nouvelles

entreprises sont insuffisantes. Il faut garder les entreprises en place et assurer une relève à

celles qui n’en ont pas car commencer à zéro, c’est extrêmement difficile.