89
COGNET GILLES Septembre 2004 IUP Métiers des Arts et de la Culture Culture et Technologies Numériques Mémoire professionnel de Maîtrise Sous la direction de Virginie SPIES Le DVD vidéo : Enjeux cinématographiques du numérique - Université d’Avignon et des Pays du Vaucluse -

Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

  • Upload
    others

  • View
    1

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 1 -

COGNET GILLES Septembre 2004

IUP Métiers des Arts et de la Culture Culture et Technologies Numériques

Mémoire professionnel de Maîtrise Sous la direction de Virginie SPIES

Le DVD vidéo : Enjeux cinématographiques du numérique

- Université d’Avignon et des Pays du Vaucluse -

Page 2: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 2 -

Page 3: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 3 -

Remerciements En premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université

d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire.

Je remercie plus généralement l’ensemble du corps professoral et pédagogique de

l’Université d’Avignon pour m’avoir apporté un enseignement de qualité qui a

contribué à la rédaction de ce mémoire.

Guillaume COLAS, Directeur Artistique chez DVD MAKER, pour son accueil, sa

sympathie et ses conseils.

Je remercie plus généralement toute l’équipe de DVD MAKER de m’avoir accepté et

intégré au sein de l’équipe, ainsi que d’avoir participé à la construction de ce

mémoire aux travers des différents témoignages.

Enki BILAL, pour sa sympathie et le temps qu’il a bien voulu nous consacrer.

Le groupe de réflexion L’EXCEPTION d’avoir eu l’initiative de débattre

intelligemment du devenir cinématographique.

Ma famille et mes amis de m’avoir supporté lors de la rédaction de ce mémoire.

Page 4: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 4 -

Liste des abréviations utilisées Cf : conférer

Etc. : Et caetera

Id : Idem

Ndlr : Note de la rédaction

Page 5: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 5 -

Table des Matières

Avant-propos………………………………………………………………………..8

Introduction………………………………………………………………………...10

I- Le DVD-vidéo

I-1 Une évolution technique……………………………………………………17

1- Un support informatique………………………………………………..17

2- Les titres et les objets vidéo…………………………………………...19

3- L’interactivité…………………………………………………………….20

4- Les menus……………………………………………………………….20

5- L’audio……………………………………………………………………21

I-2 Les contenus……...………………………………………..………….……24

1- Le film…………………………………………………………………….24

2- Les bonus………………………………………………………………..25

3- Les menus……………………………………………………………….30

4- Le packaging…………………………………………………………….31

I-3 Le marché du DVD…………………………………………………………33

1- L’édition DVD……………………………………………………………34

2- Les succès……………………………………………………………….37

3- Les tendances…………………………………………………………..38

Page 6: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 6 -

II- Le DVD vidéo, cheval de Troie du cinéma numérique ?

II-1 Le cinéma numérique………………………………………………………42

1- Le courant Lumière……………………………………………………..43

2- Le courant Méliès……………………………………………………….45

II-2 La réalisation numérique…………………………………………………..47

1- Une nouvelle forme hybride ?..........................................................48

2- Les influences de la réalisation numérique…………………………..52

II-3 Le DVD, démocrate de l’imagerie numérique……………………………57

1- Une histoire de pixels…………………………………………………..57

2- L’infographie et l’animation…………………………………………….59

3- L’immatérialité du numérique………………………………………….61

III- Le DVD vidéo, vers de nouvelles approches cinématographiques ?

III-1 Le spectacle hors de la salle………………………………………………63

III-2 L’interactivité et la délinéarisation…………………………………………66

III-3 Du film au concept………………………………………………………….70

IV- Le DVD vidéo, un outil pour l’intelligence ?

IV-1 Le DVD, outil pédagogique……………...………………………………...75

IV-2 Les nouveaux chemins de l’intelligence ?.............................................78

Page 7: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 7 -

Conclusion…………………………………………………………………………………80

Repères bibliographiques………………………...……………………………….…….82

Glossaire……………………………………………………………………………………87

Table des Annexes……………………………………………………………………..…89

Page 8: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 8 -

Avant-propos

Ce mémoire professionnel porte son étude sur l’expérience

cinématographique à l’épreuve du DVD vidéo, et plus généralement des

technologies numériques. Les enjeux sont donc socioculturels et non économiques.

L’argumentation s’appuiera essentiellement sur des idées et théories partagées par

des chercheurs, des philosophes et des cinéastes, des statistiques d’organismes

reconnus (Gfk, études CNC), mais surtout sur deux stages effectués dans le cadre

de l’IUP Métiers des Arts et de la Culture. Le premier s’est déroulé en juillet août

2003 au sein d’une structure Avignonnaise commerciale et culturelle, le

magasin/Label SIXPACK. J’ai personnellement conçu et réalisé un DVD vidéo qui

présente l’univers artistique et évènementiel de la petite structure. Le second stage,

beaucoup plus important, s’est déroulé de mars à juillet 2004 au sein de la société

BROADSTREAM, fusion des sociétés PIONEER Studio DVD et DVD MAKER. Située

à Boulogne-Billancourt, pôle français des technologies audiovisuelles, cette société

fait partie du groupe SISA1, qui comprend plusieurs entreprises du domaine de

l’audiovisuel. (Laboratoire vidéo, Maintenance technique, Montage et postproduction)

Si l’entité BROADSTREAM se construit, la renommée de DVD MAKER place ce

studio parmi les cinq meilleurs studios d’authoring en France. C’est grâce notamment

à la réalisation de succès comme Le fabuleux destin d’Amélie Poulain (Jeunet,

[2001]), La sirène Rouge (Megaton, [2002]) ou bien encore Immortel (Bilal, [2004])

que le studio a pu acquérir une notoriété professionnelle.

J’y ai effectué un apprentissage technique et artistique au coté des

professionnels les plus compétents de ce domaine. En parallèle à la réalisations de

divers projets que l’on m’a confié durant ces cinq mois, j’ai pu développer une

réflexion sur les enjeux socioculturels et cinématographiques que génère le DVD

vidéo, en collaboration avec Guillaume Colas, le Directeur Artistique de la société.

« Une réelle passion pour ce support novateur motive et nourri l’équipe » me confiait

1 www.sisa.fr Cf. annexes DVD MAKER

Page 9: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 9 -

alors le jeune Directeur Artistique, « et même si le marché de l’édition nous impose

son dictat, on essaie de garder une approche conceptuelle de ce support. »1

Ce mémoire est le fruit d’un intérêt et d’une réflexion personnels fondés sur

plusieurs situations professionnelles et sur la lecture de notions théoriques. En tant

que mémoire professionnel, son argumentation représente, au-delà d’une réflexion

personnelle, la réflexion développée par les professionnels de la création DVD sur

l’essence même de ce support, son utilisation, et ses devenirs.

1 Interview réalisée en juillet 2004 dans le cadre de ce mémoire.

Page 10: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 10 -

Introduction

Le passage au troisième millénaire nous a définitivement propulsé au sein de

l’ère de l’information. Le développement des micro-ordinateurs et des réseaux

d’informations a révolutionné le monde du travail et des pratiques socio culturelles.

Le codage de l’information sous forme numérique a permis aux différentes

technologies électroniques de se comprendre, et de se compléter. L’information

numérique devient fluide et continue. Ainsi Paul Valéry expliquait en 1928 que

comme l’eau, le gaz et l’électricité qui arrivent dans nos demeures et nous distribuent

de l’énergie, un jour nous serions alimentés en images auditives et visuelles qui

obéiront comme à un geste, à notre appel. (Valery, [1928]) A travers la radio, il avait

deviné la télévision, mais au-delà les flux d’information numérique que nous

connaissons aujourd’hui : ordinateur, Internet, télévision, Home cinéma et DVD…

Une révolution des contenus audiovisuelle s’est effectuée, et continuera de

s’effectuer à travers ce développement technologique numérique.

Comme beaucoup d’arts qui ont évolué en fonction des techniques

disponibles, le cinéma a subi consciemment cette révolution numérique. L’histoire du

cinéma est une histoire d’expériences technologiques, de relations

spectateur/spectacle et de systèmes de production, de distribution et de

présentation, indissociables des conditions économiques, politiques et idéologiques.

Entrée par la petite lucarne des effets spéciaux dans les années 1970 grâce au

développement de la puissance de calcul des ordinateurs, la technologie numérique

a depuis cette époque élargit son champ d’action à tous les domaines de

l’audiovisuel. Ainsi, la télévision et la publicité ont été un formidable laboratoire de

développement des techniques vidéo, qui parfois ont par leur esthétique et leur

usage particulier, créé leur propre genre. De son coté le son a avancé en pionnier du

numérique, en posant les bases de la construction bar boucles et du montage non

linéaire. Finalement, c’est la généralisation des plateformes informatiques de

postproduction qui a éradiqué tout doute ; la numérisation de la chaîne de production

cinématographique est largement entamée et prometteuse, donc probablement sans

retour. Si les technologies numériques sont apparues au cinéma pour palier à des

contraintes techniques, elles se développent dorénavant pour apporter une « plus-

Page 11: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 11 -

value numérique ». Le cinéma est donc changeant, car réalisé par des outils

mutants, qui visent à enrichir le cinéma et l’audiovisuel de nouvelles approches et de

nouvelles esthétiques.

L’apport des nouvelles technologies au cinéma est un sujet de constante

actualité, et sous l’approche première des technologies mises en œuvre, il aborde

des questions ancestrales : l’art et la technique, l’art et la représentation du réel, le

fonctionnement de la trinité auteur / œuvre / spectateur. L’étude sera centrée ici sur

le support final du produit cinématographique ; le DVD vidéo. Le Digital Versatil Disc

parait être un choix judicieux d’étude, car tout d’abord son statut n’est plus

discutable ; il est devenu en quelques années LE support grand public du cinéma.

Maillon essentiel de fin de chaîne cinéma, le DVD vidéo est avant tout un succès

commercial, une proposition technologique et culturelle qui a su séduire un public qui

s’ennuyait d’un système VHS en bout de course. Il s’agit ici du constat primaire, le

germe de cette étude ; l’objet DVD vidéo. Il conviendra donc d’analyser cette

technologie, cette proposition culturelle, ce succès commercial.

Mais au-delà de ce premier constat, d’autres questions sont soulevées par les

spécificités mêmes de ce support, qui se différencie de son prédécesseur, le VHS. Il

apparaît que le DVD ne se contente pas de reporter le cinéma sur support

numérique, mais bien au-delà il place cet art centenaire au sein d’un dispositif

hypermédia. Le DVD est peut-être une étape intermédiaire entre les pratiques

cinématographiques du siècle dernier et les pratiques cinématographiques et

hypermédia qui se développeront. Voilà pourquoi, après avoir défini sa nature et son

contexte, il parait essentiel de comprendre le rôle que joue cet objet hybride. Quel

est le rôle du DVD au sein de l’évolution cinématographique ? Si celle-ci passe par le

numérique, quelle proposition pour un cinéma numérique ?

Pour répondre à ces questions, il convient de recontextualiser l’impact des

technologies numériques au cinéma : Ce passage au numérique s’effectue dans la

forme et dans le fond, sur le contenu mais aussi sur le contenant. De nouveaux outils

pour créer de nouvelles esthétiques et de nouveaux modes de consommation

audiovisuelle. Le cinéma numérique, c’est d’abord le passage de toute la chaîne

cinématographique au numérique : production, postproduction, diffusion et

Page 12: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 12 -

exploitation. Le DVD, en tant que support de diffusion vidéo grand public, se situe en

bout de chaîne de cette aventure. Néanmoins, il possède une longueur d’avance

indéniable sur la projection numérique (en salle), l’alternative d’exploitation. Mais le

cinéma numérique, c’est aussi la réalisation numérique, soit la réalisation par

l’ordinateur. A ce niveau là, il devient difficile de répertorier les technologies de

réalisation expérimentées ou acclamées, mais nul doute que nous assistons depuis

une vingtaine d’années à une naissance de la réalisation assistée par ordinateur :

jeux vidéo, animations 2D et 3D et cinéma traditionnel sont concernés.

Le DVD vidéo est sans contexte un acteur essentiel de ce passage du cinéma

au « tout numérique ». Grâce à son succès auprès du public, le DVD devient le fer

de lance officiel de la numérisation du cinéma, devançant la projection numérique

encore balbutiante. Ce positionnement nous amène à nous poser la question

suivante : le DVD ne serait-il pas le cheval de Troie du cinéma numérique ? Si le

DVD représente le nouveau marché de la vidéo, il développe et diffuse les

caractéristiques esthétiques et ergonomiques propres à la réalisation numérique.

Voilà pourquoi je me permettrais de parler alors du DVD vidéo en tant que

« démocrate de l’image numérique ».

Après cette approche esthétique, il conviendra d’analyser les nouvelles

expériences cinématographiques résultantes des pratiques liées à ce support. Grâce

à son offre qui se différencie de la salle de cinéma, le DVD emmène le spectateur

sur de nouveaux territoires : la personnalisation de l’expérience cinématographique,

l’exploration interactive et la délinéarisation du récit, la conceptualisation de l’œuvre.

Ces analyses nous démontreront que l’expérience cinématographique se complexifie

avec l’arrivée de ces nouveaux médias électroniques. Néanmoins, c’est en

comprenant ces nouvelles pratiques que nous accepterons des éventuelles

transformations au sein du cinéma.

Comme toute technologie qui nécessite un apprentissage, il existe une

vocation pédagogique au DVD vidéo. Cette vocation est même double : proposer un

outil ergonomique pour apprendre les images, leur manipulation et le pouvoir du

spectateur, et de manière plus générale, le DVD vidéo appartient à l’univers

numérique, univers qui se construit par les outils électroniques et leurs usages. En

Page 13: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 13 -

se gardant de prophétiser une nouvelle ère technologique, il reste sensé d’observer

les grands changements induits par la technoculture numérique : création d’univers

virtuels persistants pour le travail et les loisirs, développement de nouveaux schémas

cognitifs pour la pensée humaine. Les outils numériques sont donc les forges de

nouvelles pratiques qui vont probablement modifier en profondeur la

conceptualisation de notre rapport à la représentation, à la réalité. C’est en tant

qu’outil technologique et en tant que support du 7ème art (de la représentation) que le

DVD semble jouer son humble rôle pédagogique au sein de cette évolution.

« Ce rapport du cinéma aux nouvelles technologies l’affecte dans ses modes

d’existence classique, dans le domaine de la production comme de la diffusion,

notamment la projection en salle, mais le cinéma est aussi travaillé par ces nouvelles

technologies du fait des nouveaux supports. Il apparaît qu’aujourd’hui, l’angle

d’attaque peut-être le plus pertinent pour réfléchir à l’état contemporain du cinéma

est le DVD. […] Au cours de nombreux débats s’est imposé le constat que le DVD

permettait d’aborder aussi bien la création, la production, la diffusion des œuvres, le

rapport du public au film, la conservation, la politique patrimoniale, l’enseignement du

cinéma, et qu’énormément de questions qu’on se pose, dont les questions

esthétiques, théoriques, des questions d’action publique, se rétractaient dans ce

support, cet objet technique qu’est le DVD. » (Frodon, [2002], p96) 1

1 le banquet imaginaire, p96, Gallimard, 2002

Page 14: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 14 -

I. Le DVD-vidéo

Dès 1994, sous l'impulsion de Warner Bros, un comité est mis en place pour

étudier le cahier des charges d'un nouveau type de CD, capable notamment de

répondre aux exigences de qualité de l'industrie du film.

Les objectifs fixés par ce comité sont :

• Vidéo de haute résolution (conforme au standard broadcast CCIR-601).

• 133 minutes de film sur une même face d'un disque haute densité.

• Audio stéréo de haute qualité, six canaux minimum pour le son.

• Choix de 3 à 5 langues.

• Protection contre la copie.

• Possibilité de verrouillage parental pour les titres pour adultes.

• Plusieurs rapports d'aspect pour l'image (écran large 16/9, 4/3 avec possibilité

de pan-scan ou "letter box").

Le 15 septembre 1995 est une date essentielle pour l'évolution du stockage

optique. En effet, sous la pression conjuguée des industries de la vidéo et de

l'informatique, les deux groupes concurrents de multinationales Sony/Philips et

Toshiba/Time Warner sont tombés d'accord pour promouvoir un nouveau standard

mondial de stockage optique pour la vidéo. L’historique du DVD, acronyme de Digital

Versatile Disc, remonte donc déjà à une dizaine d’années maintenant. Semblable par

sa taille et son procédé technique (laser optique) à son aîné le CD, on pouvait ne lui

prédire qu’un avenir prometteur. Pour rappel, depuis 1982, date de mise sur le

marché du Compact Disc, il s’est vendu plus de 12 milliards de disques compacts

audio pour plus de 900 millions de lecteurs.

Effectivement, à ce jour le marché du DVD n’est pas en expansion, mais en

explosion. Devenu un véritable bien de consommation à partir de 1998, les objets qui

Page 15: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 15 -

ont trait au DVD, à savoir les lecteurs et les supports, se sont démocratisés à une

vitesse impressionnante, beaucoup plus rapidement que ne l’avait fait le cd en son

temps. De tarifs prohibitifs en vigueur lors du lancement, les prix des lecteurs ont

diminué très rapidement jusqu’à atteindre des tarifs à peine supérieurs à ceux des

magnétoscopes. Si le milieu professionnel bénéficiait déjà de formats vidéo

numériques (Digital betacam…), le grand public découvre lui la qualité numérique

avec ce nouveau support. Cet engouement pour le DVD doit s’expliquer, ou tout au

moins se comprendre : ce processus d’équipement technologique s’inscrit dans une

numérisation de toute la chaîne de vie des informations numériques. Il est donc

normal que le consommateur puisse bénéficier du label « qualité numérique », avec

une technologie appropriable aisément.

En 1997, les Editions Montparnasse sortaient en DVD Microcosmos et Les

Enfants de Lumière, les deux premiers films édités en Europe dans la technologie

numérique Digital Versatile Disc. Depuis, 6 000 titres ont été mis sur le marché en

France. Cinq ans après, le nombre de lecteurs de DVD est 2,5 fois supérieur à ce

qu’il était pour les lecteurs de CD au bout de la même période. Fin 2002, près de 25

% des foyers étaient équipés, séduits par les qualités extraordinaires d’image et de

son du nouveau support (le taux d’équipement suit avec un an de retard la tendance

américaine). Entre le DVD et la VHS, 2002 est l’année de l’inversion en France : 40

millions d’exemplaires vendus pour les premiers, contre 28 millions pour les seconds.

(Source : étude «Pratique et économie du DVD », L’Exception, 2002)

Equipement en lecteurs DVD en Europe

0,017 0,17

1,037

4

00,5

11,5

22,5

33,5

44,5

1997 1998 1999 2000

en m

illio

ns

nombre de lecteurs

Page 16: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 16 -

Selon Yves Caillaud, PDG de Warner Home Video et président du Syndicat de

l’Edition Vidéo (SEV), le succès du DVD résulte essentiellement d’une politique

commerciale élaborée conjointement par les concepteurs de hardware et de

software, de l’adoption d’une norme technique unique, d’une offre de titres

immédiatement diversifiée, d’une politique de prix agressive1. D’abord réservé à une

poignée de technophiles équipés en home-cinéma, le DVD est déjà un produit

populaire. Les premiers prix des lecteurs avoisinent aujourd’hui 100 euros. Pour les

disques, la fourchette est comprise entre 20 et 30 euros.

Pourquoi cet objet technologique a-t-il pu s’imposer si rapidement ? Son offre

correspondait-elle aux attentes des consommateurs, ou bien s’est-il créé un besoin

chez celui ci ? Il convient d’analyser les spécificités du DVD-vidéo et ses contenus,

afin de mieux comprendre son identité.

1 Article paru dans Le Monde du 23 novembre 2002.

Page 17: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 17 -

I - 1 Une évolution technique En 1995, un accord est accepté par les dix membres du DVD consortium. Le Digital

Versatile Disc est né. Afin de comprendre la logique mise en œuvre par cette

technologie, il est nécessaire, à défaut d’une étude technique, d’en définir les

principes de fonctionnement.

I-1.1 Un support informatique Il existe en plusieurs variantes suivant le nombre de couches et le nombre de

faces utilisées. On peut mettre l'équivalent de 7 à 26 CD sur un DVD, suivant la

capacité choisie.

Les pistes contenant l'information inscrite sous forme de micro-cuvettes (pits) et de

méplats (lands) sont plus serrées sur le DVD (0,74 micron contre 1,6 micron),

chaque élément d'information étant lui-même de plus petite taille (0,4 micron

minimum au lieu de 0,83 micron minimum sur un CD)

Principe de lecture du CD et du DVD

Un DVD de 12 cm pressé en usine autorise une capacité variable de 4,7 Giga octets,

8,5, 9,4 ou 17 Giga octets en fonction du choix du concepteur du programme. Il peut

choisir d'utiliser une seule couche sur une seule face, deux couches sur une seule

face, une couche sur les deux faces ou deux couches sur les deux faces.

Page 18: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 18 -

Vue en coupe : DVD double couche

(Source des illustrations : "Le DVD" Georges ZENATTI, Editions Hermès à Paris)

Tous les DVD, quelle que soit leur destination, du DVD-Rom au DVD-Vidéo ou au

DVD-Audio, doivent utiliser un même système d'organisation des données défini par

l'OSTA : l'UDF/ISO-9660 Bridge Format. L'UDF (Universal Disc Format) est une

évolution du format ISO-9660 utilisé par la majorité des CD-ROM. C'est un véritable

standard universel qui offre une compatibilité multi-plateforme informatique et lecteur

de salon.

Le niveau le plus élevé d'organisation d'un DVD est le volume. (Il est

intéressant de noter l’analogie au tomes des livre…) Le volume est constitué

conformément au standard UDF Bridge d'une zone vidéo Video Zone qui contient

tous les éléments destinés aux lecteurs de salon et une zone DVD OtherZones qui

peut être utilisée pour des données ou des applications informatiques destinées aux

micro-ordinateurs équipés de lecteur de DVD-Rom. On peut ainsi concevoir un DVD

comportant un film de formation et une série d'applications informatiques. Le PC

équipé d'un lecteur de DVD-Rom pourra lire non seulement la partie proprement

vidéo, mais aussi la partie comportant des données comme on peut en trouver sur

un CD-ROM. La zone DVD-Vidéo débute par un gestionnaire vidéo où sont

répertoriées toutes les données du disque, et comporte à la suite de 1 à 99 titres de

vidéo. Le gestionnaire vidéo commence par un clip vidéo/audio de présentation, suivi

d'un menu offrant au spectateur la possibilité de choisir entre les différents titres.

Lorsque l'utilisateur appuie sur le bouton Titre de la télécommande du DVD, le film

s'arrête et l'écran affiche à nouveau le menu principal.

Page 19: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 19 -

I-1.2 Les titres et les objets vidéo

La zone du gestionnaire vidéo (Video Manager) est suivie d'ensembles de

titres vidéo (Vidéo Title Sets) qui constituent la partie la plus importante du DVD. Un

DVD peut comporter jusqu'à 99 ensembles de titres différents. Cependant, la plupart

des DVD commercialisés pour l'instant proposent un seul long métrage cinéma :

dans ces DVD la zone VTS se réduit à un seul ensemble de titres comportant un

seul titre. Chaque VTS comporte un ou plusieurs titres vidéo. Au début de chaque

VTS, un menu apparaît, permettant de choisir l'accès à un titre ou à un autre. A son

tour, chaque titre peut être divisé en chapitres, ici appelés Part of title (PTT). Les

données à l'intérieur de chaque titre vidéo (Video Title) sont organisées en

ensembles d'objets vidéo (Video Object Sets) VOBS, eux-mêmes composés d'objets

vidéo (Video Objects) VOB.

L'objet vidéo est la plus petite unité de programme du DVD : il est composé de

vidéo, d'audio, d'images d'incrustation et sous-titres et de données de navigation.

Enfin, chaque objet vidéo peut lui-même être divisé en cellules. La cellule est la plus

petite unité qui peut être adressée lors d'un choix interactif. Une cellule peut avoir la

taille d'un film entier si le film ne comporte aucune interactivité. Une cellule peut être

de la taille d'un groupe d'images MPEG (généralement 12 images en Pal). L'intérêt

de cette arborescence en ensemble de titres, titres, ensemble d'objets vidéo

n'apparaît que lors du développement d'un DVD comportant une très grande

interactivité. Dans le cas d'un film de long métrage cinéma, l'interactivité est

généralement limitée et les possibilités de navigation sont réduites. Le film est

souvent divisé en chapitres. On peut choisir de regarder le film d'une traite ou

accéder directement à un chapitre. Dans ce cas, chaque chapitre correspond à une

cellule. Mais il n'y a qu'un ensemble de titres (VTS) composé d'un seul titre (VT) lui-

même constitué d'un seul ensemble d'objets vidéo (VOBS) contenant un seul objet

vidéo (VOB) : l'objet vidéo est enfin divisé en autant de cellules qu'il y a de chapitres.

Page 20: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 20 -

I-1.3 L’interactivité

Les possibilités d'interactivité du DVD sont relativement étendues pour un

programme vidéo et développent ce qui avait été entamé avec le CD-I de Philips ou

le Vidéo CD (qui connurent un échec commercial) mais restent bien restreintes en

comparaison d’applications multimédia non bornées par une norme technique

rigoureuse : jeux vidéo, sites internet, cd-rom. Sa rapidité de réponse permet

néanmoins d'envisager son application à des jeux interactifs simples.

L’interactivité est programmable à travers 128 instructions qui peuvent être

regroupées en 5 catégories : Aller à et Lier à, Calculer, Comparer, Apprécier les

paramètres et Jouer le programme. Des variables peuvent être créées et

reprogrammées, ce qui permet de personnaliser l’interactivité : la combinaison de

ces commandes permet de gérer des instructions assez complexes telles que

conserver le résultat d'un jeu, jouer des séquences de façon aléatoire, s'assurer que

dans le cas d'un film interactif certaines séquences-clés sont bien jouées. Ce qu’il

faut souligner, c’est la possibilité de mémoriser la navigation effectuée par le

spectateur navigateur, pour que le programme puisse interagir avec.

I-1.4 Les menus

La plupart des DVD commercialisés comportent des menus qui permettent à

l'utilisateur d'effectuer ses choix de navigation ou de configuration. Les menus sont

constitués de trois éléments :

- une image de fond (cela peut aussi bien être une séquence vidéo qu'une image

fixe),

- une image d'incrustation, qui permet de mettre en évidence les choix.

- une ou plusieurs zones sensibles comportant un ou plusieurs boutons affectés

d'une surbrillance lorsque le pointeur de la télécommande entre dans sa zone.

Les spécifications du DVD déterminent un certain nombre de menus que l'utilisateur

doit pouvoir activer à partir de sa télécommande. Ces menus systèmes sont au

nombre de cinq.

Page 21: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 21 -

- Menu Titre, incorporé au gestionnaire vidéo il permet l'accès direct aux titres du

DVD. Il doit pouvoir être affiché par pression du bouton "Titre" de la télécommande.

- Menu Principal, incorporé à chaque ensemble de titres vidéo (VTS). Il s'affiche sur

pression du bouton "Menu" de la télécommande.

- Menu Audio, incorporé à chaque ensemble VTS. Il s'affiche sur pression du bouton

"Audio" de la télécommande.

- Menu Angle vidéo, incorporé à chaque ensemble VTS. Il s'affiche sur pression du

bouton "Angle" de la télécommande.

- Menu Incrustations, incorporé à chaque ensemble VTS. Il s'affiche sur pression du

bouton "Incrustations" de la télécommande.

Lorsque l'utilisateur active l'un des menus système, le lecteur de DVD mémorise à

quelle position du flux vidéo il se trouve et peut le reprendre lorsque l'utilisateur a fini

sa consultation ou sa configuration. Il faut donc souligner ici la possibilité de maîtrise

à tout moment sur l’arborescence hiérarchique des différents éléments d’un DVD.

I-1.5 L’audio Comme nous l’avons vu, il est possible d’assigner plusieurs pistes audio à un

objet vidéo (VOB). Le standard supporte quatre formats audio numériques à 48KHz,

soit une qualité meilleure que le CD :

- Le Dolby Digital (aussi appelé AC3). Ce format est multicanaux, ce

qui signifie que là où la stéréo proposait 2 voies, le dolby digital peut

en proposer jusqu’à 6 : gauche, droite, central, arrière gauche, arrière

droit et basses. La taille de la piste augmente en fonction du nombre

de canaux.

- Le DTS est l’alternative, aussi multicanaux, mais proposant une

compression plus réduite, en dépit d’une taille plus volumineuse. Un

luxe pour les installations appropriées.

- Le PCM propose un signal non compressé, stéréo.

- Le Mpeg audio ne propose aucun réel avantage, il est généralement

proscrit, car pas toujours compatible.

Les données audio (pistes) subissent donc un encodage différent selon leur

destination et leur usage. Il faut néanmoins souligner que l’écoute de pistes

Page 22: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 22 -

multicanaux ne peut s’effectuer qu’avec la configuration matérielle appropriée :

amplificateur décodeur, enceintes.

Il était nécessaire d’expliquer le principe de fonctionnement du DVD, afin de mieux

cerner la logique mise en œuvre, voilà qui est fait. Il est inutile d’aller plus loin dans

les autres spécificités purement techniques du DVD-vidéo (compression, normes

audio, signal…) car ce mémoire ne se veut pas une étude technique, mais une

réflexion sur un enjeu technico-culturel.

Pour résumer, le DVD offre une technologie d’accès séquentiel à un stockage de

données informatiques. Ces données sont interprétées soit par les puces

électroniques contenues dans les lecteurs DVD de salon (platine DVD-vidéo) ou bien

par les logiciels d’ordinateur (DVD-rom). Il convient quand même de souligner qu’à la

différence d’anciens supports, comme le VHS, qui ne contenait que des données

(analogiques) relatives au signal vidéo, le DVD contient des données informatiques

annexes au signal vidéo numérique, les méta données, qui permettent de structurer

hiérarchiquement et interactivement les informations contenues. Le DVD est donc un

produit informatique avant tout, il est intéressant de le rappeler.

Page 23: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 23 -

Voici un résumé des avantages techniques du DVD-vidéo :

• Vidéo numérique au format PAL (16/9 ou 4/3)avec une compression MPEG 2

pouvant délivrer au maximum 9 Mb/s, soit une excellente qualité visuelle ;

Arrêt sur image parfait, ralenti, avance rapide.

• 8 angles différents pour une vidéo.

• 8 pistes son numérique pouvant contenir chacune jusqu'à 8 canaux, adoptant

la technologie Dolby Digital, DTS, ou bien PCM.

• 32 pistes de sous-titres différents.

• Séquençage des éléments, chapitrage, bouclage des menus.

• Interactivité via télécommande infrarouge permettant de programmer la

navigation sur le support.

• Protection anti-piratage du support

• Immortalité (théorique) du support.

Le consommateur doit renouveler son équipement vidéo, voire audio, pour pouvoir

bénéficier de ce nouveau format vidéo, ce qui signifie la mort annoncée de l’ancien

système VHS, jusqu’alors dominant le marché vidéo. En effet, si jusqu’à aujourd’hui

les magnétoscopes VHS restaient utiles grâce à l’incapacité des lecteurs DVD

d’enregistrer, la dernière génération de lecteurs-enregistreurs DVD va définitivement

rendre le VHS désuet.

Page 24: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 24 -

I - 2 Les contenus

Le DVD axe sa campagne marketing sur les concepts de qualité, d’immortalité et

d’interactivité. Dès ses débuts, une norme s’est rapidement définie pour la

structuration de ses contenus ; menus, film et bonus. En effet, puisque le système

prévoyait des menus de navigations, ils furent de suite adoptés, pour illustrer le

caractère interactif de l’objet. De même, comme le support offrait une taille de

stockage bien supérieur au seul contenu du film, il fut rapidement adopté d’ajouter

des bonus, mot qui désigne des productions de toutes natures, complémentaires à

l’œuvre cinématographique. Il faut reconnaître que si les spectateurs ont découvert

le « genre bonus » avec le DVD, c’est le Laserdisc, son aîné, qui avait lancé

l’originalité. Cette partie sur les contenus se veut de lister les principaux contenus

que le support puisse présenter.

I-2.1 Le film (l’œuvre principale) 85 % des titres édités en DVD sont des films du cinéma1. Pour leur transfert

sur DVD, les œuvres cinématographiques subissent un report vidéo (télécinéma)

avec un étalonnage. En effet, la luminance, les couleurs et les contrastes du film

argentique ne réagissent pas identiquement en vidéo. Afin de respecter l’œuvre

originale, un étalonnage s’impose alors. Le master vidéo ainsi obtenu (format

BetaNum) est ensuite encodé au format DVD (Mpeg2), avec une compression

variable selon le cahier des charges. En effet, il est nécessaire d’optimiser la

compression de chaque élément présent sur le DVD (bit budget) afin de pouvoir

accorder plus de qualité (de données) à certains éléments. Le meilleur bit budget est

accordé généralement au film, élément qui justifie le produit DVD. L’œuvre

cinématographique est donc reportée dans sa totalité, avec une approche nouvelle

par rapport à la VHS : le chapitrage. Celui-ci est généralement effectué selon la

1 Pratiques et économie du DVD, annexe du banquet imaginaire. www.lexception.org

Page 25: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 25 -

logique du récit, mais il est coutume pour un long métrage de proposer de 10 à 30

chapitres, de durées assez homogènes. L’œuvre audiovisuelle est dorénavant

accessible par chapitres, et manipulable à souhait : avance rapide (sans mutilation

visuelle contrairement au VHS), ralenti propre et arrêt sur image parfait, avec

l’option, sur certains lecteurs, de zoomer dans l’image. Il existe une série de DVD

Superbit qui proposent seulement le film sur le support, afin d’utiliser tout l’espace

disponible pour offrir la meilleure qualité visuelle possible.

De plus, le film est bien souvent accompagné de plusieurs doublages, soit

plusieurs langues. C’est là une des grandes nouveautés de ce support : la

satisfaction de tous les publics avec une seule édition. On retrouve donc la version

originale, puis le doublage français (oui, admettons que l’on se trouve en France…).

Ce schéma est à première vue le plus répandu, mais il est fréquent pour les grosses

productions de trouver jusqu’à cinq langues différentes. Il est à noter que pour les

concerts, il est fréquent de trouver un mode de vision du concert en multi-angles. Les

trois caméras, ou trois vidéos, sont alors synchronisées avec la piste audio, et le

spectateur peut zapper de caméra, et explorer la retransmission du concert à sa

guise. Le DVD de Metallica Cunning Stunts, par exemple, exploite pleinement le

multi-angles pour traduire l’intensité scénique du show des rockeurs. On peut noter

pour conclure sur le multi-angles, que l’usage de ce procédé permet de doubler

visuellement les passages du film qui contiennent des indications écrites. Le DVD de

Star Wars I (Lucas, [1999]) y a recours : pour les tirades écrites, notamment la

désormais mythique introduction, un angle est ajusté en fonction de la langue

sélectionnée. Ce procédé est totalement invisible pour le spectateur…

I-2.2 Les bonus

Sous la dénomination « Bonus », on retrouve toutes sortes de matériel

audiovisuel se rapportant à l’œuvre principale, un film en général. Ce terme, issu du

lexique publicitaire, reste cependant relativement obscur. Quels sont les contenus

regroupés sous ce nom ? Une standardisation des bonus est-elle notable ? La liste

suivante n’est pas exhaustive, mais représentative des principales formes de bonus.

Page 26: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 26 -

- Le making-of Le making-of peut apparaître sous des formes esthétiques et

pédagogiques plus ou moins prononcées, mais il reste une réalisation à

vocation documentaire. Il se différencie du documentaire pur par son

sujet : la réalisation du film, ses coulisses. On peut séparer

vraisemblablement les making-of en deux catégories : le reportage et

l’étude de cas.

Le reportage revêt des intentions esthétiques, son but est de montrer

l’envers du décor, et sa pédagogie se limite alors à l’illustration des

happenings du tournage, et à la participation succincte des

professionnels concernés.

L’étude de cas présente souvent une explication, souvent technique, de

réalisation, création, ou interprétation. Les archives annexes à la

réalisation du film sont exposées, il s’agit d’expliciter le travail réalisé

par les professionnels qui ont pris part au projet. Ces bonus

revendiquent une dimension professionnelle et éducative.

- Le documentaire Il est présent à caractère informatif, voire éducatif. Il traite souvent d’un

sujet abordé par le film : culture, histoire, sciences… Mêmes si certains

documentaires relèvent de la fiction, la plupart des documentaires

proposés sont d’une réelle qualité informative. Pour des raisons

promotionnelles évidentes, beaucoup de documentaires se situent à mi

chemin entre le making-of et la revue de presse.

- Les bandes d’annonce Il s’agit du bonus le plus récurrent sur les DVD-vidéo. En effet, leurs

durées très courtes justifient le faible besoin en place sur le disque,

donc elles offrent un bonus vite intégré. Car il ne faut pas oublier que,

pour la très grande majorité des bandes d’annonces, il s’agit d’un report

vidéo des bandes annonces diffusées au cinéma. Cependant, la

promotion de films étant aussi télévisée, (aux états unis par exemple) le

spectateur peut jouir chez lui grâce au DVD de ces bandes annonces

alors devenues « exclusives ». Au-delà de la dimension fétichiste de

Page 27: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 27 -

l’aspect collector que les bandes d’annonces peuvent présenter, il est

courant de les intégrer pour illustrer des filmographies ou plus

commercialement des collections d’éditeurs.

- Les commentaires Présents sur la majorité des DVD, les commentaires correspondent à

des pistes audio ou sous-titres disponibles lors de la lecture du film ou

de bonus. Il s’agit, à la différence des langues, d’apporter un

complément à la compréhension du film. Ces commentaires sont alors

parlés, accompagnant la lecture chronologique du film. Les intervenant

dans ce domaine sont tous inhérents au film mais hétérogènes ;

réalisateur, producteur, acteurs, mais aussi responsables techniques,

qui viennent expliquer les trucages avec une approche très

professionnelle, comme par exemple John Gaeta, responsable effets

spéciaux1, qui sur les DVD Matrix prend en charge toute la partie

technologique du film avec son commentaire, afin de libérer les

réalisateurs, qui peuvent alors se concentrer sur le récit du tournage. La

piste sonore est privilégiée, mais le fait qu’elle soit doublée en sous-

titres permet au spectateur une grande liberté dans sa configuration de

lecture : Version originale du film et commentaires en sous-titres

français, Commentaires audio du réalisateur avec sous-titres des

dialogues en allemand, les combinaisons sont nombreuses. Quelques

DVD, les plus travaillés, présentent souvent une approche originale du

mode commentaire. Ainsi, sur Men In Black, l’écoute des commentaires

implique l’activation d’une piste de sous-titres spéciale, qui présente les

silhouettes des intervenants (acteurs et réalisateur) en incrustation en

bas de l’écran2. Le DVD de Matrix (toujours !), utilise lui une piste de

sous-titres pour faire apparaître un motif (petit lapin blanc) lors de la

lecture de certaines scènes, qui signifie au spectateur qu’il peut accéder

à l’explication technique de la scène en cliquant sur la télécommande.

Les commentaires sont donc des guides de lecture et d’analyse de film.

1 John Gaeta est le superviseur des effets spéciaux sur la trilogie Matrix. La créativité visuelle et technique mise en œuvre dans ces films lui a conféré une notoriété internationale. 2 Etude sur le DVD, p.237, annexes du Banquet imaginaire, Gallimard, 2002

Page 28: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 28 -

- les jeux Bien que l’interactivité soit grandement limitée en comparaison avec les

programmes multimédia tournant sur cd-rom, il est fréquent de trouver

de petits jeux, quiz ou autres interactions ludiques. Ce genre de

demande reste relativement fréquent affirme Thomas Guinand,

Responsable Marketing chez DVD Maker, studio de création DVD 1,

comme ça a été le cas sur Amélie Poulain (jeux de marelle), Zentrix

(bandit manchot) ou bien plus récemment sur Lizzie McGuire (quizz sur

la série). Les jeux peuvent se montrer plus ambitieux, comme l’atelier

de montage présenté sur le DVD de Die Hard 1 (Mc Tiernan, [1988]) qui

se veut une initiation à l’activité professionnelle…

- Les Director’s cuts, scènes coupées, versions longues Il s’agit de matériel non utilisé, ou tout du moins pas dans la version

cinéma, qui ressort ici pour des raisons diverses. Il est fréquent de

trouver des scènes inédites intéressantes pour la cohérence du récit,

qui sont alors insérées dans le film, ou bien des versions alternatives de

scènes proposées en consultation annexe. Certaines relèvent donc du

collector, comme la scène de 12mn entre « le bon » et « le truand »

dans Le bon, la brute et le truand (leone, [1966]) ou bien d’une nouvelle

version de l’œuvre ; Coppola a ressorti en 2001 une nouvelle édition de

Apocalypse Now, plus fidèle à son projet initial.

- Biographies, filmographies, collections On distingue deux catégories différentes : les biographies et

filmographies relatives au film, puis les collections, qui listent les titres

sortis par l’éditeur dans la même collection ou la même saison. Si le

premier revêt un intérêt cinématographique, le deuxième se rapproche

beaucoup plus de la promotion.

1 Interview réalisée en juin 2004 par Gilles Cognet dans le cadre de ce mémoire

Page 29: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 29 -

- Les clips Il s’agit majoritairement des clips musicaux, qui relèvent de la bande

originale du film : la présence du clip se justifie alors par son visuel qui

recoupe l’univers du film, ou en utilise des extraits. Le clip de Lenny

Kravitz If I could fall in love s’inscrit dans le scénario de Blue Crush

(Stockwell, [2002]). Ces scènes exclusives immiscent le chanteur dans

l’univers du surf hawaiien et des héroïnes du film.

- Les réalisations annexes, courts métrages… Il est d’usage, pour le premier film d’un réalisateur souvent, de proposer

des courts métrages et autres réalisations antérieures au film. Le lien

n’est alors plus l’œuvre principale, mais le réalisateur et son univers.

Jan Kounen pour la sortie DVD de Dobermann (Kounen, [1997]) a

gonflé l’édition collector de trois courts métrages qu’il avait pu réaliser

auparavant. Loin de la surenchère commerciale, il offre la possibilité à

ces formats spéciaux de trouver un support de qualité, et donc une

diffusion.

- Les galleries photo Les spécificités techniques du DVD permettant de proposer des

Diaporamas, cette offre est récurrente comme bonus. La variété et la

nature des photos est très diversifiée : photo de tournage, de campagne

promotionnelle, affiches, photomontages…. Le spectateur garde

souvent le contrôle sur la navigation du diaporama.

- Les Suppléments DVD-rom La compatibilité DVD-rom des DVD-vidéo permet d’ajouter des fichiers

multimédia lisibles sur un ordinateur. Les principaux suppléments

rencontrés sont des applications multimédia (économiseurs d’écran,

démo de jeux…) et des liens internet, qui renvoient vers d’autres bonus

en ligne.

Page 30: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 30 -

- Les bonus cachés Afin d’inviter le consommateur à explorer le DVD, certain suppléments

ne sont accessible grâce à une navigation secrète et aveugle. L’édition

collector de Gangs of New York (Scorsese, [2002]) présente un

documentaire intéressant sur les studios Cinecitta. Les crédits de

conception DVD sont souvent cachés, car peu intéressant pour le

spectateur.

D’après une étude effectuée par le site l’internaute, les bonus DVD rencontrent un

vif succès auprès des consommateurs. 45% des sondés les regardent tout le temps,

35,8% parfois, 12,2 % jamais. Cependant les forts coûts de production de ces

contenus laissent prévoir un écartement des extrêmes : production de contenus pour

les gros titres et les collectors, et report de contenus déjà existant pour les titres plus

modestes.

I-2.3 Les menus

« L’initiation à la découverte et à l’interactivité, le boîtier libère finalement le

disque qui plonge l’utilisateur dans l’univers du film. Riche en contenus, le DVD ne

peut se passer d’une interface de navigation. Les menus doivent répondre d’abord à

une contrainte graphique et sonore. Le graphisme peut s’inscrire dans la charte

graphique d’une série ou d’une collection mais le plus souvent il est directement

rattaché au film. Les menus en reprennent les images, les couleurs, les polices, les

caractères et tout ce qui contribue à l’ambiance. Ils s’inspirent du VHS, des

campagnes d’affichage cinéma et du discours promotionnel préexistant. Les menus

doivent ensuite permettre de naviguer sur le DVD et d’en découvrir les contenus.

Ergonomie et lisibilité sont la règle. »1

Les menus consistent en des écrans à choix multiples, graphiquement

travaillées, qui construisent l’arborescence du DVD. La navigation en devient

1 Etude sur le DVD, p.233, annexes du Banquet imaginaire, Gallimard, 2002

Page 31: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 31 -

dépendante. Au-delà des simples choix de navigation qu’ils proposent, ce sont

généralement des réalisations audiovisuelles à l’esthétique travaillée. Une charte

graphique est généralement développée pour chaque titre, afin de créer un concept

original, comme le confirme Guillaume Colas, directeur artistique de DVD Maker.

Ces menus sont justement l’œuvre d’infographistes vidéo et d’authoreurs (Encodage

et programmation) ; leur réalisation est donc l’oeuvre de professionnels spécialistes.

Les DVD les plus élaborés présentent des menus dynamiques qui s’enchaînent via

des transitions animées : une cohérence spatiale s’installe alors entre les différents

menus. Les éditions plus modestes proposent des écrans de menus fixes, qui

s’enchaînent sans transition.

Bien que la plupart des menus présentent un concept de navigation basique,

certaines productions s’oses à proposer une navigation plus audacieuse : le DVD de

Dark City (Alex Proyas, [1998]) propose une navigation physique dans les rue

sombres à partir d’un carrefour central. (Ce type de navigation visuelle est d’ailleurs

présent aussi sur le DVD de Gangs of New York (Scorsese, [2002])

I-2.3 Le packaging

L’analogie du DVD avec le livre a été soulevée de nombreuse fois ; si le DVD

s’apparente au CD par sa forme, son packaging se rapproche de celui de la cassette

vidéo. Plus fin et élancé, grâce à la finesse du disque, il s’apparente plutôt au livre et

achève le travail de design qui avait été commencé avec le CD et son emballage

Digipack, dans le milieu des années 90. Le boîtier plastique s’est normalisé pour les

éditions courantes, il intègre en extérieur la fameuse jaquette, et en intérieur

généralement une brochure illustrative qui donne le chapitrage, voire plus. Outre

l’ergonomie, un consommateur exigera d’un boîtier que celui-ci contienne le plus

d’informations possibles sur l’œuvre véhiculée, que ce soit un synopsis du film sur le

dos de la jaquette, ou des informations complémentaires dans les livrets internes.

Car le premier contact avec le film a lieu via le boîtier. Parfois conceptuel, celui-ci est

souvent en adéquation avec l’œuvre qu’il contient.

Page 32: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 32 -

Les éditions de prestige et autres collectors peuvent elles se présenter sous

des formes hétérogènes, avec un « labyrinthe de volets, dépliants et tiroirs», qui

s’ordonnent dans un concept bien précis. L’édition prestige de la trilogie « Le

Seigneur des Anneaux » présente des coffrets stylés « grimoires », rejoignant alors

le concept original : les livres d’héroïc-fantasy de Tolkien. Le packaging vire parfois

vers le « collector » des produits dérivés, qui va bien au delà du simple support

DVD : l’édition Box collector de Spiderman (Raimi, [2002]) présente un caisson en

bois pyrogravé limité et numéroté à 5000 exemplaires, contenant le comic-book

originel, un morceaux de pellicule du film, un portfolio d’illustrations dédicacé, une

statuette en résine de l’homme araignée, plus bien évidemment 3 DVD du film et de

bonus… Plus amusant, la première édition du DVD de RRRrrr !!! (Chabat, [2003])

présente un boîtier en « moumoute » simili crinière de Cro-Magnon, plaçant le

support dans la diégèse du film.

Page 33: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 33 -

I - 3 Le marché du DVD

Pour la quatrième année consécutive, l’institut GfK1 a réalisé une étude

destinée à observer l’évolution des comportements de consommation des français à

l’égard du DVD. Cette étude a été réalisée à partir d’un échantillon de 900 personnes

interrogées en avril 2003 (600 possesseurs de lecteurs DVD et 300 non

possesseurs). Depuis son lancement sur le marché français en 1997, les français ont

adopté le DVD à un rythme spectaculaire. La technologie DVD s’est en effet

considérablement démocratisée : à fin mars 2003, le parc français s’élève à 6 285

000 lecteurs DVD (25.7% des foyers français équipés) dont 48% ont été acquis dans

les 12 derniers mois. Contrairement aux années précédentes, la qualité d’image

(23.5%) est le premier critère pour le choix du format DVD, suivi du son (18.6%). De

nouveaux utilisateurs ont également été conquis grâce à des prix considérés

désormais comme abordables. En effet, pour la première fois, le prix d’appel du DVD

est inférieur à celui du magnétoscope (respectivement 69 et 79 euros)

Pouvoir visionner chez soi les films appréciés au cinéma et découvrir de

nouveaux films sont les principales motivations d’achat des DVD. Ces résultats

s’expliquent notamment par le fait que les DVD-philes sont des amateurs du 7ème

art : ils vont plus souvent au cinéma (7.4 fois par an) que la moyenne française (5.6

fois par an)2. Par ailleurs, les films les plus appréciés par les DVD-philes restent les

films d’actions et d’aventures (67.4% des citations) et les films policiers (60.4%

contre 47.3% en 2002). Cette année les comédies sont toujours en troisième position

(54%) devant les films fantastiques (48.3% contre 40.8%).

Du côté des bonus, les bêtisiers et makings-off sont plébiscités

(respectivement 25% et 23% des citations) ; viennent ensuite les documentaires

(9%) et les scènes coupées (8%). Les bonus sont particulièrement appréciés par les

DVD-philes puisque seulement 13.6% d’entre eux ne les regardent pas (contre 16%

1 A propos de GfK : Le groupe GfK est la 4ème société européenne d'études marketing et la 5ème au niveau mondial. GfK est

le n°1 mondial du tracking des biens durables au travers de panels de détaillants.

Les informations seront consultables sur le site web de GfK : http://www.gfkms.com 2 Données issues de l’étude La vidéo : perception et attentes du public, CNC 2003

Page 34: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 34 -

en 2002). Cependant, ils ne représentent pas un critère déterminant dans l’achat du

DVD : 82% des personnes interrogées déclarent ne pas être influencées par les

bonus proposés.

Pour l’année 2003, la satisfaction des possesseurs de DVD s’élève à 94.9% dont

66.1% qui se déclarent très satisfaits de leur choix. Rappel historique du taux

d’équipement DVD Video1 :

Fin 1998 : 0.2%

Fin 1999 : 1.5%

Fin 2000 : 5%

Fin 2001 : 12.1%

Fin 2002 : 23.3%

Fin 2003 : 42%

I-3.1 L’édition DVD

La grande majorité des titres diffusés sur DVD en France sont des films

américains, avec 80 % des titres édités. La France se réserve 17 % de titres

français. Il s’agit bien souvent de la nature même des titres américains, plus enclins

au spectacle, donc à tirer profit des spécificités du DVD. Jean-Yves Mirzki, délégué

général du SEV, nous confie : "Traditionnellement, la vidéo est le domaine du film

d’action, du spectaculaire. Avec ses nouvelles qualités d’image et de son, le DVD

accentue encore cette tendance."

1 Etudes Gfk

Page 35: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 35 -

Répartition comparée du marché du DVD et de la VHS par genre (ventes tous circuits)

Dessins animés5,35%

Musique 7,00%

Comédie12,14%

Autres8,64%

Fantastique Fiction23,05%

Action/Aventure20,88%

Policier/Thriller 22,94%

Dessins animés3,50%

Musique 5,60%

Comédie9,60%

Autres15,40%

Fantastique Fiction22,40%

Action/Aventure18,50%

Policier/Thriller 25,00%

(Source Etude pratiques et économies du DVD, L’Exception, 2002)

En dehors des sorties DVD de films récents, il existe aujourd'hui un marché qui

s'adresse à tous les cinéphiles, pointus ou non. Exemples: Paramount sort une

collection western avec John Wayne, les Editions Montparnasse exploitent le

catalogue de la RKO et mettent en rayon Citizen Kane, d'Orson Welles, Lobster édite

des courts-métrages tournés entre 1896 et 1942, HK Vidéo met sur le marché des

perles asiatiques bondissantes, ancêtres de Tigre et dragon... Il y en a pour tous les

goûts et pour toutes les couleurs - même en noir en blanc.1

«Le DVD ouvre une perspective plus large que le VHS, note Nathanaël

Karmitz, responsable du secteur chez MK22. Aujourd'hui, on peut envisager ce

support comme un éditeur envisage le papier. Autour d'un film, il peut y avoir une

préface, une postface, un appareil critique, etc.» Témoin, la sortie du Dictateur, de

Chaplin, chez MK2, qui s'accompagne notamment d'un reportage sur le tournage,

d'un documentaire et des différentes affiches. Trouver ou produire des bonus

originaux devient ainsi le travail essentiel de l'éditeur. Mais l'avantage du DVD se

situe aussi sur des terrains moins tape-à-l'œil ou plus pratiques. D'abord, sur le plan

de la qualité de l'image, il n'y a évidemment pas photo entre un VHS (magnétique) et

1 Cf annexe Edition DVD, le partage de la galette 2 Propos issus de l’article Pour le cinéma, c’est une révolution, du 05/12/2002 de l’Express.

Page 36: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 36 -

un DVD (numérique). La restauration de films anciens bénéficiant en priorité de cet

apport qualitatif, c'est toute la cinéphilie qui retrouve un nouvel essor - voir le travail

effectué par Lobster sur L'Atalante, de Jean Vigo, ou sur l'intégrale des films de

Buster Keaton. Quant au coût relativement élevé de l'opération, aux alentours de

30 000 €, il «évite la concurrence des médiocres», selon la formule directe de Serge

Bromberg, patron de Lobster - en moyenne, la production d'un DVD, bonus compris,

va de 12 000 à 40 000 €. «Le DVD possède une valeur ajoutée culturelle très forte,

analyse Renaud Delourme des Editions Montparnasse, qui fut le premier, en 1996, à

éditer un DVD en Europe. L'œuvre passe en premier, mais on doit prendre en

compte le souci d'information pédagogique tout en faisant attention à ce que les

bonus ne soient pas assimilés à un paquet de lessive.»

Si le secteur est en plein boom artistique, il reste économiquement mouvant.

«Le DVD fonctionne au-delà de toutes les espérances, se félicite Jérôme Chung,

directeur musique et vidéo de Studio Canal. Mais il faut regarder l'évolution du

marché. D'abord, faire attention à la multiplication des titres: on peut arriver à

saturation; il faut donc rechercher la qualité. Ensuite, éviter les tensions sur les tarifs:

il n'est pas nécessaire de descendre au-dessous d'un certain seuil (en moyenne, un

DVD vaut 19 €) et le cinéphile peut mettre le prix.

D’après L’étude menée par le groupe de réflexion L’Exception, le succès des

éditeurs à long terme réside donc dans la redéfinition du produit, pour tirer parti des

possibilités offertes par le support et pour justifier le prix. De nombreux éditeurs aux

Etats Unis et en Europe, tant au sein des majors que chez les indépendants, ont

opéré un véritable effort de réflexion éditoriale autour du DVD. Il semble que ce

support soit considéré comme un formidable outil de création d’une identité de

marque forte pour certains (MK2), alors que pour d’autres, il s’agit de mettre en

valeur particulièrement certaines œuvres, qui nécessitent une mise en perspective

ou un type d’accompagnement individualisé pour pouvoir vivre une seconde carrière

en DVD (TF1 vidéo, par exemple). Enfin, pour de nombreux éditeurs de pays en

développement (Asie) ainsi que pour les détenteurs de droits de vieux films de série

B en occident, la stratégie du « contenu minimum pour un prix minimum » semble

devoir être privilégiée.

Page 37: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 37 -

I-3.2 Les succès

Si certains films s’offrent une deuxième vie avec l’édition DVD, la plupart des

succès vidéo restent de bon succès cinéma. « Le schéma est clair : les clients

viennent chercher le produit qui leur a plu quelques mois plus tôt et l’archivent. »1

Ainsi en France, Le pacte des Loups (Gans, 2001), Les rivières pourpres (Kassovitz,

2000), La vérité si je mens 2 et Le fabuleux destin d’Amélie Poulain (Jeunet, 2001)

confirment leur triomphe au box office. Un succès populaire en salle reste la garantie

d’une réussite commerciale en DVD.

Voici, à titre indicatif, les 20 meilleures ventes de DVD pour la semaine du 12 juillet

2004 :

1. LE SEIGNEUR DES ANNEAUX – LE RETOUR DU ROI ED PRESTIGE (TF1 VIDEO)

2. MICHEL VAILLANT (FPE)

3. MASTER AND COMMANDER (UPV)

4. LE ROI LION 2 –L’HONNEUR DE LA TRIBU (BVHE)

5. LE MONDE DE NEMO (BVHE)

6. LES LOONEY TUNES PASSENT A L’ACTION (WARNER HV)

7. SPIDER-MAN ED SIMPLE (GCTHV)

8. UN COUPLE PRESQUE PARFAIT (BVHE)

9. MICHEL VAILLANT –ED COLLECTOR (FPE)

10. MATRIX REVOLUTIONS ED COLLECTOR (WHV)

11. SHREK 3D L’AVENTURE CONTINUE (UPV)

12. KILL BILL VOL 1 (TF1 VIDEO)

13. LE SEIGNEUR DES ANNEAUX TRILOGIE (TF1 VIDEO)

14. L’AGE DE GLACE (FPE)

15. SWAT UNITE D’ELITE (GCTHV)

16. MYSTIC RIVER (WHV)

17. HANNIBAL (GCTHV)

18. LE RETOUR DE LA MOMIE (GCTHV)

19. STARSHIP TROOPERS (GCTHV)

20. LOST IN TRANSLATION (FPE)

Voici, à titre comparatif, les 20 meilleures ventes de VHS pour cette même période :

1. LE ROI LION 2 –L’HONNEUR DE LA TRIBU (BVHE)

2. LE SEIGNEUR DES ANNEAUX – LE RETOUR DU ROI (TF1 VIDEO)

3. LES LOONEY TUNES PASSENT A L’ACTION (WARNER HV)

1 Jean Marc Vernier, Le banquet imaginaire, p. 256, Gallimard, 2002

Page 38: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 38 -

4. LE MONDE DE NEMO (BVHE)

5. MICHEL VAILLANT (FPE)

6. MASTER AND COMMANDER (UPV)

7. LA BELLE ET LA BETE (BVHE)

8. LA PROPHETIE DES GRENOUILLES (UPV)

9. SHREK 3D L’AVENTURE CONTINUE (UPV)

10. SPRIT – L’ETALON DES PLAINES (UPV)

11. 2 FAST TO FURIOUS (UPV)

12. HULK ED COLLECTOR ( UPV)

13. OUI OUI ET LA GOMME ENCHANTEE (UPV)

14. LE SEIGNEUR DES ANNEAUX TRILOGIE (TF1 VIDEO)

15. DANY BOON - A S´BARAQUE ET EN CH´TI (TF1 VIDEO)

16. LE CERCLE (UPV)

17. X MEN 2 (UPV)

18. TCHOUPI MUSICIEN (UPV)

19. ARRETE MOI SI TU PEUX (UPV)

20. HARRY POTTER ET LA CHAMBRE DES SECRETS ED SIMPLE (WHV)

Les meilleures ventes DVD ne sont sensiblement pas les mêmes que sur VHS, ce

qui prouve là une certaine attente du consommateur face à l’édition DVD. Si le DVD

est le support de prédilection du film, le VHS reste un support plus abordable,

trouvant donc encore sa place, notamment chez un public jeune (dessins animés

notamment).

I-3.3 Les tendances

Une étude des stratégies de l’édition DVD montre un net fossé entre quelques

éditeurs cherchant à construire une collection de prestige culturelle et une logique du

coup par coup des détenteurs de gros catalogues. Une certaine plue value est alors

apportée aux échecs commerciaux en salles, avec un florilège de bonus et un

packaging original. L’autre tendance est de proposer des DVD bon marché, mais

dénués de tous supplément. Les majors américaines, notamment, s’interrogent sur la

rentabilité des bonus, et pensent à se diriger vers des DVD sans enrichissement.

Quelle que soit la pertinence du bonus, il n’en demeure pas moins qu’il ne prouve

guère sa rentabilité dans les ventes. L’analyse des motivations d’achat relevées pour

2003 par le SEV souligne qu’il ne constitue pas un critère de choix. 82 % des

acheteurs affirment ne pas être influencés : leur priorité allant vers la qualité d’image

Page 39: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 39 -

(23%) et celle du son (20%). Toujours d’après le SEV, les bonus représentent, en

coût de fabrication, 10% du coût total (y compris le mastering, l’authoring et le

développement) : l’acquisition des droits d’exploitation demeurant le poste le plus

important avec 25% le marketing 20%, la fabrication 10% et la distribution physique

5%, les autres 15% frais généraux, TSA, sacem. Le coût de la production de bonus

est néanmoins à la hausse. Pour maîtriser cette production, dont l’échelle est sans

commune mesure avec l’édition de cédérom ; les éditeurs cherchent la meilleure

économie de temps et de moyens. (Développement de leur propre pôle de création

de bonus, réalisation en parallèle au film…)

D’autre part, la concurrence du piratage, d’internet et des vidéoclubs force le

marché de la vente DVD à se recycler : dernière innovation, le DVD-D (pour

disposable) qui est un DVD jetable. Commercialisé par des acteurs tentant cette

aventure (cdiscount.com), le disque, lorsqu’il est sorti de son emballage, est lisible

pendant 8 heures, après quoi il devient illisible (réaction chimique). Commercialisé à

2.49 euros, ce produit inscrit donc le DVD dans une logique consumériste aux

antipodes du fétichisme DVD. Bien que l’identité DVD soit indéniable, le marché de

ce dernier se cherche et se redéfinit constamment.

Page 40: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 40 -

II. Le DVD, cheval de Troie du cinéma numérique ?

Si le DVD a su relancer une industrie de la vidéo qui s’essoufflait, il a aussi

établit une nouvelle esthétique cinématographique. De manière plus générale, c’est

l’ensemble des nouvelles technologies, leur esthétique et leurs pratiques,

engendrées par leurs outils, qui déteignent sur notre représentation du monde. Il est

donc normal que le cinéma, qui se veut représenter une certaine réalité, intègre ces

influences. Ainsi, à l’image de ce début de XXI siècle, l’esthétique visuelle est

« numérique, numérisable, numérisante ». Dans ce grand engouement

technologique et commercial de l’imagerie numérique, les définitions se perdent pour

laisser place à une grande illusion populaire, un « label numérique ». Néanmoins les

changements sont là, et leur évolution mesurable. Un cinéma nouveau, tant par sa

technique que par son esthétique, est naissant. Si le sujet de ce mémoire n’est pas

focalisé sur la nature de ces formes nouvelles et de ses devenirs, il parait néanmoins

essentiel d’y consacrer une attention particulière. En effet, le DVD vidéo est le

premier exploitant de ces nouvelles esthétiques à travers la présentation de

contenus audiovisuels hétéroclites (film, bonus…), et y est intrinsèquement lié par la

nature même de sa conception (Arborescence, montage, compositing…).

La conception d’un DVD justement, permet de prendre pleinement conscience

de la nature de ce support, de sa logique de fonctionnement. De fait, la plupart des

studios de conception DVD sont aussi des studios d’animation multimédia ou de

réalisation numérique. Si le schéma usuel est qu’un studio de postproduction intègre

un pôle conception DVD depuis l’arrivée de ce nouveau marché, certains acteurs

suivent une chronologie inverse. Le studio d’authoring DVD MAKER, basé à

Boulogne-billancourt, compte franchir cette étape en proposant pour 2005, de la

réalisation en vidéo numérique, de la postproduction et du montage. « Ces secteurs

sont liés » nous confie Thomas Guinand, Directeur Marketing de la société1. « Les

compétences de nos artistes et de nos techniciens nous permettent de prétendre à

1 Interview réalisée par Gilles Cognet en juillet 2004 dans le cadre de ce mémoire.

Page 41: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 41 -

travailler dans le domaine du cinéma numérique. Les outils et techniques sont

pratiquement les mêmes. De plus, nous avons une approche des médias

généraliste, puisque pour le DVD nous sommes amenés à zapper entre texte, image

et son. Ce rapport à la matière vidéo ajoute une vraie plus-value à nos compétences,

et s’inscrit dans la logique de la filière cinéma numérique.»

Pour affirmer que le DVD porte et nourri le cinéma dans sa mutation vers la

réalisation numérique, il est donc nécessaire de d’abord clarifier les concepts de

cinéma numérique et de réalisation numérique. (Je m’appuie notamment sur les

expériences de ce nouveau support, ainsi que sur les théories du chercheur Lev

Manovich et du groupe de réflexion l’Exception).

Ensuite, je me pencherai sur le DVD, qui exploite pleinement les codes de la

réalisation numérique grâce à ses spécificités particulières, mais plus encore qui les

développe et réinjecte en retour ces influences aux spectateurs et aux réalisateurs…

Page 42: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 42 -

II-1 Le cinéma numérique

Depuis sa création il a cent ans, le cinéma a toujours évolué en fonction de

techniques relatives à l’usage de son support ; la bobine de film argentique. La

linéarité du support, la bande film, a permis aux frères Lumière de filmer une histoire,

et l’exploration de ce support a permis à Georges Méliès de créer l’illusion. Cette

technologie du cinéma a connu une remarquable longévité. Si des avancées

majeures comme l’apparition du son ou de la couleur ont révolutionné ce média, la

bobine de film argentique a toujours été son support de base. Depuis quelques

années est annoncé l’avènement du cinéma numérique. Que signifie cette

appellation ? Le cinéma numérique, c’est recourir aux technologies numériques pour

créer, distribuer et projeter des films dans les salles de cinéma ou chez le spectateur

via le Home cinéma.

Le numérique est arrivé dans la filière traditionnelle par la lucarne des effets

spéciaux dans les années 1970, et s’est progressivement répandu à tout le secteur

de la postproduction via le montage virtuel et les effets numériques. Pour les

professionnels, ce passage de la postproduction au numérique est sans retour. A

l’heure actuelle, la filière cinématographique reste encore largement analogique :

tournage sur pellicule 35 mm, projection du film en salle en 35 mm. Néanmoins les

progrès technologiques avançant à grands pas, il reste évident pour les

professionnels du secteur que la solution du tout numérique s’imposera :

financièrement et ergonomiquement, le numérique s’imposera sur l’analogique

comme il s’est imposé sur la filière de la musique ces dix dernières années.

L’augmentation des tâches de postproduction confirme cette tendance de

numérisation du film. En début de chaîne, la tendance est aussi à l’adoption du

numérique : si les caméras DV s’étaient déjà illustrée par le mouvement Dogme pour

leur maniabilité, leur faible coût et leur esthétique particulière, les nouvelles caméra

Haute Définition annoncent déjà une prise de pouvoir sur la bobine argentique.

En 2001, Jean-Christophe Comar, dit « Pitof » réalise le premier film

entièrement tourné en numérique, Vidocq. Echec commercial, le film ouvre

néanmoins la voie de la réalisation par la caméra numérique. Si les critiques

Page 43: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 43 -

condamnent le film pour sa mise en scène, tous reconnaissent l’originalité du support

et de son esthétique novatrice. Quelques mois plus tard, Georges Lucas nous livre

son Star Wars Episode II, lui aussi tourné en caméra Haute Définition. Et d’autres

pionniers se lancent depuis dans l’aventure.

Mais en bout de chaîne, il reste le problème de la diffusion : la projection de

cinéma numérique exige l’abandon des projecteurs 35mm et l’adoption des

nouveaux projecteurs numériques. Ce qui signifie un renouvellement complet du

parc de diffusion mondial, soit les salles de cinéma. Devant l’ampleur d’une telle

mise en œuvre, l’on comprend la réticence des acteurs engagés dans cette

modernisation. Si l’on ajoute les problèmes liés au piratage numérique, à la

redéfinition du rôle des salles numériques (qui pourront alors projeter tout et

n’importe quoi) et de sa différenciation avec son petit frère le Home cinéma, l’on

comprend vite les gros enjeux économiques et socioculturels mis en jeux. Dans cette

attaque du support film, le 35 mm défend une esthétique et une linéarité du récit qui

se sont institutionnalisés.

Mais à l’extrémité de la chaîne de diffusion (l’exploitation vidéo et l’archivage),

prédomine dorénavant un acteur essentiel : le DVD vidéo. Même si la grande

majorité des DVD présente un télécinéma de film originellement en 35mm, ce

support accueille aussi bien des œuvres d’origine vidéo : making of, animation,

menus… Chez les réalisateurs, on pense dorénavant au support DVD en amont de

la production, ce qui encourage le passage au « tout numérique ».

II-1.1 Le cinéma Lumière

En référence au travail des frères Lumières, ce courant bannit tout effet,

spécial ou autre, dans la recherche d'une authenticité absolue. Ces cinéastes en

quête de réalisme peuvent être vus également comme les héritiers de la Nouvelle

Vague. Ils utilisent le numérique pour se rapprocher le plus possible de leur sujet,

pour alléger des moyens de production, et acquérir une esthétique propre à la vidéo.

En DV, on peut filmer à équipe très réduite, voir tout seul, toutes les fonctions

nécessaires au tournage étant intégrées (plus ou moins bien) dans la caméra. Ce

Page 44: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 44 -

type de cinéma utilise également beaucoup de codes empruntés à la télévision. Pour

une génération élevée aux images télévisuelles, la vidéo est synonyme de direct, de

reportages, de documentaires. La distance induite par la texture, le grain, ainsi qu'un

certain romantisme de la pellicule disparaissent. Le spectateur reçoit alors les

images de façon beaucoup plus directe et frontale et les fictions se rapprochent ainsi,

dans leur forme, aux documentaires. Matt Hanson, militant du cinéma numérique,

parle à ce sujet de revitalisation de la réalité. (Hanson, [2004]) Un des premiers films

à suivre cette démarche avec succès fut Festen de Thomas Vinterberg, lançant au

passage la mode des films en numérique suivi du mouvement Dogme.

L’ergonomie de la vidéo et son faible coût (pour le DV) permet à toute une

nouvelle génération de talents de s’approprier ce format, et de s’investir dans des

genres moins définis. En témoigne les florilèges de making-of et autres

documentaires, où la caméra numérique joue alors un rôle d’investigation. Pour

l’édition DVD de Immortel (Bilal, [2004]), Enki Bilal avait pensé soudainement à

inclure un entretien avec son co-scénariste qui se déroulait dans le théâtre cinéma

de TF1. Alexandre Lecoeur, réalisateur et monteur chez DVD MAKER, a pris en

charge la gestion du projet ; son choix s’est rapidement tourné vers le DVcam, qui

présentait une souplesse d’utilisation enviable. « Réalisé avec trois caméras

numériques et trois mandarines (projecteurs, ndlr), l’entretien a pu sous quelques

heures être monté et montré le jour suivant à Bilal » se félicite Alexandre Lecoeur.

« Il s’agit d’une vraie évolution pour la réalisation de making-of. » Ces évolutions

touchent aussi les chefs opérateurs. Besoins en éclairage réduits, parfois inexistants,

profondeur de champ très vaste, contrôle poussé de l'image en post-production, sont

autant de facilités nouvelles qui s'offrent à eux. Il en résulte, pour beaucoup, une plus

grande liberté dans leur travail. Comme le dit Jean-François Robin, chef opérateur

de Chaos de la réalisatrice Coline Serrau,1 « Il ne faut pas dire que [le fait de tourner

en DV] m'a donné plus de liberté. Ca m'a contraint à plus de liberté. En fait, je n'avais

pas le choix. » D’un autre coté, la vidéo Haute Définition, qui se cantonnait aux

fictions télévisées, se démocratise aussi au cinéma. Si son utilisation reste encore

largement minoritaire par rapport à la pellicule 35 mm, le format vidéo Haute

Définition séduit de plus en plus les réalisateurs. « C’est l’avenir, la HD est

maintenant un vrai outil, un outil en pleine effervescence. Et c’est une effervescence

1 Issu de l’article De l'argentique au numérique (Médiamorphoses No 2 / juillet 2001, p. 38

Page 45: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 45 -

qui va dans le bon sens, celui de la qualité » clame avec conviction Samuel Amar,

qui a travaillé à la production de deux longs métrages français tournées en HD :

Vidocq de Pitof et La petite Lili de Claude Miller.1

II-1.2 Le cinéma Méliès

Georges Méliès était le précurseur de ce courant qui fabrique les films comme

une gigantesque séquence d'effets spéciaux. Les techniques d'effets numériques

employées ici ne cherchent que rarement à montrer des sujets ordinaires, d'une

manière ordinaire. L’innovation et le spectaculaire sont de rigueur. Dans cette

configuration, toute décision technique et artistique a pour but de dépayser,

surprendre le spectateur, le faire échapper du monde réel. Toutefois, les

perspectives de ce genre sont bien plus vastes : Dès lors qu'un film peut être

conceptualisé et créé dans un ordinateur, filmer la réalité (et la projeter sur un écran)

devient une option parmi tant d'autres. Les images de prises de vues, une fois

scannées dans un ordinateur, ne deviennent qu'un nouvel élément à manipuler, au

même titre que les images de synthèses ou les matte-paintings. Ainsi, la production

et les prises de vues ne sont que les premières étapes du processus global de post-

production que devient la fabrication d'un film. « Le cinéma numérique est un aspect

particulier d'animation filmique, qui a la particularité d'utiliser des éléments réels de

prises de vues comme une de ses nombreuses matières premières. »2

Dans cette façon de faire, le montage, la création et le compositing d'effets

spéciaux deviennent tous des étapes interchangeables d'un seul et même

processus. Un rapprochement majeur s'opère ainsi entre les métiers de monteur et

de créateur d'effets numériques. Alors que dans le passé, des techniciens

autonomes (voire des boîtes spécialisées) s'occupaient de la manipulation digitale

d'un film, les monteurs qui travaillent en numérique sont souvent à même de

s'occuper d'une bonne partie de l'intégration des effets spéciaux et de la retouche

digitale, si ce n'est pas, comme dans les films à (très) petit budget, le réalisateur lui-

même qui se charge de tout cet aspect de la post-production. (Ainsi, le réalisateur

1 Issu de l’article Le cinéma en vidéo HD fait école, SONOVISION Digital Film supplément au n° 473 / Mai 2003, p. 32 2 Lev Manovich, What is Digital Cinema ?, 1995, disponible sur www.manovich.net

Page 46: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 46 -

Robert Rodriguez occupe généralement dans ses film les postes de réalisateur,

compositeur, auteur, monteur et directeur des effets spéciaux.) On peut également

tirer des copies directement depuis les éléments dans l'ordinateur, sans passer par

une copie intermédiaire, ce qui évite les pertes de générations, et apporte un meilleur

contrôle de l'image finale (colorimétrie, étalonnage, son).

Issu de ce courant, la réalisation numérique place l'ordinateur comme point

nodal par lequel transitent toutes les étapes qui suivent le tournage. Ce domaine de

la réalisation numérique nécessite bien plus qu’un paragraphe dans ce mémoire, car

il est au centre de la conception et de la création numérique. C’est pourquoi je me

propose de lui consacrer une prochaine partie plus développée.

Page 47: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 47 -

II-2 La réalisation numérique

Le rôle privilégié joué par la construction manuelle des images dans le cinéma

numérique est un exemple d’une tendance plus générale : le retour aux techniques

pré cinématographiques d’animation. Marginalisées par l’institution du tournage

narratif qui les relégua aux domaines de l’animation et des effets spéciaux, ces

techniques réapparaissent comme les fondations de la réalisation numérique. Ce qui

était supplémentaire au cinéma devient sa norme ; ce qui était ses frontières revient

au centre. Le média numérique nous renvoie la face réprimée du cinéma. La culture

des images animées est en pleine redéfinition, le réalisme cinématographique est

recadré de son statut dominant à une option parmi plusieurs. Marc Nicolas, directeur

de la FEMIS, annonce que le numérique « donne naissance à un langage commun,

avec le fait que les effets spéciaux se généralisent y compris aux images sans

trucage, que la manipulation numérique des images se répand à des représentations

de la vie quotidienne, qu’on aurait apparemment filmées en prise de vue réelles. »

(Nicolas, [2002], p. 86)

L’omniprésence du traitement numérique de l’image au sein du film floute les

frontières entre la production et la postproduction. Les phases de post-production se

développent d’une façon phénoménale et les métiers de la post-production sont en

train de se brouiller tous. La post production permet d’interagir sur la matière filmée

comme il était possible de le faire jusqu’à présent avec le son, et cette post

production se redéfinit elle-même ; ses outils s’inscrivent dorénavant dans la

production, une sorte de « post production en temps réel ».

Page 48: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 48 -

II-2.1 Une nouvelle forme hybride ?

Depuis longtemps, la plupart des discussions sur le cinéma à l’heure

numérique se sont focalisées sur les possibilités de la narration interactive. Il n’est

pas difficile de comprendre pourquoi : étant donné que la plupart des spectateurs et

des critiques assimilent le cinéma au récit d’histoire, le média numérique est compris

comme quelque chose qui laissera le cinéma raconter ses histoires différemment.

Encore aussi excitante, que l’idée du spectateur qui participe à l’histoire, puisse

choisir différents chemins narratifs et interagisse avec les personnages soit-elle, tout

ceci ne traite qu’un seul aspect,essentiel certes, du cinéma : le récit.

Le défi que les médias numériques posent au cinéma va bien au delà de la

question du récit. Le média numérique redéfini l’identité profonde du cinéma. Lors

d’un symposium qui prit place à Hollywood au printemps 1966, un des participant se

référa de façon provocatrice aux films, définissant les films comme « projections

plate » et les acteurs humains comme « des produits organiques mous ».1 Comme

ces termes le suggèrent de manière crue, ce qui était les caractéristiques

définissantes du cinéma sont devenues les options par défaut. Avec assez de temps

et d’argent, tout peut être simulé par ordinateur, la photo réalité du cinéma n’étant

qu’un aspect. Cette crise de l’identité cinématographique affecte aussi les termes et

les catégories utilisés pour définir l’histoire du cinéma. Christian Metz déclarait en

1970 que « la plupart des films tournés aujourd’hui, qu’ils soient bon ou mauvais,

originaux ou non, commerciaux ou non, ont en commun la même caractéristique

qu’ils décrivent une histoire. Dans cette mesure ils appartiennent à un seul et même

genre, qui est plutôt, une sorte de super-genre. » (Metz, [1975])

En identifiant les films de fiction comme un super-genre du cinéma du XXeme

siècle, Metz ne se préoccupa pas des autres caractéristiques de ce genre, parce

qu’à cette époque c’était trop évident : les films de fiction sont des tournages réels,

ils consistent largement en enregistrements photographiques non modifiés

d’évènements réels qui ont pris place dans notre monde physique. Aujourd’hui, à

l’age des simulations et des générations d’images par ordinateur, invoquer cette

caractéristique devient crucial dans la définition du cinéma du XX eme siècle. 1 Lev Manovich, What is digital cinema ?, MIT press, 2001

Page 49: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 49 -

Projetons nous dans un hypothétique futur de cette culture cinématographique ; les

différences entre les films classiques de Hollywood, les films européens d'art et

d‘essai et les films d'avant-garde peuvent apparaître insignifiantes en comparaison à

ce dispositif qu’elles ont en commun: ces différents modèles cinématographiques

sont fondées sur des enregistrements objectifs basés sur la réalité. (Manovich,

[2002])

Un signe visible de ce décalage est le nouveau rôle que jouent les effets

spéciaux numériques dans l’industrie Hollywoodienne depuis ces dernières années.

Beaucoup de succès (Hollywoodiens, donc des « Blockbusters ») sont conduits par

les effets spéciaux, nourrissant par là leur popularité. Hollywood a même créé, le

genre des « Making of » pour créer un marché d’édition vidéo et papier, qui révèlent

comment sont créés les effets spéciaux. Cette démarche n’est pas sans rappeler les

presdigitateurs qui livrent les secrets de leurs tours.

Jusqu’à récemment, seuls les studios hollywoodiens pouvaient se payer des

outils de production d’effets numériques. De toute façon, cette révolution numérique

n’atteint pas seulement Hollywood, mais le cinéma dans son ensemble. Avec le

remplacement de la filière de production cinématographique par la filière numérique,

la logique du processus de réalisation au cinéma est redéfinie. Ces nouveaux

principes de la réalisation numérique sont valides autant pour les productions

collectives (entendons par là les grands studios) que pour les productions

individuelles, quelle que soient les technologies employées, professionnelles ou

amateurs.

Au lieu de filmer la réalité physique il est donc dorénavant possible de générer

des scènes directement sur ordinateur, avec l’aide de l’animation 3D, et ce avec une

approche de la qualité film. Une fois que les actions « réellement tournées » sont

numérisées (ou directement enregistrées en format numérique par la caméra), elles

perdent leur relation au réel. En effet, l’ordinateur ne fait pas de distinction entre une

image obtenue à travers une lentille photographique, une image créée avec un

programme de graphisme (photoshop, par exemple) ou bien une image synthétisée

par un programme de conception 3D, puisque toutes sont composées du même

matériel, le pixel. Les scènes tournées (une fois pour toute, je comprends par

Page 50: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 50 -

tournage une caméra réelle) sont réduites à n’être plus que graphiques, une

composante de l’image numérique.

Mais la souplesse des technologies numériques permet de concilier

techniques analogiques avec traitement numérique ; Peter Jackson, lors de la

réalisation du Seigneur des Anneaux (Jackson, [2001]) a utilisé une technique

novatrice développée par WETA Digital, sa société d’effets numériques. La scène

présente un combat entre les héros et un troll des cavernes1. La technique normale

consisterait à écrire la scène, filmer la scène en réel avec les acteurs qui combattent

un avatar2 , reproduire la scène en 3D le troll en plus, puis compositer les images

pour obtenir le résultat attendu. Seulement Jackson voulait pouvoir « filmer la

scène », pour injecter dans le cadrage des plans un réalisme qui fait souvent défaut

à l’animation de caméras 3D, trop « propres ». Il a utilisé les instruments de réalité

virtuelle pour filmer cette scène : un casque écran pour visualiser la scène 3D avec

le troll qui se bat, et un gant qui représente ici une caméra, pour « filmer » ce qu’il

voit la manière dont il le désire. Le résultat est assez impressionnant à observer : le

réalisateur cadre et filme numériquement une réalité générée par ordinateur qu’il est

le seul à observer.3 Cet exemple est très démonstrateur à mon sens des directions

que la réalisation numérique pourra emprunter prochainement…

« Dans l’animation, il faut créer tous les mouvements », explique Mamoru

Oshii.4 « Dans la fiction (Avalon (Oshii, [2001]), ndrl) il s’agissait pour moi d’utiliser

un matériel existant, le réel, qui est extrêmement riche en informations, puis de ne

garder que ce qui était strictement nécessaire. Mon objectif était de partir de la réalité

pour créer de la non réalité. Grâce aux nouvelles technologies, les fictions

deviennent de plus en plus des œuvres de création, car on peut construire des

mondes qui correspondent exactement à ce que le metteur en scène à dans la tête.

Je souhaitais réaliser depuis longtemps un film où je pourrais tout contrôler. Cette

façon de procéder est vraiment différente de celle usitée dans les longs métrages

1 Un troll des cavernes est dans l’œuvre de J.R.R Tolkien une grosse créature humanoïde féroce. 2 Ici, il s’agit d’un acteur portant une combinaison « fond bleu » dont les mouvements sont numérisés et assignables à un logiciel 3D. Il sera effacé de l’image et remplacé par un double numérique en postproduction. 3 Documentaire disponible dans le making of de l’édition DVD Collector Le Seigneur des Anneaux : La Communauté de l’Anneau 4 Propos recueillis par Bertrand Rougier, disponibles dans le livret de l’édition DVD Collector d’Avalon.

Page 51: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 51 -

classiques. J’ai manipulé des acteurs de chair et d’os comme s’ils étaient des

personnages issus d’un film d’animation. »

Si les scènes tournées étaient auparavant laissées intactes et constituaient le

produit fini, il s’agit maintenant de données brutes, modifiables par les procédés de

tracking*, de compositing*, de morphing* et d’animation. Par exemple, la scène

d’ouverture de Forest Gump (Zemeckis, [1994]) traque une plume qui effectue un vol

long et très complexe. Pour créer la scène, la plume réelle a été filmée sur fond bleu

dans différentes positions, ces données ont été animées et compositées sur le fond

tourné d’un paysage réel. Le résultat est une nouvelle forme de réalisme, qui peut

être décrite comme « quelque chose qui ressemble à ce que ça aurait ressemblé si

l’action se serait passée, bien que ceci soit impossible. » (Lev Manovich, [2001])

Auparavant, le montage et les effets spéciaux étaient des activités bien à part.

Un monteur travaillait sur l’ordre des séquences sans que les images puissent être

modifiées, et le truquiste s’occupait d’un autre coté des images à traiter. L’ordinateur

abolit cette contrainte. La manipulation d’images individuelles via les traitements

algorithmiques, aussi bien pour le montage que pour le trucage adopte, adopte la

« philosophie copier-coller ». La manipulation d’images numériques n’est pas

sensible aux distinctions d’espace, de temps ou d’échelle. Donc finalement, monter

des séquences d’images dans le temps, les compositer ensembles dans l’espace,

modifier partiellement une image, ou modifier un pixel, relève de la même opération,

conceptuelle et pratique. (Pourrait on même aller jusqu’au ludique ?)

Beaucoup de spécialistes des effets spéciaux, ou de théoriciens du film, comme Lev

Manovich, entre autres, définissent donc le film numérique par la somme de ses

composantes :

- Séquences tournées

- Peinture numérique

- Retouche numérique

- Animations 3D modélisées ou scannées

- Animation 2 D

- Compositing des différents éléments

Page 52: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 52 -

Ainsi Marc Nicolas, président de la FEMIS, reconnaît qu’ « on arrive

effectivement à une situation où la capture des images n’est plus qu’un composant,

pas forcément déterminant, dans l’élaboration de l’œuvre. » De même Alain Bergala

confirme « qu’on va vers une situation où ce qui sera central ce sera

l’assemblage. » La réalisation numérique – le modèle Méliès, que je nommerais à

partir de maintenant cinéma numérique - est donc une nouvelle forme d’animation

qui utilise la photographie (séquences tournées) comme matériel de travail parmi

beaucoup d’autres. Si le cinéma du siècle dernier se construisait avec la pellicule, le

cinéma numérique se construit avec l’ordinateur.

II-2.2 Les influences de la réalisation numérique

Les Vidéoclips

Représenté majoritairement par les clips musicaux, le genre se créa

exactement quand les outils d’effets vidéo entrèrent dans les studios d’édition. Le

genre des vidéoclips a été, et est toujours, un formidable laboratoire

d’expérimentation sur la manipulation et l’hybridation d’images. Un vrai manuel pour

le cinéma numérique, en quelque sorte. Il n’est pas étonnant de voir alors aujourd’hui

l’influence des vidéoclips sur l’esthétique des films modernes ; nervosité du montage,

mise en avant de la bande son, adoption de chartes graphiques éloignant le film du

récit pour le plonger dans l’esthétique pur. Vitesse et mouvement ordonnent une

quantité d’images toujours grandissante. Le spectateur s’adapte alors à ce flot

continu de données visuelles. Le cinéma a donc digéré et intégré ces nouveaux

codes modernes pour les intégrer, et se redéfinir par conséquent.

Ainsi que l’énonce Matt Hanson, cinéaste et militant du numérique1, l’influence

de la réalisation des vidéoclips loin de développer une esthétique dégradante pour le

1 Matt Hanson est écrivain et réalisateur, connu dans le monde pour son investissement dans la réalisation numérique. En 1996, il a créé le Digital Film Festival OneDotZero,

Page 53: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 53 -

cinéma, a tonifié une forme d’art qui fête son centenaire. (Hanson, [2004]) On

pourrait dire que les clips ont dynamisé le cinéma. Si nous pensons à Fight Club

(David Fincher, [1999]), à Tueurs Nés (Oliver Stone, [1994]), ou bien au récent

péplum Gladiator (Ridley Scott, [2000]), ils n’auraient pas pu être réalisés au sein

d’une culture visuelle qui ne se soient pas familiarisée avec l’art du montage,

spécifique aux vidéoclips. Ainsi il n’est pas rare de trouver parmi les jeunes espoirs

des réalisateurs issus du clip musical ; Dans son premier long métrage, Spun

(Akerlund, [2002]) Jonas Akerlund enchaine les séquences hallucinées (au propre

comme au figuré) et les mélanges esthétiques hérités de sa génération nourrie aux

séries télé de tous genres. La communication visuelle du film devient bien plus

complexe que le récit ; « ces films reposent sur une narration conduite par les

images, Nous nous dirigeons vers le cinéma de l’abstraction. Face à ce déluge

d’images, il n’est pas surprenant que le contexte soit noyé dans l’essence même de

l’émotion. » (Matt Hanson, [2004], p. 93) Ce cinéma de l’abstraction pourrait être une

réaction à la surcharge d’information, à la surmédiatisation qui semble caractériser

notre société. Umberto Ecco, observe que la musique pop se construit comme un

véhicule se dirigeant vers le refrain, un point où l’auditeur est alors submergé par

l’émotion. Le cinéma accéléré, issu du clip, suggère que le même schéma pourrait

bien se produire avec les images animées. (Ecco, [1986])

L’animation

Si jusqu’à l’apparition de la télévision l’animation restait un divertissement

exercé par quelques maîtres (Walt Disney, Tex Avery, Chuck Jones…), elle s’est

ensuite industrialisée pour séduire un public jeune. En brisant ces dogmes qui

imposaient à l’animation des narrations enfantines ou comiques, l’animation s’est

émancipée ces quinze dernières années. La percée de l’animation japonaise est en

grande partie responsable de ce phénomène. Si les occidentaux voient en

l’animation une représentation enfantine et caricaturée du monde réel, la mentalité

orientale, plus conceptuelle, l’intègre comme une représentation du monde à même

titre que le cinéma ou la littérature. Ainsi, l’animation nippone est thématiquement

bien plus variée que dans le reste du monde. Les films d’animation se sont sortis de

cette réduction puérile grâce à une génération d’animateurs qui n’aurait pas rejoint la

Page 54: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 54 -

profession sans l’avènement des technologies numériques. Le cinéma d'animation,

longtemps considéré comme un parent éloigné du septième art, a en fait permis

pendant des décennies à ses artistes d'apprendre à retranscrire la réalité d'un

mouvement, d'un décor, en les dessinant puis en les animant. Ce savoir est

aujourd'hui primordial pour créer des films où tout est virtuel. D'ailleurs, le processus

de fabrication d'un dessin animé, où chaque scène est composée de plusieurs

couches d'origine différente, s'applique de nos jours à la création virtuelle, les

éléments constitutifs d'un film ne se limitant plus aux prises de vues. L’apparition puis

la généralisation de la 3D au sein de l’animation vient diversifier et dynamiser ce

genre, le rapprochant de plus en plus d’une esthétique photo réaliste.

Même si Disney, Pixar et Dreamworks continuent de nous livrer un cinéma

d’animation figuratif ultra conventionnel (dans la narration), et ce en dépit de leur

avance technologique incontestée, les intégrations de séquences d’animation au

sein de films longs métrages comme Tueurs nés (Oliver Stone, [1994]), Spun

(Akerlund, [2002]), ou plus récemment Kill Bill (Tarantino, [2003]) démontrent que

l’animation rentre dans la palette des réalisateurs. Elle dessine notre monde dans de

nouvelles réalités et de nouvelles visions, en apportant une esthétique typée.

Les jeux-vidéos De nombreux films mettent en œuvre différentes figures stylistiques propres

aux jeux vidéo, et la tendance est grandissante. Si la réponse la plus grossière

consiste à adapter un jeu existant, force est de constater que cette démarche est

majoritaire à une réflexion sur la cyberculture. Ainsi, nous observons depuis une

décennie, des adaptations de jeux vidéo : Street Fighter, Tomb Raider, Final

Fantasy, ou plus récemment Resident Evil, qui boosté par son succès, nous sort une

suite cet été 2004. Et semblablement à l’iceberg, le plus gros reste à venir : Silent

Hill, Duke Nukem, Soul Calibur et autres Doom sont déjà annoncés à grand renfort

de marketing. Paradoxalement, leur adaptation au grand écran les réoriente vers une

version Hollywoodienne purement narrative, dans un souci de prise de risque

minimum.

Page 55: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 55 -

« Il est évident que les interaction entre jeux vidéo et cinéma, sur le plan

esthétique comme sur le plan industriel et commercial, sont devenue une réalité qu’il

vaut mieux analyser» commente Jean-marc Vernier, avant de reconnaître qu’une

certaine tendance du cinéma américain travaille sur « la matière

cinématographique ». (Vernier, [2002], p. 72) Ainsi les scénaristes et réalisateurs ont

analysé et adopté les codes de non linéarité qui régissent les jeux vidéo, leur

exploration. « Le cinéma, par ces formes narratives et ses formes de mise en scène,

a toujours emprunté ou répondu à des défis d’autres domaines artistiques. Il s’est

confronté à la littérature, à la peinture, ou a d’autres dispositifs de production

visuelle, que ce soit la photographie, la télévision ou la publicité. Il l’a fait dans une

dimension de concurrence auprès du public, et comme renouvellement ou création

esthétique. Aujourd’hui, un nouveau défi vient des jeux vidéo ».

La première influence des jeux vidéos est donc visuelle : caméra subjective,

combats chorégraphiés, bouclage de séquences, scénario à embranchements…

C’est sur ces concepts que Matrix mise : l’alchimie entre ses différents ingrédients

fonctionne1. En particulier l’intégration des codes et structures propres aux jeux

vidéo : incarnation de héro, combats abolis des lois physiques, configuration du

personnage, choix multiples, boss de fin de niveaux, énigmes, univers cyberpunk…

Néanmoins, ces références aux jeux vidéo sont rendus cohérentes par la présence

d’un scénario solide, lui-même construit sur le modèle des jeux vidéo : présence

d’une matrice virtuelle et d’un monde réel, soit deux univers accessibles par

connexion neuronale, apprentissage par niveaux, avec évolution du personnage. Les

héros du film que regarde le spectateur sont eux même acteurs d’une réalité

virtuelle, ce qui ne manque pas d’interpeller le spectateur et de réveiller ses

processus cognitifs propres aux jeux vidéo. Si les frères Wachowski sont rapidement

devenus les représentant du genre de science fiction moderne avec la trilogie Matrix,

c’est aussi par ce qu’ils ont conçu leur œuvre comme un univers numérique, qui

prend forme sous l’aspect de courts métrages d’animation, d’un site web et d’un jeu

vidéo, au-delà des trois films. Ces « adaptations » poussent les limites du scénario,

redéfinissant alors le film lui-même, ce qui est l’essence même des jeux vidéo. Et là

ça prend. 1 Cf l’étude de Matrix dans Cinéma & Nouvelles Technologies, en annexe

Page 56: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 56 -

Un autre exemple d’intégration pertinent d’univers de jeux vidéo au cinéma est

Avalon, (Oshii, [2002]) film du réalisateur nippon issu de l’animation (Ghost in the

shell, [2002], un long métrage d’animation, qui philosophait sur la cyberculture). Dans

son film (retouché intégralement sur ordinateur), l’héroïne gagne sa vie en jouant à

un jeux de réalité virtuelle, jusqu’à qu’elle découvre un « niveau caché », qui lui

apparaît une réalité bien plus acceptable que son monde réel. Au-delà d’une

esthétique de réalité virtuelle travaillée, le film présente une réflexion sur les

conceptions de réalité, de virtualité et de liberté.

Ainsi la notion de « niveau », en tant que mission à accomplir se traduit au

cinéma par la schizophrénie excitante des univers virtuels et de la notion même de

réalité. Cours Lola cours (Tom Tykwer, [1998]) est un film d’un jeune réalisateur

allemand qui propose une mise en scène originale: la jeune Lola revit le même

scénario de 20 minutes quatre fois, en l’améliorant à chaque fois par les

apprentissages des expériences précédentes. Cette structuration du récit en

tentatives successives est directement inspirée des jeux vidéo : exploration,

apprentissage, récidive. Cette impression est en plus soulignée dans le film par un

scénario typé (20 minutes pour trouver 1 million de marks afin de sauver son copain

de la mafia) et par la présence une musique électronique au BPM endiablé. Cette

idée n’est pas complètement nouvelle au cinéma non plus, on se souvient de Un jour

sans fin (Ramis, [1993]), qui obligeait Bill Murray à vivre la même journée

quotidiennement, jusqu’à qu’il trouve l’échappatoire…

Page 57: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 57 -

II-2 Le DVD, démocrate du cinéma numérique Si le DVD, est le support qui s’est imposé pour la vidéo numérique, cette situation le

place logiquement en véhicule de l’image numérique. Celle-ci affiche donc sa nature

et son originalité.

II-2.1 Une histoire de pixels La motivation première des consommateurs, quant à l’achat de DVD, revient à

la qualité audiovisuelle. « Il n’est pas tant apprécié pour les options qu’il propose que

pour sa qualité d’image et de son [...] Le DVD participe à cette idée très actuelle que

l’on peut accéder à la perfection à travers la technologie». Lassé par une image

vidéo analogique qui bavait et se dégradait avec le temps, le consommateur a vite

adopté le label numérique pour sa consommation audiovisuelle. En témoignent les

rééditions numériques d’œuvres antérieures à cette technologie ; les spectateurs

rachètent la nouvelle version « remasterisée » qui présente pourtant la même œuvre

que la VHS. Issue de l’évolution des micro-ordinateurs, s’effectue alors une course à

la résolution, une culture du pixel. Cette course à la qualité visuelle cache le désir de

l’illusion parfaite. Car le pixel1 est le plus petit élément quantifiable d’une image

numérique, c’est son unité de mesure. Là où l’image analogique ne se quantifiait que

très difficilement, l’image numérique se mesure et se compare très aisément, grâce à

sa résolution. L’utilisateur en prend pleinement conscience lorsqu’il regarde un DVD

sur un ordinateur : le DVD s’affiche dans une fenêtre de certaine taille (720*576

pixels) bien inférieure à la taille de son écran. Phénomène qu’il ne peut pas déceler

lors du visionnage sur télévision. Néanmoins, un écran d’ordinateur propose une

résolution d’image bien plus élevée que la télévision, ce qui atténue la différenciation.

Dernièrement, les appareils photo numériques ont grandement démocratisé le

lexique technique propre à cette culture numérique, en marketant du « mégapixel ».

Et cette vulgarisation technique s’effectue dans toute la gamme des appareils

numériques : scanners, imprimantes, caméscopes, portables, organizers. Ainsi

l’image numérique s’est émancipée de sont support originel, l’ordinateur. Le DVD est

1 Pixel : contraction de picture element. Le plus petit élément quantifiable d’une image numérique.

Page 58: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 58 -

le support d’image numérique le plus commercial et il devient à ce titre le

représentant de la qualité visuelle numérique le plus médiatique.

Le DVD vidéo est aussi un objet technologique perfectionniste : si, l’un de ses

arguments commerciaux est de figer l’œuvre pour l’éternité (en témoignent les

éditions prestiges dites « définitives » et autres « ultimates »), il n’en reste pas pour

le moins un objet technologique, donc soumis à l’évolution. Ainsi, le successeur du

DVD est déjà annoncé. On parle du DVD-HD (pour Haute Définition) ou bien du Blu-

Ray (pour son laser bleu), deux technologies qui se disputent actuellement la

bataille. Ainsi, à la question « Dans l’objectif d’imposer le DVD-HD comme format

standard justement, que représente cette étape ? » (Le lancement des 3 premiers

DVD-HD en test, ndlr), Xavier Bringué, Development Manager chez Microsoft

répondait1 : « Nous contribuons à évangéliser. Nous voulons éduquer le

consommateur, lui montrer que le PC peut jouer un rôle dans le divertissement. Le

consommateur ne sait pas encore ce qu’est la HD. Et dans un magasin, personne ne

va dire « je veux la HD ». Mais quand les consommateurs la verront, ils feront la

différence et ils diront « je veux cette qualité d’image ». Nous sommes encore dans

une phase éducative et nous allons créer la demande. C’est un peu le même

procédé que le passage à la qualité audio apportée par le cd il y a quelques années.

Ces disques sont là pour accélérer la transition. »

C’est en cela que le numérique franchit une nouvelle étape dans la

consommation audiovisuelle. Si auparavant la vidéo analogique évoluait en fonction

de ses propres besoins, l’image numérique évolue elle avec l’informatique, la

puissance des microprocesseurs (pour simplifier). Si jusqu’à présent cette qualité

visuelle du DVD n’était sujette qu’à la lecture de films, elle peut dorénavant être

sujette à enregistrement et manipulation, avec l’arrivée récente des enregistreurs et

des caméscopes DVD, puis à appréciation, avec les écrans numériques plats et

autres vidéo-projecteurs De la phase de fascination, lors de sa mise sur le marché

et son adoption immédiate, le DVD passe maintenant à la phase de compréhension :

le consommateur comprend cette technologie (parce qu’on la lui explique, certes), et

peut dorénavant se l’approprier pour son propre usage. Bernard Stiegler, directeur

1 Dossier sur le DVD HD publié sur le site multimedialaune http://www.multimedialaune.net/index.php?action=article&id_article=38252&id_rubrique=4515

Page 59: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 59 -

général adjoint de l’INA affirme1 que « cette initiative d’aller vers un marché de

grande diffusion signifie que la manipulation des images par le grand public est

d’ores et déjà rentré dans les faits. » Le lecteur de DVD continue de séduire les

Français, avec un taux d'équipement de 44% des foyers à la fin mars 2004 contre

25% à la même période de l'an dernier, selon l'institut d'études GfK. Fin 2003, 41,6%

des foyers français possédaient un lecteur de DVD et GfK anticipe que la proportion

atteindra 59% à la fin 2004. La baisse de plus de 40% du prix moyen du lecteur en

2003 explique cette progression, estime l'institut, qui indique que « les nouveaux

équipés ont des revenus plus modestes ». L’étude sur la vidéo du CNC est formelle

elle aussi : « Le lecteur de DVD se répand de plus en plus et est plus facile d’accès

qu’un ordinateur. Ainsi, il constitue un moyen de démocratiser les contenus qui

n’étaient accessibles que sur PC (CD Roms ludo-éducatifs). Il permet d’atteindre les

foyers qui ne sont pas équipés de micro-ordinateur. » Avec cette démocratisation du

DVD, c’est l’image numérique, avec sa consultation non linéaire, et sa résolution en

pixels, qui se démocratise au grand public.

II-2.2 L’infographie et l’animation De part sa nature, le DVD reste donc en grande partie un objet de culte

technologique. Si il est le diffuseur de l’image numérique, il devient par extension le

diffuseur de l’image synthétique. Comme le définit le cinéma numérique, l’image

numérique est (de plus en plus) composition, synthèse. Cette diffusion d’images de

synthèse s’effectue à deux niveaux :

- La diffusion de contenus intégrants des images de synthèse Jean-Yves Mirzki, délégué général du SEV, est sans détour 2: « Traditionnellement,

la vidéo est le domaine du film d’action, du spectaculaire. Avec ses nouvelles

qualités d’image et de son, le DVD accentue encore cette tendance.» L’étude du

CNC 3 sur les attentes du public en vidéo le confirme : « Pour les spectateurs, la très

grande technicité de la conception des films américains est en forte adéquation avec 1 Cinéma et dernières technologies, p. 97, INA De Boeck Université, 1998 2 Article paru dans Le Monde du 23 novembre 2002 3 La vidéo, perception et attentes du public, étude qualitative du CNC, décembre 2003

Page 60: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 60 -

la technologie du DVD. En effet, les films américains induisent l’idée d’un travail

complexe ; ils mettent en oeuvre des effets techniques, un jeu d’acteur très travaillé,

une équipe nombreuse… La fabrication d’un film américain apparaît plus riche, plus

propice à profiter des possibilités techniques du DVD. »

Il convient encore une fois ici d’éclairer ce point : il ne s’agit pas de se réjouir

de l’hégémonie d’Hollywood sur le marché mondial du DVD, mais plutôt de constater

que les films, quels qu’ils soient, intègrent de plus en plus des images synthétiques.

(D’ailleurs il ne s’agit plus d’effets spéciaux, puisque la grande majorité de ces films y

ont recours, là est un point essentiel du mémoire !) Il reste vrai que la science-fiction

est la plus encline à offrir au spectateur un florilège d’images synthétiques, et elle

reste un des genres privilégiés par les consommateurs de DVD.1

Autre réalisations qui donnent la part belle aux images de synthèse : les making-of.

Ce phénomène est inhérent au premier : ci les films ont eu recours aux technologies

numériques, il est généralement proposé dans les bonus un documentaire (pseudo)

technique sur cette utilisation. Ceci pour des raisons commerciales bien souvent,

puisque les images sont disponibles bien souvent dans les ordinateurs des studios

de création numérique. Ces effets spéciaux sont alors exposés de manière brut et

laissent apparaître leur caractère synthétique ; esthétique, fabrication…

- L’utilisation de l’infographie au sein des menus. La réalisation de menus relève de la composition d’image, ce travail est

l’oeuvre d’infographistes spécialisés. A mi chemin entre l’animation et le sampling

vidéo, les menus DVD sont l’exemple même de ce qu’est appelée à devenir le

cinéma numérique.2 Les menus doivent êtres textuels, signifiants et ergonomiques,

cette volonté étant aussi celle des consommateurs.3 La navigation est souvent

spatiale, il convient donc d’animer les déplacements et transitions que le spectateur-

navigateur est amené à effectuer. Une navigation spatiale est bien plus

mnémotechnique qu’un simple choix directif. A travers la conception DVD, c’est toute

une génération de graphistes intégrateurs biberonnés au photoshop4 qui trouve enfin

la possibilité de donner une cohérence au mélange des médias. Beaucoup de

succès cinéma soulignent une attention particulière à la conception des menus. Pour 1 Les contenus de DVD,p. 26, Etude qualitative du CNC, décembre 2003 2 Etant moi-même infographiste vidéo, je me permet de parler en connaissance de cause et de la profession 3 Les contenus de DVD,p. 19, Etude qualitative du CNC, décembre 2003 4 Logiciel d’infographie de la société Adobe, considéré par la profession comme l’outil essentiel de retouche photo et de création infographique.

Page 61: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 61 -

reprendre l’exemple du Seigneur des Anneaux (Jackson, [2001]), les menus

présentent une navigation visuelle sur un vieux grimoire (cf packaging), à chaque

menu correspondant une page différente. Semblable à un jeu vidéo dans la

démarche, mais bien plus réaliste dans l’aspect, il s’agit de réalisations

infographiques qui n’aurait que très difficilement être pu tournées avec une caméra.

Si les menus DVD ne sont pas un critère essentiel qui pousse à l’achat du

DVD, il forment avec l’interactivité la personnalité du DVD, ce que Jean Marc Vernier

appelle le « Style DVD » (Vernier, [2002]). La présence de menus soignés, animés et

ergonomiques restera, car elle définit l’objet DVD. Même si certaines éditions

s’orientent vers des menus ultra épurés, voire inexistants, pour alléger leurs coûts,

les menus DVD, et avec eux l’interface animée, ne sont pas prêt de disparaître, bien

au contraire. Alors que le public s’est familiarisé avec ces interfaces d’accès aux

mondes virtuels cinématographiques, se définit déjà à l’horizon les prémices des

futures interfaces de l’évolution du DVD, le DVD HD. Si rien n’est encore définit,

certaines sources parlent d’interfaces en langage html, soit le même langage

qu’internet. Les futures interfaces DVD pourrait donc s’apparenter à des sites web,

consultables via les Media Centers1 qui prévoient de se démocratiser dans les

salons, sur le schéma du DVD. Mais la technologie est bien trop rapide et

dépendantes des industries pour pouvoir annoncer quoi que ce soit.

II-2.3 L’immatérialité du numérique Autre caractéristique de l’image numérique, sa virtualité. Le fait qu’elle

appartienne au langage informatique la rend duplicable et diffusable par les réseaux.

Nulle n’est ici l’intention d’exposer les procédés et usages du piratage vidéo, mais il

faut reconnaître que depuis l’existence du DVD, le piratage vidéo est en hausse

exponentielle. L’étude publiée par le CNC2 à ce sujet est très révélatrice de ces

pratiques. L’avènement récent de l’internet Haut débit a catalysé ce phénomène à

l’échelle mondiale, mais ces pratiques d’échanges sont apparues des le décryptage

1 Serveur informatique multimédia qui vise à coordonner tous les appareils électroniques de la maison: Télévision, chaîne audio, connexion internet… 2 La piraterie de films ; motivations et pratiques des internautes, Etude CNC, 2004

Page 62: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 62 -

du système de protection des DVD1. Cette disponibilité de l’image numérique, en

l’occurrence ici les films, apparaît comme « innée » et « acquise » dixit les pirates. La

vidéo numérique se duplique et se diffuse sur tous les médias, mais le DVD vidéo

reste un support source, le point de départ d’une diffusion, légale ou non.

1 En 1999, Jon Johansen, un jeune informaticien norvégien, trouve une faille dans le système de cryptage CSS développé par Matsushita et créé DeCSS, outil qui crack le système, dont le code se répand immédiatement via les réseaux.

Page 63: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 63 -

III. De nouvelles approches cinématographiques

III-1 Le spectacle hors de la salle ?

Depuis l’arrivée de la télévision, le cinéma s’est vu exporté hors des salles obscures.

Il a donc connu plusieurs crises, survivant d’abord à la télévision, puis au VHS,

réaffirmant sa différence et sa singularité. Si le concept de home cinéma était

commercialisé à partir de 1995, c’est bien le DVD qui l’a démocratisé au grand

public. En effet, un system Home Cinéma se compose d’un écran de grande taille de

préférence 16/9 (télévision, vidéoprojecteur), d’un système sonore multicanaux

(amplificateur décodeur et enceintes satellites) et bien sur d’un lecteur DVD pouvant

fournir les signaux audiovisuels. Comme son nom l’indique, le Home cinéma vise à

reproduire dans le salon du spectateur les conditions d’écoute et de visionnage que

proposent les salles obscures. En adoptant les mêmes systèmes techniques

(projection, son multicanaux). Le mode de visionnement d’un film sur un téléviseur

peut être qualifié de mode de vision affaibli, (image plus petite, son moins fort, qualité

de rendu moindre) par rapport à une installation home cinéma. Avec ces dernières

innovations technologiques sont en train de réduire considérablement l’écart entre la

pratique spectaculaire publique et la pratique spectaculaire privée. (Le Bihan, [2003])

Si le DVD exporte les conditions de spectacle cinématographique à la maison,

il devient quelque part le démocrate du cinéma, ou en tout cas de la cinéphilie.

Thomas Guinand, Directeur Marketing chez DVD MAKER1, pense qu’il s’agit d’un

gros changement par rapport à la VHS : « Avant, la VHS proposait une qualité de

visionnage et d’écoute qui s’apparentait à la diffusion télé. Les gens n’étaient pas

dans des conditions d’immersion cinématographiques. Avec le DVD et le Home

cinéma, on se rapproche vraiment du cinéma de salle. Je pense à une famille de

quatre enfants par exemple : six mois après la sortie ciné, la famille peut pour vingt

1 Interview réalisée en juillet 2004 dans le cadre de ce mémoire

Page 64: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 64 -

euros s’offrir le DVD. Les prix des cinémas augmentent, la qualité du home cinéma

aussi… » Marc Nicolas propose les mêmes arguments : « Jusqu’à une date très

récente, la cassette était un appendice du téléviseur et permettait de voir les films sur

le petit écran, comme on regarde la télévision. Aujourd’hui se produisent deux

évolutions très complémentaires, d’un coté la qualité de l’image enregistrée sur DVD

est bien meilleure que celle d’une cassette VHS, et d’un autre coté on a des vidéo

projecteurs qui se vendent comme des petits pains. Avec cette meilleure image du

DVD et cette image projetée, la multiplication de ces instruments n’est-elle pas en

train de reconstituer une forme de spectacle, par opposition à ce qu’est la

télévision ? » (Nicolas, [2004], p. 242)

D’où la problématique de savoir si cette pratique du « cinéma à la maison » ne

porte pas préjudice aux salles obscures. Le CNC1 nous rapporte que effectivement,

une baisse des fréquentations de salle est observée chez les possesseurs de DVD,

néanmoins il convient de nuancer ce phénomène par des distinctions. Les cinéphiles

continuent d’aller au cinéma, voire y vont plus souvent, excitant leur désir

cinématographique par la pratique casanière du DVD, et d’un autre coté les non

cinéphiles se contentent dorénavant du support DVD (achat, location, prêt),

délaissant les sorties cinéma. Le DVD catalyse donc les pratiques cinéphiliques :

ceux qui allaient au cinéma complètent leur pratique avec le DVD, et ceux qui ne s’y

rendait qu’occasionnellement la remplace.

Olivier Assayas parle d’une « possession » ; le spectateur qui fut écrasé par le

déluge d’images et de spectacle en salle veut se « venger » ensuite chez lui en

achetant le DVD et en possédant l’objet qui l’a possédé. Il parle d’une relation quasi

sexuelle, fétichiste entre l’œuvre et le spectateur. (Assayas, [2004])

D’un autre coté, il convient d’analyser ces nouvelles conditions de visionnage. Le

DVD, et par extension le Home cinéma, installe le spectateur au sein d’un

équipement technologique visant à reproduire le spectaculaire de la salle dans le

salon du spectateur : l’expérience devient cinéphilique, et individuelle. La

consommation collective restant minoritaire (location, consommation familiale). D’un

autre coté, le DVD à travers sa compatibilité avec l’ordinateur, a vu naître une

1 1 Les français et la vidéo, p. 9, Vidéo : Perception et attente du public, p. 34, Etude du CNC, décembre 2003

Page 65: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 65 -

pratique nouvelle : le visionnage de films via l’ordinateur. La majorité des DVD vus

sur ordinateurs le sont sur l’ordinateur personnel, à la maison. Néanmoins les

pratiques nomades sont croissantes. (Mise en place du service location DVD dans

les gares TGV) Il s’agit alors de spectateurs technophiles qui disposent de

l’équipement adéquat : rappelons que les écrans informatiques présentent une bien

meilleure résolution que les téléviseurs, et que la taille de ceux-ci ne cesse de

croître. Le DVD consulté sur un ordinateur permet de plus d’accéder aux bonus

DVD-rom, qui, même futiles, restent exclusifs.

Page 66: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 66 -

III-2 L’interactivité et la délinéarisation

Le DVD a révolutionné les modes de consommation vidéo. L’arborescence proposée

par le DVD est comparée à l’apparition du chapitrage dans les livres. L’interactivité

de ce support change le positionnement de l’œuvre et du spectateur. Olivier

Assayas, réalisateur français, acquiesce : « je suis d’accord sur le fait que la vidéo,

et plus encore le DVD, transforment le rapport au film : d’un rapport où le spectateur

est passif, le spectateur devient actif, il a prise sur le film. » (assayas, [2002]) Ce

nouveau rapport aux objets audiovisuel est hérité directement de l’ordinateur. On

visionne, on manipule, on transforme. Alain Bergala, critique et cinéaste, insiste sur

l’écart qui se creuse avec la projection en salle : « Le rapport au spectateur va

encore changer davantage : dans l’état actuel d’un film en salles, on est toujours pris

par la main par la linéarité du film. Mais déjà, on peut zoomer sur un morceau de

l’image pour mieux la voir pendant que le film se déroule, bientôt je pourrais choisir

pour moi seul, ce que je veux voir, plutôt du point de vue de tel personnage ou tel

autre. Je pourrai choisir un axe différent, à ce moment, ce sont les cinéastes qui vont

être dépossédés, comme le sont les chef-op aujourd’hui. Ils perdront cette maîtrise

qu’ils avaient, au moins, de la linéarité de la réception de leur film par les

téléspectateurs. » (Bergala, [2004], p. 92)

Dès son lancement, les possibilités d’interactivité du produit ont laissé

l’imaginaire public fantasmer sur un support qui rendrait le film interactif. Le DVD est

un objet qui est programmable par le spectateur, même en temps réel, il s’agit donc

de vision programmée, configurée, mais il est bien difficile de s’approcher du récit

interactif. Ainsi, Stephane Zambon, programmateur informatique et authoreur DVD

chez DVD MAKER porte un jugement nuancé quant aux possibilité d’interaction avec

le récit : « La technologie DVD n’a absolument pas été pensée pour développer des

récits non linéaires. Il s’agissait seulement de permettre un choix des titres vidéo.

Maintenant, nous sommes obliger de ruser pour réaliser de l’interactivité poussée. La

technologie est trop vieille, trop rigide. »1 Néanmoins, la possibilité de détourner

l’usage usuel des pistes de sous-titres et de multi angles permet de greffer une

approche non linéaire sur un récit originellement linéaire. Quelques réalisations ont 1 Interview réalisée par Gilles Cognet en juillet 2004 dans le cadre de ce mémoire

Page 67: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 67 -

exploré cette voie : Le Manoir, première édition du concept BDVD, association de BD

et de DVD. Il s’agit de bandes dessinées filmées, montées et doublées, dans lequel

on peut choisir d’incarner un personnage, donc une certaine version de l’histoire. Le

résultat est surprenant, « bâtard » entre le dessin animé et une version cd-rom de

Cluedo1. Agnès Varda, a elle, pour le DVD de son film Les glaneuses, été filmer deux

ans après, les personnages de son film, et a intégré au déroulement linéaire du film

des « moments cliquables », qui renvoient vers un interview des personnages deux

ans plus tard. Le film propose donc deux approches parallèles d’une même œuvre.

Ce procédé a originellement été développé sur le DVD de Matrix (Wachowski,

[1999]): Un mode de visionnage du film permet d’activer une piste de sous-titres

(subpictures) et une piste d’interaction (Highlights) : pendant la lecture du film,

certaines scènes font apparaître un petit signe dans le coin de l’image : un petit lapin

blanc (qui appartient au scénario du film). En cliquant, l’on accède à un documentaire

expliquant le construction de la scène en question. Il s’agit ici d’un exemple

d’intégration complète des bonus au sein du film en lui-même. Le suivi du film se

retrouve interrompu par la consultation de documentaires, mais cette délinéarisation

est alors commandée par le spectateur. Il y a bien interactivité entre le support et le

spectateur, mais cette pratique se rapproche peut-être plus du téléspectateur qui

zappe que du joueur qui construit son récit.

Romain goupil parle lui de la « culture du zapping », propre à la génération

biberonnée à la Nintendo et au zapping télévisuel. D’un spectateur passif, qui était

sous l’emprise toute puissante du cinéma, de la linéarité chronologique du récit, et

d’un dictat de la diffusion, l’on est arrivé à un spectateur dictateur à son tour du

contenu visuel, à travers une liberté de consultation. Alain Bergala note lui « un

plaisir de circuler dans les objets audiovisuels, ça fait aujourd’hui partie d’une réalité

massive, l’impatiente est partout. Les gamins circulent comme des fous sur Internet,

il y a un plaisir de s’étourdir. » (Bergala, [2002], p. 114) Cette attitude héritée des

jeux vidéo transforme donc le spectateur en spectateur acteur, en « spect-acteur ».

La manipulation visuelle est alors privilégiée. Mais cette interaction reste, dans le cas

ici présent du DVD vidéo, plus à rapprocher à de la configuration en temps réel. Car

si nous l’avons vu quelques DVD se sont lancés dans l’expérience du récit-jeux, il

faut bien reconnaître que la grande majorité des titres édités proposent une 1 Jeux de rôle où l’on doit résoudre une affaire d’assassinat

Page 68: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 68 -

interactivité annexe à la visualisation de l’œuvre principale. Le récit au sein du film

conserve alors sa linéarité et semble bien avoir du mal à se lancer dans l’aventure du

récit séquentiel.

Le cinéma se refuse d’abandonner son unique effet, qui selon Christian Metz,

repose sur la forme narrative, l’effet réaliste et l'arrangement architectural du cinéma,

le tout fonctionnant ensemble. Metz se demande si dans le futur des films basés sur

un modèle non narratif se développeront. Si c’est le cas, il suggère que le cinéma

n’aura plus besoin de générer son effet réaliste. (Metz, [1975]) L’électronique puis les

médias numériques ont déjà apporté à cette transformation. Depuis les années 1980,

de nouvelles formes animées qui se différencient du récit linéaire ont émergé, non

pas dans les salles de cinéma, mais sur les tubes cathodiques de télévision et

d’ordinateurs : clip vidéo, jeux vidéo, animation flash, interfaces homme-machine…

Si ces nouvelles formes ont nourri le cinéma au point de révolutionner sa

construction (cinéma numérique), leur propre développement amène à réfléchir sur

la définition même du récit. Carole Desbarats, cinéaste, nous le confirme : « En tout

cas, l’enjeu du numérique est bien dans ce rapport au linéaire. Mais tout ne se joue

pas dans le domaine du cinéma, les jeux vidéo proposent un autre modèle : le jeune

spectateur à aujourd’hui intégré le pouvoir qu’il a sur l’histoire qu’on lui raconte. »

(Desbarats, [2004], p. 93)

« Le spectateur doit devenir acteur ». Il y a presque dix ans déjà, un ancien

ministre de la culture (Douste-Blazy) redéfinissait le rôle du visiteur du Musée du

Louvre. En raison de ses connotations de passivité et de culpabilité, la position

spectateur semble en effet mal convenir à la consommation culturelle à l’ère

numérique. Le spectateur, sollicité pour intervenir, entre donc en connectivité avec le

dispositif par le biais d’une interface qu’il active en se déplaçant, en se mouvant ou

par contact. Ce sont ses gestes qui vont enclencher (ou non, car l’inaction du

spectateur est elle aussi souvent prévue au stade de la réalisation) des bifurcations

dans la suite des récits, des modifications dans l’écoulement temporel, ou des

changements de scène. Cette possibilité d’intervention dans le cours du film

complète l’immersion du spectateur dans le dispositif. En effet, l’immersion a toujours

été un élément important du dispositif cinématographique. Dans le cadre d’un

dispositif hypermédia, comme les jeux vidéo, elle se renforce, au travers des

Page 69: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 69 -

processus d’identification aux personnages, comme devant l’écran de cinéma, mais

elle se déploie autrement. Nathalie Fougeras pense que les dispositifs hypermédias

rendent le spectateur acteur : « L’immersion ici est plus sensorielle que psychique et

se renforce d’une participation pratique du spectateur, avec tout son corps, au

monde virtuel. La prise en compte du temps resté sur une image ou celle de ses

gestes par un capteur sensitif font que le spectateur devient finalement l’acteur de

son propre geste. » Des gestes précis peuvent en effet être guidés par une

consigne : pour le DVD, la connaissance du module de contrôle (télécommande) et

son apprentissage rendu ludique par les interfaces animées.

Page 70: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 70 -

III-3 Du film au concept « L’arrivée du DVD a des conséquences révolutionnaires à mes yeux, sur un plan

politique : elle permet de sortir massivement d’un rapport à l’œuvre issue de l’idée

implicite, partagée par les cinéastes et les cinéphiles, que l’histoire avait un

sens.(…)La sortie du rapport de passivité du spectateur quand la lumière s’éteint, la

sortie de la situation de maîtrise du temps accordée au réalisateur, aux

« producteurs », change le rapport au monde, à la fiction, etc.…C’est plus important

que la transposition sur un nouveau support des films classiques. » Ainsi Romain

Goupil commente t-il la « désacralisation » du cinéma qu’effectue le DVD vidéo.

(Goupil, [2002], p. 94)

Avec le DVD, l’œuvre n’est plus dans le définitif, mais plutôt une dilution de ce

définitif, une parcellisation, une segmentation. Si la sortie cinéma était jusqu’alors

l’essence même de l’œuvre cinématographique, elle n’est aujourd’hui qu’un point de

départ. Le film devient le noyau central, l’élément narratif, d’un univers filmique. Cet

univers est enrichi et détaillé par les bonus et il est international avec le multi

langues. Chez DVD Maker, studio de conception DVD, on voit le DVD comme une

interface d’accès à un univers : « La grande capacité de stockage du support permet

d’ajouter des contenus divers en relation avec le film. Notre travail est de rendre cet

assemblage cohérent, à travers un habillage audiovisuel, mais aussi narratif, de

manière à créer un univers du film »1. Le DVD prend parfois même l’apparence d’une

clé ou d’une porte; certains bonus DVD-rom contiennent des clés électroniques qui

permettent d’accéder à des contenus spéciaux sur internet.

Le modèle Hollywoodien tend vers le schéma suivant : le film est au cœur

d’une culture – une industrie – du loisir, il doit donc se développer des relations

directes avec les autres acteurs de l’ « entertainment ». L’exemple type est

Dreamworks, la major californienne créée par Steven Spelberg, Jeffrey Katzenberg

et David Geffen. Cinéma, animation et Musique sont réunis sous le même studio

pour gagner en productivité et en cohérence : un département s’occupe de la 1 Interview de Guillaume Colas, D.A chez DVD MAKER par Gilles Cognet en juillet 2004, dans le cadre de ce mémoire

Page 71: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 71 -

réalisation du film pendant qu’un autre développe le jeu vidéo, ou la musique. Jean

Michel Frodon remarque à ce sujet « qu’il existe à présent une corporation nouvelle,

susceptible de travailler pour les deux départements, celles des concepteurs

designers. » (Frodon, [2002], p. 86) Les produits culturels deviennent multimédia,

multi plates formes. Si dans cette « nébuleuse culturelle » le rôle économique

apparaît évident, il faut néanmoins reconnaître une vraie sincérité à beaucoup de

réalisateurs. Reprenons le cas Matrix : Si le film est à la base un scénario, (lui-même

fortement inspiré d’autres scénarios), il devient cinéma à travers la projection d’une

trilogie, puis devient adaptation vidéo en DVD, proposant des versions longues et

ultra documentées (bonus). Voilà le noyau central Matrix. Puis les frères Wachowski

décident d’émanciper l’histoire du film, et supervisent la réalisation de courts

métrages d’animation se greffant sur l’histoire. Parallèlement, un jeu vidéo est

développé, mélangeant univers 3D et séquences cinématographiques

« traditionnelles » permettant d’explorer de nouvelles dimensions de l’univers matrix,

en tant cette fois que spect-acteur. Enfin, cette nébuleuse Matrix est alimentée à

grand renfort de soutient internet : site officiel explorant la diégèse, etc.… 1

Les réalisateurs sont-ils alors amenés à devenir des concepteurs ? Si certains

refusent catégoriquement de concevoir le film à travers le DVD, d’autres se

réjouissent de cette émancipation du film.

Au croisement de plusieurs compétences : graphisme, vidéo et multimédia,

l'authoring est un métier à forte responsabilité qui joue un rôle important dans la

deuxième vie des longs-métrages : leur sortie en DVD. Placé en bout de la chaîne de

l'industrie cinématographique, cette activité présente pour Éric Le Boloc'h des

analogies avec le clip vidéo, format qui a progressivement pris une importance

décisive pour l'industrie du disque. « Le monde du cinéma s'intéresse de plus en plus

au DVD. Il n'est pas impossible de penser qu'un jour prochain, l'authoring soit pris en

charge par le producteur du film lui-même. »2 Une évolution décisive qui autoriserait

encore plus de créativité…Ainsi, Gaumont Vidéo a laissé carte blanche à Manuel

Boursinhac pour la conception du DVD de son film, La Mentale, afin qu’il intègre

dans son DVD ce qu’il désire apporter au spectateur. Le réalisateur a une vision

particulière du support, du moins, dans le cas de son film, La Mentale. Le scénario

1 Cf l’étude de Matrix en annexe 2 Interview issue de l’article L’authoring DVD du site pixelcréation.fr

Page 72: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 72 -

particulier de son œuvre (le milieu du banditisme) lui a valu des critiques acerbes de

la part de certains magazines ou quotidiens, qui ont quelque peu atteint le

réalisateur. Si le public a, en grande partie, suivi ce mythe des voyous porté à l’écran

par un casting de rêve, il n’en reste pas moins que Boursinhac estime que son film

n’a peut-être pas été compris comme il aurait du. Pour lui, le DVD apparaît alors

comme un « droit de réponse » à son film, qui dit-il a peut-être « subi une mauvaise

lecture ». De ce fait, il lui procure la chance de « remettre les pendules à l’heure, en

donnant un nouvel éclairage et des indications inédites qui permettent de mieux

saisir ma démarche et celle de Bibi Nacéri (le scénariste) ». De plus, Manuel

Boursinhac nous confie qu’il est toujours appréciable, pour un réalisateur, de prendre

du recul par rapport à sa propre œuvre, ce à quoi sert aussi le DVD.1 Et le résultat

est réussi : le DVD de la mentale est devenu le prolongement de l’œuvre, un

complément de l’univers dépeint. En regardant la façon dont sont construits les deux

disques, on se rend compte de la dualité entre le thème du film (dramatique et

violent) et l’histoire de famille qui se cache derrière la pellicule. Le DVD stockant le

film arbore un menu bleu, glacial : l’univers des voyous. Le DVD de bonus est, lui,

construit autour d’un menu d’accueil au tons chauds : l’univers de la famille. Outre

l’authoring élaboré, le DVD présente des documentaires et interviews qui expliquent

la position de l’auteur, des guides d’analyse du film, et des scènes inédites. Il

convient de préciser que le réalisateur a prémixé et étalonné les quatorze séquences

spécialement pour le DVD (pas question de présenter un rush timecodé), les a

introduites et les a commentées. Boursinhac déclare parfaitement comprendre les

réalisateurs qui tournent des scènes uniquement pour le DVD, ou en pensant, lors de

la préproduction, à ce support. Pareillement, Christophe Gans, déclare penser au

DVD dès la préproduction, après ses différentes expériences cinématographiques,

Crying Freeman (Gans, [1995]) et Le pacte des Loups (Gans, [2001]). Et cet intérêt

pour le support DVD devient croissant chez les réalisateurs, qui n’hésitent plus à

penser la conception des bonus en production.

Pour la réalisation du DVD d’Immortel (Bilal, [2004]), Enki Bilal est entré en

complète collaboration avec le studio d’authoring DVD MAKER. Le réalisateur a

voulu prendre du recul par rapport à son film, notamment à travers une discussion

sur la Science Fiction entretenue avec le co-scénariste et une présentation de son 1 Issu de l’article « Le DVD, une seconde lecture de l’œuvre» du n° 475 de SONOVISION

Page 73: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 73 -

univers graphique, où l’artiste se filme en steadycam dans son atelier. « Le

réalisateur souhaitait développer des bonus variés sur l’univers d’Immortel, excuse

pour aller plus loin dans la discussion... » nous confie Guillaume Colas, Directeur

Artistique chez DVD Maker1. « Cette volonté d’exploiter le média DVD et de l’utiliser

pour réfléchir au film et au cinéma nous est toujours présente chez les réalisateurs

qui s’investissent dans l’édition DVD de leur film. Jean Pierre Jeunet, Olivier

Mégaton, Olivier Assayas, Enki Bilal ou bien encore Gilles Paquet-Brenner sont

parmi les réalisateurs qui se sont le plus investi parmi nos réalisations. Ils partagent

avec nous cette vision de développement du film, de son univers. »

« Les nouvelles technologies remettent en jeu le pouvoir de l’auteur sur son

œuvre, en même temps qu’elles redistribuent, en particulier dans la postproduction,

les différents rapports de pouvoir entre tous ceux qui concourent à l’existence du

film, jusqu’au spectateur dès lors qu’il peut ou pourra intervenir dans l’œuvre. Tout ce

qui faisait qu’un auteur avait les pleins pouvoirs sur sa création et de façon presque

millénaire. » (Mondzain, [2004], p. 98)

Dilué ou complété par des suppléments hétéroclites, le film devient le noyau

scénaristique d’un univers ramifié. Dans cette conceptualisation de l’œuvre, le

réalisateur devient auteur, de même que le spectateur devient auteur de sa

personnalisation de l’œuvre.

1 Interview réalisée en juillet 2004 par Gilles Cognet dans le cadre de ce mémoire

Page 74: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 74 -

IV Le DVD, un outil pour l’intelligence ?

Les bouleversements induits par les technologies de l'information et de la

communication, qu’ils soient d'ordre politique, culturel ou social sont indéniables. Ils

sont forgés par l’adoption de nouveaux outils que nous exploitons régulièrement. Si

le DVD vidéo souffre de son image d’objet ludique, culturel et commercial, il n’en

reste pas pour le moins un outil multimédia interactif dont l’usage reste

malheureusement cantonné à l’édition vidéo.

Outre la pédagogie cinéphilique qu’il développe, consciemment ou pas, à

travers les suppléments documentaires et le fétichisme de l’objet, le DVD vidéo ne se

contente pas de proposer « simplement » des contenus. L’outil technique est en lui-

même une solution pédagogique pour l’enseignement des images, pour

l’enseignement par l’image.

De plus, son utilisation qui se généralise, travaille l’ergonomie de navigation

virtuelle chez le spectateur. En complément de l’ordinateur, et des technologies

numériques de la communication, le DVD vidéo travaille les signes et les symboles

interactifs, les schématisations mentales, les nouveaux chemins que prend

l’intelligence, où le sujet coopère dorénavant avec des univers numériques

d’information « virtuelle. »

Page 75: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 75 -

IV-1 Le DVD, outil pédagogique

A travers l’interpellation du spectateur, l’invitation à posséder l’œuvre, la

décortiquer et la maîtriser, le DVD se révèle un outil d’apprentissage. Si les jeux

vidéo et les applications interactives classiques (cd-rom) avaient déjà prouvé leur

rôle dans la mise en place de nouveaux schémas cognitifs, la question du DVD

n’avait jusque là pas vraiment été abordée. S’agit-il seulement d’une « culture du

zapping » propre aux nouvelles générations qui exploitent les outils proposés pour

assouvir leur impatience ? Alain Bergala, cinéaste et enseignant à la Femis se

demande comment faire pour que cette circulation devienne un acte d’intelligence.

« La réponse que nous avons choisi avec nos DVD (éducatifs, pour apprendre le

cinéma, ndlr) consiste à rendre possible de se déplacer comme on veut entre les

scènes, mais une fois qu’on a choisi de voir une scène, on ne peut pas l’accélérer,

on est obligé de la voir en temps entier. C’est une façon de ne pas confondre

circulation et impatiente, puisqu’il est évident que dans une fonction éducative, il est

hors de question de favoriser l’impatiente. » Néanmoins Alain Bergala soulève une

distinction entre deux gestes que permet le DVD, à savoir de sélectionner un

fragment et d’accélérer ; « Le DVD ne relève pas du zapping, il relève d’une action,

d’une décision de celui qui a la télécommande, d’aller voir tel morceau du film, de

l’arrêter, et d’aller voir tel autre morceau. On est plus dans le registre de la grande

école contemporaine de l’impatience, ça relève de l’intelligence, ça relève du choix,

d’une maîtrise et d’un projet. » (Bergala, [2004], p. 49)

L’enseignement s’est donc rapidement tourné vers ce support : Le DVD-vidéo

facilite d’abord le travail des enseignants utilisateurs de l’audiovisuel éducatif ou de

ceux qui, comme en géographie, exploitent les images sous toutes leurs formes :

«Le statut de l’image animée est particulier au sein d’une double hiérarchie dans les

apprentissages : l’image dans son rapport au langage et à l’écrit ; mais aussi, l’image

animée dans son rapport à l’image fixe réputée plus sérieuse. Tableaux muraux,

images des manuels, films à vues fixes et beaucoup plus tard diapositives eurent en

effet une place reconnue au sein des apprentissages, voire au sein des débats

pédagogiques et didactiques […] La possibilité d’utiliser des images animées et de

les organiser autour de lieux, de thèmes et de notions, répond à un besoin spécifique

Page 76: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 76 -

pour l’enseignement de la géographie1. » Alain Bergala, alerte le Centre National de

Documentation Pédagogique sur les possibilités du DVD tout en gardant une

approche neutre du support : « Le choix du support DVD dans le volet cinéma du

Plan de cinq ans pour les arts et la culture à l’école est d’abord et avant tout un choix

de pensée pédagogique, et non une option moderniste ou techniciste. »2 (Bergala,

[2003])

L’accès simple, direct et immédiat à de nombreux documents indexés (courtes

séquences vidéo, images fixes de toutes natures, graphes et autres animations) sur

un ou plusieurs thèmes permet, sinon le remontage, du moins la mise en perspective

rapide de données jusqu’alors dispersées sur plusieurs supports. Si cet outil ne

saurait être assimilé à une simple rétro projection performante, il en possède

cependant les atouts : accompagnement et dynamisation du cours, mise en place de

démarches comparatives, insertion de séquences vidéo de courte durée ou d’images

fixes, aussi bien pour l’illustration que pour l’observation et l’analyse. Il peut tout

aussi bien être exploité individuellement par les élèves comme base de données sur

un ordinateur. « Le DVD permet un découpage logique du discours filmique linéaire

et facilite l’intégration de la vidéo sous forme de segments courts. »3 Cette

segmentation lui est parfois reprochée car elle fait perdre la vue d’ensemble du

document dont les séquences sont issues – ce dont l’enseignant devra tenir compte.

Le DVD-vidéo est donc un outil supplémentaire qui requalifie la lecture et l’analyse

d’images et s’ajoute à la panoplie de l’enseignant. Il ne remplace cependant ni la

diffusion de l’œuvre intégrale, ni le visionnage d’un long métrage dans une véritable

salle de cinéma.

Chez les professionnels de la création DVD, la question est arrêtée : « Le

DVD est assurément un outil pédagogique, je passe en ce moment même mon code

(permis moto, ndlr) grâce au DVD vidéo ! » déclare Guillaume Colas, Directeur

Artistique chez DVD MAKER.4 « Plus sérieusement, ce support grâce à son

ergonomie simple présente une bonne initiation aux univers interactifs… Je pense en

1 Francis Delarue, rapportant le Guide pédagogique du DVD Vidéo, Dossiers de l’Ecran Numérique, 2003 2 cf. articles du CNDP en annexes 3 Francis Delarue, rapportant le Guide pédagogique du DVD Vidéo, Dossiers de l’Ecran Numérique, 2003 4 Interview réalisée par Gilles Cognet en juillet 2004 dans le cadre de ce mémoire

Page 77: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 77 -

particulier aux adultes et personnes âgées qui n’utilisent jamais d’ordinateur, et qui

ont pu découvrir les concepts d’icônes cliquables avec le DVD. […] En plus de la

revendication éducative de certains bonus propre au contenu (quizzs,

documentaires), le DVD apporte grâce au multi langues un apprentissage des

langues étrangères ludique et apprécié. Mais je pense que cet aspect essentiel du

DVD, son caractère pédagogique, est malheureusement mis à défaut par les

éditeurs, qui privilégient du spectaculaire. »

Page 78: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 78 -

IV-2 Les nouveaux chemins de l’intelligence ?

Le DVD, en tant qu’outil numérique relevant du domaine de l’informatique,

développe donc de nouvelles facultés d’exploration informative et pédagogique. Ces

nouveaux modèles de « pensée objet » nous sont directement hérités de l’usage de

l’ordinateur. De façon plus générale, les nouveaux processus cognitifs que mettent

en place les technologies numériques trouvent leurs racines communes dans

l’informatique et les réseaux. Ainsi que le rappelle Derrick de Kerkhove dans

L'Intelligence des Réseaux, l'inventeur de l'Hyper Texte a fondé sa création sur la

nécessité dans laquelle il se trouvait de maîtriser et de contrôler l'hyper production

d'idées d'un cerveau en perpétuelle ébullition. Il pouvait ainsi suivre chaque méandre

de sa pensée, sans être victime des interruptions générées par de nouvelles

ramifications. Apparu dès 1965 , bien avant l'émergence du Web, l'Hyper Texte, qui

se définit comme « une écriture non-séquentielle avec liens contrôlés par le

lecteur », est devenu aujourd'hui une des composantes majeures de l'internet,

pratiquée de façon courante par des millions d'internautes. Mais cette délinéarisation

s’est répandue dans toute la communication, et dorénavant aussi à la communication

l’audiovisuelle. Le succès de ce mode de lecture ne repose pas seulement sur les

capacités du numérique à le rendre aisément accessible, mais aussi et surtout sur sa

parfaite correspondance avec le mode de fonctionnement naturel et spontané du

cerveau humain. Au contraire, la pensée linéaire, qui pour autant fonde très

largement notre culture, est un acquis, fruit d'un apprentissage et d'une pratique

imposés dès l'age de la scolarisation. Il est admis que seuls les esprits " créatifs " y

échappent, ceci constituant en soi la reconnaissance de la fécondité de la pensée

non-linéaire. (De kerkhove, [2000])

Ainsi Georges Vignaux, directeur de recherche au CNRS, fait–il l’analogie :

« Les nouvelles technologies de la communication et du symbolique (informatique,

médias, images, télécommunications) contribuent donc à instaurer de

nouvelles logiques de l’intelligence et de ses applications. Conjointement, les progrès

des neurosciences nous font davantage percevoir le fonctionnement de notre

cerveau. Ainsi connaît-on mieux les contributions réciproques des deux hémisphères

cérébraux, de même que les formes de coopération « modulaire » entre unités

Page 79: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 79 -

cérébrales, de même encore que les étonnantes capacités d’apprentissage et de

souplesse de récupération de notre système nerveux. Le cerveau humain apparaît

comme un extraordinaire modèle de coopération entre unités constitutives, ce dont

s’approchent nos dispositifs électroniques et de communication. Les nouveaux

dispositifs techniques qui voient le jour vont de plus en plus s’inspirer de ce que l’on

apprend et de ce que l’on sait du fonctionnement du cerveau (machines à

architectures parallèles et fonctionnements distribués) ; de même, des langages et

systèmes actuellement conçus (programmation par objets, hypertextes, modèles

neuromimétiques). De facto, ces nouveau dispositifs, ces nouvelles images, ces

nouveaux systèmes de navigation dans les textes, les banques de données, des

univers plus ou moins composites posent le problème crucial de l’acculturation du

public et de l’appropriation par les utilisateurs, car ils se fondent et s’instaurent

comme nouveaux usages, nouveaux régimes d’organisation et de régulation de

l’intelligence gérant le monde. Régimes fondés sur la souplesse, la labilité, le

passage parfois sans transition d’un univers à un autre, ou encore sur la gestion

simultanée de plusieurs univers conjoints. A l’image de nos nouvelles existences… »

(Vignaux, [2003], p. 203)

Tout en prenant garde à ne pas succomber à la tentation de prophétiser un

certain avenir qui serait induit par les nouvelles technologies, il reste sensé

d’observer l’avènement de certaines pratiques qui changent notre quotidien. Ce

concept relevé par Vignaux « d’univers conjoints » est l’un des enjeux essentiel de

cette médiation technologique. Le développement des réalités dites virtuelles et la

mutation des arts de la représentation ; si le cinéma a toujours été un report ou une

illusion de la réalité, il a toujours représenté une réalité à laquelle il fallait adhérer

pour pouvoir s’y projeter et vivre l’expérience cinématographique. La nature du film

est probablement en pleine redéfinition : le DVD vidéo nous invite à s’en rendre

compte, en tant qu’outil disponible et acteur de cette révolution numérique.

Page 80: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 80 -

Conclusion

Le DVD vidéo est un succès : jamais une offre technico-culturelle n’avait

connu un succès commercial qualitatif et quantitatif si rapide. (Une prédiction de 50%

des foyers équipés en France pour 20041.) Ce succès s’explique notamment par les

nouveautés du support : qualité d’image numérique, son spatial numérique,

suppléments complémentaires au film, universalité du support, configuration et

navigation interactive…

En bout de chaîne de l’exploitation cinématographique, le DVD vidéo plonge le

cinéma au cœur de l’expérience numérique, alors que la chaîne de production

cinématographique est encore en grande partie analogique. Le film est donc pensé

ou retravaillé pour ce support, et devient le noyau d’une réalisation numérique

multimédia interactive. A travers les suppléments proposés ou bien à travers les

menus de navigation, le DVD vidéo exporte les codes de la réalisation numérique

hors des effets spéciaux, de l’animation ou du jeux vidéo pour les injecter au cœur

de l’expérience Home cinéma. Le DVD devient alors le diffuseur privilégié de

l’imagerie numérique, mais aussi de l’ergonomie qui lui est propre. L’œuvre

cinématographique devient sujet à manipulation, à délinéarisation, à réinterprétation

et à conceptualisation. Loin de n’être qu’un support, le DVD représente une évolution

majeure pour le développement du cinéma numérique.

Ces bouleversements au sein de la pratique cinématographique privée

alimentent le débat d’un nouveau cinéma : sommes nous en train de vivre les

dernières années du cinéma tel que nous l’avons connu depuis des dizaines

d’années ? Le DVD vidéo créé une expérience audiovisuelle inédite, au croisement

du cinéma et du jeux vidéo. Le spectateur conditionne son visionnage et devient

auteur de sa navigation ; le film s’émancipe d’un conditionnement linéaire. Au-delà

du film, le DVD vidéo propose un univers filmique où chacun peut construire son

approche du film. Les réalisateurs et les éditeurs ont bien compris les enjeux de ce

support : ils s’investissent de plus en plus dans la conception de l’édition DVD, en

collaboration avec les studios d’authoring DVD.

1 Etudes Gfk

Page 81: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 81 -

Enfin, en tant qu’outil pédagogique, le DVD vidéo permet de participer à la

compréhension des changements induits par les nouvelles technologies sur notre

société : rapport à la réalité, aux objets, à l’image, aux symboles, à la virtualisation.

Les technologies numériques d’information se sont largement démocratisées au

quotidien, et le cinéma, art de la représentation et de la projection, est entré de plein

pied dans cette numérisation grâce au DVD vidéo.

Néanmoins, si les enjeux cinématographiques du DVD sont prometteurs, les

réalités économiques sont plus complexes. L’objet de ce mémoire ne se voulait pas

d’aborder les perspectives économiques de la filière numérique, mais il faudrait bien

évidemment les prendre en compte pour orienter l’avenir de ce support. Si les

acteurs culturels privilégient une exploration des contenus, les acteurs commerciaux

s’orientent vers une rentabilisation du produit. Toute la problématique actuelle de la

culture. Dans cette négociation, il reste encourageant d’observer l’engagement

passionné des studios d’authoring et des réalisateurs numériques. Ils restent les

éclaireurs et les pionniers du cinéma de demain.

Page 82: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 82 -

Repères Bibliographiques Ouvrages Spécialisés Cinéma et dernières technologies Sous la direction de Beau Frank, Dubois Philippe, Leblanc Gérard INA, DeBoeck Université, 1998 Du signe au virtuel Vignaux Georges Seuil 2003 Du trucage aux effets spéciaux Hamus-Vallée Réjane Corlet-télérama, 2002 La révolution Numérique dans la production audiovisuelle et cinématographique Landau Olivier & De Peslouan Gilles Dixit, paris 1996 Le Banquet imaginaire L’Exception, Groupe de réflexion sur le cinéma Gallimard 2002 Le cinéma sans la télévision / Le Banquet imaginaire 2 L’Exception, Groupe de réflexion sur le cinéma Gallimard 2004 Le film de fiction et son spectateur Metz Christian Communications 23, 1975 L'intelligence des réseaux De Kerkhove Derrick Odile Jacob, 2000 Où va le cinéma ? Sous la coordination de Scheinfeigel Maxime Cinergon, 2003 Scénarisation & multimédia Fournier Josée Eyrolle The end of celluloïd Hanson Matt Rotovision, 2004

Page 83: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 83 -

Rapports et Etudes Evolution du secteur de l’exploitation cinématographique Rapport d’Information du SENAT n° 308 / 05/2003 Images de synthèses et mondes virtuels techniques et enjeux de société Rapport d’Information du SENAT n° 169 / 1997-1998 La vidéo ; perception et attentes du public Service des études, des statistiques et de la prospective du CNC. 12/2003 Le contenu des DVD Service des études, des statistiques et de la prospective du CNC. 10/2003 Les français et la vidéo Service des études, des statistiques et de la prospective du CNC. 12/2003 Nouveaux écrans, nouveaux médias Marc Wélinski pour le CNC. 04/2003 Pratiques et économie du DVD (Bonus du Banquet Imaginaire) L’exception – sous la direction de Jean-Marc Vernier. 2002 Sites Internet et articles en ligne consultés www.cnc.frConsulté régulièrement www.linternaute.comConsulté régulièrement www.lexception.orgConsulté régulièrement http://www.objectif-cinema.comConsulté régulièrement http://www.gfkms.comConsulté régulièrement http://www.lexpress.fr/info/multimedia/dossier/dvd/dossier.asp?ida=366349Consulté le 15/12/2003 http://www.multimedialaune.net/index.php?action=article&id_article=38252&print=1Consulté le 20/05/2004 http://www.cinenow.com/fr/article.php3/id,1606/Consulté le 13/05/2004

Page 84: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 84 -

http://www.pixelcreation.com/news/news.asp?code=2140470188#00Consulté le 04/04/2004 http://sfstory.free.fr/films/sonnenfeld.htmlConsulté le 29/02/2004 http://www.mcxapc.org/cahier.php?a=display&ID=595Consulté le 12/02/2004 http://www.cndp.fr/tice/DossiersIE/tribune200203.htmConsulté le 20/04/2004 http://www.cadrage.net/dossier/cinemajeux/cinemajeux.htmlConsulté le 12/03/2004 http://www.lacinemathequedetoulouse.com/colloque/hybridation/index.htmlConsulté le 14/06/2004 http://www.matrix-happening.net/reflexions/index.htmConsulté le 19/04/2004 Littérature La Boucle Suzuki Koiji Fleuve noir, 2003 Neuromancien Gibson William La découverte, 1984 Filmographie DVD (non exhaustive) (Pour les films, mais surtout pour l’édition DVD : les bonus, les menus et le packaging) Matrix, Matrix Reloaded, Matrix revolutions, Animatrix - Editions Collector Andy & Larry Wachowski, 1999, 2003, 2003, 2003 Avalon Edition Collector Mamoru Oshii, 2001 Demonlover Olivier Assayas, 2002 Le fabuleux destin d’Amélie Poulain – Edition Collector Jean–Pierre Jeunet, 2001

Page 85: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 85 -

Cowboy Bebop Shinishiro Watanabe, 2003 L’auberge espagnole Cédric Klapish, 2002 Snowboarder Edition Collector Olias barco, 2002 Gangs of New York Edition Collector Martin Scorsese, 2002 Indiana Jones – Trilogy Collector Steven Spielberg , 1981, 1984, 1989, 2003 Alien Quadrilogy Collector Scott, 1979 - Cameron, 1986 – Fincher, 1992 – Jeunet, 1997 The nightmare before Christmas Henry Selick / Tim Burton, 1993 Pulp Fiction Quentin Tarantino, 1994 Le peuple de l’herbe – Edition Collector Claude Nuridsany & Marie Pérennou, 1996 Astérix & Obelix : Mission Cléopâtre Alain Chabat, 2002 Snatch Guy Ritchie, 2000 Fight Club David Fincher, 1999 House of 1000 corpses Rob Zombie, 2003 Shaolin Soccer Stephen Chow, 2001 James Bond - 007 Edition Spéciale Collection (L’intégrale, pour les suppléments et menus) MGM, 2000 Spun Jonas Akerlund, 2002

Page 86: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 86 -

Evil Dead 2 – Edition Collector Sam Raimi, 1987 Strange Days Kathryn Bigelow, 1995 Rammstein : LichtspielHaus Divers, 2003 Metallica : Cunning Stunts Whayne Isham, 1998 La salle de bain JL Moreau, 2004 Le bon, la brute et le truand Sergio Léone, 1966 Il était une fois dans l’Ouest Edition Collector Sergio Leone, 1968 Le nom de la rose Edition Collector JJ Annaud, 1986 Buena Vista Social Club Edition Collector Wim Wenders, 1999 Le pacte des Loups Edition Collector Christophe Gans, 2001 Le projet Blair Witch D. Myrick & E. Sanchez, 1999 Les Temps Modernes Charles Chaplin, 1936 Le Seigneur des Anneaux I, II & III Peter Jackson, 2001/2002/2003 Ludographie Enter the matrix Atari, 2003 In Memoriam Lexis numérique / Ubisoft, 2003

Page 87: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 87 -

Glossaire Analogique : Signaux susceptibles de varier de manière continue et pouvant prendre une infinité de valeurs comprises entre deux limites absolues. Contrairement au numérique, cette technologie présente l'inconvénient de ne pas restituer fidèlement l'image ou le son mais seulement de manière analogue. Authoring : Programmation d’un produit multimédia à navigation, construction de son arborescence et de son interactivité. Par extension, l’authoring désigne dorénavant la conception DVD. Les studios de conception DVD sont couramment appelés studios DVD, ou studio d’authoring.

Betacam Digital: (en français BetaNum). Le format Betacam Digital est mis sur le marché par Sony en 1994. Il s'agit d'un format en composantes numériques qui est appelé à remplacer le Betacam SP pour toutes les productions très haut de gamme ainsi que pour certains besoins cinématographiques.

Compositing : Association de couches graphiques diverses de manière à obtenir une image composite finale. Le travail est effectué dans un logiciel d’infographie. DV : (Digital Video) format numérique de vidéo au standard PAL. Utilisé par les caméscopes numériques, chez le grand public, mais aussi dans le milieu professionnel via le DVcam, une version plus élaborée développée par Sony. DVD : (Digital Versatil Disc) Le format DVD est un support vidéo apparu en 1995. (Voir partie I, le DVD vidéo) Femis : Ecole nationale supérieure des métiers de l’image et du son HD : (High Definition) format numérique de vidéo, appelé à se démocratiser pour le cinéma et le broadcast. La variante la plus utilisée est le HDcam de Sony. Hypermédia : Extension de l'hypertexte à des données multimédias, permettant d'inclure des liens entre des éléments textuels, visuels et sonores. Mpeg2 : (Motion Picture Expert Group 2) Standard de compression vidéo numérique, utilisé notamment pour le DVD, la TV numérique, le SVCD et certains caméscopes.

Multimedia : Technologie de l'information permettant l'utilisation simultanée de plusieurs types de données numériques (textuelles, visuelles et sonores) à l'intérieur d'une même application ou d'un même support, et cela, en y intégrant l'interactivité apportée par l'informatique.

Réalisation numérique : technique de réalisation cinématographique qui exploite l’ordinateur pour réaliser le produit audiovisuel. La photographie peut prendre part au projet, mais la création numérique reste prépondérante.

Page 88: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 88 -

Steadycam : Caméra de poing. (Non à l’épaule) Télécinéma : formatage d’un support film au support vidéo. Tracking : Analyse d’une scène filmée par un logiciel qui détecte les positions et mouvements de chaque élément. Ces données permettent notamment d’ajuster les effets numériques en postproduction. VHS : (Vidéo Home System). Système d’enregistrement vidéo analogique sur cassettes développé par JVC en 1975.

Page 89: Mémoire professionnel de MaîtriseEn premier lieu Virginie SPIES, Enseignante et Maître de conférence à l’Université d’Avignon, pour ses conseils et son suivi de mémoire

- 89 -

Table des annexes Annexe 1 : DVD MAKER

- Analyse institutionnelle de la structure de stage effectué en Maîtrise - DVD Maker, les fabuleux dessins d’Amélie Poulain (Sonovision 01/2002) - DVD Maker, l’union fait sa force ! (Sonovision, 02/2002) - DVD maker et pioneer en symbiose (Sonovision 02/2004)

Annexe 2 : Cinéma & Nouvelles Technologies

- Cinéma & nouvelles technologies – Matrix (www.cadrage.net 02/2003) Annexe 3 : SONOVISION

- Edition DVD, le partage de la galette (Sonovision 11/2003) Annexe 4 : L’ECRAN NUMERIQUE

- Eloge pédagogique de l’extrait (www.cndp.org) - Des équipements pour quoi faire ? (www.cndp.org) - Le DVD vidéo arrive à l’école (www.cndp.org)