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Modèle de prévision pour la gestion en temps réel : application aux réseaux d’assainissement Abderrahman Assabbane et Saad Bennis Résumé : Le travail présenté ici a pour objectif le développement d’un modèle de prévision des débits dédié à la ges- tion en temps réel. Le modèle proposé repose sur la notion de fonction de transfert pour un système linéaire identifiée à l’aide de l’algorithme du filtre de Kalman. Dans un premier temps, le modèle de fonction de transfert a été rattaché au modèle semi-empirique de Muskingum puis a été modifié pour éliminer sa composante autorégressive. L’algorithme du filtre de Kalman permet de réajuster les paramètres du modèle proposé à la réception de chaque nouvelle mesure en fonction des erreurs de prévision constatées en temps réel. Afin d’analyser la performance du modèle proposé, ses ré- sultats ont été comparés à ceux obtenus à partir du modèle de l’onde dynamique et du modèle simplifié de l’onde ciné- matique. En l’absence de valeurs mesurées de débit en aval correspondant à l’hydrogramme d’entrée, les résultats du modèle de l’onde dynamique ont été utilisés comme valeurs de référence pour qualifier la performance des autres mo- dèles. Ces résultats ont aussi été utilisés, après avoir été bruités, pour simuler des valeurs mesurées et alimenter « en temps réel » l’algorithme d’identification de la fonction de transfert afin de réajuster, à posteriori, ses paramètres en fonction de ses écarts dans la prévision des débits. Les résultats obtenus par le modèle de la fonction de transfert concordent avec ceux du modèle dynamique par rapport aux trois critères de performance retenus. Le coefficient de Nash et le rapport entre les débits de pointe avoisinent dans tous les cas l’unité. Le déphasage entre les débits de pointe estimés par les deux modèles est négligeable. Mots clés : réseaux d’assainissement, gestion en temps réel, modèles de propagation des crues, prévision, fonction de transfert, filtre de Kalman. Abstract: The work presented here aims at developing a flow forecast model dedicated to real-time management. The proposed model is based on the notion of a transfer function for a linear system identified through the Kalman filter al- gorithm. In a first step, the transfer function model is linked to the Muskingum semi-empirical model; then it is modi- fied to eliminate the autoregressive component. The Kalman filter algorithm allows the parameters of the proposed model to be updated upon the reception of each new measure with respect to the forecast errors observed in real time. To analyze the performance of the proposed model, its results are compared with those obtained using the dynamic wave model and the simplified kinematic wave model. Because of the absence of measured downstream flow values corresponding to the input hydrograph, the results from the dynamic wave model are used as reference values to evalu- ate the performance of the other models. These results are also used with the addition of noises to simulate measured values and feed, in “real-time,” the identification algorithm of the transfer function in order to adjust, a posteriori, its parameters according to its differences in the flow prediction. The results obtained by the transfer function model agree with those obtained by the dynamic model following the three performance criteria employed. The Nash coefficient and the ratio between the peak flows are close to unity in all of the cases. Also, the lag between the peak flows estimated by the two models is negligible. Key words: waste water networks, real-time management, flow propagation models, forecast, transfer function, Kalman filter. [Journal Translation] Assabbane et Bennis 337 1. Introduction Une des conditions essentielles à l’opération d’un réseau d’assainissement en mode de gestion prédictif intégré est la disponibilité d’un modèle fiable de prédiction des débits. Les autres conditions sont la disponibilité d’un réseau de té- lémesure des niveaux et des débits et la possibilité de con- trôler le chemin emprunté par l’eau à travers le stockage, le délestage ou la dérivation. La gestion en mode prédictif inté- gré permet ainsi de minimiser les débordements et la pollu- tion du milieu récepteur. En hydrologie urbaine, le modèle de prévision simule nor- malement deux phénomènes qui se succèdent dans le temps. Can. J. Civ. Eng. 27: 327–337 (2000) © 2000 CNRC Canada 327 Reçu le 17 mars 1999. Révision acceptée le 13 octobre 1999. A. Assabbane et S. Bennis. 1 École de technologie supérieure, Département de génie de la construction, 1100, rue Notre-Dame Ouest, Montréal, QC H3C 1K3, Canada. Les commentaires sur le contenu de cet article doivent être envoyés au directeur scientifique de la revue avant le 31 août 2000. 1 Auteur correspondant (e-mail : [email protected]).

Modèle de prévision pour la gestion en temps réel : application aux réseaux d'assainissement

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Page 1: Modèle de prévision pour la gestion en temps réel : application aux réseaux d'assainissement

Modèle de prévision pour la gestion en tempsréel : application aux réseaux d’assainissement

Abderrahman Assabbane et Saad Bennis

Résumé: Le travail présenté ici a pour objectif le développement d’un modèle de prévision des débits dédié à la ges-tion en temps réel. Le modèle proposé repose sur la notion de fonction de transfert pour un système linéaire identifiéeà l’aide de l’algorithme du filtre de Kalman. Dans un premier temps, le modèle de fonction de transfert a été rattachéau modèle semi-empirique de Muskingum puis a été modifié pour éliminer sa composante autorégressive. L’algorithmedu filtre de Kalman permet de réajuster les paramètres du modèle proposé à la réception de chaque nouvelle mesure enfonction des erreurs de prévision constatées en temps réel. Afin d’analyser la performance du modèle proposé, ses ré-sultats ont été comparés à ceux obtenus à partir du modèle de l’onde dynamique et du modèle simplifié de l’onde ciné-matique. En l’absence de valeurs mesurées de débit en aval correspondant à l’hydrogramme d’entrée, les résultats dumodèle de l’onde dynamique ont été utilisés comme valeurs de référence pour qualifier la performance des autres mo-dèles. Ces résultats ont aussi été utilisés, après avoir été bruités, pour simuler des valeurs mesurées et alimenter « entemps réel » l’algorithme d’identification de la fonction de transfert afin de réajuster, à posteriori, ses paramètres enfonction de ses écarts dans la prévision des débits. Les résultats obtenus par le modèle de la fonction de transfertconcordent avec ceux du modèle dynamique par rapport aux trois critères de performance retenus. Le coefficient deNash et le rapport entre les débits de pointe avoisinent dans tous les cas l’unité. Le déphasage entre les débits depointe estimés par les deux modèles est négligeable.

Mots clés: réseaux d’assainissement, gestion en temps réel, modèles de propagation des crues, prévision, fonction detransfert, filtre de Kalman.

Abstract: The work presented here aims at developing a flow forecast model dedicated to real-time management. Theproposed model is based on the notion of a transfer function for a linear system identified through the Kalman filter al-gorithm. In a first step, the transfer function model is linked to the Muskingum semi-empirical model; then it is modi-fied to eliminate the autoregressive component. The Kalman filter algorithm allows the parameters of the proposedmodel to be updated upon the reception of each new measure with respect to the forecast errors observed in real time.To analyze the performance of the proposed model, its results are compared with those obtained using the dynamicwave model and the simplified kinematic wave model. Because of the absence of measured downstream flow valuescorresponding to the input hydrograph, the results from the dynamic wave model are used as reference values to evalu-ate the performance of the other models. These results are also used with the addition of noises to simulate measuredvalues and feed, in “real-time,” the identification algorithm of the transfer function in order to adjust, a posteriori, itsparameters according to its differences in the flow prediction. The results obtained by the transfer function model agreewith those obtained by the dynamic model following the three performance criteria employed. The Nash coefficient andthe ratio between the peak flows are close to unity in all of the cases. Also, the lag between the peak flows estimatedby the two models is negligible.

Key words: waste water networks, real-time management, flow propagation models, forecast, transfer function, Kalmanfilter.

[Journal Translation] Assabbane et Bennis 337

1. Introduction

Une des conditions essentielles à l’opération d’un réseaud’assainissement en mode de gestion prédictif intégré est ladisponibilité d’un modèle fiable de prédiction des débits.Les autres conditions sont la disponibilité d’un réseau de té-lémesure des niveaux et des débits et la possibilité de con-trôler le chemin emprunté par l’eau à travers le stockage, ledélestage ou la dérivation. La gestion en mode prédictif inté-gré permet ainsi de minimiser les débordements et la pollu-tion du milieu récepteur.

En hydrologie urbaine, le modèle de prévision simule nor-malement deux phénomènes qui se succèdent dans le temps.

Can. J. Civ. Eng.27: 327–337 (2000) © 2000 CNRC Canada

327

Reçu le 17 mars 1999.Révision acceptée le 13 octobre 1999.

A. Assabbane et S. Bennis.1 École de technologiesupérieure, Département de génie de la construction, 1100,rue Notre-Dame Ouest, Montréal, QC H3C 1K3, Canada.

Les commentaires sur le contenu de cet article doivent êtreenvoyés au directeur scientifique de la revue avant le 31 août2000.

1Auteur correspondant (e-mail : [email protected]).

Page 2: Modèle de prévision pour la gestion en temps réel : application aux réseaux d'assainissement

Le modèle hydrologique consiste à transformer les hyéto-grammes de précipitation en hydrogrammes de ruissellementà l’exutoire des sous-bassins versants. Le modèle hydrau-lique permet de faire le laminage des crues à l’intérieur duréseau d’assainissement. Dans le présent travail, nous som-mes principalement concernés par le modèle hydraulique,même si la méthodologie proposée peut s’appliquer au mo-dèle hydrologique.

Contrairement aux phénomènes de ruissellement de sur-face qui font intervenir des processus physiques mal connus,la propagation des ondes de crues obéit à des lois dérivéesde la mécanique des fluides représentées par les équationsde Saint-Venant :• l’équation dynamique traduit la conservation de la

quantité de mouvement :

[1]1g

Ut

UUx

hx

i i¶¶

+ ¶¶

æ

èç

ö

ø÷ = - ¶

¶+ -f e

• l’équation dite de continuité traduit la conservation de lamasse et s’écrit :

[2]¶¶

+ ¶¶

=At

Qx

0

où x représente l’abscisse le long de la conduite (m);t, letemps (s);g, l’accélération de la pesanteur (m/s2); U, la vi-tesse d’écoulement (m/s);h, la profondeur (m);i f, la pentedu fond (m/m);ie, la pente de la ligne d’énergie (m/m);A, lasection mouillée (m2); Q, la débit (Q = UA) (m3/s).

La résolution numérique des équations de Saint-Venant sefait généralement à l’aide de schémas de différences finiesimplicites ou explicites (Chocat 1997). Sur le plan pratique,ces deux équations représentent le modèle mécaniste de pro-pagation de crues le plus complet. Ce modèle sera utilisédans le présent travail comme référence pour qualifier les ré-sultats obtenus par d’autres modèles.

Selon les caractéristiques d’écoulement et les conditionsaux limites, on peut négliger certains termes de [1] et obtenirdes modèles simplifiés de propagation de crues. Le modèlede l’onde cinématique consiste à négliger les termesd’accélérations temporelle et convective ainsi que la pentede la ligne d’eau devant la pente du fond et à ramener [1]sous la forme (Chocat 1997) :

[3] ie = i f

L’équation de continuité est gardée sous sa forme initiale,puis résolue par différences finies (French 1987). Le modèlede l’onde cinématique constitue le modèle mécaniste le plussimple de propagation des crues. Le modèle de Muskingumest une variante empirique du modèle précédent. Il combinel’équation de continuité, écrite pour un volume de contrôlemacroscopique sous la forme :

[4]d

damont avalV t

tQ t Q t

( )( ) ( )= -

avec une équation de stockage à deux paramètresK et X quirelie le volume stocké à une combinaison linéaire des débitsentrant et sortant :

[5] V t K XQ t X Q t( ) ( ( ) ( ) ( ))= + -amont aval1

Selon le schéma de discrétisation retenu, plusieurs formu-lations peuvent être obtenues, la plus classique et la plus ré-pandue est (Chocat 1997) :

[6] Q C Q C Q C Qt t t t t taval amont amont aval= + +- -0 1 2D D

où C0, C1, et C2 sont des paramètres fixes de calibration quis’expriment explicitement en fonction deK et X.

On vient d’exposer trois modèles de laminage de crues, decomplexités différentes. En réalité, il existe une multitude demodèles de laminage en fonction du type d’approche uti-lisée, stochastique versus déterministe, des phénomènes phy-siques pris en compte et de la méthode de résolution retenue.

L’objectif principal du travail présenté ici est le dévelop-pement d’un modèle de prévision des débits qui satisfait auxexigences suivantes : (i) posséder une précision raisonnable;(ii ) être rapide d’exécution; (iii ) s’intégrer facilement dans leschéma global d’optimisation.

Le premier point n’est pas à démontrer et se passe decommentaires. Quant à la rapidité d’exécution, elle est es-sentielle à la gestion en temps réel et permet de maximiserla marge de manoeuvre pour la prise de décision etl’opération des systèmes de contrôle et de détournement desflux. La récursivité des algorithmes utilisés permetd’atteindre ce but tout en évitant de stocker les données an-térieures et de refaire les traitements à chaque pas de tempspour réajuster le modèle de prévision à la réception dechaque nouvelle mesure. Enfin, le dernier point signifie quele modèle hydraulique doit fonctionner en harmonie avec lesautres procédures d’optimisation de la gestion en temps réel.

Malheureusement aucun des modèles exposés plus haut nesatisfait à toutes ces exigences. À titre d’exemple, il est in-concevable d’intégrer le modèle de prévision hydrauliquebasé sur les équations complètes de Saint-Venant dans laprocédure globale d’optimisation qui fournit les consignespour minimiser à chaque pas de temps les débordements etles inondations en fonction des mesures acquises en tempsréel.

2. Développements théoriques

Le modèle de Muskingum peut se généraliser sous laforme du modèle linéaire de type fonction de transfert sui-vant (Box et Jenkins 1976) :

[7] Q C Q D Qk t ijk

i

N

j

M

j t i t b ik

i

L

jk, ,

aval amont= +==

- -=

åå å11 1

D k t i t k tV, ,- +Daval

L’indice k réfère à la section de la conduite, en aval, oùl’on prédit le débit. Les paramètresN et L réfèrent respecti-vement à l’ordre des modèles régressif et autorégressif choi-sis, ils valent respectivement 2 et 1 dans le modèle deMuskingum. Le paramètreM réfère au nombre de sectionssituées en amont de la sectionk et dont le débit sert de va-riable prédictive, il vaut 1 dans le modèle de Muskingum.Les coefficientsCij

k et Dik sont respectivement les coefficients

des modèles régressif et autorégressif. Le paramètrebjk re-

présente le temps de réponse entre l’entrée «j » et la sortie« k ». Finalement,Vk,t représente le bruit de mesure et demodélisation propre à la section «k » à l’instant« t ». On lesuppose gaussien, de moyenne nulle et de variance cons-

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328 Can. J. Civ. Eng. Vol. 27, 2000

Page 3: Modèle de prévision pour la gestion en temps réel : application aux réseaux d'assainissement

tante. Cette composante aléatoire n’est pas prise en compted’une manière explicite dans le modèle de Muskingum.

Le modèle [7] est prédictif. En effet, une fois les paramè-tresCij

k, Dik et bj

k déterminés, on peut prédire le débit en avalpour l’instant futur « t », connaissant le débit en aval àl’instant présent «t – Dt » et les débits en amont jusqu’àl’instant « t – bj

k ». Ce modèle présente, cependant, l’incon-vénient de nous limiter à un seul horizon de prévisionDt sil’on veut utiliser uniquement des valeurs mesurées de débit.Pour prédire le débit en aval pour l’instant «t + Dt », le dé-bit à l’instant t au même endroit est nécessaire. Mais ce dé-bit n’est pas encore disponible à l’instant présent «t – Dt ».Comme dans le modèle de Muskingum, cette valeur peutêtre remplacée par le débit calculé au pas de temps précé-dent. Mais, cette extrapolation qui peut être acceptable pourun ou deux pas de temps relativement petits, peut affectersérieusement la précision lorsqu’elle est répétée sur un longhorizon de prévision. L’accumulation des erreurs de prévi-sion rend la précision de plus en plus médiocre au fur et àmesure que l’extrapolation s’étend dans le temps et qu’onutilise des valeurs calculées aux pas de temps précédents à laplace des valeurs mesurées en aval. D’un autre côté, les dé-bits mesurés dans les sections situées en amont sont des in-trants fiables reliés au débit en aval par l’intermédiaire demodèles déterministes issus de la mécanique des fluides. Deplus, le retardbj

k, lorsqu’il est important, peut permettre uneavance de prévision appréciable, permettant une marge demanoeuvre nécessaire à la gestion en temps réel. C’est pourcette raison qu’il est avantageux de modifier le modèle defonction de transfert [7]. Reprenons à titre d’exemple le mo-dèle simple de Muskingum :

[8] Q C Q C Q C Qt t t t t taval amont amont aval= + +- -0 1 2D D

On peut écrire la même équation pourQt t-Daval :

[9] Q C Q C Q C Qt t t t t t t t- - - -= + +D D D Daval amont amont aval

0 1 2 2 2

En substituant [9] dans [8] on obtient :

[10] Q C Q C C C Qt t t taval amont amont= + + -0 1 0 2( ) D

+ +- -C C Q C Qt t t t1 2 2 22

2D Damont aval

Ainsi on obtient aussi :

[11] Q C Q C C C Qt t t taval amont amont= + + -1 0 1 2( ) D

+ + + +- - -C C C C Q C C Q C Qt t t t t t2 0 1 2 2 1 22

3 23

3( ) D D Damont amont aval

Et l’on constate que :• les pondérations successives accordées àQt t-2D

aval , Qt t-3Daval ,

Qt t-4Daval , etc… qui sont respectivementC C C2

223

24, , , etc…

tendent vers zéro au fur et à mesure qu’augmente lenombre des substitutions puisque le coefficientC2 estinférieur à l’unité;

• le débit Qtaval dépend non seulement deQt

amont et Qt t-Damont

mais aussi deQt t-2Damont, Qt t-3D

amont, Qt t-4Damont, etc… et que les coef-

ficients de pondération associés à ces dernières valeursvont en décroissant au fur et à mesure qu’on recule dansle temps (effet d’effacement de la mémoire).Alors [11] peut être écrite sous la forme :

[12] Q A Q C Qt ii

N

t i tN

t N taval amont aval= +

=- -å

02D D

où A0 = C0; A1 = C1 + C0C2; A2 = C2 (C1 + C0C2); A3 = C22

(C1 + C0C2).On obtient ainsi la série récurrente suivante :A0 = C0; Ai =

Ci2

1- (C1 + C0C2) pour 0 < i < N; AN = C CN1 2

1-

On retrouve le modèle de Muskingum en posantN = 1.LorsqueN est assez grand,CN

2 tend vers zéro, puisqueC2est inférieur à l’unité, si bien qu’on peut négliger le secondterme du membre de droite de [12]. Comme il y a toujoursun temps de réponse entre la section d’entrée en amont et lasection de sortie en aval, la relation [12] s’écrit sous laforme :

[13] Q A Q Vt ii

N

t i t b taval amont= +

=- -å

0D

où la composanteVt tient compte de toutes les imperfectionsde modélisation, incluant le terme négligéQt N t- D

aval , et les er-reurs de mesure.

Finalement, si l’on considèreM sections en amont, [13]s’écrit pour chaque sectionK située en aval :

[14] Q A Q VK t ijK

i

N

j

M

j t b i t K tjK, , ,

aval amont= +==

- -åå01

D

où bjK est le retard entre l’entréej et la sortieK.

Ces développements mathématiques ont permis, d’unepart, de rattacher le modèle de fonction de transfert basé surle concept de boîte noire, et perçu en tant que tel, au modèlesemi-empirique de Muskingum, d’autre part, d’éliminer lacomposante autorégressive des deux modèles pour baser laprévision du débit en aval uniquement sur les débits mesurésen amont au profit d’une avance de prévisionbj

k égale autemps de réponse entre l’entréej et la sortiek.

3. Modèle utilisé

D’une manière plus explicite, [14] s’énonce pour chacunedes sectionsK où l’on prédit le débit à l’aide d’une seulestation en amont :

[15] Q A Q A QK tK

t bK

t b tK K, , ,aval amont amont= + +

- - -10 1 11 11 1 DK

+ +- -

A Q VNK

t b N t K tK1 1 1, ,Damont

Cette équation s’écrit sous forme matricielle :

[16] y = XTA + V

avec :

X Q Q Q Qt b t b t t b t tk k k

T amont amont=- - - - -[

, , , ,1 1 1 2 11 1 1D D K - -b N tk

1 D ]

A

A

A

A

A

y Q

k

k

k

iNk

k t= ×

×

×

é

ë

êêêêêêêêê

ù

û

úúúúúúúúú

=

10

11

12

[ ,aval] [ ],V VK t=

© 2000 CNRC Canada

Assabbane et Bennis 329

Page 4: Modèle de prévision pour la gestion en temps réel : application aux réseaux d'assainissement

4. Méthode de résolution

4.1. Méthode des moindres carrésDans la méthode des moindres carrés, on minimise la

somme des carrés des erreurs entre les valeurs calculées etcelles observées, soit :

[17] J X A yii

t

i= -=å ( )T minimum

1

2

où yi est la valeur du débit observé à l’instant «i », X AiT re-

présente la valeur du débit calculé, ett est le nombred’observations disponibles. Les équations normales sont lessuivantes :

[18] DA ii

t

i t ii

t

iJ X X A X Y( ) =é

ëêê

ù

ûúú

- == =å å

1 1

0T

Si la matrice X Xii

t

i=åé

ëêê

ù

ûúú1

T n’est pas singulière, la solution du

système d’équations [18] s’écrit :

[19] Ât = PtBt

P X X B X Yt ii

t

i t ii

t

i=é

ëêê

ù

ûúú

==

-

=å å

1

1

1

T ,

La méthode classique des moindres carrés possède lestrois inconvénients suivants : (i) elle ne tient pas compte dela variation des paramètres de régression en fonction dutemps; (ii ) les variables explicatives sont souvent corréléesentre elles, ce qui viole une des conditions de son applica-tion; (iii ) les erreurs de mesure obéissent rarement àl’hypothèse de bruit gaussien utilisée dans la solution par laméthode standard des moindres carrés. Ce dernier point estsource de biais dans l’estimation des paramètres du modèlede régression utilisé (O’Connel 1980).

D’autres algorithmes plus sophistiqués, comme les varia-bles instrumentales et le maximum de vraisemblance, appli-qués à des séries chronologiques entachées artificiellementd’un bruit aléatoire de moyenne nulle et de variance cons-tante, produisent des solutions non biaisées meilleures quecelles obtenues par la méthode standard des moindres carrés(Berrada et al. 1996).

Malheureusement, ces algorithmes n’apportent plusd’amélioration significative lorsqu’il s’agit d’un signal expé-rimental entaché d’un bruit réel de caractéristiques statisti-ques inconnues qui ne répondent plus aux hypothèsesidéales imposées (Bennis et Bruneau 1993).

L’analyse en composantes principales vient remédier à ladépendance mutuelle des variables explicatives (McCuen etSnyder 1986). La régression pseudo-orthogonale (Kachrooet Liang 1992) peut aussi être utilisée pour remédier au pro-blème de multicolinéarité des entrées du système. Elleconsiste à remplacer la matricePt par la matrice ¢Pt :

[20] ¢ = +é

ëêê

ù

ûúú=

åP X X It ii

t

i1

T b

où b est un facteur de poids arbitraire qu’il faut déterminerpar essai–erreur afin d’obtenir le moins d’oscillations possi-bles dans la réponse impulsionnelle etI est la matrice iden-tité. Malheureusement, ce facteur arbitraire de poids doitêtre obtenu par essai–erreur, alors que l’objectif est de déve-lopper une méthodologie automatisée et généraled’application. De plus, le facteur de poids utilisé dans la ré-gression pseudo-orthogonale introduit un biais dans la solu-tion, laquelle n’est plus optimale au sens des moindrescarrés. Ce biais, qui évolue dans le même sens que le facteurde poids, peut être modéré dans certaines situations (Bruenet Dooge 1984), mais peut devenir très important pourd’autres applications (Kachroo et al. 1992).

Un des moyens fiables pour éviter l’autocorrélation desrésidus et tenir compte de la variation des paramètres du mo-dèle en fonction du temps est l’algorithme du filtre de Kal-man. De plus, cet algorithme étant récursif et autoadaptatif,il est tout indiqué pour la gestion en temps réel.

4.2. Algorithme du filtre de KalmanUn des points forts du filtre de Kalman est l’utilisation, en

parallèle, d’informations provenant de deux sources indé-pendantes : l’équation d’état [21] et l’équation de mesure[22]. Ces équations peuvent être ramenées à la forme sim-plifiée suivante (Bergman et Delleur 1985) :

[21] At+1 = ft A t + Wt

[22] Zt = Ht At + Vt

où At est le vecteur d’état de dimensionN évalué à l’instantt. Il présente, dans le cadre de cette étude, les paramètres dela fonction de transfert.ft est la matrice de transition de di-mensionsN sur N, on la considère ici égale à la matriceidentité. Dans ce cas, le modèle [21] est celui de la marcheau hasard « random walk ».

Ht est la matrice de mesure de dimensionN sur L. Elleprésente, dans le cadre de cette étude, les débits des stationsd’entrée.

Zt est le vecteur des observations à l’instantt. De dimen-sion L = 1 dans cette étude, il représente le débit mesuré à lastation de sortie où l’on prédit le débit.

Wt est un vecteur de dimensionN représentant le bruit demesure; sa moyenne estW. On considère souventW = 0.

Vt est un vecteur de dimensionL qui représente le bruit demesure; sa moyenne estV .

Ces deux derniers vecteurs sont supposés être des bruitsblancs possédant les matrices de covariance suivantes :

[23] E[(Wt – W) ( ¢Wt – W)T ] = St t td ¢

[24] E[(Vt – V) ( ¢Vt – V)T ] = Rt t td ¢

où t et ¢t sont deux instants de mesure,E désigne l’espérancemathématique,d ¢t t est le symbole de Kronecker etT indiquela transposée d’une matrice.St et Rt désignent, respective-ment, les matrices de covariance des bruits de modélisationet de mesure. De plus, les deux bruits sont supposés être mu-tuellement indépendants, ce qui se traduit par l’équation :

© 2000 CNRC Canada

330 Can. J. Civ. Eng. Vol. 27, 2000

Page 5: Modèle de prévision pour la gestion en temps réel : application aux réseaux d'assainissement

[25] E V V W W t tt tT[( ) ( ) ]- ¢ - = " ¢0 et

En partant des conditions initialesÂo et Po, Po étant lamatrice de covariance deÂo, l’algorithme du filtre de Kal-man (Bennis et Bruneau 1993) permet d’obtenir les valeurssuccessives de la variable d’état, dans notre casAt :

[26] Ât,t–1 = Ât–1,t–1 + W

[27] Pt,t–1 = Pt t- -1 1, + St–1

[28] K P H H P H Rt t t t t t t t t= +- --

, ,[ ]1 11T T

[29] gt = Zt – HtÂt,t–1 – V

[30] Ât,t = Ât,t–1 + Ktgt

[31] Pt,t = (I – KtHt) Pt,t–1

où I est la matrice identité. D’une façon générale, la notationXt,t–1 signifie que la variableX est évaluée à l’instantt en sebasant sur les mesures effectuées jusqu’à l’instantt – 1. Ât,t–1exprime donc l’estimation de la variable d’état à l’instantten se basant sur les mesures effectuées jusqu’à l’instantt -1.

La mise en oeuvre du filtre de Kalman peut se faire dedeux manières différentes. (i) Une première option consisteà déterminerÂt et Pt à partir des données disponibles parl’utilisation de [19]. Ces valeurs seront réajustées à la récep-tion de chaque nouvelle mesure selon le processus identifi-cation–prévision à l’aide de [21]. (ii ) Un deuxième choix,moins évident, est basé sur l’interprétation statistique dePtcomme estimation de la matrice de covariance de l’erreurd’estimation deAt. On attribue alors àP0 une valeur qui doitrefléter le degré de confiance dans la valeur initialeÂ0. Dansle cas général où il n’y a pas d’informations surÂ0, on éta-blit de façon arbitraire queÂ0 = [0] et P0 est une matricediagonale de terme constant très élevé, par exemple 106.L’expérience montre que l’algorithme converge très vite decette manière. C’est cette deuxième option qui a été adoptéedans la mise en oeuvre de l’algorithme du filtre de Kalman.

4.3 Critères de performancePour évaluer la performance des modèles de prévision uti-

lisés on a recours à trois indicateurs.• Le premier est le rapport entre le débit de pointe calculé

par le modèle évalué et le débit de pointe mesuré.• Le deuxième indicateur est le décalage dans le temps en-

tre les débits de pointe calculé par le modèle évalué et ledébit mesuré.

• Finalement, le dernier critère est le coefficient de Nash :

[32] Nash= -- ¢

-

=

=

å

å1 1

2

1

2

( )

( )

i

t

i i

ii

t

q q

q q

où qi est le débit mesuré.¢qi est le débit prédit par le modèleévalué.q est la moyenne des débits mesurés. Les valeurs ducoefficient de Nash fournies dans la partie application sontcalculées à l’aide d’un exercice de simulation de la prévisionen temps réel. L’algorithme du filtre de Kalman fournit àchaque instant de simulation «t » un vecteurÂt basé sur laconnaissance des débits enregistrés en amont jusqu’à

l’instant t – bjk et du débit mesuré en aval à l’instant «t ».

Cette dernière valeur est remplacée dans la présente étudepar le débit fourni par le modèle de référence. Il est doncpossible de simuler la prévision du débit en aval à l’instant« t + 1 » à l’aide du modèle [16]. La valeur du débit fourniepar le modèle de référence à l’instant «t + 1 » est ensuiteutilisée pour calculer l’erreur de prévision qui servira à cal-culer le coefficient de Nash et à réajuster les coefficients dumodèle et prédire le débit en aval pour l’instant «t + 2 »[16]. Le coefficient de Nash est donc calculé, à priori, dansun contexte simulé de gestion en temps réel.

5. Application

Les trois modèles considérés ont été utilisés pour prédirela propagation d’une onde de crue dans l’intercepteur nordde la communauté urbaine de Montréal. Les intercepteurs dela CUM sont construits en tunnel dans le roc à des profon-deurs variant entre 15 et 50 m. Le diamètre de l’intercepteurNord, d’une longueur de 41 km, varie de 1800 à 4800 mm.La capacité de l’intercepteur Nord est de 44 m3/s. Sur lapartie du bassin (ouest de l’île) drainée par un réseau sépara-tif, les collecteurs sanitaires sont directement raccordés auxstructures de chute de l’intercepteur. Quant aux collecteursunitaires, (est de l’île), ils sont raccordés à l’intercepteur parl’intermédiaire d’ouvrages de régulation pouvant assurerl’utilisation maximale de la capacité de l’intercepteur et ins-tallés aux points de raccordement des collecteurs avec les in-tercepteurs. La structure de dérivation est constituée d’unefosse construite sous le radier du collecteur. Les dimensionsde cette fosse ont été établies pour dériver un certain débitdu collecteur vers l’intercepteur, par l’intermédiaire d’uneconduite située à un niveau légèrement inférieur à celui ducollecteur. Des vannes murales, situées dans la structure derégulation contrôlent l’apport à l’intercepteur en fonction dela capacité disponible dans celui-ci. Ensuite, l’eau empruntele puits de chute, dont la hauteur peut atteindre 30 m, ets’écoule vers l’intercepteur pour se diriger vers la stationd’épuration où elle sera traitée avant son déversement dansla Rivière des Prairies (Paquin 1986).

Le mode de gestion actuel de l’intercepteur est local. Ladécision de déverser en un point de régulation donné del’intercepteur n’est prise qu’en fonction du niveau d’eau ence point. Afin d’optimiser la régulation du système, il estpréférable d’envisager un mode de gestion intégré qui per-met de minimiser l’impact global sur le milieu récepteur,compte tenu de la vulnérabilité de chaque lieu de déverse-ment. Une telle optimisation nécessite d’une part, un modèlede prévision hydraulique et d’autre part, la connaissance desconcentrations en flux de polluants (matières en suspension,demande biologique en oxygène).

Afin d’analyser la performance du modèle proposé, ses ré-sultats ont été comparés à ceux obtenus à partir du modèlecomplet de l’onde dynamique représenté par les équationsde Saint-Venant et du modèle simplifié de l’onde cinéma-tique.

La formulation mathématique de ces deux modèles a étéexposée dans l’introduction. Leur mise en œuvre pratique aété accomplie grâce au logiciel SWMM (version 6.02) où ilssont incorporés. Le schéma numérique de résolution utilisé

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Rapport des débits de pointe Coefficient de NashDécalage dans le temps entre lesdébits de pointe

Événements

Modèledynamiquecontre fonctionde transfert

Modèledynamique contremodèle de l’ondecinématique

Modèledynamiquecontre fonctionde transfert

Modèledynamique contremodèle de l’ondecinématique

Modèledynamiquecontre fonctionde transfert

Modèle dynamiquecontre modèle del’onde cinématique

13-06-1975 0,99 0,81 0,99 0,95 00:01 (–) 00:03 (–)19-06-1975 1,00 0,78 0,99 0,93 00:03 (+) 00:03 (–)21-07-1975 1,01 0,75 0,99 0,93 00:02 (–) 00:05 (–)18-09-1976 0,99 0,78 0,99 0,94 00:02 (+) 00:13 (–)

Nota : (+) indique un décalage dans le temps avancé par rapport au modèle de référence; (–) indique un décalage dans le temps retardé par rapport aumodèle de référence.

Tableau 1. Résultat des critères de performance entre les modèles de laminage.

Fig. 2. Comparaison des modèles de laminage (événement de 13-06-1975).

Fig. 1. Localisation des régulateurs de l’intercepteur nord (Tirée de Nguyen et Osseyrane 1987).

Page 7: Modèle de prévision pour la gestion en temps réel : application aux réseaux d'assainissement

est basé sur la méthode de différences finies implicite (XP-SWMM 1993).

Comme le modèle de l’onde dynamique tient compte detous les phénomènes physiques importants de transfertd’onde, il servira de modèle de référence pour évaluer laperformance des deux autres modèles.

Les résultats du modèle de l’onde dynamique ont aussi étéutilisés pour simuler des valeurs mesurées et alimenter « entemps réel » l’algorithme du filtre de Kalman qu’on utilisepour identifier la fonction de transfert. Même si des mesuresde débit étaient disponibles en aval, il serait difficile de lesrépartir entre les différentes sections situées en amont pour

établir des relations entre une seule entrée et une sortie. Ceproblème peut être résolu en utilisant un modèle plus géné-ral qui prend en considération plusieurs entrées et une sortie[14]. Il faut cependant être conscient que dans ce cas,l’avance de prévision maximale possible est égale au tempsde retard minimal entre les différentes entrées et la sortie.

Il faut souligner que le modèle utilisé ici n’est pas dugenre conceptuel. Pour un modèle conceptuel on doit néces-sairement disposer d’une banque de données d’hydro-grammes mesurés qu’on départage normalement en deuxparties presque égales. Une première partie est utilisée pourcalibrer le modèle conceptuel. La seconde est utilisée pour la

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Fig. 3. Comparaison des modèles de laminage (événement de 19-06-1975).

Fig. 4. Comparaison des modèles de laminage (événement de 21-07-1975).

Page 8: Modèle de prévision pour la gestion en temps réel : application aux réseaux d'assainissement

validation de ce modèle. Dans le cas du modèle de la fonc-tion de transfert identifiée par le filtre de Kalman, la situa-tion est complètement différente. Les deux opérations decalibration et de validation du modèle sont indissociables. Àchaque pas de tempst, on utilise les mesures prises jusqu’àl’instant t pour calibrer le modèle puis l’utiliser pour faireune prévision pour les instantst + Dt, t + 2Dt, etc…. Ce sontces prévisions qu’on superpose aux valeurs mesurées, quin’ont pas été utilisées lors de calibration, pour valider le mo-dèle et évaluer les erreurs de prévision d’avanceDt, 2Dt,etc…. Il est par conséquent légitime de croire dans la vali-dité du modèle proposé s’il réussit de prédire à priori les va-leurs futures du débit généré par le modèle de l’ondedynamique. Pour rendre cette démarche plus saine sur leplan méthodologique et s’assurer de sa validité sur des don-nées mesurées, un bruit a été rajouté volontairement aux hy-drogrammes calculés par le modèle de l’onde dynamique.Ce bruit qui simule les erreurs de mesure est la superposi-tion d’un signal de distribution normale, de moyenne nulleet d’écart type constant et de quelques perturbations qui re-présentent des erreurs accidentelles.

Dans la partie application, on considère uniquement unhydrogramme de ruissellement arrivant au régulateur 7, Cu-rotte, (fig. 1) et on s’intéresse à l’évolution de cet hydro-gramme dans l’intercepteur Nord jusqu’au régulateur 18,situé 15 km en aval au niveau de la 83e Avenue (fig. 1).

L’hydrogramme d’entrée a été généré pour quatre évène-ments pluviométriques historiques grâce au modèle du réser-voir non linéaire du logiciel SWMM (Huber et Dickinson1988). Le tableau 1 montre la synthèse des résultats obtenuspour les quatre événements.

Les figures 2 à 5montrent l’hydrogramme d’entrée et leshydrogrammes prévus par les trois modèles au point de jonc-tion avec le régulateur aval. L’analyse de ces résultats nouspermet de tirer les conclusions suivantes :

(1) Le décalage moyen dans le temps entre le débit depointe à la sortie et à l’entrée est de 100 min. Ce temps quicorrespond au paramètrebk

1 dans [15] représente l’avance deprévision possible à l’aide du modèle de fonction de trans-fert;

(2) La réduction du débit de pointe de l’hydrogrammed’entrée est tellement prononcée que tout modèle de prévi-

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Fig. 5. Comparaison des modèles de laminage (événement de 18-09-1976).

Rapport des débits de pointe Coefficient de NashDécalage dans le temps entre lesdébits de pointe

Événements

Modèledynamiquecontre fonctionde transfert

Modèledynamique contremodèle de l’ondecinématique

Modèledynamiquecontre fonctionde transfert

Modèledynamique contremodèle de l’ondecinématique

Modèledynamiquecontre fonctionde transfert

Modèle dynamiquecontre modèle del’onde cinématique

13-06-1975 0,97 0,79 0,99 0,94 00:02 (–) 00:05 (–)19-06-1975 0,94 0,73 0,98 0,91 00:01 (+) 00:01 (–)21-07-1975 0,95 0,71 0,98 0,92 00:02 (–) 00:05 (–)18-09-1976 0,95 0,75 0,99 0,93 00:02 (+) 00:17 (–)

Nota : (+) indique un décalage dans le temps avancé par rapport au modèle de référence; (–) indique un décalage dans le temps retardé par rapport aumodèle de référence.

Tableau 2. Résultat des critères de performance entre les modèles de laminage : présence de bruit.

Page 9: Modèle de prévision pour la gestion en temps réel : application aux réseaux d'assainissement

sion basé sur le transfert d’onde avec vitesse constante ouvariable doit être écarté;

(3) Le modèle de fonction de transfert proposé reproduitfidèlement les prévisions obtenues à partir du modèle del’onde dynamique selon les trois critères de performance uti-lisés. En effet, le rapport entre les débits de pointe préditspar les deux modèles se rapproche dans tous les cas del’unité, avec une valeur moyenne de 1. Il en est de mêmepour le décalage entre les débits de pointe dont la valeurmoyenne est de 2 min et le coefficient de Nash qui est tou-jours égal à 0,99.

(4) La concordance entre les résultats des modèles dyna-mique et cinématique est un peu moins concluante que pourle cas précédent. Bien qu’il n’y ait aucun effet de refoule-ment, ni de maillage dans le système étudié, les résultats dumodèle de l’onde cinématique s’écartent d’une manière as-sez significative des résultats fournis par le modèle dyna-mique. Le rapport moyen entre les débits de pointe estiméspar les deux modèles est de 0,78. Le décalage moyen dans letemps entre les débits de pointe est de 6 min. Le coefficientde Nash moyen est de 0,94 comparativement à 0,99 dans lecas précédent.

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Fig. 6. Comparaison des modèles de laminage : présence de bruit (événement de 13-06-1975).

Fig. 7. Comparaison des modèles de laminage : présence de bruit (événement de 19-06-1975).

Page 10: Modèle de prévision pour la gestion en temps réel : application aux réseaux d'assainissement

(5) Les prévisions obtenues par le modèle de fonction detransfert ne sont pas biaisées par rapport à celles obtenuespar le modèle de l’onde dynamique. Les débits de pointe nesont pas systématiquement sous estimés ni surestimés. Ainsi,le rapport entre les débits de pointe obtenus par les deux mo-dèles sont presque autant de fois supérieurs qu’inférieurs àl’unité. Il en est de même pour le décalage entrel’occurrence des débits de pointe qui est autant de fois posi-tif que négatif.

(6) Ces conclusions sont différentes dans la comparaisonentre les modèles de l’onde cinématique et dynamique. Il y adans ce cas un biais évident dans l’estimation du débit de

pointe et du décalage dans le temps entre les pointes desdeux hydrogrammes. Ainsi, les débits de pointe sont systé-matiquement sous-estimés par le modèle de l’onde cinéma-tique et le temps d’occurrence de ces débits succède celui del’onde dynamique.

Comme les valeurs de débit mesurées sont toujours enta-chées d’erreur, un bruit a été rajouté volontairement aux hy-drogrammes calculés par les équations de Saint-Venant pourles quatre événements. Ces hydrogrammes bruités ont en-suite été utilisés pour simuler des valeurs mesurées et ali-menter en « temps réel » l’algorithme du filtre de Kalmanpour identifier la fonction de transfert. Le bruit considéré est

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Fig. 8. Comparaison des modèles de laminage : présence de bruit (événement de 21-07-1975).

Fig. 9. Comparaison des modèles de laminage : présence de bruit (événement de 18-09-1976).

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gaussien, de moyenne nulle et d’écart type constant égal à10% de la moyenne des débits calculés par le modèle del’onde dynamique. Le tableau (2) montre la synthèse des ré-sultats obtenus pour les quatre événements. Les figures 6 à 9montrent l’hydrogramme d’entrée et les hydrogrammes pré-vus par les trois modèles au point de jonction avec le régula-teur aval. Ces résultats montrent clairement que même si lerapport entre les débits de pointe calculés par les différentsmodèles a été légèrement altéré par la présence du bruit, lesautres critères de performances sont demeurés quasimentidentiques au cas précédent.

6. Conclusion

La propagation d’une onde de crue dans l’intercepteur dela communauté urbaine de Montréal, a été analysée à l’aidede deux modèles issus de la mécanique des fluides, ondesdynamique et cinématique, et d’un modèle basé sur l’analysedes systèmes utilisant la notion de fonction de transfert.

Contrairement aux deux autres modèles, la technique au-toadaptative proposée permet de réajuster automatiquementles paramètres du modèle utilisé en temps réel en fonctiondes écarts constatés entre les valeurs calculées et mesurées.Les résultats obtenus par le modèle de fonction de transfertconcordent avec ceux du modèle de l’onde dynamique quiont été considérés comme valeurs mesurées pour alimenterl’algorithme d’identification de la fonction de transfert. Lefiltre de Kalman est assez robuste pour tenir compte de laprésence des erreurs de mesure et assez simple pours’intégrer dans une procédure globale d’optimisation de lagestion des réseaux d’assainissement.

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