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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003 Modèles mathématiques en hydrogéologie Ledoux Emmanuel Centre d’Informatique Géologique Ecole Nationale Supérieure des Mines de Paris LHM-RD – 86/12

Modèles mathématiques en hydrogéologie - … · - 3 - Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003 7.5. Application de la méthode des différences finies à la résolution de l'équation

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Modèles mathématiques en hydrogéologieLedoux Emmanuel

Centre d’Informatique GéologiqueEcole Nationale Supérieure des Mines de Paris

LHM-RD – 86/12

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

SOMMAIRE

INTRODUCTION

1. LE MILIEU SOUTERRAIN

2. LES MODELES "BOITE NOIRE" ET A "RESERVOIRS"

2.1. Principe des modèles "boite noire"

2.2. Hypothèses concernant la relation entrée-sortie: convolution

2.3. Assouplissement des hypothèses concernant la linéarité

2.4. Traitement mathématique de l'identification

2.5. Domaine d'application des modèles "boite noire" en hydrogéologie

2.6. Exemples d'application des modèles "boite noire"

3. LE MODELE MACROSCOPIQUE ET SES LIMITES

4. APPLICATION DU MODELE MACROSCOPIQUE AU CAS DE L’ECOULEMENT

4.1. Relations phénoménologiques régissant l'écoulement

4.2. Synthèse des relations phénoménologiques: équation de diffusivité

5. APPLICATION DU MODELE MACROSCOPIQUE AU TRANSFERT DE MATIERE

5.1. Relations phénoménologiques régissant le transfert de matière

5.2. Synthèse des relations phénoménologiques définissant le transfert de

matière: équation de dispersion

5.3. Cas du transfert de chaleur

6. LES STRUCTURES MODELISABLES AU MOYEN DU MODELE MACROSCOPIQUE

6.1. Les modèles de ressources en eau

6.2. Les modèles de génie civil

6.3. Cas particulier des systèmes aquifères: écoulement en nappe

6.4. Les conditions aux limites

6.5. Cas du milieu fissuré

7. TRAITEMENT MATHEMATIQUE DES EQUATIONS DU MODELE MACROSCOPIQUE

7.1. Principes généraux des méthodes numériques appliquées à l'hydrogéologie

7.2. Traitement des systèmes aquifères monocouches par la méthode des différences

finies

7.3. Traitement des systèmes aquifères multicouches

7.4. Quelques perfectionnements utiles de la méthode des différences finies

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7.5. Application de la méthode des différences finies à la résolution de

l'équation de la dispersion

7.6. Les problèmes d'écoulement local: méthode des éléments finis

8. LA PRATIQUE DE L'EMPLOI DES MODELES EN HYDROGEOLOGIE

8.1. Etude du soutien du débit d'étiage d'une rivière par pompage en nappe

8.2. Exploitation d'un aquifère côtier

8.3. Evolution à long terme de la qualité de l'eau souterraine dans un aquifère

provoquée par l'activité humaine

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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INTRODUCTION

Le domaine de l'eau souterraine est représenté par les formations géologiques

dont les interstices sont en permanence complètement saturés par l'eau. Ce domaine

constitue un des maillons importants de l'ensemble du cycle de l'eau, objet de longue

date des préoccupations de l'hydrogéologie, et ceci pour deux raisons majeures.

En premier lieu, le domaine souterrain est un organe de transfert capable de

permettre, dans certaines conditions, la mobilisation de la ressource en eau, le plus

souvent sur les lieux mêmes de son utilisation.

En second lieu, le domaine souterrain constitue un organe de stockage naturel

capable d'amortir les irrégularités des autres composantes du cycle de l'eau et

présentant une vulnérabilité relativement faible aux altérations de sa qualité.

De nombreux efforts de recherche ont ainsi été consacrés à une bonne

compréhension et à une bonne description de cet élément essentiel de la ressource en

eau. Tout d'abord entreprise pour les besoins de l'exploitation pétrolière, l'étude

scientifique des rapports entre les fluides et les roches s'est étendue à

l’hydrogéologie, science qui, à l'heure actuelle, combine :

- un aspect naturaliste: la description des circulations souterraines;

- un aspect pratique: la quantification des écoulements.

Plutôt que de décrire de manière détaillée la mise en oeuvre des méthodes de

l'hydrogéologie quantitative, l'objectif de ce mémoire vise à définir les rapports

entre les besoins et les méthodes, c'est à dire la manière dont il convient d'aborder

la modélisation du milieu souterrain en fonction de la question posée.

Un modèle est une représentation plus ou moins conceptuelle d'un système; il

s'agira, dans notre cas particulier, d'un système hydrogéologique. Nous distinguerons

ultérieurement les différents modèles selon leur degré de conceptualisation.

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Une remarque importante s'impose dès à présent. A un besoin donné correspond un

niveau de conceptualisation du domaine souterrain, donc un type de modèle, mais

également un ou plusieurs types de méthodes de mise en oeuvre de ce modèle. Par

exemple, un modèle basé sur la représentation phénoménologique des écoulements en

milieu poreux conviendra à la fois pour l'étude des ressources en eau dans un aquifère

et pour la recherche de la surface libre à l'intérieur d'une digue en terre. Par

contre, l'utilisateur sera vraisemblablement amené à choisir la méthode des différences

finies dans le premier cas, celle des éléments finis dans le second, pour la résolution

des équations du problème. Ainsi pour les deux questions, le modèle est identique,

seules les méthodes de mise en oeuvre diffèrent.

Le niveau de conceptualisation nécessaire varie avec le problème posé. L'étude

fine des écoulements en milieu poreux requiert un modèle très détaillé basé sur les

relations phénoménologiques entre des grandeurs physiques définissant le milieu. La

simulation du débit à l'exutoire d'un bassin versant peut, par contre, n'exiger qu'une

représentation plus globale du domaine souterrain pour laquelle un modèle à réservoirs

conviendra parfaitement. Enfin, la méconnaissance de la structure du système étudié

peut rendre obligatoire une approche entièrement paramétrique au moyen d'un modèle du

type "boite noire".

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1. LE MILIEU SOUTERRAIN

Les problèmes pratiques qui se posent sont très différents selon la nature du

milieu qui constitue le domaine souterrain. On distingue habituellement:

- le milieu finement divisé,

- le milieu discontinu.

Nous entendons par milieu finement divisé tout milieu où la distinction entre les

pleins et les vides ne peut se faire qu'à l'échelle microscopique. Entrent ainsi dans

cette catégorie le milieu poreux constituant une très grande partie des aquifères, mais

également le milieu finement fissuré qui renferme également une part non négligeable

des disponibilités en eau.

A l'opposé, la description du milieu discontinu tendra à opérer une distinction

nette entre la matrice rocheuse et les vides éventuellement occupés par l'eau; ce sera

le cas du milieu peu fissuré et des systèmes karstiques.

Une grosse difficulté s'élève dès à présent à la limite entre les deux domaines

finement divisé et discontinu. En effet, si l'on peut dire que l'hydrogéologie

quantitative offre, à l'heure actuelle, -des méthodes opérationnelles pour l'étude des

milieux poreux ou des systèmes karstiques, il n'en est pas de même pour le milieu

fissuré où le modéliste se trouve relativement désarmé. La raison tient évidemment aux

difficultés théoriques, mais également à la demande restée, jusqu'ici, assez faible à

cause d'un moindre intérêt accordé jusqu'à présent à ce mode de gisement de l'eau

souterraine. Des progrès devraient cependant être effectués dans un avenir proche grâce

aux études sur les possibilités d'évacuation des déchets radioactifs dans les

formations géologiques profondes imperméables où les problèmes de transfert à travers

les éventuels réseaux de fractures se posent avec acuité.

Le présent mémoire est consacré à l'étude des écoulements dans le milieu finement

divisé. Nous nous efforcerons d'y définir d'une part les besoins en modélisation,

d'autre part les différents types de modèles apportant une réponse aux questions

posées. La mise en oeuvre des modèles, les problèmes rencontrés à cette occasion et

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leurs limitations seront ensuite abordés à la faveur d'exemples. Les méthodes

mathématiques ne seront cependant pas décrites en détail, mais seront seulement

signalées en ce qui concerne leur adaptation particulière à telle ou telle catégorie de

modèles. Le lecteur pourra se reporter aux ouvrages spécialisés pour les développements

détaillés les concernant.

Le milieu finement divisé pour lequel la prospection de la ressource en eau est

plus aisée a retenu tout d'abord l'attention des hydrogéologues. La division du milieu

peut être due soit à une porosité d'interstices (sables, grès, dolomies, ...), soit à

une porosité de fissure (calcaires compacts, roches cristallines, roches cristallophyl-

liennes). Suivant l'aptitude que présente un tel milieu à la circulation des fluides.

Il est d'usage de classer les différents types de formations géologiques rencontrées en

trois catégories:

- les formations dites perméables qui constituent les aquifères et qui autorisent

une circulation aisée de l'eau de telle sorte qu'il soit envisageable de la

mobiliser grâce à des captages;

- les formations dites imperméables qui, bien que pouvant contenir une grande

quantité de fluide, n'en permettent pas la mobilisation;

- les formations de type intermédiaire, souvent qualifiées de semi-perméables,

dans lesquelles l'eau n'est pas non plus mobilisable, mais à travers lesquelles

des transferts sont possibles à l'échelle régionale entre les formations

aquifères.

Il convient de noter que ces distinctions sont relatives et dépendent notablement

de l'échelle du problème posé. Ainsi l'étude d'un champ de captage de la nappe de la

Craie dans le Bassin parisien peut être faite en considérant que la formation

sous-jacente de l'argile du Gault est imperméable; il n'en serait pas de même s'il

s'agissait de considérer les écoulements de la nappe de l'Albien à l'échelle de

l'ensemble du bassin, car c'est justement la drainance vers la craie à travers cette

argile qui constitue l'exutoire des sables verts de l'Albien. Apparaît ainsi, dès à

présent, l'importance de l'identification judicieuse de la structure qui doit être

modélisée pour traiter un problème pratique, indépendamment de tout choix de modèle.

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Parmi les problèmes qui se posent en matière d’hydrologie, certains sont d'ordre

purement hydrodynamique et requièrent la mise en oeuvre de modèles dits quantitatifs,

d'autres plus complexes font intervenir des variables de qualité de la ressource en eau

et sont dits qualitatifs. La distinction entre ces deux catégories n'a pas en réalité

de sens physique; seul les distingue le degré de conceptualisation auquel il est fait

appel pour la représentation des phénomènes.

Les sujets d'étude se ramenant à un problème d'écoulement pur concernent

habituellement les domaines suivants:

- l'étude quantitative des ressources en eau: quantification des écoulements dans

un aquifère ou un système d'aquifères, simulation de l'impact de phénomènes

naturels ou provoqués par l'activité humaine;

- les problèmes de génie civil: rabattement de nappe, dénoyage d'ouvrages,

exhaure de mines, écoulement dans les digues et barrages, impact de l'écoulement

sur les travaux souterrains.

Les modèles adaptés à ces types d'étude sont généralement très conceptuels et

basés sur les relations phénoménologiques de la mécanique des fluides appliquées à des

structures pouvant approcher la réalité de manière complexe. Dans d'autres cas, le

modèle souterrain ne sera qu'un élément d'un modèle plus général et il sera approprié

de sacrifier une partie de la conceptualisation au profit d'un allègement des calculs.

Tel sera le cas des modèles de bassin qui doivent considérer simultanément plusieurs

maillons du cycle de l'eau comme le ruissellement de surface, l'écoulement en rivière,

l'infiltration, l'évaporation et l'écoulement souterrain.

L'aspect qualitatif associe à l'écoulement la migration de substances

accompagnant l'eau dans son mouvement. Ces phénomènes, souvent très délicats à

modéliser car ils combinent les aspects hydrodynamiques et physico-chimiques,

concernent les problèmes suivants:

- pollution des aquifères: question complémentaire de l'étude de la ressource en

eau, évolution naturelle de la qualité de l'eau, impact des aménagements,

protection des eaux souterraines contre la pollution des aquifères;

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- stockage en milieu souterrain: stockage temporaire des hydrocarbures,

évacuation définitive des déchets industriels ou radioactifs;

- transfert de chaleur en aquifère: exploitation des ressources géothermiques,

stockage de la chaleur dans le sol.

Les modèles décrivant ces mécanismes de transfert auront a priori un niveau de

conceptualisation élevé. Il convient cependant de noter que les relations

phénoménologiques explicatives demeurent encore assez mal connues et que les paramètres

sont, en général, d'une acquisition difficile. Un effort particulier est cependant

actuellement entrepris dans cette voie.

Nous aborderons, dans cette étude, la description des modèles suivant un niveau

de conceptualisation croissant en distinguant ainsi:

- les modèles de type « boite noire » et les modèles à « réservoirs »;

- les modèles phénoménologiques basés sur la mécanique des fluides en milieu

poreux.

Nous en exposerons, dans chaque cas, les principes et donnerons un aperçu des méthodes

mathématiques nécessaires à leur mise en oeuvre.

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2. LES MODELES "BOITE NOIRE" ET LES MODELES A "RESERVOIRS"

Les modèles de type "boite noire" ou à "réservoirs" ne prennent en compte qu'un

degré limité de conceptualisation du milieu souterrain.

Les modèles "boite noire" considèrent les écoulements de manière globale

assimilant une structure hydrogéologique à un système physique mettant en relation des

données d'entrée, en général un historique de précipitation, et des données de sortie,

en général un historique débit.

Un tel modèle s'attachera à l'identification selon des critères mathématiques

d'un opérateur reliant l'entrée à la sortie. Cet opérateur dépendra bien évidemment des

caractéristiques internes du système, mais celles-ci ne seront pas identifiables

d'après l'aspect de l'opérateur et de plus n'interviendront généralement pas dans la

méthode d'identification. Ce procédé d'étude est généralisable à de nombreux systèmes

physiques naturels, nous n'en discuterons ici que l'application aux phénomènes

hydrologiques souterrains.

Les modèles paramétriques dits à « réservoirs » ne présentent que peu d'intérêt

pour l’étude des ressources en eau souterraine qui fait l'objet de notre étude. Leur

emploi est par contre fréquent dans la plupart des modèles hydrologiques appelés à

représenter les relations entre les précipitations et le débit des cours d'eau.

Ces modèles prennent ainsi en compte une composante appelée débit de base

traduisant la contribution des aquifères. Dans la mesure où ils ne considèrent pas

toutes les variables d'état d'un système hydrogéologique, telle que le niveau

piézométrique par exemple, leurs prévisions ne peuvent être calibrées sur des données

expérimentales autres que globales (débit des principaux exutoires, quantité globale

d'eau stockée), et leur utilisation ne peut donc être envisagée que comme élément

constitutif d'un modèle plus général.

2.1. Principe des modèles "boite noire"

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Considérons un système dont les caractéristiques sont mal connues et qui a pour

effet de transformer une grandeur d'entrée E en une grandeur de sortie S. On cherche,

en l'absence de connaissances sur la structure physique des phénomènes ou bien avec la

volonté de les ignorer, à étudier la relation entre l'entrée et la sortie. On résout ce

problème en recherchant un opérateur f dont l'application sur l'entrée soit une repré-

sentation satisfaisante de la sortie:

Sf

E →

Le problème à résoudre est donc une identification d'opérateur (Marsily, 1978).

2.2. Hypothèses concernant la relation entrée-sortie: convolution

Un certain nombre d'hypothèses doivent être imposées à l'opérateur pour tenir

compte du comportement du système simulé. L'hypothèse de linéarité conduit à une

application pratique intéressante.

Cette hypothèse stipule les propriétés suivantes:

212121 SS)f(E)f(E)Ef(E +=+=+

SEfEf λλλ == )()(

Physiquement, l'hypothèse de linéarité signifie que les contributions séparées de

deux entrées indépendantes, par exemples deux averses, se superposent par addition.

On notera alors que, dans ces conditions, l'opérateur f revêt la forme générale

d'un produit de convolution faisant intervenir une fonction F caractéristique du

système

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∫−∞

∞+

−= τττ dtEftS )()()(

Pour la majorité des applications aux phénomènes hydrologiques, la variable t

représente le temps, ce qui implique que les composantes de F pour τ négatif sont

nulles, la sortie ne pouvant dépendre d'un phénomène à venir.

L'expression précédente se met donc sous la forme:

∫ ∫+∞

∞−

−=−=0

t

dtFEdFtEtS ττττττ )()()()()(

Pratiquement, cela revient à considérer que S(t) est une somme pondérée des

valeurs de E comprises entre -∞ et t. La fonction F est appelée réponse impulsionnelle,

car elle est la sortie du système quand l'entrée est une distribution de Dirac

représentant une impulsion unitaire.

2.3. Assouplissement des hypothèses concernant la linéarité

Les hypothèses de linéarité sont assez restrictives quant au comportement du

système, et il est bien rare qu'un phénomène naturel se prête d'emblée à une telle

schématisation. Deux voies peuvent être explorées pour assouplir le modèle.

- Traitement préliminaire de l'entrée: les grandeurs directement accessibles à la

mesure ne sont souvent que des représentations déformées de la véritable entrée du

système. En hydrogéologie, il est clair que l'ensemble des précipitations ne participe

pas à l'écoulement souterrain et qu'un traitement préliminaire devra au préalable

aboutir au calcul de la pluie efficace à partir des précipitations brutes seules

mesurables. Ce dernier modèle devra cependant être inclus dans le processus

d'identification de l'opérateur dans la mesure où le seul calibrage possible porte sur

la pluie brute et le débit de base.

- Traitement des systèmes non linéaires: Les solutions proposées précédemment ne

permettent pas de tenir compte des modifications du système au cours de son évolution.

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Ces modifications peuvent entraîner des déformations plus ou moins complexes da la

réponse impulsionnelle. Le problème est donc de rechercher un opérateur qui tienne

compte des variations des caractéristiques physiques du système à simuler en postulant

seulement que la réponse impulsionnelle reste la même pour deux états identiques du

système.

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Trait continu: Débit observé et précipitation Trait interrompu: Débit calculé par reconvolution de la pluie avec la

réponse impulsionnelle

FIGURE 1 : BASSIN DE L'HALLUE (Somme, France) EXEMPLE DE DECONVOLUTION LINEAIRE

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FIGURE 2 : BASSIN DE L'EYRE (Landes, France) EXEMPLE DE DECONVOLUTION NON-LINEAIRE REPONSES IMPULSIONNELLES OBTENUES POUR 4 CLASSES DE VALEURS DES DEBITS A L'EXUTOIRE

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FIGURE 3 : BASSIN DE L'EYRE (Landes, France) EXEMPLE DE DECONVOLUTION NON-LINEAIRE RECONSTITUTION DU DEBIT A L'EXUTOIRE

Débit observé: trait interrompu - débit calculé: trait continu

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Dans cette approche, l'opérateur F est une fonction à deux variables telle que:

∫ ∫+∞

−=0 0

tp

ddFtEtS τπτπτ ),()()(

le paramètre pt, lui-même fonction du temps, servant à caractériser l'état du- système.

La sortie à l'instant t est donc une somme pondérée des valeurs de E comprises entre -∞

et t, les coefficients de pondération dépendant de l'état du système à l'instant t.

Il est ainsi possible de cerner de plus près la réalité physique, puisque les

phénomènes de stockage et de transfert de l'eau dépendent des fluctuations des

paramètres hydrodynamiques, ce qui modifie les temps de transfert. Les variations du

paramètre pt doivent donc être représentatives de l'évolution de paramètres physiques

tels que le niveau piézométrique, le stock en eau, l'historique des pluies. On peut

souvent considérer que la sortie elle-même, par exemple le débit, est représentative de

l'historique du bassin. On proposera alors comme valeur du paramètre p à l'instant t la

valeur de cette sortie à l'instant t-∆t.

2.4. Traitement mathématique de l'identification

La recherche de l'opérateur F porte le nom de déconvolution. Un certain nombre de

méthodes ont fait leur preuve à l'occasion d'application à des systèmes divers

rencontrés dans le domaine de l'hydrologie. Nous renverrons le lecteur à la

bibliographie pour la mise en oeuvre de ces méthodes (Marsily, 1978).

2.5. Domaine d'application des modèles "boite noire" en hydrogéologie

Dans la mesure où la connaissance des écoulements souterrains passe le plus

souvent par l'étude des variations de l'état du système au moyen de mesures

piézométriques, les modèles "boite noire", qui ignorent a priori les variables d'état,

ne présentent qu'un intérêt modeste. Certains types de problèmes peuvent cependant se

contenter de la recherche d'une relation pluie-débit, soit parce que la représentation

phénoménologique des mécanismes est malaisée (cas des systèmes karstiques), soit parce

que les objectifs à atteindre ne nécessitent pas la simulation détaillée de l'état du

système.

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La mise en oeuvre d'un modèle "boite noire" est en général rapide et son calage

assez aisé pour peu que l'on dispose de données en quantité et qualité suffisantes.

Les inconvénients principaux de tels modèles sont les suivants:

- il est nécessaire de rassembler un historique continu d'entrées et de sortie

(au moins pour les sorties);

- l'opérateur ainsi identifié caractérise un système donné pour un historique

d'états donné. Le modèle n'est donc pas transposable à un autre système, même

s'il est le siège de phénomènes identiques. Toute prévision ou extrapolation

dans le temps au moyen du modèle ne peut être valable que sous l'hypothèse

d'une invariance de la structure. Ce type de modèle n'autorise pas, en

particulier, l'étude des conséquences d'un aménagement.

2.6. Exemples d'application des modèles "boite noire"

- Utilisation d'un procédé de simulation linéaire : exemple du bassin de l'Hallue

(Marsily, 1978).

Ce bassin, situé en France, au nord d'Amiens, présente une superficie de 220 kM2.

Il est constitué de calcaire crayeux (Sénonien et Turonien) reposant sur des marnes.

Equipé par le Bureau de Recherches Géologiques et Minières, il a fait l'objet de

l'étude expérimentale de la relation pluie-débit pendant les années 1967 à 1971.

L'identification de la réponse impulsionnelle reliant la pluie efficace au débit

de base qui constitue la quasi totalité de l'écoulement sur un tel bassin, a été

réalisée par une méthode mise au point au CIG (cf. Marsily, 1978).L'évapotranspiration

potentielle évaluée par la formule de Thornthwaite conduit au calcul de la pluie

efficace par calage d'un paramètre caractérisant le stock d'eau dans le sol ou "réserve

facilement utilisable" supposé homogène sur l'ensemble du bassin, dans lequel

l'évaporation peut puiser en l'absence de pluie. Les ajustements du modèle effectués au

pas de temps de 10 jours ont montré que le meilleur calage était obtenu pour une valeur

nulle de la réserve facilement utilisable et que la mémoire du phénomène d'écoulement

(longueur du support de la réponse impulsionnelle) devait être supérieure à 320 jours.

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

De plus, il a été mis en évidence que la période de calage du modèle devait être

supérieure à 2 ans, ce qui impliquait la disponibilité de séries de deux années de

débits et de trois années de pluies. La figure 1 rend compte des résultats obtenus dans

le meilleur cas.

- Utilisation d'un procédé de simulation non linéaire: exemple du bassin de l'Eyre

(Marsily, 1978).

L'Eyre est un cours d'eau côtier du sud-ouest de la France débouchant dans le

bassin d'Arcachon. Le bassin versant de 2258 km2 est constitué par des sables dunaires

recouverts en grande majorité par la forêt des Landes. L'identification d'un opérateur

non linéaire a été réalisée au pas de temps de 7 jours par la méthode CIG en retenant

quatre classes de valeurs du débit obtenues en divisant par 4 l'intervalle débit

minimum-débit maximum évalué sur la période de calcul de l'opérateur. La figure 2

montre les réponses impulsionnelles calculées sur 225 jours pour ces quatre cas.

L'entrée est constituée par la pluie brute, ce qui explique les allures dissemblables

des résultats, ceux-ci intégrant les effets de l'évapotranspiration. La figure 3

présente la comparaison entre la sortie mesurée et la sortie reconstituée.

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3. LE MODELE MACROSCOPIQUE ET SES LIMITES

Ce type de modèle, très conceptuel, assimile le milieu finement divisé à un

milieu continu à l'intérieur duquel l'ensemble des propriétés qui le caractérisent peut

être représenté par des fonctions continues. Cette approche est maintenant classique en

hydrogéologie et décrite par de nombreux auteurs (Bear, 1972, 1979; Marsily, 1981).

Nous en rappellerons seulement les principes.

Chaque propriété affectée en un point de milieu est définie de manière locale sur

un élément de volume entourant ce point dit "volume élémentaire représentatif" (VER).

La taille du- VER est choisie de manière théorique en fonction de la division du milieu

de telle sorte que:

- le VER soit suffisamment grand pour contenir un grand nombre de pores de

manière à pouvoir y définir une propriété moyenne globale avec l'assurance que

l'effet de fluctuation d'un interstice à un autre sera négligeable;

- le VER soit suffisamment petit pour que les variations des propriétés d'un

domaine au domaine voisin puissent être approchées par des fonctions continues

sans introduire d'erreur décelable par les instruments de mesure à l'échelle

macroscopique.

La validité de cette représentation du milieu finement divisé qui découle de

manière naturelle de la notion d'échantillon est donc liée au rapport entre l'échelle

microscopique (le pas d'espace de la division du milieu) et l'échelle macroscopique (le

pas d'espace de l'investigation par les instruments de mesure). On conçoit ainsi que le

modèle puisse être valable dans le cas d'une roche poreuse ou très fissurée, mais perde

toute signification lorsque la division du milieu augmente pour prendre par exemple des

valeurs décamétriques ou même hectométriques.

La représentation du milieu poreux selon un milieu continu, parfois désignée sous

le nom de modèle macroscopique n'est pas la seule conceptualisation possible. Des

recherches sont actuellement menées pour une approche probabiliste du milieu poreux,

elles n'ont cependant pas encore débouché sur des applications pratiques.

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Le modèle macroscopique présente l'avantage de reposer sur une notion intuitive-

la notion d'échantillon, qui permet de définir des grandeurs moyennes attachées au

milieu. Plusieurs inconvénients en découlent cependant:

- La taille de l'échantillon reste assez arbitraire. Rien ne permet d'affirmer

qu'il existe toujours un volume d'échantillon qui puisse assurer la continuité

macroscopique du milieu. Dans l'état actuel des connaissances, on ne sait pas

relier la taille du VER à la structure du milieu. De récents travaux

(Robinson, 1982; Long, 1985; Charlaix, Guyon et al. 1984) tendent à montrer

que dans le cas de milieux fissurés il n'existe pas nécessairement

d'échantillon où l'on puisse définir un tenseur de perméabilité.

- Le modèle macroscopique est mal adapté au traitement des discontinuités du

milieu, ce qui pose parfois des problèmes de représentation aux limites entre

deux milieux.

- Les nombres qui mesurent les grandeurs attachées au milieu ne sont pas

indépendants de la taille des échantillons; ce fait est connu sous le terme

d'effet d'échelle. Cette question est particulièrement cruciale en pratique,

où se pose constamment le problème de l'estimation de paramètres des modèles à

partir d'observations in situ. L'effet d'échelle explique l'échec des

tentatives de liaison de la perméabilité régionale à la structure fine du

milieu et, en particulier, aux caractéristiques granulométriques. L'effet

d'échelle est également en partie responsable du fait qu'il est la plupart du

temps nécessaire de caler les modèles, même lorsque les données sont

abondantes. En effet, au cours de ce calage, on est amené à identifier la

distribution spatiale (éventuellement temporelle) d'une ou plusieurs grandeurs

(par exemple, la perméabilité ou la transmissivité) qui permet la meilleure

correspondance entre les résultats des calculs et les observations. Différents

résultats seront obtenus suivant la discrétisation spatiale adoptée, sans que

l'on sache les relier entre eux autrement que par le fait qu'ils constituent

justement les paramètres d'un même modèle.

L'effet d'échelle prend toute son importance dans le transfert de matière où les

expériences réalisées à ce jour montrent clairement que la valeur que l'on doit

attribuer au coefficient de dispersion varie avec la distance parcourue par les

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substances. Des travaux sont actuellement en cours pour tenter de relier l'existence

d'une valeur limite de la dispersion qui serait obtenue après un parcours suffisamment

long, aux propriétés structurales du milieu (Dieulin, 1980; Matheron et Marsily, 1980).

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

4. APPLICATION DU MODELE MACROSCOPIQUE AU CAS DE L'ECOULEMENT

4.1. Relations phénoménologiques régissant l'écoulement

Les relations phénoménologiques définissant l'écoulement mettent en oeuvre les

variables macroscopiques décrivant le milieu poreux et le comportement de l'eau qui en

sature les vides. Ces relations sont issues de la mécanique des fluides moyennant une

adaptation empirique nécessitée par la description macroscopique du milieu (Marsily,

1981). Trois groupes de relations peuvent ainsi être dégagés:

a) Principe de continuité macroscopique

Ce principe traduit la conservation de la masse de fluide à l'intérieur de tout VER

demeurant fixe dans l'espace. Il s'exprime par l'équation dite équation de continuité:

0=+∂∂

+ qt

Vdiv ρρερ )()(

qui met en jeu les grandeurs macroscopiques suivantes rapportées au VER,

- ρ : masse volumique de l'eau [M] [L-3]

- ε : porosité du milieu poreux définie comme le rapport entre le volume des

vides présents dans le VER et son volume total (sans dimension);

- q : débit volumique d'eau prélevé (ou injecté) par unité de volume de VER

[T-1]

- Vr: vitesse de filtration de l'écoulement (vitesse de Darcy) [L] [T-1]

exprimant la vitesse fictive d'un fluide qui percolerait à travers le milieu

en occupant tout l'espace (pores + grains) au lieu de n’occuper que les vides.

Le flux du vecteur Vr à travers une surface quelconque de milieu poreux

représente ainsi le débit d'eau qui la traverse.

b) Equation du mouvement: loi de Darcy

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

La loi de Darcy issue de l'expérience (chevalier Henri Darcy, 1856) exprime, dans

le cadre du modèle macroscopique, la relation fondamentale de la mécanique. La

formulation la plus courante en hydrogéologie revêt la forme suivante:

hdgraKVrr

*−=

où h est la charge hydraulique macroscopique définie par la relation h=z+p/ρg.

Lorsque la masse volumique ρ peut être considérée comme constante, la charge

s'identifie au niveau piézométrique. La charge attachée à un VER est alors

matérialisée par la cote de la surface libre de l'eau dans un tube ouvert dont

l'orifice inférieur pénètre ce VER (piézomètre). La cartographie du champ h au

sein d'un aquifère constitue la carte piézométrique d'une nappe. La charge, ou

niveau piézométrique, s'exprime habituellement en mètres d'eau.

Et K est le coefficient de Darcy, ou perméabilité du milieu poreux [L] [T -1]

relativement à l'écoulement d'un fluide donné (l'eau dans le cas qui nous

occupe). Dans le but de rendre compte de l'anisotropie du milieu poreux,

inhérente à la structure des formations géologiques, on est amené à considérer la

perméabilité comme une propriété tensorielle.

On admet ainsi que K est un tenseur symétrique du 2ème ordre, c'est à-dire une

matrice à 9 coefficients dans l'espace à trois dimensions.

=

zzzyzx

yzyyyx

xzkyxx

KKK

KKK

KKK

K avec :

zyyz

zxxz

yxxy

KK

KK

KK

===

Ce formalisme peut être allégé en utilisant pour décrire le milieu un repère

d'axes orthogonaux tels que le tenseur K se réduise à ses composantes diagonales. Ces

directions particulières de l'espace sont appelées directions principales

d'anisotropie. Physiquement, ces directions sont celles pour lesquelles le vecteur

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

vitesse de Darcy Vrest parallèle au gradient de la charge hydraulique hdgra

r. Dans un

milieu sédimentaire stratifié, il est évident que les directions parallèles et

perpendiculaires à la stratification s'identifient à ces directions privilégiées de

l'écoulement.

Le formalisme précédent de la loi de Darcy au moyen de la charge hydraulique

n'est pas toujours possible. En effet, dans les applications où la masse volumique est

susceptible de varier notablement dans l'espace, notamment dans le cas de transfert de

matières dissoutes, la notion de charge devient malcommode et il est nécessaire de

faire appel à une formulation plus générale de la loi de Darcy:

zdgragpdgrak

Vrrr

*( ρµ

+−=

où p représente la pression macroscopique de fluide dans le VER [M] [L-1] [T2] :

- z est l'altitude [L]

- g est l'accélération de la pesanteur [L] [T-2]

- µ est la viscosité dynamique du fluide [M] [L-1] [T-1]

- k est la perméabilité intrinsèque de milieu poreux [L2]

Le coefficient k , grandeur tensorielle comme K , caractérise cette fois le

milieu poreux indépendamment des propriétés du fluide qui y percole. Il s'exprime le

plus souvent en darcy (1 darcy vaut 0,987xl0-12 m2). La relation entre k et K est

donnée par:

µρgk

K =

La notion de perméabilité intrinsèque est surtout utilisée~par les pétroliers qui

considèrent simultanément plusieurs fluides.

c) Equations d'état

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Les équations d'état traduisent le comportement mécanique de l'eau et de la

matrice rocheuse en fonction de la pression. En hydrogéologie, on adopte habituellement

un modèle élastique pour expliquer ce comportement, faisant intervenir les coefficients

d'élasticité α et β définis par les relations suivantes:

dpd βρρ

= pour l’eau

dpdVdV ασα =−= pour la matrice

dans lesquelles σ représente la contrainte effective (contrainte s'exerçant sur les

grains) au sein du volume élémentaire représentatif de volume V. En l'absence de

variation des forces extérieures s'exerçant sur le milieu poreux, la contrainte

effective σ est liée à la pression interstitielle p de l'eau par la relation

0=+ σddp dite relation de Terzaghi.

Dans ces conditions, on démontre la relation (Marsily, 1981) d(ρε) = ρdε + εdρ =

ρg(α+εβ), dp ≅ ρ2g(α+ εβ) dh reliant la variation d(ρε) du stock en eau dans un VER à

la variation dh du niveau piézométrique.

On pose Ss = ρg(α+εβ), ce qui définit le coefficient d'emmagasinement spécifique

du milieu poreux sur tout VER [L-1].

4.2. Synthèse des relations phénoménologiques: équation de diffusivité

La combinaison des trois groupes de relations qui viennent d'être décrits, à savoir:

- équation de continuité : 0=+∂∂

+ qt

Vdiv ρρερ )()(r

- loi de Darcy : hdgraKVrr

*−=

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

- équation d’état : dhSd sρρε =)(

conduit à l'équation aux dérivées partielles unique suivante, dite équation de

diffusivité, en négligeant le gradient de la masse volumique dans l'espace:

qth

ShdgraKdiv S +∂∂

=)*(r

Cette équation définit entièrement l'écoulement en permettant la détermination du

champ de charge hydraulique h. C'est cette équation que les modèles phénoménologiques

d'écoulement en milieu poreux s'efforcent de résoudre.

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

5. APPLICATION DU MODELE MACROSCOPIQUE AU TRANSFERT DE MATIERE

L'usage du modèle macroscopique du milieu poreux peut être étendu, avec cependant

quelques difficultés, au transfert des matières solubles accompagnant l'écoulement.

Cette extension est connue sous le nom de théorie de la dispersion.

Nous nous intéressons ici aux éléments transportés dits en solution, c'est-à-dire

ne constituant pas une phase mobile différente de la phase fluide, mais s'intégrant à

l'eau du milieu naturel en y modifiant éventuellement les propriétés physiques et

chimiques (notamment la masse volumique et la viscosité). Ces éléments pourront revêtir

différentes formes chimiques: ions, agrégats de molécules ou d'ions, micelles et

colloïdes, dont l'interaction avec le milieu devrait pouvoir être envisagée de manière

spécifique. Par opposition au transport en solution, on distingue les écoulements de

fluides immiscibles tels que les écoulements d'huile et d'eau dont les lois de

migration sont très différentes. Ce point ne sera pas abordé dans ce mémoire, comme

sortant du domaine habituel de l'hydrogéologie. L'exemple d'application concernant les

relations eau douce-eau salée dans un aquifère côtier pourra s'y rattacher cependant

d'une certaine façon.

5. 1. Relations phénoménologiques régissant le transfert de matière

La conceptualisation des transferts de solutés s'organise autour de trois niveaux

de mécanismes: la convection, la dispersion et l'interaction entre la fraction mobile

et la fraction immobile du milieu.

a) Mécanismes de convection

Il s'agit de l’entraînement avec le mouvement macroscopique moyen du fluide. Le flux

convectif Qc de soluté i qui traverse l'unité de surface de milieu poreux s'exprime par

la relation:

ic CnVQrr

*=

où : Vr est la vitesse de Darcy de l'écoulement,

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

nr est le vecteur normal à la surface unité,

Ci est la concentration en soluté i présente dans le fluide qui circule. Cette

concentration s'exprime le plus souvent en gramme/litre [M] [L-3].

De par la définition même du mécanisme de convection, il apparaît ainsi une

distinction entre la fraction du milieu qui peut circuler et qui autorise donc le

transfert avec l'écoulement moyen et la fraction composée de solide, mais également de

fluide, qui reste immobile tout en pouvant contenir de la matière et donc jouer un rôle

dans la migration.

On est amené à définir une porosité cinématique E c correspondant au domaine du

milieu poreux occupé par l'eau en mouvement. Cette porosité cinématique est toujours

inférieure à la porosité totale déjà introduite en hydrodynamique et dépend des

caractéristiques du milieu poreux, mais aussi vraisemblablement du gradient hydraulique

de l'écoulement, bien que cette notion n'ait pas encore été nettement précisée

expérimentalement. Remarquons que cette distinction faite au sein d'un volume

élémentaire représentatif entre fraction mobile et fraction immobile est incompatible

avec le modèle macroscopique dont le principe est justement d'homogénéiser les

propriétés à l'intérieur d'un VER dans le but de définir un milieu continu équivalent.

Il y a là une difficulté que nous ne saurons pas résoudre dans le cadre de la théorie

de la dispersion.

b) Mécanismes de dispersion

On regroupe sous le terme général de dispersion l'ensemble des mécanismes qui tendent à

réduire les contrastes de concentration en se superposant au mouvement convectif moyen.

Au moins deux causes peuvent être attribuées à la dispersion. En premier lieu,

l'agitation thermique des particules dans la solution tend à une homogénéisation de la

concentration même en l'absence de mouvement convectif, c'est la diffusion moléculaire.

En second lieu, les hétérogénéités microscopiques de la vitesse des parcelles fluides

circulant au sein du VER, qui sont négligées par la représentation macroscopique de

l'écoulement selon la loi de Darcy, contribuent également au mélange, et ceci d'autant

plus que le mouvement convectif est important. Ce phénomène porte le nom de dispersion

cinématique. Remarquons que la dispersion cinématique est une conséquence du modèle

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

macroscopique du milieu poreux. Sa quantification dépendra donc de la finesse avec

laquelle on sera capable de décrire les hétérogénéités de la vitesse macroscopique,

c'est à dire finalement de la taille adoptée pour le VER.

La dispersion en milieu poreux est habituellement formulée d'après des travaux

théoriques et expérimentaux, par une loi analogue à la loi de Fick.

nCdgraDQ id

rr**−=

où : Qd représente le flux dispersif à travers la surface unité de milieu poreux,

Ci est la concentration en élément i [M] [L-3],

nr est le vecteur normal à la surface unité,

D est le coefficient de dispersion [L2] [T-1]

Le coefficient de dispersion D est un tenseur symétrique, du 2ème ordre (matrice

à 9 coefficients de l'espace à 3 dimensions). Il a comme directions principales la

direction du vecteur vitesse de Darcy et deux autres directions généralement

quelconques quoique orthogonales à la première. Enfin, les coefficients du tenseur sont

fonction du module de la vitesse convective. Dans le repère principal d'anisotropie, D

se réduit à trois composantes:

=

T

T

L

D

D

D

D

000000

DL étant le coefficient de dispersion longitudinal (dans le sens de l'écoulement), DT

le coefficient de dispersion transversal (orthogonalement à l'écoulement).

D'après les expériences menées en laboratoire par Pfankuch (1963), on admet pour

le domaine des vitesses usuelles les relations:

VD LL α=

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

VD TL α=

αL et αT, qui ont la dimension d'une longueur, étant les coefficients de dispersion

intrinsèque ou dispersivités.

c) Interaction entre fraction mobile et fraction immobile

Les mécanismes élémentaires concernés par cette rubrique restent encore très mal

connus et sont habituellement représentés de manière globale sans distinguer leurs

différentes origines physiques. Quelques exemples de phénomènes se manifestant à

différentes échelles convaincront de la difficulté de conceptualisation dans le cadre

du modèle macroscopique

A l'échelle microscopique des grains du milieu poreux, un soluté peut se fixer

sur la matrice rocheuse. Il peut s'agir d'un mécanisme d'échange d'ions ou encore d'un

mécanisme d'ordre physico-chimique dû aux propriétés électriques des particules en

solution. On désigne le phénomène global sous le nom de sorption. Le plus souvent, un

équilibre s'établit dans la solution entre la fixation (adsorption) et la libération

(désorption) des particules. Les constantes d'équilibre dépendent des propriétés chimi-

ques de la solution et de la roche, de la température, et notamment des différents

éléments dissous. Un même soluté pourra donc présenter des comportements très

différents suivant son environnement. Les mécanismes de sorption sont particulièrement

importants dans les argiles dont la capacité d'adsorption peut atteindre le dixième de

leur volume. Toujours à l'échelle microscopique, certaines particules de grandes

tailles (ions complexes, colloïdes, etc.) ne pourront pas pénétrer dans les pores les

plus petits du milieu et se verront ainsi filtrées au cours de leur mouvement. Enfin,

certaines espèces chimiques pourront s'engager de manière éventuellement irréversible

avec les constituants de la matrice (réactions acide-base, oxydoréduction,

précipitation).

Dépassant l'échelle des grains et des pores, représentons -nous l'agencement des

vides du milieu poreux comme des canaux plus ou moins tortueux parcourus par

l'écoulement et présentant des culs-de-sac. Globalement, les canaux ouverts assurent

l'écoulement macroscopique et le mouvement convectif des solutés. Les particules en

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

solution, tant que leur taille le permet, pénètrent cependant dans les culs-de-sac soit

sous l'effet de la diffusion moléculaire, soit encore sous l'effet des hétérogénéités

microscopiques de la vitesse d'écoulement. Tout se passe comme si l'espace offert au

soluté était plus grand que celui offert au fluide circulant.

Enfin, à l'échelle macroscopique, la répartition du soluté sera influencée par

celle de la porosité et de la perméabilité. Par exemple, un massif de craie fissurée

constitue habituellement un excellent aquifère possédant une porosité d'interstices

dans la matrice crayeuse et une porosité de fissures qui constituent l'essentiel de la

perméabilité du massif. Le mouvement convectif global du soluté parcourra donc

principalement les fissures, mais une pénétration des blocs se manifestera également

avec un certain retard sous l'effet de circulations plus lentes et de la diffusion

moléculaire. La persistance de la pollution dans un tel aquifère longtemps après que la

cause en ait cessé atteste ce phénomène.

Reprenant la distinction déjà évoquée à propos des mécanismes de convection en

deux fractions, l'une mobile, l'autre immobile, on représente classiquement

l'interaction par une relation globale paramétrique du type F=f(C) reliant la

concentration volumique C dans la fraction mobile à la concentration massique F dans la

fraction immobile.

Différents types de lois ont été proposés, basés sur l'interprétation

d'expériences de traçage par diverses substances menées soit en laboratoire, soit in

situ (Goblet, 1981). Remarquons que ces expériences sont encore peu nombreuses, et que

l'approche globale qu'elles représentent rend hasardeuse, sinon sans fondement, toute

tentative d'extrapolation des paramètres dans l'espace et dans le temps.

Dans le cadre de ce mémoire, nous retiendrons trois modes de description de

l'interaction.

α) Interaction linéaire et instantanée: Il est postulé, pour ce cas, la relation F =

KdC, où Kd est une constante dépendant éventuellement de la température appelée

coefficient de distribution [L3] [M-1] . On suppose ainsi un partage immédiat à chaque

instant dans une proportion fixe de la matière en mouvement entre la fraction mobile et

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

la fraction immobile. La valeur du coefficient Kd caractérise à la fois la roche

constituant le milieu poreux et les substances en solution. Ce modèle est

habituellement retenu pour l'étude des transferts lents avec de faibles concentrations

tels ceux qui sont susceptibles d'intervenir à la suite de l'enfouissement de déchets

radioactifs dans le sous-sol.

β) Interaction linéaire non instantanée à cinétique linéaire: On admet, dans ce cas, la

relation dF/dt = w*(C-F/Kd), où w, coefficient constant, caractérise la cinétique de

l'interaction. Lors w tend vers +∞, l'état d'équilibre représenté par dF/dt = 0 est

atteint instantanément et le modèle cinétique se confond avec le précédent. Des

tentatives ont été faites à l'occasion d'expériences en laboratoire et in situ pour

distinguer deux valeurs de w selon que le transfert s'effectue de la fraction mobile

vers la fraction immobile (adsorption) ou l'inverse (désorption) (Goblet, 1981). Le

modèle linéaire à cinétique linéaire semble particulièrement convenir pour traiter le

cas des transferts rapides sur de courtes distances, ce qui correspond le plus souvent

aux conditions des essais in situ.

γ) Diffusion entre fraction mobile et fraction immobile: Ce modèle admet le couplage de

deux milieux communiquant l'un vers l'autre par un mécanisme de diffusion pure

obéissant à la loi de Fick. Il est alors nécessaire de définir la surface de contact

entre les deux milieux rapportée à chaque VER et le coefficient de diffusion de chaque

substance. Cette approche semble particulièrement convenir au cas du milieu fissuré où

la fraction mobile est constituée par l'eau parcourant les fissures tandis que la

matrice rocheuse et l'eau qui en sature les pores figurent la fraction immobile.

5.2. Synthèse des relations phénoménologiques définissant le transfert de matière:

équation de dispersion

La combinaison des trois groupes de relations décrivant les mécanismes de

convection, de dispersion et d'interaction conduit à l'équation aux dérivées

partielles, dite équation généralisée de la dispersion. Cette équation exprime la

conservation pour tout VER de la masse d'un soluté au cours de son transfert:

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

tF

tC

CVvdiCdgraDdiv Scc ∂∂

−+∂∂

=− ρεε *)()()*( 1rrr

Cette équation fait ainsi intervenir:

- la vitesse de Darcy de l'écoulement Vr,

- la porosité cinématique du milieu poreux εc, définie comme le rapport entre le

volume de la fraction mobile et le volume total du VER,

- la masse volumique ρs de la fraction immobile,

- le tenseur de dispersion D .

Il est, par ailleurs, nécessaire de la compléter par la relation liant F et C,

suivant le modèle d'interaction retenu.

Dans un certain nombre de cas fréquents, la présence de soluté n'a pas

d'influence sur l'écoulement et la vitesse V peut être obtenue indépendamment par

résolution préalable de l'équation de diffusivité. On dit alors être dans l'hypothèse

du "traceur". Dans le cas contraire, lorsque masse volumique et viscosité varient

notablement avec la concentration, le transfert de l'eau et celui des solutés ne

peuvent être découplés et le problème se complique beaucoup.

Cas particulier: Modèle d'interaction linéaire et instantanée.

La relation F = KdC adjointe à l’équation de diffusivité conduit à :

tC

KCVdivCdgraDdiv dsc

cc ∂

∂−+=− )()()*( ρ

εε

ε1

1rr

soit en posant : dsc

c KR ρεε−

+=1

1

et compte tenu de : VD α=

- 35 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

et de : tC

CRV

divgradCRV

divcc ∂

∂=− )*()*(

εεα

r

Ce résultat signifie que le soluté caractérisé par Kd se déplace dans le milieu

poreux avec une vitesse apparente V* = V/(εcR) qui permet de classer ainsi

théoriquement différentes substances les unes par rapport aux autres. Les corps dont la

migration peut être correctement approchée au moyen d'un tel modèle sont dits "bons

traceurs". Un bon traceur sera d'autant meilleur que sa vitesse de transfert apparente

sera plus grande.

5.3. Cas du transfert de chaleur

Un cas particulier intéressant de transfert en milieu poreux concerne la

migration de la chaleur. Les développements récents de la géothermie et les besoins en

modélisation qui en découlent justifient clairement qu'il en soit fait mention dans le

cadre de cet ouvrage traitant de la modélisation en hydrologie.

L'eau chaude peut être assimilée à une substance dissoute dans l'eau froide

migrant sous l'effet de la convection, de la dispersion et donnant lieu à des échanges

de chaleur avec la matrice rocheuse et l'eau ne participant pas à l'écoulement.

Dans ces conditions, le coefficient de dispersion devient un coefficient de

conductibilité thermique équivalente incluant le transfert de chaleur par conduction

dans un milieu continu composé d'eau et de roche ainsi que l'effet du mélange dû aux

hétérogénéités de vitesse des filets liquides non décrites par la vitesse de Darcy.

Considérant la finesse de division du milieu poreux et la lenteur relative du

déplacement de l'eau, on admet généralement l'existence d'une température unique

affectée à chaque Volume Elémentaire Représentatif (VER) résultant de l'échange irré-

versible et instantané de chaleur entre fraction mobile et fraction immobile.

L'équation de dispersion généralisée appliquée au transfert de chaleur devient:

tVdivgraddiv f ∂

∂=−

θγθγθλ )()*(r

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

où : λ représente le tenseur de conductibilité thermique apparente,

γf est la capacité calorifique de l'eau,

γs est la capacité calorifique de la fraction immobile (roche + eau immobile),

γ = εcγf = (1- εc)γs est la capacité calorifique équivalente du milieu poreux,

θ est la température du volume élémentaire représentatif,

Vr est la vitesse de Darcy.

Le formalisme mathématique qui rend ainsi compte du transfert de chaleur est donc

identique à celui du transfert d'un soluté dans le cas d'une interaction linéaire et

instantanée entre fraction mobile et fraction immobile. En particulier, la température

migre avec une vitesse apparente égale à:

Vfr

γγ

Lorsque la vitesse de l'écoulement est suffisamment grande, l'effet de dispersion

devient prédominant devant la conduction thermique, et l'on pose Vαλ ′= . Des

considérations théoriques basées sur une approche probabiliste du milieu poreux,

corroborées par l'expérience, permettent de penser que la dispersivité thermique α' est

supérieure à la dispersivité α; en première approximation, on retiendra α' = 3α

(Marsily, 1978).

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

6. LES STRUCTURES MODELISABLES AU MOYEN DU MODELE MACROSCOPIQUE

Le domaine d'application des modèles phénoménologiques est relativement vaste et

regroupe théoriquement l'ensemble des problèmes d'écoulement souterrain à différentes

échelles. Il n'est pas concevable, dans un ouvrage de synthèse, de passer en revue les

différents types de problèmes rencontrés. Nous nous bornerons donc à choisir deux

exemples qui nous paraissent constituer deux pâles encadrant les autres cas. Ces deux

exemples nous amèneront plus tard à introduire des nuances adaptées à chaque cas, dans

le traitement mathématique.

Le premier exemple concerne l'étude des ressources en eau, le second répond aux

besoins du génie civil.

6.1. Les modèles de ressources en eau

Ces modèles s’adressent aux structures hydrogéologiques à grande échelle, et plus

particulièrement au cas des bassins sédimentaires comportant éventuellement plusieurs

aquifères superposés. L'échelle du modèle peut varier dans d'assez larges proportions,

disons, pour fixer les idées, de quelques km2 (cas d'une nappe alluviale locale) à

quelques centaines de milliers de km2 (cas d'un grand bassin sédimentaire).

Dans de tels systèmes, la conceptualisation des écoulements fait généralement

appel à la notion de structure multicouche. L'alternance de couches sédimentaires de

lithologie variée amène à définir des aquifères où s'effectue l'essentiel des

circulations souterraines subhorizontales, et des semi-perméables séparant les

aquifères où les circulations horizontales sont négligeables, mais qui assurent les

transferts de l'eau entre aquifères, à l'échelle régionale.

L'idéalisation d'une telle structure conduit au modèle multicouche constitué par

un empilement de couches subhorizontales où l'écoulement est bidimensionnel (écoulement

en nappe), reliées entre elles par des écoulements sub-verticaux monodimensionnels.

Remarquons que la schématisation multicouche ne constitue qu'une simplification, en vue

d'un allègement des calculs ultérieurs, d'une structure tridimensionnelle en mettant à

profit les contrastes de perméabilité souvent rencontrés dans la nature.

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 4 : SCHEMA DE LA STRUCTURE MULTICOUCHE DES AQUIFERES TERTIAIRES, CRETACES ET JURASSIQUES DU BASSIN AQUITAIN

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Lorsque ces contrastes n'existent pas, ou bien lorsqu'il s'avère nécessaire de

décrire le comportement hydrodynamique d'un aquifère dans son épaisseur, on peut avoir

recours à une modélisation tridimensionnelle complète, ce qui, en fait, revient à

accroître le nombre de couches. Remarquons enfin que la schématisation multicouche

constitue une première discrétisation spatiale du domaine d'étude.

La figure 4 illustre les différentes démarches pour parvenir à cette

schématisation, sur l'exemple de la modélisation des aquifères tertiaires et

jurassiques du bassin aquitain. Dans cet exemple, huit couches aquifères ont été

retenues pour couvrir une superficie cumulée de 250.000 kM2 (Besbès, 1976).

Une bonne identification de la structure conditionne la représentativité du

modèle. Le travail du modélisateur doit donc débuter par une étude hydrogéologique

approfondie dont la conclusion amènera à proposer une ou parfois plusieurs

interprétations qui seront traduites à travers le modèle. Il convient cependant de

noter que le choix de la bonne structure dépend du problème posé, comme nous l'avons

déjà indiqué.

Les modèles de ressources en eau peuvent exiger la prise en compte d'un vaste

domaine étendu. Cela est d'autant plus vrai que le modèle intéressera des aquifères

plus profonds, dont les conditions aux limites physiques se situeront parfois à grande

distance. Il n'est pas rare, dans ces conditions, de traiter des superficies de

plusieurs dizaines de milliers de kM2 (exemple du bassin aquitain, déjà cité).

Les nappes superficielles ou phréatiques sont en général, tout au moins sous les

climats où les précipitations sont suffisantes, en relation avec le réseau

hydrographique pérenne qui constitue les limites hydrauliques, ce qui réduit

l'extension du modèle.

Les conséquences de l'ampleur d'un modèle sont de deux ordres:

- En premier lieu, le problème posé peut ne concerner qu'une petite partie du

domaine d'étude. Il en résultera vraisemblablement une hétérogénéité dans la

connaissance des caractéristiques du système se traduisant par une

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

concentration des données sur quelques secteurs particuliers. Cette situation

rend délicat l'emploi des techniques d'estimation, telles que le krigeage

(Delhommne. 1976) auxquelles on pourrait avoir recours pour l'introduction des

paramètres dans le modèle. Par ailleurs, la représentativité du modèle calé à

l'aide d'une information hétérogène risque d'être compromise dans certains

secteurs.

- En second lieu, comme nous le verrons au chapitre suivant, les techniques de

calcul qui sont employées ne diffèrent pas selon l’étendue du domaine

modélisé. La mise en oeuvre de ces techniques, fondées sur la discrétisation

spatiale, conduira ainsi à adopter un ordre de grandeur identique pour le

nombre des éléments discrets ou mailles quel que soit le type de problème

envisagé; ce nombre étant en fait déterminé plus par la capacité de traitement

des ordinateurs et la quantité de données à saisir que par la question posée.

6.2. Les modèles de génie civil

Nous classerons, dans cette catégorie, les modèles destinés à traiter les

écoulements de manière souvent détaillée, sur des domaines d'extension modeste pouvant

représenter, par exemple, la zone d'influence d'un aménagement. Tel sera, par exemple,

le cas du rabattement de nappe autour d'une fouille, de la prévision du débit d'exhaure

nécessaire à son assèchement, ou bien encore de la recherche de la surface libre de

l'écoulement à l'intérieur d'une digue en terre en vue de l'étude de sa stabilité.

Les caractéristiques de tels modèles par rapport au cas précédent sont les

suivantes:

- L'extension limitée du domaine d'étude permet une meilleure connaissance des

grandeurs le concernant (plus grand nombre de mesures, répartition spatiale

plus homogène). Parfois même, le milieu aura été créé artificiellement avec

des matériaux de propriétés définies à l'avance; ce sera, par exemple, le cas

pour une digue en terre.

- Les contours définissant les différents éléments des structures (noyaux

imperméables d'une digue, drains de pied, drains de tête, etc.) auront

- 41 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

généralement une influence notable sur les résultats et devront donc pouvoir

être représentés avec une précision suffisante.

- Les hypothèses simplificatrices utilisées à grande échelle pourront, dans

certains cas, ne pas être valables. L'hypothèse de Dupuit qui, en assimilant

l'écoulement en nappe à un écoulement à deux dimensions, amène à négliger la

composante verticale de l'écoulement, est par exemple inacceptable à

l'intérieur d'une digue ou au voisinage d'un ouvrage de captage. En toute

rigueur, le problème devra être traité de manière tridimensionnelle, ou bien

ramené à deux dimensions dans un plan vertical si les structures de

l'écoulement le permettent (problème plan ou axisymétrique).

- La question des conditions aux limites est en général compliquée par rapport

au cas précédent. Etant donné la taille réduite du domaine d'étude, certaines

limites physiques réelles de l'écoulement risquent de se trouver hors de

portée d'une extension raisonnable du modèle. Il en résulte que des limites

artificielles sans signification physique nette devraient parfois être

adoptées, ce qui restreindra la validité du modèle à des conditions définies

d'emploi.

Entre ces deux types de structures qui viennent d’être rapidement évoquées se

placent un certain nombre de cas intermédiaires parfois difficiles à traiter. Il

s'agit, en général, de problèmes qui associent la nécessité d'une représentation

détaillée de l'écoulement en quelques points particuliers localisés et celle d'avoir à

prendre en compte un vaste domaine d'étude pour atteindre, par exemple, les limites

hydrauliques du système. Il n'existe pas de méthodes pleinement satisfaisantes pour

faire face à ce genre de question.

Une méthode souvent employée consiste à combiner les deux types de modèles, en

réalisant d'abord l'étude à l'échelle régionale avec l'outil approprié, puis à en

extraire une ou plusieurs portions que l'on modélise plus finement en réglant les

conditions aux limites sur les résultats du modèle régional. Ce procédé est en général

très lourd. Une autre méthode qui peut paraître meilleure considère une discrétisation

de l'espace de taille variable permettant de raffiner localement l'information. Ceci ne

peut malheureusement être fait, comme nous en verrons des exemples plus loin, qu'au

- 42 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

prix d'une complication appréciable de la structure du modèle et des outils

informatiques.

6.3. Cas particulier des systèmes aquifères: écoulement en nappe

Les structures géologiques confèrent la plupart du temps aux systèmes aquifères

des conditions qui privilégient l'extension horizontale devant l'extension verticale.

Ceci a pour conséquence que, à l'échelle régionale, la composante verticale de

l'écoulement peut être le plus souvent négligée au profit des composantes horizontales

ou subhorizontales. Cette approximation, connue des hydrogéologues sous le nom

d'hypothèse de Dupuit, est justifiée par l'absence de variations significatives de la

charge (ou cote piézométrique) le long de la verticale au sein d'un aquifère, ce qui

permet de ramener à deux le nombre des variables d'espace dont dépend la fonction h. Il

convient toutefois de noter qu'à une échelle plus locale, notamment au voisinage

d'ouvrages de captage, l'approche bidimensionnelle peut être tout à fait illicite et

que seul un modèle tridimensionnel peut se révéler dans ce cas efficace.

Nous allons examiner comment il convient d'adapter les équations obtenues

précédemment au cas de l'écoulement en nappe.

Cas de l'écoulement: équation de diffusivité à deux dimensions

Le Volume élémentaire Représentatif (VER) adapté à l'écoulement en nappe doit

considérer le domaine d'écoulement sur toute sa hauteur mouillée entre les cotes z1, et

z2 (fig. 5). Le niveau z1, représente le substratum imperméable de la nappe, le niveau

z2, figurant soit le recouvrement imperméable d'une nappe captive, soit la surface

piézométrique d'une nappe libre dont la cote s'identifie alors avec la charge h.

En exprimant, pour la clarté de l'exposé, l'équation de diffusivité à trois

dimensions dans un repère cartésien. Ox, Oy, Oz supposé repère principal d'anisotropie

pour la perméabilité et en intégrant selon la verticale Oz supposée elle-même direction

principale d'anisotropie, il vient successivement:

- 43 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

qth

Szh

Kzy

hK

yxh

Kx szyx +

∂∂

=∂∂

∂∂

+∂∂

∂∂

+∂∂

∂∂

)()()(

soit, en intégrant et en tenant compte de δh/δz = 0 (hypothèse de Dupuit):

∫∫∫∫ +∂∂

=∂∂

∂∂

+∂∂

∂∂ 2

1

2

1

2

1

2

1

z

z

z

zsy

z

zx

z

z

qdzdzth

Sdzyh

Ky

dzxh

Kx

)()(

soit encore, en admettant que z1 et z2 varient peu en fonction de x et y:

∫ ∫∫∫ +=∂∂

∂∂

+∂∂

∂∂ 2

1

2

1

2

1

2

1

z

z

z

zs

z

zy

z

zx qdzdzS

ydyK

yxdxK

x)())(())((

qui devient, en posant:

dzKTz

zxx ∫=

2

1

: Transmissivité de l'aquifère suivant les directions Ox et Oy

dzKTz

zyy ∫=

2

1

: (dimension [L2] [T-1])

dzSSz

zs∫=

2

1

: Coefficient d'emmagasinement (sans dimension)

∫=2

1

z

z

qdzQ : Débit prélevé par unité de surface

Qth

Syh

Tyx

hT

x yx +∂∂

=∂∂

∂∂

+∂∂

∂∂

)()(

- 44 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 5 : VOLUME ELEMENTAIRE REPRESENTATIF (VER) ADAPTE A L'ECOULEMENT EN NAPPE

- 45 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Remarquons que la notion de transmissivité ainsi introduite s'étend au cas des

nappes libres dans la mesure où l'on admet que cette transmissivité peut dépendre de la

cote piézométrique h et de la répartition de la perméabilité de l'aquifère selon la

verticale:

dzzKhTz

zxx )()( ∫=

2

1

La notion d'emmagasinement n'est par contre pas directement transposable au cas

de la nappe libre dans la mesure où le volume élémentaire représentatif présente un

volume variable assujetti aux variations de h, ce qui rend inapplicable l'équation de

continuité dans les hypothèses où nous l'avons introduite en 4.1.. On montre toutefois

qu'il est possible d'étendre la notion de coefficient d'emmagasinement au cas de la

nappe libre en lui substituant la valeur de la porosité de drainage du milieu poreux.

Le stockage et le déstockage d'eau correspondent alors à des phénomènes

d'humidification ou de drainage du milieu selon le sens de déplacement de la surface

libre en fonction du temps. Signalons, pour terminer, que les mécanismes

d'humidification-drainage ne sont pas instantanés, et ceci d'autant plus que le milieu

est plus finement divisé et que, par voie de conséquence, ce modèle peut constituer une

simplification irréaliste si l'on cherche à représenter des évènements intervenant sur

un court laps de temps.

Cas du transfert de matière: équation de dispersion à deux dimensions

Le traitement à deux dimensions de l'équation de diffusivité est rendu possible

par l'invariance de la charge selon la verticale au sein d'un aquifère. Rien ne permet

de transposer cette hypothèse au cas de la concentration en éléments dissous. Au

contraire, l'hétérogénéité verticale de la perméabilité horizontale qui était sans

conséquence sur le niveau piézométrique joue un rôle fondamental sur la vitesse de

transfert du polluant qui risque ainsi d'être différente selon les variations

lithologiques des roches constituant l'aquifère. La figure 6 illustre le cheminement

d'une substance dans un milieu présentant une hétérogénéité verticale de perméabilité.

- 46 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Si l'on choisit de représenter, au moyen du modèle, une concentration moyenne

selon la verticale, calculée à partir de la vitesse moyenne de l'écoulement déduite de

la loi de Darcy appliquée à deux dimensions, on sera conduit à reporter l'effet de

l'hétérogénéité sur la dispersion et le problème deviendra celui de l'estimation du

coefficient de dispersion. On constate d'ailleurs que le coefficient de dispersion à

retenir dépend de la distance parcourue, phénomène mis en évidence expérimentalement,

dénommé effet de parcours (Dieulin, 1980).

Malgré cet inconvénient notable du modèle, on utilise cependant fréquemment

l'équation de dispersion à deux dimensions faute de disposer d'information suffisante

sur l'hétérogénéité verticale et pour éviter d'avoir à manipuler un modèle

tridimensionnel toujours lourd.

L'équation de dispersion devient dans ce cas, en l'exprimant dans un repère

cartésien Ox, Oy:

tF

sct

CcCyV

yCxV

xy

CyyD

x

CyxD

yy

CxyD

x

CxxD

x ∂∂

−+∂

∂=

∂−

∂−

∂+

∂+

∂+

∂ρεε )()()()

)()( 1

Rappelons que cette équation doit être complétée par la relation liant F,

concentration massique dans la fraction immobile à C concentration volumique dans l'eau

mobile. Vx et Vy sont dans ce cas les composantes de la vitesse de Darcy, moyenne

horizontale.

Dans la mesure où le tenseur de dispersion D admet comme direction principale la

vitesse de Darcy, il devra être considéré la plupart du temps sous sa forme générale:

=

yyyx

xyxx

DD

DDD

dans le repère Ox, 0y.

- 47 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 6 : SCHEMA DE PROPAGATION D'UN POLLUANT DANS UN MILIEU PRESENTANT UNE HETEROGENEITE DE PERMEABILITE (K1 < K2)

- 48 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

6.4. Les conditions aux limites

Les conditions aux limites concernent les règles d'échange des flux entre le

domaine modélisé et le milieu extérieur. Dans le cadre de nos préoccupations, il

s'agira d'un flux d'eau, d'un flux de matière migrant avec l'eau, ou encore d'un flux

de chaleur.

D'une manière générale, il est avantageux pour la représentativité du modèle que

les limites du domaine d'étude coïncident avec des limites physiques où la description

des flux puisse être effectuée de manière conceptuelle à partir des observations sur le

terrain. Nous avons vu que cela n'est pas toujours commodément possible, et oblige

parfois à étendre le domaine du modèle au-delà de la zone d'intérêt.

Soulignons que la description des conditions aux limites, fait partie de la définition

de la structure du modèle et en conditionne par conséquent fortement la validité; cette

remarque est évidente si l'on considère que c'est justement à travers les limites que

s'établit le bilan d'un aquifère.

Cas des modèles d'écoulement

On ramène schématiquement les conditions aux limites d'un modèle d'écoulement à deux

cas qu'il est possible de combiner entre eux:

- Conditions de charges ou de niveaux piézométriques imposés: On admet, dans ce

cas, que le niveau piézométrique le long d'un contour (linéaire ou surfacique)

est déterminé par une cause extérieure. Les situations naturelles justiciables

d'un tel traitement sont variées et concernent plusieurs degrés d'échelle de

la modélisation. Il peut s'agir à l'échelle locale ou régionale d'un plan

d'eau libre (lac, réservoir, cours d'eau, etc.), d'un seuil autorisant le

déversement d'une nappe (source), mais encore à l'échelle régionale d'une zone

de nappe libre suffisamment alimentée pour que la piézométrie moyenne imposée

par le réseau hydrographique drainant puisse être considérée comme invariante.

La figure 7 illustre différentes configurations possibles.

- 49 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

- Conditions de débits imposés: Les échanges avec le milieu extérieur sont dans

ce cas réglés par la connaissance a priori du flux d'eau traversant une

portion donnée de limite. Diverses configurations relèvent de ce type de

condition aux limites: zone d'alimentation de piedmont à l'amont d'un

aquifère, infiltration à partir d'un cours d'eau non directement connecté à la

nappe, ligne de courant de l'écoulement souterrain suffisamment éloignée de la

zone d'intérêt de l'étude pour qu'elle puisse être raisonnablement considérée

comme invariante. Ce dernier cas est particulièrement utile lorsqu'il est

nécessaire d'interrompre le domaine d'étude avant d'atteindre une limite

hydraulique réelle de la nappe. La figure 8 schématise quelques exemples de

conditions de flux imposé.

- Conditions mixtes: charge imposée avec limitation du débit. L'existence d'une

condition de charge ou piézométrie imposée implique la possibilité d'un

échange de flux quelconque entre l'aquifère et le milieu extérieur, ce qui

peut, dans certains cas, ne pas correspondre au comportement réel du système.

Nous en donnerons deux exemples parmi les plus courants (figure 9).

- 50 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Le long de l'affleurement AA’, les précipitations

sont supérieures au flux d'eau pouvant s'écouler

dans la nappe; la charge est constante, voisine

de la cote du sol.

Le long de la ligne de contact nappe-rivière AA', la

charge est constante imposée à la valeur H0

FIGURE 7 : EXEMPLES DE CONDITIONS AUX LIMITES DE TYPE "CHARGE IMPOSEE"

- 51 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Le long de AA', les précipitations sont inférieures

aux possibilités d'écoulement de la nappe;

l'alimentation est définie par le taux d'infiltration

de la pluie.

La rivière est déconnectée de la nappe; l'alimentation

l'aquifère le long de AA' est définie par

l'infiltration percolant à travers la zone non

saturée.

FIGURE 8 : EXEMPLE DE CONDITIONS AUX LIMITES DE TYPE "DEBIT IMPOSE"

- 52 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Le débit QNAP percolant de la nappe vers la rivière est limité à la valeur Q 0 (QO <0)

dans la situation 2 où nappe et rivière sont déconnectées.

Les sources A et A' débitent, la charge est imposée au niveau des exutoires.

La source A' est tarie, le débit est imposé à zéro.

FIGURE 9 : EXEMPLES DE CONDITIONS AUX LIMITES "MIXTES" (CHARGE IMPOSEE AVEC DEBIT LIMITE)

- 53 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Une source est bien représentée par un potentiel imposé correspondant à la cote

de l'émergence tant que celle-ci débite; mais si le régime d'écoulement de la nappe

subit une modification entraînant une baisse du niveau piézométrique au-dessous de

l'émergence, il y a tarissement de l'exutoire sans que, pour autant, il y ait admission

d’eau de l'extérieur vers l'intérieur comme le permettrait la représentation de la

source par une condition de charge imposée. Dans cette nouvelle configuration, une

condition de débit imposé nul doit être substituée à la première.

Un échange nappe-rivière peut également être traité par une condition de charge

imposée correspondant à l'altitude du fil de l'eau aussi longtemps que la rivière reste

en connexion avec la nappe (figure 9, cas 1). En cas d'étiage prononcé de la nappe,

l'approfondissement de la surface piézométrique peut provoquer l'apparition d'une zone

non saturée à travers laquelle le transfert de l'eau n'est plus régi par les lois

entrant dans la conception du modèle d'écoulement de la nappe (figure 9, cas 2). On

pourra admettre, en première approximation, que le débit d'alimentation de la nappe en

provenance de la rivière prend une valeur constante dépendant des caractéristiques

physiques de l'aquifère et des matériaux constituant le lit. Là encore, une condition

de débit imposé doit être substituée à une charge imposée.

Cas des modèles de transfert de matière (ou de chaleur)

Dans les cas qui nous occupent, c'est-à-dire la modélisation des systèmes aquifères de

perméabilité notable, le transfert par convection est prédominant devant le transfert

par dispersion. Les mécanismes réglant les échanges de matière aux limites sont donc

régis au premier chef par les caractéristiques de la vitesse de l'écoulement à travers

les limites.

- Cas d'un flux d'eau entrant: Il est, dans ce cas, nécessaire de définir la

concentration de l'eau en provenance du milieu extérieur; le flux de matière

est alors représenté par le produit de la composante normale de la vitesse de

Darcy et de cette concentration (figure 10, cas a).

- Cas d'un flux d'eau sortant: Le transfert de matière est indépendant des

conditions extérieures et se trouve défini par la vitesse de Darcy et la

- 54 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

concentration des eaux de nappe à l'exutoire déterminé par le modèle (figure

10, cas b).

Le cas du transfert de chaleur relève du même type de traitement, à ceci près que

les échanges par conduction pure peuvent ne pas être négligeables, en particulier

lorsque l'écoulement est faible, ou même nul. Ainsi les fuites thermiques au toit et au

mur des aquifères devront le plus souvent être prises en compte.

6.5. Cas du milieu fissuré

Il existe actuellement deux approches des écoulements en milieu fissuré: l'une

prenant en compte les fissures élémentaires une par une, l'autre considérant un milieu

continu équivalent.

Seule la première approche permet, à partir des lois de l'écoulement relativement

complexes en fissures élémentaires (Louis, 1974), une représentation fidèle à l'échelle

fine. Elle nécessite toutefois la connaissance précise de la position dans l'espace et

des propriétés de chaque fissure élémentaire. Cette approche est donc d'une application

pratique peu réaliste à l'échelle de la modélisation des systèmes hydrologiques qui

nous concernent.

L'approche milieu continu fait l'hypothèse qu'il est possible d'assimiler le

milieu fissuré à un milieu finement divisé et d'obtenir ainsi un tenseur de

perméabilité à partir des propriétés de chaque famille de fractures - -conductrices de

l'eau. Les propriétés de chaque famille peuvent être déterminées soit de manière

théorique à partir de formules impliquant les propriétés géométriques moyennes des

fissures élémentaires (ouverture, espacement, orientation, rugosité), soit directement

à partir d'essais in situ individualisant chaque famille.

L'approche milieu continu n'est alors valable qu'à une certaine échelle

d'observation. Elle ne permettra, par exemple, d'accéder exactement ni aux charges ni

aux vitesses d'écoulement dans les fractures, mais seulement à des valeurs moyennes sur

un ensemble de fractures.

- 55 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Cas b: La nappe à la concentration C alimente la rivière

avec un débit Q0 ; le flux de matière le long de AA' est

sortant et vaut Q0xC.

Cas a: l'eau de la rivière à la concentration C alimente la

nappe avec un débit Q0 ; le flux de matière est entrant le

long de AA' et vaut Q0 x C0.

FIGURE 10 : EXEMPLES DE CONDITIONS AUX LIMITES DANS LE CAS DU TRANSFERT DE MATIERE

- 56 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Pour ce qui concerne le transfert de matière, il n'existe pas, dans le cas du

milieu fissuré, de théorie particulièrement élaborée. Les mécanismes présentés pour le

milieu poreux, à savoir la convection, la dispersion et l'interaction entre fraction

mobile et fraction immobile, sont également présents. Notons cependant que les

expériences ayant permis une mesure des valeurs des paramètres n'existent qu'en nombre

beaucoup plus restreint.

Quelques points particuliers méritent d'être soulignés:

- La porosité totale et, par conséquent, la porosité cinématique offerte à

l'écoulement, sont souvent de plusieurs ordres de grandeur inférieures aux

valeurs observées en milieu poreux. Le transfert convectif sera donc d'autant

plus rapide.

- Corrélativement, l'imbrication entre la fraction mobile du milieu et la

fraction immobile étant moins poussée que pour le milieu poreux, il pourra

être nécessaire de distinguer les propriétés dans les fractures de celles dans

la matrice. On distinguera, par exemple dans le cas du transfert de chaleur,

la température de l'eau de celle des blocs encaissants en tentant de

représenter les échanges thermiques entre fissures et roches par un mécanisme

de conduction thermique pure.

- Dans certains types de problèmes, la perméabilité de matrice éventuelle ne

peut être négligée devant la perméabilité équivalente du réseau de fractures.

Il faut alors recourir à une modélisation complexe couplant deux milieux

continus avec diffusion d'un milieu dans l'autre.

Les caractéristiques hydrauliques différentes d'une famille de fractures à une

autre amènent le plus souvent à considérer une perméabilité anisotrope dont la mesure

sur le terrain reste difficile. Cette anisotropie a pour conséquence une plus grande

hétérogénéité des vitesses conduisant généralement à une augmentation des propriétés

dispersives du milieu.

- 57 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

7. TRAITEMENT MATHEMATIQUE DES EQUATIONS DU MODELE MACROSCOPIQUE

On montre, en mathématique, que l'équation de diffusivité et l’équation de la

dispersion possèdent une solution et une seule lorsque l'on s'est donné:

- un domaine d'intégration correspondant au domaine d'étude de l'écoulement

saturé,

- des conditions à la limite de type potentiel imposé (condition de Dirichlet)

et/ou de type flux imposé (condition de Neuman),

- des conditions initiales: carte piézométrique et/ou carte des concentrations à

l'instant t correspondant au début de la simulation.

La recherche de solutions explicites formulables au moyen des fonctions

classiques de l'analyse mathématique n'est cependant possible que pour un nombre

restreint de cas présentant des configurations simples et fait appel à des techniques

que l'enseignement actuel des mathématiques néglige de plus en plus. En pratique, on se

limite à l'utilisation de quelques solutions-types (cinq ou six) devenues classiques et

l'on fait appel dans les autres cas aux techniques de l'analyse numérique, qui sont

d'un usage courant depuis la généralisation des moyens informatiques.

Nous ne reprendrons pas, dans le cadre de cet ouvrage, la description des

solutions classiques, en priant le lecteur de se reporter aux nombreux ouvrages

spécialisés d'hydrogéologie et d'hydraulique (Bear, 1979, Marsily, 1981). Nous

insisterons, par contre, particulièrement sur la mise en oeuvre des méthodes numériques

appliquées aux problèmes de ressources en eau.

7.1. Principes généraux des méthodes numériques appliquées à l'hydrogéologie

Les méthodes proposées font toutes appel au principe de discrétisation de

l'espace et éventuellement du temps. Le problème posé est celui de la recherche d'une

fonction définie en chaque point x,y,z de l'espace, et à chaque instant t obéissant,

dans un certain domaine, à une équation aux dérivées partielles et à certaines

conditions aux limites. Il s'agira, par exemple, de la fonction niveau piézométrique

h(x,y,t) relative à un écoulement en nappe, solution de l'équation de diffusivité ou

- 58 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

encore de la fonction concentration C(x,y,t), solution de l'équation de la dispersion.

Nous nous placerons, pour la suite de l'exposé, dans le cas bidimensionnel

correspondant à la notion d'écoulement en nappe.

Par le canal de la discrétisation, c'est-à-dire du découpage de l'espace en

éléments géométriques discrets, le problème général de la recherche de la solution

γ(x,y) en tout point de l'espace, est transformé en celui de la recherche d'une

fonction Γ(x,y), constituée par la réunion des fonctions Γi(x,y) définies chacune sur

un élément i du domaine. Les fonctions Γi auxquelles on cherche à donner a priori une

représentation mathématique simple (on choisit habituellement des polynômes) sont appe-

lées fonction d'approximation. La solution γ est alors connue par son approximation Γ

dont la valeur dépend de la forme mathématique adoptée pour les différents Γi et de la

discrétisation du domaine. La validité de la méthode est subordonnée à l'erreur de

discrétisation γ-Γ qui doit tendre vers 0 lorsque le nombre d'éléments discrets tend

vers l’infini.

Lorsque l'on choisit des fonctions constantes (polynôme de degré zéro) pour

fonctions d'approximation, les éléments étant en général rectangulaires ou carrés, la

méthode est appelée méthode des différences finies. Lorsque l'on emploie des fonctions

d'approximation polynomiales de degré supérieur ou égal à 1, la méthode prend le nom de

méthode des éléments finis. Dans l'un ou l'autre des cas, la méthode aboutit finalement

à un ou plusieurs systèmes d'équations linéaires dont les inconnues sont les valeurs

approchées de la fonction recherchée en un nombre donné de points du domaine.

Nous présentons, dans le cadre de cet ouvrage, un développement relatif à la mise

en oeuvre des différences finies, bien adapté à l'étude des ressources en eau. La

méthode des éléments finis sera plus rapidement évoquée en insistant particulièrement

sur les avantages qu'elle peut représenter pour le traitement des problèmes de type

particulier.

7.2 Traitement des systèmes aquifères monocouches par la méthode des différences finies

- 59 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Soit un domaine D plan figurant l'extension d'un aquifère assimilable à une nappe

unique d'extension subhorizontale. La discrétisation de l'espace est réalisée dans un

premier temps au moyen d'une grille d'éléments carrés ou mailles de côté a (figure 11).

Nous avons vu que la fonction niveau piézométrique h(x,y) est solution de

l'équation de diffusivité sur ce domaine, soit:

th

SQyh

Tyx

hT

x yx ∂∂

+=∂∂

∂∂

+∂∂

∂∂

)()(

en choisissant le repère Ox,Oy parallèle aux éventuelles directions principales

d'anisotropie.

Nous choisirons pour approximation de h des fonctions constantes Hi définies sur

chaque maille i, et nous ferons les calculs en admettant que la valeur en est attribuée

au centre de la maille.

On procèdera de même pour les différents paramètres de l'équation, en définissant

sur chaque maille i:

- une transmissivité Ti (éventuellement deux, Txi et Tyi , si le milieu est

anisotrope),

- un coefficient d'emmagasinement Si

- un débit total algébrique prélevé Qi.

En écrivant que les fonctions d'approximation satisfont localement, c'est-à-dire

pour chaque maille, à l'équation de diffusivité, on obtient, comme on va le voir, un

système d'équations linéaires définissant les valeurs Hi au centre des mailles. Une

méthode générale peut être proposée; nous décrirons, dans ce mémoire, une démarche plus

physique faisant appel aux lois élémentaires de l'écoulement en milieu poreux.

Isolons une maille donnée i du domaine avec ses quatre voisines, que nous

désignerons par les notations N (nord), E (est), S (sud), et W (ouest) (figure 12).

- 60 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

- Le principe de continuité implique la conservation du débit d'eau entrant

algébriquement par les quatre limites de la maille i, ce qui s'écrit:

QN + QE + QS + QW = Qi + Qemi

où Qemi désigne le débit emmagasiné dans la maille i.

- La loi de Darcy permet d'exprimer chaque composante du débit entrant en

fonction de la transmissivité et du gradient hydraulique:

)(* ii HHNTN

aHHN

aTNQN −=−

=

où TN représente la transmissivité de l'aquifère entre la maille i et sa

voisine dans la direction du N. Hi et HN sont les approximations de la charge

respectivement sur la maille i et sur la maille N

- Enfin l'équation d'état fournit l'expression du débit emmagasiné:

dtdH

SaQ iiemi

2=

où Si est le coefficient d'emmagasinement sur la maille i. Tous calculs faits,

l'expression (2) devient:

dtdH

SaQHHWTWHHSTSHHETEHHNTN iiiiiii

2+=−+−+−+− )()()()(

- 61 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 11 : DISCRETISATION SPATIALE D'UN DOMAINE D AU MOYEN DE MAILLES CARREES DE COTE a

- 62 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 12 : BILAN DES FLUX EN EAU SUR LA MAILLE i

- 63 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Le même travail peut être exécuté pour chaque maille du modèle mettant en oeuvre

les n valeurs Hi (i=l,n) des fonctions d'approximation attribuées aux n mailles, ce qui

conduit à un système différentiel linéaire du premier ordre, dont les n fonctions

inconnues du temps sont les fonctions Hi.

Pour simplifier les écritures, nous adopterons la notation matricielle:

dtdH

SaQHT 2+=

en définissant les vecteurs:

piézométrie :

=

nH

H

H M1

et débit :

=

nQ

Q

Q M1

et les matrices T et S construites respectivement à partir des transmissivités et des

coefficients d'emmagasinement.

Propriétés de la matrice des transmissivités T

Les transferts de l'eau aux frontières de la maille sont régis par les paramètres

TN, TE, TS et TW représentant la transmissivité de la nappe dans les quatre directions

N, E, S et W, parfois désignées sous le nom de transmissivités de passage. Ce sont

elles en particulier qu'il conviendra d'ajuster au cours du calage du modèle pour

assurer l'adéquation entre les niveaux piézométriques calculés et observés. On préfère

en général, plutôt que d'introduire quatre paramètres par maille, engendrer les

transmissivités de passage par le calcul à partir d'une transmissivité unique moyenne

attribuée à chaque maille.

La transmissivité de passage Tij entre deux mailles notées i et j est alors

fonction des transmissivités Ti et Tj de chacune des mailles:

- 64 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

),(),( ijjiij TTfTTfT ==

Plusieurs formulations peuvent être proposées pour la fonction f, qui doit

cependant être obligatoirement symétrique afin de respecter la réciprocité du calcul

des échanges entre mailles:

- moyenne arithmétique : 2

jiij

TTT

+=

- moyenne géométrique : jiij TTT =

- moyenne harmonique : ji

jiij TT

TTT

+=

*2

Remarquons que la dernière formulation par la moyenne harmonique correspond à la

règle de composition des transmissivités pour les écoulements en série. Tij est alors

la transmissivité du milieu homogène équivalent formé à partir de deux autres milieux

homogènes de transmissivités Ti et Tj.

Des études faites sur la répartition statistique des transmissivités dans un

aquifère (Delhomme, 1976) ont montré que la moyenne géométrique représentait bien la

tendance spatiale des valeurs mesurées ponctuellement. Néanmoins, les transmissivités

que l'on sera conduit à affecter aux mailles d'un modèle ne seront

qu'exceptionnellement mesurées sur le terrain et l'on devra procéder par calage, ce qui

réduit l'intérêt d'une recherche approfondie sur la meilleure formulation du calcul des

transmissivités de passage.

Dans ces conditions, la matrice des transmissivités 1 possède les propriétés

suivantes :

- elle est symétrique,

- elle est diagonalement dominante: le terme diagonal se présente comme la somme

changée de signe des termes non diagonaux : (TN + TE + TS + TW)

- la ligne (ou la colonne) ne comporte au maximum que cinq termes non nuls,

conférant à la matrice une structure de bande. La largeur de bande dépend de

- 65 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

l'ordre dans lequel sont rangées les mailles au moment de l'établissement des

équations de bilan.

Ces propriétés générales entraînent des conséquences quant aux méthodes de

résolution des systèmes linéaires associés à la matrice T.

Introduction des conditions aux limites

Les conditions aux limites de charge imposée et de débit imposé peuvent être

facilement incorporées au système d'équations (4).

- Cas du débit imposé (figure 13). Considérons la maille i, dont la bordure N

vient, par exemple, en limite du domaine modélisé, sachant qu'un débit Q 0

imposé par les conditions extérieures transite à travers cette limite.

L'équation du bilan des flux s'établit alors comme suit:

dtidH

iSaiQiHHWTWiHHSTSiHHETEQ 20 +=−+−+−+ )(*)(*)(*

On constate que la contribution du coefficient TN disparaît, tandis que le

débit total prélevé devient au second membre Qi-Q0.

- Cas du niveau piézométrique imposé (figure 14). Supposons que les conditions

extérieures fixent le niveau piézométrique de la maille i à la valeur Hoi. Il

n'est plus nécessaire d'écrire l'équation du bilan des flux pour cette maille

i et la dimension du problème se trouve diminuée de 1. Les mailles voisines de

i voient, par contre, leurs équations modifiées, comme le montre l'exemple de

la maille j supposée située au S de i:

dt

jdH

jSajQjHHWTWjHHSTSjHHETEjHoiHTN 2+=−+−+−+− )(*)(*)(*)(*

- 66 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

On constate que le terme diagonal demeure inchangé, mais que le terme non

diagonal associé à TN disparaît en apportant la contribution TN Hoi au débit

prélevé Qj.

La prise en compte des conditions aux limites ne modifie donc pas la forme du

système d’équations T restant identiques.

- 67 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 13 : BILAN DES FLUX EN EAU SUR LA MAILLE i AVEC UNE LIMITE

A DEBIT IMPOSE AU NORD

- 68 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 14 : BILAN DES FLUX EN EAU SUR LA MAILLE i AVEC UNE LIMITE A CHARGE IMPOSEE

AU NORD

- 69 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Solution en régime permanent

Dans les conditions de régime permanent, on admet que les termes du bilan en eau

de la nappe, exprimés dans les conditions aux limites et dans le débit algébrique

prélevé, sont invariants dans le temps et l'on recherche l'état stationnaire

correspondant.

Le système d’équations devient alors:

QHT =*

L'existence de la solution est conditionnée par les propriétés de la matrice T .

On montre que si le modèle ne possède aucune maille dont la charge est imposée, le

déterminant de T est nul; il ne peut alors y avoir de solution que si le bilan de la

nappe est par ailleurs bouclé, C'est-à-dire que si la somme des composantes de Q est

nulle. Il devient dans ce cas possible de fixer arbitrairement la valeur d'une des

inconnues, ce qui entraîne l'existence d'une infinité de solutions correspondant à une

famille de cartes piézométriques parallèles entre elles. Par contre, lorsqu'il se

trouve au moins une maille dont le niveau piézométrique est imposé, le système admet

une solution unique.

Méthodes de calcul numérique de la solution

L'analyse numérique propose de nombreuses méthodes de résolution des systèmes

linéaires dont l'exposé dépasse le cadre de nos propos (Gastinel. 1966; Korganoff,

1967; Remson, 1971). Nous nous limiterons ici à quelques principes généraux issus de

l'expérience.

On distingue deux types de méthodes:

- 70 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

- les méthodes directes organisées autour d'un algorithme qui conduit à la

solution définitive après exécution des calculs. L'algorithme type est celui

de Gauss-Jordan, appelé aussi méthode de substitution;

- les méthodes itératives qui font appel à un algorithme répétitif au moyen

duquel on converge vers la solution par itérations successives. L'algorithme

de Gauss-Seidel amélioré par sur-relaxation en constitue la méthode type.

L'algorithme de Gauss-Jordan est sûr, et sa précision suffisante dans la plupart

des cas avec les moyens de calcul modernes. Son principal inconvénient réside dans le

fait que l'encombrement mémoire nécessaire et le temps de calcul croissent assez

rapidement avec le nombre de mailles, en première approximation comme son carré. Son

emploi peut ainsi devenir prohibitif pour les gros modèles, en particulier dans le cas

de problèmes multicouches ou même tridimensionnels.

Les propriétés déjà évoquées de la matrice T impliquent la certitude théorique

de la convergence de l'algorithme de Gauss-Seidel quelle que soit la nature du problème

formulé par la méthode des différences finies. La convergence peut cependant être

difficile, en particulier lorsque la matrice T se trouve mal conditionnée par la

présence de forts contrastes de transmissivités au sein de l'aquifère. La relative

modestie du temps calcul et de l'encombrement mémoire nécessaires, même au prix d'un

grand nombre d'itérations (proportionnel au nombre de mailles), en font une méthode

universelle qui convient aux modèles de taille importante.

D'autres méthodes itératives peuvent être proposées, mais dont les performances

par rapport à l'algorithme de Gauss-Seidel sont soumises à la géométrie du problème et

à la répartition des conditions aux limites.

En conclusion, pour les application pratiques en hydrogéologie, nous pensons

qu':U est raisonnable de se restreindre à un petit nombre de méthodes numériques

universelles qui conduisent au résultat dans tous les cas, même si elles ne mettent pas

toujours à profit les avantages d'une configuration particulière. On pourra retenir les

principes suivants:

- 71 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

- les modèles de taille modérée (inférieurs à 1000 mailles) se traitent bien au

moyen de l'algorithme direct de Gauss-Jordan;

- au-delà, il devient préférable d'employer une méthode itérative peu

contraignante comme l'algorithme de Gauss-Seidel amélioré par sur-relaxation;

- en cas de difficulté de convergence, il peut être nécessaire de revenir à une

méthode directe, même au prix d'un allongement de la durée des calculs.

Solution en régime transitoire

Le problème posé est la résolution d'un système différentiel linéaire du premier

ordre:

dtdH

SaQHT *2+=

en vue du calcul de l'évolution du vecteur H au cours du temps. Les méthodes classiques

procèdent de proche en proche après découpage de la période de simulation en

intervalles de temps ∆t (ou pas de temps) non nécessairement égaux.

En posant l'approximation t

tHttH

dt

dH

−∆+= sur l'intervalle de temps [t,t+∆t],

le système (6) devient:

tHH

SaQHTttt

∆−

+=∆+

2

Différentes possibilités s’offrent alors selon la date à laquelle on exprime la

quantité HT pour chaque pas de temps:

- Méthode explicite: HT est exprimé à l'instant t, d’où l'on tire:

)(*)(* QHTSatHH tttt −∆+= −∆+ 12

- 72 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

- Méthode implicite: HT est exprimé à l'instant t+∆t, d'où l'on tire:

ttt HtSa

QHtSa

T **)(∆

−=∆

− ∆+22

Il est également possible de recourir à une méthode mixte explicite-implicite

formulable de la manière suivante:

tHH

SaQHTHTttt

ttt

∆−

+=+−∆+

∆+ ***)( 21 θθ

avec : 150 ≤< θ,

Existence des solutions, stabilité

Le système d'équations discrétisées du régime transitoire possède toujours une

solution unique dès que l'on se donne un état initial (carte piézométrique à l'instant

t=0). La discrétisation du temps conduisant aux systèmes (8) ou (9) introduit cependant

certaines restrictions dans la possibilité d'obtenir numériquement la solution. On

montre que la méthode explicite n'est stable que si l'on opère avec des pas de temps

dont la durée est inférieure à une valeur critique ∆tc qui dépend des paramètres

hydrodynamiques de l'aquifère. La valeur de ∆tc pour un problème donné s'obtient par la

relation:

i

i

nic TWTSTETNSa

t)(

min),( +++

=∆=

2

1

Pour les nappes présentant une forte diffusivité (T/S>>l) et lorsque les mailles

sont de petite taille (100 à l000m), le pas de temps critique peut devenir relativement

petit, de l'ordre de quelques heures, ce qui implique un grand nombre de pas de temps

pour couvrir la période de simulation.

- 73 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

La méthode implicite est par contre inconditionnellement stable quel que soit le

pas de temps.

Méthodes de calcul numérique de la solution

La méthode explicite, sous réserve de l'utilisation d'un pas de temps

suffisamment petit ne pose pas de problèmes de calcul numérique, l'obtention de Ht+∆t en

fonction de Ht dans l'expression (8) ne demandant que des additions et multiplications

matricielles.

La méthode implicite nécessite, pour sa part, la résolution d'un système

d'équations linéaires de matrice tSaTM ∆−= /2 à chaque pas de temps, ce qui rend

la quantité de calculs comparable à celle d'un régime permanent. La matrice tSa ∆/2

étant diagonale, les propriétés énoncées pour T demeurent inchangées pour la matrice

M . Il en résulte que les méthodes numériques proposées pour le cas du régime permanent

sont applicables au régime transitoire. La méthode directe de Gauss-Jordan perd

cependant son intérêt dans la mesure où la rapidité de convergence de la méthode

itérative de Gauss-Seidel avec sur-relaxation est fortement augmentée par le fait que

d'une part, le calcul étant mené de proche en proche d'un pas de temps à un autre, la

solution initiale n'est jamais très éloignée de la solution finale, et que, d'autre

part, la matrice M dont le poids de la diagonale est renforcé par la contribution du

terme tSa ∆/2 , confère de meilleures propriétés au processus itératif.

7.3. Traitement des systèmes aquifères multicouches

La méthode de traitement numérique de l'équation de diffusivité qui vient d'être

exposée peut être sans difficulté adaptée au cas des systèmes aquifères multicouches.

Chaque couche figurant un aquifère individualisé est maillée à l'aide de mailles

carrées de côté a, de telle sorte que les différentes mailles, lorsqu'elles existent,

se correspondent en projection verticale (figure 15).

- 74 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 15 : DISCRETISATION SPATIALE D'UN DOMAINE BICOUCHE

- 75 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 16 : BILAN DES FLUX EN EAU SUR LA MAILLE i DANS LE CAS

MULTICOUCHE

- 76 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Le bilan des flux pour chacune des mailles s'établit alors comme suit, en prenant

l'exemple d'une maille i quelconque (figure 16). Le principe de continuité permet

d'écrire:

emii QQQBQHQWQSQEQN +=+++++

où QN, QE, QS et QW représentent les échanges d'eau entre la maille i et ses voisines

situées dans les directions N, E, S et W dans la même couche :

- Qi est le débit total algébrique prélevé dans la maille i,

- Qemi est le débit emmagasiné,

- QH et QB figurent les débits échangés respectivement avec l'aquifère supérieur

et l'aquifère inférieur à travers les semi-perméables, ou débits de drainance.

Aux débits de drainance près, les termes du bilan sont identiques au cas

monocouche, et seront donc évalués de la même manière.

Calcul des débits de drainance

Soit HH et HB les niveaux piézométriques dans les mailles des couches supérieure

et inférieure situées en regard de la maille i:

EHHHH

aKHQH−

= 2*

EBHHB

aKBQB−

= 2*

où KH et KB sont les perméabilités des semi-perméables; EH, EB sont leurs épaisseurs.

En posant TH = a2(KH/EH) et TB = a2(KB/EB), on définit des coefficients de transfert

verticaux, parfois appelés par abus de langage transmissivités verticales.

- 77 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Remarque: La formulation du débit de drainance qui vient d'être proposée n’est en toute

rigueur valable qu'en régime permanent, car elle néglige en effet la capacité de

stockage du semi-perméable en postulant que le débit vertical qui quitte l'aquifère

supérieur est identique à celui qui pénètre dans l'aquifère inférieur. La modélisation

complète est possible, mais d'une pratique peu courante due à l'importante complication

des calculs; nous évoquerons plus loin quelques méthodes possibles.

Traitement numérique des équations de bilan des flux en multicouche

Le bilan des flux effectué pour l'ensemble des n mailles du modèle par la méthode

précédente conduit au système différentiel linéaire suivant:

dti

dH

iSa

iQiHHBTBiHHHTHiHHWTWiHHSTSiHHETEiHHNTN

2+=−+−+−+−+−+− )()()()()()(

Ce système possède la même forme mathématique que le système correspondant au cas

monocouche, la matrice des transmissivités T étant simplement complétée par les termes

TH et TB sans que ses propriétés en soient changées.

Tous les développements déjà faits concernant l'introduction des conditions aux

limites, la recherche des solutions en régime permanent et en régime transitoire

s'appliquent donc encore.

Quelques remarques s'imposent cependant sur la mise en oeuvre des méthodes

numériques, dues à l'existence des termes de drainance:

- il convient de prendre garde à l'ordre de grandeur des coefficients de

transfert verticaux TH et TB par rapport aux transmissivités de passage. En

effet, dans leur définition interviennent non seulement les caractéristiques

des semi-perméables, mais aussi la surface de la maille. Il importe donc de

définir un maillage adapté, sachant que les mailles devront être d'autant plus

petites que le rapport perméabilité/ épaisseur du semi-perméable sera plus

grand.

- 78 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

- la présence des termes supplémentaires TH et TB dans la matrice T majore la

largeur des bandes dans des proportions notables; il s'ensuit une augmentation

de l'encombrement mémoire et du temps de calcul qui pénalise la méthode de

résolution directe de Gauss-Jordan par rapport à la méthode itérative de

Gauss-Seidel.

- la formulation du pas de temps critique de la méthode implicite devient:

iiiiii

i

nic TBTHTWTSTETNSa

t+++++

=∆=

2

1 ),(min

7.4. Quelques perfectionnements utiles de la méthode des différences finies

Amélioration de la discrétisation spatiale

La discrétisation de l'espace en mailles carrées régulières présente une grande

facilité d'emploi aussi bien en ce qui concerne la mise en oeuvre des modèles que la

programmation des algorithmes. Cette technique devient cependant pénalisante par suite

de l'augmentation du nombre de mailles lorsqu'il s'avère nécessaire de recourir à un

découpage fin. Nous proposons ici deux méthodes permettant de ne raffiner le maillage

qu'en certains secteurs localisés du modèle.

- Maillage de type "écossais": Cette méthode utilise des éléments rectangulaires

disposés de manière analogue aux rayures d'un tissu écossais. La génération du

maillage demeure ainsi presque aussi simple qu'avec les éléments carrés.

L'inconvénient principal réside dans le fait qu'un resserrement local des

lignes ou des colonnes se répercute jusqu'aux limites du domaine, entraînant

le risque de constitution d'éléments trop allongés préjudiciables à un bon

déroulement des méthodes numériques (figure 17).

Le bilan des flux pour chaque rectangle s'effectue de manière analogue au cas

du carré, les transmissivités de passage étant simplement affectées d'un

coefficient de forme traduisant l'allongement des rectangles.

- 79 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

L'exemple de la figure 17 conduirait à la formulation suivante:

dti

dHSab

iQiHHW

a

bTWiHHS

b

aTSiHHE

a

bTEiHHN

b

aTN *)()()()( +=−+−+−+−

qui met en évidence le rôle du rapport de forme a/b sur l'ordre de grandeur

des coefficients.

- Maillage de type "gigogne": On engendre ce type de maillage en partant de

mailles carrées régulières que l'on découpe localement en 4 parties égales. Le

processus peut être répété un nombre théoriquement illimité de fois et le

raffinement du maillage reste ainsi limité à la stricte étendue nécessaire. Le

procédé reste également valable d'un aquifère à l'autre pour les systèmes

multicouches (figure 18).

- 80 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 17 : DISCRETISATION SPATIALE EN MAILLES RECTANGULAIRES (type

"écossais")

- 81 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 18 : MAILLAGE IRREGULIER, TYPE "GIGOGNE"

- 82 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Si l'on prend la précaution de réaliser le découpage de manière continue de

façon à ce qu'une maille ne puisse avoir comme voisine qu'une maille de même

taille ou de taille immédiatement supérieure ou inférieure, la géométrie

n'affecte que faiblement les coefficients de transfert et les risques de

problèmes numériques sont écartés.

La transmissivité de passage se calcule aisément comme le montre l'exemple

suivant que l'on généraliserait facilement à tous les cas de figure (figure 19).

Le débit transitant en direction de la maille i s'exprime par:

)()( 131312121312 32

32

HHTHHTQQQ −+−=+=

en négligeant la composante du gradient hydraulique parallèle à la limite entre

mailles.

L'utilisation de la moyenne harmonique pour définir la transmissivité de

passage à partir des transmissivités de chaque maille conduit à la formulation:

21

2112 2

3TT

TTT

+= ,

31

3113 2

3TT

TTT

+=

Tous calculs faits, on obtient une matrice des transmissivités analogue à

la matrice correspondant au cas du maillage régulier et possédant les mêmes

propriétés, sa largeur de bande étant seulement augmentée puisqu' une ligne peut

comporter jusqu'à 17 termes non nuls dans la configuration maximale.

- 83 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

T1

:

transmissivité sur la maille 1

T2

:

transmissivité sur la maille 2

T3

:

transmissivité sur la maille 3

T12 :

transmissivité de passage entre 1 et 2

T13

:

transmissivité de passage entre 1 et 3

FIGURE 19 : CALCUL DE LA TRANSMISSIVITE DE PASSAGE POUR UN MAILLAGE TYPE « GIGOGNE »

- 84 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Condition aux limites de drainage

Ce type de condition à la limite permet un raffinement de la représentation des

conditions de niveau piézométrique imposé particulièrement adapté au cas des rivières

ou des exutoires drainant une nappe. Les exemples suivants en démontrent le principe de

fonctionnement.

Soit H0 la cote de drainage moyenne d'un exutoire dans une maille (cote d'une

source, cote du fil de l'eau d'une rivière, etc..). Le débit drainé algébriquement par

l'exutoire est exprimé par:

)( 0HHTPQ −=

où H est le niveau piézométrique dans la maille et TP un coefficient de transfert ayant

la dimension d'une transmissivité qui caractérise l'impédance hydraulique de l'exutoire

(propriétés du lit de la rivière).

Ce mode de représentation du débit drainé se prête aisément à l'introduction d'un

seuil Q0 minorant algébriquement le débit drainé. La formulation serait alors la

suivante:

≥−=

0

0

QQ

HHTPQ )(

Avec la valeur Q0=0, on représenterait ainsi une source capable de drainer de

l'eau en provenance de la nappe, mais interdisant toute entrée d'eau en cas de

rabattement du niveau piézométrique au-dessous de la cote de drainage H0. Une valeur de

Q0 négative marquerait un débit d'alimentation maximal de la nappe de valeur |QO|

tenant, par exemple, compte de l'apparition d'une zone non saturée entre une rivière et

la nappe alluviale (figure 20).

- 85 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Nappe et rivière déconnectées

Q = Q0

(Q0 < 0)

Nappe et rivière en connexion

Q = TP(H – H0)

FIGURE 20 : CALCUL DU DEBIT ECHANGE ENTRE UNE NAPPE ET UNE RIVIERE

H0 : cote du plan d'eau

H : niveau piézométrique de la nappe

TP: coefficient de transfert

Q : débit échangé (positif dans le sens nappe-rivière)

- 86 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Cas des nappes libres

Il est possible de généraliser à une nappe libre le système d'équations

discrétisées obtenu par la méthode des différences finies.

Les modifications concernent les points suivants:

- Le coefficient d'emmagasinement reflète à présent un mécanisme de

drainage-humidification, et prend une valeur correspondant à la porosité de

drainage; ceci n'affecte cependant pas le formalisme des équations.

- La notion de transmissivité peut être généralisée en tenant compte de

l'épaisseur mouillée de l'aquifère. Dans le cas où la perméabilité est

homogène selon la verticale, la transmissivité devient proportionnelle à cette

épaisseur mouillée que l'on calcule comme la différence entre le niveau

piézométrique et la cote du substratum imperméable de la nappe désignée par

HMUR (figure 21).

)( HMURHKT −=

Le coefficient de transfert entre deux mailles s'exprime, en adoptant une

formule de composition harmonique des transmissivités, par:

)()()(*)(*

222111

22211112

2HMURHKHMURHKHMURHKHMURHK

T−−−−−

=

- 87 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 21 : CALCUL DE LA TRANSMISSIVITE EN NAPPE LIBRE : T = K (H-HMUR)

- 88 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

)()(

)(

)()(

TOI

MUR

librecaptif

TOITOI

HHTHQHHTHQ

HHHTTT

SSSS

HHHH

−=−=−==≅=≅=

<≥−−

121

20

2422

1010

FIGURE 22 : DENOYAGE DES AQUIFERES CAPTIFS, MODE DE CALCUL DU DEBIT DE DRAINANCE Q

- 89 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Problème de dénoyage des aquifères captifs

Le passage de l'état captif à l'état libre et réciproquement est possible pour un

aquifère même profond, lorsque son niveau piézométrique se trouve rabattu en-deçà des

formations imperméables ou semi-perméables qui le recouvrent.

Au niveau du modèle, les conséquences sont de trois ordres:

- le coefficient d'emmagasinement change d'ordre de grandeur, quelques 10-2 pour

une nappe libre à quelques 10-4 pour une nappe captive;

- la transmissivité passe d'une valeur constante à une valeur variable en

fonction de l'épaisseur mouillée;

- le calcul de la drainance en provenance d'un éventuel aquifère supérieur est

modifié;

- l'exemple de la figure 22 résume les différentes formulations suivant les cas.

La prise en compte des mécanismes de dénoyage nécessite donc la connaissance en

chaque maille du modèle de la perméabilité, de la cote du substratum et de la cote du

toit des aquifères.

Traitement des cas de non linéarité par des méthodes numériques

Nous venons de voir que la modélisation des conditions aux limites de drainage

avec débit limité, celle des nappes libres et, a fortiori, celle des mécanismes de

dénoyage -ennoyage des aquifères captifs introduisent dans les équations des conditions

de non linéarité qui rendent caduques les méthodes d'analyse numérique linéaire

utilisées jusqu'ici. La technique employée pour y porter remède est fondée sur la

linéarisation itérative qui nécessite une certaine expérience pour être utilisée

correctement.

- Cas du régime transitoire: C'est celui qui, paradoxalement, pose les problèmes

les moins délicats. La linéarisation s'effectue aisément en exprimant les

coefficients non linéaires des équations en fonction des niveaux piézo-

- 90 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

métriques connus en début de pas de temps, puis en en calculant l'évolution

par la méthode implicite; le procédé est alors appelé semi-implicite. Un

raffinement possible, mais la plupart du temps superflu, consiste à réitérer

les calculs sur le même pas de temps en relinéarisant les équations à l'aide

des valeurs trouvées précédemment; la méthode est dite méthode du prédicteur-

correcteur.

- Cas du régime permanent: Les problèmes numériques sont ici plus délicats. Si

l'on emploie une méthode directe (Gauss-Jordan), l'exécution complète de

l'algorithme est nécessaire à chaque tentative de linéarisation, ce qui

accroît le volume des calculs de manière souvent prohibitive. Si l'on utilise

par contre une méthode itérative (Gauss-Seidel), la linéarisation des

coefficients peut être faite au cours des itérations, mais on risque de

compromettre la convergence. La méthode consiste à recourir à l'expérience en

n'effectuant les linéarisations qu'avec une périodicité contrôlée regroupant

un certain nombre d’itérations (de l'ordre d'une dizaine).

Traitement des semi-perméables capacitifs

La notion de semi-perméable capacitif s'applique au cas d'une formation

géologique peu perméable réalisant une liaison par drainance entre deux aquifères et

dont la diffusivité est suffisamment petite pour que les variations du stock en eau n'y

soient pas négligeables. Le problème revient alors à évaluer, dans cette hypothèse, le

débit QH et QB pénétrant au mur et au toit de chaque aquifère (figure 23).

Le débit QH alimentant l'aquifère 1 en un point de sa surface provient de la

différence de niveau piézométrique ∆H = H2-H1 de part et d'autre du semi-perméable en

ce point que l'on supposera homogène, de perméabilité K, d'épaisseur e et de

coefficient d'emmagasinement spécifique S. Une formulation analytique de l'évolution du

débit QH au cours du temps en fonction de la variation de ∆H est possible, mais

nécessite un calcul numérique complexe basé sur une relation de convolution (Houpeurt,

- 91 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

1975), ce qui exige de conserver en mémoire l'historique piézométrique des aquifères,

ce qui devient rapidement prohibitif.

Une méthode plus réaliste consiste à résoudre numériquement par la méthode des

différences finies l’équation de diffusivité à une dimension relative au semi-perméable

en introduisant comme conditions aux limites les niveaux piézométriques calculés dans

les aquifères. Il est alors nécessaire de procéder à un maillage du semi-perméable,

mais il subsiste un allègement par rapport à une représentation tridimensionnelle

complète dans la mesure où les flux horizontaux entre mailles dans les semi-perméables

ne sont pas pris en compte.

FIGURE 23: CALCUL DU DEBIT DE DRAINANCE AU TOIT (QH) ET AU MUR (QB) D’UN AQUIFERE

- 92 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Remarque sur la prise en compte l’anisotropie de transmissivité

La méthode des différences finies est mal adaptée à la représentation d'une

anisotropie de transmissivité dont les directions principales ne sont pas parallèles

aux axes du maillage, comme nous l'avons supposé jusqu'à présent. En effet, le débit

échangé entre une maille et sa voisine ne dépend, dans notre formulation, que de la

composante normale du gradient hydraulique calculé entre ceux deux mailles; ceci n'est

exact que si la direction joignant le centre des mailles coïncident avec une direction

principale d'anisotropie. Il est, par contre, aisé de tenir compte d'une anisotropie

selon les axes du maillage en introduisant pour chaque maille deux valeurs de la

transmissivité Tx et Ty selon Ox et Oy.

Dans le cas général d'une anisotropie de directions quelconques évoluant dans

l'espace, il semble préférable de recourir à la méthode des éléments finis.

7.5. Application de la méthode des différences finies à la résolution de l'équation de

la dispersion

D'une manière générale, la méthode des différences finies se révèle peu efficace

pour la résolution de l'équation de la dispersion avec les hypothèses qui ont été

formulées. En effet, nous avons vu qu'il est admis qu'une des directions principales du

tenseur de dispersion est portée par la vitesse de Darcy, ce qui implique que

normalement ces directions puissent évoluer dans l'espace, et même dans le temps, ce

qui est mal commode sinon impossible à réaliser en différences finies. Certains cas

particuliers peuvent cependant relever de cette méthode, lorsque la direction de la

vitesse d'écoulement est uniforme lorsque la dispersion peut être négligée devant la

convection, ou encore lorsque le tenseur de dispersion est isotrope.

A titre d'exemple, nous donnerons un aperçu de la mise en oeuvre des différences

finies dans ce dernier cas pour un système aquifère monocouche en considérant un

élément dissous qui n'interagit pas avec la fraction immobile du milieu.

L'équation à résoudre est alors la suivante:

- 93 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

tC

yVyC

xVxC

yC

Dyx

CD

x c ∂∂

=∂

∂−

∂∂

−∂∂

∂∂

+∂∂

∂∂ ε)()(

)()(

Comme dans le cas de l'écoulement, on réalise un maillage du domaine

d'intégration à partir d'éléments carrés réguliers, de côté a, auxquels on attribue une

valeur discrète des différentes grandeurs intervenant dans l'équation de dispersion

(figure 24).

Le système d'équations discrétisées donnant la concentration est alors obtenu en

écrivant pour chaque maille le bilan des flux de matière accompagnant le mouvement de

l'eau.

FIGURE 24: BILAN DES FLUX DE MATIERE EN DIFFERENCES FINIES DANS LA MAILLE i

- 94 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Calcul du flux dispersif

Ce calcul est semblable en tout point à celui qui a été décrit dans le cas de

l'équation de diffusivité.

Flux traversant la limite nord: FN = DN * e(CN-Ci)

où Ci représente la concentration dans la maille i et CN celle de la maille située au

nord de i.

DN est le coefficient de dispersion dans la direction nord qui peut être obtenu à

partir des coefficients de dispersion affectés à chaque maille, par exemple en en

affectant la moyenne harmonique. Rappelons que ce coefficient de dispersion peut être

proportionnel au module |V| de la vitesse de Darcy. e est l'épaisseur moyenne de

l'aquifère.

Une formulation analogue s'applique au trois autres directions est, sud et ouest.

Calcul du flux convectif

Le flux convectif FN’ traversant, par exemple, la limite nord est le produit de

la composante normale de la vitesse de Darcy par la concentration véhiculée par

l'écoulement. La solution offrant le maximum de signification physique consiste à

utiliser la concentration de la maille située en amont de l'écoulement, ce qui implique

donc un choix variable suivant le sens de la vitesse normale.

Fixant arbitrairement une valeur positive à la vitesse VN entre la maille i et la

maille nord lorsqu'elle est dirigée vers i, on écrira:

- FN’ = VN * a * e * CN pour VN > 0

- FN’ = VN * a * e * Ci pour VN < 0

- 95 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Equation du bilan des flux pour la maille i

Le bilan complet s'établit comme suit:

emconvectiffluxdispersifflux

FFWFSFEFNFWFSFEFN =+++++++−−

444 3444 214444 34444 21 ''''

Fem représente le flux de matière emmagasiné, c'est-à-dire la variation à chaque

instant de la masse contenue dans la porosité cinématique.

tC

eaF icem ∂∂

= ε**2

d'où, finalement, le système d'équations discrétisées s'exprimant en notation

matricielle par:

dtdC

EaCA *2=

en introduisant le vecteur

=

nC

C

C M1

dont les composantes sont les concentrations sur

les n mailles, la matrice A construite à partir des coefficients de dispersion et des

vitesses de Darcy et la matrice diagonale E contenant les porosités cinématiques

Résolution numérique du système d'équations discrétisées

On constate facilement qu'avec les hypothèses utilisées, la matrice A possède

les mêmes propriétés que la matrice T relative à l'écoulement, excepté la propriété de

symétrie qui est supprimée par la présence du terme convectif. Les méthodes numériques

proposées pour l'écoulement S'appliquent donc ici dans les mêmes conditions.

- 96 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

En pratique, le calcul des concentrations devra être mené en parallèle avec celui

de l'écoulement qui permet de définir les vitesses de Darcy qui interviennent comme

paramètres de l'équation de dispersion. Dans la mesure où l'on admet que la

concentration en substance dissoute n’a pas d'influence sur l'écoulement (hypothèse du

"traceur" déjà citée), ces calculs peuvent être totalement découplés.

Un cas particulier souvent rencontré consiste à étudier en fonction du temps

l'évolution de la concentration en admettant des conditions d'écoulement permanentes.

Remarque concernant la discrétisation du terme convectif: dispersion numérique

Un transfert de matière dissoute qui s'effectue sans dispersion conserve les

fronts abrupts de concentration. On constate que cette situation n'est pas respectée

par les modèles mathématiques utilisant une méthode discrète d'intégration des

équations par suite de l'apparition d'un certain étalement comparable à l'effet de la

dispersion, connu sous le terme de dispersion numérique. Certaines améliorations

peuvent être apportées au modèle en vue d'une correction partielle de cette dispersion

numérique. La discussion des méthodes proposées pour la minoration des erreurs de

dispersion numérique sort du cadre de ce mémoire - et nous renverrons le lecteur à des

documents spécialisés (Goblet, 1981).

7.6. Les problèmes d'écoulement local: méthode des éléments finis

Selon la distinction faite au chapitre 6, un certain nombre de questions

concernent les écoulements en milieu poreux dans des domaines généralement de faible

extension mais pouvant présenter des caractéristiques géométriques complexes et des

hétérogénéités marquées de leurs propriétés. Appartiennent à cette catégorie, les

problèmes de génie civil.

Bien que débordant le cadre strict de ce mémoire centré sur les ressources en

eau, nous donnerons cependant un aperçu des méthodes numériques qui nous semblent les

mieux appropriées.

- 97 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

L'équation de diffusivité, conséquence du modèle macroscopique du milieu poreux,

s'applique toujours à ce type de problème; seule sa méthode de résolution peut

différer, la technique des éléments finis étant particulièrement intéressante.

Généralités sur la méthode des éléments finis

Cette méthode de l'analyse numérique est particulièrement riche et s'adapte à une

multitude de problèmes physiques.

La théorie générale en est assez complexe. Nous nous contenterons ici d'une

approche pragmatique à deux dimensions et en régime permanent basée sur des fonctions

d'approximations linéaires mises en oeuvre sur des éléments de base triangulaires.

Soit un domaine d'intégration D où l'écoulement est régi par l'équation de

diffusivité à deux dimensions en régime permanent accompagnée de ses conditions aux

limites:

qyh

Tyx

hT

yyh

Txx

hT

x yxyxyx =∂∂

∂∂

+∂∂

∂∂

+∂∂

∂∂

+∂∂

∂∂

)()()()(

On réalise un pavage du domaine en éléments triangulaires dont chaque sommet i

est repéré par ses coordonnées xi et yi (figure 25).

Le niveau piézométrique h(x,y) est supposé approximé sur chaque élément par la

fonction linéaire : h(x,y) = A0 + A1x + A2y où AO, A1, et A2 sont des coefficients

constants. L'attribution des valeurs Hi, Hj, Hk, appelées valeurs nodales, aux sommets

i, j et k de chaque triangle permet d’identifier les coefficients A0, A1, et A2 sous la

forme d'une combinaison linéaire des valeurs nodales, en fonction des coordonnées des

trois sommets. Ces relations s'écrivent en notation matricielle:

=

2

1

0

111

A

A

A

yx

yx

yx

H

H

H

kk

jj

ii

k

j

i

- 98 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 25: EXEMPLE DE MAILLAGE ELEMENTS FINIS UTILISANT LE TRIANGLE COMME ELEMENT DE

BASE

Introduisant la matrice des transmissivités

=yTxyTxyTxTT dans le cas général

d'un écoulement anisotrope, la loi de Darcy s'écrit:

−=

∂∂∂∂

−=

2

1

A

AT

yhxh

TQ

Q

y

x

sur chaque élément triangulaire; ce qui permet de calculer le flux d’eau pénétrant

algébriquement à l'intérieur de l'élément (figure 26):

- flux traversant ij : )()( ixjxyQiyjyxQijQ −+−−=

- flux traversant jk : )()(j

xk

xyQjykyxQjkQ −+−−=

- 99 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

- flux traversant ki : )()( kxixyQkyiyxQkiQ −+−−=

Etant donné la répartition homogène du flux le long d'un côté, conséquence de la

linéarité de la fonction d'approximation de h, on attribuera à chacun des sommets des

triangles la moitié du flux traversant les côtés adjacents, soit:

−−−−−−−−−

=

y

x

jiji

ikk

kjki

k

j

i

Q

Q

xxyy

xxyiy

xxyy

Q

Q

Q

)()(

)()(

)()(

21

Des relations précédentes, on tire:

−−−−−−−−−

=

k

j

i

jiikkj

jiikkj

H

H

H

xxxxxx

yyyyyy

DA

A

)()()(

)()()(12

1

avec D = (yi-yk)*(xi-xj) - (yi-yj)*(xj-xk)

d'où, finalement:

=

k

j

i

k

j

i

H

H

H

M

Q

Q

Q

*

en introduisant la matrice M caractéristique des propriétés de chaque triangle.

FIGURE 26: METHODE DES ELEMENTS FINIS, BILAN DES FLUX SUR UN TRIANGLE DE BASE

- 100 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

L'agrégation des contributions de tous les triangles ayant un sommet commun

conduit à une matrice globale G caractéristique de l'ensemble du domaine d'intégration

reliant le vecteur Q dont les composantes sont les débits prélevés dans le domaine

d'intégration D supposés attribués à chaque sommet au vecteur H dont les composantes

sont les valeurs nodales du niveau piézométrique.

HGQ *=

Le calcul du vecteur H peut alors s'effectuer au moyen des techniques décrites

précédemment à propos de la méthode des différences finies.

- Avantages de la méthode des éléments finis: La méthode qui vient d'être

décrite dans le cas particulier de fonctions d'approximation linéaires est

généralisable à des cas plus complexes, et sa précision numérique peut en être

ainsi améliorée les coordonnées des noeuds du maillage figurent explicitement

dans les équations, ce qui permet d'attribuer aux éléments des formes

variables pouvant s'adapter aux contours du domaine et aux limites des

hétérogénéités internes. On peut même concevoir l'emploi d'un maillage

déformable pour suivre les déplacements d'une limite variable, par exemple

dans le cas de la recherche de la position d'une surface libre de l'écou-

lement. Les propriétés d'anisotropie (perméabilité, transmissivité,

coefficient de dispersion) peuvent être facilement intégrés dans les

équations.

- Inconvénients de la méthode des éléments finis: En contrepartie des avantages

précédents, l'ampleur des calculs numériques se trouve augmentée. De plus, et

ceci d'autant plus que le degré de complexité des fonctions d'approximation

croît, la signification physique des équations discrétisées est moins

apparente que pour la méthode des différences finies, ce qui rend plus délicat

les applications pratiques.

- 101 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

- Domaines d'application de la méthode des éléments finis : Comme cela a déjà

été dit, en matière de ressources en eau, la méthode des éléments finis ne

présente généralement que peu d'intérêt dans la mesure où la description des

contours et des hétérogénéités internes des systèmes modélisés n'est pas

susceptible d'une grande précision. Pour les écoulements plus localisés tels

ceux rencontrés en génie civil, la méthode s'avère cependant fructueuse et est

généralement mise en oeuvre à deux dimensions pour traiter des problèmes

plan-verticaux ou présentant une symétrie radiale. La figure 27 donne quelques

exemples de maillages appliqués à des problèmes de ce type.

- 102 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Etude de l'écoulement au voisinage d'une galerie de

mine

Etude de l'écoulement dans une digue en terre

FIGURE 27 : EXEMPLES DE MAILLAGE EN ELEMENTS FINIS APPLIQUES A DES PROBLEMES DE GENIE CIVIL

- 103 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

8. LA PRATIQUE DE L'EMPLOI DES MODELES EN HYDROGEOLOGIE

En guise de conclusion à ce mémoire destiné à la présentation des techniques de

modélisation en hydrogéologie, trois exemples d'applications pratiques seront évoqués.

Le premier exemple concerne l'étude prévisionnelle des conséquences d'un aménagement

sur un système hydrogéologique en vue de l'alimentation en eau potable dans le Nord de

la France.

Le second exemple concerne des problèmes très spécifiques de relations entre

l'eau douce et l'eau salée rencontrés à l'occasion de l'étude d'un aquifère côtier au

Gabon.

Le troisième traite de l'évolution des risques de pollution d'un aquifère profond sous

l'effet d'une exploitation intensive en zone aride.

8.1. Etude du soutien du débit d'étiage d'une rivière par pompage dans la nappe

La présente application tire sa substance d'un projet d'augmentation artificielle

du débit d'étiage de la rivière la Lys en prélevant par forages des débits importants

dans la nappe de la Craie qu'elle draine naturellement et en rejetant ces débits à la

rivière.

Ces travaux, commandités par l'Agence Financière de Bassin Artois-Picardie, ont

mobilisé plusieurs organismes d'étude, notamment le Bureau de Recherches Géologiques et

Minières et l'Ecole des Mines de Paris (Besbès et al., 1981).

Devant la croissance de la demande en eau de l'agglomération lilloise, il a fallu

créer une usine de traitement des eaux de la rivière la Lys, en amont d'Aire-sur-Lys

(Pas-de-Calais) afin de bénéficier d'une eau relativement peu polluée. Dès la

conception de cette usine dont la capacité de traitement s'élève à 100.000m3/j, il a

été prévu de renforcer le débit d'étiage de la rivière qui s'avère le plus souvent

insuffisant en été (30.000m3/j). L'une des solutions envisagées repose sur des pompages

saisonniers dans la nappe de la Haute-Lys, objet de la présente étude.

Définition du cadre et des objectifs de l'étude

- 104 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

La Lys et son affluent la Traxenne forment à Lugy un bassin versant de 85km2 (cf.

figure 28). Ce bassin comprend la nappe de la Craie surmontant les schistes gréseux du

Primaire, réputés imperméables. L'étude des faciès de la Craie et de leurs

caractéristiques hydrauliques permet de distinguer deux unités aquifères présentes sur

la zone d'étude: la nappe supérieure du Turonien moyen se déversant dans les vallées

sous forme de sources diffuses à tarissement rapide; la nappe inférieure du Cénomanien

dont les débits sont réguliers. Le Turonien inférieur, plus marneux, constitue une zone

peu perméable entre ces deux nappes autorisant leur communication par drainance. La

présence de ce niveau semi-perméable accroît l'intérêt de capter la nappe inférieure

pour l'alimentation de la rivière.

Deux problèmes essentiels se posent alors:

- déterminer le rendement de l'exploitation saisonnière de la nappe car les

pompages en nappe vont d'une part diminuer les apports naturels à la rivière,

mais encore induire en certains secteurs une re-infiltration de la rivière

vers la nappe;

- déterminer la recharge de la nappe en période d'arrêt des pompages et prévoir

l'évolution de son état piézométrique après plusieurs années d'exploitation en

étiage.

Pour tenter de répondre à ces deux questions, un ensemble de modèles d'écoulement

du bassin de la Haute Lys a été conçu, validé par une expérimentation de pompage dans

la nappe réalisé sur 6 mois, pendant l'année 1978.

La modélisation entreprise passe par trois étapes complémentaires faisant appel

aux techniques décrites précédemment:

- modèle de convolution pluie-débit sur le bassin,

- modèle de retard à l'infiltration,

- modèle maillé des écoulements souterrains.

- 105 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 28 : BASSIN VERSANT DE LA LYS A LUGY (Pas de Calais, France)

- 106 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Modèle de convolution pluie-débit sur le bassin

L'étude de la relation pluie-débit sur le bassin de la Haute Lys répond à deux

objectifs:

- fournir un moyen de calcul du débit naturel de la rivière à partir des seules

pluies, donc tout-à-fait indépendamment de l'influence de pompages. Ce calcul

était en effet nécessaire pour l'évaluation du rendement de l'essai de pompage

de 1978;

- étudier les mécanismes d'infiltration sur le bassin en vue de définir les

entrées du modèle maillé venant en phase finale de l'étude.

Ce modèle, de type "boite noire", nécessaire au stade préliminaire de l'étude,

est par contre totalement impuissant pour remplir l'objectif de simulation à long terme

du comportement des aquifères sous l'effet des pompages.

L'entrée du modèle de convolution est la pluie nette calculée en affectant au sol

une "réserve facilement utilisable", RFU, et en appliquant l’évapotranspiration

potentielle déterminée par la formule mensuelle de Thornthwaite. Ce bilan est d'abord

réalisé au pas de temps journalier, puis cumulé sur sept jours, pas de temps de

l’algorithme de déconvolution.

Connaissant la série des débits Q observés à la station de Lugy située à

l'exutoire du bassin, on a recherché, par déconvolution un opérateur F linéaire et

stationnaire, indépendant de l'état du système.

L'ajustement du modèle a porté sur la recherche de la pluie corrigée la mieux

adaptée à la modélisation des débits. 'Dans ce but, on a considéré d'une part la

qualité de l'ajustement obtenu exprimé par l'écart entre débits réels et débits

calculés, et d'autre part le degré de signification physique de la réponse

impulsionnelle ainsi obtenue, traduit par son allure et sa superficie.

- 107 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Différents essais utilisant une RFU comprise entre 0 et 150mm ont été réalisés.

Les meilleurs résultats, représentés sur la figure 29; ont conduit à adopter la valeur

RFU = 100mm. La pluie efficace moyenne estimée sur le bassin s'élève, dans ces

conditions, à 6 l/s/km2.

Débits moyens journaliers

Pluie nette FIGURE 29: RECONSTITUTION DES DEBITS DE LA LYS A LUGY AU MOYEN D'UN MODELE DE

DECONVOLUTION LINEAIRE

- 108 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Modèle de retard à l'infiltration

Entre le moment où l'eau s'infiltre dans le sol et celui où elle parvient à la

nappe, il existe un certain retard dont la valeur dépend de la perméabilité des

terrains dans la zone non saturée et de la profondeur de la surface libre de la nappe

sous le sol.

Sur l'exemple du bassin de la Haute Lys, l'examen des variations piézométriques

en différents lieux comparées à celles de la pluie efficace montre une grande

hétérogénéité de cet effet de retard à l'infiltration justifiant de préciser ce

concept.

On distinguera pour la modélisation en un point donné du bassin, d'une part le

débit d'infiltration s'identifiant à la pluie nette calculée précédemment, d'autre part

le débit d'alimentation parvenant à la nappe après avoir percolé à travers la tranche

non saturée. Entre ces deux grandeurs, on considère qu'il y a conservation de la masse,

l'alimentation ne représentant qu'une infiltration différée dans le temps par

l'intermédiaire d'une loi appelée fonction de retard. On admet (Besbès, 1978) que ce

transfert est un phénomène linéaire et l'on peut écrire en un lieu donné du bassin une

relation de convolution entre l'infiltration p et l'alimentation q:

∫∞−

−=t

dpttq τττφ )()()(

Sous réserve de connaître q(t), il est possible d'identifier par déconvolution

les fonctions de retard φ en différents points du bassin.

Une estimation de q(t) peut être obtenue en mettant à profit les variations

piézométriques au cours du temps. Etant donné la linéarité de l'équation de diffusivité

caractérisant les transferts en milieu poreux, il existe une relation de convolution

entre le débit d'alimentation q au voisinage d'un piézomètre et la remontée effective

s(t) de la nappe en ce même piézomètre. La remontée effective est définie comme la

différence entre le niveau réel de la nappe et celui qui aurait été observé si

l'alimentation de la nappe n'avait pas eu lieu depuis le début de la période de calcul.

- 109 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Ce dernier niveau peut être calculé à l'aide du modèle maillé représentant le

comportement de l'aquifère dont il sera question au paragraphe suivant.

De la relation:

∫∞−

−=t

dqtFts τττ )()()(

on tire par déconvolution la réponse F de l'aquifère.

L'identification de l'alimentation de la nappe nécessite donc une série de

déconvolutions réalisées pour les différents piézomètres, couplées à des simulations au

moyen du modèle maillé. Dans la mesure où le calage du modèle maillé dépend lui-même en

partie du calcul de l'alimentation, le processus doit être appliqué de manière

itérative selon l'illustration de la figure 30.

FIGURE 30 : SCHEMA DE LA METHODE D'IDENTIFICATION DE L'ALIMENTATION D'UNE NAPPE ASSOCIANT UN MODELE MAILLE ET UN MODELE BOITE NOIRE (d'après M. Besbes)

Modèle maillé des écoulements souterrains

- 110 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

La modélisation des écoulements souterrains au sein des aquifères de la Haute Lys

a été réalisée au moyen d'un modèle maillé basé sur l'intégration par la méthode des

différences finies des équations de diffusivité représentant une structure bicouche.

Les deux aquifères du Cénomanien et du Turonien moyen sont représentés par deux couches

sièges d'écoulement bidimensionnels, reliées entre elles par un semi-perméable

autorisant la drainance.

L'espace est discrétisé en mailles carrées de trois tailles différentes

permettant de représenter finement avec des mailles de 500 m de côté le bassin de la

Lys là où une meilleure précision était souhaitable, et d'atteindre les conditions aux

limites figurées par les rivières des bassins voisins avec des mailles de 2 kilomètres

(figure 31).

Un premier calage des transmissivités a été réalisé en régime permanent sur un étiage

de la nappe relevé en Décembre 1971.

La détermination des coefficients d'emmagasinement ainsi qu'une retouche des

transmissivités ont ensuite été assurées sur un régime de tarissement non influencé (30

Avril au 30 Décembre 1975) pour lequel on a fait l'hypothèse que l'alimentation de la

nappe était nulle ou négligeable.

Utilisant la procédure décrite précédemment pour estimer l'alimentation de la

nappe en mettant à profit les historiques piézométriques observés, la validité du

calage du modèle ont ensuite été contrôlées avec un pas de temps hebdomadaire sur la

période 1972-1975. La figure 32 illustre les résultats obtenus pour une série

piézométrique et le débit à l'exutoire du bassin.

- 111 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Nappe inférieure : craie turonienne

Nappe inférieure : craie cénomanienne

FIGURE 31 : MODELE MAILLE DU BASSIN DE LA LYS,

- 112 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 32 : BASSIN DE LA LYS, RECONSTITUTION DU DEBIT ET DE LA PIEZOMETRIE

- 113 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

- Interprétation de l'essai de pompage de longue durée : Une fois le modèle

maillé calé selon la méthode précédente, il a été utilisé pour

l'interprétation d'un essai de pompage en vraie grandeur destinée à tester les

possibilités de soutien du débit d'étiage de la rivière à partir de la nappe.

Cet essai, réalisé pendant 27 semaines de Juin à Décembre 1978, à partir de 5

forages implantés dans la nappe inférieure, avec un débit total moyen de

400l/s a permis de préciser les paramètres de drainance entre nappes

introduits dans le modèle. La figure 33 illustre la reconstitution des niveaux

de la nappe dans un piézomètre d'observation selon un pas de temps de 7 jours.

La reconstitution par simulation à l'aide du modèle maillé du débit naturel

qui aurait été observé en l'absence de pompage permet de calculer le rendement

de l'opération de soutien du débit en rivière défini par le rapport entre le

débit pompé et l'excédent de débit observé en rivière vis-à-vis de son état

naturel. La figure 34 met en évidence les différents débits calculés à

l'exutoire du bassin ainsi que le gain dû aux prélèvements en nappe. On

constate que le rendement se stabilise en quelques semaines autour de la

valeur de 40% dans les conditions de l'essai.

- Simulation prévisionnelle du fonctionnement à long terme : Le modèle ainsi

construit a pu être utilisé pour atteindre son objectif final qui était,

rappelons-le, de prévoir l'évolution à long terme du rendement de l'opération

de pompage et de la recharge des aquifères.

La période 1971 à 1976 a été sélectionnée après étude préalable comme

comportant une série d'étiages qui auraient nécessité l'intervention de

pompages en nappe pour ramener le débit de la rivière au-delà du seuil de

450l/s fixé a priori. Disposant d'une capacité de pompage de 450l/s selon

l'installation existante, le comportement du système a été simulé au moyen du

modèle en réglant les débits prélevés en nappe en fonction du débit en rivière

avec un pas de temps mensuel.

- 114 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

Les résultats font apparaître les remarques suivantes:

- la capacité de l'installation de pompage est suffisante au soutien de

l'étiage;

- la reconstitution du stock de la nappe entre les périodes de pompage est

bonne;

- grâce à cette reconstitution rapide de la réserve de la nappe, le rendement de

l'opération reste élevé d'une année sur l'autre.

FIGURE 33 : BASSIN DE LA LYS RECONSTITUTION AU MOYEN D'UN MODELE MAILLE D'UN ESSAI DE POMPAGE DE LONGUE DUREE

- 115 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 34 : BASSIN DE LA LYS, RECONSTITUTION AU MOYEN DU MODELE MAILLEDU RENDEMENT DE

L'OPERATION DE SOUTIEN DU DEBIT D'ETIAGE DE LA RIVIERE

- 116 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

8.2 Exploitation d’un aquifère côtier

Les problèmes posés par l’exploitation d’un aquifère côtier sont en général

délicats car ils associent la notion de quantité à celle de qualité. L’expérience a

montré que des captages entrepris sans discernement ont pu, dans certains cas,

entraîner des pollutions par l’eau de mer dont il a été très difficile sinon impossible

de se débarrasser par la suite.

Le problème est d’autant plus important que les zones côtières constituent

souvent en pays aride des secteurs privilégiés du point de vue climatique où la demande

en eau est généralement grande impliquant une motivation particulière pour tenter d’y

mobiliser l’eau.

Mécanismes réglant les rapports entre l’eau douce et l’eau salée

Il est reconnu que dans un aquifère côtier non perturbé par l’activité humaine,

l’eau douce en provenance de l’infiltration des précipitations constitue une nappe

s’écoulant vers la mer qui surmonte une masse d’eau salée affectant la forme d’un

biseau pénétrant à l’intérieur des terres (figure 35).

La transition entre eau douce et eau salée s’effectue relativement brusquement

sur une épaisseur ne dépassant pas quelques mètres. A l’échelle de l’aquifère, cette

zone de transition est souvent assimilée à une interface abrupte séparant l’eau douce

de l’eau salée.

L’existence de la zone de transition est due à la coexistence de plusieurs

phénomènes :

- les fluctuations naturelles de la nappe d’eau douce ou encore l’effet de la

marée provoquent un mélange des eaux par déplacement de l’interface ;

- la diffusion moléculaire du sel dans l’eau tend à diminuer les contrastes de

concentration ;

- 117 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

- enfin, la dispersion en milieu poreux due à l’écoulement de long de

l’interface contribue également au mélange.

L’ensemble de ces causes tendrait à un envahissement progressif de l’aquifère par

la saumure, si l’écoulement de la nappe d’eau douce vers la mer n’entraînait un

nettoyage permanent et si l’effet de densité ne tendait à maintenir le sel en

profondeur.

FIGURE 35 : SCHEMA DE LA RELATION EAU DOUCE-EAU SALEE DANS UN AQUIFERE COTIER (BISEAU

OU COIN SALE)

Mécanismes de pollution des aquifères côtiers

Sous l'effet d'un pompage, la zone de transition eau douce-eau salée subit un

déplacement d'ensemble vers l'intérieur des terres. Si cette zone de transition atteint

les crépines des forages (phénomène connu sous le nom "d'upconing"), il se produit un

pollution intense de l'eau pompée. Cet évènement peut apparaître même si la nappe d'eau

douce n'est pas surexploitée, il s'agit seulement d'une remontée locale de l'eau de mer

dans la zone des captages.

Le phénomène est d'autant plus grave que consécutivement au déplacement de l'interface

en cours d'exploitation, l'écoulement s'effectue avec un coefficient d'emmagasinement

- 118 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

apparent très élevé par rapport à celui de la nappe libre d'eau douce. Il en résulte

une évolution lente de la piézométrie de l'aquifère qui masque le caractère

inacceptable de la situation à long terme.

Modélisation des écoulements

L'eau douce et l'eau de mer étant miscibles en toutes proportions, l'écoulement

revêt un aspect monophasique justiciable d'une modélisation par la théorie de la

dispersion. Cependant, l'effet de densité jouant clairement un rôle prédominant, on se

trouve dans des conditions pratiques délicates de la théorie et l'on préfère, pour la

modélisation à l'échelle régionale qui nous occupe, recourir à une approche

particulière dérivée de la théorie des écoulements polyphasiques surtout utilisée pour

l'étude des réservoirs pétroliers.

Se plaçant dans l'hypothèse de l'interface abrupte, on considère que les deux

fluides suivent indépendamment les lois de l'écoulement en milieu poreux décrites dans

la première partie de ce chapitre. L'équilibre à l'interface est assuré en exprimant

qu'à chaque instant les pressions dans l'eau douce et dans l'eau salée sont égales de

part et d'autre de cette interface.

Introduisant les grandeurs suivantes (cf. figure 35):

- hl : charge hydraulique dans l'eau douce exprimée en hauteur d'eau douce,

- h2 : charge hydraulique dans l'eau salée exprimée en hauteur d'eau salée,

- K : perméabilité de l'aquifère supposée homogène selon la verticale,

- zi cote de l'interface abrupte,

- zs cote du substratum imperméable,

- ρl, ρ2 masses volumiques de l'eau douce et de l'eau salée.

- ε porosité de drainage de l'aquifère (coefficient d'emmagasinement en nappe

libre),

- q débit prélevé par unité de surface dans l'eau douce,

- 119 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

et admettant que l'écoulement dans les deux nappes satisfait aux hypothèses de Dupuit

(écoulement bidimensionnel), on aboutit aux équations de diffusivité suivantes:

∂∂

+=∂∂

−∂∂

+∂∂

−∂∂

−∂∂

+=∂∂

−∂∂

+∂∂

−∂∂

tz

qyh

zhKyx

hzhK

x

zht

qyh

zhKyx

hzhK

xi

ss

iii

ε

ε

))(())((

)())(())((

21

21

11

11

1

avec : izhh2

121

2

12 ρ

ρρρρ −

+=

La résolution d'un tel système d'équations que l'on constate non-linéaire peut

être entreprise par la méthode des différences finies selon la théorie proposée au

cours de ce chapitre. Une difficulté surgit cependant car il est nécessaire de résoudre

simultanément deux équations en h1 et en h2, ou mieux en h1 et zi.

Application au cas de la nappe de la Pointe Denis (Gabon)

La nappe de la Pointe Denis est sise dans les sables et graviers qui constituent

les dunes de l'extrémité de la presqu’île située au débouché de l'estuaire du Gabon en

face de la ville de Libreville. Le cadre particulièrement agréable du lieu et sa

proximité de la capitale du Gabon en font un site touristique appelé à développement

motivant les efforts de recherche en matière de ressources en eau.

Les sables fins, les sables grossiers et, dans une moindre mesure, les sables

argileux constituent un excellent réservoir pour l'eau souterraine. La structure d'un

aquifère d'eau douce surmontant une nappe d'eau salée a été reconnue successivement par

une campagne de prospection géophysique, par sondages électriques, puis par une série

de forages ayant traversé la zone de transition eau douce-eau salée. L'ensemble aqui-

fère présente une épaisseur d'une quarantaine de mètres, reposant sur un substratum

marno-calcaire considéré comme imperméable (figure 36).

- 120 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 36 : STRUCTURE DE LIAQUIFERE DE LA POINTE DENIS (Gabon)

POSITION DE L'INTERFACE EAU DOUCE-EAU SALEE

- 121 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

La pluie équatoriale de près de 3 m par an est responsable de l'alimentation de

la nappe, répartie en deux saisons humides, d'Octobre à Mai et de Juin à Septembre.

L'écoulement de la nappe s'effectue vers la mer avec un gradient moyen de l'ordre de 1

X. La profondeur de la nappe n'excède jamais 3 m avec des variations saisonnières de

plus de 2 mètres occasionnant des débordements dans des marécages à l'amont.

Dans le but de déterminer les ressources exploitables de l'aquifère, dans le cadre d'un

projet de développement touristique, une modélisation des écoulements tenant compte des

rapports entre l'eau douce et l'eau salée, -dans le cas d'un interface abrupt, a été

développée.

Un modèle en différences finies mis en oeuvre sur 256 mailles carrées de 100 m de

côté (cf. figure 37) a été ajusté sur un historique d'une année de mesures

piézométriques (Juillet 1975 à Juillet 1976) en tenant compte d'un retard à

l'infiltration calculé à l'aide d'un modèle à réservoir faisant intervenir une

évapotranspiration potentielle mesurée sur bac et une "réserve facilement utilisable"

de 200 mm.

Après ajustement, le modèle a été utilisé pour étudier l'influence sur la nappe

d'un schéma d'exploitation dans deux hypothèses:

- simulation à long terme: recherche du régime permanent d'exploitation

acceptable,

- simulation à court terme: recherche du délai de pompage de la réserve unique.

- Recherche du régime permanent d'exploitation acceptable: Il s'agit tout

d'abord de déterminer le débit moyen maximal exploitable qui garantisse une

stabilisation à long terme de l'interface en-dessous de la cote des crépines

des forages. Une difficulté se présente dans la mesure où un modèle

fonctionnant avec des mailles de 100m de côté ne permet pas de représenter le

profil de l'interface au voisinage des forages avec une précision suffisante.

Un sous-modèle, constitué de mailles de 20m de côté, a donc dû être adjoint au

premier pour lever cette difficulté (cf. figure 38).

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

La recherche du débit maximal d'exploitation a alors été menée de la façon

suivante:

- on impose a priori, compte-tenu de l'implantation du dispositif de

pompage, une cote que l'interface eau douce-eau salée ne doit pas

dépasser;

- on estime ensuite une valeur pour les débits d'exploitation et on

réalise une simulation en régime permanent au moyen du modèle général

à grandes mailles. Cette simulation fournit les conditions aux

limites du sous-modèle en mailles réduites;

- on calcule, à l'aide du sous-modèle, la cote de l'interface et on la

compare avec la valeur limite fixée a priori.

Après quelques itérations, un débit de 4l/s par ouvrage a été reconnu comme

acceptable pour des puits disposés en ligne parallèle au rivage et distants

entre eux de 100m.

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 37 : MODELE MAILLE DE L’AQUIFERE DE LA POINTE DENIS (Gabon) MAILLAGE ET CONDITIONS AUX LIMITES

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 38 : MODELE MAILLE DE L'AQUIFERE DE LA POINTE DENIS (Gabon) STRUCTURE DU SOUS-MODELE REALISE AU VOISINAGE DE LA ZONE DE CAPTAGE

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

- Recherche du délai de pompage de la réserve unique: La différence entre le

volume d'eau douce contenu dans l'aquifère entre l'état moyen et l'état final

constitue la réserve unique de la nappe, car elle ne peut être théoriquement

prélevée qu'une seule fois. Le modèle maillé permet d'apprécier un délai de

pompage de cette réserve unique en fonction du débit prélevé supérieur au

débit maximal acceptable en régime permanent.

La figure 39 montre l'évolution en fonction du temps du profil de l'interface

perpendiculairement au rivage pour différents débits de prélèvement. Les

résultats obtenus confirment le fait que, grâce au coefficient

d'emmagasinement apparent important de l'aquifère, le débit maximal acceptable

en régime permanent peut être notablement dépassé pendant un laps de temps non

négligeable.

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Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 39 : SIMULATION DES ECOULEMENTS A LA POINTE DENIS (Gabon)

EVOLUTION DU PROFIL DE L'INTERFACE EAU DOUCE-EAU SALEE AU COURS DU TEMPS POUR DIFFERENTES

HYPOTHESES DU DEBIT D'EXPLOITATION

- 127 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

8.3. Evolution à long terme de la qualité de l'eau souterraine dans un aquifère

provoquée par l'activité humaine

La plaine alluviale de Kairouan, en Tunisie, s'étend sur près de 3000km2. Elle

est constituée par une cuvette d'effondrements comblée par des dépôts détritiques

continentaux d’âge plio-quaternaire. La sédimentation y est lenticulaire et formée

d'alternances de sables plus ou moins grossiers et de marnes sur une épaisseur de 500m.

On distingue un réservoir profond capté par forages et un niveau aquifère phréatique.

Ces nappes sont essentiellement alimentées par les crues de deux oueds tandis que la

reprise par évaporation constitue l'unique exutoire naturel, principalement au nord et

au nord-est du domaine (Besbès et al. 1976) (cf. figure 40).

FIGURE 40: CARTE PIEZOMETRIQUE DE LA NAPPE PHREATIQUE DE KAIROUAN (Tunisie)

- 128 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

La carte piézométrique illustre le fonctionnement du réservoir. En amont, la

nappe profonde est alimentée par le niveau supérieur; par contre, en aval, l'aquifère

profond se met en charge et percole dans la nappe phréatique. La répartition spatiale

des concentrations en sels dissous reflète ces mécanismes hydrogéologiques (figure 41).

La mise en valeur des terres agricoles entraînera dans l'avenir une

surexploitation de la nappe profonde. Les rabattements résultant des pompages

risqueront alors d'engendrer une contamination des eaux profondes par les eaux plus

salées de la nappe phréatique lorsque les gradients de niveaux piézométriques

s'inverseront à l'aval.

Pour quantifier ce risque, une simulation de l'effet de ce régime de

surexploitation a été réalisée au moyen d'un modèle maillé décrivant les transferts de

matière dissoute à l'échelle régionale.

Le modèle considère une restriction aux simples échanges par convection du

mouvement d'un corps dissous selon la théorie de la dispersion.

Les phénomènes sont schématisés en se limitant à la description du mouvement des

sels dans la nappe profonde en supposant la concentration de la nappe phréatique

invariante dans le temps. Partant de la situation actuelle observée (figure 41), le

modèle calcule l'évolution de la salinité dans la nappe profonde en considérant une

structure bicouche. La concentration de l'eau pompée dans les forages provient du

mélange qui s'effectue entre l'eau arrivant par drainance de la nappe phréatique et

l'eau emmagasinée dans la porosité de la nappe profonde. Une épaisseur de 50m pour une

porosité de 5% ayant été attribuée à l'aquifère capté, les résultats des simulations

recherchés sur 20 ans montrent un effet peu marqué des exploitations, l'augmentation

maximale de concentration restant de l'ordre de 500mg/l (figure 42).

Cette approche très globale néglige plusieurs phénomènes reconnus comme

influençant le transfert des matières en solution dans un milieu poreux, décrits dans

la première partie de ce chapitre. En effet, aucune dispersion, ni aucun mécanisme

d'interaction entre les sels dissous et la roche n'ont été considérés comme étant hors

- 129 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

de portée de la connaissance expérimentale du système. Un tel modèle, bien que basé sur

une approche conceptuelle, ne doit donc être utilisé que comme un indicateur des zones

à risque dans le cadre d'une modélisation régionale à l'échelle d'un bassin

hydrogéologique.

- 130 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

FIGURE 41 : CARTE DES SALINITES OBSERVEES DANS LES AQUIFERES DE KAIROUAN (Tunisie)

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FIGURE 42 : VARIATION DE SALINITE DANS LA NAPPE PROFONDE APRES 20 ANNEES D'EXPLOITATION CALCULEE AU MOYEN DU MODELE MAILLE (en 0,1g/l)

- 132 -

Cours E. Ledoux – Révision - 1/19/2003

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