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N° d’ordre 05 ISAL 0040 Année 2005 Thèse Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic routier hétérogène poids lourds et véhicules légers Présentée devant l’Institut National des Sciences Appliquées de Lyon Pour obtenir Le diplôme de docteur École doctorale Mécanique, Energétique, Génie civil et Acoustique (MEGA) Spécialité : Génie civil Par Stéphane CHANUT Ingénieur des Travaux Publics de l’Etat Soutenue le 27 juin 2005 devant la commission d’examen Jury : Rapporteur Sylvie BENZONI-GAVAGE Professeur (Université Lyon I) Directeur de thèse Christine BUISSON Chargée de recherche (INRETS-ENTPE) Président Bernard CHOCAT Professeur (I NSA de Lyon) Directeur de thèse Jean-Baptiste LESORT Directeur de recherche (I NRETS-ENTPE) Examinateur Fabien LEURENT Docteur, Ingénieur (ENPC-INRETS) Rapporteur Markos PAPAGEORGIOU Professeur (Université Technique de Crète) Thèse préparée au Laboratoire d’Ingénierie Circulation Transport, unité mixte ENTPE/INRETS Rue Maurice Audin – 69518 Vaulx en Velin Cedex

Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

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N° d’ordre 05 ISAL 0040 Année 2005

Thèse

Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic routier hétérogène

poids lourds et véhicules légers

Présentée devant l’Institut National des Sciences Appliquées de Lyon

Pour obtenir

Le diplôme de docteur

École doctorale Mécanique, Energétique, Génie civil et Acoustique (MEGA) Spécialité : Génie civil

Par Stéphane CHANUT

Ingénieur des Travaux Publics de l’Etat

Soutenue le 27 juin 2005 devant la commission d’examen

Jury :

Rapporteur Sylvie BENZONI-GAVAGE Professeur (Université Lyon I) Directeur de thèse Christine BUISSON Chargée de recherche (INRETS-ENTPE) Président Bernard CHOCAT Professeur (INSA de Lyon) Directeur de thèse Jean-Baptiste LESORT Directeur de recherche (INRETS-ENTPE) Examinateur Fabien LEURENT Docteur, Ingénieur (ENPC-INRETS) Rapporteur Markos PAPAGEORGIOU Professeur (Université Technique de Crète)

Thèse préparée au Laboratoire d’Ingénierie Circulation Transport, unité mixte ENTPE/INRETS Rue Maurice Audin – 69518 Vaulx en Velin Cedex

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N° d’ordre 05 ISAL 0040 Année 2005

Thèse

Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic routier hétérogène

poids lourds et véhicules légers

Présentée devant l’Institut National des Sciences Appliquées de Lyon

Pour obtenir

Le diplôme de docteur

École doctorale Mécanique, Energétique, Génie civil et Acoustique (MEGA) Spécialité : Génie civil

Par Stéphane CHANUT

Ingénieur des Travaux Publics de l’Etat

Soutenue le 27 juin 2005 devant la commission d’examen

Jury :

Rapporteur Sylvie BENZONI-GAVAGE Professeur (Université Lyon I) Directeur de thèse Christine BUISSON Chargée de recherche (INRETS-ENTPE) Président Bernard CHOCAT Professeur (INSA de Lyon) Directeur de thèse Jean-Baptiste LESORT Directeur de recherche (INRETS-ENTPE) Examinateur Fabien LEURENT Docteur, Ingénieur (ENPC-INRETS) Rapporteur Markos PAPAGEORGIOU Professeur (Université Technique de Crète)

Thèse préparée au Laboratoire d’Ingénierie Circulation Transport, unité mixte ENTPE/INRETS Rue Maurice Audin – 69518 Vaulx en Velin Cedex

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Novembre 2003

INSTITUT NATIONAL DES SCIENCES APPLIQUEES DE LYON Directeur : STORCK A. Professeurs : AMGHAR Y. LIRIS AUDISIO S. PHYSICOCHIMIE INDUSTRIELLE BABOT D. CONT. NON DESTR. PAR RAYONNEMENTS IONISANTS BABOUX J.C. GEMPPM*** BALLAND B. PHYSIQUE DE LA MATIERE BAPTISTE P. PRODUCTIQUE INFORMATIQUE DES SYSTEMES MANUFACTURIERS BARBIER D. PHYSIQUE DE LA MATIERE BASKURT A. LIRIS BASTIDE J.P. LAEPSI**** BAYADA G. MECANIQUE DES CONTACTS BENADDA B. LAEPSI**** BETEMPS M. AUTOMATIQUE INDUSTRIELLE BIENNIER F. PRODUCTIQUE INFORMATIQUE DES SYSTEMES MANUFACTURIERS BLANCHARD J.M. LAEPSI**** BOISSE P. LAMCOS BOISSON C. VIBRATIONS-ACOUSTIQUE BOIVIN M. (Prof. émérite) MECANIQUE DES SOLIDES BOTTA H. UNITE DE RECHERCHE EN GENIE CIVIL - Développement Urbain BOTTA-ZIMMERMANN M. (Mme) UNITE DE RECHERCHE EN GENIE CIVIL - Développement Urbain BOULAYE G. (Prof. émérite) INFORMATIQUE BOYER J.C. MECANIQUE DES SOLIDES BRAU J. CENTRE DE THERMIQUE DE LYON - Thermique du bâtiment BREMOND G. PHYSIQUE DE LA MATIERE BRISSAUD M. GENIE ELECTRIQUE ET FERROELECTRICITE BRUNET M. MECANIQUE DES SOLIDES BRUNIE L. INGENIERIE DES SYSTEMES D’INFORMATION BUFFIERE J-Y. GEMPPM*** BUREAU J.C. CEGELY* CAMPAGNE J-P. PRISMA CAVAILLE J.Y. GEMPPM*** CHAMPAGNE J-Y. LMFA CHANTE J.P. CEGELY*- Composants de puissance et applications CHOCAT B. UNITE DE RECHERCHE EN GENIE CIVIL - Hydrologie urbaine COMBESCURE A. MECANIQUE DES CONTACTS COURBON GEMPPM COUSIN M. UNITE DE RECHERCHE EN GENIE CIVIL - Structures DAUMAS F. (Mme) CENTRE DE THERMIQUE DE LYON - Energétique et Thermique DJERAN-MAIGRE I. UNITE DE RECHERCHE EN GENIE CIVIL DOUTHEAU A. CHIMIE ORGANIQUE DUBUY-MASSARD N. ESCHIL DUFOUR R. MECANIQUE DES STRUCTURES DUPUY J.C. PHYSIQUE DE LA MATIERE EMPTOZ H. RECONNAISSANCE DE FORMES ET VISION ESNOUF C. GEMPPM*** EYRAUD L. (Prof. émérite) GENIE ELECTRIQUE ET FERROELECTRICITE FANTOZZI G. GEMPPM*** FAVREL J. PRODUCTIQUE INFORMATIQUE DES SYSTEMES MANUFACTURIERS FAYARD J.M. BIOLOGIE FONCTIONNELLE, INSECTES ET INTERACTIONS FAYET M. (Prof. émérite) MECANIQUE DES SOLIDES FAZEKAS A. GEMPPM FERRARIS-BESSO G. MECANIQUE DES STRUCTURES FLAMAND L. MECANIQUE DES CONTACTS FLEURY E. CITI FLORY A. INGENIERIE DES SYSTEMES D’INFORMATIONS FOUGERES R. GEMPPM*** FOUQUET F. GEMPPM*** FRECON L. (Prof. émérite) REGROUPEMENT DES ENSEIGNANTS CHERCHEURS ISOLES GERARD J.F. INGENIERIE DES MATERIAUX POLYMERES GERMAIN P. LAEPSI**** GIMENEZ G. CREATIS** GOBIN P.F. (Prof. émérite) GEMPPM*** GONNARD P. GENIE ELECTRIQUE ET FERROELECTRICITE GONTRAND M. PHYSIQUE DE LA MATIERE GOUTTE R. (Prof. émérite) CREATIS** GOUJON L. GEMPPM*** GOURDON R. LAEPSI****. GRANGE G. (Prof. émérite) GENIE ELECTRIQUE ET FERROELECTRICITE

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GUENIN G. GEMPPM*** GUICHARDANT M. BIOCHIMIE ET PHARMACOLOGIE GUILLOT G. PHYSIQUE DE LA MATIERE GUINET A. PRODUCTIQUE INFORMATIQUE DES SYSTEMES MANUFACTURIERS GUYADER J.L. VIBRATIONS-ACOUSTIQUE GUYOMAR D. GENIE ELECTRIQUE ET FERROELECTRICITE HEIBIG A. MATHEMATIQUE APPLIQUEES DE LYON JACQUET-RICHARDET G. MECANIQUE DES STRUCTURES JAYET Y. GEMPPM*** JOLION J.M. RECONNAISSANCE DE FORMES ET VISION JULLIEN J.F. UNITE DE RECHERCHE EN GENIE CIVIL - Structures JUTARD A. (Prof. émérite) AUTOMATIQUE INDUSTRIELLE KASTNER R. UNITE DE RECHERCHE EN GENIE CIVIL - Géotechnique KOULOUMDJIAN J. (Prof. émérite) INGENIERIE DES SYSTEMES D’INFORMATION LAGARDE M. BIOCHIMIE ET PHARMACOLOGIE LALANNE M. (Prof. émérite) MECANIQUE DES STRUCTURES LALLEMAND A. CENTRE DE THERMIQUE DE LYON - Energétique et thermique LALLEMAND M. (Mme) CENTRE DE THERMIQUE DE LYON - Energétique et thermique LAREAL P (Prof. émérite) UNITE DE RECHERCHE EN GENIE CIVIL - Géotechnique LAUGIER A. (Prof. émérite) PHYSIQUE DE LA MATIERE LAUGIER C. BIOCHIMIE ET PHARMACOLOGIE LAURINI R. INFORMATIQUE EN IMAGE ET SYSTEMES D’INFORMATION LEJEUNE P. UNITE MICROBIOLOGIE ET GENETIQUE LUBRECHT A. MECANIQUE DES CONTACTS MASSARD N. INTERACTION COLLABORATIVE TELEFORMATION TELEACTIVITE MAZILLE H. (Prof. émérite) PHYSICOCHIMIE INDUSTRIELLE MERLE P. GEMPPM*** MERLIN J. GEMPPM*** MIGNOTTE A. (Mle) INGENIERIE, INFORMATIQUE INDUSTRIELLE MILLET J.P. PHYSICOCHIMIE INDUSTRIELLE MIRAMOND M. UNITE DE RECHERCHE EN GENIE CIVIL - Hydrologie urbaine MOREL R. (Prof. émérite) MECANIQUE DES FLUIDES ET D’ACOUSTIQUES MOSZKOWICZ P. LAEPSI**** NARDON P. (Prof. émérite) BIOLOGIE FONCTIONNELLE, INSECTES ET INTERACTIONS NAVARRO Alain (Prof. émérite) LAEPSI**** NELIAS D. LAMCOS NIEL E. AUTOMATIQUE INDUSTRIELLE NORMAND B. GEMPPM NORTIER P. DREP ODET C. CREATIS** OTTERBEIN M. (Prof. émérite) LAEPSI**** PARIZET E. VIBRATIONS-ACOUSTIQUE PASCAULT J.P. INGENIERIE DES MATERIAUX POLYMERES PAVIC G. VIBRATIONS-ACOUSTIQUE PECORARO S. GEMPPM PELLETIER J.M. GEMPPM*** PERA J. UNITE DE RECHERCHE EN GENIE CIVIL - Matériaux PERRIAT P. GEMPPM*** PERRIN J. INTERACTION COLLABORATIVE TELEFORMATION TELEACTIVITE PINARD P. (Prof. émérite) PHYSIQUE DE LA MATIERE PINON J.M. INGENIERIE DES SYSTEMES D’INFORMATION PONCET A. PHYSIQUE DE LA MATIERE POUSIN J. MODELISATION MATHEMATIQUE ET CALCUL SCIENTIFIQUE PREVOT P. INTERACTION COLLABORATIVE TELEFORMATION TELEACTIVITE PROST R. CREATIS** RAYNAUD M. CENTRE DE THERMIQUE DE LYON - Transferts Interfaces et Matériaux REDARCE H. AUTOMATIQUE INDUSTRIELLE RETIF J-M. CEGELY* REYNOUARD J.M. UNITE DE RECHERCHE EN GENIE CIVIL - Structures RICHARD C. LGEF RIGAL J.F. MECANIQUE DES SOLIDES RIEUTORD E. (Prof. émérite) MECANIQUE DES FLUIDES ROBERT-BAUDOUY J. (Mme) (Prof. émérite) GENETIQUE MOLECULAIRE DES MICROORGANISMES ROUBY D. GEMPPM*** ROUX J.J. CENTRE DE THERMIQUE DE LYON – Thermique de l’Habitat RUBEL P. INGENIERIE DES SYSTEMES D’INFORMATION SACADURA J.F. CENTRE DE THERMIQUE DE LYON - Transferts Interfaces et Matériaux SAUTEREAU H. INGENIERIE DES MATERIAUX POLYMERES SCAVARDA S. (Prof. émérite) AUTOMATIQUE INDUSTRIELLE SOUIFI A. PHYSIQUE DE LA MATIERE SOUROUILLE J.L. INGENIERIE INFORMATIQUE INDUSTRIELLE THOMASSET D. AUTOMATIQUE INDUSTRIELLE THUDEROZ C. ESCHIL – Equipe Sciences Humaines de l’Insa de Lyon UBEDA S. CENTRE D’INNOV. EN TELECOM ET INTEGRATION DE SERVICES VELEX P. MECANIQUE DES CONTACTS VERMANDE P. (Prof émérite) LAEPSI

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VIGIER G. GEMPPM*** VINCENT A. GEMPPM*** VRAY D. CREATIS** VUILLERMOZ P.L. (Prof. émérite) PHYSIQUE DE LA MATIERE Directeurs de recherche C.N.R.S. : BERTHIER Y. MECANIQUE DES CONTACTS CONDEMINE G. UNITE MICROBIOLOGIE ET GENETIQUE COTTE-PATAT N. (Mme) UNITE MICROBIOLOGIE ET GENETIQUE ESCUDIE D. (Mme) CENTRE DE THERMIQUE DE LYON FRANCIOSI P. GEMPPM*** MANDRAND M.A. (Mme) UNITE MICROBIOLOGIE ET GENETIQUE POUSIN G. BIOLOGIE ET PHARMACOLOGIE ROCHE A. INGENIERIE DES MATERIAUX POLYMERES SEGUELA A. GEMPPM*** VERGNE P. LaMcos Directeurs de recherche I.N.R.A. : FEBVAY G. BIOLOGIE FONCTIONNELLE, INSECTES ET INTERACTIONS GRENIER S. BIOLOGIE FONCTIONNELLE, INSECTES ET INTERACTIONS RAHBE Y. BIOLOGIE FONCTIONNELLE, INSECTES ET INTERACTIONS Directeurs de recherche I.N.S.E.R.M. : KOBAYASHI T. PLM PRIGENT A.F. (Mme) BIOLOGIE ET PHARMACOLOGIE MAGNIN I. (Mme) CREATIS** * CEGELY CENTRE DE GENIE ELECTRIQUE DE LYON ** CREATIS CENTRE DE RECHERCHE ET D’APPLICATIONS EN TRAITEMENT DE L’IMAGE ET DU SIGNAL ***GEMPPM GROUPE D'ETUDE METALLURGIE PHYSIQUE ET PHYSIQUE DES MATERIAUX ****LAEPSI LABORATOIRE D’ANALYSE ENVIRONNEMENTALE DES PROCEDES ET SYSTEMES INDUSTRIELS

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SIGLE ECOLE DOCTORALE NOM ET COORDONNEES DU RESPONSABLE

CHIMIE DE LYON M. Denis SINOU Université Claude Bernard Lyon 1 Lab Synthèse Asymétrique UMR UCB/CNRS 5622 Bât 308 2ème étage 43 bd du 11 novembre 1918 69622 VILLEURBANNE Cedex Tél : 04.72.44.81.83 [email protected]

E2MC

ECONOMIE, ESPACE ET MODELISATION DES COMPORTEMENTS

M. Alain BONNAFOUS Université Lyon 2 14 avenue Berthelot MRASH Laboratoire d’Economie des Transports 69363 LYON Cedex 07 Tél : 04.78.69.72.76 [email protected]

E.E.A.

ELECTRONIQUE, ELECTROTECHNIQUE, AUTOMATIQUE

M. Daniel BARBIER INSA DE LYON Laboratoire Physique de la Matière Bâtiment Blaise Pascal 69621 VILLEURBANNE Cedex Tél : 04.72.43.64.43 [email protected]

E2M2

EVOLUTION, ECOSYSTEME, MICROBIOLOGIE, MODELISATION http://biomserv.univ-lyon1.fr/E2M2

M. Jean-Pierre FLANDROIS UMR 5558 Biométrie et Biologie Evolutive Equipe Dynamique des Populations Bactériennes Faculté de Médecine Lyon-Sud Laboratoire de Bactériologie BP 1269600 OULLINS Tél : 04.78.86.31.50 [email protected]

EDIIS

INFORMATIQUE ET INFORMATION POUR LA SOCIETE http://www.insa-lyon.fr/ediis

M. Lionel BRUNIE INSA DE LYON EDIIS Bâtiment Blaise Pascal 69621 VILLEURBANNE Cedex Tél : 04.72.43.60.55 [email protected]

EDISS

INTERDISCIPLINAIRE SCIENCES-SANTE http://www.ibcp.fr/ediis

M. Alain Jean COZZONE IBCP (UCBL1) 7 passage du Vercors 69367 LYON Cedex 07 Tél : 04.72.72.26.75 [email protected]

MATERIAUX DE LYON http://www.ec-lyon.fr/sites/edml

M. Jacques JOSEPH Ecole Centrale de Lyon Bât F7 Lab. Sciences et Techniques des Matériaux et des Surfaces 36 Avenue Guy de Collongue BP 163 69131 ECULLY Cedex Tél : 04.72.18.62.51 [email protected]

Math IF

MATHEMATIQUES ET INFORMATIQUE FONDAMENTALE http://www.ens-lyon.fr/MathIS

M. Franck WAGNER Université Claude Bernard Lyon1 Institut Girard Desargues UMR 5028 MATHEMATIQUES Bâtiment Doyen Jean Braconnier Bureau 101 Bis, 1er étage 69622 VILLEURBANNE Cedex Tél : 04.72.43.27.86 [email protected]

MEGA

MECANIQUE, ENERGETIQUE, GENIE CIVIL, ACOUSTIQUE http://www.lmfa.ec-lyon.fr/autres/MEGA/index.html

M. François SIDOROFF Ecole Centrale de Lyon Lab. Tribologie et Dynamique des Systêmes Bât G8 36 avenue Guy de Collongue BP 163 69131 ECULLY Cedex Tél :04.72.18.62.14 [email protected]

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A mon papa

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Remerciements

Cette page est pour tous ceux qui ont contribué, de près et de loin, à la réalisation de l'ensemble des travaux de thèse exposés ici.

Mes remerciements vont en premier lieu à Christine Buisson, qui a suivi au quotidien l'avancée de mon travail. Sa disponibilité, ses conseils avisés, la pertinence de ses idées tout comme son goût communicatif pour la recherche et sa gentillesse ont été un soutien permanent pendant ces trois années.

Je remercie également Jean-Baptiste Lesort, directeur du laboratoire, pour avoir co-dirigé cette thèse et m'avoir donné des conseils précieux quant à sa réalisation, le tout avec sa traditionnelle bonne humeur.

Je tiens à exprimer ma gratitude envers Markos Papageorgiou, pour avoir accepté de rapporter ce mémoire et de venir participer au jury, et envers Sylvie Benzoni-Gavage, également rapporteur, qui en me faisant découvrir la théorie des systèmes hyperboliques m'a ouvert de larges horizons pour l'aboutissement de mes travaux.

Merci également à Fabien Leurent pour avoir accepté le rôle d'examinateur, et pour les conseils donnés au tout début de la thèse ; merci aussi à Bernard Chocat, pour sa participation au jury, et pour ses cours de DEA que je n'ai pas oubliés : ils ont contribué à forger mon goût pour la recherche.

C'est également ici pour moi l'occasion de remercier tous les membres du LICIT, parmi lesquels j'ai passé quatre années formidables ; durant celles-ci j'ai pu échanger sans cesse avec eux sur nos thématiques de recherche. Leur bonne humeur permanente donne au laboratoire son caractère convivial et je les remercie pour cela.

Je tiens à remercier tout particulièrement Ludovic, qui a été pour moi un collègue précieux pour l'intérêt qu'il a porté à ma recherche et pour ses avis éclairés, mais aussi un camarade au quotidien, toujours là pour m'apporter du soutien. Merci aussi à Manu avec qui j'ai partagé le bureau pendant plus de deux années, pour l'ambiance amicale et chaleureuse qu'il y a fait régner, pour ses conseils et ses encouragements.

Merci également à Vincent pour son regard sur mes travaux et les sorties (pas assez fréquentes - je sais ! -) de course à pied à la pause de midi ; à Rémy, Nour, Sophie, Olivier, Sam, Anis et Thomas pour l'ambiance de travail ; à Marie-Thérèse et Sonia pour leur gentillesse et leur appui logistique irremplaçable.

Je pense aussi à tous les autres membres de la famille de la recherche que j'ai côtoyés durant ces trois ans. En premier lieu les autres thésards, avec qui j'ai partagé les labeurs des périodes de doute et les joies des aboutissements de recherche : ceux du

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Remerciements

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laboratoire géo-matériaux, en particulier Jean-Michel ; ceux du laboratoire des sciences de l'environnement ; mon ami Chichang.

Surtout, je tiens ici particulièrement à remercier l'ensemble de ma famille pour son soutien durant ces années de thèse, et plus généralement durant tout mon cursus scientifique. Je pense à mes parents, qui ont su sans cesse m'encourager (et parfois, dans les moments difficiles, me supporter), à leur fierté de me voir réussir mes examens. Je leur dois en grande partie mon parcours. Je pense à mon frère et à son soutien indéfectible.

Enfin, cette thèse restera comme un moment privilégié de ma vie, celui à partir duquel, Marie, tu es entrée. Pour l'enchantement que tu m'as apporté en faisant converger nos trajectoires, pour ton amour et la confiance que tu me témoignes au quotidien, pour toutes les joies et les moments de bonheur à venir pour nous deux, un immense merci.

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Sommaire

Introduction 15

Chapitre 1 Poids lourds et gestion du trafic 19

Chapitre 2 Etat de l'art des modèles d'écoulement d'un trafic hétérogène 45

Chapitre 3 Diagrammes fondamentaux multi-classes 71

Chapitre 4 Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène 91

Chapitre 5 Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov Comportement du modèle 147

Chapitre 6 Extension du modèle : Modélisation d'une gêne au dépassement 189

Chapitre 7 Vers une application du modèle de trafic hétérogène 221

Synthèse et perspectives 261

Bibliographie 265

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Introduction

Contexte de la recherche

Depuis une quinzaine d'années, les préoccupations sociales, économiques et environnementales ont considérablement modifié l'approche de l'exploitation de la route en Europe. Désormais, l'optimisation du fonctionnement des infrastructures existantes est une priorité pour tout gestionnaire de réseau routier pour faire face à la croissance permanente des volumes de trafic et d'encombrements, la construction de nouvelles infrastructures n'étant plus que rarement considérée.

Dans ce cadre, les exploitants routiers cherchent aujourd'hui à mieux mesurer, comprendre et prévoir l'écoulement du trafic, notamment dans ses aspects dynamiques dont le phénomène de congestion est le meilleur exemple ; ce regard attentif nouveau leur permet, dans la mise en place de mesures de régulation du trafic, d'assurer une réponse efficace aux difficultés d'exploitation observées.

La modélisation dynamique du trafic constitue ici une aide certaine pour le gestionnaire ; en décrivant et représentant la réalité physique qu'est l’écoulement du trafic, elle explique cette réalité et prévoit son évolution : elle est ainsi un socle solide de conception d'outils opérationnels d’évaluation, de prévision, d’aide à la décision ou de régulation, tous nécessaires à l'exploitant dans sa mission.

L'hétérogénéité du trafic, au sens d'une composition en plusieurs types de véhicules, est l'un des phénomènes importants à qualifier et à quantifier aujourd'hui pour les exploitants ; en effet, de nombreuses sections autoroutières sont désormais chargées en poids lourds, et ce de façon quotidienne. La question de l'effet sur l'écoulement du trafic de la présence de ces véhicules est ainsi posée, exploitants et automobilistes se rejoignant pour incriminer les poids lourds, leur vitesse faible et leur gabarit imposant, quant à la détérioration des conditions de circulation, la densification du trafic et la formation plus rapide et plus durable de congestions et de ralentissements.

La modélisation du trafic se doit donc d'apporter une réponse à cette interrogation, en prenant en compte dans les modèles construits le caractère hétérogène du trafic ; une extension notamment nécessaire pour les modèles macroscopiques, dont la robustesse et l'efficacité tiennent à leur détachement des considérations véhiculaires et individuelles et à leur description du trafic comme un flux, et qui, par conséquent, considèrent généralement ce flux comme homogène. [Zhang et Lin, 2002] ont ainsi souligné la nécessité de faire évoluer les modèles macroscopiques entre autres en distinguant plusieurs classes de véhicules au sein du flux représenté.

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Introduction

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L'objet de ces travaux de thèse est d'apporter une contribution à cette amélioration des modèles macroscopiques, en se concentrant sur la modélisation d'un trafic autoroutier constitué de deux classes de véhicules : des véhicules légers et des poids lourds. En mettant en évidence et en intégrant dans la modélisation les différences physiques, cinématiques et comportementales entre ces types de véhicules, on cherche ici à améliorer le pouvoir descriptif et explicatif du modèle d'écoulement dans le cas d'un trafic hétérogène, et ainsi à constituer une première base théorique utile à l'exploitant dans le choix et le test de mesures de régulation envers le trafic poids lourds.

Plan du mémoire

La démarche suivie au cours de ces travaux est basée sur une construction pas à pas de la modélisation, de l'observation du problème à l'application possible du modèle construit. Le plan du mémoire reproduit ce cheminement par étapes.

Tout d'abord, on mène un travail préparatoire à la construction du modèle. Le chapitre 1 vise à décrire l'hétérogénéité du trafic et le trafic de poids lourds ; on

observe notamment les effets de ces véhicules sur l'écoulement et les moyens utilisés par les exploitants pour gérer leur présence.

Le chapitre 2 cherche à formuler le problème posé par le caractère hétérogène du trafic. Pour ce faire, on recense dans la littérature la façon dont l'hétérogénéité du trafic est intégrée et on évalue chaque type d'approche de modélisation du trafic par rapport aux perspectives que cela offre. Ceci nous conduit au choix d'une modélisation macroscopique du premier ordre du trafic, et à la définition d'objectifs quant aux effets que l'on cherche à représenter par le modèle.

Ensuite, on met en place, étape par étape, une modélisation macroscopique d'un trafic hétérogène.

Le chapitre 3 s'attache à la construction de diagrammes fondamentaux multi-classes, qui portent la phénoménologie du trafic qui sera associée par la suite au modèle. Dans cette phase de formulation d'hypothèses quant au comportement d'un flux de trafic hétérogène, on s'appuie notamment sur des données expérimentales. Les différences de vitesses et de longueurs entre véhicules sont les principales variables explicatives utilisées à ce stade.

Le chapitre 4 constitue l'étape mathématique de résolution analytique du modèle, qui fait appel à la théorie des systèmes hyperboliques d'équations. Le modèle de trafic construit au chapitre précédent y est résolu ; ceci constitue un exemple d'application de cette théorie à un champ particulier, l'écoulement du trafic routier, dont la phénoménologie influence les solutions et peut de plus générer des phénomènes mathématiques non standard.

Le chapitre 5 est un exemple de déclinaison numérique, par l'utilisation d'un schéma de Godunov, de la résolution analytique précédente. Elle est nécessaire dans le cas du trafic routier pour permettre une utilisation pratique par les exploitants ; elle autorise en particulier à mener aisément et rapidement des simulations d'écoulement. Sa mise en œuvre permet aussi une première phase de vérification du modèle, en évaluant la capacité de ce dernier à reproduire correctement des observations communes de comportement d'un trafic hétérogène.

Le chapitre 6 est une extension du modèle visant à améliorer sa description des situations de trafic pour lesquelles des difficultés d'écoulement, liées aux phases de

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Introduction

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dépassement des véhicules entre eux, peuvent apparaître. Ce travail reprend les étapes précédentes pour affiner le pouvoir de description du modèle dans ces situations particulières de trafic : état de l'art de leur considération, travail sur la phénoménologie, résolution analytique et numérique du modèle étendu et vérification de son comportement.

Enfin, on décrit les applications possibles du modèle. Le chapitre 7 constitue l'étape de déclinaison du travail de modélisation à des fins

pratiques. Sans mettre directement en œuvre le modèle construit, on montre les diverses approches possibles de sa calibration et de son application, et ce à divers niveaux de la gestion du trafic.

En conclusion, la synthèse des principaux résultats obtenus au cours de ces travaux de thèse est présentée et les principales perspectives de recherche sur l'évolution et l'amélioration de la modélisation mise en place sont établies.

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Chapitre 1 Poids lourds et gestion du trafic

1 Généralités sur le trafic poids lourds 20 1.1 Quelques données sur le transport de fret 20 1.2 Nuisances et problèmes liés à la circulation des poids lourds 21

2 Recensement des effets des poids lourds sur le trafic 23 2.1 Quelles différences entre un véhicule léger et un poids lourd ? 23 2.2 Effets locaux de la présence de poids lourds 24 2.3 Effets globaux de la présence de poids lourds 28

3 Prise en compte des poids lourds pour la gestion du trafic 29 3.1 Dimensionnement et évaluation du niveau de service 30 3.2 Evaluation des temps de parcours 33 3.3 Mesures d'exploitation spécifiques aux poids lourds 39

4 Conclusion 43

Des éléments de ce chapitre ont été publiés dans la revue Recherche Transports Sécurité [Chanut, 2004], d'autres ont été structurés lors d'une étude bibliographique menée pour le SETRA1 [Chanut et Buisson, 2004].

L'augmentation actuelle des échanges commerciaux et la part modale croissante de la route pour le transport de marchandises engendrent une présence croissante des poids lourds au sein de la circulation automobile, entraînant des nuisances environnementales accrues et une circulation routière plus difficile. De nouveaux problèmes d'exploitation et de gestion du trafic sont ainsi soulevés par la présence des poids lourds dans le réseau de transport, particulièrement sur les infrastructures à normes autoroutières.

Ce premier chapitre vise à situer le contexte de la recherche menée, en mettant en évidence les impacts des poids lourds sur la circulation des autoroutes et des voies rapides urbaines et en décrivant la façon dont leur présence est actuellement prise en compte par les gestionnaires du trafic sur ces réseaux.

1 Service d'Etudes Techniques des Routes et Autoroutes (service technique central du ministère de l'Equipement).

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Chapitre 1

20

On commence par rappeler quelques données économiques, environnementales et d'exploitation liées au trafic poids lourds, et souligner les impacts et nuisances spécifiques à ce type de trafic (partie 1). On décrit alors plus particulièrement les effets sur l'écoulement de l'hétérogénéité du trafic (partie 2). Enfin, on termine en recensant les réponses apportées actuellement par les exploitants en charge du trafic aux problèmes spécifiques posés par les poids lourds (partie 3).

1 Généralités sur le trafic poids lourds

1.1 Quelques données sur le transport de fret

En 2003 le niveau du transport de marchandises en France a été de 242,4 millions de tonnes.kilomètres [INSEE, 2000]. Il connaît depuis plusieurs décennies une augmentation soutenue, liée au développement économique et à l'amélioration des infrastructures [Profillidis et Boilé, 2001] : +7,3 % sur 5 ans (1998-2003), +58 % depuis 1982.

Le mode routier a assuré en 2003 un transport de fret de 188,7 millions de tonnes.kilomètres, ce qui représente une part modale de 78 %, loin devant les transports ferré (19 %) et fluvial (3 %). Cette prédominance de la route pour le transport de marchandises n'est pas nouvelle : sur les 5 dernières années, la part modale de la route a augmenté de 5 points au détriment du fer ; elle n'était que de 56 % en 1982, 47 % en 1970 et 37 % en 1960 [Verdier, 2001] ! La Figure 1-1 est l'illustration de cette évolution pour les vingt dernières années :

1985 1990 1995 20000

20

40

60

80

100

Par

t mod

ale

(%)

Années

Route

Fer

Canaux

Figure 1-1 : Evolution des parts modales du transport de marchandises en France

(1982-2003)

Ce type d'évolution se retrouve dans la plupart des autres pays européens ainsi qu'aux Etats-Unis [Bureau of Transportation Statistics, 2004]. Plusieurs raisons peuvent être avancées pour expliquer le développement du fret routier.

Les premières sont d'ordre structurel et liées à l'évolution du secteur des transports. L'activité économique se dématérialise progressivement, s'orientant de plus en

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Poids lourds et gestion du trafic

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plus vers des activités de service, et génère ainsi des produits moins pondéreux et incluant plus de valeur ajoutée. Or ces derniers (produits agro-alimentaires, produits chimiques, matériels de haute technologie, …) sont majoritairement transportés par la route, alors que les produits pondéreux (minerais, combustibles, …) constituaient une niche économique des transports ferré et fluvial.

Par ailleurs, la distribution des produits manufacturés de détail est pratiquement toujours (pour des raisons évidentes de flexibilité) réalisée par camions, surtout depuis le développement du juste-à-temps. Cette technique de production, qui permet aux fabricants de réduire leurs coûts en diminuant leurs stocks, augmente considérablement le nombre de mouvements de camions.

Enfin, le transport routier a démontré ces dernières années sa grande capacité d'adaptation aux évolutions de l'activité économique, notamment par l'amélioration de ses prestations de services et la modernisation de son matériel roulant (modernisation facilitée par une durée de vie courte du matériel, au contraire de celui des modes concurrents). Il a également profité directement du développement du réseau autoroutier, le long duquel, par ailleurs, se sont souvent installées les entreprises.

Cette évolution générale entraîne par conséquent un nombre de plus en plus important de poids lourds au sein du réseau de transport. Ceci est particulièrement sensible pour la France, pays de transit de l'arc atlantique où circulent massivement les poids lourds ; situation par ailleurs accentuée depuis l'instauration par plusieurs états européens (Suisse, Autriche, …) de législations strictes et contraignantes sur le trafic de camions. A titre d'illustrations, entre 1980 et 2000, le pourcentage de poids lourds est passé de 17,7 à 19,9 % sur les autoroutes françaises concédées, de 19,5 à 22,7 % sur l'axe Lille-Marseille, de 16 à 39 % sur l'autoroute A9 à la frontière espagnole [Union routière de France, 2003].

Les prévisions d'augmentation du trafic de marchandises par la route suivent les tendances actuelles. La prise en compte des nuisances et des problèmes propres à la circulation des poids lourds constitue donc un défi important pour les gestionnaires des réseaux de transport.

1.2 Nuisances et problèmes liés à la circulation des poids lourds

L'augmentation du trafic poids lourds pose toute une série de problèmes aux exploitants de réseaux de transport, et ce sur de multiples aspects [Transportation Research Board, 2002].

1.2.1 Les atteintes à l'environnement

Tout d'abord, la circulation poids lourds entraîne de nombreuses nuisances environnementales, mises en évidence par l'augmentation actuelle du trafic au sein duquel ils occupent une part croissante.

Certaines sont immédiates et de proximité ; le bruit en est un exemple important, les poids lourds générant significativement plus de bruit que les voitures : à 90 km/h, un poids lourd fait autant de bruit que 28 voitures [FHWA, 1992].

D'autres sont d'influence plus globale, à plus long terme : il s'agit par exemple de l'émission de gaz polluants, nocifs pour la qualité de l'atmosphère et la santé humaine

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[INSEE, 2004]. Outre le dioxyde de carbone CO2 responsable en partie de l'effet de serre, les poids lourds sont d'importants émetteurs d'oxydes d'azote NOx (pluies acides), de monoxyde de carbone CO (néfaste à l'homme), de particules en suspension (maladies cardio-vasculaires et effets cancérigènes), de dioxyde de soufre SO2 (pluies acides) et de composés organiques volatils (formation d'ozone dans la basse atmosphère). Ici aussi, l'augmentation du trafic poids lourds contribue largement à l'augmentation de la pollution générale.

1.2.2 La dégradation des infrastructures

Les poids lourds sont également responsables d'une dégradation rapide de l'infrastructure. Celle-ci est liée d'une part au vieillissement accentué de la chaussée dû au trafic lourd (le passage d'un poids lourd est pour la chaussée équivalent à celui de dix mille à plusieurs milliards de véhicules légers), d'autre part aux sollicitations plus importantes des ouvrages d'art [Babilotte et Faure, 1998].

1.2.3 L'insécurité routière

La sécurité routière est aussi dégradée dans le cas d'un trafic hétérogène. Deux raisons essentielles à cela : d'une part, la présence simultanée de véhicules légers et de poids lourds crée un différentiel de vitesse plus important (notamment en montées quand certains poids lourds sont très lents) et de plus fréquents changements de voies, ce qui s'avère accidentogène ; d'autre part, la faible manoeuvrabilité des véhicules lourds augmente les risques d'accidents lors d'intempéries [Forkenbrock et Hanley, 2003].

Les poids lourds, à cause de leur gabarit imposant, augmentent par ailleurs la gravité2 des accidents dans lesquels ils sont impliqués : lorsqu'un poids lourd est impliqué, elle est multipliée par 2,6 [SETRA et CETUR, 1992]. La tendance au développement rapide de poids lourds avec remorque(s), déjà observée aux Etats-Unis, semble de plus engendrer une insécurité routière accrue [Forkenbrock et Hanley, 2003]3.

Enfin, la question des traversées des tunnels par les poids lourds soulève des problèmes d'exploitation spécifiques. L'accident survenu au tunnel du Mont-Blanc en mars 1999 a conduit les pouvoirs publics et les exploitants à mener de larges réflexions sur les mesures envisageables pour diminuer les risques d'accidents (interdistance minimale dans les tunnels, mise en place d'alternats, stockage de poids lourds en amont des ouvrages).

1.2.4 Une gestion du trafic plus délicate

La gestion du trafic et de son écoulement devient plus délicate en cas de fort taux de poids lourds. Les conséquences de la présence de poids lourds observées traditionnellement sont une dégradation des temps de parcours, un inconfort de conduite ainsi qu'une apparition plus rapide de la congestion, en particulier sur des sections difficiles pour les poids lourds comme les montées.

2 On peut la définir comme le nombre de tués par accident corporel. 3 Il faut toutefois souligner que la sur-implication des poids lourds dans les accidents graves ne signifie pas nécessairement qu'ils sont à l'origine de l'accident. En rapportant le nombre d'accidents au kilométrage effectué, les poids lourds ont d'ailleurs moins d'accidents que les véhicules légers [SETRA et CETUR, 1992].

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Cette congestion a un coût sensible pour l'activité économique, notamment pour le transport de marchandises lui-même qui, dans le schéma de production du juste-à-temps, ne peut plus tolérer ni retard ni incident dans les trajets des véhicules de livraison. Elle est devenue récurrente sur certains axes chargés quotidiennement en poids lourds, tels que l'autoroute A7 ou le sillon mosellan (A31 et A32), et n'épargne pas non plus les voies rapides urbaines, telles que le contournement Est de l'agglomération lyonnaise.

Ces difficultés amènent souvent les pouvoirs publics et les exploitants à étudier la faisabilité de l'augmentation de capacité des réseaux de transport. Mais le contexte économique et environnemental n'est plus propice au développement et à la construction de nouvelles infrastructures routières : les ressources financières et spatiales sont de plus en plus limitées, l'acceptabilité par le public d'un accroissement du réseau est devenue faible et le trafic induit par l'augmentation de l'offre fait craindre une situation future paradoxalement aggravée.

Par conséquent, l'optimisation de la gestion de l'existant par une meilleure utilisation des capacités actuelles est peu à peu devenue une priorité pour les exploitants routiers. Dans ce cadre, la compréhension de l'impact des poids lourds sur la circulation du trafic et la mise en place de mesures d'exploitation spécifiques aux véhicules de transport de marchandises constituent une clé d'amélioration de la gestion des réseaux routiers.

2 Recensement des effets des poids lourds sur le trafic

L'impact de la présence de poids lourds au sein du trafic sur l'écoulement des véhicules est évidente pour tout conducteur, même occasionnel. L'objet de cette partie est d'une part d'expliciter les différences existant entre les véhicules légers et les poids lourds, tant au point de vue du véhicule que du comportement des conducteurs, d'autre part de recenser les effets locaux et globaux générés par les poids lourds que l'on peut relever dans un trafic hétérogène. En quoi donc un trafic hétérogène contenant des poids lourds se comporte-t-il différemment d'un trafic homogène de véhicules légers ?

2.1 Quelles différences entre un véhicule léger et un poids lourd ?4

Ce sont les différences existantes entre les types de véhicules qui génèrent des interactions locales entre véhicules et provoquent des modifications de l'écoulement du trafic localement et globalement. Ces différences entre véhicules légers et poids lourds peuvent être classées en trois types [Krammes et Crowley, 1986] [Al-Khaisy, Hall et Reisman, 2002] :

4 La littérature existante sur le sujet est essentiellement américaine. Si notre étude ne porte pas spécifiquement sur le contexte européen ou français mais se veut générale, il faut toutefois garder à l'esprit les différences notables (de puissance, de comportement, …) pouvant exister entre les poids lourds nord-américains et européens.

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Chapitre 1

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• il existe tout d'abord des différences physiques entre véhicules : les poids lourds sont plus longs et plus larges que les véhicules légers, et occupent par conséquent un espace plus important sur la chaussée, rendant de fait par leur présence l'écoulement plus dense, et donc moins aisé, car on observe phénoménologiquement une baisse des vitesses avec l'augmentation de la concentration en véhicules5 ;

• ensuite, la cinématique des véhicules est très différente :

les poids lourds sont généralement plus lents que les véhicules légers et sont beaucoup plus sensibles que ces derniers à toute difficulté géométrique de l'infrastructure (profil en plan sinueux ou profil en long en rampe ou en descente), surtout s'ils sont chargés, ainsi qu'aux conditions climatiques délicates (chaussées glissantes, neige) dégradant leur adhérence. Cette différence de vitesse entre véhicules nécessite le dépassement des poids lourds par les véhicules légers, et crée donc pour ces derniers des sections routières ponctuelles où ils sont privés d'au moins une voie de circulation ; l'effet de gêne qui en résulte est d'autant plus important que le nombre de voies de l'infrastructure est faible ;

on doit souligner également les capacités d'accélération et de décélération généralement moindres des poids lourds. Ceci accroît en rampe ou en situation de redémarrage la différence de vitesse et donc d'écoulement entre poids lourds et véhicules légers ;

• enfin, le comportement des conducteurs est différent, à la fois dans l'absolu et lors de l'interaction avec les autres véhicules. Ceci est perceptible par la position choisie par les véhicules sur l'infrastructure, les choix de changements de voie ou encore l'interdistance laissée avec le véhicule précédent, un véhicule léger ne se comportant pas de la même façon s'il est entouré d'autres véhicules légers ou de poids lourds. Notons ici que le comportement des usagers en présence de poids lourds répond à la fois à des causes physiques (par exemple, la gêne à la visibilité créée par les poids lourds) et à des causes psychologiques (par exemple, une prudence supérieure pour des raisons diffuses au voisinage de poids lourds).

Ces différences génèrent une modification de l'écoulement du trafic. Les paragraphes suivants décrivent ces modifications, d'une part à l'échelle locale (à la taille des véhicules, vision microscopique), d'autre part à l'échelle globale (à la taille du flux de trafic, vision macroscopique).

2.2 Effets locaux de la présence de poids lourds

L'influence locale du trafic poids lourds sur les véhicules environnants se traduit essentiellement par une modification des temps intervéhiculaires6 et par des choix modifiés de positionnement sur la chaussée et de dépassement. Certains effets psychologiques sont également à prendre en compte : ils sont liés à l'inconfort de conduite plus ou moins ressenti par les conducteurs au voisinage immédiat d'un poids lourd.

5 Nombre de véhicules par unité de longueur. 6 Le temps intervéhiculaire considéré ici est la durée écoulée entre le passage à un point donné de l'arrière du véhicule suivi et le passage au même point de l'avant du véhicule suiveur.

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Poids lourds et gestion du trafic

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2.2.1 Des temps intervéhiculaires augmentés

Plusieurs études ont été réalisées pour déterminer la modification des temps intervéhiculaires en présence de poids lourds. En particulier, [Parker, 1996] a mené une étude de ce type pour déterminer l'utilité d'une séparation des poids lourds et des véhicules légers dans les zones de travaux. Toutefois, ces résultats sont suffisamment généraux et permettent de mettre en évidence les modifications d'espacement entre véhicules en présence de poids lourds, notamment par l'étude des temps intervéhiculaires selon les couples véhicule suiveur / véhicule suivi.

Observations

On note dans les résultats de l'étude de [Parker, 1996] que les temps intervéhiculaires laissés par les usagers avec le véhicule qui les précède, toutes choses égales par ailleurs, sont plus importants lorsque ce dernier est un poids lourd. En particulier, c'est lorsque le véhicule suivi est un poids lourd que l'on relève les temps intervéhiculaires les plus importants. Cette interdistance plus grande laissée par les usagers derrière les poids lourds constitue un phénomène reconnu, corroboré également par [Yoo et Green, 2004], qui évaluent à 10 % l'augmentation du temps intervéhiculaire derrière un poids lourd.

Mais la nature du véhicule suiveur est aussi importante : les données de l'étude de [Parker, 1996] montrent que les véhicules légers ont tendance à suivre le véhicule précédent de plus près que ne le font les poids lourds, et ce quelle que soit la nature du véhicule suivi. De plus, les temps intervéhiculaires laissés par les véhicules légers se concentrent sur des valeurs faibles, alors que ceux laissés par les poids lourds sont plus étalés.

Explications physiques

Les différences de temps intervéhiculaires selon la nature des couples véhicule suiveur / véhicule suivi ont des justifications physiques.

Ainsi, les interdistances plus importantes laissées par les usagers derrière les poids lourds peuvent s'expliquer par les perturbations aérodynamiques créées au voisinage de ces véhicules ou par le besoin de visibilité en prévision d'un dépassement. Les caractéristiques cinématiques et la manoeuvrabilité faibles des poids lourds incitent sans doute les usagers suiveurs à conserver une marge de manœuvre afin d'anticiper les situations critiques de conduite pouvant survenir. La bonne maniabilité des véhicules légers, dotés de capacités de freinage et d'accélération plus importantes que les poids lourds, leur permet cependant de laisser un espacement plus faible.

[Pipes, 1967] avance par ailleurs une explication physiologique à l'augmentation du temps intervéhiculaire derrière un poids lourd. Un conducteur suiveur détecterait une différence de vitesse avec le véhicule précédent à partir de la variation de l'angle de vision qu'il a de la largeur du véhicule précédent ; il réagirait si cette variation est supérieure à une valeur seuil, de l'ordre de quelques dixièmes de millième de radians par seconde. Cette variation étant proportionnelle à la fois à la largeur du véhicule précédent et à la différence de vitesse avec celui-ci, les poids lourds, par leur gabarit plus important et leur relative lenteur, induiraient une vigilance et une prudence accrue des véhicules suiveurs.

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2.2.2 Des comportements de positionnement et de dépassements modifiés

La présence de poids lourds lents au sein du trafic contraint les véhicules légers plus rapides à dépasser et donc à changer de voie. Ce mécanisme est par ailleurs fortement influencé par le positionnement des poids lourds sur la chaussée, pas nécessairement confinés sur la voie lente.

Nombre de dépassements et poids lourds

[Shahab Uddin et Ardekani, 2002] ont étudié le nombre Y de changement de voies sur une autoroute texane à deux voies en fonction du différentiel de vitesses X2 entre les deux voies et le taux de poids lourds X1 selon le modèle suivant (A, B et C sont des constantes) :

21 2Y A BX CX= + + (1.1)

Sur la base des données recueillies ils ont pu montrer que le modèle proposé était représentatif, démontrant ainsi l'effet important de la présence de poids lourds sur le nombre de dépassements. Toutefois, ils ont aussi souligné que le coefficient C n'était significativement non nul que lorsque le volume de trafic était suffisamment important (période de pointe de trafic).

Positionnement des poids lourds sur la chaussée

Peu de données sont disponibles et peu d'études ont été menées sur la position des poids lourds sur la chaussée ; seuls des éléments partiels existent, et uniquement pour des infrastructures à deux voies. Ainsi, [Gattuso, 1998] note, avec l'augmentation du débit, une tendance linéaire à une uniformisation de la répartition des poids lourds entre les voies. Au débit de capacité de l'infrastructure, la voie rapide réalise ainsi le tiers du débit poids lourds7.

Par ailleurs, une expérimentation a été menée au Nouveau-Mexique à fin de vérification de l'hypothèse formulée dans le manuel technique de cet Etat américain qui stipulait que 94 % des poids lourds se positionnaient sur la voie lente. Les résultats de cette campagne de mesure sont donnés par [Albright et Blewett, 1988] ; ils montrent que loin d'être constante, la proportion de poids lourds situés sur la voie lente décroît avec le débit de façon linéaire et que lorsque l'infrastructure fonctionne à capacité, la voie lente n'assure plus que les deux tiers du débit environ. Ces résultats sont cohérents avec les observations de [Gattuso, 1998] et montrent une sous-estimation dans le manuel technique de l'Etat du nombre de poids lourds changeant de voie, tout du moins quand le volume de trafic est suffisamment important.

Par conséquent, par leur propre changement de voie, les poids lourds contribuent fortement à l'augmentation des changements de files et à la gêne occasionnée aux autres usagers.

7 Pour le trafic en général (tous véhicules confondus), on suppose couramment que la voie rapide assure les 2/3 du débit quand celui-ci est proche de la capacité de l'infrastructure (modèle de Heidemann, cité par [Gattuso, 1998]).

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2.2.3 Inconfort de conduite au voisinage des poids lourds

Typologie de l'inconfort

Outre les effets physiques relevés ci-dessus, les conducteurs de véhicules légers ressentent un inconfort de conduite lorsqu'ils se trouvent au voisinage de poids lourds. Cet inconfort est lié à différents facteurs, recensés par [Peeta, Zhou et Zhang, 2004]. La gêne ressentie dépend ainsi à la fois de caractéristiques socio-économiques du conducteur (son âge, son sexe, son niveau d'études ou sa position sociale), de ses comportements de conduite et des circonstances du trafic (les conditions météorologiques, la période diurne ou nocturne de la conduite, le niveau de trafic) ; elle varie donc entre conducteurs et, pour un même individu, au cours du temps.

[Peeta, Zhou et Zhang, 2004], sur la base d'un questionnaire à un échantillon de conducteurs de véhicules légers, soulignent que l'inconfort est le plus important la nuit, en conditions météorologiques mauvaises et lorsque le volume de trafic est fort, mais pas trop8.

Selon cette enquête, l'inconfort de conduite est lié essentiellement à des préoccupations de sécurité ; elles sont relatives au masque de visibilité dû au gabarit des poids lourds, à la difficulté de les dépasser du fait de leur longueur et à la crainte de n'être pas bien perçu par le conducteur du poids lourd.

Conséquences

Ce sentiment d'inconfort et d'insécurité amène les conducteurs à laisser une interdistance plus importante. [Peeta, Zhou et Zhang, 2004] évaluent à une dizaine de mètres l'interdistance supplémentaire qui peut être laissée par un conducteur particulièrement gêné par la présence de poids lourds.

Par ailleurs, l'un des points essentiels que fait ressortir cette étude est qu'à conditions identiques les conducteurs sont plus tentés de dépasser un poids lourd qu'un autre véhicule léger. Ceci signifie que les conducteurs de véhicules légers cherchent à dépasser les poids lourds même en cas de faible écart de vitesses, et sont prêts pour cela à accélérer, préférant éviter le voisinage de véhicules lourds et s'en éloigner le plus rapidement possible. [Peeta, Zhou et Zhang, 2004] évaluent ainsi à 20 % la proportion de véhicules légers dépassant des poids lourds qui roulent pourtant à la vitesse désirée de ces véhicules.

2.2.4 Conclusion sur les effets locaux

Ainsi, localement, les effets de la présence de poids lourds affectent l'écoulement du trafic selon deux aspects principaux :

• une interdistance plus grande avec les véhicules avoisinants. Ceci restreint la capacité d'écoulement du trafic en augmentant la part d'espace indisponible de la chaussée ;

8 En effet, quand le trafic est très fluide, il y a peu d'interactions entre véhicules et donc peu de gêne ; pour un volume moyen de trafic, les vitesses sont encore élevées et le nombre de véhicules est important, maximisant ainsi les situations de conflit et l'insécurité ; pour un trafic encore plus dense, les vitesses s'uniformisent et le trafic devient plus homogène et plus apaisé, limitant à nouveau le sentiment d'inconfort induit par les poids lourds.

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• une restriction ponctuelle du nombre de voies pour les véhicules légers plus rapides qui doivent dépasser, engendrant un écoulement plus difficile. L'inconfort de conduite que les poids lourds génèrent dans leur voisinage incite par ailleurs les véhicules légers les plus lents à dépasser et à gêner à leur tour les véhicules légers les plus rapides ; le dépassement des poids lourds entre eux accentue encore cet effet.

2.3 Effets globaux de la présence de poids lourds

Si l'on peut mettre en évidence localement les modifications de l'écoulement causées par la présence de poids lourds, il est aussi possible de qualifier à une échelle plus globale l'effet sur la circulation de l'hétérogénéité du trafic, et, en quelque sorte, le résultat de l'agrégation des effets locaux générés par les poids lourds et décrits ci-dessus. Les exploitants de réseaux routiers soulignent ainsi que lorsque le taux de poids lourds est fort, la capacité de l'infrastructure est plus faible, et que le risque que le trafic passe dans un état congestionné est accru.

De façon plus générale, on peut caractériser ces deux observations par l'étude des débits réalisés en fonction de la concentration du trafic d'une part, et par l'instabilité de ce dernier d'autre part.

2.3.1 Diagramme fondamental et poids lourds

Diagramme fondamental est le terme consacré en ingénierie du trafic pour désigner la courbe donnant en état d'équilibre du trafic le débit réalisé en fonction de la concentration de véhicules. Cette courbe donne aux exploitants une information pertinente sur le niveau de service offert aux usagers et leur permet par ailleurs de déterminer quelle est la capacité de leur infrastructure dans une situation donnée (les conditions climatiques, le type d'usagers, les motifs de déplacements étant susceptibles de la modifier [Cohen, 1990]). La composition du trafic, notamment le taux de poids lourds, est ainsi un paramètre très influent sur la valeur de la capacité, et plus généralement sur le diagramme fondamental.

Ainsi, [Kockelman, 1998] a mené une étude visant à expliquer la dispersion des données de trafic recueillies par l'existence de facteurs explicatifs de cette dispersion. Les résultats montrent notamment que la présence de poids lourds affecte nettement le diagramme fondamental :

• à même concentration de véhicules, le débit réalisé est plus faible (ou, ce qui est équivalent, la vitesse est plus faible) ;

• la capacité de l'infrastructure est trouvée plus faible (passant de 2 300 à 2 100 véh.h-1.voie-1 pour un taux de 10 % de poids lourds) et s'obtient pour une concentration un peu plus faible en véhicules ;

• la concentration maximale observée est plus faible en présence de poids lourds.

Des observations semblables sur l'évolution du diagramme fondamental en présence de poids lourds à partir de données ont également été formulées par [Wu, 2002].

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2.3.2 Qualité du trafic et poids lourds

Plusieurs méthodes ont été développées dans la littérature pour déterminer la qualité du trafic, décrire son confort de conduite, sa sécurité ou sa stabilité, et dépasser quelque peu la description quantitative d'un niveau de service seulement évalué par les vitesses ou les débits réalisés.

Une méthode complète est ainsi développé par [Ferrari et al., 1982]. Elle consiste, sur la base de 15 indicateurs du trafic tels que le débit, la vitesse ou les temps intervéhiculaires, à tenter de dégager ceux permettant le mieux d'expliquer la variance constatée dans les données recueillies. Les auteurs ont ainsi mené une analyse en composantes principales, qui leur ont permis de dégager 3 macro-indicateurs s'exprimant en fonctions des 15 initiaux et permettant d'expliquer 75 % de la variance observée. Le premier, qui explique à lui seul 55 % de la variance observée, est un bon indicateur du niveau de service général ; s'il est bon, les vitesses sont élevées, il y a peu de contraintes sur l'écoulement des véhicules. Le deuxième est un bon indicateur de la sécurité de la circulation et le troisième représente l'instabilité du trafic.

Cette étude montre par ailleurs que la composition du trafic, et notamment l'importance de la part du trafic poids lourds au sein de celui-ci, a une influence importante sur les résultats du premier indicateur si les caractéristiques géométriques de la route sont mauvaises (sinuosité ou montées).

Dans une autre étude [Ferrari et al., 1984], ces mêmes auteurs montrent la forte corrélation de ce premier indicateur avec la proportion de véhicules qualifiés de gênés par les véhicules précédents ; constituent cette catégorie les véhicules qui ne ralentissent que très peu en s'approchant des véhicules précédents, maintiennent ensuite un espacement faible avec ces véhicules et les dépassent dès la manœuvre devenue possible. Ce comportement est caractéristique de véhicules légers gênés par des poids lourds plus lents (en accord avec le besoin de dépassement décrit au paragraphe 2.2.3) ; l'étude fait donc le lien entre l'inconfort de conduite créé par les poids lourds et l'efficacité du niveau de service de l'infrastructure.

2.3.3 Conclusion sur les effets globaux

Ainsi, les effets locaux recensés au paragraphe 2.2 se retrouvent dans l'analyse de l'impact de la présence de poids lourds à une échelle plus globale :

• à même concentration de trafic, les débits et les vitesses sont plus faibles, et la concentration maximale est moindre ;

• l'efficacité de l'écoulement est diminuée, notamment par la gêne directe liée aux dépassements nécessaires à l'avancée des véhicules les plus rapides.

3 Prise en compte des poids lourds pour la gestion du trafic

Les gestionnaires de réseaux routiers tiennent compte du trafic poids lourds pour l’optimisation de leur infrastructure. Les réponses qu’ils apportent sont liées aux différents impacts générés par les poids lourds recensés au paragraphe 2. Elles concernent à la fois le dimensionnement des infrastructures, l’évaluation économique des coûts du

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Chapitre 1

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transport pour les usagers par l’estimation des temps de parcours et du niveau de service qui leur est offert, ainsi que des mesures d’exploitation, dynamiques ou non, visant à limiter les effets de la circulation des poids lourds sur l’écoulement général du trafic.

3.1 Dimensionnement et évaluation du niveau de service

3.1.1 Le coefficient d'équivalence : définition

Les poids lourds, par leur gabarit, les interdistances plus grandes laissées dans leur voisinage et leurs vitesses moindres, occupent un espace sur la chaussée plus important et pendant plus longtemps. Par conséquent, la capacité attendue d’une infrastructure est significativement plus faible en présence de poids lourds.

Pour tenir compte de cette influence dans le dimensionnement des infrastructures, et plus généralement dans l’évaluation du niveau de service, les exploitants utilisent la notion de coefficient d'équivalence. Cette notion a été introduite pour la première fois dans le manuel technique américain d'exploitation du trafic, le Highway Capacity Manual (HCM) en 1965. Dans la dernière version de 2000, ce coefficient est défini comme suit [Transportation Research Board, 2000] :

le nombre de véhicules légers qui utiliseraient la même fraction de capacité de l'infrastructure qu'un poids lourd, et ce dans les mêmes conditions d'infrastructure, de trafic et de régulation.

L'utilisation de ce coefficient permet de transformer un débit constitué de véhicules légers et de poids lourds en un débit équivalent constitué uniquement de véhicules légers et exprimés par conséquent en unités de véhicules légers (u.v.l.). En présence de poids lourds et, dans les conditions d'infrastructure, de trafic et de régulation considérées, on définit une valeur du coefficient d'équivalence poids lourds/véhicules légers ET ; ceci permet de ramener le volume de trafic réel V au volume équivalent V* qui serait constitué de véhicules légers uniquement :

( )( )* 1 1T TV V P E −= + (1.2)

avec PT la fraction de poids lourds. Le coefficient d'équivalence est décliné dans le HCM selon le type d'infrastructures

(nationales, voies express, autoroutes) et le type général de terrain (plaine, vallons ou montagnes). En effet, comme noté plus haut, les caractéristiques géométriques des infrastructures ont une influence importante sur les performances des poids lourds et la gêne occasionnée à l'écoulement des autres véhicules est bien plus élevée en montée ou en descente. A titre d'exemple, les valeurs utilisées aux Etats-Unis pour le coefficient d'équivalence sur autoroute sont résumées dans le tableau suivant :

Terrain plat Terrain vallonné Terrain montagneux

Coefficient d'équivalence Poids lourds/Véhicules légers 1,5 2,5 4,5

Tableau 1-1 : Coefficients d'équivalence poids lourds/véhicules légers [HCM, 2000]

Dans des sections routières en rampe ou en descente, le HCM propose de plus un coefficient d'équivalence affiné, tenant compte de la longueur et de l'importance de la

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Poids lourds et gestion du trafic

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rampe ou de la descente (les performances cinématiques des poids lourds étant en effet plus ou moins affectées selon la valeur de ces paramètres) et de la proportion de poids lourds au sein du trafic total (une proportion importante augmente le nombre de dépassements entre poids lourds et donc la gêne occasionnée aux autres véhicules).

3.1.2 Utilisations du coefficient d'équivalence

Le coefficient d'équivalence, défini à type d'infrastructure et éventuellement composition du trafic donnés, est utilisé principalement comme un outil de gestion statique des réseaux : dimensionnement a priori d'infrastructures, ou évaluation d'un niveau de service offert aux usagers.

La transformation des volumes de trafic prévus pour une infrastructure donnée en volumes équivalents exprimés en unités de véhicules légers permet en effet aux exploitants de calculer le nombre de voies nécessaires au bon écoulement futur du trafic, et d'envisager éventuellement la construction de voies supplémentaires.

Le coefficient d'équivalence est également pour les exploitants un outil d'analyse du niveau de service offert aux usagers, car il permet de déterminer pour une situation de trafic donnée la réserve de capacité restante. Ainsi on peut déterminer la qualité du trafic ressentie par les conducteurs présents sur l'infrastructure. Le HCM définit en effet six niveaux de service offerts à l'usager (de A – très bon niveau, trafic très fluide à F – niveau de service dégradé, congestion du trafic), sur la base du type d'infrastructure considérée et du ratio volume de trafic/capacité, exprimé en termes de véhicules légers par heure et par voie. La valeur du coefficient d'équivalence est ainsi très importante, car elle permet de définir, pour un trafic hétérogène, quelles sont les valeurs seuil de débit (en tous véhicules et non en u.v.l.) entre les différents niveaux de services.

La relation utilisée par le HCM pour définir les cinq premiers niveaux de service est donnée ci-dessous.

EXHIBIT 23-3. SPEED-FLOW CURVES AND LOS FOR BASIC FREEWAY SEGMENTS

C

Free-Flow Speed, FFS = 120 km/h

110 km/h

100 km/h

90 km/h

1300

1450

1600

1750

Dens

ity =

7 p

c/km

/ln

11 pc

/km/ln

22 pc/

km/ln

28 pc/km/ln

LOS A B D E

130

120

110

100

90

80

70

60

50

40

30

20

10

00 400 800 1200 1600 2000 2400

Aver

age

Pass

enge

r-C

ar S

peed

, S (k

m/h

)

Flow Rate, vp (pc/h/ln)

16 pc

/km/ln

Figure 1-2 : Détermination des niveaux de service pour une autoroute [HCM, 2000]

3.1.3 Questions sur le coefficient d'équivalence

Si cette notion de coefficient d'équivalence a été mise en place aux Etats-Unis, il faut souligner que son utilisation est très répandue dans les autres pays industrialisés. Elle constitue en effet un outil efficace pour l'exploitant afin d'utiliser les manuels techniques pour le dimensionnement et l'évaluation du niveau de service de ses infrastructures ; assez

Page 34: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 1

32

affinée dans le HCM, elle est dans les autres pays soit copiée sur les valeurs américaines, soit restreinte à un faible nombre de valeurs (parfois même une seule, telle que 2 ou 2.5).

Un certain nombre de recherches visent ainsi à adapter les résultats américains à d'autres pays, tant il est vrai qu'entre pays il peut exister une diversité dans les types de véhicules (les poids lourds américains semblent a priori plus puissants que les poids lourds européens) ou dans le comportement des conducteurs [Petigny, 1967] ; la finalité des travaux de [Fan, 1990], par exemple, est de faire cette adaptation dans le cas de Singapour.

De plus, au vu de l'importance opérationnelle que prennent les valeurs attribuées au coefficient d'équivalence dans les manuels techniques, la façon de les calculer revêt un intérêt particulier. Depuis 1965 et son introduction dans le HCM, une littérature abondante est ainsi venue alimenter la façon de calculer le coefficient d'équivalence, en proposant différentes méthodologies et différents critères d'équivalence.

C'est en effet par rapport à un critère d'équivalence qu'est calculé le coefficient d'équivalence entre poids lourds et véhicules légers ; il correspond à la quantité conservée entre le trafic hétérogène réel et le trafic homogène virtuel que l'on bâti comme équivalent au trafic étudié. Il semble naturel que ce critère corresponde au paramètre permettant de définir par la suite le niveau de service [Krammes et Crowley, 1986].

Les critères d'équivalence utilisés jusqu'ici ont été :

• longtemps la vitesse moyenne [Linzer, Roess et Mc Shane, 1979], [Van Aerde et Yagar, 1984], [Elefteriadou, Torbic et Webster, 1997], qui conduit à l'impossibilité de définir le coefficient à volume faible quand les vitesses considérées sont les vitesses moyennes du trafic total ; ceci ne se produit plus si l'on considère la vitesse des véhicules légers [Huber, 1980];

• la concentration de trafic, ou mieux le ratio concentration/concentration critique, qui correspond au critère de définition des niveaux de service dans le HCM actuel [Krammes et Crowley, 1986], [Webster et Elefteriadou, 1999] ;

• le retard [Craus, Polus et Grinberg, 1980] ;

• la formation de pelotons [Van Aerde et Yagar, 1984] (caractérisée par la probabilité qu'a un véhicule de créer un peloton, ainsi que par le nombre de véhicules qui composent le peloton).

Le coefficient d'équivalence ne peut pas prendre la même valeur pour n'importe lequel de ces critères. Il est nécessaire d'utiliser un critère d'équivalence en relation avec la finalité de l'application concernée par son utilisation [Van Aerde et Yagar, 1984].

Ainsi, il est illusoire de vouloir décrire l'interaction du trafic poids lourds avec celui de véhicules légers avec un coefficient d'équivalence unique. Celui-ci, loin d'être intrinsèque au trafic hétérogène, doit être décliné pour chaque situation étudiée, et selon l'équivalence voulue. Les recherches sont d'ailleurs toujours aussi nombreuses, pour :

• déterminer la valeur de coefficients d'équivalence en congestion [Al-Kaisy, Hall et Reisman, 2002]9, situation de trafic souvent négligée par les études précédentes et les manuels techniques actuels ;

9 Le critère d'équivalence est ici le débit de décharge en sortie de la congestion.

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Poids lourds et gestion du trafic

33

• pour améliorer leur description en rampes [Laval, 2004] ;

• pour tenir compte de plusieurs types de poids lourds à la fois [Demarchi et Setti, 2003] ;

• pour décrire plusieurs types d'infrastructures et/ou de poids lourds [Torbic et al., 1997] ou encore pour prendre en compte le rapport poids/puissance des poids lourds [Elefteriadou, Torbic et Webster, 1997]. Cette caractéristique est très importante en rampes ou sur des sections sinueuses, et une modification de la législation sur les caractéristiques physiques des poids lourds serait d'ailleurs de nature à modifier leur impact sur le trafic environnant [Elefteriadou et Webster, 2000].

3.2 Evaluation des temps de parcours

La vitesse, ou son inverse le temps de parcours, est une mesure très importante pour la planification et l'évaluation économique des infrastructures. En effet on considère que le temps de parcours influence les choix d'itinéraires par les usagers, donc les niveaux de trafic ainsi que les recettes aux péages autoroutiers [SETRA, 2001]. Le temps de parcours est d'ailleurs bien plus intéressant en termes de ressenti pour l'usager qu'un quelconque niveau de service, essentiellement utile pour l'exploitant.

Une des applications fréquentes en planification est ainsi l'utilisation de lois vitesses-débits. Ainsi, les manuels d'exploitation de la route britannique [Highway Agency, 2002], allemand [Ministère Fédéral des Transports, 1993], américain [HCM, 2000] ou français [SETRA, 2001] utilisent de telles lois pour estimer les temps de parcours ou les vitesses sur leurs réseaux nationaux.

Ces courbes, qui ne sont utilisables qu'en situation fluide de trafic, donnent la vitesse prévue du trafic, à la fois pour les véhicules légers et les poids lourds, en fonction du débit observé. Ici encore, le débit est ramené, selon la proportion de poids lourds, à un débit équivalent en véhicules légers, par l'intermédiaire d'un coefficient d'équivalence qui ne prend souvent qu'une seule valeur quels que soient le type et les caractéristiques géométriques de la route considérée.

3.2.1 Facteurs pris en compte dans les courbes vitesses-débits

De façon générale, les manuels techniques nationaux cherchent à prendre en compte dans les courbes vitesses-débits les paramètres suivants [Chanut et Buisson, 2004] :

• des paramètres concernant la géométrie de l'infrastructure :

le type de voirie (voie express, autoroute, …) et le nombre de voies ; le profil en plan ; les rampes et les descentes ;

• des paramètres concernant le trafic :

son niveau ; sa composition.

Page 36: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 1

34

3.2.2 Formulation de courbes vitesses-débits

Les principaux pays à avoir bâti de telles courbes sont le Royaume-Uni, l'Allemagne, les Etats-Unis et la France. On donne ci-dessous un rapide aperçu des courbes de chacun d'entre eux. Les vitesses s'expriment en km/h, les débits en véh/(h.voie). Dans la suite, les véhicules légers seront représentés par le sigle VL, les poids lourds par le sigle PL.

Courbes britanniques

Les courbes britanniques s'expriment selon :

( )( ) ( ) ( )

0.1 0.14 0.006 si

0.033 siVL libVL b

VL VL b b b

V Q V B H Q Q Q

V Q V Q Q Q Q Q

= − − − ≤= − − >

(1.3)10

( ) ( )( )0.1 0.25 ,PL libPL VLV Q Min V B H V Q= − − (1.4)

Ces formules sont valables jusqu'à la capacité Qc11, définie avec un coefficient

d'équivalence de 2.5. On obtient la forme de courbe débits-vitesses suivante :

Vite

sses

Débits

VlibVL

VlibPL

Qb

Qc

Vitesse VL

Vitesse PL

Figure 1-3 : Courbes vitesses-débits pour le manuel britannique

[Highway Agency, 2002]

Courbes allemandes

Le trafic PL est pondéré par un coefficient 2 pour la vitesse VL, tandis que la vitesse des PL n'est sensible qu'au trafic des PL :

( ) ( ) ( )3 20.235 10, 8 0.5 VL PLa Q Qs KUVL VL PL libVLV Q Q V e e e− +−= − − (1.5)12

( ) ( ) 30.248 106 0.2 PLbs KU QPL PL libPLV Q V e e e−−= − − (1.6)13

10 Qb est un débit fixé dit de rupture de pente, B est la courbure du profil en plan en degrés/km, H est la pente positive en m/km. 11 selon (avec p le pourcentage de poids lourds) Qc=2330/(1+0.015p). 12 avec s la pente longitudinale de la route (en pourcentage) et KU la sinuosité (en degrés/km) ; la sensibilité de la vitesse des VL au trafic, a, vaut 1.38.10-3 h/véh. 13 La sensibilité de la vitesse des PL au trafic, b, vaut 0,45.10-2 h/véh.

Page 37: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Poids lourds et gestion du trafic

35

Les courbes sont définies jusqu'à 20 km/h et sont donc de la forme suivante :

Vite

sses

Débits

VlibVL

VlibPL

Vitesse PL

Vitesse VL

Figure 1-4 : Courbes vitesses-débits pour le manuel allemand

[Ministère Fédéral des Transports, 1993]

Courbes américaines

Une seule courbe vitesses-débits, valable pour tous les véhicules quel que soit leur type, est définie dans le manuel américain. Le trafic PL est pondéré par un coefficient ET dépendant des caractéristiques de l'infrastructure comme mentionné au 3.1.

La courbe, définie par l'équation (1.7) jusqu'à Qc, a la forme de la Figure 1-5 :

( )

( )2.6

si

15 310023 1800 si28 20 1300

éq éqlib b

éq liblibéq éq clib b

lib

V Q V Q Q

Q VVV Q V Q Q QV

< ≤

= ≤

+ −−= − − (1.7)14

Vite

sses

Débits

Vlib

Qb

Qc

Figure 1-5 : Courbe vitesse-débit pour le manuel américain [HCM, 2000]

14 avec Qéq = QVL + ETQPL, Qb = 3100 - 15Vlib, Qc = 1800 + 5Vlib.

Page 38: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 1

36

Courbes françaises

Les vitesses libres dépendent de la nature du relief (plaine, vallonné ou montagneux). Le coefficient d'équivalence e entre VL et PL est pris égal à 2.5.

( )

( )

1

2

1

2

,1

,1

libVLVL VL PL

VL PL

libPLPL VL PL

VL PL

VV Q QQ eQ

CVV Q QQ eQ

C

α

α

γ

γ

=++

=++

(1.8)15

Vite

sses

Débits

VlibVL

VlibPL

Figure 1-6 : Courbe vitesse-débit pour le manuel français [SETRA, 2001]

3.2.3 Comparaisons des courbes nationales

Les représentations des courbes vitesses-débits dans les différents pays présentent un certain nombre de points communs, mais également des différences d'approche que l'on va souligner.

Evolution de la capacité en fonction du pourcentage de poids lourds

La Figure 1-7 présente l'évolution prévue par les manuels techniques de la capacité des autoroutes à 3 voies sans aucune altération (ni échangeurs, ni pentes, ni sinuosité) lorsque le pourcentage de poids lourds augmente.

On note que la forme de la décroissance de la capacité est similaire pour tous les pays, même si la décroissance est plus faible pour les Etats-Unis, ceci étant essentiellement dû à la faiblesse du coefficient d'équivalence (1.5 pour les autoroutes de plaine) liée à la puissance des poids lourds américains.

15 Les coefficients γ1 et γ2 sont liés directement aux vitesses critiques Vc des VL et des PL, supposées différentes : γi = (Vlib,i/Vc,i) - 1. Les coefficients α1 et α2 représentent la sensibilité du temps de parcours au débit en unités de véhicules légers (uvl) à l'approche de la saturation ; le premier vaut 6 pour les autoroutes à 3 voies, le deuxième est fixé à 1. C est la capacité intrinsèque de l'infrastructure, prise égale à 1730 uvl/h.voie.

Page 39: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Poids lourds et gestion du trafic

37

0 20 40 60 80 1000

500

1000

1500

2000

2500

Cap

acité

(vé

h/h.

voie

)

Pourcentage PL

AllemagneFranceEtats−UnisGrande−Bretagne

Figure 1-7 : Evolution des capacités selon le pourcentage de poids lourds

Effets des caractéristiques géométriques de l'infrastructure sur la vitesse

Seuls les manuels allemands et britanniques prennent directement en compte la sinuosité et le profil en long de l'infrastructure dans la détermination des vitesses. Comme attendu, les poids lourds sont plus sensibles que les véhicules légers aux caractéristiques géométriques de la route.

En France et aux Etats-Unis, le profil en long (montées et descentes) est pris en compte par le biais du coefficient d'équivalence (Etats-Unis) ou des vitesses libres (France).

Effets du trafic sur la vitesse des véhicules légers

Pour un trafic uniquement composé de véhicules légers, la Figure 1-8 présente la perte de vitesse liée à l'augmentation du débit.

0 500 1000 1500 2000 2500

−120

−100

−80

−60

−40

−20

0

Per

te d

e vi

tess

e (k

m/h

)

Débit VL (véh/h.voie)

AllemagneFranceEtats−UnisGrande−Bretagne

Figure 1-8 : Perte de vitesse des VL avec l'augmentation du débit VL

On note ici que la forme de la décroissance est semblable entre pays, seule la Grande-Bretagne se démarquant par une décroissance linéaire de la vitesse. Entre les trois autres pays la différence réside dans le seuil à partir duquel la perte de vitesse devient sensible : 500 VL/h pour l'Allemagne, 1000 pour la France, 1500 aux Etats-Unis.

Les mêmes remarques peuvent être formulées quant à l'effet du trafic PL sur la vitesse d'un VL isolé [Chanut et Buisson, 2004]. Seuls les seuils de perte significative de

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Chapitre 1

38

vitesses changent : 0 PL/h pour l'Allemagne, 300 pour la France, 900 pour les Etats-Unis. Pour le manuel britannique, la décroissance est toujours linéaire et donc différente des trois autres pays.

Effets du trafic sur la vitesse des poids lourds

Il y a ici deux écoles : d'une part les manuels britanniques et allemands, qui considèrent que le trafic VL n'a pas d'effets sur la vitesse PL (voir les équations (1.4) et (1.6)) (le manuel britannique considère même que la vitesse des poids lourds reste constante quel que soit le trafic) ; d'autre part, les manuels américains et français qui considèrent une diminution de vitesse des poids lourds à cause du débit VL (voir les équations (1.7) et (1.8)). Cependant, si les courbes françaises considèrent une décroissance quasi-linéaire des vitesses PL, le manuel américain représente une décroissance beaucoup plus forte mais seulement significative après un seuil situé à environ 1500 VL/h.voie.

Quant aux effets du trafic PL sur la vitesse PL, le manuel français se distingue également en supposant que la décroissance de la vitesse est quasi-linéaire.

3.2.4 Conclusion – améliorations possibles

Les courbes techniques vitesses-débits utilisées dans les différents pays présentent un certain nombre de ressemblances. Parmi celles-ci, on peut souligner la forme de la décroissance de la capacité en fonction du pourcentage de poids lourds présentée à la Figure 1-7. De plus, les courbes britanniques mises à part, la décroissance des vitesses des VL en fonction du trafic est relativement similaire.

Les différences résident ainsi essentiellement dans la prise en compte ou non selon les pays de l'influence du débit VL sur le temps de parcours PL, et de la forme de la décroissance de la vitesse PL (linéaire ou non). D'autres différences existent à propos de la sensibilité de la vitesse à l'augmentation du débit, mais peuvent refléter des comportements nationaux différents liés aux facteurs économiques, géographiques ou culturels des pays concernés. C'est ainsi que de multiples recherches sont menées pour adapter les courbes proposées par les principaux manuels à d'autres pays : c'est ainsi le cas pour l'adaptation des courbes allemandes à l'Autriche [Mahdy, 2002], ou du HCM à la Corée du Sud [Suh, 1990].

Le HCM est le manuel qui prend le plus finement en compte la présence de poids lourds, car à travers la définition du coefficient d'équivalence il intègre l'effet des caractéristiques géométriques de l'infrastructure, ainsi que les impacts particuliers des rampes. Toutefois, conçu essentiellement comme un outil de dimensionnement, il néglige les pertes de vitesses subies par les véhicules pour des volumes faibles d'une part, et ne différencie pas les comportements des véhicules légers et des poids lourds d'autre part16. Ainsi, [Mahmassani et Kim, 1987] et [Ye, Tarko et Sinha, 2001] ont proposé des améliorations du manuel visant respectivement à bâtir une courbe vitesses-débits différente pour PL et VL en débits faibles et à décrire plus précisément des vitesses libres différentes selon le type de véhicules.

Enfin, ce type de courbes vitesses-débits néglige largement les situations congestionnées de trafic. [Mahdy, 2002] a ainsi construit une deuxième courbe vitesses-

16 Ceci pourrait cependant être en partie justifié par la puissance des poids lourds nord-américains, dont les capacités et les comportements sont proches de ceux des véhicules particuliers.

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Poids lourds et gestion du trafic

39

débits pour la partie congestionnée du trafic (baisse conjointe du débit et des vitesses). Cependant, ces situations ne sont peu ou pas décrites dans les manuels techniques, alors que des modélisations existent dans les travaux de recherche pour les modèles d'affectation de trafic multi-classes (voir pour détails la thèse de [Bliemer, 2000]).

3.3 Mesures d'exploitation spécifiques aux poids lourds

Les problèmes de sécurité lors de la traversée de tunnels routiers par un trafic poids lourds ont amené les exploitants à réfléchir à des mesures de gestion du trafic pour juguler les risques mis en évidence lors des accidents du tunnel du Mont-Blanc en 1999 ou du Saint-Gothard en 2001. Ainsi, les pouvoirs publics ont mis en place des régulations sévères concernant les débits horaires acceptables en poids lourds et les interdistances intervéhiculaires en tunnel ; des mesures d'alternat ont parfois été mises en place, et les exploitants ont été amenés à concevoir des plans de gestion du trafic poids lourds en conséquence (création de zones de stockage de véhicules, régulation des arrivées, etc. ; pour un exemple d'un tel plan de gestion pour la traversée des Alpes suisses, voir [Rapp et Albrecht, 2003]). Ces mesures sont bâties dans un souci d'amélioration de la sécurité du trafic.

Les difficultés que la présence de poids lourds peut générer sur le bon écoulement du trafic, comme détaillées au paragraphe 2, ont également incité pouvoirs publics et exploitants à réfléchir à des mesures d'exploitation, plus ou moins dynamiques, permettant de limiter ou réguler ces effets. Ils portent sur une meilleure gestion de la coexistence de véhicules de vitesses différentes, générant congestions, pertes de temps et dépassements donc changements de files néfastes à l'écoulement et à la sécurité. Sans chercher à être absolument exhaustif, on peut citer :

• les réglementations de circulation des poids lourds, régulières ou exceptionnelles, sur l'autorisation du déplacement ou les vitesses ;

• la mise en place de voiries dédiées au trafic poids lourds, dans un souci de séparation des flux motivé essentiellement par la sécurité routière ;

• l'interdiction de dépassement, ou d'utilisation de voie(s) rapide(s), par les poids lourds ;

• la régulation des vitesses sur les axes chargés en poids lourds.

3.3.1 La réglementation de la circulation des poids lourds

Les difficultés de circulation liées aux poids lourds ont tout d'abord fait l'objet d'une mise en place progressive d'une réglementation sur leurs conditions de circulation.

Ainsi, en France, la règle générale stipule que la circulation des véhicules de marchandises est interdite des samedis et veilles de jours fériés au soir jusqu'aux dimanches et jours fériés au soir. Des interdictions de circulation complémentaires existent les jours de grands départs de vacances d'été ou d'hiver afin de faciliter le trajet

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Chapitre 1

40

des vacanciers. Le succès de ces mesures a conduit à les reproduire, par arrêtés locaux, localement17 ou lors d'événements prévisibles18.

Par ailleurs, les vitesses des poids lourds, dans un objectif de sécurité routière, font l'objet d'une réglementation spécifique.

Enfin, il devient fréquent que les exploitants prennent des mesures de restriction envers le trafic poids lourds lors d'événements climatiques (neige notamment) rendant plus difficiles leurs déplacements.

3.3.2 Voiries réservées au trafic poids lourds

La mise en place de voiries réservées au trafic poids lourds vise à améliorer la sécurité routière principalement, l'écoulement du trafic secondairement, par la séparation des flux des différents types de véhicules. Très étudiée aux Etats-Unis (voir par exemple [Fischer, Ahanotu et Waliszewski, 2003], elle l'est moins en Europe mais faisait partie des réflexions sur la résolution des difficultés d'écoulement d'axes français de fort trafic lourd, comme l'autoroute A7 ou le sillon mosellan A31/A32.

En séparant les deux types de trafic, les gains d'exploitation envisageables sont importants, tant en termes de fluidité du trafic, de sécurité routière que de confort de conduite pour les conducteurs de véhicules légers. Des gains considérables d'entretien de l'infrastructure, liés aux dégradations19 de la chaussée et des ouvrages d'art causées par le trafic poids lourds, sont également attendus pour l'infrastructure débarrassée de son trafic de marchandises [Transportation Research Board, 2002, #2].

Les contraintes économiques, d'espace exploitable et d'acceptation par les populations riveraines concernées rendent difficilement envisageables en Europe ce type de solution pour l'exploitation du trafic poids lourds, même si des solutions légères (voirie coaxiale pour les poids lourds à une seule voie avec créneaux réguliers de dépassement) ou mixtes (trafic véhicules légers autorisé selon le niveau de trafic sur l'infrastructure dédiée aux poids lourds) ont été étudiées.

3.3.3 Interdiction de dépassements pour les poids lourds

La lenteur des poids lourds sur des sections en forte rampe a conduit depuis de nombreuses années les exploitants à créer sur ces sections une voie supplémentaire réservée aux véhicules les plus lents. Les résultats d'exploitation sont convaincants et les conducteurs de véhicules légers sont très satisfaits de ce type de mesure, aujourd'hui très répandu. L'efficacité du dispositif réside essentiellement dans le fait que les véhicules rapides ne sont pas forcés de dépasser des véhicules nettement plus lents qu'eux se trouvant sur leur voie.

L'idée d'étendre ce principe aux sections courantes des infrastructures a fait son chemin et plusieurs expérimentations ont eu lieu pour tester l'efficacité, non de la création partout d'une voie réservée aux poids lourds, mais de l'interdiction qui leur serait faite de

17 Des mesures de ce type existent ainsi sur les autoroutes franciliennes : la circulation poids lourds est interdite dans le sens Paris-Province le vendredi soir et le samedi afin de fluidifier autant que faire se peut les départs en week-end, et le lundi matin dans le sens Province-Paris pour faciliter les retours. 18 Manifestations sportives par exemple. 19 Elles ont été évoquées au paragraphe 1.2.2.

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Poids lourds et gestion du trafic

41

quitter la voie la plus lente, de la même façon qu'ils sont cantonnés sur la voie véhicules lents en rampes.

Efficacité pour la fluidité du trafic

L'efficacité de l'interdiction de dépassement faite aux poids lourds a fait l'objet d'une controverse dans la littérature, comme le soulignent [Cate et Urbanik, 2004]. Les résultats de fluidification du trafic, mesurée en baisse de la concentration du trafic ou en diminution des temps de parcours pour les véhicules légers, n'étaient pas convaincants, sauf sur des sections en rampes assez fortes (au moins 4 % rapportent [Cate et Urbanik, 2004]). Sur des sections planes, [Jo, Gan et Bonyani, 2003] ont même rapporté, sur la base de simulations de trafic20, une augmentation de la concentration de trafic, associée à une baisse de capacité de l'infrastructure en cas de débits élevés et de taux de poids lourds importants.

Cependant, les résultats des études les plus récentes, tout en confirmant les gains sur les sections en rampes, tendent à montrer l'efficacité, même plus modeste, de cette mesure d'exploitation sur les sections planes.

Ainsi, une étude a été réalisée sur l'autoroute A4 en France sur une section plane, pour tester l'efficacité de l'interdiction de dépassement pour les poids lourds. Les résultats ont démontré l'augmentation des vitesses moyennes sur les deux voies [CETE de l'Est, 2001]. Une autre expérimentation est en cours sur l'autoroute A10.

L'étude en simulation de [Cate et Urbanik, 2004]21 a mis en évidence une variation non significative de la concentration de véhicules à la suite de la mise en place de l'interdiction de dépassement, mais globalement un temps de parcours plus faible pour les véhicules légers, alors que celui des poids lourds n'était que faiblement augmenté. Les résultats obtenus sur des sections en rampe sont quant à eux très bons, les gains étant nets autant sur la diminution de la concentration que sur celle des temps de parcours, surtout en cas de pente forte et/ou de fort pourcentage de poids lourds. Il est toutefois vraisemblable que ces résultats, notamment pour le temps de parcours poids lourds, dépendent beaucoup de la distribution de vitesses attribuée à ces derniers.

Enfin, l'étude menée par [Peeta, Zhou et Zhang, 2004] a quant à elle souligné le gain en termes de confort ressenti par les usagers en véhicules légers lorsque les poids lourds étaient cantonnés sur la voie de droite.

Ainsi, les gains en fluidification du trafic de l'interdiction de dépassement par les poids lourds semblent aujourd'hui ne plus faire controverse, même si des études plus poussées sont nécessaires afin de mieux quantifier l'effet de cette mesure et pour tenir compte du non-respect éventuel de l'interdiction par les conducteurs de poids lourds.

Gains de sécurité routière

La mise en œuvre de l'interdiction de changement de voie par les poids lourds entraîne une interrogation quant à l'impact de cette mesure sur la sécurité routière, car elle conduit à deux modifications de l'écoulement d'effet opposé quant au risque de collisions :

20 A l'aide du logiciel de simulation microscopique CORSIM. 21 A l'aide du logiciel de simulation microscopique VISSIM.

Page 44: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 1

42

• la différence de vitesses entre véhicules légers et poids lourds augmente, surtout quand l'interdiction de dépassement est imposée aux poids lourds en rampe. On peut donc s'attendre à une augmentation des collisions avant/arrière sur la voie de droite entre un véhicule léger et un poids lourd ;

• le nombre de changements de voies diminue fortement, évidemment pour les poids lourds (au moins en théorie), mais également pour les véhicules légers, d'autant plus si la section est en rampe. Le risque de collision doit donc logiquement décroître puisqu'on limite l'interaction entre véhicules.

[Cate et Urbanik, 2004] concluent leur étude en notant que le premier effet, notamment à cause de la séparation de fait des écoulements des différents types de véhicules selon les voies, est bien plus faible que le second, et que par conséquent les gains de sécurité routière sont très appréciables. Dans une autre étude, basée sur une expérimentation terrain sur un site sans congestion très forte, [Mugarula et Mussa, 2003] soulignent que même sur une infrastructure peu sujette à congestion où les gains apportés par l'interdiction de dépassement des poids lourds en termes de temps de parcours seront faibles, cette mesure mérite cependant d'être utilisée pour les gains de sécurité routière, grâce à la diminution drastique du nombre de changements de voie qu'elle permet.

Il faut enfin souligner ici que les gains en sécurité routière, notamment quand il s'agit d'accidentologie poids lourds, participent à des gains de fluidité du trafic en éliminant de fait les congestions générées par les accidents.

3.3.4 La régulation de vitesses

Ce type de mesure n'a été que très rarement expérimenté. Il consiste à imposer une vitesse limite plus faible que la limite réglementaire, et ainsi à homogénéiser les vitesses pratiquées, notamment entre poids lourds et véhicules légers, ces derniers étant ralentis. Des gains de sécurité routière, grâce au plus faible nombre de dépassements, avaient été enregistrés lors des quelques expérimentations réalisées. Cette forme de régulation est aujourd'hui plus fréquemment utilisée en été, afin de diminuer la pollution de l'air.

Cependant, [Elbers et van Berkum, 2003] ont montré sur la base de simulations de trafic22 que l'utilisation de la régulation de vitesses, outre les gains de sécurité routière qu'elle génère, pouvaient améliorer l'écoulement du trafic en diminuant la probabilité de voir apparaître une zone de trafic congestionnée.

De plus, [Daganzo, Laval et Muñoz, 2004] promeuvent l'utilisation de ce type de mesure pour rendre plus efficace la gestion du trafic en cas de fonctionnement à capacité de l'infrastructure, en imposant comme vitesse limite la vitesse des poids lourds. Ainsi les voies rapides perdent du débit puisque la vitesse des véhicules rapides est réduite. Mais simultanément, la concentration de la voie lente, pour laquelle la vitesse ne change pas, augmente par la présence de véhicules légers assez lents qui évitaient auparavant cette voie car ils souhaitaient pouvoir facilement dépasser les poids lourds. Le débit résultant des deux voies pourrait ainsi être augmenté.

En dépit de sa faible utilisation actuelle, la régulation de vitesses apparaît donc, tout comme l'interdiction de dépassement des poids lourds, comme une mesure susceptible d'améliorer à la fois la sécurité et l'écoulement du trafic. L'évaluation du dispositif de

22 A l'aide du logiciel de simulation microscopique FOSIM.

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Poids lourds et gestion du trafic

43

régulation des vitesses expérimental en temps réel mis en place sur l'autoroute A7 lors de l'été 2004 devrait donner des indications sur l'efficacité du dispositif.

4 Conclusion

L'hétérogénéité de la composition du trafic routier modifie considérablement son écoulement. La présence de poids lourds diminue la fluidité de cet écoulement, aussi bien du fait de la vitesse moindre et de la longueur plus importante de ce type de véhicules que des dépassements et changements de voies que la différence de vitesses avec les autres véhicules engendrent.

La prise en compte de la composition du trafic pour l'exploitation de la route s'est longtemps cantonnée à l'introduction d'un coefficient d'équivalence entre poids lourds et véhicules légers permettant de se ramener à un débit équivalent d'un trafic homogène, constitué uniquement de véhicules légers. Cela est suffisant pour des objectifs de planification, mais l'approche doit être améliorée dans un but d'optimisation de l'exploitation. Il apparaît en effet clairement aujourd'hui qu'un coefficient d'équivalence, qui plus est fixe, ne saurait à lui seul intégrer toutes les modifications de l'écoulement induites par l'hétérogénéité des véhicules composant le trafic.

Par ailleurs, l'attention portée par les gestionnaires des réseaux aux conséquences de la présence de poids lourds, souvent ciblée sur une évaluation relativement statique des temps de parcours, se porte désormais sur une gestion plus dynamique des flux de trafic, notamment avec la mise en place de mesures d'exploitation spécifiques au trafic poids lourds.

Dans ce cadre, le développement de modèles dynamiques d'écoulement du trafic routier, tenant compte de sa composition en poids lourds et en véhicules légers, apparaît pertinent pour mieux comprendre et décrire les interactions sur l'écoulement générées par les poids lourds d'une part, mieux prévoir les conditions de trafic et l'apparition de la congestion d'autre part. Les outils de simulation issus de ces modèles doivent de plus permettre l'évaluation de mesures d'exploitation dynamiques envers les poids lourds, avant leur implantation sur le terrain.

L'objet de cette thèse est ainsi de proposer un modèle dynamique d'écoulement représentant explicitement les effets de la composition hétérogène du trafic routier.

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45

Chapitre 2 Etat de l'art des modèles d'écoulement d'un trafic hétérogène

1 Modélisation microscopique et poids lourds 46 1.1 Lois de poursuite 47 1.2 Modèles de changement de files 47 1.3 Résolution des modèles microscopiques 48 1.4 Prise en compte des poids lourds dans la modélisation microscopique 48 1.5 Conclusion 51

2 Modélisation macroscopique et poids lourds 51 2.1 Principes de l'approche macroscopique 51 2.2 Modèles macroscopiques du premier ordre 52 2.3 Modèles macroscopiques d'ordre supérieur 55 2.4 Prise en compte des poids lourds dans la modélisation macroscopique 58 2.5 Conclusion 65

3 Modèles cinétiques et poids lourds 66 3.1 Principes 66 3.2 Résolution 67 3.3 Prise en compte des poids lourds dans les modèles cinétiques 67 3.4 Conclusion 68

4 Approche de modélisation suivie 68 4.1 Quel type de modèle ? 68 4.2 Objectifs de la modélisation du trafic hétérogène 69

Si les premières études liées à la modélisation de la circulation routière datent des années 1930 [Greenshields, 1934], la science du trafic a dans les faits été fondée lorsque les premiers modèles d'écoulement sont apparus aux Etats-Unis aux début des années 1950. C'est en effet à partir de cette date que plusieurs théories ont été bâties pour modéliser la circulation automobile.

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Chapitre 2

46

Aujourd'hui, on regroupe traditionnellement les modèles d'écoulement existants en deux grandes catégories, selon l'échelle des comportements qu'ils décrivent [Buisson, 1996] :

• les modèles microscopiques, qui modélisent le comportement de chaque véhicule dans son environnement, d'une part ;

• les modèles macroscopiques, qui représentent et étudient le trafic routier comme un flux continu, sur la base d'une analogie avec l'hydrodynamique, d'autre part.

Les modèles cinétiques, quant à eux, constituent une forme un peu particulière de modèles macroscopiques, étant construits par analogie avec la cinétique des gaz.

Ces différents modèles ont été construits initialement pour représenter un trafic dans l'ensemble homogène quant à ses caractéristiques et/ou son comportement. La prise en compte par les modèles d'écoulement de l'hétérogénéité des véhicules composant le trafic est ainsi plutôt récente. Ce chapitre a donc pour but de recenser les efforts de modélisation d'un trafic hétérogène menés pour chaque type de modèle.

Les modèles microscopiques, macroscopiques et cinétiques sont donc étudiés successivement dans ce chapitre (parties 1, 2 et 3). Pour chaque type de modélisation, un rapide rappel de ses fondements théoriques est effectué ; puis une revue de l'état de l'art de la prise en compte de l'hétérogénéité du trafic pour l'approche considérée est menée. Une attention particulière est portée aux modèles macroscopiques qui constituent l'approche retenue. Le dernier paragraphe (partie 4) justifie ce choix et présente la démarche proposée pour la réalisation des objectifs fixés.

1 Modélisation microscopique et poids lourds

La modélisation microscopique de la circulation routière a fait partie des toutes premières contributions à la science du trafic, grâce aux premières avancées obtenues par les modèles de Reuschel (1950) et Pipes (1953) [Gazis, 2002]. Ce type de modélisation représente le mouvement de chaque véhicule, en cherchant à reproduire le plus finement possible la réaction du conducteur à son environnement. Le comportement de chaque couple véhicule/conducteur peut ainsi être paramétré selon la vitesse désirée du conducteur, les capacités d'accélération et de décélération du véhicule, l'agressivité de la conduite, etc.

La gestion de l'écoulement du trafic dans les modèles microscopiques est principalement réalisée par une loi de poursuite, décrivant l'avancée du véhicule en fonction des véhicules l'environnant sur sa voie, et par une autre modélisation destinée à représenter les changements de voie ou dépassements23.

Ils ont donné lieu au développement d'outils de simulation et de réalisations informatiques nombreuses. Cependant, hormis les lois de poursuite, les modèles décrivant les autres fonctions de conduite (y compris les dépassements et les changements de voie)

23 D'autres modèles spécifiques existent dans la modélisation microscopique de l'écoulement pour préciser comment sont gérés la génération des véhicules, le fonctionnement des diverses intersections ou encore la réponse des conducteurs aux systèmes de régulation du trafic (tels qu'un feu tricolore ou une régulation de vitesses).

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Etat de l'art des modèles d'écoulement hétérogène

47

font l'objet de publications plus restreintes ; il est difficile d'accéder aux lois implémentées, protection industrielle oblige.

1.1 Lois de poursuite

Les lois de poursuite contenues dans les modèles microscopiques sont fondées sur le principe suivant : les conducteurs réagissent, dans leurs actions de conduite, aux stimuli générés par le ou les véhicules environnant(s). Cette réaction se fait avec un certain décalage temporel τ , correspondant au temps de réaction des conducteurs, et selon une certaine sensibilité à la stimulation :

( ) ( )Réaction t Sensibilité Stimulus tτ+ = × (2.1)

Les premiers modèles conçus par les ingénieurs de General Motors faisaient l'hypothèse que l'accélération de chaque conducteur était une fonction linéaire de la différence de vitesse avec la voiture précédente, d'où les appellations car-following ou voiture suiveuse et modèle linéaire associées à ce modèle [Gazis, 2002] :

( ) ( ) ( )( )1 1i i ix t x t x tτ α+ ++ = − (2.2)

le coefficient α est la sensibilité du conducteur au différentiel de vitesse. Ainsi, si le véhicule suiveur est plus lent que son prédécesseur, il accélère pour adapter sa vitesse à celle de ce dernier ; et respectivement, un différentiel négatif de vitesses amène le véhicule suiveur à ralentir.

Ce premier modèle n'était pas satisfaisant, notamment parce qu'il ne prenait en compte ni l'espacement entre véhicules, ni leur vitesse. Les travaux de [Gazis, Herman et Rothery, 1961] ont permis de combler ces lacunes en proposant l'expression générale suivante pour les modèles de voiture suiveuse :

( ) ( ) ( )( )( )

( ) ( )( )1

11

im

i i i li i

x tx t x t x t

x t x t

ττ α τ +

++

++ = − +

− (2.3)

les paramètres l et m permettant de préciser les formes de dépendance envers l'espacement et la vitesse des véhicules24.

D'autres modèles ont été proposés par la suite pour préciser certaines interactions, mais les fondements de ce type de modélisation, décrits par les formules générales données ci-dessus, restent les mêmes.

1.2 Modèles de changement de files

Le positionnement des véhicules sur les voies et les changements de files, notamment pour le dépassement, influent beaucoup sur l'écoulement du trafic. Il s'agit de phénomènes complexes, lors desquels les conducteurs tiennent compte des véhicules sur leur voie et sur les voies adjacentes. Leur modélisation dans les modèles microscopiques fait l'objet de lois spécifiques, tenant compte à la fois de variables continues et de seuil de

24 La littérature a proposé les valeurs de 0 ou 1 pour m, 0, 1 ou 2 pour l.

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Chapitre 2

48

décision (acceptation ou non de créneaux par exemple), notamment quand la route est bi-directionnelle [Fluteaux, 2001].

Sur le réseau autoroutier, des études spécifiques ont été menées afin de déterminer les variables caractéristiques influençant les décisions de changement de voie. [Chang et Kao, 1991] ont ainsi, sur la base de variables macroscopiques, mis en évidence l'importance pour les conducteurs de la distribution des temps intervéhiculaires et des différentiels de vitesse et de concentration entre les voies. Les modèles principaux de changement de voie cherchent ainsi à tenir compte, dans la décision des conducteurs, de ces différentes variables ; ils incluent éventuellement en outre la perte de vitesse derrière le véhicule suivi, l'espacement avec les véhicules environnants (le prédécesseur actuel, mais également les futurs véhicules suiveur et suivi sur la voie de destination de la manœuvre). D'autres paramètres de comportement peuvent être ajoutés et pris en compte dans la définition des valeurs seuils déterminant la réalisation ou non du changement de voie, comme c'est le cas par exemple dans les travaux de [El Hadouaj, Drogoul et Espié, 2000].

La complexité de la décision par les conducteurs, le nombre potentiellement très élevé de paramètres pouvant influencer cette décision et la difficulté de recueillir des données pertinentes pour calibrer et valider de tels modèles rendent cependant la modélisation des changements de voie particulièrement difficile. Les efforts de recherche restent ainsi continus dans ce domaine ; des algorithmes complets de décision de changement de voies ont encore été par exemple développés récemment par [Sultan et McDonald, 2001] ou [Hidas, 2002].

1.3 Résolution des modèles microscopiques

La résolution analytique des modèles microscopiques est très difficile, à cause de la complexité des équations et du temps de décalage induit par le temps de réaction des conducteurs. Les modèles de ce type font donc essentiellement l'objet d'une résolution numérique par discrétisation temporelle. A chaque pas de temps, l'accélération, la vitesse et la position de chaque véhicule sont calculées, après intégration des stratégies de direction (changements de files pour atteindre une direction donnée, dépassements, …).

1.4 Prise en compte des poids lourds dans la modélisation microscopique

1.4.1 Dans les paramètres liés aux véhicules et aux conducteurs

La description individuelle des véhicules dans le cadre de la modélisation microscopique du trafic permet de prendre aisément en compte les différences physiques et cinématiques des véhicules. Les modèles microscopiques développés intègrent ainsi souvent différents types de véhicules, différenciés par leurs gabarits, leurs vitesses libres, leurs capacités d'accélération ou de freinage, et différents types de conducteurs, parmi lesquels on peut distinguer les habitués du réseau, les agressifs, etc. Dans le cas particulier des poids lourds, de nombreux travaux ont été menés pour tenir compte précisément de leurs capacités cinématiques (caractérisées par exemple par leur vitesse libre ou leur puissance rapportée à leur poids) et de l'influence sur leurs vitesses de

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Etat de l'art des modèles d'écoulement hétérogène

49

contraintes liées à l'infrastructure (voir par exemple les travaux de [Rakha et al., 2001] sur les capacités d'accélération des poids lourds en montée).

La différenciation cinématique des poids lourds a une influence sur leur loi de poursuite et le modèle de changement de voie qui leur est appliqué, puisque ce sont des variables telles que la vitesse ou les capacités d'accélération qui sont prépondérantes dans ces lois. Toutefois, il reste à examiner si les lois de comportement des autres véhicules sont également modifiées quand parmi les véhicules environnants se trouvent un ou plusieurs poids lourds.

1.4.2 Dans les lois de poursuite

Les limitations cinématiques imposées aux poids lourds (sur leurs vitesses et leurs capacité d'accélération notamment) modifient leurs progressions de fait par l'expression de la loi de poursuite. Par contre, le chapitre 1 paragraphe 2.2.3 a mis en évidence les effets locaux des poids lourds et l'inconfort de conduite des autres usagers à leur voisinage ; les conséquences de cette présence étant notamment des temps intervéhiculaires plus grands [Peeta, Zhou et Zhang, 2004].

Ainsi, [Peeta, Zhou et Zhang, 2004] proposent-ils de modifier la loi de poursuite incluse dans le logiciel microscopique étudié25 en rajoutant un espacement supplémentaire quand le véhicule suivi est un poids lourd. Dans le cas de cette étude, cet espacement supplémentaire vaut :

supH DLβ= × (2.4)

où β est la sensibilité de l'espacement laissé par le conducteur suiveur à la gêne DL ressentie par ce dernier et définie par ailleurs (sur une échelle de 0 à 4 dans l'étude de [Peeta, Zhou et Zhang, 2004]). Ceci peut conduire, pour les conducteurs particulièrement gênés, à ajouter un espacement supplémentaire de l'ordre de dix mètres. Notons ici que la sensibilité proposée est constante et ne tient compte ni de la concentration, ni de la vitesse du trafic, ni du différentiel de vitesse avec le véhicule précédent.

Par conséquent, si les lois de poursuite des véhicules lourds sont modifiées dans les modèles microscopiques, des recherches restent à mener pour prendre en compte plus précisément la modification des lois de poursuite des autres véhicules quand ils se trouvent au voisinage de poids lourds.

1.4.3 Dans les modèles de changement de file

[Gipps, 1986] a souligné l'effet de la présence de véhicules lourds sur les changements de voie. Les conducteurs de véhicules légers essayent en effet d'éviter d'être bloqués derrière un poids lourd lent, et cherchent ainsi à anticiper leur dépassement en changeant de file plus tôt. L'auteur fait également remarquer que la faible capacité d'accélération des poids lourds crée des espacements plus importants qu'en moyenne devant ceux-ci, ce qui autorise des rabattements vers la voie de droite qui auraient été difficiles.

[Peeta, Zhou et Zhang, 2004] soulignent également l'importance de l'influence de la présence de poids lourds sur les mécanismes de changement de files des véhicules

25 Il s'agit du logiciel FRESIM.

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Chapitre 2

50

suiveurs, et estiment à 20 % la part de véhicules légers prêts à dépasser un poids lourd roulant pourtant à leur vitesse désirée.

Enfin, sur la base de données terrain, [Shahab Uddin et Ardekani, 2002] ont mis en évidence qu'en cas de trafic suffisamment fort, la présence de poids lourds contribuaient d'une part, à des dépassements par les véhicules légers pour des différentiels de vitesse significativement plus faibles, et d'autre part, à l'acceptation par ces mêmes véhicules de créneaux significativement plus petits.

Les mécanismes de changement de voie sont par conséquent quelque peu modifiés dans les modèles microscopiques, sans que ce phénomène ne soit particulièrement pris en compte par ailleurs.

Ainsi, [Gipps, 1986], repris par [Hidas, 2002], recommande d'anticiper les changements de file des véhicules légers en présence de poids lourds. Pour ce faire, les véhicules légers sont supposés se comporter, s'ils sont assez près d'un poids lourd sans que celui-ci soit le véhicule qui les précède, comme suivant directement ce poids lourd, et donc subissant par avance un différentiel de vitesse a priori plus important que le différentiel réel ; la tendance au changement de voie des véhicules légers est donc accentuée et anticipée en présence de poids lourds.

Par ailleurs, l'étude sur l'inconfort de conduite de [Peeta, Zhou et Zhang, 2004] amène ceux-ci à proposer le mécanisme suivant de souhait de changement de voie quand un véhicule léger suit un poids lourd :

0

20

40

60

80

100

Pro

babi

lité

de s

ouha

it de

dép

asse

men

t (%

)

Vitesse du poids lourdV

désV

lim

Plim

Figure 2-1 : Probabilité de souhait de dépassement d'un véhicule léger

suivant la vitesse du poids lourd le précédant [Peeta, Zhou et Zhang, 2004]

avec Vdés la vitesse désirée par le véhicule léger dans les conditions données de circulation, Vlim la vitesse minimale du poids lourd en dessous de laquelle le véhicule léger souhaite toujours dépasser, et Plim la probabilité de souhait de dépassement quand le poids lourd roule pourtant à la vitesse désirée du véhicule léger. Cette probabilité est non nulle si l'inconfort ressenti par l'usager est non nul, et est d'autant plus importante (jusqu'à 20 %) que cet inconfort est grand26.

26 Une probabilité forte ne signifie bien sûr pas que le dépassement est possible, elle ne décrit que la volonté plus ou moins affirmée du conducteur du véhicule léger de dépasser le poids lourd.

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51

Ces quelques exemples montrent les difficultés à quantifier précisément la gêne au dépassement subie par les véhicules légers en présence de poids lourds, mais également que des efforts de recherche sont menés dans ce sens.

1.5 Conclusion

La modélisation microscopique permet de différencier aisément les véhicules en leur attribuant des caractéristiques physiques, cinématiques ou comportementales spécifiques. Il s'avère donc simple de prendre en compte dans ce type de modélisation la diversité des véhicules composant le trafic.

Toutefois, les lois de poursuite d'une part, de changement de files d'autre part, demandent à être adaptées aux types de véhicules qu'elles prennent en compte, car les comportements des usagers diffèrent quand les véhicules environnants sont des poids lourds. L'amélioration des lois microscopiques est donc encore insuffisante pour bien prendre en considération la mixité du trafic.

2 Modélisation macroscopique et poids lourds

Les modèles macroscopiques considèrent le trafic comme un flux continu et homogène de véhicules. Bâtis par analogie avec la dynamique des fluides, ils ont été mis en place par les articles fondateurs de [Lighthill et Whitham, 1955] et [Richards, 1956].

2.1 Principes de l'approche macroscopique

Le trafic est décrit par une concentration K (en véhicules par unité de longueur) de véhicules se déplaçant à une vitesse V et générant un débit Q (en véhicules par unité de temps). Toutes ses variables sont définies de façon continue27 en fonction du temps t et de l'espace supposé monodirectionnel x.

Le débit est défini classiquement comme le produit de la concentration et de la vitesse du flux de trafic :

( ) ( ) ( ), , ,Q x t K x t V x t= × (2.5)

La vitesse est ici la vitesse moyenne spatiale des véhicules composant le flux.

La loi fondamentale de l'écoulement est la conservation des véhicules, qui correspond donc à l'équation de conservation suivante :

( ) ( ), , 0K x t Q x tt x

∂ ∂+ =∂ ∂

(2.6)

si l'on ne considère pas de termes source ou puits, qui seraient dans le cas du trafic liés à l'existence d'entrées ou de sorties du réseau considéré.

27 Il est clair que dans le cas du trafic routier l'hypothèse de continuité est assez grossière, les vides au sein de la circulation étant très présents comparés au nombre de particules-véhicules.

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Chapitre 2

52

Ce type de modèle nécessite l'existence d'une troisième relation entre variables, permettant de connaître, à concentration ou profil de concentration donné(e), l'une des deux autres variables caractérisant le trafic, par exemple la vitesse.

Si l'on postule une relation définissant la vitesse à partir de la concentration (équation d'état), on parle de modèle du premier ordre ; ce modèle est classiquement appelé modèle LWR du nom des auteurs des articles fondateurs. Si cette relation est remplacée par une équation dynamique sur la vitesse, on parle de modèle du second ordre, ou, de façon moins impropre, de modèle d'ordre supérieur.

2.2 Modèles macroscopiques du premier ordre

2.2.1 Principes

Dans le cas des modèles du premier ordre, une relation est supposée entre deux des trois variables fondamentales. L'existence d'une telle relation suppose que le trafic se trouve toujours dans un état d'équilibre, et n'évolue qu'en passant d'un état d'équilibre à l'autre.

Cette équation d'état est de nature phénoménologique :

( ) ( ) ( ) ou Q ou éq éq éqV V K Q K V V Q= = = (2.7)

La plus employée est la relation donnant le débit en fonction de la concentration, courbe traditionnellement nommée diagramme fondamental dans le domaine de la modélisation du trafic routier. [Greenshields, 1934] fut le premier à proposer une forme, parabolique, de ce diagramme, sur la base de données terrain.

Déb

it

Concentration

Capacité

Kc

Kmax

FLUIDE CONGESTION

Figure 2-2 : Exemple de diagramme fondamental Q=Qéq(K) : diagramme de Greenshields

De nombreux autres auteurs ont proposé depuis lors d'autres formes pour ce diagramme, mais tous s'accordent sur la phénoménologie générale donnée par [Greenshields, 1934]. Quand il n'y a pas de véhicules (concentration nulle), le débit est nul. Il augmente ensuite avec la concentration en véhicules, mais de moins en moins vite, car les véhicules se gênent les uns les autres, jusqu'à atteindre le débit maximal ou capacité de l'infrastructure. A partir de cette concentration Kc, qualifiée de critique, le débit diminue si la concentration en véhicules continue d'augmenter. Il finit par s'annuler pour la

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53

concentration maximale Kmax, ce qui correspond à la situation d'un trafic entièrement congestionné pour lequel la vitesse est nulle.

Ce diagramme permet de mettre en évidence deux grandes catégories d'état de trafic : les états de trafic fluides, pour lesquels la concentration est inférieure à la concentration critique et une augmentation de concentration augmenterait le débit réalisé ; les états de trafic congestionnés, pour lesquels la concentration est supérieure à la concentration critique et une augmentation de concentration diminuerait le débit réalisé.

2.2.2 Résolution analytique

Une fois définie une relation d'équilibre entre deux des trois variables fondamentales, l'équation de conservation des véhicules (2.6) devient28 :

0éqK dQ K

t dK x∂ ∂+ =∂ ∂

(2.8)

Ceci est l’équation d’une onde cinématique, pour laquelle dQéq(K)/dK est la célérité des courbes caractéristiques le long desquelles la concentration en véhicules K est constante. Étant donné la forme concave classique du diagramme fondamental, la célérité d’une concentration donnée est donc d’autant plus importante que cette concentration est faible. Elle est de plus positive pour les états fluides de trafic (le propagation se fait donc vers l'aval), négative pour les états congestionnés (la propagation se fait donc vers l'amont).

Dans le cas où la célérité est constante (c’est-à-dire dans le cas où la concentration est constante), on retrouve une équation de translation pure et simple et sans déformation du profil initial de concentration : toutes les caractéristiques sont parallèles.

Dans le cas, beaucoup plus courant, où la concentration varie initialement selon l'espace x, il y a déformation du profil de concentration ; les caractéristiques des différentes concentrations du trafic ne se propageant pas à la même vitesse, certaines vont s'entrecroiser et d'autres au contraire s'écarter.

Nous sommes alors ramenés à résoudre un problème de type Riemann, défini par :

( ) 0

, 0 0

K si xK x

K si x−

+

<= ≥ (2.9)

La résolution de ce type de problème est bien connue. Elle conduit à deux formes d'évolution de la discontinuité initiale [LeVeque, 1992] :

• dans le cas d'un profil croissant de concentrations, les caractéristiques des états initiaux se croisent : il se forme une onde de choc, séparant les deux états de trafic initiaux, de vitesse :

[ ][ ]QsK

= (2.10)29

en accord avec la condition dite de Rankine-Hugoniot ;

28 Par la suite, les dépendances en x et en t des variables seront implicites. 29 [a] représente la différence en a de part et d'autre de la discontinuité : [a] = a+ - a-.

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Chapitre 2

54

Concentration

Déb

it

K− K+

Onde de choc

K−

K+

x=0Onde de choc

Temps t

Esp

ace

x

Figure 2-3 : Formation d'une onde de choc30

• dans le cas d'un profil décroissant de concentrations, les caractéristiques des états initiaux divergent ; plusieurs solutions sont alors possibles. La solution physique est sélectionnée par l'ajout d'un critère dit d'entropie, et consiste, dans le cas du trafic routier, en la formation d'un éventail continu des caractéristiques comprises entre celles des deux états initiaux. Ceci correspond à une maximisation du débit de véhicules [Ansorge, 1990].

Concentration

Déb

it

K−K+

Eventail

K−

K+

Eventail

Temps t

Esp

ace

x

Figure 2-4 : Formation d'un éventail de caractéristiques

2.2.3 Résolution numérique

La résolution numérique la plus classique pour les modèles macroscopiques consiste en une discrétisation spatio-temporelle (pas de temps ∆t, pas d'espace ∆x) de l'écoulement. Elle permet d'obtenir une résolution rapide du modèle d'écoulement, notamment lorsque le calcul analytique est difficile, ce qui est le cas quand il met en œuvre des éventails.

Le schéma numérique le plus utilisé est celui de Godunov ; il est reconnu comme étant le schéma à trois points le plus efficace pour l'écoulement du trafic routier [Zhang et Wu, 1997], notamment parce que c'est un schéma numérique upwind, c'est-à-dire qui tient compte du sens de propagation de l'information ; il est donc bien adapté à la propagation potentiellement à la fois vers l'aval et vers l'amont des caractéristiques du trafic. Ce schéma est basé sur la résolution analytique effective de mini-problèmes de Riemann

30 Dans tout le document nous adoptons la représentation traficienne du diagramme espace-temps (t,x) plutôt que la représentation mathématicienne (x,t).

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Etat de l'art des modèles d'écoulement hétérogène

55

renouvelés à chaque pas de temps sur les frontières des tronçons constitués par le découpage spatial. Il assure la convergence de la solution numérique vers la solution analytique à condition que la discrétisation spatio-temporelle réalisée vérifie la condition dite de Courant-Friedrichs-Lewy :

maxx Vt

∆ ≤∆

(2.11)

où Vmax est la vitesse maximale de propagation de l'information.

Par ailleurs, dans le cas particulier des modèles macroscopiques du premier ordre, [Daganzo, 1995] et [Lebacque, 1996] ont montré indépendamment que le calcul des débits aux frontières des tronçons par l'application du schéma de Godunov pouvait être formulé très simplement à l'aide de fonctions dites de demande et d'offre, qui présentent l'avantage d'avoir un certain sens physique. Elles sont déclinées du diagramme fondamental selon :

Kc

Capacité

Kmax

Concentration

Dem

ande

Kc

Capacité

Kmax

Concentration

Offr

e

Figure 2-5 : Fonctions de demande et d'offre pour l'application du schéma de Godunov

Les débits entre cellules issues de la discrétisation spatio-temporelle de l'axe modélisé s'expriment ainsi comme le minimum de la demande de la cellule amont et de l'offre de la cellule aval.

Plus récemment, une méthode assez différente d'approche numérique des modèles de type LWR a été proposée par [Henn, 2003]. Elle est basée sur une résolution non entropique du modèle LWR ; en remplaçant, dans le cas d'un profil décroissant de concentration, les éventails de caractéristiques par une série de chocs non-entropiques, la solution analytique est plus facile à calculer car toutes les discontinuités se propagent alors selon des droites.

2.3 Modèles macroscopiques d'ordre supérieur

2.3.1 Principes

La simplicité et la robustesse du modèle LWR constituent un avantage important pour la modélisation et la simulation du trafic routier. Ce modèle se résout de plus aisément, analytiquement par l'utilisation des caractéristiques ou numériquement par des schémas aux différences finies. Cependant il présente l'inconvénient de supposer le trafic en permanence en état d'équilibre, la vitesse étant toujours fixée, à concentration de trafic

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Chapitre 2

56

donnée, par le diagramme fondamental ; aucune relaxation ni anticipation des conducteurs n'est ainsi intégrée.

Pour compenser cette lacune, les modèles macroscopiques qualifiés initialement et improprement du second ordre complètent le diagramme fondamental par une équation dynamique sur l'évolution de la vitesse. De cette façon ces nouveaux modèles macroscopiques intégrent en partie les comportements individuels des conducteurs en exprimant explicitement leur accélération, à la manière des lois de poursuite des modèles microscopiques. [Payne, 1971] fut le premier à proposer une telle équation sur l'accélération ; elle s'exprimait ainsi :

( )( )RelaxationAccélération Anticipation

1 1éqV V KV V K Vt x K x

υτ τ

∂ ∂ ∂+ = − −∂ ∂ ∂

(2.12)

où l'accélération des véhicules tient compte d'un terme de relaxation vers la vitesse d'équilibre prévue par le diagramme fondamental, suivant un temps de réaction τ ; et d'un terme d'anticipation des conducteurs, avec un coefficient υ pris égal dans le modèle de Payne à :

( )1

2

éqdV KdK

υ = − (2.13)

Ce modèle a reçu de nombreuses applications dans le domaine de la modélisation du trafic sur autoroutes, notamment pour la mise en place de stratégies de contrôle d'accès [Papageorgiou, Blosseville et Hadj-Salem, 1990]. D'autres modèles d'ordre supérieur ont été construits à la manière de ce modèle pionnier, notamment [Ross, 1988], [Del Castillo, Pintado et Benitez, 1993] ou [Zhang, 1998] ; l'équation d'évolution de la vitesse qu'ils intègrent peut se mettre sous la forme générale suivante :

( )( ) 02

RelaxationAccélération Anticipation

1 1éqV V KV V K V ct x K xτ

∂ ∂ ∂+ = − −∂ ∂ ∂

(2.14)

Dans le formalisme des systèmes hyperboliques d'équations, le modèle général devient ainsi, avec l'équation de conservation des véhicules :

( )

( )20

0éq

V KK KV K Vct xV VV

K τ

∂ ∂ + = − ∂ ∂ U

F U

(2.15)

Ce type de modèle d'ordre supérieur présentait cependant un défaut majeur, mis en évidence par [Daganzo, 1995, #2] dans un article visant à discréditer définitivement ce type de modèle. Les propriétés de ces modèles, et notamment la vitesse de propagation de l'information, sont en effet gouvernées par les valeurs propres de la matrice de flux F(U). Or, les deux valeurs propres s'expriment dans ces modèles comme :

1 0

2 0

V c

V c

λ

λ

= − = + (2.16)

La deuxième valeur propre est ainsi toujours plus grande que la vitesse du flux ; ceci conduit à une propagation anormalement rapide de l'information et surtout viole le principe d'anisotropie du trafic : les véhicules ne réagissent, en première approximation,

Page 59: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Etat de l'art des modèles d'écoulement hétérogène

57

qu'aux stimuli reçus des véhicules se trouvant devant eux et en aucun cas à ceux des véhicules derrière eux. Cette anomalie pouvait conduire dans certaines versions du modèle à des comportements pour le moins fâcheux de véhicules, comme la dissipation de files d'attente à l'arrêt à un feu par l'arrière du peloton, entraînant débits et vitesses négatifs évidemment peu réalistes.

Les virulentes critiques formulées au vu de ces comportements du modèle ont conduit à une nouvelle famille de modèles d'ordre supérieur, pour lesquels le terme d'anticipation n'est plus basé sur un gradient de concentration mais sur un gradient de vitesse.

L'équation d'évolution de la vitesse devient alors :

( )( ) 01 éqV V VV V K V c

t x xτ∂ ∂ ∂+ = − −∂ ∂ ∂

(2.17)

Cette nouvelle famille a été fondée simultanément mais indépendamment par les travaux de [Aw et Rascle, 2000], [Jiang, Wu et Zhu, 2002] et [Zhang, 2002]. Ces modèles assurent la propriété d'anisotropie du trafic puisqu'aucune des valeurs propres gouvernant le système n'est plus supérieure à la vitesse du trafic :

1 0

2

V c

V

λ

λ

= − = (2.18)

Cette nouvelle famille de modèles d'ordre supérieur semble permettre de satisfaire les critiques formulées précédemment.

2.3.2 Résolution analytique

Les systèmes hyperboliques d'équations qui sont à la base des modèles d'ordre supérieur sont gouvernés par les valeurs propres de la matrice de flux F(U). Les variables fondamentales, désormais au nombre de deux (la concentration et la vitesse), amènent à la résolution de problèmes de type Riemann s'écrivant selon :

( )( )( )

( )

, 0, , 0

, 0

K V si xK V x

K V si x− −

+ +

<= ≥ (2.19)

Il n'est alors pas toujours possible de passer de l'état amont à l'état aval à travers une seule transition. De façon générale, il se crée un état intermédiaire relié à l'état amont par une première transition, et à l'état aval par une seconde. Ces transitions peuvent être des discontinuités (chocs ou contacts) ou des variations continues (éventails, nommés plutôt dans ce cas ondes de raréfaction). Le résultat dans le plan (x,t) sera donc par exemple la succession d'un éventail et d'une onde de choc (voir la Figure 2-6).

Page 60: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 2

58

(K−,V

−)

(K+,V

+)

Etat intermédiaire (Kint

,Vint

)

x=0

Eventail

Onde de choc

Temps tE

spac

e x

Figure 2-6 : Exemple de solution d'un problème de Riemann pour un modèle d'ordre

supérieur

Plus de détails sur la résolution analytique de ce type de modèle peuvent être trouvés dans [Zhang, 2000].

2.3.3 Résolution numérique

Tout comme les modèles du premier ordre, la résolution numérique des modèles d'ordre supérieur est possible par discrétisation spatio-temporelle.

Plusieurs schémas numériques ont été utilisés dans ce but. Sans entrer dans les détails et sans vouloir être exhaustif, on peut citer l'utilisation du schéma de Roe par [Leo et Pretty, 1992], du schéma de Lax-Friedrichs par [Zhang, 2000, #2], et du schéma de Godunov par [Zhang, 2001]31. Notons ici que le schéma de Godunov peut une nouvelle fois se traduire par des fonctions du type d'offre et de demande telles que présentées au paragraphe 2.2.3, mais par une construction un peu plus complexe.

2.4 Prise en compte des poids lourds dans la modélisation macroscopique

De nombreux modèles macroscopiques tenant compte de l'hétérogénéité du trafic ont été développés ces dernières années. En effet, les modèles macroscopiques décrits précédemment ont été bâtis pour représenter un flot homogène de véhicules ; ils ne sont d'ailleurs particulièrement performants que si le trafic est réellement homogène. La décomposition des trafics hétérogènes en sous-classes homogènes est ainsi peu à peu apparue comme l'une des pistes d'amélioration du pouvoir de description de ces modèles macroscopiques, comme souligné par [Zhang et Lin, 2002].

2.4.1 Intégration de l'hétérogénéité du trafic dans les modèles du premier ordre

Principe

Le flux de trafic global est décomposé en sous-classes homogènes. La modélisation de l'écoulement de ces sous-classes est donc analogue à celle d'un trafic global homogène ; en particulier, le principe de conservation des véhicules qui s'applique au flot global s'applique également aux n classes de trafic ainsi constituées :

31 [Aw et al., 2002] ont également utilisé le schéma de Godunov mais par une discrétisation lagrangienne (décomposition du flux en paquets de cardinal constant) et non spatio-temporelle.

Page 61: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Etat de l'art des modèles d'écoulement hétérogène

59

( )0 1,...,i i iK KV i n

t x∂ ∂+ = =∂ ∂

(2.20)

Le débit partiel en chaque sous-classe de véhicules est défini de la façon attendue selon :

1,...,i i iQ KV i n= = (2.21)

Chaque classe a sa vitesse Vi définie par un diagramme fondamental, ce qui permet de continuer de parler de modèle macroscopique du premier ordre. Cette vitesse peut dépendre de la concentration partielle en véhicules de la classe considérée et/ou de tout ou partie des autres concentrations partielles :

( )1,...,éqi niV V K K= (2.22)

Le modèle à résoudre est alors un système de n lois de conservation, une pour chacune des classes constituées. Il peut se mettre sous la forme suivante :

( )t x

∂ ∂+ =∂ ∂K KF K 0 (2.23)

avec K le vecteur colonne des concentrations partielles et F(K) la matrice jacobienne (du vecteur débit Q) dont les termes sont définis par :

( )[ ] ,i

i jj

∂=∂QF KK

(2.24)

Dans le cas où le diagramme fondamental est identique pour toutes les classes et où la vitesse ne dépend que de la concentration totale en véhicules, l'écoulement du trafic n'est pas modifié par rapport au cas du flot global homogène : c'est le cas d'une distinction par classes basée sur l'origine, la destination ou la valeur du temps des conducteurs. Par contre cela permet de suivre l'évolution de ces différents groupes de véhicules et est utile pour la modélisation de l'affectation du trafic aux nœuds du réseau.

Cependant, le cas qui nous intéresse ici est celui où il y a interaction entre les sous-classes ainsi constituées, et donc modification de l'écoulement par rapport à un flot homogène. Ces interactions sont représentées dans les diagrammes fondamentaux ; la définition de ces derniers permet de différencier les modèles multi-classes existants.

Ces premiers efforts de modélisation macroscopique multi-classes du trafic se sont souvent limités au cas n = 2, en intégrant la différence de vitesse et/ou d'occupation de l'espace des deux classes (classiquement des poids lourds et des véhicules légers).

Un modèle multi-classes et mono-vitesse

[Zhang et Jin, 2002] ont proposé un modèle particulier. Les deux classes considérées ont des vitesses différentes Vf1 et Vf2 en situation fluide de trafic, mais le trafic global a une vitesse finalement homogène, même si elle dépend des concentrations Ki de chacune des classes.

Page 62: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 2

60

Ceci explique pourquoi ce modèle peut être considéré comme un modèle multi-classes mono-vitesse : tous les véhicules s'écoulent au sein du trafic global à la même vitesse V, mais cette vitesse dépend de la proportion de véhicules lents :

( )( )

1 1 2 21 1 2 2

1 21 2

1 2 1 1 2 2

si ,

, si

f fc

cong c

KV K VK K K

K KV K KV K K K K K

γ γ

γ γ

+ + < += + ≥

(2.25)

avec Vcong une fonction donnant la vitesse en congestion ; les coefficients γi, qui pondèrent les concentrations partielles, visent à représenter la longueur des véhicules et leurs capacités d'accélération/décélération. Kc est une concentration critique intrinsèque à l'infrastructure.

Le système d'équation à résoudre devient donc :

( )( ).V

t x∂ ∂+ =∂ ∂K K K 0 (2.26)

Il se rapproche beaucoup d'un modèle où les classes ne sont différenciées que par leur destination. Surtout, même dans le cas où l'on considérerait n classes différentes, il possède une structure mathématique dite riche, qui simplifie sa résolution analytique et donne un sens physique aux différentes transitions entre états32. Toutefois, un important inconvénient de ce modèle est l'écoulement FIFO33 résultant de l'égalité des vitesses de tous les véhicules : toute représentation de la progression plus rapide des véhicules légers par rapport aux poids lourds en est empêchée.

Modèles multi-classes multi-vitesses

Les autres modèles multi-classes supposent des vitesses et/ou une occupation de l'espace différentes entre les classes considérées. De façon générale, la vitesse de chaque classe de véhicules décroît de la vitesse libre Vlib,i de ladite classe, quand la concentration en véhicules est nulle, jusqu'à zéro quand la concentration totale34 en véhicules augmente.

Le diagramme de Greenshields, évoqué au paragraphe 2.2.1, donne ainsi une décroissance de la vitesse de chaque classe selon :

( ) max,

maxi lib i

K KV K VK

− = (2.27)

C'est cette forme de décroissance qui est choisie dans le modèle multi-classes de [Benzoni-Gavage et Colombo, 2003].

[Wong et Wong, 2002] utilisent quant à eux la fonction de Drake :

( )( )20

, 2i lib i

KKV K V exp

= −

(2.28)

avec K0 une constante, fonction qui présente l'inconvénient de ne pas s'annuler complètement à la concentration maximale.

32 Les transitions apparaissant dans le modèle conservent soit la composition du trafic, soit la vitesse. 33 First In First Out. 34 Dans les modèles évoqués ici, on entend toujours par concentration totale la somme des concentrations partielles.

Page 63: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Etat de l'art des modèles d'écoulement hétérogène

61

Pour [Zhu, Chang et Wu, 2003], la décroissance de la vitesse s'exprime selon :

,max

1in

i lib iKV VK

= − (2.29)

ni est un coefficient relatif à chaque classe tel que la dérivée du flux par rapport à la concentration s'annule quand cette dernière est égale à la concentration critique. Donc :

,

max

11

inc i

i

KK n

= + (2.30)

où les Kc,i sont les concentrations critiques spécifiques à chaque classe considérée35 : ce modèle tient donc compte d'une occupation de l'espace différente selon les véhicules.

De façon générale, ces modèles intègrent peu la phénoménologie de l'écoulement d'un trafic hétérogène poids lourds et véhicules légers, alors que certains aspects de cette phénoménologie peuvent avoir une influence notable sur la résolution des modèles comme nous le verrons par la suite.

Modèles multi-classes avec optimum

Enfin, certains modèles macroscopiques multi-classes ont été développés en supposant la recherche par les usagers d'un optimum, suivant les premiers travaux de [Daganzo, 1997].

Dans ce modèle, l'un des tous premiers macroscopiques hétérogènes du trafic, il y a deux types de voies, les normales et les prioritaires, et deux types de véhicules, les normaux et les prioritaires. Seuls les véhicules prioritaires peuvent circuler sur les voies prioritaires. Le modèle, bâti sur l'hypothèse de l'existence d'un diagramme triangulaire identique pour les deux types de véhicules, fonctionne ensuite en accord avec un équilibre de type Wardrop, identique dans le principe avec celui utilisé en affectation du trafic :

• la vitesse pratiquée sur les voies prioritaires est toujours au moins égale à celle pratiquée sur les voies normales ;

• lorsque la vitesse est plus élevée sur les voies prioritaires, il y a complète séparation des deux types de véhicules (les véhicules prioritaires sur les voies prioritaires, les véhicules normaux sur les voies normales). On peut parler alors d'écoulement séparé ;

• si les vitesses sont égales entre les voies, alors les véhicules prioritaires utilisent les voies prioritaires et les voies normales. On peut parler alors d'écoulement homogénéisé. Ceci représente le fait que si l'écoulement est plus difficile sur les voies prioritaires que sur les voies normales, les véhicules prioritaires vont homogénéiser l'ensemble des voies en utilisant également les voies normales.

Ce modèle permet de mieux prendre en compte les phénomènes affectant différemment les voies, comme la gêne pouvant exister à proximité d'échangeurs par exemple. Surtout, pour ce qui nous intéresse, il a donné naissance à un deuxième modèle, basé sur des principes semblables mais différenciant les conducteurs (mais ce pourrait être les véhicules) selon leurs vitesses. Ce second modèle, présenté dans [Daganzo, 2002], considère deux types de conducteurs : des conducteurs rapides (rabbits) et des conducteurs lents (slugs), qui ont des vitesses libres différentes. Deux diagrammes

35 C'est-à-dire lorsque le trafic n'est composé que de cette classe de véhicules.

Page 64: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 2

62

fondamentaux triangulaires différents sont donc définis pour les deux types de conducteurs et de voies :

Concentration

Déb

it

Voie rapide ( séparé fluide)

Voie lente (trafic séparé)

Voie rapide (trafic homogénéisé)

Voie lente (trafic homogénéisé)

Ligne d’homogénéisation du trafic

Toutes les voies (trafic homogénéisé)Voie rapide

( semi−congestion)

Figure 2-7 : Diagrammes fondamentaux de [Daganzo, 2002]

Il existe un équilibre de type Wardrop identique au précédent modèle :

• les véhicules lents se comportent comme les véhicules normaux précédents et se concentrent sur les voies lentes ;

• les véhicules rapides se comportent comme les véhicules prioritaires précédents et peuvent utiliser les deux types de voies.

Trois types de régime de trafic sont ainsi observés :

• un trafic séparé fluide quand tous les conducteurs rapides sont sur la voie rapide, tous les conducteurs lents sur la voie lente, et que chaque conducteur peut maintenir sa vitesse libre ;

• un trafic séparé semi-congestionné quand tous les conducteurs rapides sont sur la voie rapide, tous les conducteurs lents sur la voie lente, et que les conducteurs rapides ne peuvent maintenir leur vitesse libre mais atteignent cependant une vitesse supérieure aux véhicules lents ;

• un trafic homogénéisé congestionné quand les conducteurs rapides ne peuvent plus maintenir sur la voie rapide une vitesse supérieure à celle des conducteurs lents : ils se répartissent alors sur les deux voies et homogénéisent la vitesse sur l'ensemble des voies.

Il faut remarquer ici que les véhicules rapides une fois sur la voie lente se comportent nécessairement comme des véhicules lents, et qu'ils ne se rabattent que lorsque les voies rapides sont assez congestionnées. Cette hypothèse devient peu pertinente dans le cas d'un trafic au sein duquel il n'y a que peu (ou pas) de véhicules lents.

Cette approche de la modélisation d'un trafic hétérogène (forte influence du choix de la voie de circulation, absence d'effets de la concentration sur les vitesses) est bien adaptée au comportement discipliné et au fonctionnement voie par voie du trafic aux Etats-Unis ; il l'est beaucoup moins en Europe, où les vitesses des véhicules sont plus étalées et où la règle est la conduite sur la voie la plus à droite.

Enfin, le modèle de trafic hétérogène développé par [Logghe, 2003] s'inspire des concepts du modèle précédent. Dans ce modèle sont considérées deux classes de

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Etat de l'art des modèles d'écoulement hétérogène

63

véhicules, des poids lourds lents et des véhicules légers rapides et donc deux diagrammes triangulaires distincts en partie fluide de trafic :

Concentration

Déb

it

M1

M2

C1

C2

Diagramme VL

Diagramme PL

Figure 2-8 : Diagrammes fondamentaux de [Logghe, 2003]

La capacité C1 pour un trafic composé uniquement de véhicules légers correspond au point M1, celle C2 pour un trafic composé uniquement de poids lourds au point M2.

[Logghe, 2003] fait l'hypothèse que les véhicules lents occupent la place et seulement la place qu'il leur est nécessaire pour l'écoulement. Ceux-ci utilisent donc un débit α C2 de l'infrastructure, et l'offre restante aux véhicules légers est alors de (1- α) C1. Ceci implique l'existence de trois types d'écoulement du trafic, similairement au modèle de [Daganzo, 2002] : fluide, semi-congestionné et congestionné.

Ce dernier modèle, la simplicité de la forme de ses diagrammes fondamentaux exceptée, s'efforce de décrire les spécificités phénoménologiques d'un trafic hétérogène ; toutefois, sa résolution n'a pas été resituée dans son contexte mathématique et surtout, il ne s'intéresse pas à l'éventuelle impossibilité physique de dépassement pour les véhicules légers.

Modèle hybride macroscopique – microscopique

[Laval, 2004, #2] a mené une approche hybride d'une modélisation multi-classes. Dans son modèle, les poids lourds sont représentés de façon microscopique, alors que les véhicules légers le sont sous la forme d'un flux. Les poids lourds suivent une loi de comportement spécifique, tenant compte de l'impact sur les vitesses des montées, alors que la modélisation des véhicules légers est en plus multi-voies, un modèle de changement de files ayant été associé au modèle principal.

Cette approche permet de représenter les différences de vitesse entre les deux types de véhicules. L'effet principal des poids lourds sur le trafic environnant est représenté par la nécessité de dépassement imposé aux véhicules et la restriction de capacité qui en découle : les poids lourds bloquent les véhicules légers qui sont sur leur voie. La prise en compte d'une accélération bornée des véhicules reprenant leur vitesse de croisière après avoir terminé leur changement de voie permet en outre d'accentuer l'effet de la mixité du trafic.

Cependant, l'effet de la concentration des poids lourds, qui peuvent être très nombreux sur certaines routes, sur les vitesses des véhicules légers, n'est pas pris directement en compte, seule l'interaction de dépassement étant représentée. De plus, la

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Chapitre 2

64

modélisation complète nécessite de représenter explicitement un écoulement par voies pour les véhicules légers, ce qui complexifie l'approche alors que les modèles de changement de voie existants, et notamment celui utilisé par [Laval, 2004, #2], restent sommaires36 et difficiles à calibrer. Enfin, les interactions entre poids lourds ne sont pas explicitement représentées : le modèle s'applique essentiellement pour des poids lourds en nombre restreint, sans interactions directes entre eux.

2.4.2 Intégration de l'hétérogénéité du trafic dans les modèles d'ordre supérieur

Plusieurs auteurs ont également construit des modèles d'ordre supérieur tenant compte de la composition du trafic. Dans ce type de modèle, la prise en compte de cette hétérogénéité se fait à l'aide du diagramme fondamental utilisé à l'équilibre pour chacune des classes considérées d'une part, par la modification de l'équation d'évolution des vitesses d'autre part. Cela conduit a priori à un système de n lois de conservation pour les n classes considérées, et n équations d'évolution dynamique de la vitesse.

Un modèle multi-classes mono-vitesse

Dans le modèle de [Bagnerini et Rascle, 2003], la décroissance des vitesses de chacune des classes se fait de façon logarithmique en fonction de la concentration. Mais surtout, à la manière de [Zhang et Jin, 2002], si les deux classes considérées ont des vitesses différentes, le trafic global a une vitesse finalement homogène, même si elle dépend des concentrations Ki de chacune des classes :

( ) ( ) ( ) ( )1 2, 1V K p p V K pV K= − + (2.31)

avec p la fraction du type 2 de véhicules. Par conséquent, il n'existe dans ce modèle qu'une seule équation d'évolution de la

vitesse, celle concernant la vitesse globale du trafic, et, avec la conservation des deux types de véhicules, le système se résume à trois équations.

Cette hypothèse rend la résolution analytique du modèle proposé plus simple, mais a le même inconvénient que le modèle de [Zhang et Jin, 2002], à savoir l'impossibilité de représenter une évolution plus rapide des véhicules légers à cause du type FIFO de l'écoulement.

Un modèle multi-classes multi-vitesses

[Jiang et Wu, 2004] proposent quant à eux une relation d'équilibre sur la vitesse de la forme :

( ) ( )max,

,1 exp 1 exp 1iéq

lib iilib i

c KV K VV K

= − − − (2.32)

avec ci la vitesse de la caractéristique du trafic de la classe i à la concentration maximale Kmax supposée identique pour les différentes classes.

36 Le modèle de changement de voies de [Laval, 2004, #2] ne tient ainsi compte que des vitesses des différentes voies, alors que les concentrations en véhicules sur chacune des voies sont de façon évidente des variables explicatives de la répartition sur les voies.

Page 67: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Etat de l'art des modèles d'écoulement hétérogène

65

Outre les deux équations de conservation pour les deux classes considérées, [Jiang et Wu, 2004] considèrent deux équations d'évolution de la vitesse différentes pour les véhicules rapides indicés 1 et les véhicules lents indicés 2 :

( )( ) ( )( )( )( )

21 1 1 1 2 2

1 1 0111

2 2 22 2 022

2

1

1

éq

éq

V V V V V KV V K V ct x x a bV V VV V K V ct x x

τ

τ

∂ ∂ ∂ − + = − − − ∂ ∂ ∂∂ ∂ ∂ + = − − ∂ ∂ ∂

(2.33)

Chaque type de véhicule à ses propres paramètres τi de temps de réaction et c0i de sensibilité au gradient de vitesse. De plus, les véhicules rapides sont susceptibles d'être gênés par les véhicules lents à travers le terme de friction :

( )( )21 2 2V V Ka b− (2.34)

où a et b sont des coefficients constants. Cette friction est supposée proportionnelle à la différence de vitesse et est liée à la concentration en véhicules lents : elle est nulle quand ces derniers sont absents.

La résolution de ce modèle, qui est au final un système de quatre équations, n'est réalisée que numériquement par [Jiang et Wu, 2004].

2.4.3 Résolution de ces modèles

Ces différents modèles macroscopiques multi-classes amènent à la résolution de systèmes hyperboliques d'équations. La résolution analytique est possible, mais rapidement assez compliquée, dans le cas où l'on a deux équations (cas des modèles bi-classes du premier ordre) : elle s'apparente à la résolution analytique des modèles mono-classe d'ordre supérieur, avec des transitions du type ondes de choc, de raréfaction ou de contact. La différence ici est que les deux variables caractéristiques du système sont les deux concentrations partielles et non plus le couple (concentration, vitesse).

Au-delà (plus de trois équations, cas des modèles bi-classes d'ordre supérieur), la résolution est encore plus délicate, sauf si le système présente des propriétés la rendant plus facile : on doit se contenter de résolutions numériques.

A défaut d'une résolution analytique assez rarement effectuée car souvent délicate, tous les modèles évoqués précédemment ont fait l'objet de résolutions numériques afin de procéder à des simulations. Les schémas numériques utilisés sont essentiellement ceux de Lax-Friedrichs [Benzoni-Gavage et Colombo, 2003], [Wong et Wong, 2002] et de Godunov [Zhang et Jin, 2002], [Bagnerini et Rascle, 2003].

2.5 Conclusion

De nombreux modèles macroscopiques de trafic hétérogène ont été développés ces dernières années, essentiellement pour modéliser des flux ayant des vitesses différentes. Les différences d'occupation de l'espace selon le type de véhicules sont en effet beaucoup moins souvent prises en compte, alors qu'elles constituent une caractéristique forte d'un trafic hétérogène.

De façon générale, les diagrammes fondamentaux supposés ne sont que très peu bâtis sur des données terrain et n'incluent que trop rarement des observations

Page 68: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 2

66

phénoménologiques. L'incidence de la phénoménologie sur la résolution des modèles est pourtant importante.

Par ailleurs, la résolution analytique de ces modèles est trop rarement menée, alors qu'elle peut soulever des aspects difficiles et mathématiquement intéressants.

Enfin, aucun des modèles proposés ne tient compte directement de l'éventuelle impossibilité physique de dépassement pour les véhicules les plus rapides, alors que le chapitre 1 a montré l'importance de ces interactions.

Des progrès restent donc à accomplir pour mieux prendre en compte la phénoménologie d'un trafic hétérogène et intégrer les difficultés éventuelles de dépassement d'une part, resituer ces modèles dans le cadre des travaux mathématiques et des difficultés théoriques spécifiques qu'ils pourraient poser d'autre part.

3 Modèles cinétiques et poids lourds

3.1 Principes

Les modèles cinétiques de trafic décrivent macroscopiquement le flux en s'appuyant sur une analyse du comportement individuel des véhicules et une distribution de certaines variables de trafic.

Fondés sur une analogie avec la théorie de la cinétique des gaz, ils sont apparus avec les travaux de [Prigogine et Herman, 1971]. Dans ces modèles une densité de distribution conjointe f (x,v,t) des vitesses et des positions des véhicules est introduite. Ainsi, f (x,v,t) dx dv représente, à l'instant t, le nombre de véhicules situés entre x et x + dx dont la vitesse est comprise entre v et v + dv. On applique alors la conservation des véhicules, qui s'exprime, quand la vitesse des véhicules est constante, comme :

( ) ( ), , , , 0f x v t f x v tvt x

∂ ∂+ =∂ ∂

(2.35)

Ceci n'est valide que lorsqu'aucun véhicule n'est gêné. Dans le cas où des véhicules rapides sont gênés par des véhicules plus lents, ils ne peuvent maintenir leur vitesse ; cela se traduit dans ce type de modèles par l'apparition d'un second membre dans l'équation (2.35), qui modifie l'équation sur la densité en incluant l'interaction avec les autres véhicules et leur relaxation vers leur vitesse désirée :

( ) ( ) ( ) ( )

interaction relaxation

, , , , , , , ,f x v t f x v t f x v t f x v tvt x t t

∂ ∂ ∂ ∂ + = + ∂ ∂ ∂ ∂ (2.36)

Le terme d'interaction décrit la difficulté de dépassement des véhicules lents par les véhicules rapides, il s'exprime dans le modèle initial de [Prigogine et Herman, 1971] comme :

( ) ( )1 P K V v f− − (2.37)

avec P une probabilité de dépassement, (V – v) la différence entre la vitesse moyenne du flux et la vitesse individuelle du véhicule, K la concentration.

Page 69: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Etat de l'art des modèles d'écoulement hétérogène

67

Le terme de relaxation est quant à lui semblable au terme correspondant des modèles d'ordre supérieur :

0f fτ− (2.38)

avec f0 la distribution d'équilibre des vitesses.

3.2 Résolution

On ne connaît pratiquement aucune solution explicite de ces modèles (hormis le cas stationnaire) [Lebacque, 1995], la résolution est avant tout numérique, à l'aide de différents schémas ; [Hoogendoorn et Bovy, 2000] utilisent ainsi un solveur de Roe.

3.3 Prise en compte des poids lourds dans les modèles cinétiques

L'intégration d'un trafic hétérogène ou multi-voies se fait assez naturellement dans les modèles cinétiques, étant donné que les modèles cinétiques de trafic homogène tiennent déjà compte d'une distribution des vitesses. L'extension des modèles cinétiques au cas du trafic multi-classes ou multi-voies est toutefois récente, suivant les efforts de [Shvetsov et Helbing, 1999] et [Hoogendoorn et Bovy, 2000].

Dans ces modèles, l'équation (2.36) est déclinée pour chaque classe de véhicules considérée. Par ailleurs, c'est sur le terme d'interaction que portent les efforts de modélisation. C'est celui-ci qui est ainsi décomposé en trois parties dans [Shvetsov et Helbing, 1999], pour différencier les effets sur la concentration des changements de voie liés aux dépassements, aux rabattements et aux entrées/sorties de véhicules.

Dans [Hoogendoorn et Bovy, 2000], la prise en compte de l'hétérogénéité du trafic et des dépassements entre véhicules implique la décomposition du terme d'interaction selon les facteurs pouvant faire augmenter ou diminuer la densité de véhicules d'une classe donnée fu(x,v,vo,t)37 :

• cette densité diminue lorsque les véhicules de cette classe sont gênés par des véhicules plus lents qu'ils doivent dépasser (leur vitesse chute en dessous de v) ;

• cette densité augmente lorsque des véhicules de vitesse v gênent des véhicules de type u qui ont une vitesse w supérieure à v (leur vitesse se réduit à v).

La probabilité de dépassement prend dans ces modèles toute son importance ; sa description doit être la plus précise possible. Dans [Hoogendoorn et Bovy, 2000], elle intègre notamment les conditions de trafic sur la voie d'arrivée, la manoeuvrabilité et la longueur du véhicule, la différence de vitesse avec le véhicule à dépasser et la composition du trafic.

37Classe des véhicules de type u, de vitesse v et de vitesse désirée v0.

Page 70: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 2

68

3.4 Conclusion

Les modèles cinétiques raisonnant en termes de distribution des vitesses, il leur a été naturel d'intégrer une composition hétérogène du trafic. Leur force est de représenter explicitement les voies et les mécanismes de dépassement.

Toutefois, les paramètres utilisés par ces modèles sont difficiles à calibrer et à valider, notamment pour les mécanismes de dépassements, ici essentiels. Comme dans le cas général, il n'existe bien sûr pas non plus de résolution analytique dans le cas multi-classes.

4 Approche de modélisation suivie

Prendre en considération le caractère hétérogène de la circulation a conduit ces dernières années à de nombreux développements théoriques dans tous les types de modèles d'écoulement du trafic. Ces nouveaux modèles parviennent à représenter des caractéristiques importantes du trafic routier hétérogène, notamment les évolutions à des vitesses différentes des différentes classes de véhicules, fréquemment des poids lourds et des véhicules légers.

Toutefois, des progrès restent à faire pour mieux intégrer la phénoménologie du trafic en présence de poids lourds, ce qui a des incidences sur les résolutions analytiques et numériques des modèles, et à mieux représenter les interactions de dépassements, diversement prises en compte.

L'objectif de cette thèse est donc de contribuer à l'amélioration de la description de l'écoulement d'un trafic hétérogène constitué de véhicules légers et de poids lourds, et ce dans un environnement autoroutier ou de voies rapides urbaines.

4.1 Quel type de modèle ?

C'est une approche macroscopique du premier ordre sur laquelle nous avons décidé de faire porter nos efforts pour représenter un trafic hétérogène composé de poids lourds et de véhicules légers.

Ceci ne présage en rien de la supériorité de ce type de modèle sur les autres, tant il est vrai que chaque type de modèle n'a de sens que par rapport à l'application future qu'il en est faite. Cependant, pour bien représenter un écoulement mixte poids lourds et véhicules légers, il était nécessaire de comprendre dans ses grandes lignes la phénoménologie qu'il impliquait ; et dans ce but, la modélisation macroscopique nous a semblé constituer un meilleur cadre d'approche que les modèles microscopiques et cinétiques, grâce notamment à son nombre limité de paramètres, sa robustesse et son aptitude à reproduire le comportement d'un système complexe sans qu'il lui soit absolument nécessaire pour ce faire de décrire précisément les interactions locales entre véhicules.

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Etat de l'art des modèles d'écoulement hétérogène

69

Ce choix de représentation macroscopique est fait pour les deux types de véhicules. Pour les véhicules légers, ceci s'explique par l'efficacité du modèle LWR existant. Pour les poids lourds, ceci est argumenté notamment par le nombre de véhicules de cette classe, lui donnant un réel comportement de flux et non de véhicules isolés, point renforcé par le comportement très homogène des véhicules de ce type.

Enfin, le choix d'un modèle du premier ordre et non d'ordre supérieur réside dans la volonté de travailler dans un premier temps sur des états d'équilibre permettant de représenter simplement le caractère hétérogène du trafic, et de pouvoir résoudre le modèle analytiquement et numériquement (la partie 2.4.3 a souligné la difficulté à résoudre les modèles multi-classes d'ordre supérieur de façon analytique).

4.2 Objectifs de la modélisation du trafic hétérogène

Dans le cadre d'une modélisation macroscopique du premier ordre, les objectifs de nos travaux se sont déclinés selon les deux points suivants :

• introduire dans la modélisation, par la construction de diagrammes fondamentaux adaptés, la phénoménologie de l'écoulement d'un trafic comportant des poids lourds. Deux grands types d'interaction sont à prendre en compte :

la vitesse moindre des poids lourds et leur occupation de l'espace plus importante, mises en évidence au chapitre 1 paragraphe 2.1 ;

les interactions liées au dépassement des poids lourds par les véhicules légers et décrits au chapitre 1 paragraphe 2.2.2 ; interactions peu ou pas prises en compte de façon explicite par les modèles macroscopiques multi-classes développés jusqu'ici ;

• proposer une résolution analytique du modèle, en soulignant comment les hypothèses phénoménologiques du point précédent peuvent, d'un point de vue mathématique, la faciliter ou la complexifier ; ainsi qu'une résolution numérique, nécessaire à la mise en place de simulations.

Enfin, dans un souci de simplicité, et afin de dissocier deux aspects qui nous paraissent différents quant à leurs effets sur l'écoulement du trafic, nous avons bâti notre modélisation en deux parties. Tout d'abord, nous avons construit un modèle général tenant compte des différences cinématiques et de longueur entre les véhicules légers et les poids lourds (chapitre 3), modèle que nous avons résolu analytiquement (chapitre 4) et numériquement (chapitre 5). Puis, nous avons étendu (chapitre 6) ce modèle pour intégrer les effets des difficultés éventuellement ressenties par les véhicules légers pour dépasser les poids lourds.

Page 72: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic
Page 73: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

71

Chapitre 3 Diagrammes fondamentaux multi-classes

1 Préambule : forme générale des diagrammes fondamentaux 72

2 Nombre de classes considérées 73 2.1 Distribution des longueurs 73 2.2 Homogénéité des classes en vitesse 75

3 Considérations générales sur les relations d'équilibre pour un trafic multi-classes 76

3.1 Occupation de l'espace par un trafic hétérogène 76 3.2 Relations d'équilibre multi-classes 77

4 Construction de relations fondamentales multi-classes pour un trafic hétérogène véhicules légers et poids lourds 80

4.1 Trafic hétérogène et occupation de l'espace 80 4.2 Construction des relations d'équilibre vitesses-concentrations ou débits-

concentrations 83

5 Conclusion 89

Les diagrammes fondamentaux ont été initialement mis en place lors du travail de fin d'études de l'ENTPE [Chanut, 2001] et du DEA de Génie Civil [Chanut, 2001, #2] réalisés sur le même thème que ces travaux de thèse. Améliorés, ils ont été présentés au séminaire modélisation du trafic de l'INRETS [Chanut, 2003] et publiés dans la revue Recherche Transports Sécurité [Chanut, 2004].

Les relations d'équilibre utilisées par les modèles macroscopiques multi-classes présentées au chapitre 2 ne sont souvent que le choix d'une certaine formulation mathématique intéressante et n'intègrent que trop peu la phénoménologie d'un trafic hétérogène. La construction de diagrammes fondamentaux Qéq = f(K) ou de relations d'équilibre Véq = f(K) pour les deux classes considérées dans nos travaux, des véhicules légers et des poids lourds, doit permettre de prendre en compte plus précisément les spécificités de chacune de ces classes dans l'écoulement du trafic hétérogène ainsi

Page 74: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 3

72

constitué. Ces relations permettront notamment de représenter, selon les types de véhicules :

• les différences d'occupation de l'espace ;

• les différences de vitesse.

La perturbation de l'écoulement causée par les dépassements n'est pas intégrée à ce stade, elle le sera au chapitre 6 lors de l'extension du premier modèle dont nous construisons ici les bases.

Le but de ce chapitre est donc de bâtir deux relations fondamentales représentatives de la phénoménologie de l'écoulement des véhicules légers et des poids lourds. Les recherches effectuées sur la définition de fonctions de temps de parcours multi-classes et les observations sur le terrain d'écoulement avec poids lourds nous permettront d'appuyer nos choix sur des considérations théoriques et empiriques.

Après quelques réflexions quant à la forme des diagrammes fondamentaux (partie 1) et au nombre de classes de véhicules considérées (partie 2), on se consacre au recensement de caractéristiques de la circulation d'un trafic mixte, composé de poids lourds et de véhicules légers (partie 3) ; ceci permet de définir les propriétés générales des relations d'équilibre à bâtir. On construit alors (partie 4) à proprement parler les relations d'équilibre vitesses-concentrations ou débits-concentrations pour les deux classes de trafic.

1 Préambule : forme générale des diagrammes fondamentaux

Depuis le premier diagramme fondamental parabolique proposé par [Greenshields, 1934] et présenté au chapitre 2 paragraphe 2.2.1, la littérature a été abondante pour proposer d'autres formes de diagrammes fondamentaux. La forme parabolique de la partie fluide de la courbe est assez répandue ; les principales formes alternatives sont une droite jusqu'à la capacité, forme très utilisée aux Etats-Unis, et la forme exponentielle (voir par exemple [Messmer et Papageorgiou, 1990]). Ces différences décrivent ainsi la variation ou non des vitesses en situation fluide de trafic. La modélisation de la partie congestionnée de la courbe est elle beaucoup plus délicate, essentiellement à cause de la dispersion et du faible nombre de données dans cette zone ; les formes proposées sont ainsi très variées.

Par ailleurs, des phénomènes d'hystérésis ont été mis en évidence par le passé (voir [Koshi, Iwasaki et Okhura, 1981], [Hall et Agyemang-Duah, 1991]) : les débits maximum observés lors de la dissipation d'une file d'attente sont parfois relevés plus faibles que ceux recensés peu de temps avant le passage du trafic en congestion. Ces observations ont conduit à une forme du diagramme fondamental dit en lambda renversé38, sur lequel la branche de la congestion relie le point de débit nul à concentration maximale à un état de trafic de la partie fluide qui correspond à un débit plus faible (et donc à une concentration également plus faible) que celle de la capacité.

38 ou plutôt réfléchi.

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Diagrammes fondamentaux multi-classes

73

Enfin, plus récemment, les travaux de Boris Kerner (voir par exemple [Kerner, Konhaüser et Shilke, 1996]) mettent en exergue l'apparition d'états de trafic dits synchronisés, pour lesquels la vitesse est uniforme pour toutes les voies et qui peuvent se déplacer vers l'amont ou l'aval ; ils peuvent être également représentés par un diagramme avec hystérésis.

Intégrer dans le diagramme fondamental des observations empiriques pour représenter le phénomène d'hystérésis, ou tenir compte de l'existence d'états synchronisés de trafic, fait l'objet de recherches à part entière. Dans le cadre du modèle que nous cherchons à développer ici, nous allons, dans un souci de simplicité et de déconnexion des phénomènes à représenter, ignorer volontairement ce type de phénomènes de trafic. Par conséquent, les diagrammes fondamentaux entre débits et concentration que nous allons construire ici seront supposés continus et univoques.

2 Nombre de classes considérées

Dans l'étude que nous allons mener, nous avons choisi de définir deux classes de véhicules : des véhicules légers et des poids lourds. L'objectif initial de la séparation d'un trafic hétérogène en classes est de pouvoir considérer ces classes comme homogènes ; on peut ainsi légitimement se demander à quel degré d'homogénéité des classes amène le découpage en deux classes que l'on propose quant aux variables explicatives que nous souhaitons introduire dans le modèle : les longueurs des véhicules et les vitesses qu'ils pratiquent.

2.1 Distribution des longueurs

La question d'homogénéité des classes quant aux longueurs véhiculaires se pose essentiellement pour les poids lourds, étant donné que la classe PL peut regrouper des véhicules de dimensions très différentes (camions de 6 ou 7 mètres et semi-remorques de 18 mètres), ce qui n'est pas le cas des véhicules légers (tailles de véhicules presque toutes comprises entre 3.5 et 5 mètres).

Plusieurs auteurs ont étudié la répartition du trafic selon les longueurs des véhicules.

Les résultats obtenus par [Bliemer, 2000] aux Pays-Bas tendent à montrer un net regroupement des longueurs autour de trois classes : une première autour de 4 mètres, qui correspond aux véhicules légers ; une deuxième autour de 8 mètres, représentative de petits camions ; une troisième autour de 15 mètres, qui regroupe les semi-remorques.

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Chapitre 3

74

Figure 3-1 : Histogramme des longueurs véhiculaires relevées sur l'autoroute

néerlandaise A9 (extrait de [Bliemer, 2000], p.53)

Ces résultats sont cohérents avec ceux obtenus par [Pillot et al., 1994] en France. Leur étude sur les poids lourds donne la distribution suivante des longueurs des poids lourds pour un trafic interurbain (sur route nationale) :

Figure 3-2 : Distribution des longueurs des poids lourds en interurbain

(extrait de [Pillot et al., 1994], p.29)

Il semble donc que, pour prendre en compte correctement l'occupation de l'espace des différents véhicules, on se doive de considérer au sein des poids lourds deux classes différentes : des poids lourds courts (type camions sans remorque) et des poids lourds longs (type semi-remorques). Toutefois, dans un contexte autoroutier international, on tend vers une répartition de plus en plus uniforme des poids lourds : [Pillot et al.,1994] notent ainsi qu'en trafic international 94 % des poids lourds sont des semi-remorques mesurant entre 14 et 18.5 mètres. Sur des données plus récentes, datées de 2001 et obtenues sur l'autoroute française A939, les silhouettes de véhicules obtenues permettent d'évaluer la part des semi-remorques à près de 85 % des poids lourds.

39 Données issus de boucles de comptage HESTIA ; source : Autoroutes du Sud de la France.

Page 77: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Diagrammes fondamentaux multi-classes

75

La distribution des longueurs des poids lourds est alors la suivante :

Figure 3-3 : Distribution des longueurs des poids lourds sur l'autoroute française A9

On voit un pic très net sur les semi-remorques à environ 16 mètres. S'il y a une deuxième classe de poids lourds à considérer, il s'agit des camions avec remorque, que l'on retrouve à des longueurs de 20 mètres.

Par conséquent, sur un axe interurbain à vocation de transit international, type d'infrastructure qui nous intéresse ici plus particulièrement, on peut considérer qu'au vu de l'importance de la part de semi-remorques dans le trafic poids lourds, une seule classe de poids lourds peut suffire au regard de la distribution des longueurs.

2.2 Homogénéité des classes en vitesse

Pour ce qui est des vitesses, l'homogénéité des classes doit également être examinée. Dans ce cas, contrairement à la distribution des longueurs, c'est l'homogénéité de la classe des véhicules légers qui est la moins assurée.

Ainsi, [Bliemer, 2000], qui avait sur la base de son étude de distribution des longueurs considéré deux classes de poids lourds, des courts et des longs, note que les vitesses de ces deux classes de poids lourds ne sont pas significativement différentes.

Par ailleurs, [Leurent, 2002] montre que l'écart-type du temps de parcours (et donc de la vitesse) des véhicules légers est bien supérieur à celui du temps de parcours des poids lourds ; à faible débit, il est près du double40. La grande standardisation du semi-remorque, liée aux contraintes réglementaires, est vraisemblablement la cause de cette grande homogénéité de la classe poids lourds.

Par conséquent, le découpage en deux classes de véhicules permet de séparer deux trafics très différents (poids lourds et véhicules légers), mais, au contraire de la classe poids lourds, la vitesse de la classe véhicules légers, surtout pour des débits faibles, n'est pas très homogène. Il faudra tenir compte de ce point dans la construction du diagramme fondamental des véhicules légers.

40 L'écart-type des temps de parcours diminue avec le débit, la vitesse des véhicules étant de plus en plus contrainte.

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Chapitre 3

76

3 Considérations générales sur les relations d'équilibre pour un trafic multi-classes

Les relations d'équilibre multi-classes doivent posséder certaines propriétés, notamment pour représenter des observations communes concernant un trafic hétérogène. Ceci concerne l'intégration de la diversité des longueurs de véhicules dans les variables explicatives (ici, les concentrations en véhicules) ainsi que plusieurs caractéristiques sur les vitesses et leur évolution.

3.1 Occupation de l'espace par un trafic hétérogène

La classe poids lourds contenant des véhicules plus longs que la classe véhicules légers, il est nécessaire de tenir compte de l'espace occupé supplémentaire dans l'expression de la concentration en véhicules, ne serait-ce que pour représenter le fait que les concentrations maximales observées dans le cas d'un trafic hétérogène sont plus faibles que lorsque ce trafic n'est constitué que de véhicules légers.

Dans beaucoup de modèles multi-classes, tels que ceux présentés au chapitre 2 paragraphe 2.4.1, les longueurs différentes de véhicules ne sont pourtant pas prises en compte ; ces modèles se contentent d'utiliser la concentration totale K du trafic égale à la somme des concentrations partielles (1 pour les véhicules légers, 2 pour les poids lourds) :

1 2K K K= + (3.1)

Les modèles qui tiennent comptent d'une occupation plus importante de l'espace de certains véhicules raisonnent en concentration totale effective en pondérant la ou les concentrations partielles. Ainsi, pour [Zhang et Jin, 2002], les deux concentrations partielles sont pondérées par des coefficients γi tels que :

i i i fiL Vγ τ= + (3.2)

avec Li la longueur moyenne des véhicules de chaque classe et le terme τiVfi représentant une capacité d'accélération/décélération des véhicules. Ainsi, les concentrations maximale et critique du modèle dépendent de la composition du trafic. C'est le cas également, de façon plus implicite, dans le modèle de [Zhu, Chang et Wu, 2003].

[Hoogendoorn et Bovy, 2000] considèrent quant à eux une pondération plus sophistiquée pour exprimer une concentration effective du trafic, inspirée du modèle de [Jepsen, 1998], en exprimant la longueur li nécessaire à chaque véhicule de vitesse vi par :

( ) 2i i i i i i i il v L d vT v F= + + + (3.3)

avec di l'espacement minimal entre deux véhicules, Ti le temps de réaction et Fi un facteur de sécurité pris par le conducteur.

De façon générale, on peut donc exprimer la concentration totale effective en unités de véhicules légers par unité de longueur par :

( ) ( )1 2 1 1 2 2, ,K V V K e V V K= + (3.4)

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Diagrammes fondamentaux multi-classes

77

avec e un coefficient d'équivalence affecté aux poids lourds, et qui dépend des vitesses des classes (ou d'une seule classe si les vitesses des classes sont elles-mêmes reliées entre elles). En effet, comme le note [Bliemer, 2000], ce coefficient e n'est pas intrinsèque et ne saurait prendre la même valeur dans toutes les conditions de trafic ; il suppose ainsi, dans son modèle, que ce coefficient suit une loi du type :

( ) a be V e eV= − (3.5)

avec ea et eb deux constantes ; la première représenterait l'influence de la longueur des poids lourds, la deuxième qualifierait l'impact de la différence de vitesse avec les véhicules légers. Curieusement toutefois, en calibrant ses données, [Bliemer, 2000] trouve un coefficient ea de l'ordre de 1.7, et un coefficient eb très faible, de l'ordre de 0.003 par kilomètres/heure ; le coefficient d'équivalence n'est donc pas significativement variable avec la vitesse.

Il est clairement nécessaire de pondérer les concentrations de poids lourds pour tenir compte de la longueur plus importante de ces véhicules. Il paraît également sensé d'avancer que cette pondération doit dépendre de l'état du trafic ; toutefois, faute de connaître une loi précise de variation, et au vu des résultats peu convaincants obtenus jusque là, nous supposerons dans la construction de nos diagrammes fondamentaux une pondération constante des deux concentrations partielles, à la manière de [Zhang et Jin, 2002].

3.2 Relations d'équilibre multi-classes

Avant de construire les diagrammes fondamentaux multi-classes de nos modèles, nous allons mettre en évidence certaines propriétés que ces diagrammes devront, en toute logique, respecter.

3.2.1 Décroissance des vitesses avec la concentration en véhicules

Tout d'abord, il faut s'assurer que les vitesses des classes diminuent avec la concentration totale, quelle que soit la façon dont cette dernière est définie. [Bliemer, 2000] note ainsi que la vitesse d'une classe doit nécessairement décroître avec l'augmentation de la concentration, quelle que soit la classe de véhicules qui provoque cette augmentation de concentration.

3.2.2 Effet de la mixité du trafic sur les vitesses

Par ailleurs, on peut s'attendre à ce que la composition hétérogène du trafic ait un impact négatif sur les conditions de trafic, comme souligné également par [Bliemer, 2000] ; ainsi, à occupation de l'espace équivalente, il paraît logique que les vitesses des classes soient, dans le cas d'un trafic hétérogène, au plus égales à celles observées dans le cas d'un trafic homogène de la classe considérée. Cette interaction entre les véhicules, liée aux dépassements, a de bonnes chances d'être asymétrique, les véhicules rapides étant vraisemblablement plus gênés que les véhicules lents.

[Bliemer, 2000] comme [Hoogendoorn, 1999] sépare l'effet sur les vitesses de la concentration en véhicules d'une part, de la mixité du trafic d'autre part.

Page 80: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 3

78

Pour [Bliemer, 2000], la mixité est modélisée comme accentuant la gêne par l'augmentation de la concentration effective :

ij Effets de la densité

Effets de la mixité

i i i jClasses i Classes j plus lentes que Classes i

K e K K Kα

= + ∑ ∑ (3.6)

Les coefficients ei et αij sont supposés dépendre de la vitesse de la classe la plus rapide, vitesse à laquelle les vitesses des autres classes sont reliées. Pour le coefficient de mixité, [Bliemer, 2000] propose la formulation suivante :

( ) ( ),ij i j ij i jV V V Vα β= × + (3.7)

avec βij une constante positive. Par conséquent, le terme de mixité tend vers 0 quand l'une des classes de véhicules est absente (terme en KiKj) ou quand le trafic atteint sa concentration maximale (les vitesses tendent alors vers 0).

Pour [Hoogendoorn, 1999], la mixité est modélisée à travers la possibilité de dépassement ; elle accentue la perte de vitesse si le dépassement est impossible, selon :

( )( ), 1 21 ,i lib i iV V h K K Kα= − − (3.8)41

avec hi la probabilité de dépassement de la classe i et K la concentration totale effective intégrant déjà une pondération des concentrations partielles.

Quant à nous, nous avons fait le choix de séparer plus distinctement la gêne relative à la concentration de véhicules et celle relative au dépassement. Par conséquent, l'altération des vitesses due au dépassement sera intégrée plus tard ; nous n'intégrerons donc dans un premier temps que l'effet de l'augmentation relative de concentration liée à l'hétérogénéité du trafic.

3.2.3 Forme des courbes d'équilibre multi-classes

On peut également s'interroger sur les propriétés qualitatives nécessaires des courbes d'équilibre multi-classes.

En situation fluide de trafic

Dans la littérature la forme du diagramme fondamental Qéq = f(K) pour les états fluides de trafic est classiquement soit linéaire (aucune altération des vitesses avec l'augmentation de la concentration du trafic) soit courbée (souvent selon un polynôme d'ordre 2) pour intégrer la gêne croissante des véhicules entre eux avec l'augmentation de la concentration qui les contraint à diminuer leur vitesse. La première forme est très utilisée dans la littérature américaine (on notera d'ailleurs que cette idée est également transcrite dans le manuel technique national, le HCM, voir Chapitre 1chapitre 1 paragraphe 3.2.2), la deuxième plus répandue en Europe. Cela peut s'expliquer par la plus grande uniformité des capacités des véhicules aux Etats-Unis, notamment la grande puissance des poids lourds dont les propriétés cinématiques se rapprochent de celles des véhicules légers (ce qui n'est pas le cas en Europe), une discipline plus grande des conducteurs ainsi qu'un fonctionnement de l'écoulement par voies.

41 Il s'agit d'un modèle cinétique, il intégre donc une distribution des vitesses ; par conséquent, les poids lourds peuvent également être amenés à dépasser.

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Diagrammes fondamentaux multi-classes

79

Comme souligné par [Logghe, 2003], cette courbure du diagramme fondamental représente en fait l'interaction croissante entre véhicules de vitesses différentes ; ainsi, si l'on différencie le trafic hétérogène en classes de trafic supposées homogènes en vitesses, ces interactions entre véhicules n'ont plus lieu d'être représentées par le diagramme ; l'interaction entre les classes n'est en effet pas à intégrer directement dans le diagramme fondamental mais se doit d'être décrite par une autre forme de modélisation.

Par conséquent, on pourrait légitimement supposer que les diagrammes fondamentaux pour un trafic véhicules légers et poids lourds, dans la partie fluide, peuvent être représentés sous la forme d'un segment de droite jusqu'à la capacité. Toutefois, ceci n'est valable que pour des classes réellement homogènes en vitesses. Or le paragraphe 2.2, sur la base des résultats de [Leurent, 2002], a souligné un certain manque d'homogénéité sur les vitesses de la classe véhicules légers, la classe poids lourds étant de ce point de vue beaucoup plus homogène. Des interactions peuvent donc exister entre les véhicules légers, beaucoup moins entre les poids lourds. On s'attend donc à une courbure en fluide du diagramme fondamental des véhicules légers, celui des poids lourds pouvant être (presque) considéré comme un segment de droite.

En situation congestionnée de trafic

De nombreuses formes sont proposées dans la littérature pour la partie congestionnée du diagramme fondamental ; ceci est lié à la grande dispersion des données de trafic pour de tels états de trafic, et on ne peut décréter qu'une forme de diagramme est plus adaptée qu'une autre. On peut simplement rappeler le fait que le diagramme doit, a priori, être concave, et ce pour des raisons physiques : dans le cas contraire, certains états de trafic pourraient se propager42 plus rapidement que des états de trafic moins denses, ce qui conduirait à l'apparition de discontinuités de concentrations décroissantes : ceci est contraire à l'intuition. Les diagrammes multi-classes ne sont pas différents quant à ces aspects.

Par contre, une hypothèse est très répandue à propos des vitesses des véhicules des différentes classes en situation congestionnée de trafic : il s'agit de leur égalité pour ce type d'états. En effet, comme souligné par [Bliemer, 2000], la vitesse des différentes classes doit converger en congestion, car il n'y a pas de raisons de supposer qu'en situation congestionnée de trafic il soit possible à une classe donnée de véhicules d'avoir une vitesse (significativement) plus élevée que celle des autres classes.

Ainsi, poids lourds et véhicules légers doivent avoir une vitesse égale en congestion, et les deux diagrammes fondamentaux se confondent donc. Tout au plus pourrait-on faire l'hypothèse que cette vitesse commune dépend, à occupation de l'espace donnée, de la composition du trafic : c'est ce que [Leurent, 2002] appelle l'homogénéité partielle (par rapport à une homogénéité dite totale des vitesses).

Bien que de nombreux travaux de modélisation multi-classes supposent des vitesses différentes en congestion même très sévère pour les différentes classes (les diagrammes fondamentaux étant en effet totalement disjoints), cette hypothèse d'égalité des vitesses en congestionné est de plus en plus répandue : [Zhang et Jin, 2002], [Daganzo, 2002], [Logghe, 2003], entre autres, ont fait leur cette assertion.

42 à la vitesse de leur caractéristique Q'(K).

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Chapitre 3

80

Enfin, il est bien sûr évident que la vitesse doit s'annuler lorsque la concentration maximale en véhicules est atteinte.

Séparation des états fluides et congestionnés

Nous avons souligné plus haut (paragraphe 1) que nous supposions un diagramme fondamental continu, sans hystérésis, pour chacune des classes homogènes considérées. Ainsi, à occupation de l'espace donnée, chaque classe de trafic est soit en congestion, soit en situation fluide.

Toutefois, il reste à savoir si les différentes classes de trafic sont nécessairement dans le même état qualitatif de trafic. On peut en effet envisager, comme dans les travaux de [Daganzo, 2002] ou [Logghe, 2003], qu'il existe des états semi-congestionnés, pour lesquels une classe est en situation fluide alors que la seconde est en congestion. Pour notre part, dans un souci de simplicité, et sans nier l'existence empirique de ces états particuliers d'écoulement du trafic, nous avons pris le parti de considérer que l'état du trafic (au sens de sa fluidité ou de sa congestion plus ou moins importante) est identique pour les poids lourds et les véhicules légers.

4 Construction de relations fondamentales multi-classes pour un trafic hétérogène véhicules légers et poids lourds

Les deux relations d'équilibre que nous allons construire dans ce chapitre doivent mettre en évidence d'une part la longueur et donc l'occupation de l'espace plus importante des poids lourds, d'autre part la différence de vitesses entre poids lourds et véhicules légers.

Dans toute la suite, les variables relatives aux véhicules légers sont indicées 1, celles relatives aux poids lourds indicées 2.

4.1 Trafic hétérogène et occupation de l'espace

La concentration en véhicules est le facteur déterminant de l'évolution du débit ou de la vitesse du trafic. Deux concentrations en véhicules sont particulièrement remarquables dans la construction des diagrammes d'équilibre : il s'agit de la concentration dite maximale, pour laquelle la vitesse du trafic devient nulle (trafic à l'arrêt en congestion) et de la concentration critique, qui est la concentration du trafic pour laquelle on passe d'un écoulement fluide à un écoulement congestionné.

Dans le cas d'un trafic hétérogène, les véhicules ne sont pas tous de la même longueur et ne rendent pas la même quantité d'espace indisponible à l'écoulement des autres véhicules. Par conséquent, les concentrations maximale et critique, en nombre de véhicules par unité de longueur, doivent varier avec la composition du trafic.

4.1.1 Expression de la concentration maximale pour un trafic hétérogène

A la concentration maximale tous les véhicules sont à l'arrêt. On peut donc considérer que l'espace occupé par chaque véhicule, c'est-à-dire celui qu'il rend indisponible aux autres, est constitué de sa propre longueur augmentée d'une interdistance

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Diagrammes fondamentaux multi-classes

81

minimale avec le véhicule précédent. Cette longueur occupée Li par chaque véhicule de la classe i s'exprime donc selon :

i i iL l d= + (3.9)

avec li la longueur réelle du véhicule et di l'espacement laissé avec le véhicule précédent. Nous allons supposer en première approximation que ce dernier n'est pas différent selon les véhicules, et est donc constant et égal à d. Dans la mise en œuvre de simulations de son modèle43, [Bliemer, 2000] fait une hypothèse semblable.

Par conséquent, la concentration maximale attendue pour un trafic hétérogène constitué de véhicules légers et de poids lourds, avec une fraction p de ces derniers, s'exprime en véhicules par mètre et par voie selon :

( )( )max

1 2

11

K pp L pL

=− +

(3.10)

Ici, p est défini comme le rapport entre les concentrations en poids lourds et totale :

2

1 2

KpK K

=+

(3.11)

En fonction des concentrations K1 et K2, la concentration maximale s'exprime selon :

( ) 1 2max 1 2

1 1 2 2, K KK K K

K L K L+=+

(3.12)

Dans le plan des phases (K1,K2), la concentration maximale est donc repérée par une ligne droite, comme c'est le cas pour [Bliemer, 2000] et [Hoogendoorn, 1999] ; cela délimite un triangle de couples de concentrations possibles. A titre d'illustration, avec d = 2 m, l1 = 4.25 m et l2 = 16 m, on obtient :

0 0.05 0.1 0.150

0.01

0.02

0.03

0.04

0.05

0.06

Concentration maximale

K1 (véh/m)

K2 (

véh/

m)

Figure 3-4 : Plan des phases : concentration maximale

43 avec le logiciel microscopique FOSIM.

Page 84: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 3

82

4.1.2 Expression de la concentration critique pour un trafic hétérogène

De façon similaire à la concentration maximale, on s'attend à ce que la concentration critique qui délimite les états fluides et congestionnés de trafic dépende de la composition du trafic.

Pour approcher cette variation, nous avons étudié le taux d'occupation critique sur une section de voie rapide urbaine à l'entrée nord-ouest de Lyon. Le taux d'occupation est le pourcentage du temps pendant lequel un capteur de trafic détecte la présence d'un véhicule. Il est relié à la concentration par :

( )TO K l b= + (3.13)

avec b la longueur du capteur et l la longueur moyenne des véhicules44. Cette mesure intègre donc déjà l'influence de la longueur des véhicules ; dans notre cas, elle nous donne directement une estimation de la part de l'espace occupé, et donc de la proximité ou non de l'état de trafic avec l'état de congestion correspondant à la concentration maximale.

Sur la section étudiée45, nous disposons, par période d'une minute, des débits tous véhicules, du taux d'occupation et du pourcentage de poids lourds46. Pour chaque pourcentage de poids lourds et pour un mois entier, nous avons approché la valeur du TO critique en relevant la moyenne des TO correspondant aux occurrences des 4 débits les plus élevés. On obtient alors les estimations suivantes du taux d'occupation critique :

0 5 10 15 20 2510

15

20

25

30

35

40

45

50

Pourcentage PL

TO

crit

ique

Figure 3-5 : Estimation du TO critique en fonction de la composition du trafic

(un point par pourcentage PL, points reliés)

Autour d'une valeur moyenne de 25 % environ, le TO critique ne varie pas de façon significative avec l'évolution du pourcentage poids lourds47. Il serait nécessaire

44 Si l'on note L = l + b, le taux d'occupation est en fait égal au produit de la concentration K par la valeur moyenne de L, mais augmentée de V cov(L,1/V). [Kockelman, 1998] a trouvé que ce deuxième terme était en fait négligeable sur autoroute et que la formule (3.13) était une très bonne approximation du TO. [Kim et Hall, 2004] ont confirmé cet avis dans une étude spécifique de la relation entre taux d'occupation et concentration, soulignant simplement que la linéarité de la relation était plus difficilement justifiable en cas de poids lourds en nombre important. 45 Données transmises par l'opérateur des voies rapides urbaines de l'agglomération lyonnaise, CORALY. 46 Les poids lourds sont ici les véhicules d'une longueur supérieure à 7.80 m. Le pourcentage correspond ici au pourcentage des débits. 47 L'interpolation par une droite ne permet pas de dégager un sens de variation dans un intervalle de confiance à 95 % ; par ailleurs, la variation du TO critique n'excède pas 3% de TO entre 0 et 25 % de poids lourds.

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Diagrammes fondamentaux multi-classes

83

d'approfondir cette première approche sommaire, mais l'on peut en première approximation supposer que le taux d'occupation critique est constant avec la composition du trafic : le trafic devient donc congestionné pour une même occupation de l'espace. Etant donné que l'inverse de (L(p)+b) est une bonne approximation de Kmax(p), un taux d'occupation critique constant signifie que le rapport entre concentrations critique et maximale est constant. Nous exprimerons donc la concentration critique dans nos relations d'équilibre comme une part constante de la concentration maximale, c'est-à-dire selon :

( ) ( )1 2 max 1 2, ,cK K K K K Kα= (3.14)

avec α une constante. Dans le plan des phases (K1, K2), on obtient donc la séparation de la Figure 3-6 entre les états fluides et congestionnés de trafic (ici nous avons pris un coefficient α égal à 1/3). Cette construction de la concentration critique selon la composition du trafic est au final analogue à celle proposée par [Zhang et Jin, 2002].

0 0.05 0.1 0.150

0.01

0.02

0.03

0.04

0.05

0.06

Concentration maximale

Concentration critique

FLUIDE

CONGESTION

K1 (véh/m)

K2 (

véh/

m)

Figure 3-6 : Plan des phases : concentrations critiques et maximales

4.2 Construction des relations d'équilibre vitesses-concentrations ou débits-concentrations

Il reste maintenant à construire sur l'espace des phases les courbes de vitesses ou de débits. En s'appuyant sur les considérations et propriétés générales des trafics multi-classes mises en évidences au paragraphe 3.2.3, nous allons travailler séparément sur les états congestionnés et fluides de trafic.

4.2.1 Trafic congestionné

On a noté au paragraphe 3.2.3 l'évidence empirique de l'égalité des vitesses en congestion. Cette hypothèse est retenue pour la construction de nos relations d'équilibre ; par conséquent on aura, en situation congestionnée de trafic :

( ) ( ) ( )1 1 2 2 1 2 1 2, , ,congV K K V K K V K K= = (3.15)

Page 86: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 3

84

et

( ) ( )

( )1 1 2

2 1 2

, 1

,

Q K K p Q

Q K K pQ

= − = (3.16)

puisque tous les véhicules ont même vitesse.

Quelle forme de décroissance donner, en situation de congestion, à la vitesse commune des véhicules Vcong ou au débit total Q ? De façon générale, la dispersion des données et leur faible nombre en congestion ne permet pas de décider quelle est la meilleure forme d'interpolation des débits en fonction de la concentration. Par conséquent, nous choisissons ici la forme simple qu'est la décroissance linéaire pour l'évolution du débit entre les concentrations critique et maximale. Notons cependant que la représentation du diagramme fondamental en congestion par une droite est aussi supportée de façon théorique par [Wu, 2002] sur la base de la théorie des files d'attente.

La décroissance linéaire du débit en congestion correspond à une décroissance hyperbolique de la vitesse. On a donc, pour un pourcentage donné p de poids lourds, des relations d'équilibre de la forme suivante en congestion :

Concentration totale

Vite

sses

Kmax

(p)

Vc(p)

Kc(p)

Concentration totale

Déb

it

Kmax

(p)Kc(p)

Capacité(p)

Figure 3-7 : Forme des relations d'équilibre en congestion

où Vc(p) est la vitesse critique.

4.2.2 Trafic fluide

Les considérations des paragraphes 2.2 et 3.2.3 amènent à proposer en situation fluide de trafic une décroissance de la vitesse pour les véhicules légers et une vitesse constante pour les poids lourds. En effet, selon les réflexions menées plus haut, la grande homogénéité de la classe poids lourds devrait assurer l'absence de gêne et donc de perte de vitesse de cette classe tant que le trafic reste en situation fluide, alors que l'hétérogénéité de la classe véhicules légers devrait entraîner une gêne de ces véhicules entre eux dès de faibles concentrations et donc une décroissance de vitesse.

On peut appuyer ces considérations générales sur l'étude de données terrain. L'analyse des vitesses des véhicules légers et des semi-remorques pour les données utilisées précédemment de l'autoroute française A9 est à ce titre instructive, à la fois pour la décroissance ou non des vitesses et pour la forme de cette décroissance.

Page 87: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Diagrammes fondamentaux multi-classes

85

Les états de trafic sur les sections considérées sont uniquement fluides, avec des vitesses élevées ; trop peu de points sont disponibles pour des concentrations élevées. Nous nous sommes donc limités à une concentration de 50 uvl/km. Par ailleurs, les poids lourds sont en nombre important (environ 40 % du trafic) et particulièrement uniformes (cf. Figure 3-3).

Pour différents intervalles de concentrations effectives (c'est-à-dire tenant compte de la longueur plus importante des poids lourds)48, nous avons calculé la vitesse moyenne des poids lourds et des véhicules légers ; on obtient alors les résultats suivants :

0 10 20 30 4040

50

60

70

80

90

100

110

120

130

Station n°1

Concentration effective (uvl/km)

Vite

sses

(km

/h)

Véhicules légersPoids lourds

0 10 20 30 40 5040

50

60

70

80

90

100

110

120

130

Station n°2

Concentration effective (uvl/km)

Vite

sses

(km

/h)

Véhicules légersPoids lourds

Figure 3-8 : Evolution des vitesses en situation fluide de trafic

sur une section de l'autoroute française A9

Sur la station n°1, on note que pour des concentrations assez faibles (inférieures à 30 uvl/km) la vitesse des poids lourds peut être considérée comme (presque) constante, et que l'approximation linéaire est pertinente pour la décroissance de la vitesse des véhicules légers. La concentration critique devrait se situer à environ 40 uvl/km.

Sur la station n°2, on note une décroissance significativement non nulle de la vitesse des poids lourds ; la décroissance de la vitesse des véhicules légers est également plus importante. Ces phénomènes sont vraisemblablement liés à la pente de la route, en montée, à cet endroit. Sans être aussi pertinente que sur la station n°1, l'approximation linéaire pour la décroissance des vitesses des deux types de véhicules est défendable. Enfin, on note une concentration critique de l'ordre de 45 uvl/km.

Sur la base de ces résultats, nous choisissons alors, pour les états fluides de trafic, une décroissance linéaire des vitesses des différentes classes de véhicules, y compris pour les poids lourds. L'hypothèse d'une vitesse poids lourds constante quelque soit la concentration du trafic reste toutefois plausible sur certaines sections ; le choix réalisé permet de rester dans un cadre général.

De façon générale, la décroissance linéaire des vitesses en situation fluide de trafic a été soutenue théoriquement pour les sections autoroutières à 2 voies par [Wu, 2002], sur la base de la théorie des files d'attente49.

Page 88: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 3

86

Il reste à déterminer à quelle concentration la vitesse des différents véhicules s'uniformise. Dans le cadre de ces travaux, nous allons faire l'hypothèse que l'égalité des vitesses devient effective lorsque le trafic passe en congestion : en situation de congestion, on a déjà établi (paragraphe 3.2.3) que les vitesses doivent tendre à s'égaler ; en situation fluide, nous supposons que les véhicules légers parviennent à conserver une vitesse supérieure aux poids lourds jusqu'à ce que la capacité de l'infrastructure soit atteinte.

Enfin, nous supposerons par la suite que la vitesse critique du trafic Vc, nécessairement identique par construction pour les deux classes, est indépendante de la composition du trafic.

4.2.3 Relations d'équilibre vitesses-concentration et débit(s)-concentration(s)

Relation vitesses-concentration

On obtient donc la forme suivante pour la relation d'équilibre vitesses-concentration totale :

Concentration totale

Vite

sses

Kmax

(p)

Vc

VlibVL

VlibPL

Kc(p)

Vitesse VLVitesse PLVitesse congestion

Figure 3-9 : Relation vitesses-concentration totale (à un pourcentage PL p donné)

Cette forme de relation ne se veut pas universelle ; nous avons précédemment été conduits à faire un certain nombre d'hypothèses. Cependant, sur la base des éléments théoriques détaillés plus haut et des résultats empiriques dont nous disposions, cette forme est fondée. Par ailleurs, elle s'adapterait bien à la modélisation des données recueillies par exemple par [Bliemer, 2000] et présentées par la Figure 3-10.

48 Les données disponibles sont des données individuelles. Une concentration ki a été attachée à chaque véhicule comme l'inverse de l'espacement laissé avec le véhicule précédent (pris égal au produit de la vitesse du véhicule et du temps intervéhiculaire avant du véhicule suivi/avant du véhicule suiveur), espacement diminué de la différence de longueur moyenne entre PL et VL quand le véhicule suivi était un PL. La concentration finale utilisée a été prise, pour un véhicule donné, comme la moyenne des concentrations ki de ce véhicule et des deux véhicules précédents et suivants. 49 Pour une section à 3 voies, la méthode théorique prévoie que la vitesse dépende du carré de la concentration [Wu, 2002].

Page 89: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Diagrammes fondamentaux multi-classes

87

Figure 3-10 : Vitesses véhicules légers et poids lourds et concentration effective

(véh/km) (extrait de [Bliemer, 2000])

Dans le plan des phases (K1,K2) on obtient les iso-vitesses suivantes (hypothèse d'une vitesse libre de 35 m/s pour les véhicules légers, 25 m/s pour les poids lourds, hypothèse d'une vitesse critique de 20 m/s) :

Figure 3-11 : Iso-vitesses (m/s) pour les véhicules légers (figure de gauche)

et pour les poids lourds (figure de droite) dans le plan des phases (K1,K2)

Les iso-vitesses obtenues sont des segments de droite et sont parallèles entre elles ; cela représente le fait que la mixité du trafic, à concentration totale équivalente (c'est-à-dire une fois les concentrations partielles pondérées selon le type de véhicule), n'entraîne pas d'impact négatif sur les vitesses des deux classes ; seule l'occupation de l'espace général a un effet. L'influence de la mixité sera intégrée séparément au chapitre 6, lorsque se posera la question de la modélisation de l'effet des dépassements.

Page 90: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 3

88

Relations débit(s)-concentration(s)

En raisonnant sur le diagramme fondamental débit(s)-concentration(s), toujours à un pourcentage poids lourds p donné, on obtient les courbes suivantes :

Concentration totale

Déb

its

Kmax

(p)Kc(p)

(a)

Débit VLDébit PLDébit total

Concentrations

Déb

its

Kmax

(p)(1−p)Kmax

(p)pKmax

(p)

(b)

Débit VLDébit PLDébit total

Figure 3-12 : Relations d'équilibre à un pourcentage de poids lourds p fixé :

(a) Débits total et partiels en fonction de la concentration totale (b) Débit total en fonction de la concentration totale, débits partiels en fonction des

concentrations partielles

La faible courbure du diagramme poids lourds en situation fluide s'explique par la faible influence de la concentration sur la vitesse de ces véhicules.

En trois dimensions, avec la concentration totale et le pourcentage poids lourds en variables explicatives, on a la forme suivante des diagrammes fondamentaux :

Figure 3-13 : Diagramme fondamental multi-classes 3D

Ce diagramme en trois dimensions met en évidence la diminution de la capacité et de la concentration maximale avec l'augmentation de la part du trafic poids lourds.

Page 91: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Diagrammes fondamentaux multi-classes

89

5 Conclusion

Ce chapitre a été consacré à la construction de relations d'équilibre dans le cas d'un trafic hétérogène composé de deux classes.

Sur la base d'éléments théoriques et empiriques, nous avons bâti deux relations fondamentales pour les véhicules légers et les poids lourds permettant de mettre en évidence l'effet de l'occupation de l'espace plus importante des poids lourds et les différences de vitesses entre les deux classes de véhicules considérées. Certaines hypothèses phénoménologiques que nous avons formulées, comme notamment l'égalité des vitesses en congestion, joueront un rôle important quant aux propriétés du modèle de trafic.

Les deux chapitres suivants vont s'attacher à présenter la résolution analytique et numérique du modèle d'écoulement du trafic hétérogène basé sur les relations d'équilibre construites ici.

Page 92: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic
Page 93: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

91

Chapitre 4 Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

1 Introduction : notations et formulation du problème 92 1.1 Notations 92 1.2 Formulation du modèle 94 1.3 Le problème de Riemann 96

2 Propriétés générales du modèle 96 2.1 Généralités 97 2.2 Hyperbolicité du système étudié 98 2.3 Etude des valeurs propres 100 2.4 Invariance du domaine 102 2.5 Généralisation de ces résultats 103 2.6 Conclusion 103

3 Courbes de Lax : principes et tracé pour le modèle étudié 103 3.1 Principes 104 3.2 Nature des champs caractéristiques du système étudié 107 3.3 Courbes de Lax et résolution du problème de Riemann 110 3.4 Tracé des courbes de choc et de raréfaction 111 3.5 Conclusion 118

4 Caractère anisotropique du modèle 118 4.1 Une propriété nécessaire du modèle 119 4.2 Critères d'anisotropie 119 4.3 Anisotropie du modèle proposé 120

5 Résolution du problème de Riemann (cas général) 121 5.1 Principes 121 5.2 Résolution de problèmes de Riemann types pour notre modèle 126

6 Cas particuliers et aspects mathématiques non standard du modèle 131 6.1 Application du modèle à un trafic homogène 132 6.2 Intégration de l'hypothèse v2 = constante en trafic fluide 139

7 Conclusion 145

Page 94: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

92

Les principaux éléments de résolution analytique du modèle ont été présentés lors de la 82ème conférence annuelle du Transportation Research Board [Chanut et Buisson, 2003], ce qui a donné lieu à publication dans Transportation Research Record [Chanut et Buisson, 2003, #2]. Les aspects mathématiques non standard ont été publiés pour la 16ème conférence triennale ISTTT [Chanut, 2005].

Le modèle d'écoulement de trafic homogène LWR est construit autour de l'équation scalaire de conservation des véhicules. Sa résolution analytique, bien connue, est bâtie sur la méthode des caractéristiques. Le modèle d'écoulement de trafic hétérogène étudié ici constitue quant à lui un système de deux équations de conservation. Sa résolution analytique que nous allons présenter en détails dans ce chapitre fait appel à une théorie mathématique, celle des systèmes hyperboliques d'équations. Son application pour la résolution de notre modèle suit une série d'étapes bien définies que nous allons aborder successivement, en faisant référence à la résolution du cas scalaire.

Après avoir fixé les notations utilisées et formulé le problème à résoudre (partie 1), on présente ainsi les propriétés principales du modèle hétérogène de trafic dans le cadre des systèmes de lois de conservation (partie 2).

On construit ensuite les outils mathématiques nécessaires à la résolution du modèle (partie 3). Une propriété physique de comportement du modèle, relative à l'objet trafic et reliée à ces outils, l'anisotropie, est détaillée (partie 4). La résolution complète du modèle est réalisée à travers des problèmes de Riemann types (partie 5).

Enfin, on s'intéresse plus spécifiquement à des propriétés mathématiques non standard du modèle lors de son application à des trafics particuliers, comme les trafics homogènes ou lorsque l'on introduit l'hypothèse phénoménologique de stabilité des vitesses des poids lourds en situation fluide de trafic (partie 6).

1 Introduction : notations et formulation du problème

Cette première partie est destinée à préciser les notations et les appellations qui seront utilisées dans la suite du document ; le lecteur pourra ainsi s'y référer en cas de besoin. Elle formule par ailleurs le modèle d'écoulement de trafic hétérogène que nous allons résoudre, en le replaçant dans son contexte mathématique.

1.1 Notations

Dans toute la suite du document, les variables et paramètres relatifs aux véhicules légers seront indicés i = 1, ceux relatifs aux poids lourds indicés i = 2.

1.1.1 Paramètres du modèle

On notera de la façon suivante les paramètres du modèle :

• Vi : les vitesses libres des véhicules, c'est-à-dire quand il n'y a pas de véhicules sur la route (densité de trafic nulle). On a naturellement V1 > V2 , les véhicules légers se déplaçant plus vite que les poids lourds dans cette situation ;

Page 95: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

93

• Vc : la vitesse critique. Elle correspond au passage du trafic fluide au trafic congestionné et est choisie telle que : 2cV V≤ ;

• Li : les longueurs caractéristiques des véhicules, choisies comme sommes de la longueur du véhicule li et de l'espacement intervéhiculaire laissé à l'arrêt avec le véhicule précédent d ;

• N : le nombre de voies de l'infrastructure.

1.1.2 Variables du modèle

Les variables dépendent du temps et de l'espace. Cependant, on allégera l'écriture en ne mentionnant pas systématiquement les dépendances des variables en x et en t.

Concentrations (en véhicules par unité de longueur)

• ki(x,t) : les concentrations partielles en véhicules ;

• k(x,t) : la concentration totale, égale à k1(x,t) + k2(x,t).

• kmax(x,t) : la concentration maximale, celle pour laquelle tous les véhicules sont à l'arrêt. Elle dépend de la composition du trafic et s'exprime selon :

( ) 1 21 2

1 1 2 2,max

k kk k kk L k L

+=+

(4.1)

• kc(x,t) : la concentration critique, celle pour laquelle le trafic passe de fluide à congestionné ; elle dépend de la composition du trafic et est reliée à la concentration maximale par

α : le rapport, choisi comme constant, entre concentrations critique et maximale ;

( ) ( )1 2 1 2, ,c maxk k k k k kα= (4.2)

On définit également :

• p(x,t) : la fraction de poids lourds, égale à :

( )( )( )

2 ,,,

k x tp x tk x t

= (4.3)

Vitesses

• vi(x,t) sont les vitesses des différentes classes ; elles sont directement liées par une relation phénoménologique aux concentrations partielles ; en congestion elles sont égales pour les deux types de véhicules et on notera donc plus simplement v1(x,t) = v2(x,t) = v(x,t). Elles permettent par ailleurs de définir les débits selon :

Débits (en véhicules par unité de temps)

• qi(x,t) : les débits partiels en véhicules, définis comme le produit ki(x,t) vi(x,t) ;

• q(x,t) : le débit total, égal à q1(x,t) + q2(x,t).

Page 96: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

94

Densités (en mètres occupés par unités de longueur de voirie)

On définit également :

• ρi(x,t) : les concentrations partielles en véhicules pondérées par Li : ρi(x,t) = ki(x,t)Li(x,t) ; on les nommera par la suite densités. Elles sont sans dimension mais pourraient également s'exprimer en mètres occupés (par les véhicules) par mètres de voirie. Ces mètres occupés tiennent compte d'un espacement intervéhiculaire ;

• ρ(x,t) : la concentration totale pondérée ou densité totale, égale à ρ1(x,t) + ρ2(x,t).

Dans cette même optique, on peut définir :

• ρmax, la densité maximale ; elle est égale à 1 pour une voie, donc à N pour une infrastructure à N voies ;

• ρc, la densité critique ; elle est égale à α pour une voie, donc à αN pour une infrastructure à N voies ;

• ψ(x,t) : la fraction de densité poids lourds, égale à :

( )( )( )

2 ,,,x tx tx t

ρψρ

= (4.4)

Flux (en mètres occupés par unité de temps)

On définit, d'une manière similaire aux débits, des flux :

• fi(x,t) : les produits ρi(x,t) vi(x,t) ; ils peuvent s'exprimer en mètres occupés par unité de temps ;

• f(x,t) : le flux total, égal à f1(x,t) + f2(x,t).

Enfin, les matrices seront notées en gras et lettres droites (exemple : A).

1.2 Formulation du modèle

Pour résoudre le modèle d'écoulement de trafic hétérogène construit, il faut résoudre le système de deux équations de conservation suivant (une pour les véhicules légers, une pour les poids lourds) :

1 1

2 2

0

0

q kx tq kx t

∂ ∂ + = ∂ ∂∂ ∂ + = ∂ ∂

(4.5)

ou, de façon équivalente50, en utilisant les densités et flux définis plus haut :

1 1

2 2

0

0

fx tfx t

ρ

ρ

∂ ∂ + = ∂ ∂∂ ∂ + = ∂ ∂

(4.6)

50 Les longueurs attribuées aux deux classes de véhicules, si elles ont un intérêt phénoménologique évident, ne modifient pas la résolution analytique du modèle.

Page 97: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

95

Les vitesses d'équilibre vi sont définies par les courbes phénoménologiques construites au chapitre 3. Deux régimes d'écoulement du trafic sont distingués :

• le régime fluide, quand la concentration totale est inférieure à la concentration critique :

1 21 2

1 1 2 20 k kk k N

k L k Lα +≤ + ≤

+ (4.7)

donc quand :

1 20 cρ ρ ρ≤ + ≤ (4.8)

• le régime congestionné, quand la concentration totale est comprise entre la concentration critique et la concentration maximale :

1 2 1 21 2

1 1 2 2 1 1 2 2

k k k kN k k Nk L k L k L k L

α + +≤ + ≤+ +

(4.9)

donc quand :

1 2c maxρ ρ ρ ρ≤ + ≤ (4.10)

Selon les régimes de trafic, les vitesses d'équilibre supposées sont les suivantes, conformément aux courbes du chapitre 3 (cf. Figure 3-9) :

( ) [ ]

( ) [ ]

1 2

1 2

, si 0,

, 1 si ,

i i i c

maxca c max

v V

v V

ρ ρ β ρ ρ ρ

ρρ ρ ρ ρ ρρ

= − ∈ = − ∈

(4.11)

avec les notations suivantes, destinées à alléger l'écriture :

• βi : le rapport

i c

c

V Vρ− (4.12)

• Vca : la quantité suivante :

1ca cV Vα

α=

− (4.13)

Ainsi, avec l'augmentation de la densité, on suppose une décroissance linéaire des vitesses en fluide entre la vitesse libre et la vitesse critique, et une décroissance correspondant à une décroissance linéaire du débit en congestion (cf. Figure 3-9).

Dans la suite de la résolution du modèle, nous raisonnerons toujours en termes de densités et de flux (ρ et f) et non plus en termes de concentrations et débits (k et q), car les premières variables intègrent les longueurs caractéristiques des différents véhicules et simplifient l'expression des équations.

Page 98: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

96

1.3 Le problème de Riemann

Résoudre le problème proposé revient à chercher la solution de problèmes dits de Riemann, c'est-à-dire constitués du système de lois de conservation (4.6) (associé aux relations (4.11)) et de conditions initiales constantes par morceaux avec une unique discontinuité en x = x0 telles que :

( )( )( )

( )01 2

1 21 2 0

, si (état ), , 0

, si (état )

g gg

d d d

x xx

x x

ρ ρρ ρ

ρ ρ

= <= = >

G

D

ρ

ρ (4.14)

avec ρ1d, ρ1

g, ρ2d et ρ2

g des constantes. Ce problème est illustré par la Figure 4-1 pour x0 = 0.

à t=0

x<0 x>0

x=0

G

D

ρ1g

ρ2g

ρ1d

ρ2d

Den

sité

s

ρ1

ρ2

Figure 4-1 : Problème de Riemann pour le modèle de trafic hétérogène

En effet, tout problème de variation continue de densités peut être exprimé comme la limite d'une série de problèmes de variation par paliers.

De plus, l'apparition de discontinuités lors de la résolution de systèmes de lois de conservation, y compris lorsque l'on part de conditions initiales régulières, renforce l'intérêt de la résolution de ce type de problème ; dans le cas spécifique du trafic routier, les conditions aux limites sont par ailleurs elles aussi souvent décrites comme des discontinuités, spatiales (réduction d'une voie de l'infrastructure suite à un accident par exemple) ou temporelles (présence d'un feu tricolore).

Enfin, lors de la mise en œuvre d'une résolution numérique par discrétisation spatio-temporelle, c'est bien ce type de problème que l'on est amené à résoudre.

2 Propriétés générales du modèle

Il est tout d'abord nécessaire de vérifier certaines propriétés que présente le modèle étudié afin d'appliquer par la suite la résolution du modèle, dictée par la théorie des systèmes de lois de conservation. La propriété fondamentale à vérifier est l'hyperbolicité du système ; c'est elle qui conditionne l'application de la méthode mathématique de résolution que nous allons utiliser. Mais il s'agit également ici de s'intéresser aux vitesses

Page 99: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

97

caractéristiques de propagation de l'information trafic dans notre modèle, ainsi qu'à sa stabilité.

2.1 Généralités

Dans le modèle LWR du premier ordre, l'équation de conservation du trafic s'exprime selon :

0éqK dQ K

t dK x∂ ∂+ =∂ ∂

(4.15)

Par conséquent, la vitesse caractéristique du trafic est ici dQéq(K)/dK : elle représente la vitesse de propagation de la densité K. A cause de la forme de la relation fondamentale Qéq(K), cette vitesse de propagation est positive quand le trafic est fluide, négative si le trafic est en congestion (cf. Figure 2-3 et Figure 2-4).

Dans notre cas, le système d'équations que l'on étudie peut se mettre sous la forme :

( ) ( )

( ) ( )

( )

1 1 1 11 11 2

2 22 2 2 2

1 2

0

0

v v

t xv v

ρ ρρ ρρ ρρ ρρ ρ

ρ ρ

∂ ∂ ∂ ∂∂ ∂ + = ∂ ∂ ∂ ∂ ∂ ∂ J

ρ

ρ

(4.16)

Les vitesses caractéristiques du système sont alors les valeurs propres de la matrice jacobienne J(ρ) ; ce sont elles qui vont gouverner l'évolution dans le temps et l'espace des couples de densités (ρ1, ρ2). Du fait de la relation phénoménologique (4.11), elles vont s'exprimer différemment selon que le trafic est fluide ou congestionné. En effet, le domaine de définition des couples de densités (ρ1, ρ2) est le suivant :

( ) ( ) [ ] 21 2 1 2, ; 0, maxX ρ ρ ρ ρ ρ ρ= ∈ = + ∈ (4.17)

au sein duquel on peut distinguer deux espaces de fonctionnement différent :

• les états fluides (pour les deux types de véhicules) de trafic sur :

( ) ( ) [ ] 21 2 1 2, ; 0, (trafic fluide)fl

cX ρ ρ ρ ρ ρ ρ= ∈ = + ∈ (4.18)

• les états congestionnés (pour les deux types de véhicules) de trafic sur :

( ) ( ) [ ] 21 2 1 2, ; , (trafic congestionné)cg

c maxX ρ ρ ρ ρ ρ ρ ρ= ∈ = + ∈ (4.19)

Ceci est illustré par le plan des phases suivant de la Figure 4-2.

Page 100: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

98

ρmax

ρc

FLUIDE

CONGESTION

ρ1

ρ 2

Figure 4-2 : Plan des phases et nature fluide/congestionné du trafic

Les propriétés de ces valeurs propres, et donc de la matrice jacobienne, sont particulièrement importantes pour l'étude du système. En particulier, l'hyperbolicité du système en dépend ; or elle constitue une donnée importante, qui nous permettra d'utiliser les résultats mathématiques efficaces de la théorie des systèmes hyperboliques d'équation par la suite.

2.2 Hyperbolicité du système étudié

Définissons tout d'abord la notion d'hyperbolicité, nécessaire à l'utilisation de la théorie mathématique que nous allons employer.

Un système est dit hyperbolique si les valeurs propres de sa matrice jacobienne sont réelles et si les vecteurs propres sont linéairement indépendants ; il est dit strictement hyperbolique si les valeurs propres sont en plus distinctes.

Dans le cas que l'on étudie ici, la matrice jacobienne s'exprime différemment en trafic fluide et en congestion.

2.2.1 Expression des valeurs et vecteurs propres en trafic congestionné

En congestion (ρ > ρc), la matrice jacobienne s'exprime selon :

( )1 111 12

21 222 2

v vvJ J

J J v vv

ρ ρρ ρ

ρ ρρ ρ

∂ ∂ + ∂ ∂ = = ∂ ∂ + ∂ ∂

J ρ (4.20)

La première valeur propre est alors une constante négative alors que la seconde est égale à la vitesse du trafic :

( )

( ) ( )

1

2 1 2

01

1 , 0

c ca

maxca

V V

V v

αλα

ρλ ρ ρρ

= − = − < − = − = ≥

ρ

ρ (4.21)

Ceci signifie qu'un état de trafic hétérogène congestionné porte deux informations, l'une se propageant vers l'amont, l'autre vers l'aval à la même vitesse que ces véhicules. Nous verrons par la suite quelle est la nature de cette information.

Page 101: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

99

Par ailleurs, ces valeurs propres sont réelles et distinctes.

Dans cette situation on peut choisir comme vecteurs propres associés à ces deux valeurs propres :

( ) ( )1

1 22

1 et

1

ρρ= =

−r rρ ρ (4.22)

Le système est donc strictement hyperbolique pour un trafic congestionné, les vecteurs propres étant linéairement indépendants. L'expression particulière des vecteurs propres signifie grossièrement que la première information est transmise à composition de trafic constante alors que la deuxième l'est à densité constante. Nous y reviendrons également par la suite.

2.2.2 Expression des valeurs et vecteurs propres en trafic fluide

La matrice jacobienne s'exprime, en trafic fluide, selon :

( )11 12 1 1 1 1 1

21 22 2 2 2 2 2

J J v

J J v

β ρ β ρ

β ρ β ρ

− − = = − − J ρ (4.23)

L'expression des valeurs propres est alors la suivante, plus compliquée que précédemment et au signe moins évident :

( ) ( )( )( ) ( )( )

21 11 22 11 22 12 21

22 11 22 11 22 12 21

1 421 42

J J J J J J

J J J J J J

λ

λ

= + − − + = + + − +

ρ

ρ (4.24)

On voit que ces valeurs propres sont réelles et distinctes si et seulement si :

11 22 12 21 ou 0J J J J≠ ≠ (4.25)

Ceci est réalisé de façon générale, sauf en des états de trafic particuliers.

En trafic fluide, on peut choisir en dehors des axes ρi = 0 les vecteurs propres suivants :

( ) ( )1 22 2 22

1 221 21

et J J

J J

λ λ− + −= =

−r rρ ρ (4.26)

mais leur expression n'est parfois plus valide sur les axes. Le choix suivant, plus compliqué, est quant à lui valide partout :

( ) ( )1 22 12 2 22 12

1 221 1 11 21 2 11

et J J J J

J J J J

λ λ

λ λ

− + − − −= =

− − + − +r rρ ρ (4.27)

L'expression (4.26) des vecteurs propres assure qu'ils sont linéairement indépendants, et donc que le système est bien strictement hyperbolique, si les deux valeurs propres sont distinctes.

Page 102: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

100

Perte d'hyperbolicité

On a J12J21 = 0 dans le cas où une classe de véhicules est absente (ρi = 0) ; les valeurs propres du système coïncident et l'hyperbolicité du système est perdue lorsque J11 = J22.

Sur l'axe des véhicules légers (ρ2 = 0) cela correspond à la densité suivante en véhicules légers :

1 21

1 22omb

cc

V VV V V

ρ ρ −=− −

(4.28)

et sur l'axe des poids lourds (ρ1 = 0) à la densité suivante en poids lourds :

1 22

1 22omb

cc

V VV V V

ρ ρ −=− −

(4.29)

Ces deux états de trafic particuliers pour lesquels l'hyperbolicité du système est perdue sont dits ombilicaux. Le couple de densités (0, ρ2

omb) ne décrit toutefois un état fluide de trafic que si ρ2omb < ρc,

c'est-à-dire si :

( ) ( ) ( )1 2 2 1 2 2 donc c cV V V V V V V V− − − ≤ − ≤ (4.30)

Ceci ne serait réalisé que si l'on choisissait V2 = Vc (c'est-à-dire une vitesse constante des poids lourds en trafic fluide) ; l'état de trafic posant problème serait alors situé sur la ligne de capacité ρ = ρc. Un tel choix poserait cependant d'autres difficultés et dans un premier temps nous allons supposer qu'il n'y a pas égalité entre V2 et Vc. L'hyperbolicité du système n'est donc finalement perdue que sur le point ombilical situé sur l'axe des véhicules rapides :

( )1 , 0omb ombρ=ρ (4.31)

L'influence de l'existence de cet état de trafic particulier sera examinée en détails par la suite.

2.2.3 Hyperbolicité du système

Le système est donc strictement hyperbolique sur l'ensemble X* suivant :

( ) ( ) [ ] ( ) 21 2 1 2 1* , ; 0; \ , 0ombX Nρ ρ ρ ρ ρ ρ= ∈ = + ∈ (4.32)

c'est-à-dire sur tous les états (ρ1, ρ2) possibles physiquement hormis le point ombilical. On reviendra en détails sur les difficultés posées par l'existence du point ombilical

plus loin (paragraphe 6.1.2). Partout ailleurs les résultats mathématiques relatifs aux systèmes hyperboliques d'équation vont pouvoir être appliqués.

2.3 Etude des valeurs propres

Il est intéressant ici de s'intéresser aux valeurs propres du système, car ce sont elles qui définissent la vitesse à laquelle les informations se propagent. Dans le cas scalaire, elles définissaient des courbes caractéristiques ; ici, elles permettent de définir des champs caractéristiques.

Page 103: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

101

2.3.1 Classement des valeurs propres

Tout d'abord, les équations (4.21) et (4.24) montrent que les deux valeurs propres sont classées quelle que soit la situation de trafic :

( ) ( )1 2λ λ∀ ≤ρ ρ ρ (4.33)

La première information se déplace donc toujours plus lentement que la deuxième. Ceci sera par ailleurs utile dans la résolution du problème de Riemann.

2.3.2 Vitesse de l'information finie et majorée par la vitesse du trafic

De plus, il est aisé de montrer que l'on a :

( ) ( )2 1vλ∀ ≤ρ ρ ρ (4.34)

ce qui nous assure qu'aucune information de trafic ne se déplace plus vite que le trafic lui-même : ceci est une propriété essentielle du modèle, qui a priori élimine les risques de voir des véhicules réagir à une information provenant de derrière eux et permet de respecter le caractère, attendu et souhaité, d'anisotropie du trafic. Nous reviendrons sur cette notion dans le paragraphe 4.

2.3.3 Evolution des valeurs propres avec les densités

Propriétés en fluide

En plus des propriétés précédentes, on peut montrer51 que pour les états fluides de trafic λ1 est inférieure à v2 (mais reste positive) et que λ2 est comprise entre v1 et v2 :

( ) ( ) ( ) ( ) ( )1 2 2 2 1 et v v vλ λ≤ ≤ ≤ρ ρ ρ ρ ρ (4.35)

La première information se déplace donc plus lentement que tous les véhicules, tandis que la deuxième est plus lente que les véhicules légers mais plus rapide que les poids lourds.

Par ailleurs, avec le choix de vecteurs propres (4.27), on note que ces derniers ont toujours leur première composante positive ou nulle, et leur deuxième positive ou nulle (pour r1), négative ou nulle (pour r2).

Propriétés en congestion

En congestion λ1 est une constante négative, tandis que λ2 correspond à la vitesse du trafic.

Evolution générale

Pour une densité de poids lourds ρ2 fixée (densité fluide à densité de véhicules légers nulle donc inférieure à la densité critique ρc), on a, suivant les équations (4.24) et (4.21), l'évolution des valeurs propres de la Figure 4-3 (les vitesses des classes sont indiquées en pointillés).

51 Les travaux de [Benzoni-Gavage et Colombo, 2003] fournissent les preuves détaillées dans le cas d'un flux quadratique, comme c'est le cas dans notre modèle pour les états fluides de trafic.

Page 104: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

102

(à ρ2 fixé)

λ1

λ2

ρmax

− ρ2

ρc − ρ

2

0

v2(0,ρ

2)

v1(0,ρ

2)

−Vca

Densité ρ1

Vite

sses

Figure 4-3 : Evolution des valeurs propres avec la densité en véhicules légers

(pour une densité de poids lourds donnée)

Pour les états fluides de trafic, la première valeur propre décroît de v2 - β2ρ2 (pour une densité de véhicules légers nulle) à (2Vc - V1) + (V1 - V2) ρ2 / ρc (pour un écoulement à la capacité). La deuxième valeur propre décroît de v1 (pour une densité de véhicules légers nulle) à Vc (pour un écoulement à la capacité).

Signe des valeurs propres

Les valeurs propres décrivant la vitesse de propagation de l'information dans le modèle, on note donc que :

• sur la première valeur propre : une information du modèle se propage, en fluide, vers l'aval mais plus lentement que les véhicules ; en congestion, vers l'amont et à vitesse constante ;

• sur la deuxième valeur propre : une autre information du modèle se propage, en fluide et en congestion, vers l'aval, plus rapidement que les poids lourds et plus lentement que les véhicules légers.

Cas particulier de la capacité

On note de plus qu'il y a continuité, lors du passage en congestion, de la valeur propre λ2. Par conséquent, pour un état de trafic à la capacité, les deux formulations (4.21) et (4.24) sont équivalentes, tout comme la formulation du vecteur propre associé ((4.22) ou (4.27)).

Par contre, il y a discontinuité entre la formulation en fluide et en congestion pour la valeur propre λ1. Les états de trafic à la capacité seront ainsi réputés porter l'ensemble des valeurs propres entre les deux valeurs constituant le saut, c'est-à-dire (2Vc -V1) + (V1 - V2) ρ2 / ρc et - Vca. Sur la frontière de capacité, le vecteur propre à gauche (vers les états fluide) sera donnée par l'expression en fluide (4.27), celui à droite (vers les états congestionnés) par l'expression en congestion (4.22).

2.4 Invariance du domaine

On doit également s'assurer à ce stade qu'il n'apparaîtra pas, lors de la résolution du modèle, de vitesses ou de densités négatives, ce qui serait aberrant.

Page 105: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

103

On peut s'assurer de l'invariance du domaine des états possibles à l'aide de considérations mathématiques (voir [Hoff, 1985], cité par [Benzoni-Gavage et Colombo, 2003]). Toutefois, la forme des courbes de Lax (que nous verrons par la suite) dans la zone de congestion assure plus simplement l'invariance du domaine.

2.5 Généralisation de ces résultats

Dans le cas où :

• les vitesses des classes ont la même forme de décroissance monotone avec la densité,

• qu'elles sont ordonnées selon vn<… < v1,

• et qu'elles s'annulent à la densité maximale,

[Benzoni-Gavage et Colombo, 2003] ont généralisé ces résultats dans le cas d'un trafic à n classes, et ont ainsi montré :

• l'hyperbolicité sur tout l'ensemble X des états possibles privé des axes ρi = 0,

• l'invariance du domaine,

• et les relations suivantes sur les valeurs propres ordonnées de façon croissante entre λ1 et λn :

( ) ( ) ( ) ( )1 1 et n nv vλ λ≤ ≤ρ ρ ρ ρ (4.36)

Dans le cadre de cette thèse, on se limitera quant à nous au cas de deux classes.

2.6 Conclusion

Cette partie a permis de mettre en évidence les propriétés mathématiques du système d'équations étudié, et de souligner certaines propriétés des valeurs propres, qui décrivent la vitesse de propagation de l'information dans le modèle. Elle a prouvé notamment que le système était hyperbolique (sauf en des points particuliers), ce qui autorise la résolution mathématique du système à l'aide d'outils que la troisième partie du chapitre va maintenant permettre de mettre en place : les courbes de Lax.

3 Courbes de Lax : principes et tracé pour le modèle étudié

La résolution d'un système hyperbolique d'équations de conservation est basée sur l'utilisation de courbes du plan des phases appelées courbes de Lax (voir le paragraphe 3.3). Nous allons les présenter et les construire dans le cadre de cette partie.

Ces courbes décrivent, pour un état de trafic donné, les ensembles d'autres états qui peuvent lui être reliés, soit par une discontinuité (onde de choc) (on parle alors de lieux de Hugoniot), soit par une zone dans laquelle l'état de trafic varie continûment (onde de raréfaction) (il s'agit alors des courbes intégrales).

Page 106: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

104

3.1 Principes

Il existe deux grands types de courbes de Lax : les lieux de Hugoniot et les courbes intégrales.

3.1.1 Lieux de Hugoniot

Construction

Dans le cas d'une équation hyperbolique scalaire comme dans le modèle LWR, tout état de concentration kg peut être relié par une discontinuité appelée onde de choc à un autre état de concentration kd ; en effet une telle discontinuité est possible si les états de trafic de part et d'autre de la discontinuité vérifient la condition dite de Rankine-Hugoniot :

[ ] [ ] s q s ρ∃ ∈ = (4.37)

avec s la vitesse du choc ; dans le cas scalaire, tout couple d'états (kg, kd) peut donc être relié par une onde de choc de vitesse :

( ) ( )( )( )

éq d éq g

d g

q k q ks

k k−

=−

(4.38)

En revanche, dans le cas d'un système, ne peuvent être reliés à un état de trafic ρg que les états de trafic ρd vérifiant la même condition de Rankine-Hugoniot pour la dimension 2, c'est-à-dire :

( ) ( ) ( )( )( )

1 11 1

2 22 2

donc

d g d g

g gd d

g gd d

s s

f f s

f f s

ρ ρ

ρ ρ

∃ ∈ − = −

− = − − = −

f fρ ρ ρ ρ

(4.39)

avec f1 et f2 les flux en véhicules légers et en poids lourds. Ceci conduit à un ensemble de points appelé lieux de Hugoniot de l'état ρg. Il y a autant de courbes que d'équations considérées ; elles seront donc au nombre de deux dans notre cas. On les différencie selon le vecteur propre auquel elles sont tangentes en ρg (lieux de type 1 ou 2).

Admissibilité des ondes de chocs

Dans le cas scalaire du modèle LWR, les chocs ne sont toutefois admissibles que si l'on a un profil de concentrations croissantes : les caractéristiques issues des concentrations faibles situées en amont croisent les caractéristiques issues des concentrations élevées situées en aval (cf. Figure 4-4 (b)). Ceci correspond à l'arrivée de véhicules sur une file d'attente par exemple, dans tous les cas à l'arrivée d'un trafic rapide sur un trafic plus lent.

Page 107: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

105

Concentration

Déb

it

kg kd

Onde de choc

kg

kd

x=0Onde de choc

Temps t

Esp

ace

x

(a) (b)

Figure 4-4 : Formation d'une onde de choc dans le cas scalaire

Les caractéristiques de l'état amont croiseraient celles de l'état aval

Dans le cas contraire (profil de concentrations décroissantes) qui correspond par exemple au redémarrage des véhicules à un feu, ces différentes caractéristiques s'écartent et la résolution du problème de Riemann par une discontinuité, mathématiquement possible, n'est pas physiquement vraisemblable (il y a dispersion des véhicules et donc une évolution progressive de la concentration et non pas propagation d'une discontinuité).

Ceci se traduit par la condition dite entropique suivante sur la vitesse s du choc étudié, représentant le fait que les caractéristiques du trafic situé en amont doivent, pour que le choc soit vraisemblable physiquement, rejoindre celles du trafic situé en aval :

( ) ( )' 'g d g dq k s q k k k> > ⇔ < (4.40)

On remarque ici que les q'(ki) sont en fait les caractéristiques ou valeurs propres de l'équation scalaire et que l'équivalence avec les concentrations est liée à la concavité de la fonction de flux q(k) (cf. Figure 4-4 (a))

L'extension de ce critère d'entropie à un système peut se faire selon la proposition dite de Lax avec l'équation suivante. Est admissible un i-choc si :

( ) ( )g di isλ λ> >ρ ρ (4.41)

Pour poursuivre l'analogie avec le cas scalaire, un choc n'est admissible que si les caractéristiques du ième champ disparaissent dans le choc tout comme, dans le cas scalaire, les caractéristiques q'(ki) disparaissent dans le choc dans le cas d'un profil croissant de concentrations. Cependant, la construction du critère d'entropie (4.40) dans le cas scalaire est rendue possible par la variation monotone des caractéristiques q'(ki) avec la concentration. De façon similaire, pour un système, l'expression (4.41) n'est utilisable que si les valeurs propres λi varient de façon monotone le long des courbes intégrales52.

52 Courbes dont la tangente en chaque point a pour direction celle du vecteur propre considéré en ce même point.

Page 108: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

106

Ceci est ainsi le pendant pour les systèmes de la concavité du diagramme fondamental pour le modèle scalaire, et se traduit par la propriété de véritable non-linéarité :

Le champ caractéristique correspondant à une valeur propre λ de la jacobienne J de vecteur propre associé r est véritablement non-linéaire si et seulement si la dérivée de λ dans la direction de r ne s'annule pas :

( ) ( ). 0 λ ≠ ∀ ∈ Χd rρ ρ ρ

Il sera donc nécessaire, préalablement au tracé des courbes de Hugoniot, de vérifier la véritable non-linéarité des champs caractéristiques du système étudié.

3.1.2 Courbes intégrales

Construction

Des différences existent pour les ondes de raréfaction entre l'équation scalaire et le système d'équations de façon similaire aux différences entre ces deux mêmes cas pour les ondes de choc. Alors que dans le cas scalaire tout couple d'états de trafic constituant un profil de concentrations décroissantes peut être relié par un éventail de concentrations, ceci n'est plus vrai dans le cas d'un système.

Dans le cas d'un système, un état de trafic ρg ne peut être relié à un autre état ρd par une onde de raréfaction et donc un ensemble d'état de trafic variant continûment, que si cet état de trafic aval ρd se trouve sur une courbe intégrale issue de ρg. Comme pour les lieux de Hugoniot, il y a autant de courbes intégrales que de vecteurs propres, donc que d'équations de conservation. On les différencie selon le vecteur propre qui a conduit leur construction (courbes de type 1 ou 2).

Admissibilité des ondes de raréfaction

L'onde de raréfaction n'existe dans le cas scalaire que lorsque les caractéristiques q'(k) sont croissantes et donc, du fait de la concavité de la relation débit-concentration, à des concentrations décroissantes ; ceci permet à un éventail de caractéristiques de combler la zone créée par la divergence des caractéristiques des états de trafic amont et aval.

Concentration

Déb

it

(a)

KgKd

Eventail

Kg

Kd

Eventail

Temps t

Esp

ace

x

(b)

Figure 4-5 : Formation d'un éventail dans le cas scalaire

Les caractéristiques de l'état amont divergent de celles de l'état aval

Dans le cas d'un système, ceci correspond à la nécessité d'avoir des valeurs propres croissantes dans le sens suivi sur la courbe intégrale. Par conséquent, la propriété de

Page 109: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

107

véritable non-linéarité des champs est ici aussi très importante, car il est nécessaire que le long d'une courbe intégrale la variation des valeurs propres soit monotone afin de s'assurer de l'admissibilité de tout une partie de la courbe intégrale.

3.2 Nature des champs caractéristiques du système étudié

La propriété de véritable non-linéarité des champs caractéristiques du système étudié est, comme nous l'avons vu plus haut, très importante pour le fonctionnement de notre système, notamment pour qualifier l'admissibilité des ondes de choc ou de raréfaction. Nous étudions ici la nature des champs caractéristiques en trafic fluide et congestionné.

3.2.1 Trafic fluide

L'expression des valeurs propres pour les états fluides de notre modèle (4.24) est compliquée. Toutefois, la décroissance linéaire des vitesses pour ces états fluides, et donc la forme quadratique de la fonction de flux, permettent de démontrer facilement que les deux champs caractéristiques de notre système sont véritablement non-linéaires53.

Ainsi, pour les états fluides de trafic, et pour le choix de vecteurs propres (4.27), on a, en dehors du point ombilical :

• pour le premier champ de vecteurs :

( ) ( )1 1. 0 \fl ombXλ < ∀ ∈d rρ ρ ρ ρ (4.42)

• pour le deuxième champ de vecteurs :

( ) ( )

( ) ( )2 2

2 2

. 0 \ tel que

. 0 si

fl ombc

c

Xλ ρ ρ

λ ρ ρ

< ∀ ∈ < = =

d r

d r

ρ ρ ρ ρρ ρ

(4.43)

car sur la ligne de capacité ρ = ρc la valeur propre λ2 est constante et égale à Vc et la direction du vecteur propre associé conserve ρ.

Le premier champ est effectivement véritablement non-linéaire. Le deuxième champ l'est également, sauf sur la ligne de capacité ; il est alors qualifié sur cette ligne de champ de linéairement dégénéré, c'est-à-dire, pour un ensemble d'états S donné, tel que :

( ) ( ). 0 i i Sλ ≡ ∀ ∈d rρ ρ ρ (4.44)

On va revenir sur ce point dans le paragraphe suivant.

3.2.2 Trafic congestionné

En congestion, les propriétés des champs sont particulières. En effet, la première valeur propre est constante quel que soit l'état de trafic congestionné. Le premier champ est donc linéairement dégénéré en congestion.

Cette propriété est due à l'hypothèse que nous avons faite de décroissance linéaire du débit avec la densité.

53 Voir pour la preuve dans le cas d'un flux quadratique, ce qui est le cas de notre modèle en partie fluide [Benzoni–Gavage et Colombo, 2003].

Page 110: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

108

Quant au deuxième champ, la direction du vecteur propre (4.22) conserve la densité totale. Or à densité totale égale, la vitesse du trafic est constante ; de plus, la deuxième valeur propre est égale à la vitesse du trafic en congestion. Par conséquent, le deuxième champ caractéristique est également linéairement dégénéré en partie congestionnée, à laquelle dans le cas présent on peut joindre la ligne de capacité ρ = ρc comme nous l'avons vu précédemment.

Cette propriété est due à l'hypothèse phénoménologique formulée précédemment d'égalité des vitesses entre les classes de trafic en situation de congestion.

Cela conduira pour les deux champs en congestion à des discontinuités spécifiques, dites ondes de contact ; ces ondes relient, en vérifiant la condition de Rankine-Hugoniot, des états de trafic dont les valeurs propres du champ linéairement dégénéré considéré sont égales par une discontinuité de vitesse égale auxdites valeurs propres. Par conséquent, la discontinuité est dans le plan (t,x) parallèle aux caractéristiques des états qu'elle sépare. Dans notre cas particulier, la 2-onde de contact, reliée à la deuxième valeur propre qui est égale à la vitesse du trafic, sépare dans notre modèle des états de trafic à une vitesse égale à cette deuxième valeur propre, donc à celle des véhicules des états qu'elle sépare.

Une des propriétés des courbes de contact est qu'elles coïncident à la fois avec les lieux de Hugoniot et les courbes intégrales, et qu'elles peuvent être parcourues (au sens entropique) dans les deux sens.

Pour plus de facilité et afin de prendre en compte l'existence de ces courbes de contact, on étend le critère d'entropie (4.41) en ôtant la stricte inégalité :

( ) ( )g di isλ λ≥ ≥ρ ρ (4.45)

3.2.3 Définitions des courbes de chocs et de raréfactions admissibles

A l'aide des considérations ci-dessus quant à l'admissibilité des discontinuités ou des transitions continues entre états, nous pouvons définir à partir des lieux de Hugoniot et des courbes intégrales les courbes de chocs et de raréfaction admissibles entropiquement.

Courbes de choc

On peut montrer ([Benzoni-Gavage et Colombo, 2003]) que dans le cas d'un flux quadratique (comme c'est le cas ici en partie fluide de trafic) la partie de la courbe de Hugoniot qui est admissible et qui constitue la courbe de choc est celle pour laquelle il y augmentation de la densité totale ρ.

On définit donc les deux courbes de 1-choc et de 2-choc suivant les deux champs considérés par :

La courbe de i-choc passant par un état de trafic ρg de X est définie par la courbe :

( ) ( ) ( ) ( ) ; tel que g d d g d giS X s f f s= ∈ ∃ ∈ − = −ρ ρ ρ ρ ρ ρ (4.46)

avec ρg ≥ ρd, et qui est tangente au vecteur propre ri(ρg) en ρg.

Page 111: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

109

ρ1

ρ 2

ri(G)

G

Si(G)

Figure 4-6 : Exemple d'une courbe de choc

Tous les états de trafic situés sur la i-courbe de choc de G peuvent être reliés par une onde de choc, c'est-à-dire une discontinuité spatio-temporelle, de type i à l'état de trafic G.

Il existe par ailleurs une propriété particulière du modèle pour les i-chocs reliant deux états de trafic fluides ; elle est due à la forme quadratique du flux. Dans ce cas, le vecteur reliant ces deux états est colinéaire au vecteur propre du champ i au milieu du segment constitué par ces deux états, et la vitesse du choc est égale à la valeur propre i en ce même point :

( ) ( ) ( )

( )

2Si et , , alors

// et 2 2

d g g d fli

g d g dg d

i i

S X

s λ

∈ ∈

+ + − = r

ρ ρ ρ ρ

ρ ρ ρ ρρ ρ (4.47)54

Courbes de raréfaction

Il s'agit de la partie des courbes intégrales respectant la condition d'entropie (4.45). Par conséquent, Ri(ρg) est définie comme la partie de la courbe intégrale du vecteur

propre ri, passant par ρg et pour laquelle λi > λi(ρg).

ρ1

ρ 2

GRi(G)

Figure 4-7 : Exemple d'une onde de raréfaction

54 Un résultat également démontré pour un flux quadratique dans [Benzoni-Gavage et Colombo, 2003].

Page 112: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

110

Tous les états de trafic situés sur la i-courbe de raréfaction de G peuvent être reliés par une onde de raréfaction, c'est-à-dire une variation continue des états de trafic en suivant cette même courbe de raréfaction, de type i, avec l'état G.

Cas particuliers des ondes de contacts

Ceci concerne les états de trafic situés en congestion. Pour de tels états, les deux champs caractéristiques sont linéairement dégénérés et les transitions dans la zone de congestion se font sous forme d'ondes de contact Ci.

Ainsi, pour un état de trafic congestionné ρg, la courbe de 1-contact s'exprime selon :

( ) 1 1 22 1 ; g gg d cg d dC X ρ ρ ρ ρ= ∈ =ρ ρ (4.48)

ce qui traduit la conservation de la composition du trafic. Toutefois, on pourra considérer que cette onde de contact est une onde de choc de vitesse particulière (car égale à la vitesse - Vca des caractéristiques de part et d'autre de la discontinuité) quand l'état d'arrivée est tel que ρd

> ρg, et une onde de raréfaction (d'étendue spatiale nulle) quand ρd < ρg.

Nous reviendrons sur ce point avec la Figure 4-11.

De façon similaire, pour un état de trafic ρg en congestion, la courbe de 2-contact s'exprime selon :

( ) 2 ; g d cg d gC X ρ ρ= ∈ =ρ ρ (4.49)

ce qui traduit la conservation de la densité totale, et donc ici de la vitesse du trafic (cf. équation (4.21)). De la même façon que pour le premier champ, on peut considérer que cette onde de contact est une onde de choc de vitesse particulière, égale à la vitesse du trafic des états qu'elle sépare, quand ψd < ψg, et une onde de raréfaction, d'étendue spatiale nulle, quand ψd > ψg.

Nous reviendrons sur ce point avec la Figure 4-14.

3.3 Courbes de Lax et résolution du problème de Riemann

Nous avons vu précédemment que les deux états de trafic initiaux constituant le problème de Riemann (4.14) ρg et ρd ne peuvent pas, dans le cas général, continués d'être séparés par une discontinuité ou une unique onde de raréfaction à t > 0 ; pour que cela soit possible, il faudrait que ρd se trouve sur l'une des courbes de choc ou l'une des courbes de raréfaction de ρg, ce qui n'est pas le cas de façon générale.

La résolution du problème (4.14) nécessite donc de trouver un état intermédiaire ρint qui puisse être relié à la fois à l'état amont ρg et à l'état aval ρd, et ce par une seule transition (choc ou raréfaction). Cet état intermédiaire doit donc se trouver sur une courbe de Lax (1 ou 2, choc ou raréfaction) de l'état ρg et être tel que l'état ρd se trouve sur une de ses propres courbes de Lax (2 ou 1 selon la nature de la première transition, choc ou raréfaction).

Page 113: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

111

ρ1

ρ 2

G

D

I

Li(G)

Lj(I)

Figure 4-8 : Principe de résolution d'un problème de Riemann entre G et D

par l'introduction d'un état intermédiaire I

3.4 Tracé des courbes de choc et de raréfaction

Dans ce paragraphe nous allons tracer les courbes de Lax admissibles, constituées des courbes de choc et de raréfaction définies précédemment. Ce sont ces courbes que nous utiliserons dans la partie 5 de ce chapitre afin de résoudre les différents problèmes de Riemann qui se poseront lors de la mise en œuvre du modèle.

3.4.1 Valeurs numériques utilisées

Dans la suite, on prend les valeurs numériques suivantes :

1

2

35 /

25 /

20 /

3

1/2

c

V m s

V m s

V m s

N

α

=

=

=

=

=

(4.50)

Ces valeurs correspondent à la phénoménologie mise en évidence par des données terrain au chapitre 3. Cependant, la valeur prise ici pour α, rapport entre les densités critique et maximale, l'a été par souci de lisibilité des graphiques, afin de ne pas rendre la zone fluide trop petite ; ce choix ne modifie pas les conclusions.

3.4.2 Courbes du premier champ caractéristique

On trace ici pour différents types d'états de trafic les courbes de choc et de raréfaction liés à la première valeur propre.

1-onde de choc pour un état fluide

Pour quelques états de trafic ρg fluides (non situés sur les frontières ρi = 0 toutefois), on trace les courbes de 1-choc dans le plan des phases (ρ1, ρ2).

Page 114: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

112

ρ1

ρ 2

ρc

ρmax

Figure 4-9 : Courbes S1 de 1-choc pour états de trafic fluides

Tous les états de trafic situés sur la courbe de 1-choc d'un état de trafic donné peuvent être reliés par une discontinuité (1-onde de choc) spatio-temporelle avec cet état.

Toutes les courbes de 1-choc sortent de la zone fluide et traversent complètement la zone de congestion jusqu'à la densité maximale ρ = ρmax. Elles conduisent à une augmentation de la densité totale, donc à une baisse des vitesses, ainsi qu'à une augmentation de la densité en véhicules légers.

Dans le cas ρ = ρc, la courbe de 1-choc est une courbe de 1-contact conservant la composition du trafic ψ.

1-onde de raréfaction pour un état fluide

Pour des états fluides, les courbes de 1-raréfaction sont les suivantes :

ρ1

ρ 2

ρc

Figure 4-10 : Courbes R1 de 1-raréfaction pour des états de trafic fluides

Toutes les courbes restent en fluide et se dirigent vers l'axe des véhicules légers ρ2 = 0 ; elles sortent du domaine pour une densité en véhicules légers ρ1 entre 0 et ρ1

omb (le point ombilical figure sur cet axe par une croix). Elles conduisent à une baisse de la densité totale, donc à une augmentation des vitesses, et à une diminution des densités de véhicules légers et de poids lourds jusqu'à disparition de ces derniers.

Page 115: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

113

1-ondes pour un état en congestion

Pour des états de trafic en congestion, les 1-courbes de Lax (1-onde de choc et 1-raréfaction) sont les suivantes :

ρ1

ρ 2

ρc

ρmax

R1

R1=C

1

S1=C

1

Figure 4-11 : 1-courbes de Lax pour des états de trafic en congestion

Elles sont constituées en congestion d'une onde de contact55 le long de laquelle se conserve la composition du trafic ψ ; toutefois, on peut considérer qu'entre la limite de capacité ρ = ρc et le point considéré la courbe est une 1-raréfaction, et qu'entre le point considéré et la limite de densité maximale ρ = ρmax il s'agit d'une courbe de 1-choc.

Par ailleurs, les courbes traversent la limite de capacité et deviennent ensuite de véritables 1-ondes de raréfaction pour sortir du domaine sur l'axe des véhicules légers entre la densité nulle et celle du point ombilical. Elles conduisent donc également à une augmentation des vitesses par diminution des densités de véhicules légers et de poids lourds, jusqu'à disparition de ces derniers.

Conclusion

Les courbes de 1-choc contribuent à l'augmentation de la densité, donc à une diminution des vitesses. Elles font augmenter les deux densités partielles.

Les courbes de 1-raréfaction contribuent à la diminution de la densité, donc à une augmentation des vitesses. Le long de ces courbes, les deux densités partielles diminuent.

Ces 1-courbes vont donc permettre une adaptation des vitesses du trafic aux nouvelles conditions rencontrées.

3.4.3 Courbes du deuxième champ caractéristique

2-onde de choc pour un état fluide

Pour quelques points ρg situés en état fluide de trafic (hormis les frontières ρi = 0), on trace quelques courbes de 2-choc, qui sont présentées sur la Figure 4-12.

55 Les ondes de contact seront par la suite tracées en "-.".

Page 116: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

114

ρ1

ρ 2

ρc

Figure 4-12 : Courbe S2 de 2-choc pour des états de trafic fluides

Toutes les courbes de 2-choc restent dans la zone fluide et sortent du domaine sur l'axe des véhicules légers pour une densité comprise entre celle du point ombilical et ρc. Elles conduisent à une augmentation de la densité totale, donc à une baisse des vitesses, et à une augmentation de la densité en véhicules légers et à une baisse de la densité en poids lourds.

2-onde de raréfaction pour un état fluide

Pour des points en fluide, les courbes de 2-raréfaction sont les suivantes :

ρ1

ρ 2

ρc

Figure 4-13 : Courbes R2 de 2-raréfaction pour des états de trafic fluides

Toutes les courbes restent en fluide et se dirigent vers l'axe des poids lourds ρ1 = 0 ; elles sortent du domaine pour une densité en poids lourds ρ2 quelconque. Elles conduisent à une diminution de la densité totale, donc à une augmentation des vitesses ; elles amènent par ailleurs à une diminution de la densité en véhicules légers et, de façon moins intuitive, à une augmentation de la densité en poids lourds.

Page 117: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

115

2-ondes pour un état en congestion

Pour des états de trafic situés en congestion, on a les 2-courbes de Lax (2-contacts) suivantes :

ρ1

ρ 2

ρc

ρmax

R2=C

2

S2=C

2

Figure 4-14 : 2-courbes de Lax pour des états de trafic en congestion

Elles restent uniquement en congestion. Comme noté plus haut au paragraphe 3.2.3 il s'agit d'ondes de contact le long desquelles se conserve la densité totale, donc la vitesse du trafic, et que l'on peut considérer comme composées d'une courbe de 2-choc (pour les états de trafic de composition en poids lourds inférieure à celle de ρg) et d'une courbe de 2-raréfaction (pour les états de trafic de composition en poids lourds supérieure à celle de ρg).

Dans les cas particuliers pour lesquels ρ = ρc et ρ = ρmax, ces 2-contacts se confondent avec les limites de capacité et de densité maximale.

Conclusion

Les courbes de 2-choc augmentent légèrement la densité totale, donc diminuent légèrement les vitesses. La densité partielle des véhicules légers augmente, alors que celle des poids lourds diminue.

La fraction de poids lourds diminue donc avec les 2-chocs.

Les courbes de 2-raréfaction diminuent légèrement la densité totale, donc augmentent légèrement les vitesses. La densité partielle des véhicules légers diminue, alors que celle des poids lourds augmente.

La fraction de poids lourds augmente donc avec les 2-raréfactions.

Ces 2-courbes vont donc permettre une adaptation de la composition du trafic aux nouvelles conditions rencontrées, sans modifier beaucoup les vitesses.

3.4.4 Cas particulier des frontières du domaine

Frontières de capacité et de densité maximale

Les cas ρ = ρc et ρ = ρmax n'appellent pas de commentaires particuliers ; on a souligné plus haut la coïncidence des 2-courbes de Lax avec les frontières pour des points sur ces frontières, ainsi que l'orientation du premier vecteur propre de part et d'autre de la ligne de capacité (cf. paragraphe 2.3.3). Il reste à examiner les frontières ρi = 0.

Page 118: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

116

Axe des poids lourds

Sur la frontière ρ1 = 0, les états de trafic sont composés uniquement de poids lourds :

• dans le cas où l'état considéré ρg est fluide (cf. Figure 4-15), la 1-courbe de Lax est constituée par la frontière ρ1 = 0 ; il s'agit d'une 1-choc entre le point considéré et l'ordonnée ρ2 = ρc, d'une 1-raréfaction entre le point considéré et l'ordonnée ρ2 = 0. La 2-courbe de Lax n'est constituée, dans le domaine, que par la 2-choc qui reste en zone fluide et coupe l'axe des véhicules légers ρ2 = 0, au-delà du point ombilical. La courbe de 2-raréfaction est en dehors du domaine.

ρ1

ρ 2

ρc

ρmax

S1

R1

S2G

Figure 4-15 : Courbes de Lax pour un état de trafic fluide avec 100% de PL

• dans le cas où l'état considéré ρg est en congestion (cf. Figure 4-16), la 1-courbe de Lax est constituée par la frontière ρ1 = 0 ; il s'agit d'une 1-choc (plus précisément un 1-contact) entre l'état considéré et l'ordonnée ρ2 = ρmax, d'une 1-raréfaction entre l'état considéré et l'ordonnée ρ2 = 0 (plus précisément un 1-contact jusqu'à la limite de capacité puis une raréfaction). La 2-courbe de Lax est constituée par l'onde de contact C2 (assimilable à un 2-choc) qui reste en congestion et conserve la vitesse :

ρ1

ρ 2

ρc

ρmax

S1

R1

S2=C

2

G

Figure 4-16 : Courbes de Lax pour un état de trafic en congestion avec 100% de PL

Page 119: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

117

Axe des véhicules légers

Sur la frontière ρ2 = 0, les états de trafic sont composés uniquement de véhicules légers :

• si l'état ρg est situé à gauche du point ombilical (ρ1g < ρ1

omb) (cf. Figure 4-17), il y a dans le domaine : la 2-raréfaction R2 confondue avec l'axe des véhicules légers jusqu'à ρ1 = 0 ; une courbe de 1-choc S1 qui rentre dans le domaine pour revenir sur l'axe ρ2 = 0 avant la capacité mais après le point ombilical. Enfin, les états situés sur l'axe ρ2 = 0 avec ρ1

d > ρ1g peuvent également être reliés avec l'état de départ par une courbe de choc : il

s'agit de la 2-choc S2 si ρd se trouve avant le point où la 1-choc retraverse l'axe ρ2 = 0, d'une 1-choc S1 après. La courbe de 1-raréfaction est en dehors du domaine.

ρ1

ρ 2

ρc

ρmax

R2

S2 S

2S

1

G Figure 4-17 : Courbes de Lax pour un état de trafic fluide avec 100% de VL

et avec ρ1g < ρ1

omb

• si l'état ρg est situé à droite du point ombilical mais en fluide (ρ1omb < ρ1

g < ρc) (cf. Figure 4-18), il y a dans le domaine : la 2-raréfaction R2 qui reste en fluide et va couper l'axe des poids lourds ; une 1-choc S1 confondue avec l'axe des véhicules légers entre le point considéré et la densité maximale ; une 1-raréfaction R1 confondue avec l'axe des véhicules légers entre le point considéré et le point ombilical. La courbe de 2-choc est en dehors du domaine.

ρ1

ρ 2

ρc

ρmax

R2

S1

R1

G Figure 4-18 : Courbes de Lax pour un état de trafic fluide avec 100% de VL et avec

ρ1g > ρ1

omb

Page 120: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

118

• si l'état ρg est situé en congestion (ρc < ρ1g)(cf. Figure 4-19), il y a dans le domaine :

la 2-raréfaction ou 2-contact conservant la densité totale ; la 1-raréfaction R1 confondue avec l'axe des véhicules légers entre l'état considéré et le point ombilical (qui est plus précisément un contact C1 jusqu'à la ligne de capacité) ; la 1-choc S1 confondue avec l'axe des véhicules légers entre l'état considéré et la densité maximale (qui est plus exactement une onde de contact C1) :

ρ1

ρ 2

ρc

ρmax

R1 R

1=C

1

R2=C

2

S1=C

1

G Figure 4-19 : Courbes de Lax pour un état de trafic avec 100% de VL en congestion

3.5 Conclusion

Ce paragraphe a permis de construire l'ensemble des courbes de Lax qui serviront de base à la résolution des problèmes de Riemann rencontrés dans notre modèle. Cette résolution sera abordée en détails dans le paragraphe 5 de ce chapitre.

Avant cela, nous allons nous intéresser, à la lumière notamment des réflexions menées dans ce paragraphe, sur l'une des propriétés physiques que l'on attend du comportement de notre modèle : l'anisotropie du trafic.

4 Caractère anisotropique du modèle

A cette étape de construction de la résolution du modèle, il est pertinent de vérifier le caractère anisotropique de ce dernier. En effet, une exigence fréquente de comportement d'un modèle de trafic est que celui-ci ne doit réagir qu'aux événements se produisant devant lui et jamais à ceux se produisant derrière. La non-anisotropie des premiers modèles dits d'ordre supérieur (notamment celui de [Payne, 1971]) a d'ailleurs conduit aux critiques virulentes de ce type de modèle par [Daganzo, 1995, #2] et à la fondation d'une nouvelle famille de modèles d'ordre supérieur évoquée au chapitre 2 paragraphe 2.3.1.

A priori, il est nécessaire que les modèles de trafic multi-classes présentent également ce caractère anisotropique. Les considérations effectuées au paragraphe précédent vont nous permettre de vérifier le bon comportement anisotropique du modèle :

Page 121: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

119

ce comportement dépend de la propagation de l'information dans le modèle, donc notamment de la vitesse des transitions entre états de trafic.

4.1 Une propriété nécessaire du modèle

Dans le cas d'un modèle d'écoulement du trafic, l'information trafic est générée par la présence des véhicules. Par conséquent, un modèle de trafic se doit a priori d'être anisotropique : aucune information d'écoulement de trafic ne doit se propager plus vite que les véhicules qui la portent [Zhang, 1999].

Dans le cas d'un trafic s'écoulant sur une seule voie, cette propriété d'anisotropie est une exigence évidente. Pour le cas d'un modèle de trafic décrivant l'écoulement séparément sur chacune des voies, l'exigence d'anisotropie ne peut s'appliquer qu'à l'écoulement de chacune des voies et non au trafic global.

Ainsi, [Zhang, 2003] a montré sur la base de considérations théoriques que dans le cas d'un modèle macroscopique multi-voies il était possible que de l'information de trafic se propage de façon non-anisotropique ; cela se produit ainsi si l'on caractérise le trafic global comme une moyenne des trafics de chaque voie. De plus, [Zhang, 2003] souligne que la représentation explicite des changements de file et des dépassements dans un modèle macroscopique de trafic peut conduire à la représentation de phénomènes effectivement non-anisotropiques, dans le cas par exemple où des véhicules se rabattent sur les voies lentes sous la pression de véhicules suiveurs plus rapides.

Notre modèle vise à représenter un écoulement sur une infrastructure à plusieurs voies mais ne représente pas le trafic voie par voie. De plus, aucune influence effective du trafic amont, même dans les phases de dépassement que nous aurons à intégrer par la suite, n'est explicitement représentée. Par conséquent, il apparaît nécessaire que le modèle développé satisfasse à un fonctionnement anisotropique.

4.2 Critères d'anisotropie

Dans un modèle de trafic, l'information se propage à la fois sous la forme d'ondes caractéristiques et de discontinuités. Mathématiquement, la condition nécessite donc, d'une part que les vitesses caractéristiques du trafic soient plus faibles que celles des véhicules, d'autre part que la vitesse des discontinuités (chocs) soit plus faible que celles des véhicules des états de trafic que ces discontinuités séparent [Zhang, 2003].

Par conséquent, dans le cas de notre modèle, la condition d'anisotropie s'écrit selon :

∀ρ ( ) ( ) ( ) ( )1 1 2 1 et v vλ λ≤ ≤ρ ρ ρ ρ (4.51)

et, dans le cas des chocs séparant des états de trafic ρg et ρd et dont on notera la vitesse s, selon :

( )11min ,g ds v v≤ (4.52)

Page 122: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

120

4.3 Anisotropie du modèle proposé

Il s'agit ici de démontrer d'une part la relation (4.51) sur les valeurs propres et d'autre part la relation (4.52) sur la vitesse des chocs.

4.3.1 Vitesses caractéristiques et anisotropie

La validité des propriétés (4.51) pour notre modèle a été déjà discutée aux paragraphes 2.3.2 et 2.3.3. Ces conditions sont remplies de façon évidente pour les états congestionnés de trafic, et il est assez aisé de les démontrer en situation fluide56.

4.3.2 Vitesses des chocs et anisotropie

Dans le cas d'une onde de 1-choc, la vitesse s1 de la discontinuité entre deux états de trafic hétérogène ρg et ρd peut s'exprimer notamment selon :

( ) 1 1 1 11

1 1,

g gd dg d

gdv v

sρ ρρ ρ

−=−

ρ ρ (4.53)

Or les courbes de 1-choc conduisent à une augmentation de la densité de véhicules légers et à une diminution des vitesses des flux (cf. paragraphe 3.4.2) : le dénominateur est donc positif et l'on peut majorer s1 de la façon suivante :

( ) 1 1 111

1 1,

gd d dg d

gdv v

sρ ρρ ρ

−≤−

ρ ρ (4.54)

et l'on vérifie donc la condition (4.52) puisque l'on a :

( )1 1 1, gg d ds v v≤ ≤ρ ρ (4.55)

Ceci signifie par ailleurs que les véhicules légers traversent les 1-ondes de choc.

De façon similaire, dans le cas d'une onde de 2-choc, et toujours en utilisant l'évolution croissante de la densité de véhicules légers et décroissante des vitesses au travers de ce type de discontinuité, on montre que :

( )2 1 1, gg d ds v v≤ ≤ρ ρ (4.56)

Ceci signifie par ailleurs que les poids lourds traversent les 1-ondes de choc.

4.3.3 Conclusion

La condition (4.52) est ainsi assurée : le modèle d'écoulement de trafic hétérogène proposé est donc bien anisotrope.

56 Voir la preuve pour un flux quadratique, ce qui est le cas de notre modèle pour les états fluides de trafic, dans [Benzoni-Gavage et Colombo, 2003].

Page 123: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

121

5 Résolution du problème de Riemann (cas général)

Dans cette partie nous utilisons les courbes de Lax construites au paragraphe 3 afin de résoudre le problème de Riemann ; ceci est réalisé pour un certain nombre de problèmes types. Auparavant, dans le premier sous-paragraphe, nous revenons et complétons les principes de résolution du problème de Riemann.

5.1 Principes

Nous avons vu précédemment que la résolution du problème (4.14) revient à trouver l'état intermédiaire ρint qui est relié à la fois à l'état amont ρg et à l'état aval ρd, et ce par une seule transition (choc ou raréfaction). Cet état intermédiaire se trouve sur une courbe de Lax (1 ou 2) de l'état ρg et est tel que l'état ρd se trouve sur une des courbes de Lax de cet état (2 ou 1 selon la nature de la première transition) (cf. Figure 4-8).

Quel doit être l'enchaînement des types de transition ? Dans le plan (t,x), pour une date t > 0 et pour des x croissants, on rencontre d'abord l'état amont, puis l'état intermédiaire après la première transition, puis l'état aval après la deuxième transition, comme le met en évidence la Figure 4-20 :

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d)

Etat intermédiaire I=(ρ1int,ρ

2int)

x=0

Première transition

Deuxième transition

Temps t

Esp

ace

x

Figure 4-20 : Résolution du problème de Riemann

(les transitions peuvent être des ondes de raréfaction [exemple première transition] ou des ondes de choc [exemple deuxième transition])

La première transition doit donc nécessairement être plus lente que la deuxième.

Le classement (4.33) des valeurs propres (la première est plus petite que la deuxième) pour un état de trafic donné laisse à penser que l'enchaînement doit être une 1-onde puis une 2-onde. Certes la condition de vitesse de propagation est relative aux transitions entre états et non aux valeurs propres, mais la propriété (4.33), associée aux propriétés (4.55), (4.56) et à deux autres relations que nous allons montrer va nous permettre de démontrer que l'enchaînement est effectivement une 1-onde suivie d'une 2-onde.

Page 124: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

122

5.1.1 Résultats préliminaires

Un raisonnement analogue à celui du paragraphe 4.3.2 nous conduit à exprimer la vitesse d'une 1-choc existant entre deux états de trafic ρg et ρd selon :

( ) 2 2 2 21

2 2,

g gd dg d

gdv v

sρ ρρ ρ

−=−

ρ ρ (4.57)

Or les courbes de 1-choc conduisent à une augmentation de la densité de poids lourds et à une diminution des vitesses des flux (cf. paragraphe 3.4.2) : le dénominateur est donc positif et l'on peut majorer s1 de la façon suivante :

( ) 2 2 221

2 2,

gd d dg d

gdv v

sρ ρρ ρ

−≤−

ρ ρ (4.58)

et l'on a donc :

( )1 2 2, gg d ds v v≤ ≤ρ ρ (4.59)

Ceci signifie en particulier que les poids lourds traversent les 1-ondes de choc.

De façon similaire, dans le cas d'une onde de 2-choc, on utilise cette fois l'évolution décroissante de la densité de poids lourds et celle décroissante des vitesses au travers de ce type de discontinuité (cf. paragraphe 3.4.3). On minore alors s2 de la façon suivante :

( ) 2 2 2 22

2 2,

g g gdg d

gdv v

sρ ρρ ρ

−≥−

ρ ρ (4.60)

et l'on a donc :

( )2 22, gg d ds v v≥ ≥ρ ρ (4.61)

Cela signifie en particulier que les poids lourds sont rattrapés par les 2-ondes de choc.

5.1.2 Chocs, raréfactions et diagramme espace-temps

Rappel

Lors d’un choc du champ caractéristique i, les deux états ρg et ρd sont séparés par une simple discontinuité dont la vitesse si est telle que :

( ) ( ) ( ),d g d gi i isλ λ≤ ≤ρ ρ ρ ρ (4.62)

Ceci est illustré par la Figure 4-21. Lors d’une onde de raréfaction du champ caractéristique i, les deux états ρg et ρd

sont séparés par une zone de variation continue des états de trafic le long de la courbe intégrale i et dont l’étendue dans l’espace (t,x) est délimitée par les droites de pente λi(ρg) et λi(ρd). Ceci est illustré par la Figure 4-22.

Page 125: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

123

i−onde de choc

si

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d)

x=0

Temps tE

spac

e x

Figure 4-21 : Onde de choc dans le plan (t,x)

i−onde de raréfaction

λi(G)

λi(D)

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d)

x=0

Temps t

Esp

ace

x

Figure 4-22 : Onde de raréfaction dans le plan (t,x)

Remarque

Avec les considérations menées plus haut sur les relations entre les vitesses d'ondes de choc et celles des véhicules (équations (4.55), (4.56), (4.59) et (4.61)), et les relations entre les valeurs propres et les vitesses des véhicules étudiées au paragraphe 2.3.3 (notamment l'équation (4.35)), on note que :

• les véhicules légers traversent les 1 et 2-ondes (sauf en congestion pour ces dernières : les trajectoires sont parallèles aux 2-contacts) ;

• les poids lourds traversent les 1-ondes mais sont rattrapés par les 2-ondes (sauf en congestion pour ces dernières : les trajectoires sont parallèles aux 2-contacts).

Ceci explique notamment pourquoi les 2-ondes permettent de modifier la composition du trafic, étant donné que seuls les véhicules légers les traversent vers l'avant.

5.1.3 Classement des ondes dans le problème de Riemann

On va montrer dans cette partie que la succession 1-onde puis 2-onde est possible quel que soit le problème de Riemann ; autrement dit, que la vitesse de la première transition est plus faible que celle de la deuxième, quels que soient les types de transition mis en œuvre.

Page 126: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

124

Succession 1-choc et 2-choc

Supposons que l’état intermédiaire soit séparé de l’état amont par une courbe de 1-choc et de l’état aval par une courbe de 2-choc. La première transition, de vitesse s1(ρg, ρint), est nécessairement plus lente que la deuxième, de vitesse s2(ρint, ρd) car :

( )( )

( ) ( )( )

( )4.57 4.59

1 2 2 2, et ,g int int int int ds v v s≤ ≤ρ ρ ρ ρ ρ ρ (4.63)

Succession 1-choc et 2-raréfaction

Supposons que l’état intermédiaire soit séparé de l’état amont par une courbe de 1-choc et de l’état aval par une courbe de 2-choc. La première transition, de vitesse s1(ρg, ρint) est nécessairement plus lente que la deuxième, dont la vitesse la plus faible est λ2(ρint), car :

( )( )

( ) ( )( )

( )4.57 4.33

1 2 2 2, et g int int int ints v v λ≤ ≤ρ ρ ρ ρ ρ (4.64)

Succession 1-raréfaction et 2-choc

Supposons que l’état intermédiaire soit séparé de l’état amont par une courbe de 1-raréfaction et de l’état aval par une courbe de 2-choc. La première transition, dont la vitesse la plus élevée est λ1(ρint), est nécessairement plus lente que la deuxième, de vitesse s2(ρint, ρd) car :

( )( )

( ) ( )( )

( )4.33 4.59

1 2 2 2 et ,int int int int dv v sλ ≤ ≤ρ ρ ρ ρ ρ (4.65)

Succession 1-raréfaction et 2-raréfaction

Supposons que l’état intermédiaire soit séparé de l’état amont par une courbe de 1-raréfaction et de l’état aval par une courbe de 2-raréfaction. La première transition, dont la vitesse la plus élevée est λ1(ρint), est nécessairement plus lente que la deuxième, dont la vitesse la plus lente est λ2(ρint) (voir le classement des valeurs propres (4.33)).

5.1.4 Conclusion

Pour résoudre le problème de Riemann (4.11), on cherche un état de trafic intermédiaire ρint de façon à ce qu'il soit relié à la fois au point ρg=(ρ1

g, ρ2g) par une 1-

onde et au point ρd = (ρ1d, ρ2

d) par une 2-onde. Si l'on note Li la i-courbe de Lax (réunion de la i-choc et de la i-raréfaction), on doit donc avoir :

( ) ( )1 2 et int g d intL L∈ ∈ρ ρ ρ ρ (4.66)

Ceci est illustré sur la Figure 4-23.

Page 127: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

125

ρ1

ρ 2

G

D

I

L1(G)

L2(I)

Figure 4-23 : Principe de résolution d'un problème de Riemann

par l'introduction d'un état intermédiaire I - Succession 1-onde puis 2-onde

Plus pragmatiquement, en notant Li* la i-courbe de Lax non-entropique, réunion des

parties non-entropiques des i-lieux de Hugoniot et des i-courbes intégrales, on cherche un état ρint tel que :

( ) ( )( )*1 2,int g dL L∈ ∩ρ ρ ρ (4.67)

ρ1

ρ 2

G

D

I

L1(G)

L*2(D)

Figure 4-24 : Principe de résolution d'un problème de Riemann entre G et D

par l'introduction d'un état intermédiaire I Intersection de la 1-courbe entropique de G et de la 2-courbe non-entropique de D

Les courbes de Lax non-entropiques Li*(ρd) de ρd peuvent être vues comme l'ensemble des

états de trafic ρint ayant ρd sur une de leurs courbes de Lax. On obtient deux courbes de choc et deux courbes de raréfaction distinctes, de type 1 et 2. Le type i de la courbe de Lax non-entropique est le type du vecteur propre de ρd (et non des états considérés ρint) auquel la courbe de Lax non-entropique est tangente en ρd ; en général, cela correspond au même type que la courbe de Lax entropique issue de ρint, mais des exceptions se produisent en cas de perte d'hyperbolicité. Cette difficulté sera abordée en détails lors de l'examen de l'influence des points ombilicaux dans le paragraphe 6.1.2.

Page 128: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

126

5.2 Résolution de problèmes de Riemann types pour notre modèle

La forme des courbes de Lax mise en évidence au paragraphe 3 est fortement liée au caractère congestionné ou non des états de trafic. Ainsi, l'état intermédiaire solution du problème de Riemann dépend lui-même directement du caractère congestionné ou non des états initiaux de ce problème. En particulier, étant donné qu'aucune 2-courbe de Lax ne coupe la ligne de capacité, l'état intermédiaire I est nécessaire dans le même état de trafic (fluide ou congestion) que l'état aval D.

Nous étudions ici successivement les problèmes de Riemann pour des états amont fluides ou congestionnés et des états aval fluides ou congestionnés.

5.2.1 Trafics amont et aval fluides

Dans le cas d'un problème de Riemann pour lequel l'état de trafic amont G=ρg(ρ1g,

ρ2g) est fluide et l'état de trafic aval D=ρd(ρ1

d, ρ2d) également, la forme des courbes de Lax

montre que l'état intermédiaire I=ρint(ρ1int, ρ2

int) est également un état fluide, car aucune 2-courbe de Lax ne traverse la ligne de capacité. Selon la position relative des deux états initiaux, toutes les combinaisons de transitions sont possibles : 1-choc ou 1-raréfaction suivie d'un 2-choc ou d'une 2-raréfaction (cf. partie (a) des Figure 4-25 à Figure 4-28).

Dans tous les cas, la première transition est plutôt une adaptation de la vitesse (la distance avec la ligne de capacité est similaire pour les états intermédiaire et aval) alors que la deuxième est plutôt une adaptation de la composition du trafic (augmentation ou diminution de la part de poids lourds).

La première transition est un choc quand on augmente la densité totale, une raréfaction sinon. La deuxième transition est un choc quand on diminue la fraction de poids lourds, une raréfaction sinon

Les diagrammes (t,x) correspondants sont donnés par les parties (b) des Figure 4-25 à Figure 4-28.

ρ1

ρ 2

G

D

I

ρmaxρ

c

S1(G)

S2(I)

(a)

S1

S2

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d) I=(ρ

1int,ρ

2int)

x=0

S2

(b)

Temps t

Esp

ace

x

Figure 4-25 : Problème de Riemann pour des états amont et aval fluides :

1-choc puis 2-choc (a) Etat intermédiaire dans le plan des phases

(b) Diagramme (t,x)

Page 129: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

127

ρ1

ρ 2

G

D

I

ρmaxρ

c

S1(G)

R2(I)

(a)

S1

R2

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d) I=(ρ1

int ,ρ2int )

x=0

(b)

Temps t

Esp

ace

x

Figure 4-26 : Problème de Riemann pour des états amont et aval fluides :

1-choc puis 2-raréfaction (a) Etat intermédiaire dans le plan des phases

(b) Diagramme (t,x)

ρ1

ρ 2

G

D

I

ρmaxρ

c

R1(G)

S2(I)

(a)

R1

S2

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d)

I=(ρ 1int ,ρ 2

int )

x=0

(b)

Temps t

Esp

ace

x

Figure 4-27 : Problème de Riemann pour des états amont et aval fluides :

1-raréfaction puis 2-choc (a) Etat intermédiaire dans le plan des phases

(b) Diagramme (t,x)

ρ1

ρ 2

GD I

ρmaxρ

c

R1(G)

R2(I)

(a)

R1

R2

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d)

I=(ρ 1int ,ρ 2

int )

x=0

(b)

Temps t

Esp

ace

x

Figure 4-28 : Problème de Riemann pour des états amont et aval fluides : 1-raréfaction puis 2-raréfaction

(a) Etat intermédiaire dans le plan des phases (b) Diagramme (t,x)

Page 130: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

128

5.2.2 Trafic amont fluide, trafic aval congestionné

Il s'agit typiquement du cas pour lequel un trafic de véhicules arrive sur une queue de bouchon. La forme des courbes de Lax montre que l'état intermédiaire ρint est nécessairement situé en congestion, aucune 2-courbe de Lax ne traversant la ligne de capacité. La combinaison de transitions est nécessairement une courbe de 1-choc suivie d'une 2-choc ou d'une 2-raréfaction ; dans les deux cas cette dernière se trouve en congestion et est donc une onde de contact (cf. Figure 4-29 (a)). Par conséquent, les états de trafic intermédiaire et aval ont la même vitesse de trafic (car même valeur de ρ). Les états de trafic correspondant sur un diagramme (t,x) sont donnés par la Figure 4-29 (b).

L'état intermédiaire représente ainsi physiquement l'extension de la file d'attente initiale représentée par l'état D. Dans le cas où l'état aval est un état D' de même densité que l'état D, les transitions et leurs vitesses sont strictement les mêmes.

ρ1

ρ 2

G

D

D’

max

ρc

S1(G)

C2(I)

(a)

S1

C2

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d) ou D’=(ρ

1d’,ρ

2d’)

I=(ρ1int,ρ

2int)x=0

(b)

Temps t

Esp

ace

x

Figure 4-29 : Problème de Riemann pour un état amont fluide et un état aval en

congestion (a) Etat intermédiaire dans le plan des phases

(b) Diagramme (t,x)

La vitesse de la 2-onde de contact est égale à la vitesse (commune pour tous les véhicules) des états congestionnés de trafic qu'elle sépare. Elle est donc toujours positive et marque la séparation entre deux compositions de trafic différentes, logiquement à la même vitesse de déplacement que celle des véhicules composant les deux états de trafic qu'elle sépare.

La vitesse de la 1-onde de choc peut par contre être positive si les états initiaux amont et aval sont plus fluides (ou moins congestionnés), comme mis en évidence par la Figure 4-30. Dans ce cas la congestion n'est pas persistante en un lieu donné.

Page 131: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

129

ρ1

ρ 2

GD

D’

I

ρmax

ρc

S1(G)

C2(I)

(a)

S1

C2

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d) ou D’(ρ

1d’,ρ

2d’)

I=(ρ1int,ρ

2int)

x=0

(b)

Temps t

Esp

ace

x

Figure 4-30 : Problème de Riemann pour un état amont fluide et un état aval en

congestion (a) Etat intermédiaire dans le plan des phases

(b) Diagramme (t,x)

5.2.3 Trafics amont et aval congestionnés

Il s'agit de la situation de trafic dans une congestion avec deux vitesses amont et aval différentes.

Dans ce cas la forme des courbes de Lax montre que l'état intermédiaire ρint est nécessairement situé en congestion. De façon très similaire à la résolution du modèle de [Zhang et Jin, 2002], la combinaison de transitions est nécessairement une courbe de 1-contact, conservant le ratio ψ de poids lourds, suivie d'une courbe de 2-contact conservant la densité totale ρ donc la vitesse (cf. Figure 4-31 (a)).

Par conséquent, pour deux états en congestion, la vitesse de la 1-onde de contact est une constante négative (égale à -Vca) alors que la vitesse de la 2-onde de contact dépend de la vitesse du trafic de l'état aval (elle lui est égale) (cf. Figure 4-31 (b)).

L'état intermédiaire est caractérisé aisément : il a la même composition de trafic que l'état amont et la même vitesse et donc la même densité totale que l'état aval. Il représente l'adaptation du trafic amont à la vitesse du trafic aval, sans modification de sa composition, qui ne se fait qu'à travers la deuxième transition.

ρ1

ρ 2 G

D

I

ρmax

ρc

C1(G)

C2(I)

(a)

C1

C2

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d)

I=(ρ1int,ρ

2int)

x=0

(b)

Temps t

Esp

ace

x

Figure 4-31 : Problème de Riemann pour des états amont et aval en congestion

(a) Etat intermédiaire dans le plan des phases (b) Diagramme (t, x)

Page 132: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

130

On fait remarquer ici que le modèle de trafic hétérogène se comporte dans ce cas-là comme un modèle de trafic homogène au sein duquel on distinguerait deux destinations différentes des véhicules : l'état intermédiaire aurait la même vitesse que l'état aval et la même composition en termes de destination que l'état amont.

5.2.4 Trafic amont congestionné, trafic aval fluide

Il s'agit du cas pour lequel un trafic, initialement congestionné, retrouve un état fluide, comme lors du redémarrage à un feu de circulation lorsque celui-ci repasse au vert. La forme des courbes de Lax montre que l'état intermédiaire ρint est nécessairement un état fluide, aucune 2-courbe de Lax ne traversant la ligne de capacité. La combinaison de transitions est nécessairement une courbe de 1-raréfaction, suivie d'une 2-choc ou d'une 2-raréfaction.

La courbe de 1-choc traverse la ligne de capacité : par conséquent, elle s'apparente à une courbe de 1-contact dans la partie congestionnée. Ceci donne une propriété à l'état de trafic F (ρf=(ρ1

f, ρ2f)) situé à l'intersection de cette courbe et de la ligne de capacité : il a la

même composition de trafic que l'état amont congestionné. Par ailleurs, on a vu au paragraphe 2.3.3 qu'il y avait discontinuité de la première valeur propre au passage de la ligne de capacité, celle-ci étant une constante négative en congestion et étant positive en fluide. Comme mentionné au paragraphe 2.2.3, et suivant par là les remarques de [Velan et Florian, 2002], les caractéristiques intermédiaires seront supposées portées par l'état de trafic F. Cet état représente bien le redémarrage, à la capacité de la voie et dans la composition de trafic de la file d'attente, des véhicules initialement en congestion.

Selon la nature de la deuxième transition, on a donc les solutions suivantes à ce problème de Riemann :

ρ1

ρ 2

G

D

I

F

ρmax

ρc

R1(G)

S2(I) C

1(G)

(a)

C1

S2

R1

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d)

F=(ρ1f ,ρ

2f )

I=(ρ 1int ,ρ 2

int )

x=0

(b)

Temps t

Esp

ace

x

Figure 4-32 : Problème de Riemann pour un état amont en congestion et un état aval

fluide Cas avec une 2-choc

(a) Etat intermédiaire dans le plan des phases (b) Diagramme (t, x)

Page 133: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

131

ρ1

ρ 2

G

DI

F

ρmax

ρc

R1(G)

R2(I)

C1(G)

(a)

C1

R2

R1

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d)

F=(ρ1f ,ρ

2f )

I=(ρ 1int ,ρ 2

int )

x=0

(b)

Temps t

Esp

ace

x

Figure 4-33 : Problème de Riemann pour un état amont en congestion et un état aval

fluide Cas avec une 2-raréfaction

(a) Etat intermédiaire dans le plan des phases (b) Diagramme (t, x)

5.2.5 Conclusion

On a étudié ici les problèmes de Riemann types pouvant se produire lors de la résolution du modèle. Le chapitre 5 reviendra sur des situations de trafic plus particulières et soulignera alors les liens, évoqués ici, entre la solution mathématique et la physique de l'écoulement dans les diverses situations rencontrées.

6 Cas particuliers et aspects mathématiques non standard du modèle

En dépit de sa relative simplicité, un modèle d'écoulement d'un trafic hétérogène tel que celui exposé ici peut présenter un certain nombre de propriétés non standard, mettant la robustesse de son comportement en jeu ; ceci se produit dans le cas d'applications particulières du modèle. Le but de cette partie est de mettre en évidence ces difficultés potentielles.

Une première difficulté apparaît dans le cas d'états de trafic homogènes, composés d'une seule classe de véhicules : il existe alors des points qualifiés d'ombilicaux situés sur les axes du plan des phases dont nous avons parlé au paragraphe 2.2.2. Pour de tels états de trafic, le problème perd son caractère hyperbolique car les deux valeurs propres deviennent égales. Ceci est de nature à perturber la résolution du problème de Riemann dans le cas où le modèle s'applique à un trafic homogène de véhicules, et pour lequel on s'attend à ce qu'il se comporte de façon similaire au modèle LWR pour un flux homogène. On risque en particulier de voir apparaître un état intermédiaire anormalement non homogène.

Une seconde difficulté est liée à l'introduction d'une hypothèse phénoménologique supplémentaire au modèle, consistant à considérer qu'en état fluide de trafic la vitesse des poids lourds reste constante. Une telle hypothèse, fondée au regard des données expérimentales (cf. Figure 3-8), généralise l'aspect mathématique gênant de l'égalité des valeurs propres rencontré pour les points ombilicaux.

Page 134: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

132

Le but de ce paragraphe est donc de s'intéresser aux cas particuliers que sont l'application du modèle de trafic hétérogène au cas homogène d'une part, l'intégration de l'hypothèse de vitesse poids lourds constante en fluide d'autre part. Nous allons étudier les problèmes mathématiques pouvant survenir et montrer que le modèle développé reste bien posé même dans ces cas particuliers.

6.1 Application du modèle à un trafic homogène

Une des propriétés souhaitables du modèle est qu'il puisse s'appliquer au cas d'un trafic homogène : on cherche alors à ce qu'il présente un comportement similaire à celui du modèle LWR scalaire pour un trafic constitué d'un seul type de véhicules.

L'application du modèle à un trafic homogène pose le problème de la coïncidence des deux valeurs propres et des deux vecteurs propres, problème qui peut se produire en des points particuliers, dits ombilicaux, situés en trafic fluide.

6.1.1 Trafic homogène constitué de poids lourds uniquement

Dans ce cas on fixe ρ1 = 0. Les deux valeurs propres et les deux vecteurs propres s'égalent, en trafic fluide, pour le point ombilical dont la densité de poids lourds est :

1 22

1 22omb

cc

V VV V V

ρ ρ −=− −

(4.68)

Cet état de trafic, comme noté au paragraphe 2.2.2, se trouve en congestion ou sur la ligne de capacité, et non en trafic fluide. Par conséquent, la perte d'hyperbolicité n'est pas effective dans le modèle.

Pour un tel trafic homogène, les valeurs propres, quelle que soit la densité, s'expriment simplement, selon :

( )

( )

( ) ( )( )

2 21 22

2

1 12 11 1

1

vJ

vJ v

ρλρ

ρλρ

∂ = = ∂ ∂ = = = ∂

ρ

ρ ρ (4.69)

Les courbes de Lax correspondantes ont été présentées sur les Figure 4-15 et Figure 4-16.

Le premier vecteur propre est quant à lui toujours parallèle à l'axe ρ1 = 0 ; ceci est très important, car cela assure la coïncidence des courbes de 1-choc non-entropiques avec les courbes de 1-raréfaction le long de cet axe et signifie donc que si ρd est sur la 1-choc de ρg, alors ρg est sur la 1-choc non-entropique de ρd.

Le problème de Riemann se résout alors à l'aide d'une seule transition, qui est de deux types selon la position des états initiaux ρg et ρd :

• si ρ2g < ρ2

d, alors la solution du problème de Riemann est un 1-choc de vitesse s1, comprise entre λ1(ρd) et λ1(ρg) ;

• si ρ2g > ρ2

d, alors la solution du problème de Riemann est une 1-raréfaction, dont les caractéristiques varient entre λ1(ρg) et λ1(ρd).

Page 135: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

133

ρ1

ρ 2

G

maxρc

S1(G)

(a)

ρ1

ρ 2

G

D

ρmaxρ

c

R1(G)

(b)

Figure 4-34 : Problème de Riemann pour des états homogènes à 100% de PL

(a) 1-choc (b) 1-raréfaction

La première valeur propre correspond dans tous les cas à la dérivée du flux de poids lourds par rapport à la densité de poids lourds (équation (4.69)) ; elle est donc égale à la caractéristique d'un trafic poids lourds dans le modèle LWR.

La première valeur propre étant celle impliquée dans la résolution du problème de Riemann dans le cadre du modèle hétérogène, ce dernier se comporte donc exactement comme le modèle LWR si le trafic considéré n'est composé que de poids lourds.

6.1.2 Trafic homogène constitué de véhicules légers uniquement

Dans ce cas on fixe ρ2 = 0. Les valeurs propres et vecteurs propres s'égalent, en trafic fluide, pour le point ombilical dont la densité de véhicules légers est :

1 21

1 22omb

cc

V VV V V

ρ ρ −=− −

(4.70)

Cet état de trafic est effectivement situé dans la zone de trafic fluide. Les valeurs propres s'expriment alors plus simplement, selon la position de l'état de trafic considéré par rapport au point ombilical, par :

( )( )

( )

( )

( )

( )

( )( )

2 222 2 1 1

21

1 111 1 1

1

1 111 1 1

12

2 222 2 1 1

2

si

si

si

si

omb

omb

omb

omb

vJ v

vJ

vJ

vJ v

ρ ρ ρρ

λρ ρ ρρρ ρ ρρ

λρ ρ ρρ

∂ = = ≤ ∂ = ∂ = > ∂ ∂ = ≤ ∂ = ∂ = = > ∂

ρρ

ρρ

(4.71)

Elles s'égalent au point ombilical, où les vecteurs propres coïncident (ils sont alors tous deux horizontaux dans le plan des phases). Quel que soit l'état du trafic, un des deux vecteurs propres est horizontal : il s'agit du premier vecteur propre à droite du point ombilical, du deuxième vecteur propre à sa gauche.

La présence du point ombilical modifie beaucoup les courbes de Lax (voir les Figure 4-17, Figure 4-18 et Figure 4-19). De plus, à cause du changement de vecteur

Page 136: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

134

propre au passage du point ombilical, les courbes de choc non entropiques ne coïncident plus, après ce passage, avec la raréfaction entropique du même type.

ρ1

ρ 2

ρc

ρmax

S2* R

2*

R1*

D

(a)

ρ1

ρ 2

ρc

ρmax

S2*

R1*S

1*

(b)

D Figure 4-35 : (a) Courbes de Lax non-entropiques

pour un état fluide à 100% VL et ρ1g < ρ1

omb (b) Courbes de Lax non-entropiques

pour un état fluide à 100% VL et ρ1g > ρ1

omb [à comparer aux Figure 4-17 et Figure 4-18]

Autrement dit, si deux états homogènes ρg et ρd constitués uniquement de véhicules légers peuvent être (logiquement) reliés directement entre eux par un choc ou une raréfaction, la nature du choc ou de la raréfaction est moins évidente quand ils sont situés de part et d'autre du point ombilical, car le vecteur propre horizontal n'est pas du même type pour ces deux états. La résolution du problème de Riemann demande alors de distinguer précisément la position des états de trafic par rapport au point ombilical.

Etats de trafic initiaux à gauche du point ombilical

Si les deux états initiaux ρg et ρd sont situés à gauche du point ombilical, ils sont reliés directement soit par une 2-choc (cas où ρ2

g < ρ2d), soit par une 2-raréfaction (cas où

ρ2g > ρ2

d). Dans tous les cas, la vitesse de la transition est reliée à la deuxième valeur propre, qui correspond bien à la dérivée du flux de véhicules légers par rapport à la densité de véhicules légers, et qui est donc égale à la caractéristique d'un trafic véhicules légers dans le modèle LWR.

Le comportement du modèle hétérogène est donc identique à celui de LWR dans ce cas.

Page 137: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

135

ρ1

ρ 2

G D

ρmaxρ

c

S2(G)

(a)

ρ1

ρ 2

GD

ρmaxρ

c

R2(G)

(b)

Figure 4-36 : Problème de Riemann pour des états homogènes à 100% de VL,

à gauche du point ombilical (a) 2-choc

(b) 2-raréfaction

Etats de trafic initiaux à droite du point ombilical

Si les deux états initiaux ρg et ρd sont situés à droite du point ombilical (y compris en congestion), ils sont reliés directement soit par une 1-choc (cas où ρ1

g < ρ1d), soit par

une 1-raréfaction (cas où ρ1g > ρ1

d). Dans tous les cas, la vitesse de la transition est reliée à la première valeur propre, qui correspond bien à la dérivée du flux de véhicules légers par rapport à la densité de véhicules légers, et qui est donc égale à la caractéristique d'un trafic véhicules légers dans le modèle LWR.

Le comportement du modèle hétérogène est donc identique à celui de LWR dans ce cas.

ρ1

ρ 2

G D

ρmaxρ

c

S1(G)

(a)

ρ1

ρ 2

GD

ρmaxρ

c

R1(G)

(b)

Figure 4-37 : Problème de Riemann pour des états homogènes à 100% de VL, à droite du point ombilical

(a) 1-choc (b) 1-raréfaction

Etat amont à droite du point ombilical, état aval à gauche

Les deux états sont alors reliés par une onde de raréfaction, car il y a toujours un vecteur propre horizontal sur l'axe ρ2 = 0. Cette raréfaction est en fait une 1-onde entre l'état amont et le point ombilical, puis une 2-onde entre le point ombilical et le point aval ; en effet, le vecteur propre horizontal est le 1-vecteur propre à droite du point ombilical, le 2-vecteur propre à gauche. Toutefois, étant donné que les valeurs propres coïncident pour le point ombilical, on peut considérer que l'on a une seule onde de

Page 138: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

136

raréfaction continue (l'état intermédiaire, qui ici correspond au point ombilical, n'a pas d'extension spatiale).

ρ1

ρ 2

G

D

I

ρmaxρ

c

R1(G)R

2(I)

(a)

R1

R2

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d) I=(ρ 1

int ,ρ 2int )

x=0

(b)

Temps t

Esp

ace

x

Figure 4-38 : Problème de Riemann pour des états homogènes à 100% de VL,

de part et d'autre du point ombilical (a) Double raréfaction

(b) L'état intermédiaire (trait gras) n'a pas d'extension spatiale

Puisque l'on a une 1-raréfaction à droite du point ombilical et une 2-raréfaction à sa gauche, la valeur propre impliquée dans la transition est toujours égale à la dérivée du flux de véhicules légers par rapport à la densité de véhicules légers (cf. équation (4.71)). Le comportement du modèle hétérogène est donc identique à celui de LWR.

Etat amont à gauche du point ombilical, état aval à droite

Les deux états peuvent alors être reliés directement par une courbe de choc. Il reste toutefois à déterminer de quelle nature est celle-ci. En effet, on a alors :

( ) ( )*2 1 et d g g dS S∈ ∈ρ ρ ρ ρ (4.72)

ρ1

ρ 2

ρc

ρmax

R2

S2 S

2S

1

G D ρ1

ρ 2

ρc

ρmax

S2*

R1*S

1*

(b)

DG Figure 4-39 : Problème de Riemann pour des états homogènes à 100% de VL,

de part et d'autre du point ombilical (a) Courbes entropiques de l'état G

(b) Courbes non-entropiques de l'état D

Outre le fait que l'attribution d'un type (1 ou 2) au choc est alors délicate, ceci fait craindre l'existence d'un point intermédiaire qui serait sur une 1-courbe de Lax de ρg et pour lequel une 2-courbe de Lax contiendrait ρd : il y aurait alors non-unicité de la

Page 139: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

137

solution. La forme des courbes de Lax montre que cela semble envisageable par la succession de deux chocs.

Une étude un peu plus précise du problème de Riemann considéré amène à mettre en évidence deux états de trafic particulier, ρmin et ρmax :

ρ1

ρ 2

G

I

ρc

S1(G)

S2* (ρmax)

S2* (ρB)

S2* (ρA)

S2* (ρmin )

S2(I) S

2* (D)

S2(G) S

1(G)

ρA ρBDρmin

ρmax

ρomb

Figure 4-40 : Problème de Riemann pour des états homogènes, VL seuls Possibilité de solutions non physiques

La courbe de 2-choc non-entropique S2* issue d'un état de trafic situé à droite du

point ombilical entre dans le domaine puis recoupe soit l'axe ρ2 = 0, soit l'axe ρ1 = 0. Dans tous les cas, elle ressort du domaine à gauche du point ombilical. Il est donc bien envisageable que cette courbe de 2-choc non-entropique intersecte la courbe de 1-choc S1(ρg) issue de ρg.

Dans ce cadre, ρmin(ρg) est le premier état de trafic, dans l'ordre des ρ1 croissants, pour lequel la courbe de 2-choc non entropique atteint ρg ; pour un état ρA de densité plus faible, la courbe S2

*(ρA) intersecte l'axe ρ2 = 0 pour une densité plus forte que ρg et ne peut pas rencontrer S1(ρg). ρmin(ρg) est tel que :

( ) ( )1 2 1 2 11 1

1

ggmin V V β β ρρ ρ

β− − −= (4.73)

ρmax(ρg) est lui l'état de trafic sur l'axe ρ2 = 0 qui appartient à S1(ρg). Pour un état ρB de densité plus forte, la courbe S2

*(ρB) intersecte l'axe ρ2 = 0 pour une densité plus faible que ρg et ne peut donc pas rencontrer S1(ρg). ρmax est tel que :

( )( )

1 2 1 11 1

1 2

ggmax V V β ρρ ρ

β β− −=

− (4.74)

Par conséquent, tous les états de trafic ρd (noté D) situés sur l'axe ρ2 = 0 entre les états de trafic ρmin(ρg) et ρmax(ρg) sont tels qu'il existe un point intérieur (noté I sur le graphe) au domaine (donc avec une densité non nulle en poids lourds) qui puisse constituer un état intermédiaire entre les deux états initiaux.

Une telle solution est bien sûr irréaliste, car il ne peut y avoir subitement apparition de poids lourds entre deux états homogènes constitués uniquement de véhicules légers !

Cet état intermédiaire non-physique permet donc mathématiquement de relier autrement que directement les deux états initiaux ; il autorise la succession d'un 1-choc puis d'un 2-choc. Cependant, les propriétés du modèle en partie fluide, et notamment la forme quadratique de son flux, permettent de montrer que les vitesses des deux chocs sont

Page 140: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

138

en fait égales : l'état intermédiaire n'a donc pas d'extension spatiale. De plus, la vitesse de ces deux chocs est égale à celle du choc direct entre les deux états initiaux. Ces deux aspects ont été entièrement démontrés par [Benzoni-Gavage et Colombo, 2003].

Par conséquent, la solution non-physique n'apparaît pas réellement dans la résolution du modèle, car on ne peut la distinguer du choc direct entre les deux états initiaux :

S1(G−I) S

2(G−D)

S2(I−D)

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d) I=(ρ 1

int ,ρ 2int )

x=0

Temps t

Esp

ace

x

Figure 4-41 : Problème de Riemann pour des états homogènes, VL seuls

Possibilité de solutions non physiques La solution non-physique : succession d'un 1-choc entre G et I et d'un 2-choc entre I et D, produit un état intermédiaire sans extension spatiale et ne peut être distinguée du

choc direct

Le modèle se comporte donc de façon correcte même dans ce cas particulier.

Il reste enfin à décider de quel type est le choc direct entre ρg et ρd. Il s'agit clairement d'un 2-choc pour un état ρd entre le point ombilical et ρmin(ρg), puisque le choc direct est la seule solution possible ; de façon similaire, il s'agit d'un 1-choc pour un état ρd situé à la droite de ρmax(ρg). Pour un état ρd entre ρmin(ρg) et ρmax(ρg), le choc est en fait dit surcompressif, étant donné qu'il y a compression des deux valeurs propres à la fois (la solution non-physique, succession d'une 1-choc et d'une 2-choc en est la preuve) ; on a à la fois :

( ) ( ) ( ) ( )1 1 2 2 et d g d gs sλ λ λ λ< < < <ρ ρ ρ ρ (4.75)

Toutefois, si par convention on appelle i-choc un choc tel que sa vitesse si soit égale à la i-valeur propre de l'état situé au milieu du segment reliant les deux états séparés par le choc (propriété (4.47)) :

2

g d

i is λ + = ρ ρ

alors on peut montrer que le choc direct est un 2-choc si ρd est situé à gauche du symétrique de ρg par rapport au point ombilical (donc le milieu du segment est à gauche du point ombilical, et sa deuxième valeur propre est la dérivée du flux de véhicules légers par rapport à la densité de véhicules légers), un 1-choc si ρd est situé à droite du symétrique de ρg par rapport au point ombilical (donc le milieu du segment est à droite du point ombilical, et sa première valeur propre est la dérivée du flux de véhicules légers par rapport à la densité de véhicules légers).

Page 141: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

139

Ceci permet de s'assurer que le modèle hétérogène pour un flux homogène de véhicules légers dans le cas "état amont à gauche du point ombilical, état aval à droite" se comporte bien comme le modèle LWR correspondant.

6.1.3 Conclusion

La présence de points ombilicaux rend plus délicate la résolution du problème de Riemann quand on applique le modèle hétérogène au cas d'un flux homogène. Toutefois, on a pu montrer dans ce paragraphe qu'il était toujours possible de dégager la solution physique, les solutions non physiques pouvant exister étant dans les faits identiques à la solution physique.

Par ailleurs, on a démontré que le modèle hétérogène se comportait bien de façon strictement identique au modèle LWR pour un flux homogène, notamment que les vitesses des ondes correspondaient bien à celles prévus par le modèle LWR.

6.2 Intégration de l'hypothèse v2 = constante en trafic fluide

Le paragraphe 4.2.2 du chapitre 3 et notamment la Figure 3-8 amènent à considérer l'hypothèse d'une vitesse constante pour les poids lourds en trafic fluide.

Une telle hypothèse simplifie assez nettement l'expression des valeurs propres et vecteurs propres et donc la forme des courbes de Lax. Par contre, cela généralise le problème de coïncidence pour certains états de trafic des valeurs et vecteurs propres.

Ce paragraphe fait le point sur les difficultés potentielles de résolution.

6.2.1 Expression des valeurs propres et vecteurs propres

Si l'on fait l'hypothèse d'une vitesse des poids lourds constante en situation fluide et égale à la vitesse critique, la matrice jacobienne (4.23) devient :

( )11 12 1 1 1 1 1

21 22 0 c

J J v

J J V

β ρ β ρ− − = = J ρ (4.76)

L'expression des valeurs propres (4.24) dépend alors de la comparaison de J11 et de J22. Ce dernier terme étant constant alors que J11 décroît avec la densité de véhicules légers, les valeurs propres coïncident lorsque la relation suivante est satisfaite :

( )1 212 cρ ρ ρ= − (4.77)

Page 142: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

140

Dans le plan des phases, cela délimite la zone fluide en deux parties, I et II :

ρ1

ρ 2 ρmax

ρc

Ligne de transition

Point ombilical

I II

Figure 4-42 : Délimitation de deux zones en état fluide de trafic

L'évolution des vitesses (tracée en pointillés) et des valeurs propres le long des ρ1 croissants est alors la suivante, pour une densité de poids lourds donnée :

(à ρ2 fixé)

λ1

λ2

ρmax

− ρ2

ρc − ρ

2

0

Vc

v1(0,ρ

2)

−Vca

Densité ρ1

Vite

sses

Figure 4-43 : Evolution des valeurs propres avec la densité en véhicules légers

(pour une densité de poids lourds donnée, hypothèse v2 = Vc en fluide)

Dans la zone I

La première zone correspond aux densités suffisamment faibles pour être à gauche de la ligne de transition ; J11 est plus grand que J22 et on a alors les valeurs propres suivantes :

( )

( )1 22

2 1 1 1 11

cV J

v J

λ

λ β ρ

= = = − =

ρρ

(4.78)

La première valeur propre est constante, le premier champ devient linéairement dégénéré dans la zone. Pour le deuxième champ, le vecteur propre est horizontal. Un choix possible de vecteurs propres est alors :

( ) ( )12

1 211 22

1 et

0

J

J J

−= =

−r rρ ρ (4.79)

Les deux composantes du premier vecteur propre sont alors positives.

Page 143: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

141

Sur la ligne de transition

Les deux valeurs propres coïncident, et les deux vecteurs propres s'égalent : ils sont tous deux horizontaux dans le plan des phases.

Dans la zone II

La deuxième zone correspond aux densités suffisamment fortes pour être à droite de la ligne de transition ; J11 est plus petit que J22 et on a alors les valeurs propres suivantes :

( )

( )1 1 1 1 11

2 22c

v J

V J

λ β ρ

λ

= − = = =

ρρ

(4.80)

La deuxième valeur propre est constante, le deuxième champ devient linéairement dégénéré dans la zone. Pour le premier champ, le vecteur propre est horizontal. Un choix possible de vecteurs propres est alors :

( ) ( )12

1 211 22

1 et

0

J

J J

−= =

−r rρ ρ (4.81)

La première composante du deuxième vecteur propre est positive, alors que la deuxième est négative.

6.2.2 Courbes de Lax pour des états de trafic fluides

La modification des courbes de Lax pour des états de trafic situés en congestion affecte la partie des courbes située en fluide (cela se produit pour la 1-raréfaction). En particulier, lors de la traversée de la zone I, le premier champ est dégénéré, la courbe est une courbe de 1-contact (de valeur propre Vc) C1

bis :

ρ1

ρ 2

ρmaxρ

c

S1=C

1

R1=C

1

C2

R1R

1=C

1bis

Figure 4-44 : Courbes de Lax pour un état de trafic congestionné (v2 constante)

Pour un état de trafic fluide, les courbes de Lax présentent un certain nombre de particularités ; elles sont mises en évidence sur la Figure 4-45.

Etat de la zone I

Pour un état de la zone I, la 2-raréfaction relie des états à même densité de poids lourds. De façon similaire, la densité de poids lourds est conservée sur la courbe de 1-choc à partir du point où elle rejoint la courbe de 2-choc, qui possédait cette même propriété jusqu'alors.

Page 144: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

142

Quant à la 1-courbe de Lax, elle correspond à un 1-contact dans la zone I, de vitesse égale à la vitesse constante des poids lourds.

Etat de la zone II

Pour un état de la zone II, la 2-raréfaction relie des états à même densité de poids lourds après le passage de la ligne de transition. De façon similaire, la densité de poids lourds est conservée sur la courbe de 1-choc en partie fluide. Par ailleurs, dans la zone I, la 1-raréfaction est en fait un 1-contact de vitesse Vc, et c'est également le cas de la 2-choc en zone II.

Plus généralement, on note que la forme des courbes de Lax pour des points en situation fluide est similaire à celle observée dans le cas général sur l'axe des véhicules légers autour du point ombilical.

ρ1

ρ 2

ρmaxρ

c

R1=C

1bis

S2

S2

S1

S1=C

1bis

R2

(a)

ρ1

ρ 2

ρmaxρ

c

R1=C

1bis

R1

S2=C

2bis

S1

R2=C

2bis

R2

(b)

Figure 4-45 : Courbes de Lax pour des états fluides (v2 constante)

(a) dans la zone I (b) dans la zone II

Les courbes non-entropiques confirment la forme pressentie :

ρ1

ρ 2

ρmaxρ

c

S1*

R2*

R1*

S2*

(a)

ρ1

ρ 2

ρmaxρ

c

S1*

S1*

R2*

R1*

S2*

S2*

(b)

Figure 4-46 : Courbes de Lax non-entropiques pour des états fluides (v2 constante)

(a) dans la zone I (b) dans la zone II

En particulier, on note sur ces figures que la courbe de choc horizontale issue d'un point de la zone I est de type 2, alors que la courbe de choc non entropique horizontale issue d'un point de la zone II est de type 1. Ceci est dû, comme dans le cas des points

Page 145: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

143

ombilicaux, au passage à l'égalité de direction des vecteurs propres lors de la traversée de la ligne de transition.

6.2.3 De nouvelles difficultés de résolution ?

Général

De façon générale, la résolution du problème de Riemann est légèrement changée du fait de la modification de la forme des courbes de Lax. Le principal fait notable nouveau consiste en la présence désormais en fluide d'ondes de contact, ce qui ferme parfois les éventails de raréfaction présentés dans le cas v2 variable. Un exemple est donné sur la figure suivante, où le premier éventail, lié à la 1-raréfaction, est en fait fermé entre F et I :

ρ1

ρ 2

D

G

I F

Ligne de transition

ρc

R2(I)

R1(G)R

1(G)=C

1(G)

(a)

R1

R2

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d)

I=(ρ 1int ,ρ 2

int )

F

x=0

(b)

Temps t

Esp

ace

x

Figure 4-47 : Exemple de résolution d'un problème de Riemann dans l'hypothèse v2

constante (a) Plan des phases (b) Diagramme (t,x)

Eventuelles difficultés mathématiques

Si l'on fait l'hypothèse v2 constante en fluide, le point ombilical de l'axe des poids lourds (0, ρ2

omb) mentionné au paragraphe 2.2.2 est situé sur la ligne de capacité. Par conséquent, étant à la frontière avec une autre expression des valeurs et vecteurs propres du modèle, son existence ne pose pas de difficultés particulières.

La difficulté nouvelle est en fait la conséquence de la présence de la ligne de transition où les valeurs propres coïncident. En effet, il apparaît sur les courbes de Lax que deux états de trafic fluides ayant la même densité de poids lourds peuvent être directement connectés. Les problèmes détaillés dans le cas v2 variable pour une densité de poids lourds nulle réapparaissent ici.

Ainsi, si les deux états considérés sont tous deux dans la zone I, ils peuvent être reliés par un choc ou une raréfaction, dont le type est 2 (les deux états se trouvent sur des courbes entropique et non entropique de même type).

Si les deux états considérés sont tous deux dans la zone II, ils peuvent être reliés par un choc ou une raréfaction, dont le type est 1 (les deux états se trouvent sur des courbe entropique et non entropique de même type).

Si l'état amont est dans la zone II, l'état aval est dans la zone I, la solution au problème de Riemann est la succession de deux ondes de raréfactions, conservant la

Page 146: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 4

144

densité de poids lourds. Comme au paragraphe 6.1.2, l'état intermédiaire est situé sur la ligne de transition et par conséquent n'a pas d'extension spatiale puisque les deux valeurs propres y coïncident :

ρ1

ρ 2

D GI

Ligne de transition

ρc

R2(I)

R1(G)

R1(G)

(a)

R1

R2

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d)

I=(ρ 1int ,ρ 2

int )

x=0

(b)

Temps t

Esp

ace

x

Figure 4-48 : Problème de Riemann dans l'hypothèse v2 constante ;

traversée par une raréfaction de la ligne de transition (a) Plan des phases

(b) L'état intermédiaire (trait gras) n'a pas d'extension spatiale

Si l'état amont est dans la zone I, l'état aval est dans la zone II, la solution au problème de Riemann est un choc. En effet, on a :

( ) ( )*2 1 et d g g dS S∈ ∈ρ ρ ρ ρ (4.82)

Par conséquent, on craint ici aussi l'existence d'une autre solution impliquant un état intermédiaire I situé sur la courbe de 1-choc de ρg et sur la courbe de 2-choc non entropique de ρd. Le tracé simultané de ces courbes lève cependant cette possibilité :

ρ1

ρ 2

D D D DG

Ligne de transition

ρc

S2* (D)S

2(G)

S1(G)

Figure 4-49 : Problème de Riemann dans l'hypothèse v2 constante ;

traversée par un choc de la ligne de transition

En effet, la 1-choc S1(ρg) recoupe le niveau de densité poids lourds initial dans la zone II. Si l'état aval ρd est situé avant cela, sa courbe de 2-choc non-entropique S2

*(ρd) reste à l'intérieur de la forme de S1(ρg) et ne l'intersecte pas. Si l'état aval ρd est situé au-delà, sa courbe de 2-choc non-entropique S2

*(ρd) reste à l'extérieur de la forme de S1(ρg) et ne l'intersecte pas non plus. Il n'y a par conséquent aucune possibilité d'existence d'une autre solution au problème de Riemann autre que le choc direct entre les deux états. Quant

Page 147: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène

145

au type de ce dernier, il s'agit d'un 2-choc ou d'un 1-choc selon que l'état aval ρd se situe avant (2-choc) ou après (1-choc) le retour à la même densité poids lourds de S1(ρg).

6.2.4 Conclusion

Introduire l'hypothèse phénoménologique d'une vitesse constante pour les poids lourds en situation fluide de trafic modifie la solution au problème de Riemann en créant notamment de nouvelles ondes de contact. Par contre, en dépit des craintes pouvant exister, la généralisation d'états de trafic pour lesquels les valeurs propres coïncident ne génère pas de nouvelles solutions non physiques au problème de Riemann : il reste toujours possible de déterminer une et une seule solution, en outre physique, au modèle.

7 Conclusion

Ce chapitre a présenté en profondeur la résolution analytique du modèle de trafic hétérogène sur la base de la théorie mathématique des systèmes de lois de conservation. Il a ainsi mis en évidence les propriétés mathématiques du modèle, ainsi que le caractère anisotropique de ce dernier. La résolution du modèle a été construite étape par étape, suivant l'application de la théorie : de la construction des courbes de Lax à la solution aux problèmes de Riemann types, liés au caractère fluide ou congestionné des états de trafic considérés.

En dépit de sa simplicité de formulation, le système considéré fait par ailleurs apparaître un certain nombre d'aspects mathématiques non standard, dans le cas de trafic particuliers (les trafics homogènes) ou d'hypothèses phénoménologiques étayées (la stabilité des vitesses des poids lourds en trafic fluide). Il a été montré dans ce chapitre qu'il n'apparaissait pas systématiquement de nouvelles solutions aux problèmes (cas de l'hypothèse vitesse poids lourds constante), et que celles qui existaient étaient bien identiques aux solutions physiques attendues (cas des trafics homogènes).

Le chapitre suivant va permettre, par la mise en place d'une résolution numérique, de mener plusieurs simulations et ainsi de mettre en évidence le comportement du modèle et de souligner sa signification physique.

Page 148: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic
Page 149: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

147

Chapitre 5 Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov Comportement du modèle

1 De l'intérêt d'une résolution numérique 148

2 Résolution numérique et modèles de trafic 149 2.1 Résolution par schémas numériques aux différences finies 149 2.2 Autres approches de résolution numérique 154 2.3 Conclusion 156

3 Application du schéma de Godunov au modèle de trafic hétérogène 156 3.1 Méthode de Godunov et modèles de trafic 156 3.2 Un schéma numérique de type Godunov pour le modèle hétérogène 161

4 Etude du comportement du modèle en simulation 170 4.1 Evolution d'un trafic hétérogène 170 4.2 Fonctionnement dans un même état de trafic (fluide ou congestionné) 179 4.3 Etats de trafic particuliers 182 4.4 Simulation et pas de temps 185

5 Conclusion 187

Les principaux éléments de résolution numérique du modèle ont été présentés lors de la 82ème conférence annuelle du Transportation Research Board [Chanut et Buisson, 2003], ce qui a donné lieu à publication dans Transportation Research Record [Chanut et Buisson, 2003, #2].

Parallèlement à la résolution analytique, il est pertinent de bâtir une résolution numérique du modèle dans le but principal de mener aisément des simulations. Ceci constitue l'objectif de la résolution numérique construite dans ce chapitre.

Ainsi, après avoir repositionné l'intérêt de la résolution numérique du modèle (partie 1), on présente les différents types de schémas numériques utilisables et on

Page 150: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

148

souligne l'emploi répandu de la méthode de Godunov dans le cas des modèles d'écoulement du trafic routier (partie 2).

On détaille alors cette méthode et la façon dont on l'a utilisée pour construire le schéma numérique du modèle de trafic routier hétérogène (partie 3). Une attention particulière est portée à la possibilité d'étendre au cas du trafic hétérogène les concepts d'offre et de demande locales de trafic utilisés classiquement lors de la résolution du modèle homogène.

Enfin, on présente plusieurs simulations (partie 4). Elles permettent de vérifier la convergence du schéma numérique vers les solutions analytiques, ainsi que la robustesse du modèle. Surtout, elles illustrent en détail le comportement du modèle dans plusieurs situations fréquentes de trafic et soulignent ainsi sa capacité à reproduire correctement les différents aspects attendus de l'écoulement d'un trafic hétérogène.

1 De l'intérêt d'une résolution numérique

Il est tout d'abord nécessaire de se poser la question de savoir en quoi l'emploi d'une résolution numérique peut nous être utile, étant donné que la solution analytique est en grande partie connue et maîtrisée.

Il faut ici souligner que bien que les principes généraux de la résolution analytique du modèle soient connus, le calcul pratique se heurte à la difficulté de décrire précisément les courbes de Lax présentées au chapitre 4. En effet, s'il est aisé de donner une expression analytique des lieux de Hugoniot décrivant les états de trafic reliables par des discontinuités et de calculer exactement la vitesse de propagation de ces dernières, cela est plus délicat pour les courbes intégrales qui génèrent les transitions continues que sont les ondes de raréfaction. Cette difficulté n'est pas nouvelle : même dans les modèles du premier ordre mono-flux, dont l'équation est scalaire, il est beaucoup plus contraignant de décrire les éventails de caractéristiques que les ondes de chocs ; c'est d'ailleurs cette difficulté qui a inspiré les travaux sur la résolution par wave tracking de [Henn, 2003] des modèles du premier ordre. L'emploi d'une résolution numérique se justifie donc pleinement ici.

De plus, les modèles de trafic font très classiquement l'objet de simulations ; en particulier, ils ne prennent de valeur applicative que lorsqu'ils ont été calibrés et validés, c'est-à-dire quand leurs sorties ont été comparées aux observations faites dans la réalité. Ceci nécessite de pouvoir calculer rapidement et simplement les solutions du modèle dans des cas variés.

Or, même si la solution analytique est connue, elle s'avère souvent longue à déterminer du fait de la multiplicité des conditions aux limites. Par conséquent, il est souvent nécessaire de faire appel à une résolution numérique, plus rapide.

Par ailleurs, la mise en œuvre et l'évaluation de la qualité du schéma numérique sont grandement facilitées par la connaissance de la solution analytique, puisque l'on peut alors accéder à la solution exacte.

Page 151: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

149

Par conséquent, il s'avère nécessaire de proposer une forme de résolution numérique pour notre modèle. Le paragraphe suivant présente les différentes techniques possibles.

2 Résolution numérique et modèles de trafic

La résolution numérique des modèles macroscopiques d'écoulement de trafic s'appuie traditionnellement sur une discrétisation spatio-temporelle, permettant d'appliquer, après définition d'un pas de temps ∆t et découpage de l'axe des x en cellules de longueur ∆x, un schéma numérique aux différences finies. Si d'autres méthodes numériques ont été appliquées aux modèles de trafic (elles seront évoquées au paragraphe 2.2), la discrétisation spatio-temporelle reste la plus répandue. C'est donc elle que nous allons principalement présenter dans la suite.

2.1 Résolution par schémas numériques aux différences finies

2.1.1 Généralités

Les schémas numériques aux différences finies développés permettent d'approcher la ou les variables caractéristiques u des modèles en un nombre discret de points (x,t) qui correspondent aux nœuds d'une grille définie par une discrétisation spatio-temporelle. La variable qu'on approche est ainsi la concentration dans le cas des modèles macroscopiques du premier ordre ; le couple (concentration, vitesse) dans le cas des modèles d'ordre supérieur. Dans le cas d'un modèle bi-flux, il s'agira donc d'approcher le couple des deux concentrations ou densités de trafic des deux classes de véhicules considérées.

On peut voir les valeurs approchées U(x,t) aux nœuds (x,t) comme des valeurs approximées de la moyenne de la variable u sur un segment de longueur ∆x, à une date t :

( ) ( )12

12

1, , x x

x xU x t u x t dx

x+ ∆

− ∆≡

∆ ∫ (5.1)

Afin qu'un schéma aux différences finies approxime correctement l'équation de conservation, il doit posséder trois propriétés principales [LeVeque, 1992] :

• il doit être consistant avec l'Equation aux Dérivées Partielles (EDP) initiale : l'expression du schéma numérique tend vers l'expression de l'EDP quand ∆t et ∆x tendent vers 0 ;

• il doit être stable : l'erreur introduite et augmentée à chaque itération par la résolution numérique ne doit pas diverger ;

• il doit être convergent : les solutions du schéma numérique doivent tendre vers les solutions de l'EDP quand ∆t et ∆x tendent vers 0.

Page 152: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

150

Par ailleurs, un schéma numérique est qualifié de conservatif s'il peut se mettre sous la forme :

( ) ( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )( )

~ ~, 1 , , 1 , , , , , 1 0U x t U x t F U x t U x t F U x t U x t -

t x+ − + −+ =

∆ ∆ (5.2)

avec ~F un flux dit numérique.

De nombreuses méthodes numériques aux différences finies existent pour approcher les solutions d'équations de conservation. La plupart sont issues d'une approximation directe, par différences finies, des dérivées de l'EDP initiale :

( ) ( ), , 0u x t u x tAt x

∂ ∂+ =∂ ∂

(5.3)

C'est le cas par exemple du schéma numérique de Lax-Friedrichs :

( ) ( ) ( )( )

( ) ( )( )

1, , ,2

, ,2

U x t t U x x t U x x t

t A U x x t U x x tx

+ ∆ = − ∆ + + ∆

∆− −∆ − + ∆∆

(5.4)

Cette méthode est par ailleurs qualifiée du premier ordre puisque l'on utilise une différence finie du premier ordre.

Mais certaines autres méthodes numériques sont bâties sur le développement en séries de Taylor pour estimer u(x, t + ∆t) :

( ) ( )( ) ( ) ( )2 2

2, ,, , ...

2u x t t u x tu x t t u x t tt t

∂ ∆ ∂+ ∆ = + ∆ + +∂ ∂

(5.5)

C'est le cas par exemple du schéma numérique de Lax-Wendroff :

( ) ( ) ( ) ( )( )

( )( )

( ) ( ) ( )( )2

22

, , , ,2

+ , 2 , ,2

tU x t t U x t A U x x t U x x txt A U x x t U x t U x x tx

∆+ ∆ = − −∆ − + ∆∆∆ + ∆ − + −∆∆

(5.6)

qui est qualifié de méthode du deuxième ordre puisqu'il inclut des différences finies précises à l'ordre 2.

Quel type de méthode choisir alors, dans notre cas où la solution au problème inclut

des discontinuités ? Pour de tels problèmes, les méthodes du premier ordre s'avèrent dissipatives ; le terme qui caractérise l'écart avec la solution exacte est en effet un terme de diffusion57.

Pour illustrer ceci, on a tracé, de façon similaire à [LeVeque, 1992], le résultat après 50 secondes du problème de Riemann suivant :

( ) ( )

( )

, , 0

1 0, 0

0 0

u x t u x tat x

xu x

x

∂ ∂+ =∂ ∂

< >

(5.7)

57 Il s'exprime en fonction de la dérivée seconde de la variable d'état u par rapport à l'espace.

Page 153: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

151

Le créneau initial doit, en théorie, se déplacer sans déformation à une vitesse de a m/s ; si l'on choisit une valeur de 1 pour a, le créneau doit donc se trouver à x = 50 m à t = 50 s.

0 20 40 60 80 100−0.5

0

0.5

1

1.5

x (m)

u

Figure 5-1 : Solutions exacte (trait plein) et numérique (pointillés)

Méthode de Lax-Friedrichs (méthode du premier ordre)

On note bien sur la figure la diffusion de la solution numérique, que l'on peut limiter en prenant une grille spatio-temporelle plus fine.

L'utilisation d'une méthode du second ordre n'est pas significativement meilleure ; une méthode de ce type amène en effet classiquement à une dissipation beaucoup plus faible de la discontinuité mais à des oscillations autour de cette dernière. Le terme qui caractérise l'écart avec la solution exacte est alors un terme de dispersion58.

La même simulation que précédemment amène ainsi au profil numérique suivant :

0 20 40 60 80 100−0.5

0

0.5

1

1.5

x (m)

u

Figure 5-2 : Solutions exacte (trait plein) et numérique (pointillés)

Méthode de Lax-Wendroff (méthode du deuxième ordre)

58 Il s'exprime en fonction de la dérivée troisième de la variable d'état u par rapport à l'espace.

Page 154: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

152

2.1.2 Mise en œuvre dans les modèles de trafic

Schémas utilisés dans la littérature

Les résultats du paragraphe précédent amèneraient à penser que les méthodes numériques du deuxième ordre sont plus précises que celles du premier ordre, et qu'elles sont donc plus utilisées pour la résolution numérique des modèles macroscopiques des modèles d'écoulement de trafic.

Cependant, la littérature montre que ce sont principalement deux schémas numériques du premier ordre qui sont principalement utilisés : le schéma de Lax-Friedrichs, déjà évoqué plus haut, et celui de Godunov, basé sur la résolution exacte, à chaque pas de temps et sur un pas d'espace, de mini-problèmes de Riemann. Ceci est vrai aussi bien pour les modèles de trafic à équation scalaire (modèles du premier ordre mono-flux) qu'à systèmes d'équations (modèles d'ordre supérieur ou modèles multi-classes).

Parmi les utilisations de Lax-Friedrichs, on peut ainsi citer [Benzoni-Gavage et Colombo, 2003] pour les modèles multi-classes ou encore [Zhang, 2000#2] pour les modèles d'ordre supérieur. Quant au schéma de Godunov, il est à la base des discrétisations spatio-temporelles des modèles du premier ordre CELL ([Daganzo, 1994] et [Daganzo, 1995]) et STRADA ([Buisson, Lebacque et Lesort, 1996]), du modèle d'ordre supérieur de [Zhang, 2001] et de [Aw et al., 2002], des modèles multi-classes de [Daganzo, Lin et Del Castillo, 1997] ou [Chanut et Buisson, 2003], ou encore des modèles à nombre de voies variable de [Jin et Zhang, 2003], suivant les premières applications de [Lebacque, 1996].

Ce choix de méthodes du premier ordre est rarement argumenté dans la littérature. De plus, peu d'études ont réellement essayé de comparer les performances de différents schémas numériques, et notamment leur ordre, pour la résolution des modèles de trafic. L'article de [Zhang et Wu, 1997] en est cependant un exemple significatif. Dans ces travaux, les auteurs ont comparé des méthodes du premier ordre, notamment Lax-Friedrichs et Godunov, entre elles et avec des méthodes du deuxième ordre, sur la base de diverses situations classiques de trafic : remontée de congestion, redémarrage à un feu.

Les résultats les ont amenés à rejeter l'utilisation des méthodes du second ordre, essentiellement à cause des oscillations présentées, peu maîtrisables et corrigeables ; la difficulté de s'assurer de leur stabilité et de leur convergence a ainsi été décrite comme un handicap important. Quant aux méthodes du premier ordre, la diffusion qu'elles présentent, bien sûr gênante, a au moins l'intérêt de ressembler à une diffusion physique59.

Ces conclusions sont en accord avec celles données par [Michalopoulos, Beskos et Lin, 1984] : ces auteurs étaient arrivés à la conclusion que la précision supplémentaire apportée par les méthodes du second ordre n'était pas suffisante pour justifier leur utilisation et leur mise en œuvre, plus complexes que celles des méthodes du premier ordre.

Par ailleurs, [Zhang et Wu, 1997] ont conclu à la supériorité des méthodes de type Godunov parmi les méthodes du premier ordre, point sur lequel nous allons revenir.

La prédominance du schéma de Godunov

Plus que le schéma de Lax-Friedrichs, c'est en effet le schéma de Godunov qui est très souvent utilisé pour la résolution numérique des modèles macroscopiques

59 Bien que sans aucun rapport avec elle.

Page 155: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

153

d'écoulement du trafic. Sa popularité s'explique selon plusieurs points, qui sont soulignés dans l'article de [Zhang et Wu, 1997].

Performances numériques

Le schéma de Godunov est un schéma qualifié d'upwind ; ceci signifie que le schéma aux différences finies utilisé est bâti dans la direction qui permet de rencontrer le plus rapidement l'information qui se déplace, c'est-à-dire les caractéristiques de l'équation de conservation dans notre cas. Ceci est particulièrement intéressant pour les modèles de trafic, étant donné que les phénomènes qui leur sont associés peuvent se propager à la fois vers l'amont (remontée de congestion par exemple) et vers l'aval (propagation d'un peloton de véhicules). D'autres schémas comme Lax-Friedrichs sont également adaptés à des modèles pour lesquels de l'information se propage dans les deux sens, mais n'anticipent pas comme le fait Godunov la direction d'où vient l'information ; ce dernier schéma est donc sans surprise moins dissipatif que les autres méthodes du premier ordre, la recherche du sens de propagation de l'information permettant de faire une interpolation plus précise.

En outre, ce comportement upwind est une qualité d'autant plus importante dans les modèles de trafic que la tâche principale dans leur résolution est de décrire et de suivre le plus précisément possible la propagation des discontinuités que sont les ondes de choc : les qualités du schéma de Godunov sont donc particulièrement adaptées. [Zhang et Wu, 1997] arrivent ainsi à la conclusion que le schéma de Godunov est plus précis et converge plus vite que le schéma de Lax-Friedrichs dans les situations de trafic où des ondes de choc apparaissent. Lorsque ce sont des ondes de raréfaction ou des éventails qui sont impliqués, le schéma de Godunov reste efficace malgré une convergence un peu plus lente que Lax-Friedrichs.

Au final, le schéma de Godunov constitue donc un bon compromis permettant à la fois d'éviter les oscillations générées par les schémas numériques d'ordre deux et de limiter la diffusion propre aux méthodes numériques du premier ordre par son caractère upwind.

Autres intérêts mathématiques

Par ailleurs, le schéma de Godunov présente d'autres aspects mathématiques utiles pour l'application qui nous intéresse.

Tout d'abord, c'est un schéma conservatif et consistant, et, pour de tels schémas linéaires, conservatifs et consistants, la stabilité implique la convergence [LeVeque, 1992]. Or il existe un critère simple de stabilité ; il s'agit du critère suivant, qualifié de condition de Courant-Friedrichs-Lewy (CFL) :

valeur propre de , 1tx

λλ ∆∀ ≤∆

A (5.8)

A étant la matrice jacobienne de l'équation de conservation. Cette condition empêche qu'une information contenue dans le modèle traverse plus

d'une cellule de discrétisation en un pas de temps ; autrement dit, aucune caractéristique ou onde générée à une interface de cellules lors de la résolution du problème de Riemann ne peut parcourir ∆x et donc atteindre l'interface suivante ou précédente avant la fin du pas de temps ∆t.

Page 156: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

154

Il est donc facile de s'assurer de la stabilité du schéma de Godunov, et ceci est un atout60.

De plus, il est aisé de faire converger la solution générale d'un schéma de Godunov vers la solution entropique61 ; il suffit en effet pour cela que la résolution analytique de chaque mini-problème de Riemann soit elle-même entropique.

Enfin, il y a un intérêt encore plus général de bâtir la solution numérique sur la résolution exacte de mini-problèmes de Riemann, pourtant pas toujours triviale, donc d'utiliser une méthode de Godunov. En effet, la diffusion des méthodes du premier ordre, même limitée par le caractère upwind éventuel des schémas, reste un inconvénient fort, alors que les solutions des méthodes d'ordre deux souffrent de la présence d'oscillations.

La voie à suivre pour améliorer l'utilisation de tels schémas, bien qu'elle n'ait pas encore été approfondie, à la connaissance de l'auteur, dans le cas des modèles de trafic, serait alors la construction de méthodes numériques plus sophistiquées (dites à haute résolution) intégrant les comportements locaux de la solution près des discontinuités ; dans cette optique, utiliser les solutions analytiques exactes de mini-problèmes de Riemann constituant le problème général, comme on le fait en utilisant une méthode de Godunov, forme une base solide pour mettre en place une telle nouvelle méthode numérique plus performante [LeVeque, 1992].

Signification physique du schéma

La large utilisation du schéma de Godunov pour la résolution numérique des modèles d'écoulement du trafic s'explique cependant également, et surtout, par le sens physique qu'il est possible de donner à la mise en œuvre de ce schéma.

En effet, il est possible de contracter la formule qui permet de calculer les débits à chaque pas de temps entre cellules spatiales de la grille de discrétisation en utilisant des notions d'offre de capacité restante d'infrastructure et de demande de trafic pour chacune des cellules. Il est alors possible de calculer, très simplement, à chaque pas de temps, le débit entre deux cellules consécutives comme le minimum de la demande en amont et de l'offre en aval. La mise en œuvre du schéma de Godunov prend ainsi une signification physique et de plus, par la contraction de la formule de calcul, devient plus facile.

Ce remarquable lien entre le schéma numérique et des concepts physiques a été souligné et formalisé de façon simultanée et indépendante par [Lebacque, 1996] et [Daganzo, 1995] (ce dernier utilisant les notions de sending et receiving flows au lieu de demande et d'offre). Nous reviendrons par la suite plus en détail sur ces concepts.

2.2 Autres approches de résolution numérique

Aussi répandue soit-elle, la discrétisation spatio-temporelle n'est cependant pas la seule méthode numérique mise en œuvre pour la résolution des modèles d'écoulement de trafic. Parmi les autres méthodes déjà utilisées et potentiellement utilisables avec succès

60 Le théorème "conservativité + consistance + stabilité => convergence" n'a pas été prouvé pour les systèmes non-linéraires, mais les simulations numériques menées jusqu'à présent laissent penser que la condition CFL suffit également pour s'assurer la convergence de la méthode pour beaucoup de systèmes, notamment ceux des modèles de trafic. 61 La convergence du schéma s'entend vers une solution faible du modèle, pas nécessairement la solution entropique.

Page 157: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

155

pour un écoulement mixte, on peut citer principalement la résolution par suivi d'ondes (wave tracking) [Holden et Risebro, 2002] et la résolution de type recherche opérationnelle ; cette dernière est apparue très récemment suite aux travaux de [Daganzo, 2005], qui a démontré l'équivalence de la résolution du modèle de trafic LWR avec celle d'un problème de contrôle optimal.

La première méthode, bâtie sur les concepts du wave tracking, a été appliquée aux modèles de trafic par [Henn, 2003]. Elle consiste à utiliser le fait que l'on sait analytiquement beaucoup plus facilement décrire les transitions du type discontinuités (ondes de choc) que de type continu (éventail ou ondes de raréfaction). Par conséquent, [Henn, 2003] propose d'utiliser non pas la solution analytique entropique mais une solution dans laquelle les ondes de raréfaction entropiques sont remplacées par une série d'ondes de choc non entropiques. Cette nouvelle solution analytique est plus facile à décrire numériquement que la solution entropique car elle est entièrement construite à partir de discontinuités ; par ailleurs, elle converge vers la solution entropique quand on augmente le nombre d'ondes de choc non entropiques remplaçant les éventails.

Kav

al

Kam

ont

K

x

K1

K2

K3

Kaval

Kamont

K1

K2

K3

t

x

Kamont

Kaval K

Q K1

K2

K3

Pentes desondes de choc

Figure 5-3 : Méthode wave-tracking

Remplacement de l'éventail entropique par une série de chocs non-entropiques

Cependant, l'utilisation du wave tracking pour des systèmes d'équations ne répond pas exactement aux mêmes principes que son application à une équation scalaire. En effet, sur notre modèle par exemple, si deux états de trafic peuvent être reliés par une onde entropique de raréfaction, ils ne peuvent généralement pas l'être par un choc non entropique. Par conséquent, la transformation des transitions continues que sont les ondes de raréfaction en transitions par discontinuités successives que sont les chocs non entropiques n'est pas immédiate dans le cas de systèmes. C'est ainsi que la méthode du wave tracking n'a pas encore été appliquée aux modèles d'écoulement du trafic comportant un système d'équations : des recherches doivent être menées sur ce sujet.

La deuxième méthode est la résolution numérique du modèle de [Daganzo, 2005] assimilant le modèle de trafic LWR à un problème de recherche opérationnelle et sa résolution à la recherche d'un plus court chemin. Dans ce modèle, la variable fondamentale choisie est le nombre cumulé de véhicules N(x,t) étant passés à un point d'abscisse x avant un instant t donné. L'équation de conservation est alors simplement remplacée par l'existence de cette fonction N.

Page 158: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

156

L'avantage de ce modèle est qu'il se ramène à un problème bien connu de recherche opérationnelle et permet ainsi d'utiliser les algorithmes classiques de plus court chemin dans le plan (t,x) pour calculer des solutions ; on définit pour cela une mesure L qui dépend du diagramme fondamental que l'on suppose.

Conceptuellement, cette nouvelle formulation présente l'avantage de pouvoir insérer des conditions aux limites mobiles, liées par exemple à la présence d'un ou plusieurs véhicules lents. En effet, la résolution numérique se bâtit directement dans le plan (t,x) en évaluant les évolutions possibles de N dans ce plan ; par conséquent, il est facile d'implémenter la condition aux limites désirée par insertion de la trajectoire du véhicule gênant. Très récent, ce modèle nécessite toutefois une large consolidation quant à sa mise en œuvre opérationnelle.

2.3 Conclusion

La méthode numérique que nous avons choisie pour calculer les solutions de notre système d'équations et mener des simulations est un schéma aux différences finies inspiré du schéma de Godunov.

Ce choix a été fait au vu des nombreux atouts que possède ce schéma pour les modèles de trafic et que nous avons présentés plus haut. La signification physique du schéma est notamment un avantage fort. Les propriétés de signe des valeurs propres du modèle qui ont été mises en évidence au chapitre 4 constituent un autre argument déterminant pour le choix d'un tel schéma upwind.

Nous allons mettre en œuvre ce schéma pour un système d'équations issu d'une modélisation multi-classes. Cela va ainsi permettre de compléter son utilisation pour la résolution numérique de tels systèmes, après qu'il a été employé pour des systèmes hyperboliques pour lesquels la deuxième équation était issue d'une modélisation d'ordre supérieur ([Zhang, 2001], [Ngoduy, Hoogendoorn et Van Zuylen, 2004]) et d'une prise en compte de l'hétérogénéité de la voirie [Jin et Zhang, 2003].

3 Application du schéma de Godunov au modèle de trafic hétérogène

Nous allons présenter plus en détails dans ce chapitre la méthode de Godunov, ainsi que la façon dont elle s'applique aux modèles d'écoulement du trafic. Dans un deuxième temps, nous l'appliquerons à notre modèle de trafic hétérogène.

3.1 Méthode de Godunov et modèles de trafic

Cette méthode de résolution numérique, basée sur un découpage spatio-temporel du problème à résoudre, a été proposée par Godunov en 1959 ; l'idée était, dans le cas d'équations de conservation, d'utiliser les informations des caractéristiques et notamment leur signe pour bâtir un schéma aux différences finies performant.

Page 159: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

157

3.1.1 Principes de fonctionnement

Le calcul est illustré par la Figure 5-4 pour le modèle de trafic LWR. Il se fait de la façon suivante.

On définit une grille spatio-temporelle respectant la condition CFL (5.8) ; celle-ci correspond, dans le cas du modèle LWR, à ce que le pas d'espace ∆x empêche l'information la plus rapide, ici la caractéristique du trafic de densité nulle (vitesse Vmax), de parcourir plus d'une cellule en un pas de temps ∆t.

A partir de la solution numérique donnant les concentrations de trafic Ki à l'instant tj en différents points de cette grille (en xi = x1, x2 = x1 + ∆x, x3 = x2 + ∆x, …), on construit une fonction définie sur l'ensemble des x : kj(x,tj), valable à cet instant tj (phase 1 de la figure) :

( ) ( ), pour tout entre et j ij j i ik x t K t x x x x≡ + ∆

A la différence des autres schémas aux différences finies classiques du premier ordre, cette fonction constante par morceaux à l'instant tj ne sera pas considérée comme constante jusqu'à tj+1 = tj + ∆t. En effet, on va l'utiliser pour résoudre, de façon exacte, les mini-problèmes de Riemann ainsi constitués (discontinuités en x1, x2 = x1 + ∆x, x3 = x2 + ∆x, …), entre tj et tj + ∆t (phase 2 de la figure).

La solution générale du problème sur le pas de temps considéré n'est rien d'autre que la juxtaposition des solutions des mini-problèmes de Riemann jusqu'à ce que les ondes de choc ou de raréfaction générées par deux mini-problèmes de Riemann consécutifs interagissent : ceci ne se produit pas sur la figure, mais on pourrait imaginer, par exemple, que l'onde de choc issue de x3 soit négative et rencontre l'éventail issu de x2 avant tj+1

62. Il serait alors nécessaire de reconsidérer un mini-problème de Riemann à l'endroit de la jonction des ondes pour poursuivre le calcul exact, ce qui peut devenir difficile à mettre en œuvre.

La solution exacte au temps tj+1 : kj(x,tj+1) (phase 3), calculée à partir de l'évolution sur le pas de temps de kj(x,tj), est approximée au temps tj+1 par le profil : kj+1(x,tj+1) (phase 4) de la façon suivante :

( ) ( )1 , i

i

x xi jj j j j

x

K t t k x t t dxx

+∆

+ ∆ = + ∆∆ ∫ (5.9)

ce qui permet de passer à l'itération suivante.

Comme mentionné plus haut, la méthode peut toutefois s'avérer délicate à mettre en œuvre à cause de l'interaction potentielle des ondes avant tj+1 ; en, effet, la condition CFL empêche les ondes d'atteindre avant la fin du pas de temps la frontière de la cellule précédente ou suivante, mais pas la collision d'ondes issues de deux mini-problèmes de Riemann consécutifs.

62 En fait, cette situation est même impossible dans un modèle de trafic macroscopique pour une forme classique (de type Greenshields) de diagramme fondamental.

Page 160: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

158

K1 (t

j)

K2 (t

j)

K3 (t

j)

K4 (t

j)

K5 (t

j)

kj(x,tj)

PHASE 1

x1

x2

x3

x4

x5

x6

Onde de Choc

Onde de Choc

tj+1

= tj+∆tt

j

PHASE 2

Eventail

Eventail

kj(x,t) kj(x,tj+1

)

Sol

utio

n ex

acte

en

conc

entr

atio

ns

PHASE 3

K1 (t

j+1)

K2 (t

j+1)

K3 (t

j+1)

K4 (t

j+1)

K5 (t

j+1)

kj+1(x,tj+1

)

Sol

utio

n nu

mér

ique

apr

ès m

oyen

ne

PHASE 4 Figure 5-4 : Résolution par le schéma de Godunov du modèle LWR

Cependant, ces difficultés de calcul sont évitées grâce à l'existence de la relation de conservation très simple suivante :

( ) ( ) ( ) ( )( )1 11 1 1

i i i i i ij j j j j j

tK t K t Q t t Q t tx

−> + − −>+ + +

∆= − − > − − >∆

(5.10)

avec

( ) ( ) ( )( )( ) ( ) ( )( )

1 11

1 11

, le débit sortant de la cellule i

, le débit entrant dans la cellule i

i i i ij j j j

i i i ij j j j

Q t t Q K t K t

Q t t Q K t K t

−> + ++

− −> −+

− > = − > = (5.11)

les Q étant les débits exacts que l'on peut calculer à chaque interface x1, x2 = x1 + ∆x, x3 = x2 + ∆x, … dans la phase 2. L'intérêt de leur utilisation à la place des concentrations pour le calcul du profil final est que la condition CFL assure qu'aucune onde ne viendra les perturber pendant tout le pas de temps63 : ils sont donc constants durant le pas de

63 Même en cas d'interaction d'ondes de deux mini-problèmes de Riemann consécutifs.

Page 161: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

159

temps [tj, tj + ∆t] ! Comme par ailleurs ils ne dépendent que des états de trafic des cellules amont et aval à l'instant tj, leur calcul est aisé, et la réactualisation (5.10) du profil de concentration devient à son tour facile.

Cette simplification du calcul est l'une des forces principales du schéma de Godunov.

3.1.2 Méthode de Godunov et concepts physiques de trafic

L'intérêt de l'utilisation de la méthode de Godunov pour les modèles de trafic réside également dans la signification physique que l'on peut donner à la mise en œuvre du schéma ; une signification par ailleurs liée à la possibilité de mettre en place un calcul très simple du débit entre deux cellules numériques.

Un calcul simple du débit

En effet, avec la formule (5.10), le calcul ne nécessite que la détermination du débit à la frontière de chaque cellule connaissant les états de trafic amont et aval ; il faut donc résoudre chaque problème de Riemann pouvant apparaître selon ces états de trafic, et mettre en évidence l'état de trafic qui va persister sur la frontière.

Cependant, dans le cas du modèle de trafic LWR du premier ordre, les débits sont reliés aux concentrations de trafic par le diagramme fondamental Qéq(K), dont la forme conduit généralement à des propriétés de signe pour les caractéristiques impliquées dans la résolution du problème de Riemann. Ainsi, les caractéristiques, qui correspondent à la pente de la dérivée du diagramme fondamental dans le cas scalaire, sont de vitesse positive si le trafic est fluide (voir le point A de la Figure 5-5), négative si le trafic est congestionné (voir le point B). De plus, le point C de capacité du diagramme porte la caractéristique de vitesse nulle (que le diagramme fondamental choisi soit ou non continûment dérivable en ce point) :

A

B

C

Déb

it

ConcentrationK

cK

max

FLUIDE CONGESTION

Figure 5-5 : Diagramme fondamental Qéq(K) et vitesse des caractéristiques (trait fin)

L'étude des différents problèmes de Riemann possibles pour le modèle LWR, menée par [Lebacque, 1996] et [Daganzo, 1995], a permis de montrer que le débit persistant sur la frontière entre une cellule i et la cellule suivante i+1 durant un pas de temps [tj, tj+1 = tj + ∆t] pouvait se calculer sans distinguer les différents cas par la formule générale suivante :

Page 162: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

160

( ) ( )( ) ( )( )( )1 11 min , i i i i

j j j jQ t t K t K t−> + ++− > = ∆ Ω (5.12)

où Ω et ∆ sont deux fonctions permettant de caractériser, au début du pas de temps, l'état de trafic des cellules consécutives à l'interface desquelles on cherche le débit.

∆ (K) est la fonction suivante (voir Figure 5-6 (a)) :

( ) ( ) [ ]

( ) [ ]

si 0,

Capacité si ,

éqc

c max

K Q K K K

K K K K

∆ = ∈∆ = ∈ (5.13)

Quant à Ω (K), elle s'exprime selon (voir Figure 5-6 (b)) :

( ) [ ]

( ) ( ) [ ]

Capacité si 0,

si ,

c

éqc max

K K K

K Q K K K K

Ω = ∈Ω = ∈ (5.14)

Dem

ande

Concentration

Capacité

Kc

Kmax

FLUIDE CONGESTION

Offr

e

Concentration

Capacité

Kc

Kmax

FLUIDE CONGESTION

Figure 5-6 : Fonctions de demande et d'offre locales de trafic

Signification physique des fonctions d'offre et de demande

Outre le fait qu'elles permettent le calcul des débits par la seule formule (5.12), ces deux fonctions ont une signification physique.

La fonction ∆ représente le débit de trafic souhaitant quitter une cellule numérique ; égal au débit d'équilibre si le trafic est fluide, il correspond à la capacité en cas de trafic congestionné. Pour ces raisons, la fonction ∆ est appelée demande locale de trafic.

La fonction Ω, quant à elle, représente le débit de trafic pouvant entrer dans une cellule numérique ; égal au débit d'équilibre si le trafic est en congestion, ce débit correspond à la capacité si le trafic est fluide. Pour ces raisons, la fonction Ω est appelée offre locale de trafic.

Cette remarquable signification physique du schéma numérique pour le modèle LWR permet non seulement de comprendre facilement le fonctionnement du calcul numérique, mais également de rattacher aisément les résultats obtenus en simulation à un phénomène physique de trafic (une carence d'offre ou une trop forte demande par exemple).

Page 163: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

161

3.2 Un schéma numérique de type Godunov pour le modèle hétérogène

Suivant les principes énoncés plus haut, nous allons mettre en place, pour le modèle de trafic hétérogène que nous avons développé, un schéma numérique de type Godunov.

La méthode de construction de ce schéma est analogue à la démarche suivie par [Zhang, 2001] pour la résolution numérique de son modèle d'ordre supérieur, tout comme celle suivie par [Jin et Zhang, 2003] pour leur modèle à nombre de voies variable : on étudie les différents problèmes de Riemann que l'on peut rencontrer dans la résolution du modèle, et notamment on détermine quel est l'état de trafic, et donc le débit, qui persiste sur la frontière de cellule durant le pas de temps, afin d'appliquer la relation (5.10).

3.2.1 Objectifs et attentes

Les propriétés de signe de notre modèle nous permettent d'espérer que plusieurs problèmes de Riemann conduisent au même type de débit sur la frontière, et que l'on puisse donc au final synthétiser le calcul de ce débit pour tous les problèmes possibles de Riemann par une formule aussi contractée que celle obtenue pour le modèle LWR.

L'intérêt de la méthode de Godunov prendrait aussi tout son sens si les débits sur la frontière s'avéraient le plus souvent déjà connus, et ne généreraient par conséquent pas de calculs spécifiques supplémentaires lors de la mise en œuvre du schéma : ce serait le cas s'il s'agissait des débits des états initiaux amont ou aval du problème de Riemann. On espère aussi pouvoir éviter autant que possible d'avoir à calculer explicitement l'état intermédiaire que génère la résolution du problème de Riemann (à moins que cet état soit suffisamment particulier pour que son calcul soit facile).

Enfin, il conviendra d'étudier si lors de la mise en œuvre du schéma il est possible d'attribuer une signification physique aux calculs menés pour la résolution numérique, et notamment s'il existe des fonctions équivalentes, pour le modèle de trafic hétérogène, à celles de demande et d'offre locales (5.13) et (5.14) mises en évidence pour le modèle LWR.

3.2.2 Construction d'un schéma de Godunov pour le modèle de trafic hétérogène

Application d'une condition CFL

Pour que notre schéma numérique soit stable, et en accord avec la formulation de la condition de stabilité CFL (5.8), on applique une discrétisation spatio-temporelle de telle sorte que :

max ixt

λ ∆≤∆

(5.15)

L'expression des valeurs propres (4.21) et (4.24) et la Figure 4-3 nous indiquent que ce maximum de valeurs propres correspond à la deuxième valeur propre pour l'état de trafic de densités nulles, égale à la vitesse libre des véhicules légers :

( )2 1max 0, 0i Vλ λ= = (5.16)

Page 164: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

162

Par conséquent, on bâtit par la suite la discrétisation spatio-temporelle de façon à ce qu'un véhicule léger ne puisse pas parcourir plus qu'une cellule en un pas de temps ; il est donc nécessaire que le nombre suivant :

1t Vx

δ ∆=∆

(5.17)

appelé nombre de Courant, soit au plus égal à 1.

Rappel des propriétés de signe des caractéristiques du modèle

hétérogène

Le principe de la méthode de Godunov est d'anticiper sur le sens de propagation de l'information. Dans ce cadre, les propriétés de signe que possèdent les caractéristiques du modèle hétérogène construit vont être utiles dans le recensement des différents problèmes de Riemann possibles.

Rappelons ainsi que la première valeur propre λ1 est toujours positive en trafic fluide et toujours négative en situation congestionnée. Quant à la deuxième valeur propre λ2, elle est positive quel que soit l'état du trafic.

Rappelons également que la vitesse d'une i-onde de choc est comprise entre les valeurs propres i des états qu'elle sépare, alors qu'une i-onde de raréfaction couvre une zone spatio-temporelle délimitée par la propagation des caractéristiques de type i (se déplaçant à la vitesse λi) des états de trafic qu'elle sépare.

Grâce aux propriétés de signe des valeurs propres, on a donc les propriétés suivantes de propagation des différentes ondes (de type 1 ou 2) lors de la résolution du problème de Riemann :

• les 2-ondes (2-chocs ou 2-raréfactions) se propagent vers l'aval, quels que soient les états impliqués ;

• entre deux trafics fluides, les 1-ondes (1-chocs ou 1-raréfactions) se propagent vers l'aval ;

• entre deux trafics congestionnés, les 1-ondes (1-chocs ou 1-raréfactions) se propagent vers l'amont ;

• entre un trafic congestionné et un trafic fluide, un 1-choc (cas d'un trafic fluide situé derrière un trafic congestionné) peut se propager vers l'amont ou l'aval, une 1-raréfaction (cas d'un trafic congestionné situé derrière un trafic fluide) couvre une zone espace-temps incluant le lieu de la discontinuité initiale.

Page 165: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

163

Classement des différents problèmes de Riemann possibles

Pour appliquer un schéma de type Godunov, il est nécessaire de déterminer quel état de trafic persiste durant un pas de temps à l'endroit de la discontinuité initiale.

Sur la base des propriétés de signe recensées au paragraphe précédent, on a donc, dans l'optique d'appliquer une telle méthode numérique, quatre types de problèmes de Riemann à étudier selon le caractère fluide ou congestionné des états de trafic initiaux en amont et en aval : états amont et aval fluides (cas 1), état amont fluide et état aval congestionné (cas 2), états amont et aval congestionnés (cas 3), état amont congestionné et état aval fluide (cas 4). Ces quatre cas sont résumés dans le tableau suivant :

Etats de trafic Aval fluide Aval congestionné Amont fluide [Cas 1] [Cas 2]

Amont congestionné [Cas 4] [Cas 3]

Tableau 5-1 : Les quatre cas types du problème de Riemann

Si l'on note G l'état amont du problème de Riemann, D l'état aval et I l'état intermédiaire, on a les représentations graphiques suivantes de ces cas dans le plan (t,x) :

x=0

D fluide

G fluide

I fluide

[Cas 1]

t

x

x=0

D congestionné

G fluide

I2 congestionné

I2 congestionné

ou G fluide

[Cas 2]

Si s<0

Si s>0

t

x

x=0

D fluide

G congestionné

I fluide

F capacité

[Cas 4]

t

x

x=0

D congestionné

G congestionné

I1 congestionné

[Cas 3]

t

x

Figure 5-7 : Méthode de Godunov et problèmes de Riemann types

Les pointillés représentent une onde qui peut être de choc ou de raréfaction Les points représentent les ondes de contact

Page 166: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

164

Cas 1 (basé sur les Figure 4-25 à Figure 4-28) : Quel que soit leur type (choc ou raréfaction), les deux ondes se propagent vers

l'aval et l'état persistant sur la frontière x = 0 est l'état amont G.

Cas 2 (basé sur les Figure 4-29 et Figure 4-30) : La 2-onde est une onde de contact se propageant vers l'aval. La 1-onde est un choc,

dont la vitesse peut être positive ou négative. Dans le premier cas, c'est l'état amont G qui persiste sur la frontière x = 0, dans le second cas, il s'agit de l'état intermédiaire I2. Ce dernier ne présente pas de caractéristiques particulières.

Cas 3 (basé sur la Figure 4-31) : La 1-onde et la 2-onde sont des ondes de contact ; la 1-contact se propage vers

l'amont et la 2-contact vers l'aval. Par conséquent, c'est l'état amont I1 qui persiste sur la frontière x = 0. Ce dernier présente des caractéristiques particulières aisées à calculer : il présente la même composition relative que l'état amont G et la même densité (ou vitesse) que l'état aval D.

Cas 4 (basé sur les Figure 4-32 et Figure 4-33) : La 2-onde se propage vers l'aval. Quant à la 1-onde, il s'agit d'une 1-raréfaction un

peu particulière : il s'agit d'un contact jusqu'à un état F situé sur la ligne de capacité et de composition de trafic semblable à l'état amont G. Ce dernier est alors relié par une véritable 1-raréfaction, entièrement orientée vers l'aval, avec l'état intermédiaire I. C'est donc cet état intermédiaire F, aux caractéristiques particulières, qui persiste sur la frontière x = 0.

Etats résultants sur la frontière

Le tableau suivant récapitule l'état qui servira à calculer, sur la durée du pas de temps ∆t, les flux à la frontière constituée par la discontinuité initiale du problème de Riemann, et permettra d'utiliser la formule (5.10) :

Etats de trafic Etat aval D fluide Etat aval D congestionné

Etat amont G fluide

G (fluide) [Cas 1]

I2 (congestionné) (si s<0)

ou G (fluide) (si s>0)

[Cas 2]

Etat amont G congestionné

F (capacité) [Cas 4] I1 (congestionné) [Cas 3]

Tableau 5-2 : Etats de trafic sur la frontière du problème de Riemann selon les états initiaux

Il est donc nécessaire de connaître les états de trafic G, F, I1 et I2. On connaît déjà l'état de trafic G puisqu'il constitue l'un des deux états initiaux du problème de Riemann. Il reste à exprimer les états F, I1 et I2.

Page 167: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

165

L'état F est aisé à calculer ; il a la même composition relative que l'état G et se situe à capacité :

1 1

22

1 2

f g

gf

f fcv v V

ρ ρρρ

= = =

(5.18)

L'état I1 est également aisé à calculer ; il a la même composition relative que l'état G et la même densité totale, et donc la même vitesse, que l'état D :

1 1

2 2

gint

gint

int d

ρρρρ

ρ ρ

= =

(5.19)

L'état I2 est en fait le seul état dont l'expression nécessite un calcul plus complexe. Il réside sur la frontière si la vitesse de la 1-onde de choc est négative. A l'intersection de la courbe de 1-choc entropique de l'état G et de la courbe de 2-contact de l'état D, on sait toutefois qu'il a la même densité totale, et donc la même vitesse, que l'état D. Un calcul plus poussé amène à sa caractérisation selon :

1 1 1 2 2 1

1

2 1

g g g g g gd dint

g d g

int d int

f f f fv f

ρ ρ ρ ρρρ

ρ ρ ρ

− − + = − = −

(5.20)

Par ailleurs, le signe de la vitesse de la 1-onde de choc est le même que celui de :

d g

d gf fρ ρ

−−

(5.21)

Par conséquent, on note ici qu'il sera assez facile de calculer le flux sur la frontière du problème de Riemann, excepté dans le cas de l'état I2. Dans les autres cas, le flux est celui d'un des deux états initiaux ou celui d'un état partageant une propriété remarquable (fonctionnement à capacité, même composition du trafic ou même densité qu'un des états initiaux).

3.2.3 Extension des concepts physiques d'offre et de demande au trafic hétérogène

Le paragraphe précédent a permis de mettre en évidence les états de trafic qui seront à prendre en compte pour le calcul des flux à chaque pas de temps de notre résolution numérique.

Il devient alors intéressant d'étudier si l'on peut ici, tout comme lors de la résolution numérique du modèle LWR par une méthode de Godunov, définir des concepts d'offre et de demande de trafic hétérogène qui serviraient par ailleurs d'appui à un calcul unique des débits lors de la résolution, comme le permet la formule (5.12) pour LWR.

[Logghe, 2003] avait tenté de mettre en place de tels concepts d'offre et de demande, mais sans repartir de la solution analytique des mini-problèmes de Riemann ; ceci avait conduit à une formulation erronée de ces concepts. Il est en effet nécessaire, une fois définies une offre et une demande locales de trafic hétérogène, de vérifier si leur utilisation dans le calcul des débits conduit bien aux débits prévus par l'étude des mini-problèmes de Riemann du paragraphe 3.2.2.

Page 168: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

166

Définition d'une demande de trafic hétérogène

En trafic fluide, le concept de demande locale de trafic en véhicules légers ou en poids lourds est facile à appréhender ; il suffit de le définir de façon identique à celui de la demande du modèle LWR, en tenant compte des concentrations et des vitesses spécifiques à chaque type de véhicules : on obtient alors une demande en véhicules légers ∆1 et une demande en poids lourds ∆2 qui correspondent aux débits partiels d'équilibre :

( ) ( )

( ) ( )

1 1 1

2 2 2 en trafic fluide

k v

k v

∆ =∆ =

k k

k k (5.22)

La demande globale peut se définir simplement, comme la somme des deux demandes partielles en véhicules légers et en poids lourds, moyennant l'utilisation d'un coefficient d'équivalence e pour la demande des poids lourds. Elle s'exprime alors en unités de véhicules légers selon :

( ) ( ) ( )1 2 en trafic fluidee∆ = ∆ + ∆k k k (5.23)

En trafic congestionné, tous les véhicules allant à la même vitesse, on appréhende facilement une demande globale en unités de véhicules légers, égale à la capacité C (intrinsèque, c'est-à-dire en unités de véhicules légers) de l'infrastructure :

( )1

Capacité = en trafic congestionnécNVLα∆ =k (5.24)

Les demandes partielles (en véhicules de chaque type) peuvent alors être simplement définies au prorata de cette demande globale, selon la composition du trafic avec pondération des poids lourds par le coefficient d'équivalence :

( )

( )

11

1 2

22

1 2

en trafic congestionné

k Ck ekk C

k ek

∆ = +∆ = +

k

k (5.25)

Le coefficient d'équivalence e sert à exprimer l'équivalence de la demande poids lourds en unités de véhicules légers. L'utilisation des densités ρi = Liki à la place des concentrations par pondération de ces dernières par un coefficient représentatif de l'occupation de l'espace des différentes classes remplit déjà cette fonction. On peut donc définir les demandes partielles et la demande totale plus simplement selon :

( ) ( )

( ) ( )

( ) ( ) ( )

1 1 1

2 2 2

1 2

en trafic fluide

v

v

ρ

ρ

∆ = ∆ =∆ = ∆ + ∆

ρ ρρ ρ

ρ ρ ρ (5.26)

( )

( ) ( )( )

( ) ( )

1

2

1 en trafic congestionnéc c

c c

c c

V

V

V

ρ

ψ ρ

ψ ρ

∆ =∆ = − ∆ =

ρρ ρ

ρ ρ (5.27)

On rappelle ici que ψ est le rapport entre la densité en poids lourds ρ2 et la densité totale ρ.

Page 169: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

167

Ces demandes sont exprimées en termes d'espace occupé. Elles sont par ailleurs aisées à traduire d'un point de vue physique, puisqu'elles correspondent aux flux d'équilibre (trafic fluide) ou à la capacité (trafic congestionné).

Définition d'une offre de trafic hétérogène

L'offre reste un concept global : il n'y a pas de sens à considérer des offres partielles, tous les types de véhicules ayant, a priori, accès à toute l'infrastructure.

En trafic fluide, l'offre globale, exprimée en espace occupé, est logiquement prise égale à la capacité de l'infrastructure :

( ) en trafic fluidec cVρΩ =ρ (5.28)

En trafic congestionné, l'offre est prise égale au flux d'équilibre (en termes d'espace occupé) prévu par le diagramme fondamental :

( ) ( ) en trafic congestionnévρΩ =ρ ρ (5.29)

Ces offres sont exprimées en termes d'espace occupé. Elles sont aisées à traduire d'un point de vue physique, puisque qu'elles correspondent aux flux d'équilibre (trafic congestionné) ou à la capacité (trafic fluide).

Calcul des débits avec les concepts d'offre et de demande

Principe

De façon similaire au calcul mené pour le modèle LWR, on propose de calculer le flux Fi->i+1, en espace occupé, entre la cellule i et la cellule suivante i+1 durant un pas de temps [tj, tj+1 = tj + ∆t] selon :

( ) ( )( ) ( )( )( )1 11 min , i i i i

j j j jF t t t t−> + ++− > = ∆ Ωρ ρ (5.30)

A un pas de temps donné, si la demande de trafic hétérogène est inférieure à l'offre, la demande peut s'écouler entièrement. On considère alors que les demandes partielles sont satisfaites et que l'on a les flux partiels suivants :

( )( )

( ) ( )1

11 11

22

si i i i

i ii i i

f

f

−> ++

−> +

= ∆ ∆ ≤ Ω = ∆

ρρ ρ

ρ (5.31)

Si la demande de trafic hétérogène est supérieure à l'offre, le flux de trafic est pris égal à cette offre, et il est réparti entre les flux partiels selon la composition de la demande :

( ) ( )

( )( ) ( )

1 11 1

1 12

1 si

i i i ii i

i i i i

f

f

−> + ++

−> + +

= − Ψ Ω ∆ > Ω = Ψ Ω

ρρ ρ

ρ (5.32)

Vérification de l'application de l'offre et de la demande

Les flux proposés par l'application de la formule (5.30) liée à l'utilisation des concepts d'offre et de demande de trafic hétérogène définis plus haut doivent être confrontés aux flux obtenus par l'étude des problèmes de Riemann exposée dans le Tableau 5-2. Nous le faisons ci-dessous pour les quatre types de problèmes de Riemann recensés par la Figure 5-7. Nous allons vérifier que la formule d'offre et demande de trafic

Page 170: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

168

hétérogène permet de calculer correctement les flux dans les cas 1, 3 et 4, mais qu'elle échoue dans le cas 2, que nous aborderons en dernier.

Cas 1 : Etats amont et aval fluides

L'état aval est fluide donc l'offre est égale à la capacité. L'état amont est fluide. En utilisant la définition de la demande en trafic fluide (5.26), la formule (5.31) prévoit donc des flux correspondant à :

( ) ( )

( ) ( )

11 1 11

12 2 22

i i i g

i i i g

f v

f v

ρ

ρ

−> +

−> +

= ∆ = = ∆ =

ρ ρ

ρ ρ (5.33)

Ces flux correspondent à ceux de l'état amont G, en accord avec ce qui était prévu par le problème de Riemann correspondant dans le Tableau 5-2.

Cas 3 : Etats amont et aval congestionnés

L'état aval est congestionné, l'offre est donc égale au flux d'équilibre. L'état amont est aussi congestionné, la demande est donc égale à la capacité.

Par conséquent, en utilisant la définition de l'offre en congestion (5.29), l'application de la formule (5.32) conduit à des flux correspondant à :

( ) ( ) ( ) ( )

( ) ( )

1 11

1 12

1 1i i i i g d d

i i i i g d d

f v

f v

ρ

ρ

−> + +

−> + +

= − Ψ Ω = − Ψ = Ψ Ω = Ψ

ρ ρ

ρ ρ (5.34)

Ces flux sont ceux d'un état de trafic congestionné, dont la composition de trafic est celle de l'état amont G, et dont la vitesse d'équilibre est celle de l'état aval D. Ceci correspond bien aux flux de l'état de trafic I1 que prévoit la résolution du problème de Riemann (cf. Tableau 5-2).

Cas 4 : Etat amont congestionné, état aval fluide

L'état amont est congestionné, la demande est donc égale à la capacité. L'état aval est fluide, l'offre est donc aussi égale à la capacité. En utilisant la définition de la demande en congestion (5.27), l'application de la formule (5.31) donne les flux suivants :

( ) ( )

( )

111

122

1i i i gc c

i i i gc c

f V

f V

ψ ρ

ψ ρ

−> +

−> +

= ∆ = − = ∆ =

ρ

ρ (5.35)

Ces flux sont ceux d'un état fonctionnant à capacité, et dont la composition du trafic est semblable à celle de l'état amont G. Ceci correspond bien à l'état F prévu par la résolution du problème de Riemann et inscrit dans le Tableau 5-2.

Cas 2 : Etat amont fluide, état aval congestionné

L'état amont est fluide, sa demande est donc égale au flux d'équilibre. L'état aval est congestionné, l'offre est donc égale à son flux d'équilibre. Deux cas se présentent alors :

• l'offre est supérieure à la demande : alors le flux d'équilibre f g est inférieur au flux d'équilibre f d. Comme ρg est inférieur à ρd (états amont fluide, aval congestionné), la vitesse de la 1-onde de choc est positive (voir formule (5.21)). Le Tableau 5-2 prévoit donc sur la frontière la présence de l'état G ;

Page 171: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

169

• l'offre est inférieure à la demande : alors le flux d'équilibre f g est supérieur au flux d'équilibre f d. Comme ρg est inférieur à ρd (états amont fluide, aval congestionné), la vitesse de la 1-onde de choc est négative (voir formule (5.21)). Le Tableau 5-2 prévoit donc sur la frontière l'état I2.

Dans ces deux cas, l'application des concepts d'offre et de demande (5.30) conduit respectivement aux flux suivants :

• dans le cas où la 1-choc est positive et où par conséquent l'offre de trafic hétérogène est supérieure à la demande, l'application de la formule (5.31), avec la définition de la demande en trafic fluide (5.26), conduit à :

( ) ( )

( ) ( )

11 11 1

12 22 2

gi i i g

gi i i g

f v

f v

ρ

ρ

−> +

−> +

= ∆ = = ∆ =

ρ ρ

ρ ρ (5.36)

ce qui correspond aux flux de l'état de trafic G, comme prévu par l'étude du problème de Riemann ;

• dans le cas où la 1-choc est négative et où par conséquent l'offre de trafic hétérogène est inférieure à la demande, l'application de la formule (5.32), avec la définition de l'offre en trafic congestionné (5.29), conduit à :

( ) ( ) ( ) ( )

( ) ( )

1 11

1 12

1 1 i i i i g d d

i i i i g d d

f v

f v

ρ

ρ

−> + +

−> + +

= − Ψ Ω = − Ψ = Ψ Ω = Ψ

ρ ρ

ρ ρ (5.37)

ce qui correspond aux flux d'un état de trafic de même vitesse que l'état aval D et de même composition que l'état amont G. Ceci ne correspond pas à l'état I2 prévu par le problème de Riemann.

Conclusion

L'application dans le calcul du schéma numérique des concepts d'offre et de demande de trafic hétérogène s'avère correcte dans tous les cas de figure sauf un. Ce dernier cas, pour lequel il n'est pas possible d'appliquer les concepts d'offre et de demande de trafic hétérogène, correspond à un état de trafic amont fluide et un trafic aval congestionné (arrivée de véhicules sur une file d'attente par exemple), avec une offre inférieure à la demande (remontée de la queue de bouchon vers l'amont). Il est alors nécessaire de calculer explicitement l'état intermédiaire correspondant, I2. Si cela se produit pour la condition aux limites en entrée, cela nécessite de donner les densités et flux partiels64.

Dans tous les autres cas, l'application des concepts d'offre et de demande de trafic hétérogène et le calcul des flux par la formule du minimum est correcte. Elle permet de calculer, de façon unique, les flux nécessaires au fonctionnement du schéma numérique. De plus, elle permet de définir facilement les conditions aux limites.

C'est par conséquent ce type de calculs (application de la formule du minimum sauf dans le cas mentionné ci-dessus pour lequel on calcule explicitement l'état intermédiaire) qui a été implémenté afin de réaliser les simulations étudiées par la suite.

64 La sortie ne pose jamais problème car dans le cas où l'état intermédiaire doit être explicitement calculé l'offre de trafic hétérogène suffit comme condition aux limites : en cas de non-concordance de la composition du trafic, il se crée une 2-onde d'adaptation de vitesse égale à celle du trafic donc positive et n'interférant pas sur la section courante.

Page 172: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

170

4 Etude du comportement du modèle en simulation

Plusieurs simulations de trafic ont été menées à l'aide de la résolution numérique bâtie ci-dessus afin d'étudier le comportement du modèle. Elles sont exposées ici.

Elles ont pour but de vérifier que le modèle permet effectivement de représenter des caractéristiques générales d'un trafic hétérogène comme une avancée différente des véhicules légers et des poids lourds, mais également de mettre en évidence d'autres phénomènes moins intuitifs. Elles vont aussi permettre de s'assurer que la résolution du modèle est maîtrisée, et que ce dernier se comporte correctement, y compris autour des points ombilicaux évoqués au chapitre 4 ou lorsque l'on fait l'hypothèse d'une vitesse poids lourds constante en trafic fluide.

Dans la suite, et en cohérence avec les données terrain du chapitre 3, on a pris les paramètres suivants pour les simulations : N = 3 voies, V1 = 35 m/s, V2 = 25 m/s, Vc = 20 m/s, α = 0.25, ∆t = 0.2 s, ∆x = 7 m. On suppose par ailleurs que les poids lourds ont une longueur caractéristique 3 fois plus importante que les véhicules légers. Le pas de temps de simulation est choisi petit afin de limiter la dissipation du schéma de Godunov (un paragraphe à la fin de cette quatrième partie étudie brièvement son influence).

4.1 Evolution d'un trafic hétérogène

Il s'agit ici de vérifier que le modèle permet d'observer correctement l'évolution d'un trafic hétérogène, à la fois en termes d'avancée plus rapide des véhicules légers, de ralentissements causés par la présence de poids lourds et lors des phases d'arrêt et de redémarrage dans une file d'attente.

4.1.1 Propagation plus rapide des véhicules légers

Une des caractéristiques premières que l'on attend du modèle hétérogène construit est qu'il permette de représenter l'avancée plus rapide des véhicules légers par rapport aux poids lourds. Pour cela, on a simulé l'évolution d'un peloton de véhicules composé en densité à 20 % de poids lourds (soit 7.7 % des véhicules si on suppose que les PL sont trois fois plus longs que les véhicules légers), pour une densité initiale de 0.5 m/m65 (trafic fluide), et situé initialement sur les 15 premières cellules de discrétisation, soit 105 m.

65 Mètres occupés par mètre de voirie.

Page 173: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

171

0 1 2 3 4 5 6 70

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5 t = 0 s

Den

sité

tota

le (

m/m

)

0 1 2 3 4 5 6 70

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5 t = 40 s

Espace (km)0 1 2 3 4 5 6 7

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5 t = 80 s

0 1 2 3 4 5 6 70

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5 t = 120 s

Den

sité

tota

le (

m/m

)

0 1 2 3 4 5 6 70

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5 t = 160 s

Espace (km)0 1 2 3 4 5 6 7

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5 t = 200 s

Figure 5-8 : Propagation d'un peloton de véhicules dont 7.7 % sont des poids lourds

(20 % de la densité)

On note une séparation progressive du peloton en deux sous-pelotons : le plus lent est composé des poids lourds, alors que le plus rapide est celui des véhicules légers, qui parviennent donc peu à peu à se détacher des véhicules lents : la séparation est pratiquement complète après 80 s.

Page 174: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

172

Si l'on inverse les proportions dans le peloton initial en le supposant composé, en densité, à 80 % de poids lourds (57 % des véhicules), on observe une évolution semblable :

0 1 2 3 4 5 6 70

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5 t = 0 s

Den

sité

tota

le (

m/m

)

0 1 2 3 4 5 6 70

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5 t = 40 s

Espace (km)0 1 2 3 4 5 6 7

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5 t = 80 s

0 1 2 3 4 5 6 70

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5 t = 120 s

Den

sité

tota

le (

m/m

)

0 1 2 3 4 5 6 70

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5 t = 160 s

Espace (km)0 1 2 3 4 5 6 7

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5 t = 200 s

Figure 5-9 : Propagation d'un peloton de véhicules dont 57 % sont des poids lourds

(80 % de la densité)

Page 175: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

173

4.1.2 Perturbations liées à la présence de poids lourds

Quand un peloton de véhicules légers rencontre et doit dépasser un peloton de poids lourds, on s'attend à ce qu'il perde du temps. Ceci est observé dans l'utilisation de notre modèle et est illustré par les figures suivantes. On y observe le déplacement d'un peloton composé uniquement de véhicules légers rattrapant un peloton composé uniquement de poids lourds. En conditions initiales, on fixe à 0.75 m/m la densité des deux pelotons.

Dans le cas où il n'y a pas de peloton poids lourds devant le peloton véhicules légers, on a l'évolution suivante :

0 2 4 6 8 10 12 140

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8t = 0 s

Den

sité

s pa

rtie

lles

(m/m

)

0 2 4 6 8 10 12 140

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8t = 80 s

Espace (km)0 2 4 6 8 10 12 14

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8t = 160 s

0 2 4 6 8 10 12 140

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8t = 240 s

Den

sité

s pa

rtie

lles

(m/m

)

0 2 4 6 8 10 12 140

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8t = 320 s

Espace (km)0 2 4 6 8 10 12 14

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8t = 400 s

Figure 5-10 : Evolution d'un peloton de véhicules légers (sans nécessité de

dépassement)

Page 176: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

174

Quand on interpose un peloton de poids lourds sur le trajet des véhicules légers, ceux-ci sont, comme attendu par l'intuition physique, ralentis et le peloton se déforme :

0 2 4 6 8 10 12 140

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8 t = 0 sD

ensi

tés

part

ielle

s (m

/m)

VLPL

0 2 4 6 8 10 12 140

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8 t = 80 s

Espace (km)

VLPL

0 2 4 6 8 10 12 140

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8 t = 160 s VLPL

0 2 4 6 8 10 12 140

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8 t = 240 s

Den

sité

s pa

rtie

lles

(m/m

)

VLPL

0 2 4 6 8 10 12 140

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8 t = 320 s

Espace (km)

VLPL

0 2 4 6 8 10 12 140

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8 t = 400 s VLPL

Figure 5-11 : Evolution d'un peloton de véhicules légers (trait plein)

lors du dépassement d'un peloton de poids lourds (pointillés)

On observe notamment très bien la formation d'un ralentissement des véhicules légers derrière le peloton de poids lourds ainsi que l'échappée des véhicules légers dès que ceux-ci ont fini le dépassement. Ainsi, la déformation du peloton de véhicules légers est très différente de celle observée en l'absence de poids lourds sur la Figure 5-10.

4.1.3 Arrivée d'un trafic hétérogène sur une file d'attente

Un cas de simulation intéressant est l'arrivée d'un trafic hétérogène sur une file d'attente, elle aussi hétérogène, à l'arrêt. Ceci correspond notamment à l'arrivée sur un feu tricolore, ou encore sur un incident bloquant totalement l'écoulement de l'infrastructure. De plus, lors de la mise en œuvre du schéma numérique, il s'agit du cas où l'on ne peut appliquer les concepts d'offre et de demande en trafic hétérogène et pour lequel on doit calculer explicitement l'état intermédiaire.

Page 177: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

175

0 0.5 1 1.5 2 2.5 30

0.5

1

1.5

2

2.5

3

ρ1(m/m)

ρ 2(m/m

)

G

D I

ρmax

ρc S

1(G)

C2(I)

(a)

0 100 200 300 4000

1

2

3

4

5

6

7

S1

C2

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d))

I=(ρ1int,ρ

2int)

x=0

(b)

Temps (s)

Esp

ace

(km

)

Figure 5-12 : Arrivée sur une file d'attente : approche théorique

(a) Plan des phases (b) Diagramme espace-temps

L'approche théorique du problème présentée sur la Figure 5-12 indique que lorsqu'un état de trafic G fluide se retrouve initialement derrière un état de trafic congestionné à l'arrêt D, la solution exacte au problème est constituée par l'apparition d'un état intermédiaire I au sein duquel les véhicules sont également à l'arrêt (densité maximale). Cet état, et ceci est général, est cependant moins riche en poids lourds que l'état aval D. La première discontinuité, comme présentée sur la partie (b) du graphe, est un 1-choc de vitesse négative. La deuxième discontinuité est un contact de vitesse nulle. L'état intermédiaire représente donc ici l'extension de la file d'attente initiale.

On suppose ici que la fin de la file d'attente est initialement positionnée à x = 3.5 km.

La simulation numérique permet de vérifier que le modèle produit la remontée de file d'attente attendue :

0 1 2 3 4 5 6 70

0.5

1

1.5

2

2.5

3

3.5

t=0s

t=80

st=

160s

t=24

0st=

320s

t=40

0s

Espace (km)

Den

sité

tota

le (

m/m

)

Figure 5-13 : Remontée de la file d'attente au cours du temps

Ceci assure le bon fonctionnement du schéma numérique dans le cas spécifique du calcul explicite de l'état intermédiaire (cas 2 du paragraphe 3.2.3).

Page 178: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

176

On vérifie également, en traçant dans le diagramme espace-temps la carte des densités partielles, que la solution numérique converge effectivement vers la solution analytique présentée sur la Figure 5-12 (b) :

Figure 5-14 : Arrivée sur file d'attente : cartes des densités partielles

(a) Densité VL ρ1 (b) Densité PL ρ2

On note en particulier que le schéma numérique permet de retrouver très précisément les ondes de choc.

Une coupe à la date t = 200 s des cartes précédentes permet de mettre en évidence l'évolution des états de trafic. La Figure 5-15 (a) montre ainsi l'augmentation des densités entre l'état amont fluide G et l'état aval entièrement congestionné D. On note bien que l'état intermédiaire I présente la même densité totale que l'état aval D, mais que sa fraction PL est plus faible que ce dernier, et également que l'état G (Figure 5-15 (b)).

0 2 4 60

0.5

1

1.5

2

2.5

3

3.5

Espace (km)

Den

sité

s pa

rtie

lles

(m/m

)

t=200s(a)

G

I

D

VLPLTotal

0 2 4 60

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

Espace (km)

Fra

ctio

n P

L

t=200s(b)

GI

D

Figure 5-15 : Arrivée sur file d'attente (a) Evolution des densités partielles

(b) Evolution de la fraction PL

Ceci peut paraître paradoxal mais s'explique aisément. La remontée de la congestion piège le trafic dans la composition dans lequel celui-ci s'écoule. Or étant donné que le trafic VL, en situation fluide, est plus rapide que le trafic PL, la composition du flux est plus faible en poids lourds que ne l'est la composition de la densité. L'état intermédiaire

Page 179: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

177

qui se crée et s'étend peu à peu est donc plus pauvre en poids lourds que l'état amont qui l'alimente.

4.1.4 Redémarrage après un feu

Une autre situation classique de trafic intéressante à étudier est le redémarrage d'une file d'attente, une fois l'obstacle ayant contribué à la créer disparu. C'est en particulier le cas du redémarrage à un feu tricolore. Cette situation de trafic, que l'on étudie ci-dessous, se caractérise par le fait que l'état amont est congestionné avec les véhicules entièrement à l'arrêt, alors que l'état aval est quant à lui tel que les deux densités partielles sont nulles (absence totale de véhicules).

La résolution théorique de ce type de problème de Riemann (Figure 5-16) prévoit l'apparition d'un état fonctionnant à capacité, F, qui représente le fait que l'écoulement, au droit du feu, est maximal. Cet état est relié à l'état G par une onde de contact de vitesse négative, et présente la même fraction PL que lui. L'état F est suivi par une raréfaction, qui représente l'évolution plus rapide des premiers véhicules du peloton redémarrant. On aboutit ainsi à un état de trafic I, constitué uniquement de véhicules légers : tous les poids lourds ont été alors distancés. Une deuxième raréfaction représente la dispersion des premiers véhicules légers avant d'atteindre l'état aval D initial, vide de véhicules.

0 0.5 1 1.5 2 2.5 30

0.5

1

1.5

2

2.5

3

ρ1

ρ 2

G

DI

F

ρmaxρ

cR

1(G)

R2(I)

C1(G)

(a)

0 100 200 300 4000

1

2

3

4

5

6

7

C1

R1

R2

G=(ρ1g,ρ

2g)

F=(ρ1f ,ρ

2f )

D=(ρ1d,ρ

2d)

I=(ρ 1

int ,ρ 2

int )

x=0

(b)

Temps (s)

Esp

ace

(km

)

Figure 5-16 : Redémarrage à un feu : approche théorique

(a) Plan des phases (b) Diagramme espace-temps

Le tracé dans le diagramme espace-temps des densités partielles permet ici aussi de mettre en évidence la capacité du modèle à reproduire cette situation de trafic (Figure 5-17). Numériquement, on est ici dans le cas 4 du paragraphe 3.2.3.

Page 180: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

178

Figure 5-17 : Redémarrage à un feu: cartes des densités partielles

(a) Densité VL ρ1 (b) Densité PL ρ2

On note la bonne convergence du schéma numérique vers la solution analytique, même si les ondes de raréfaction sont moins précisément représentées que les ondes de choc. Ceci est en effet une des caractéristiques des méthodes de Godunov, moins précises que le schéma de Lax-Friedrichs pour la représentation des éventails, alors qu'elles sont plus efficaces pour représenter les ondes de choc. Ce point avait été noté par [Zhang et Wu, 1997].

La coupe à une date t = 100 s des cartes précédentes permet de mettre en évidence les différents états de trafic, et notamment de montrer la capacité du modèle à retrouver les zones d'états de trafic constants (paliers sur la Figure 5-18).

0 2 4 60

0.5

1

1.5

2

2.5

3

3.5

Espace (km)

Den

sité

s pa

rtie

lles

(m/m

)

t=100s

(a)

G

F

I D

VLPLTotal

0 2 4 60

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

Espace (km)

Fra

ctio

n P

L

t=100s(b)

G F

I D

Figure 5-18 : Redémarrage à un feu

(a) Evolution des densités (b) Evolution de la fraction PL

On note par ailleurs sur le graphe donnant l'évolution de la fraction PL un pic qui correspond à l'éventail entre les états F et I : ce pic représente la dispersion du peloton s'étalant lors du redémarrage. En effet, une fois le feu franchi à capacité (état F), le peloton s'étale, les véhicules légers distançant en particulier les poids lourds, d'où une zone à fraction PL élevée. Naturellement, cette zone correspond aussi, du fait de l'étalement des véhicules, à une chute des densités.

Page 181: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

179

4.2 Fonctionnement dans un même état de trafic (fluide ou congestionné)

Des simulations ont été menées afin de vérifier le comportement du modèle en situation de trafic congestionnée, de façon à mettre en évidence les particularités des transitions présentées au chapitre 4, et en situation de trafic fluide, afin de souligner une particularité sur l'évolution de la densité en poids lourds.

4.2.1 Trafics en état congestionné

Lorsque deux états de trafic congestionnés G et D sont consécutifs (cas du fonctionnement d'une file d'attente avec deux vitesses différentes en amont et en aval), la transition entre les deux présente plusieurs particularités (Figure 5-19).

0 0.5 1 1.5 2 2.5 30

0.5

1

1.5

2

2.5

3

ρ1

ρ 2

G

D

I

ρmax

ρc

C1(G)

C2(I)

(a)

0 100 200 300 4000

1

2

3

4

5

6

7

C1

C2

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d))

I=(ρ1int,ρ

2int)

x=0

(b)

Temps (s)

Esp

ace

(km

)

Figure 5-19 : Transition entre deux états congestionnés : approche théorique

(a) Plan des phases (b) Diagramme espace-temps

En effet, l'état intermédiaire I qui apparaît représente le durcissement ou l'allégement de la file d'attente. Dans tous les cas, il présente la même composition de trafic que l'état amont qui l'alimente en véhicules ; on retrouve ici une caractéristique des remontées de file d'attente piégeant le trafic dans la composition dans laquelle il s'écoule66.

Par ailleurs, il présente la même densité que l'état aval D, donc la même vitesse de véhicules. La deuxième transition est en effet un contact, se propageant vers l'aval à la vitesse des véhicules de I et de D et marquant la frontière en composition du trafic entre celle de I et celle de D. Il s'agit d'un résultat attendu puisque les deux états de trafic ont des vitesses véhiculaires égales ; la frontière de composition des états se déplace logiquement à cette même vitesse.

La Figure 5-20 permet de vérifier ces spécificités des transitions : conservation des densités entre I et D, conservation des fractions poids lourds entre G et I. Numériquement, on est ici dans le cas 3 du paragraphe 3.2.3.

66 La composition concernée est celle du flux de G, donc celle de la densité de G, puisque cet état est en congestion et que par conséquent les deux types de véhicules vont à la même vitesse.

Page 182: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

180

Figure 5-20 : Transition entre deux états congestionnés :

(a) Carte de la densité totale ρ (b) Carte de la fraction PL ψ

La Figure 5-21 présente plus en détail l'évolution des densités et de la fraction PL. Elle permet de vérifier les conservations mentionnées ci-dessus.

0 2 4 60

0.5

1

1.5

2

2.5

3

3.5

Espace (km)

Den

sité

s (m

/m)

t=200s

(a)

G I D

VLPLTotal

0 2 4 60

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8

Espace (km)

Fra

ctio

n P

L

t=200s

(b)

G I

D

Figure 5-21 : Transition entre deux états congestionnés

(a) Evolution des densités (b) Evolution de la fraction PL

4.2.2 Trafics en état fluide

Quand deux états de trafic consécutifs sont fluides, une des solutions possibles est la succession d'un choc puis d'une raréfaction comme présentée sur la Figure 5-22 (a). C'est le cas quand les deux états de trafic présentent la même densité en véhicules légers et que l'état aval est plus dense, donc moins rapide, à cause d'une densité de poids lourds plus élevée.

Page 183: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

181

0 0.2 0.4 0.6 0.8 10

0.2

0.4

0.6

0.8

1

ρ1

ρ 2

G

D

I

ρc

S1(G)

R2(I)

(a)

0 100 200 300 4000

1

2

3

4

5

6

7

S1

R2

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d)) I=

(ρ 1int ,ρ 2

int )

x=0

(b)

Temps (s)

Esp

ace

(km

)

Figure 5-22 : Transition entre deux états fluides

(a) Plan des phases (zoom) (b) Diagramme espace-temps

Dans cette situation, il apparaît un état intermédiaire I très dense, à proximité de la capacité, représentant l'état obtenu après l'onde de choc (de type 1) : il représente le ralentissement des véhicules de l'état G quand ils arrivent sur le trafic plus lent de l'état D ; la densité totale, donc les vitesses des véhicules, de l'état I sont sensiblement identiques à celles de l'état D.

S'ensuit une onde de raréfaction de type 2, permettant d'assurer la transition avec la composition du trafic de l'état D. Cette onde est toutefois de faible étendue spatiale (Figure 5-22 (b)), ce qui est logique puisque la vitesse des véhicules des états I et D est proche (celle de D est légèrement supérieure) : on est presque dans la situation du paragraphe précédent (deux états congestionnés) où la deuxième transition est un contact marquant la séparation des compositions du trafic.

Une autre spécificité notable de ces situations de trafic est l'évolution des densités partielles comme l'illustre la Figure 5-23. En effet, la 1-choc contribue à l'augmentation des deux densités partielles, tous les véhicules étant ralentis par la présence en aval d'un trafic plus dense. L'adaptation de la composition du trafic, qui est réalisée par une raréfaction et est matérialisée par la deuxième transition, contribue elle à la décroissance de la densité en véhicules légers, mais un peu paradoxalement à une nouvelle augmentation de la densité en poids lourds.

Ceci peut s'expliquer par le fait que la première transition est un choc et donc fait augmenter les densités, mais surtout celle des véhicules légers puisque le trafic est fluide, (par conséquent les véhicules légers sont plus rapides que les poids lourds) et que les ondes de choc piègent le trafic dans la composition dans laquelle il s'écoule. Il est donc naturel que la densité en poids lourds de l'état intermédiaire I créé soit plus faible que celle de l'état D, et qu'il soit nécessaire d'avoir une nouvelle augmentation de la densité PL à travers une deuxième transition.

Page 184: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

182

Figure 5-23 : Transition entre deux états fluides : cartes des densités partielles

(a) Densité VL ρ1 (b) Densité PL ρ2

Numériquement, on est ici dans le cas 1 du paragraphe 3.2.3.

La Figure 5-24 permet de mettre en évidence par une coupe des densités partielles et de la fraction PL à t = 120 s l'augmentation de la densité totale à travers la première onde de choc puis sa légère décroissance à travers la 2-raréfaction. Les effets de la 1-onde de choc sur la composition du trafic (piégeage du trafic dans la composition dans laquelle il s'écoule, et donc chute transitoire dans l'état I de la fraction PL) se retrouvent sur la partie (b) de la figure.

0 2 4 60

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8

Espace (km)

Den

sité

s (m

/m)

t=120s

(a)

G

I

D

VLPLTotal

0 2 4 60

0.2

0.4

0.6

0.8

1

Espace (km)

Fra

ctio

n P

L

t=120s

(b)

G I

D

Figure 5-24 : Transition entre deux états fluides

(a) Evolution des densités (b) Evolution de la fraction PL

4.3 Etats de trafic particuliers

Il est également intéressant de vérifier le comportement du modèle dans les cas pouvant entraîner des difficultés (possibilité de solutions non physiques) comme présentées au chapitre 4, notamment quand le trafic est homogène et constitué uniquement de véhicules légers. Par ailleurs, quand on fait l'hypothèse d'une vitesse constante des

Page 185: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

183

poids lourds en trafic fluide, la résolution du modèle présente certaines spécificités. Les simulations ci-dessous permettent d'illustrer ces situations particulières.

4.3.1 Etats homogènes et point ombilical

Dans le cas d'un trafic homogène ne comportant pas de poids lourds, la présence d'un point ombilical dans le plan des phases fait craindre dans certains cas l'apparition d'un état intermédiaire non physique (car comportant des poids lourds !) lors de la résolution du modèle. Le chapitre 4 a montré qu'en théorie le modèle continuait de se comporter de façon satisfaisante et que cet état n'apparaissait en fait pas : la Figure 5-25 reprend la solution analytique attendue.

0 0.5 1 1.50

0.5

1

1.5

ρ1

ρ 2

G

D

I

ρc

S1(G)

S2(I)

S2(G)

(a)

0 100 200 300 4000

1

2

3

4

5

6

7

S1(G−D)

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d)

x=0

(b)

Temps (s)

Esp

ace

(km

)

Figure 5-25 : Trafic homogène et point ombilical : approche analytique

(a) Plan des phases (b) Diagramme espace-temps

La résolution numérique du cas ci-dessus (états de trafic G et D constitués uniquement de véhicules légers et situés dans le plan des phases de part et d'autre du point ombilical, symbolisé sur la figure par une croix) permet de vérifier que l'état intermédiaire non physique I de la Figure 5-25 (a) n'apparaît effectivement pas. Ainsi, on ne note qu'une seule transition de densités sur la Figure 5-26 (a), tandis qu'aucune apparition de poids lourds n'est visible sur la Figure 5-26 (b) : la fraction VL reste égale à 1.

0 2 4 60

0.2

0.4

0.6

0.8

1

1.2

1.4

1.6

Espace (km)

Den

sité

s (m

/m)

t=100s(a)

G D

VLPLTotal

0 2 4 60

0.2

0.4

0.6

0.8

1

Espace (km)

Fra

ctio

n V

L

t=100s

(b)

G D

Figure 5-26 : Trafic homogène et point ombilical

(a) Evolution des densités (b) Evolution de la fraction PL

Page 186: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

184

La simulation menée illustre ainsi le bon fonctionnement du modèle numérique dans le cas d'un trafic homogène.

4.3.2 Cas de l'hypothèse v2 constante en trafic fluide

Un risque de solution non physique existe également dans le cas où l'hypothèse de vitesse constante pour les poids lourds en trafic fluide est formulée ; le chapitre 4 a montré que ce n'était en fait pas le cas. Cependant, la formulation de cette hypothèse sur la vitesse des poids lourds donne à la solution du modèle quelques spécificités, que nous illustrons ici.

La Figure 5-27 présente ainsi le cas de deux états amont et aval fluides, le second étant plus dense et présentant une plus forte proportion de PL. La solution analytique est composée d'un choc amenant à un état intermédiaire I dense, à proximité de la capacité, et qui présente la particularité d'avoir une densité de poids lourds identique à celle de l'état amont G. La deuxième transition est une raréfaction amenant à l'état aval D ; cependant il s'agit d'un contact jusqu'à l'état de trafic situé sur R2(I) ayant la même densité de poids lourds que l'état D, puis réellement d'une raréfaction (ayant donc une étendue spatiale) par la suite, mais avec conservation de la densité de poids lourds.

0 0.5 1 1.5 2 2.5 30

0.5

1

1.5

2

2.5

3

ρ1

ρ 2

G

D

I

ρmax

ρc

S1(G)

R2(I)

(a)

0 100 200 300 4000

1

2

3

4

5

6

7

S1

R2

G=(ρ1g,ρ

2g)

D=(ρ1d,ρ

2d)) I=

(ρ 1int ,ρ 2

int )

x=0

(b)

Temps (s)

Esp

ace

(km

)

Figure 5-27 : Hypothèse v2 constante : approche analytique

(a) Plan des phases (b) Diagramme espace-temps

Par conséquent, la carte des densités partielles dans un diagramme espace-temps (Figure 5-28) permet de mettre en évidence la conservation de la densité poids lourds à la transition entre les états G et I : ceci est naturel, car le trafic reste fluide et les poids lourds ont une vitesse constante ; on s'attend donc à ce que leur densité reste stable, seuls les véhicules légers étant ralentis par la présence d'un trafic plus dense devant eux.

Lors de la deuxième transition, et conformément à la solution analytique, la densité de poids lourds est constante et égale à celle de D ; en effet, d'une part la transition est un contact jusqu'à ce que la densité en PL de I atteigne celle de D, d'autre part dans la raréfaction la densité de PL reste alors constante. Sur la carte de la densité de poids lourds, on ne note donc qu'une discontinuité, entre les états G et I d'une part et l'éventail et l'état D d'autre part. De plus, cette discontinuité se propage à la vitesse (constante) des poids lourds en situation fluide : on retrouve alors une évolution semblable de la frontière

Page 187: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

185

de composition du trafic dans le cas d'un trafic congestionné, tout se passant comme avec un contact.

Figure 5-28 : Hypothèse v2 constante : cartes des densités partielles

(a) Densité VL ρ1 (b) Densité PL ρ2

Une coupe à t = 130 s des densités illustre plus complètement l'unique discontinuité recensée de la densité de poids lourds (Figure 5-29).

0 2 4 60

0.5

1

1.5

Espace (km)

Den

sité

s (m

/m)

t=130s

G

ID

VLPLTotal

Figure 5-29 : Hypothèse v2 constante : Evolution des densités

4.4 Simulation et pas de temps

Dans toutes les simulations menées précédemment, le pas de temps de résolution a été pris égal à 0.2 s. Un tel pas de temps donne une rapidité de convergence satisfaisante. On peut toutefois s'interroger sur le pas de temps maximal qu'il est acceptable d'utiliser, étant donné que sa diminution entraîne une augmentation importante de la précision du schéma numérique mais également de la durée des calculs.

Pour mieux appréhender ce choix, on donne l'exemple sur la Figure 5-30 de la résolution numérique du redémarrage à un feu (voir la Figure 5-18 (a)) qui a été menée pour différents pas de temps.

Page 188: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 5

186

0 2 4 60

0.5

1

1.5

2

2.5

3

3.5

Espace (km)

Den

sité

s pa

rtie

lles

(m/m

)

∆t=4s

G

F

I D

VLPLTotal

0 2 4 60

0.5

1

1.5

2

2.5

3

3.5

Espace (km)

Den

sité

s pa

rtie

lles

(m/m

)

∆t=2s

G

F

I D

VLPLTotal

0 2 4 60

0.5

1

1.5

2

2.5

3

3.5

Espace (km)

Den

sité

s pa

rtie

lles

(m/m

)

∆t=1s

G

F

I D

VLPLTotal

0 2 4 60

0.5

1

1.5

2

2.5

3

3.5

Espace (km)

Den

sité

s pa

rtie

lles

(m/m

)∆t=0.5s

G

F

I D

VLPLTotal

0 2 4 60

0.5

1

1.5

2

2.5

3

3.5

Espace (km)

Den

sité

s pa

rtie

lles

(m/m

)

∆t=0.2s

G

F

I D

VLPLTotal

0 2 4 60

0.5

1

1.5

2

2.5

3

3.5

Espace (km)

Den

sité

s pa

rtie

lles

(m/m

)

∆t=0.1s

G

F

I D

VLPLTotal

Figure 5-30 : Résolution numérique et pas de temps (simulation à t = 100 s)

On voit que pour des pas de temps de 1, 2 ou 4 secondes, la discontinuité entre G et F est dissipée. Ce n'est que pour un pas de temps de 0.5 seconde que ce contact est représenté de façon satisfaisante dans le cas présent.

Pour ce qui est de la transition continue entre F et D avec un palier à l'état I, on note que le palier n'est vraiment obtenu que pour un pas de temps inférieur à 1 seconde. Sa description s'améliore encore si l'on diminue le pas de temps.

Par conséquent, il apparaît impératif, afin d'obtenir une convergence suffisante, de choisir un pas de temps d'au plus 0.5 seconde. En deçà, le choix est dicté par le temps de

Page 189: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov – Comportement du modèle

187

calcul. A titre d'exemple, il a fallu quelques secondes pour obtenir la Figure 5-30 pour un pas de temps de 0.5 seconde, une quinzaine de secondes pour un pas de temps de 0.2 seconde, plus d'une minute pour un pas de temps de 0.1 seconde.

Ainsi, le pas de temps de 0.2 seconde nous a paru le plus adapté aux simulations que nous souhaitions mener : son choix a résidé dans la bonne précision qu'il apportait sans être excessivement consommateur de temps de calcul.

5 Conclusion

Dans ce chapitre on a bâti une résolution numérique du modèle, afin notamment de mener des simulations. Le schéma numérique proposé a été construit selon une méthode de Godunov, très classiquement utilisée en trafic, essentiellement car elle permet une interprétation physique du fonctionnement du schéma lors de sa mise en œuvre.

L'adaptation d'une telle méthode au cas du trafic hétérogène a ainsi permis d'étendre les notions usuelles de demande et d'offre locales de trafic.

Les sorties en simulation présentées ici, en plus de permettre de vérifier l'efficacité du schéma numérique utilisé, montrent toutes les capacités du modèle à bien reproduire le comportement attendu d'un trafic hétérogène dans diverses situations de trafic, tel que l'avancée plus rapide des véhicules légers ou le ralentissement de ces derniers lors du rattrapage de pelotons de poids lourds. Toutefois, le modèle proposé jusqu'alors n'intègre pas directement la gêne au dépassement générée par les poids lourds sur les véhicules légers ; le chapitre 6 va ainsi proposer une extension du modèle initial afin de prendre pleinement en compte cet aspect usuel des trafics routiers comprenant des poids lourds.

Page 190: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic
Page 191: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

189

Chapitre 6 Extension du modèle : Modélisation d'une gêne au dépassement

1 Comment représenter la gêne liée au dépassement des poids lourds ? 190 1.1 De la nécessité de modéliser une interaction de dépassement 191 1.2 Etat de l'art et gêne au dépassement 191

2 Etat de l'art des modèles dits à incidents mobiles 194 2.1 Phénoménologie de la gêne au dépassement 194 2.2 Description de l'incident mobile dans le modèle LWR 196 2.3 Quelques réflexions sur la phénoménologie des modèles à incidents mobiles 199

3 Modélisation d’une gêne au dépassement dans le cas du modèle de trafic hétérogène 204

3.1 Etats de trafic hétérogène générant une gêne au dépassement 204 3.2 Nouvelle phénoménologie pour les véhicules légers lors de la gêne 211

4 Conséquences sur la résolution du modèle de trafic hétérogène 213 4.1 Modification de la vitesse du flux véhicules légers 213 4.2 Modification des transitions entre états 213

5 Un exemple numérique de la gêne au dépassement 218 5.1 Gêne au dépassement et résolution numérique 218 5.2 Une simulation d'avancée d'un peloton véhicules légers parmi un flux poids

lourds 219

6 Conclusion 220

Une synthèse des modèles de trafic à incidents mobiles a été présentée lors de la 83ème conférence annuelle du Transportation Research Board [Leclercq, Chanut et Lesort, 2004], ce qui a donné lieu à publication dans Transportation Research Record [Leclercq, Chanut et Lesort, 2004, #2] (l'article en français est [Leclercq, Chanut et Lesort,

Page 192: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 6

190

2004, #3]). La description de la zone de gêne a été publiée dans [Chanut et Leclercq, 2003] ; la modélisation en tant que telle de la gêne au dépassement fait l'objet de la publication à la 16ème conférence triennale ISTTT [Chanut, 2005].

Le modèle proposé et résolu dans les chapitres 3, 4 et 5 permet de représenter l'écoulement d'un flux de trafic comportant des poids lourds plus lents et plus longs que les véhicules légers. Ce modèle est basé sur une détermination des vitesses de chaque type de véhicules en fonction de la concentration des deux types de véhicules, et permet de représenter l'effet de l'hétérogénéité du trafic sur l'écoulement.

Toutefois, le modèle reste macroscopique et ne représente pas explicitement l'occupation des voies par les véhicules ; or ceci peut avoir une incidence forte sur l'écoulement. En effet, les poids lourds occupent au moins une voie de circulation, et les véhicules légers rencontrent donc une restriction locale de capacité lorsqu'ils les dépassent : ils peuvent ainsi être amenés, momentanément, à ralentir ou même être bloqués derrière les poids lourds.

Le but de ce chapitre est donc de proposer une extension au modèle afin de représenter explicitement cette gêne au dépassement pour les véhicules légers.

Dans ce chapitre, on commence par présenter les différentes méthodes développées dans la littérature pour modéliser cette interaction entre véhicules lents et rapides, notamment celle que nous avons choisie d'utiliser : les poids lourds seront considérés comme des restrictions de capacité pour le flux de véhicules légers (partie 1). On présente ensuite l'état de l'art sur ce type de modèles dits à incidents mobiles (partie 2), qui vise à représenter l'effet sur le flux général de véhicules lents isolés décrits séparément.

En s'appuyant sur ces travaux, on étend alors le principe de restrictions de capacité mobiles à notre modèle macroscopique à deux flux ; dans notre cas, les véhicules lents sont décrits comme un flux, et non plus individuellement, et leur vitesse est donnée par le modèle d'écoulement global du flux hétérogène, et non plus par une loi de poursuite spécifique (partie 3).

A la suite de l'extension, la résolution du modèle initial est modifiée : les conséquences de cette modification sur les états de trafic rencontrés sont soulignées (partie 4).

Enfin, un exemple de simulation numérique est donné afin de mettre en évidence les apports de l'extension pour la modélisation de la gêne liée au dépassement du flux lent (partie 5).

1 Comment représenter la gêne liée au dépassement des poids lourds ?

Plusieurs auteurs ont, dans la littérature, tenu compte de l'interaction de dépassement existant entre véhicules lents et rapides lors de la construction de modèles multi-classes. Toutefois, la façon de modéliser cette interaction est assez variable. Les différentes approches et leur possible utilisation pour notre modèle sont étudiées dans ce paragraphe.

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Extension du modèle : modélisation d'une gêne au dépassement

191

1.1 De la nécessité de modéliser une interaction de dépassement

Lors de l'étude phénoménologique du comportement d'un trafic hétérogène en véhicules présentée au chapitre 3, on a souligné l'effet de la présence de véhicules plus longs que les autres sur l'occupation de l'espace (paragraphe 3.1) et les contraintes générées sur l'écoulement. On a également mis en évidence les différences de vitesses entre poids lourds et véhicules légers (paragraphe 3.2.1). Enfin les effets liés à la mixité des vitesses, notamment lors des phases de dépassement, ont été évoqués (paragraphe 3.2.2).

Les deux premiers points (l'occupation de l'espace et la différence de vitesses) ont été pris en compte dans les diagrammes fondamentaux que nous avons construits pour le modèle de trafic hétérogène : d'une part, par la définition de concentrations critique et maximale variables, d'autre part, par la définition de deux diagrammes fondamentaux différents. Par contre, l'interaction de dépassement n'a quant à elle pas été explicitement modélisée.

Il est pourtant nécessaire de l'expliciter. En effet, le modèle construit précédemment prévoit, sur la base des concentrations des deux types de véhicules, les vitesses des poids lourds et des véhicules légers. Si le trafic est fluide, la vitesse des véhicules légers est modélisée comme supérieure à celle des poids lourds. Pour se déplacer effectivement à la vitesse prévue, les véhicules légers doivent donc dépasser. Or le modèle ne prévoit pas la répartition des véhicules entre les voies ; il n'est donc pas certain que le dépassement soit possible, car les poids lourds occupent au moins une voie de circulation et entraînent donc une baisse de capacité pour le flux de véhicules légers : ces derniers peuvent être gênés, voire bloqués par les poids lourds. Une modélisation explicite de la gêne liée au dépassement rencontrée par les véhicules rapides est donc bien nécessaire.

1.2 Etat de l'art et gêne au dépassement

Dans les modèles macroscopiques LWR multi-classes existant dans la littérature, ce problème de gêne au dépassement est rarement pris en compte ; à la connaissance de l'auteur, il ne l'a même jamais été jusqu'à présent pour le type de modèle que l'on développe : macroscopique, du premier ordre et ne modélisant pas la répartition sur les voies. Ainsi, les modèles de [Wong et Wong, 2002], [Benzoni-Gavage et Colombo, 2003], [Logghe, 2003], [Zhu, Chang et Wu, 2003] n'intègrent pas cette gêne au dépassement67.

1.2.1 Inclusion de la gêne au dépassement lors de la définition des vitesses

Une approche possible pour modéliser l'interaction de dépassement est de tenir compte de la mixité du trafic dès la définition des vitesses par les diagrammes fondamentaux. En plus de l'effet de la concentration en véhicules, il est en effet possible de faire varier les vitesses selon un terme représentant la mixité plus ou moins forte du trafic. C'est l'approche suivie par [Bliemer, 2000] ou encore [Hoogendoorn, 1999], et présentée au chapitre 3 paragraphe 3.2.2 (voir les équations (3.6) et (3.8)). [Bliemer,

67 Le modèle de [Zhang et Jin, 2002] ne le modélise pas non plus, et pour cause : les vitesses des différents flux sont dans la mise en œuvre du modèle finalement égales et il n'y a donc pas de dépassements.

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Chapitre 6

192

2000] prend le parti de majorer la concentration effective en véhicules (et donc de minorer les vitesses) selon l'importance de la mixité du trafic, alors que [Hoogendoorn, 1999] préfère lui minorer la concentration effective si le dépassement est probablement possible afin d'augmenter la vitesse initialement prévue.

Cette approche nous paraît présenter l'inconvénient de chercher une équivalence, assez fictive, entre la difficulté de dépasser pour les véhicules rapides et la concentration en véhicules. Comme déjà mentionné au chapitre 3, il nous semble plus opportun de distinguer l'effet sur les vitesses de la concentration en véhicules de différentes longueurs (pris en considération dans le modèle bâti jusqu'à présent) de celui lié aux phases de dépassement (pris en compte dans l'extension que l'on va bâtir du modèle).

1.2.2 Modélisation explicite de la répartition des véhicules sur les voies et des changements de file

Une façon de prendre en compte les dépassements entre véhicules dans un modèle macroscopique est de modéliser la répartition des flux sur les voies et/ou les changements de file.

Modélisation de la répartition des véhicules selon les voies

Les modèles de [Daganzo, 1997] et [Daganzo, 2002] présentés au chapitre 2 paragraphe 2.4.1 constituent une représentation macroscopique du premier ordre d'un trafic multi-classes. Il ne s'agit pas à proprement parler de modèles multi-voies, car ils n'intègrent pas de modélisation de changements de files. Cependant, les hypothèses sont fortes quant au positionnement des véhicules selon les voies : voies rapides réservées à des véhicules dits prioritaires [Daganzo, 1997], ou attribution de fait des voies rapides aux véhicules rapides et des voies lentes aux véhicules lents [Daganzo, 2002].

On pourrait considérer que ces modèles représentent donc correctement les dépassements des véhicules lents (ou non prioritaires) par les véhicules rapides (ou prioritaires). Cependant, les modèles de Daganzo présentent deux inconvénients. D'une part, ils ne tendent pas de façon satisfaisante vers le comportement d'un trafic homogène quand la classe lente (ou non prioritaire) de véhicules disparaît ou devient très peu représentée : les véhicules rapides (ou prioritaires) ne se rabattent en effet sur les voies lentes (ou non prioritaires) que lorsque leurs voies rapides (ou prioritaires) deviennent trop congestionnées. D'autre part, un véhicule sur la voie lente se comporte nécessairement dans le modèle comme un véhicule lent.

L'approche de ces modèles peut être correcte pour un trafic américain, mais les comportements décrits ne sont guère réalistes dans le cas d'un trafic homogène de véhicules rapides dans un contexte français ou européen. En effet, en France ou en Europe, les véhicules ne s'affectent pas aussi naturellement et de façon aussi disciplinée selon les voies. Par conséquent, on écarte ce type de représentation pour la modélisation des effets du dépassement dans notre modèle, considérant que les poids lourds et surtout les véhicules légers peuvent se situer sur les voies lentes et rapides, et ce même si le trafic est fluide.

Modélisation des changements de files

Dans son approche hybride, [Laval, 2004, #2] représente un écoulement macroscopique multi-voies des véhicules légers, l'avancée des poids lourds étant décrite par une loi microscopique. Le dépassement des poids lourds par le flux de véhicules

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Extension du modèle : modélisation d'une gêne au dépassement

193

légers est pris en considération : les véhicules légers sur la même voie que les poids lourds sont bloqués derrière eux, ils doivent dépasser et changer de file pour reprendre leur vitesse de croisière. Par ailleurs, la prise en compte de l'accélération bornée des véhicules légers venant de changer de file et reprenant leur vitesse de croisière après le dépassement ajoute un effet sur l'écoulement du trafic.

Une telle approche nécessite de mettre en place une modélisation des changements de file ; ceci n'est pas facile, les variables explicatives sont nombreuses et l'aspect comportemental, aux implications locales, doit souvent être pris en considération. De plus, il est nécessaire de disposer d'un modèle microscopique pour gérer les interactions entre poids lourds.

Nous avons fait le choix de conserver une approche entièrement macroscopique, en représentant les poids lourds comme un flux (ceci se justifie par leur nombre important et leur comportement homogène) et de modéliser ainsi les interactions de dépassement de façon moyenne et macroscopique. Ainsi on évite une représentation comportementale et/ou microscopique difficile à calibrer et aux effets sur l'écoulement du trafic difficiles à appréhender sans de multiples simulations numériques.

1.2.3 Représentation d'incidents mobiles

Une extension récente et largement débattue du modèle LWR concerne la prise en compte de l'effet sur le flux environnant d'un unique véhicule lent : un tel modèle s'applique classiquement au cas d'un bus en zone urbaine.

La description du déplacement de ce véhicule est exogène au modèle LWR (sa vitesse est même souvent supposée constante) et le modèle développé vise à traduire, de façon macroscopique et sans référence directe aux voies, l'impact du véhicule lent sur l'écoulement du flux de trafic général. Le véhicule gênant, supposé ponctuel, est en effet traduit comme une restriction de capacité pour le flux décrit par le modèle LWR : on parle alors d'incident mobile.

Ce type de modèle peut constituer une approche de représentation de l'hétérogénéité du trafic dans le cas où les véhicules singuliers sont peu nombreux. Il permet en effet de représenter l'effet sur le trafic plus rapide du dépassement des véhicules lents. Il présente l'inconvénient de ne pas représenter la longueur de ces véhicules (et par conséquent de ne pas représenter l'écoulement du trafic à leur hauteur), et de décrire par une loi exogène leur avancée. Cependant, il ne nécessite pas la description explicite de l'écoulement de chaque voie et des changements de file, et constitue ainsi un outil efficace pour décrire macroscopiquement la gêne au dépassement.

1.2.4 Conclusion

Dans notre approche de modélisation, nous avons pris le parti de bien séparer, sur l'écoulement du trafic, l'effet de l'occupation de l'espace et l'effet lié aux phases de dépassement. Ceci ne plaide pas en faveur d'une approche d'équivalence entre les concentrations et les difficultés de dépassement comme celle présentée au paragraphe 1.2.1.

Par ailleurs, nous représentons l'écoulement des deux flux sans référence au positionnement sur les voies et aux changements de files, car ces points sont délicats à

Page 196: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 6

194

modéliser. Ceci rend inadéquat la représentation des dépassements par l'approche du paragraphe 1.2.2.

Pour notre cas, l'approche la plus adaptée de la gêne liée au dépassement, car elle reste à une échelle macroscopique, est donc celle des incidents mobiles du paragraphe 1.2.3.

Toutefois, dans la littérature, cette approche ne décrit que l'effet sur le trafic rapide d'un véhicule lent, supposé singulier et dont le comportement est décrit de façon exogène au modèle du flux rapide. Il va donc nous falloir étendre son application au cas d'un flux de véhicules lents d'une part, dont la vitesse est décrite simultanément avec celle des véhicules légers par le modèle global du flux hétérogène d'autre part.

Préalablement à cette extension, le paragraphe suivant va présenter en détails l'état de l'art de cette approche, dite modèles à incidents mobiles.

2 Etat de l'art des modèles dits à incidents mobiles

La représentation au sein du modèle LWR d'incidents mobiles entraînant une restriction de capacité pour le trafic environnant a fait l'objet de plusieurs recherches depuis une quinzaine d'années. Ces travaux cherchent à représenter l'effet d'un véhicule lent, tel qu'un bus, sur l'écoulement du trafic de véhicules légers, pour qui ledit véhicule lent est modélisé comme un obstacle mobile.

La première approche a été réalisée par [Gazis et Herman, 1992] sur la base de réflexions phénoménologiques. Elle a été consolidée par une théorie plus complète, mise en place par [Newell, 1993] et publiée dans [Newell, 1998], et, de façon similaire mais indépendante, par [Lebacque, Lesort et Giorgi, 1998] ; ces modèles définissent de façon précise quels sont les états de trafic attendus dans le modèle LWR en amont et en aval du véhicule lent, ainsi qu'à la hauteur de ce véhicule (bien que ce dernier soit décrit comme ponctuel).

Les résultats de ces modèles sont quelquefois contre intuitifs, ce qui a valu un certain nombre de débats sur leur phénoménologie, notamment à l'issue des travaux de [Muňoz et Daganzo, 2002]. Une synthèse de ces modèles et une explicitation des phénoménologies mises en jeu ont été réalisées par [Leclercq, Chanut et Lesort, 2004].

2.1 Phénoménologie de la gêne au dépassement

[Gazis et Herman, 1992] ont été les premiers à analyser la phénoménologie macroscopique issue de la gêne occasionnée par un véhicule lent sur un flux de véhicules rapides et à mettre en place une modélisation.

2.1.1 Considérations phénoménologiques

Ils considèrent une route à deux voies sur laquelle un véhicule lent se déplace, et pour laquelle il existe un diagramme fondamental. Quand le débit QA en amont de ce véhicule est suffisamment élevé et/ou lorsque la différence entre la vitesse de ce véhicule

Page 197: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Extension du modèle : modélisation d'une gêne au dépassement

195

Vb et celle du flux VA arrivant de l'amont est assez importante, une perturbation de l'écoulement apparaît : une file d'attente se forme sur les deux voies.

Figure 6-1 : Phénoménologie d'un dépassement avec formation d'une file d'attente

Cette file d'attente est constituée de véhicules à une concentration notée KU, et se déplace à la vitesse du véhicule lent Vb. Lorsqu'ils atteignent ce véhicule lent, les véhicules quittent la file d'attente puisqu'ils terminent leur dépassement : on suppose que ceci se réalise à une vitesse dite d'échappée VE, et à un débit QE (ceci donne une concentration d'échappée KE, soit un état E sur le diagramme fondamental, voir la Figure 6-2). Cet état de trafic est supposé prédéfini, et ne se trouve pas nécessairement sur le diagramme fondamental : la vitesse peut être supérieure à la vitesse d'équilibre. Selon les auteurs, ceci représente le fait que les conducteurs tentent ainsi de rattraper le temps perdu dans la file d'attente.

Par conséquent, lorsqu'une perturbation due à un véhicule lent apparaît sur une route à deux voies, l'état d'équilibre dans la file d'attente correspond à un débit QU égal à la somme du débit de dépassement Qdép du véhicule lent :

( )dép E E bQ K V V= − (6.1)

et du débit Qfa de la file d'attente derrière le véhicule lent :

fa U bQ K V= (6.2)

d'où un débit d'équilibre :

( ) ( )U dép fa E E b U b E U E bQ Q Q K V V K V Q K K V= + = − + = + − (6.3)

Le débit QE étant supposé connu, l'état d'équilibre U = (KU, QU) est donc situé, sur le diagramme fondamental, à l'intersection de ce diagramme et de la droite passant par le point supposé connu (KE, QE) et de pente Vb. Ceci est illustré sur la figure suivante :

Concentration

Déb

it

ED

U

A Vb

Figure 6-2 : Etats de trafic lors du dépassement d'un véhicule lent avec perturbation

On note que lors du passage du véhicule lent, c'est le débit relatif, ou de dépassement, q = Q - KVb qui est conservé.

Vb VE, KE

File d'attente

Vb Véhicule lent KA, QA, VA KU

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Chapitre 6

196

L'état de trafic E est celui d'échappée des véhicules, juste à la sortie du dépassement. N'étant pas à l'équilibre, il tend rapidement vers D, état du diagramme ayant le même débit relatif (par rapport au véhicule lent) que E : D représente l'état de trafic en aval de l'incident mobile.

2.1.2 Etats de trafic perturbés

Les états de trafic perturbés sont ceux dont la concentration est trop forte pour être possible en aval immédiat du véhicule lent, et qui sont moins congestionnés que la file d'attente qui se crée derrière le véhicule lent : il s'agit donc des états situés sur le diagramme fondamental entre les points D et U.

Dans le cas où une perturbation apparaît (par exemple si le trafic en amont est dans l'état A), les états en amont (file d'attente) et en aval (après le dépassement) du véhicule lent sont les états U et D, qui ne dépendent ici que de la vitesse du véhicule gênant.

2.1.3 Conclusion

[Gazis et Herman, 1992] ne représentent pas l'état de trafic au droit du véhicule lent, supposé ponctuel. Cependant, leur approche phénoménologique permet de mettre en évidence deux temps de résolution du problème : la description des états gênés par la présence du véhicule lent d'une part, les états d'équilibre en aval et en amont de ce véhicule dans le cas d'apparition d'une perturbation d'autre part.

2.2 Description de l'incident mobile dans le modèle LWR

Cette analyse phénoménologique a été confortée et décrite dans le modèle LWR par les travaux de [Newell, 1998] et [Lebacque, Lesort et Giorgi, 1998]. A la différence de la première approche de [Gazis et Herman, 1992], ils ont supposé l'existence d'un diagramme fondamental au droit du véhicule lent, ce qui leur permet de décrire l'état de trafic d'équilibre qui existerait à son niveau si le véhicule n'était pas ponctuel.

2.2.1 Equation de conservation dans un repère mobile

Ces auteurs ont montré que l'équation de conservation initiale de LWR, exprimée dans un repère spatio-temporel absolu (x,t) :

( ) ( )( ), , 0K x t Q K x tt x

∂ ∂+ =∂ ∂

(6.4)

devient, dans un repère mobile attaché à l'avancée du véhicule lent (ξ = x –Vb t, t' = t), l'équation de conservation suivante :

( ) ( )( ), ' , ' 0'

eqK t q K ttξ ξ

ξ∂ ∂+ =

∂ ∂ (6.5)

avec le débit relatif à la vitesse du véhicule lent suivant :

( )( ) ( )( ) ( ), ' , ' , 'éq éqbq K t Q K t K t Vξ ξ ξ= − (6.6)

Seule la fonction de flux est donc remplacée par l'introduction du débit relatif.

Page 199: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Extension du modèle : modélisation d'une gêne au dépassement

197

Dans le cas où le trafic est perturbé par sa présence, le véhicule lent représente une discontinuité fixe dans le repère mobile (ξ,t). Par conséquent, l'application de la condition de Rankine-Hugoniot (cf. équation (4.37)) impose que les états de trafic de part et d'autre du véhicule lent partagent le même débit relatif. Ceci confirme l'analyse phénoménologique de [Gazis et Herman, 1992].

Graphiquement, sur le diagramme fondamental (cf. Figure 6-3 (a)), ceci se traduit par le fait que dans le cas d'un état, comme l'état A, qui entraîne la formation d'une perturbation, les états U et D qui apparaissent alors en amont et en aval de la discontinuité sont reliés par une droite de pente Vb, droite sur laquelle se trouve également l'état de trafic B au droit du véhicule lent. U et D sont situés sur le diagramme deux voies, alors que B est situé sur le diagramme une voie.

Concentration

Déb

it

BD

U

A Vb (a)

2 voies1 voie A

A

D

U

Trajectoire du véhicule lent

(b)

Temps

Esp

ace

Figure 6-3 : Solution analytique au problème de l'incident mobile,

dans le cas d'une perturbation (a) Diagramme fondamental

(b) Diagramme espace-temps

La Figure 6-3 (b) présente la forme de la solution analytique dans le diagramme espace-temps. Les vitesses de propagation des discontinuités sont obtenues par lecture directe sur le diagramme fondamental.

2.2.2 Etat de trafic au droit du véhicule lent

Par ailleurs, [Newell, 1998] et [Lebacque, Lesort et Giorgi, 1998] ont montré que la solution entropique au modèle nécessite de maximiser le débit relatif conservé lors du dépassement.

Par conséquent, la droite de pente Vb reliant les différents états de trafic impliqués dans la résolution du problème doit être tangente au diagramme une voie ; ce point de tangence est naturellement l'état de trafic B au droit du véhicule lent.

On note ici que ce point est par ailleurs le seul du diagramme une voie pour lequel la pente de la caractéristique dQéq

1 voie /dK est égale à la vitesse du véhicule gênant : c'est par conséquent le seul état d'équilibre du diagramme une voie permettant de garder constant le débit au droit du véhicule lent, puisque c'est le seul se déplaçant à la vitesse de la caractéristique de l'état B.

Page 200: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 6

198

2.2.3 Effectivité de la gêne

Une perturbation à l'écoulement due à la présence du véhicule lent existe :

• quand la demande de trafic dépasse le débit possible juste en aval du véhicule lent (celui de l'état D) ;

• sans que l'état de trafic amont initial soit déjà plus congestionné que celui qui apparaîtrait en amont du véhicule lent (état U).

Les états induisant une perturbation de l'écoulement sont donc ceux situés sur la partie D U du diagramme deux voies de la Figure 6-3 (a), comme l'état de trafic A. Dans le cas contraire, le véhicule lent n'a pas d'effet sur le trafic, soit parce que la demande de trafic est trop faible pour être gênée (concentration inférieure à celle de D), soit parce que le trafic est déjà trop congestionné pour que le véhicule lent soit source de congestion (concentration supérieure à celle de U).

2.2.4 Résolution numérique du modèle LWR à incidents mobiles

Si la résolution analytique du problème de l'incident mobile est bien maîtrisée par l'apport des travaux présentés ci-dessus, la résolution numérique est plus délicate.

En effet, le véhicule lent correspond à une condition aux limites pour la résolution du modèle LWR : autour de sa trajectoire décrite microscopiquement, on doit résoudre un problème de type Riemann. Dans le cas d'une résolution par discrétisation spatio-temporelle, cette condition aux limites peut se situer à tout endroit des cellules numériques. Par conséquent, quelle que soit la taille des cellules numériques, le problème de Riemann lié au véhicule lent peut toujours être suffisamment proche d'une frontière pour générer une onde perturbant l'état à cette frontière avant la fin du pas de temps, et donc rendre inopérant le schéma de Godunov. Il est donc impossible de définir une condition de type CFL (5.8) valable pour toute la discrétisation.

Afin de résoudre ce problème, [Giorgi, Leclercq et Lesort, 2002] ont proposé une discrétisation spatio-temporelle variable, la cellule numérique accueillant le véhicule lent à un pas de temps donné étant fusionnée à ce même pas de temps avec les deux cellules amont et aval. Ceci permet alors de respecter la condition, mais génère alors une dissipation numérique variable puisque les cellules numériques sont de taille variable.

Une autre approche a été menée par [Daganzo et Laval, 2005]. Dans ces travaux, les auteurs remplacent la trajectoire continue du véhicule lent par une trajectoire discrète, par pas d'espace : le véhicule lent saute d'une frontière de cellules numériques à l'autre. Le modèle d'incident mobile devient alors un modèle d'incident fixe, dont la localisation se déplace de façon discrète. Il a été démontré que cette approche convergeait effectivement vers la solution analytique. Cependant, elle fait perdre de la signification physique à la cinématique du véhicule lent, et surtout à celle du flux de manière générale.

Or la bonne représentation de cette cinématique peut être primordiale : c'est le cas lorsque le modèle de trafic développé vise à permettre une estimation des nuisances sonores : une telle estimation dépend directement de la vitesse des véhicules. Dans cette optique, [Leclercq et Lelong, 2003] ont bâti une résolution numérique basée sur l'introduction de zones de transition destinées à correctement représenter l'accélération bornée des véhicules autour des véhicules lents et qui permettent par ailleurs de bien gérer la condition aux limites imposée par la présence des véhicules lents.

Page 201: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Extension du modèle : modélisation d'une gêne au dépassement

199

La résolution numérique du modèle à incidents mobiles reste complexe, et diverses recherches ouvrent aujourd'hui de nouvelles perspectives pour sa mise en œuvre ; parmi celles-ci, on peut citer l'application des méthodes de suivi d'ondes (wave tracking) au cas des autobus dans un trafic de véhicules légers [Henn et Leclercq, 2004], ou encore le développement de l'analogie de la résolution du modèle LWR avec un problème de recherche de plus court chemin [Daganzo, 2005]. Ces deux approches laissent espérer une description facilitée des conditions aux limites mobiles.

2.3 Quelques réflexions sur la phénoménologie des modèles à incidents mobiles

Les modèles à incidents mobiles ont donné lieu à plusieurs controverses quant à la phénoménologie qu'ils impliquent. Ce paragraphe vise à amener quelques réflexions sur ces débats.

2.3.1 Etats de trafic générant des perturbations

Le fonctionnement du modèle à incidents mobiles est parfois contre intuitif et paradoxal. Un point l'est particulièrement : il s'agit de la position de l'état de trafic D, qui marque la concentration à partir de laquelle un état de trafic va générer une perturbation lors du dépassement d'un véhicule lent.

On voit en effet sur la Figure 6-3 (a) que le débit et la concentration de cet état D sont d'autant plus faibles que la vitesse du véhicule lent est importante. Ceci est paradoxal : on s'attend en effet à ce que plus le véhicule lent est rapide, moins il perturbe le trafic. On remarque notamment que l'existence d'un véhicule lent perturbe plus le trafic qu'un incident fixe, de vitesse nulle : une perturbation, inexistante pour un véhicule lent à l'arrêt bloquant une voie, peut donc apparaître quand ce véhicule lent démarre. Ce phénomène contre intuitif a été notamment contesté par [Muňoz et Daganzo, 2002], qui ont sur cette base rejeté le modèle à incidents mobiles de [Newell, 1998] et [Lebacque, Lesort et Giorgi, 1998].

Cependant, [Leclercq, Chanut et Lesort, 2004] ont montré la nécessité de la naissance d'une perturbation dans le cas du démarrage d'un véhicule lent. Ceci est expliqué par la conservation nécessaire du débit de part et d'autre de la discontinuité. La Figure 6-4, tirée de [Leclercq, Chanut et Lesort, 2004 #2] en est l'illustration.

On y représente, sur une route à deux voies, les trajectoires de véhicules de part et d'autre d'un véhicule lent, initialement à l'arrêt puis démarrant. L’écoulement se fait sur deux voies avant le véhicule lent, une seule voie ensuite (cas similaire à un véhicule lent de longueur infinie).

Page 202: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 6

200

Esp

ace

Temps

Discontinuitéfixe

Discontinuité mobile(vitesse constante)

Le débit doit etre constant

(a)

Trajectoire du véhicule lentTrajectoires des véhicules

Temps

Esp

ace

Discontinuitéfixe

Discontinuité mobile(vitesse constante)

Le débit doit etre constant

(b)

Trajectoire du véhicule lentTrajectoires des véhiculesOnde de choc

Figure 6-4 : Paradoxe du modèle à incident mobile. Trajectoires des véhicules :

(a) sans création de perturbation (comportement irréaliste) (b) avec création d'une perturbation (comportement réaliste)

(D'après [Leclercq, Chanut et Lesort, 2004 #2])

On suppose que le débit de véhicules légers arrivant sur le véhicule lent est égal au débit maximal sur une voie, c'est-à-dire à la capacité de la route dans le cas d'un incident immobile. Lorsque le véhicule lent démarre, aucune perturbation n'est supposée dans la partie (a) de la Figure 6-4, en désaccord avec le modèle à incident mobile, alors qu'on suppose, dans la partie (b) de la Figure 6-4, l'apparition d'une gêne, conformément au modèle de l'incident mobile.

On voit que les trajectoires de la partie (a) de la Figure 6-4 sont irréalistes. Afin de maintenir le débit constant sur une voie quand le véhicule lent se déplace, les véhicules doivent en effet brusquement ralentir lorsqu'ils le dépassent. Ceci n'était pas nécessaire lorsque le véhicule était arrêté ; en effet, lorsque le véhicule lent avance, un véhicule le rattrapant parcourt auparavant une distance plus importante que le véhicule précédent en amont de ce véhicule lent : l'interdistance avec le véhicule précédent diminue donc entre les deux dates de dépassement.

L'apparition d'un état gêné dans la partie (b) de la Figure 6-4, au sein duquel les véhicules ralentissent avant le dépassement du véhicule lent, permet de garantir, après le passage sur une seule voie, la même interdistance entre véhicules et donc le même débit.

Le paradoxe est donc levé. Toutefois, le débit prévu en aval du dépassement, sur une voie, est donné par la vitesse du véhicule lent et le diagramme que l'on suppose pour la partie à une voie : c'est donc bien la phénoménologie du trafic que l'on suppose sur une voie qui est à l'origine du comportement paradoxal ou contre intuitif du modèle à incidents mobiles.

2.3.2 Phénoménologie et diagramme fondamental sur une voie

Les résultats expérimentaux de [Muñoz et Daganzo, 2002] montrent que le paradoxe présenté précédemment ne devrait pas apparaître. Sur leurs données, plus le véhicule lent est rapide, plus le débit aval est élevé. Or ce débit aval, celui de l'état D de la Figure 6-3, est le débit de demande à partir duquel une perturbation apparaît ; par conséquent, plus le véhicule lent va vite, plus la gêne apparaît tardivement (pour un débit plus élevé) : ceci est plus intuitif. Les conclusions des auteurs sont que le modèle à incidents mobiles de [Newell, 1998] et [Lebacque, Lesort et Giorgi, 1998] n'est pas réaliste, et proposent un autre modèle, sans description de l'écoulement sur une voie, pour lequel le débit relatif est

Page 203: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Extension du modèle : modélisation d'une gêne au dépassement

201

conservé lors du dépassement mais pour lequel une relation phénoménologique donne un débit aval croissant avec la vitesse du véhicule lent.

A la suite de ces critiques, [Leclercq, Chanut et Lesort, 2004] ont montré que le comportement contre intuitif du modèle LWR étendu à l'incident mobile n'était pas dû au modèle lui-même, mais à la phénoménologie que l'on supposait pour le trafic sur une seule voie. La figure suivante en est l'illustration :

Concentration

Déb

it

BD

U

A Vb (a)

2 voies1 voie

ConcentrationD

ébit

BD

U

AV

b

(b)

2 voies1 voie

Figure 6-5 : Phénoménologie du diagramme 1 voie et modèle à incident mobile

(a) Diagramme 1 voie à l'intérieur du diagramme 2 voies (b) Diagramme 1 voie à l'extérieur du diagramme 2 voies

En effet, les modèles à incidents mobiles de [Newell, 1998] et [Lebacque, Lesort et Giorgi, 1998] supposent que le diagramme sur une voie est homothétique du diagramme sur deux voies et est donc inclus dans ce dernier. Le point de tangence de la droite de pente la vitesse du véhicule lent, B, est donc nécessairement à l'intérieur du diagramme deux voies ; par conséquent, le débit du point D diminue si la vitesse du véhicule lent augmente (Figure 6-5 (a)).

Mais il est possible de supposer une autre forme de diagramme sur une voie, par exemple celle de la Figure 6-5 (b) : le diagramme sur une voie est extérieur au diagramme sur deux voies. Pour cette forme, la vitesse libre des véhicules est plus élevée sur une voie que sur deux voies. Ceci peut se justifier : on peut en effet considérer que les véhicules légers accélèrent le temps du dépassement d'un obstacle mobile. Cette motivation des conducteurs lors du dépassement est soulignée par [Leclercq, Chanut et Lesort, 2004] et est par ailleurs conforme à la phénoménologie décrite par [Gazis et Herman, 1992] à travers le choix de leur état E d'échappée ; cette sur-vitesse des véhicules légers lors du dépassement est justifiée d'un point de vue psychologique (les véhicules légers souhaitent s'éloigner le plus vite possible des poids lourds) par l'étude de [Peeta, Zhou et Zhang, 2004].

A des fins de généralisation, on pourrait donc considérer que le diagramme décrivant l'écoulement des véhicules sur une voie est extérieur et amène à une accélération des conducteurs lorsque ceux-ci sont motivés et est intérieur si les conducteurs sont démotivés. Un exemple de cas de motivation pourrait être rencontré quand il n'y a qu'un seul véhicule lent à dépasser, alors qu'un cas de démotivation serait constitué par un long convoi à dépasser, interdisant tout espoir aux véhicules légers de se retrouver rapidement éloignés de véhicules gênants.

Page 204: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 6

202

Dans le cas d'un diagramme une voie extérieur au diagramme deux voies, on note sur la Figure 6-5 (b) que le débit de l'état aval D augmente avec la vitesse du véhicule lent, ce qui est plus en accord avec l'intuition : [Leclercq, Chanut et Lesort, 2004] ont d'ailleurs montré que le choix d'un tel diagramme une voie permettait d'expliquer les données expérimentales de [Muňoz et Daganzo, 2002]. Il ressort de tous ces arguments que c'est bien la phénoménologie supposée de l'écoulement sur une voie qui peut amener à des résultats contre intuitifs et non le modèle à incidents mobiles, parfaitement fondé.

2.3.3 Modèle LWR à incidents mobiles et capacité

Une autre controverse concerne la définition d'une capacité de l'infrastructure en présence d'un véhicule lent. On cherche ici à clarifier cette notion ; on s'appuiera pour ce faire sur le caractère permanent ou non des congestions pouvant apparaître.

Classiquement, on appelle capacité d'une route le débit maximal du diagramme fondamental caractérisant l'écoulement du trafic qu'elle supporte. Dans le cas où un incident immobile bloque une partie des voies, la capacité résiduelle est ainsi le débit maximal du diagramme fondamental pour le nombre de voies laissées libres à l'écoulement des véhicules. Par exemple, dans le cas d'un incident immobile bloquant une voie d'une route à deux voies, la capacité résiduelle est le débit maximal du diagramme à une voie.

Une congestion apparaît donc si l’état de trafic arrivant sur cet incident immobile est situé sur la partie D U du diagramme fondamental (voir Figure 6-6), comme c’est le cas de l’état A. L’état en amont de l’incident est alors l’état U, congestionné et séparé de l’état A par une onde de choc de vitesse nécessairement négative : une fois la congestion installée à une localisation x, elle se poursuit et est donc permanente (tant que la demande reste au même niveau).

Concentration

Déb

it

BD U

A(a)

2 voies1 voie

x

A

A

D

UIncident fixe

(b)

Temps

Esp

ace

Figure 6-6 : Incident fixe et capacité

(a) Diagramme fondamental (b) Diagramme espace-temps

En x, un trait plein représente un état fluide, les points représentent la congestion

Dans le cas d’un incident mobile (voir Figure 6-3), la position des états D et U délimitant la zone du diagramme fondamental pour laquelle une congestion apparaît est modifiée par rapport au cas de l'incident immobile (on rappelle l'ancienne position de D et U par D' et U'). La Figure 6-7 montre que la concentration de l’état D est plus faible : les états fluides situés entre D et D’ engendrent désormais une congestion. De la même façon,

Page 205: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Extension du modèle : modélisation d'une gêne au dépassement

203

la concentration de l’état U est également plus faible : les états situés entre U et U’ n’engendrent plus de congestion.

Concentration

Déb

it

B

D

HF

U’D’

U

A Vb

2 voies1 voie

Figure 6-7 : Incident mobile et capacité

(D' et U' sont les états D et U de l'incident immobile)

De plus, pour des états de trafic entre D et H comme l’état A, la vitesse de l’onde de choc entre A et U est désormais positive ; par conséquent, ces états de trafic n’engendrent que des congestions temporaires : à une localisation x donnée, la congestion, représentée par l'état U, apparaît puis disparaît avec l’avancée du véhicule lent (voir la Figure 6-8 (a)).

x

A

A

D

U

Trajectoire du véhicule lent

(a)

Temps

Esp

ace

x

F

F

D

UTrajectoire du véhicule lent

(b)

Temps

Esp

ace

Figure 6-8 : Congestions d'un incident mobile

(a) Temporaire (b) Permanente

En x, un trait plein représente un état fluide, les points représentent la congestion

Pour que la congestion soit permanente, c’est-à-dire que, comme dans le cas de l’incident immobile, une fois installée elle perdure à une localisation donnée, il est nécessaire que l’onde de choc entre l’état initial et U soit de vitesse négative ; par conséquent, un tel état F doit se situer entre les états H et U (voir les Figure 6-7 et Figure 6-8 (b)).

Ainsi, si l’on considère que la capacité est le débit maximal au-delà duquel s’installent des congestions permanentes, alors, en cas de présence d’un véhicule lent ou incident mobile, la capacité est ramenée au débit de U. Pour des états de trafic entre D et

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Chapitre 6

204

H, la perturbation engendrée n’est en effet qu’une congestion temporaire : on peut donc plutôt parler de gêne ou ralentissement à l’avancée des véhicules.

Cette définition de la capacité permet de vérifier l’intuition physique : elle est supérieure à la capacité d’un incident fixe (débit de D dans la Figure 6-6) et elle augmente bien avec la vitesse du véhicule lent68. Une telle définition permettrait ainsi de lever une partie de la controverse sur le comportement non intuitif des modèles à incidents mobiles.

3 Modélisation d’une gêne au dépassement dans le cas du modèle de trafic hétérogène

Nous allons dans cette troisième partie modéliser la gêne rencontrée par les véhicules légers lorsqu'ils dépassent les poids lourds. Pour cela, nous allons fonctionner par analogie avec le modèle LWR à incident mobile présenté dans la partie précédente.

Deux différences existent entre le cas du modèle de trafic hétérogène et le cas du modèle à incident mobile. D’une part, ce qui est susceptible de gêner le flux rapide est un autre flux lent, et non plus un véhicule lent isolé. D’autre part, la vitesse de ce flux lent de poids lourds est décrite de façon associée avec celle du flux rapide de véhicules légers, alors que dans le cas du modèle à incident mobile la vitesse du véhicule lent est décrite par une loi exogène au modèle de flux principal.

Dans cette partie, nous allons nous appuyer sur les considérations phénoménologiques du dépassement pour décrire, au final, d'une façon macroscopique et homogène les vitesses des véhicules légers en cas de gêne au dépassement. Nous procédons en deux étapes : tout d’abord, nous définissons quels sont les états de trafic hétérogène (ρ1, ρ2) pour lesquels le flux de véhicules légers est gêné pour dépasser le flux de poids lourds ; ensuite, nous décrivons les conséquences sur l’écoulement des véhicules légers lorsque ces derniers rencontrent cette gêne au dépassement.

3.1 Etats de trafic hétérogène générant une gêne au dépassement

On raisonne de façon similaire au modèle à incident mobile pour décrire quels sont les états de trafic hétérogène pour lesquels une gêne au dépassement apparaît. Il est nécessaire d’utiliser deux diagrammes fondamentaux pour décrire l'écoulement des véhicules légers : le diagramme fondamental qui représente leur écoulement sur l’infrastructure à N voies en présence d’une densité ρ2 (inférieure à ρc) de poids lourds d’une part, un diagramme fondamental à définir représentant leur écoulement lors du dépassement sur un nombre de voies réduit d’autre part.

68 Quand la vitesse de l’incident est telle que l’état U est un état fluide et non plus congestionné de trafic, alors aucun état de trafic n’engendre de congestion permanente : on peut alors considérer que la capacité de la route n’est pas affectée du tout et reste égale au débit maximal du diagramme fondamental à deux voies.

Page 207: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Extension du modèle : modélisation d'une gêne au dépassement

205

3.1.1 Construction des diagrammes fondamentaux véhicules légers

Soit n le nombre de voies sur lesquels circulent les poids lourds (de densité ρ2, de flux f2)69 ; par conséquent, ces n voies ne sont pas disponibles pour le dépassement par les véhicules légers : pour ces derniers, il reste (N – n) voies afin de dépasser. Le diagramme fondamental des véhicules légers sur N voies en présence d’une densité ρ2 de poids lourds est le suivant (on rappelle que la densité maximale est égale à N et la densité critique à α N) :

Densité VL ρ1

Flu

x V

L f 1

à ρ2 fixé

α N − ρ2

N − ρ2

α N Vc − f

2

Figure 6-9 : Diagramme partiel, sur N voies, des véhicules légers

Raisonnons alors sur le diagramme des véhicules légers sur (N – n) voies. On peut légitimement considérer que le trafic, lors du dépassement, est uniquement composé de véhicules légers : la capacité de ce diagramme peut donc être prise comme égale à :

( ) cN n Vα − (6.7)

et sa densité maximale égale à :

N n− (6.8)

Par ailleurs, on suppose, par souci de simplification, que la partie fluide de ce diagramme sur (N – n) voies se confond avec celle du diagramme de véhicules légers sur N voies. On obtient alors le diagramme véhicules légers sur (N – n) de la Figure 6-10.

Par rapport au diagramme d'équilibre attendu sur (N – n) voies, le diagramme que l'on suppose présente des vitesses plus élevées en situation fluide ; ceci est accentué plus la densité en poids lourds ρ2 est faible. Par conséquent, ce diagramme représente un état motivé des véhicules légers pour le dépassement, d'autant plus important qu'il y a peu de poids lourds à dépasser ; ceci est en accord avec les considérations du paragraphe 2.3.2.

69 n est un paramètre du modèle, il peut être non entier pour représenter une occupation temporelle moyenne des voies par les poids lourds. Il représente en particulier les dépassements des poids lourds entre eux, même si l'on considère toujours dans le modèle une vitesse homogène pour le trafic poids lourds.

Page 208: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 6

206

Densité VL ρ1

Flu

x V

L f 1

à ρ2 fixé

N − n

α (N−n) Vc

Diagramme VL sur N voiesDiagramme VL sur N−n voies

Figure 6-10 : Diagrammes partiels, sur N et (N – n) voies, des véhicules légers

3.1.2 Définition des états gênés pour une densité de poids lourds donnée

Par analogie avec les modèles LWR à incident mobile, pour un état de trafic A = (ρ1, ρ2) donné, on trace la droite de pente la vitesse du flux lent v2(A) et tangente au diagramme, sur le nombre de voies réduites, du flux gêné.

Etant donné la forme que l'on a supposée pour le diagramme sur (N – n) voies, le point de tangence est l'état de trafic B de la Figure 6-11, sauf si la vitesse des poids lourds est supérieure à la tangente en ce point. Par souci de simplicité, on adopte alors un raisonnement d'état fixe d'échappée, comme l'ont fait [Gazis et Herman, 1992], en choisissant comme état de trafic de dépassement l'état B.

Pour déterminer si un état de trafic est gêné ou non lors du dépassement des poids lourds par les véhicules légers, on vérifie s'il se situe ou non dans la partie du diagramme compris entre B et l'intersection du diagramme avec la droite. Ainsi, les véhicules légers de l'état A' suivant vont rencontrer une gêne au dépassement :

Densité VL ρ1

Flu

x V

L f 1

à ρ2 fixé

B

A’

v2(A’ ) N voies

N−n voies

Figure 6-11 : Etat A' : les véhicules légers rencontrent une gêne lors du dépassement

Page 209: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Extension du modèle : modélisation d'une gêne au dépassement

207

Par contre, les véhicules légers des états A et A'' suivants ne rencontreront pas de gêne lors du dépassement des poids lourds :

Densité VL ρ1

Flu

x V

L f 1

à ρ2 fixé

B

A

v2(A)

(a)

N voiesN−n voies

Densité VL ρ1

Flu

x V

L f 1

à ρ2 fixé

B

A’’

v2(A’’ )

(b)

N voiesN−n voies

Figure 6-12 : Etats de trafic

pour lesquels les véhicules légers ne rencontrent pas de gêne lors du dépassement

Plus généralement, pour une densité de poids lourds ρ2 donnée, les véhicules légers d'états de trafic situés entre B (en deçà la demande de véhicules légers est trop faible) et la capacité du diagramme sur N voies (au-delà le trafic est en congestion donc il n'y a plus de dépassements) peuvent rencontrer une gêne au dépassement. En parcourant le diagramme fondamental entre B et la capacité, la gêne au dépassement apparaît ou disparaît. Autrement dit, il n'y a gêne que lorsque le trafic de véhicules légers est moyen (état A'), et non trop faible (état A) ou trop élevé (état A'').

Ceci est cohérent avec les études menées par d'autres auteurs dans la littérature. Ainsi, [Peeta, Zhou et Zhang, 2004] soulignent que les interactions entre poids lourds et véhicules légers sont les plus fortes pour des densités moyennes : pour de faibles densités, le nombre de véhicules est insuffisant pour qu'il y ait des interactions notables, alors que pour des densités fortes, les vitesses sont trop homogénéisées pour que des interactions apparaissent. Par ailleurs, [Bliemer, 2000] choisit pour son modèle d'affectation une fonction d'interaction entre véhicules de la forme suivante :

Figure 6-13 : Fonction d'interaction extraite de [Bliemer, 2000] (p. 69)

Page 210: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 6

208

La forme choisie est également cohérente avec celle que nous donne l'analyse par incident mobile de la gêne au dépassement de notre modèle à deux flux.

3.1.3 Etats de trafic gênés dans le plan de phase (ρ1, ρ2)

En reproduisant, pour toutes les densités de poids lourds ρ2 possibles, la même démarche que dans le paragraphe 3.1.2, on peut tracer dans le plan des phases (ρ1, ρ2) l'ensemble des états de trafic pour lesquels les véhicules légers rencontrent une gêne au dépassement. Ceci est illustré par la figure suivante :

ρ1

ρ 2 ρmax

ρc

Zone de gene

Figure 6-14 : Ensemble d'états de trafic

pour lesquels les véhicules légers rencontrent une gêne au dépassement

Les états de trafic situés sur l'axe ρ2 = 0 pour lesquels il n'y a pas de poids lourds ne font bien sûr pas partie de la zone de gêne.

Pour une densité totale donnée, la gêne n'apparaît que si la densité de véhicules légers est assez forte. Par ailleurs, cette gêne n'existe pas si le trafic n'est pas assez fluide : dans ce cas, les différences de vitesse sont trop faibles pour engendrer une gêne liée au dépassement.

3.1.4 Influence des paramètres sur la zone de gêne

Si la forme de la zone de gêne donnée par la Figure 6-14 est générale, sa taille et sa position dépendent à la fois des différentes vitesses libres des véhicules et du nombre de voies laissées au dépassement. Quant au rapport α des densités critique et maximale, il n'a pas d'influence directe.

Influence de la différence de vitesses libres

On suppose une vitesse critique Vc = 20 m/s et α = 0.5 pour plus de lisibilité des graphiques. On fait ici les comparaisons pour une route à N = 3 voies, pour lesquels les poids lourds se répartissent sur n = 2 voies. On fait alors varier la différence de vitesses libres V1 – V2.

Page 211: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Extension du modèle : modélisation d'une gêne au dépassement

209

ρ1

ρ 2 ρmax

ρc

(a)

ρ1

ρ 2 ρmax

ρc

Zone de gene

(b)

ρ1

ρ 2 ρmax

ρc

Zone de gene

(c)

ρ1

ρ 2 ρmax

ρc

Zone de gene

(d)

Figure 6-15 : Zone de gêne et vitesses libres (N = 3 voies, n = 2 voies)

(a) V1 = 28 m/s, V2 = 26 m/s (b) V1 = 31 m/s, V2 = 24 m/s (c) V1 = 34 m/s, V2 = 22 m/s (d) V1 = 37 m/s, V2 = 20 m/s

Si la différence de vitesses libres est trop faible (Figure 6-15 (a)), alors les différences de vitesses sont insuffisantes pour que les véhicules légers soient gênés : il n'existe pas de zone de gêne. Par ailleurs et sans surprise, plus les vitesses libres sont différentes, plus la zone de gêne est étendue.

Influence du nombre de voies laissées au dépassement

On suppose une vitesse critique Vc = 20 m/s et α = 0.5 pour plus de lisibilité des graphiques. On fait ici les comparaisons pour une vitesse libre des véhicules légers de V1 = 35 m/s et une vitesse libre des poids lourds de V2 = 25 m/s. On fait alors varier le nombre de voies N de l'infrastructure et le nombre de voies n sur lesquelles se répartissent les poids lourds. On note ici que l'on cherche à reproduire un comportement moyen des poids lourds ; par conséquent, on s'autorise à choisir n non entier afin de représenter la répartition moyenne des poids lourds sur les différentes voies de l'infrastructure.

Page 212: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 6

210

Pour N = 3 voies, on a l'évolution suivante en fonction de n :

ρ1

ρ 2 ρmax

ρc

Zone de gene

(a)

ρ1

ρ 2 ρmax

ρc

Zone de gene

(b)

ρ1

ρ 2 ρmax

ρc

Zone de gene

(c)

ρ1

ρ 2 ρmax

ρc

Zone de gene

(d)

Figure 6-16 : Zone de gêne et nombre de voies sur lesquelles se répartissent les poids lourds

Cas d'une route à N = 3 voies, V1 = 35 m/s, V2 = 25 m/s (a) n = 1 voie

(b) n = 1.5 voie (c) n = 2 voies

(d) n = 2.5 voies

On note l'augmentation attendue de la zone de la zone de gêne avec n.

Pour N = 2 voies, on a l'évolution, en fonction de n, de la Figure 6-17. On y note que, pour une infrastructure à N = 2 voies, la gêne lors du dépassement

existe pour pratiquement tous les états fluides de trafic si n est plus grand que 1.5 voie.

Page 213: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Extension du modèle : modélisation d'une gêne au dépassement

211

ρ1

ρ 2

ρmaxρ

c

Zone de gene

(a)

ρ1

ρ 2

ρmaxρ

c

Zone de gene

(b)

ρ1

ρ 2

ρmaxρ

c

Zone de gene

(c)

ρ1

ρ 2

ρmaxρ

c

Zone de gene

(d)

Figure 6-17 : Zone de gêne et nombre de voies sur lesquelles se répartissent les poids lourds

Cas d'une route à N = 2 voies, V1 = 35 m/s, V2 = 25 m/s (a) n = 1 voie

(b) n = 1.2 voie (c) n = 1.5 voie (d) n = 1.8 voie

3.2 Nouvelle phénoménologie pour les véhicules légers lors de la gêne

Dans le cas où un état de trafic se situe dans la zone de gêne, les véhicules légers rencontrent des difficultés lors du dépassement. Dans ce cadre, étant donné que l'état de trafic doit pouvoir exister, on va modifier la phénoménologie des véhicules légers en leur donnant la vitesse maximale qu'ils peuvent atteindre.

Ceci est réalisé de la façon suivante. On considère un état A situé dans la zone de gêne, ce qui donne, dans une coupe du diagramme des véhicules légers à ρ2(A), la Figure 6-18.

Page 214: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 6

212

Densité VL ρ1

Flu

x V

L f 1

à ρ2 (A) fixé

B

A

A’

v2 (A)

(a)

N voiesN−n voies

Densité VL ρ1

Flu

x V

L f 1

A

A’

v2 (A)[Zoom]

(b)

N voiesN−n voies

Figure 6-18 : Modification des vitesses des véhicules légers en cas de gêne au

dépassement (a) Principe général

(b) Zoom

En reprenant la modélisation des incidents mobiles présentée au paragraphe 2.2, l'état A ne peut exister : le débit en véhicules légers est trop élevé au sein de la densité de poids lourds ρ2(A). Le débit maximal possible pour une densité de véhicules légers ρ1(A) n'est alors pas f1(A) mais f1(A') où A' est l'état de trafic avec les mêmes densités en véhicules légers que A mais situé sur la droite issue de l'état B et de pente la vitesse d'équilibre des points lourds v2(A).

En suivant la description de la phénoménologie de [Gazis et Herman, 1992] présentée au paragraphe 2.1, on peut considérer que tous les véhicules légers de l'état A ne peuvent pas maintenir, à cause des dépassements, la vitesse v1(A) qui leur était initialement prévue par le modèle de trafic hétérogène. En effet, une partie des véhicules légers peuvent dépasser les poids lourds, d'autres sont bloqués derrière eux. Les véhicules de la première catégorie utilisent la capacité des voies laissées libres pour le dépassement : f1(B) = α (N – n) Vc. D'après le diagramme fondamental sur (N – n) voies, leur densité est ρ1(B). Les autres véhicules, soit une densité de ρ1(A) – ρ1(B), sont bloqués derrière les poids lourds et avancent donc à la même vitesse que ces derniers, soit v2(A). L'état macroscopique résultant des véhicules légers est donc bien l'état (ρ1(A), f1(B) + (ρ1(A) – ρ1(B)) v2(A)), c'est-à-dire l'état A'.

Par conséquent, l'extension du modèle pour prendre en compte la gêne au dépassement pouvant apparaître nous amène à remplacer, pour un état de trafic A situé dans la zone de gêne, la vitesse d'équilibre macroscopique de ses véhicules légers v1(A) par la vitesse suivante :

( )( ) ( ) ( ) ( )( )

( )1 2 1 1

11

f vv ρ ρρ

+ −= B A A BA'A

(6.9)

La vitesse des poids lourds v2(A), quant à elle, n'est pas modifiée : les véhicules lents ne sont pas gênés par le dépassement, l'interaction étant supposée entièrement asymétrique.

Page 215: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Extension du modèle : modélisation d'une gêne au dépassement

213

4 Conséquences sur la résolution du modèle de trafic hétérogène

La prise en compte dans le modèle d'une gêne liée au dépassement entraîne deux types de conséquences sur la résolution du modèle de trafic hétérogène :

• les états de trafic situés dans la zone de gêne voient la vitesse du flux de véhicules légers diminuée ;

• les transitions entre états de trafic (chocs ou raréfactions) peuvent être modifiées.

4.1 Modification de la vitesse du flux véhicules légers

La vitesse du flux véhicules légers des états de trafic situés dans la zone de gêne au dépassement telle que définie dans le paragraphe 3.1 est modifiée selon la formule (6.9).

4.2 Modification des transitions entre états

Avec la nouvelle définition des vitesses que l'on suppose dans la zone de gêne pour les véhicules légers, les valeurs et vecteurs propres des états de cette zone sont modifiés. Par conséquent, les courbes de Lax sont modifiées par l'extension du modèle, ce qui peut par ailleurs conduire, même pour deux états à l'extérieur de la zone de gêne, à un état intermédiaire permettant de les relier qui soit différent de précédemment.

4.2.1 Modifications des valeurs propres

Dans la zone de gêne, les valeurs propres de la matrice jacobienne sont modifiées. Leur nouvelle évolution, avec la densité de véhicules légers et pour une densité de poids lourds donnée, est la suivante :

(à ρ2 fixé)

λ1

λ2

ρmax

− ρ2

ρc − ρ

2

0

v2(0,ρ

2)

v1(0,ρ

2)

−Vca

Densité ρ1

Vite

sses

Zone de gene

Figure 6-19 : Evolution des valeurs propres avec la densité de véhicules légers

(pour une densité de poids lourds donnée) (les vitesses des classes sont en pointillés)

A l'entrée ou à la sortie de la zone de gêne, les valeurs propres sont discontinues ; ceci est net pour la deuxième valeur propre à la frontière de la zone de gêne de densité la

Page 216: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 6

214

plus faible et pour la première valeur propre à la frontière de la zone de gêne de densité la plus élevée. Concrètement, cela signifie que dans le cas d'une raréfaction, les états sur la frontière de la zone de gêne auront une étendue spatiale, car ils porteront l'ensemble des valeurs propres de ces discontinuités.

On retrouve alors ici un comportement attendu du modèle. En effet, les 1-ondes amènent principalement à une variation de la densité. Dans le cas d'une 1-raréfaction traversant la zone de gêne, l'état à la frontière de cette zone de gêne (de densité la plus élevée) aura, contrairement au cas sans gêne, une extension spatiale non négligeable : ceci montre qu'une densité élevée de véhicules légers perdurera plus longtemps que lorsqu'aucune gêne au dépassement n'est modélisée.

4.2.2 Modifications des courbes de Lax

Les courbes de Lax des états de trafic sont modifiées quand la zone de gêne intervient : ceci est le cas si l'état de trafic considéré est dans la zone de gêne, mais également si ses courbes de Lax traversent la zone de gêne.

Etat de trafic dans la zone de gêne

Si l'état de trafic A est situé dans la zone de gêne, ses courbes de Lax (raréfactions R1 et R2 et courbes de choc S1 et S2) sont modifiées de la façon suivante :

ρ1

ρ 2

ρc

S2

R2

S1

R1

A

(a)

ρ1

ρ 2

ρc

S2

R2

S1

R1

A

(b)

Figure 6-20 : Modifications des courbes de Lax d'un état A situé dans la zone de gêne

(a) Sans gêne au dépassement (b) Avec gêne au dépassement

Les courbes de raréfaction sont toutes deux modifiées puisque les vecteurs propres de l'état A le sont. De même, les courbes de choc sont modifiées puisque l'on a modifié les vitesses des véhicules légers de A.

Page 217: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Extension du modèle : modélisation d'une gêne au dépassement

215

Courbes de chocs et zone de gêne

Si les courbes de choc issues d'un état de trafic A traversent la zone de gêne, elles sont modifiées dans cette zone (et uniquement dans cette zone) puisque les vitesses des véhicules légers des états de cette zone l'ont été. Par contre, il n'y a pas de modifications pour la partie des courbes de choc en dehors de la zone de gêne :

ρ1

ρ 2

ρc

S2

R2

S1

R1

A

(a)

ρ1

ρ 2

ρc

S2

R2

S1

R1

A

(b)

Figure 6-21 : Modifications des courbes de choc dans la zone de gêne

(a) Sans gêne au dépassement (b) Avec gêne au dépassement

Courbes de raréfaction et zone de gêne

Si les courbes de raréfaction d'un état de trafic A traversent la zone de gêne, elles sont modifiées puisque les vitesses des états de trafic de la zone de gêne, donc les vecteurs propres qui leur sont associés, l'ont été :

ρ1

ρ 2

ρc

C1

C2

R1

A

(a)

ρ1

ρ 2

ρc

C1

C2

R1

A

(b)

Figure 6-22 : Modifications des courbes de raréfaction dans la zone de gêne

(a) Sans gêne au dépassement (b) Avec gêne au dépassement

Contrairement aux courbes de choc, les courbes de raréfaction sont modifiées y compris après la traversée de la zone de gêne, car elles décrivent une variation continue des états : la traversée préalable de la zone de gêne est donc influente.

Conclusion

Les courbes de choc sont modifiées uniquement si au moins l'un des deux états de trafic reliés par le choc est situé dans la zone de gêne. Dans le cas contraire elles restent identiques.

Page 218: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 6

216

Les courbes de raréfaction sont modifiées dans la zone de gêne et après la sortie de cette zone, du fait de leur modification antérieure dans la zone de gêne.

4.2.3 Modification de l'état intermédiaire

La modification des courbes de Lax présentée dans le paragraphe précédent peut entraîner la modification de l'état intermédiaire qui était prévu précédemment entre deux états de trafic en dehors de la zone de gêne.

Ceci ne se produit pas dans le cas d'une transition entre deux états congestionnés, ni dans le cas d'un état amont fluide et d'un état aval congestionné : dans ces deux cas la zone de gêne n'intervient pas (voir les Figure 4-29 et Figure 4-31 pour s'en convaincre).

Par contre, ceci peut se produire entre deux états fluides, ou lorsque l'état amont est congestionné et l'état aval fluide.

Modification de l'état intermédiaire pour deux états fluides

Si deux états fluides en dehors de la zone de gêne sont reliés par un état intermédiaire situé lui en zone de gêne, l'introduction d'une gêne au dépassement peut modifier cet état intermédiaire. Un tel exemple est donné par les figures suivantes :

ρ1

ρ 2

ρc

D

GI0

S1(G)

R2(I

0)

(a)

ρ1

ρ 2

ρc

D

G

FI1

I0

S1(G)

R2(I

1)

(b)

Figure 6-23 : Modification de l'état intermédiaire lors d'une transition entre deux états

fluides (a) Etat intermédiaire sans gêne au dépassement (I0)

(b) Etat intermédiaire avec gêne au dépassement (I1) [Io aide la comparaison]

Sans gêne au dépassement, c'est l'état intermédiaire I0 qui permet de relier les deux états de trafic G et D. Si l'on suppose une gêne lors du dépassement, le nouvel état intermédiaire I1 permettant de relier ces mêmes états G et D est plus congestionné que le précédent ; surtout, il présente une densité plus élevée en véhicules légers, ce qui traduit bien la difficulté de dépassement subie par ces derniers.

Page 219: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Extension du modèle : modélisation d'une gêne au dépassement

217

S1

R2

G

D

I0

(a)

Temps

Esp

ace

S1

R2

G

D

I1

F(b)

Temps

Esp

ace

Figure 6-24 : Modification de l'état intermédiaire lors d'une transition entre deux états

fluides (a) Diagramme (x,t) sans gêne au dépassement (b) Diagramme (x,t) avec gêne au dépassement

Sur le diagramme (x,t), on ne note pas une grande différence entre les deux cas, si ce n'est la persistance de l'état F qui marque la sortie de la zone de gêne.

Modification de l'état intermédiaire entre un état congestionné et un état

fluide

Une telle modification de l'état intermédiaire peut également survenir dans le cas d'un état amont congestionné G et d'un état aval fluide D. Dans le cas du redémarrage à un feu, cas étudié au chapitre 5 paragraphe 4.1.4 (voir les Figure 5-16 à Figure 5-18), une première raréfaction amène à la disparition progressive des véhicules lents :

ρ1

ρ 2

ρc

D

G

I0

F

R2(I

0)

R1(G)

(a)

ρ1

ρ 2

ρc

D

G

I0

I1

F2

F1

R2(I

1)

R1(G)

(b)

Figure 6-25 : Modification de l'état intermédiaire lors d'une transition

entre un état amont congestionné et un état aval fluide (a) Etat intermédiaire sans gêne au dépassement (I0)

(b) Etat intermédiaire avec gêne au dépassement (I1) [Io aide la comparaison]

Dans le cas où une gêne au dépassement est implémentée dans le modèle, on voit sur la Figure 6-25 (b) que la séparation des véhicules légers et des poids lourds se fait sur une plus longue transition : la 1-raréfaction réalise un plus long chemin continu parmi des états contenant des poids lourds pour aboutir à un état intermédiaire I1 présentant une densité plus faible en véhicules légers que l'état intermédiaire I0 qui prévalait en l'absence de gêne au dépassement. Ceci représente ainsi la plus grande difficulté des véhicules légers de se détacher des poids lourds lors du redémarrage.

Page 220: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 6

218

C1

R1

R2

G

F

D

I0

x=0

(a)

Temps

Esp

ace

C1

R1

R2

G

F1

DI1

F2

x=0

(b)

Temps

Esp

ace

Figure 6-26 : Modification de l'état intermédiaire lors d'une transition

entre un état amont congestionné et un état aval fluide (a) Diagramme (x,t) sans gêne au dépassement (b) Diagramme (x,t) avec gêne au dépassement

On note par ailleurs, dans le diagramme (x,t) de la Figure 6-26, que l'on représente bien une gêne au dépassement lors du redémarrage des véhicules le long de la 1-raréfaction : une file d'attente, représentée par l'état F2 et d'étendue spatiale non négligeable, est créée.

5 Un exemple numérique de la gêne au dépassement

L'extension mise en place dans le modèle pour représenter les éventuelles difficultés de dépassement du flux poids lourds par le flux véhicules légers vise à limiter la vitesse des véhicules légers lors de leur progression parmi un ensemble de véhicules lents.

Pour illustrer ceci, une simulation a été menée pour décrire l'avancée d'un peloton de véhicules légers parmi un flux constant de poids lourds.

5.1 Gêne au dépassement et résolution numérique

On utilise pour la simulation le même schéma numérique que celui bâti pour le modèle sans extension et présenté au chapitre 5.

En effet, la mise en place de l'extension du modèle ne modifie que légèrement les valeurs propres du modèle (voir la Figure 6-19). Elles conservent en particulier toutes leurs propriétés de signe, qui ont aidé largement à la mise en place du schéma de Godunov utilisé dans le cas sans gêne au dépassement.

Page 221: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Extension du modèle : modélisation d'une gêne au dépassement

219

5.2 Une simulation d'avancée d'un peloton véhicules légers parmi un flux poids lourds

Une simulation intéressante à mener pour mettre en évidence la gêne occasionnée par le dépassement et désormais modélisée est l'avancée d'un peloton de véhicules légers parmi un flux supposé constant de poids lourds.

A cette fin, on a utilisé les valeurs numériques suivantes : N = 3 voies, n = 2 voies, V1 = 35m/s, V2 = Vc = 20 m/s, α = 0.5, L1 = 5 m, L2 = 15 m. Le pas de temps est de 0.2 s et le pas d'espace de 7 m.

La vitesse libre des poids lourds a été prise égale à la vitesse critique et donc constante en régime fluide de façon à ce que le flux poids lourds ne soit pas modifié par le passage du peloton de véhicules légers.

On suppose donc une concentration uniforme de poids lourds de 0.02 PL/m, au sein de laquelle on fait avancer un groupe de véhicules légers, d'une densité de 0.23 VL/m et initialement situé sur les 350 premiers mètres.

La figure suivante permet de comparer l'avancée de ce groupe de véhicules légers, avec ou sans modélisation de la gêne au dépassement :

0.7 1.4 2.1 2.8 3.5 4.2 4.90

0.05

0.1

0.15

0.2

0.25

Espace (km)

Con

cent

ratio

n V

L k 1 (

véh/

m)

k2 constant

Peloton VL

t=0s t=

28s

t=56

s

t=84

s

t=11

2s

t=14

0sSans geneAvec gene

Figure 6-27 : Avancée d'un peloton de véhicules légers parmi un flux constant de poids

lourds

On note l'influence de la gêne au dépassement introduite, qui limite l'avancée des véhicules légers et crée des files d'attentes (voir les pics de densité en queue de peloton).

On peut également évaluer le temps perdu par les véhicules légers à cause des dépassements uniquement. Pour cela, on trace les débits cumulés de véhicules légers en un point donné, à la fois quand la gêne est modélisée et quand elle ne l'est pas. Nous l'avons réalisé pour la localisation x = 2.8 km.

Page 222: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 6

220

Le résultat est illustré par la figure suivante :

60 80 100 120 1400

20

40

60

80

100

Temps (s)

Déb

it cu

mul

é

Retarddu véhicule n°70causé parle dépassement

Sans gene Avec gene

Figure 6-28 : Débits cumulés et gêne au dépassement

La différence horizontale entre les deux courbes permet d'évaluer le temps perdu par un véhicule donné. On lit ainsi, graphiquement, que le 70ème véhicule de notre groupe initial a perdu environ 4 secondes après 2.8 kilomètres, ce qui représente environ 3.5 %. Ce temps perdu est faible, mais l'est uniquement à cause du dépassement, puisque dans les deux cas que l'on compare on prend en compte le ralentissement dû à la densité de poids lourds ; par ailleurs, les véhicules légers rattrapent leur retard après le dépassement.

On observe donc la bonne capacité de l'extension du modèle à représenter un temps perdu par les véhicules légers à cause d'une gêne lors du dépassement d'un flux de poids lourds, et surtout sa capacité à reproduire l'observation fréquente de files d'attente liées à ces dépassements ponctuellement difficiles.

6 Conclusion

Dans ce chapitre nous avons construit une extension au modèle initialement mis en place afin de représenter les éventuelles difficultés de dépassement du flux lent de poids lourds par le flux rapide de véhicules légers. Pour ce faire, on a réduit la vitesse des véhicules légers pour un certain nombre d'états de trafic hétérogène générant des ralentissements liés au dépassement. La description de ces états ainsi que la représentation de la baisse de vitesse des véhicules légers ont été réalisées par analogie avec les travaux précédemment menés quant à la modélisation de véhicules lents singuliers comme des incidents mobiles.

Les résultats théoriques obtenus et les sorties de simulation montrent la capacité du modèle à représenter de façon plus précise le comportement d'un trafic hétérogène par une description explicite de cette gêne au dépassement.

Ce chapitre conclut le travail de modélisation de l'écoulement d'un trafic hétérogène poids lourds et véhicules légers. Le chapitre suivant a pour but de montrer les applications possibles de l'outil de modélisation construit.

Page 223: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

221

Chapitre 7 Vers une application du modèle de trafic hétérogène

1 Données et modèles de trafic 222 1.1 Recueils de données de trafic 223 1.2 Exploitation des données issues de boucles électromagnétiques 228 1.3 Conclusion 231

2 Calibrage du modèle de trafic hétérogène 232 2.1 Calibrage des diagrammes fondamentaux 232 2.2 Calibrage de la zone de gêne 236 2.3 Conclusion 240

3 Applications de la modélisation du trafic hétérogène en planification 240 3.1 Apports sur les caractéristiques de l'infrastructure 240 3.2 Apports quant à l'évaluation économique 243 3.3 Utilisation concrète 247

4 Apports de la modélisation du trafic hétérogène en exploitation 247 4.1 Compréhension et prévision du trafic hétérogène 248 4.2 Test de mesures de régulation vis-à-vis des poids lourds 250 4.3 Utilisation concrète 256

5 Apports de la modélisation du trafic hétérogène pour d'autres modèles 257 5.1 Trafic hétérogène et modèles d'affectation 257 5.2 Trafic hétérogène et estimations de nuisances environnementales 258 5.3 Trafic hétérogène et intersections 258

6 Conclusion 259

Ce chapitre a pour but de montrer quelles sont les possibilités d'application du modèle de trafic hétérogène qui a été mis en place dans les chapitres précédents. Ces applications peuvent concerner la planification du trafic, son exploitation dynamique ou encore l'amélioration d'autres modélisations du trafic construites à des fins spécifiques mais pour un trafic homogène seulement.

Page 224: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 7

222

Au préalable, il est nécessaire de calibrer le modèle afin de pouvoir l'utiliser dans le contexte de l'application souhaitée. Ceci doit se faire à l'aide de données expérimentales permettant de caractériser un trafic hétérogène. Par ailleurs, l'utilisation du modèle pour une application donnée doit faire l'objet d'une validation, en confrontant les sorties souhaitées du modèle avec une réalité expérimentale. Ainsi, calibrage et validation d'un modèle de trafic dépendent étroitement de l'application visée.

Cette démarche théorique préalable à l'application est cependant délicate à mettre en œuvre dans le cas d'un modèle d'écoulement de trafic, car les données sont intrinsèquement difficiles à analyser, et est rendue presque impossible dans le cas d'un trafic hétérogène car les données ne sont généralement pas adaptées, hors expérimentation spécifique.

Ces difficultés liées aux données sont tout d'abord explicitées (partie 1). Ensuite, nous expliquons comment utiliser au mieux ces données afin de calibrer le modèle que nous avons construit (partie 2). Puis nous faisons un tour d'horizon des diverses applications possibles de notre modèle, à la fois à des fins de planification du trafic (partie 3) et d'exploitation en temps réel du trafic (partie 4). Autant que possible, nous soulignons à chaque fois quels sont les paramètres essentiels à caler, et quelles sont les possibilités de validation du modèle dans le cadre de l'application concernée. Enfin, nous listons quelques pistes d'amélioration du fonctionnement d'autres modèles de trafic, répondant à des besoins spécifiques, par la modélisation de trafic hétérogène menée (partie 5).

1 Données et modèles de trafic

Les résultats théoriques du modèle de trafic hétérogène sont cohérents et les sorties numériques obtenues reflètent correctement l'intuition physique pour des situations classiques d'écoulement du trafic (voir les chapitres 4, 5 et 6). Cependant, à des fins d'application, on se doit de confronter le modèle à des données expérimentales afin de le calibrer, en calant ces paramètres pour cette application, et afin de le valider, en confrontant ses sorties avec une réalité expérimentale pour estimer précisément sa capacité de prévision.

Ceci est cependant difficile à réaliser en modélisation du trafic, et l'est encore plus dans le cas d'un trafic hétérogène, à cause du nombre et de la nature des données disponibles. Cette partie a pour but de faire une présentation de ces difficultés de recueil et d'exploitation de données de trafic, hors expérimentation spécifique, ce qui est le cas de ces travaux de thèse70.

Dans un premier temps, nous allons discuter des données disponibles afin de caractériser le trafic, notamment de type hétérogène, puis nous décrirons les difficultés d'exploitation de ces données.

70 Durant la thèse, une proposition d'expérimentation sur l'impact des poids lourds au sein d'un trafic de véhicules légers a été construite avec l'aide de la Zone Expérimentale et Laboratoire de Trafic (ZELT) de Toulouse, mais n'a pu aboutir, faute de financement.

Page 225: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Vers une application du modèle de trafic hétérogène

223

1.1 Recueils de données de trafic

Si de nombreux types de recueil de données existent, leur disponibilité, leur qualité et leur adéquation avec les besoins de modélisation sont rarement satisfaisantes si l'on s'intéresse à un trafic hétérogène.

En effet, dans le cadre d'un modèle de trafic hétérogène, il serait idéalement nécessaire, sur une section routière d'une longueur de plusieurs kilomètres (afin de pouvoir étudier une propagation du trafic), de disposer d'un recueil de données permettant :

• de différencier le trafic entre poids lourds et véhicules légers ;

• d'affecter à chacune des classes une concentration et une vitesse ;

• d'évaluer les difficultés liées aux dépassements des poids lourds.

Selon l'application visée, toutes ces données ne sont cependant pas nécessairement indispensables.

On peut distinguer deux grands types de recueil de données de trafic : le recueil de données collectives par boucles électromagnétiques, permettant de caractériser globalement le flux de trafic, et le recueil de données individuelles, visant à obtenir de l'information véhicule par véhicule.

Une troisième voie de recueil de données consisterait à réaliser une expérimentation spécifique.

1.1.1 Recueil de données collectives par boucles électromagnétiques

Les boucles électromagnétiques sont le mode de recueil automatique de données le plus utilisé.

Principes

Ce dispositif de mesure est constitué d'une boucle inductive noyée dans le revêtement de la chaussée. Le passage de la masse métallique des véhicules induit un courant électrique révélateur de la présence de ces derniers.

Avec une boucle par voie, on mesure ainsi aisément le débit (grâce au nombre de signaux électriques recensés), mais aussi le taux d'occupation de la boucle (pourcentage du temps pendant lequel la boucle enregistre le passage d'un véhicule) ; avec la longueur des véhicules (estimée ou mesurée), le taux d'occupation donne une approximation de la concentration en véhicules (voir l'équation (3.13)).

Pour mesurer les vitesses et la longueur des véhicules, il faut deux boucles électromagnétiques consécutives, espacées d'une distance d connue. La vitesse instantanée des véhicules est alors :

2 1

dvt t

=−

(7.1)

avec t1 et t2 les instants pour lesquels l'avant des véhicules pénètre dans la zone de détection de chacune des boucles. La longueur des véhicules est obtenue grâce à la vitesse mesurée plus haut et la durée du signal enregistré par une des deux boucles.

Page 226: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 7

224

Bien qu'individuelles, ces mesures sont systématiquement agrégées à des fins d'exploitation par les gestionnaires de l'infrastructure et facilement disponibles uniquement sous cette forme ; cette agrégation est réalisée par pas de temps d'une minute ou plus.

Utilisation pour le trafic hétérogène

La mesure des longueurs véhiculaires par boucles électromagnétiques doubles permet d'obtenir aisément des débits selon différentes classes de longueur de véhicules. Cette ségrégation des véhicules selon leur longueur est en particulier celle classiquement utilisée par les exploitants afin d'obtenir des données de trafic séparées entre véhicules légers et poids lourds.

Ainsi, dans de nombreux cas, un véhicule est qualifié de poids lourds dans le recueil de données si sa longueur dépasse une certaine valeur. Cependant, il n'existe pas de norme quant à cette valeur ; à titre d'exemples, cette valeur seuil est fixée à 7,80 mètres sur les voies rapides lyonnaises, alors que dans le recueil de données néerlandais de [Bliemer, 2000], cette valeur est de 6 mètres.

Outre le fait que la distinction entre trafics léger et lourd est assez grossière, ce type de constitution de données macroscopiques par classes de trafic présente également l'inconvénient de n'être réalisé que pour les débits ; aucune donnée n'est en effet classiquement disponible quant à la répartition du taux d'occupation selon les classes, ni quant à la vitesse pratiquée par ces deux types de classes : une modification de l'acquisition serait nécessaire pour atteindre de telles données, pourtant très importantes dans la caractérisation de l'écoulement d'un trafic hétérogène.

De plus, la construction de modèles de trafic hétérogène, pour l'exploitation ou la planification, nécessite la connaissance du pourcentage de poids lourds, au sens spatial du terme : c'est un pourcentage de véhicules dont on a l'utilité. Or, de la façon dont sont construites les données de trafic disponibles, c'est un pourcentage de débit que l'on obtient, donc un pourcentage construit dans un sens temporel. Cette méthode d'utilisation des données sous-estime donc généralement le pourcentage de poids lourds, puisque, plus lents que les véhicules légers, ces derniers génèrent, à nombre identique, un débit plus faible.

La Figure 7-1 illustre ce phénomène ; on trace le pourcentage de débit réalisé par les poids lourds selon la concentration, pour un trafic dont 20 % des véhicules sont des poids lourds, en supposant les diagrammes fondamentaux du chapitre 3 (voir Figure 3-9).

Après la concentration critique Kc, le trafic est congestionné et tous les véhicules ont la même vitesse. Par conséquent, le débit que réalisent les poids lourds correspond dès lors bien à leur pourcentage en nombre de véhicules, soit 20 %.

Page 227: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Vers une application du modèle de trafic hétérogène

225

0

5

10

15

20

25

30

35

Kc

ConcentrationP

ourc

enta

ge d

e po

ids

lour

ds

En véhiculesEn débit

Figure 7-1 : Pourcentage du débit réalisé par les poids lourds selon la concentration

(20 % des véhicules sont des poids lourds)

Conclusion

Le recueil automatique de données par boucles électromagnétiques est de loin le plus disponible pour mener des études de trafic, ce qui prédispose naturellement son utilisation dans la mise en œuvre du modèle. Cependant, il présente deux inconvénients : d'une part, la distinction entre poids lourds et véhicules légers n'est réalisée que sur un critère de longueur véhiculaire ; d'autre part, l'on ne dispose pas de données de vitesses ou de concentrations selon les classes de véhicules, ce qui est pourtant très important dans le but de calibrer ou de valider notre modèle.

1.1.2 Recueil de données individuelles

Il existe plusieurs types de recueil de données permettant d'obtenir des données individuelles. Cependant, ils ne sont que rarement utilisés de façon permanente ; leur utilisation principale est la réalisation de campagnes de mesures temporaires.

Les boucles électromagnétiques à détection d'essieux

Ces boucles électromagnétiques permettent de détecter le passage de chaque essieu de véhicules, et ainsi de comptabiliser le nombre d'essieux par véhicules. Installées de façon permanente sur quelques localisations autoroutières, elles permettent d'obtenir une répartition précise du trafic selon le type de véhicules. Certaines sont également équipées de mesures de poids des véhicules à l'aide de capteurs piézo-électriques, ce qui permet d'affiner la classification.

A titre d'exemple, les données utilisées au chapitre 3 sur l'autoroute A9 en France sont issues de ce type de boucles ; dans ce cas précis, on obtient une répartition du trafic en 32 classes de véhicules, selon le nombre d'essieux et leur répartition, ce qui permet de distinguer les véhicules légers des camionnettes, ou encore de distinguer semi-remorques et petits poids lourds.

De plus, ce type de boucles donne souvent des données individuelles sur les vitesses de chaque véhicule et sur les temps intervéhiculaires. Grâce à une agrégation, il est donc possible d'accéder à des vitesses et à des concentrations par type de véhicules.

Ainsi, ce type de recueil est idéal quant à la précision de la répartition en type de véhicules et quant à sa possibilité de fournir des vitesses et des concentrations selon ces types. Toutefois, le fait qu'il soit très peu répandu empêche la constitution d'une base de

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Chapitre 7

226

données réellement exploitable pour un calibrage et une validation ; en particulier, ces boucles sont largement isolées les unes des autres, ce qui interdit toute étude de propagation d'un trafic hétérogène.

Les appareils de type radar

Ils permettent de mesurer de façon précise les vitesses par analyse de la différence de fréquence entre l'onde émise et l'onde réfléchie par le véhicule détecté (effet Doppler).

Utilisé avec une technologie laser au-dessus des voies, ce type d'appareils peut par ailleurs permettre une classification du trafic. Ainsi, [Harlow et Peng, 2001] annoncent avec une telle méthode une classification du trafic en 14 classes avec un taux de réussite de plus de 90 %.

Ce type de mesure n'est pas utilisé de façon permanente pour la collecte de données de trafic.

Les appareils à ultrasons

Ces capteurs acoustiques émettent des trains d'ondes ultrasonores et permettent ainsi de détecter le passage des véhicules par réflexion de l'onde par ces derniers. On accède ainsi à un comptage des véhicules (et donc à un débit) et à une approximation d'un taux d'occupation.

Utilisé au-dessus des voies, cette technologie permet également de classer le trafic en différents types de véhicules, et ainsi de discriminer selon les classes les mesures précédentes.

Ce type de mesure, relativement adéquat à nos besoins, n'existe pas de façon permanente en Europe ; son utilisation est limitée à des mesures temporaires71.

Les mesures par vidéo

L'analyse d'images par vidéo peut permettre la réalisation de mesures classiques de trafic : comptage des véhicules, mesure de la concentration en véhicules, mesure des vitesses, distinction des types de véhicules.

Cependant, de nombreuses améliorations sont encore nécessaires pour s'assurer de l'efficacité de tels systèmes. De plus, leur utilisation conjointe à des fins de surveillance du trafic n'est pas idéale : la mesure du trafic nécessite un champ d'observation fixe, alors que sa surveillance requiert souvent une modification manuelle par l'opérateur de ce champ.

Ce type de mesure reste peu utilisé en dehors d'expérimentations spécifiques.

Les mesures embarquées

Le développement de la téléphonie mobile et des systèmes de positionnement de type GPS peuvent permettre d'accéder à de l'information individuelle de trafic, notamment sur la position et la vitesse des véhicules. Par agrégation, ceci peut amener à des données globales de trafic, ou au moins permettre d'affiner celles obtenues par des mesures plus classiques.

Toutefois, ce type de mesure est très faiblement développé actuellement, car il pose encore de nombreux problèmes liés à la propriété des données. De plus, le taux d'équipement des véhicules reste largement insuffisant.

71 Il est par contre utilisé massivement au Japon.

Page 229: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Vers une application du modèle de trafic hétérogène

227

Conclusion

Il existe de nombreux systèmes permettant de recueillir de l'information individuelle précise et notamment de différencier les types de véhicules au sein d'un trafic, ce qui permet par la suite de distinguer les grandes variables de trafic (débits, concentrations, vitesses) selon ces types. Cependant, leur utilisation est très peu répandue et est limitée à des expérimentations temporaires.

1.1.3 Mesures par expérimentation spécifique

Une approche efficace possible consiste en la mise en place d'une expérimentation spécifique, permettant de satisfaire les besoins en données exprimés et ainsi de calibrer le modèle, de le valider et de constituer une base de données pour les études sur un trafic hétérogène.

Un tel projet a été proposé au cours de cette thèse, mais n'a pas obtenu le financement nécessaire. Construite en collaboration avec la ZELT72 de Toulouse, cette proposition d'expérimentation avait trois grands objectifs (la note détaillée est celle de [Olivero, 2002]) :

• construire des diagrammes fondamentaux pour les poids lourds et les véhicules légers ;

• calibrer le modèle proposé sur un premier jeu de données (en calant les vitesses libres et critiques et les longueurs caractéristiques des différents types de véhicules), puis valider le modèle sur un deuxième jeu de données, le tout à des fins de prévision d'évolution d'états de trafic ;

• analyser plus finement les interactions de dépassement entre le flux rapide et le flux lent, afin de faire une critique de l'extension du modèle à la gêne au dépassement.

Les mesures devaient porter sur des états de trafic les plus variés possibles et apporter deux des trois variables fondamentales (débit, concentration et vitesse) pour chaque type de véhicule. Elles devaient être réalisées par des boucles électromagnétiques doubles, agrégeant les données par type de véhicules (véhicules légers et poids lourds différenciés par leur longueur).

Pour ce qui est de la gêne au dépassement, un dispositif par vidéo avait été proposé en plus des mesures par boucles afin d'avoir accès, dans les situations de gêne au dépassement :

• à la position des poids lourds sur les voies ;

• au débit et à la vitesse de dépassement des poids lourds par les véhicules légers ;

• au nombre de véhicules se trouvant en file d'attente derrière les poids lourds ;

• à la longueur d'influence d'un poids lourd sur la manœuvre de dépassement des véhicules légers.

Ceci aurait permis d'améliorer la construction de l'extension au modèle pour la gêne au dépassement et aurait fourni une première étape de calibrage et de validation de la zone de gêne du modèle.

72 Zone Expérimentale et Laboratoire de Trafic, entité du Centre d'Etudes Techniques de l'Equipement du Sud-Ouest.

Page 230: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 7

228

1.1.4 Conclusion

Il est très difficile de trouver des sites équipés de façon satisfaisante en recueil de données de trafic hétérogène. Les seules données potentiellement accessibles en nombre ne sont en effet que des données globales de flux, issues de boucles électromagnétiques, ne différenciant véhicules légers et poids lourds que par une longueur seuil, et discriminant uniquement les débits dans ces deux classes. De plus, au cours de ces travaux il n'a pas été possible de réaliser l'expérimentation succinctement décrite ci-dessus.

Ceci rend le calibrage et la validation du modèle plus délicats. La suite du travail porte donc uniquement sur des données issues de boucles électromagnétiques.

1.2 Exploitation des données issues de boucles électromagnétiques

Les données de trafic aisément disponibles sont celles issues de boucles électromagnétiques. Ces données de trafic posent des difficultés d'exploitation pour la modélisation du trafic, surtout hétérogène : il est en effet difficile de faire ressortir des données les états de trafic d'équilibre, car il existe un bruit important du trafic lié au comportement des conducteurs, et de nombreux états de trafic ne sont que très rarement observés.

1.2.1 Caractère d'équilibre des états de trafic mesurés

Les diagrammes fondamentaux utilisés dans les modèles macroscopiques de trafic décrivent des états de trafic dits à l'équilibre. Par conséquent, il est nécessaire de vérifier que les données de trafic recueillies concernent effectivement des états représentatifs de l'écoulement du trafic. Or l'expérience montre que ceci est loin d'être le cas, à cause d'instabilités du trafic, de situations transitoires ou encore d'erreurs de mesures.

En milieu urbain, ces phénomènes sont aisément mis en évidence ; en effet, la présence de feux tricolores rend difficile la mesure d'états de trafic que l'on pourrait juger représentatifs. On obtient alors des couples de données (concentrations-débits) du type de la Figure 7-2 (route à deux voies).

De nombreux points de mesures concernent des états de trafic à l'intérieur du diagramme fondamental que l'on pourrait imaginer ; beaucoup d'entre eux ne sont pas significatifs ni représentatifs d'états de trafic, leur présence s'expliquant par un effet de moyenne sur deux ou plusieurs états de trafic différents ou des comportements marginaux de véhicules, notamment lors du redémarrage au feu.

Page 231: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Vers une application du modèle de trafic hétérogène

229

Figure 7-2 : Diagramme fondamental mesuré en milieu urbain, données 30 s

(extrait de [Leclercq, 2002], p. 225)

Un constat similaire peut être formulé en milieu autoroutier. Un exemple est donné ci-dessous, pour des données agrégées sur une minute et une voie rapide urbaine lyonnaise à trois voies :

Figure 7-3 : Diagramme fondamental sur autoroute (Cusset, Lyon), donnée 1 min

On note que beaucoup de points mesurés ne sont pas dans l'équilibre supposé, notamment pour des états congestionnés de trafic.

Il est donc nécessaire de filtrer les données, afin de ne garder que les états réellement représentatifs. Plusieurs méthodes ont été proposées dans la littérature afin de ne conserver que des états représentatifs de trafic sur des données issues de boucles électromagnétiques ; c'est le cas notamment des méthodes proposées par [Cassidy, 1998] (méthode basée sur la stabilité des débits cumulés au cours du temps) ou [Leclercq, 2005] (méthode basée sur l'occurrence des mesures pour les états fluides et sur les concentrations maximales à débit donné pour les états congestionnés).

Dans le cas d'un trafic hétérogène, ces méthodes sont plus délicates à mettre en œuvre ; il faut alors en effet prendre en compte la composition du trafic dans l'analyse des données : elle explique en particulier, par la présence de véhicules lents, les vitesses moyennes plus faibles du trafic, pour un débit identique.

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Chapitre 7

230

1.2.2 Distribution et hétéroscedasticité des données

Une autre difficulté importante des données de trafic est la rareté de l'observation sur autoroutes d'états de trafic congestionnés. Ceci est nettement observable sur la Figure 7-3 : il n'existe pas d'états congestionnés sur une minute avec un taux d'occupation de plus de 50 %, alors que les mesures ont été menées de façon continue sur 15 jours entiers. Ainsi, sur 19 497 mesures, seules 1 301 concernent des états congestionnés, soit 6.7 %.

De plus, on note clairement sur cette figure que les données pour ces états sont beaucoup plus dispersées et donc mal appréhendées par la mesure que celles des états fluides de trafic.

Ceci est encore plus vrai si l'on segmente les données selon le pourcentage de poids lourds. En effet, plus le pourcentage de poids lourds est élevé, moins les données sont nombreuses :

Pourcentage de

poids lourds Nombre de données

disponibles dont en

congestion Pourcentage de

données en congestion 0 – 5 12 734 1 163 9,1

6 – 10 3 104 124 4,0 11 – 15 1 229 12 1,0 16 – 20 639 2 0,3 21 – 30 628 1 0,2 31 – 40 479 0 0,0 41 – 50 374 0 0,0

51 – 100 310 0 0,0

Tableau 7-1 : Nombre de données disponibles, poids lourds et congestion (Données sur autoroute, agrégation 1 minute, Cusset, Lyon)

On voit nettement sur le tableau qu'on n'observe pas, sur la station de mesure considérée, de congestion exploitable pour un pourcentage de poids lourds supérieur à 10 %. Ceci s'explique en partie par le fait que le nombre de poids lourds fluctue beaucoup moins au cours de la journée que celui des véhicules légers, et que donc les forts pourcentages de poids lourds ne sont observés que lorsque les véhicules légers sont absents, donc en situation fluide (la nuit ou en heures creuses).

La Figure 7-4, présentant les données de trafic sous forme (concentrations- débits), illustre bien le fait que le traitement des données ne peut être identique pour de faibles (partie (a)) ou de fortes (partie (b)) proportions de poids lourds.

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Vers une application du modèle de trafic hétérogène

231

Figure 7-4 : Diagrammes fondamentaux sur autoroute (Cusset, Lyon), donnée 1 min

(a) Composition du trafic entre 0 et 5 % de poids lourds (b) Composition du trafic entre 20 et 25 % de poids lourds

Une solution pour limiter les effets de la distribution et de l'hétéroscedasticité des données serait de travailler par groupe de données d'une part et de pondérer les valeurs utilisées par la confiance dans la qualité de la mesure d'autre part.

Par contre, il faut souligner ici que les hypothèses phénoménologiques formulées dans notre modèle permettent de s'affranchir de données nécessairement nombreuses en congestion ; en particulier, l'hypothèse d'égalité de vitesses entre les flux en congestion permet de traiter en partie les données de ces états de trafic comme celles d'un trafic mono-flux. Le point nécessaire est alors de réussir à montrer expérimentalement la justesse de l'hypothèse.

1.2.3 Conclusion

Outre la difficulté de sélectionner parmi les données de trafic celles qui sont réellement significatives, on se heurte classiquement dans l'exploitation de ces données au fait qu'une large partie de l'écoulement représenté est rare et difficile à mesurer. C'est le cas en particulier des états congestionnés, et pour ce qui nous concerne, des forts pourcentages de poids lourds.

1.3 Conclusion

La difficulté du recueil de données de trafic hétérogène et les problèmes liés à son exploitation rendent la démarche de calibrage et de validation du modèle délicate.

La démarche que nous proposons par la suite se veut ainsi pragmatique, tentant d'exploiter au mieux les données le plus souvent disponibles, à savoir des données collectives issues de boucles électromagnétiques où seuls les débits sont discriminés entre poids lourds et véhicules légers.

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Chapitre 7

232

2 Calibrage du modèle de trafic hétérogène

Afin de mener à bien le calibrage du modèle de trafic hétérogène, nous avons à caler les paramètres des diagrammes fondamentaux par type de véhicules d'une part, ceux de la zone de gêne d'autre part.

2.1 Calibrage des diagrammes fondamentaux

Ce sont les diagrammes fondamentaux qui portent la phénoménologie des modèles d'écoulement de trafic. Par conséquent, leur justesse est un élément précieux quant au pouvoir de prévision de ces modèles.

De façon idéale, le calibrage des paramètres des diagrammes fondamentaux devrait se faire globalement pour tous les paramètres. Toutefois, il s'agit d'une étape non triviale, à cause des difficultés d'exploitation des données mentionnées au paragraphe 1.2, et qui a suscité de nombreuses recherches.

2.1.1 Démarche générale de calibrage d'un diagramme fondamental

Si chaque paramètre d'un diagramme fondamental a une signification physique, comme les vitesses libres ou la concentration maximale, c'est le diagramme fondamental dans son ensemble qui donne la phénoménologie du modèle de trafic. Par conséquent, il paraît adéquat de caler les paramètres de ce diagramme de façon globale et simultanée ; il est naturellement nécessaire que le résultat du calibrage, pour chaque paramètre, soit cohérent avec la réalité physique. Ce type de démarche est notamment détaillé dans [Leclercq, 2005].

Plusieurs formes de diagrammes fondamentaux sont possibles, et la littérature est abondante à ce sujet. Parmi les paramètres retrouvés classiquement dans la définition de ces diagrammes, on trouve la vitesse libre des véhicules, la vitesse et la concentration critiques, la concentration maximale, ou encore la pente du diagramme en congestion (dans le cas où l'on suppose que cette partie du diagramme est représentée par un segment de droite).

Afin d'effectuer le calibrage, on emploie une méthode mathématique d'optimisation du calage du diagramme fondamental sur les données, comme la minimisation d'une fonction objectif. Le calibrage se fait le plus souvent par confrontation du diagramme proposé avec les données disponibles de concentrations et de débits, mais peut également être réalisé par confrontation de sorties du modèle en utilisant le diagramme proposé avec des indicateurs expérimentaux. Parmi ces derniers, [Grange, 2001] a proposé l'emploi, entre autres et dans des situations de trafic bien définies, du temps de parcours et de l'extension spatiale et temporelle de files d'attente.

Pour les raisons détaillées au paragraphe 1.2, il est difficile d'utiliser une méthode de ce type pour calibrer les diagrammes fondamentaux hétérogènes. En effet, il serait nécessaire de posséder des données, au moins en fluide, pour tous les pourcentages de poids lourds possibles, ce qui n'est évident, surtout pour les points proches de la capacité. Par conséquent, nous proposons de calibrer les diagrammes fondamentaux paramètre par

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Vers une application du modèle de trafic hétérogène

233

paramètre, en indiquant pour chacun une méthode possible de calage. Cette démarche permet au moins d'assurer une valeur physique à chaque paramètre, qui pourrait être par ailleurs utile dans le cas d'un calage global pour donner un intervalle de valeurs possibles au paramètre concerné.

2.1.2 Calibrage des diagrammes fondamentaux du modèle de trafic hétérogène

Pour les formes de diagrammes fondamentaux que nous avons supposées au chapitre 3, les paramètres à caler sont :

• les vitesses libres des véhicules : V1 pour les véhicules légers, V2 pour les poids lourds ;

• les longueurs véhiculaires des véhicules légers l1 et des poids lourds l2 ainsi que la distance intervéhiculaire d à l'arrêt ; ceci donne les longueurs caractéristiques L1 et L2 ;

• la vitesse critique Vc et le rapport concentration critique / concentration maximale α.

Vitesses libres des véhicules

Il s'agit des vitesses pratiquées par les véhicules en l'absence d'autres véhicules sur l'infrastructure. Même sans discrimination du recueil de données de vitesses entre type de véhicules, il s'avère assez facile de déterminer la vitesse libre des véhicules légers et des poids lourds.

Une première méthode consiste à sélectionner les données pour lesquelles un seul véhicule a été comptabilisé pour l'intervalle de temps choisi : on connaît alors le type et la vitesse individuelle du véhicule, dans des conditions très fluides de trafic de surcroît. Ceci permet ainsi d'accéder très facilement à une estimation des vitesses libres des deux types de véhicules.

Cependant, ces données de trafic pour lesquelles un seul véhicule est comptabilisé au cours d'un pas de temps de mesure sont recensées essentiellement la nuit ; or il n'est pas certain que la vitesse libre soit alors semblable à celle des véhicules le jour, dans les conditions où l'on souhaite utiliser le modèle.

Une deuxième méthode est bâtie sur l'observation suivante. Pour des concentrations très faibles de trafic, les mesures expérimentales traduisent une assez grande stabilité des vitesses envers la concentration ; autrement dit, les véhicules maintiennent leur vitesse libre même en présence d'autres véhicules si ces derniers restent peu nombreux. Ce point a notamment été souligné par [Chanut, 2001].

La Figure 7-5 illustre cet état de fait.

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Chapitre 7

234

0 10 20 30 40 50 6060

70

80

90

100

110

120

130

140

Concentration (véh/km)

Vite

sses

(km

/h)

Kd

Figure 7-5 : Des vitesses constantes à concentrations faibles

Mesures sur l'autoroute A7, 3 voies, pourcentage PL entre 5 et 10 % (extrait de [Chanut, 2001], p. 69)

Par conséquent, une méthode possible pour évaluer les vitesses libres de chaque type de véhicule est la suivante. On regroupe les données par classes de pourcentages poids lourds. Pour chacune d'entre elles, la vitesse libre moyenne est donnée par la vitesse constante que l'on peut lire pour des concentrations suffisamment faibles (par exemple 122 km/h pour un trafic comportant entre 5 et 10 % de poids lourds dans le cas de la Figure 7-5). On trace ensuite le graphe des vitesses libres obtenues en fonction du pourcentage de poids lourds ; on doit pouvoir l'interpoler par une droite dont l'ordonnée à l'origine est égale à la vitesse libre des véhicules légers et celle pour une abscisse de 100 % de poids lourds égale à la vitesse libre des poids lourds (voir la Figure 7-6).

0 10 20 30 40 50 6095

100

105

110

115

120

125

130

Pourcentage poids lourds

Vite

sse

libre

moy

enne

(km

/h)

Figure 7-6 : Régression linéaire pour la détermination des vitesses libres

(extrait de [Chanut, 2001], p. 106) La droite de régression est : y = 125.61 - 45.542x, avec R2 = 0.9834

Cette méthode est assez efficace ; sur l'exemple ci-dessus, elle permet d'évaluer la vitesse libre des véhicules légers à 125.6 km/h et celle des poids lourds à 80.1 km/h. Ses limitations sont liées à la nécessité de faire des classes de pourcentage poids lourds suffisamment grandes pour avoir des données représentatives.

Une troisième méthode est proposée sur l'ensemble des données obtenues, et non plus seulement sur les concentrations très faibles, par [Botma et Bovy, 2000]. Elle est

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Vers une application du modèle de trafic hétérogène

235

basée sur la sélection des véhicules circulant à vitesse libre et non gênée au sein du trafic ; ce type de méthodes dont Kaplan-Meier est un exemple utilise classiquement comme critères de distinction entre véhicules libres et véhicules gênés le temps intervéhiculaire et la différence de vitesse avec le véhicule précédent. Une méthode similaire a été récemment construite et mise en application par [Hoogendoorn, 2005].

Longueurs caractéristiques

Il s'agit ici des longueurs véhiculaires moyennes des véhicules légers l1 et des poids lourds l2, ainsi que la distance intervéhiculaire à l'arrêt d, supposée identique pour tous les types de véhicules.

Les longueurs véhiculaires moyennes sont accessibles par des techniques similaires à celles d'obtention des vitesses libres, mais de façon plus simple et plus précise. En effet, il n'y a pas d'effets de la concentration sur ces longueurs, et toutes les données recueillies sont donc exploitables. De plus, la présence d'une seule boucle double donnant les longueurs est suffisante pour une section routière donnée, car l'on peut légitimement supposer que les longueurs des véhicules légers et des poids lourds ne varient que peu dans l'espace ou le temps.

On peut donc accéder aux longueurs véhiculaires par type de véhicules en utilisant les données pour lesquelles un seul véhicule a été détecté. On peut également, en calculant la longueur moyenne pour chaque pourcentage de poids lourds donné, obtenir aisément, par une interpolation comme celle de la Figure 7-6, la longueur véhiculaire des véhicules légers et celle des poids lourds.

Par contre, la mesure de la distance intervéhiculaire à l'arrêt, d, est plus délicate à cause de la grande rareté d'observation d'un arrêt à vitesse nulle des véhicules sur autoroute. Néanmoins, on peut penser que cette valeur est constante quel que soit le site autoroutier ; sa mesure, lors d'une expérimentation spécifique, doit donc pouvoir être utilisée comme une valeur de calibrage du modèle.

Une des possibilités de sa mesure est l'utilisation de la vidéo, sur un site choisi comme localisation de congestions fortes et récurrentes. Cette approche a été proposée par [Grange, 2001].

Vitesse critique Vc et rapport concentrations critique / maximale α Afin de caler les diagrammes fondamentaux en fluide, il est nécessaire de

déterminer l'état de trafic correspondant au passage en congestion, c'est-à-dire la vitesse critique Vc et la densité critique, que l'on obtient à partir de la densité maximale par le coefficient α.

Ni l'un ni l'autre ne sont facilement mesurables, à cause de la grande instabilité du trafic dans les états proches de la capacité, et par conséquent de la variance des données pour de tels états.

Toutefois, la vitesse critique doit pouvoir s'obtenir en étudiant les diagrammes de données (concentrations-débits) et évaluant les vitesses relevées lorsque les débits observés sont maximaux. La mise en œuvre de cette évaluation reste cependant difficile à cause de la variance des données et de leur faible nombre, surtout pour des pourcentages de poids lourds élevés.

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Chapitre 7

236

La mesure du coefficient α est tout aussi délicate, mais peut être approchée comme l'a montré le chapitre 3 paragraphe 4.1.2. En effet, on peut évaluer le taux d'occupation critique en sélectionnant les données proposant, par classes de pourcentage de poids lourds, les débits les plus élevés. Ce taux d'occupation critique, dans l'hypothèse où le taux d'occupation maximal est proche de 100 %, constitue une évaluation du coefficient α.

Une autre approche pour déterminer l'état de trafic est de mesurer ou d'évaluer uniquement Vc ou α et de compléter par une mesure de la vitesse de l'onde de redémarrage des véhicules en congestion. En effet, cette vitesse d'onde correspond à la valeur propre λ1 en congestion, qui est constante quel que soit le pourcentage de poids lourds et la concentration et qui est égale à :

1,congestion 1 cVαλ α= −−

(7.2)

Comme proposé par [Grange, 2001], cette vitesse d'onde de redémarrage paraît accessible à la mesure, par exemple par l'exploitation de films vidéo. On observe pour cela le redémarrage d'une file de véhicules à l'arrêt en notant pour chaque véhicule dont on connaît la position initiale x le temps de redémarrage t ; la pente de la droite de régression x(t) donne une première approximation de λ1,congestion. Classiquement, il est reconnu que cette valeur se situe entre 10 et 25 km/h (voir les résultats de [Kerner et al., 2004] et de [Coifman et Wang, 2005]).

2.2 Calibrage de la zone de gêne

Le calibrage de la zone de gêne se fait par la détermination du nombre n de voies qu'occupent les poids lourds et qui ne sont par conséquent pas disponibles au dépassement par les véhicules légers.

2.2.1 Généralités

Dans le modèle, ce nombre n'est pas nécessairement entier ; en effet, on essaye ici de représenter macroscopiquement et de façon moyenne l'effet des poids lourds sur une gêne au dépassement ; le caractère non entier de n représente la présence non permanente des poids lourds sur certaines voies ; il s'agit classiquement de la voie de gauche pour une infrastructure à deux voies, de la voie médiane dans le cas d'une infrastructure à trois voies.

Par ailleurs, n peut être supérieur à 1 même si les concentrations en poids lourds sont faibles. Dans de tels cas, et dans l'hypothèse faite que les poids lourds ont une vitesse uniforme, tous les poids lourds devraient pourtant se trouver sur la voie lente ; mais si l'on a choisi une représentation commune de la vitesse de tous les poids lourds, le calage de n permet de représenter le fait que dans la réalité les vitesses sont hétérogènes et que les poids lourds se doublent entre eux.

2.2.2 Calage du paramètre n

Le paramètre n permet de mener la modélisation de la gêne au dépassement présentée au chapitre 6. A priori, il doit être évalué pour chaque condition de trafic, afin de tester si cette condition de trafic fait partie de la zone de gêne du modèle ou non.

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Vers une application du modèle de trafic hétérogène

237

Le calage de n nécessite donc d'évaluer le nombre de voies utilisées par les poids lourds selon les conditions de trafic. Comme noté au chapitre 1 paragraphe 2.2.2, peu de données sont disponibles et peu d'études ont été menées sur la position des poids lourds sur la chaussée ; seuls des éléments partiels existent, et uniquement pour des infrastructures à deux voies. Toutefois, dans le cas de données issues de boucles électromagnétiques donnant les taux d'occupation et le pourcentage de poids lourds, ainsi que la répartition de ces véhicules sur les voies, il est possible d'estimer une probabilité de présence des poids lourds sur les voies de dépassement.

Une telle estimation a été menée sur des données de ce type, agrégées sur une minute, et recueillies sur l'autoroute A7 pendant un mois près de Lyon. Sur cette infrastructure à deux voies, on a cherché à établir la présence ou non de poids lourds sur la voie de gauche selon les conditions de trafic. Pour cela, on a regroupé les données recueillies par couple (taux d'occupation par classe de 4 % - pourcentage de poids lourds par classe de 5 %), et l'on a alors pour chaque condition de trafic noté la présence ou non de poids lourds sur la voie de gauche. On a ainsi considéré la présence de poids lourds comme significative quand 3 véhicules au moins étaient répertoriés sur la voie de dépassement dans l'intervalle d'une minute. Le rapport, pour une condition de trafic donnée, entre les données pour lesquelles on observe une présence significative de poids lourds sur la voie de dépassement et le nombre total d'occurrences de cette condition de trafic constitue notre indicateur de présence. Un indicateur de ξ plaide pour un calage de n à (1 + ξ) voie.

On observe une forte variance sur les résultats, ce qui rend leur utilisation délicate. En particulier, on a écarté les états de trafic d'occurrence trop faible (moins de 5 sur le mois étudié). Toutefois, on peut noter de grandes tendances.

Il est utile de noter ici que le passage en congestion sur cette station de mesure correspond à un taux d'occupation de l'ordre de 25 %. Rappelons en outre que seuls les états fluides de trafic sont susceptibles de générer une gêne au dépassement. Le lecteur pourra également se rapporter au chapitre 6 Figure 6-17 pour noter l'étendue de la zone de gêne dans le cas d'une infrastructure à 2 voies. On y lit en particulier que la gêne peut y être très répandue pour un nombre de voies supérieur à n = 1.5.

A taux d'occupation donné

Si l'on raisonne pour une classe de taux d'occupation donnée, on observe l'évolution suivante selon le pourcentage de poids lourds.

L'indicateur de présence est d'abord nul, c'est-à-dire qu'il est sûr qu'il n'y a pas de poids lourds sur la voie de dépassement, pour de faibles pourcentages de poids lourds ; puis il augmente de façon continue pour atteindre 1, c'est-à-dire qu'il est sûr de trouver des poids lourds sur la voie rapide, et se maintient à cette valeur. On déduit n en ajoutant 1 à l'indicateur.

Page 240: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 7

238

La courbe est très bonne pour la classe [4 – 8 %] de taux d'occupation :

0 20 40 60 80 1001

1.2

1.4

1.6

1.8

2

Pourcentage PL

Nom

bre

de v

oies

occ

upée

s n

Figure 7-7 : Nombre de voies n occupées par les poids lourds

Taux d'occupation entre 4 et 8 %

On voit sur ce graphique que la perturbation due au dépassement des poids lourds créée par n = 1.5 voie apparaît quand le pourcentage de poids lourds atteint 20 %.

L'augmentation de n est d'autant plus rapide que le taux d'occupation est élevé. Pour la classe de pourcentage poids lourds [5 – 10 %], n atteint la valeur de 1.2 pour un taux d'occupation de [8 – 12 %], 1.6 pour un taux d'occupation de [12 – 16 %] et 1.7 pour un taux d'occupation de [16 – 20 %].

Pour des taux d'occupation plus élevés, on observe une diminution de n quand on atteint un pourcentage poids lourds assez élevé :

0 20 40 60 80 1001

1.2

1.4

1.6

1.8

2

Pourcentage PL

Nom

bre

de v

oies

occ

upée

s n

(a)

0 20 40 60 80 1001

1.2

1.4

1.6

1.8

2

Pourcentage PL

Nom

bre

de v

oies

occ

upée

s n

(b)

Figure 7-8 : Nombre de voies n occupées par les poids lourds

(a) Taux d'occupation entre 16 et 20 % (b) Taux d'occupation entre 20 et 24 %

Ceci pourrait s'interpréter comme une affectation naturelle des voies en congestion, les poids lourds sur la voie lente et les véhicules légers sur la voie rapide.

Surtout, on note que pour ces trafics plus denses (mais toujours fluides), les poids lourds génèrent un n = 1.5 voie dès un pourcentage autour de 10 %. Ceci conforte l'intuition physique : lorsque le trafic est dense, la gêne lors du dépassement croît rapidement avec le nombre de poids lourds.

Page 241: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Vers une application du modèle de trafic hétérogène

239

A pourcentage de poids lourds donné

Quand le pourcentage de poids lourds est inférieur à 5 %, on n'observe pas dans les données de présence significative de poids lourds sur la voie de gauche ; par conséquent, on peut prendre n = 1.

Ceci est un point important, car la zone de gêne couvre largement les faibles pourcentages de poids lourds quand n est suffisamment grand (voir la Figure 6-17).

Pour des pourcentages plus élevés de poids lourds, on observe la forme suivante :

0 20 40 60 80 1001

1.2

1.4

1.6

1.8

2

Taux d’occupation (%)

Nom

bre

de v

oies

occ

upée

s n

Figure 7-9 : Nombre de voies n occupées par les poids lourds

Pourcentage poids lourds entre 5 et 10 %

Ce qui nous intéresse particulièrement sont les états fluides de trafic (taux d'occupation inférieur à 25 %). On note que n est le plus grand quand le taux d'occupation est situé entre 15 % à 20 %, suivie d'une baisse en congestion ; on observe de plus un creux autour d'un pourcentage de 25 %, qui pourrait être lié au passage en congestion (peut-être une pression des véhicules légers pour une affectation des poids lourds sur la voie lente tant que le trafic est encore fluide).

Plus les pourcentages de poids lourds augmentent, plus les poids lourds se situent sur la voie de gauche et donc n est important :

0 20 40 60 80 1001

1.2

1.4

1.6

1.8

2

Taux d’occupation (%)

Nom

bre

de v

oies

occ

upée

s n

(a)

0 20 40 60 80 1001

1.2

1.4

1.6

1.8

2

Taux d’occupation (%)

Nom

bre

de v

oies

occ

upée

s n

(b)

Figure 7-10 : Nombre de voies n occupées par les poids lourds

(a) Pourcentage poids lourds entre 10 et 15 % (b) Pourcentage poids lourds entre 15 et 20 %

Page 242: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 7

240

Par conséquent, pour des états à très fort pourcentage poids lourds, on retrouve l'intuition physique d'un risque maximal de gêne au dépassement, quelle que soit la densité.

Conclusion

L'analyse des résultats précédents donne des indications sur le calage du paramètre n lors de la définition de la zone de gêne dans le modèle.

Ainsi, quand le trafic est fluide, n augmente avec le pourcentage de poids lourds, d'autant plus vite que la densité de trafic est importante. Il décroît par la suite, à l'approche de la congestion et en congestion, mais d'autant moins que le pourcentage de poids lourds est important.

2.3 Conclusion

Le calibrage des diagrammes fondamentaux et de la zone de gêne s'avère difficile dans le cadre de notre modèle, faute de données disponibles adéquates et en nombre suffisant pour mettre en place un calibrage global. Toutefois, il est possible de caler les différents paramètres mis en jeu un par un, à l'aide des données couramment disponibles ; certains sont en effet aisément accessibles à la mesure, comme les vitesses libres des véhicules, d'autres peuvent être estimés par l'analyse des données, comme la répartition des poids lourds selon les voies.

3 Applications de la modélisation du trafic hétérogène en planification

Un premier type d'application de la modélisation du trafic hétérogène que nous avons menée concerne la planification du trafic. On utilise ici les hypothèses phénoménologiques faites au chapitre 3 : les diagrammes fondamentaux construits, précisés par la gêne au dépassement du chapitre 6, permettent en effet d'affiner la description des caractéristiques d'une infrastructure routière dans le cas d'un trafic hétérogène ; de plus, ils permettent une évaluation économique du trafic plus précise en différenciant les types de véhicules.

3.1 Apports sur les caractéristiques de l'infrastructure

La modélisation phénoménologique proposée au chapitre 3 permet de préciser, dans le cas d'un trafic hétérogène, les grandes caractéristiques d'une infrastructure comme sa capacité ou ses concentrations maximale et critique.

3.1.1 Trafic hétérogène et capacité

Les diagrammes fondamentaux permettent tout d'abord de mettre en évidence une décroissance de la capacité d'une infrastructure avec l'augmentation du pourcentage de poids lourds, utile lors du dimensionnement d'une route.

Page 243: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Vers une application du modèle de trafic hétérogène

241

Ainsi, pour une autoroute à 3 voies, si l'on suppose une capacité de 5 200 véh/h dans le cas d'un trafic homogène, avec une vitesse critique égale à 25 m/s, des longueurs véhiculaires caractéristiques telles que L1 = 6.25 m et L2 = 18 m et un coefficient α égal à 0.12, on obtient la décroissance suivante de la capacité en fonction du pourcentage de poids lourds :

0 20 40 60 80 1000

1000

2000

3000

4000

5000

6000

Pourcentage PL

Cap

acité

(vé

h/h)

Figure 7-11 : Décroissance de la capacité avec le pourcentage de poids lourds

Dans la méthode proposée ici, l'évaluation de la capacité est surtout sensible à la bonne évaluation de la vitesse critique, et, à un degré moindre, à la précision sur les longueurs véhiculaires et le coefficient α ([Chanut, 2001]).

Cette modélisation de la décroissance de la capacité avec le pourcentage de poids lourds participe aux efforts de planification des manuels nationaux, ainsi qu'aux travaux menés par différents auteurs sur la capacité des infrastructures en présence de poids lourds (voir par exemple [Leurent (#2), 2002] ou encore [Laval, 2004]).

3.1.2 Trafic hétérogène et concentrations critique et maximale

L'originalité de l'approche proposée ici est le travail sur les concentrations maximale et critique, à l'aide de la modélisation des équations (3.10) et (3.14). Elle permet d'évaluer la décroissance de ces concentrations avec la proportion de poids lourds, mais également selon les tailles des véhicules. La Figure 7-12 donne l'exemple de la décroissance de la concentration maximale, pour une voie de circulation, selon le pourcentage de poids lourds constituant le trafic (L1 = 6.25 m, L2 = 18 m).

Page 244: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 7

242

0 20 40 60 80 1000

50

100

150

200

Pourcentage PL

Con

cent

ratio

n m

axim

ale

(véh

/km

)

Figure 7-12 : Décroissance de la concentration maximale avec le pourcentage PL

Cette modélisation est sommaire mais peut par contre permettre d'évaluer l'incidence d'une modification des tailles caractéristiques des poids lourds sur la concentration maximale, donc sur la concentration critique et le nombre de véhicules lors du passage en congestion par les hypothèses formulées dans notre modèle. Ceci est intéressant dans le cas de mise en application de nouvelles réglementations sur les longueurs de véhicules, car les poids lourds sont bien souvent à la longueur maximale réglementaire. C'est ainsi que [Elefteriadou et Webster, 2000] ont cherché à modifier les coefficients d'équivalence du manuel d'exploitation américain pour anticiper l'apparition de poids lourds plus longs et/ou articulés, dont l'utilisation pourrait permettre d'atteindre des gains de productivité dans le domaine du transport de marchandises.

Dans le cadre des hypothèses phénoménologiques faites quant aux diagrammes fondamentaux de notre modèle, les sorties suivantes sont obtenues sur les concentrations maximales pour une voie selon les longueurs véhiculaires moyennes des véhicules poids lourds l2, respectivement prises égales à 16, 18 et 20 m, soit des longueurs caractéristiques L2 égales à 18, 20 et 22 m (la longueur caractéristique des véhicules légers reste prise égale à 6.25 m) :

0 20 40 60 80 1000

50

100

150

200

Pourcentage PL

Con

cent

ratio

n m

axim

ale

(véh

/km

) l2 = 16 m

l2 = 18 m

l2 = 20 m

Figure 7-13 : Influence de la longueur des poids lourds sur la concentration maximale

On peut ainsi estimer la variation de concentration maximale, et donc dans notre modèle de la capacité, si la longueur moyenne des poids lourds varie de quelques mètres ;

Page 245: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Vers une application du modèle de trafic hétérogène

243

pour un taux de poids lourds de 20 %, classique en milieu autoroutier, cette variation est de l'ordre de 4 à 5 % pour une variation de deux mètres. Si l'augmentation de la taille de poids lourds est observée sans diminution de leur nombre, la congestion apparaît pour des concentrations en nombre de véhicules plus faibles, donc plus souvent.

Comme pour le dimensionnement par la capacité, la caractérisation par le modèle des concentrations maximale et critique est surtout sensible à la détermination des longueurs moyennes de véhicules [Chanut, 2001].

3.2 Apports quant à l'évaluation économique

Il est aujourd'hui devenu important d'estimer ou de mesurer la qualité du service de transport. Un des indicateurs les plus pertinents pour cela est le temps de parcours, ou la vitesse moyenne des véhicules ; il influence en effet la répartition du trafic selon les itinéraires et est donc un élément essentiel de planification des réseaux routiers. C'est donc l'évolution de cette vitesse moyenne qui va nous permettre de bâtir des indicateurs de qualité de trafic, notamment pour le flux de véhicules légers.

3.2.1 Utilisation des diagrammes fondamentaux

Dans ce cadre, la différenciation des vitesses des véhicules légers et des poids lourds est un point important qui permet d'affiner l'évaluation par rapport à une vitesse moyenne tous véhicules.

Lors de la modélisation des diagrammes fondamentaux proposée au chapitre 3, les relations vitesses-concentrations que nous avons mises en place sont simples : une décroissance linéaire des vitesses des deux types de véhicules en trafic fluide, l'égalité des vitesses en congestion avec une décroissance linéaire du débit total. De plus, l'hétérogénéité du trafic est prise en compte par la définition de concentrations critique et maximale variables avec le pourcentage de poids lourds.

Ceci constitue une approche légèrement différente de celle des courbes temps-débits utilisées par les manuels nationaux de différents pays et que nous avons présentées au chapitre 1 paragraphe 3.2 ; cette dernière ne raisonne en effet que sur les états fluides de trafic et l'expression mathématique des courbes proposées est souvent complexe et sans grande intuition physique. Dans notre cas, en dépit de la simplicité de la relation utilisée, les diagrammes fondamentaux proposés permettent de mettre en évidence de façon simple les effets de la concentration de chaque type de véhicule sur les véhicules du même type et sur ceux de l'autre type, en liaison directe avec les vitesses plus faibles des poids lourds et leur longueur plus importante. De plus, ils permettent de décrire les états congestionnés de trafic ; si ce point n'est pas crucial en planification, il permet toutefois d'éviter de travailler avec des courbes dont on ne cerne pas toujours bien le domaine de validité73.

73 Ainsi, les courbes allemandes [Ministère Fédéral des Transports, 1993] sont utilisables jusqu'à une vitesse de 20 km/h, pour laquelle les véhicules légers vont toujours plus vite que les poids lourds, alors même qu'on n'imagine que difficilement un état de trafic non sévèrement congestionné et par conséquent homogénéisé pour une telle vitesse moyenne.

Page 246: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 7

244

Perte de vitesse pour les véhicules légers

Cette démarche peut ainsi permettre de dégager des indicateurs de qualité de circulation, liée aux vitesses des différents véhicules, et notamment pour les véhicules légers. Il est ainsi possible de déterminer, à l'aide des diagrammes fondamentaux, quelle serait l'incidence sur les vitesses des véhicules légers d'une augmentation ponctuelle du taux de poids lourds, à demande de véhicules légers constante par exemple ; ceci prend tout son sens dans l'évaluation de l'évolution du trafic sur une infrastructure.

Par exemple, supposons une infrastructure à 3 voies, des vitesses libres de 35 et 25 m/s pour les véhicules légers et les poids lourds, une vitesse critique de 20 m/s, des longueurs caractéristiques véhiculaires de 6.25 et 18 m, et un taux de poids lourds de 10 %. Si l'on prend une concentration en véhicules légers de 35 véh/km, la concentration totale est de 38.9 véh/km et notre modèle prévoit, dans le cas d'un coefficient α de 0.2, un débit total de 3 817 véh/h (soit 4 411 uvp/h pour une équivalence PL/VL de 2.88, rapport des longueurs caractéristiques).

Cette situation correspond à un écoulement à 48 % de la concentration critique (égale ici à 80.8 véh/km d'après les équations (3.10) et (3.14)), et le modèle prévoit alors une vitesse pour les véhicules légers égale à 100.0 km/h.

Si l'on suppose une augmentation du nombre de poids lourds permettant d'atteindre un pourcentage de poids lourds de 14 %, la concentration passe à 40.7 véh/km ; le débit total en véhicules ne varie presque pas (3 856 véh/h, soit 4 717 uvp/h), mais le fonctionnement se fait maintenant à 54 % de la concentration critique (désormais égale à 76.0 véh/km). Le modèle prévoit alors une vitesse pour les véhicules légers de 97.1 km/h, en baisse de 2.9 % par rapport à la situation précédente.

Si l'on balaye, à concentration constante pour les véhicules légers, le pourcentage de poids lourds, on retrouve la courbe de décroissance de vitesses des véhicules légers :

0 20 40 60 80 1000

20

40

60

80

100

120

Pourcentage PL (%)

Vite

sse

VL

(km

/h)

A

FLUIDE CONGESTION

Vc

Figure 7-14 : Indicateur perte de vitesse des VL à concentration VL constante

(35 véh/km) Point A : vitesse référence de 100 km/h pour les VL, 10 % de poids lourds

Notre situation de référence étant une vitesse de 100 km/h pour les véhicules légers, le graphe ci-dessus donne directement la perte de vitesse en pourcentage avec l'augmentation du nombre de poids lourds, ou le gain attendu si l'on limite le nombre de poids lourds. Ainsi, on peut voir que la perte de vitesse des véhicules légers est de 10 % si le taux de poids lourds atteint 22 %, de 20 % si le taux de poids lourds est de 32 %. Au-

Page 247: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Vers une application du modèle de trafic hétérogène

245

delà de 37 %, on passe en congestion. On note également que si l'on interdisait la circulation des poids lourds, on aurait un gain de 6.3 % pour la vitesse des véhicules légers. Ces valeurs ne sont naturellement que des ordres de grandeur, la sensibilité aux paramètres du modèle devant être prise en considération ; on note toutefois que l'élasticité est inférieure à 1 [Chanut, 2001, #2].

Indicateur de distance et de temps libres pour les véhicules légers

En faisant des hypothèses plus fortes, comme celle de considérer que les véhicules légers soit sont bloqués derrière les poids lourds à la vitesse v2 de ceux-ci, soit circulent à leur vitesse libre V1, il est possible de dégager, à partir de la vitesse moyenne des véhicules légers prévue par le diagramme fondamental le pourcentage de distance libre β et le pourcentage de temps libre β* : il s'agit des distances et des temps pour lesquels les véhicules légers parviennent à rouler à leur vitesse libre. Une méthode de ce type a ainsi été développée dans [Simonet, Danzanvilliers et Leurent, 2005]74.

Dans ce cadre, le pourcentage de distance libre β est tel que :

( )1 1 1

1 2 1

1k k kV v vβ β−+ = (7.3)

et le pourcentage de temps libre β* est tel que :

( )1

1 2

* 1V

V v

β

β β β= −+ (7.4)

0 10 20 30 400

20

40

60

80

100

Pourcentage PL

Dis

tanc

e et

tem

ps li

bre

(%)

Distance libreTemps libre

Figure 7-15 : Pourcentage de distance et de temps libre pour les véhicules légers

Concentration VL constante (35 véh/km)

On lit sur la Figure 7-15, avec l'augmentation du nombre de poids lourds, la décroissance de la distance et du temps pour lesquels les véhicules légers parviennent à conserver leur vitesse libre. Etant donné que les véhicules légers ont une vitesse plus élevée que celle des poids lourds, le pourcentage de distance libre est nécessairement toujours plus élevé que celui de temps libre.

74 On s'intéresse ici à l'influence des poids lourds sur cet indicateur. Cependant, en dépit de sa définition, il décroît aussi avec l'augmentation de la concentration en véhicules légers ; sa décroissance n'est donc dans notre cas qu'imputable aux poids lourds, mais uniquement parce que la concentration en véhicules légers est considérée comme constante.

Page 248: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 7

246

On voit ainsi que pour la concentration en véhicules légers étudiée (35 véh/km), ces véhicules légers maintiennent leur vitesse libre pendant 54 % du temps en l'absence de poids lourds ; en présence de ces derniers, ce pourcentage de temps libre n'est plus que de 48 % pour 5 % de poids lourds, 42 % pour 10 % de poids lourds, 35 % pour 15 % de poids lourds, et finit par s'annuler quand on atteint la congestion, pour un taux de poids lourds de 37.7 % : tous les véhicules légers sont alors en permanence gênés.

3.2.2 Apport de la modélisation de la gêne au dépassement

La modélisation dynamique de la gêne au dépassement éventuellement ressentie par les véhicules légers et présentée au chapitre 6 permet de repréciser le diagramme fondamental des véhicules légers. Ainsi, la vitesse initialement prévue pour le flux rapide est minorée en présence d'une gêne au dépassement.

FLUIDE CONGESTION

Zonede gene

Concentration VL

Vite

sse

VL

Sans geneAvec gene

Figure 7-16 : Diagrammes fondamentaux VL, pour une concentration PL donnée

Sans et avec gêne au dépassement

Pour reprendre l'exemple de la perte de vitesse pour les véhicules légers traité précédemment, on a, sans et avec gêne au dépassement, les gains et pertes suivants sur la vitesse des véhicules légers :

Concentration VL (véh/km)

Pourcentage PL

Vitesse VL (km/h)

Sans gêne

Vitesse VL (km/h)

Avec gêne

Perte de vitesse due à la gêne (km/h)

35 0 % 106.3 (référence) 106.3 (0.0) 0.0 35 5 % 103.3 (-3.0) 99.6 (-6.7) 3.7 35 10 % 100.0 (-6.3) 97.4 (-8.9) 2.6 35 15 % 96.3 (-10.0) 94.9 (-11.4) 1.4 35 20 % 92.1 (-14.2) 92.0 (-14.3) 0.1 35 25 % 87.4 (-18.9) 87.4 (-18.9) 0.0 35 30 % 82.0 (-24.3) 82.0 (-24.3) 0.0 35 35 % 75.8 (-30.5) 75.8 (-30.5) 0.0

Tableau 7-2 : Perte supplémentaire de vitesse due à la gêne au dépassement

Page 249: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Vers une application du modèle de trafic hétérogène

247

Ainsi, et comme mis en évidence par la zone de gêne présentée au chapitre 6 (voir par exemple la Figure 6-14), c'est pour des pourcentages faibles de poids lourds qu'intervient une gêne supplémentaire liée au dépassement. Dans le tableau étudié ici, la gêne existe jusqu'à 20 % de poids lourds. Au-delà, le trafic est trop homogène pour qu'il y ait une gêne liée au dépassement.

Cette gêne est par ailleurs d'autant plus importante en termes de perte de vitesse que ce pourcentage de poids lourds est faible ; dans ces cas-là, une grande partie de la gêne est due au dépassement (3.7 des 6.7 km/h perdus par les véhicules légers avec 5 % de poids lourds). Pour des pourcentages plus élevés, la gêne due au dépassement s'estompe, en absolu et en relatif par rapport à la perte de vitesse due à la concentration en véhicules, pour finir par s'annuler.

Toutefois, si cette gêne au dépassement est souvent faible, elle peut être particulièrement mal ressentie par les usagers.

3.3 Utilisation concrète

L'utilisation du modèle dans un but de dimensionnement ou d'évaluation économique nécessite de valider les diagrammes fondamentaux et également le modèle de gêne au dépassement. Le calibrage des diagrammes fondamentaux et de la zone de gêne peut être réalisé selon les principes indiqués au paragraphe 2. La validation de la modélisation de la gêne au dépassement devrait être menée par une expérimentation spécifique ; toutefois, le modèle pour un véhicule isolé de type bus a déjà été confronté avec succès à des données expérimentales (voir [Giorgi, Leclercq et Lelong, 2000] ou encore [Muňoz et Daganzo, 2002] avec l'éclairage de [Leclercq, Chanut et Lesort, 2004]).

Les quelques indicateurs bâtis ici donnent des pistes d'évaluation de l'écoulement du trafic sur une infrastructure planifiée ou existante. Toutefois, ils doivent être confrontés à des situations réelles pour les indicateurs de dimensionnement, pondérés par le ressenti des conducteurs et monétarisés afin de représenter la perte pour les usagers et la collectivité pour les indicateurs économiques. Cette dernière tâche n'est guère aisée ; par exemple, le temps perdu lié à la gêne au dépassement, comme mis en évidence dans le cas d'un peloton par la Figure 6-27, est souvent faible, mais la présence récurrente de files d'attente peut par contre entraîner un ressenti fortement négatif des conducteurs quant au confort de la route empruntée et doit être pris en compte.

4 Apports de la modélisation du trafic hétérogène en exploitation

La modélisation développée aux chapitres 4, 5 et 6 peut constituer un outil pour les exploitants de gestion dynamique du trafic. En effet, elle permet d'expliquer la formation de phénomènes spécifiques à la présence de poids lourds, d'en prévoir l'apparition, mais également de tester des stratégies d'exploitation envers le trafic poids lourds.

Page 250: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 7

248

4.1 Compréhension et prévision du trafic hétérogène

Le modèle développé constitue un outil de compréhension de l'évolution dynamique d'un trafic hétérogène. Les simulations menées au chapitre 5 en sont l'illustration.

4.1.1 Explicitation de la gêne causée aux véhicules légers par les poids lourds

Le modèle construit dans ces travaux de thèse permet de préciser les mécanismes de formation de la gêne causée par la présence de poids lourds sur le bon écoulement du trafic de véhicules légers, et largement observée par les exploitants.

Cette gêne est caractérisée dans notre modèle par une occupation de l'espace plus élevée liée à la longueur des véhicules, et donc des vitesses plus faibles, en présence de poids lourds. Les résultats de simulation, et notamment la Figure 5-11, illustrent ce résultat.

Par ailleurs, une gêne supplémentaire est introduite par les effets liés au dépassement des véhicules lents ; modélisée au chapitre 6, son effet sur l'avancée d'un peloton de véhicules légers est mise en évidence par la simulation et illustrée par la Figure 6-27.

La modélisation menée constitue donc un premier éclairage pour l'exploitant pour expliciter les raisons des perturbations observées sur l'écoulement du trafic en présence de poids lourds.

4.1.2 Prévision de situations de trafic

En situation dynamique de trafic, lorsque la demande varie, le modèle est également à même de prévoir comment se fait la transition entre les différents états de trafic impliqués : par une discontinuité simple (de type onde de choc) ou par une variation continue de l'état du trafic (de type onde de raréfaction).

Dans le cas d'un trafic hétérogène, le modèle prévoit l'état intermédiaire qui doit apparaître. Cet état peut présenter certaines caractéristiques intéressantes pour l'exploitant, d'autant plus que c'est un état nouveau qui ne correspond ni à l'état aval préexistant, ni à l'état amont caractérisant la demande.

Une grande partie de ces caractéristiques particulières de l'état intermédiaire est liée à la différence de vitesses entre les différents véhicules. Ainsi, lors de l'arrivée d'un trafic fluide sur une file d'attente, cette dernière s'allonge par un état intermédiaire de même vitesse qu'elle, mais dont la composition en poids lourds est nécessairement plus faible que celle du trafic fluide l'alimentant. Par conséquent, si la file d'attente initiale présente la même composition en trafic que l'état fluide de demande (ou une composition plus forte en poids lourds), la file d'attente s'allonge avec un pourcentage de poids lourds d'une faiblesse surprenante ! Ceci est illustré par la Figure 5-12, reprise par la Figure 7-17 et s'explique par le fait que le trafic est piégé dans la composition dans laquelle il s'écoule, nécessairement plus faible en poids lourds que celle qui le compose en nombre de véhicules du fait de la vitesse plus élevée des véhicules légers.

Page 251: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Vers une application du modèle de trafic hétérogène

249

0 2 4 60

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

Espace (km)

Fra

ctio

n P

L

GI

D

Extension de la file d’attente

Figure 7-17 : Extension d'une file d'attente

D = file, I = extension de la file, G = alimentation de la file

Un tel état intermédiaire de trafic avec un pourcentage étonnamment faible de poids lourds se retrouve également lors de tout ralentissement du trafic lorsque ce dernier reste fluide ; un exemple en est le cas de la Figure 5-22, reprise par la Figure 7-18, et ce pour les mêmes raisons que précédemment.

0 2 4 60

0.2

0.4

0.6

0.8

1

Espace (km)

Fra

ctio

n P

L

G I

D

Creux de PL

Figure 7-18 : Ralentissement

G = état amont, I = état intermédiaire, D = état aval

A contrario, lors du redémarrage d'une file d'attente, il faut s'attendre juste après le redémarrage à une zone à pourcentage poids lourds élevé à cause de l'échappée plus rapide des véhicules légers (cette zone présente naturellement une concentration plus faible que la file d'attente initiale). Ceci est illustré par le cas de la Figure 5-18, reprise par la Figure 7-19.

Page 252: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 7

250

0 2 4 60

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

Espace (km)

Fra

ctio

n P

L

G F

I D

Pic PL au redémarrage

Figure 7-19 : Redémarrage

G = file d'attente, F = redémarrage, éventail = dispersion, I = véhicules légers seuls, D = état vide

Ainsi, le modèle mis en place peut permettre à l'exploitant de prévoir l'apparition d'états de trafic particuliers, notamment des états amoindris en nombre de poids lourds et d'autres constituant de véritables pics dans ce type de véhicules. Des expérimentations spécifiques pourraient être menées pour reproduire les situations de trafic décrites dans ce paragraphe et ainsi vérifier l'existence de ces pics ou creux de pourcentages poids lourds. En particulier, une analyse de propagation d'ondes comme celle menée en congestion par [Coifman et Wang, 2005] serait particulièrement pertinente dans notre cas.

4.2 Test de mesures de régulation vis-à-vis des poids lourds

De nombreuses actions de régulation de trafic ne sont pas, par les exploitants, expérimentables facilement : ceci est lié à un ensemble de contraintes socio-économiques qu'il n'est guère aisé de lever sur des infrastructures chargées en trafic, hormis dans le cadre d'expérimentations pilotes. L'intérêt de la modélisation prend alors tout son sens : le modèle fournit une reproduction de l'expérimentation que l'on souhaiterait réaliser afin de tester telle ou telle action de régulation.

Dans ce paragraphe, on va ainsi donner l'exemple du test par la simulation d'actions de régulation visant à interdire la circulation des poids lourds, à les assigner sur la voie lente en leur interdisant de dépasser, et à modérer la vitesse des véhicules légers afin d'homogénéiser le trafic.

Pour cela, on part de la simulation menée dans le chapitre 6 sur l'évolution d'un peloton de véhicules légers au sein d'un trafic constant de poids lourds. Les valeurs numériques suivantes sont utilisées : N = 3 voies, n = 2 voies, V1 = 35 m/s, V2 = Vc = 20 m/s, α = 0.5, L1 = 5 m, L2 = 15 m. Le pas de temps est de 0.2 s et le pas d'espace de 7 m.

On suppose une concentration uniforme de poids lourds de 0.02 PL/m, au sein de laquelle on fait avancer un groupe de véhicules légers, d'une densité de 0.23 VL/m et initialement situé sur les 350 premiers mètres.

Page 253: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Vers une application du modèle de trafic hétérogène

251

Dans ces conditions, on a la zone de gêne suivante :

0 0.5 1 1.5 2 2.5 30

0.5

1

1.5

2

2.5

3

ρ1

ρ 2 ρmax

ρc

Zone de gene

Figure 7-20 : Zone de gêne de la situation de référence, n = 2 voies

Le point représente l'état initial de trafic (0.23 VL/m, 0.02 PL/m) et la ligne les états de trafic qui vont apparaître lors de la dispersion du peloton de véhicules légers (concentration constante en poids lourds de 0.02 véh/m). On note une large traversée de la zone de gêne, par conséquent on s'attend à de nombreuses perturbations liées au dépassement. Ceci s'illustre par les figures suivantes :

0.7 1.4 2.1 2.8 3.5 4.2 4.90

0.05

0.1

0.15

0.2

0.25

k2 constant

Espace (km)

Con

cent

ratio

n V

L k 1 (

véh/

m)

(a)

60 80 100 120 1400

20

40

60

80

100

Temps (s)

Déb

it cu

mul

é

(b)

Figure 7-21 : Avancée d'un peloton de véhicules légers parmi un flux constant de poids

lourds Situation de référence

(a) Evolution du peloton (b) Débit cumulé en véhicules légers en x = 2.8 km

Comme prévu, le peloton de véhicules légers se déforme largement, on note l'apparition de files d'attente représentant les difficultés de dépassement. Le tracé des débits cumulés donne une situation de référence par rapport à laquelle on pourra évaluer l'impact des mesures de régulation proposées.

Le temps de parcours du véhicule n°70, qui nous servira de référence par la suite, est de 119.7 s pour effectuer 2.75 km (sa localisation initiale était de x = 46 m), soit une moyenne de 82.71 km/h ou 22.97 m/s.

Page 254: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 7

252

4.2.1 Interdiction de circulation des poids lourds

Une première mesure possible est l'interdiction de circulation des poids lourds (ou leur cantonnement sur une infrastructure dédiée). Dans ce cas, il n'y a évidemment pas de gêne liée au dépassement des poids lourds. De telles mesures d'interdiction de circulation de poids lourds sont largement utilisées dans l'Union Européenne, et notamment en France, que ce soit de façon permanente (du samedi 22 h au dimanche 22 h) ou de façon ponctuelle (grands départs l'hiver ou l'été, manifestations spécifiques) ou localisée (agglomération parisienne pour les retours de week-end).

La mise en place dans notre modèle montre que les gains sont alors notables : il n'y a plus de files d'attente et les temps de parcours sont beaucoup plus faibles.

0.7 1.4 2.1 2.8 3.5 4.2 4.90

0.05

0.1

0.15

0.2

0.25

Espace (km)

Con

cent

ratio

n V

L k 1 (

véh/

m) Peloton VL

(a)t=0s

t=28

s

t=56

s

t=84

s

t=11

2s

t=14

0sAvec interdictionRéférence

60 80 100 120 1400

20

40

60

80

100

Temps (s)

Déb

it cu

mul

éGaindu véhicule n°70

(b)

Avec interdictionRéférence

Figure 7-22 : Avancée d'un peloton de véhicules légers parmi un flux constant de poids

lourds Interdiction de circulation des poids lourds

(a) Evolution du peloton (b) Débit cumulé en véhicules légers en x = 2.8 km

Sur les débits cumulés, le temps de parcours du véhicule n°70 n'est plus que de 103.9 s, soit une vitesse moyenne de 95.43 km/h ou 26.51 m/s, en hausse de 15.4 % par rapport à la situation de référence.

4.2.2 Interdiction de dépassement par les poids lourds

Une autre mesure de régulation est destinée à éliminer la gêne liée au dépassement des poids lourds en interdisant à ces derniers de quitter la voie lente. L'expérimentation d'une mesure de ce type a été réalisée sur l'autoroute A4, près de Strasbourg, et les résultats ont été prometteurs en termes de vitesses [CETE de l'Est, 2001].

Dans le cadre de notre modèle, interdire aux poids lourds de quitter la voie de droite consiste à imposer n = 1 voie. Si l'on admet un taux d'infraction de 25 % (retrouvé dans l'expérimentation sur A4), la zone de gêne est naturellement modifiée avec n = 1.25 (Figure 7-23).

Page 255: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Vers une application du modèle de trafic hétérogène

253

0 0.5 1 1.5 2 2.5 30

0.5

1

1.5

2

2.5

3

ρ1

ρ 2 ρmax

ρc

Zone de gene

Figure 7-23 : Zone de gêne avec interdiction de dépassement pour les PL, n = 1.25 voies

On voit alors que lors de l'avancée du peloton, aucune gêne n'apparaîtra, car la zone de gêne ne sera pas traversée ; pour l'être, il faudrait un taux d'infraction de 45 %.

Les effets de l'interdiction de dépassement sur l'avancée du peloton et les temps de parcours sont donc notables :

0.7 1.4 2.1 2.8 3.5 4.2 4.90

0.05

0.1

0.15

0.2

0.25

Espace (km)

Con

cent

ratio

n V

L k 1 (

véh/

m) Peloton VL

(a)t=0s

t=28

s

t=56

s

t=84

s

t=11

2s

t=14

0s

Avec interdictionRéférence

60 80 100 120 1400

20

40

60

80

100

Temps (s)

Déb

it cu

mul

é

Gaindu véhicule n°70

(b)

Avec interdictionRéférence

Figure 7-24 : Avancée d'un peloton de véhicules légers parmi un flux constant de poids

lourds Interdiction de dépassement pour les poids lourds

(a) Evolution du peloton (b) Débit cumulé en véhicules légers en x = 2.8 km

Il n'y a plus de formation de files d'attente liées aux problèmes de dépassement, et le temps de parcours du véhicule n°70 est désormais de 115.6 s, soit une vitesse moyenne de 85.64 km/h ou 23.79 m/s, en hausse de 3.6 % par rapport à la situation de référence. Ce gain est naturellement nettement plus faible que lors de l'interdiction de circulation des poids lourds mais n'est pas négligeable.

4.2.3 Régulation de la vitesse des véhicules légers

Une autre mesure pouvant permettre un écoulement facilité d'un trafic hétérogène est la limitation de la vitesse des véhicules légers afin d'homogénéiser le trafic et ainsi de diminuer la gêne au dépassement. C'est selon des considérations du même type, visant à gagner en stabilité du trafic par l'homogénéisation des comportements, qu'une expérimentation semblable de régulation des vitesses ciblée sur les grands départs en

Page 256: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 7

254

vacances d'été a été réalisée sur l'autoroute A7 en France en 2004, pour des résultats ici encore prometteurs quant aux volumes d'encombrements recensés.

Dans notre modèle, cette mesure de régulation se traduit par un écrêtement des vitesses des véhicules légers à la vitesse de régulation. Pour la description de la zone de gêne, on considère que la vitesse libre des véhicules légers est alors cette vitesse de régulation.

Si l'on prend cette vitesse respectivement égale à 34 (122), 32 (115), 30 (108) et 28 m/s (101 km/h) au lieu des 35 m/s (126 km/h) initiaux, on observe une diminution de la zone de gêne :

0 0.5 1 1.50

0.5

1

1.5

ρ1

ρ 2

ρc

Zone de gene(a)

0 0.5 1 1.50

0.5

1

1.5

ρ1

ρ 2

ρc

Zone de gene(b)

0 0.5 1 1.50

0.5

1

1.5

ρ1

ρ 2

ρc

Zone de gene(c)

0 0.5 1 1.50

0.5

1

1.5

ρ1

ρ 2

ρc

Zone de gene(d)

Figure 7-25 : Zone de gêne avec limitation de la vitesse libre des véhicules légers

(a) V1 = 34 m/s (122 km/h) (b) V1 = 32 m/s (115 km/h) (c) V1 = 30 m/s (108 km/h) (d) V1 = 28 m/s (101 km/h)

Pour référence, la zone de gêne pour V1 = 35 m/s (126 km/h) est rappelée

Cette diminution de la zone de gêne est faible mais la modération des vitesses des véhicules légers signifie aussi que la gêne est moins importante quand elle se produit.

Page 257: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Vers une application du modèle de trafic hétérogène

255

Ainsi, plus on modère la vitesse des véhicules légers, moins on observe de files d'attente dues aux dépassements :

0.7 1.4 2.1 2.8 3.5 4.2 4.90

0.05

0.1

0.15

0.2

0.25

Espace (km)

Con

cent

ratio

n V

L k 1 (

véh/

m)

k2 constant

Peloton VL

(a)t=0s t=

28s

t=56

s

t=84

s

t=11

2s

t=14

0s

Avec régulationRéférence

0.7 1.4 2.1 2.8 3.5 4.2 4.90

0.05

0.1

0.15

0.2

0.25

Espace (km)

Con

cent

ratio

n V

L k 1 (

véh/

m)

k2 constant

Peloton VL

(b)t=0s t=

28s

t=56

s

t=84

s

t=11

2s

t=14

0s

Avec régulationRéférence

0.7 1.4 2.1 2.8 3.5 4.2 4.90

0.05

0.1

0.15

0.2

0.25

Espace (km)

Con

cent

ratio

n V

L k 1 (

véh/

m)

k2 constant

Peloton VL

(c)t=0s t=

28s

t=56

s

t=84

s

t=11

2s

t=14

0s

Avec régulationRéférence

0.7 1.4 2.1 2.8 3.5 4.2 4.90

0.05

0.1

0.15

0.2

0.25

Espace (km)

Con

cent

ratio

n V

L k 1 (

véh/

m)

k2 constant

Peloton VL

(d)t=0s t=

28s

t=56

s

t=84

s

t=11

2s

t=14

0s

Avec régulationRéférence

Figure 7-26 : Avancée d'un peloton de véhicules légers parmi un flux constant de poids

lourds Régulation de vitesse des véhicules légers

(a) à 34 m/s (122 km/h) (b) à 32 m/s (115 km/h) (c) à 30 m/s (108 km/h) (d) à 28 m/s (101 km/h)

On note ainsi la disparition de la file d'attente liée aux dépassements à t = 140 s pour une régulation à 34 m/s et sa disparition progressive à t = 112 s au fur et à mesure que l'on abaisse la vitesse de régulation ; cette observation qualitative est un argument pour l'emploi de cette mesure d'exploitation.

L'inconvénient de la régulation de vitesse est l'échappée contenue des véhicules légers après être sortis de la file d'attente du dépassement. A cause de la régulation de vitesse, leur avancée est ralentie, leur vitesse étant écrêtée. Ceci crée les paliers de concentration que l'on observe en tête de peloton et en sortie de file d'attente, et un retard de plus en plus marqué des tout premiers véhicules par rapport à la situation de référence.

Page 258: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 7

256

Toutefois, le tracé des débits cumulés montre qu'hormis les véhicules de tête, les temps de parcours restent très semblables, en dépit de la régulation imposée :

60 80 100 120 1400

20

40

60

80

100

Temps (s)

Déb

it cu

mul

é

(a)

Avec régulationRéférence

60 80 100 120 1400

20

40

60

80

100

Temps (s)

Déb

it cu

mul

é

(b)

Avec régulationRéférence

60 80 100 120 1400

20

40

60

80

100

Temps (s)

Déb

it cu

mul

é

(c)

Avec régulationRéférence

60 80 100 120 1400

20

40

60

80

100

Temps (s)

Déb

it cu

mul

é

(d)

Avec régulationRéférence

Figure 7-27 : Débits cumulés en x = 2.8 km lors de l'avancée d'un peloton de véhicules

légers Régulation de vitesse des véhicules légers (a) à 34 m/s (122 km/h) (b) à 32 m/s (115 km/h) (c) à 30 m/s (108 km/h) (d) à 28 m/s (101 km/h)

4.3 Utilisation concrète

Dans le cadre de l'exploitation dynamique du trafic, la modélisation est un outil performant au sens où elle permet au gestionnaire de comprendre les phénomènes de trafic, de les prévoir et de tester des mesures de régulation du trafic sans mettre en place d'expérimentation spécifique.

Dans le cadre d'un trafic hétérogène, le modèle développé au cours de ces travaux de thèse peut constituer un outil efficace quant à de telles évaluations. S'il est nécessaire de mieux le calibrer et de le valider plus complètement par des expérimentations spécifiques, cette partie montre qu'il est possible de l'utiliser afin d'évaluer des stratégies d'exploitation vis-à-vis du trafic poids lourds.

Page 259: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Vers une application du modèle de trafic hétérogène

257

5 Apports de la modélisation du trafic hétérogène pour d'autres modèles

Le traitement de l'hétérogénéité du trafic présente également un intérêt pour d'autres modèles de trafic, construits pour d'autres besoins spécifiques mais avec un trafic supposé homogène. La prise en compte du caractère hétérogène du trafic dans ces modèles, sur la base des résultats obtenus au cours de ces travaux de thèse, peut permettre d'améliorer l'efficacité de ces modèles dans leurs applications propres. Quelques exemples sont donnés dans cette partie.

5.1 Trafic hétérogène et modèles d'affectation

Les modèles d'affectation de trafic cherchent à préciser les choix d'itinéraires effectués par les différents usagers de la route afin de réaliser un déplacement donné, et à cerner les mécanismes présidant à ce choix. Dans ces modèles, le trafic est le plus souvent considéré comme homogène, alors que le choix peut différer selon le type de véhicules. Considérer un trafic hétérogène est par conséquent intéressant pour l'affectation ; c'est ainsi le but des travaux de [Toint et Wynter, 1996] ou [Bliemer, 2000].

La prise en compte de l'hétérogénéité du trafic est pertinente dans le cas de modèles d'affectation pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, il est raisonnable de penser que les poids lourds n'ont pas les mêmes mécanismes de choix que les véhicules légers : les conducteurs de poids lourds sont expérimentés, connaissent bien le réseau et par conséquent évaluent avec plus de recul les conditions de trafic sur les différents itinéraires afin de faire leur choix ; ceci n'est pas vrai pour une bonne partie des véhicules légers. De plus, leur temps de parcours est assez peu sensible, en l'absence de congestion, au niveau de trafic. Cependant, au contraire des véhicules légers, les poids lourds peuvent être soumis à un certain nombre de contraintes (point de passage obligé, itinéraire à suivre absolument, …) qui restreignent leur choix.

De plus, cette affectation différente des poids lourds influence l'affectation des véhicules légers. En effet, le choix est basé sur les temps de parcours des différents itinéraires, donc sur les volumes de trafic qui y circulent. Par conséquent, l'affectation des poids lourds selon les différents itinéraires a un impact immédiat sur le choix des véhicules légers.

Enfin, la diffusion d’information routière est devenue depuis plusieurs années une réalité grâce au développement des panneaux à messages variables (qui peuvent, par exemple, annoncer des incidents ou afficher des temps de parcours pour rejoindre une destination), mais aussi grâce à la mise en place progressive de systèmes embarqués à bord des véhicules : le conducteur est guidé en fonction des conditions de circulation en temps réel. Le problème, du point de vue de l’exploitant cherchant à utiliser de tels systèmes, est alors de connaître les effets que va entraîner la diffusion d’une information. Or il est là aussi raisonnable de penser que d'une part, les poids lourds disposent de plus d'informations que les véhicules légers (intérêt pour les messages sur les panneaux à message variable, écoute des radios d'information routière, équipement en systèmes embarqués, partage de l'information, …), d'autre part qu'ils utilisent plus complètement

Page 260: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Chapitre 7

258

cette information que les véhicules légers (pondérant cette information par leur expérience du réseau). Ceci plaide encore pour une différenciation au sein des modèles d'affectation des différents types de véhicules.

Tout modèle d'affectation ne peut être entièrement déconnecté d'un modèle d'écoulement, même simplifié, car c'est bien l'état de l'écoulement qui préside au choix d'itinéraires. Par conséquent, les apports théoriques du modèle d'écoulement d'un trafic hétérogène construit dans ces travaux de thèse constituent une base pour la prise en compte, dans les modèles d'affectation, de l'hétérogénéité du trafic et plus particulièrement de la présence de poids lourds.

5.2 Trafic hétérogène et estimations de nuisances environnementales

Des travaux spécifiques ont été menés pour utiliser les modèles d'écoulement de trafic à des fins d'estimation des nuisances environnementales. C'est en particulier le cas pour l'estimation dynamique des niveaux sonores à l'aide d'un modèle macroscopique d'écoulement de trafic [Leclercq, 2002] considérant un trafic homogène en véhicules.

Or, de façon générale, la pollution engendrée par les poids lourds, qu'elle soit aérienne ou sonore, est bien supérieure à celle des véhicules légers (voir le chapitre 1 paragraphe 1.2.1). Il est possible de prendre en compte globalement cette pollution, de façon moyenne et statique, par l'intermédiaire d'un pourcentage moyen de poids lourds par exemple. Cependant, il est aussi parfois nécessaire de considérer l'aspect dynamique de la pollution. Le cas des nuisances sonores est illustratif : il est important d'avoir une modélisation dynamique du trafic près d'un carrefour à feu urbain. En effet, au voisinage de ce dernier, la nuisance est plus la variation périodique du bruit, liée au ralentissement et au redémarrage des véhicules, que le niveau moyen de ce bruit.

Dans ce cadre, la différenciation des véhicules selon leur type pourrait être pertinente pour affiner la description des émissions sonores ou de polluants. Un outil de modélisation d'écoulement dynamique d'un trafic hétérogène serait alors nécessaire. Les travaux présentés dans le cadre de cette thèse pourraient ainsi servir de support à l'amélioration de cette description.

5.3 Trafic hétérogène et intersections

La modélisation de l'écoulement du trafic dans les intersections est aujourd'hui un sujet d'études important, tant l'écoulement aux nœuds d'échanges peut conditionner le niveau de fonctionnement global d'une infrastructure.

Le modèle proposé permet donc d'aller vers une modélisation macroscopique de l'écoulement dans les intersections qui prenne en compte l'hétérogénéité du trafic.

Cependant, une telle modélisation se doit d'être précise dans la description des comportements individuels, car les phénomènes mis en jeu sont locaux : entrée sur une bretelle d'accès, acceptation d'un créneau de passage, entrecroisement, régime de priorité. De plus, la variation inter-individuelle est importante ici, la réponse de deux conducteurs pouvant être très différente. Pour ces raisons, une approche microscopique de la modélisation de l'écoulement dans les carrefours peut être aussi pertinente, et ce d'autant

Page 261: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Vers une application du modèle de trafic hétérogène

259

plus qu'elle permet de distinguer aisément les types de véhicules, susceptibles également d'entraîner de fortes disparités de réponses à une même situation de trafic en intersections : les capacités d'accélération et l'espace nécessaire à un mouvement sont bien différents entre un véhicule léger et un poids lourds.

Toutefois, les carrefours ne constituent qu'une petite partie des réseaux de transport ; la majeure partie est constituée de linéaires de route où les phénomènes de trafic sont beaucoup plus globaux. Pour ces sections, une représentation macroscopique du trafic apparaît comme plus pertinente. Une idée récente consiste donc à adapter la représentation du trafic à l'échelle globale ou locale des phénomènes de trafic : microscopique pour les intersections, macroscopique pour la section courante. La difficulté est alors de construire un outil de traduction des conditions d'écoulement du trafic de l'approche macroscopique, décrivant le trafic comme un flux, en conditions d'écoulement dans une approche microscopique, pour laquelle les véhicules sont individualisés ; l'opération inverse est naturellement également nécessaire. Cette modélisation, qualifiée d' "hybride", a fait l'objet des recherches de [Bourrel, 2003] et est prometteuse. [Burghout, Koutsopoulos et Andréasson, 2005] ont ainsi repris cette idée en l'adaptant aux représentations microscopique et mésoscopique du trafic.

Ainsi, il est possible d'envisager l'utilisation d'un modèle microscopique différenciant les types de véhicules (il s'agit d'une tâche aisée pour un modèle de ce type) pour affiner la description de l'écoulement du trafic dans les intersections. Afin de le coupler avec un modèle macroscopique cohérent, à l'aide d'outils de la modélisation hybride qu'il serait nécessaire d'adapter à un trafic constitué de plusieurs types de véhicules, il est impératif que ce modèle macroscopique soit lui-même capable de représenter correctement l'écoulement macroscopique d'un trafic hétérogène. La modélisation développée au cours de cette thèse est ainsi candidate à une telle utilisation ; pour le moins, à travers les résultats obtenus lors de la résolution du modèle, elle met en évidence la nature de l'information à traduire dans le cas d'un trafic hétérogène et sa propagation au sein du modèle macroscopique.

6 Conclusion

Le calibrage et la validation d'un modèle d'écoulement du trafic constituent des étapes indispensables mais difficiles généralement à mener, à cause de la faiblesse des données en dehors d'expérimentations spécifiques. Cet état de fait est accentué dans le cas d'un trafic hétérogène, pour lequel le recueil de données est souvent peu adapté. Ce chapitre a mis en évidence ces difficultés mais a aussi montré qu'il était possible de mettre en place des méthodes permettant d'aller vers un calibrage efficace du modèle et ainsi des applications concrètes.

Parmi ces dernières, ce chapitre a souligné les possibilités offertes par le modèle de développer des indicateurs de qualité d'écoulement du trafic, utiles en planification, que ce soit pour le dimensionnement des infrastructures ou l'évaluation économique de leur fonctionnement et de tester sans expérimentation spécifique des mesures d'exploitation dynamique du trafic vis-à-vis des poids lourds, mesures pour lesquelles la modélisation de la gêne au dépassement est essentielle. Enfin, le chapitre a mis en exergue l'apport de

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Chapitre 7

260

connaissances quant à la description et la modélisation d'un trafic hétérogène qui pourrait être utile pour l'amélioration d'autres modèles de trafic à buts différents.

D'autres efforts seraient encore nécessaires afin de rendre opérationnelle la modélisation développée, mais son pouvoir de description, de prévision et d'évaluation constitue un premier outil d'analyse en laboratoire.

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261

Synthèse et perspectives

L'objectif de ces travaux de thèse était d'obtenir une modélisation dynamique d'écoulement du trafic routier prenant en considération le caractère hétérogène du trafic, notamment la présence de poids lourds au sein d'un flux de véhicules légers, et capable de reproduire les observations de comportement d'un tel trafic. En particulier, on cherchait à représenter trois caractéristiques principales d'un trafic poids lourds et véhicules légers : les différences de longueurs entre véhicules, les différences de vitesses entre types d'usagers et les interactions de dépassement.

Résultats obtenus

Cet objectif peut être considéré comme atteint par la mise en place et la résolution d'un modèle macroscopique du premier ordre d'écoulement d'un trafic hétérogène à deux types de véhicules : des poids lourds et des véhicules légers, sur la base du modèle originel de Lighthill-Whitham-Richards (LWR).

Les différences de longueurs et de vitesses entre véhicules ont été introduites dans le modèle lors de la définition des diagrammes fondamentaux de chaque type de véhicules ; ces diagrammes permettent d'exprimer phénoménologiquement les vitesses de chaque classe selon la densité du trafic et sa composition et ont été construits sur la base de considérations théoriques et de terrain. Les hypothèses formulées, en dépit de leur simplicité, permettent d'introduire le sens physique indispensable que doit présenter le modèle.

Les interactions liées au dépassement ont quant à elles été décrites par une modélisation spécifique interne au modèle d'écoulement général. Cette modélisation est basée sur l'extension au cas d'un flux rapide dépassant un flux lent des recherches antérieures décrivant les effets sur un flux rapide du dépassement d'un véhicule lent isolé.

Le modèle ainsi construit a été résolu de façon analytique par l'emploi des outils théoriques mathématiques des systèmes hyperboliques de lois de conservation. L'application des ces derniers au cas de l'écoulement d'un trafic routier à deux classes constitue un exemple de mise en œuvre pour lequel les hypothèses phénoménologiques formulées conduisent aussi bien à des propriétés spécifiques sur la solution, simplifiant son expression et son interprétation, qu'à l'apparition d'aspects mathématiques non standard, mettant en doute l'existence et l'unicité des solutions (finalement bien réelles).

Une déclinaison numérique de la résolution a été obtenue par l'utilisation d'un schéma de Godunov, très classiquement utilisé en modélisation macroscopique du trafic. On a pu montrer qu'il était possible de conserver en grande partie, dans le cas du trafic

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Synthèse et perspectives

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hétérogène, le sens physique que l'on attribue habituellement à sa mise en œuvre dans le cas d'un trafic homogène.

L'étude des solutions analytiques du modèle et du comportement de ce dernier en simulation a permis de montrer la cohérence des résultats obtenus et leur adéquation avec l'expérience quotidienne des conducteurs. La modélisation menée peut ainsi être appliquée à des fins variées de gestion du trafic, du dimensionnement des infrastructures aux tests de stratégies de régulation du trafic poids lourds.

Perspectives

Il reste naturellement un certain nombre de pistes d'amélioration du modèle. Elles concernent, entre autres, la description de l'hétérogénéité du trafic, les hypothèses phénoménologiques sous-jacentes, la résolution du modèle et la représentation délicate des interactions de dépassement.

Sur l'hétérogénéité du trafic

Le modèle proposé est adapté à un trafic décomposable en deux grandes classes de véhicules, homogènes par les longueurs véhiculaires et les vitesses pratiquées. Cette description de l'hétérogénéité du trafic est correcte sur des axes autoroutiers pour lesquels les poids lourds sont presque exclusivement des semi-remorques semblables ; par contre, elle peut s'avérer insuffisante dans un certain nombre de cas pour lesquels des différences notables apparaissent entre véhicules lents. Il s'agit notamment du cas des rampes ; dans ces conditions, certains poids lourds pratiquent une vitesse très lente et gênent les plus puissants d'entre eux.

La question d'un découpage du trafic en plus de deux classes se pose donc. Elle soulève un certain nombre de questions techniques quant aux possibilités de décrire de façon macroscopique toutes les classes considérées : il est alors nécessaire de résoudre un modèle macroscopique à 3, 4 ou 5 classes de véhicules. Plus pragmatiquement, une idée pourrait être approfondie pour les sections en rampes : les poids lourds les plus lents, assez peu nombreux, peuvent être modélisés de façon microscopique comme des véhicules isolés perturbant le flux de trafic à deux classes véhicules légers et poids lourds rapides. Cette approche permettrait de limiter les difficultés de description et de résolution du modèle, tout en s'appuyant sur les résultats consolidés des modèles d'incidents mobiles.

Sur les hypothèses phénoménologiques

Sans être déterminantes pour la résolution, les hypothèses phénoménologiques effectuées en début de modélisation sous-tendent le comportement du modèle. Un certain nombre d'entre elles sont fortes, même si elles sont justifiables par le sens commun ou des observations de terrain. Ces hypothèses doivent donc être confrontées à la réalité expérimentale pour être affinées : l'égalité des vitesses en congestion, la constance du taux d'occupation critique avec la composition du trafic en sont des exemples. La phénoménologie du modèle pourrait être ainsi largement améliorée.

Dans ce cadre, une étude expérimentale spécifique serait nécessaire pour repréciser le comportement d'un trafic hétérogène et les vitesses pratiquées par les différents véhicules selon les conditions de trafic. Elle permettrait en outre de tester l'hypothèse, au voisinage de la capacité, de l'existence d'états de trafic différents entre poids lourds et

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Synthèse et perspectives

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véhicules légers : c'est la semi-congestion, lors de laquelle les véhicules légers seraient en congestion alors que les poids lourds resteraient en trafic fluide. Cet état particulier est supposé par plusieurs auteurs dans la littérature.

Sur la résolution du modèle

Les difficultés mathématiques de résolution analytique apparues au gré des hypothèses phénoménologiques formulées, et en dépit de l'apparente simplicité de la formulation du modèle, conservent leur intérêt théorique ; des progrès sont encore possibles dans ce domaine. Toutefois, les perspectives de recherche en trafic quant à la résolution du modèle se concentrent plutôt sur son traitement numérique, indispensable pour mener rapidement des simulations.

Si l'emploi d'un schéma de type Godunov se justifie pleinement au vu de son utilisation consacrée pour les modèles macroscopiques de trafic, il serait pertinent d'approfondir d'autres techniques de résolution numérique. Il pourrait s'agir aussi bien d'autres schémas similaires (de type différences finies), plus complexes et plus adaptés à des systèmes non-linéaires, que d'approches plus novatrices, telles que les techniques de suivi d'ondes (wave tracking) ou issues de formulation variationnelle du modèle ; ces deux dernières approches pourraient être plus efficaces en cas d'introduction de conditions aux limites mobiles (modélisation microscopique des poids lourds les plus lents ou du caractère borné de l'accélération des véhicules).

Sur la modélisation des interactions de dépassement

Enfin, considérer des véhicules plus rapides que d'autres nécessite de s'intéresser précisément à la phase de dépassement et aux difficultés qui y sont attachées. Dans ces travaux de thèse et dans le cadre d'une modélisation macroscopique pour les deux classes considérées, une approche de modélisation de l'effet moyen du dépassement, basée sur une extension des modèles à incidents mobiles, a été proposée. Sa mise en œuvre a permis d'affiner la représentation de l'écoulement du trafic hétérogène.

Toutefois d'autres approches peuvent être suivies, en particulier celles basées sur les aspects stochastiques, et mériteraient d'être évaluées par rapport à celle choisie. C'est le cas notamment de la modélisation macroscopique multi-voies, comme celle bâtie par [Laval, 2004, #2]. Un tel travail pourrait ainsi être utilement mené dans la perspective de l'utilisation des résultats de la modélisation de cette interaction de dépassement ; selon que l'application concerne la sécurité routière ou l'évaluation d'un temps gêné, des approches différentes pourraient en effet être privilégiées.

Conclusion

Ces travaux de thèse se sont attachés à la description aussi précise que possible d'un modèle de trafic hétérogène en mettant en évidence les propriétés d'une telle modélisation ; la résolution théorique a été traitée de façon complète, en discutant des difficultés éventuelles et en y apportant des solutions. Si des pistes d'amélioration existent, ces efforts constituent un premier pas indispensable vers l'utilisation plus opérationnelle d'un tel modèle, dont des illustrations ont été données. Ce n'est par ailleurs que par cette confrontation à des applications opérationnelles, à leurs contraintes sur les objectifs à atteindre et aux données disponibles pour cela, que le modèle pourra être réellement validé et que les pistes d'amélioration les plus pertinentes pourront être déterminées.

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279

Table des illustrations

Figures

Figure 1-1 : Evolution des parts modales du transport de marchandises en France (1982-2003) 20 Figure 1-2 : Détermination des niveaux de service pour une autoroute [HCM, 2000] 31 Figure 1-3 : Courbes vitesses-débits pour le manuel britannique [Highway Agency, 2002] 34 Figure 1-4 : Courbes vitesses-débits pour le manuel allemand [Ministère Fédéral des Transports, 1993] 35 Figure 1-5 : Courbe vitesse-débit pour le manuel américain [HCM, 2000] 35 Figure 1-6 : Courbe vitesse-débit pour le manuel français [SETRA, 2001] 36 Figure 1-7 : Evolution des capacités selon le pourcentage de poids lourds 37 Figure 1-8 : Perte de vitesse des VL avec l'augmentation du débit VL 37 Figure 2-1 : Probabilité de souhait de dépassement d'un véhicule léger suivant la vitesse du poids lourd le précédant

[Peeta, Zhou et Zhang, 2004] 50 Figure 2-2 : Exemple de diagramme fondamental Q=Qéq(K) : diagramme de Greenshields 52 Figure 2-3 : Formation d'une onde de choc 54 Figure 2-4 : Formation d'un éventail de caractéristiques 54 Figure 2-5 : Fonctions de demande et d'offre pour l'application du schéma de Godunov 55 Figure 2-6 : Exemple de solution d'un problème de Riemann pour un modèle d'ordre supérieur 58 Figure 2-7 : Diagrammes fondamentaux de [Daganzo, 2002] 62 Figure 2-8 : Diagrammes fondamentaux de [Logghe, 2003] 63 Figure 3-1 : Histogramme des longueurs véhiculaires relevées sur l'autoroute néerlandaise A9 (extrait de [Bliemer,

2000], p.53) 74 Figure 3-2 : Distribution des longueurs des poids lourds en interurbain (extrait de [Pillot et al., 1994], p.29) 74 Figure 3-3 : Distribution des longueurs des poids lourds sur l'autoroute française A9 75 Figure 3-4 : Plan des phases : concentration maximale 81 Figure 3-5 : Estimation du TO critique en fonction de la composition du trafic (un point par pourcentage PL, points

reliés) 82 Figure 3-6 : Plan des phases : concentrations critiques et maximales 83 Figure 3-7 : Forme des relations d'équilibre en congestion 84 Figure 3-8 : Evolution des vitesses en situation fluide de trafic sur une section de l'autoroute française A9 85 Figure 3-9 : Relation vitesses-concentration totale (à un pourcentage PL p donné) 86 Figure 3-10 : Vitesses véhicules légers et poids lourds et concentration effective (véh/km) (extrait de [Bliemer,

2000]) 87 Figure 3-11 : Iso-vitesses (m/s) pour les véhicules légers (figure de gauche) et pour les poids lourds (figure de

droite) dans le plan des phases (K1,K2) 87 Figure 3-12 : Relations d'équilibre à un pourcentage de poids lourds p fixé : (a) Débits total et partiels en fonction

de la concentration totale (b) Débit total en fonction de la concentration totale, débits partiels en fonction des concentrations partielles 88

Figure 3-13 : Diagramme fondamental multi-classes 3D 88 Figure 4-1 : Problème de Riemann pour le modèle de trafic hétérogène 96 Figure 4-2 : Plan des phases et nature fluide/congestionné du trafic 98 Figure 4-3 : Evolution des valeurs propres avec la densité en véhicules légers (pour une densité de poids lourds

donnée) 102

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Table des illustrations

280

Figure 4-4 : Formation d'une onde de choc dans le cas scalaire Les caractéristiques de l'état amont croiseraient celles de l'état aval 105

Figure 4-5 : Formation d'un éventail dans le cas scalaire Les caractéristiques de l'état amont divergent de celles de l'état aval 106

Figure 4-6 : Exemple d'une courbe de choc 109 Figure 4-7 : Exemple d'une onde de raréfaction 109 Figure 4-8 : Principe de résolution d'un problème de Riemann entre G et D par l'introduction d'un état

intermédiaire I 111 Figure 4-9 : Courbes S1 de 1-choc pour états de trafic fluides 112 Figure 4-10 : Courbes R1 de 1-raréfaction pour des états de trafic fluides 112 Figure 4-11 : 1-courbes de Lax pour des états de trafic en congestion 113 Figure 4-12 : Courbe S2 de 2-choc pour des états de trafic fluides 114 Figure 4-13 : Courbes R2 de 2-raréfaction pour des états de trafic fluides 114 Figure 4-14 : 2-courbes de Lax pour des états de trafic en congestion 115 Figure 4-15 : Courbes de Lax pour un état de trafic fluide avec 100% de PL 116 Figure 4-16 : Courbes de Lax pour un état de trafic en congestion avec 100% de PL 116 Figure 4-17 : Courbes de Lax pour un état de trafic fluide avec 100% de VL et avec ρ1

g < ρ1omb 117

Figure 4-18 : Courbes de Lax pour un état de trafic fluide avec 100% de VL et avec ρ1g > ρ1

omb 117 Figure 4-19 : Courbes de Lax pour un état de trafic avec 100% de VL en congestion 118 Figure 4-20 : Résolution du problème de Riemann (les transitions peuvent être des ondes de raréfaction [exemple

première transition] ou des ondes de choc [exemple deuxième transition]) 121 Figure 4-21 : Onde de choc dans le plan (t,x) 123 Figure 4-22 : Onde de raréfaction dans le plan (t,x) 123 Figure 4-23 : Principe de résolution d'un problème de Riemann par l'introduction d'un état intermédiaire I -

Succession 1-onde puis 2-onde 125 Figure 4-24 : Principe de résolution d'un problème de Riemann entre G et D par l'introduction d'un état

intermédiaire I Intersection de la 1-courbe entropique de G et de la 2-courbe non-entropique de D 125 Figure 4-25 : Problème de Riemann pour des états amont et aval fluides : 1-choc puis 2-choc (a) Etat intermédiaire

dans le plan des phases (b) Diagramme (t,x) 126 Figure 4-26 : Problème de Riemann pour des états amont et aval fluides : 1-choc puis 2-raréfaction (a) Etat

intermédiaire dans le plan des phases (b) Diagramme (t,x) 127 Figure 4-27 : Problème de Riemann pour des états amont et aval fluides : 1-raréfaction puis 2-choc (a) Etat

intermédiaire dans le plan des phases (b) Diagramme (t,x) 127 Figure 4-28 : Problème de Riemann pour des états amont et aval fluides : 1-raréfaction puis 2-raréfaction (a) Etat

intermédiaire dans le plan des phases (b) Diagramme (t,x) 127 Figure 4-29 : Problème de Riemann pour un état amont fluide et un état aval en congestion (a) Etat intermédiaire

dans le plan des phases (b) Diagramme (t,x) 128 Figure 4-30 : Problème de Riemann pour un état amont fluide et un état aval en congestion (a) Etat intermédiaire

dans le plan des phases (b) Diagramme (t,x) 129 Figure 4-31 : Problème de Riemann pour des états amont et aval en congestion (a) Etat intermédiaire dans le plan

des phases (b) Diagramme (t, x) 129 Figure 4-32 : Problème de Riemann pour un état amont en congestion et un état aval fluide Cas avec une 2-choc (a)

Etat intermédiaire dans le plan des phases (b) Diagramme (t, x) 130 Figure 4-33 : Problème de Riemann pour un état amont en congestion et un état aval fluide Cas avec une 2-

raréfaction (a) Etat intermédiaire dans le plan des phases (b) Diagramme (t, x) 131 Figure 4-34 : Problème de Riemann pour des états homogènes à 100% de PL (a) 1-choc (b) 1-raréfaction 133 Figure 4-35 : (a) Courbes de Lax non-entropiques pour un état fluide à 100% VL et ρ1

g < ρ1omb (b) Courbes de Lax

non-entropiques pour un état fluide à 100% VL et ρ1g > ρ1

omb [à comparer aux Figure 4-17 et Figure 4-18] 134

Figure 4-36 : Problème de Riemann pour des états homogènes à 100% de VL, à gauche du point ombilical (a) 2-choc (b) 2-raréfaction 135

Figure 4-37 : Problème de Riemann pour des états homogènes à 100% de VL, à droite du point ombilical (a) 1-choc (b) 1-raréfaction 135

Figure 4-38 : Problème de Riemann pour des états homogènes à 100% de VL, de part et d'autre du point ombilical (a) Double raréfaction (b) L'état intermédiaire (trait gras) n'a pas d'extension spatiale 136

Figure 4-39 : Problème de Riemann pour des états homogènes à 100% de VL, de part et d'autre du point ombilical (a) Courbes entropiques de l'état G (b) Courbes non-entropiques de l'état D 136

Figure 4-40 : Problème de Riemann pour des états homogènes, VL seuls Possibilité de solutions non physiques 137

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Table des illustrations

281

Figure 4-41 : Problème de Riemann pour des états homogènes, VL seuls Possibilité de solutions non physiques La solution non-physique : succession d'un 1-choc entre G et I et d'un 2-choc entre I et D, produit un état intermédiaire sans extension spatiale et ne peut être distinguée du choc direct 138

Figure 4-42 : Délimitation de deux zones en état fluide de trafic 140 Figure 4-43 : Evolution des valeurs propres avec la densité en véhicules légers (pour une densité de poids lourds

donnée, hypothèse v2 = Vc en fluide) 140 Figure 4-44 : Courbes de Lax pour un état de trafic congestionné (v2 constante) 141 Figure 4-45 : Courbes de Lax pour des états fluides (v2 constante) (a) dans la zone I (b) dans la zone II 142 Figure 4-46 : Courbes de Lax non-entropiques pour des états fluides (v2 constante) (a) dans la zone I (b) dans la

zone II 142 Figure 4-47 : Exemple de résolution d'un problème de Riemann dans l'hypothèse v2 constante (a) Plan des phases

(b) Diagramme (t,x) 143 Figure 4-48 : Problème de Riemann dans l'hypothèse v2 constante ; traversée par une raréfaction de la ligne de

transition (a) Plan des phases (b) L'état intermédiaire (trait gras) n'a pas d'extension spatiale 144 Figure 4-49 : Problème de Riemann dans l'hypothèse v2 constante ; traversée par un choc de la ligne de transition

144 Figure 5-1 : Solutions exacte (trait plein) et numérique (pointillés) Méthode de Lax-Friedrichs (méthode du

premier ordre) 151 Figure 5-2 : Solutions exacte (trait plein) et numérique (pointillés) Méthode de Lax-Wendroff (méthode du

deuxième ordre) 151 Figure 5-3 : Méthode wave-tracking Remplacement de l'éventail entropique par une série de chocs non-entropiques

155 Figure 5-4 : Résolution par le schéma de Godunov du modèle LWR 158 Figure 5-5 : Diagramme fondamental Qéq(K) et vitesse des caractéristiques (trait fin) 159 Figure 5-6 : Fonctions de demande et d'offre locales de trafic 160 Figure 5-7 : Méthode de Godunov et problèmes de Riemann types Les pointillés représentent une onde qui peut être

de choc ou de raréfaction Les points représentent les ondes de contact 163 Figure 5-8 : Propagation d'un peloton de véhicules dont 7.7 % sont des poids lourds (20 % de la densité) 171 Figure 5-9 : Propagation d'un peloton de véhicules dont 57 % sont des poids lourds (80 % de la densité) 172 Figure 5-10 : Evolution d'un peloton de véhicules légers (sans nécessité de dépassement) 173 Figure 5-11 : Evolution d'un peloton de véhicules légers (trait plein) lors du dépassement d'un peloton de poids

lourds (pointillés) 174 Figure 5-12 : Arrivée sur une file d'attente : approche théorique (a) Plan des phases (b) Diagramme espace-temps

175 Figure 5-13 : Remontée de la file d'attente au cours du temps 175 Figure 5-14 : Arrivée sur file d'attente : cartes des densités partielles (a) Densité VL ρ1 (b) Densité PL ρ2 176 Figure 5-15 : Arrivée sur file d'attente (a) Evolution des densités partielles (b) Evolution de la fraction PL 176 Figure 5-16 : Redémarrage à un feu : approche théorique (a) Plan des phases (b) Diagramme espace-temps 177 Figure 5-17 : Redémarrage à un feu: cartes des densités partielles (a) Densité VL ρ1 (b) Densité PL ρ2 178 Figure 5-18 : Redémarrage à un feu (a) Evolution des densités (b) Evolution de la fraction PL 178 Figure 5-19 : Transition entre deux états congestionnés : approche théorique (a) Plan des phases (b) Diagramme

espace-temps 179 Figure 5-20 : Transition entre deux états congestionnés : (a) Carte de la densité totale ρ (b) Carte de la fraction PL

ψ 180 Figure 5-21 : Transition entre deux états congestionnés (a) Evolution des densités (b) Evolution de la fraction PL

180 Figure 5-22 : Transition entre deux états fluides (a) Plan des phases (zoom) (b) Diagramme espace-temps 181 Figure 5-23 : Transition entre deux états fluides : cartes des densités partielles (a) Densité VL ρ1 (b) Densité PL ρ2

182 Figure 5-24 : Transition entre deux états fluides (a) Evolution des densités (b) Evolution de la fraction PL 182 Figure 5-25 : Trafic homogène et point ombilical : approche analytique (a) Plan des phases (b) Diagramme espace-

temps 183 Figure 5-26 : Trafic homogène et point ombilical (a) Evolution des densités (b) Evolution de la fraction PL 183 Figure 5-27 : Hypothèse v2 constante : approche analytique (a) Plan des phases (b) Diagramme espace-temps 184 Figure 5-28 : Hypothèse v2 constante : cartes des densités partielles (a) Densité VL ρ1 (b) Densité PL ρ2 185 Figure 5-29 : Hypothèse v2 constante : Evolution des densités 185 Figure 5-30 : Résolution numérique et pas de temps (simulation à t = 100 s) 186 Figure 6-1 : Phénoménologie d'un dépassement avec formation d'une file d'attente 195

Page 284: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Table des illustrations

282

Figure 6-2 : Etats de trafic lors du dépassement d'un véhicule lent avec perturbation 195 Figure 6-3 : Solution analytique au problème de l'incident mobile, dans le cas d'une perturbation (a) Diagramme

fondamental (b) Diagramme espace-temps 197 Figure 6-4 : Paradoxe du modèle à incident mobile. Trajectoires des véhicules : (a) sans création de perturbation

(comportement irréaliste) (b) avec création d'une perturbation (comportement réaliste) (D'après [Leclercq, Chanut et Lesort, 2004 #2]) 200

Figure 6-5 : Phénoménologie du diagramme 1 voie et modèle à incident mobile (a) Diagramme 1 voie à l'intérieur du diagramme 2 voies (b) Diagramme 1 voie à l'extérieur du diagramme 2 voies 201

Figure 6-6 : Incident fixe et capacité (a) Diagramme fondamental (b) Diagramme espace-temps En x, un trait plein représente un état fluide, les points représentent la congestion 202

Figure 6-7 : Incident mobile et capacité (D' et U' sont les états D et U de l'incident immobile) 203 Figure 6-8 : Congestions d'un incident mobile (a) Temporaire (b) Permanente En x, un trait plein représente un état

fluide, les points représentent la congestion 203 Figure 6-9 : Diagramme partiel, sur N voies, des véhicules légers 205 Figure 6-10 : Diagrammes partiels, sur N et (N – n) voies, des véhicules légers 206 Figure 6-11 : Etat A' : les véhicules légers rencontrent une gêne lors du dépassement 206 Figure 6-12 : Etats de trafic pour lesquels les véhicules légers ne rencontrent pas de gêne lors du dépassement 207 Figure 6-13 : Fonction d'interaction extraite de [Bliemer, 2000] (p. 69) 207 Figure 6-14 : Ensemble d'états de trafic pour lesquels les véhicules légers rencontrent une gêne au dépassement 208 Figure 6-15 : Zone de gêne et vitesses libres (N = 3 voies, n = 2 voies) (a) V1 = 28 m/s, V2 = 26 m/s (b)

V1 = 31 m/s, V2 = 24 m/s (c) V1 = 34 m/s, V2 = 22 m/s (d) V1 = 37 m/s, V2 = 20 m/s 209 Figure 6-16 : Zone de gêne et nombre de voies sur lesquelles se répartissent les poids lourds Cas d'une route à N = 3

voies, V1 = 35 m/s, V2 = 25 m/s (a) n = 1 voie (b) n = 1.5 voie (c) n = 2 voies (d) n = 2.5 voies 210 Figure 6-17 : Zone de gêne et nombre de voies sur lesquelles se répartissent les poids lourds Cas d'une route à N = 2

voies, V1 = 35 m/s, V2 = 25 m/s (a) n = 1 voie (b) n = 1.2 voie (c) n = 1.5 voie (d) n = 1.8 voie 211 Figure 6-18 : Modification des vitesses des véhicules légers en cas de gêne au dépassement (a) Principe général (b)

Zoom 212 Figure 6-19 : Evolution des valeurs propres avec la densité de véhicules légers (pour une densité de poids lourds

donnée) (les vitesses des classes sont en pointillés) 213 Figure 6-20 : Modifications des courbes de Lax d'un état A situé dans la zone de gêne (a) Sans gêne au dépassement

(b) Avec gêne au dépassement 214 Figure 6-21 : Modifications des courbes de choc dans la zone de gêne (a) Sans gêne au dépassement (b) Avec gêne

au dépassement 215 Figure 6-22 : Modifications des courbes de raréfaction dans la zone de gêne (a) Sans gêne au dépassement (b) Avec

gêne au dépassement 215 Figure 6-23 : Modification de l'état intermédiaire lors d'une transition entre deux états fluides (a) Etat intermédiaire

sans gêne au dépassement (I0) (b) Etat intermédiaire avec gêne au dépassement (I1) [Io aide la comparaison] 216

Figure 6-24 : Modification de l'état intermédiaire lors d'une transition entre deux états fluides (a) Diagramme (x,t) sans gêne au dépassement (b) Diagramme (x,t) avec gêne au dépassement 217

Figure 6-25 : Modification de l'état intermédiaire lors d'une transition entre un état amont congestionné et un état aval fluide (a) Etat intermédiaire sans gêne au dépassement (I0) (b) Etat intermédiaire avec gêne au dépassement (I1) [Io aide la comparaison] 217

Figure 6-26 : Modification de l'état intermédiaire lors d'une transition entre un état amont congestionné et un état aval fluide (a) Diagramme (x,t) sans gêne au dépassement (b) Diagramme (x,t) avec gêne au dépassement 218

Figure 6-27 : Avancée d'un peloton de véhicules légers parmi un flux constant de poids lourds 219 Figure 6-28 : Débits cumulés et gêne au dépassement 220 Figure 7-1 : Pourcentage du débit réalisé par les poids lourds selon la concentration (20 % des véhicules sont des

poids lourds) 225 Figure 7-2 : Diagramme fondamental mesuré en milieu urbain, données 30 s (extrait de [Leclercq, 2002], p. 225)

229 Figure 7-3 : Diagramme fondamental sur autoroute (Cusset, Lyon), donnée 1 min 229 Figure 7-4 : Diagrammes fondamentaux sur autoroute (Cusset, Lyon), donnée 1 min (a) Composition du trafic entre

0 et 5 % de poids lourds (b) Composition du trafic entre 20 et 25 % de poids lourds 231 Figure 7-5 : Des vitesses constantes à concentrations faibles Mesures sur l'autoroute A7, 3 voies, pourcentage PL

entre 5 et 10 % (extrait de [Chanut, 2001], p. 69) 234 Figure 7-6 : Régression linéaire pour la détermination des vitesses libres (extrait de [Chanut, 2001], p. 106) La

droite de régression est : y = 125.61 - 45.542x, avec R2 = 0.9834 234 Figure 7-7 : Nombre de voies n occupées par les poids lourds Taux d'occupation entre 4 et 8 % 238

Page 285: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Table des illustrations

283

Figure 7-8 : Nombre de voies n occupées par les poids lourds (a) Taux d'occupation entre 16 et 20 % (b) Taux d'occupation entre 20 et 24 % 238

Figure 7-9 : Nombre de voies n occupées par les poids lourds Pourcentage poids lourds entre 5 et 10 % 239 Figure 7-10 : Nombre de voies n occupées par les poids lourds (a) Pourcentage poids lourds entre 10 et 15 % (b)

Pourcentage poids lourds entre 15 et 20 % 239 Figure 7-11 : Décroissance de la capacité avec le pourcentage de poids lourds 241 Figure 7-12 : Décroissance de la concentration maximale avec le pourcentage PL 242 Figure 7-13 : Influence de la longueur des poids lourds sur la concentration maximale 242 Figure 7-14 : Indicateur perte de vitesse des VL à concentration VL constante (35 véh/km) Point A : vitesse

référence de 100 km/h pour les VL, 10 % de poids lourds 244 Figure 7-15 : Pourcentage de distance et de temps libre pour les véhicules légers Concentration VL constante

(35 véh/km) 245 Figure 7-16 : Diagrammes fondamentaux VL, pour une concentration PL donnée Sans et avec gêne au dépassement

246 Figure 7-17 : Extension d'une file d'attente D = file, I = extension de la file, G = alimentation de la file 249 Figure 7-18 : Ralentissement G = état amont, I = état intermédiaire, D = état aval 249 Figure 7-19 : Redémarrage G = file d'attente, F = redémarrage, éventail = dispersion, I = véhicules légers seuls,

D = état vide 250 Figure 7-20 : Zone de gêne de la situation de référence, n = 2 voies 251 Figure 7-21 : Avancée d'un peloton de véhicules légers parmi un flux constant de poids lourds Situation de

référence (a) Evolution du peloton (b) Débit cumulé en véhicules légers en x = 2.8 km 251 Figure 7-22 : Avancée d'un peloton de véhicules légers parmi un flux constant de poids lourds Interdiction de

circulation des poids lourds (a) Evolution du peloton (b) Débit cumulé en véhicules légers en x = 2.8 km 252

Figure 7-23 : Zone de gêne avec interdiction de dépassement pour les PL, n = 1.25 voies 253 Figure 7-24 : Avancée d'un peloton de véhicules légers parmi un flux constant de poids lourds Interdiction de

dépassement pour les poids lourds (a) Evolution du peloton (b) Débit cumulé en véhicules légers en x = 2.8 km 253

Figure 7-25 : Zone de gêne avec limitation de la vitesse libre des véhicules légers (a) V1 = 34 m/s (122 km/h) (b) V1 = 32 m/s (115 km/h) (c) V1 = 30 m/s (108 km/h) (d) V1 = 28 m/s (101 km/h) Pour référence, la zone de gêne pour V1 = 35 m/s (126 km/h) est rappelée 254

Figure 7-26 : Avancée d'un peloton de véhicules légers parmi un flux constant de poids lourds Régulation de vitesse des véhicules légers (a) à 34 m/s (122 km/h) (b) à 32 m/s (115 km/h) (c) à 30 m/s (108 km/h) (d) à 28 m/s (101 km/h) 255

Figure 7-27 : Débits cumulés en x = 2.8 km lors de l'avancée d'un peloton de véhicules légers Régulation de vitesse des véhicules légers (a) à 34 m/s (122 km/h) (b) à 32 m/s (115 km/h) (c) à 30 m/s (108 km/h) (d) à 28 m/s (101 km/h) 256

Tableaux

Tableau 1-1 : Coefficients d'équivalence poids lourds/véhicules légers [HCM, 2000] 30 Tableau 5-1 : Les quatre cas types du problème de Riemann 163 Tableau 5-2 : Etats de trafic sur la frontière du problème de Riemann selon les états initiaux 164 Tableau 7-1 : Nombre de données disponibles, poids lourds et congestion (Données sur autoroute, agrégation

1 minute, Cusset, Lyon) 230 Tableau 7-2 : Perte supplémentaire de vitesse due à la gêne au dépassement 246

Page 286: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic
Page 287: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

285

Table des matières

Remerciements 11

Sommaire 13

Introduction 15

Chapitre 1 Poids lourds et gestion du trafic 19

1 Généralités sur le trafic poids lourds 20 1.1 Quelques données sur le transport de fret 20 1.2 Nuisances et problèmes liés à la circulation des poids lourds 21

1.2.1 Les atteintes à l'environnement 21 1.2.2 La dégradation des infrastructures 22 1.2.3 L'insécurité routière 22 1.2.4 Une gestion du trafic plus délicate 22

2 Recensement des effets des poids lourds sur le trafic 23 2.1 Quelles différences entre un véhicule léger et un poids lourd ? 23 2.2 Effets locaux de la présence de poids lourds 24

2.2.1 Des temps intervéhiculaires augmentés 25 2.2.2 Des comportements de positionnement et de dépassements modifiés 26 2.2.3 Inconfort de conduite au voisinage des poids lourds 27 2.2.4 Conclusion sur les effets locaux 27

2.3 Effets globaux de la présence de poids lourds 28 2.3.1 Diagramme fondamental et poids lourds 28 2.3.2 Qualité du trafic et poids lourds 29 2.3.3 Conclusion sur les effets globaux 29

3 Prise en compte des poids lourds pour la gestion du trafic 29 3.1 Dimensionnement et évaluation du niveau de service 30

3.1.1 Le coefficient d'équivalence : définition 30 3.1.2 Utilisations du coefficient d'équivalence 31 3.1.3 Questions sur le coefficient d'équivalence 31

3.2 Evaluation des temps de parcours 33 3.2.1 Facteurs pris en compte dans les courbes vitesses-débits 33 3.2.2 Formulation de courbes vitesses-débits 34 3.2.3 Comparaisons des courbes nationales 36 3.2.4 Conclusion – améliorations possibles 38

3.3 Mesures d'exploitation spécifiques aux poids lourds 39 3.3.1 La réglementation de la circulation des poids lourds 39 3.3.2 Voiries réservées au trafic poids lourds 40 3.3.3 Interdiction de dépassements pour les poids lourds 40

Page 288: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Table des matières

286

3.3.4 La régulation de vitesses 42

4 Conclusion 43

Chapitre 2 Etat de l'art des modèles d'écoulement d'un trafic hétérogène 45

1 Modélisation microscopique et poids lourds 46 1.1 Lois de poursuite 47 1.2 Modèles de changement de files 47 1.3 Résolution des modèles microscopiques 48 1.4 Prise en compte des poids lourds dans la modélisation microscopique 48

1.4.1 Dans les paramètres liés aux véhicules et aux conducteurs 48 1.4.2 Dans les lois de poursuite 49 1.4.3 Dans les modèles de changement de file 49

1.5 Conclusion 51

2 Modélisation macroscopique et poids lourds 51 2.1 Principes de l'approche macroscopique 51 2.2 Modèles macroscopiques du premier ordre 52

2.2.1 Principes 52 2.2.2 Résolution analytique 53 2.2.3 Résolution numérique 54

2.3 Modèles macroscopiques d'ordre supérieur 55 2.3.1 Principes 55 2.3.2 Résolution analytique 57 2.3.3 Résolution numérique 58

2.4 Prise en compte des poids lourds dans la modélisation macroscopique 58 2.4.1 Intégration de l'hétérogénéité du trafic dans les modèles

du premier ordre 58 2.4.2 Intégration de l'hétérogénéité du trafic dans les modèles d'ordre

supérieur 64 2.4.3 Résolution de ces modèles 65

2.5 Conclusion 65

3 Modèles cinétiques et poids lourds 66 3.1 Principes 66 3.2 Résolution 67 3.3 Prise en compte des poids lourds dans les modèles cinétiques 67 3.4 Conclusion 68

4 Approche de modélisation suivie 68 4.1 Quel type de modèle ? 68 4.2 Objectifs de la modélisation du trafic hétérogène 69

Chapitre 3 Diagrammes fondamentaux multi-classes 71

1 Préambule : forme générale des diagrammes fondamentaux 72

2 Nombre de classes considérées 73 2.1 Distribution des longueurs 73 2.2 Homogénéité des classes en vitesse 75

3 Considérations générales sur les relations d'équilibre pour un trafic multi-classes 76

3.1 Occupation de l'espace par un trafic hétérogène 76 3.2 Relations d'équilibre multi-classes 77

3.2.1 Décroissance des vitesses avec la concentration en véhicules 77

Page 289: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Table des matières

287

3.2.2 Effet de la mixité du trafic sur les vitesses 77 3.2.3 Forme des courbes d'équilibre multi-classes 78

4 Construction de relations fondamentales multi-classes pour un trafic hétérogène véhicules légers et poids lourds 80

4.1 Trafic hétérogène et occupation de l'espace 80 4.1.1 Expression de la concentration maximale pour un trafic hétérogène 80 4.1.2 Expression de la concentration critique pour un trafic hétérogène 82

4.2 Construction des relations d'équilibre vitesses-concentrations ou débits-concentrations 83 4.2.1 Trafic congestionné 83 4.2.2 Trafic fluide 84 4.2.3 Relations d'équilibre vitesses-concentration et débit(s)-concentration(s) 86

5 Conclusion 89

Chapitre 4 Résolution analytique du modèle d'écoulement de trafic hétérogène 91

1 Introduction : notations et formulation du problème 92 1.1 Notations 92

1.1.1 Paramètres du modèle 92 1.1.2 Variables du modèle 93

1.2 Formulation du modèle 94 1.3 Le problème de Riemann 96

2 Propriétés générales du modèle 96 2.1 Généralités 97 2.2 Hyperbolicité du système étudié 98

2.2.1 Expression des valeurs et vecteurs propres en trafic congestionné 98 2.2.2 Expression des valeurs et vecteurs propres en trafic fluide 99 2.2.3 Hyperbolicité du système 100

2.3 Etude des valeurs propres 100 2.3.1 Classement des valeurs propres 101 2.3.2 Vitesse de l'information finie et majorée par la vitesse du trafic 101 2.3.3 Evolution des valeurs propres avec les densités 101

2.4 Invariance du domaine 102 2.5 Généralisation de ces résultats 103 2.6 Conclusion 103

3 Courbes de Lax : principes et tracé pour le modèle étudié 103 3.1 Principes 104

3.1.1 Lieux de Hugoniot 104 3.1.2 Courbes intégrales 106

3.2 Nature des champs caractéristiques du système étudié 107 3.2.1 Trafic fluide 107 3.2.2 Trafic congestionné 107 3.2.3 Définitions des courbes de chocs et de raréfactions admissibles 108

3.3 Courbes de Lax et résolution du problème de Riemann 110 3.4 Tracé des courbes de choc et de raréfaction 111

3.4.1 Valeurs numériques utilisées 111 3.4.2 Courbes du premier champ caractéristique 111 3.4.3 Courbes du deuxième champ caractéristique 113 3.4.4 Cas particulier des frontières du domaine 115

3.5 Conclusion 118

4 Caractère anisotropique du modèle 118 4.1 Une propriété nécessaire du modèle 119

Page 290: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Table des matières

288

4.2 Critères d'anisotropie 119 4.3 Anisotropie du modèle proposé 120

4.3.1 Vitesses caractéristiques et anisotropie 120 4.3.2 Vitesses des chocs et anisotropie 120 4.3.3 Conclusion 120

5 Résolution du problème de Riemann (cas général) 121 5.1 Principes 121

5.1.1 Résultats préliminaires 122 5.1.2 Chocs, raréfactions et diagramme espace-temps 122 5.1.3 Classement des ondes dans le problème de Riemann 123 5.1.4 Conclusion 124

5.2 Résolution de problèmes de Riemann types pour notre modèle 126 5.2.1 Trafics amont et aval fluides 126 5.2.2 Trafic amont fluide, trafic aval congestionné 128 5.2.3 Trafics amont et aval congestionnés 129 5.2.4 Trafic amont congestionné, trafic aval fluide 130 5.2.5 Conclusion 131

6 Cas particuliers et aspects mathématiques non standard du modèle 131 6.1 Application du modèle à un trafic homogène 132

6.1.1 Trafic homogène constitué de poids lourds uniquement 132 6.1.2 Trafic homogène constitué de véhicules légers uniquement 133 6.1.3 Conclusion 139

6.2 Intégration de l'hypothèse v2 = constante en trafic fluide 139 6.2.1 Expression des valeurs propres et vecteurs propres 139 6.2.2 Courbes de Lax pour des états de trafic fluides 141 6.2.3 De nouvelles difficultés de résolution ? 143 6.2.4 Conclusion 145

7 Conclusion 145

Chapitre 5 Résolution numérique du modèle par un schéma de Godunov Comportement du modèle 147

1 De l'intérêt d'une résolution numérique 148

2 Résolution numérique et modèles de trafic 149 2.1 Résolution par schémas numériques aux différences finies 149

2.1.1 Généralités 149 2.1.2 Mise en œuvre dans les modèles de trafic 152

2.2 Autres approches de résolution numérique 154 2.3 Conclusion 156

3 Application du schéma de Godunov au modèle de trafic hétérogène 156 3.1 Méthode de Godunov et modèles de trafic 156

3.1.1 Principes de fonctionnement 157 3.1.2 Méthode de Godunov et concepts physiques de trafic 159

3.2 Un schéma numérique de type Godunov pour le modèle hétérogène 161 3.2.1 Objectifs et attentes 161 3.2.2 Construction d'un schéma de Godunov pour le modèle de trafic

hétérogène 161 3.2.3 Extension des concepts physiques d'offre et de demande au trafic

hétérogène 165

4 Etude du comportement du modèle en simulation 170 4.1 Evolution d'un trafic hétérogène 170

Page 291: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Table des matières

289

4.1.1 Propagation plus rapide des véhicules légers 170 4.1.2 Perturbations liées à la présence de poids lourds 173 4.1.3 Arrivée d'un trafic hétérogène sur une file d'attente 174 4.1.4 Redémarrage après un feu 177

4.2 Fonctionnement dans un même état de trafic (fluide ou congestionné) 179 4.2.1 Trafics en état congestionné 179 4.2.2 Trafics en état fluide 180

4.3 Etats de trafic particuliers 182 4.3.1 Etats homogènes et point ombilical 183 4.3.2 Cas de l'hypothèse v2 constante en trafic fluide 184

4.4 Simulation et pas de temps 185

5 Conclusion 187

Chapitre 6 Extension du modèle : Modélisation d'une gêne au dépassement 189

1 Comment représenter la gêne liée au dépassement des poids lourds ? 190 1.1 De la nécessité de modéliser une interaction de dépassement 191 1.2 Etat de l'art et gêne au dépassement 191

1.2.1 Inclusion de la gêne au dépassement lors de la définition des vitesses 191 1.2.2 Modélisation explicite de la répartition des véhicules sur les voies et des

changements de file 192 1.2.3 Représentation d'incidents mobiles 193 1.2.4 Conclusion 193

2 Etat de l'art des modèles dits à incidents mobiles 194 2.1 Phénoménologie de la gêne au dépassement 194

2.1.1 Considérations phénoménologiques 194 2.1.2 Etats de trafic perturbés 196 2.1.3 Conclusion 196

2.2 Description de l'incident mobile dans le modèle LWR 196 2.2.1 Equation de conservation dans un repère mobile 196 2.2.2 Etat de trafic au droit du véhicule lent 197 2.2.3 Effectivité de la gêne 198 2.2.4 Résolution numérique du modèle LWR à incidents mobiles 198

2.3 Quelques réflexions sur la phénoménologie des modèles à incidents mobiles 199 2.3.1 Etats de trafic générant des perturbations 199 2.3.2 Phénoménologie et diagramme fondamental sur une voie 200 2.3.3 Modèle LWR à incidents mobiles et capacité 202

3 Modélisation d’une gêne au dépassement dans le cas du modèle de trafic hétérogène 204

3.1 Etats de trafic hétérogène générant une gêne au dépassement 204 3.1.1 Construction des diagrammes fondamentaux véhicules légers 205 3.1.2 Définition des états gênés pour une densité de poids lourds donnée 206 3.1.3 Etats de trafic gênés dans le plan de phase (ρ1, ρ2) 208 3.1.4 Influence des paramètres sur la zone de gêne 208

3.2 Nouvelle phénoménologie pour les véhicules légers lors de la gêne 211

4 Conséquences sur la résolution du modèle de trafic hétérogène 213 4.1 Modification de la vitesse du flux véhicules légers 213 4.2 Modification des transitions entre états 213

4.2.1 Modifications des valeurs propres 213 4.2.2 Modifications des courbes de Lax 214 4.2.3 Modification de l'état intermédiaire 216

5 Un exemple numérique de la gêne au dépassement 218

Page 292: Modélisation dynamique macroscopique de l'écoulement d'un trafic

Table des matières

290

5.1 Gêne au dépassement et résolution numérique 218 5.2 Une simulation d'avancée d'un peloton véhicules légers parmi un flux poids

lourds 219

6 Conclusion 220

Chapitre 7 Vers une application du modèle de trafic hétérogène 221

1 Données et modèles de trafic 222 1.1 Recueils de données de trafic 223

1.1.1 Recueil de données collectives par boucles électromagnétiques 223 1.1.2 Recueil de données individuelles 225 1.1.3 Mesures par expérimentation spécifique 227 1.1.4 Conclusion 228

1.2 Exploitation des données issues de boucles électromagnétiques 228 1.2.1 Caractère d'équilibre des états de trafic mesurés 228 1.2.2 Distribution et hétéroscedasticité des données 230 1.2.3 Conclusion 231

1.3 Conclusion 231

2 Calibrage du modèle de trafic hétérogène 232 2.1 Calibrage des diagrammes fondamentaux 232

2.1.1 Démarche générale de calibrage d'un diagramme fondamental 232 2.1.2 Calibrage des diagrammes fondamentaux du modèle de trafic

hétérogène 233 2.2 Calibrage de la zone de gêne 236

2.2.1 Généralités 236 2.2.2 Calage du paramètre n 236

2.3 Conclusion 240

3 Applications de la modélisation du trafic hétérogène en planification 240 3.1 Apports sur les caractéristiques de l'infrastructure 240

3.1.1 Trafic hétérogène et capacité 240 3.1.2 Trafic hétérogène et concentrations critique et maximale 241

3.2 Apports quant à l'évaluation économique 243 3.2.1 Utilisation des diagrammes fondamentaux 243 3.2.2 Apport de la modélisation de la gêne au dépassement 246

3.3 Utilisation concrète 247

4 Apports de la modélisation du trafic hétérogène en exploitation 247 4.1 Compréhension et prévision du trafic hétérogène 248

4.1.1 Explicitation de la gêne causée aux véhicules légers par les poids lourds 248

4.1.2 Prévision de situations de trafic 248 4.2 Test de mesures de régulation vis-à-vis des poids lourds 250

4.2.1 Interdiction de circulation des poids lourds 252 4.2.2 Interdiction de dépassement par les poids lourds 252 4.2.3 Régulation de la vitesse des véhicules légers 253

4.3 Utilisation concrète 256

5 Apports de la modélisation du trafic hétérogène pour d'autres modèles 257 5.1 Trafic hétérogène et modèles d'affectation 257 5.2 Trafic hétérogène et estimations de nuisances environnementales 258 5.3 Trafic hétérogène et intersections 258

6 Conclusion 259

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Table des matières

291

Synthèse et perspectives 261

Bibliographie 265

Table des illustrations 279

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293

FOLIO ADMINISTRATIF

THESE SOUTENUE DEVANT L'INSTITUT NATIONAL DES SCIENCES APPLIQUEES DE LYON

NOM : CHANUT DATE de SOUTENANCE : Prénoms : Stéphane François Serge 27 juin 2005

TITRE : MODELISATION DYNAMIQUE MACROSCOPIQUE DE L’ECOULEMENT

D'UN TRAFIC ROUTIER HETEROGENE POIDS LOURDS ET VEHICULES LEGERS

NATURE : Doctorat Numéro d'ordre : 05 ISAL 0040

Formation doctorale : Mécanique, Energétique, Génie civil et Acoustique (MEGA)

Cote B.I.U. - Lyon : T 50/210/20 / et bis CLASSE :

RESUME :

L'hétérogénéité du trafic, au sens d'une composition en plusieurs types de véhicules, est l'un des phénomènes importants à qualifier et à quantifier aujourd'hui pour les exploitants ; en effet, de nombreuses sections autoroutières sont désormais chargées en poids lourds, et ce de façon quotidienne. La question de l'impact sur l'écoulement de la présence de ces véhicules se pose donc, exploitants et automobilistes se rejoignant pour incriminer les poids lourds, leur vitesse faible et leur gabarit imposant, quant à la détérioration des conditions de circulation, la densification du trafic et la formation plus rapide et plus durable de congestions et de ralentissements.

Cette thèse propose de construire un modèle d'écoulement du trafic permettant de décrire le comportement autoroutier d'un trafic hétérogène et constituant une première base théorique utile à l'exploitant dans le choix et le test de mesures de régulation envers le trafic poids lourds. Ce modèle est macroscopique à deux classes : il décrit le trafic comme un flux continu et composé de deux classes homogènes : des poids lourds et des véhicules légers, différenciés par leur vitesse et leur longueur.

Des diagrammes fondamentaux pour chacune des classes sont bâtis sur la base de considérations théoriques et de terrain afin d'introduire dans le modèle la phénoménologie attendue. Le modèle fait ensuite l'objet d'une résolution analytique complète par l'utilisation des outils mathématiques des systèmes hyperboliques de lois de conservation. Une résolution numérique est mise en place par l'utilisation d'un schéma de type Godunov. Une attention particulière est portée aux phases de dépassement et à leurs conséquences sur l'écoulement du trafic par la mise en place d'une modélisation spécifique. Les résultats théoriques obtenus et les sorties de simulation montrent la capacité du modèle à représenter de façon adéquate le comportement d'un trafic hétérogène : baisse des capacités des infrastructures, ralentissement des véhicules légers, formation de files d'attente temporaires lors du dépassement.

Les applications (de planification et de gestion dynamique du trafic) dont le modèle pourrait faire l'objet sur le terrain sont nombreuses : meilleure précision du dimensionnement des infrastructures, évaluation socio-économique affinée du fonctionnement des infrastructures en présence de poids lourds, test et évaluation de mesures de régulation d'un trafic hétérogène (interdiction de circulation ou de dépassement des poids lourds, régulation des vitesses).

MOTS-CLES :

modélisation écoulement trafic routier poids lourds Godunov hétérogène macroscopique dynamique conservation multi-classes exploitation hyperbolique

Laboratoire de recherche : Laboratoire d’Ingénierie Circulation Transport (LICIT), unité mixte ENTPE/INRETS

Directeurs de thèse: Jean-Baptiste Lesort et Christine Buisson

Président de jury : Bernard Chocat

Composition du jury : Sylvie Benzoni-Gavage Bernard Chocat Fabien Leurent Christine Buisson Jean-Baptiste Lesort Markos Papageorgiou

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Résumé L'hétérogénéité du trafic, au sens d'une composition en plusieurs types de véhicules, est l'un des

phénomènes importants à qualifier et à quantifier aujourd'hui pour les exploitants ; en effet, de nombreuses sections autoroutières sont désormais chargées en poids lourds, et ce de façon quotidienne. La question de l'impact sur l'écoulement de la présence de ces véhicules se pose donc, exploitants et automobilistes se rejoignant pour incriminer les poids lourds, leur vitesse faible et leur gabarit imposant, quant à la détérioration des conditions de circulation, la densification du trafic et la formation plus rapide et plus durable de congestions et de ralentissements.

Cette thèse propose de construire un modèle d'écoulement du trafic permettant de décrire le comportement autoroutier d'un trafic hétérogène et constituant une première base théorique utile à l'exploitant dans le choix et le test de mesures de régulation envers le trafic poids lourds. Ce modèle est macroscopique à deux classes : il décrit le trafic comme un flux continu et composé de deux classes homogènes : des poids lourds et des véhicules légers, différenciés par leur vitesse et leur longueur.

Des diagrammes fondamentaux pour chacune des classes sont bâtis sur la base de considérations théoriques et de terrain afin d'introduire dans le modèle la phénoménologie attendue. Le modèle fait ensuite l'objet d'une résolution analytique complète par l'utilisation des outils mathématiques des systèmes hyperboliques de lois de conservation. Une résolution numérique est mise en place par l'utilisation d'un schéma de type Godunov. Une attention particulière est portée aux phases de dépassement et à leurs conséquences sur l'écoulement du trafic par la mise en place d'une modélisation spécifique. Les résultats théoriques obtenus et les sorties de simulation montrent la capacité du modèle à représenter de façon adéquate le comportement d'un trafic hétérogène : baisse des capacités des infrastructures, ralentissement des véhicules légers, formation de files d'attente temporaires lors du dépassement.

Les applications (de planification et de gestion dynamique du trafic) dont le modèle pourrait faire l'objet sur le terrain sont nombreuses : meilleure précision du dimensionnement des infrastructures, évaluation socio-économique affinée du fonctionnement des infrastructures en présence de poids lourds, test et évaluation de mesures de régulation d'un trafic hétérogène (interdiction de circulation ou de dépassement des poids lourds, régulation des vitesses).

Abstract The traffic composition in several vehicle types is one of the most important phenomenon that road

managers have to address. Indeed many trucks drive daily on certain motorway sections. A question thus arises for what concerns the impact on the flow of the lorries. Managers and motorists agree to think trucks, their low speed and their imposing gauge are responsible for the deterioration of the flow conditions, the traffic density and the faster and more persistent formation of congestions and decelerations.

This thesis proposes to build a traffic flow model making it possible to describe the behavior of a heterogeneous traffic. Its aim is to provide a first theoretical tool for road managers, which can help them to choose and test regulation strategies towards the truck flow. This proposed model is a macroscopic one, with two classes. The traffic is described like a continuous flow and is assumed to be composed of two homogeneous classes: trucks and passenger cars, which are different from their speeds and their lengths.

Fundamental diagrams for each class are built on the basis of theoretical and field considerations: they introduce the expected phenomenology into the model. Then the model is completely solved by the use of the mathematical tools of the hyperbolic systems of conservation laws. A numerical resolution is built with a Godunov scheme. A particular attention is paid to the passing phenomenon and its effects on the traffic flow by a specific modelling. The theoretical results we get and the simulation cases we lead show the model makes it possible to represent the behavior of a heterogeneous traffic in an adequate way: lower capacities of motorways, deceleration of passenger cars, formation of temporary queues caused by passing.

The applications (in planning and dynamic traffic management) of the model are numerous: better precision of road planning, refined socio-economic evaluation of the transportation system in the presence of lorries, test and evaluation of regulation strategies of a heterogeneous traffic (prohibition of circulation or passing for trucks, speed metering).

Mots-clés modélisation écoulement trafic routier poids lourds Godunov hétérogène macroscopique dynamique conservation multi-classes exploitation hyperbolique