Théâtre

MOI, LES MAMMOUTHSJoris Mathieu en compagnie de Haut et CourtD'après le texte de Manuela Draeger

Création 2018 au Théâtre Nouvelle Génération

CENTRE DRAMATIQUE NATIONAL - LYON

THÉÂTRE NOUVELLE GÉNÉRATION

©Icinori

LE TNG VAISE 23 rue de Bourgogne, Lyon 9ème

DOSSIER PÉDAGOGIQUE Réalisé par David Rignault, Professeur-relais missioné par la DAAC et l’équipe du service des publics du théâtre

POUR TOUS DÈS : 12 ANS- DURÉE : 55 MIN

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SOMMAIRE

PRÉSENTATION DU SPECTACLE

Focus post-exotique 4

Le récit 5

La forme 6

Espace scénique et lumière 6

L'auteur 7

L'équipe artistique 8

Joris Mathieu 9

PISTES PÉDAGOGIQUES

Avant le spectacle 12

Après le spectacle 13

Avant / après le spectacle 14

ANNEXES

Annexe 1 : Interview d'Antoine Volodine par Laure Adler 16

Annexe 2 : Bestiaire 18

Annexe 3 : Analyser la mise en scène 19

Annexe 4 : Découvrir les enquêtes de Bobby Potempkine 20

Annexe 5 : De l'univers de Claude Ponty à celui de Volodine / Manuela Draeger 22

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Théâtre

MOI, LES MAMMOUTHSJoris Mathieu en compagnie de Haut et CourtD'après le texte de Manuela Draeger

Création 2018 au Théâtre Nouvelle Génération

Ce soir-là, rien ne semblait tout à fait pareil : le paysage avait perdu toutes ses couleurs et on raconte même que des pachydermes étaient entrés dans la ville, écrasant la directrice de la Maison du peuple, compressée dans un petit cube de glace… Voici comment l’histoire a commencé, et voilà comment Bobby Potemkine a débuté son enquête entre rêves éveillés et songes lucides. Sur scène, nous le retrouvons dans un petit bureau de police abandonné, glissant au gré du récit entre deux mondes, comme embarqué dans un périple où la magie des mots et la poésie des images jouent de concert.

Néons, flashs et fonds verts à l’intensité quasi-nucléaire composent un espace semblable à un rêve éveillé. Ici, tout concourt à troubler les perceptions, pour mieux perdre pied et quitter l’espace ou toute autre notion de temps. Persistances rétiniennes, ombres et phosphorescences nous hypnotisent au rythme d’un oratorio mêlant les compositions sonores de Nicolas Thévenet à la voix en live de la comédienne Maud Peyrache. Laissons-nous désarçonner pour parcourir ce monde où les météorites tombent en pluie et où les icebergs défilent en bon ordre. Rendez-vous pour un voyage singulier en territoires incongrus pour prendre plaisir à ressortir délicieusement sonné.

DISTRIBUTION

Adaptation scénique et musicale de Moi, les Mammouths, Manuela Draeger, éditions L’École des loisirs Mise en scène Joris Mathieu Espace scénique Nicolas Boudier, Joris Mathieu Composition musicale Nicolas Thévenet Interprète Maud Peyrache Création lumière Nicolas Boudier Costumes et masque Marion Talotti

CRÉDITS

Production Théâtre Nouvelle Génération – Centre dramatique national de Lyon Coproduction Scène nationale de Sète et du Bassin de Thau

FOCUS POST EXOTIQUE

Joris Mathieu renoue avec les mondes glissants, poétiques et politiques d’Antoine Volodine afin de poursuivre sur scène le déploiement de l’univers post-exotique que celui-ci dessine livre après livre, à plusieurs voix et en compagnie d’hétéronymes multiples.

Derrière son titre insolite, cette nouvelle création de Joris Mathieu tirée du livre de Manuela Draeger, l’un des hétéronymes d’Antoine Volodine, cache une mystérieuse enquête sur fond d’invasion de mammouths laineux…

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FOCUS POST-EXOTIQUE

Antoine Volodine est devenu au fil du temps un véritable compagnon de route de la compagnie Haut et Court. Nous avons tout d'abord créé entre 2007 et 2009, une adaptation en trois volets de son roman Des Anges Mineurs puis, suite à cette première rencontre, nous avons construit ensemble, en 2010 et 2011, le Bardo, un labyrinthe immersif évolutif de 49 pièces pour un seul spectateur.

Après quelques incursions dans les univers littéraires voisins de Witold Grombrowicz (adaptation de Cosmos) et de Philip K. Dick (Urbik/Orbik), nous avons eu le désir de retrouver les mondes glissants, poétiques et politiques d'Antoine Volodine afin de poursuivre sur scène le déploiement d'un monde post-exotique qu'il dessine livre après livre, à plusieurs voix et en compagnie d'hétéronymes multiples.

Sur la saison 2017-2018, l’équipe artistique Haut et Court développera au Centre dramatique national un focus autour de la littérature des auteurs post-exotiques. C'est dans le cadre de ce focus que nous produirons Moi, les mammouths et Frères Sorcières.

À Lyon, nous présenterons les deux formes en parallèle.

Frères sorcières, texte inédit qu’Antoine Volodine a confié à Joris Mathieu, s’adresse à un public adulte et est une nouvelle plongée au cœur de son univers littéraire ; un voyage visuel, fantastique et fascinant qui nous raconte l’errance d’un être immortel condamné à se glisser d’un corps à un autre pour traverser les siècles.

Moi, les mammouths adapté du roman pour l'enfance et la jeunesse de Manuela Draeger (hétéronyme d'Antoine Volodine) sera une forme plus légère, avec une seule interprète, et à destination d’un public de collégiens. Cette petite forme tournera ensuite, entre autres, en décentralisation dans les collèges du Département. Derrière son titre insolite, cette nouvelle création cache une mystérieuse enquête sur fond d’invasion de mammouths laineux…

Persistances rétiniennes, ombres et phosphorescence nous hypnotisent au rythme d’un oratorio mêlant les compositions sonores de Nicolas Thévenet, à la voix en live de la comédienne Maud Peyrache.

Joris MathieuJanvier 2017

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LE RÉCIT

Bobby Potemkine est le personnage récurrent d'une série de 11 romans pour la jeunesse écrite par Manuela Draeger et publiée à l'École des Loisirs. Moi, les Mammouths est la dernière de ses aventures qui nous soit parvenue à ce jour.

Bobby Potemkine vit dans un monde surnaturel. Tous les personnages, qu'ils soient humains, animaux ou végétaux, cohabitent au sein d'une communauté hétéroclite et étrange. Dans cet univers, Bobby Potemkine fait office de shérif depuis qu'il s'est simplement installé pour vivre dans le bureau déserté par la police. Comme la plupart des habitants de ce monde, Bobby éprouve la solitude et l'isolement. Alors, pour tuer le temps, Bobby mène des enquêtes, glissant entre le monde réel et le monde des rêves.

Bobby mène des enquêtes donc, mais Bobby raconte aussi des histoires à voix haute pour un public imaginaire, pour son amie Lilly Nebraska et pour lui-même aussi, pour rester en éveil.

Ne pas sombrer dans le sommeil... surtout ne pas sombrer... garder les yeux ouverts... et regarder par la fenêtre.

Ce soir-là justement, comme de nombreux autres soirs, Bobby est à la fenêtre et se tient prêt à être témoin de quelque chose de bizarre. Quelque chose qui nécessiterait que la police mène une enquête. Des cris de mouettes rieuses au loin, un ciel traversé par les pluies de météorites, la ville qui a perdu ses couleurs, des petites taches au loin sur l'estuaire, qui ressemblent à des baleines portant des fourrures, des mammouths plutôt, impossible pourtant que cela soit des mammouths, mais la rumeur commence à enfler dans la ville et revient aux oreilles de Bobby par la bouche-même des mouettes qui lui racontent que les mammouths sont entrés dans la ville, on raconte même qu'ils auraient écrasé la directrice de la maison du peuple, compressée pour être plus précis dans un petit cube de glace.

Voilà comment l'histoire commence, voilà comment Bobby démarre son enquête entre rêves éveillés et songes lucides.

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LA FORMEL'aventure de Moi, les mammouths commence par une commande passée à Nicolas Thévenet, musicien, créateur de l'ensemble de l'univers sonore des productions de Haut et Court. L'écriture poétique de Volodine se prête parfaitement à la composition musicale. Notre envie était de produire une sorte d'Oratorio pour une interprète, Maud Peyrache qui a déjà travaillé sur plusieurs projets de la compagnie Haut et Court, une forme simple formellement qui fasse confiance à la puissance des images littéraires de Volodine. Un des enjeux était pour nous de partir en décentralisation à la rencontre des publics (collégiens notamment), pour leur faire découvrir cette langue fantastique, poétique et exigeante.

Dans notre travail en général, et dans cette forme en particulier, la musique n'est pas un support, elle participe à l'écriture, elle produit du sens et agit sur les sens.

Moi, les mammouths nous plonge dans un espace intermédiaire.

Comme le personnage principal, Bobby Potemkine, nous spectateurs sommes sans cesse en train de glisser entre le sommeil et l'éveil. Il y a quelque chose d'hypnotique et de magique dans cet univers, qui nous fait perdre pied, quitter l'espace dans lequel nous sommes et perdre la notion du temps. La musique et les textes travaillent de concert pour nous faire naviguer dans ces eaux troublantes et chavirer dans un entre-rêve.

Sur scène, dans un dispositif entièrement autonome, on retrouve Bobby dans un espace épuré qui ressemble à un petit bureau de police abandonné. Ce bureau est au centre d'une sorte de studio de tournage sur fond vert. Ici, aucune image n'est projetée mais chacun peut déployer un imaginaire propre et incruster Bobby dans des décors mentaux. Ce bureau semble glisser dans différents mondes au gré du récit, embarqué dans les images littéraires.

Progressivement, la présence de ce fond vert s'estompe et se révèle être un espace phosphorescent, presque une source de lumière dans cet univers irradié et post-nucléaire.

Avec Nicolas Boudier qui crée les lumières et les espaces scéniques de tous les spectacles de Haut et Court, nous avons conçu un dispositif autonome (led, fluo, flash de studio photo) qui délimite cet espace de jeu.

Nous souhaitons déployer un travail particulier qui joue sur les perceptions du public. Un travail sur la persistance rétinienne, la rémanence des images, les ombres et la phosphorescence. Nous utiliserons notamment des petits éclairages au sodium, qui ont la particularité d'effacer certaines couleurs sur les objets, costumes et même sur la peau. Ainsi, comme dans un rêve, sous les yeux des spectateurs la perception des couleurs et de l'espace sera troublée.

Moi, les mammouths présente un dispositif reposant en partie sur la perception, l’œil du spectateur en est le prolongement. Moi, les mammouths est un songe éveillé, une insomnie qui se situerait dans une sorte de boîte photographique où les images s’impriment plus qu’elles ne s’expriment. Un espace de jeu pouvant produire sa propre lumière, jouant sur la persistance rétinienne pour générer la rémanence des images, il est habité par une figure oscillant entre réel et irréel, ombre et pleine lumière, noir et orange, sépia ou couleur.

Elle est l’habitante d’une zone irradiée, enfermée à l’intérieur de ses paupières, un espace matrice à la fois révélateur et fixateur des images qui apparaissent sous nos yeux.

Composé d’une toile phosphorescente, sorte de papier photographique géant d’environ 6m x 5m, la lumière sera une composante primordiale pour faire vivre ce dispositif, elle convoquera les LED trichromiques, la lumière au mercure, les flashs photographiques ou encore les sodiums basses pressions qui, de par leur particularité monochromatique, ont le pouvoir de faire disparaitre la couleur.

ESPACE SCÉNIQUE ET LUMIÈRE

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L'AUTEURAntoine Volodine est le principal pseudonyme d'un romancier français, né en 1950. En 2014, il est lauréat du prix Medicis pour son roman Terminus radieux. Quelques années plus tôt, son roman Des anges mineurs, adapté au Théâtre par la compagnie Haut et Court, obtient le prix Wepler et le prix du Livre Inter.

Antoine Volodine a d'abord enseigné le russe pendant quinze ans, avant de se consacrer à l'écriture et à la traduction à partir de 1987. Il commence à publier des romans dans la collection « Présence du futur » des éditions Denoël, tout en déclarant que ses livres n’appartiennent pas au registre de la science-fiction. Il publiera ensuite aux éditions Minuit, puis chez Gallimard et aujourd'hui aux Editions du Seuil.

Dès ses premiers livres, il construit avec constance un édifice romanesque à plusieurs voix qu'il nomme « post-exotisme ». Il se place délibérément à l'écart des courants littéraires contemporains et se réclame à la fois du réalisme magique et d'une littérature internationaliste, engagée, où se croisent l'onirisme et la politique. Les thèmes de ses ouvrages sont marqués par une réflexion sur l'histoire du XXème siècle, sur les génocides et l'échec des révolutions. Dans un décor souvent ruiniforme ou carcéral, les personnages sont des rescapés hantés par le passé, cherchant à fuir leur misère affective en inventant des univers féeriques ou des espaces parallèles. Profondément attiré par les cultures asiatiques, et en particulier par le chamanisme et le bouddhisme, Antoine Volodine met volontiers en scène des hommes et des femmes qui errent dans le monde d'après la mort, dans le Bardo tibétain du Bardo Thödol, ou voyagent de rêve en rêve, à la recherche de l'âme sœur ou d'un territoire utopique.

L’originalité des écrits d’Antoine Volodine a souvent conduit la critique à le présenter comme inclassable. La catégorie littéraire nouvelle dont il se réclame, le « post-exotisme », permet toutefois d’aborder son œuvre sans se perdre dans des systèmes de classifications intenables. Ce terme, qui à l’origine se voulait une simple marque d’indépendance, correspond bien aujourd’hui à un projet concret : donner à lire « une littérature étrangère écrite en français », « une littérature de l’ailleurs qui va vers l’ailleurs ». Antoine Volodine a signé une quinzaine de livres et s’est présenté comme « porte-parole » du post-exotisme et de ses « divers » écrivains. En effet, à la fin des années 1990, d’autres signatures sont venues s’ajouter à celle d’Antoine Volodine. Plusieurs parmi celles qui sont citées dans Le Post-exotisme en dix leçons, leçon onze ont publié des livres : Elli Kronauer et Manuel Draeger à l'École des Loisirs et, en mai 2008, Lutz Bassmann aux éditions Verdier. Mais, à la façon de Fernando Pessoa, quoiqu’avec cette différence essentielle qu'est la collectivisation, absente du modèle lusitanien, il s'agit là d'une série d'hétéronymes, sous lesquels se cache un seul et même écrivain, d'abord connu sous le pseudonyme d'Antoine Volodine.

ANTOINE VOLODINE A PROPOS DU POST-EXOTISME

« De quoi ça parle ? Ça parle de sujets ordinaires : du destin de l’individu, de la brutalité de la société et de l’histoire, et d’une infirmité qui frappe l’espèce humaine comme une plaie : impossible pour elle d’aller vers autre chose que vers le pire. Ni les révolutions ni les rêves n’aboutissent. Ça parle de ça aussi, de la nostalgie écroulée d’un bolchevisme qui ne s’écroulerait pas, des songes passionnés, violemment inoubliables et jamais oubliés, des amours en vase clos, des horizons en vase clos, toujours atteignables, toujours atteints. (…) Qui parle ? Cette question nous fait sourire. Nous haussons vaguement une demi-épaule. Suivent quelques secondes de silence embarrassé. Car au fond, nous ne sommes plus très sûrs de la réponse. Dans certains de nos livres, l'importance du théâtre est si forte que plutôt de lecteurs et de lectrices, nous parlons d'auditeurs, d'auditrices, et même de spectateurs et de spectatrices. D'ailleurs les écrivains post-exotiques se sont régulièrement présentés comme diseurs plutôt que comme écrivains. »

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L’ÉQUIPE ARTISTIQUEHAUT ET COURT, UN THÉÂTRE EN COMPAGNIE

J’envisage le Théâtre comme un art qui se pratique en compagnie. À mon sens, le geste artistique puise sa force et sa beauté dans l’agrégation des désirs, des visions et des compétences, de plusieurs individus qui œuvrent ensemble.

C’est ainsi qu’est née en 1998 la compagnie Haut et Court autour d’une envie et d’une énergie partagées avec d’autres artistes. Aujourd’hui, ils sont toujours à mes côtés et ont dynamisé et porté ce projet, affrontant collectivement les échecs et partageant les réussites. Grâce à ce travail collectif de patiente maturation artistique, Haut et Court est aujourd’hui porteur d’une identité singulière. Se revendiquant clairement théâtrales, les formes que nous créons, s’adressent à tous les sens du spectateur et mêlent intimement images, littérature, illusions d’optique, musique, nouvelles technologies et machinerie traditionnelle. L’anticipation, l’imaginaire des sciences, l’innovation scénique et technologique sont des moteurs puissants de notre recherche créative.

La question du vivant est au centre de notre travail et se traduit scéniquement par une recherche sur l'état de présence du corps de l'acteur. Un langage qui s'élabore depuis le début en compagnie des interprètes fondateurs de la compagnie. La dramaturgie des spectacles se construit en étroite collaboration avec Nicolas Boudier dans sa dimension scénographique et le travail de composition musicale de Nicolas Thévenet marque de son empreinte l'univers scénique de la compagnie.

Ensemble, nous nous engageons sur la voie d’un théâtre d’anticipation et poétique, qui renoue avec une tradition politique du spectacle, interrogeant le monde, la place de l’individu mais aussi celle de l’art au cœur de la cité.

Après ces années de travail en compagnie indépendante, c’est tout naturellement que l’équipe de Haut et Court s’est engagée à mes côtés en 2015 et habite désormais les murs et anime le projet artistique du Théâtre Nouvelle Génération - Centre dramatique national de Lyon. Par l’agrégation de leurs visions, désirs et compétences, ils œuvrent désormais pour nourrir les projets de création du CDN dans ses murs à Lyon, en tournée en France et à l’étranger, et dans la transmission auprès des publics.

Joris Mathieu

LES CRÉATEURS

Joris Mathieu – metteur en scène, auteur, concepteur des dispositifs scéniques

Nicolas Boudier – concepteur des dispositifs scéniques, éclairagiste, photographe

Nicolas Thévenet – compositeur

Philippe Chareyron – comédien

Vincent Hermano – comédien

Marion Talotti – comédienne, conceptrice de masques

Loïc Bontems – créateur vidéo, programmeur

Siegfried Marque – créateur vidéo, photographe

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Après des études supérieures en arts du spectacle, Joris Mathieu fonde en 1998, avec plusieurs compagnons artistes interprètes et créateurs techniques, la Compagnie Haut et Court à Lyon.

Féru de littérature comme d’arts plastiques, il privilégie l’adaptation de romans ou de nouvelles qui lui permettent de s’exprimer en tant qu’auteur scénique. Très vite, la compagnie est repérée sur la scène régionale et par les institutions. Elle est en résidence au Polaris de Corbas puis au Théâtre de Vénissieux. Elle rencontre son public aussi bien dans des CDN, Scènes nationales, Scènes régionales, que dans des lieux dits de recherche.

Au cours de ces années, l’identité artistique de Haut et Court devient très claire et permet à Joris Mathieu d’affirmer des projets ambitieux dans leurs dimensions poétiques et littéraires comme dans leurs développements technologiques.

Avec Des anges mineurs puis le Bardo, il entame un compagnonnage avec l’auteur Antoine Volodine, une des figures centrales de l’écriture contemporaine en France. La Compagnie développe également un intérêt tout particulier pour le jeune public avec des adaptations de nouvelles.

Depuis le 1er janvier 2015, Joris Mathieu est directeur du Théâtre Nouvelle Génération – Centre dramatique national de Lyon.

C’est dans le prolongement du projet artistique développé par la compagnie Haut et Court, que Joris Mathieu a construit celui du Centre dramatique national de Lyon, en plaçant la création et l’acte poétique dans une perspective intergénérationnelle. Trouver des voies d’accès à l’art pour toutes les générations de public, inventer des dispositifs innovants pour aller à la rencontre des publics et en particulier des plus jeunes spectateurs, est au cœur de son projet.

JORIS MATHIEUMETTEUR EN SCÈNE ET DIRECTEUR ARTISTIQUE

SPECTACLES CRÉÉS• 2017 Artefact de Joris Mathieu en Compagnie de Haut et Court

• 2016 Hikikomori - le refuge de Joris Mathieu en Compagnie de Haut et Court

• 2013 Un jour je vous raconterai une autre aventure extraordinaire... Cosmos d’après le roman de Witold Gombrowicz

• 2011 Urbik/Orbik d’après Lorris Murail inspiré par la vie et l’œuvre de Philip K. Dick

• 2011 La Sphère d’Or d’après Barjavel et Erle Cox

• 2011 Sarapis d’après Philip K. Dick

• 2010 Le Bardo écrit en collaboration avec Antoine Volodine

• 2006-2010 Des anges mineurs d’après Antoine Volodine

• 2005 Microclimats d’après Maïakovski, Cortazar et Botho Strauss

• 2004 Notices, manuels techniques et modes d’emploi d’après Laurent Gautier

• 2003 Matin brun (jeune public) d’après Franck Pavloff

• 2003 Préambule à une déclaration mondiale de guerre à l’ordre d’après Alain Turgeon

• 2002 Gorges déployées écriture collective

• 2002 Le palais des claques (jeune public) d’après Pascal Brückner

• 2001 pH neutre de Joris Mathieu

• 1999 La méthode albanaise d’après Lorris Murail

• 1998 Kernok le pirate (jeune public) d’après Eugène Sue

© D.R.

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NICOLAS BOUDIERConcepteur des dispositifs scéniques, créateur lumière, scénographe et photographe

Après avoir suivi des études d’automation et de robotique, il se tourne vers le spectacle vivant. En 1992, il est diplômé de l’ENSATT et du GRIM en tant que concepteur lumière. Par la suite, il est rapidement sollicité pour concevoir des scénographies pour la danse et le théâtre. Depuis 1992, il conçoit et réalise la lumière et/ou la scénographie pour les spectacles de : Joris Mathieu, Lia Rodrigues, Yuval Pick, Gilles Pastor, Olivier Meyrou, Stephane Ricordel, João Saldanha, Astrid Takche de Toledo, Carole Lorang, Shantala Shivalingappa, Ushio Amagatsu, Pina Bausch, Savitry Naïr, projet Namasya dirigé par Shantala Shivalingappa, Enzo Cormann, Le Nordik Balck Theatre, Christian Giriat, Nathalie Royer, Denis Plassard, Philippe Pellen Baldini, Sylvie Mongin Algan.Dernièrement, il a réalisé des dispositifs optiques, lumière et vidéo en collaboration avec Enki Bilal pour l’exposition Mécanhumanimal au Musée des arts et métiers à Paris. Il développe en parallèle son travail photographique, ainsi que des performances et installations en collaboration avec Astrid Takche de Toledo. Au sein du Théâtre Nouvelle Génération, il poursuit sa collaboration étroite avec Joris Mathieu pour développer le projet de recherche scénographique des productions du Centre dramatique national.

NICOLAS THÉVENETArtiste Compositeur

Après le CNR de Lyon en classe de musique acousmatique, il compose tous les univers sonores de la compagnie Haut et Court depuis ses débuts. Il collabore aussi avec la Cie Traction Avant, Jean Christophe Hembert, Jean Lambert-Wild et Nicolas Ramond, la Cie la hors de, le musée des confluences. En parallèle des productions scéniques, il développe au sein du Centre dramatique national un projet de production de fictions audiophoniques.

MAUD PEYRACHEArtiste Interprète

Après une année d'Arts Appliqués, elle prépare une licence de Lettres Modernes, en même temps elle suit des cours de jeu à Lyon et à St Etienne, puis à Paris au Cours Florent. Elle quitte rapidement cette formation, rencontre Joris Mathieu au cours d'un stage en 2010 et commence à travailler comme comédienne pour la Compagnie Haut et Court (Le Bardo, La Sphère d'Or).

Elle clôt en parallèle ses études universitaires par un mémoire de recherche sur les différents enjeux des théâtres immersifs.

Depuis trois ans, Maud développe une activité d'écriture et de mise en scène sur des projets personnels (théâtre, documentaire, fiction sonore) tout en multipliant les ateliers et projets de création artistique auprès de différents publics (adolescents, adultes, détenus, primo-arrivants) pour le Théâtre Nouvelle Génération – CDN de Lyon et Les Subsistances.

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PISTES PÉDAGOGIQUES

AVANT LE SPECTACLEPour préparer au mieux vos élèves à voir Moi, les mammouths, lisez le texte tiré de l’interview d’Antoine Volodine (Annexe 1) : ce document permet de comprendre la polyphonie narrative offerte par les auteurs du post-exotisme.

JOUER AVEC LE TITRELe titre fait référence à une réplique récurrente dans la narration : « Je ne sais pas, vous, les mammouths, mais moi… » A partir de ce début de phrase chaque élève propose une suite. Cet exercice peut se faire tant à l’écrit qu’à l’oral. Un débat peut même être envisagé. L’imagination des élèves peut ainsi se déployer, à l’image des questionnements narrateur/enquêteur Bobby Potemkine sur ces animaux réels mais d’un autre temps.

CRÉER UN BESTIAIREAntoine Volodine aime créer de nouvelles réalités : noms d’herbes et de plantes, êtres hybrides avec lesquels s’effacent les genres et la frontière entre humanité et animalité. Dans Moi, les mammouths, plusieurs personnages apparaissent – dont certains sont récurrents dans les enquêtes de Manuela Draeger. Les élèves sont invités à dessiner ce que leur inspirent les personnages, simplement à partir de leur nom. Afin d’accompagner la création, on peut montrer aux élèves l’image étrange de l’Annexe 2 où l’animal dessiné prend vie. Cela va dans le sens de ce que les élèves vont vivre avec la représentation : la création mentale d’un univers à la fois étrange et familier.

> Bobby Potemkine > Lili Nebraska > les mouettes Melissa Fatale et Belinda Naufrageuse appelées « les soeurs Dodeskaden » > Big Katz, le crabe laineux > Hilmi Brill, la chauve-soubise

ECRIRE & (RA)CONTER

A partir du début du texte, on demande aux élèves d’écrire la suite de la description d’abord puis l’intrusion d’une action dans cette description.

C'était un soir comme presque tous les autres. Je me tenais près de la fenêtre et, du haut du cinquième étage, je regardais le crépuscule s'étendre sur l'estuaire. Depuis chez moi, la vue est superbe quelle que soit l'heure, mais, quand la nuit vient, l'image qui se forme est particulièrement belle.

L’exercice se poursuit ensuite par une mise en voix des textes. Il s’agit de sensibiliser les élèves au rythme de leur lecture et, si les conditions le permettent, à la situation de prise de parole (position du public, effet de lumière, lecture à plusieurs voix…). Il doit y avoir une nécessité pour eux à raconter leur histoire.

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APRÈS LE SPECTACLEANALYSER LA MISE EN SCÈNEIl est important de faire l’articulation entre la narration et les procédés utilisés par la compagnie Haut et Court, tant le travail musical de Nicolas Thévenet que le travail scénographique de Nicolas Boudier. On peut orienter les débats à partir de ces quelques questions.

> L’espace scénique est-il l’image d’un espace de vie précis, copie exacte du réel ? D’un espace imaginaire ? Est-il l’image d’un espace concret décrit dans le texte ?

> La scénographie est-elle fixe ou évolutive ? Quelles sont les matières utilisées pour composer ? Que suggèrent-elles ?

> La lumière indique-t-elle le rapport au temps (saisons, moments du jour...) ? Figure-t-elle abstraitement l’atmosphère ? Apporte-t-elle des informations supplémentaires par rapport au texte ?

> Quel est le rôle de la musique ? Créer, illustrer, caractériser une atmosphère correspondant à la situation dramatique, faire reconnaître une situation par un bruitage, souligner un moment de jeu, ponctuer la mise en scène (pause de jeu, transition, changement de dispositif scénique) ?

> Comment la comédienne occupe-t-elle l’espace ? Est-elle statique ? Quel est son type de déplacement ? L’amplitude et les rythmes de ses mouvements ? Comment raconte-t-elle l’histoire ?

Pour accompagner l’analyse, on montrera aux élèves des images de la scénographie (Annexe 3) afin qu’ils décrivent au mieux le procédé de la phosphorescence qui est directement lié à la question de la narration. Flash, rémanence des images et persistance rétienne : le procédé est symbolique de l’univers littéraire de Volodine et de la manière dont les histoires inscrivent en nous des images fortes.

INVENTER DES HISTOIRESDans une partie du récit de Manuela Draeger non conservée dans l’adaptation de la compagnie, , Bobby Potemkine évoque des enquêtes non résolues : « Aucune solution n'a été trouvée là-dessus. Et j'ai pris des exemples au hasard. La liste des enquêtes qui n'ont rien donné est nettement plus longue. » Les élèves s’inspirent d’un des titres pour écrire leur propre enquête de Bobby Potemkine, en faisant apparaître les personnages récurrents, en inventant de nouveaux…

> L’affaire des parapluies grandioses> L’affaire des gamins magnétiques> Le problème du yack chanteur> L'affaire de la septième bestiolette> L'enquête sur les miroirs sans reflet

> L'affaire des locomotives sauteuses> L'affaire des faux-vrais fromages> L'enquête sur Jean Popocatepetl> L'affaire des poupées fumigènes> L'affaire des mille et une nuisettes

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AVANT / APRÈS LE SPECTACLEDÉCOUVRIR LES ENQUÊTES DE BOBBY POTEMPKINELes enquêtes de Bobby Potempkine, publiées par Volodine sous l’hétéronyme Manuel Draeger à l’Ecole des loisirs, sont passionnantes. Il en existe dix en tout : elles permettent de créer une bibliographie exploitable par une classe dans le cadre d’un projet de lecture à partir des quatrièmes de couverture (Annexe 4).

L’exercice peut donner lieu à un speed-booking. Le "speed-dating", ou "speed-meeting", "rencontres rapides", est une façon d’effectuer des rencontres. Chacun dispose de quelques minutes pour se présenter à quelqu’un, puis passe à une autre personne. Le speed-booking a été inventé sur ce modèle. Au sein d'une classe ou d'une rencontre inter-classes, chaque participant doit présenter à d’autres personnes, dans un temps très limité, un livre qu’il a lu, éveiller la curiosité et l'envie de le lire.

DE L’UNIVERS DE CLAUDE PONTI A CELUI DE VOLODINE / MANUELA DRAEGER

On peut établir un parallèle fécond entre l’esthétique de Volodine et celle de Claude Ponti, que les élèves ont pu croiser dans leur parcours scolaire ou dans leurs lectures personnelles. En convoquant l’auteur d’album jeunesse on rappelle combien la prose de Volodine crée en nous des images comme l’indique Yvanne Chenouf dans son ouvrage Lire Claude Ponti : Encore et encore (2006) :

« Jamais l’activité visuelle ne peut être dissociée : image d’abord, texte ensuite, ou bien l’inverse. En permanence, ils se renvoient l’un à l’autre et, s’ils se correspondent, il leur arrive de se contredire, exigeant l’arbitrage du lecteur. […] Dans les images, si les détails fourmillent, le plus extraordinaire réside dans le télescopage d’éléments venus d’univers différents pour se donner rendez-vous dans des histoires où ils n’ont aucun rôle. »

Dans l’album de Claude Ponti, Schmélele et L’Eugénie des larmes on apprend que les murs et les fenêtres d'une maison peuvent s'en aller, par coquetterie ou par désespoir. C'est également un livre où l'on apprend comment les parents peuvent rétrécir. On y découvre qu'il y a toutes sortes de larmes. Qu'elles peuvent être lourdes, énormes, mouillées, légères, bleues, profondes... Et qu'il peut être utile de pleurer tout aussi bien que de s'arrêter…

Dans Moi, les mammouths, la directrice de la Maison du peuple aurait été littéralement compressée par les mammouths. Dans L’arrestation de la grande Mimille, une autre enquête de Bobby Potempkine, les poissons vivent dans les murs…

Claude Ponti et Volodine ont tous deux cette spécificité de jouer avec les mots, d’en créer de nouveaux qui, par leur singularité, sont des clés ouvrant à l’imaginaire. On peut donc proposer aux élèves un atelier d’écriture avec les mots valises ou des mots composés. Ces mots font écho aux noms d’animaux de Moi, les mammouths (Chauve-Soubise, Crabe laineux) ou aux noms de personnages de Claude Ponti. On pense au personnage de l’album Okilélé : quand il est né, Okilélé n'était pas beau. Ses parents, ses frères, sa sœur dirent : « Oh ! Qu'il est laid ! » L'enfant pensa que c'était son prénom. Afin d’initier le travail, on peut montrer aux élèves la couverture de l’album : Konpozékon-Noubli (Annexe 5).

« Jouer avec les mots est un plaisir sans cesse renouvelé. C'est aussi un moyen puissant d'explorer le langage sous des angles inhabituels et ainsi, de parvenir à faire la distinction entre l'apparence et la vérité du discours. […] Le mot-valise est une sorte de bonzaï littéraire. Chaque définition est un monde en miniature – vision originale de la réalité ou chimère improbable – qui, pour se donner à voir, nécessite la recherche d'un accord entre la forme et le fond, le signifiant et le signifié. » Alain Créhenge

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ANNEXE 1INTERVIEW D’ANTOINE VOLODINE

PAR LAURE ADLER

Les écrivains post-exotiques signent de nombreux noms. Ce ne sont pas forcément des pseudonymes d’ailleurs. Il y a Elli Kronauer, il y a Manuela Draeger, il y a Lutz Bassmann, il y a Antoine Volodine. Moi j’ai qui en face de moi ?

Vous avez un porte-parole de cet ensemble littéraire à plusieurs voix publiées et plusieurs voix qui se trouvent à l’intérieur des livres qui font une sorte de chœur avec alternance de prise de parole et qui, fondamentalement, dans la fiction que j’ai mise en place, sont des voix de prisonniers et de prisonnières qui inventent des mondes, des mondes oniriques, qui ruminent sur leurs souvenirs de vie, sur leurs biographie et qui mettent en scène des personnages imaginaires, se mettent également en scène sous forme d’intervention d’auteur dans les textes qui ne sont pas les interventions d’auteurs individuels mais au contraire les interventions d’une communauté d’écrivains qui surgit à l’intérieur des livres et qui leur donne un caractère polyphonique ou symphonique.

Le « on » : est-ce un « je » ? est-ce un « nous » ? est-ce un « on » ? Par rapport à cette définition de l’écrivain que vous avez dessinée sur la carte littéraire française, que vous avez véritablement inventée, peut-on dire que ce sont des voix qui vous habitent et que votre travail d’écriture consiste à faire entendre au lecteur ces différentes voix qui vous assaillent ?

Je ne suis pas assailli, je ne suis pas visité. C’est moi qui visite les voix et les personnages. Je pense avoir une maîtrise là-dessus, autrement ce serait psychiquement assez dangereux et je serais fragilisé. Mais je donne la parole à des voix différentes qui surgissent de la fiction et pas de mon cerveau malade. Cette fiction se trame à partir de thèmes récurrents : les paysages, les bâtiments en ruines, une période de déclin d’après le communisme, une méditation politique très importante à l’intérieur de tous mes livres et cette polyphonie de voix qui nous attrape nous lecteurs. Cette communauté d’écrivains, qui est une communauté de fiction qui rentre dans le concret à partir du moment où certaines de ces voix sont publiées en tant qu’auteurs – hommes et femmes, ces voix d’écrivains, cette communauté d’écrivains dans la fiction est placée dans une prison. Prisonniers et prisonnières prennent la parole pour dire des livres ou des fragments de livres qui sont ensuite repris et deviennent des romans publiés. Mais ils/elles ont en commun leur passé militant : ce sont des prisonniers et des prisonnières politiques rassemblés dans une prison spéciale, conçue pour eux et elles. En permanence ils/elles inventent des histoires et repensent à leur passé militant, guerrier, marqué leur échec, par la défaite. Comme on n’est pas dans la fiction complètement, ces échecs renvoient aux échecs de l’humanisme, de la révolution au 20ème siècle : ce sont des prisonniers et des prisonnières qui ont échoué dans le projet de changer le réel, la société réelle et d’en faire quelque chose de beau.

On sait peu de chose sur votre vie. Mais quand on revisite votre vie, on se dit que peut-être certains éléments biographiques permettent d’éclairer l’atelier d’écriture. Dans plusieurs de vos ouvrages on note que peut-être, un hétéronyme de vous a cru en l’espoir de révolution à la fin des années 60 / début des années 70, qu’il a été profondément meurtri par l’échec de l’idée même de révolution. On sait aussi de vous que vous avez beaucoup enseigné le russe et que vous avez traduit des livres majeurs de la langue russe. On se dit que tout cela se retrouve dans votre matériau d’écriture.

Cette construction littéraire pleine de traits baroques, très variée, est une construction avec beaucoup d’éléments autobiographiques. Mais ces éléments ont été tout à fait transformés par les rêves, par les rêves de mes personnages, par leur méditation politique. Au départ il y a eu une expérience que je partage avec ces prisonniers et prisonnières qui existe comme noyau de fiction et qui donne les livres qui paraissent. Je partage avec eux cette même déception,

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cette même expérience de la lutte révolutionnaire qui a abouti à l’échec. D’autre part, j’ai des liens avec la Russie qui sont considérables : liens linguistiques, culturels. Cette Russie c’est bien la Russie soviétique, celle que j’ai connue, où j’ai séjourné, où j’ai passé beaucoup de temps et connu beaucoup de gens et d’expériences. La Russie soviétique est très présente sur la méditation sur l’échec parce que non seulement la révolution mondiale qui était en cours dans les années 70, dans ma jeunesse militante, n’a abouti à rien de vraiment concret. D’autre part, cette utopie du socialisme réel qui était loin des espoirs révolutionnaires mais qui était quand même un territoire à part sur la planète s’est écroulée au début des années 90. Lorsque nous avons commencé à écrire, l’URSS existait et aujourd’hui, depuis 25 ans, nous écrivons aussi sur l’écroulement de cette Union Soviétique qui était un territoire à part où il était plus facile d’habiter idéologiquement que dans le monde capitaliste et le monde nord-atlantique pour nous.

D’après l’émission Hors-Champs de Laure Adler sur France Culture le 31/10/2014

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ANNEXE 2BESTIAIRE

Image de la collection : Things I have drawn

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ANNEXE 3ANALYSER LA MISE EN SCÈNE

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ANNEXE 4DÉCOUVRIR LES ENQUÊTES

DE BOBBY POTEMPKINE

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ANNEXE 5DE L'UNIVERS DE CLAUDE PONTY À CELUI

D'ANTOINE VOLODINE / MANUELA DRAEGER

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