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@ Pierre RIVIÈRE Moi pierre Riviere, ayant egorgé ma mére, ma soeur et mon frére,...

Moi, Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, ma sœur et mon frère

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Moi pierre Riviere, ayant egorg ma mre, ma soeur et mon frre,...

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Les classiques des sciences sociales

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Moi pierre Riviere, ayant egorg ma mre, ma soeur et mon frre,

Le mmoire dePierre RIVIRE (1815-1840)Pages 27-28 et 89-184 de:

Moi, Pierre Rivire, ayant gorg ma mre, ma sur et mon frre, Un cas de parricide au XIXe sicle, prsent par Michel Foucault, Editions Gallimard, collection Folio, 2007, 424 pages. Premire dition 1973.

Premire dition du mmoire: librairie Mancel, Caen, 1836.

Police de caractres utilise: Verdana, 12 et 10 points, et pour le mmoire, Comic sans MS, 12 et 9 points. Mise en page sur papier format Lettre (US letter), 8.5x11.Note: la prsentation de 1973 reprend le mmoire dans la forme mme du manuscrit, et prcise que celui-ci ne porte aucune majuscule, mais aussi quil y a un certain flottement sur ce point (ce que parat confirmer la photo du manuscrit au bas de cette page); il a sembl aux Classiques que ce flottement tait mieux traduit, mme si la tche du lecteur est plus ardue, par labsence quasi-totale (sauf pour les noms de famille) des majuscules, et quil sharmonisait mieux ainsi avec les autres flottements, orthographique et grammatical.dition complte le 18 novembre 2007 Chicoutimi, Qubec. Procs-verbal du juge de paixLe mmoire: Dtail et explication de lvnement arriv le 3 juin Aunay, village de la Fauctrie crite par lauteur de cette action.Procs-verbal du juge de paixAujourdhui, 3 juin 1835, une heure aprs midi.

Nous, Franois-Edouard Baudouin, juge de paix du canton dAunay, assist de Louis-Landre Langliney, notre greffier.

A linstant, inform par M. le maire de la commune dAunay, quun meurtre pouvantable vient dtre commis en ladite commune dAunay, village dit la Faucterie, au domicile du sieur Pierre-Margrin Rivire, propritaire cultivateur, absent de chez lui, nous dit-on, depuis le matin; nous nous sommes immdiatement transports audit domicile, accompagns de M. le maire dAunay, et encore de MM. Morin, docteur en mdecine, et Cordier, officier de sant, lun et lautre domicilis Aunay, venus sur notre rquisition conformment la loi. Entrs dans une maison au rez-de-chausse, usage de salle, jouxte au nord par le chemin vicinal dAunay Saint-Agnan, claire au midi par une croise et une porte, et au nord par une porte vitre, nous y avons trouv trois cadavres gisant par terre: 1 une femme denviron quarante ans renverse sur le dos en face la chemine o il parat quelle tait occupe, au moment o elle a t assassine, faire cuire de la bouillie qui tait encore dans une casserole sur le foyer. Cette femme est vtue comme son ordinaire, dcoiffe; elle a le cou et le derrire du crne coups et coutelasss. 2 Un petit garon de sept huit ans, vtu dune blouse bleue, pantalon, bas, et souliers, tomb sur le ventre le visage contre terre, ayant la tte fendue par-derrire une trs grande profondeur. 3 Une fille vtue dindienne, bas, sans souliers ni sabots, tombe sur le dos, les pieds sur le seuil de la porte donnant sur la cour, vers midi, son mtier dentelle pos sur son ventre, son bonnet de coton ses pieds, et une forte poigne de cheveux qui paraissent lui avoir t arrachs lors du meurtre; le ct droit de la figure et le cou coutelasss une trs grande profondeur. Il paratrait que cette malheureuse jeune personne travaillait sa dentelle, prs la porte vitre oppose celle o elle est tombe, ses sabots tant rests au pied de la chaise qui y est place.

Ce triple assassinat parat avoir t commis avec un instrument tranchant.Ces victimes se nomment: la premire, Victoire Brion, pouse de Pierre-Margrin Rivire; la seconde, Jules Rivire; la troisime, Victoire Rivire; les deux dernires, enfants de la premire.La vindicte publique dsignant comme auteur de ce crime le nomm Pierre Rivire, fils et frre des assassins, nous avons inform le brigadier de la gendarmerie, en rsidence au Mesnil Ozouf, de cet vnement, aprs nous tre assur que le prvenu stait vad immdiatement aprs le crime qui lui est imput, requrant de ce fonctionnaire den faire immdiatement la recherche et larrestation, sil est possible.

. . . / . . .Dtail et explication de lvnement

arriv le 3 juin aunay, village de la fauctrie

crite par lauteur de cette action.Moi pierre Riviere, ayant egorg ma mre, ma soeur et mon frre, et voulant faire connatre quel sont les motifs qui mont port cette action, jai ecrit toute la vie que mon pre et ma mre ont mene ensemble pendant leur mariage. jai t tmoin de la plus grande partie des faits, et qui sont crits sur la fin de cette histoire, pour ce qui est du commencement, jai lait entendu raconter mon pre lorsques quil en parlait avec ses amis, ainsi quavec sa mre, avec moi et avec ceux qui en avaient connaissance. aprs cela je dirai comment je me suis rsolu a commettre ce crime, ce que pensais alors et quelle tait mon intention, je dirai aussi quelle tait la vie que je menais parmi le monde, je dirai ce qui se passa dans mon esprit aprs avoir fait cette action, la vie que je mne et les endroits par ou je t depuis ce crime jusques mon arrestation et quelles furent les resolutions que je pris. tout cette ouvrage sera stil trs grossirement, car je ne sais que lire et crire; mais pourvu quon entende ce que je veux dire, ce cest que je demande, et jai toute rdig du mieux que je puis.Rsum des peines et des afflictions

que mon pere a souffertes de la part de ma mre

depuis 1813 jusqu 1835Mon pre etait le second des trois garons jean Rivire et de marianne Cordel, il fut lev dans lhonntet et dans la religion, il se montra toujours doux et pacifique et affable parmi le monde, aussi il tait estim de tous ceux qui le connaissaient, il fut de la conscription en 1813. dans ce temps comme on le sait tous les garons partaient, aprs que le contingent avait t rempli une fois, quelque temps aprs on revenait sur les numros et on prenait le reste, mais ceux qui staient maris avant ce second appel taient exempts par l; mon oncle frere ain de mon pre tait au service, et on craignait que mon pere malgr son haut numro ne fut encore oblig de partir, il fut donc rsolu quil se marierait. un fonctionnaire public avec qui il tait ami promis quil lavertirai aussitot que son contingent serai rempli, quen attendant il fit toujours une bonne amie. par la connaissance de franois le comte de Courvaudon, mon pre fut demander victoire Brion, les ages et les fortunes sadonnaient a peu prs, elle lui fut promise et mon pre la frequenta pendant six mois, alors on laverti quil tait temps quil se mariat, les parens de ma mere nen furent plus alors davis, leurs garcons taient morts au service et ils craignaient dtre encore embarrasss pour leur gendre. mon pre alors leur representa que sils avaient a se dedire ils auraient d le faire auparavant, car maintenant il allaient le laisser embarass, ma mre applaudissait ce que disait mon pre et elle pleurait voyant que ses parens elle sopposaient leur union, mon pre la voyant pleurer se pensait: elle maime puisque quelle pleure, enfin ses parens se dcidrent et on alla passer le contrat de mariage par devant monsieur le bailly notaire aunay. les clauses de ce contrat furent quil existerait communaut entre les poux de biens mobiliers daquet et conquets immobiliers, quen cas de morts de lun des epoux avant lautre sans enfans alors existans, le survivant jouirrait pendant sa vie de la totalit de biens propres de son conjoint, et que sil y avait des enfans, il jouirrait seulement de ces biens et les enfans de lautre moiti. que le pre et la mere de la future epouse lui constitue et quelle se constitue en dot tous les biens immobiliers quelle pourra recueillir de la succession de ses pere et mre. ces biens lors de leur recouvrement seront regis et administrs par le mari conformment la loi titre du regime dotal. linalienabilit de ces biens telle quelle est explique dans le code civil, est aussi mentionne dans ce contrat. il portait en outre que lapport prsent du mari en communaut etait evalu a 100 frans et celui de la femme se consistant en linges et hardes de plusieurs espces, une armoire fermant a deux volets, un lit, des draps et plusieurs autres chose mentionne. le tout estim la somme de quatre cents francs. que le jour du mariage lui vaudra daquit de cet apport en communaut. que la dite epouse autoris comme dit est se reserve le droit de renoncer a la communaut dans quelle temps et de quelle manire que la dissolution dicelle arrive alors elle remporterai en exemtion de toutes dettes et charges son apport ci dessus mentionn et en outre tout ce qui lui serai echu de succession dont elle justifirait tat. que cette dissolution de la communaut arrivant du vivant des epoux, que le survivant ne serait nullement priv des droits qui sont mentionns plus haut de jouir sa vie durant des biens personnels de son conjoint. telles furent les clauses du contrat. quelques jours aprs ils se marirent au civil. ensuite lglise. lors de ces derniers actes ma mere nen tait davis comme auparavant, ils ne tinrent pas de noces, et le jour de leur mariage ils ne couchrent pas ensemble, parce que la rforme netant pas encore passe, ma mre disait: il n qua me faire un enfant et puis partir que dviendraije. comme ceci pouvait tre raisonnable, mon pre ne forct pas a y coucher. quelque jours aprs eut lieu la rforme, mon pre portat son acte de mariage, et par un retard qui survint il resta trois jours a caen de plus quil ne croyait. pendant ce temps ma mere ne vint pas voir a aunay ce qui en tait. mon pere en revenant de caen passa par courvaudon et ce fut la prmiere fois quil coucha avec elle. jexpliquerai ici comment tait compose ma famille, celle de mon pre et de ma mre. dans la maison de mon pre a aunay il y avait mon grand-pre et ma grand-mre une tante de mon pre, mon oncle plus jeune que mon pre de dix ans en tout cinq personnes. a courvaudon il y avait mes ayeux maternels et ma mre en tout trois. mon grand-pre paternel possdait a peuprs 6 acres de terre et mon pre et mon oncle entre autres ouvrages et commerces quils faisaient, soccupaient faire valoir cette terre. ils avaient un cheval et sosonnaient avec un homme qui en avait un aussi. pour mon grand-pre maternel il possedait a peuprs trois acres de terre quil faisait valoir en prenant des laboureurs a journe. le village du bouillon ou il demeurait est eloign dune lieue de celui de la fauctrie ou demeurait mon pre. aprs le mariage ma mere restat avec ses parens courvaudon, et mon pre allait y allait faire le labourage quil y avait faire. dans les premiers temps de son union avec ma mere il allait souvent lui rendre visite, mais il ntait recu delle quavec une froideur qui le dconcertait, son beau-pere et sa belle-mere lui faisaient bien meilleure mine. par cette froideur que ma mere lui temoignait il nallait plus la voir si souvent, sa mre setonnait quil neut pas cette ardeur des nouveaux maris. mais lui disait-elle ne vas-tu pas aller aller au bouillion ce soir ah dit-il ou voulez-vous que jaille? dans le contrat de mariage il tait dit que ma mere avait un bon mobilier. mais ce nest quune coutume quon a de mettre cela dans les contrats elle nen avait pas, et comme elle avait besoin dun lit et quon faisait une vendue un village peu loign elle dit a mon pre desirait avoir le lit, il lui demanda elle naimerai pas mieux du neuf, mais elle dit que non et elle le disputait fort quil allait arriver trop tard, mon pre alors pensa quil allait lacheter quelque prix que ce fut, et il lacheta peuprs sa valeur, mais pendant la vendue dautres femmes dirent a ma mere quils ne voudraient pas de la peuvre, et elle dit mon pre quelle nen voulait pas que ctait trop cher; il lui repondit: mais cela est achet il faut quon sen serve, elle dit quen nen voulait pas, mon pre dit: pas de bruit pour cela et il prit le lit et fut oblig de le revendre. dans le commencement de 1815 ma mre acoucha de moi, elle fut bien malade de cette couche. mon pre prit tous les soins quil fallait prendre envers elle, il ne couchat pas pendant six semaines, il dit que lors quil se couchat par la suite il ne pouvait dormir, quil etait accoutum a veiller, dans cette maladie de ma mere, les manmelles lui pourrirent et mon pre les lui sucait pour en extraire le venin, ensuite il le vomissait a terre. ma mere dans sa maladie montrait du mpris et de la duret surtout regard de sa mre, elle ne la trouvait pas capable de lui faire aucune choses; ctait ma grand-mre paternel quelle trouvait alors capable de la soigner. comme elle lui demandait pourquoi elle ne voulait pas que ce ft sa mre, elle repondait: et puisque quelle est si bte. le mal que souffrait ma mre alors eut pu lexcuser si sa conduite neut pas toujours continu dpuis. dans cette maladie elle avait le dvoument, elle ne voulait pas quon mt de son linge sous elle, elle voulait que ce fut celui de sa mre. au bout de six mois elle fut gurie, mon pre comme je lai dis faisait le labourage quil y avait faire courvaudon, et pendant tout son mariage lexception du peu de temps quelle vint demeurer avec lui dont je vais bientt parler, il na couch avec ma mre que lorsques quil allait faire ce labour ou quelque autre ouvrages comme dapprter du grain, couper du bois, planter des arbres, faire du cidre, etc. lanne suivante ma mre se trouvant de nouveau enceinte, ses parens rsolurent de lenvoyer avec son mari, et elle lavertit quelle avait dessein dhabiter avec lui, mon pre en fut bien aise, et on fit arranger un cabinet pour y mettre son mnage. mon pere acheta une armoire et on apporta tous les meubles que ma mre avait courvaudon, elle devait resider avec les parents de mon pre, et vivre tous ensemble. cela alla bien pendant deux ou trois mois jusqu sa couche et elle accoucha dune fille nomme victoire, sa maladie fut de nouveau grave et elle dura trois mois, elle fut soigne comme le doit tre tout malade, mon pre et ma grand-mere ptl passaient leurs nuits, et on lui donnait ce que le mdecin ordonnait, ctait chez la veuve michel-guernier boulanger a aunay quon prenait le pain. malgr tous les soins que mon pre et ma grand-mre prenaient pour elle, elle lest accablait dinjure et de paroles mortifiantes, ma grand-mre paternel ntait plus alors capable de lui rien faire, sa mre venait la voir de courvandon et elle la trouvait seule capable de la soigner, elle se faisait donner des plats de porc cuit au four, et plusieurs autres choses indigestives, et comme mon pre et ma grand-mere paternel si opposaient elle disait quils y avaient regret que ctait lavarice, quils faisaient prir. ma g-m-m. venait la voir elle disait quil fallait lui en donner, elle lui en faisait cuire, et enfin pour la satisfaire on lui donnait ce quelle demandait et aprs quelle avait pris toutes ces choses, elle etait prises de nouvelles convulsions on peut dire que ceci retarda beaucoup sa gurison. lorsquelle commenca se retablir, ma g-m-m. en venant la voir disait quelle voudrait bien quelle retournat chez elle que mon g-p-m. avait bien envie de la voir quil fallait la rapporter dans une charette. ma mere dit aussi quelle voulait sen retourner et quelle ne demeurerait plus aunay. mon pre eut beau lui faire des reprsentations quil serait honteux pour lui, quelle sen retournt, elle dit quelle le voulait absolument et que sil ne lui raportait ses meubles, elle les enverrait chercher. elle retourna donc avec ses parents, et mon pre lui reporta ses meubles il en porta une partie la nuit car le monde sen moquait. or a cette poque ma mre manifesta une grande aversion pour mon pere, elle debita dans courvaudon quelle ntait revenue que parce quon la faisait prir quelle manquait de tout, et que pendant sa maladie on avait fait moudre deux barts de mouture sans bulleter afin que cela durat plus longtemps. lorsques que mon pere y retournait travaillier elle lui tmoignait toute son aversion; lui tachait de la gagner, il lui disait: puisque que tu nas pas voulu rester avec moi veux-tu que je vienne ici avec tes parens pour y demeurer? que feraient-ils de toi, lui rpondit-elle, il lui demanda ce quelle voulait quil fit, elle voulait quil se louat pour tre domestique et que tous les ans il vint lui apporter largent de ses gages pour en disposer comme elle voudrait, mon pre dit quayant de loccupation chez lui il ne se louerait pas domestique et puis voyant comme elle le traitait, il resolut de ne plus retourner la voir, plusieurs personnes entrautres ma g-m-p, feu Nicolle de saint agnan avec lequel il sosonnait, lui conseillirent dy retourner, et alors il dit a son frre et a Nicolle daller sans en parler a personnes labourer le champs quil y avait labourer courvaudon et puis de sen revenir, mais ils y furent vus et mag-m-m. vint leur apporter manger, quelque-temps aprs mon pre y fut couper du treffe, ma mre vint lui apporter de la soupe, et alors il lui dit: veux-tu membrasser? ce nest pas bien la peine, lui repondit-elle, et bien, lui dit mon pre, mange ta soupe car je nen veux pas, et il faucha tout le trffle sans manger et sans revint aunay. dans ce temps-l je ne sais quelle circonstance y avait donn lieu, je demeurais avec mon pre aunay. javais trois ou quatre ans, ma mre accompagne de sa mre vint me chercher, elle me trouva dans le prai ou lon fanait, ma g-m-p. me tenait sur le bras alors sans dire une parole personne elle me prit et memporta. comme je criais mon pre courut aprs elle, et dit quil ne voulait pas quelle memportt criant, quil me porterai le lendemai sur le cheval courvaudon, ce que voyant ma mre elle dit a sa mre qui tait avec elle: touchez dessus, touchez dessus, ma g-m-m. etait un peu maligne, mais elle ne doit pas etre mise en comparaison avec ma mre, elle avait un bon coeur et recevait toujours mon pre avec amiti, elle se donna bien de garde de faire ce que ma mre lui disait alors, ma mre voyant donc que mon pre ne voulait pas quelle memmenat ce jour, se mit a crier dans les rues: je reveux mon enfant, je reveux mon enfant, et elle alla de ce pas trouver le juge de paix de villers pour lui demander si mon pre avait le droit de lui retenir son enfant. mon pere suivant sa promesse alla me porter le lendemain a courvaudon et dconcert de toutes ces choses il ny retournait plus, on le conseillia dy retourner, il obeit encore et continuat dy aller travailler, ma mre lui faisait toutes les vilainets possibles entrautres de lui retirer loreillier et couete du ct ou il se couchait. dans ce temps l, mon pre et mon oncle acheterent en leurs nom pour mille cus de terre et de maisons, qui sadonnaient dans leur bien. ils empruntrent la moiti de cette argent et mon pre en fait encore la rente, pour lautre moiti, ils en avaient une partie et ils esperaient gagner le reste, et mon pre malgr la maladie et la mort de oncle en 1825 tait presque acquit quand un procs survint pour les biens de ma mere dont je parlerai, quoique ceci paraisse tranger la cause de cette histoire jen ai cependant fait mention, car ma mere a debit plusieurs fois que mon pre tait un mangeards et quils faisait perir ses enfans. il se passa des intervalles ou ma mre ne tmoigna pas tant daversion envers mon pre, sans pourtant lui faire beaucoup damiti, rien que des paroles mortifiantes mon pre et mon oncle lorsquils allaient faire le labourage ou bien leur porter du bois, car les parens de ma mre nen recoltaient pas assez, et mon pre qui en recoltait plus queux leurs en portait lorsquils en avaient besoin. mon oncle etait plus vif que mon pre, il ne pouvait supporter toutes les paroles que ma mre lui disait; quand, dit-il, je lui entends dire toutes ces raisons elle me met a bout, si elle continue je finirai par lui foutre ma main par la goule. mon pre craignant quil ne fit, lui dit de ny pas retourner, ainsi ce fut le plus souvent mon pre qui depuis alla faire le labourage. ma mre en 1820 accoucha dune fille nomme aime et 1822 dun garon nomm prosper. je dirai ici la vie que ma mre menait avec ses parens, tous les jours elle disputait avec sa mre, elle ne lui disait pas une parole que cela ne fut pour la mortifier, sentrereprochaient continuellement cinquantes milles choses, tmoin tous ceux qui les ont entendu parler ensemble, mon pere avait beau faire de remontrances ma mre quil fallait mieux respecter la sienne ctait en vain, elle sen moquait, je demeurai courvaudon pendant mes six premires annes jtais tmoin de toutes ces disputes je puis que je navais pas grand attachement pour ma mre, jaimais bien plus mon grand-pere et ma g-m, surtout mon g-p; il me contait plusieurs choses jallais avec lui, et il est reconnu que cetait un brave homme, il faisait la profession de charpentier, mais dans le temps dont je parle, il nallait plus journe, il tait demeur de jambes, il travaillait encore dans sa boutique, et la il tait tranquille, elle tait assez loigne pour ne pas entendre que faiblement le claquet qui regnait dans la maison. ma soeur victoire avait t habiter quelque temps avec mon pre aunay, elle avait peu-prs trois ou quatre ans, et ma g-m-p. qui avait eu autrefois une fille quelle avait perdue dans son age, semblait voir dans masoeur la resurection de cette enfant, ma mre alla la rechercher, mon pre lui fit la representation que je viens de dire, mais il aurait mieux fait de dire quelle lui tait charge. moi jallai habiter avec mon pre lage de dix ans et depuis jai toujours rest avec lui. ma mre en 1824 accoucha dun garcon nomm jean, il fut convenu que ce serait ma g-m-p. et moi qui le nommeraient, mon pre tait absent lors de la couche, ma g-m-p. fut courvaudon, et aprs avoir vu ma mre qui tait accouche, elle examina lenfant, il tait envelopp de quelques mauvais haillons, ma g-m-p dit alors: ah on ne lui mettra je crois bien ses autres habits que demain. ah, dit ma mre, il ny a pas dautre chose, bienheureux davoir cela. ma g-m-p. compris alors quelle avait fait cela sachant que ce serait elle qui le nommerai, pntre de douleur elle revint aunay et dit ces choses mon oncle qui tait alors malade; ah dit-il, en sera-t-il encore de lespce, apportez-le ici ce pauvre ptit, il naura pas de mauvais exemples. ma g-m alla au boug et recommanda un bonnet et ce quil fallait pour habiller cet enfant, la couturire passa sa nuit pour le faire, et le lendemain on le baptisat, mon pre qui tait revenu demanda a ma mre, si on allait enporter quelquuns des enfans et qui la genaient, mais elle dit quelle voulait quon enportat que celui qui venait detre fait; eh bien, dit mon pere, on va lenporter et du partir de leglise, car elle est sur le chemin daunay; lorsques que ma mre vit quon allait partir, elle dit a mon pre: oh je vois bien que tu as envie de me faire crever, et ne voulut plus quon lenportt. dans ce temps l mon g-p-m. fut tout fait infirme, il avait encore quelque argent quil voulut donner mon pre aimant mieux le lui confier qua sa femme et sa fille, mon pre lui quil tait plus convenable quil le confiat a sa femme ma g-m-m. ce qui fut fait. cet homme mourut en 1826. dans ce temps, mon pre voulait avoir de ses enfans avec lui; ma soeur aime avait montr le dsir dy venir, dailleurs ma mre demandait du grain pour les nourrir, et elle envoya le meunier pour en chercher un sac, mon pre dit quil avait du pain chez lui pour ses enfans, quils pouvaient en venir manger, et il ne donna pas de grain ce que voyant ma mre, et sachant quil tait ami avec mrs les vicaires daunay, elle shabilla comme une mendiante et vint aunay, elle entra chez mon pre, elle lui reprocha quil tait un mangeard et un lubrique quil entretenait des putains: tu fais le devot, lui dit-elle, mais tu ne dit pas tout ton conffesseur, je vais aller le trouver et lui apprendre ta vie; puis sadressant a ma g-m-p, elle lui dit: que vous avez eu tort de llever dans un telle vice, fi que cela est vilain et indigne. entendant de telles paroles, ma g-m repondit: oh que dites-vous l passez dehors, jy vais passer aussi, dit ma mre, mon pre navait montr toutes ces reproches que son humeur ordinaire, toujours doux, et cherchant a se justifier en exposant la vrit, ma mre fut de ce pas trouver feu mr grellay qui tait alors vicaire aunay. elle lui dit que son mari la faisait prir, quelle manquait de tout, quil avait dautres femmes quelle, enfin tout ce quelle put imaginer pour le diffamer; cela mtonne disait mr le vicaire, je prenais Rivire pour un bon garon. a la fin il lui dit, ecoutez si vous etiez avec lui vous auriez comme lui. dans la journe il vit mon pere, et lui parla de cette affaire, mon pere se justifia du mieux quil put et mr le vaire ne mit pas grand foi ce que mre lui avait dit. a cette epoque il se trouva une maison vendre ct de ceux de ma mre courvaudon, elle en avait envie, mais mon pere qui voyait quils avaient deja plus de maisons quils ne leurs fallait, et qui craignait le resultat dun procs quon venait dintenter sur les biens de ma mre, sopposait lachat de cette maison, mais ma g-m-m. lacheta en son nom et ils y employerent largent quils avaient. le procs quon venait dintenter, etait pour une pice de terre que mon g-p-m. avait achete dun homme, dont la femme avait par son contrat de mariage, une dot de douze cents francs remporter dessus, et cette hypothque navait pas t leve, il devint plus serieux quon ne lavait cru du commencement, mon pre et ma mre allerent consulter plusieurs personnes qui connaissaient la loi, et on les avertit quils tomberaient toujours au dessous du procs, il etait pourtant reconnu que ctait une volerie.Cette femme navait jamais rien apport son mari, et comme ma mre voulait plaider, des avocats quils consulterent caen, dirent quen prouvant que cette femme neut rien apport quelle ne pourrait rien reclamer, ainsi il y eut donc procs, mais il fut bientot perdu, mon pere comme je lai deja dit avait des amis, tous lui offrirent de largent pour sarranger et ne pas laisser vendre cette terre, et il sarranga, il lui en couta en frais et en tout 850 francs. ma mre avait une rente dont lamortissement fournit peu prs 200 frs mon pre payat le reste, il fut oblig de tout emprunter: et il la du pendant deux ans. ma g-m-p. avait une rente de 90 francs que ses frres lui faisaient pour son mariage; ils en amortirent un tiers, ce qui fit peu prs la somme que mon pere devait, ainsi a t la rente de ma g-m-p. qui a servi a aqquiter les biens de ma mre, pendant tout ce procs ma mre faisait trs bonne mine mon pre, et de ce temps jusquaux deux dernires annes il ny eut pas grand chose entreux; lanne dapprs ce procs en 1828 ma mre accoucha dun garcon nomm jule, ma soeur aime, et mon frre prosper, taient venus demeurer avec mon pre, lanne suivante mon frere jean y vint aussi demeurer; ma soeur victoire et mon frre jule ont toujours rest avec ma mre. a cette epoque jallais avec mon pre faire le labourage, et je voyais que les disputes entre ma g-m. et ma mre continuaient toujours, mais ma mre prit le dessus de ma g-m. qui saffblissait, cette pauvre bonne femme fut tout-afait malheureuse, non-seulement elle souffrait les querelles continuelles; mais plusieurs personnes rapporte avoir vu ma mere la battre et la trainer par les cheveux. mon pre na jamais battu ma mre lexception de quelques soufflets quil lui donna dans les grandes niarges quelle lui faisait, et dont je parlerai; mais il dit que sil stait trouv dans ces rencontres il naurait pu sempcher de la frapper; ma mre en outre commanda a ma soeur victoire de ne pas obir du tout ma g-m de sorte quils etaient daccord et la perscutaient toutes deux, elle dit plusieurs fois mon pre quelle souhaitait de faire des lots et se retirer dans une des autres maisons ct, mais mon pre lui disait: est-ce que je veux faire des lots avec vous, nest-ce pas tout pour vous, elle avait plusieurs fois reproch ma mre dans les disputes, quelle manquait de fidlit son mari et lui avait reproch plusieurs chalans, jamais mon pere ny a ajout foi, il disait que les maux quelle endurait lui faisaient imaginer et dire ces choses, il prenait tous les soins possibles pour tacher davoir la paix et la tranquillit avec ma mre, il lui achetait des vaches, et les vendait lorsquil le fallait, et ils se rendaient compte liad pour liad, ma mre avait dans son jardin une chouppe dosier, elle en vendait si mon pre en avait besoin de quelques bottes, il les payait sur les prix quelle lui dmandait, il lui prit un jour un quarteron de gleuf; il fallut quil prit un dtour et quil dit quune personne lui avait demand du gleuf, et quil lachetai pour tel prix, et ma mre dit quelle le donnai... alors il la payat et prit le gleuf; car sil leut pris sans cette prcaution, elle aurait toujours dit quil ne laurai pas pay sa valeur, tous les marchs quil faisait pour elle, elle nen trouvai pas un de bien fait; quand il achetait ctait toujours trop cher, quand il vendait ctait toujours trop bon march, pour une vertile de rien elle se courroucait, un jour un de ses voisins ayant plant de piquets peut-tre un pouce ou deux sur son terrain, elle en parla mon pre, il eut le malheur de dire que cela ny portait pas grand prjudice, elle se mit lui-dire mille injures et entra tellement en furie quelle en avait la bros la bouche. jarrive aux deux dernires annes du mariage au commencement de 1833; ma g-m-m. tait alors retenue au lit de la maladie dont elle est morte, ma mre fit faire un habit ma soeur victoire, et comme elle passait tous les samedis la fauctrie en venant vendre son beurre aunay, en passant elle dit quil faudrait aussi faire un habit a ma soeur aime; vu que ma soeur avait assez dhabits, et que mon pre navait dargent a perdre, il rpondit quil ny en avait pas besoin pour le moment. le samedi suivant ma mre parlant ma g-m-p. dit si on ntait point dcid de faire un habit, on repondit que non. ah cest cela, dit-elle on ne craint pas tant de depenser pour dautres; et sen alla en disant cela, ma g-m-p. comprit quelle accusait de nouveau mon pre de debauches et dadultre; ceci fut vrifi le samedi suivant, ma mre en passant vint trouver mon pre la grange ou il battait avec moi, mon pre venait de faire faire une chartrie dont il avait fait peindre la porte en arrivant, ah, dit-elle, tu prends bien plus de peine pour ta chartrie, que pour ta maison est-tu dcid de me donner de largent pour payer bringon mon pre dit, mais ce nest pas la coutume que je te fournisse dargent, donne-moi, dit ma mre, ce que tu me dois le reste du prix de notre veau, mon pre dit tu sais que nous avons cont et que cela revenait a quelque chose prs. en effet mon pre lui avait acht une vache, et ils staient rendus compte trente ou quarante sous prs, en outre mon pre avait acht pour elle une vache qui stant trouve malade il lavait garde chez lui, il lavait perdue et il ne lui contait pas cela. ma mre lui dit: ah oui tu as envie de me voler, quand tu as largent entre les mains tu le garde, vieux fripon, vieux lubrique, vieux macroc tu aimes bien mieux soutenir ta mnagire, tu fais perir mes enfants pour soutenir les siens tu lui sme tu lui laboure tout son cas; mais dit mon pre il faut bien que je gagne ma vie. ma mre lui dit, tu fais tout pour le ciel, elle a de lagrement cella elle a le cul sacr, sulpice me le disait bien, tu devrais mourir la honte, va tu as eu mes enfans, mais tu auras la menagiere aussi car je veux venir les soigner, je nentends pas que tu les fasse prir; je veux empcher tes debauches, et elle sen alla. mon pre la larme aux yeux me dit alors que je me repends davoir donn tant dargent pour le champ-poulain, cetait le nom de la pice de terre quil avait rachete a ma mre. malgr tout ce quelle venait de dire, elle ne laissa pas en revenant du boug de venir trouver mon pre pour lui dire daller tuer son cochon car mon pre savait tuer et saler les cochons, et il y fut pendant la semaine, arriv il demanda ou il allait mettre son cheval, ma mre dit quil ny avait pas de place, elle en eu bien trouv si elle voulut, mais elle disait quil etait tout aussi bien dehors, mon pre le logea chez un des voisins, et ensuite il apprta le cochon, ctait la coutume quil en apportait un morceau pour en faire gouter, de cette fois il nen prit pas. ma mre lui demanda pourquoi; si jen prenais, dit-il ce serait pour donner a celle qui a le cul sacr en passant, et sur cela mre soutint toujours son opinion, et mon pre partit aussitt. ma mre nallait pas souvent a confesse, il y avait quelques annes quelle navait fait de pques, cependant comme mon pre etait ami avec mr le cur de courvaudon elle fut a conffesse, et en outre elle lui parla de mon pere, laccusant de ce que je dis quelle lui avait rproch, quelle voulait venir soigner ses enfans quon faisait prir. quelques jours aprs mon vit mr le cur qui lui quil avait vu sa femme et quelle dsirait venir avec lui. mon pre lui dit ne vous -t-elle pas encore dit autres chose? ah quand cela, dit le cur, on vous connait bien, mais elle veut tre avec ses enfants, mon pere dit, je la veux bien aussi, mais maintenant la position est bien critique. voila sa mre qui est bien malade et qui peut-tre en mourra, il faudrait attendre quelle fut gurie, ou bien si veut absolument venir, mettre une personne la soigner, le cur trouva que cela etait juste, et la maladie de ma g-m-m. allant en empirant elle mourut quinze jours aprs, mon pre payat ce quil fallut pour lenterrement, et quelque jours aprs il dit ma mre, tu voulais venir avec moi, maintenant il ny a plus rien qui te retient, tu peux y venir; cependant comme il la connaissait, il lui fit cette proposition, si tu veux rester ici, lui dit-il, je continuerai vnir faire le labourage, et je te ferai comme auparavant, non dit-elle je veux empcher tes aumnes, mon pre lui dit, tu est donc toujours de la mme opinion est-ce pour me faire de la peine que tu dis cela ou bien si tu le crois reelment, mais ma mre le soutint toujours et lui dit qutant venu il y a quelque temps pour faire du cidre, il avait t cause, quelle avait t oblige de payer une journe de pressoir de plus quil naurait fallut, quelle savait que le matin avant de venir, il avait t conduire sa putainelle en parla aussi devant ma soeur aime, ma soeur eut beau la prier tout en larmes, quelle cesst davoir de telles persuasions, que par rapport ce quelle disait que mon pre avait t conduire cette femme, que cela ntait pas vrai, que ctait un autre homme du village qui avait t la conduire, Nativel, ma mre repondit, si Nativel a t la conduire il ne le faisait pas pour rien, il le payait, va pauvre petite sotte il ten passe bien, que tu ne ten aperois pas. mon pre dit ma mre que puisquelle voulait venir avec lui, quil faudrait quon louat la terre, ce ntait pas son intention elle dit quon y laisserai les deux filles; quils soccuperaient a amenager et a y nourrir des bestiaux; de sorte que ma mre pensait quelle irait et viendrait et quelle ramasserai largent de tout; elle ne se contentai pas de jouir de la matrise de son bien tout apprt et travaill, mais elle voulait encore rgir celui de mon pre, et quil neut ladministration de rien, pas mme de boire sans sa permission, une quarte le dimanche avec ses amis, mon pre lui dit que les filles ne seraient pas en leurs honneur de rester ainsi seules dans une maison, quelle choisit ou de rester comme auparavant, ou quon louerait la terre, il lui demanda si elle aimait mieux quon la lout en gros ou en dtail, elle dit quelle aimait mieux que ce ft a un seul fermier. comme mon pre avait assez de meubles aunay, il lui dit quon pourrait vendre ceux qui taient a courvaudon, elle dit quelle ne voulait pas quon vendt ses meubles, eh bien, dit mon pre, on ne les vendra pas. quelques jours aprs jallai y casser du bois a midi elle le mprisa moi disant: oh il avait envie de vendre nos meubles, ctait sa mre qui sans doute lui avait conseill cela, pour faire une poigne dargent, vraiment on nen rirait. je lui dit, il les venderait sil voulait pourtant, ah oui, dit-elle, sil pouvait, si tu avais affaire a daucuns, lui dis-je, ils te meneraient dune autre maniere que cela, mais il te fait une autre proposition, reste tranquille comme tu tais, ah oui dit-elle, et puis quand il aura vendu quelque chose il en gardera largent, je ne resterai pas la. ma soeur victoire avait lair de bien se moquer des raisons que je disais, mon pre publia quil avait envie de louer la terre, et alors pierre le comte son cousin vint le lui demander, cet homme avait de la terre au bouillon mais point de maisons, il voulait stablir et voyait que cela larrangeait, ma mre en fut bien consentante, le prix en fut fait devant elle, et elle rut le vin, cet homme loua toute la terre labourable ainsi que le prai, avec le corps de batiment dans lequel demeurait ma mre, deux salles, une grange, et une table, tout de fond en comble, et pour 250 francs par an avec 50 francs de vin quil donna, le bail fut fait pour neuf ans, il portait que le fermier engraisserait la terre suivant lusage du pays, quil entretiendrait les maisons, quil aurait les arbres fruitiers qui pourraient tomber en ant mettant de bons la place, quil aurait tant de paille en entrant, et quil les laisserai de mme, quil aurait une coupe de bois deux ans avant la fin du bail. il restait encore deux corps de maisons a louer et dont on pouvait faire 60 francs. ds le bout de quinze jours ma mre ne trouva plus cela bien, elle dit que ctait trop bon march, et toutes fois que mon pere allait courvaudon, car ma mre devait y rester jusqua la saint-michel, ou le fermier entrait en jouissance, elle lui disait quil fallait casser le march, que sa fille pleurait continuellement et quelle ne voudrait pas quitter, mon pere demanda a ma soeur si ctait vrai, elle dit que non. voyant que ma mre persistait toujours vouloir casser le march, mon pere parla au fermier, et ils allerent tous les deux trouver ma mre, et lui porterent leurs bails, alors mon pre lui dit, tu peux casser le march si tu veux, voila les deux crits, mais fais attention que je ne reviendrait plus ici, tu tarrangeras comme tu voudras, ma mre ne voulut pas casser les marchs elle ne dit ni oui ni non, et mon pre sen retourna avec le fermier remportant leurs bails; mais ma mre persista toujours dire quelle ne sortirai jamais de chez elle, un jour que jy tais et que je parlais avec ma soeur, entrautres choses je lui dit quelle ne serait pas l un an dici, pourquoi ny serai-je pas dit-elle, nous verrons si pierre le comte nous mettra dehors de chez nous; mais, lui dis-je il forcera bien papa de ty mettre dehors. ah, dit-elle si papa nous faisait cela, maman lui reprocherait toujours cela, elle ferait tout pour faire mal; comme je pensais que le fermier ne forcerait pas mon pre, je repondit ma soeur, mais si tu reste l comment feras-tu papa ny viendra plus labourer? coutez, dit-elle, et nous prendrons des gens, si ny fut pas revenu il a quinze ans jaurions bien eu du hasard maman ne len enhtait pas. mon pre esperait que le fermier ne le forcerait pas, et on tait alors au commencement de la recolte, voyant que ma mre persister vouloir rester, lorsquelle vint lui dire sil ne viendrai point entrer le grain, si tu veux, lui dit-il, quon lapporte ici jy irai, comme cela ne lui convenait pas, elle dit plusieurs choses et sen alla et mon pre lui dit, va-t-en pauvre vielle tte perdue; lorsquelle fut partie jamais, dit-il, je ne lui en avais dit autant. dans ce temps mon pre fit un voyage la delivrande et y portt mon frre prosper qui avait mal la vue, ma soeur victoire avait montr des intentions dy aller, mon pere alla encore lavertir, ah, dit-elle, nous navons pas le temps daller courir, questce qui mettrai notre cas. ma mre prit des gens pour faire entrer sa rcolte. cependant le fermier qui avait lou la terre paraissait dispos a vouloir tenir son march, ils se parlaient quelquefois ma mre et lui, et elle le narguait disant quil ntait pas capable de la mettre dehors, cela lirritait et lenttait encore davantage a vouloir tenir a son march, et ma mre ayant encore quelques craintes fit monder plusieurs arbres dans le mois daout craignant quil nen profitt, il en vint avertir mon pre; mais que pouvait-il y faire, il le priait dabandonner le march; mais ce fermier pensa que mon pre et ma mre taient daccord afin de le lui retirer; ils sont daccord, disait-il, mais ils ne men passeront pas par sous le nez. la saint michel arriva, mon pre fut trouver ce fermier. il lui offrit de largent tant quil en voudrait, plusieurs personnes accompagnrent mon pre et le priaient egalement pour lui, la fin il se resolu de ceder le march, condition quils feraient un crit comme mon pre ne le louerai pas a dautres. mais le dimanche suivant il vint dire quil se ddisait, mon pre lui dit alors: tu me feras ce que tu voudras, je nen bougerai pas quand tu devrais me ruiner. mais comment veux-tu donc que je fasse, il lui rpondit, et parent navez-vous pas un chapeau, et il sen alla disant quil verrait la manire de sy prendre et il fit enregistrer son bail dans la semaine et il le montra mon pre qui voyant quil prnait ces formes resolut daller demeubler. auparavant il fut trouver ma mre et mena avec lui franois le comte de courvaudon et qui tait de connaissance avec ma mre pour tacher de la mettre a la raison. tout fut inutile, elle dit, quon ne la ferait pas sortir, quelle se battrai plutt jusqua la mort. quelques jours aprs nous partmes avec la charette pour aller querir du meuble, nous tions a trois, mon pre, fouchet avec lequel nous sosonnions et moi; en passant mon pre pria ladjoint de la commune de venir avec lui pour lui faire des remontrances, et il y vint, il dit quil nallait pas se montrer au cas quelle ne dit rien, etant arrivs mon pere commenca par charger du grain qui tait dans des pouche, ma mre ne disait rien et ladjoint sen retourna. mon pre demanda la clef dun guernier, et sur son refus, il prit un coffre qui etait dans la maison, ma mre sy opposa alors il la tint pendant que je le chargai avec lhomme qui tait avec nous. pendant quil la tenait elle se mit a le grimer a la figure et le mordit en quelques endroits, mon ptit frere jules stant approch, elle lui dit: mord, mord-le mon petit, mord-le ce coquain l, mon pere dit quil lui prenait les doigts dans sa bouche mais quil nosait les serrer; cependant voyant quil lenbarassait je prit cet enfant et le portait dans une maison voisine, nous achevmes de charger et nous partmes. apres midi nous retournons notre arrive tout le village sortit aux portes, ma mre se mit a disputer, et mon pre monta par une fentre pour aller dans un guernier, alors elle le prt par les jambes et le precipita du haut en bas, lui rompit la chaine de sa montre et lui dchira ses habits, il ne la frappa du tout, mais il dit que pour tre tranquille il allait lenfermer dans une maison, il la prt dans ses bras pour lemporter, mais ses mains agirent et le grima encore plus que la premire fois, alors il lui prit les mains pour la conduire dans cette maison et elle se laissa tomber; il ne la tranait pas comme elle disait, mais il tachait de la relever pour la conduire, ma soeur sy mla pour empcher mon pre, et voyant quelle le genait, je la retirai et lui donnai plusieurs soufflets pendant que mon pre conduisait ma mre, elle criait ainsi que ma soeur: vengeance, il me tue, il massassine, il me tue, vengeance mon dieu vengeance. arrivs dans la maison, une de ses cousine vint qui lui fit plusieurs remontrances, quelle ferait bien mieux de nous aider charger, et de sen aller avec son mari, que de faire toutes ces choses. ce qui la calma un peu. mon pre tait si epuis lorsquil arriva dans cette maison quil en crachait le sang. il revint charger, ma mre lui rtira encore plusieurs choses quil voulait emporter, il en reprit dautres a la place et nous partmes. je parlai a ma soeur elle me disait que je lavais tue et ecrase, je lui dit, mais pourquoi ten mlais tu aussi, ne sais tu pas toutes les imaginations quelle a faites contre lui? elle me rpondit: elle nen a pas fait une seule imagination, mon pre, avec fouchet, lui parla aussi il lui dit de conseiller plutt sa mre au bien que de la rtenir et elle repondait quelle ne cessait de lui conseiller tous les jours daller avec lui mais quelle ny pouvait rien gagner. mon pre demanda aussi au batteur qui tait l sil ne lui tait pas du quelque chose, il rependit que non. le lendemain ma mere arriva pour reprendre sa vache, mon pre sy opposa elle lui dit plusieurs injures et en outre: tu as emport le coffre tu croyais bien emporter largent mais tu ne lauras pas. puis sadressant ma g-m: vous lui avez dit de venir me voler, cest votre bonne vierge qui je crois bien vous avait conseillier de faire cela. et elle sen alla de suite trouver le juge de paix de villers, qui la crut et envoya mon pre une lettre concue en ces termes: votre pouse se plaint de ce que vous etes venus hier avec des charettes au domicile ou est dcde feu sa mre dont elle est la seule et unique hritire, que vous avez enlev les grains, vaches, et meubles de toute especes. il me semble que votre femme avait le droit de faire constater le mobilier de cette succession et que vous naviez pas celui de vous en enparer sans aucunes formalits lgales, dautant mieux que vous viviez mal avec elle puisque vous lavez traine par les bras et les mains parce quelle sopposait a ce que vous defonciez des portes et croises. il est certain que si elle portait des plaintes en justice contre vous elle obtiendrait une juste reparation de vos torts. pour eviter des desagrmens toujours fcheux entre mari et femme je vous invite a venir dimanche prochain sur les neuf heures du matin en mon cabinet lande pour vous arranger lamiable. ou bien allez-vous en par devant mr le juge de paix de votre commune qui comme je le pense pourra vous appeler et vous remettre a la raison.

Ma mre en apportant cette lettre la montra mr le juge de paix daunay, et vint de suite la donner a mon pre, qui se disposait a aller querir le veau qui netait pas vendu, et il fut le querir avec le bann, mais arriv, et ma mre faisant de nouvelles resistances, il sen revint sans rien apporter, ma mre alla le vendre deux jours aprs villers avec son batteur. mr le juge de paix daunay qui avait vu la lettre parlant mr Rivire directeur de la poste aunay, ainsi qua son frre dit: diable que cela mtonne je ne prenais pas Rivire pour un homme comme cela, mais il lui dirent ce qui en tait. comme il est du devoir quun mari habite avec sa femme, mr le cur daunay qui mon pre avait cont que le fermier ne voulait pas lui ceder le march avait dit quil en tait bien aise. mon pre fut alors le trouver et lui montra sa figure, ah, dit le cur que je vous plains mon pauvre Rivire. il lui montra aussi la lettre quil avait reue. mr le cur lui en donna une pour aller consulter un avocat de sa connaissance a cond, mr davou. mon pre porta son contrat, et par rapport un article quon peut voir dans ce que jen ai dit, il lui dit quil tait utile quil fit un inventaire du mobilier. mon pre lui demanda la manire de sy prendre, et il dit: que votre femme fasse elle-mme cette estimation. mon pre navait pu lui expliquer son tat on peut juger par ce que jen ai deja dit, si cet avis pouvait se pratiquer. mon pre lui demanda comment il la ferait venir avec lui, il lui dit; que toutes les formalits taient de prendre la garde nationale, au cas que le maire le voult, ou bien la gendarmerie. mon pre neut pas le temps daller le dimanche trouver le juge de paix de villers, il tait occup a planter des bornes avec un de ses voisins. les bls taient faire et la force de louvrage. mon pre navait pas le temps daller se battre et se tintamarer; il fit un tat des arbres au fermier, lui accorda quil coupt le bois la dernire anne du bail, pour les arbres que ma mere avait fait couper, et lui donna le fumier pour la paille quil lui avait accorde, ainsi ce fermier entra en jouissance et il fit les bls, mon pre fit aussi les siens, et lorsquil neut plus tant douvrage il rsolut de livrer les maisons. avant il dit au fermier quil allt trouver le juge de paix de villers les mander tous deux sa femme et lui, mais le juge repondit, quil avait deja ecrit cet homme et quil ne lavait pas vu, quil croyait que sa femme avait raison et quelle sexpliquait bien. que puisquil lui avait lou son bien, il pouvait le forcer a lui livrer, et lui demander une indemnit pour ce dont il navait pas joui. ce fermier repondit quil ne voulait pas lui faire des frais. eh bien, lui dit le juge, que demandez-vous donc? et il sen revint de cette manire, quelques jours aprs mon pre alla avec lui pour lui vider une maison, et il dit a ma mre: veux-tu, lui dit mon pre que nous mettions les meubles dans tes autres maisons qui ne sont pas loues, tu ty retireras et tu recevras tout le revenu de ton bien, mais elle dit que non et quil fallait mettre les meubles dehors, comment dehors, dit mon pre, et puis a quoi que cela va aboutir. mais elle voulut quon les mit dehors, lorsquils y furent il lui dit, veux-tu quon les entrent dans les autres maisons, non, dit-elle, alors mon pre ferma la maison qui venait detre vide, et sen alla avec le fermier. mais a peine furent-ils partis que ma mre et ma soeur rentrrent tous les meubles, et ma soeur disait en les rentrant: cest sans doute craignant de nous laisser manquer douvrage quils ont fait cela, mon pere dans la semaine resolut de prendre ladjoint et quelques personnes notables avec lui et un serrurier, et daller abattre les serrures, vider les maisons, les fermer, et emporter tous les meubles. la nuit du jour ou il devait faire cela, il pensa que si le fermier voulait encore sarranger, et quen lui remboursant tout ce quil avait fait, puis une indemnit il se trouverai encore plus heureux que de la forcer venir avec lui. le matin il nous declara son intention et me dit quil allait toujours aller devant, et que jament la charette jusquau village du fermier, quau cas quil sarrangt quon nirait pas plus loin et ce fermier y consentit. on comta tout ce quil avait fait. la terre quil avait ensemence, le vin quil avait donn, lenregistrement du bail tout cela montait a la somme de 119 frs et autant pour ceder le march, ce qui fit 238 francs ensuite le fermier lui remit le bail, et lui donna un crit que ladjoint ecrivit, comme il abandonnait le march. mon pauvre pre croyait bien tre tranquille il navait pas cet argent, il allt lemprunter chez un de ses voisins, Hbert, je suis pourtant tranquille, disait-il, que tous mes enfants viennent membrasser, quelle reste tant quelle voudra dans son bien. tout ce que je desirerais ce que le pauvre ptit fut encore l, car pour lautre elle est la raison. un mois environ aprs cela, ma mre vint le trouver et lui dit: a present que tu as fait toutes tes farces, je viens voir quand est-ce que tu est dcid de me rendre ce que tu mas pris et de me donner ladministration de mon bien, mon pre rpondit, tu peux maintenant tre tranquille, ton bl est fait, tu as encore une vache, et tu ne manque pas laisse moi tranquille, tu nas plus que faire de craindre que je retourne entour toi, ma mere dit, je reveux mon cas, mon pre dit je te le rendrai, si tu veux rendre aussi ce que je donnai pour toi, mais elle dit et a toujours dit depuis, quil ntait pas vrai que mon pre et donn une indemnit au fermier, quils staient mis daccord, pour la faire sortir, que mon pre lui faisait faire le bl, quil lui avait fait enregistrer son bail, et que lecrit quils avaient fait comme il cedait le march a mon pre pour tant dargent, ntait quun pur micmac. elle fut trouver mr le juge de paix daunay qui les manda tous deux en conciliation, il fit quantit de remontrances a ma mre et qui naboutirent rien, elle dit quelle en verrait plus long, elle allait consulter franois le comte de courvaudon qui cherchait tant quil pouvait a la remettre dans son devoir, il lui disait quelle pouvait rester tranquille, que son mari lui laisserai, elle y avait parut dcide, mais elle lui dit un jour que sa fille lui disait quil aurait tout aussi bien le droit de venir une autre fois la ravager, et quelle voulait se mettre en assurance, le comte lui dit: mais vous depenserez de largent. eh bien, dit-elle, si jen depense il en depensera aussi, et elle fut dans la semaine a vire, elle revint sans rien faire, mais elle dit ceux qui sinformerent de son voyage quil en serait tout aussi bien temps dans six mois dici, et quelle ferait bien manger tout le bien de mon pere si elle voulait. alors elle prit le parti de lui faire des dettes. elle prenait ordinairement des marchandises pour sa toilette et celle de ma soeur, aunay chez mme Aod. elle avait toujours bien pay, elle ne payait plus. le batteur qui mon pre avait demand sil ne lui tait pas du dargent, vint le trouver dans ces temps et lui dit que ma mre ne voulait pas lui payer douze frs quelle lui devait, ctait le mme qui avait mond les arbres. mon pre lui tmoigna un peu son tonnement, puis il lui dit quil ntait pas juste quil perdit son argent, et quil irait avec lui trouver ma mre et que si elle ne voulait pas le payer, quil prendrai la vache et la vendrai pour le payer, le jour convenu il y alla et trouva le batteur dans la maison, et ma mre et ma soeur dans letable une de chaque cot de la vache, la dessus il dit quelques paroles a ma mre, puis il dit au batteur quil se fit payer comme il voult. cet homme le fit venir en conciliation devant mr le juge de paix, mais ma mre y alla aussi. le juge sadressa a elle seulement, il lui fit de nouvelles remontrances quelle ferait bien mieux daller avec son mari, et elle dit, quelle y viendrait, mon pre paya le batteur. ma mre se plaignit cette audience que mon pre laissait sa terre a labourer, pour labourer celle des autres. ces paroles entendues par les auditeurs furent tournes en ridicule. on les entendait de deux manires, et mon pre tait ainsi le jouet de la rise publique. marie Fortain lui dit: ah je vous prie nallez plus par devant le juge de paix quand elle vous y citerai de nouveau, les gens sen moquent trop. mon pre retrourna labourer courvaudon vu que ma mre disait quelle viendrait avec lui. il lui demanda quand est-ce quelle viendrait, ah, bientt, dit-elle; sur cela ma soeur prenant la parole lui dit: ah je me louerai a la saint-clair moi, et elle nosait se declarer, enfin elle dit: ah ce que vous croyez que nous nous en irons la sous votre domination, mon pre toujours patient lui dit tu disais que ce ntait pas toi qui retnais ta mre cependant je vois bien que tu est aussi pire quelle; ce nest pas moi, dit-elle, qui lai faites revenir il y a quinze ans, fallait la laisser tranquille vous, et rester ou vous etiez dans ce temps-l. ma mre dit aussi plusieurs paroles qui firent connatre mon pre quelle navait pas lintention de quitter. quelques jours aprs en passant elle lui demanda sil viendrait bientt faire lorge. il lui dit si elle pensai quil ft toutafait fou pour se deranger tant pour une personne qui ne cherchai qua le depiter; eh bien, lui dit ma mre, tu fais cela mais ce ne sera douze francs de cette fois que tu verras, tu en verras dautre que cela, mon pre, lui dit, mais si tu me fais des dettes je retournerai querir des meubles pour les payer. eh bien, dit elle, nous verrons. et elle sen alla. craignant quelle ne realist ses menaces, mon pre fut consulter un avocat caen mr beaucher, pour lui demander sil ne pourrait point faire publier que personne ne lui donnassent rien crdit ou quils le perdraient de sa part. cet avocat lui dit que cela serait infamant, quil fallait plutt la faire venir avec lui. mon lui conta une partie de ce qui en tait. cest bien malheureux, repondit-il, mais allez querir ses meubles une journe que vous savez quelle nest pas l. aprs que mon pre fut sorti il alla encore en consulter un autre mr Pouillier; celui-ci lui dit quil fallait prendre les formes legales et presenter une requete au tribunal pour la faire venir avec lui, de sorte que ces avis de la faire venir, il fallait tout autant dire quil fallait faire venir le diable, et mon pre en resta l, il avertit seulement le laboureur qui lui demandait si cela ne lui ferait pas de la peine quil travaillt pour elle, travaillez-y tant que vous voudrez lui dit mon pere, mais ne contez pas sur moi pour le payement, il avertit aussi mme Aod a qui elle devait dj 45 francs de ne pas lui en donner dautre sans se faire payer; mais ma mere avait plus dune boutique, en outre elle prenait aux merciers qui passaient par son village, achetait du grain et le revendai, elle dit a un mercier, le roux de courvaudon a qui elle voulait prendre trois ou quatre bonnets de coton, dites mon mari que je vous dois douze francs et vous me donnerez le reste. cet homme ne voulut pas lui donner ses bonnets elle dit des mmes choses a une marchande de boutique que jai perdue de vue. pendant quelle faisait toutes ces choses, mon frre jean tomba malade dans le mois de juillet dune maladie de cerveau, il ne dura que quinze jours. dans les derniers jours on resolut malgr tout davertir sa mre, jallai la trouver et elle vint le voir, il tait alors sans presque aucune connaissance, il ne la reconnut pas; ctait le lundi, ma mre sen retourna et elle revint le mardi soir, pendant la nuit mon frre fut pris de quart dheure en quart dheure de convulsions qui le faisaient se debattre horriblement. cet enfant avait dj montr plus de socit parmi le monde que moi et que mon frere prosper. il aidait deja a toutes sortes douvrages aussi mon pre laimait-il. on peut juger quelle tait sa tristesse et son abattement au pied de cet enfant. cependant ma mre lui donna deux lettres une de mme Aod et lautre du percepteur pour payer ses dettes et soutint devant lui ses opinions rapportes ci-dessus. mon pre perc de douleur secria: que je suis donc malheureux, ah seigneur men donnerez vous encore de plus dures, va mon pauvre petit tu vas tre bien heureux dtre retir du monde, tu vas aller au ciel. ma g-m. presente lui fit plusieurs reproches et puis le sang lui monta elle etait toute enroue. le lendemain cet enfant expira, les voisins voulurent retirer mon pre dauprs de lui en ce moment, non, dit-il je ne labandonnerai pas, et puis le voyant mort: oh, secria-t-il, mon pauvre petit jean qui disait, non mammre, restez jai plus la force de faire cela que vous, oh je vais mechapper. ou vas-tu aller mon pauvre fils, lui dit ma g-m, puis il se pencha sur un lit, jeta son bonnet, et sarrachait les cheveux; ma soeur aime se jette entre ses bras: votre fille ne vous abandonnera jamais, lui dirent les voisins. ma mre sen retourna, elle ne manqua pas de debiter partout que mon pre avait fait prir son enfant, et continua faire des dettes, elle avertit le laboureur, quil se fit payer comme il voult. lorsques que les marchands lui demandaient de largent elle disait: faites vous payer a celui qui a pris mon cas. voulez-vous que je vous fasse un billier. craignant que mon pre nallt chercher quelque chose elle fit battre sa recolte aussitt recolte, elle fit battre premierement le plus gros du bl pour lavoir plus vite, elle vendait a tous les marchs a aunay et a evreci, elle ne payat que le percepteur, car on lavertit quil pourrait faire saisir sur le mobilier de son domicile, les autres cranciers demanderent de largent mon pere, qui voyant quil serait ruin sil laissait continuer tout cela resolut daller qurir des meubles pour voir quel aboutissement cela pourrait faire. ma g-m. tait extremement afflige de toutes ces choses: ah, dit-elle, en pleurant marie Fortain, je voudrais tre dans le cimetire, ah faut-il que jaie eu tant de mal ma vie pour en tre recompense de la sorte, pour qui que le bon dieu en fait donc tant souffrir, pour qui quil me laisse si longtemps sur la terre; marie Fortain la consola du mieux quelle put et nous partmes mon pre et moi un jour du march devreci que nous esperions que serait ma mre, et pour emmener la vache et un cochon quil y avait. tant arrivs nous trouvons ma soeur, mais ma mere tait l aussi pas loin. mon pre dit quil allait prendre la vache, sur cela ma soeur se mit a crier: maman, maman, arrive il veut emmener notre vache; elle arrivat et voulut en empcher, mon pre la prit et senferma avec elle dans la maison, alors elle le grima et mordit encore en quelques endroits, puis elle se mit lui reprocher la mort de son enfant. oui, dit-elle, si javais bien su je laurais fait trepaner, au moins on aurait vu ta malice, il lui lacha un soufflet, elle se mit a crier vengeance de nouveau. comme je cherchais a prendre la vache, ma soeur, voulut en enpcher en la faisant echapper, alors je lui donnai plusieurs coups de manche a fouet, nous prmes un sac dorge avec la vache, mon pre dit au batteur de sen aller, et lui demanda combien il lui tait du, il dit quon lui devait 28 sous, nous partmes. ma mre courut derriere nous regoinit; mon pre la prit alors sous le bras comme pour aller en noces, elle se laissa tomber trois fois, et en tombant la troisieme fois, elle fit glisser son pied le long de sa jambe, mon pre ne lui fit autre chose que de lui dire, ma foi tu te couche et te place assez bien, pour je te jense mais je nen suis pas dans le train. il y eut plusieurs personnes qui virent cette scene. ma mre sen servait dans la suite pour demander une separation. ouelques jours aprs elle vint trouver mon pre pour qui lui rendit ce quil lui avait pris. paye tes dettes, lui dit-il, mais elle voulait faire un arrangement comme par lequel il payerait ses dettes, lui donnerai ce quil lui avait pris, et lui ferait une pension pour quelle restt sur son bien. ou veux-tu que je prenne de largent, lui dit-il, fais comme les autres dit ma mre prends-en la banque. elle alla trouver mr Foucaut a vire pour obtenir une separation de corps, mais il manda mon pre par une lettre de venir sarranger, mon pre fut le trouver et porta des certificats de sa conduite des curs des deux communes, ma mre sy trouva et ils convinrent quelle viendrait demeurer avec lui, mais quil la mettrai dans une maison a part avec ses meubles et ce quelle avait, que ma g-m. nentrerai pas dans sa maison, que par sa permission, ou que si elle y entrait, quelle retournerai sur ses biens a courvaudon, et que cette maison serait prte dans quinze jours ou trois semaines du plus-tard. mon pre la rapporta de vire dans la charette, et ils convinrent quil irait battre le sarazin qui tait courvaudon sur la fin de la semaine; mon pre alla faire afficher la terre a louer, car la saint michel etait proche; mais ma mre ne fut pas contente de cet arrangement, elle retourna vire dans la semaine et fit battre le sarazin sur le commencement sans en avertir mon pre, elle fit ses dispositions pour que tout le grain fut vendu lorsquil viendrait la chercher. il faisait apprter la maison du plus vite quil pouvait, et il apprt lintention ou tait ma mre de tout vendre en attendit. alors il prit la charette et deux personnes du village, et fut chercher ce qui restait de grain. il trouva encore le sarazin tout lautre grain tait tout surbatu, il prit aussi un cochon, pendant que nous chargions, il se tint avec elle dans la maison pour quelle restt tranquille, nous fmes deux voyages, au second ma mre ntait plus l elle etait a faire racomoder ses souliers, en partant il voulut emporter des draps et comme ma soeur sy opposait, il dit quil faudrait quon les aportt tout aussi bien dans quelques jours, non elle ny ira pas, dit-elle, elle va partir pour mettre les affaires en train. et en effet elle retourna encore vire mon pre retourna aussi trouver mr Foucaut pour lui demander la manire de sy prendre, il lui demanda sil ne lavait pas revue, et lui dit quelle tait revenue deux fois. je ne lai pas vue, repondit-il, cest quelle a t trouver un autre saint. le soir quelle fut revenue daller faire racomoder ses souliers ma soeur lui dit: va y si tu veux, mais pour moi je nirai jamais avec un cocain comme cela qui nous prend tout notre cas. cependant ma mre voyant quelle serait oblige de venir ft plusieurs dispositions pour continuer faire mal. la maison tant prte mon pere alla la chercher, accompagn de Quevillon notre soson et de victor domestique chez mr Grellai, il ne trouva que peu de meubles, il ny avait pas de marmite, quoique ma mre eut fait toutes les dettes dont jai parl, il ne leur trouva que trs peu de toilettes. ma mre fit de nouvelles rsistances, elle dit quelle voulait quil payat ses dettes avant quelle vint avec lui. mon pre dit quil en avait deja pay une partie et quil paierai les autres. mais il ne se doutai pas dune lettre que ma mre croyait quil avait recue. mon pre pria deux femmes de venir lui montrer le bon sens. et il parti avec une charte, il emmena de cette fois mon frre jule, tout le long du chemin, et ceux qui etaient avec lui pourraient le rapporter, il prenait de temps en temps cet enfant et lembrassait. ah, mon pauvre petit jule, disait-il, je suis content, va cest bien toi qui est le plus cher meuble que javais envie demmener, a la seconde charte, comme les femmes conseillaient ma mre daller avec lui, elle se mt pleurer, car elle avait assez lhabitude de pleurer, elle dit: ah fallait me faire aller, pendant que mon pauvre enfant vivait, il ne serait pas mort et ils vinrent ma soeur et elle. le soir quoique quon neut pas eu le temps de tout arranger elle voulut absolument coucher avec ses deux enfans dans sa maison. mon pre tant revenu trouver ma g-m. elle lui montra une lettre qui etait venue par la poste, et dont la reception avait mis ma g-m dans une grande affliction; elle stait roule par terre et avait battu la terre de son corps. voyant tant de maux je la reciterai ici.

courvaudon le... memoire de dettes faites en lanne 1833. 40 francs a un mercier de hamars, 30 frs a Goff, 10 frs a victor Bourse. 10 frs a un cordonnier. 10 frs de messe, 17 frs a sophie Rivire 27 frs a marianne le Comte et un sac 3 frs a rose lemine 40 sous a charles le Bas 8 sous a mr le riche 48 sous a sophie le Coc 70 sous a pierre Bretoure. si ces dettes ne sont pas payes sous huit jours on fera la requte et il faudra payer aussi celles de lanne 1834 et elles sont bien plus consequentes. toutes ces dettes etaient inconnues de mon pre, en outre de celles dont jai parl il avait pay 25 frs au laboureur qui il avait dit de ne pas comter sur lui. mais cet homme ctait fi a ma mre, et elle lavait tromp; il eut de nouvelles peines en voyant ces dettes, cette lettre avait t ecrite par ma soeur victoire; mon pre sinforma de ces dettes, victor bourse, qui il tait mis 10 frs dit quelle lui devait a peu prs 30 sous, il crut que cela serai la mme choses des autres, mais a lexception des 30 frs a goffe, des 17 frs a sophie Rivire, il a t oblig de payer le reste; je dirai que ce goffe, et le comte frere de cette marianne dont il est parl, et en outre un maon de hamars, que tous ces gens l que ma mre allait consulter taient des celibataires, et peu delicats sur la puret; quelques jours aprs son arrive, ma mre et ma soeur victoire et mes deux frres mon pre et moi, nous fmes ramasser des pommes courvaudon, et au midi la dispute recommenca, mon pre parla de la lettre, il nen avait pas encore parl ma mre, il lui demanda pourquoi elle le persecutait tant, pourquoi elle voulait lui faire payer des choses qui netaient pas mmes de cas, ce quil lui avait donc fait, mais elle repondit en le narguant, que pour navoir pas voulut la laisser tranquille il ny gagnerait pas tant comme il croyait. et elle sen alla chez sa cousine avec ma soeur et mon frere jule, comme mon frre jule pleurait, car quoique cet enfant penchat un peu du ct de ma mre, il aimait aussi mon pre et tait content lorsquil les voyait daccord, mon pre voulut le retenir par ses caresses il ne le put. alors il dit a mon frre prosper: vas-tu aussi me laisser et ten aller avec eux? non, dit-il, et nous restmes tous trois. mon pre parla aussi la femme de jacques le comte qui etait l et lui dit: mais que me demande-t-elle donc de vouloir me ruiner ainsi, aprs que jai eu tant de mal pour acquerir ce que jai pour mes enfans, je serait oblig de vendre de la terre et aprs que jen aurai vendu un morceau, cela ne suffira pas encore, si elle continue il faudrat que jen vende encore dautres, il avait la larmes aux yeux en disant cela cette femme lui repondit, quelle ne pouvait penser autre chose que de voir quelle avait toujours eu lide de matrser et de se faire une bourse a part. le soir, ma mre et tous revinrent a la fauctrie. un dimanche mon pre alla hamars pour parler le mercier, il lui tait du les 40 frs mon pere les paya le samedi daprs et retira une quitance de cet homme comme il le tenait quite et comme il ne donnerai jamais rien a credit ma mre ni a ma soeur victoire. le dimanche quil fut le trouver etant revenu a vepres a aunay, et accabl de toutes ces choses il se trouva malade, il fut oblig de sortir de leglise, et se retira chez la veuve guernier. ma mre voulut que les enfans ma soeur victoire et mon frre jule, coucht dans la mme maison ou elle tait. mon pre lui representat quil se serait pas bien de mettre tant de lits dans la maison et quil y avait un cabinet et dautres endroits pour les coucher, ma mre ne le voulut pas et ces deux enfans couchaient dans le mme lit avec elle. quelquuns dirent mon pre: je voudrais coucher avec elle quand cela ne serait que pour la faire enrager. mon pre mt un autre lit dans la maison, ma soeur y coucha, et il coucha avec ma mre, et comme elle ne voulait pas envoyer jules coucher autre part, ils couchaient tous les trois ensemble. mon pre depuis leurs grands differents navait pas eu de commerce charnel avec elle. cependant suffit de la faire enrager il voulut essayer la premiere ou seconde nuit. ma sieur victoire entendit. alors elle dit: ah mon dieu mon dieu quest-ce que vous lui faites? vois-tu, lui dit-il, quest-ce que cela te regarde, je lui fais ce que les hommes font a leurs femmes, ah, dit-elle, laissez-la puisquelle ne veut pas. va, lui dit mon pre, je vais bien la laisser aussi. ll coucha avec elle quelques nuits et puis voyant quelle ne laissait pas de coute de son ct ni de plume dans loreillier, et quelle faisait tout pour faire mal, il prefera coucher dans lautre lit, et ma soeur et mon frere ont toujours depuis couch avec ma mre, elle faisait la cuisine, nous allions tous vivre avec elle, a lexception de ma g-m. a qui il tait deffendu dentrer dans sa maison; cette femme qui avait donn lamortissement de sa rente pour racheter les biens de ma mre, ainsi elle restait a manger seule ce qui lui tait extremement sensible. un jour que ses ressentiments la devoraient, et elle venait de nous donner une chemise a prosper et a moi, nous etions couchs dans un cabinet a ct, et elle dit: ah oui je me suis donne bien du mal pour les soigner tous, et pour les lever du mieux que jai pu, et jen suis bien recompense. et puis jentendit quelle se frappa deux ou trois la tte contre la table ou contre terre, oui, dit-elle, je veux battre la terre de mon corps, ah faut-il que le bon dieu me laisse si longtemps souffrir, sil y avait l un eau je me jetterais dedans. ma soeur aime qui etait avec elle lui dit: couchez-vous mammre ah je vous prie; et elle se coucha. ma mre continuait toujours faire mal, elle disait quon lavait fait venir pour la faire prir, que sa fille mourait de chagrin tous les jours, elle portait des plotons de fil, et des ballots de filase dans les boutiques, disant quelle tait oblige de vendre cela pour se nourrir, tmoin mme le gouix dit lemine, mon pre etait dsespr de toutes ces choses, il prit lhabitude de lui parler a haute voix lorsquelle laccablait de ses raisons; alors on le voyait le visage plein de tristesse parler a elle, crier haut, parler bas sans pouvoir rien y gagner, ma mre sen moquait, elle etait bien contente de le voir accabl. comme il disputait avec elle un samedi que les gens passaient, la femme de hehert vint lui dire quil se tt. tous ceux qui passent, dit-elle, en parlent jen ai entendu qui disaient: ah mais elle ne saccoutume pas je crois, et dautres mais elle na pas encore tant de tort que vous croyez on dit quil la bat comme une chair de boeuf. quelque temps aprs elle fit plusieurs prparatifs. elle blanchit du linge et mit des souliers en tat, nous tions en train de faire du cidre, et elle voyait mon pre embarass,

Un matin donc elle parti sans le dire a personne emportant des habits et plusieurs choses, ma soeur victoire et mon frre jule la suivaient ma soeur emportait son metier dentelle, on avertit mon pre qui etait au pressoir, et il courut aprs eux jallai aussi voir ce qui en allait devenir, et je le trouvait qui revenait avec le petit sur son dos, ma mre le suivait, mon pre avait un visage et un air desespr, il semblait vouloir dire: je renonce a tout jabandonne tout ce que jai, il ny a que ce pauvre petit quon ne menlevera pas, je veux le tenir et lemporter toujours avec moi; dans le chemin je lui dit: laisse les aller ou ils voudront et fais afficher quonne leur donne rien. il ne me repondait pas il etait tout absorb, lorsque nous fmes au village ma mre dit a jule; ne crains pas je vais revenir ce soir et elle sen alla. en dinant mon pre dit jule: ne va plus avec elle elle nest dans le cas que de te faire du mal mon pauvre petit. et il lembrassait. ma mre revint le soir avec ma soeur, on ne sait pas ce quils avaient t faire, mais mere continua ses niarges envers mon pere, et se moquait de la tristesse dont il etait accabl. le lendemain il fut beaucoup occup dans le pressoir, et comme il devait aller labourer le lendemain pour ouevillon, je lui demandai sil ne fallait point aller lui dire que cela ne se pouvait pas, mais il disait que non, et il etait reveur, a la fin il dit: tiens, jabandonne tout je laisse tout, je vais me jeter dans notre puits, il sen alla je le suivit, et ma g-m. sy trouvant aussi, il ne le fit pas, il prt un verre deau et retourna au pressoir; il consentit que javertit Quevillon quon ne aller le lendemain pour lui; au matin nous epluchons le marc, nous etions trois, mon pre ma g-m. et moi. nous parlions de ces dmarches que ma mere faisait, et ma g-m. et moi nous conseillions a mon pre de faire afficher craignant quelle nachevt de le ruiner, mon pre disait quil ne voulait pas faire cela, tu la laisse faire comme elle veut aussi, lui disions nous, tu la jirote. ah dit-il, je ne la jiroterai pas mais long-temps vous etes bien sure que cela sera bientt fini. ah, lui dit ma g-m., tu menace de cela donc, cest bien pour que jen menace moi; et elle sen alla. mon pre prt alors son bonnet et il sarrachait les cheveux, il etait comme dans un accs de rage et de desespoir. oh, oh, oh, oh, disait-il; je me jettai lui, ah mon pauvre papa lui dis-je, dure donc. un moment aprs ma soeur aime arriva pleurant, quest-ce quil y a donc eu de nouveau, dit-elle, mammre est la haut qui pleure et se desole quest-ce quil y a donc eu, je me penchai a son oreille et lui dit: va ten chercher mr le cur, il veut se tuer. ma soeur sen alla. et ils revinrent ma g-m. et elle un peu aprs. ma g-m. dit a mon pre: il a dit a aime daller chercher mr le cur, veux-tu que jaille le trouver moi. mais il tait plus calme. et on ny alla pas. cependant il fut encore repris de ces ides je ne sais si ctait cette journe l ou quelque jours aprs quil dit ces paroles: quoi naije pas la force de me soustraire a tant de persecutions, il y en a qui le font pour bien moins de raisons. quelque temps aprs cette marianne le comte a qui ma mre disait quelle devait un sac de bl se presenta pour tre paye. ctait assurement un arrangement que ma mre et cette femme avaient fait ensemble elle pouvait lui en avoir donn une barte, car mon pre ayant demand comment elle le lui avait donn, elle dit quelle lui avait donn barte barte que les trois premires bartes, elle les avait emportes une a la fois, sur son dos dans une pouche, et que la derniere elle avait le cheval du meunier, et quelle lui avait donn cette barte avec un sac pour la mettre quelle avait emport. mon pre demanda ma soeur si elle navait point aidait a sa mre a aller querir ce grain elle dit que non mais quelle avait aidait a le manger. mon pre dit cette femme qui passe dans le pays pour une friponnire, quil ne la pairai pas. ma mre lui dit de le poursuivre et quelle leverai le pied et la main sil le fallait comme elle le lui devait. cette femme le fit venir en conciliation. ma mre alla avec elle. mon pre avait pour raison que quelquun auraient du lui voir emporter le grain quelle avait emport sur le dos et que ma soeur aurait du lui aider, le juge de paix demanda a cette femme si elle voulait affirmer sur la foi de son me que cela lui etait legitimement du. comme cela avait un air de la repugner, ma mre dit: que vous tes innoncente, si cetait moi jafirmerais bien. le juge conclut en disant je vois que cette femme a la delicatesse de ne pas vouloir affirmer ainsi payez la et allez vous en paix, et mon pere la paya. le batteur qui mon pere avait deffendu dy travailler davantage et etait arrt avec lui pour 28 sous y avait travaillier depuis et voulut se faire payer le surplus, le juge dit encore quil fallait le payer et mon pere le paya. lorsques que mon pre parlait quelque fois au juge de ma mere il disait: voyez-vous votre femme est faible il faut la menager. ma mre eut aprs ces jugemens encore plus de force de rire de mon pre et de soutenir ses raisons. jai oubli une autre circonstance de dispute arrive avant ses dernires. un homme qui allait se marier vint a lepoque que ma mre vint avec mon pere, il lui demanda a louer une des maisons pour sy loger avec sa femme, cette maison fut une de celles qui navaient pas t loue au fermier dont jai parl, il y a un jardin dpendant de cette maison. ma mre ne voulait rien louer. et la terre quil avait affiche na pas t loue soit parce que les gens ne sen souciaient pas vu les changemens qui arrivaient tous moment, soit quil ft trop tard parce que la saint michel etait passe, mon pre la faite valoir cette anne. pour la maison dont je parle qui etait la boutique a charpentier et la cave elle fut loue dix ecus, et il fut dit que le fermier aurait tout ce quil y avait de legumes dans le jardin, et que mon pere jouirait de la cave jusquau premier jour de lan. ce march ne convenait pas a ma mre, non plus que tout autre, elle dit que cet homme ne jouirait pas et quelle arracherai tous les legumes du jardin. un jour donc quelle y etait retourne que mon pre y tait aller travaillier, au soir elle dit a ma soeur de plumer les choux, elle obit. mon pre lui dit: mais que fais-tu donc je te defends de les plumer puisquils sont lous, ma soeur dit: ah ma foi ils sont bien trop touffus, il la ft retirer. mais ma mre voyant cela se mt a les plumer elle mme, mon pre le lui dfendant elle dit: en parle-tu, je vais tous les etter, il lui donna un soufflet, alors elle se mt crier: vengeance mon dieu il me tue, ma soeur victoire y courut, moi aussi et je vis que mon pre, cherchait a la faire sortir du jardin; elle le frappait a coups de pied, et lui donna aussi des coups de poing, aprs quelle fut sortie. faut-il que je sois si malheureuse, dit-elle, dun cocain qui me tue la nuit, mais je reviendrai les prendre nos choux je les prendrai au beau jour. je revins avec mon pre et Quevillon par un chemin, et ma mre et ma soeur sen allerent par un autre. lorsques quon ft le dernier cidre, ma mre ne voulait pas quon apportt un tonneau qui etait restait a courvaudon, et voyant quon laportait elle fut consulter un maon a hamars pour voir comment elle pourrait obtenir une sparation, et depuis elle toujours t souvent en consulter de part et dautre et debiter que son mari la faisait perir et quil la battait journalement; il y avait quelques temps quon avait fait la lesive que ma mre demanda a blanchir des draps; elle devait encore en avoir. mon pre lui demanda ce quelle en avait fait. elle dit peu de chose mais ma soeur dit; quil ny en avait pas temps comme il disait. il parait que ma mre avait pris tout son meilleur linge et quelle lavait cach chez ses cousins courvaudon, car elle savait que mon pre tait oblig de lui fournir ce qui lui etait necessaire et ses cousines passaient le samedi et sentretenaient avec elle, une dentre-elles avait dit une personne dans le temps que ma mre etait encore a courvaudon et quelle faisait des dettes; quon disait que Rivire tait un si bon homme par ci et par l, et elle ajoutait: je ne le prends pas pour un si brave homme, pourquoi quil ne laissait pas sa femme tranquille sans lui prendre ce quelle avait, ils lavaient fait venir autrefois avec eux, ils ne purent la souffrir, fallait continuer a lui faire son labourage comme il faisait sans la tracaser, netait-elle pas attache a son bien comme il est attach au sien. cette cousine faisait bonne mine mon pre quand elle le voyait, et elle disait dans le boug daunay que ma mre etait une mauvaises femme et quelle faisait souffrir son mari. nous fmes ecouter mon pre et moi par un endroit du plancher les discours que ma mre et ma soeur disaient ensemblent. jy allai le plus souvent mais on ne les entendait que lorsquils parlaient un peu haut. un jour que mon pere avait dit a ma soeur victoire, que ma g-m. ne pourrait mais guere plus travailler, quil faudrait aider soigner les vaches, et aller a la mengaille chacun a son tour, mon autre soeur et elle; lorsque que ma mre fut revenue elle lui dit en repetant les paroles de mon pre dun ton moqueur: ah il a dit quil faudrait aller a la mengaille, que sa mre ne serait plus capable de travailler, ma mre en faisant la cuisine faisait du plus mal quelle pouvait elle mettait des herbes la soupe quelle savait que mon pre naimait pas et les mettait avec dautres quil aimait. mon pre sentretenait quelque fois avec ses voisins de tous ses maux, il parlait des linges quelle avait soustrait, et il disait: ils ont sans doute envie de sen retourner, quils sen retournent ou ils voudront mais ils nemmeront pas le petit jule avec eux, je ne veux quil les suivent, je veux quil reste avec moi, dabord on ne peut pas le hair. ma mere alla consulter mr Blain a beauquay, elle lui debita ses calomnies contre mon pre, elle lui dit aussi quelle tait grosse. ll y avait dautres personnes chez mr Blain, cela fut bientt repandu dans aunay, et un homme parlant a un de nos voisins dit: il parat que vous avez un voisin quil faut quil maltraite etrangement sa femme, car elle en dit de belles choses. mon pre sachant quelle avait dit quelle tait grosse, ne put croire quelle le ft car, disait-il, comme elle sait ce qui en est avec moi, elle se pense, il tient lhonneur, mais quil voie une pareille affaire, il dira: comment est-il possible, il ne pourra se contretenir, il me battra et je pourrai obtenir une sparation. je suis sur, continuait-il, quelle se met de quoi sur le ventre pour le faire grossir, il faudra que jy regarde; il tint ce raisonnement devant quantit de personnes entrautres, Hebert et sa femme, la veuve Quesnel, victor domestique chez mr Grellai, une de cousine de ma mre de courvaudon Gurin garde-champtre, un remonteur qui est a aunay, mr le cur daunay; mr le cur lui dit de ny pas regarder. mon pre disait encore: elle dit que jai fait perir lautre, mais je lui dirai quil faudra quelle me rende compte de celui quelle a dans le corps. cependant craignant quil ne se trompt je resolut de meclaircir de cette affaire en ecoutant; une fois jentendis que ma mere et ma soeur calculaient le temps quelle serait dans cette couche en examinant le temps quelle avait t dans les autres. ma soeur dit en outre: il ne faut pas lui faire aucun habit, au moins mais quil soit fait, et quil vienne a demander le bonnet, que les gens soient l tu diras: ma foi, il ny en a pas, mas-tu donn de largent pour en avoir. cest l, ajoutait ma soeur, quil y aura a rire; ensuite elle supposa et dit dun ton de moquerie les paroles que mon pre pourrait dire alors: ah, continua-t-elle, il te dira, ah tu as encore fait cela pour me faire honte, tu est toujours de mme, si cet t pour autre chose tu en aurais bien trouv; ma mre se mefiant des ecoutes lui dit: tais-toi donc. ma soeur dit dun ton plus bas: nen fais pas toujours. une autre fois ma soeur avait t porter sa dentelle a villers, elle revint sans avoir t paye. ma mre dit alors: que je suis malheureuse dtre dans cette position, que nous ne resterions donc pas l long-temps mon dieu. puis elle ajouta: as-tu pris garde si le marchand payait les autres qui en portaient comme toi. cest peut-tre lui qui lui a deffendu de te payer. je net garde de dire toutes ces choses que javaient entendues mon pre vu les penses quil avait. une autre fois que mon pre tait parti a un voyage, jentendis que ma mre et ma soeur supposaient quil etait peut-tre a tenter ceux chez qui elle avait rtir ses linges, et ies contrats daquets de ses terres: il est chez julie, disaient-ils, ou bien chez la pinote, il va lui demander des contrats ou dautres choses, oh mais ils ne vont pas lui en donner, il faudrait quils fussent bien lches toujours sil le faisaient; quoique ma mre fut grosse elle pensa quelle pourrait cepandant commencer a intenter un procs pour avoir une sparation, alors elle ne voulut plus faire de cuisine que pour les deux enfans qui etaient avec elle, ni prendre de pain chez ma g-m. ou on le mettait, et aprs avoir t chercher des avis pendant trois ou quatre jours, un matin elle fut chez sa cousine sans doute pour avoir son argent. et lautre matin elle parti pour vire; je remarquai quen partant, un homme se trouva avec elle, cetait sans doute un de ses avocats du pays; pendant son absence ma soeur victoire et mon frre jule resterent dans la maison manger du pain quelle leur avait achet, sans vouloir venir avec nous autres qui depuis avons t vivre avec ma g-m. le soir mon pre demanda a ma soeur pourquoi quelle laissai perdre le pain qui etait chez lui pour en aller chercher dautre, ah, repondit-elle, puisque nous avons moyen den acheter. paye donc tes dettes, lui dit-il, chez Rabche et ailleurs que tu disais que tu payerais lorsques tu et de largent. pourquoi empche-tu a ton petit frere de venir manger avec nous? je ne len empche pas dit-elle; tu mens, lui dit-il, tu lui en empche. ma mre revint avec une ordonnance de mr le president pour paratre en conciliation. ce fut mr le valois huissier saint-georges qui apporta cette ordonnance mon pre. tout le monde etait touch de voir un homme dune conduite irreprochable si malheureux et persecut si cruellement par une femme. le dimanche lorsquil entonna leau bnite, car mon pre chantait a la messe, prs de cinquante personnes pleurrent. pendant la semaine mon pre obtint des certificats, un du maire daunay dans lequel il etait fait mention de sa conduite et de lestime dont il jouissait; un de celui de courvaudon qui contenait la mme chose et en outre quelques choses sur la conduite de ma mre et un autre crit par mr le cur et sign de plusieurs habitans de la commune qui exposaient quelle conduite mon pre avait tenue avec ma mre, plusieurs des sacrifices quil avait faits pour vivre en paix avec elle. mon pre prt aussi son contrat de mariage. larrangement fait devant mr Foucaut, quil perdit en chemin et qui fut retrouve et lui ft rendu, le bail quil avait cass, la lettre des dettes quon lui avait envoye, et comparu le lendemain de lascension. il trouva mr le president dispos en faveur de ma mre, ses certificats ne furent regards quavec indifrence. mr le president dit mme en voyant celui de courvaudon: mais cest contre votre femme que vous en avez fait faire un a courvaudon. mon pre dit que le maire lavait fait comme il avait voult. ma mre commena a lui reprocher de nouveau quil avait fait prir son enfant. mon pre en pleurant explica a mr le president ce qui en etait. il lui montra aussi larrangement fait par devant mr Foucaut. mr le president demanda a mre pourquoi elle ne voulait pas tenir a cet arrangement et lui dit quelle avait trois partis a choisir. ou de tenir a cet arrangement, ou de retourner sur ces biens a courvaudon, ou de plaider. ma mre dit quen retournant dans son bien elle voulait que son mari lui rendit ce quil lui avait pris, ses meubles, son argent, ses vaches, ses tonneaux, et plusieurs choses quelle nomma dont il y en avait beaucoup quil navait pas eues. mon pre lui dit: je te rendrai tout. on demanda a qui seraient confis les enfans. mr le prt dit quils iraient ou ils voudraient. mon pre dit: mais mr elle se dit grosse, a qui sera confi cet enfant? il repondit ce sera plutt votre femme qua vous, cest elle qui lalaitera. mais ce netait pas