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Incarnation(s)
Du vendredi 20 novembre 2015 au mercredi 20 janvier 2016
Une exposition sous la direction artistique d'Estelle Lecaille, à l'initiative de mòsso (www.mosso-
brussels.com) et en coproduction avec la Maison des Cultures et de la Cohésion Sociale de
Molenbeek-St-Jean.
Vernissage le jeudi 19 novembre 2015 à partir de 18h avec les performances :
• How to read between black & white Café Biscuits Avenir de Patricia Barakat (lecture des
cartes de tarot & marc de café, cinq personnes maximum, 20 mn par personne)
• Bare Faced de Lazara Rosell Albear, Audrey Lauro et Aurélie Lierman (durée 40 mn,
projection de vidéos, impro sax, danse, batterie et clavier)
Finissage le mercredi 20 janvier 2016 à 18h avec une soirée de projections de films
Dankumba de Bakary Diallo Mali 2011 12'
Gnawa de Olivier Dekegel 2010 Belgique 43'
Violin Fase de Eric Pauwels 1986 Belgique 12’
Faraw ka taama de Seydou Cissé Mali 2012 11'
Lettres du voyant de Louis Henderson Ghana 2013 40'
Miramen de Khristine Gillard et Marco Rebuttini, Belgique, 2011, 22’
L'exposition Incarnation(s) propose par des pratiques très diverses allant de sculptures, de pièces
sonores, d'installations à des vidéos des approches de la personnification du monde magique de
l'invisible. Les artistes instaurent ainsi chacun une relation particulière avec le monde surnaturel en
dehors de toute religion mais en lien avec un instinct millénaire, malheureusement corrompu dans
nos sociétés occidentales actuelles mais encore très vivace sur d'autres continents. Le parti pris a
été de réunir des créateurs, de générations différentes, susceptibles d'incarner valablement, dans
leurs propos, une perception critique de leur époque dans un voyage global allant de la Corée du
Sud au Bénin en passant par la République Démocratique du Congo, l'Europe et Cuba.
L'exposition tend à apporter une réflexion au spectateur sur sa relation avec le monde surnaturel
dans un contexte économique et politique global difficile. Les œuvres en appellent au sens critique
du visiteur: Pourquoi l’idée d’un monde de choses animées constitue-t-elle encore aujourd'hui une
provocation pour la société occidentale moderne ? Comment repenser notre rapport au monde
actuel en le liant à nos croyances intimes ?
Artistes présentés dans l'exposition
Sammy Baloji & Lazara Rosell Albear (République Démocratique du Congo / Cuba)
Jean-Philippe Convert (France)
Denicolai & Provoost (Italie / Belgique)
Dimitri Fagbohoun (Bénin / France)
Roberta Gigante (Italie)
Laurent Le Deunff (France)
Namsa Leuba (Suisse)
Eléonore Saintagnan (France)
Heures d’ouverture: du lundi au samedi de 9h à 17h30, nocturne le mardi jusque 21h sauf le
dimanche et les jours fériés.
Entrée libre
Visites guidées pour des groupes, des écoles ou des associations sur réservation au 02/415.86.03
Visite guidée gratuite tous les jeudis de 14h à 18h. Réalisation d'un dépliant pédagogique pour les
enfants entre 8 et 12 ans avec Belgik Mojaïk, distribué gratuitement au public.
Subsides : Pro Helvetia, Cocof, VGC, Fédération Wallonie Bruxelles, Commune de Molenbeek-St-
Jean
Programme détaillé : Projection de films 20 janvier 2015 en présence des réalisateurs
18h – SEANCE 1
Miramen de Khristine Gillard et Marco Rebuttini, Belgique, 2011, 22’
Violin Fase de Eric Pauwels, 1986, Belgique, 12’
Gnawa de Olivier Dekegel, 2010, Belgique, 43'
20h – SEANCE 2
Dankumba de Bakary Diallo, Mali, 2011, 12'
Faraw ka taama de Seydou Cissé, Mali, 2012, 11'
Les Lettres du voyant de Louis Henderson, Ghana, 2013, 40'
Miramen de Khristine Gillard et Marco Rebuttini
Miramen, du provençal, mirage. La Camargue est une île qui demande à l’homme qui l’habite de
faire corps avec elle. Ce monde de l’entre deux, entre terres et eaux, est celui de la rencontre du
fleuve, de la mer et de la communauté des étangs. C’est un monde de gestes — ceux du gardian-
centaure, du pêcheur d’étang, du tellinier, du chasseur des marais — inscrits dans les corps et les
paysages. Une relation au sauvage. Là veille la Bête.
Violin Fase de Eric Pauwels
Un solo qui se joue à deux : la danse et la caméra. Eric Pauwels fait tourbillonner son objectif
autour du corps d'Anne Teresa de Keersmaeker. Ce que l'on voit, ce n'est pas une structure
chorégraphique géométrique et minimaliste, c'est une femme possédée, qui baigne dans sa sueur
et explore les limites de l'épuisement physique. Dans ce documentaire en quatre prises
ininterrompues, Pauwels est constamment dans la recherche de l'essence, de l'âme du cinéma. La
caméra est également poussée dans ses retranchements, sa propre transpiration, ses difficultés.
Pauwels est dans la recherche plutôt que dans la beauté formelle du plan.
Gnawa de Olivier Dekegel
Tournée en Super 8, une plongée visuelle et sonore dans l’univers magico-religieux des Gnawa du
Maroc – avec rituels sacrificiels et rituels de possession – pour un film de transe.
Dankumba de Bakary Diallo
Une succession de plans qui montrent comment la superstition est en prise avec le quotidien des
habitants d'un village du Mali, questionnant le rapport à soi et à autrui.
Faraw ka taama de Seydou Cissé
Des miracles se produisent dans un village, des pierres se déplacent, mues par des coups de
fouet et nombre d'autres mystères se produisent. Le tout se termine par la vue magnifique d'un
pont. Une vieille dame y passe avec sa fille, elle lui raconte l'histoire de la construction du pont de
Markala.
Lettres du voyant de Louis Henderson
“Reprendre l’or qui nous a été volé, tel est l’objet de nos actes”.
Une fiction-documentaire sur le spiritisme et la technologie au Ghana contemporain, qui tente de
découvrir quelques vérités sur une pratique mystérieuse nommée Sakawa. Mêlant escroqueries
internet et magie vaudou, le Sakawa pourrait bien être une forme de résistance anti-néocoloniale.
ARTISTES EXPOSES
Dimitri Fagbohoun
Mama Dao est l’histoire d’une séparation, de retrouvailles et de passations. « Alors que je venais
de le devenir pour la première fois, j’ai perdu mon père. Son départ soudain ont posé moult
questions : sur la vie - sur sa vie -, sur ce qui survit, sur la mort - sur sa mort - et sur la vie après la
mort, cet au-delà dont on ne peut que pressentir qu’il existe. Mama Dao est le fruit de cette
expérience immatérielle, innommable qui est à la fois la contraction phonétique de Dahomey,
ancien nom du Bénin et une appellation allégorique de la mère du monde. C’est à la fois l’histoire
de ce voyage de cette mère terre qui nous mange, nous digère et nous régénère, et de cet esprit
qui vit dans les corps, à travers le temps et les générations. »
Mama Dao
installation (fétiche à clous, masques et cartes en céramique, néon), 2015
Adiyo
installation (vidéo et cartes en céramique), 2015
Sammy Baloji & Lazara Rosell Albear
Bare-Faced est un projet transdisciplinaire de Sammy Baloji et Lazara Rosell Albear né en 2011
d'une résidence d'artistes à l'initiative de Corban / Walter Verdin.
Cette rencontre des deux artistes l'un de la République démocratique du Congo et l'autre de Cuba
les a amenés à chercher les ponts, la filiation et les allers-retours entre leurs pays respectifs en
explorant notamment la religion animiste palo mayombe, religion afro cubaine qui trouve ses
racines dans les peuples de la côte occidentale de l'Afrique, la question de la restitution des
reliques, la quête identitaire des afro américains sur la terre de leurs ancêtres avec le combat de
boxe organisé à Kinshasa entre Mohamed Ali et George Foreman en 1974, la figure mythologique
de la Mami Wata etc...Ouvertes sur une multiplicité de références culturelles, la performance et la
vidéo édictent ainsi une transgression des assignations culturelles habituelles, produit de la longue
histoire des constructions racistes. L'oeuvre transdisciplinaire et transculturelle établit des
connexions entre l'Histoire et le Présent en soulignant la nécessité de la transmission d'une
mémoire partagée.
Bare Faced
vidéo HD, 20 mn, 2015
Eléonore Saintagnan
Eléonore Saintagnan filme les personnes qu'elle rencontre, qu'ils soient acteurs ou non. Son travail
documente la persistance et l'évolution des mythes et des croyances irrationnelles face aux
avancées des nouvelles technologies.
Pendant l'été 2015, elle a filmé la ville de Séoul, interrogeant le rapport qu'entretiennent les
habitants de la capitale de la Corée du Sud à la nature. Pour cette vidéo, elle a filmé le versant sud
du mont Bukhan, parc naturel situé au nord de la ville. Il abrite quelques temples bouddhistes, et
fait face au mont Bughak où est situé un camp d'entraînement militaire. Dans une société où,
malgré l'avancée technologique et économique spectaculaire des dernières années, les conditions
de travail et la pression sociale restent aliénantes, ce parc naturel constitue un lieu de retrait
privilégié pour les Coréens qui souhaitent décompresser de la ville. On y croise surtout des
randonneurs et des moines bouddhistes. C'est aussi le lieu de pratiques rituelles chamanistes, qui
restent très présentes dans la culture coréenne malgré l'ouverture à des religions venues de
l'extérieur. Eléonore Saintagnan y a rencontré un groupe de chrétiens de l'île de Jeju, berceau de
la mythologie chamanique, venu à Séoul pour appeler Jésus du haut de la montagne.
L'esprit de la roche
vidéo HD, 20 mn, 2015
Roberta Gigante
« Dans cette nouvelle recherche artistique, l’objet de transmission est le corps. J’enquête sur l’âme
comme l’instrument vibratoire de l’existence. L’âme comme le principe vital immanent ou
transcendent, humain, animal, végétal. En hébreu : nèphèsh et en grec : psukhê, ces termes sont
employés dans la Bible et indiquent qu’une « âme » est une personne, un animal, ou la vie dont
jouit une personne ou un animal. Nèphèsh vient d’une racine qui signifie « respirer ». Dans un
sens littéral, nèphèsh pourrait être rendu par «un respirant ». Je propose ici une recherche sur le
souffle et l’utilisation de celui-ci. Un échange dans le présent. Le souffle devient l’instrument d’une
composition en temps réel qui se traduit en chorégraphie. Les sons provoqués par mon propre
souffle sont traduits par des images qui encoderont les intensités des sons émis. Ces cellules
seront les données graphiques de la composition chorégraphique. Des simples modules qui
donneront vie à un tableau vivant, un tableau respiratoire »
Aria
Installation, 2015
Laurent Le Deunff
Son travail se focalise sur la sculpture faite main et sur des questions ancestrales d'animalité,
d'archaïsme, de rituel, tout en portant un regard ironique sur certains des travers de notre époque.
S’inspirant de ces étranges objets citadins que sont les arbres à chat, destinés à éveiller l’instinct
de chasseur de félins d’appartements, Laurent Le Deunff crée une construction abstraite in situ
dans la cour de la Maison des Cultures. Dénuée de toute fonction, conçue en agençant des
bûches de bois récupérées, elle dessine des circulations dans l’espace, et, non sans humour, la
quête hypothétique d’un retour à la nature. Un ensemble de sculptures en terre cuite de
dinosaures nous emmène quant à lui dans une sorte de bestiaire préhistorique fantasmé.
Arbre à chat, bois, 220 cm, 2015
Sans titre, Sculptures en terre cuite, tailles diverses, 2015
Namsa Leuba
Depuis 4 ans sa recherche porte sur l’identité africaine à travers le regard occidental.
« Ce projet s’inscrit dans une recherche anthropologique commencée au cours d’un voyage en
Guinée Conakry, en 2011. Je me suis intéressée à la cosmogonie africaine dans le but d’entamer
un dialogue avec mes origines. » Arpentant la Guinée Conakry et l’Afrique du Sud, Namsa Leuba a
assisté à diverses cérémonies religieuses. Celles avec lesquelles elle s’est sentie en résonance lui
ont servi de base de travail, et ont conditionné le choix des modèles. « Mais les Africains n’ont pas
le même rapport au temps que les Européens. Il faut souvent patienter une journée entière avant
de pouvoir prendre une photo, quitte à devoir s’adapter à la lumière. Il s’agit aussi d’affronter des
réactions parfois violentes, ma démarche étant considérée par certains comme sacrilège. » Il faut
dire que Namsa Leuba, fascinée par les « fétiches » et leur charge mystique, entend justement les
désacraliser « en les immortalisant dans une composition à l’occidentale. Ce sont deux identités
en lutte permanente que j’essaie de réconcilier dans une forme de syncrétisme culturel, qui
interroge au passage l’ambiguïté de l’ethnocentrisme ».
Ya Kala Ben
photographies sur bâches, 320 x 230 cm, 2011
Denicolai & Provoost
Le 12 février 1989, l’année de la chute du mur, un cachalot échoua sur la plage de Saint-André à
Koksijde, sur la côte Belge. Il fut l’objet d’une ample récupération politique, médiatique, touristique,
commerciale et même religieuse. 100.000 curieux vinrent se rapporter à ce géant abandonné par
la mer sur le sable. Il fut baptisé Valentin de Saint-André, et fut enterré en grande pompe au bout
de trop nombreux jours d’attente, avec un office religieux, en présence des politiciens locaux, des
média et d’une nombreuse assistance. Aujourd’hui encore, son corps de 17 mètres de long, et de
40 tonnes de poids, résiste à la décomposition grâce à la terre argileuse qui, 26 ans après,
empêche la récupération de son squelette et son placement dans le Musée national de la pêche à
Koksijde. Pour Incarnation(s) cette mémoire est re-écrite, digérée et livré sous forme de récit oral
au moyen de cd’s en distribution. La forme sculpturale disparaît, au fur et à mesure que l’histoire
essaime.
Pièce sonore à écouter et à emporter, 2015
Jean-Philippe Convert
Extrait de TOUT SAUF UN ESCLAVE à paraître dans le catalogue de l'exposition
Ni chrétiens ni musulmans ni bouddhistes ni hindouistes ni confucianistes. Les animistes
n'appartiennent à aucune des grandes religions. Dis comme cela, l'animisme n'est qu'un grand
fourre-tout: on y met tout ce qui n'entre pas ailleurs. On dit alors qu'il s'agit d'une croyance «
primitive »: la croyance que des entités naturelles et surnaturelles non humaines, comme par
exemple un chien ou un arbre ou une voiture, possèdent une « âme » et des intentions semblables
aux miennes. Mais ce n'est pas très éclairant. Le fait d'attribuer des qualités humaines à des êtres
non humain est un trait commun à toutes les religions, qu'elles soient ou non animistes. En fait, il
faut savoir ce que l'on entend par croyance. On peut croire en la vérité de quelque chose comme
ce saint qui se levait chaque jour bien avant l'aube et qui priait Dieu pour que Dieu fasse,
aujourd'hui encore, lever le soleil. Puis dès l'aurore apparue, il priait Dieu pour le remercier d'avoir
accédé à sa prière. Mais une nuit, pris d'un sommeil de plomb, le saint oublia sa nocturne prière.
Quand il se réveilla, le soleil était déjà très haut au-dessus de l'horizon. Alors, après un instant de
désarroi, le saint se mit en prière pour remercier Dieu qui, malgré la coupable négligence de son
serviteur, avait quand même fait lever le soleil.
Ce saint est animé d'une croyance « positive » en son Dieu. Il appartient aux religions du livre qui
ont développé une réflexivité qui fait qu'il existe des « articles de foi ». Dieu ne saurait être
négligent et si le saint veut rester membre de la communauté des « croyants », il a besoin de
réaffirmer constamment sa foi. En fait, ce saint est un grand rêveur de l'Ordre éternel. Et
l'expérience du monde n'est qu'un voile lui dissimulant la vérité de son rêve.
Il peut y avoir une autre forme du « croire »: adopter une attitude d'acceptation face à un fait ou
une idée. On peut avoir l'habitude de se lever chaque matin avant le lever du soleil et ne pas se
sentir coupable le jour où on oublie de le faire. On peut croire que le fait de ne pas s'être levé
comme d'habitude avant le lever du soleil n'est pas une faute mais une expérience vécue. Un
indice. On peut croire que le soleil aujourd'hui, contrairement à hier, s'est levé avant moi et que par
là il veut me dire quelque chose. Cet indice me permet d'inférer la présence d'un esprit, l'esprit du
soleil, avec lequel je peux entrer en communication.
(...)