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1 © Éditions Belin/Éditions Gallimard, 2009. LIVRET PÉDAGOGIQUE Dix-sept ans, un bel âge ? Pour Emma, c’est tout le contraire : en quelques mois, elle perd sa grand-mère, quitte son amoureux, vole au supermarché. Elle maigrit beaucoup. Volontairement. Pourquoi ? Elle-même ne le sait pas vraiment. Tout bascule le jour où elle découvre un vieux journal intime dont la lecture l’entraîne dans une douloureuse enquête sur le rôle de ses grands-parents pendant la Seconde Guerre mondiale… ISBN 978-2-7011-5256- 1 224 pages — 5 Arrêt sur lecture 1 p. 41-46 Un quiz pour commencer p. 41-42 Pourquoi son père vient-il chercher Emma au supermarché ? Parce qu’elle a essayé de voler des marchandises. Comment réagit-il quand il la retrouve ? Il ne lui parle pas. Que fait Emma de retour chez elle ? Elle mange une boîte de nourriture pour chat. Que voit Emma dans son rêve ? Une chambre éclairée. De quelle origine était la grand-mère d’Emma ? Polonaise. En 1942, pourquoi Jacques Desroches s’engage-t-il dans la guerre ? Il part se battre aux côtés des Allemands. De qui Karl Frank est-il le nom de clandestinité ? De Jacques Desroches. Sobibor Jean Molla Notes, présentation et dossier par Marianne Chomienne 3 e R e c o m m a n d é p o u r l a c l a s s e d e

n d cla m a o 3 e s e s de c e R Sobibor Jean Molla · où elle découvre un vieux journal intime dont la lecture l’entraîne dans une douloureuse enquête sur le rôle de ses grands-parents

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L I V R E T P É D A G O G I Q U E

Dix-sept ans, un bel âge ? Pour Emma, c’est tout le contraire :

en quelques mois, elle perd sa grand-mère,

quitte son amoureux, vole au supermarché.

Elle maigrit beaucoup. Volontairement. Pourquoi ?

Elle-même ne le sait pas vraiment. Tout bascule le jour

où elle découvre un vieux journal intime dont la lecture

l’entraîne dans une douloureuse enquête sur le rôle

de ses grands-parents pendant la Seconde Guerre mondiale…

ISBN 978-2-7011-5256- 1

224 pages — 5 €

Arrêt sur lecture 1p. 41-46

Un quiz pour commencer p. 41-42

� Pourquoi son père vient-il chercher Emma au supermarché ? Parce qu’elle a essayé de voler des

marchandises.

� Comment réagit-il quand il la retrouve ? Il ne lui parle pas.

� Que fait Emma de retour chez elle ? Elle mange une boîte de nourriture pour chat.

� Que voit Emma dans son rêve ? Une chambre éclairée.

� De quelle origine était la grand-mère d’Emma ? Polonaise.

� En 1942, pourquoi Jacques Desroches s’engage-t-il dans la guerre ? Il part se battre aux côtés

des Allemands.

� De qui Karl Frank est-il le nom de clandestinité ? De Jacques Desroches.

SobiborJean Molla

Notes, présentation et dossier par Marianne Chomienne

3e

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dé pour la classe de

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Des questions pour aller plus loin p. 42-43

☛ Étudier la mise en place du récit

Un mélange de voix� Les premières pages (p. 11-14) font-elles partie du roman ? Que remarquez-vous d’étrange dans leur présentation ? Les pages 11 à 14 se situent avant le premier chapitre et ne comportent aucun intitulé initial. Elles font partie du roman car les personnages qui y apparaissent sont ceux du roman. Mais elles ont un statut ambigu : elles constituent une ouverture, tout en se situant hors du récit. Le traitement du temps dans ces pages confirme ce statut : il s’agit à la fois d’une action qui commence (voir le premier mot du texte, « Aujourd’hui ») et d’une fin comme le montre la fin de la phrase, « j’ai vomi pour la dernière fois ». De plus, deux époques et deux récits s’entremêlent sans que l’on comprenne leur rapport — le dernier moment du roman, la résurrection d’Emma, y côtoie l’origine historique de sa maladie, l’assassinat d’Eva et Simon en 1943 ; le passage se situe donc à la fois après et avant l’ensemble du récit, il en est en même temps la conclusion et l’introduction, signe d’un temps perturbé qui est celui d’Emma.

� Que sait-on du narrateur des deux premiers chapitres ? Servez-vous des informations données dans les pages 15 à 29 pour dresser sa carte d’identité (nom, âge, portrait physique, caractère, composition de sa famille, etc.). Le narrateur est Emma Lachenal, jeune adolescente (bientôt dix-huit ans) malade (elle est anorexique-boulimique). Son physique se caractérise par une maigreur extrême (« mes joues creuses, mes yeux cernés, mon corps squelettique » ch. 1, p. 15). On sait aussi qu’elle est blonde comme Eva (ch. 2, p. 28). L’entrevue avec le directeur du supermarché la montre dure, sur la défensive, provocatrice, mais elle est aussi mal à l’aise et fragile. Sur sa famille, on retient qu’elle appartient à la bourgeoisie : son père est médecin et sa mère très attachée aux codes de la bonne société provinciale ; sa grand-mère quant à elle est une musicienne d’origine polonaise.

� Relevez les phrases interrogatives dans les pages 11 à 14. Analysez le recours à l’interrogation dans ce début de roman : qui pose ces questions, à quel sujet ? Quelles questions reçoivent des réponses, lesquelles n’en reçoivent pas, pourquoi ? On peut relever quatre types de questions :— des questions sur la vérité du récit ;« Les faits se sont-ils passés exactement comme je vais les relater ? » (p. 12)« Mais est-ce ce qui importe en définitive ? » (p. 12)— des questions sur le mari d’Eva ;« Était-il malade ? […] Et qui a pleuré sur lui ? » (p. 13)— des questions sur l’arrivée à Sobibor ;« Ont-ils seulement su le nom de ce lieu ? […] Faisait-il beau, ce jour où ils sont morts ? » (p. 13)— une question sur soi.« Qu’aurais-je fait, moi ? » (p. 13)Emma se pose des questions sur la déportation des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. La seule réponse formulée (« J’en doute fort. ») exprime un doute sur la véracité du récit et suscite une deuxième question (p. 12, l. 24). L’absence de réponses renvoie à la volonté des nazis de supprimer les traces de l’exter mination et au risque que ces victimes dont il ne reste plus ni témoignage ni trace tombent dans l’oubli.

� Dans les trois premiers chapitres, quels autres personnages prennent la parole pour raconter leur histoire ? Quelle forme l’auteur donne-t-il à ces prises de paroles ? Dans les trois premiers cha-pitres, deux autres personnages prennent la parole pour raconter leur histoire :— Mamouchka, la grand-mère d’Emma qui évoque son passé polonais, soit consciemment soit incons-ciemment lors de son rêve. Ce récit est oral, sous forme de dialogue avec sa petite-fille.— Jacques Desroches, qui écrit son journal pour sa mère. C’est un récit écrit et fait au jour le jour.

� Faites la liste des personnages qui restent silencieux ou refusent de parler dans le début du roman. Expliquez leur silence quand c’est possible. Dans le début du roman, les personnages silen-cieux sont :— Eva, son mari et Simon, êtres privés de parole par la bestialité nazie ;— le père d’Emma qui ne lui dit rien sur ses actes ;— la grand-mère d’Emma qui refuse de parler de toute une part de son passé et se réfugie dans le silence après son rêve.

Un mélange d’époques et de lieux� Relevez les indices qui permettent de situer Emma dans le temps et l’espace : s’agit-il d’un monde passé, actuel ou à venir ? L’histoire d’Emma commence dans un supermarché puis dans des

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lieux de son quotidien (chez elle à Angoulême, chez ses grands-parents). Tous les indices convergent pour désigner le monde actuel (supermarché, vigile, clinique psychiatrique, etc.).

� Dès le titre du roman, des lieux que ne connaît pas Emma sont évoqués. À quel(s) personnage(s) du roman sont-ils liés ? Le titre du roman évoque Sobibor, un camp d’extermination en Pologne. Le nom du camp est lié à trois personnages :— Eva Hirschbaum qui y est assassinée ;— Mamouchka qui dévoile ce nom malgré elle dans son rêve et révèle ainsi qu’elle y a vécu ;— Jacques Desroches, envoyé par les nazis pour travailler à Sobibor.

Au chapitre 2, montrez qu’Emma effectue un retour en arrière dans l’histoire qu’elle raconte : à quelle époque la ramène-t-il ? Ce moment est-il important pour l’histoire de la narratrice ? Le retour en arrière ramène à la maladie de sa grand-mère, un an auparavant : le paragraphe qui ouvre la page 24 évoque un passé révolu, une époque d’avant la tempête, le plus-que-parfait, temps de l’antériorité dans le passé, fait son apparition dans le récit d’Emma pour rappeler la progression de la maladie. Celle-ci est donnée comme le déclencheur de la maladie d’Emma, la date à partir de laquelle son aspect physique et son caractère ont changé. Ce moment est donc très important pour l’histoire de la narratrice.

Retrouvez l’ordre chronologique des événements racontés dans ces premiers chapitres et placez-les sur un axe chronologique semblable à celui ci-dessous. (Vous préciserez les pages du roman sur lesquelles vous vous appuyez.)

Départ de J. Desroches dans

la LVF (p. 30)

J. Desroches recruté pour Sobibor

(p. 37)

Assassinat d’Eva et de Simon

(p. 12)

Maladie de Mamouchka

(p. 24)

Vol au supermarché

(p. 15)

Dernier vomissement

(p. 11)

20 janv. 42 10 févr. 42 Printemps 43 Il y a un an [2 jours avant] Aujourd’hui

� Quelles sont les deux époques auxquelles se déroulent les événements racontés ? Quels per-sonnages, quels objets permettent de faire le lien de l’une à l’autre ? Les événements racontés se déroulent de nos jours et pendant la Seconde Guerre mondiale. Le lien entre les deux époques se fait, d’une part, par la grand-mère d’Emma et, d’autre part, par le journal de Jacques Desroches.

� À quelle occasion le passé historique fait-il irruption dans la vie d’Emma ? Quels sentiments res-sent-elle lors de ces premières révélations ? C’est lors de la maladie de Mamouchka que le passé fait irruption dans la vie d’Emma : la vieille dame laisse échapper des noms surprenants pour sa petite-fille mais que cette dernière ne peut que reconnaître. Le lecteur sait que ce ne sont pas des délires, mais des vérités que l’inconscient de la malade fait resurgir. Emma éprouve de la surprise, de la déception et de la tristesse d’apprendre que sa grand-mère lui a menti.

Une plongée dans l’abjection

Sur quelle image s’ouvre le roman ? Relevez les mots appartenant au champ lexical de la mala-die et de la souffrance physique (p. 11-13 et 19-24). De qui ces termes décrivent-ils la souffrance ? Le roman s’ouvre sur une scène de vomissement. Le champ lexical de la maladie et de la souffrance est d’abord utilisé pour décrire la maladie d’Emma :— « j’ai vomi », « hoquet », « brûlure acide », « lacérant », « épuisée », « douloureuse » (p. 11) et égale-ment « j’ai vomi », « ça m’a fait mal », « spasmes violents », « douleur » (p. 19).Ce champ lexical réapparaît ensuite pour décrire les souffrances d’autres personnages :— « épuisement », « douleur », « maltraité », « souffrances », « pleurs », « cris » (p. 12-13) : souffrances des déportés ;— « tumeur », « maigrissait », « vomissait », « cancer », « fatigues » (p. 24) : maladie de Mamouchka.On pourra remarquer l’expression du vide qui revient à chaque fois.

� Quelle est la date à laquelle Jacques Desroches commence son journal ? Est-ce une date impor-tante dans la chronologie de la Seconde Guerre mondiale ? Le journal de Jacques Desroches com-mence le 20 janvier 1942 : c’est la date de la conférence de Wannsee réunissant une quinzaine de dignitaires nazis et d’officiers de la S.S., au cours de laquelle Reinhard Heydrich expose les modalités de la « solution finale de la question juive ». Le journal de Jacques Desroches commence donc symbo-liquement le jour-même de la décision de l’extermination massive des Juifs.

� Jacques Desroches est guidé dans son cheminement par deux personnages importants pour lui : son père et Konrad von Lebbe. Expliquez qui ils sont à partir des indices glissés dans les premières pages de son journal (chapitre 3). Les deux guides de Jacques Desroches sont son père, collabora-tionniste tué par les Résistants, et Konrad von Lebbe, dignitaire nazi important puisqu’il a participé à

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l’extermination des handicapés (opération T4) et qu’il fait partie des officiers placés en clandestinité pour mettre au point la solution finale ; c’est un personnage inventé par Jean Molla.

� Quels sont les personnages historiques cités dans les premières pages du journal de Jacques Desroches ? Présentez chacun d’entre eux en quelques phrases. Dans les premières pages du journal de Jacques Desroches, on trouve des personnages majeurs de la Seconde Guerre mondiale : Staline pour la Russie ; les Français Carrel, Doriot, Darnand et Mayol de Luppé, fervents collaborateurs des nazis ; les dirigeants allemands Rommel, important chef militaire, et Himmler, chef de la Gestapo ; enfin, les penseurs auxquels se réfèrent les nazis et les antisémites (Gustave Le Bon, Gobineau, Schopenhauer, Drumont, Vacher de Lapouge).

� Relevez les mots appartenant au champ lexical des sentiments dans les pages du journal de Jacques Desroches. Que nous apprennent-ils sur ce personnage ? On peut relever en particulier les mots suivants : « plaisir », « empressement », « enthousiasmé », « admirer » ; « impressionné », « nous enorgueillir », « amour-propre », « galvanisé », « fierté » ; « énervement », « surprise », « abasourdi » (ch. 3). Les sentiments évoqués sont l’admiration pour les nazis, la fierté de partir se battre à leurs côtés, mais aussi l’étonnement face à ce que les nazis sont en train d’entreprendre.

� Le nom de « Sobibor » apparaît à plusieurs reprises dans ces premières pages (p. 11, 13, 27, 28, 29 et 40). Qui prononce ce nom à chaque fois ? Quel sentiment domine dans chacune de ces évocations ? Trois personnages prononcent le nom de Sobibor : la narratrice, Emma (p. 11, 13, 28, 29), sa grand-mère (p. 27) et Jacques Desroches (p. 40). Quand Emma prononce ce nom, elle est sous le choc de ce qu’elle vient d’apprendre ; elle ressent donc de l’incompréhension et du dégoût. Pour Mamouchka, c’est une volonté de fuir, un rejet violent du lieu et de ce qu’elle y voit. À cela s’opposent la curiosité et l’impatience de Jacques Desroches.

De la lecture à l’écriture p. 45-46

Des mots pour mieux écrire

Sentiment Citation justificative2 autres mots ou expressions

pour dire ce sentiment

Effroi « Ses yeux se sont attardés sur mes mains et il a réprimé un frisson. » (p. 15)

Inquiétude, crainte

Déception « J’attendais qu’il me parle, qu’il crie, qu’il m’engueule. J’aurais voulu qu’il me demande pourquoi j’avais volé, si j’avais fait exprès de me faire prendre, si je regrettais. Il ne m’a pas interrogée. Il n’a rien dit. » (p. 18-19)

Frustration, attente

Mépris « Ma mère a pris l’air d’une grosse volaille idiote. » (p. 22) Rejet, honte

Nostalgie « C’était il y a un an, j’avais seize ans et demi, pas mal de kilos en plus. J’étais amoureuse. Mamouchka était toujours vivante et je ne connaissais pas encore la violence qui se cachait en moi. » (p. 24)

Regret, tristesse

Admiration « L’Allemagne nous montre la voie vers l’avenir. Comment ne pas être fasciné par l’ordre, la discipline, l’énergie incroyable de ce peuple ? » (p. 33)

Fascination, vénération

Fierté « J’aurais mauvaise grâce à taire que ces paroles ont délicieusement flatté mon amour-propre. » (p. 36)

Orgueil, arrogance

� Champ lexical de la surprise et de l’étonnement.

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Arrêt sur lecture 2p. 74-79

Un quiz pour commencer p. 74-75

� D’après ce qu’il dit, où le grand-père d’Emma a-t-il rencontré sa femme ? Dans une ferme en Allemagne.

� Pourquoi le couple des grands-parents semble-t-il une figure idéale ? Leur amour a été très fort.

� Qui a vu en premier qu’Emma était malade ? Julien.

� Comment Emma juge-t-elle son corps anorexique ? Elle l’aime, il est le signe de sa maîtrise sur elle-même.

� Quels rapports Emma entretient-elle avec ses parents ? Elle juge sévèrement sa mère et s’est éloignée de son père.

� Comment le grand-père d’Emma réagit-il quand elle évoque Sobibor ? Il réagit violemment et la secoue.

� Pourquoi la grand-mère d’Emma aimait-elle la grande chaconne de Bach ? C’est un morceau qui permet d’exprimer une douleur indicible autrement.

Quel souvenir Emma rapporte-t-elle en cachette de chez sa grand-mère ? Un cahier d’écolier.

Des questions pour aller plus loin p. 76-77

☛ Étudier le rôle de l’histoire familiale dans la construction du personnage d’Emma

La progression de la maladie

� Relevez dans le chapitre 4 (p. 51-56) les notations permettant de faire un portrait physique d’Emma à différents moments de son adolescence. Comment Emma explique-t-elle les différentes étapes de son évolution ?

Éléments du portrait physique Indices temporels

« menue, fine et légère » (p. 51) enfant

« mes seins ont gonflé », « mes cuisses se sont remplies, mes fesses alourdies » (p. 51) ; « fille trop grosse à mon goût » (p. 52)

puberté

« j’ai maigri », « apparition de vergetures sur ma peau » (p. 52) 13 ans (1re diète)

« j’ai de nouveau grossi » (p. 52) ; « kilos superflus », « un peu ronde », « bourrelets » (p. 53)

2 ans après, un beau jour d’avril

« j’ai minci », « svelte » (p. 53) ; « mes seins se sont effacés, mon visage s’est creusé », « filiforme », « maigre »,

« bras grêles », « poitrine creuse », « corps efflanqué », « je m’étais légèrement arrondie » (p. 55)

automne, fin octobre

Emma a du mal à accepter l’adolescence et le passage à un corps adulte au moment de la puberté. Elle cherche d’abord à cacher ses formes en grossissant. Puis elle entame un premier régime, trop brutal, marquant son corps. Elle se remet ensuite à grossir jusqu’à la remarque de son petit ami, deux ans plus tard. En peu de temps, elle maigrit d’abord pour plaire, puis par goût de la maîtrise de soi qu’elle y voit ; c’est là que se déclenche la maladie à proprement parler.

� Quel regard Emma porte-t-elle sur son corps anorexique dans les chapitres 6 et 7 ? Justifiez votre réponse en relevant les marques du jugement qu’elle porte sur elle-même. Le regard d’Emma est un regard positif, valorisant. Le vocabulaire est mélioratif : « perfection », « victoires », « combat »

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(p. 63) ; « forme nette », « vifs et brillants », « mince », « courbes bien marquées », « merveilleuse fer-

meté », « élégantes », « arrondi parfait », « épuré », « belle » (p. 67-68). On perçoit aussi de la fierté

quand elle évoque sa maîtrise d’elle-même : « Ce corps, c’est moi qui l’ai façonné, qui l’ai épuré. Je l’ai

corrigé, domestiqué, plié à ma volonté. Assujetti. » (p. 67-68).

� Quels autres personnages réagissent en voyant le corps d’Emma ? Quel regard portent-ils sur

lui ? La grand-mère d’Emma est horrifiée (p. 55), cela la prive même de parole, elle ne trouve pas

les mots pour décrire ce nouveau corps. Julien, lui aussi, est opposé à cette évolution : il est d’abord

question de ses mains « hésitantes » et d’« inquiétudes » (p. 55) puis on peut lire une certaine répul-

sion devant les « os saillants [qui] le dissuadent de [me] dispenser ces caresses » (p. 63) ; c’est lui qui

nomme la maladie et alerte les parents d’Emma.

� Le récit est rétrospectif : Emma raconte des événements passés. Les chapitres 4 à 8 portent-ils

des traces du regard qu’elle jette a posteriori sur elle-même ? Comment se juge-t-elle alors ? Le

récit porte la trace du regard que jette a posteriori Emma sur cette période de sa vie dans maints

indices critiques : « c’est devenu ma drogue », (p. 54), « Je n’avais évidemment pas conscience que la

situation m’échappait… » (p. 55). Celle qui croyait maîtriser son corps comprend qu’elle se trompait,

qu’elle n’en était pas maître. Elle se rend compte qu’il s’agissait en fait d’une maladie. Elle souligne

aussi son aveuglement et ses erreurs : « Je n’avais pas encore compris que ne plus manger signifie

très exactement souhaiter se mettre à l’écart. » (p. 54) ; elle parle ainsi d’« une sorte de ghetto que

l’on s’invente », d’« un mélange pervers d’aveuglement et de ravissement », d’« une forme de distinc-

tion absurde » (p. 54).

Le poids du silence

� Faites la liste des personnages qui se taisent ou cachent quelque chose aux autres dans les cha-

pitres 4 à 8 ? Quels personnages échappent à ce silence ? Les personnages qui se taisent ou cachent

quelque chose sont nombreux : la grand-mère cache ce qui s’est passé à Sobibor, refuse de dire ce

qu’elle sait de Jacques Desroches et d’Eva Hirschbaum, elle tait toute référence à la déportation ; le

grand-père tait ce qu’il sait du passé de sa femme ; Emma tait sa maladie, ses crises de boulimie et de

vomissements ; le père d’Emma se tait tout le temps. Seuls la mère d’Emma et Julien semblent doués

de parole : la mère de façon négative (Emma parle de « jacasseries » p. 51, relire aussi sa réaction à la

maladie d’Emma p. 21) ; Julien de façon plus positive : il est le seul dont la parole soit un peu efficace,

il est celui qui révèle la maladie et avertit ses parents.

� Pourquoi la grand-mère ne finit-elle pas sa phrase devant la maigreur d’Emma (p. 55) ? Quelle

est la fin attendue de cette comparaison ? La grand-mère d’Emma ne finit pas sa phrase parce qu’elle

maîtrise encore un peu sa parole et ne veut pas laisser échapper d’informations sur son passé. La

maigreur d’Emma provoque une réaction d’horreur. Maigre comme un déporté serait la comparaison

attendue, tant les portraits d’Emma s’arrêtant sur les os saillants, les côtes dessinées… rappellent les

photos des prisonniers des camps libérés par les Alliés.

� Comment Emma avait-elle interprété l’interruption de cette comparaison ? Quelle autre raison

peut-on donner au silence de la grand-mère ? Pour Emma, sa grand-mère s’est interrompue parce

qu’elle n’a rien trouvé de rapprochant (soit du fait de sa mémoire vacillante, soit du fait de l’extrême

maigreur d’Emma). Mais le « comme si » souligne que la raison n’est sans doute pas là. En réalité, elle

ne peut pas finir sa phrase sans dévoiler son secret et rappeler son passé.

Quels noms prononcés par Emma font réagir violemment son grand-père ? Dans les pages 60-61,

quelles informations donne le grand-père sur le lieu et les personnes évoquées par ces noms ?

Les noms prononcés sont ceux de Jacques, Eva Hirschbaum et Sobibor. Avec eux viennent les mots

« camp de concentration », « camp d’extermination », « juive », « collaborateur », « nazis », « assassi-

nées ». Le grand-père cherche à éluder les questions d’Emma mais donne quelques informations sur

Sobibor et sur la vie de Mamouchka avant 1942.

Quels arguments donne le grand-père pour ne pas raconter à Emma le passé de sa grand-mère ?

Relevez les phrases qui contiennent ces arguments et reformulez-les. Le grand-père justifie son

silence en se mettant hors de cette histoire : il s’agit de gens rencontrés par Anna avant 1942, avant

leur rencontre, qui est datée de 1943 ; il n’est donc pas témoin ou personnage de ce moment et ne

peut le révéler puisque de son vivant, Anna ne l’a pas fait. « C’est son passé, il ne t’appartient pas. Ça

ne sert à rien de le remuer. Si tu ne le fais pas pour moi, fais-le pour elle, pour Mamouchka. » (p. 61) :

selon lui, ce serait la trahir que de raconter un épisode de sa vie qu’elle n’a pas voulu faire connaître

aux autres de son vivant.

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L’histoire des grands parents, un conte des origines (p. 47-51)

� Relevez les termes appartenant au champ lexical de l’invention dans les pages 47 à 51. On

peut relever les termes suivants : « romans », « mythe fondateur », « raconté », « prétendait », « rêvé »,

« image », « exemplaire ».

� Que sait-on de la vie des grands-parents avant leur rencontre ? Cela correspond-il à une situation

initiale de conte ? La jeunesse du grand-père, avant qu’il rencontre Anna, le place sous le signe du

manque : manque familial, il devient orphelin, n’a qu’une tante qu’il perd pendant la guerre ; manque

financier, il vient d’une région sinistrée, celle des mines du Nord de la France ; manque social, il ne fait

pas d’études pour pouvoir travailler le plus tôt possible. C’est donc bien un héros possible pour un

conte. De son côté, Anna est jolie, musicienne, on sait qu’elle vient d’un milieu plus aisé (p. 50), rappel

peut-être de la princesse des contes. Elle aussi connaît des manques : elle est séparée de sa famille, de

son pays, isolée dans une ferme allemande. On est donc bien dans une situation de conte.

Quels sont les différents obstacles qu’ils ont rencontrés ? Les obstacles sont historiques et poli-

tiques : le travail forcé en Allemagne, la fuite en 1945, la séparation par les Alliés, le jugement de Paul

Desroches qui le blanchit des accusations de collaboration qui pesaient sur lui, le renvoi d’Anna aux

mains des Soviétiques, l’évasion et la marche d’Anna jusqu’en Belgique, les retrouvailles des deux

amoureux.

� Décomposez et expliquez le sens de l’adjectif « invraisemblable » qui caractérise la fuite d’Anna

pour retrouver son fiancé. Sur quel aspect de cette histoire cet adjectif insiste-t-il ? L’adjectif

« invraisemblable » est formé sur les radicaux « vrai » et « sembl » précédés du préfixe privatif « in- »

et suivis du suffixe « -able », marquant la possibilité : il désigne ce qui ne peut pas sembler vrai et

insiste sur l’aspect construit de cette histoire.

� Quelle est la situation finale de ces deux personnages ? Répond-elle aux exigences du conte ?

La situation finale de ces deux personnages est optimiste et répond aux exigences du conte : après

leurs retrouvailles, les deux amoureux connaissent une ascension sociale grâce aux études du grand-

père, financière et familiale (3 enfants). Les manques de la situation initiale ont été comblés : de sans

famille, ils sont devenus les racines de leur propre famille et d’apatrides, ils sont devenus des notables

de la région où ils se sont réfugiés.

� Quels sont les différents temps utilisés dans ce passage ? Justifiez leur emploi. Les temps

employés sont essentiellement le plus-que-parfait, temps du retour en arrière, et le passé simple.

Ce deuxième temps domine dans l’histoire des grands-parents depuis leur fuite loin de la ferme alle-

mande jusqu’à leurs retrouvailles en Belgique. C’est le temps du récit littéraire par excellence, un

temps qui établit une distance entre le narrateur et le récit qu’il fait, par opposition avec le passé

composé qui établit des liens entre le narrateur et son récit. Tout dans cette histoire (vocabulaire,

composition, temps verbaux) permet de mettre le récit de l’histoire des grands-parents à distance,

d’en faire un récit fictif.

De la lecture à l’écriture p. 78-79

Des mots pour mieux écrire� C’est le champ lexical du mensonge : on peut penser aussi à dissimuler, inventer, tromper, inven-

tion, mythomanie…

D E GE F I L I F O R M EC F O EH L N LA M A I G R I ER N IN Q L C R E U S E

M E N U IE G

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Du texte à l’image p. 79

☛ Meyer, Portrait d’une adolescente, 2008. (Image reproduite en couverture.)

Lire l’image� Observez le portrait reproduit en couverture et décrivez avec précision le personnage que vous

voyez. C’est une jeune fille, à peine entrée dans l’adolescence, aux cheveux blonds, aux yeux verts.

On n’oubliera pas de souligner la maigreur visible, les os saillants et les veines du cou.

� Quels sentiments peuvent être lus dans l’expression de son visage ? On peut penser à différents

sentiments selon que l’on fait plutôt attention au regard ou à la bouche : de la satisfaction, du défi, du

désarroi, de la tristesse.

� Que voit-on du décor ? Le décor se limite à un rideau fleuri, flou. On a un portrait qui peut faire

penser à une photo d’identité par son cadrage mais aussi à une photo prise dans un lieu intime grâce

au motif du rideau.

Comparer le texte et l’image� Le modèle est-il bien choisi selon vous pour représenter Emma ? Oui, le modèle est bien choisi

de par son âge, la couleur des cheveux (on sait qu’Emma est blonde) et les yeux clairs, les indices de

maigreur, l’ambivalence du regard, mais le visage n’est pas très creusé, ni cerné.

� Quel passage précis du texte ce portrait pourrait-il illustrer ? Pourquoi ? Ce portrait pourrait

illustrer le passage du chapitre 7, après le bain : la jeune fille a les cheveux mouillés et ce pourrait être

l’illustration du moment où Emma s’observe dans la glace et se trouve belle.

À vous de créer� Et si elle se mettait à parler ? Rédigez une dizaine de lignes dans lesquelles cette jeune fille

s’adresse à celui ou celle qui la regarde. Pour réussir cet exercice, il faut définir à qui la jeune fille

parle : à elle-même, si c’est elle qu’elle regarde, à un des personnages du roman ou au lecteur. Le

message qu’elle adresse est fonction de l’interlocuteur : elle peut s’interroger sur la conduite à tenir,

prendre à partie un de ses parents sur leur aveuglement, appeler à l’aide…

Arrêt sur lecture 3p. 123-129

Un quiz pour commencer p. 123-124

� Quand il part à la guerre, que redoute Jacques Desroches ? Il craint de mourir au front.

� Quand Jacques Desroches arrive-t-il à Sobibor ? Pendant la construction du camp.

� Que manque-t-il dans le camp 3 de Sobibor ? Les baraquements des prisonniers.

� Quel passé commun partagent les compagnons nazis de Jacques Desroches ? Ils ont participé à

une opération d’extermination de handicapés.

� Que pense Jacques Desroches des premières semaines à Sobibor ? Il est déçu : c’est un endroit

où il ne se passe rien d’important.

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� Quel est le premier événement qui déstabilise Jacques ? La rencontre d’un vieil homme juif conscient de sa mort prochaine.

� Quelles sont les premières pages arrachées du journal ? Le moment où il apprend que Sobibor est un camp d’extermination.

Sur quel événement se termine le journal de Jacques Desroches ? L’annonce de la mort de Jacques.

Que trouve Emma dans la couverture du journal ? Des photographies.

Des questions pour aller plus loin p. 125-126

☛ Analyser l’insertion du journal dans le récit

La description de Sobibor dans le journal de Jacques Desroches

� À partir de la description du camp datant du 21 février 1942, faites un plan de Sobibor et placez les différents éléments qui composent le camp et ses alentours : les 3 Lager, la gare, la voie ferrée, le sentier bordé de barbelés, la forêt de sapins, le village de Sobibor. Quelle partie du camp est appe-lée la Himmelstrasse ? Pourquoi est-ce ironique ? On peut trouver des plans du camp sur Internet : ils montrent la fidélité de la description qui en est faite dans le roman. Le mot « Himmelstrasse » signifie « route vers le ciel ». Ce terme est ironique car cette route ne mène pas au bonheur, mais à la mort.

� Dressez la liste du personnel de Sobibor qui apparaît dans le journal de Jacques Desroches et précisez les fonctions de chacun des personnages (ou groupes de personnages). Cherchez dans cette liste les personnages historiques. Les soldats allemands cités ont tous existé et ont tous été à Sobibor. Odilo Globocnic, sous l’autorité duquel sont tous les autres, était chef de police du district de Lublin ; il supervisa la construction des camps d’extermination de Belzec puis Sobibor avec Christian Wirth, un proche, et Richard Thomalla, responsable sur place du camp. Cette dernière fonction fut ensuite occupée par Stangl puis Reichleitner. Le personnel S.S. du camp était composé, entre autres, de Bauer, Floss, Schwarz, Barbel, Mentz, Hermann Michel, Fuchs, Gotringer, Wagner, Schüt, Gomerski, Lambert, Bolender. Lorenz Hackeholt, soldat S.S., est effectivement celui qui a conçu les chambres à gaz de Belzec et Sobibor. De même, ce qui est dit sur les gardes ukrainiens et lituaniens est conforme à la réalité historique ; parmi eux, Woronikov est connu pour sa férocité. Seuls Jacques, Anna et Von Lebbe n’ont pas d’existence historique.

� À quelle date arrivent les premiers convois de déportés ? Expliquez comment ils sont accueillis et pourquoi. Les premiers convois de déportés arrivent le 5 mai 1942. Le but de l’accueil calme et rassurant est de casser toute envie de révolte.

� Quelles scènes retiennent particulièrement l’attention dans ces pages de journal ? Parmi les scènes les plus marquantes, nous pouvons retenir les trois dates suivantes : 25 juillet 1942, le bûcher ; 22 octobre 1942, le vieil homme qui ne se laisse pas déshumaniser mais manifeste par le regard une pleine conscience de ce qui se passe ; 21 mai 1943, l’assassinat d’Eva et de Simon.

� Les faits rapportés sont-ils fidèles à la réalité ? Quelle est la part d’invention que s’est autorisé l’auteur ? Les faits sont fidèles à la réalité historique : on retrouve énormément de données histori-ques sur les lieux, les hommes, le déroulement de l’extermination (ordres, brutalité, odeurs, pluie de cendres…). L’invention se situe dans l’individualisation de certaines victimes (le vieil homme, Eva et Simon) et dans la création de trois personnages : Jacques, Anna et Konrad Von Lebbe mais tous sont crédibles et auraient pu exister.

� Qu’apporte, à votre avis, le choix du journal intime pour évoquer cette réalité ? La forme du journal intime renforce le sentiment d’authenticité, de choses vues. C’est un document, donc on lui donne d’emblée du crédit. De plus, le morcellement en jours permet de mettre en lumière certains moments forts, marquants et de taire les autres. Enfin, c’est un écrit intime, personnel qui permet de lire les événements racontés mais aussi ce qu’en pense celui qui rédige son journal.

La parole d’un des bourreaux

� Quelle est la place de Jacques Desroches dans la hiérarchie du camp ? Quel est son rôle ? Jacques Desroches a une situation à part, il est un élément étranger (par son origine, son accent, sa culture), extérieur à tout groupe constitué et un peu marginal (p. 85). Cependant, grâce à l’appui renouvelé de Von Lebbe, il est intouchable et est un élément haut placé (p. 98). Son rôle est d’abord de former les

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équipes de prisonniers, de superviser l’approvisionnement (p. 85-86), puis de tenir la comptabilité des morts, d’établir des statistiques et d’optimiser le fonctionnement (p. 92, 105-106).

Quel jugement porte-t-il sur ses compagnons ? Faites la liste des reproches qu’il leur fait et des qualités qu’il leur trouve. Il est déçu de leur aspect rustre, peu éduqué. S’il est marqué par leurs physiques (p. 94) et leur efficacité (p. 106), il leur reproche leur vulgarité (p. 85), leur brutalité (p. 90, 94), leur excès de boisson (p. 87). On peut aussi y adjoindre la critique de Eichmann (p. 92) qui rappelle le procès d’Eichmann pendant lequel celui-ci a cherché à donner l’image d’un simple bureaucrate zélé.

Relevez les termes employés par Jacques Desroches pour évoquer les Juifs qui arrivent à Sobibor. Ce vocabulaire est-il neutre ou non ? Pour désigner les Juifs qui arrivent à Sobibor, Jacques Desroches utilise les termes suivants : « prisonniers », « populations en transit », « Juifs », « personnes », « matériel humain », « les arrivants », « populations traitées », « individus », « horde misérable », « troupeau », « troupe d’homme ». Le vocabulaire est général, voire déshumanisant pour faciliter l’extermination (voir les propos de Konrad sur le fait de ne plus les considérer comme des êtres humains, p. 92).

� Comparez les deux récits de la mort d’Eva Hirschbaum en reproduisant le tableau suivant.

Récit liminaire (p. 12-14) Récit du chapitre 11 (p. 114-116)

Qui est le narrateur ? Emma Jacques Desroches

À quelle époque le récit est-il fait ?

Après son dernier vomissement. 30 mai 1943, 9 jours après l’assassinat (21 mai 1943).

Quels sont les faits importants racontés ?

— L’arrestation et l’enfermement à Westerbork ;

— le transport en train et la mort du mari d’Eva ;

— l’arrivée anxieuse ;

— l’assassinat de Simon et d’Eva.

— L’arrivée désordonnée d’un convoi ;

— l’assassinat de Simon et d’Eva sous le regard de Konrad Von Lebbe et d’Anna ;

— l’évanouissement d’Anna et sa fausse couche ;

— la découverte des corps et des identités par Anna pendant la nuit.

Qu’apprend-on sur ce qui a eu lieu avant le meurtre ?

— Les conditions de vie avant l’arrestation et la déportation ;

— le transport en train.

— La pression imposée par Von Lebbe ;

— la nationalité d’Eva et de Simon (des Juifs allemands réfugiés en Hollande depuis 1938) et la mort du mari.

Quels sont les types de phrases employés ?

Phrases déclaratives et interrogatives.

Phrases déclaratives, aucune phrase interrogative.

Certains mots trahissent-ils les sentiments ou l’opinion du narrateur ?

Vocabulaire courant voire soutenu : « sommaire », « dignité », « le terme de leur voyage », « incrédule », « cohue ». Il y a une certaine recherche du vocabulaire, comme pour rendre leur dignité à ceux à qui on a voulu l’enlever.

Vocabulaire dépréciatif : « un sinistre petit crétin », « ces imbéciles d’Ukrainiens », « comme une folle ».

Quels sont les sentiments du narrateur face à ce qu’il raconte ?

Incompréhension, compassion, pitié.

Détachement, agacement, mépris pour différents personnages.

On conclura par l’opposition des deux points de vue adoptés : d’un côté de l’incompréhension, de l’in-certitude, de la compassion, de l’autre de la dureté, de la certitude, un regard hautain et dévalorisant.

Les réactions face à l’extermination

� Relevez les différents éléments descriptifs qui concernent Von Lebbe ? Que peut-on en conclure ? Desroches insiste souvent sur l’aspect éprouvé, fatigué, amaigri de celui qui assiste à la mise en place de l’extermination des Juifs. Cela rejoint le passage au meurtre en chambre à gaz : celles-ci ont été mises en place pour faciliter le meurtre de masse et décharger les officiers et soldats de l’assassinat, devenu trop pénible à supporter (cf. 26 août 1942 p. 106).

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Quels sont les différents sentiments qu’Anna connaît à Sobibor ? Précisez pour qui (ou pour quoi) et à quel moment elle les éprouve. Anna cherche d’abord à ne pas voir, ne pas entendre ce qui se passe et demande à Jacques de la laisser en dehors de tout ça (p. 100). Elle ne change de posture qu’avec l’assassinat d’Eva et Simon, le meurtre commis sous ses yeux par Jacques la rend folle, rend la vie à Sobibor insupportable, ce qui se traduit entre autres par un refus de la nourriture (p. 115-116). Elle est aussi amoureuse, capable de bonheur, enceinte (p. 100, 111). Elle accuse Von Lebbe d’être la mauvaise influence de Jacques, repoussant sur lui les choix de l’homme qu’elle aime (p. 111-112).

� Quelles pages du journal ont été arrachées ? Que peut-on supposer sur ce qu’elles contenaient ? Les pages arrachées se situent entre le 15 avril et le 8 juin 1942 (révélations de Konrad et premiers convois) ; entre le 22 octobre et le 26 avril 1943 (effet de la honte ressentie lors de la rencontre du vieil homme juif ou de l’aspect répétitif des journées que seule vient rompre la nationalité française du convoi suivant) ; entre le 26 avril et le 30 mai 1943 (dates d’annonce de la grossesse — 27 avril — et de l’assassinat d’Eva et de Simon — 21 mai).

� Qui a pu déchirer ces pages ? Pour quelles raisons ? Anna a pu déchirer ces pages pour décharger sa culpabilité et surtout celle de Jacques : les pages arrachées prouvent qu’il est conscient de ses actes (Konrad lui apprend ce qu’est ce camp) et correspondent au moment heureux (grossesse) et au meurtre d’Eva.

� Retrouvez les passages où Emma intervient dans les chapitres 9 à 12. Quels sont les différents sentiments qu’elle éprouve ? La lecture du journal est encadrée par les interventions d’Emma (ch. 9 et ch. 12). Plusieurs coupures ont lieu : page 82, pour ne pas répéter le début du journal, déjà lu au début du roman ; page 101, pour commenter l’amour d’Anna et Jacques ; chapitre 12, après la lecture du journal ; Emma intervient aussi pour signaler les pages arrachées. Les sentiments d’Emma sont multiples : gêne, curiosité (avant la lecture), stupéfaction, incrédulité, incompréhension face au nou-veau visage de sa grand-mère qu’elle ne reconnaît pas ; hostilité, rejet de celle qui a pu vivre cela — ce rejet va jusqu’à la tentative de suicide qui clôt le chapitre 12 ; compassion pour les victimes juives.

� Au début du chapitre 12, quel type de phrase domine ? Pour quelles raisons le fait de connaître cette partie du passé de sa grand-mère bouleverse-t-il Emma à ce point ? Au début du chapitre 12, ce sont les phrases interrogatives qui dominent : Emma est déstabilisée par ce qu’elle vient d’appren-dre. Sa grand-mère n’était pas celle qu’elle croyait, or Emma a construit sa personnalité par rapport à elle et par rapport à son grand-père : « Ce qu’il y avait de solide en moi, je le leur devais. » (p. 51).

De la lecture à l’écriture p. 127-128

Des mots pour mieux écrire� Ressentiment : sentiment amer qui exprime un désir de vengeance.Condescendance : sentiment de supériorité bienveillante mêlée de mépris.Compassion : sentiment qui nous fait ressentir les souffrances des autres.Connivence : accord amical qui n’a pas besoin d’être formulé.

� a. On retrouve dans tous ces adjectifs le même préfixe privatif « in- » (« ir- » ou « il- » n’en sont que des variantes orthographiques) et le même suffixe « -able » (ou « -ible », « -uble », là encore variantes orthographiques) dont la signification est « que l’on peut » ou « qui peut être ».b. Incompréhensible, incalculable, inavouable, illisible.

Du texte à l’image p. 129

☛ Photographie de l’arrivée de déportés à Auschwitz-Birkenau en juin 1944. (Image reproduite en début d’ouvrage, au verso de la couverture, en haut.)

Lire l’image� Où se situe cette scène ? D’après cette photo, que peut-on observer à propos des wagons qui ont servi à la déportation ? La photo montre un quai de gare, au camp d’Auschwitz-Birkenau, devant des wagons qui ne sont pas des wagons de voyageurs mais des wagons plombés, sans fenêtre.

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� Qui sont les personnes photographiées ? Qu’est-ce qui permet de les identifier ? Ce sont des femmes et des enfants ; les étoiles permettent d’identifier les déportés comme des Juifs.

� Quels sentiments peut-on lire dans leurs expressions ? Les visages sont fermés, les déportés semblent s’interroger sur leur sort. Peut-être certains sont-ils soulagés d’avoir quitté les wagons.

Comparer le texte et l’image� Cette photographie a été prise à Auschwitz-Birkenau, pourrait-elle cependant illustrer l’arrivée des déportés au camp de Sobibor telle que la raconte Jacques Desroches ? Cette photographie pourrait sans doute illustrer l’arrivée à Sobibor, l’absence d’hommes dans la file des déportés photo-graphiée laisse penser qu’il y a eu, à l’arrivée du train une sélection entre les hommes d’une part et les femmes et les enfants de l’autre. Page 114, le journal de Jacques Desroches raconte comment le personnel du camp de Sobibor accueille ordinairement les déportés en séparant les hommes et en laissant femmes et enfants ensemble.

� S’il fallait insérer cette photographie dans le journal de Jacques Desroches, à quel moment précis la placeriez-vous ? Après ou avant quel événement ? Pourquoi ? On pourrait la placer page 114, pour illustrer l’arrivée des déportés telle qu’elle se déroule habituellement et à laquelle s’oppose le tri parti-culier du jour de l’assassinat d’Eva et de Simon (femmes et enfants avaient été séparés contrairement à d’habitude). On pourrait également la placer page 89, lorsque l’arrivée des convois de déportés à Sobibor est évoquée ainsi que les discours rassurants de l’Oberscharführer Hermann Michel.

Arrêt sur lecture 4p. 170-175

Un quiz pour commencer p. 170-171

� À douze ans, pourquoi Emma s’en veut-elle ? Elle croit avoir fait souffrir sa grand-mère en lui rappelant son passé.

� D’après Emma, qu’est-ce qui, en fin de compte, a déclenché son anorexie ? La découverte que sa grand-mère lui avait menti.

� Pourquoi Emma décide-t-elle de faire ce qu’on lui demande et de reprendre du poids ? Elle a peur de perdre la raison en restant à l’hôpital.

� À qui Emma révèle-t-elle qu’elle sait quelque chose que personne d’autre ne sait ? Au directeur du supermarché.

� Pourquoi Emma se montre-t-elle nue à son grand-père ? Parce qu’elle veut lui rappeler la guerre et Sobibor.

� Comment Emma connaît-elle la véritable identité de son grand-père ? Elle a reconnu son grand-père sur la photo de Jacques Desroches.

� Comment les nazis ont-ils fait disparaître le camp de Sobibor ? Ils ont replanté une forêt à l’em-placement des bâtiments.

Qu’est-ce qu’Emma dit réellement à son grand-père ? Je ne te juge pas, je te condamne.

À quoi la mort du grand-père d’Emma met-elle fin ? À ses vomissements : elle est sûre d’elle et sait ce qu’il lui reste à faire.

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Des questions pour aller plus loin p. 172-173

☛ Étudier le dénouement du roman

Le dénouement de tous les fils

� Quels sont les personnages présents ou cités dans les chapitres 13 à 19 ? Que remarquez-vous ? Les personnages cités sont Emma, ses parents, le grand-père mais aussi M. Prade, le directeur du supermarché, sa secrétaire, Julien, Von Lebbe… : tous les personnages du roman réapparaissent, un peu comme dans les dernières scènes d’une pièce de théâtre.

� Qui raconte ce qui n’est pas décrit dans le cahier de Jacques Desroches : la fin de l’histoire de

Jacques et Anna d’une part, de Sobibor et de l’armée allemande d’autre part ? Complétez le tableau

suivant en essayant de dater les événements. C’est le grand-père d’Emma qui prend la parole, c’est donc bien la suite du journal : Jean Molla conserve le même narrateur.

Histoire de Jacques et AnnaHistoire de Sobibor

et de l’armée allemande

Dates Événements Dates Événements

Juin ou juillet 1943

— Anna donne à manger aux prisonniers juifs.

— Dispute entre Jacques et Wagner : von Lebbe intervient et sauve Jacques et Anna.

— Jacques devient Paul Lachenal. Exécution du véritable Paul Lachenal. Mensonges sur la mort de Karl Frank et Jacques Desroches.

Été 1943 — Enlisement de l’armée allemande en Russie, la défaite allemande est certaine.

— Himmler fait de Sobibor un camp de concentration, qui sert d’entrepôt pour les armes et les munitions prises aux armées ennemies. Arrivée de prisonniers russes.

Deux jours après

— Départ de Jacques et Anna de Sobibor.

— Jacques, puis Anna arrivent dans une ferme allemande : période heureuse.

14 octobre 1943

— Révolte des prisonniers de Sobibor : 11 SS tués, évasion de 300 prisonniers, exécution des autres. 100 des évadés ont été repris et tués.

– Destruction du camp, une forêt a été replantée à la place pour effacer toute trace.

Mars 1945 — Jacques rencontre Von Lebbe pour la dernière fois.

— À minuit : Jacques et Anna quittent la ferme après avoir mis le feu à la grange. (Anna récupère le journal.)

Quelques mois plus tard

— Arrivée des Russes, Sobibor n’existe plus ; il n’y a qu’une jeune forêt.

— Bombardements alliés des villes allemandes.

� Dans les chapitres 13 à 19, quelles sont les différentes étapes de l’évolution de l’état de santé

d’Emma ? L’état de santé d’Emma s’améliore lentement et de façon chaotique, sa guérison est diffi-cile. Après sa tentative de suicide, Emma est hospitalisée puis fait une cure au service psychiatrique à Poitiers. Mais elle ne guérit que partiellement, elle triche pour faire croire à sa guérison. Le portrait qu’elle fait d’elle au début du chapitre 15 montre bien que la guérison n’est pas complète, de même que la remarque de son père sur sa perte de poids : « Tu recommences à maigrir, non ? » (ch. 19, p. 165). Elle a progressé cependant dans la connaissance de sa maladie : elle en identifie la cause dans le mensonge de ses grands-parents. Toutefois le dernier chapitre se termine sur ce qui était la première phrase du roman et annonce le dernier vomissement. La maladie est comme circonscrite, encerclée, maîtrisée. Les décisions que prend Emma après le départ de sa mère traduisent cette nouvelle maîtrise d’elle et de son histoire. Elle annonce aussi son retour à l’hôpital pour sortir de sa maladie sans tricher cette fois-ci.

� Comment Emma réorganise-t-elle ses liens familiaux ? Quel nouveau regard porte-t-elle sur ses

parents ? Par rapport aux premiers chapitres, les liens familiaux se sont réorganisés autour d’Emma. Elle s’est rapprochée de ses parents : le dialogue commence à reprendre avec son père et, à la fin du chapitre 19, on ne retrouve plus trace du regard péjoratif porté sur sa mère. La famille se reforme même dans ses pensées quand elle se sert du pronom personnel « nous » : « nous refermer sur ce secret », « nous avons le devoir de reprendre son nom » (p. 167).

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� Quels temps de l’indicatif sont employés dans les derniers paragraphes du roman (p. 166-167, l. 81-103) ? Donnez un exemple de chaque temps. Les temps de l’indicatif employés dans les derniers paragraphes sont le présent (« s’étire »), le passé composé (« j’ai lu ») et le futur (« je parlerai »).

� Lequel de ces temps est employé pour la première fois ? De quoi est-ce le signe ? Le futur est employé pour la première fois. C’est le signe d’un progrès vers la guérison : Emma n’est plus repliée sur le passé familial mais envisage un avenir.

La condamnation du bourreau

� Quel conseil donne le directeur du supermarché à Emma ? Suit-elle ce conseil ? Le directeur du supermarché conseille à Emma de faire appel à la justice, il lui donne même le numéro d’un juge. Mais elle ne suit pas ce conseil : elle va voir son grand-père directement en sortant du supermarché. On trouve d’ailleurs dans ses paroles ce refus de la justice : « je ne te juge pas, je te condamne » (p. 157).

Au cours du chapitre 18, quelles justifications le grand-père d’Emma donne-t-il à ses actes pen-dant la guerre ? Le grand-père d’Emma donne différentes explications concernant son comportement pendant la guerre. Pour justifier son engagement du côté des nazis, il explique : « C’était la guerre » (p. 155), « Tu ne peux pas comprendre ce qui s’est passé pendant la guerre. Tu ne sais rien de cette époque ! » (p. 157). Et pour expliquer l’assassinat d’Eva et de Simon, il déclare : « Ils refusaient d’obéir aux ordres, et puis… » (p. 159), « Ils seraient morts de toute façon. » (p. 159), « C’était comme un défi que m’avait lancé von Lebbe. Ne pas sévir aurait signifié pour tous que j’étais un lâche. » (p. 159). À aucun moment, il ne formule de regret ni même de doutes sur le bien-fondé de ce qu’il a fait.

Quels types de phrases sont utilisés dans les propos d’Emma (p. 157-160) ? Justifiez leur emploi. Les phrases interrogatives et exclamatives qui dominent montrent l’émotion d’Emma, son incompré-hension et sa colère. C’est une scène de violence tant physique que verbale, loin d’un procès raisonné et maîtrisé.

� Qu’est-ce qui semble avoir décidé le grand-père à se suicider ? Comment interpréter ce geste ? Ce qui semble avoir poussé le grand-père d’Emma au suicide, c’est la menace de la publication du cahier de Jacques Desroches dans la presse et d’un jugement par la justice rendant impossible de maintenir le secret et la réputation du couple des grands-parents, si admirés dans leur ville. Le suicide est une fuite devant cette perspective de déshonneur, il n’est en aucun cas l’aveu d’un remords ou d’une culpabilité. Il est aussi l’écho des suicides des gradés nazis à la fin de la guerre (Hitler, Goebbels, Goering, Himmler).

Écrire pour ne pas oublier

� Quelles sont les différentes actions mises en place par les nazis pour effacer les traces de l’extermination ? La volonté des nazis d’effacer les traces de l’extermination correspond à la réalité historique. Dans le roman, elle se traduit par différentes actions, dont seules sont fictives celles qui concernent le personnage de Jacques Desroches. Tout a été mis en place pour trouver une nouvelle identité à Jacques Desroches ; les derniers prisonniers ont été exécutés ; les soldats de Sobibor ont été envoyés à Trieste, en Italie, lieu d’un camp de transit, le camp de San Sabba ; les bâtiments de Sobibor ont été rasés et une forêt y a été replantée.

Au niveau individuel, Jacques et Anna ont eux aussi accompli des actes pour oublier, lesquels ? On peut relever la vie calme et tranquille à la ferme, le feu mis à la ferme et au cahier de Jacques Desroches abandonné par le grand-père, la nouvelle vie, tournée vers les autres une fois en France.

� En quoi les dispositions auxquelles pense Emma à la fin du chapitre 19 (l. 85-95) sont-elles une réponse efficace contre l’oubli ? Ce que souhaite Emma par-dessus tout, c’est ramener à la lumière des événements qu’on a voulu cacher, taire. Pour cela, elle envisage trois choses : reprendre le nom Desroches, remettre à la justice le journal de Jacques Desroches et publier son histoire. Reprendre le nom du grand-père, Desroches, c’est redonner une existence au bourreau : il a existé et a fondé une famille. Passer devant la justice, c’est signifier qu’il y a bien eu crime. Publier son histoire, c’est étendre à un plus large public la connaissance de l’histoire qu’on a voulu taire, amplifier l’écho de l’histoire retrouvée.

� D’après la postface, quelles raisons ont poussé Jean Molla à écrire ce livre ? D’après la postface de Jean Molla, on trouve à l’origine du livre le film documentaire de Claude Lanzmann, Shoah, qui a éveillé sa conscience sur la volonté des nazis d’effacer les traces de la solution finale. Il a ensuite été marqué par l’ignorance du nom même de Sobibor par une jeune polonaise : les nazis avaient presque réussi le pari de faire oublier la réalité du camp. C’est pourquoi ce n’est pas tant un livre sur les camps qu’un livre sur l’oubli, le mensonge.

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De la lecture à l’écriture p. 174

Des mots pour mieux écrire� Champ lexical du mensonge.Antonymes : transparence, dévoilé, sincérité, révéler, montrer ; champ lexical de la vérité.

� Par exemple : oublier, oublieux, oubliettes, inoubliable ; mémoriser, mémorial, mémorable, commé-morer, immémorial.

Du texte à l’image p. 175

☛ Planche de Tardi parue dans le quotidien Libération (27 janvier 2000). (Image reproduite en fin d’ouvrage.)

Lire l’image� Comparez la première et la dernière image de la bande dessinée. L’évolution que vous remarquez convient-elle au genre littéraire annoncé dans la première image ? Dans la première et la dernière image de la bande dessinée, le lieu est le même : on reconnaît les trois maisons ; les arbres et buissons sont placés au même endroit. Cependant, la première image s’oppose à la dernière : ordre, confort d’une maison typique de la région parisienne, mention de l’univers du conte de fée (« il était une fois », « princesse », « château »), clarté de l’image d’un côté ; de l’autre : paysage de guerre détruit, noirci ; au passé du conte s’oppose la date récente (« hier ») et la mention de l’holocauste. Le conte de fée annoncé dans la première vignette n’est donc pas réalisé, au contraire.

� Faites la liste de toutes les oppositions, dans le texte et dans l’image, sur lesquelles repose la bande dessinée. Les vignettes 2-3 et 5-6 s’opposent sur bien des détails : père actif — fille inquiète / fille lisant avec plaisir (sourire) — père déstabilisé ; ombre d’un monstre (vignette 3) / image du lapin en couverture du livre de la petite fille. Les textes font appel aux termes d’opposition et de négation (« mais », « personne »…).

� La lecture des histoires de monstres avait-elle de quoi inquiéter la petite princesse ? Vous jus-tifierez votre réponse par des indices puisés dans le texte et dans l’image. La lecture des histoires de monstres n’était pas source d’inquiétude pour la petite fille. Son sommeil n’était pas perturbé. Le texte joue de la valeur de répétition de l’imparfait, du mot « bercée » pour évoquer un sommeil sans problème. On peut enfin noter le renversement en partie ironique du constat de la vignette 6 : « n’en dormait pas moins bien pour autant ».

Comparer le texte et l’image� En quoi cette planche de bande dessinée rappelle-t-elle l’histoire d’Emma ? La planche de Tardi rappelle l’histoire d’Emma parce qu’elle fait le même constat : taire le passé, ne pas évoquer ce qui a été monstrueux peut conduire à la destruction.

� En quoi le message délivré par la bande dessinée n’est-il cependant pas du tout le même que celui de Jean Molla ? La différence entre la bande dessinée de Tardi et le roman de Jean Molla tient en ce que le roman n’évoque jamais la menace du retour des monstres nazis.

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Arrêt sur l’œuvrep. 176-183

Des questions sur l’ensemble du roman p. 176-177

Des personnages complexes

� Faites la liste des personnages du roman, en les classant en fonction du lieu où ils apparaissent : Sobibor ou Angoulême. En quoi cette liste correspond-elle à celle d’un roman historique ?

Sobibor Angoulême

Jacques Desroches / Karl Frank

Anna

Konrad von Lebbe

Eva Hirschbaum et Simon

le vieil homme juif

les prisonniers juifs

les déportés allant être exterminés

Globocnic, Christian Wirth, Stangl, Thomalla, Bauer, Floss, Schwarz, Barbel, Hermann Michel

Les gardes ukrainiens et lituaniens

Eichmann

Cités : Heydrich, Hitler

Emma

Paul Lachenal

Mamouchka

le père et la mère d’Emma

Julien

M. Prade et sa secrétaire

les amis de classe d’Emma

les personnes présentes à l’enterrement de Mamouchka

les médecins et psychiatres qui soignent Emma

Comme dans un roman, les personnages sont nombreux, plus ou moins importants. De plus, certains per-sonnages ont une réelle existence historique. Les recherches que l’on peut faire sur le camp de Sobibor attestent la présence des soldats cités. Cette liste correspond donc à celle d’un roman historique.

� Quel rôle jouent Julien et M. Prade, le directeur du supermarché ? Ils ont un statut de person-nages secondaires mais jouent un rôle important dans le roman : Julien est celui qui alerte sur la maladie d’Emma ; M. Prade, en donnant le numéro du juge, offre à Emma une issue possible ; de plus, il est la figure adulte qui offre la plus nette opposition avec le grand-père : il ne ment pas, ne triche pas, mais dit les choses de façon claire et directe ; sa devise, selon laquelle il ne se limite pas à sa fonction est, elle aussi, l’inverse du comportement de Jacques Desroches.

� Jean Molla refuse le manichéisme et crée des personnages complexes. En quoi Emma et son grand-père reflètent-ils ce refus de simplification ? Ni le grand-père ni Emma ne sont présentés de façon manichéenne comme entièrement mauvais ou bons. Ainsi, le grand-père explique qu’il a cherché à se racheter en faisant le bien autour de lui et dans sa ville ; il est une figure d’amour pour sa famille ; il est aussi une figure de bourreau, d’autant plus effrayante qu’il reste humain ; de son côté, Emma est capable de violence : verbale, physique, contre elle-même mais aussi contre son grand-père qu’elle pousse au suicide (elle dit bien qu’elle condamne sans même juger, se rendant responsable de cette mort).

Un temps perturbé : le mélange des époques

� Relisez les premiers et derniers paragraphes du roman (p. 11 et p. 167). Que remarquez-vous ? Combien de temps s’est-il écoulé entre le début et la fin du livre ? Le premier et le dernier para-graphe du roman sont presque le même texte : seules variantes, l’ordre des phrases et le temps des verbes (passé composé vs. présent). Il ne se passe donc aucun temps entre le début et la fin du livre : la fin correspond au moment même du début. Signe peut-être qu’Emma va pouvoir retrouver un temps plus linéaire : la perturbation des époques, l’imprégnation du présent par le passé est close, encerclée, maîtrisée.

� Remettez les événements suivants dans l’ordre chronologique : le vol au supermarché, les pre-miers problèmes de poids d’Emma, le suicide du grand-père, la découverte du cahier de Jacques Desroches, la Seconde Guerre mondiale, la maladie et la mort de la grand-mère. Citez une période évoquée dans le roman qui est antérieure à tous ces événements. Ces événements ont lieu dans

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l’ordre chronologique suivant : la Seconde Guerre mondiale, les premiers problèmes de poids

d’Emma, la maladie et la mort de la grand-mère, la découverte du cahier de Jacques Desroches, le

vol au supermarché, le suicide du grand-père. Mais le roman évoque aussi une époque plus lointaine :

l’enfance du grand-père dans les années 20.

� Faites la liste, chapitre par chapitre, de tout ce que l’on apprend sur l’histoire des grands-parents

d’une part, et l’histoire d’Emma d’autre part.

Rappel de l’histoire des grands-parents

Rappel de l’histoire d’Emma

P. 11-14 Histoire d’Eva et de Simon Hirschbaum, 1943. Dernier vomissement.

Ch. 1 — Vol au supermarché.

— Rêve de la lumière derrière la porte.

Ch. 2 Mensonges sur la guerre. — Lendemain du vol.

— Un auparavant, cauchemar de Mamouchka, 1re mention des noms de Sobibor, Eva Hirschbaum et Jacques.

Ch. 3 Journal de Jacques Desroches : 20 janvier 1942-10 février 1942.

Ch. 4 — Histoire d’amour hors du commun.

— Enfance du grand-père.

— Rencontre des grands-parents, séparations et retrouvailles.

— Nouveau départ dans la vie à Angoulême.

— Maladie et mort de la grand-mère (nov.).

— Repli sur soi d’Emma.

— À 13 ans : 1er régime puis boulimie.

— Deux ans plus tard, rencontre de Julien.

— Avril suivant, maladresse de Julien, nouveau régime, anorexie puis boulimie-anorexie.

Ch. 5 Mention d’Eva Hirschbaum, explications du grand-père.

Enterrement de Mamouchka.

Ch. 6 Lendemain de l’enterrement, visite de Julien.

Ch. 7 Après la visite de Julien : bain, regard admiratif sur elle.

Ch. 8 Derniers jours de novembre, découverte du cahier de Jacques Desroches.

Ch. 9 Journal de Jacques Desroches : 20 janvier 1942.

— Emma lit le journal de Jacques Desroches.

— Annonce de son suicide.

Ch. 10 Journal de Jacques Desroches : 21 février 1942-18 juillet 1942.

Ch. 11 — Journal de Jacques Desroches : 21 juillet 1942-4 juin 1943.

— Annonce de la mort de Jacques Desroches.

Ch. 12 Réaction d’Emma à la lecture du journal, découverte des photos, tentative de suicide.

Ch. 13 Réveil en salle de réanimation, soins.

Ch. 14 Amour en temps de guerre. — Soins psychiatriques.

— Recherches sur son prénom.

— Souvenir d’une conversation avec Mamouchka, Emma avait 12 ou 13 ans.

Ch. 15 Visite au directeur du supermarché.

Ch. 16 Rappel du vieil homme juif, de la grange incendiée.

Visite à son grand-père, identifié comme Jacques Desroches.

Ch. 17 — Départ de Jacques et Anna loin de Sobibor, fin de la guerre.

— Récit de la fin du camp de Sobibor.

Ch. 18 Emma imagine comment sa grand-mère a récupéré le cahier de Jacques Desroches.

— Condamnation du grand-père par Emma.

— Retour chez elle.

Ch. 19 — Emma retrouve des relations familiales plus normales.

— Suicide du grand-père.

— Dernier vomissement.

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Le récit de l’extermination

� Quels sont les camps d’extermination cités dans le roman ? Ont-ils tous existé ? Les camps d’extermination cités dans le roman sont Sobibor, Belzec, Treblinka et Trieste. Tous ont existé réellement.

Dans quels chapitres Eva Hirschbaum est-elle mentionnée ? À votre avis, pourquoi Jean Molla a-t-il choisi de répéter ainsi son histoire ? Eva Hirschbaum est citée dans sept chapitres différents, elle revient ainsi de façon récurrente : avant le premier chapitre (p. 12), dans les chapitres 2 (p. 26-27), 5 (p. 59-60), 11 (p. 114-116), 12 (p. 121), 14 (p. 134 et 138) et 18 (p. 158). C’est un peu comme si ce retour venait insister sur l’individualité de chaque victime, s’opposer à l’aspect abstrait et peu imaginable du nombre des victimes du camp de Sobibor (250 000). C’est aussi une façon de redonner une impor-tance à l’une des victimes à qui on a voulu enlever toute humanité.

Dans les chapitres consacrés au journal de Jacques Desroches, Emma, la narratrice du roman, intervient régulièrement : quel est son rôle ? Emma est celle qui trouve le cahier, elle est celle qui va permettre au lecteur du roman de s’en faire une idée : description, mention des pages arrachées… Elle est une figure de lecteur, image de l’adolescent qui lit le livre : elle souligne par ses réactions l’effroi, l’horreur que procure la lecture du journal.

Des mots pour mieux écrire p. 177-181

Lexique du mensonge p. 177-179

Mots croisés

Horizontalement : 1. fard ; 2. boniments ; 3. maquillé ; 4. dupes ; 5. feindre ; 6. hypocrite.Verticalement : A. fanfaron ; B. désinformation ; C. simuler ; D. craques ; E. mirage ; F. leurrer.

Lexique de la mémoire et de l’oubli p. 180

a. amnésie ; b. imprescriptible, amnistie ; c. omission d. obsédant/lancinant ; e. commémorations, perpétuer.

Lexique du poids p. 181

Peau : diaphane / Yeux : caves / Visage : émacié, bouffi / Pied : potelé, rachitique / Silhouette : rachiti-que, gracile, efflanquée, corpulente.

Du texte à l’image p. 183

☛ Nandor Glid, Aux victimes des camps de concentration, Mémorial de Yad Vashem. (Image reproduite en début d’ouvrage, au verso de la couverture.)

Lire l’image

� Où se trouve cette sculpture ? De quel endroit s’agit-il ? Quelle est sa vocation ? Cette sculpture est un des monuments du Mémorial de Yad Vashem à Jérusalem, mémorial israélien créé en 1953 en mémoire des victimes juives des nazis. Elle y a été installée en 1979. C’est la reproduction d’une sculpture de Nandor Glid, artiste yougoslave, ancien déporté, érigée en 1968 dans le camp allemand de Dachau.

� Décrivez le plus précisément possible les personnes représentées sur cette sculpture. La sculpture montre des corps émaciés, squelettiques, allongés, tordus, des visages creusés, bouche ouverte.

� Regardez sous le personnage en bas à droite : quel élément des camps cela rappelle-t-il ? Les lignes des corps, des membres et la position des mains et des doigts évoquent les fils barbelés qui entouraient les camps de concentration. D’ailleurs la sculpture originelle, celle de Dachau, évoquait les victimes électrocutées sur les barbelés du camp.

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Comparer le texte et l’image

� Nandor Glid a créé un monument à la mémoire des victimes des camps de concentration et d’extermination. Quels sentiments cherche-t-il à faire naître en nous ? Retrouve-t-on cette volonté dans le roman de Jean Molla ? La sculpture rappelle l’horreur vécue et le désespoir des victimes des camps. Il s’agit de faire toucher du doigt ce à quoi les victimes juives étaient réduites. Il s’agit d’émouvoir le visiteur qui fait face à la sculpture, de l’entraîner dans la voie de la compassion et du partage. Jean Molla quant à lui évoque cette même réalité lorsqu’il raconte l’arrivée des Juifs au camp de Sobibor ou l’assassinat d’Eva et de Simon, mais il refuse de se mettre dans la peau d’une des victimes : ce n’est pas tant leurs conditions de vie qu’il entend montrer (les témoignages des survivants existent et sont seuls aptes à raconter l’horreur des camps), que l’ignominie de ceux qui ont voulu faire oublier leur responsabilité dans l’extermination. Le roman de Jean Molla doit nous entraîner du côté de la réprobation absolue, de la dénonciation et du rejet de ceux qui non seulement ont pris part à la Shoah, mais encore ont tout mis en œuvre pour échapper aux poursuites et n’ont pas assumé leurs responsabilités.

� Pensez-vous que la vision d’un monument commémoratif est plus efficace que la lecture d’un récit sur l’extermination ? Vous justifierez votre réponse en développant au moins deux arguments. On peut inciter les élèves à réfléchir sur les qualités et les forces de la représentation visuelle : elle montre immédiatement l’aspect torturé des corps, la maigreur, la souffrance, sans passer par des descriptions, ou des mots souvent moins directement parlants que la réalité du fer forgé de la sculp-ture ; on peut aussi évoquer le rapprochement visuel entre les doigts des suppliciés et les barbelés, plus évident du fait de la proximité visuelle et du matériau utilisé qu’il ne l’aurait été dans une compa-raison littéraire. Du côté de la lecture, la dureté et la précision des récits de survivants permettent de se faire une idée plus détaillée de ce que les déportés ont eu à connaître. La lecture suppose en outre une expérience du temps, elle permet d’approcher, par le récit, l’expérience des autres : elle n’a pas l’immédiateté de la vision et suppose un ensemble de constructions mentales qui peuvent, peut-être, permettre d’approcher des réalités complexes et leur durée.