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nécrologie ROGER HERVE R oge r Hervé, agrégé de l'Université, ancien assistant au Musée ethnographique du Troca- ro , conservateur honoraire à la Bibliothèque nationale, es t décédé fin nove mbr e 1997 à Paris, à l'âge de quatre-vingt-treize ans. Il appartenait depuis de longues ann ées au comité de patronage de Nou - velle Ecole. rt était né en 1904 au Havre, de père breton et de mère fl amande, dans une famille de fonctionnaires des finances. Il avait fait ses études à la faculté des lettres de Re nn es à partir de 1921, et avait passé son agréga- tion d'histoire et géographie en 1926. Il fut success ive- ment professeur aux lycées de Brest, Amiens, Sai nt- Brieuc, ainsi qu'à Pontivy, il se li a avec l' écrivain normand Fernand Lechanteur. Proche d'Olier Mor- dre!, Franz Debauvais et Yann Poupinot, il participa clan s l es années trente aux activités du mouveme nt breton, sur lequel il exerça une forte influence d'ordre culturel à partir de 1937. Il publia notamment, sous l es pseudonymes de Glémarec et Katuvolkos, plu sie ur s articles de fond cl ans l es revu es Stur et Nemeton. Nommé en 1969 conse rvate ur à la Bibliothèque nati onale, il y joua un rôle particulièrement important au département des cartes et plan s. li publia notam- ment plusieurs étud es sur des cartographes anciens, dont Ni co las de Nicolay, et sur l es plans des forêts de Colbert. On l ui doit aussi le Catalogue des cartes géo- graphiques sur parch em in conservées au départemen t des cartes et plans (Bibliothèque nationale, 1974), ainsi qu 'un travail fai sant suite à l' étude critique des cartes di e ppoi ses et apparentées, Découverte fortuite de !'.Aus- tralie et de la Nouvelle-Zélande par des navigateurs por- tugais et espagnols entre 1 521 et 1528 (Ed. du CTHS, 1982), ouvrage dont une traduction anglaise a paru en Nouve ll e-Zélande en 1983. Il fut éga leme nt le co- auteur, avec Yann Poupinot, de l'Atlas historique de la Bretagne, dont la plus récente édition a paru chez J.M. Willamson en 1995. Devenu presque aveugle à la fin de sa vi e, Roger He rvé avait travaillé pendant près d'un de mi -s iècle à un vaste projet de livre consacré à l' oe uvre cl 'Oswalcl Spengler, dont il se proposait d'act uali ser l es vu es concernant la morphologie des grand es cultures histo- riques. L'ouvrage devait s'intituler L'histoire et l es théo- ries cycliques et comprendre ci eux volum es (Oswald Spengler et la pensée contemporaine, Quelques préci- sions de temps et de lieux). Ce projet n'a mali1eureuse- me nt jamais pu ê tre mené à bi e n. Roger Hervé en avait esquissé l es grandes lign es clans une brochure intitulée Actualité de Spengler, publiée en 1983 par le Cercle d'étud es fédéralistes. VALENTIN THIEBAUT M e mbr e du comité de patronage de N. E., Valentin Thiébaut, ancien secr'taire général de l'univer sité de Buenos Air es, ancien directeur des Editions universitaires de Buenos Aires, ancien professeur à l'Université argentine d es sciences sociales, ancien conse ill er au Conseil des avocats de l'Etat argentin, est décédé le 27 novembre 1997. RAYMOND B. CATIELL R aymond B. Catte ll fut sans conteste l'un des psychologues les plus exce ptionne ll eme nt influents du XXe siècle. Membre du comité de patronage de N. E., il est mort d' un e crise cardiaque le 2 vri er 1998 à Hawaï, à l'âge de quatre-vingt-douze an s. Il a été inhumé quelques jours plus tard à Hono- lulu, en présence de ses cinq enfants. D'origine anglaise, il était né le 20 mars 1905 à Hilltop, cl ans le Devonshire, où son père, Alfred Ern est Cattell, était ingé ni eur, mais avait passé toute son enfance dans le Devonshire. Surdoué de ni e, il achève ses études à Cambridge à l'âge de quinze ans, et passe un do ctorat de chimie à dix-neuf ans. Lecteur à l'univers ité d'Exeter à partir de 1927, il est nommé en 1932 directeur de la Chilcl Guidance Clini c de la vill e d'Exete r. Dès cette époque, il commence à tra- vailler sur l'é l1.1cl e de la personnalité et met au point de nouve ll es batteri es de tests per mettant de mi eux la cerne r. Ses premi ers articles paraissent en 1928 dans le British journal of Psychology. Parallèlement, il pour- suit ses ét ud es à l'université de Londres, où il passe son doctorat ès-sciences sous la direction de Charl es E. Spea rm an. Celui -c i, qui jette alors les bases de l'application de l' analyse factorielle à l' étl1de de l'inte lli- gence, le prend comme assistant. Durant l es années trente, Ray mond Cattell subit l'inJlu ence des id ées socialistes, que soutiennent alors en Angleterre des personnalités comme George Ber- nard Shaw, H.G. Wells, Bertrand Russell, Ronald Fisher, Aldous Huxley, Beatrice et Stanley Webb. IL co ll abore réguli èrement à l'Eugenics Review, et publie toute une sé ri e d'ouvrages sur l' apport de la psyc ho- métrie aux sciences sociales. En 1937, cl ans un livre intitulé Th e Fight for Our National Inte lligence, il met en lumière une corrélation inverse entre QI et taux de fertilité, ce qui l'amène à s'inquiéter d'une éventue ll e te ndanc e dys nique en Grande-Bretagne, qui se manif esterait par l'augmentation de la criminalité et par l' é ro sion des valeurs civiques et de la qualité de vi e des communautés. Cet ouvrage devait ouvrir un débat auquel il a continué à contribuer durant toute sa vi e . Ses prévisions ont depuis été largeme nt .confirmées par l es travaux de Richard Lynn (Dysge nics, Praeger, New York 1996). En 1937, il accepte une invitation à l' équipe de E.L. Thomdike à l'université de Columbia, aux Etats-Unis. Celle-ci comprend principalement des partisans de la théorie mult:ifactorie ll e de l'intelligence , hos til es à la théorie monofactoriell e de Spearman. est ensuite nommé professeur à l'université Clark, ou il continue à travailler à la mi se au point de mesures d'évaluation de l'inteligence et de la personnalité. En 1941, à l'invitation de Gordon Allport, il rejoint l'univer- sité de Harvard, il va poursuivre ses travaux dant deux ans. Dura.11t la Deuxième Guerre mondiale, ·1 est égaleme nt employé comme conseiller civil au 1 ' Département de la Guerre, où il est a mettre au point des tests de sélection pour l es officiers. A la fin de la guerre, en 1945, Raymond B. Cattell est nommé professeur de psychologique à l'université de l'Illinois, à Urbana, où la mi se au pomt des pre mi ers ordinateurs va pe1 :mettr : cl 'u.tili se r J'analyse factorielle de façon mtens 1ve. C est la que, pendant près de trente ans, il va publier ses travaw_< l es plus importants. En liaison avec des ciens célèbres, comme Lee Cronbach, Leclyard 1 uc- ker, Paul Horst et Herny Kaiser, il fonde alors le Labo- ratory of Personality Assess me nt and Group Beha- Le chercheur d'origin e anglaise Raymond B. Cattell compte ?armi scientifiqu es qui ont le plus znfluencee ta psychologie au XX• siècle. viour Analysis, et met au point de nombr e us es mét hod es d'évaluation et de tests dans le cadre de l'Institute for Personality and Ability Testing (!PAT) de Champaign, dans l'Illinois. En 1946, il avec Cyril Burt la création de la Mensa. En 11 crée et devient le premier président de la Society for Multivariate Expe1imental Psychology, qui publiera la prestigieuse revue Multivariate Behavioral Resea .rch. Il fondera aussi par la suite le Cattell Research lnstitute. Cattell se rattache à l'école anglaise de psycholo- gie différentielle fondée par Francis Psycho.- Jogue de la personnalité, il s'est d'abord mtéressé a l'intelli gence comme manifestation de cet te lité. Son oeuvre porte essentiell ement sur la genétique de l'intelligence et du comp01tement, l' é l1.tde de so nna.lit ' et de la motivation. Elle a surtout consiste établir des critères objectifs pour la recherche e mpi- rique clans l es sciences du comporteme.nt à la possible application des méthodes scientifiques a la r éso lution des problèmes sociaux. Dans tous domaines, Raymond B. Cattell a appo1té des contribu- tions de pre mi er plan. . . Da.11s le domaine de la personnalité, Cattell utilise esse nti ell ement la mét hode des qu estionnaires facto- ri els. Son questionnaire de personnalité en 16 (16 PF), conçu sur la base de l'analy s.e factorielle, donne une description complète des t:ra1ts fonda.tnen-

Nécrologie Roger Heervé

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Notice biographique sur Roger Hervé (1904-1997), auteur d'une étude sur Oswald Spengler

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nécrologie

ROGER HERVE

Roger Hervé, agrégé de l'Unive rs ité, ancien assistant au Musée ethnographique du Troca­déro, conservateur honoraire à la Bibliothèque

nationale, est décédé fin novembre 1997 à Paris, à l'âge de quatre-vingt-treize ans. Il appartenait depuis de longues années au comité de patronage de Nou­velle Ecole.

rt était né en 1904 au Havre, de père breton et de mère flamande, dans une famille de fonctionnaires des finances. Il avait fait ses études à la faculté des lettres de Rennes à partir de 1921, et avait passé son agréga­tion d'histoire et géographie en 1926. Il fut successive­ment professeur aux lycées de Brest, Amiens, Saint­Brieuc, ainsi qu'à Pontivy, où il se lia avec l'écrivain normand Fernand Lechanteur. Proche d'Olier Mor­dre!, Franz Debauvais et Yann Poupinot, il participa clans les années trente aux activités du mouvement breton, sur lequel il exerça une forte influence d'ordre culturel à partir de 1937. Il publia notamment, sous les pseudonymes de Glémarec et Katuvolkos, plusieurs articles de fond clans les revues Stur et Nemeton.

Nommé en 1969 conservateur à la Bibliothèque nationale, il y joua un rôle particulièrement important au département des cartes et plans. li publia notam­ment plusieurs études sur des cartographes anciens, dont Nicolas de Nicolay, et sur les plans des forêts de Colbert. On lui doit aussi le Catalogue des cartes géo­graphiques sur parchemin conservées au département des cartes et plans (Bibliothèque nationale, 1974), ainsi qu'un travail faisant suite à l'étude critique des cartes dieppoises et apparentées, Découverte fortuite de !'.Aus­tralie et de la Nouvelle-Zélande par des navigateurs por­tugais et espagnols entre 1521 et 1528 (Ed. du CTHS, 1982), ouvrage dont une traduction anglaise a paru en Nouve lle-Zélande en 1983. Il fut également le co­auteur, avec Yann Poupinot, de l'Atlas historique de la Bretagne, dont la plus récente édition a paru chez J.M. Willamson en 1995.

Devenu presque aveugle à la fin de sa vie, Roger Hervé avait travaillé pendant près d'un demi-siècle à un vaste projet de livre consacré à l'œ uvre cl 'Oswalcl Spengler, dont il se proposait d'actualiser les vues concernant la morphologie des grandes cultures histo­riques. L'ouvrage devait s'intituler L'histoire et les théo­ries cycliques et comprendre cieux volumes (Oswald Spengler et la pensée contemporaine, Quelques préci­sions de temps et de lieux). Ce projet n'a mali1eureuse­ment jamais pu être mené à bien. Roger Hervé en avait esquissé les grandes lignes clans une brochure intitulée Actualité de Spengler, publiée en 1983 par le Cercle d'études fédéralistes.

VALENTIN THIEBAUT

Membre du comité de patronage de N. E., Valentin Thiébaut, ancien secr'taire général de l'université de Buenos Aires, ancien

directeur des Editions universitaires de Buenos Aires, ancien professeur à l'Unive rs ité argentine des sciences sociales, ancien conseiller au Conseil des avocats de l'Etat argentin, est décédé le 27 novembre 1997.

• RAYMOND B. CATIELL

Raymond B. Cattell fut sans conteste l'un des psychologues les plus exceptionnelle ment influents du XXe siècle. Membre du comité de

patronage de N. E., il est mort d'une crise cardiaque le 2 février 1998 à Hawaï, à l'âge de quatre-vingt-douze ans. Il a été inhumé quelques jours plus tard à Hono­lulu, en présence de ses cinq enfants.

D'origine anglaise, il était né le 20 mars 1905 à Hilltop, cl ans le Devonshire, où so n père, Alfred Ernest Cattell, était ingénieur, mais avait passé toute son enfance dans le Devonshire. Surdoué de génie, il achève ses études à Cambridge à l'âge de quinze ans, et passe un doctorat de chimie à dix-neuf ans. Lecteur à l'université d'Exeter à partir de 1927, il est nommé en 1932 directeur de la Chilcl Guidance Clinic de la ville d'Exeter. Dès cette époque, il commence à tra­vailler sur l'él1.1cle de la personnalité et met au point de nouvelles batteries de tests permettant de mieux la cerner. Ses premiers articles paraissent en 1928 dans le British journal of Psychology. Parallèlement, il pour­suit ses études à l'université de Londres, où il passe son doctorat ès-sciences sous la direction de Charles E. Spearman. Celui-ci, qui jette alors les bases de l'application de l'analyse factorielle à l'étl1de de l'intelli­gence, le prend comme assistant.

Durant les années trente, Raymond Cattell subit l'inJluence des idées socialistes, que soutiennent alors en Angleterre des personnalités comme George Ber­nard Shaw, H.G. Wells, Bertrand Russell, Ronald Fisher, Aldous Huxley, Beatrice et Stanley Webb. IL collabore régulièrement à l'Eugenics Review, et publie toute une série d'ouvrages sur l'apport de la psycho­métrie aux sciences sociales. En 1937, clans un livre intitulé The Fight for Our National Intelligence, il met en lumière une corrélation inverse entre QI et taux de fertilité, ce qui l'amène à s'inquiéter d'une éventuelle tendance dysgénique en Grande-Bretagne, qui se manifesterait par l'augmentation de la criminalité et par l'érosion des valeurs civiques et de la qualité de vie des communautés. Cet ouvrage devait ouvrir un débat auquel il a continué à contribuer durant toute sa vie .

Ses prévisions ont depuis été largement.confirmées par les travaux de Richard Lynn (Dysgenics, Praeger,

New York 1996). En 1937, il accepte une invitation à rejoind~·e

l'équipe de E.L. Thomdike à l'université de Columbia, aux Etats-Unis. Celle-ci comprend principalement des partisans de la théorie mult:ifactorielle de l'intelligence, hostiles à la théorie monofactorielle de Spearman. ~ est ensuite nommé professeur à l'université Clark, ou il continue à travailler à la mise au point de mesures d'évaluation de l'inteligence et de la personnalité. En 1941, à l'invitation de Gordon Allport, il rejoint l'univer­sité de Harvard, où il va poursuivre ses travaux ~en­dant deux ans. Dura.11t la Deuxième Guerre mondiale, ·1 est également employé comme conseiller civil au 1 ' Département de la Guerre, où il est a.tne~é a mettre au point des tests de sélection pour les officiers.

A la fin de la guerre, en 1945, Raymond B. Cattell est nommé professeur de psychologique génétiqu~ à l'université de l'Illinois, à Urbana, où la mise au pomt des premiers ordinateurs va ~ui pe1:mettr: cl'u.tiliser J'analyse factorielle de façon mtens1ve. C est la que, pendant près de trente ans, il va publier ses travaw_< les plus importants. En liaison avec des psychom~tr1-ciens célèbres, comme Lee Cronbach, Leclyard 1 uc­ker, Paul Horst et Herny Kaiser, il fonde alors le Labo­ratory of Personality Assessment and Group Beha-

Le chercheur d'origine anglaise Raymond B. Cattell compte ?armi le~ scientifiques qui ont le plus znfluencee ta psychologie au XX• siècle.

viour Analysis, et met au point de nombreuses méthodes d'évaluation et de tests dans le cadre de l'Institute for Personality and Ability Testing (!PAT) de Champaign, dans l'Illinois. En 1946, il patronn~ avec Cyril Burt la création de la Mensa. En ~960, 11 crée et devient le premier président de la Society for Multivariate Expe1imental Psychology, qui publiera la prestigieuse revue Multivariate Behavioral Resea.rch. Il fondera aussi par la suite le Cattell Research lnstitute.

Cattell se rattache à l'école anglaise de psycholo­gie différentielle fondée par Francis Galt~n. Psycho.­Jogue de la personnalité, il s'est d'abord mtéressé a l'intelligence comme manifestation de cette p~rso~na­lité. Son œuvre porte essentiellement sur la genétique de l'intelligence et du comp01tement, l'él1.tde de 1~ p~r: sonna.lit ' et de la motivation. Elle a surtout consiste ~ établir des critères objectifs pour la recherche empi­rique clans les sciences du comporteme.nt ~t à étu~ier la possible application des méthodes scientifiques a la résolution des problèmes sociaux . Dans tous ~es domaines, Raymond B. Cattell a appo1té des contribu-

tions de premier plan. . . Da.11s le domaine de la personnalité, Cattell utilise

essentiellement la méthode des questionnaires facto­riels. Son questionnaire de personnalité en 16 fac~eurs (16 PF), conçu sur la base de l'analys.e factorielle, donne une description complète des t:ra1ts fonda.tnen-