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Énergies nouvelles, énergies pour la vie. Bilan, enjeux

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y Energies nouvelles, énergies pour la vie

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ÉDISUD/ÉNER GIES AL TERNA TIVES

Thierry CABIROL, Albert PÉLISSOU, Daniel Roux Le chauffe-eau solaire

Guy CUNTY Eoliennes et aérogénérateurs

Jacques DESAUTEL Les capteurs héliothermiques

Bernard LAGRANGE Biométhane 1 : Une alternative crédible Biométhane 2 : Principes, techniques, utilisations

Charles FONTANEL La pompe à chaleur

Michel FRÉNOT, Nabih SAWAYA Isolation thermique

Michel CHATEAUMINOIS, Daniel MANDINEAU, Daniel Roux Calcul d'installations solaires à eau

École supérieure d'ingénieurs de Marseille Tables d'ensoleillement maximal pour la France (ESIM)

ISBN 2-85744-059-6

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ÉNERGIES ALTERNA TIVES

/

Energies nouvelles Energies pour la vie

Bilan - Enjeux

Marcel Barrabé - Jean-Luc Chevalier Anne-Marie Péguin - Pierre Péguin

ÉDISUD La Calade, 13090 Aix-en-Provence

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© Charly-Yves CHAUDOREILLE - ÉDISUD, Aix-en-Provence 1980 Tous droits de traduction, reproduction et adaptation réservés pour tous pays.

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Pourquoi ce livre? L'idée de réaliser ce livre découle de notre pratique des sessions de

formations d'adultes, des débats, des animations, au cours desquelles nous rencontrons des publics variés, intéressés par les énergies dites «nou- velles ».

Il nous a semblé qu'il manquait un document faisant le point sur ce que l'on peut attendre actuellement de toutes les énergies alternatives qui sont à notre disposition, document regroupant l'ensemble des informations essentielles, et accessible à toute personne motivée.

Nous avons eu l'ambition de réaliser cet ouvrage en nous appuyant largement sur les documents spécialisés disponibles que nous citons au fur et à mesure.

Au cours de ce travail, nous nous sommes aperçus que nous avions besoin de préciser nos idées, d'expliquer le contexte actuel de l'énergie en France et les raisons pour lesquelles nous souhaitons favoriser le dévelop- pement des énergies alternatives. C'est ce que nous faisons dans la première partie.

Dans la seconde partie, nous passons en revue chaque énergie, en essayant d'expliquer l'essentiel, les possibilités qu'elle offre, le degré de développement, le coût. Le nucléaire ne fait pas partie des énergies « nou- velles» telles que nous les définissons dans la première partie. Il n'y a donc pas place pour cette énergie dans la seconde partie.

Pour rédiger le texte sur l'énergie éolienne, nous avons fait appel à Yves Boulay et Jean-Claude Picquard, du Groupe de travail éolien, que nous remercions vivement pour leur contribution.

Nous espérons que ce livre provoquera la réflexion et la discussion sur le type de société enjeu, et qu'il constituera un document d'initiation et de travail.

Grenoble, le 1erjuillet 1979

Marcel BARRABÉ, Jean-Luc CHEVALIER, Annie PÉGUIN et Pierre PÉGUIN

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Introduction Énergie, un autre choix pour un autre mode de vie?

Il est facile et bien agréable de consommer de l'énergie : on appuie sur un bouton, la lampe s'éclaire, le linge se lave, l'eau chauffe. La croissance industrielle, accompagnée de la croissance énergétique, a largement con- tribué à améliorer le niveau de vie. Personne n'est disposé à revenir aux dures conditions de vie du siècle dernier.

Mais une prise de conscience qui émerge depuis quelques années nous amène à nous poser des questions. Allons-nous laisser se développer les in- dustries grosses dévoreuses d'énergie et de matières premières? Allons-nous continuer à acquérir les appareillages électriques, les gadgets, les objets à jeter, comme nous y invite une publicité alléchante? Existe-t-il un seuil au-delà duquel les désagréments dus aux nuisances liées au développement industriel et à la consommation d'énergie effacent le plaisir d'utiliser de nouveaux appareils et le bien-être qu'ils apportent?

D'ailleurs, pourquoi se poser cette question? Le plaisir, l'avantage sont immédiats et individuels, on apprécie le confort ou le progrès tout de suite. Par contre, les inconvénients, les effets des nuisances se font sentir plus loin, parfois plus tard, et elles pèsent sur tous, sur la collectivité. Les centrales et les raffineries sont ailleurs, certaines fabrications polluantes sont repoussées vers les pays pauvres, les inconvénients majeurs de la radioactivité se feront sentir dans 5 ou 15 ans. Bref, tous ces méfaits se diluent dans le temps, dans l'espace, dans la masse. C'est pour plus tard et pour les autres. Entre cet avantage individuel immédiat et une nuisance collective et éloignée, il y a un décalage qui en rend difficile la prise de conscience.

Pourtant, un certain nombre d'événements apparaissent avec évidence de jour en jour :

- Dégradation de l'environnement par la pollution chimique, thermique, radioactive qui pèse sur le bien-être de tous.

- Concentration urbaine, liée à la croissance industrielle et à la nécessité de disposer d'une main-d'œuvre exploitable, au mépris de l'équilibre de vie des habitants des grandes métropoles.

- Coûts humains et sociaux de la vie industrielle moderne, accidents et maladies professionnelles, risques pour la population, accrus par la loi du profit et par les exigences de la rentabilité économique. On ne dispose même plus en contrepartie de la sécurité de l'emploi.

- Concentration de la technologie de haut niveau dans les pays riches,

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renforçant leur domination sur les autres, du fait des enjeux économiques considérables.

Dans le domaine plus spécifique de la production et de la consomma- tion d'énergie, on constate que :

- La concentration croissante de la production (complexes pétroliers, barrages, centrales de plus en plus puissantes) et de la distribution rend plus fragile l'organisation de la société. Elle exige un pouvoir plus concentré ainsi qu'un contrôle plus rigoureux de chaque individu.

- Les investissements gigantesques actuels ne sont rentabilisés que si l'on consomme beaucoup d'énergie. Nous sommes donc incités à la gaspil- ler en acquérant des objets souvent inutiles, peu durables, produits en grande série et dont on se lasse vite.

- L'augmentation de la production d'électricité par les centrales nu- cléaires implique une consommation plus régulière de l'électricité. Il est en effet trop coûteux de ralentir ou d'arrêter une telle centrale; de plus, les lâchers de produits radioactifs dans l'environnement sont plus importants pendant les changements de régime de la centrale. Des incitations diverses, une politique des tarifs vont donc favoriser le développement du travail posté la nuit, les dimanches, l'été, aux dépens de l'équilibre et de la santé des travailleurs.

- La moitié des logements neufs sont actuellement équipés du chauffage électrique et, là où s'installe le chauffage électrique, les familles nom- breuses et modestes doivent partir. En effet, il faut dans ce cas bien con- trôler ses thermostats, laisser portes et fenêtres rigoureusement fermées, et cela n'est pas compatible avec le rythme des familles simples surtout si elles sont d'origine méditerranéenne : on aime aérer sa maison, sa literie, fenêtres grandes ouvertes, on vit dehors, on rentre et on sort sans cesse. Pendant ce temps l'extraction mécanique fait pénétrer l'air froid, les radia- teurs débitent à fond. A la fin du mois, l'arrivée de la facture d'électricité peut poser de tragiques problèmes.

Bref, n'avons-nous pas atteint un seuil à partir duquel la croissance énergétique n'est plus justifiée par le bien-être, mais par le profit et le pouvoir?

Face à cette situation, existe-t-il une autre voie possible? D'autres choix énergétiques permettraient-ils d'assurer notre équilibre tout en respectant notre environnement et nos ressources? Aideraient-ils les pays en voie de développement à acquérir un niveau de vie correct tout en préservant leur culture et sans accroître leur dépendance? Laisseraient-ils à nos enfants la possibilité d'une vie saine et riche ?

Il n'est pas facile de répondre à ces questions, mais nous espérons que ce livre contribuera à une prise de conscience et à la réflexion des lecteurs.

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Première partie

ÉNERGIE ET SOCIÉTÉ

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1 . L ' é n e r g i e e n F r a n c e

L'énergie que nous consommons La consommation actuelle en France

Nous consommons beaucoup d'énergie, beaucoup plus qu'il y a dix, vingt ou cent ans. L'énergie de traction animale, l'énergie de l'homme, du bois, du vent, des moulins à eau ont cédé la place aux énergies fossiles, charbons puis hydrocarbures.

Consommation d'énergie primaire en France en millions de tonnes d'équivalent pétrole (tep)

(voir la figure 1)

1900 31,5 Mtep 1950 56 1960 85,7 1970 148,3 1973 174,8 197 6 . . . . . . . . . . . . . 174,2 197 7 178,4 197 8 182

prévisions 1979 . . . . . . . . . . . . . 189

Fig. 1.1 - Évolution de la consommation d'énergie en France

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La croissance de l'énergie a été exponentielle jusqu'en 1973. Cette année-là, on a consommé en France deux fois plus d'énergie qu'en 1963. Avons-nous été deux fois plus heureux? Les inégalités ont-elles été ré- duites? L'aide de la France aux défavorisés, aux affamés a-t-elle été multipliée ?

En 1974, la consommation d'énergie a un peu diminué, et le niveau de 73 n'a été retrouvé qu'en 76. Pendant ce temps, la production officielle a crû de 10 %. Mais alors, consommation d'énergie et production ne sont pas tout à fait liés ?

L'énergie consommée en France correspond en 1978 à 3,5 tonnes de pétrole par personne. C'est beaucoup; où passe donc cette énergie?

Chiffres officiels de la consommation d'énergie par secteurs d'activité en 1978

Industrie 59 Mtep Domestique et tertiaire 66 Transports 35 Secteur énergétique et pertes. 22 Total . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182

Mais cette classification officielle par secteurs d'activité cache pudique- ment des choses importantes qui échappent au particulier : la construction d'ouvrages imposants pas toujours utiles, autoroutes, aérodromes, ports; la consommation de l'armée dont le budget croît rapidement; le dévelop- pement des centrales nucléaires, d'Eurodif, etc.

L'industrie utilise à peu près un tiers de l'énergie. Certains secteurs sont particulièrement gourmands : l'électrochimie, l'aluminium, l'acier, le papier, le verre, le ciment, la chimie elle-même. L'énergie dépensée dans le secteur des transports croît rapidement avec le développement des trans- ports routiers et aériens. Cela représente un cinquième du total.

L'industrie de l'énergie auto-consomme aussi de l'énergie pour raffiner notre essence, extraire le charbon et le gaz, transporter l'électricité. Cela conduit à une proportion notable de la consommation française : 12 % . Ce chiffre officiel cache dans le cas de la consommation d'électricité des pertes bien plus importantes : en effet, lors de sa fabrication, on perd les deux tiers de la chaleur fournie par la combustion du fuel ou par la fission de l'uranium. Or, ces pertes ne sont pas comptabilisées dans le «secteur éner- gétique et pertes», mais sont attribuées aux trois autres secteurs d'activité. Cela peut représenter plus de 30 Mtep, ce qui revient à doubler au moins les pertes reconnues et à les porter à 25 ou 30 % de la consommation totale! (Pour plus de détails sur cet astucieux jeux d'équivalence éner- gétique destiné à masquer le mauvais rendement de notre industrie de l'énergie, se reporter à l'article de Patrice Ramain dans la Revue de l'énergie, mars 1977, n° 292, p. 165.)

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Quelques unités d'énergie

C'est fastidieux, mais comment faire autrement pour s'y retrouver dans le maquis des chiffres?

Dans le premier chapitre, il sera souvent question de tep et de Mtep. Il s'agit de tonnes équivalent pétrole et de millions de tonnes équivalent pétrole.

1 tep = 10 000 thermies = 1,5 tec (tonne équivalent charbon). Par ailleurs, la thermie qu'on avait l'habitude de trouver sur nos factures de gaz est équivalente à 1 million de calories.

1 thermie = 1 million de calories. Une autre unité d'énergie très répandue est le kWh. 1 kWh = 0,86 thermie, mais on distingue les kWh ther-

miques des kWh électriques que l'on obtient à partir des kWhth avec un rendement conventionnel de 0,39.

La consommation d'énergie dans une famille

Les particuliers consomment directement de l'ordre du quart de toute l'énergie produite en France, soit à peu près 0,8 tonne de pétrole par per- sonne et par an, sur les 3,5 tonnes de la consommation nationale par habitant. Ce chiffre de 0,8 tonne concerne le chauffage, l'eau chaude, la cuisine, l'électroménager, l'éclairage. Il ne concerne pas la circulation automobile.

Dans le tableau ci-contre, on remarque la part importante du chauffage, qui dépend de la qualité de l'isolation, de la taille du loge- ment et du type d'habitat (un appartement nécessite pour être chauffé près de deux fois moins d'énergie en moyenne qu'une mai- son).

Notons également la consom- mation importante d'appareillages dont la vente se développe depuis peu : lave-vaisselles, congélateurs.

La consommation totale d'élec- tricité des particuliers est de l'ordre de 40 milliards de kWh, soit les deux tiers de l'électricité consom- mée en basse tension ou encore 20 % de la consommation totale d'électricité. Sur ce total, l'éclai- rage des logements ne représente

Quelques chiffres extraits du numéro spécial de la revue

Que choisir?, «Au soleil de l'an 2000»

Consommations moyennes en tonne équivalent pétrole par foyer Chauffage 0,9 à 3,4 tep Eau chaude 0,22 Cuisson 0,07 È)ectroménager.... 0,25

Consommations moyennes en kWhéi par appareil et par an Téléviseur 250 kWh Four + grilloir 350 Machine à laver

le linge 450 Lave-vaisselle 700 Réfrigérateur ...... 280 Congélateur....... 800

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que 4,5 milliards de kWh, soit un peu plus de 2 % de la consommation totale française d'électricité. On peut donc s'opposer au programme nucléaire sans être pour autant partisan du retour à la bougie...

La consommation d'électricité augmente rapidement

De 1973 à 1977, la consommation totale d'énergie a augmenté de 2 %. Dans le même temps, celle d'électricité a crû de 21 % ! La politique du tout-électrique se met donc en place.

Production d'électricité en France en milliards de kWh (ou TWh) [chiffres officiels]

Consommation d'électricité (TWh)

La croissance de la consommation d'électricité est importante en 1978, soit 6,7 % . Elle est due pour l'essentiel à l'augmentation de consommation en basse tension, elle est liée au développement du chauffage électrique dans les logements et le tertiaire.

Voici à ce sujet un extrait de ce que l'on pouvait déjà trouver en 1972 dans une thèse soutenue par un chercheur du Centre d'études nucléaires de Grenoble, R. Moracchioli :

« La campagne de promotion actuellement mise en place par l'EDF nous semble prendre des dimensions inquiétantes que des considérations éner- gétiques très simples condamnent.

« En effet, la suite des transformations énergie thermique à haut potentiel - énergie mécanique - énergie électrique - énergie thermique à faible potentiel nous apparaît comme un chemin tortueux difficilement justifiable dans le cas de chauffage de locaux ou de dispositifs industriels, puisque chaque transfor- mation correspond à une perte à cause des rendements de conversion diffé- rents de l'unité. Par ailleurs, il ne nous semble pas que les avantages certains de ce procédé, comme la souplesse d'emploi, la propreté, soient des arguments suffisamment objectifs pour promouvoir cette solution. »

Cette inquiétude prend actuellement des dimensions angoissantes...

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L'effet du climat apparaît dans la production d'électricité d'origine hydraulique. En 1977, le temps humide a permis une production hydrau- lique très importante, inespérée pour les finances d'EDF et pour... le financement du nucléaire.

D'où vient l'énergie que nous utilisons actuellement?

Les données officielles

Énergies primaires consommées en France, exprimées en millions de tonnes équivalent pétrole (cf. Enerpresse n ° 2220)

Les hydrocarbures, pétrole plus gaz, représentent 70 % de toute l'énergie que nous consommons. En attendant l'ère du «tout électrique, tout nucléaire», nous sommes encore dans le «tout pétrole». La part du charbon stagne, tandis que celle du gaz naturel s'accroît (d'après les pouvoirs publics, le gaz devra couvrir 16 % des «besoins» en énergie en 1985, au lieu de 11,5 % actuellement).

Quant aux énergies dites nouvelles, elles n'existent pas. Notons que le terme «énergie primaire» devrait être réservé aux seules

énergies récupérables à partir d'une source par une seule transformation. C'est le cas des combustibles qu'il suffit de brûler. Les cas de l'électricité hydraulique et de l'électricité nucléaire sont discutés ci-dessous.

L'électricité

La caractéristique principale de l'électricité est de ne pas pouvoir être industriellement stockée : aussitôt élaborée, elle doit être utilisée. Cela a deux conséquences :

- Le potentiel de production doit correspondre à la consommation maximale. - Il n'y a pas de «source d'électricité », elle doit être produite à partir

d'autres sources d'énergie par au moins deux transformations successives. C'est une énergie secondaire.

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Certes, on peut stocker de l'électricité dans des batteries ou des piles, mais compte tenu du coût, cela ne peut concerner qu'une très faible part de cette forme d'énergie.

Par contre le stockage d'eau dans des retenues naturelles ou artificielles est possible et transformable à la demande en électricité avec un très bon rendement : on passe d'une énergie noble, l'énergie potentielle de l'eau, à une autre énergie noble, l'énergie mécanique de la turbine qui entraîne un alternateur. L'électricité d'origine hydraulique est alors considérée comme une «énergie primaire». Notons que parmi les énergies primaires actuelles, c'est la seule qui soit «renouvelable », c'est-à-dire alimentée régulièrement par l'action du soleil.

En brûlant du charbon, du fuel ou du gaz, on peut fabriquer de la vapeur d'eau qui actionnera une turbine entraînant un alternateur. Dans ce cas, on a transformé de l'énergie chimique, celle des combustibles fossiles, en énergie dégradée : la chaleur, avec laquelle on reconstitue une énergie noble : mécanique de la turbine, puis électrique. La transforma- tion de chaleur en énergie noble se réalise avec un très mauvais rendement (de l'ordre de 30 %). De plus, les centrales thermiques sont longues à mettre en route ou à arrêter, leur changement de régime de fonctionne- ment est coûteux en énergie.

Les turbines à gaz constituent une exception par rapport aux autres combustibles : leur rendement est élevé, 40 %, et elles sont souples d'emploi. Elles peuvent donc assurer les pointes de consommation. Mais, à cause des investissements nucléaires, on manque de crédits pour en construire.

L'électricité élaborée dans les centrales thermiques est dite «secondaire» puisqu'elle provient de la consommation d'une autre énergie primaire.

Qu'en est-il de l'électricité d'origine nucléaire? Au lieu de brûler un combustible, on provoque la fission contrôlée de l'uranium. La chaleur dégagée par cette fission sert à générer de la vapeur qui actionne une tur- bine. Le processus et le mauvais rendement thermique sont donc les mêmes que pour les autres centrales thermiques, si ce n'est que l'énergie primaire consommée est l'uranium, au lieu d'être un combustible fossile. Notons que les réserves d'uranium sont limitées.

Dans la comptabilité officielle, l'énergie produite par les centrales nu- cléaires est comptabilisée en tep qui auraient été nécessaires pour fabriquer la même quantité d'électricité (avec un rendement théorique de 39 %, bien que le rendement des centrales nucléaires soit plutôt inférieur à 30 %...).

L'électricité d'origine nucléaire est une énergie secondaire, comme pour les autres centrales thermiques. Elle est pourtant comptabilisée officielle- ment en énergie primaire, peut-être pour la présenter comme une res- source «nationale », même si l'uranium vient d'Afrique noire, l'uranium enrichi d'Amérique du Nord et d'Europe de l'Est, et la licence Westing- house des USA !

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Le coût énergétique de la fabrication d'électricité

L'élaboration d'électricité coûte beaucoup d'énergie, non seulement toute la chaleur perdue dans les centrales thermiques (plus des deux tiers le plus souvent), mais aussi toute l'énergie nécessaire à la construction des équipements nucléaires : construction des centrales, construçtion de l'usine d'enrichissement Eurodif et des quatre centrales du Tricastin devant lui fournir l'énergie nécessaire. Il faut y ajouter encore l'extraction de l'uranium, le retraitement des combustibles à La Hague, le démantèle- ment des centrales désaffectées, etc.

Aucune étude sérieuse complète n'a été effectuée pour chiffrer le coût énergétique de la production d'électricité par les centrales nucléaires. On peut affirmer qu'actuellement le programme électronucléaire français consomme plus d'énergie qu'il n'en fournit et qu'une véritable évaluation de la consommation de l'industrie de l'énergie ferait apparaître un gouffre!

Seule l'hydraulique a un rendement satisfaisant et cela sert aux comp- tables officiels pour prétendre que le rendement de la fabrication globale moyenne d'électricité est de 39 %. La réalité est bien inférieure.

La politique française de l'énergie Comment se pose actuellement le problème de l'énergie en France?

Une caractéristique du problème actuel de l'énergie en France est la dépendance de l'étranger et le coût en devises des importations. En 1978, 64 milliards de francs ont été dépensés pour acheter l'essentiel des énergies primaires consommées, couvrant 75 % de nos besoins.

Achats des énergies primaires à l'étranger en 1978 (en Mtep)

Pétrole 104,9 Mtep sur 106,8 consommés Charbon 16,3 32,2 Gaz naturel . . . . . . . . . . . . . 13,8 20,9

(Source : 101, Lettre d'information du ministère de l'Industrie du 10 avril 1979.) Cette situation doit s'aggraver sous l'effet de l'augmentation des cours

du pétrole et des matières premières d'une part, et d'autre part de la crois- sance de la consommation d'énergie quasi inéluctable dans la société actuelle.

De plus, elle présente l'inconvénient de faire dépendre notre activité des aléas politiques dans les pays producteurs, de changements de régimes imprévus qu 'il convient de neutraliser ou de contrôler au bénéfice de nos pays riches.

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La fin du «tout pétrole» implique-t-elle inévitablement l'avènement du «tout nucléaire»? L'inquiétant dévelop- pement du programme électronucléaire français pose en l'occurrence des questions dont il devient chaque jour plus urgent de maîtriser les termes.

- Les énergies dites nouvelles sont-elles utilisables dès maintenant?

- Les technologies «douces» peuvent-elles constituer une alternative crédible?

- Jusqu'à quel point sont-elles réellement «dôuces», et que peut-on en attendre dans la société de demain?

C'est à ces questions plus particulièrement qu'ont été sans cesse confrontés les auteurs au cours des stages de formation d'adultes, débats ou sessions de formation permanente qu'ils animent depuis quatre ans au labora- toire « Énergies nouvelles» de l'université scientifique de Grenoble.

C'est pour tenter d'y répondre de façon plus organisée qu'ils ont réalisé ce document, qui regroupe l'ensemble des informations essentielles et se veut le préalable à une réflexion critique positive.

Dans une première partie, les auteurs présentent le contexte actuel de l'énergie en France et expliquent pour- quoi ils souhaitent favoriser le développement des éner- gies alternatives. Dans la seconde partie, ils analysent chaque énergie «nouvelle» quant à ses possibilités, son degré de développement, son coût et ses perspectives. d'avenir. Rédigés dans un constant souci de vulgarisation — au sens noble du terme —, ces chapitres plus techni- ques restent accessibles à tout le public motivé, et lui ouvrent les portes d'une information plus spécialisée.

Ce livre est donc un document d'initiation et de travail, qui aura atteint son but s'il provoque la réflexion et la dis- cussion sur le type de société en jeu.

ISBN 2-85744-059-Er

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