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VENDREDI 26 MAI 2006 Nizimazine # Le cinéma européen à Cannes... par de jeunes européens # 4 Anche libero va bene L’amico di famiglia Silvio Orlando

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Vendredi 26 Mai 2006

Nizimazine#1Le cinéma européen à Cannes... par de jeunes européens

Lundi 22 mai 2006

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Anche libero va beneL’amico di famigliaSilvio Orlando

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NIZIMAZINE est un magazine gratuit publié par l’association NISI MASA avec le soutien du Ministère de la Jeunesse.REDACTION Rédacteur en chef Matthieu Darras Secrétaire de rédaction Emilie Padellec Maquettiste Laure [email protected] Ont contribué à ce numéro : Jessica Campanozzi, Luca Döme, Stéphanie Giertta, Caroline Gréard, Guillaume Giovanetti, Joshua Fitoussi, Lasse Lecklin (photo p. 7), Hannah Marshall, Georges Mitsis, Silvia Taborelli, Alkistis Tsitouri (photo p. 3) Fabrication – Imprimerie Cyclone, 12 rue des Mimosas, 06400 Cannes. NISI MASA 10 rue de l’Echiquier, 75010, Paris – + 33 (0)1 53 34 62 78, + 33 (0)6 32 61 70 26 [email protected] - www.nisimasa.com

Diffusions non-commerciales organisées dans toute l’Europe!

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Edito ela faisait quelques semaines déjà que je me préparais à venir ici. Les billets de train et la robe de soirée avaient été achetés bien en

avance. L’excitation montait au fur et à mesure que les jours passaient, que les gares défilaient : Paris, Fréjus, Saint Raphaël. Et voici Cannes. Encore plus impressionnante que je ne l’avais rêvée.

J’imaginais le festival à travers les images que peu-vent en donner les médias. Montée des marches, Palme d’Or, jury prestigieux, la Croisette, le Carlton. Je n’imaginais pas pouvoir le vivre en vrai.

Mais Cannes, c’est plus que cela. Une ville entière dédiée au cinéma pendant une quinzaine. L’ombre chinoise de In the Mood for love qui s’affiche sur la Croisette et nous rappelle la singularité du septième art. Des quidams en smoking ou robe de soirée un peu partout et à toutes heures. Des panneaux “Cannes fait le mur”, hommages aux plus grands,

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de Charlie Chaplin à Clint Eastwood en passant par Catherine Deneuve. Des cinéphiles chanceux détenant une place pour le théâtre Louis Lumière. Et d’autres, avides, à la recherche du précieux sésame. Mais avant tout, des films inédits : court-métrage étonnant (Woman and Gramophone de Ola Simmon-sson et Johannes Stjärne Nilsson) ou documentaire qui donne à réfléchir (Kigali, des images contre un massacre, de Jean-Christophe Klotz), que l’on ne reverra probablement jamais ou si peu.

Dans le train qui me ramènera à la réalité, je garderai dans mon souvenir quelque chose de bien plus fort et de bien plus magique que cela : les rencontres riches d’échanges et de partage, entre le cinéaste et son public, entre les cinéphiles amateurs et les professionnels, les personnes de tous horizons qui partagent le même but : découvrir et faire découvrir la magie au cinéma.

Caroline Gréard

Cliché du jourL’accroche coeur...

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La magie au cinéma

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La Quinzaine ça me va aussi », tels auraient pu être les mots de l’acteur italien Kim Rossi Stuart, vu

récemment dans Romanzo criminale de Michele Placi-do, et qui pour sa première réalisation met en scène une histoire profondément humaine. Dès la première scène, tout est montré, très simplement, très clairement : la belle gueule et les belles fesses du père seul repassant les vêtements de sa famille monoparentale ; la dualité de sa relation avec son cadet, Tommaso, douze ans, splendide alchimie entre un amour autoritaire et un tendre affron-tement permanent. Avant de partir à l’école, Tommaso, impressionnant de maturité, remet donc ça sur le tapis : plutôt que faire de la natation comme son père Renato le souhaite, s’il faisait du foot, comme tout le monde ? C’est le premier clash du film. Car pour le fauché éternel qu’est Renato, le foot, « c’est un sport de cons. » De la part d’un Italien, la réplique est assez jouissive.

Tout passe dans cette première pseudo-dispute. Les deux protagonistes comprennent pleinement les dé-sirs de l’autre, mais, comme dans la vraie vie, doivent composer avec un ensemble de facteurs. A commencer par eux-mêmes. C’est-à-dire un jeune garçon pénétrant l’adolescence et toutes ses données (premiers amours, envie d’autre chose – le jeune voisin riche qui l’invite à partager son train de vie, etc.), et un homme de 35 ans, abandonné par sa femme « qui baise à droite à gauche » et galérant dans son emploi de ‘steadicamer’ – Renato est freelance, et à tout moment au bord de la crise de nerfs.

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Cette entente parfaite entre ce père et ce fils , mais égal-ment avec Viola, la sœur de Tommaso, dure tout au long du film, à notre plus grand plaisir. Elle résiste aux coups durs. Comme lors du retour de la mère, jeune femme instable qui finira, Renato et Tommaso le savent bien, par repartir. Ou encore quand Tommaso décide d’abandonner la na-tation, ou qu’il s’apprête à trahir son père en partant aux sports d’hiver avec les voisins fortunés de l’immeuble.

Finalement, le titre du film lève son énigme, prononcé qu’il est par le garçon. « Libero (poste d’arrière central, ndlr), ça me va aussi », dit-il, lorsque son père accepte qu’il fasse du foot, alors qu’un poste plus à l’avant lui plairait beaucoup plus. Mais libero, c’est peut-être le poste le plus « nata-tion » du foot. Tous deux y trouvent leur juste milieu, leur équilibre du moment.

Kim Rossi Stuart explore avec brio les facettes d’une relation père-fils, avec tout ce que cela comporte de force, d’immédiateté, d’immaturité et de courage. Ainsi Anche libero va bene tire sa force de sa nature profondé-ment masculine, de par son traitement et son sujet. Un film d’hommes, un vrai.

Guillaume Giovanetti

Kim Rossi Stuart, Anche libero va bene

Anche libero va beneKiM rossi stuart (itaLie, Qr)

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eremia, soixante-dix ans, est laid, sale, cynique et ironique. Mais riche. Il entretient un rapport obsessionnel avec sa mère, son père, l’argent, les

femmes. Bref, la vie ! Pour la ‘gagner’, cette vie, Geremia travaille comme tailleur tout en étant usurier. La ville entière dépend de lui, il le sait et il l’exploite. Seul parce qu’il l’a choisi, il n’en demeure pas moins vrai que personne ne peut rester bien longtemps avec cet homme haïssable. Sans même parler d’amitié.

Le pitch est alléchant. Mais même après que les deux heures du film ont défilé devant nos yeux, il est difficile de saisir le drame personnel de Geremia. On reste froid devant le grand écran en attendant d’être touché -chose qui n’arrivera jamais- par l’interprétation du protagoniste. Au lieu de cela, une scénario très obscur nous est livré, la réalisation demeurant assez superficielle. Le metteur en scène, Paolo Sorrentino, n’a rien de bien neuf à nous proposer, ayant adopté une approche as-sez conventionnelle en ce qui concerne la trame narrative. Reste la musique, seul élément agréable qui permet de suivre le film jusqu’à sa fin. Dommage.

Georges Mitsis

L’amico di famiglia

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L’Amico di famigliaPaoLo sorrentino (itaLie, CoMPétition)

C’est dans l’air du temps les films politiques, dénonciateurs de la corruption et des magouilles des hommes politiques. Il caimano, de Nanni Moretti, est bien de ceux-là. Mais pas seulement. La réalité y côtoie la fiction de manière décon-certante. Il aurait été facile de regarder ce film en pensant que les scandales à la Berlusconi, tellement grotesques qu’ils en deviennent comiques, étaient propres à l’Italie et à sa vie politique mouvementée. C’était avant que n’éclate en France une certain polémique mettant en scène un Premier Ministre mis à mal par l’opinion publique, son Ministre de l’Intérieur ouvertement ambitieux et une certaine banque luxembourgeoise. Le tout sur fond de blanchissement d’argent et de comptes secrets. Les accusations pleuvent, le casting est alléchant : un corbeau, un juge, un ancien ponte des services secrets, un journaliste qui en sait trop… Le scénario semble déjà tout écrit. Et oui ! On savait que le cinéma s’inspirait des scandales politiques mais voilà que l’inverse semble aussi se produire. Il caimano en V.F., on traduit cela comment ? Clearstream ?

Hannah Marshall

Il Caimano en V.F

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Coin du court

ne première et dernière rencontre entre un père et un fils, extraordinaire et tragique. Dans Firn, moy-en-métrage d’Axel Koenzen, la dramaturgie se

base essentiellement sur des scènes changeantes ; des intérieurs étroits (un compartiment de train, un refuge) et de vastes paysages (le sommet d’un pic, une terre dé-sertée) qui donnent au spectateur un aperçu symbolique de cette relation père-fils en le faisant expérimenter les deux formes d’espace. On comprend ainsi qu’ils ont dû aller au bout du monde pour se retrouver là où l’origine du fils a commencé. Dans un tel environnement, le spec-tateur devient témoin d’une épreuve cruelle.

Après des années d’abandon, le père avoue à son enfant qu’il n’était pas désiré, une réponse aux provocations symboliques de son fils. L’histoire se développe ainsi à travers une série d’interactions abstraites, leur seule chance d’entrer en contact. Dans ce débat spirituel silencieux, le fils met sa vie en danger en posant une question à laquelle son père répond par un refus franc et sans émotion, refus qui mènera à une fin tragique. Le point culminant intervient quand le fils et le père sont au plus près l’un de l’autre, créant un rituel étrange avec la figure symbolique du fils masqué en Pierrot.

Des sons et des images, des espaces et des états spir-ituels, autant de moyens qui nous intriguent du début la fin du film.

Luca Döme

Carte Blanche...

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Agenda10 h 00 Rencontre avec… Brigitte Faure

Direction de production (Sur mes lèvres, Caché, L’homme du train,…) Salle du Palmier Maison des Associations, 9 rue Louis Braille

15 h 00 Rencontre avec Marie Gillain (Marraine du Prix de la Jeunesse) Salle du Palmier Maison des Associations, 9 rue Louis Braille

20 h 00 Remise des Prix de la Semaine de la Critique Espace Miramar

00h30 Projection de minuit Clerks 2, de Kevin Smith Théâtre Claude Debussy

Firn, aLLeMagne, PrograMMe 1 CinéFondation

axeL Koenzen

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ANOREXICANNES

Me voilà assise sur le sable face à la mer, entre la Plage des Palmes et le Majestic’s 59. Le ruissellement de l’eau détend, le bruit des fourchettes agacent. Petits fours, champagne, assiette d’écrevisses, la restauration de Cannes est comme le cinéma : ça fait envie mais pour intégrer leur pré carré, tu peux toujours rêver. Alors que les organisateurs du festival, les starlettes populaires et la plupart des journalistes mangent à leur faim, de mon côté je vais encore avaler une glace à la fraise (enfin, 90% d’eau et 10 % de colorants pour la modique somme de 3 euros) en guise de petit déjeuner, déjeuner et dîner.

Le comble c’est quand un journaliste t’arrête pour te demander de prendre ta glace en photo, alors que toi t’en as vu d’autres s’alimenter comme des Rois sur leurs yachts, emportant même des réserves pour la route. En définitive, le Cannes des festivaliers c’est le lieu le plus pervers au monde où se rencontrent insomniaques et anorexiques. Mieux vaut éviter de penser qu’à quelques pas de là, d’autres dégustent salades crabe-calamar et vin blanc. Enfin bon, pourquoi se plaindre quand on a la chance de voir des films visibles nulle part ailleurs.

Jessica Campanozzi

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Prix de la jeunesserenContre ProFessionneLLe aVeC...

ue serait un film sans le travail rigoureux, ingénieux et créatif de ceux qu’on appelle les techniciens ? Eux qui doivent comprendre les désirs du réalisa-

teur. Réussir à les interpréter en termes techniques. Par-venir à rassembler les matériaux nécessaires pour con-struire le film, et en faire un produit fini. Ayant travaillé avec les plus grands (Kassovitz, Costa-Gavras, Blier, Trintignant, etc.), Yann Kergoat et Pierre Befve - lequel a obtenu le César du Meilleur Son pour Le grand bleu, se définissent avant tout comme des collaborateurs de création.Chacun a eu un parcours différent. Yann Kergoat, chef monteur, a commencé par étudier la sociologie, avant de devenir stagiaire sur des publicités, puis assistant réali-sateur. Ne trouvant pas sa place sur les plateaux, il s’est alors dirigé vers les salles de montage, où enfin, il a eu l’impression de se sentir utile, d’apporter véritablement quelque chose à un film. Comme beaucoup dans la profess ion, son mét ier i l l ’a appr is sur le tas.

Pierre Befve a eu lui un parcours plus traditionnel. Rêvant d’imiter les Rolling Stones, enfant il se voyait guitariste. Il s’est donc logiquement inscrit à l’école Louis Lumière pour devenir ingénieur du son. C’est là qu’il découvre tous les métiers techniques que le cinéma offre, notamment celui de directeur de la photo. Pour Yann Kergoat, la confiance, basant la relation avec le réalisateur, est essentielle pour concilier les désirs de cha-cun. Pierre Befve évoque lui la difficulté qu’ont les réali-sateurs de définir précisément leurs souhaits en matière de son. Face à cela, l’ingénieur du son possède certes de nombreuses libertés, mais en contrepartie, il lui revient de faire des choix décisifs. Ces dernières années, la technol-ogie a pris une part de plus en plus importante dans ces métiers. Il faut désormais apprivoiser l’outil informatique pour devenir monteur ou ingénieur du son. Une vérité demeure sur ces métiers difficilement accessibles : c’est l’envie et la rage d’y arriver qui font la différence.

Caroline Gréard

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Pierre Befve § Yann Kergoat

Jury-Jeunes 3 Questions à Lasse LeCKLin Comment définirais-tu la place du

cinéma européen dans ce que tu as vu ?

Cela m’étonne un peu qu’il y ait autant de films européens. Tous les continents ne sont pas représentés. L’Afrique par exemple. Ce qui est bien à Cannes, c’est quand même l’opportunité de découvrir des films venus de très loin. Par exemple, c’est la première fois que je voyais un film paraguayen. C’était intéressant, non pas en soi, mais parce que la mise en scène était vraiment unique. Le risque en effet pour les films venant de cinémato-graphiques peu développées, c’est toujours de copier ce qui se fait ailleurs.

Tu es photographe. Peux-tu dire un mot sur le lieu où tu as fait ton auto-portrait ?

En fait, j’ai pris cette photo sur le tournage d’un film de science-fic-tion, dans le désert de Patagonie. C’est l’histoire d’extra-terrestres qui décident d’atterrir là-bas, parce qu’ils trouvent les Argentins plutôt ‘cool’… Là je me trouve en smoking dans la salle de télé-transportation !

Le festival touche à sa fin. Un premier bilan sur la trentaine de films vus pour le Jury-Jeunes ?

Une chose est sûre, c’est que la qualité varie beaucoup selon les différentes sec-tions. Autant la Semaine de la Critique était d’une bonne tenue générale, autant parmi les sélections d’Un Certain Regard et de la Quinzaine des Réali-sateurs, il y avait beaucoup de films ‘horribles’, en particulier des films français. Il est difficile de dégager des thèmes communs de toute cette diversité. J’ai quand même été frappé du fait que plusieurs films traitaient de la confrontation entre une vie pauvre dans un village et la vie moderne urbaine, comme Sonhos de peixe de Kirill Mikhanovsky ou Bled Number One de Rabah Ameur-Zaïmeche.

Propos recueillis par M.D.

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PortraitsiLVio orLando

L’anxiété aimable du cinéma italienLucchetti, Mazzacurati, Salvatores, Moretti, Ferrario, Milani ou Virzì. P a r c o u r a n t le cinéma italien des deux dernières décennies, son chemin a croisé à peu près tous les réalisateurs de cette génération révélée en Italie à la lisière entre les an-nées 80 et 90. Fa c e à ces années complexes, difficiles à comprendre et surtout, à transférer à l’écran, les interprétations de Silvio Orlando nous en donnent justement des clés de lec-ture simples, mais précieuses. Des per-sonnages ordinaires qui nous laissent la sensation agréable de révéler notre quotidien. Jouant des personnages pourtant très différents, Orlando a su tisser entre ses rôles un fil rouge suscitant la complicité du spectateur. Silvio Orlando, un ami de toujours.

Né à Naples en 1957, l’acteur y a vécu ses premières expériences au théâtre ; une passion qu’il continuera à cultiver comme metteur en scène. Très tôt, il émigre au nord. En 1985, il se retrouve dans la capitale lom-barde. C’est le temps des années de “Milano da bere” (“Milan à boire”), où tout le monde joue des coudes pour réussir dans cette ville de l’argent et du succès. Au même moment, naît le Teatro dell’Elfo, dirigé par le jeune Gabriele Salvatores, un tremplin im-portant pour beaucoup de comiques italiens. Au contact de cette troupe, qui oppose aux valeurs des yuppies une vision plus amère de la vie, la carrière d’Orlando prend son essor. Les difficultés d’un Napolitain à Milan. Tel est le premier rôle cinémato-graphique que Salvatores donne à Orlando dans Kamikazen, qui signe en 1987 les débuts du comédien à l’écran.

Après cette première expérience au cinéma, Orlando rencontre celui qui aujourd’hui, à dix-sept ans de distance, le conduit sur la Croisette. Mario, l’entraîneur de water-polo (Palombella Rossa, 1989) est devenu Bruno Bonomi, metteur en scène en crise. Au fil des années, une étroite collaboration s’est nouée entre Silvio Orlando et Nanni Moretti. Ce dernier l’a pourtant beaucoup fait jouer dans ses films pour des rôles secondaires, souvent comme faire-valoir. En témoignent le patient Oscar de La Stanza del figlio ou le chef trotskiste d’Aprile.

Peu à peu, Silvio Orlando est parvenu à se bâtir un personnage : celui d’un homme fragile et sensible, souvent en crise mais jouant avec l’ironie néces-saire pour rester sympathique et affable. Il incarne de façon très juste ce type de personnes simples et entières ; des sentiments rarement si bien exprimés de la part de la gente masculine. En ce sens, il est très apprécié des specta-trices, et un peu moins des hommes, poussés qu’ils sont à se confronter à ces aspects de leur propre identité. Souvent choisi pour des films qui traitent de la dégénérescence de l’Italie, Silvio Orlando est parfait dans la peau du looser sympa, comme sous les traits du journaliste de gauche en vacances de Ferie d’Agosto. Ses personnages peuvent être récurrents, son jeu comique s’ajuste à chaque film. En 1999, Giuseppe Piccioni lui donne la possibilité de s’essayer à un rôle plus dramatique dans Fuori dal mondo, un film délicat, capable de représenter le réel sans clameur. Une occasion pour Silvio Orlando d’avoir à ses côtés Margherita Buy qui, aujourd’hui, l’accompagne sur la Côte d’azur.

L’acteur ne cachait pas sa nervosité face à sa venue à Cannes. Lourde tâche, mais aussi mérite, de voler la vedette à Nanni Moretti. Déjà légendaire, la décla-ration d’Orlando au producteur du film pendant le casting : « Si Nanni cherche un personnage italien pour son nouveau film mais qu’il ne me choisit pas moi, je me tue. » Dans cette interprétation de metteur en scène de série B en crise, il incarne à nouveau, mais avec plus de complexité et de force que dans le passé, un personnage de perdant, qui, souffrant d’anxiété et de solitude, ne donne pas moins le meilleur de lui-même à la première occasion de socialisation.

Belle union que ces retrouvailles avec Margherita Buy : les deux acteurs fragiles et sensibles du cinéma italien font ainsi un peu d’ombre à Moretti le narcissique, le ‘caimano’ de notre cinéma.

Silvia Taborelli