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JURISPRUDENCE G7 No 3113. - Tribunal de 1J'e instance de Gand. - 24 mars 1930. Enregistrement.- Prorogation.- Base imposable. L'drücle 4 de la loi tln 30 août 1913 p9rte qu'en cas de prorogation de société, le droit est percn sur le montant dn capital social an jour de la prorogation, augmenté, le cas échéant, des apports constatés dans ·l'acte de prorogation. Les mots << capital social n ont un sens très net et ]JJ'écis; ils indiquent Iles sommes, valeurs e 1 1 biens lnis en c01/Wlttn par les associés et rémunérés par des droits sociau.-r; à un autre point vue, le ca}Jital soci'al est le minimum tl' actif que les associés offrent en (/aran lie aux tiers el qn'Us se sont engagés à ne pas réduii·e par leur j(til; il s'oppose par son caractère de pamanence même au:r résen'es de toute natzn·e qtt'tme société peut se constituer el qui, en principe, restent à la disposition des ciés ou actionnaires.' Attendu qu'il est certain rjlle la perception Iitig'ieuse ne trouve aucun point d'ap- pui dans les termes mèmes de l'article .-1 de la loi du 30 aoùt 1913; que cette dispo- sition porte, en etJ'et, fJU'en cas dr Pl'Orogation de société, le droit est perçu sur le montant du capiLal social au jour de la prorog-ation, augmenté, le cas éch(•ant, drs , apports nouveaux constatés dans l'acte de prorogation ; que les mots «capital soc.ial » ont un sens bien net et précis ; qu'ils indiquent l'ensemble des sommes, val"em·s et bictis mis en commun par les associés et rémunérés par des droits sociaux ; qu'à un autre point de vue, le capital social est le minimum d'actif (lUe les associés offt•ent en garantie aux tiers et qu'ils se sont eng·ag·és ù ne pas réduire pat· leur rait ; par son caraclrre de permanence mème aux résenes de toute natme. qu'une société peut se eonsLituer et qui, en princive, restent ù disposition drs. associés ou actionnaires ; · Attendu sans doute que M. ·wauwrrmans, rapporteur de la loi ù la Chambre a-t- il prétendu IJÙC l'assiette du droit, dan.s le cas d'une l)}'Orogation de société, est le eapHal social majoré des réserves e-t minoré des pertes; mais que/cet aYis est trop en opposition avec le texte pour qu'il puisse être considéré comme l'expression de· la \'olonté du lég-islateur, alors surtout que rien dans les discussions dont Ir projet de loi a été l'objet ne vrouve que les Clwmhres s) soient ralliées ; Que l'administration de l'emeg'istt·ement, qui avait élabm·é le projet et qui, mieux · lltW le rapporteur en connaissait la portér exacte, s'est hien gardt 1 P au début de faire sieunr l'interprétation de l\1. 'Vauwermans, et dans sa circulaire elu 20 sep- tmnhre '1913,-faite donc au lendemain de la de la loi, elit trxtuellcmcnt: « les actes dr. ·IH'OI'Ogation de société sont souniis au droit sur ll' montant du capital social au jour de la prot·og·ation n ; en 'd'autres termes, sur le montant du capilal nominal, tel qn'il rxi.stait au jour de la eonstitution de la société, majoré ou selon le cas, des augmentations ou des réductions qui auraient été au eom·s de l'èxistencc de. la société; que I\1. ·wauwermans lui-même dans son Manuel prittique des sociétés· anonymes, abandonne I.a manière de Yoir qu'il avait exprimée dans son Rapport ct estime que la seule matière imposable dans l'acte de IH'Orog-a- tion de société est le montant du capital soeial ; · Attendu crur les déeisions donl se prôvaut l'Etat (jugement rlu Tl'ilmnal de pt·e-

No 3113. - Tribunal de instance de Gand. - 24 mars 1930. · Attendu, en effet, que le contrat judiciaire est lié par l'ajonrnement sur lJase de l'article 28 de la loi helg·e des

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JURISPRUDENCE G7

No 3113. - Tribunal de 1J'e instance de Gand. - 24 mars 1930.

Enregistrement.- Société.~ Prorogation.- Base imposable.

L'drücle 4 de la loi tln 30 août 1913 p9rte qu'en cas de prorogation de société, le droit est percn sur le montant dn capital social an jour de la prorogation, augmenté, le cas échéant, des apports constatés dans ·l'acte de prorogation.

Les mots << capital social n ont un sens très net et ]JJ'écis; ils indiquent ·z~nsemble Iles sommes, valeurs e1

1 biens lnis en c01/Wlttn par les associés et rémunérés par des droits sociau.-r; à un autre point ~le vue, le ca}Jital soci'al est le minimum tl' actif que les associés offrent en (/aran lie aux tiers el qn'Us se sont engagés à ne pas réduii·e par leur j(til; il s'oppose par son caractère de pamanence même au:r résen'es de toute natzn·e qtt'tme société peut se constituer el qui, en principe, restent à la disposition des a,.~so­

ciés ou actionnaires.'

Attendu qu'il est certain rjlle la perception Iitig'ieuse ne trouve aucun point d'ap­pui dans les termes mèmes de l'article .-1 de la loi du 30 aoùt 1913; que cette dispo­sition porte, en etJ'et, fJU'en cas dr Pl'Orogation de société, le droit est perçu sur le montant du capiLal social au jour de la prorog-ation, augmenté, le cas éch(•ant, drs , apports nouveaux constatés dans l'acte de prorogation ; que les mots «capital soc.ial » ont un sens bien net et précis ; qu'ils indiquent l'ensemble des sommes, val"em·s et bictis mis en commun par les associés et rémunérés par des droits sociaux ; qu'à un autre point de vue, le capital social est le minimum d'actif (lUe les associés offt•ent en garantie aux tiers et qu'ils se sont eng·ag·és ù ne pas réduire pat· leur rait ; qn'il's'oppo~e par son caraclrre de permanence mème aux résenes de toute natme. qu'une société peut se eonsLituer et qui, en princive, restent ù l~ disposition drs. associés ou actionnaires ; ·

Attendu sans doute que M. ·wauwrrmans, rapporteur de la loi ù la Chambre a-t­il prétendu IJÙC l'assiette du droit, dan.s le cas d'une l)}'Orogation de société, est le eapHal social majoré des réserves e-t minoré des pertes; mais que/cet aYis est trop en opposition avec le texte pour qu'il puisse être considéré comme l'expression de· la \'olonté du lég-islateur, alors surtout que rien dans les discussions dont Ir projet de loi a été l'objet ne vrouve que les Clwmhres s) soient ralliées ;

Que l'administration de l'emeg'istt·ement, qui avait élabm·é le projet et qui, mieux · lltW le rapporteur en connaissait la portér exacte, s'est hien gardt1P au début de faire sieunr l'interprétation de l\1. 'Vauwermans, et dans sa circulaire elu 20 sep­tmnhre '1913,-faite donc au lendemain de la public~tion de la loi, elit trxtuellcmcnt: « les actes dr. ·IH'OI'Ogation de société sont souniis au droit sur ll' montant du capital social au jour de la prot·og·ation n ; en 'd'autres termes, sur le montant du capilal nominal, tel qn'il rxi.stait au jour de la eonstitution de la société, majoré ou dirninu!~ selon le cas, des augmentations ou des réductions qui auraient été d(~cidôrs au eom·s de l'èxistencc de. la société; que I\1. ·wauwermans lui-même dans son Manuel prittique des sociétés· anonymes, abandonne I.a manière de Yoir qu'il avait exprimée dans son Rapport ct estime que la seule matière imposable dans l'acte de IH'Orog-a-tion de société est le montant du capital soeial ; ·

Attendu crur les déeisions donl se prôvaut l'Etat (jugement rlu Tl'ilmnal de pt·e-

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mière instance de Liége elu 19 mars -1925 et arrêt confirmatif de la Cour de Liége du 6 novembre suivant, ont été rendues claus une espèce toute différente du cas actuel; que, dans l'affaire. soumise à ces· juridictions, ces associés avaient stipulé, clans l'acte ·de société, qu'une part des bénéfices .ne serait pas distribuéè m~üs s'ajouterait chaque anilée au fonds social ; que le Tribunal de Liég·e a déduit de ceLLe stipulation que les bénéfices accumulés ne co·nstituaient pas une résene pnprement dite, mais élaient de fait une partie intég-rante elu eapital social ; qu'il est vrai que la Cour de Liég·e estime, avec le rapporteur de la .loi du 30 aoùt -J 913, que le droit d'enregistremeùt exigible sur l'acte de prorogatioü de société doit être li<JUidé sm' le ·capital social, augmenté

1

des réserves; mais qu'elle n'approuve pas moins, d'une 1~1anière expresse, le raisonnement tenu pm' le premier juge, de sorte qu'en réalité la perception elu droit sur les bénéfices réservés a été rég·ulièrr pour l<". mo tH que res bénéfices amaient été incorporés au capital de la société ;

Attendu <Ju'il s'ensuit qiw la demanderesse réclame à juste titre le remboursement du droit proportionnel perçu sm' le montant de ses réserves ct fonds de prévision lors dr la prorog·ation de son existrure, constatée par acte du notaire Nèvr, en date du 20 avril -1927 ;

Par ces motifs, Lr Trilnmal rejetant tontes conclusions rontrairrs _comme non J'ondées, coii~

damne l'Etat à payrr ù la dcm:uulcrrsse la somme de 84.G70 fr., avec les intérêts judiciaires, conüamne en outre l'Etat aux dépens de l'instance. ·

Observations.- L'application du clroitcl'enregistrement en matière d'actes de prorogation de ,sociétés soulève une controverse qui a fait l'olljet de diverses cil'culail'es et décisions administratives, ainsi que de plnsiem·s jugements ou al'rêts, notamment dn Tribunal et. cle la Cour de .Liége~ rappelés dans le jugement ci-dessus 1'apf1orté (Remte, 1927, no 2746). Ce sont les termes " capdetl social " et " ap1Jorts , . . employés clans l'art. 4 de la loi du 30 aoùt 1913 r1ui sont a la base de la discussion. Doivent-ils être entendus sensu stn'cto, suivant"la thèse elu Tr·ihllnal de Gand, ou bien de ütçon extensiYe clans le sens de fonrls ou avoir social .2 ·

Dans une étude parue clans la Revue (19.27, p: 82) : " Les bases de percc1Jtion cln d'l'Oit cl' em·cg-ist1·e1nent sur les actes de société,, nous avons défendu la thèse opposée ~t celle elu jugement que nous cmn­mentons ici. Nous avons montl'é, à titre d'argument principal, -que la loi du :30 aoùt 1913 avait visé les sociétés en génél'al, aussi bien l'an­cienne société clü Code civil que les sociétés commerciales et, notam­ment, la société anonyme. Or, dims la première de ces soc.iétés, le eapital social doit s'entendre largement : il se confond avec le fonds on wroir social~ compt·enant les résm·ves, compLes de prévision, etc. La Co m' de cassation, clans nn arrêt elu 1 cr mars 1928 (Rem te, l D28~

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p. 194), jtigeant en matiét·e d'augmentation de capital aYec pt·ime d'émission, a adopté cette tllése~ qui s'appliqüe, pae conséquelit~ aux actes de prorogation dont s'occupe le n1ême article 4 de la loi du 30 aoùt 1913 et à propos desquels le législateur emploie les mêm-es'

termes " capital social ". M.F.

No 3114. - Trfbunal de ~ommerce d'Anvers. - 6 octobre 1930. IHM. Goffin, prés. ; Zech, l'éfér. ; - Mtl'es Bauss cf Yseux, avocats.

(Cie Congolaise des Cafés Cafco el Cïc cf Cïe des Cafés ûn Congo Belge « Conaco )))

Société congolaise. - 1. Prescription de la loi belge. - Inapplicabilité. JI. Approbation par l'autorité exécutive. -Nécessité. III. Dénomination sociale. --:-Similitude avec celle d'une société préexis­

tante.- Refus dtautorisation.

l. Les sociétés congolaises sont sous/miles autc prescriptions. meuw d'ordre jl/tblic, de lrt loi belge, sauf déclamlion conlmire el e.xpresse de lrt loi.

li. Les sociétés congolaises doivent, poztJ' e.risler, elre approuvées par l'autorité e:ré­cu.f ive congolaise.

HL L'autorisation lloil étre refusée à tonte société lloul le nom préseiüerait trop de similillule avec celni d'une société préexistante.

JUGEMENT. Vu la cHation enregjstrée du 25 mai 1929, tendant au chang-ement tl'une dénomina­

tion sociale et au payeinent de mille francs de donimag·es-intérèts, du chef de con-currence déloyale ; '

Attendu que la demande est non recevable ; Attendu, en effet, que le contrat judiciaire est lié par l'ajonrnement sur lJase de

l'article 28 de la loi helg·e des sociétés ; Attendu que la société défenderesse est une société cougolaise èt par consé<iuent,

soustraite :mx prescriptions, même d'ordre pulJlic, de la loi helg-e, sauf déclaration contraire et expresse de la loi ;

Attendu que, de plus, les soeiétés congolaises doivent être a])lH'omées par l':mtd­rité exécutive congolaise pour exister et que cette autorité est tenue de refuser l'au­torisation à toute société dont le nom présenterait trop de similitude avec celui d'une société préexistante ;

Attendu qu'en consééJlience la défenderesse ne peut être taxée de concmrence déloyale ; que sa dénomination d'ailleurs sensiblement différente de celle de la société demanderesse, prête si peu à confusion qu'elle fut valablement admise par le pouvoir exécutif qui l'autorisa sous le nom de « Conaco )) .

Par ces motifs, Le Tribunal dit l'action ni recevable ni 'fondée ;\en conséquence déboute la deman­

deresse de son action et la condamne aux dépens.

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Observations. - Sul' r inavL)licabil.iLé de la loi helge, aux sociétés congolaises cfr. Revue, 19.24, no 2·'537, p. 38;- 1929, ll0 2924, p. 44.

La question de savoie si une dénomination sociale présente ou non de la sin1ilitude avec une autl'e dénomination est cle pu l' fait. Le Tri­bunal d' Arn,ees, cla!ls la décision ci-dessus~ invoque comme argument décisif pour rep.ousseP la similitude, le fait que l'ant.m·ité administeative compétente en droit congolais a\'ait donné/son appt•obation ~t la société défetl!Jeeesse. l\'"ous ne sam·ions aclhéret· à pareille ar'gnmontatioil par la<1uelle le pouvoir judiciaire pat·ait abdiquer son deoit. d'appréciation de la légalité des actes de l'autoeité admi~1isti'atire, et même son ouli­gation de l'apprécier lorsque ces actes parajssent léset' un deoit civil dans le cltef d'uri justiciable.

La décision de l'autorité exécutive en cette matic\re n\t pas d'antr·e pol'tée <1ue d'habilitee la société ~t rexisteuce au point tlc vue adminis­tt·atir; elle ne peut avoir pour effet de déponillm· une société pt•éexis­tante elu droit de contestee et éventuellement de fail'e eeconnaîtt'e que !a clénomiuation, dont l'autol'i,té exécutive n'a point aperç:u le Yice de similitude, est, en réalité, cJe nature ù IH'ovoquei' la confusion que l'in-teuÜoH cln législatem' a été de rendee impossible. ~

Cfr. Com1~1. Beux., 29 mars 1927, Bevue, J 928, no 28~)6, p .. 288.

No 3115. - Sentence arbitrale. ~5 qctobre 1930. MM. N. GoJJlet, arbitre; l\I1rcs Alb. Htunblet, S~hrynemackers el Tart, aro~ats .

. 1 (FrUns cf Frljns).

Société en commandite simple. :- 1. Clause pénale stipulée au profit des associés·. - Droit du commanditaire.

11. Dépréciation de la monnaie sans influence sur le montant de l'indem­n~té.

III. Obligation de payer en argent. rv. Intérêts légaux.- Requête en nomination d'arbitre non assimila·

ble à une sommation.

L LoJ'8fJll' il est sli.pnlé que l'associé qui fe/'(t la couc1trrcnce à la société /Hûera mw ceJ'laine indemnité à chacun de ses co-associés, le conwwnditaire a le même d1:oit que les comnwnd Ués de bénéficier de la clause pénale. '

11. L'indemnité conventionnelle ne doit pas être majorée à mison de la dépréciat-ion de la monnaie.

ILL L'associé débiteur lle l'indemnité ne peul s'en libérer prtl' ww inscription à so11 débit llans les lit' l'es de la société, ce qui consliluemitnne snbstllulion cln débite/tl'.

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JURISPRT!DENCE 71

IV. La requête en Jwmiltation cl'ctrbitre ne peut èll't~ asûmilee à la sommation ]JOUI'

(ail'ecourir les inlérêis légaux; ceux-ci ne sont dûs qtt'it pa1'ti'l' du compromis.

Attendu que pat' acte de Mc Georg·es Biar, du 25 juillet 1920, les parties ont eou­stitué entre elles une société en commandite simple sous la raison sociale « Alphonse Fryns et Cie n.

Que l\lessieurs All)honse Fryns, Marcel F1·yns et Camille Hnynen étaient assucib; commandités, avec attribution de tt•ois parts soeiales à ehacun de& deux premiers, de deux parts au troisième, la nemième part étant dévolue à Mnw Hnynen, associée commanditaire ;

Q'uc la société devait avoir une durée de trente années ; Que néanmoins, par tlllP com·enlion sous seing· priyé du mème jour, les contrac­

tants autorisèrent chacun des commandités à se retit·er de la société ù dater du -1 n

janvier 1930, moyennant préayis d'un an; ils stipulèrent que, dans ce cas, le com­mandité qui se retire dcvieridt·'a simple associé commanditaire et << ne pourra pen­n dant dix ans sans le consentement exprès de la société et de ses co-associés, n ~·établir dans la province tle Liége pour y exet·cet' :fUCun comnierce ou aucune » industrie rentrant dans l'activité de la société Alph011se Fryns et Cit·, ni pt·endre » aucun intérêt direetement on indirectement dans tel conunérce ou inclnslJ'iP, » ni engag·er ses services à quelque litre que ec soit dans tel commerce ou industJ·ie,, » ù peine d'une indemnité elne de plein droit ù Litre lie elause pénale, au pl'ofiL de » chacun de ses co-associés » ;

Attendu que l\I. Alphonse Fryns a donné t•égulièrement le préavis de retrait.; Attendu que le 30 décembre -1929 il fit connaître aux intéressés sa déç.ision ll'exel'­

cer, dès le 2 janvier 1930, une profession analogue ù celle de la firlne Alphonse Fryns et Cie, se reconnaissant débiteur üe la somme de 100.000 fr; (soit, disait-il, 50.000 ft·. ù chacun de- mes associés) et tlemandait l'insct•iption de cette somme au débit de son compte ;

Que dans la correspondance qui suivit, les demandeurs élevèrent les contestations soumise's à notre arbitrage ; .

Que ces contestations, sm lesquelles le compromis nous impose de statuer con- 1

formément aux règ·les de droit, seront examinées dan~ l'ordre suivant : fo Quels sont les bénéficiaires de la clause pénale édictée à la convention sous

seing· privé du 23 juillet 1920 ? · 2° Le chiffre de l'indemnité est-il sujel ù révision ù raison d'une dépeédation

monétaire ? 3° Le défendeur est-il fondé à se lihérm· par le crétlit de son compte à la société ? 4° A p~rtir de quelle date les demandeurs peuvent-ils prétendre aux intérêts

lég·aux?

Attendu que les pal'ties ont elles-mêmes qnalilié leur convention sous seiug·-priYé de << contre lettre ct acte complémentaire ù l'acte ,constitutif de l~l société Alphon sc Fryns et Cie ».

1

Que les termes en sont clairs et ne prêtent ù aucune éttuivoque ; Que l'interdiction à l'associé qui sc retire d'exercer un cqmmet'ce on une indus­

t.l'ie analog-ue est sanctionnée par une indemnité due de plein clroit à titre cie clause pénale;

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72 JURISPRUDENCE

Que cette indemnité est fixée ù 50.000 Jr. au prùfit de chacun etes associes ; Que l'expression cc co-associés » dans ce complément se rél'ère évidemment à la

terminolog-ie employée dans l'acte 'pl'incipal, conforme d'ailleurs"':\' celle de la. loi (articles ·18 et ss.);

Que nar conséquent les quatre versonnes qui ont constitué la société en comman­dite, sont hien les co-associés visés au sous-seing· priré ;

Attendu que le texte n'étant pas susceptible de deux sens, il n'y a pas lieu ù infer,­prétation;

Que ce serait faire œuvre at'bitraire que de chercher, comme nous y convie le défendeur, à fixer la portée de l'acte de ·1920 au moyen d'un contt·at coriCiu en1910 enLt'e trois parties, et foncièrement différent;

Que vainement le défendeur J'ait valoir l'équité; Qu'aucune con;;idération de cet ordre n'autorise le jug·e à modifier les co men­

tions librement et lég-alement formées (Cass. fr. 8 aoùt 1900- D.P., 1905,1, 262); Qu'aussi bien les l)rétenclues raisons d'équité sont, dans l'espèc~e, très l'rag·iles; Que l'on comprend parfaitement, par exemple, l'intérêt puissant qu'avait 1\fadame

lluynen, dont les capit.aux étaient engag·és pour trente ans, à sc prémunir contre la concurrence possible d'un ancien g-érant pendant elix années après i 92H ;

Attendu encore flU'il.n'est vas inutile d'obserrer que l'acte litig'icux a €té condu entre pe.Psonnes ayant une sérieuse connaissance des aiTait·es, assistées ct édairécs pat' un jurisconsultè de yaleur;

Qu'à tous ég·ards clone, la prétention des demandcms doit ètre accueillie ; Attendu que les clemandeùrs réclament la majoration de l'indemnité ù -150.000 J'r.

<c à rdison de la dépréciation de notre monnaie l>. .

Qu'ils se fondent à tort sur l'arrèt de la Cour de cassation tin ·14 févl'ier ·1929 ·(Pas., 1929, 1, 87) intervenu dans un procès d'exproprialion pour cause d'utilité puhliuue;

Que cet anèt justifie le t'ejet du pourvoi par le simvle rappel d'un hreJ considé­rant de la décision entreprise, dont il ressort, d'après la Cour« que le juge elu Joncl n s'est lwrné à exprimer au moyen de l'unité monétaire légalement instituée par » l'Arrêté royal du 2.) octobre !926, la valeur qu'avait le bien exproprié à la date n elu 28 féwier '192L » ;

Que sans cloute la règ·Ie, ainsi énoncée, peut être é-tendue ù certaines autt·es matières où les tribunaux ont mission d'évaluer; mais qu'il n'en saurait ètre de même clans celle des conventions ;

Que le jug·e a le droit de les apl)liquer comme c< tënant lien de loi à ceux qui les ont faites » ( arlicle 1134) ;

Qu'ainsi le rapport au Roi tllli précède l'arrêté relatif à la stabilisation monétaire déclare catég·ol'iquement : c< Le J'ranc gardera clone so11 rôle clans l'économie natio­l> nale. Il sera demain cc qu'il était hier, au voint de vu~ des lt'ansaetions et de » l'exécution des contrats. Ceux qui vayaient hier en l'ranes pa-yeront demain en francs n (Pasinomie, 1926, p. !038) ;

Et <Ille l'arlfcle 7 de i'anèté dispose· : c< Rien n'est modifié aux· lois existantes » q nant à la l'oree libératoire dè ces billets de banque 'et ù l'oblig-ation pour les '> caisses pulJliques et les particuliers de les recevoir comme monriaie fég·ale; .. >> ;

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J URISPRÙDENCE 73

Atlenùu enfin !lll'e, clans l'espè_ee, il s'ag-it d'une ohlig·ation conventionnelle ·POUl'

laquelle le Code civil édicte précisément que (( il ne peut être alloué à l'autL'è .par: tic une somme plus fortè ni moindre n (at•tiéle HQ2) ;

Que. des lors ta demande de majoration doit être rejetée ; Atteiidu que le. défendeur a prétendu se lihét•cr par l'inscriplioli d'une somme_:dc

100.000 fr. à son débit au -compte qui lui a été ouvert par la société;· Que les demandeurs ont repoussé et repoussent ce mode de paiement ; Que nous n'avons aucun moyen de les y contraindre ; Que d'une part le créancier est entièrement libre d'agréer ou de refuser une suh­

. stitution de débitem ; Que, d'autl·e vart, il n'est pas tenu d'accepter un paiemenLpartiel ; Que les ·demandeurs signalent à bon droit ùue le crédit du défendeur dans les

livres sociaux ne sera liquide que lorsq3Jil aura approüvé le bilan - ce qui ù'es.t pas advenu jusfgl'à présent ;

Attm1du que les ll.emandeurs postulent les intérêts légaux depuis le 10 mars ,1930, date de la présentaLion de leur requête à fin de nomination d'arbitre ;

Que cet acte, auquel le dél'cmleur est resté étrang·er, ne peut èt1·c assimilé ù .la (( sommation de payer n exigée par l'article 1H>3 du Code civil ;

Qu'il en est autrement de la convention synallag·maliquc de compromis ; Que les intérêts légaux sont, en conséquence, dùs à partil· du ,10·mai 1930;

Par ces motifs, Écartant toulL'S conclusiolis contraires ou plus amples, eondamnons le défendem

à payer à ehaeun ·des demandeurs la somme lie 50.000 fr. aycc les intérêts légaux depuis le 10 mai '1930 ; .

Et, vu l'article 131 elu Code de procédure eivile, condamnons les parties ù sup-porter ehacùne un riuart quant aux clévens. · / ·

Obse~vations. - I. La sent~nce ci-dessus n~appelle pas de commen­tait·e clans l'interprétation qu'elle fait d~une clause de l'acte cle société entre parties. Il apparaît aisément que le commanditaire a intérêt, comme le commandité, et en raison même du fait qu'il a engagé son patrimoine par ses appoets, à ce que les clauses et conditions elu con­trat soi(mt respectées.

II. Dans l'état présent cle l'évolution de la jurispl'udence au sujet de l'application aux contrats, des prescriptions 1~elatives à la stabilisa­tion monétaire de 1926, les obligations de sommes restent soumises à la formule - d'ailleurs absolument aJ'tificielle au p.oint de vu~ é~ono- . mi<rue et rwofondément blessante au regard de l'équité- que le fl'anc dévalorisé g_arde cependant la même valeur libél'atoire que le ü·anc~ or. L'l~tat, usant de sa souveraineté, - et même en abusant_- a altéré par là, la valeur de la monnaie-nationale à l'exemple de cer­tains monarques absolus elu Moyen-Age qui altérè~ent le titre des mon-

\ ' ' \

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'74 DOCTRINE"

naies métalliques. Il est superflu de se répandre eil commentaires sm· ce chapitre. Cfr. notf'e étude, Bevue, 1930~ no 3076.

III et IV. La décision de Far·bitre sm' ces points est confol'me aux principes ; notanunent en ce qui concerne le refus de r-econnaitPe ~t

une requête en désignation d'arbitre le CaL'actère de demande judi­ciaire susceptible de faire courie les intérêts légaux. Le -compromis, an contl'aice, équivaut au contt~at judiciaire, clone à la demande en justice.

No 3116. -- La répression des simulations dansde contrat de société anonyme et la notion de l' " affectio societatis ".

Si l'on consic1ére les p1·incipes géné1·aux de la loi fiscale. concei·naut les mutations, oî1 s'aper(;oit que l'apport en société est soumis à un régime dérogatoire. Les ü·ansmissions sont lout'dement imposées a l'ent>egisti'ement quand elles résultent de hi vente ou <le la donation. La loi se montl'e plus accueillante quand elles résultent de l'apport' en, société. Le contraste était frappant sous l'eli1piee de la loi d.u .22 I1'ri­maire an VII : les apports purs et simpies ne donnaient ouverture qü'au deoit fixe de sept t'Panes. La loi du 30 aoùt 1913 a modifié ce régime, en établissant un dt•oit proportionnel de 1·,20-ü·.· 0 /o sm· la ·va.leue brute des appor·ts, mais le caractére 1orfaitaiL·e de ce droit et son taux relativement modéeé écaetent l'idée œimpôt de mutation. On exprime parfois cette anomalie en elisant que l'apport est réputé · cléclaratiC pat• la loi iîsçale.

En favorisant la ceéation cle sociétés commeeciales au point po vue des ü·ais~ ,lü loi incite l'individu à gt·onper ses t~wyens d'action pour

· une plus grande pt·oductivité de la I'icllesse acquise. Le 'l'eésoe s'y . I'ett·ouve dans l'imposition des bénéf-ices . .Mais c:ette faveur, c]ui sejus­

ti(ie lorsque la tL>ansmission des biens n'est qu'un moyen de réalîset· des bénétiees, perd sa eaison d · êtee quand la teansmission est le but ina\roué des paeties (1). La fi·aude est à craindre, sous forme de simu­lation de contl'at. Il y a simulation de contrat quand la convention actée dans un écPit présenté à la formalité de l'enregistr>ement n'est pas celle qui a été conclue entre parties (art. 35, loi du 11 oct. 1919).

('1) Cf. HESTJ~Au, Soc. anon. T. IV, N° 2269.

].!(• 3116

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DOCTRINE

Sans peéjudice aux amendes liscales~ le Ministere public est autorisé à poursuivre les délinquants devant le tribunal correctionnel si l'inten­

, tion feauduleuse est caractéeisée (art. 42, loi du 11 oct: 191 9). Il impoete de peécisee l,es conditions stPictement indispensables pom·

qne l'opét·ation t•éellemeut intervenue réponde iLia notion de société. Lorsque ces conditions se

1trmwent réunies, il ne peut être tjuestion

cl'imputer la simulation aux contractauts. Faut-il ranger parmi ces conditions essentielles r " affectio societatis' " ? Il est permis de se clemandet· pouequoi la doctl'ine (l) s'est appliquée à dégager dans le contrat de société cet élément intenti(mnel, tout subjectif,- qui ne ~e confondrait pas avec le simple consentement, condition de tous les contrats.

La notion de l' " affectio societatis " nous vient du dt·oit POmain. Pom· en saisit·. la pot·tée, il faut se placet' dans les conceptions de l'époque.

La société, en dt•oit t•omain, est un contl'at " intuitu pet·sonnae " da us toute la force du terwe. Dans P J~tat romain primitif, la " gens n

g'J·oupe l'activité individuelle de ses membres. La dislocation progres­sive dè ces groupements familiaux et le développement de l'activité économique ne tal'dent pas à donner naissance à des collectivités d'ol'­lll'e conkactuel : -" socii ". Ces gToupements conservent la trace de leut• caractéee _ thtpifial ol'iginail'e, ils sonH régis par le " jus ü·aterni· 1

tatis ". N'il est ditncile d'exprimer par une i<wmule c1air·e et p1·éc.ise ce que

les Honiains entendaient pal' l' " atfectio societatis ", c'est précisé­ment pat'Ge que cette -notion est spéci11quement romaine~ et fort étran­géJ·~ it la société elu clPoit moderne. C'est, ponrrait-on dire, la volonté de se somnettre aux conséquences de rappoL·tsjuridiques basés sm· une confiance récipeoque, l'inex~cution déloyale du contrat dOJ~nant ouver­ün·e ü l'action " pt·o socio "~ infnmante.

'l't•a.nsposée dans notr·e législation, cette notion devient incompré­lwnsible, à moins de lui forger de toutes piéces une signification nou­velle. l\Ia}s alors, qu'on ne parle pas de l' " àffectio societatis , sans préciser clait·ement le sens cle l'expression.

('1) Contrà: WAHL, Droit commercial, no 46tl.

x• 8116 1

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76 DOCTRINE

La plupart des, auteurs ,qui fout de l' " atfectio societatis "·une CD!l­

- ditiou essentielie du contr·at de société, -sembleutexiger, outre le.lilwe consentement,· CQildition de tout contrat, la volonté déterminée et sincère de s'associer.-_ _I.lnou~, se1nble que c'est là mie pétition de principe. Pou~ saYOÎL' si

les parties ont réellement la volonté de s~associer, ii ·est .indi~pensable d.e déterminer préalablement les éléments essentiels de la société. On cherche un critère, et on retombe dans le concept it définit·.

La loi l}scale n'aJiant pas attl'ihné u,n sens particuliet' au contl'a.t de société,, il faut s'en rapporter au droit commun. Qu'il s'agisse de socié­tés civiles ou commerciales, c'est dans le Code civil que nous trotnre­rons des pl'incipes. La loi commerciale ne définit pas la société, elle donne les caractéristiques de telle ou telle fot'tnule légale, au choix .des parties.·

Aux termes de l'art. 183.2 du Code chil : "la société est un coutt·at clans lequel deux ou plusieurs personnes conviennent de mettre <luel­qne chose en commun, clans la \'Ue de partageP le bénéfice qui pom'I'a en résulter ",-

Il ümt en premier lieu une mise en commun. L'attribution de deoits sociaux à celui qui n'a pas fait de mise constitue une libét•alité, il ll'est pas un associé.

Le même m·ticle ajoute que cette mise doit êtl'e effectuée en vue cle partager les bénéfices. A s'en tenit· rigoureusement au texte, on pour­rait se croire en droit d'exjger des contcactants l'intention de I'estet' · de façon plus ou moins clneable clans un état de participation commune. Cette exigence nous parait 1~épo~1clre assez bien à 1' idée que les auteues se fon.t de l' " affectio societatis ". Mais, poul' les motifs qui vont sui.­vre, nous devons faire- toutes nos réserves au sujet de cette inter·pré­tation.

Le Code civil fut élaboré en 1804, Je Code de commerce peimitif~ en 1807. En matière de sociétés. les rédacteurs du Code civil sont des traditionalistes~ imbus des peiùcipes elu droit romain et cle J·'ancien deoit. Les réclactem·s du Code de commerce ont au contraire fait une œuvre personnelle et en certain sens originale, c'est le cas pour la société par actions (1).

(1.) DALLOZ, Rép. prat., V0 Sociétés, nos 8 ef9.

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DOCTRiNE 77

En élaborant la dé[jnition de l'ai't. 18:32, ies rédacteurs du Code civil avaient à l'esprit la société .de [Jersonnes. ·L'incessibilité de la part sociale y est la· règle (art. 1861 C. c.) ; il faut le consentement unanime des associés poue se substituer un tiers. Rien d'étonnant que, clans ces cm1ditior1s, le Code <Ûvil ait prévu un état plus ou moins dura­ble de paeticipation à l'activité sociale.

Cette exigence peut encore se concevoir clans les sociétés de pee.; sonnes peévues par la loi commet'ciale. Mais clans la société anonyme, elle aboutirait ~t des conséquences inconciliables avec le mécanisme 1wévu et organisé par la' loi. L'action au porteur se transmet par· sim­ple tradition. L'action nominative se cède par la formalité trés simple elu Ü'ansfert au registre social. Dans le but de protéger le public contre une spéculation malhonnête, la loi déclare que les actions représenta­tives d'apports en natuee ne sont pas négociables ab initio~ mais ici encore la loi assure la possibilité de les céder dès après Pacte consti­tutif, en se conformant aux formalités de la loi civile(art.47lois coord.). A vraï'clire, il existe des restrictions: quand l'action n'est pas libéPée, le cédant reste p·eesonnellement responsable pour les dettes antérieures :i. la publicatioi de ce transfert (art. 52 lois coorcl~). ":Mais cette disposi­tion a pour ol1jet, non pas cl'enteaver la circulation des titres au début de la société, mais d'empêcher la substitution de débiteurs insolvables i.t 1 'actionnaire initial.

Ne faut., il pas en conclure que la faculté de céder la part sociale J'eprésente 'tm droit absolu clans les sociétés de capitaux ? Pourrait-on logiquement soutenir que la loi impose aux contractants de ces socié .. tés l'intention de participee en personne, pendant un, t(3mps plus ou moins peolongé, aux aléas de l'entrepl'ise, sous menace de poursuites correctionnelles éventuellement, quand elle assure, en tonte hypothèse~ le moyen de céder ces parts dès après la constitution ?

Le régime des sociétés de capitaux s'accommode mal de cette inter­prétation rigoueeuse de Part. 1832,- et ·la notion de 1' " affectio socie­tatis "·n'y est pas it sa place;

Ce que la loi exige ici !JOUl' qu'il y ait 'L apport en· société , ", c'est l'affectation conventionnelle d'un bien aux aléas de l'entreprise et la rémunération de cette mise par l'attribution de droits sociaux .. Ges deux conclitions doivent être,remplies au momen~ où s'effectuent les prestations réciproques entre l'apporteur et la société. Qu'importent les in tentions secrètes des parties, leue volonté de (Iemmwee p-lus qu

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78 DOC'tRIN-ll

moins longtemps associées ; le but spéculatif est une conséquence natu­relle de 1' oPganisation des sociétés de capitaux. ·-'cette conception est-elle de nature h autoriser les ft·audes fiscales,

la sin1ulation de contrat ? Nous ne le pensonspas. Voici une société en voie de formation. L'acquisition de tel immeu­

ble est nécessaire à la poursuite du but social. Les fondateurs cherchent il éluder les droits de mutation. Le propriétaire est d'accord pou~· Yendi•e mais 11011 poue couriL· les risques de l'entreprise. On imagine alors la combinaison suivante : le pseudo-associé fera appol't de l' im­meuble et recevra en rémunération un lot d'actions représentant, en va lem• nominale, le lH'ÎX qu'il exige de l'immeuble ; par nne conven­tion sdus seing-privé, les co-associés prennent l'engagement de lui rachetel' tous ses titres, an pair, après la constitution.

Xons disons qu'il n'est pas l.>esoin de faire appel tt l' " affectio s_ocie­tatis " pom· établir la simulation.

Que re~:oit le. pseudo-appol'teur, d'après la convention présenté~ it l'enregistrement? Des droits sociaux.

Qne reçoit .. il d'après la conYention réellement intet'venue, conven­tion complexe qui se tl·ouve consignée it ln fois dans l'acte public et dans l'acte privé? Non seu1erhent des titres, mais la laculté de tra­dniee cette rémunération en une somme fixe et détel'minée d'avance. Nous ne sommes plus dans les termes de notee définition de l'c.~pport.

·La disposition fisl3ale sur la simula,,tion s'applique adéquatement. Obset•vom;, au surplus, que la loi sm· les sociétés expose le frandenr· à de graves mécomptes ; .en effet, aux tet· mes de l'art. 46, les cessions cPactions ne sont Yalables qu'après la constitution définitive de la société. En respéce, la convention qui pm·aissait assm•er la Yente des titt•es est annulable, et 1 'inté~~essé court le risr1ue cle demeureJ' associé malgré lui.

Tl peut se présentm· également que le pseudo-apporteur reç:o:ive, non des titres, mais ün prix en nurnérair·e. La fraude ici est patente, car l'attribution de deoits sociaux n'intePriept même pas dans la rénmoé~ Pation (1 ).

La situation est toute différente quan.d l'apport a été J'énuméré par dosdroits sociaux~ même si, immédiatem~nt après la constitution de société, celui qui a ~ait cet appqrt en nature cède ses droits sociaux.

('1) Bruxelles, 24! déc. ·1910, Rec. gtJn., '19H, 5 .

•• ~.116

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79

Dans ùne espèce jugée par le Tribunal de ll'c instance de Gand (1) l' Administeation des Finances prétendait r1u'un acte de société dissi­mulait une vente d'immeuble, parce que l 'apportem· avait cédé ses titres a,près l'acte constitutif. Le Tribunal a repoussé cette prétention :

" Attendu r1u'au point de vue de l'inteqwétation d'un acte de société, " il importe peu que X ... n'ait été qu,un instant associé, et se soit " décidé presqu'immédiatement A céder ses droits ; r1ne le conteat de " société n'implir1ue pas l'obligation de rester actionnaiee pen(lant 1111

" temps déterminé ;, . Ce t'aisonnement témojgne d'une compréhension trés exacte de la

société de capitaux. Il écarte la rechel'che d'un élément intentionnel spécifique et vague, qu'il serait presque toujours impossible d'établie avec ceJ'titude. Cet élément, c'est bjen, 1wns semble~t-il, ce que les auteurs évoquent, quand ils nons parlent de 1' " affectio societat]s ".

Et cependant, dans ses derniers att.endüs, le 'l'rilmnal a cru devoir atliemer que X ... , l'apporteur du tel'rain, avait. réellement l' '1 affec­tio societatis ''. Cette énonciation nous parait tout h fait surabondante. Le Tribnn~l ne peécise pas la portée de cette condition qu'il décla1'e J'emplie. 1l llOUS parait qn'en Péal:ité. cette COndition, il ne l'exige pas.

1

On a affiemé qÙe l' " affectio societatis " était nécessaire pour dis­tinguer le contrat de société d'une indivision d'ol'igine ~ontractuelle,

pouvant résulter notamment d'un achat/en commun. Nous croyons que ce qui distingue ces deux masses de biens, c'est lem· destination éco­nomique. L'affectation des biens à lit production de bénéfices, n'est pas synonyme de simple utilité.

On invoque parfois P " affectio societatis " pom'- 1~efuser la qualité d'associé au travailleur rémunéré pae une participation aux bénéfices : ' il suffit œ obsm·ver que les conditions de l'apport ne sont pas réalisées. L'employé qui ne prend pas, au moment de la constitution, l'engage­ment de prester ses services pendant la durée de. la société, ne met pas son travail en commün. Ce travail n'est pas la conh•epartie d'une fra9tion quelconque du capital social. Aussi, la jurisprudence recon-

('l) Tl'ih. eiv. Gand, 28 nov. ,J928, l)as., -1!)30, Ill, 23. ·

N' -3116

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89 JURI~PRUDENCE

nait-elle la qualité d'associé à l'apporteur de tra'vail", _quand celui-ci n'est pas traité en subordonné et ne peut être congédié (1).

De tout ce qui précède, nous devons conclm'e que r " affectio socie.;. tatis ", réminiscence du droit romain, n'est plus en b~rmonie aYec l'organisatioü moderne des sociétés de capitaux.· Il est d'autant plus dangereux de l'érigee en condition essentielle du contrat de soc.iété, qu'on ne peut en définir exactement la portée, alors que des sanctions pénales résulteraient de son omission.

Jean PET.I'r-

Avocat pn'>s la Com d'appel de pruxelles.

Na 3117. - Tribunal correctionnel de Liége (6e ch.) - 29 nov. 1929. Prés.: M. Palmcrs; l\Iin. puùl.: M. Decerf'; Pl. : l\'f!rc P. Dubois etServaisc. Tart.

{Procureur dzt Boi et Association Liégeoise des Pécheurs à la lirtne cf Ymz. Jloe{fiwrrlen}.

Union pr9fessionnelle.,- I. Membres.- Profession et métier.- Oc~u-patiort accessoire.- Validité.

11. Pêche. - Destruction du poisson. - Délit. - Responsabilité. -Préjudice.- Partie civile.- Recevabilité de l'union professionnelle.

I. Le métier on la profession à bnt de lucre des membres de toute union profes­sionnelle ne doit pas constUuer l'occupation unique ni même l'occupation principale de celüi qni l'e.rerte; elle peut n'être qu'accessoire. .

II. Les pêchenrs~ lln fait qu'ils ont payé à l'Etat leur permis de pêche et cei'Lains . ··même nne location onéreuse~ sont en droit de se plaindre des infractidn8 ayant pour objet la Lle.stnwlion des poissons et de' réclame!/' au.1~ auteurs de ces infra,ction.~ ,la répa1'allon du domnut{fe causé. Celni-ci ne se confmul nullement apec le dounqa{fe su"(Ji pm· l'Etat, lorsqu'on crwisagc les pertes causées au.;1· ziclzeurs ·pour fi·ais de t1;ansport inutile, 1llalériel~ appâts et dil'CI'S rendns ùmtilisables. · ·

Attendu que Van Hoeg~erden poursuivi pour avoir, les 14 et 23 septembre Jf928 laisser 'couler dans le lit.de la Meuse des matières ou liquid.es de nature ft· rn altérer 1esea,nx, a été,de ce chef, condamné par le jug·c de paix de Seraing;

Que l' Assochttion Liégeoise des pêcheurs ù-la ligne ayant été déboutée de sa con-sLHntion de partie civile en la cau~e, s'est pourvue en appel; ·

J:Ùtendu que la recevabilité et le bienfondé de la constitution de la partie cïvîle, sont contestés vai· le twévenu et la société anonyme. èl'OugTée~l\Iarilülye, civilement responsable ;

('l) BJ·uxelles, L6 dée. H)09, Rel'. pral. soc., ,1910.; p. 98.

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si

Attendu que le premier moyen invor1ué est l'inexistence lég·ale de l'association demanderesse ;

Attendu qu'il est avéré et non contesté d'ailleurs que les Jormalités prescrites par l'art. 6 de la loi du BI mars 1808 ont été accomplies; que, dès lors, conJormémrnt à cet m·ticle, l'Union professionnelle dont s'agit a joui de la personnificaliou ci. vile e deUxième jour après la publication des statuts ;

Qu'à vrai clil'e l'entérinement de ces statuts par le Conseil des .1\'Iinrs ne fait pas obstacle à ce que les tiers intéressés invoquent, par voie d'exception, l'inexistence .originaire de l'Union professionnelle du cheJ d'absence d'un des éléments essentiels ù sa Jormation, mais que, conformément aux principes g·énét·aux, il appat·lient à celui qui se prévaùt d'une nullité, d'établir le fondement de sa prétention (Cctss., 29 aYril ,1912, Pas., p. 228);

Attendu ù cet ég·ard que le prévenu et la société civilement responsables, se· bornent à 'alléguer sans p1·cuve à l'appui que l'Associalion Liégeoise des Pèclleurs à la ligne est une sim11le association de sportifs et d'amateurs et nullement de pro­fessionilels de la pèche. tandis qu'à la base de toute union professionnelle doit existrr une profession ou un métier exercé en commun par ses memln·rs ;

Attrndu ·que le métier ou la profession à but de lucre de ses membres, ne doit pas constituèt~ l'occuvation uuique, ni même l'occu11ation principale de celui qui l'exerce; qu'elle peut n'èlre qu'un accessoire ; · Attendu que les statuts de l'association des pêcheurs à la Jig·ne révèlrnt mw pré­ocèupation professionnelle, un but lucratif, en défendant comme il est dit, la situation morale et matérielle de ses membres ;

Que, d'autre part, il ap1)ert de l'instruction de la cause que si ceux-ci, 11our la plupart, exercent peut-être en onll'e principal un métier, une profrssion étrangère à la pèche, encore est-il qu'ils tendent ù retit·er de celle-ci un 1Jénélice dont ils trafiqtJent ;

Atteildu, cela étant, que la dite association peut, aux termes de l'art. 1 () de la loi du 81 mars 1898, ester en justice, soit en demandant, soit en défendant, pour la défense des droits indiYiduels que ses membres tiennent par leur qualité d'assoeit;s ;

Attendu qu'il s'agit hien en l'espèce de droits dérivant de celte qualité; qu'en détruisant le poisson, la J10)lution des raux porte dil'ectement alteintc ù l'intén\t g-énél'al et collectif dont la défense constilue l'un des buts de l'Union au mi'me litre que le braconnage ù l'ègarcl d'une union professionnelle. de chasseùrs (Voy. Gan cl, 6 mars 1912, Pas., II, p. 104); <Ille la partie ciyile est donc receyablr dans son action;

Attendu, <luant au fond t'ment de cette action, <lUe si le poisson, ·comme Ir gibier d'ailleurs est « l'es nullius n il n'en est pas moins vrai que les prclwms, du fait qu'ils ont 11ayé à l'EtaL leur permis de pèche, et certains même unr location onéreuse, soùt en. d~·oH de se plaindt·e des inft•actions ayant pour résultat la clesti'Uc­tion des poissons déversés dans les cours d'eau et de réclamer aux :mteurs de ces infractions la réparation du dommage causé ;

Qùe ce dommage, contrail'ement à ce que prétendent le prétenu et la partie eiYileincnt responsable ne se confond nullement avec lé domm:ig·r suhi par l'Etat rl dont la rôparati'Jll est assurér parle jug·ement dont appl'l ;

6

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82 JÜRiSPRùDENCE

Qu'il est mème d'une tOute autre nature lorst1u'on emisage couunè le fait la partie civile, les pertes causées aux pêcheurs pour ft•ais dr transport inutiles .• matériel, appàts et divers rendus inutilisables, Pte.

Attenclu toutefois, qu'il y a lieu d'obser\·er que la partie civile üe peut, dans la présente action, prétendre à la réparation d'un préjudice que dans la limite où elle aurait été lésée par les deux seules contraventions relevée dans la citatio11, c'rst-à-dire celles des H et 25 septembre -1928 et pour lesquelles une condamnation Pst intenenue ;

Attendu· que si le préjudice consécutif aux agissements du p1'évenu est·crrtain, l'expertise sollicitée en vue d'en cléterminet' la hauteur, n'est nullement pertinente;

Qu'en aucune hypothèse, elle ne fournirait an Tribunal plus d'éléments d'appré­-ciation du dommag·c subi que les constatations faites par le brig·adier forestier Lomba clont les procès-verbaüx figurent au dossier;

Qn'il y a lieu en conséquence de fixrr e;v aequo el bono au dispositif cl-après l'in­demnité ù accorder à la partie civile ;

Vu les articles ,194 du CodP d'instruction criminrlle !382 t't '138j du Code civil ; Par ces motifs,

Le Tribunal, statuant conlradieloircment, écartant comme non justifiées toutes eonclusions plus amples on conlmires, elit l'ap11el dP la partie civilê I'ecevable et fondé;

Condamne Van Hoeg·aerden et la Société d'OngTée-1\Iarihaye :\lui payer la somme de 100 fr. :\ titre de donunag-es-intérêts et les dépens.

Condamne le prévenu Van lloeg·aenlen aux Irais envers la partie publique liquidés:\ la somme dr 67 .':W fr. en loi alité.

Dit la Société anonyme Ougrée-lUarihaye, civilemeut responsable de GCS J'rais.

Observations. - La jul'ispruclence en matière d'union iwofession­nelle est pen abondante. Elle présente rn'esque ton,iom's de l'ii1térêt lorsqu'elle porte, comme dans le cas peésent, sUI' les conditions de consti tnt.ion des unions ou la recevabilité de leur·s actions en justice.

En vel'tu de l'aet. 10 de la loi du 31 IIlaes 1898, l'union profession­nelle a le droit ù'estet' en justice pour ia c1éf'en~e de ses intérêts pt'Opt·es et pone la dét'ense des deoits individuels que ses membres tiennent de leur qnal'ité d'associés (Cfl'. étude de .T.MŒEIIAERT~ Revue, Hnl, un 2167 ; - Liége, 22 févJ'Ïel' 191 l, Revue, ÙJ12, un 2202 ; -Etude cle 'l'lt. 'l'HÙATE, Revue, .1 D 14, ll0 2404).

L'entérinement des statuts d'une union lJJ'Ofessionnelle par le Cou-· seil des Mines ne peut lu.i conférel' qu'une haùilitation génét'ale au point de vue administt·cttH'. Mais la disposition de Part. G de la loi oPganique du 31 mars 1898 a ce sujet n'enleve pas a ceux contee lesqnels Punioll agit en justice le droit d'opposer la nullité clécluHe de l' innbseJ'Vcüion de conditiOJiS substantielles requises par la loi pom' ln .

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constitution de runiou. En ce cas, les fl'ilmnaux peuvent et même doivent se refuse!' ü appliquer, comme contraire à la loi, la décision elu Conseil des Mines (Cass. 27 nov. 1911, Rez:ue, 1912! 11° 2203).

La va_lidité d'unions profession nP Iles de chasseurs a été d'abord contl'oversée. Feu COR13IAU' notr-e éminent prédécesseur~ ra CO Ill battue (Revne, '1912, no 2204). 1\fais. la jul'ispruclence s'est depuis lors nxée en sens cont1·aiee et la validité de ces unions pr·ofessionnelles n'est plus contestée. Cette jurisprudence doit évidemment bénéOciel' aux pêcheurs, tendeurs, etc. et d'une manière générale ~t ceux qui se li VJ,ellt à une activité sportive à but lnCI'atif.

Il n'est pas re(]Uis non plus que;- dans le chef des individus fJUi se constittient en ur1ion professionnelle, la profession ~t but luceatif dont l'union vise à défendre ou peomouvoir les intérêts soit exercée h titre d'occupation exclusiYe ni même principale : l'union professionnelle l'este validement constituée même si la profession à bnt lncl'atif n'est exet'Gée qu~it titre accessoire ou secondaire (Gand, o mars 1912, Ile,cue, 191~3, 11° 2292; - Cass. 29 avril 1912, Ibid., n" 229:3; -lli'UXelles, 11 juin 1913, Revue, 1913, n~ 2325).

Ln compétence de l'union professionnelle s'étend elu l'este it tous les genres d'intérêts inclus dans " les intérêts lWOfessionne"ls de ses memlwes " : ne sont donc pas exclus les intérêts moraux de la profes­f)ion, non plus qu 'aucm1 des intérêts accessoires se rattachant JlOI'­malement ou cle fait à son exe1·cice. Les expressions génét'ales dont se sel't l'ad. 4 de la loi elu 31 mat•s 1898et les travaux rwépa1·atoires, ne laissent pas place an cloute à ce propos.

Le rrl'ibunal correctionnel cle Liége nous paeaît clone avoir fait une juste application de la loi dans le jugement ci-dessus.

No 3118. Tribunal de commerce de Courtrai. - 7 février 1931. l\I~l. J. Calcwaert, juge unique; J. de Necker, référ. ;

Pl. Mtrcs De Jaegere cf A. Pl'ingiers, avocats

(Soc. coop. << llurgersbelaugen >> en liq. cf Geers).

Société commerciale. - Liquidateurs. - Souscription. - Pouvoir absolu du liquidateur d'exiger la libération.

Les acl'ionnaires, au cours de la liqzûdatlon, n'ont pas le clrolt tl'e.r:iger la Justifica­tion que [es l'f'l'Se/IICJlfS qui lei/l' SO/lf denutndés (( jirtl'flt8SC/If 11éCf'S8tlÎJ'CS fllf. paÙ~/1/fllf

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84 jtJRlSPRUb:ENè~

. des dettes sociales et des fmis de liquidat'ion >>. Les liquillateuis prennènf ceite décision sous la sanction de leur responsabilité.

Attendu que l'action tend 1 °) au payement du solde resté dù sur la souscription de cinq parts soit 2.000 francs de la so,ciété coopérative << Burg-ersbelang·en » libét·és de 20 °/o chacune, 2°) au payement des intérêts à partir du jour où le solde eut dù être p_ayé par application de l'art. 24 des statuts.

Attendu que le défendeur prétend que les liquidateurs sont sans droit pour faire un appel de fonds, alors qu'il existe un avoir dont la réalisation serait sulfisante pour couvrir fes dettes . . Qu'en l'espèce il existe encore un immeuble occupé par la S. C. Micldenstand et

un mobilier qui, non seulement ne sont pas vendus, mais dont la vente ne semble mème pas envisagée.

Attendu qu'aux termes de l'art. H>S des lois coordonnées sur les sociétés << les n liquidateurs peuvent exiger des assnc.iés le payement des sommes qu'ils se sont n eng-agés à verser clans la société et qui p~ll'aissent nécessaires au payement des n dettes sociales et des frais de liquidation n.

Attendu que les actionnaires} au cours de la liquidation n'ont pas le droit d'exig·er la justification que les versements qui lem sont demandés « paraissent nécessaires au payement des dettes sociales et des fl'ais de liquidation n.

Attendu que les liquidateurs prennent cette décision sous la sanclion de leur res­ponsabilité, les actionnaires possédant contre les liquidateurs qui auraient fait des appels de fonds au mépris des dispositions de l'art. ·158 une action en responsabilité.

Attendu lfUe l'àTt. 158 en parlant de <c sonimes qui paraissent nécessaires, au payement des dettes n, ne dit nullement que c'est aux actionnaires, qu'elles doivent pa1·aître nécessaires ù l'apul·ement du passif.

Attendu qu'il semble au contraire résultet' elu rapport de Monsieur Pirmez, rap· porteur à la Chambre, que c'est aux liquidatems que les sommes doivrnt paraître nécessait·es pour le payement des dettes sociales.

Atteildu, en effet, que le rapporteur, commentant cet art. 158, dit« c'est encm·e une di position de la loi anglaise « qui paraît aussi juste qu'utile ... n faisant entendre que cet art. HiS est emprunté ù la loi anglaise.

Attendu que le rapp,orteur doüne lui même, en note, la traduclion du te_xte anglais visô; qu'H résulte de ce texte que les lil1uidateurs ont le clt•oit de réclamer le payement par les associés de la partie d~ leurs a1)ports non libérés, nécessaires pom acquitter les dettes de la compag·nie ·et les ft•ais de la liquidation, ce avant mème (ru'ils aient constaté l'actif de la oc ou les dettes ù cllarg·e des diverses el asses de contribuables, ce qui implique que les liquidateurs seuls sont juges de la néces­sité des appels de fonds,

:\llenclu que tout système contraire aboutirait àl créer des inégalités entre aetion­nmres.

Qu'en effet, le tdbunal compétent étant, en prineipe,· celui du· dOlniçi)e du.défçn· de ur, les liqliidateurs devront a~sigJTer .les actionnaires devant d~s ·tribunaux difi'é· rents. Que les uns pomront juget' que la nécessité deJ'appel de fonds est démontrée tandis que les aull·es estimeront que celte preuve n'est pas rapportée; qu'il s'en

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JURISPRUDENCE 85

suivra que ce1·tains actionnail·es devront parfaire la libéi'aiion de lems actions tandis que d'auti·es en seront dispensés.

Attendu que 11areille inégalité se produira encore lorsque la Com cl' Appel, étant d'un avis op11osé de celui du Tribunal, réformera les jug·ements aJ)pelables I.rap1Jés d'appel, tandis que les jug·ements no11 appelables et non frappés d'appel seront maintenits et cela alors qu'il s'agira d'actionnaires tenus dans une mème mesure et dans une même société.

Attendu que ce sont les liquidatem·s qui sont juges de la nécessité d'un appel de fonds; que les décisions de l'assemblée générale- dessaisie depuis la mise en liqui­dation de l'administration cl'e la Société et ù laquelle n'est plus dévolue qu'aue mission d'autorisation et de controle - ordonnant un aJ)pel de fonds, ne lient donc pas le défendeur ;

Attendu qu'il résulte du pi'ocès-verbal de l'assemblée g·énérale elu 22 n1ai 1927 qu'il fut d'abord voté sm· le 1 o de l'ordre du jour, savoii'-la mise en liquidation de la société et que cette mise en liquidation fut adoptée: qu'immédiatement a[JI'ès les sieurs Joseph Goedertier et Maurice De Jaeg-ere flll'ent nommés liquidateurs;

Que ce ne fut qu'ap1·ès la mise rn liquidation, que l'assemblée généi·ale ratifia Ja . décision prise par le con8Pil d'administration de faire un appel de ·fonds ;

Attendu qu'à ce moment, l'assemblée générale n'avait plus pareil pouvoir; Mais attendu crue les liquidatelil's sP basent, non sm· cette délibération uniquemc11t,

mais sut' la décision du conseil cl'admiuistration, valahtement prise aux Lcnnes lies . statuts ; ,-·

Attendu que les liquid~tenrs pour postuler l'allocation des intérèts se basent sm la décision de l'assemblée générale et non sm la délibération du Conseil d'admini­stJ•aLion dont le procès-vel'hal n'est pas produit.

Attendu Cfue les intérêts ne coment clone qu'à dater de la mise en dememe. Pour ces motifs,

Le Trilnmal, écartant,toutes conclusions plus amples ou contraires. Condamne le défendent' ù paye t' à la demandel'esse la somme de deux mille francs,

majot•ée des intérêts légaux ù dater de la mise Pn demeure. Le èomlamne aux dépens, liquidés ù la somme de septante-huit f1·anes, non com-

pris I'enre~istremcnt ni l'expédition du présent jugement. . Hé serve les dt·oHs du ·défendeur à une éventuelle action en responsabilité contJ·e

les liquida.tems. · Déclal'e le pi·ésent jugement exécutoire pat· pl'ovision nonobstant tout recours ct

sans caution.

Observations. - Le jugement ci-dessus présente, fortemeut cllm·­pentée, la tltése de la souvet•aineté absolue elu pouvoir d~ appréciation des liquidateul's dans ies appels de. fonds qu'ils décrètent.

Les aeguments sont ceux-mêmes que développa··jadis!avec la netteté qui caractél'isait sa pensée, l'un des plus éminents collaborateurs de la Revue, le l'egretté J. V ANDEN HEUVEL, dans une étude souvent citée (Revue, 1896, no 678). Nous nous sommes enhat~dis à combattre cette

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86 BlBLIOGHAPHIE

opinion, non sans a voir~ pour j ustiliet' ceLte eu LrepL'ise, desrévondan ts de mat'CJue, dans une étude doctrinale parue .il y a trois ans (Bevue, 1928~ 11° 2860). Un autt'e collaboeatenr de la Revue, nrc G. RASQUIN,

'a mis en Iumiéee, dans une clémonsteation pérempto.iee, la mépt'ise cle tt'aclnction ou de teanscription snr laquelle, <:\ son "ittsn! PnDJEz.a établi son opinion de t'apporteur', ceoyant placet· le systeme rJn'il l'CCOllllllêltHlait SOUS f autm•ité de la législation anglaise, tan clis qu'en réalité celle-ci consacre le peü1Cjpe opposé (Revue, 1929, Il 0 2974).

:\ous de\'Ons clit'e rJne le cours de la jueisprncl~ence n'a pas enregistré de moclit1cation (cCt•. Rev11e, 1928, no 2859) : elle continué à se pro­noncet' le plus souvent clans le sens du pouvo:ie souYeeain d'appré­ciation cl es lifJUi_datent's. Le jugemeilt de Conl'tra:i ci-dessus en témoigne.

Xous ue pôuvons, fJUant à nous, r1ne nous référ·er de nouYeau huos précédentes ol).jections, auxquelles nous ne tt'ouvons pasjnSlJU~h présent rle réponse satisfaisante.

Nn 3119. ~BIBLIOGRAPHIE. ·

N. B. - Nous awwltcerons désormais la réception des mw myes e1woyés pour com­pte-rendu et dont l'analyse esl1nomentanément difrérée pM suite des nécessités de la rédaction.

Supplément au Dictionnaire fiscal des Sociétés belges et étrangères, -. associations, agents de change, assureurs, établissements de ban­

que, entreprises industrielles, commerciales et agricoles, pat'

Clwl'les De SYETH, avocat pt>és la Cont' d'appel de Dt'Uxelles~ avec la collaboeation de Jules CARMOIS. - "Cn vol. in 8, 200 i>., 43 Ü'.

(étranget·, 10 belgas). ~ Bt'uxelles, Ihabl. Em. Beuylant, 1931.

Nous avons sig-nalé naguère (Uevue, 1929, no 2989, p. 3Hi) les mériles de l'im-vortant « Dir!ionnairc fiscal des sociétés » tic Ml\f. Ch. DE s~mTn et J. CAR~wrs. Le foisonnement de la législal.ionfiscale, qui ne parait pas sur le point de s'anèter, devait fatalement oblig·er les autcms, ap1·ès la JH'omulg·ation de la réJorliw ai)JWt'téc pa.r les lois du 2 ~t du 13 juillet 1920, ù compléte?· leur œuvre par un supplément llUÎ la remit à jour. Les matériaux nouveaux, lég·i~lation, doctrine et jurisprudence ont été mis en œuvre dans le même ordre al phal)étique que dans l'ouvrage principal et leur concordance parfaite avec celui-ei y rend les recherches aussi faciles. Les deùx volumes forment une encyclopédie ilscale complète des questions qui c.onc er-ueut la constitution et le fonctionnement des sociétés. ·

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BIBLIOGRAPHIE 87

les impôts en Belgique. Ce que tout contribuable doit connaitre, pa1· Emile DAssY, Docteur en cli'Oit, ancien attaché au se1·vice spécial des Contributions elu M:inistéi'e des Finances. -Un v~l. in 8°, 115 p. 20 fr. - Brùxelles, I~Utbl. Em. B1't15rlant, 1931.

Ce petit volume n'est pas un eommenLail·e des lois belges d'impols. C'est un exposé lH'atique de la législation fiscak en yjg·ueur accompagné de nomlm:ux exem­ples d'apvlication. Il cmlH'asse la matiè1·e des impots dil'ecLs et indireels, des impôts sm· les revenus et de l'impol complémentaire personnel, des contrilmlions et taxes diverses et des taxes assimilées au timbre. Son but est de faire connailre ràpidt'ment eL sùrement au contribuable l'essentiel de ce flu'il doit connaître: la nature cL le taux de l'impot, ses di\rerses modalités, sa liquidation, Je fonctionnaire 11ui l'établit et le per\~oit, la jul'idietion de recours; il est parl'aitemenL alleinL et nous connaissons peu d'ouvmg·es ù la l'ois aussi réduits de Yolume cL aussi simples et nets d'cxpmit'. C'est un cxeellent guide eL nous n'hésitons pas à dit·e que des opuseules établis avce cP soiu sont u.ne excellente entrée en matièrP pom la consultation des c:omm!'nlaires pl'OlH'E'-lllent dits, qu'ils dépassent dans l'utilisation immédiate.

* '1- '1-

Une enquête sur les actions à vote privilégié en Belgique, pa1· Emile LA)U,_L. Pl'éface lle .:\f. Fet'lHtud BAVDHUIN, pl'ofesseur <\ l'UniYersité de Louvain. -lin vol. gt'. in 8°, II, 148 p. - Dt'Uxelles, Lnmci'Un, 1930.

Nous n'avons pas à app1·endre aux leclcms lie ceLle Revue l'importance cxtrème c1u'a prise, en ces'derniet·s mois, la question des actions à vote lH'iYilégié ou plural. Les abus de ee système se sont développés avec autant de rapidité que ses applica­tions mèmes, au point qu'on devait se demander, sur le seùl vtt de cc pal'aliélisme remarquable, si celles-ei n'avaient pas pour principal mobile la possibilité dt~ réali­ser et d'exploiter cenx-lù. L'.oun:agc lle l\'1. LA~IAL apporte, après la thèse de~ l\I. UE

STOOP de nouvelles lumières et plus abondantes que ne l'a fait aucun ântrc publiciste financier, sm ce que M. le Professeur llaudhuin, dans sa préface, appelk à juste titre cc l'étendue du mal en llelg·it1ue n. Pas moins de 49 °/o ùn capital holll'siet· des actions cotées à Bruxelles appartient à des sociétés où existent des actions à votes multiples ; par rapport au capital ordinaire, ces actions privilégiées ne représenlen t qu'un décaissement de 3,5 °/o et néanmoins elles })QSSèdent à peu près an tant de voix aux assemblées g·énérales.

Nous ne méconnaissons pas l'utilité que le système de la plmalité de votes peuL présenter en certains cas déterminés. l\lais quelles facilités n'offre-t-il pas pour mécaniser le controle des sociétés, le mvir à l'assemblée g·éuérale, spolier eelle-d de sa prérog·ative essentielle, eL l'CIHlre inamovible la dictature de conseils d'admi­nistration émanés de la miiiorité !. .. Quelques années ont suffi pom métamorphoser le système économique juridique des sociétés belg·es, légalement fondé sur l'indivi~ dualisme majoritaire, en un féodalisme d'adminisLt·atems-dynastes. A la faveur de cette évolution, se. sont épanouies les tendances de concentration iinaneière des

N° 3119

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88 BIBLIOGRAPHIE

baiHlUCS J'acea})arement des allhires imlustJ·ielles s'est réaUsé en uue sene de tomnè-mai11s. La révolution s'est aelleYée ])ar le procédé du dédoublement en Hlia­les et la multiplication des holdings. Sous ces coups de bélier répétés, le· fonction-

. nement juridique de la société s'est détraqué. Les eapitaüx demandés à l'éüarg·ne individuelle par l'industrie ne sont plus aujourd'hui des placements; ce sont de simvles « pat·Licipatfons aux risques n ; la saureg·arde dont la loi paraît encore nominalement les couvrir n'est })lus qu'une illusion fallaciense.-

Il y a long'lemps que nous avons dénoncé ce ])éril de la désorganisation prog-res-· sire de l'.at·mature légale de la société de capitaux et tùché d'alerter le lég-islateur concernant l'extension indéfinie de la zone de No man's laud créée autour des ehà­Leaux-forts des conseils d'administt·ation pat' eer tain es réformes imprudentes de 1913, entl'e autres par la suppression de l'action individuelle de l'actionnaire. Il aura fallu des catastrophes - comme toujours ~ })OUr amener les pouYoirs publies à s'en préoccuper.

Des ouvrag·es comme celui de M. Emile LAMAL ne peuyent manquet' d'éclairer eeux qui ont encore besoin qu'on leur dessille les yeux. JI y expose, avec clcs exem­ph's d'adualilé ù chafJUe 'pas, la g-enèse des actioùs à vole 1~rivilég-ié ct les eal}Sf's de lem clévclollPClllCnL en Bclg'i<Jue (danger de l'emprise intérieLire et extérieure, désir lie conserver la maîtrise tles afl'aiJ·cs sans immobilisation tlc capHaux impot'· ants). Il ne clissinmle pas le moins du monde les avantages- dont plusiems sont lég"itimes- que le s)'stème elu vote multiple proèure aux dit·igcants de sociétés;:àux bati<Jues d'a !l'aires, aux trusts et holdings, aux fondateurs de Hou velles sociétés. ll y ajoute de JH'écieuses incljeations sur les conditions d'application des privilég·es de vote, les différents types de ces actions et leurs bénéficiaires. Mais il met dans une égale lumièt'e et en s'appuyant sur des cas typi<Ines récents autant <IUe retentis­sants, les inconvénients elu système pour l'aetionnairc individuellement, pom l'éco­nomie, le s~·stème financier et les intérctssociaux du' pays. La partie la plus neuve ct Hl plus intél'essante tJUOique la moi us long-ne est celle qu'il consacre ù la statisÜ­que g-éné.rale, à la statistique de l'évolution du système et ù la stat.istitlllC comparée.

Les t!'ois derniers ehapitl'es sont rése1·vés à l'examen de la légalité du vote pl'ivi­lég·ié et des solutions d n problème et à des eonsid~ratious générales. ' ·

L'auteùr semhle avoir peu de coufiauce clans une intervention lég'islativc qui ren­Jorec!'ait seuleme1lt les règles lég·ales du système des sociétés de capitaux : l'habileté et l'ingéniosité des brasseurs et clidgeants cFafl'aires est, en elfct, difficile à saisir et empt'isonner tians le réseau des prescriptions et précautions lég·ales. ·Il place v lus d'esp_oir dans une réJorme de la bourse· aux valeurs uui instaurerait le coùtrole clit·cet de l'état et sa haute police sm l'activité financière du pays.

Sans méeonnaitre la nécessité de réformer le fonctionnement des bourses aux val ems, nous hésitons à penser que l'octroi à l'État d'une fonction de haute police directe en ce domaine soit suflisante et smtout soit ù l'abri d'autres abus peut-être plus désastt·eux encore que c.elui des actions ù votes niultiples ..

Nous pensons <1tie la réforme à opérer est complexe: elle doit avant tout resti­tuer sa pleine s.iilcérité . au régime majoritaire de la société de capitaux en

'eireonscrivant étroitement les applications de la plmalité de votr; elle doit aussi rétablirle frein de htetion individuelle de l'actionnaire.

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BIBLIOGRAPHIE 89

; .'La réJorme du 'f?lldionJJeJHéllt tle la holll'se. aux valeut·s sans. (1évelOPlJêîllent UllmHé. tle, l'étatisme policier eonwlétei'ft-heureusement. c-e .· h·avaiJ ,d'assai_nîssemen t. · ·_ QÙêlles -düe soiQut les· vues hüxquèllcs · flnàlemènt dollriel1 hi lll;édotninai}cc, il faüt féliciter l':~mte1.1r: d'avoir vc-I'sé mi dossim· de cette ang-oissmüe ·question: son intéressante et ütile enquête.

*

Le problème des actions à vote plural, par Paul STRVYE, avocat il .la 'com· è1' appel de Bruxelles. - Broch. in 8°, 18 p. (J~x-ti;ait de la Bevlte des S-ciences économiqnes. (Juin 1930) - Pr·iating co Liége·.

Notre di'sting'lié collahoratem, l\1. P: STHUYE fait campag-né avec vigueur, par la parole et par la ·plmne, co litre le système lég-al actuel. consacrant Je privilège des

-- actions à voix. multiples. _ , · Ses interventimÎs, nourries :d'arg'lHilents juridiques et économiques fortem~nt-éJa­

borés,_ont élô très remarquées, àjuste titt•e. Nous tenons à ohli~·ation d.e maù,ucr iei l'int{~rèt syi)lp~LiliCLUe (LUC so.n .efl'ot'Liious inspire,. ayant; ù- maintes reprises ct depuis longtemps, slg11illé le fa~ssemcnt du mécanisme normal de la société ano­nyme imputable ù la faculté illin1Héc de pluralisation de la puissance de vote des nct.ions. Le système du suffJ•agc uniYersel pur et simple présente des inconvéliients CCl'lains fot·sqn'il ne repose pas sur l'assise d'une forte culture poliliquc du corps éleetor:tl. Cet inconvél1ient apparait moindre dans l'orbite limité des iutérèts lleges­tion des sociôtés commerciales; ct en tous cas, il s'efface deYant les ahns <lu'cn­traînc le système de la dictature incontrolée et irresponsable des conseils d'alluli­nislration.

L'étude ci-dessus de l\I. P. Snn:yg résume en <!Uelques pag·es l'essentiel des don­uéès àu problème ù résomlt·e. L'auleurcstitne, ct nous a~lhérons à son avis, <!lW les actions ù voix mulliplrs violent sinon le texte, du moins l'esprit de Ja loi. de -1873, faussent le mécanisme et le IoncUounement de la société auonyme, assurent le maintien en fonction er, l'impunHé d'administrateurs incompétents et ·indignes et étal> lissent ·J'hérédité des mandats; elles exproprient les actionnaires de lem droit de rcga1·d sur la g·estion d'entreprises qui n'existent que gTùce ù l'apport de leurs fonds ; elles constituent donc (( Une atteinte extrêmement gTaVe à deuxprincipes f ondamell­taux de nott·e dt•oit pl'ivé et de nos coüceptions moi'ales : le droit de propt•iété et le principe de la responsabilité du· mandataire vis-ù·vis du mandant n.

Les fers de la I;éforme lég·islàtive étant au Jeu, l'auteur demande la suppression }llll'C et simple et SaliS délai de cette espèce d'adions.

OUVRAGES REÇUS. Essai sur la société anonyme ouvrière, par Haoul l'dm Y! pl'ofesseut· à

l'UniYersité de Gand. - Gaild, Volksdrnkkerjj, 1930.

La réforme de la loi du 24 juillet 1867 sur les sociétés. Projet de loi. Rapport général, par Andt'é DoL nEAU. Pai·is, . Housseau et cie, 1930,

N• 311.9

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90 jtjRISPRlJDENCE

Collection économique du Recueil général de l'enregistremènt 1910 ·à ·1930, servant de table vicennale, composée par les rédacteurs dn RecÙe.il sous la clit•ection de E. GENIN: - Édit. du Hecueil général, Beuxelles, 1981.

No 3120. - Tribunal de comm~-rce d'Alost. ~ 19 août 1930.. l\HJ. A D'Hondt, prés.-jug-e unique; - E. Scheerlinck, référ. ; Mtres G. André et

L. An spa ch cf P. Slruye eL F. Passelecq_, (Bruxelles), avocats.

(Soc. m1. Fabl'iques belges d'allmneltes cf (,h. Steppe).

Soeiét~ ~nonyme. - 1 . .a,ction1;1.aire. - Patrinioine social.- - Défaut de droit indi~is;.

II. Vente d'actions par un actionnaire simultan~Il!_ent. avec d'autre~. -:­Clause accessoire d'aliénation de liberté induslïrieUe et commerciale. -Acte civil.- Compétence ..

. L'twliowutire d'nnc socùJté ruwnyme n'e~"t pas, ptt/' le f'ail de la, posseslfion de 15011

acUon, Jiropriétrâre indil,is du. patrimoine ,r;ocial; cette possession ne lui confëre qu'un droit social, les bien.c; de la société étant la ZJl'OjJ/'ieté du COJ'jJI) social qu'il a aidé ri. /'olt­de!', et re juridique distinct de sa propre personnalité el agissrtnt par l'organe de l'as­semblée génémle ott de ses aduûuistmte_nrs; l'indivision ne nailmil q·zw le jou/' oh une cause quelconque {emit déclMel' la société nztlle on ine,?Jistanle.

Le caractère jMidique de la vente pm· u.n actimuutire,. de ses actions ne se modifie pas pal' le fait qu'illes aurait venllues en même temps que les autres actiomutiJ'es awYlienl 11entlu. les leurs el par un seul et même acte.

U1te Pente {{tite JJM un aclionna.il'e de ses actions ne pouJTallavoir un carrclère com­nwrçial que si elle était la suite d'wte acquisition de ces litres {{tite avec l'intentlon de les revendre; s'il n'en est pas ainsi, tout camctère conwwl'cial uutnque ltussi à la ·cliwse de cette revente des actions, par laquelle l'action1utim vendmu· s'interdit de 1-i'in-léressm· dans une enll'eprise de fabrication ou de .commerce déle7'minée. ·

Attendu- qu'e l'ac lion ten'd au- paiement de la somme de 300.000 l't·. à Litre de dom­niag·es inLérèts hvec les intérêts judiciaires eL les dépens, s01iune réctipé1·able par l:t voie de la contrainte par corps durant un an, ct se fonde sur c.e cîuc le défendeur a cédé à la société demanderesse -120 actions de là société Néo Allumettièré, s'eng·a­g-eant verbalement à ne prendre, sans son autorisation écrite, aucun intérêt soit directement SOit indirectement d~ltfS Ulle enli•eprlse s'occupant de la fabricateon OU

du commerce des allumettes en Belgique, en Hollande, en France ou au- G1·and Ducl1é du Luxembomg·, ce pendant un délai de 101 ans à dater du 29 octobre t926, so.u~ la sanct~ond'm~e péna~,ité dei.îOO:~OO fr.; c~t~l'i.\ aurait~néa,nmoin~ ~o~st~t~é~ le 2 JUill :f9.28, ayec hmt autres personnes, une soc1e.te anonyme sous la denonunatwn «La NaLionàle lndépen'dànLe n ayant son siège à Onkerzele"Grammont, et ayant pour ohjet la fabrication rt la vente des allumettes, en lui faisant apport d'un terrain de

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,JURISPRUDENCE 91

U> a .. 41, c.a. eon tt•e t'emise de 7 5 adions de capital d'une val eLit' nominale de -1000 ft·. chacu_ue et de~76 parts de fondateurs;

Sur let çomjfétence mtioue materiac : Attendu que la demanllet•esse soutient ltne, poul' la vét•ifier, le Tribunal deYrait

connaître le fond de la cause· et demamle, en conséqnence, ·qu'il- ordoime ù la dèfend~.resse lle plühl<~r le fond e11 mème temps üne la déclimltoii·e., ·ceqne-celle·ei refuse de fait·e ;

Attendu qu'eu l'espôee, la ·comi>étenee du Trii)unal ne dépend pas d'une cirçons­tance de fàH dont l'e,x:.istenee denait ètre, .~iu préalable, constatée, 'mais de la· simple ohsm·valiQII' des faiLs servant dg base à l'actionJels qu'jls sont exposés dansTexploît d'ajournement et ceux-ci étant SUpposés réels; ·qu'en efl'et, pOUl' établir J:\ compe­tence du Tribunal, la deinander~'sse invo'que '-le fait, non contest.é (J'~illeurs, que, par la convention litig-ieuse, non sèulement le défendeur mais lous les actionnaires de la société anonyme Allumett.ièt·e lui ont, de concert et simultnnén}ent, cédé leurs actions; qu'ils mu·aie_nt clone cédé leurs droits sur Je patdi!lOine ~oeial, ·aliénant ainsi des biens qui leur appartenaient. par indivis, lesquels compt·enai<mtnotamment la clieJllèle attachée· ù la société ; qu'il en résulterait que serait eommet·cial· l.'eng·a~ gmnent pt'is par eux de ne pas s'illtél'esser diJ·eetemenl ou indireétement daüs une eu(.reprise s'oceupùnt tl1•s allumettes en Be]g'ique.

Attendu q_ue l'actionnaire d'une sodété anonyme n'est. pas, var le Jait de la pos-. session de son action, propriétaire indivis du patrimoine social; cette possession ne lui confèt·e uu'un droit social, !Ps biens de la société étant la propriété du corps sodalqt~'il a aidé ù fonder, être juridique distinct de sa propre personnalité, et ag·issanl- par l'org-ane de l'assemblée générale où de ses administrateurs; l'iüdivision ne naitrait que le jom ou une cause <Jueleonque fPrait déclarer la société nulle ou

. . inexistan tc ;

Attendu qu'on ne voit pas comment le· caractère juridi<Jue de la vente- par le défe.ndeur de ses actions de la soc. Néo Allumettière viendrait à sc modifier dans le $ens indiqué par la demanderesse par le fait qu'il les amait VPtHluès en même temps que les autres actionnaires auraient rendu les leurs et par un seul ,et même ~tete ;

Attendu d'autre part que la vente faite pat· le défendeur tle ses actions de la soc. N·éo Allumettière à la soc. demanderesse ne serait au terme de l'art.. 2 al. 2 duC. Com. réputée commerciale, que si elle était la suite de l'acquisition de ces i.Hres faite par lui arec iÙtention de les revendt•e ; mais qu'il est incontestable qu'en coo­pét•ant à la fondatioil de la société N~o Allumettière, il n'a nullement eu pour but, en se faisant, de Lrafiquet• ultérieurement des titres qui lui étaient attribués en rémunératioil de ses apports, mais uniquement de fait·e un placement de f~iuls; lJUe pat· l,e Iait·mème, la revente qu'il en a faitè ù la demanderesse ne conslitue pas un acte con)mercial mais ui1 simple J'ait d'administration de son patrimoine; (jU'ain­si tout cm·àctère commet·cialmanqne à la clause lle la vente lui interdisant de s'in­tét•esser, en Belg·iJtUe, _dans toùte entreprise de fabrication ou de c:ommerce d'allu­mettes, la clause d'une convention participant. de la natut·e de l'assemblée dé la eonvei)tion.

Attendu que la· demanderesse· ne saurait d'arantag·è invoquee la· '(H'ésomption de.,

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92 JURISPRUDENCE

eommercialité iusmuée par l'ni. llual <1e l'al't. 2 elu C. Cu ut., la veùte litigieuse n'ayant pa~ le moindre rapport aYec la pwfession ùe ph:u•macien exercée. 11ar le défendeur;

· Par ces motifs _, Le Trillùnal écartant toutes conclusions se déelare· i ncompébent ratio ne nutlerlae ;

cotüJanurc la dcman~eressé aux dépCJlS ;

Dbeervations. - La ,distinetion de patt·imoiue eutL·e la société com­nu}~;ciaJe dqu~e de pet·sonnalité civile et l'associé est une des J1btl6ns fornh\inental~s elu ëlt~oit des'sociétés. Pendant rexistenée dela société. :l'.~ssocié .et,· .. tt phi§ fot>te l'aison ,' l 'aetionhaü·e~ n'a ancun droit i~H1ivi~ 'stll' le patpÜnoin~ social. C'est seàlement si la SOCiété venait Ù dispa­.raîtt'e? non p[H' dissolution~ mats pal' déclal'ation d'inexistellée Otl de ntlHité, qu'~Jle i'ee[tit place i~ une comm!manté de fait entre. ~es mem-

1

Qù,eLle.e,St laJHlttù'e du dl'Oit de l'associé? Ce .n'est pas t1Jl tll'oit r~éel ·; e~ i1;est pas non plus tlll dPo~t pet'souner peoprement dit.;- c'est -un.e SGPte de droit comvlexe de Cl'éance contt·e la société : droit d'in-tervention éloigÙée et iùclieecte (par délibéi'ation et vote) en sn>ges:.

·fion ou en son évolution constitutionnelle (modification aux statuts) ; clPoit cFintee:vention endes répartitions de bénéfîces ; deoit d'interven­tioJl dans le paetage liquidatif, etc ...

Mais (juels <ille soient la physionomie on l'objet de ce clt'oit de l'action­nait'e, ü n 'ajamais Je eàl'actére d'un clt·oit imniécliat de pt'opr.iété ni de clispc)sition SUL' .les b{ens sociaux. /

Par suite, la 'Yente, mèù1e sinmltanée et pal' un même acte,.-de toutes lès actions d'une société, ne constitue pas une aliénation de son patdmoiue; elle n'en opi:we pa;'3le trausCel't; elle ne transfége i:\ l'acheteur que les moyens ou facultés d'agit' attachés. à la r1uaht.é cFactionnàü·e. Pae racquis.Liion de la majoPité ou de la totalité des actior1s, les acquéreul's cheechent il se pt'QCUJ'et' la mct-îtn'se socialcde

· l'~lffaiee ou pluLôt les moJ.rem;juridiques der exercer. Ils ne visent pas à .faire- passee d<:u~sJent' ·patt'Ünoine pet•sonnellles -biens cle la société : si m1 tel transfet•t devait' être le. résultat de l':JC<Jllisition des actions, la société, dépouillée de son a voit·, devrait se di~soudt~e et clisparaitre .

. Le capactère civil ou C0)1lmercial d'une velite d'actions se déter­mine d'après l'i!ltention qui.en a inspiré l'acquisition 0~1· bien il se pf·ésume d'a1wès son rapport ou son défaut de l'apport avec la pro!'es .. sion commerciale cl~· l'acheteur ou ·du· vendeur·.

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JtHUSPRtJD:ElNC:El 93

1'mlte clause accessoire suit, -en cette i1nltié-re, le sort du principal ; une clause'd'aliénation d'ela 'libel-·té âe-faire 1~: comm.ercë incorporée· comme condition à une v'ente ci,rile cl'actîons'·par un particulier ·non connnerça!lt gardera, dans le chef de celui~ci, son caeactérQ civil.

li n'y a là que l'applicatio.n du droit commun.

No 3121. - Tribunal de commerce de Bruxelles (F" ch.). 5 février 1931.

Ml\1. Herman, prés. ; Guillauiüe,·référ. ; Pl. l\lll·es Deg·en· cf Thuysbaert, avocats.

(Cie Agricole et Commerciale du Tanganyka cf Ancienne .ilfalson Opsomer~rimJJsbaert.)

Société anonyme.- Souscription d'actions.~ Appel de fonds . .:.:....-Délais (art. 1244 Code civil). -Appréciation du jugé.

Aucune dispo::;ition Ûgale n'intùdit an juge d'user du. pozwoi;; que l1~i: co11.(ù~ l'm·­ticle 12-1-1 du Code clvll, lorsqu'il ::;'agit d'appel de fonds ::;ur ac/lons souscrites.

Cependant, en celle matière_, plus encore qu'en toute a!llre,te conseil que le lé.gi::;lateur aonne anjnge-de n'u::;er dn poii·voir qu'il bû accorde qn'aùee nne grande J'ésm'Pe doit l;tre scrupuleusement 7'especlé : l'égaWé entre associés est une règle ù laquelle il ne peut pas être facilement dérogé.

Attendu que la défenderesse ne conteste pas avoir souscrit cent actions de la société demanderesse; qu'elle ne conteste pas davantag·e être en retard d'effectuer les ge, &,c, 5c et Ge vet•sements appelés sm· ces actions, soit ensemble trente mille fr.;

Que ·vainement elle excipe de certain eng·agemenl qui aurait été contraCté vis·à-vis d'elle, au imjet de la fournitme des Yins dont la demanderesse aurait besoin IWÜr ses factoreries du Cong·o ; qu'elle n'apporte aucune jusLi.(ication de cet engag·ement rn;étendu; que eelui-ci fu Hl établi., autant qu'ill' est peu, l'inexécution n'en pourrait justifier la défaillance de la société demanderesse, mais I'i.mtoriseraiL tmiquement connnc elle paraH le reconnaître en ses conelusions, à réclamer la réparation d~1 préjudice <1ue celle inexécution aurait 1m lt!i occasionner, ainsi que la défenderesse se réserve de le faire; ·

Attendu que la défendei;esse sollicite des délais dé paiement pom s'acquitter des ycrsements appelés;

_Attendu qu'aucune disposition légale n'interdit au juge d.'user du pollVOil;flne lui ·éon fère l'artiele ~21-4 du Code civil, lorsqlql s'ngit d'appel de fonds sur âctiqns souscrites ; qne l'on JJC peut, comme certains aùteurs et certaine Jurisprüde:rice, nller jusqu'à déeider· qu'en cette matière les lrih~n:.mx n'on_t pas ln faculté d'oct.roy~r· de.s délais au débiteur. (HESTEAu, Sociétés anonymes t. ·Il p. J5; ........ Ci v. Drüx. ·1 °'; décembre ·1890; 1. T. ,1891 col. 384) ; . · · ·

Qu'il faut cependatit reconriaitre qu' eii · cette matière· plus m1coré. qu'en. toute autre, le conseil que le législateur donne au jug-e cie n'user· du pouvoir qu'illùi accorde qu'avec une g'J'arule réservr, doit être scrupuleusement respeet.é; que l'é~)'a-

N•3ti1

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JURlSP~UDENCE

lité eütl'e associés est un-e règ'le a laquelle il ne peut être facilement dérogé; CJUC l'autorisation donnée à .un actionnaire de retarder ses versemenfs peut même .cmn­promettre la situation de la S9r.iété (SIVTLLE, L I, no 519 ; Pand. 11. yo Sociétés anonymes,. no .70!J);

Attendu qu'm1 l'espèce la défenderesse ne justifie nullement qu'elle sc trour.e: dans des conditions si particulièrement intéressantes qu'elles puissent déterminer le jug·e à se départir. de l'extrême réserve qui s'impose si spécialement en la matière; · Attendu que, selon les statuts de la société demanderesse, l'actionnaire qui, ai)rès· p1;éavis d'un mois sig·niJlé par lettre recommandée, est en retard de satisfaire à tout appel de versement doit bonifier à la société les intérêts à S p. c. l'an à dater de l'exigibilité du versement; que le.Conscil d'adiliinistration peut, en outre, après un second avis, prononcer la déchéance de l'actionnaire et faire vendre ses titres en Bourse, sans préjudice au droit de lui réclamer le restant dù, ainsi que les· dom­mages et inté1·êts évenlüels;

Attendu que la demande se trouve donc justifiée par les di~positions statutaires qni régissent l.a soeiétt'• demandei·essc ; · ·

Attendu toutefois que la demanderesse' ne justifie nullemrnL la somme de six cents fran('s f.tu'elle réelame à titre de clommag·es-int6rêls.

· Par ces motifs, Le Tribunal écartant toutes fins et conclusions antres, ou contraires, déclare la

défenderesse déchue de ses droits d'actionnaire de la société demanderesse ; Commet M. ÜYJmLOOP, agent de change à Druxclles, avenue PrckcliilClen, HiS, par le ministère lluquelles actions nominatives· de la défenderesse avec les parts dr fondateur y afférentes sei·ont 11)iscs _en yen te publique aux enchères, en Bourse_ (Je Bruxelles, ùJa.première séance utile; Condan1ne la défenderesse à l'emettre an dit ,agent de chànge lOS Cel'tificals de ses actions. de capital et LIC. ses pariS de fondateur, en vue.de'la vente; Condamnr en outre la défenderesse dès ù présetit à payer à la

·demanderesse : -1 6 la différence eJ1 capital entre le_ montant qu'elle reste deroit· ·.lihél'CI' sur les actions. nominatives, en ec compris les tl 11. e. non encore appelés et le montant net de la ventç forcée des titres; 2° les inté•·éts deS p.e.l'an jusqu'au jour du paiement depuis les diverses dates d'éehéance sur les Yersements ~ppelés ; 3° les frais de mise en. vente des actions et des parts de fowlateur ; Condall1l1C la défcnderessr aux intérêts judiciaires ct ù .tous les déprns, !axés ù ce jour ù 'u.J, ft·anes, 50 centimes. Décl:we le wcsPnt jug-Pment ex(~eutoire par provision, 11onol)slant apvel et sans caution.

Obeerva.tions. - La jneispruclence .offi·e peu d'exemples de cas cPappÎication, et mème de demande d'application de rart. 1244 C. ciy, Cdélaü:; de gr·ùce)_ à l<:1, niatiere âe~ dettës de sonsct•iptem·. La ù1éoeie expo~ée en ce jugemmit lions pcu·aît juste. L'art. 1244confèt'e aüjuge Ull f)OUVOÎl' crappl'écial.ion généeal. :La dette de SOUSCI'Îption n'est pas exceptée de l'application de cette disposition génél•ftle. L'importance de la fibét~~ltion ponctuelle est cependant telle dans réconomie des soeiétés qu;Ùne ti1·conspection pal'ticnlièl'e s'impose aux· tPilmnaux.

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JU1US1?RUD~NC:Ii; 95

Qtiant aüx exigeilces -du mainUen de l'ég,.nlité enti'e les rictlomiaiœ~~

quelque impérieuses qu~elles so.ient _au yegard des rapports des ·actionnaires entre. eux et avec la société, elles sor1t, nous semble-t-il, un argument d'importance moindre. La plupart des statuts, en effet, prévoient le cas de retard dans les veesements et m~me l'm'gànisent par la ·stipulation d'intérêts moratoÜ'es.

No 3122. - Cour d'appel de Gand (2c ch.). - 31 décembre 1930. ~ni. Halleux, prés.;- De Clercq et De Poortere, cons.;-.Remy, av. g·én.

Plaid. : l\l'res De Pesseroey, Orhan et G. D'Haenens, avocats.

(Nys cf le curateur awr (aillites Nys, l'an den Broeck et consol'fs).

Société en nom collectif. - Faillite. de la société et les associés. -:- Oppo­~ition.- Intervention.- Aveu de cessation de paiements par un dés associés.

Un faill-i est recevable à se porter inlel'l'enanl dans l'instance om,erle sur l'opposition de son associé contre le jugement déclamf'i{.

Un Cl'éancier, quoique n'ayant pas faU de déclaration de créance an grefl'e, est recevable à fornier opposition et ù 'lnte~jeter appel dzt jugement déclaratif: Le failli n'éhtnl point partie au jugement qnl a déclaré sa faillite sur son aveu est /'{'cevable ù y forme-r opposition.

ll appart'lent et il incombe à l'associé en nom collectif de (aire l'm'eu de la cessation des paiements ·et de l'ébmnlement du crédit de la société; la faillite de la societé doit entrainer celle de chacun des associés.

C'est a'll moment dtt pron01icé du jugement déclarat-if' qu'il f'auf se reporta pour 'l'érifier. les conditions de l'état de faillite.

J. Quant à l'intervention de l'inllmé Yan den Broeck. Attendu clue c'est à tort que les appelants en eoi1testcnt la recevahilité,, sous

prétexte que le curateur de_fâilÜte t~tant rncausq, lesintérèt.s (Je l'intcneJ1ant.René Van den Brocèk (déclaré personnellement en faillite, mais non en cause ù ce titre), sont défendus et qu'au surplus il-est sans intérêt au procès ; ·

Attendu que l'intét'êL de Van den Rroeck ù intenenir n':sul_te. de sa qualité ·de ct•éancier de Nys, avérée par les éléments de la causr eL snrtouL- de sa qualité d'associé, fttü 1e rend solillail;e aree Nys, poiu· tous les eligagements de la so~iétt· (loi Slll' Je~ associés, art. f7) ; fJUe rte plus la faillite de la SOCiété énlraînant celle des ·associés, Van den Broeck peut se prévaloir de l'art. M:i2, 2° de la loi sur. les faillit~s ;

II. Quant à ia recembilité de l'opposltioÙ de la banqiœ de lfaes. Attendu que l'intimé 1\ftrr Orban ès qualités, eon teste la recevabilité de :J'opposi­

tion et de l'appel formés par la société anonyme c Ranrttw de. 'Va es >> eet.te société

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n'ayant affirmé une créance ni à la faillitlc Nys, Van den Broeck ct Cie ni à la fail­lite Nys;

Attendu qile le défaut de déclaration au g1·eJfe dan-s le délaLfixé ·ue -peut avoir pour éffctque d'exclure un créâncier de la répartition dé l'aclif(a~t. t>OSloisùr les faillites) mais· que de I,lüs il n'es~ pas contesté fJUH la dite banque est créancière hypothécaire de Nys et qu'à ce titre rlle peut avoir · ii1téi'èt à cc que les faillires nè soient pas maintenues, ne fùt-·ce que J)OUl' évîterqùe 1'immeuhlè gTevé' soit vendu sous Je rég·ime de la faillite ;

Attendu que la recevabilité de l'opposition formér par Nys à sa propre mise en faillite et à celle de la société n'est vas contrslér;

JIJ. Ai6 (01ill. __ Attendu que la preuve incombe à ceux qui font opposition ù la déelaration de

faillite (DE Pm\nE, .Manuel dü clll'afetn' de faillite, 3C édit., 11° 1H ; - GLASSOX,

COLi\IET-DAAGE ei Trssmn, Précis. de Proc. CÎY., 2C édit. 11°8 1047, 1052 et 1053); Attendu que le Tribunal dr commerce a prononcé la faillite de Van den Broec.k

sur son aven ; <Jne c'est encore sur l'aven du même qu'il a prononcé le 4 septembre :l930 la faillite ·dé.li.t soei.été; qu'il ~q)parlienL et qu'il ii~comhc à un associè en -nom eollectif de Iafre. 1)areil aveu, lorsque la société a eessé ses i)airmènts rL que son crt',dit est ébranlt' ; .

AtlellClu toutêfois que le failli, individu ·ou société, n'élaut point partie au jug~· ment, qui cltcta1'B-sa faillite sm son aven, peut la faire rapporter en ét~~Jissant

IJn' elle a été pl'Ononcée à tort~ AUendn que les opposants- font valoir en guise de p>reuve que le priucipal et

presque unique créancier de la société De Cock (qui a produit à la faÜJÛe de la société une créance de !02.030. 79 fr.) demande lui-même le t'apport de lâ. fail~He; qu'ils estiment que le crédit d'un commerçant n'est pas ébranlé, lorsque soù seul on presque seul créancier lui fait confiance et pmn; une somme aussi con~}Jlérahlp ;

Mais attendu que c'est au moment du prononcé du jugement déclaratif cru'H faut sc rapporter pour vérifier les conditions de l'état de faillite ; · -

Attendu que Van den Broeck affirme qu'en juillet ·19~0, De Coek a pris jugement· contre Nys et Van den Droeck en paiement de deux lmites acceptées,· de PimporL total de 50.000 fr. et que ni la société, ni Nys, ni yàn .den Droeck l'intervenànt lui­lïlôme n;ont été à même de s'exécuter (conel. du 40 novmnhre 1930 eureg.), · AÜt~ndtl que. dans leur éerit qui a suivi celte afl1r1t1ation (12 novemh1·eenreg·.) ies opposants appelants se sont h01·nés à soutenir qu'il 11'y ·avait jamais en d'acte d'exécution ni de tentative de pareil acte ; ·

Attendu ccpemlant que le non-paiement de. ces traites acceptées encore ~anc­t(ont)é par tine condamnation judiciaire, joint. aux autres élémeüls· c~e la cause. (lll'à relevés:\ propos le premier jug·e, révèlenl suffisamment que, lors elu prononcô dq IR failu'tc Nys, Van den Broeck et Cïe, cette société était en état de ressati011 de pak· merits et que son cré~lit était ébranlé ; · ·

Que si De Cock, quoique ayant produit à la faillite dela société d~npande lui-ni,eùl~., le rapport de eette· ·faillite, cet~acte ne peut rétroagir de façon à mettre à néant les conditions tle,Fétnt:de .faillite qui existaient lorsqlie cet rlat fut dùclart; parJc :jug·c. meilt du 4· septembre, objet: de l'opposition ;

~· 3Ulfi

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JURISPRUDENCE

Attendu qu'il doit en être ainsi, la loi ne pouvant, en cette matière, d'ordre public, rechercher et prendre en considération tels arrang·ements gratuits ou onéreux qui seraient intervenus entre failli et créanciers ; que pareil accord ne saurait être con­clu que d'aùrès les règ-les prescrites pour le concordat (DE PERRE, no H2) ;

AtLe'ndu (iu·e la faillite de la société devait entrainer celle de chacun des deux associés (ibid. no 776); que d'ailleurs les opposants n'ont pas démontilé. que l'aveu deNys fait au g-reffe et ayant entrainé sa mise en faillite personnelle, et l'aveù de Nys et de Yan den Broeck qui a entraîné la déclaration de faillite de la société n'aient pas été faits régulièrement ni à bon escient;.

Qu~ii sied: de remarquer, en outre, que les motifs du jugement a quo portent que c'esUtl1ssiatî gTeffe que Van den Broeck a fait l'aveu susdit concernant la société, et qu~', dails le dispositif il est donné ade au même de ce qu'il déclare expressément main~enfr son aveu tant concernant sa propre situation que touchant celle de là société;

Par ces motifs et adoptant ceux du jugement, La Cour, ouï en son avis conforme lVI. l'Avocat g·énéral Remy ... reçoit l'appel et

le déclare mal fondé, confirme le jug·ement, et condamne les appelants aux dépens, chacun potn~ un tiers, la solidarité ne pouvant ici se justifier.

Observations. - Cet a1·rêt est conforme à la doctrine et à la juris­

PI'UQence. · L'un cle·s associés en nom collectif a quali.té en princjpe pour fah e

l' avèu de la cessation de paiements de la société parce que cet acte ren t.re d'ailS le pon voir génél'al cl' administrer.

Toutefois, en ve1'tn elu Goele civil art. 1859, 1°, les autres associés auraient lé droit de s'y opposer, à moins que les statuts n'aient exclu

ce d1·oit d'opposition. A~utrement en nt-t-il qtÙtnt à la demande de concordat; le concorM

clat ayant !e caractère de compeomis et de tr'ansaction excède le pouM voir généeal d'administeation (Cfe. Comm. Liége, 16 janv. 1926,

. Revue, 1926~ no :2676, p. 108). Il va de soi que It~s associés étant solidairement et indéfiniment

tenus des engagements sociaux, la faillite de la société doit enteaîner celle des associés. La réc.iproque n'est pas vraie, pour le même.moÜf.

Toutefois (loi sur les faillites, art. 530), un associé peut obtenir pe1'sonnellement un concordat. ·

,.

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98 JURISPRtTDENC~

No 3123. - Cour d'appel de Gand (2c ch.).·- 31 mars 1930. (lHomme cf .Llle8/dagh et Cie et consorts).

Société commerciale.- 1. Liquidation déclarée terminée dans un acte notarié. - Preuve contraire. - Subsistance de la société jusqu'à_ achèvement de la. liquidation.

II. Clause compromissoire. - Compétence d'attribution.

I. Il est pèrmis de proUI'eJ.' p({J~ écrit contre les dires des parties constatés dans un (tele, même authenliJ]tte; quoiqu'un acte notarié de dissolution, llqzridation el partage d'une société en nom colleclit porte que cette liquidation ,esl complètement terminée, les conclusions concordantes des parties liliganles peuvent f'rmner.la Jn'el/1'e par éctil du conttaire el il s'ensuil'/'a que la société dissoute survit }JQUI' S{t liq1iülation.

II. Lorsqu'un acte de société con/'ienlune clause compromissoire qui préi'OÜ tous les différends pouvant su.l'gir entre les contractants, soit quant à l'intel'}JJ'élalion du contrat, soit q1utnt à son exécution, soif, en général, rehtlit1emenl à la société, cette chwse est applicable aux conflits qui naissent lors de la dissolution de la société el da'/18 les !li·t'eJ'ses opératûms par lesquelles chacun des associés entre en possession ile sa part.

Attendu f[Ue l'action étaU formée par la société en nom collrctü Pierre Mcsldagh 'rt Cit\ en liquidation, et, autant ({Ué dP hesoin, par les associés ou leurs ayants d1·oit <'onlrr l'associé lllomme; qu'elle tend à la nomination, par le "fl'ihuhal de eommercr, d'un second arbitre ;

Attendu que le ,jugement a quo, rendu-le 13 décemhre Hl28 par ce 'frilmnal, ayant considérô la dile société comme étant encore en liquidation. et, par cqnséltnrnt, commr. capable d'estet• en justicr en celle qualité, Hlomme a d1rig·é son appel contre rllc ct non contt'e les associés ou lems ayants· di'Oit, soutenant toujours qu'rlle Î1'cxiste plus ;

Attendu que, quoique non inlimés, la veuve Louis Jaüssens et ronsmts (les .associés el leurs ayants droit) ont conclu, autant. ftue de besoin, comme intimQe par ~Jtn· Vander IJaeg-hen, mais sans intervention régulière; qu'JI n'échet donc pas rl'~nroir ég·ard à leurs conc.lusions ; · Attendu qu'il faut donc rechercher cl'ahOJ'd si eette société dissoute ést encore rn liiJUiclation et si, par eonséquent, elle rxiste toujours pom sa liiiUid~ition rl pr'nt · donc ester en justice ù crtte Hn ;

Attendu que la réponse à crttc question cléeoulera.de l'examrn du l'one\, qui va suirre; . . ·.

Attendu ({llf' l'acte cle sociôté eontirnt nHe clause_ç·omrn;omissoire sur laqurllr s'aPt)ule la présrntr action;

Qu'à raison dn diflérrnd l'apporté ci-api'I~S, la société PiCl;l'('. 1\IesÙing-h el Ôe'avnit désig·né un arbitre rt avait sommô Blomme pat• exploit du 3 janYicr 192R, d'Pn désig-ner un second, cc que Blommr s'rst abstenu de Jaire jusqu':\ twéscnt;

Attendu que le clél'cndPtu· et app~;lant so't1tirnt que le clill'érrnd sunenu entre lui rt la soeiété llcmantlcresse et intimée échappe aux prévisions de la clitr clause compromissoit·c, clause cxeeptionnelle ct d'intcrprétntion étroite, ct ce du fait que, par un acle du ministère du notaire SP.rrnys, J'ésidanl. ù Ostende, la société a l'té

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.l ü1USP1WDENOE 99

déclarée, non seulement dissoute et mise en liquidation, mais complètement liquidée; .

Attendu que cet acte porte, en effet, que Blomme est ent1·é en pleine propriété, jouissance et libre usage des biens qui lui étaient attribués ; que ses co-partageants et la société elle--même l'ont subrogé dans tous leurs droits envers l'Etat du chef de dommages de g·uerre ; que les autres comparants ont déclaré avoir reçu les sommës qui leur étaient respr,ctivement attrihuées, ce dont il est donné pleine quittance dans l'aete;

Que cet acte se termine ainsi dans sa partie essentielle : ,, Mits al het voren­staande hekennen~partijen clat g·emelde onlhondene maatsehappij in gezamenlijkm naam gehee! en gansch vereffend Js en u_it dien hoofde geen aanspraak meer te maken teg·en malkander of tegen wien het ook zijn moge (sic) waaronder weder­keerig·e ontlasting· n ;

Attendu que plus l1aut, l'aete portait quittance, en faveur de Blomme de certaine soulte par lui due à la masse ;

!\'lais attendu que, dans ses conclusions en date du 26 novembre 1929, Blomme reconnaît qu'« il est exact que l'un ou l'autre ex-associé a encore une créance à faire valoir contre l'appelant n (Blomme); qu'il explique que cet ex-associé tout en donnant quittance à lllonune, a laissé les fonds entre les mains de celui-ci, ce qui, en fait, constituait !< UII prêt ou un crédit à titre personnel>> ;

Attendu que c'est pl'écisément sur la déhition de eertaine somme par Blomme en exécution de l'acte de liquidation que porte le litige à soumettre à un arbitrag·e, d'après la demanderesse et intimée (exploit de sommation du 3 janvier 1928, prérappelé ct conclusions de l'intimée en date du 28 janvier ·1930, en reg·.) ;

Atlendu qu'à l'appui de sa présente demande, elle fait valoir avec ·raison que la liquidation complète était subordonnnée à l'accomplissement de tout ce IJUi était constaté plus haut clans l'acte 11 mit.s al het vorenstaande )), et que, en dépit de ce qui est aclé, Blomme, en ne ·s'acquittant pas de la totalité de sa dette. ne s'est pas conformé aux conditions de la liquidation; qu'il s'ensuit que cette liquidation n'est pas terminée quoique l'acte porte le contraire;

Attendu qu'il est permis de prouver par écrit contre les dire des parties constatés­dans un aetP, même authentique, et qu'en l'espèce les conclusions des deux parties litigantes relatées ci dessus forment cette preuve ])ar écrit. (1341 eiv.);

Attendu (jU'il suit de là qu'en l'espèce la société survit encore pour sa liquidation et qu'il est inexact de prétPndi'e, avec l'appelaüt, qu'elle a cPssé d'exister et qu'il 11'existe plus qu'une dette se rattachant à l'exécution de la liquidation.;

Attendu même qu'à supposer laJhèse de l'appelant fondée, les termes de la clause eompromissoire, interprétés à la hunière des articles H56, 1157, H58 et 1164 elY., ne pennettraieut pas de lui donner raison.

Que la clause est, en effet, rédig·ée comme suit : << Toutes les contestations· entre ·les associés au sujet du présent contrat ou de son exécution ou relatives à la société seront-tranchées pal' deux arbitres désig·nés par les parties en cause n ;

A!tendu que ces termes prévoient tous les différends pouvant surgir entre les contractants, soit quant à l'interprétation fln contrat, soH quant à son exécution. soit en génél'alrelalirement à la sociétô ; ·

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lOO JttRJSPRtrDENCB

Attendu que, si la fidèle exécution d'un contrat de société importe à lous les associés, c'est principalement lors de la dissolution (Je la sodélt~ el dans les dherses opérations par lesquelles chacun d'eux entre en possession de sa part; ctue d'aillems c'est surtout à ce moment que naissent les conflits el qu'il y a lieu ù concilialion pm' voie d'arhitrag·e, lorsqu'un pacte eompt•omissoire fig·ure dans la convention ;

Attendu que ti"l Mait donc l'inlérèl des contractants, lorsqu'lis instituèrent enll·e eux la juridictiou arbitrale; que lelle est, par const1qnrnt, la p01·tée <tu'ils enten­dirent donner à cel te ela use ;

Attendu que la conclusion prise le 15 mars 1930 par l'appelant aux fins d'ohleuir nn délai pom· désig·ner t;ventuellemenl son arbitre apparnH, aprrs les enrnwnls de cette long·ue procédure, ('Olllmr un simple procédb dilatoit·e ;

Par ces motifs, 1

La Cour ... reçoit l'appel, le déclare non l'ondé, en déhonte l'apprlant, ('Ollfil'lllC lP jug-ement Pl condamne l'itppelant aux Mpens d'aplH'i.

Observations. - Le cnl'ienx ar·1·ôt reln·odnit ci-dessus met ph1tôt eil œnvre les principes du d;_•oit commun q11e ceux du dr·oit <les soeü~tés, pom· la solution dn litige .fléfél'é ù la Com· J'appel.

fLest iiltér·essant cepe'ndnnt, du point de vue fln dJ·oit des sociétés, pat; rapvl.ication fJUÎ .r est faite, flans 1les conditions nssez rares, du

peincipe de la subsistnneo :fictive de ln société pour· les besoins de sa liquidation.

Du moment !]tw la Cour décidait, h ln lnrniére des rwincipes du dt•oit commun de l'interpt•étai.ion des contr·n.Ls et 1les pl'etn'OS, qne la liquidation (le la. société, n'était pas teeminée, IIOilohstant la flécl::u·a­tion J'(wmelle coni.J·air·e, inscdte dans l'acte notarié (le cl!Hnve, il flentit. logjqnement s'ensnivr·e ln 11écessité t1e l'appeler· à l'existence officielle la société appat·en11nent 1léfunte.

N" 3124. - Tribunal de commerce de Br-uxelles (loe ch.). 22 avril 1930.

!\DL Rossum, juge uni!JlH' ;·- Cuillaume, premieJ' référ. adj:_.:_ l\[' 1'~'" Stillg-lllmnhrr, Tulkens rt Aue1·hach, av oc.

(Hanque Bel!fo-Néf'l'landai.~e cf !Jtl'Oi'llf3).

Opérations de bourse.- Report consécutif à. des opérations exécutées en ·bou1•se. - Agent de change levant en liquidation les titres achetés à terme pour son client. - Reports par l'agent avec ses capitaux

··au cours de compensation.- Contre-partie autorisée. . .

L'ayen{ de change qui, ayant accepté le mandat rle se procui·el' en boursP des lilre,ç; commandés pW' son client, lui 'l'entl des lifl'es qu''il a en porlef'euille, se consli.tue

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JURISPRUDENCE 101

·contre-partie et fiûLune opéNtlion irrégulière, non autorisée ni rati~ée, cette opéra.tion tloit être cowûdérée comme non avenue et être élimiuée cles comptes entre parties.

Pa1· contre, auèune des misons qu.i imposent l'exécntion en bonrse de l'ordl'e d'ache­ter ot.t· de 11encl're 1w se I'CJWDilil'e clctns ·une opération de report dont le but unique est cltl proc"rer au client le moyen de prolonge/' u1w opémtlon à lenne.

L'a(lenl de change 1ùt pas droit ltlt courfaye sur de8 repol'ls cow,entis persounellemeut.

Revu.en expéditions enn~gistrécs, le jug~ement t·endu entre p:ulies pat· le tribunal de ce sièg·c, le 28fén1er 1929 cL le rapport déposé par M. Hallut, le H déc. 1929 . . Attendu qtJe l'arlJitl'e t'apporteur constate que tous les achats eL ventes de Litres

pom· compte (Ju ·défendeur l)ar la tlemandercsse ont été effectués en homse, à l'ex­ception de l'achat de 20 Chimique le 8 aoùL 1~27 et de 18 Quercine, le -17 janv.1928;

Attendu qu'en YetHlant à son mandant des Litl'cs qu'elle avait en portefeuille, alot·s qu'elle avait accepté le mamlat de se les procmcr en bourse; connue elle lui a d'ailleurs affit•mé l'avoir fait, la ùemamlet·esse s'est cons!Huée contre-partie eL a fait une opération it'l'ég-ulièt'P que Il) tlél'enlleur n'a ni aut.orbée, ni ratifiée eL qui doit è.tre considét•ée eommP no11 avenuP et ètre 1iliminée des ,comptes entre parties (Brux. 7 nov. -1.907, Jar. com. Hnur., HJOS, p, 30; - FRf.:DÉRICQ, l'riJU;. de d1'oit m11un. belge, t, 1, 11. 2H et la jurisprudence citée en note);

Attendu que vainement le défendetir fait état de ee ·que la demanderesse aurait pris la position de contre-partie dans tout ou nartie des nombreuses opérations de

'report. ou de déport intervenues entre pat'ties; que dans se.mblablës opéi;ationss, il n'existe pas d'opposition d'inlét·èts entre le reporté et le rcportetlr; qu'aucune des raisons qui imposent l'exécution en bomse tle l'Ot'llre d'acheter ou de vendre, ne se rencontre dans une opération tle report dont le but unique est de procurer au client le moyen de prolonger une opération ù terme; que)e prix auqüelle reporté vend an comptant et rachète ù tm·me est tlétermilH\ par le'coms d.e compensation officiel­lement fixé en bourse, ehaque quinzaine et n'est donc sujet ù aucun arbitraire; que la spéculation du llanquiet· ou de l'agent cle ehang·e au déti'imeiÙ de son commettant n'est pas possible en matière lie report et que les motifs qui dGivent Iail·e interdire la contre-parlie lorsqu'il s'ag·H de Yentes ou d'aclmls ùe Litres, n'exis!ent pas en matière de report (Fn.ÉoÉHicQ, Op. cil., 242 et auto1'ités dtées en note) ;

Que c'est donc ù tort 11ue le ct'éfendeur critiline Iês conclusions de l'arbitt•e rap­porteur en ce qui concerne la validité des opératious de report ;

- Attendu, toutefois, tJUe la demanderesse n'est point intervenue comme iutermé­tliaire dans tout ou 11at·tie des reports; qu'elle n'a pas droit au court~ge -porté en compte var elle comme rémunét·ation de ce set·\'ice d'entt•emise qu'elle Ii'a pas rendu;

Attendu que si l'on fait abstraction des deux opét•atjons d'achat où la demanderesse a été contre-partie l'L des comlages indùment réclamés sur les t'eports consentis ,personuellf!ment Jlal' la tkmanderesse, il Pst ePr)endant constant et établi par le rapport de M. Hallut, que le défendèm reste déiJÜeur d'une somme hien plus con­sidérable (lUC celle à laquelle provisionnellement la demanderesse t•éduit sa demande; tlu'une nouvelle expertise serait frustratoire en l'état actuel de la proeédure ;

Atlcmlu que la demande dü défendem tendant ù la restitution des titres par lui

N• 3124

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102 JURISPRtJDEKCE

remis en g·arantie n'a pas élé ramenée devant le tribunal ; qu'il ne peut ~~ être statué;

· Par ees motifs, Le Tribunal, écartant toutes fins et conelusions autres ou contraires, dit pour

droit quP la demanderesse s'est constituée contre-partie dans l'opération d'achat de 25 Chimiques du 8 aoùt 1927 et dans l'opération d'achat de 25 Quercine du 17 jan­vier 1926, déclare ces opérations nulles et non avenues;

Dit que la demanderesse n'a droit à aucun courtag-epom les opérations de l'eport qu'elle a personnellement effectuées ; condamne provisionnellement le défendeur ~~ payer à la demanderesse la somme de Hi2.000 fr. du chef d'opérations de bourse; le condamne aux inté1·êtsjudiciaires et à tous les dépens faits à ce jour ; résene ceux a faire en p1•osécution de cause.

·mt que le présent jugement sera exécutoire par provision nonobstant appel et sans caution.

Observations.- Ce jugement a été confil'mé en appel :nous publions l'arrêt ci-après (Revue, no 3125). Voie rétude docteinale qui suit (Revue, no 3126).

No 3125. - Cour d'appel de Bruxelles (7e ch.). 30 octobre 1930. Ml\'1. A. Joly, prés.; -PI. 1\'Itrcs Atlerhach cf Stinglhamber.

(Lavoine cf Ste Ame Banque Belgo Néerlandaise.)

Opérati~ns de bourse. - ~xception de jeu. - Obligation de l'agent de change d'exécuter en bourse les ordres reçus de son client. - Raport pe~sonnellement effectué par l'agent de change. - Contre partie autorisée.

Celni qzti soulève l'exception de jen a le fardean de let prenve qll'il y a eu. accord pour conclttre des marchés fictifs ne devant se .liquider que par le paiement de llinërences.

Il y a lieu d'admettre la distinction entre l'opération à terme à son origine, lorsqn'elle est exécutée en bourse it l'intervention d'un agent de elzange et l'opÙaf'ion de report, qtti est une opémtion bancaire prenant naissance au moment où le client se trouvé dans l'impossibilité de lever ozt de li7JTer les titres. L'agent de change a la faculté d'exécuter lni-même les ordres de l'eport qu'ili·eçoit, avec la gltrantie des cours de compéilsatiou fixés en Bourse chaque qttinzaine.

Vu les ju~rements du tribunal de conunerec de Bmxelles; 1 oc Chambre, du 28 février -1929, et du 22 avril 1930, rég·nlièrement produits;

Attendu qu'il y a lieu de joindre comme connexes, les causes inscritès sous les numéros 769 & 24770 ;

Attendu que celui qui soulève l'exception de jeu a le -fardeau de la preme, et que, pour les motifs repris au jug-ement du 28 février '1929, l'appelant ne démontre pas qu'il y aurait eu accord pour conclure des marchés fictifs, ne devant se liquider que par le paiement de différences ;

N° 3125

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:UmSPJWDENCE 103

Attendu qu'il ressm·t dn t'apporl de l'arhitt·e:..rapporleur Hallut que des comptes fùt'e-ntsuecessivement ouverts au nom de Lavoine par la Banque Belg-o-Néerlandaisc les 2:5 avril, tel· juillet ct 13 juillet 1927; que les OJlérations comptant se cloturèt·ent le 20 déeemiJre 1927, par un solde de 68.ti81 francs 40 centimes, en Javeur de L:woinr, et que lrs opérations- terme se doturèrent le 10 décembre i927 pÜt' ün solde de G7.070 J'ranes 8~ centimes, en faveur de la Banque llelg:o Néerlandaise; qtiC des all~tit·es furent eiH'Ot'e traitées par la suite jusqu'en mai l92R; que c'esl fin ani!, début mai 1928, fJU!' les cours des valeurs constituant la position de Lavoin'e ont aUcint leur maximum, pOUl' redescendt'e immédiatement dans de fortes pro­portions;

Atteitdu que l'arbitre rap(wrteur, apr(•s avoir donné un n•levé compld des ové­rations lHigieuses, émet l'avis l]Ue tous les ordres passées p~ü· Lavoine et détaillés dans les comptes qui ont été revrocluils, ont été normalement exécutés par la Banque llelgo Néerlandaise, qui a dù lever les titres dont elle avait passé ordres d'ael'Ùtt à ses eonespondants;

ALterH-Ill' fJllC la régularité des opérations est ainsi démontrée, et lJll'il comient d'adot1'tct' l'aris tle l'arbitre rapportem saufùiüquemenl en ce qui concerne l'achat tic 23 Chimiques le 8 aoùt 1927 ct l'achat de JS Quercinc le 17 janvier 1928, ces valeui'S ayant été passées par portefeuille alors qu'elles auraient dù être ac.hctées en Bourse;

Attendu fJlH' Lavoine critique vainemeut les opérations de report qui n'ont pas été faites en Bourse ; .

-Attemlu lJU'il y à lieu, en ell'et, d'admettre la distinction que fait l'arbitt'C ravpor­tcm enlre l'opôl'afion à Cenne à son orig·ine~ lorsqu'elle est exécutée en Bomse à l'intet'v-ention d'un ag-ent de ehang-e, et l'ovération de !'('port ou de dépot subsé­ltuenle, qui est une opéi·ation bancaire prenant naissance au moment où le client sc trouve clans l'imposihililé de lever ou de livrer les titres ;

A.llendu qu'à raison lle la nature mèrne de l'opération à efiectuer, la llanque BcJg·o Néerlandaise avaÙ la faeulté d'exécuter les ordres de report qu'elle recevait, con­formément à la pralique en vi~ruem, avec la g·aranti.e, pom Lavoine, des coms de compc11sation fixés en Bourse chatJlH' f]ninzaine;

Par ces motifs, La Com, joignant comme connexes les causes inscrites sous les mun éros 769 ct

24770 du role général, et écartant toutes cm1clusions plus amples ou contmires, Entendu M. l'Avocat général De Vooght en son aYis conforme, donné à l'audience

pnbliqÙe, Confirme les jug·emcnts attaqués et condamne l'appelant aux dépens d'appel.

Observations. - Voit· l'article de doctPine publié ci-après sous le no 31 '26. -Le jugement confiemé par cet arrêt est publié ci-airant sous le 11° 3124.

N°·_ 3125

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104 .·notJTltiNE

No 3126. - De la contre-partie -de l'agent de change en matière de report.

L·~agetit de change peut-il en matiére de report se constituer contre­

pai·tie de son client? Uu jugPment du Tribunal de' commerce de Bruxelles (lûc ch.) du

22 avril 1930, confirmé par arrêt de la Cour q'appel de Bruxelles (7e ch.) du 30 oct.obre 1930, résoud la buestiov par l'atlh;mative. (Rev,ue. 1931, ll05 3124 et 3125). Celle-ciln'avait pas encore été sou­mise, croyons-nous, à 1 'appPéciation des tribunaux belges. Il convient de vérifier eu quelles limites exactes doit se renfermet' cette jul'i~1wuclence.

-:A.vant d'examiner les arguments très intéressants développés clans ce jugement, il pat·aît utile de définir le sens exact du mot ." repor·t " àfiu. de connaître la natm·e des opérations traitées dans l'espèce soumise au Ti·ibunal. Les agents de change confondent trop souvent

, les contrats et se soucient for1 peu de terminologie. C'est ain,si qu'ap­pliquant ce nom de " repm·t " à des contrats bien différents, ils lui donnent plusieurs sig·nifications.

Il y a le report cle banque, qui est un prêt d'argent sur titres, conclu sous forme d'achat au comptant par le prêteur, et de vente a un terme convenu au profit de J'empruntem·. Ces contrats sont surtout conclus

· paP les banques faisant partie d'un com!té de liquidation des opérations à terme; Jes agents de clÙmge les chat·gent de pPeuùt•e liv1~aisou des titres en liquidation, d'en payer le prix pour leur compte.

Il y a aüssi le rPport çle bmwse. A l'arrivée du terme, les agents qui ne peuvent prendre livraison des titPes qu'ils ont achetés, les reven­dent au comptant en bom·se et les rachètent à terme a un autre agent de change. Ces deux opérations de vente comptant et d'achat à terme,

. faites par un agent de change pour compte d'un commettant avec des agents de chang·e difféPents, sont appelées repol'ts parce qu'elles produi­sel1t des effet analogues au report proprement dit, à savoir, la Continuité

.. d'opérations engagées en pré-vision de la hausse des cours (1). Mais ces deux contrats de vente et d'achat bien distincts conclus avec lles

. ager1ts difféeents ne constituent pas un eeport parce qu'ils n'en pos­sédent pas les éléments essentiels, ainsi que nous le verrons plus loin. Remarquons en passant qu \m anêt de Liége du 5 avril 1928 applique

(f) Georges GoYENs: Opérations de bourse et agents de chang·e, no 160 et suivants. ~ '

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-DOCTR:JNE - 105

à ce genre d'op'érations l'exceptioli de jeu, -a· raison de leur caradere élisif de toute obligation de livrer ou tle payer et·deslors· fict:if (1).

Enfin, il y a le J'epo1·t JWOprement d·it. Availt de le définü· expliquons · le·s opérations qüi le pl'écèdent.

' LHsmalichés a. terme de bo:urse oùt ceci de j_ml'ticuliel'" tjlle! contrai­'J'ement aux autees opérations commerciales, ils ne peuvent être I'ési­·li'és ùi proï·ogés al 'échéance. De plus, ils doivent être cou elus pour· des quantités miÙimmn imposées par les comités de liquiclatiou, qui 1ixen t le:;; échéances .. Ils clevienmint, a 1 'anivée du terme, des oper·ations au comptant. L'acheteur a clone l'obLigation de prendt~e liveaison et de

· t)ayer là prix. S'il n'a pas les fonds nécessaires, il peut eevendre ces titres au comptant. Ses 1wévis:ions peuvent avoÜ' été déjouées : ache­tetu· et spécnlateue à la·lmusse~ ildésil·e conserver cette situatiou en vue d'une amélioration éventuelle des cours. Mais les règlements 1 'obligent à exécuter le marché ou à vendre comptant à un tiers qui, ac)leteur a SOn tour, rexécutera pOUl' lui. Il se fera alOl'S repOPter. Cette opération est un contrat de nature spéciale par lequel 1 '~Rgen t de change revend au coinptant le jour des repoi·ts, pour compte de sou client (le t'epar té), les ti tres achetés a terme, et ce a un agent <le change (le reportem·)~ au com·~ fixé par le comité de liquidation, et rachète a terme, à ce m.ême agent de change, le même nombre rle titres, au même prix, augmenté d'une légère différence pour leser­vice rendu. Le I'epodeur reçoit les titres achetés comptant et liYrés par le vendem' pour l'acheteur originaü·e, reporté par les soins du cmi1ité de liquidation.

Si l'on analyse cette opération en ses éléments juridiques, on con­st&te qu'elle consiste dans une vente au comptant doublée d'un achat it ~erme conclu au même prix entre les mêmes personnes. D'après ses résultats, on remarque qu'elle proroge en fait une échéance et procur·e à peu pres les mêmes avàntages qu'un prêt sur titres. ou une vente h réméré tout en étant bien différente au point de \rue Juridique (2).

I.: Relisons le jugement. Il déclare que l'agent peut sB constilue1· contre-partie en matière de J'epart, ceci conformément à la docti·i ne

, ; et à la jurisprt~dence. Le jugement décide en fait quel,acllat au comp­tant et la revelite à terme par Pagent. de change n'amenant aucune

(1) Appel Liég·e 5 avril1928; Belg. jud .. -19~8, 81 et note d'ohsenaLions. (2) FRÉDÉRICQ, Précis de droit commercial belg·e; T. 1, p. ~31.

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106 DOCTRINE

opposi-~iùn d'intérêtl ptitsque ceLte opéeaLion se l'aiL an cours de com­pensation, est licite .

. Analysant cet ensemble cropét·atiolls uous vet't'oHs, d'ap1·ès les déOnitions proposées, qulil ne s'agit pointde Pepm·t pt•opl'ement dit. n~autt·e p:u·t, l'agent ce change ne se·constitue pas contre-pat·tie, pt~.i~qn'il ne ti·aite plus comme conmlissiOI_lnait·e, mais.e11 qualité dp banquier·. Il appaPaîtt•a donc supet•f1u de lég:ilimee en l'especela coJltPe

pa1·tie par l'absence cle pt•éjudice. Ces négociations sont donc légales mais pour d'autres moLifs, (l'api'es

nous, que ceux. indiqués claus le jugement confir·mé par la Cour. Décomposant les opérations qui ont fait Pol~jet de ce jugement! que

voyons-nous? A l'arrivée elu terme, le spéculateut·, aclleteuP et haus­sier, désiee ne. pas JH'enc1t·e livraison des titl~es mais se faiee repol'te1·. L'agent ne clJet·che pas enboul'se une conke-pm·Üe : il_n·a clone pas à renseigner cette opéPation d'achat poul' compte sur sa feuille de liquidation des opér·ations it terme. llpreud l:ivl'aisou, pow· son douueut· d'ordre_ê, des tiLl'es achetés pour celui-ci. Il ue s'agit donc ,.pas de cout1·e-pal'tie. Puis, agissant en qualité de ballllUÏèl', il s'abstient de réclamet· a son commettant le prix des titres dont celui-ci ne clésit~e

pas prendt•e lin·aison : il les lui achète comptant et les lui revend il tePme, c'est-à-diee lh~t·ables à la i>roclla.i11e liquidation.

Ces opéeations IWésenl.ent avec le report des différences telles qu'il est per·mis de sontenit' qu·il ne s'agit plus d'un véritable repoet.

Il n'y a pas~ en eJfet, ici de ti ePs rep01·teul', c'est-it-dit>e d'agent de change }H'enan t livraison des titl'es du co1nité de liquidation et l~s payant comptant; ou reportant pat• voie d'application au nlai'Clté les ventes crun autre intel'médiaire opérant en sens conteaire : l'agent de change a, en réalité, Jll'Îs liveaison des titt·es pOUl' compte de son

·commettant ; il agit comme commissiounail'e. En deojt il tl'ansfËwera même la propl'iété des titres à son client, s'il

les individualise pm· lmws numéros : le Peporté cleYiendra ici lH'Oprié­taiee des titt'es; toutefois cette individualisation n'est point une oiJli­gation~ puisque l'opération a la forme d'un achat au comptant suiyi d'une vente à tePme, l'agent agit ici en qualité de banquiet' puisqu'il fait~ en réalité, un prêt SUl' titres. Dans le véritable report, l'agent rep01·tem· qui est un tiers devient, au contPaire, ÜJ11joues propriétait·e des titees.

Enfin, remarquons que ce report fait directement par l'agent pour

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DOCTRINE

coinpte dè soù clîelit a le même cm·acteee que le repol't e-n lJauqùe : la- Banque reç.oit. des tib·es des agents, lés leur· achete mt" comptcull. et l'es leüt' I'eVellÜ à ÜWllle.

Nous pensons dori'c rgte ragent faisant ce geul'e d'opét·atlons ne con­clut pas de vél'itaules I'eports et n'est pas cotlt1·e· pal'tie; il ne s'agit }Jlus d'une opét·ation de bourse. au, marohé~ -1i1a"is d'Une ·opé"t·ation de banque.

Hemarquous, en passant, (1ne ce genl'e d'opél'ations est une sout·ce d'abus. Souvent ragent de change, bien qu'ayant levé les titres pcn11· · compte de son client, les dépose en garantie, " en pension "; pom· avoie des fonds. Il ne peut pourtant disposer des titres qu'il ne détient que pour compte de sa clientèle ; il n'a pas le droit de se pt·ocuem··des fonds en mettant en nantissement des .titl'es dont il n'a·pas: la pt·o­priété., ou dont il n'est que propriétail'e momentané avec cl1arge de rendre compte et d'en trq.nsréree la propriété à sotl commettant.

II. On a voulu voit· un cas de contre-partie clans la: pratique ci-apl'Ùs de reports par application. Un agent de change a deux clients, ces­peGtivement acl1eteur et Yendeüt·, à terme,. d'une égale quantité d'un nième titt·e. Tous de li x sont désit·eux, il l'époque de la liquirlation, de continuee leurs opérations dans le même sens. Ces deux spéculatem's opérant en sens· conteaire, l'agent ·re2wrfe 1wr appliccttion c'est-à-djre se sert de la vente pour repm·tf-ll' l'achat et réciproquement; Füclteteüt· touche le dépm·t. payé pal' le vendeur l'eporté.

··Nous estimons qu'iln~.r a pas là de contee-pat·tie. L'agent reste, en effet, inteemédiait·e entre deux commettants. Il conclut l'opél'ation au même coues elit de compensation. ·Il n'entre pas clans ropération, oserions:..nous cliPe, pom' se constituer le contt,actant de son mandant. Il l'emplit sou t'ôfe d'inteemécliaü·e e~ rapproche les parties. Ainsi un coinmissionuaire teanspodeue conclut avec une éompngnie d'assu­rance, dont il est le mandatake, une assurance mat'itime pom· des marchandises à teansporter poue compte de son commettant. Cette assurance est paefai te ment valable· (l). : Ainsi le report d'application a-t-il tonjom·s été admis par la juris-

prudence feanÇaise. '

(1) LAcouR: Précis de dt•oit commercial, 3e édition, T. II, no 1611; ~ Poitiers, 15 février 1897, D. P., 1.899, 11, 3H.

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108 DOCTRINE

III. Colilment l'agent de cil ange est-il amené a se constituer contre­partie h Foccasio11 des opérations derepùi"i,s?

Nous supposons que Pagent a régulièt·.ement exécuté au mat·ché l'ordre inïtial~ ou s~il a exécuté cet achcH par voie de contre~partie! i:\ -1, in;su de son commetlant, et qu~il compe,üse cet. achat eu lui en\royaut un bor·d(Weau de vente, il ne p'eut êtl'e qtlieslion ici d'un report qui est, elll'~alité, UIW JH'OI'ogation d:échéauce, ·la substitution d'Ull contrat lt tePme }t tine convention échue, et A exéçutee. L'opéJ•atjou t<Jtlt _eut.ière sée(\ affectée d'noe nullité relative comme faite en3nécoun~t.issance

·des obligations du mandat.· I~'agBIÜ ayü.nt donc· exécuté PéguWwement rot'dt•e cPac}lat au

, . mcwché, le client se t'ait repo!·tel'. L'agent s't\perç:.oit que la tendance e~t! à ce JJW!lleJtt, h la baisse, Il fait l'opét;~ttidn suiraute: il exécute1tU ruaJ'ché un oedt·e de vente, de lhçou à ·opérer la con1peusation.avec l'achat.. ohgir)<ÜJ'e; mais il a en pol'teftmille ,des titres de même nature, bu enc01'e il se propose d'en achete1· au m~t-rché; ii envoie à son client~ clé~:areux de faü·e repol'ter HOU achat initi~l! Un bordereau de Yente·au

. comptant ei d'achat a te1·me des mêmes titres li v l'ables t~ la quinzaine suivante et ce, ·au cours de compensation m~jot·~ des fhüs de report; la teùdauce étant ü la baisse, il pomTa revendPe à Ull pvix plus bas à t'expiration de la quinzaine suivante; Ja d.iffét·ence c<.mstitueJ'a son béné.fice.·

·Cette opét·ation de ven te-achat, conclue eu tJ·e r agen_t et son dien t, simule une opét~atiou de report; mais eUé n'e11 a c1ue les appat·ences. Le ''t'LÜ l'epol't, en effet, nécessj te l'in ter·\'r(m ti on d'un ti~i·s qui achète les titres que 1~ client .ne pouvait paie1' à l'échéance. Puis, sous

. •·é~et·ve des applications chez les agents,· ~u entre ceux-ci, il permet, à l'échéauce, J'exécution effective des opérations pat· la lirraison des titr~s, et le paiement de lem· pl'ix. · · ·

Quand les opé!'ations sont exécutées au marché, les agents sont obligés de l'ecllercllet' en Bom·se, il Péi1oqw~ de Ja liqùidation, une contre-partie. Les opéi·ations e11 sens di\'el•s se multiplient et contri­buent ainsi it la siucédté <.les com·s. En p~éJ•iode d'effeerescence bom·­siere, les spéculateurs qui estiment les reports tl'op onéreux seront fol'cé~<s de revendre purement et simplement lelll'S titres. Les opéeations ne seeout pins toutes d.it'igées dans le mènie sens. La hauSise cles reports

· aménera des capitalistes à Yendt'e lem•s titres. Ces opérations l'em­plissent donc un rôle considérable et fournissent aux spéculateurs des

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DOC'l'RINE 109

inclic~üions pPeCieuses sur l'état d'un marché. Ces faits ·sonL connus,' La spéculatiop remplit ici un role utile.

Dans le report simulé, an contrait'e, il n~y a plus en,rwésC'nce que le client et l'agent. Celui-ci 11e va plu.s rechet'cher en bourse un tiers J'epol'teur. Les- opérations enlevées an marché ne peurent naturel-, lement y exercer aucune in~tience. Elles sont pt·ivées de toute exécu­tioiYeffect.ive, puisqu'elieR aboutissent à des con,1pensatiom.; entre agent et client. Elles sont fictives et même frauclnleuses. Elles pt'OClll'elÜ ii l'agent un bén~fice illicite :·celui-ci en effet, pet·çoit le IH'ix ·du t'ep<wt qui reviendrait normalement au tiers repodmw. La rwatique eRt donc eondammable à tous égards.

Au point de vue économique, la raréfaction arti.ftcielle des ordres en bourse, ne doit pas, en effet, êb'e laissée à la merci des agents. Le volnme des offres et demandes doit être la CQnséquence de toutes les opérations spéculatives. Le rôle de la spéculation est précisément de tendPe à JÜYeler les com's dans le temps et 1 'espace.

Au point de vue juridique, il y a infeaction aux régies du mandat. L·'agent suhstitne an contrat de commission-mandat un achat-ven .. te; Le client ne peut, c'est évident~ être lié par lllL conti·at atlfluelsa volonté n'est pas intervenue. J.a faculté qu'a_ professionnellement l'agent de chang'e de coneluee un contl'at de mandat-commission ou un achat-rente ne peut lui permetb'e de c·onfondre à son gré deux con­tr'ats, même si cette faç:on de pPocéder· n'enteaîne poul' le commett~nt aucune peé,judice.

Il n'en pom'J'ait ôtre aub'ement que si l'agent de ebange n'était pas, en dt>oit, un: commissionnaire et un iùtermédiaÜ'e, ou encore si le contrat de commission pouvait êtt'e exécuté par nne vente dii·ecte tout en Pestant un mandat.

l.a suppression pour l'agent de change de la défense de fnü·e des opéeations en nom personnel n'a point, dans la pensée du 1égis1ateut·, modifié le caPactére et la natm·e de la Jll'ot'ession q1ti a, en pr·indpe, pour ol~jet la négociation et les opéi·t.üions pour compte d'antt·ui. En droit, l'agent de ebange est un courtier (m·t. H4) ou plus habituelle­ment nn commissionnait'e, acheteur· Qu Yendem· vi~-à-ris des antres agents et mandatait'e v.is-it-vü; de ses clients (art. 67, alinéa 1).

Vintercliction légale cPopéPer en nm{1 per~onnel a été, il est vrai, supprimée. Mais poul' qn~lles r·aisons et dans quelles conditions?

Plusiem's membres de la Commission chnr·gée de disc1~tet· le 'projet

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110 l)OÇTRINE.

de la loi a"etuellement en vigueur insistèrent pour que cette nouveauté fùt consacrée par un texte exprès. Cette proposition, malgré leur ii1~istance,. fut toujours repoussée. La Commission eraignait que 11er­m.ettre aux -p,gents de traiter en _nom personnel n 'altérftt le caractère dela peofession. La loi, disent les travaux prépm'atoires, peut tolérer que l'agent fasse des opérations en .nom personnel; si ell.e l'y autot•ise expressément, il est à crajndre qu'il ne se reh'anclle " q~rrière cette " disposition pom' échapper aux conséquences de 1 'jnfr-action qu'.il " am'ctit apportée au mandat qui lui avait été confié ". La loi après aYOÏl' défini l'agent. de chang:e " celui qui iiltfPrient_ dans les. actes de

:' .commet'~e ~omme in t:rmédiail e ". n~ peut! l' atÜOI'Ïser ~xpressément a mtervenu' .üans ces memes actes a tttt'e ·personnel : .Jl 3~ a là .une contl'adictio.u.

En~ I'éalité, la pi'olribition pom· les agents d'opél'er, con:1me négo­ciants ep. valeurs a élé suppi'imée h raison de l'impossibilité cl~ la faire ollsel'ver, sans plus.-

L'artiele 13 de J'arrêté clil 27 praü·ial An X olJHgeait les agents de ehange ~t recevoir de leurs clients les titres(\ négoc"ieJ', ou les sommes nécessaires pom' payer ceux qu'ils doivent achet· r. Cette oblig·ation disparut dans l'article 67 de la loi actuelle parce qu']l sembla inutile cl "indiquer les motifs pou~' lesquels l ~ ageut.· de clmnge est respons[.tble .de ce fJU'il achète ou vend ~n nom personnel.

Il:. eùt été préféi·able cle J'appeler aux donneurs d'OJ'dres cette obli­gation initiale de livrel' les titJ·es destinés h êb·e vendus, ou de verser le pl'i.x. des titJ·es à achetei'. T~·op de_ clim!ts se. souviennent seulement loes de la reddition des comptes, que l'agent est lill intermédiaire et . non un banquiee. '!'l'op souvent aussi ils espèrent se libérer en. reven­dant a''ec bénéfices, quand ils ne contestent pas avoir donné ordre cl'aclleteP des tit.I'es qui ont malllem'ensement baissé de prix. Cette obligation ÎI1itiale de lirl'et' on cle payer den•ait faire l'objet d'un al'ticle de la nouvelle loi. (1) .

Maurice TrENRIEN,

Avocat à laCour d'appel ete Brüxelles.

(J) NrssENS ct DE B.\ETS, Commcntail·e Iég·islatif, Nos 3B7, 3rH, 369.

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JtiRlSPRtJD~NC:E

No 3127. - Cour d'appel de Liége (2e ch.). - 9 février 1931. 1\IM. Louche, prés.; Pepin, av. gén.; J\fll'e~ P. Philippart ej Alh. Jouruez,

(cmateur), avocats.

(IJec!.'ers cf Curateur de la {'aillile : « Boulonneries de Bressou:r ll}

111

Société anonyme.- Obligations. -- 1. Assemblées générales d'obliga­taires.- Publication des délibérations.- Sanction.

II. Substitution d'actions aux obligations. -Acceptation préalable par : l'assemblée générale des obligataires. -· Acceptation postérieure par

l'assemblée générale des actionnaires.- Délai (art. 92 lois coord.). III. Augmentation du capital par suite de substitution d'actions au:x

·obligations.- Augmentation à concurrence d'une somme supérieure par décision unique de l'assemblée générale des actionnaires.- Divi­sibilité des décisions d'échange et de souscription.

~V. Augmentation de· capital par souscription publique .. - Délai de réalisation.

V. Augmentation· de capital, - Irrégularité de souscription. - Non versement d'un cinquième. - Pas de nullité. - Responsabilité des administrateurs.

I Le retard apporté dans la publicàlion des décisions d'assemblées génërale8 d'obli­gataires n'a d'autre sanclion que la 1'esponsabilltë éventuelle des administmteurs vis-à-1'ts des obligataires qu.i eu auraient subi préjudice.

II. La déci.<;ion de l'assemblée des obligataires d'accepter la substifution d'action8 à leurs cPéances, ne peut être considérée, à défaut d'acceptation préalable des actionnai­res que comme une offre qui doit J'esta sans effet, si elle n'est pas acceptée dans le délai de trois mois.

L'acceptation prévue par l'art. 9:2, § 12 des lois coordonnées sur les soCiétés est celle de l' dssemblée générale des actionnaires dont le « consentement )) suffit lorsqu'il précède l'a8semblée des obligataires; elle n'est pas conditionnée par la date de réalisation de l'augmentation de capital qni en est le corollaire indispensable; le capital d'augmenta:­·fion se trouve de plein droit souscrit par le fait de la délibémtlon de l'assemblée géné­rale des ac/iomwires et par celle de l'assemblée des obliga.taire.r; qui l'aura précédée; -il apparlieut donc à l'assemblée générale des aclionnain<~ .. seule, d'accepter l'offre dt>t; oblig{tfail'es el cette acceptation doit êtreréputée acquise dès qu.'elle est suil1ie par lrt décision ·d'augmenter le capital : le (( consentement )> ainsi manifesté par l'assemblée -des {Wtionnrtil'es crée entre ceu:r-ci et les obligataires une com'enlion qui a pour effel de réalise)' la trans(onnatiQn des obligations en actions.

Hl. Lorsque /'(utgmentaliou de capital décidée pal' l'as,qemblëe géuérale des action­naires a pour objet 'll1lè somme supérieul'e au capital-obligations à C01I'I'C1'lir en capilal­(totions, il peut se faire, selon les circonstances de la cause, que l'augmentation 1JOtée n'était pas indlt1isible ni le consentement des actlomwlres à la substitution d'actions aux obligations, subordonué à la réalisation inlé{!mle de t'augmentation du capital glo-balement décidee. ·

N 11 3127

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112 JURISPRUDENCE

IV. La validité d'ttne a~tgmentation de capital n'eJt stlbm·donnée légalement à ttn t~élai de réalisation qne lorsqn'elle doit se réaliser par 1'0ie de sousoription-jmblique.

V. Le {ail qne le capital d'augmentation n'a pas été tëgttlièrement souscrit, ni rég1l­lièremenf l'e1'Sé même à concurrence d'un cinquième n'enfm?"nemit pas la nullitë de l'augmentation de capital mais P-ngageralt là J'eiiponsabilité des adminiHtratem·s (art . . % lois coordonnées).

l\J. l~avoèat génét·al PEPIN adonné son avis en ces tePmes sm• la. pad.ie 1wincipale du débat de cette cause :

J'en aréive; enfin, ù ce qui est, selon moi; la seule et vraie question dè celte affaire. Au point de vue du fond, l'appelànt prétend que l'accm·d sur la substitution d'ac­

tion1' de la Société ne s'est pas réalisée, l'offr·e de l'assemblée des ol)ligataires n'ayant pas ét~ acceptée dàns ie délai fatal des trois mois fixé par l'article 92, }1arag;. 12 'Pt" tine, ~u:x terù1es mêmes de cet article; elle .n'a pas eu d'effet - -

Le cura.teür répond avec· le jugement a quo qtie rom·e des obligataires a été acc~p-. tée par les actionn~ires le J 6 février· 1.924,: les· deux· assemblées s'étant tenues ·Je même~joür, qu'à l'instant même de pai· le eoncoms de consentements entre les oblir g·ataires dela Société, une noral)ons'est opérée dans les droits du demandetw- qÙi,. de· créaüclêr est devenu actionnaire ; . · ·

Que, cettes, la réalisation de l'augmentati~n du capital indispensable àcett~; sub~ stitution ri'a été constatée que le Jcl' septembre 1924, par l'acte Ingeveld, JHlhlié'OJ:e 17 septembre, mais que cet acte ne doit pas êtl·e confoildu avec la coJ1Ch!~Jon·de l~ conYentii:m dont. il. constitue simplement l'exécution, exécution· pour laquell~ :;tUC!lQ délai déterminé n'est p1·évu par la loi. · · ·

C'est la question c.apitale. du procè~. Question délicate et qui,. à ma connaissance, n'a j'usqu'iei fait l'objet ~rauovne

décision judiciaire. Suivant la solution qur vous lui donnerez, l'aspect de la faillite sera radicale!lJtmt

lt·ansformé, son passif étaut diminué ou augmenté de 900.QCO francs; · · Lt: texte porte : à moins que lrs aclionnait·es n'aient antérieurement (lOflll~. leqr

consentement au suJet de la substitution d'actions. aux ohlig·atim)s, les dé.cisipn-s· {Ir l'as.::emblée des o))Jig·ataires n'auront d'effet it cet égard que si elles sont. aecept~~s; dans le délai deJrois mois, par les aclionnaires délihéranLdans les formes ·lm!:s~ri­tes pour les modifteations aux statuts.

Dans notre cas, vous le savez, les actionnairesn 'ont délibéré e~ don nf,>, le.pJ'. con­sentement qu'après la réunion de l'assemblée des oblig-àtaires.

A première vue, le texte semble n~exig·er qu'une simple_ adhésion san~ pJus de l'assemblée dPs actionnaires :\ l'offr·e fies obligataires pour l'existénce de ~~ · ~uhst.i~ tution . . Mais il importe de ne pas s'rn tenir à son écorer et, pour en fixer le .sen$, l::t por­

tée eLla limite, d'en pénétret• l'esprit .. Les travaux préparatoires ne nous apportent aüeun éelairc;issemenL à ç.c point de

vue, mais il n'est pas difficile de la découvrir. · Anal~·sant l'article 92, Reslcau, lloJ1t l'ouvrage sm <<.Les Sociétés aJlûi1YI11~S çtevant

les lois belges » fait aulot'ité, l'indique avec préeision au t. Ill, no ·1680; .. 'Lorsque

N.9 3127

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~ià

la société, par f'org·ane de son assemblée g·énérale, n'a pas, à l'avance, donné son consentement à la substitution d'actions aux obJig·ations, la décision de l'assemblée des oblig-atait·es apparaît comme une simple sollicitation, une simple offre. Il n'eût i1as été équitable de forcer les obligataires à inaintenir indéfini ment cette offre jus~ qu'à ce flU'il plaise à la société de l'accepter ou de la repousser définitivement. De là, la disposition de l'article 92.

Aussi longtemps que l'acceptation de la société n'est pas intervenue, les oblig·a" taii·es conservent leur qualité ; ils ne sont pas encore actionnaires ; ils restent créan­ciers et ils peuvent exercer tous les droits que la loi· met à la disposition des créan­eiei;s contre son débiteur ; ifs peuvent l'assig·ner en paiement s'il leur est dù quel­que chose d'exigible; de même, ils peuvent provoquer la déclaration de faillite, exercer les actions du débiteur qui resterait dans l'inaction, demander la nullité des actes qu'il aurait fait en fraude ,de lPurs droits, etc... ·

Bref, la délibération de l'assemblée g·énérale des obJig·ataii·es est sans effet, sans -\•aleur, jusqu'au moment où elle est acceptée régulièrement par la société.

Si c'elle-ci faisait attendre son acceptation plus de trois mois l'offre viendrait à tomber définitivement, les ohligatail'eS Sel'aient déliés ell;assemblée des actionnai­l'eS ùe pourrait plus valablement décider la substitution d'actions aux créanciers des

· · obHg-ataires ... La i;aison du délai de trois mois inscrit dans l'article 92, c'est donc que l'offre

des obligataires et, par sÙite, leur qualité de créanciers ou d'actionnaires en laqu~lle Üs proposent de la tr·ansformer, ne peut rester indéfiniment en suspens.

Le lég·islateur a' voulu que la période d'attente ne dé11assât pas trois mois. Ti·ois mois après l'offt·e, la situation doit être définitivement rég-lée : ou les obli"'

gataires sont restés ohlig·ataires, où ils sont devenus actionnaires. , Leur fJualité doit être irrévocablement fixée àl'expiration de ce délai.

L'article 92 le proclame en termes énerg·iques. Passé ce délai, la décision. de I'assrmhlée cles oblig·ataires n'aura pas d'effel, c'est-à-dire que son offre sera défini· tivemenL tomhée et qu'une acceptation ultérieure de l'assemblée des actionniares sera inopérante comme tombant (lans le vide. L'acceptation doit, cela va de soi, être pure et sim11le; une acceptation conditionnelle ne vaudrait que Si la COI1dition; se. réa"risait dans le délai de trois mois. Le but de la loi ainsi défini, il faut, pour saisir le véritabl_c sens du tr~te, l'envisager à la lumière des principes fondamentaux de la loi sur les sociétés.

Quels' sont-ils? D'une i)art, la sub.stittition d'actions de la société aux oblig·ations entraîne l'aug·

Ü1entation du capital : c'est là un axiome puisqu'il faut nécessairement créer des :iclioris nouvelles pour l10UYoir les attribuer aux obligataires (Resteau, t. III,

. - Il 0 -1648) . L'aug·mentation du capital est clone le corollaire, le complément indispensable de

la décls1on de substitue!' des actions aux obligations. Sans elle, pas de substitution }WSsihle.

·Ir ne suflît donc pas que l'assemblée des actionnaires accepte en principe l'offre des olllig·ataires pour qu'une cc novation J> s'opère clans les droits du créancier, pour

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114. .JUlUSPRUDENCE

employer la termjnolog-ie du jug-ement a qug. (Voir ù cel ég·ard Wauwermans, no 831 ct Resteau, t. III, nos ·1668 et -1666).

Tl faut que l'aug·mentation du capilal soit votée. Supposons qu'après avoir donné un accord de principe :\l'offre des oblig·ataires,

l'assemblée des actionnaires, pour une raison quelconqur, se refuse ù voter l'ang'-­mentation de capital, l'oblig-ataire nonobstant cet accord, n'aura pas perdu celte qualité. Son o1fre, en effet, ne peut être comidérée comme acceptée car elle con­siste dans la substHution d'actions aux o~>Iig·ations et cetle substilution est impossi­ble ù défaut d'augmentation du capital.

Qu'on n'objecte pas qu'il y a une convention dont l'exécution prut, le cas l>ehéant, êt1·e potll'suivie en justice. Les tribunaux ne peuvent, se substituant à l'assrmblée g·énérale des actionnaires, ordonner cette augmentation.

Seule, l'assemblée des actionnaires peut la décréter, en obsenant, dit l'article 72 de la loi sur les sociétés, les ,·onditions aux statuts.

D'autre part, il ne suffit pas de décider une aug-mentation du capital, même par elevant notaire, pour qu'ellè existe ipso facto.

Sauf le cas où le capital est souscrit immédiatement, (( sur le tapis yert >> la déli­bération de l'assemblée g·énér-ale ll'apparaît que comme un simplr projet de modifi­cation aux statuts dont la réalisation est subordonnée ù l'accomplissement de toutes les conditions légales, c'est-ù-clire la souscription iutégTale tin capital d'aug·meuta­tion, la libération de cllaque action d'un cinquième au moins et la constatation défi­nitiye de l'aug·mentation par les administrateurs clans un aclr' authrnlique qui par­l'ait l'opération (Hesteau, t. TH, nos 1338, 1358 et 1337).

Ce n'est <wemoyennant l'accomplissement de ces conditions <1ue l'aug·mentalion du capital sera réalisée et <JUe la substitution deviendt·a un fait ace01llJJli.

·Il n'est clone pas exact de dire, comme faiLle jug-ement dont appel, que le man­dat donné aux administrateurs de réaliser l'aug·mentation du capital qui a (~té

déeidée par l'assemblée des actionnaires ne constitue <!n'une mesure d'exécution pom laquellr la loi n'a pré\'U aucun délai déterminé.

Ce 1wt'tendu acte d'exécution est, au contraire, l'indispcüsahle paraciu\vcnwnt du · consentement de l'assemblée des actionnaires ptiisqm•, sans lui, l'aug·mrntalion du ca.pital n'existe pas et qur, sans augmentation déddée ·et rôalisée, il LW peut y aYoir substitution d'actions aux oblig-ations. -

Les deux actes, écril Resteau, t. Ill, no 1821, p. 10, doivent èl.re puhliès pUÎS(jlle l'un est le complément de l'autre et qur la modification aux statuts, comme l'aug·­mentation définitive du capital d'ailleurs, ne résull6 que de leur conihinaison.

Tous les accords de principe solll illusoires eL vains si le moyen d'opérer la sub­stitution n'est pas décidé rt r.r1~é car une convention dont l'exéculion ne peut èti'e pomsulvie en justice, eommr -c'rsL Ir cas, unr ro.nvention dépounue de sanction !l'est. pas un 1'Ù1Cillttm juris. · ·

L'aug·mentation du capilal étant ·subo•·<lonn{•e ù sa souscription, sa libt''ralion rt. sa constance (((•linilive dans un acte autlten liqnc, la cons<''<JUCncc inéluctable qui cu dècoule dans le système admis par le jug·ement a quo, e'rst 11ue le sort lies ohliga­taiL'es est tenu en suspens jusqu':\ la passation Ile l'acte anthrntique considéJ'é comme une nwsu1·e d'exôculion l)OUJ' lalruellc aueun délai n'a ôté fixé.

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JURISPRUDENCE 115

· Le curateur le reconnaît, car dans ses conclusions, on lit cette phrase·: <! qu'il ·faut adniettre pour le moins que, dès le 1 cr septembre 1924, les oblig·ataireb avaient changé_ de qualité, qu'ils étaient devénus des actionnaires ... » .

L'acte authentique, dans cette opinion, peut donc être passé plus de trois mois . apt·ès l'offre des obligataires. En fait, dans notre cas, il n'a été dressé que le 1er

septembre '1924, plus de six mois après. Pareille conséquence est la condamnation du système cal' elle est en contradiction mauifeste avec. le but de la loi, qui a voulu que, dans les trois mois de l'assemblée des oblig-àtaires, la situation de ceux-ci fùt définitivement fixée et qu'ils Si!chent s'ils conservaient ou perdaient cette qualité. · Le terme « accepter n de l'article 92 traduit parfaitement la pensée du législateur

rians l'hypothèse où il s'est placé, hypothèse habituelle, celle où ·l'assemblée des actionnaires décide une augmentation· du capital uniquement à concurrence de la somme nécessaire poul' la substitution d'actions aux obligations.

En pareil cas, l'aug·mentation du capital se fait à l'instant même, << sm· le tapis vert ». « Lorsqu'on procèdera, écrit Rest eau, t. III, no 1il42, à une aug·mentation du capital par émission d'actions nouvelles destinées à être échang·ées contre les ohlig·ations en cours, la décision de l'assemblée g·énérale des actionnaires qui aura décidé l'échang·e sufiil'a pour constater la réalisation parfaite de l'augmentation du C:)pital ; ce capital d'augmentation se trouvera de plein droit souscrit par le fait de la délibération de l'assemblée générale des actionnaires .et_ par celle de l'assemblée ries ohlig·ataires qui l'a ur~ précédée ».

Mais tel n'est pas notre cas. En l'espèce, l'assemblée g·énérale des actionnaires a décidé une augmeiltation du

capital non pas à concurrence de 500.000 fr. mais à concurrence de .900.000 fi'., 1.000 actions de 500 fr. devant être émises en substitution des 1.000 obligations de 500 fr. et les 800 aclions de priorité de 000 fi'. restantes devant être émises au pair et à souscrire contre espèces ou par application de soldes créditeurs.

Les 800 aetions restantes étant à souscrire, -l'assemblée des actio'nnaires charge le conseil d'administration de réaliser l'aug·mentation de capital, en la faisant cons­tater authentiquement par un acte ultérieur.

Cette délibération, le curateur la décompose en deux objets distincts et indépèn­dants : 1 o la èréati<?n de 1.000 actions pour l'échang-e des oblig·ations, soit une augmentation de capital de 500.000 fr. Sur ee point, l'accord est fait, dit-il, et les actions se tl~ouvent souscrites <(sur le tapis vert>>; il est fait définitivement dans le. délai imparti par l'article 92, puisque l'assemblée des actionnaires s'est tenue le mêmé jour, 16 février, que l'assemblée "des obligataires, une demi-heure après.

Pom la partie de l'aug·mentation destinée à Ja· substitution cl'aclions aux oblig·a­t.ions, a'ucun acte ultérieur n'était, selon lui, nécessaire. L'acte du '1er septembre, mes'ure d'exécution, se borne du reste à constater que l'échang·e se fera quand les porteurs Cl'oblig·ations se présenteront. ·

La eréation de 800 actions de priorité de 500 fr., soit une aug·mentation elu capital ·de 400.000 fr. à souscrire contre espèce ou par application de soldes créditeurs; 2° quant à cette tranche de l'aug·mentation, une souscription et sa constatation dans un

·acte authentique étaient nécessaire, mais l'article 92 !ni en Pst inapplicable et aucun trxtr nr fixP un délai rnr!Pans lequel l'aele authentique doi\'r ètre passé.

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• 116 • JURISP"RUDENCE

Cette argumentation du euratem serait inattaquable>Si"tl'ne augmentaÙon du ea1;ital pouvail êlre partiellr, si elle l>lail realisée, même alors que le capilal tl'aug·mentation n'aurait pas élé intégralement souscrit.

La jurispnulenee était divisée sous l'empire de la loi du 18 mai 18i3 rt la Cour de Cassation décidait qu'iln'était vas indispensable· que le capital fùt entièrement souscrit et que les souscripteurs étaient tenus, même lorsciLÎe l'augmentation n'était réalisée qu'en partie. La loi nouvelle a mis fin ù cette eontrorerse. Aux termes de l'article 3~·, les conditions requises pour la constitution de la soeiNé sont aussi requises pour toute augmentation du capital social.

li faut donc, elit Resteau, t. III, no ·1338, pour· fJUe l'augmentation du capital puisse être constatée définitivement que le capital craugmentation soit , entièrement souscril et que chaque action soit libérée d'un cidquième au moins. Si les deux con­ditions ne se trouvaient pas réunies, les achnini 1,strateurs ne pourraient coilstatcr définitivement l'augmentation du capital.

Voir aussi nos ·1331 et t334; Wauwermans, no Hi. Quand l'aug·mentation du capital n'est pas souscrite intégTalement, elle est JIOIL

avenue et les souscripteurs ne sont pas tenus de leur souscription (Rrsteau, t. Ill, no f334).

Il suit de lù que l'augmentation elu capitaine peut ètrr tenue comme définitivemenk ~ousCI'ite à concurrence de la tranche << oblig·àtaires » 500.000 francs, comme le pré· tend le curateur, par la seule acceptation de l'assemblée des actionnaires mais que, l'augmentation elu capital étant indivisible, elle est subordonnée à la souscription dtt · restant de l'augmentation, laquelle lie sera réalisée que par la constatation défini­tive de cette augmentation failc par les aclministratem·s responsables des irrégula­rités de l'augmentation, à l'exclusion de l'assemblée des actionnaires (H.estrau, t. III, no ·1331 ).

L'acceptation de l'otfre des obiig-atair.es par l'assemblée des actionnaires n'a donc pas été pure et simple en l'espèce mais conditionnelle et subordonnée à la souscrip­tion des 400.000 francs, qui n'étaient pas couverts au moment de I'assemiMe et. dont la souscription devait ètre constatée ultérieurement pa1' les aclmirlistratems.

L'absence cle sonscripteurs, la faillite de la société auraient pu empf'chel' la réali­sation de la condition, laissant l'augmentation toute cntit'>re à l'état de lH'ojet. Cela ne s'est pas, il est vrai, proâuit en l'espèce, mais c'est la réalisation de la condition qui a été tardive. ·

L'existenee clc la souscl'iption des 900.000 J'ranes n'a été constatée que le ·1er sep­tembre seulement, en dchot'S elu délai fatal où la loi a exig-é que Ir consentement de la société ful donné.

A ce moment, les volontt;s des ohligtait·es et des actionnaires ne pomaient plus sc rencontrer, l'oll'l'e des ollligataires simple pollicitalion étant définitivement tombée.

A cléfaut d'accord dans le délai. de trois mois, les ohJig·ataires ont conSCI'Vé reltc qualitô; ils ne sont pas derenus actionnaiJ'rs et l'augmentation du rapital constatée le 1 c•· septemhrc H)21 est sans objet en ce qui les concerne; rlle est, pour les autres souscripteurs nulle et non avenue. '

Telle est, à mon avis, la solution que commande l'arliele 92 quand on cu fixe ln portée à la lumière des prineipes fondamentaux cie la loi sm les sociétés.

N° 3127

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1 JURISPRUDEi'iCE 117

Je conclus à la réformation du jugement dont appel et à l'admission de l'appelant au passif de la faillite des << Boulonneries de llressoux l>.

La Cour· a statué comme suit :

AlUtÊT: . Atterùlu fine l'intimé t'sl à la ~anse, en_ttualité de curateur de faillite de la société

anonymt~ des lloulonnel'ies de Bt•essoux, Jaillitt• dt;clarée p~u· jug·ement du Trilmnal de Commerce de Liég·e en date du 1l décmhbrc ·JU24;

Attendu que la dile soeil'L6 a été constituée à Bruxelles le 28 octohrr Hl20, par aete autlrentirtùe publi(~ aux annexes du Moniteur lleJg·e du ·18/19 noYembre ·J920, ll 0 12050, au capital de 1.2;'>0.000 Jr., que le 23 décembre 1920, le conseil d'aùmi· nistr·ation, usant de son dr·oit statutaire, a créé 1 000 'obligations de 500 fr. ratlpor­tant un iutérèt de 7 °/u;

Attentln <tne l'appclant, porlcur de 30 de ces ohligalious a par extJloit cnrcs"istré ùn J 7uovem1Jr·e 1928, de l'huissier Sem lier de Liég·e assig·né l'intimé, qualitàte.qurt deYant le Tribunal de Commerce de cette ville pour entemln~ dire pour droit, <tn'il sera inscrit au passif de la faillite comme fTéaneier de la somme de 15.000 fr. et s'entendre condamrtet' en conséttuence, ù payer ù l'appelant celte somme augmen. tée des intér·èts judidaires depuis le fct· janvier 1924 ou tout au moins la répat·ti· tion lui rcveirant dans l'actif,de la faillite;

Attemlu <Ille l'intimé oppose .à eette pretention de l'appelant <tue ses ohlig·ations oilt perdu toute valerîr, ayant été transformées en actions de priorité de la so~îété, dont il n'est dès lors, plus ~réancier; · ·

Attendu qu'il est co·nstant, et non d'ailleursdénié :, 1° Qu'une assemblée géuérale exh·aordinaire des obligataires de la société inti·

mée s'est réunie ù llruxeJies le ·16 Jéyrier 192! à 10 h. ·Jj2, en l'étude de l\I. Scheyven, qu'elle avait ù son orth•c du jout· la substitution, titl'e vour titre, aux mille- ohlig·a. Lions de la société, d'a~tions de priorité de500 Jr. chacune, ù créet' en augmenta· tiou dn capital, ainsi que les mesures d'exécution comportant l'échang·e des titt•es, <Iu'après un exposé fait }lar le Présideùt de l'assemblée, celle-ci a pris la résolutiou­d'aceeplet' la substitution qui lui était proposée ;

2° Que le mrme jom à H IL 50 s'est réunie devant le même notaire une assem· hlée g·énérale extraordinaire des actionnaires de la même société, que l'ordre du jour de la dite assemblée comportait notamment l'approbation éventuelle d'une con~ Yention avec les obligataires en vue de l'attribution à ceux-ci d'une action de IH'io~

rHéù ct•éet· en augmentation du capital en échang·e de chaque obligation, et en outt·e, aug-mentation du capital à concurrence de ·J .000."000 Jr. par création de 2.000 aptions de pdorité dont ·1000· à attribuer en écliang·e aux obligataires et J 000 à sonser·ir·e au pair contt·e espèce ;

3° Que la dite assemblée des actionnaires alH'ès exiwsé fait pat' sou Ptésident,. a t'<ltitié la substitution aux ob!ig·ations, d'actions de priorité à créer en augmentation du capital puis décidé (l'augmenter celui-ci à concmrence de 900.000 fr. par créa. tion ùe 1800 actions clé priorité, dont -1000 en substitution des obligations et 800 t\ sousct·il·e au pair·, eon tt·e est)èce, ou par application de soldes créditeurs, qpe la même assemblée, a eu outre. conformément à son ordt'e dn jour, modifié les statuts

N• 3127

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118 JURISPRUL'ENCE

de la. société et donné tous pouYoirs au conseil d'Administration à l'effet de réaliser l'augmentation du capital ainsi décidée, tant par les échanges des oblig·ations conti·e des actions de priorité que par souscription contre espèces ou par applicatioi1 de soldes créditeurs et de faire constater authentiquement cette réalisation de l'augmen­tation de capital ;

4° Que le ·1 cr septemlwe t 92 ~' le conseil d'administration de la Société a comparu devant M. lng·cveld, iwtaire à Ixelles, auquel il a déclaré que 1000 aclions de prio­rité seront remises en échang·e des obligations aux porteurs de celles-ci lorsqu'ils se présenteront et que les 800 actions de priorité restantes ont été souscrites et entièrement libérées en e&pèces, le montant de cette libération, . soit au total 400.000 fr. se trouvant dès lors, à la disposition de la Société; . Attendu que l'appelant articule en conclusions une ·série de faits dont il demande qu'ils soient conslatés en fait, que l'intimé reconnaît la· matérialité de la majorité d'entre eux mais conteste ceux cotés sous les nos 11, ·l2, '13, H>, ·16, que ceux-ci ne sont ùi établis tels qu'ils sont libellés ni offerts à preuve et qu'ils apparaissent d'ail­leurs, comme dénués de pertinence pour la décision du litig·e en présence des éiP­ments acquis aux débats ;

Attendu. qu'à l'enconlre des actes authentiques dont l'intimé fait état, rour repousser la prétention de l'appelant, celui-ci conclut qu'il soit dit pour droit, que les articles ~ t, § 4 et 92, § 12-, 13 et 14 de la loi sur les sociétés ont été violés, que les articles 31, 32, 34, 35 et 36 de la même loi n'ont pas été respectés, le moulant de l'augmentation de capital n'ayant été ni régulièrement souscrit ni rég-ulièrement versé même d'un ciuquième, qu'à raison des ordres du joUI' présentés aux assem­blées des actionnaires ct des ohlig·ataires et des résolutions des premiers, ne cadrant nullement avec l'ordre du jour, il y a eu conformément aux ar'ticles H09, 1110 rt 1H6 du Code civil, de la part des oblig·ataires consentement seul du chef d'errew· et de dol, qu'en conséquence l'aJ1pelant sera inscrit an passif de la faillite comme ..::réancie1; de la somme de Hi.OOO fr.;

Attendu tiU'il échet d'examiner successivement s'il y a eu violation de ees cliver-· ses dispositions légales ainsi :rue le prétend l'appelant ;

A. Quant aux articles 91 et 92 de la loi sur les sociétés. Attendu qu'aucun élément de la cause ne permet de ct•oire tille le capital sodal

n'était pas entièrement appelé lors de l'assemblée des oblig·ataires, qu'en conse­quence l'appelant invoque vainement ime violation du § 12 de l'article 92 ;

Attendu qu'il est constant que les décisions prises le i 6 févl'ier 1924, par les assèmblées g·énérales, tant des obligataires que des actionnaires, de mèJne (jue l'acte lng·eveld, du ·ter septembre ·1924, n'ont pas été publiés dans la quinzaine ainsi que le prescrit l'article 92, § 14, maistrue le retard apporté clans cettd publi­cation n'a d'autre sanction que la 1 esponsabilité éventuelle des administrateùrs vis­à-vis des ohlig·ataires qui en auraient subi préjudice (RESTEAU : Les sociétés anony­mes elevant les Lois befg·es, t. 3, no 1678) ; que cette responsabilité ne fait pas l'oh­jet de la présente instance ; ·

-Attendu qu'aux termes de l'article 9l, 4°, l'assemblée g·énél'ale des obligatail'es a le droit d'accepter la substitution d'aclions aux créances des oblig·ataires, que d'au­tre part, l'article ·92, § 13, stipule que les décisions de la elite assemblée n'auront

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JURŒP RUDENCE 119

d'effet ù cet ég·:ml <IIH, si l'Iles sont acceptées dans nn liPiai de trois mois· par' les aetiohnaires à moins qüe t~eux-d n'aient donné antérieuretm•t!L leur consentement;

Attendu <Itl'l•n l'espèce l'assemhlée des o!Jlig·ataires a précédé celle des actionnai­res et qu'il n'est pas l'ait élat <l'un consentement anl!il'iem de ceux-ti;

Attendnque l'appelant soutient <lU<' la dééision du 16 J'éuicr t 92 i Ue l'assemblée des üblig-alaires, simple pollieilalion, tl 'a pas tîté accC]Jlée le mème jom par l'assem­blée des a<~tionnait·es, mais le l'"" septt~llllll'e senletnent, lot·squ·c l'ut constatée authen­tittuemenll'augmenlalion du eapilal, celle-ci t'•lanl indisppnsablc pom· <tue puissent ètl'e substituées des actions aux créances des oblig-atait·es, qu'étant intenenù vlus de trois mois aprt'•s t'e H3 février 192t, cette areeplation sprait tardive el ne pour­rait lui è!re opposée;

Attendu que la décision de l'assemblée lles obligataires ne peut ètre considérée, à défaut de consentement préalable dPs aclionuait'Ps, que comme une offre qui- doit t•ester sans elfèt si elle n'est pas acceptée tians le délai de :3 mois; qu'il n'est pas contesté que l'aeceplation de cette olfre éntraine nécessairement une aug-mentation de capital mais que l'intimé prôtend llt;~ulmoins trouver dans la seule décision du 1H fév.t·ier 192t, lie l'asscmhlôe desaclionuail·es, l'at~eeplalion ret1uisc pat' l'article 92, §' 13; -

Atlt>nt.lu que l'a<.;ceplalion pl·t'~vue pat' cet article est uniquemetll celle de l'assem­hlée l:rénét·ale des aelionnait·es dont le << cottseutement » sutlit lors<lu'il précède l'assemblée des obligataires; qu'au eonrs des tt·avaux préparatoires et des débats p;l!'lementaircs,.cPpemlant longs Pt minutieux, qui ont fJrécétlé le vote de la loi de 1913, notamment eelui des articles devenus 9l et 92 des lois co,Ordonnées, l'éven­lualité n'a pas été envisag·ée d'une acceptation <Ini pounait ne pas ètre le seul iait de l'assemblée g·éuôrale des ~\Ctionnaires on qui viendrait ù se trouver conditionnée par la date de la réalisation de l'augmentation de capital qui en est le eorrollaire indispensable: qu'il importe d'observer ég·alement que la loi ll'a fixé de délai pour la t·éalisalion d'une au~mtentation de capital tine lm;squ 'il y est procédé au moyen de souscriptions publiques (art. 32, al. 9); que s'il n'etH pas été équitable de forcer les obligataires à maintenir imléfiniment leur olft·e jusqu'à ce qu'il plaise ù la Société de l'accepter on de la I'C}lOUSSel' tléfinitivement (RESTKAU, ibid., ll0 ·1680), il l'etH été moins encore de fait·c Mvendre tlu conseil tl'atlministratiou, mandaté pat' l'assem­blée des actionnaires, l'eflie1cité tle l'olfre aecevlée P~!~ elle, seule compétente pour cc l'aire ;

AUenllu que, lorsque l'assemblée des oblig·ataires aec<:>ple la suhstilution d'aclions de la société à lems obligations, e'es·l un axiome qu'une opération de ce genre doit aYoir pom· conséquéilce 1:aug1nentation du capital, 1misqu'il faut néccssairen1~11t créer des actions nouYelles pour les attribuer aux obligataires (RIIS'l'EAU, ibid.,

· no -16t8) ; que, tians ce cas, l'augmentation de capital par émission d'actions nou­velles, destinées ù ètre échang-ées contre les obligations eil cours, peut ètre réali~ée par l'apport ile celles-ci, la.tlécîsion de l'assemblée g·énérale cles actionnaires qui a <.lécitlé l'échan~re, étant suffisante pour constater la réalisation parfaite de l'aug"lnen­tation du capital et ce capital d'aug·mentation se trouvant de plein droit sbtiscrH par le fait de la délibération de l'assemblée g·énérale des actionnaires et par celle de l'assemblée des obligataires qtii l'aura lH'écédée (ibid., no 1342);

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JURISPRCDENCE

Atf~ndu qu'il appartient donc à l'assemblée g-énérale des actionnaires se_ule, d'âccepter l'ciff!;e· des. oblig·afaires et que cette accPptation doit ètre réptltée ·~cqÙise dè~ ·cru' elle est sui vie, comme en !'espèce, de la décision d'aug·menter le capital; c1ue le << consenteme11t n ainsi manifesté par l'as·semblée des actionnaires et·ée entl'~ eeux: ci et les obligataires une convention qui a pour effet de réaliser la "transforÙl;J.tiou des oblig·ations en actions (W'AuvmRMANs, Manuel prat·ique des Sociétés anmirrmes, 11°-835);

Attendu qu'en l'espèce, l'augmentation de capital n'a pas été déeidée à eonc.ur-. reüce seulement de 500.000 ft·ancs nécessaires pour la substitution d'actions .. aux obligations, mais à concurrence de 900.000 fr ; dont 400.000 fr. élevaient êti·e sous­crfts; Que cela étant, il est objecté quf3 l'acceptation de l'offre df's obligataires. n'ar' les actionnaires, n'a pas éte pure et simple, mais conditionnelle et subordonnée à cette souscriiltion de 400.000 ft'. ; que J'augmentation de capital étant indivisible ù concmrence de 900.000 fr. et n'ayant été constatée que le 1 el' septembl'e J 921·, après expiration du délai Jatal encléans lequel doit être donné le consentementdc la société, les volontés dès actionnaires et des obligatait•es n'amaient plus pu ~<' t•eücmltrer â ce moment, l'offre de ceux-si étant définitivement tombée ; .

Attendu qu'iln'est plus contesté, depuis Je vôte de l'articl·e 34 de la loi sm· les sociétés, que le capital d'augmentation doit être intégï•alement souscrit et que_, s'il nel'est pas, les-premiers sousci'Ïpteurs ne sont pas tenus de lrurs sou.scriptions, celles-ci devant être considérées comme nulles et non avenues (REsTEAu,. ibid .. , no l33i); flUe s'il en est ainsi lorsqu'une augmentation de capital doH ètre e1iUère~ meflt 1·éalisée. au moyen cl e sous cri ptio n s publiuues, il importe essen ti elle ment en l'espèce, vu le caractère spécial et complexe de l'augmentation de capital décidée ù concurrence de 900.000 fr., mais dont 400.000 fr seulement deraient ètre souscrits, de-déterminer si celle-ci était indivisible et si le consentement donné par les~lction­naires quant à la snhslitution d'acUons aux obligations, était subordonné à la t•éali-sation intégTale de l'aug·Iilentation du capital; · . _

Attendu que les résolutions de l'assemblée générale des acÜonnaires LlC-révèleut pas une telle condition ; qu'on ne peut l'induire de celte seule circonstance que la décision d'augmentation elu capital est uniqu'e, la somme de 900.000 fr. étant indis­pensable pour permettre la réalisation de l'ensrmble des décisions de l'assemblée g·éùér3le des actionnaires ; qu'il n'est pas sans intérêt de noter à cet ég·ard, qu'avant de décider cette augmentation de capital, la même assemblée s'est-prononcée, con­formément à son ordre du jour et par résolution spéciale, sur <c la substitution aux obligations de inille actions de priorité à créer en augmentation du capital n ;

Attendu qu'il résulte de l'01·dre du jour, et de la délibération de l'assf:)mblée géné­i·ale des actionnaires que l'aug·mentation de capital a été décidée par voie d'échang·e à concunence de 500 000 fr. et de souscription pour le· surplus; que notamment les ·pouvoirs douné.s au ·conseil d'administration étaient de réaliset·l'augmentation de cai>ital paii échange d'obligations et ~ousàiptions d'actions tJOnvelles; qu'il ap1>arait hien, dès lors, après ce qui vient d'être elit, que cette augmentation, bien que g·lobalement déCidée. n'était pas unique et indivisible,, mais eomportait, en xéalité, ,deux opérai ions distin-ctes, voir même indépendantes,_\ bien c_lét·e·m-üuées ._et. su.cces-. sives; que la première, décidée pa11 voie d'èchang·e~ a été immédiatement réaJlsé~

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JQRIS-PRUJJf'~;\'CE 121

par les seules-décislons authenti_quement ~.:ons talées de l'assemblé-e g·éüérale des aetiom1~ire~-çüÏlsi JHI'il_a- ét0 ëtahu précéclcmmeilt, tandis que la seconde devait re~l{ù;·à l!Gtat de projeljus<lu'ù sa réalisa(jom définitive ~ivrès souscl'ipl.ion ullé­ri'eure; C{lie cette dernière a donc été seule lenne en suspens et que l'acte lng·.eveld du ter septembre J92t, <lllÎ fait ti:aillenrsla distinction entre la i'emise Cil échang-e etJa,s_o~I.§P'~pLion en espèces des titr·es nomeaux, n'était indispe1isa!Jle <Ille vonr

< coi~stater. I'aug·meutalion de capital par :souscription, soit. à co11currence de 4·oo.o'QO fran_cs seulement; qu'üinsi chacune des deux augmentations a été régu­liè~'~mei}t·et ilitégTaleillent réalisée, la_ seconde étant distincte de la premiGre eL n'étanu~oqditionJléc par _aucun, délai; que ces deux opérations, pour avoir étô décrétées par une même décision d'assemblée générale, ne -doivent pas ètre autre­Hle!lt appr~eiées, vu les circonstances spéciales de la cause, <lUe si elles avaient été dé'çiclées _soit par deux assemblées, avec tlll certain intervalle de lemps, soit par· deux résolutions _séparées de la mème assemblée g·énérale ;

-t\.H_enc!u que lot·squc l'aug·rnentation de cai)ital est t'éaliséc an. moyen de sons­ci'iptfon~ conformém-ent ù l'articl.e32 de la loi sm les Sociétés, le délai de trois lllO,iS enqéans lequel doit se tenit• l'assemblée des SOLISCI'Ï ptelli'S, dernier acte de l'aug·mentatioiJ de capital, ne co mt qu'à partir de la date de la première sousct·iption eLnon pas à partir de la délibération de la Soeiété qni a décidé cette augmentation ( RESTEAU, ibid, no 1329) ; que le système de l'appelant, s'il était admis dans le cas d'une aug·menlation de capital décidée à la fôis tm moyen d'échange de titres et de souscriptions})ar appel an publie, ne permettrait pas ù la Société de disposer enliè­reinent ~utlélai de trois mois de l'artiC-le 32 et vourrait.mème rentlre impossible la ' ré~lisation de l'aug-mentalion du capital; ùu'ilne peut ètre l>erclu de i·ue, à cet égard, que le clélaide l'article 92, court ù parrir de l'assemblée g-énérale des oblig-a­taires et tiLl'tm temps relativement long, veut s'écouler entre celle-ci et l'assemblée g·énérale des actionnaires, puis encore jusqu'à l'ouverture des SOUSCJ'iptions (RESTÈAV, ibÛl); <lue, dans l'hypothèse envisag-ée, les délais des !t'ois mois des articles 32 § 9 · ù 9~ § -13, ne peuvent ètre l'un ct l'autr·e respectés que si l'ang·mentatiou du capital g-lobalement cleciclée, est co11sidérée comme comportant en réalité, ainsi qu'il Yient d'être dit, deux opérations distinctes déterminée~ et successives ; que, s'il en est aiqsi lorsqu'une ~mgmentation tle capital est réalisée conformément à l'articl~ 32, il ne peut en ètre autrement dans le cas de souscriJition sans appel au publie, alors surtout ~1ue la loi n'a lixé aucun délai pour la réalisation de celle-ci.

Atteudu f!U'admettrela thèse de l'appelant aboutirait en toute llYIJOtl!èse, à cette coüséquenceessenliellement contraire à la loi, de permettre au Conseil d'Adminis­tration cie décider de l'augmentation cle capital, dr·oit qui n'apparLi~1lt qu'à l'assem­hl~,e générale des actionnaires.

·!utèiiclu que l'appelant n'est pas J'ondé à invoqner les violations prétendues pal' lui, des articles 91 et 92 de la loi sur les Societés.

B. Quant aux articles -01-32-33-34-35-36 de la loi,sur les Sociétés. Attendu que l'appelant soutient une le capital d'augmentation n'a été 11i rég·ulière­

mrnt souscrit, ni r·ég·nli('l'Cment versé mème à concurrence de un cirHIU·ième contrai­re111ent aux déclarations J'ailes le 1 Cl' septembre 192t au notaü·c Ing-eyeld, par le C~nse~Ul'~dmhiistration de la Société intimée, qu'à sunposer exactes ces allé~raUons

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122 Jt!RISPRUDENCE

les irrég·ularHés ainsi commises n'entraiueraient. pas la nullité'de l'augmentation de capital mais la responsabilitl~ ùes administrateurs en vèrtu de l'article 3o de la loi (RESTEAL, il>üln° 1356 et 1357, c.A. Liége 23-lt-29, Jm. c.A. Lieg·e, 1929, 11°38, p. 306) ..

C. Quant aux artieles H09-1110 el. tll6 Liu C. C. Attendit qu'il n'est pas établi que les obligataires'auraienl sudordonné leur ofth

Ù l'aug-mentation I]U eavital prén1e pat•l'Ol'~l'C du jOUI' de l'assemblée g·énérale des actiomiaires, qu'il leur aptlartenaH de stipuler ceÜe èonditiou s'ils enlendaient en fait·.e dépendre leur convention avec la Société, qu'à défaut de l'avoir fait, leur consentementdoit ètre tenu pmu· pur et simple alors qu'il appm·ait d'aillem•s au procès-verbal de l'assemh'ée des oblig·alait·es. ,

Attendu que l'ordre du jom~ de l'assemblée des actionnaires a vaU notauuneut pour objet l'augmentation de capital à concurrence de ml million de ft•. dont500.000ft\ à souscJ'ire. contre espèces et que l'assemblée n'a décid~ cette aug'lllentatloti ·.<tu' A' concurrence de 900.000 fi'. ù souscrire contre· es.pèce ou par applieation.de solde~. n·éditems, t]tH~ cette t'ésululion ayant éte pri~edan.~ les.limHes. de l'ordre du Jom· de l'assemblée, celle.-ci n'apas. excédé. son cl t'oit d'àtil~ndex lès' proJ.)g&~tions dont elle ·eta,it s~isie. (RESTE Au, il>ill, Tome Il no 123i ---- 'VAt,VERMANS_no '.t76}.

Attendu qu'il résulte des considérations qui précèdent que les gTie,.t's.- àrtieulés par l'appelant sont à lous égal'ds sans fond~ment; · . , · ·

Par ees motifs el ceux non cpntrail;es des premiel's jug·es, La Cour, ouï M. l'Avocat Général PEPIN en son a~is en partie conforme, rejetant

toutes conclusions autres, plus amples ou. contraires, eonllrme le ju~rement dont appel et condamne l'appelant aux dépens d'appel.

Observations. - ::'\ous avoils pulJ1ié pl'écédenuuent le jugement sm· ler1uel statue l'impol'tant art·êt ci-dessus r~pl'ocluit (Revue~ 1930,

~ 11° 3038).

La question pt·incipale débattue dans ce 'twocés imporLaut ·a fait l'objet cle\'<ult· la Cout· d\me discussion approfondie, dont l'arl'êt a g<u·clé l'éclw. L~intét·êt de la discussion et de la décision a été acc1'U en appel pae le fait que l'avis du Ministét'é. public, rept•ésenté par M. l'avocat-général PI~PIN, n'a pas été suiYi .. ~m· le fait~ pê,il' la Cour.

Il n'.v avait pas de clitriculté sét•ieuse, sein1Jlait-il 1 sur -di,-et·s poiuts

de l'ar·gmpenLatioi:l de l'appelant. L'oLligatait·e n'a éYidennnent pas le clt·oit d'êtl'e admis au passifde

1a société tombée en faillite, loesque le curatent' peut établit·, comme dans l~espéce~ pat• des pl'oces-Yet'baux aullleütiques d'asseinblée gêné­t'ale~ que les obligations ont été teansü.H·mées. P-n actions dans les con­ditions 1wévues pat' les dispositions légales (lois com·clonnées art. 91 et 92). L'obligatail'e toutefois est re~eYable à invoqnet·, erJ. pareit débat, la nullité des délibérations que le curateur oppose à sa demande;

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la chm;ge dé clémoutrel' cette nullité lui iucombe. Il n'est pas obUgé. cln l'este, de prendt•e l'initiative d'une demande où nullité pm· voie cPaction principale; il lui est loisible cl'invoquel' la 'nullité en te1·mesde défense (RESTEAu; Soc. au., t. HI, n" 1643).

Les causes cl~ nullité possibles de la décisiqn tle tl'ansformatiou des obligations en actiolls sont, d'une part, celles cl iL droit con1mun des conventions, et, crautl·e par-t, celles_ qui peoyiennent cl'inlhwt.ions aux. formalités essentielles prescrites par les lois eoordonnées sur ·les sociétés.

Dans le cas jugé pal' la Uout· d'appel c\e Liége, l'obligataire aux prises avec 'le cut>atem· cle la société invoquait le, dol du cons~il

d'administration. Le débat sm· ce point de fait et d'espèce échappe au commentateu1' ;. la Com·, a1H'és le T1·ibunal, l'a tr'anché négativement. Notons seulement que le_ Ministèee public, dans son avis (que l'on teouYera eeprocluit in extenso :.Jw·. Ap1J. Liége, 1931, p. 81 et suiv.) estimait le moyen non fondé en dJ'oit par la raison que le dol allégué a charge de la sociét.é n'émanait pas d'elle mais dü conseil d'admil1is­teation. tandis que, pour êtJ·e uue cause de 1·evision des con vell ti ons, il doit ê~ee émané de cel ni au pL'ofit de qni 'po!Jligation a été couteactée.

N ons ne pouvons, quhn t it nous, nous 1·angei· it cette. opinion. Les sociétés commet·ciales sont des entitésjm·icliques assimilées aux per:­sonnes, mais en vérité, ne jouissant que d'une personnalité abstr·aite, astL·eintes pal' lem· nature même i1 ne pouvoie agir ·que pae des per­sonnes physiques, leurs admiHistL·ateurs. Ceux-ci, clans Foel>ite. de leues fonctions, sout lew·s oeganes ·directs et non pas seulement leues manda b:lit•es; partant, l'acte dolosif commis par eux, lo1·squ'.il

rentL·e par'' son objet daus leue compétence d'o1·ganes st.atutail'es et. légaux de la société, oblige celle-ci comme émané directemeut d'elle. P~r suite, dans ces mêrnes cas, le dol des administt'ateurs est opposable it la société.

L'honorable avocat général examine ensuite la question de savoü· si l'obligataire, absent loi·s de l'assemblee et qui n'a pas été pel'SOn­uellement victime du dol, a qualité pow· agie eu nullité eu se substi­tuant à la collectiv.ité qui a voté la délibération. Il 1·ésout la questiou 1~égativemeut; seule, d'après lui, la collectivité des obligataires pré­sents à l'assemblée a (jualité poue agir; car seule elle " est ü même " de dil'e si le consentement de ses memlwes a été capté par des

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" m-auœuv res telles qu'il est ce dain que, SEUlS leur· existence. elle .,. n' aw·ait pas donné son consentement ".

A cette opiniou, non plus, uous ne pouvons nous I'angee ; si toute décision eégulier'erl;l~llt \'Otée pal' l'assemblée généeale statuant a la . majorité dans ·les conditions déterminées. pae l'art .. 92, oblige indivi­duellement tous l~s obligataü·es, aussi bien les opposants et absents que les adhéL·eu ts, ·chacun. cl' eüx a des lor·s in di v iduellemen t iiltérêt~ donc action. pOLW faiee reconnaîtl'e en justice <1ue les appaL·ences de régularité de la déliuération sont teompeuses et que celle~ci.·est, en réal-ité., entachée de Hu !lité . . Vol>ligatair·e ne peut d~pendr·e, clans l'exer·cice de so'n dr·oit it ce

pr-opos., d'nue motion nouvelle de " la colleètivité des oblig~üaü•es lJI'é­sents it l'assemblée "· Cette collectivité n'a aucune rr~L·mauence 1 ni cl 'ailleurs ancu11e existence j ueidique. Elle n'a été <1ue lat fonue otr la 1igLU;e momentané-e de l'assembiée génér·ale;~ celle-ci, chaque fois qu'elle s~ réunit, se recow;;titue sous la forme ou la Ogtll'e d'nue nouvelle collectivité~ également épl1émére. En tl"aulre~ et plus simples termes~ 1<~ composition irtcllYiduelle des assemblées est indéfiniment val'1able. La collect.ivité des obligata:il'es présents à une assemblée déterminée ne -se retrouv~ra peut~êtee plus .jamais ic~entiqüe it elle-même, en aucune autre 'assemblée. Comment~ dans ces conditions, se 1>om·ra.it-il que " la collectivité des 6bligataiL'es préseüts ü l'assemblée" fùt "seule à 'lllêtlle de (liee Sl le consentement de ses membres a été Capté par des manœuvres dolosives " ?

' '

Le pojnt de savoie s'il r a eu ou non des manmuv1•es dolosives est une fplestion de .t'ait~ susceptible d' nppréciation extéJ•ieure ét de pl'euve j ucliciaire d~1-ns les conditions ordiriail'es. du clL·oit commun des"" contl'ats. Quiconque s~ voit oppose L' une· obligation elon t on le peéteucl indivi­dqellement tenu, a qualité poue en appeécier la validité, :inclépem1am:. ment dn point de savoit• si ·cette obligation le grève en vertu d'une rés)lut:ion collective ou d'un c_tcte individuel. Le cas de l'obligataire absent n'est pas autt·e que celui de l'actionnair·e : conteste-t-on la I'ecevabilité de l'exception d'un sousceipteue poui'suivi en llbél'ation et qui soutient flUe, nonobstant des apparences de régularité~ la déli­bér~ation de l'assemblée génér~ale votant l'augmentation de capital a été entachée .de dol dans le chef de la société, pae suite de dissimulation dalls les bilans ?

Nous estimons donc que tout obligataire est recevable, dans la mesure

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JURISPRUDENCE 125

mên1e oidl est tenu indivi-ch1~llemeü t par une résolution del' asseinblée, à contester la Yalidité de cette t'ésolution en rer·tu du droit c;om.mun, soit pae voie d'exception, soit pae voie d'action en justice.·

Il est évident d'ailleurs qne la délibér'ation régulièrement prise dans la foeme eestera opposable it l'obligataii'e aussi longtemps qne_celui-ci il'eti auea pas démontré et fait recoünaître judiciah'ement là n'ullité. Mais le point en débat n'est pas ici de sàvoir si Pobligàtaire a raison ou tort au tond, ni s'H réussira a faire prévaloir sa convktim1 quant au fait; il est de savoir s'il est recevable à entreprendre individuelle­ment en justice la démolistration de la nnllitéqn'il allègue. Poul' nott'e part; ùous regardons cette recevabilité comme non douteuse.

L'appelailt appuyait ~ussi sa prétention de nullité de l'augmenta-· tion elu capital süe le fait que la eésolution de l'assemblée· géùérale des obligataires n'am'ait été p\lbliée qu'avec retard et sur le fait qùe le capital d'augmentation n'aurait été ni régülièrement souscrit ni entièrement vePsé, même à concurrence crun cinquiènîe,. La Coùr, apr•ès le Ministère public, lui répond, à juste titre, que- ces ~teguments sont sans J'elevance; c~r, d'une part, le retarcl de là l)ublication des délibérations d'assemblée est sans sànctioJ1 légale autre que la res­ponsabilité éven tu elle des admiüistPateurs en cas de IWéjudice ; -et, d'autre i)art, les irrégularités alléguées. à les süpposm~ vérifiées, ne pom'r·riient avoir pour effet la nullité de l'augmentation de capital, mais seulement la· responsabilité des aclministratem~s (lois coo"rd. art:. 35).

En déônitive, le vér'itable intérêt elu procès se concentPait sm· l'ap.:. plication à faiee, au cas de l'espéce, des prescriptions des aPt. Dl' et 92 de la loi sùr les sociétés. ·

Poul' r1ne 1' accord légalement exigé, du gi'Oll pe " actions ·, et du

groupe " obligations " sm· la substitution d'actions aux obligations, soit réaLisé. au vœu de la loi, il faut, elit l'art. 9.2,. que l'augmentatibn dn capital soit acceptée da.ns le délai de trois mois : mais (}Ile doit-on entenilPe par là? Suffit-itqne la décision d'augmente!' le cà.pital soit prise, c'est-à-clir'e la délibéPation Yotée, dans ce délai ? Ne faut~il pas e11 outre qu'elle soit réalisée en ce même délai~ par' Pacte aui.henti~ que constatant )îJ. souscription effecti,re du capital d:augmentatioù ? ·

L'obs~ürité de la question qui s'agitait devant la Cour, à ce propds, provenait du fait que, dans l'espèce, la délil.Jél'ation d'augment.eP le cai)Îtal avait porté non sur le capital nécessaii'e pour absorbèr le capi-

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126 JURISPRUDENCE

tai-obligations, niais sm' un capital supériem~ a souscrire noùvellement, l'excédent prévu elevant procurer à la société de ra:egent frais dont elle paraissait avoir un pressant besoin. La clélibêration de cette aug .. mentation nnïque, mais complexe, a\rait été pi'ise dans le délai fatal de tPois mois, mais la ·souscription de l'excédent du capital d'aug­nfentation sùr le capital d'obligations 'n'avait été effectuée qu'après l'expiration de ce cléla.i. Dès lors, pouvait-on cliee que la prescrip­tion impél'ative cle l'art. 9.2 avait été respectée?

Le Tribunal avait rép.ondü atnrmativement, Ü'anchant le débat en faveur elu cueateur. 'l'outefois sa décision n'avait pas crei.1sé la diffi­cultéauss:i profondément que le Ot'ent les pat'ties elevant la Coui'.

En se1~rant les· faits de la cause le plus p~'ès possible, le débat con­tradictoire cl' appel fit. apparaîtee un désaccord principal en clrm:t, sm' la qüestion· de savoiL' si l'on pouvnit tei1ir raugmentation elu capital nécessaire à la substitution d'actions aux .obligations, pour I'éalisée par le seul effet du vote de Cül?sentement de l'assemblée des action-

·naires, émis sur l'acceptation préalable de celle des obligataires ; ou s'il faillait la tenir pour réalisée seulem.ent par la. passation de l'acte authentique constatant rexécution de la délibéi'ation généPale d'm~gmentation elu capital à souscrire.

I.e Ministè1'e public se pt•ononça en faveul' de cette solution rigon­reuse, en développant, ~t l'appui de son avis, une argumentation juriM clique d'une vigumw et cl'nn entrain I"emarquahles.

L'intérêt de la r1nestion débattue et le défaut cle toute jm'ispruchn1ce antéeiem·e nous ont varu justiOer le reproduction de cette partie de l'avis de J\L l'avocat généi'al Pepin~

B.ien que ses arguments ne ·soient pas sans f'<:dee. impression à la peemiere lecttwe, ils cèdent it la réflexion devant ceux de Paerêt.

Il apt:)aPaît certain <Jn'unè augtilentation de capital, coPolla.ire dn consentement donné par l'assemblée générale des actionnaires à une ac~.:.~ptation pPéa.lable pat' 1, assemblée générale des obUgataires de la substitution d'actions aux obligations, se réalise inst~ntanément parce que la transformation emwenue des obligations eri actions ne requiert point, pour· être contractuellement parfaitf, autre chose que la corré­lation parfaite des consentements. Aucun 'fersement, aucune souscrip­tion, aucun déct·étemeüt spécial; n'est.,· en· outre, rer1uü:;, 'püisqne l'opération consiste en la simple t.t'ansmntationjuddique d'un nombre" donné de crénncos rle somme en un non1ln'e égal ou convenu de droits

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JURISPRtTDENCE 127

d'actionnaü·e. Pourvu que le vote de consentement de rasl'=emblée géqéeale des actionnaires et la constatation de la tr'ansfOI~mation con­sécutive soient repeis en un acte authentique, les·conditions cle for·me sont eéalisées. rrout ce qui reste à fair•e : échange des titees-OIJligations contt•e ti tees-actions ou cer·tificats est opéeation d'exécution pur·emen t màtéeielle.

Aucun doute ne pom·r·ait naîtee, semble-t-il, si le capital d'augmenta­tion voté égalait toujoues exactement le capital-obligations it convel'tir·.

Mais le cloute suegit très natm·ellement lorsflUe le capital d'augmen­tation voté est supérieur au capital-obligations, c'est·à"-diro lor·sque la conversion se double d'une augmentation de capital ordinaire, les deux opérations étant englobées clans une délibération tmir1ue.

Eri ce cas, poul'rait-on diee ·encOJ'e que la simple délibération de consentement, authentiquement constatée, de l'assemblée génér·aJe des actionnaiJ·es suffit pout' paefaire la teansmutation juridique des obligations en actions, alors que l'unique augmentation du capital~

votée en principe, appelle impérieuseme1Ù, sons peine de nullité, sa réalisation par un déceetemeùt en fot·me de modification aux statuts, un acte authentique constatant la sousct•iption intégt·ale et le ver·se­ment obligé du cinrgüème, etc ... ?

M. Pavocat .. génél'al Pepin semble, en , son avis, estimer non seulement que l'opéeation litigieuse devait être interprétée en l'espèce comme formant un complexe conh·actuellement indissociable,· pat·ce que chaque pm·tie était la condition réciproque des autr'es dans 'l'in­tention des parties ; mais en ontt>e~ qu'en théorie juridique même et dans toute hypothèse, ropét·ation de Pangmentation de capitnl fm·me un acte indivisible de sa natul'e ..

Sur le 'pt~emieP point, point de t'ait! l~ Cour usant de _son pouvoir souverain d'ap}wééiation, a décidé r1ne, dat~s l'espèce, l'assemblée généeale des actiollnait·es avait, conçu la décision complexe comme flivisible. Sm· le second point~ elle s'est attacltée à mett1·e en lumière le. mée an isme jnPidique de l' opét·ation de la conver'siot1 des oLiigati<;>ns en actions. L'analyse qu'elie en fait laisse l'impression d'une exacte observation des t1rincipes jm·idiques : du moment que la délibération de consentement et d'augmentation de çapital est teimepour divisible, tons les motifs de texte, de kavaux peéparatoit·es et de t'aison donnés plus haut pour justifier la possibilité d'une réalisation innnédiate de la tt1ansmutation jur·idique, s'appliquent séparément à la pat·tie de_ la

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128 JURISPRUDENCË

rés'olutioi1 de l'âsSémlJlée qui concerne la. substitution ~;àctim]s ~t{x obligations.

Ainsi donc, il ·l'este acquis~ jul'ispruclentiellemeilt parlant, que l'unité deI~ clélibé1~ation de l'assemblée géné1·ale des actionnaires 11e doit pas nécessairement entraînee Pindivisibilité contractuelle de la d~cision ; la complexité de l'objet de celle-ci peut être de telle n[ttui·e ou s'être présentée en de t~lles condit:ions it la considé~·aÜon (les

· votants, (]US Pon puisse OU même flUe l'on doive la tenir pOUl' divisible dans 1 'intention des pai·ties. . .

Partant de Ut, rien· d'impossible en soi, nous voulons dire- d'inco~l­ceYable, à ce que la' décision' unique de l'assemblée des actiom~aires soit retenue pom· déco:rnposable eu deux décisions cHstjnctes et J11ên1e indépendantes dans lenl's modalités cre±.écution comme dans leurs

• • 1 .

objets respectifs. i

No 3128. - Tribunal de 1re inst. de Dinant. (siégêant consnl·airement) 29 janvier 1931

M. M. Uer hecq, viee-1wésiclen t; - Pl. :rtftt·cs Ber tot et :Fau v el (Bri1ielles) cf Le Bouleng·é, Tsehoffen et Toussaint:(Dim\nt), avocats:

(Soc. an. D . .'. L ... et Ue cf L.:.) .

Société anonyme. · __ Nullité. - Nombre mi~imum d'associés. :So~s .. cription d·'Une action unique par plusieurs associés nééessaires. -Apport de marques de fabrique sans valeur.- Administrateur vôtfint dans une délibération nonobstant son intérêt personnel. "--- Sanction. -Erreur ou dol. - Espérances de bénéfice~ déç':les.

Le fait que certains des actionnaires nécessaii·es en non~vre poztr constituer la sooiélé an,onyme n'ont souscrit qn'une actionne peut en rien êtreunecausede nullité. _ ,·

, Le fait que l'apport mi marques de fabrique fait pal' Vttrt d~s septfondateu.rs n'atu:ait ·aucmie 11aleu-1', ue peut en rien entmJner la 'nulliie de Zlt sociét~, surtout si lç du (to(ion­nâire it encore apporté d'autres biens, dn 11zftlél'iel JJar e:l'e'I!IJI[e. . . Le faU qn'un appel de fonds aurait été voté par un des admfrl'isf7·ateHrs anmêp1'is- de l'article 60, n'est pas sanctionné par la nullité de cette tlélibémtion.

Le fait que les fondateurs entrent dans 1t1ze. affcti1'e en. espémnt ~.les forts bé?léfices qu'on leur ·a 11antés yl" qzl'i ne se semient pas réaJisés, ne constitue en Tien l' e1'te1l1' Oll le ilol qui pom'J'ait vicier le co.nsentenient. · · . ., · ! , ·

Attendu qur l'action de la société anonyme D ... L ... et Cie iuLl"Oduite pa~·assig·~la-tiou elu o juillet 1930 tend à faire condainner L ... à payei· ù cette: soéiété fa soinine de 214.78a fr. ù titre de solde cie èapital soùscrit; ·

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JtJRlSPRUDENdE 129

· Attendu que le défendeur prétend que· la société demanderesse est inexistante pour divers motifs ;

D'abord parce que les comparants souscripteurs d'aclions en numéraire en dehors deL ... et D .... ne seraient que des intervenants de ·complaisance;

Attendu que le nombre minimum d'associés exigé par l'article 28 de la loi sur les sociétés commerciales pour la constitution d'une société anonyme a été réuni ; que si cei·tains associés, que le défendeur qualifie de c_omplaisants, n'ont souscrit qu'urie action, cela n'est en rien contraire à la loi;

Eri~uite parce que les apports de marques de fabrique n'aui•aient aucune valeur ; Att~ndu tJUe cette critique ne peut être reconnue par le tribunal qu'en tant qu'elle

se rapp~rte à la validité de la société ; Att~il~u que celui (JUi ne ferait aucun apport ne pourrait être considéré comme

~ssocié; Qu,'è·d~ admettant par hypothèse, qu'il y ait eu apport réel et.transmission rég·ulière

de inarques de fabrique et que cet apport n'ait pas de valeur, il restei-ait encore sept. associés, la société anonyme D ... devant être considérée comme telle par le fait d'un: apport de n1atériel,

QtÎ'aHisi la critique relative aux marques de fabrique ne touche en rien à l'exis­tencê'oti à la validité de la société demanderesse ;

At,~e.ndu que le. défendeur conteste la validité de l'appel de fonds qu'il prétend décrété 'au mépris de l'article 60 de la loi sur les sociétés commerciales;

Attendu que la sanction des obligations imposées par l'article 60 étant la respon­sabil!t~ des membres du conseil d'administration et non la nullité de la décision du cons~il ile tribunal n'a pas à examiner si le reproche formulé est fondé;

At(en!!fu que L ... est donc tenu de satisfaire à cette décision du conseil d'administration;

Attënitu que le défendeur p:étend également que son consentement ad socletatem a été. ''icié par erreur ou dol; qu'il articule sept faits qui se ramènent à la circon­stance que L ... se serait trompé ou aurait été trompé sur les bénéfices que la société devait lui assurer;

Attendu que ces faits ne sont ni pertinents ni concluants; que le but ~e la société anonyme étant la réalisation de bénéfices, il est normal, lors de sa conslitutron, de prévoir ou de faire prévoir un profit; que toute affaire comporte des risquesoet que les circonstances économiques qui ont suivi la constitution de la société ont dÛ avoir une fâcheuse répercussion sur la marche de l'affaire ;

A.tiendu qu'on ne voit pas bien comment certains faits, notamment la sousG,ription d'u11e seule action par certains actionnaires l'apport des marques de fabrique~,Je fait de l:,t vente de ses tabacs par la société anonyme D .. F ... , l'oblig·ation 'deL ... de payer les tabacs, auraient pu vicier le consentement deL ... à l'acte de sociét~;

Attendu que le compte actionnaire du défendeur se solde par un débit de 214.,785 fr., dont il y a lieu de retrancher la somme de !25.224~50 fr;-, crédit du compte courant du défendeur chez la demanderesse;

Par ces motifs, . Le Tribunal siégeant consulairement, écartant toutes autres conclusions, plus

K"8128 9

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JtJRlSPR Ui:>ÉN C:E

· amplès ou ·contraires, conclamne 1 ... à ·payer à la demanderesse la somme de 89.!)60.9!'5 ft•. les intérêts 6,5 °/o depuis le 15 juin t930 et les dépens;

Déboute le défendeur de sa clemande reconventionnelle de restitution. · Ordonne l'exécution provisoire du présent jug·ement nonobstant tous reco\n·s et

·sans caution; Donne acte à la demanderesse de ce qu'elle se réserve d'intenter au défendeur

ime action en dommag·es iutérêls .

. Observations. - Les causes de nullité ont 1wesque entièrement disparu du droit belge des sociétés anonymes. ~e législateur a visé à les éliminer, en raison du trouble économique et social que toute

-nullité entraîne en cette matière; il les a remplacées par la respon­sabilité personnelle dés fondateurs ou des adm:inistratem's, c.-a-d. de 'ceux à ql~i les causes de nullité alléguées sont en généra'l, imputées ·OU imputables. ·

Restent cependant outre les vices de fm~me, les vices du consente:. n1e~t clÜi, combinés aveè la règle du nlmbre 'mini.mum des associés :Cart. 28), pourraient encore entraîner Ja nullité.

L~inexistence d'un apport, sa non:..valeur. se traduisent en fait par .une déficience de souscription du capital : pareille déficience est cou­verte·i1ar la responsabilité solidaire des fondateurs (art. 35, 2o des lo:s <.;oorclonnées).

1

La p-rescription de l'article 60, · interdi<s.ant à l'administrateur de prendre part à une délibération clans laquelle il a un intérêt rersonnel opposé à celui de la société, n'a pas d'autre sanction que la Tespon­sabilité de l'administrateur qui l'enfreint.

No 3129. -.Tribunal de Commerce de u'ége. - 21 oct~bre 19.30. MM. Nagant, Vice-président;' Charlier, Référendaire; Pl : Mtres Ilannotte

cf Delfosse, avocats.

(MouUn cf Carrières et fours à. chm.tx dn pa.ys de Liégej.' .

Administrateur de société. ___, Pouvoirs. - Louag~ de services conclù par un administrateur alors que ce droit appartient au Conseil d'ad­ministration. - Nullité.

Ne lie pas la société le contrat de louage de services conclu sans cl'élég{ttion spéciale par un administrateur alors que les statuts régulièrement publiés réservent mt Co1lseil d'administration le droit de nommer les employés et que le contrat n'a pas été ratifié par la ·soCiété. · · . Attendu que l'action elu demandeur tend à faire condamner le défendeur au paie-

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· JtrtHSPRtJDE:NCE 131

ment d'une somme de 15.000 fr., à titre de dommag·es-intérêts : que le demandeur fonde son action sur ce que dans le courant de septembre 1929 il aurait été engagé par la défenderesse en qualité de controleur sur.veillant à la division d'Esneux, aux appointements mensuels de 2000 fr. plus le logement, l'éclairag·e et le chauffag·e et ce jusqu'au moment d'entrer en fonctions, il fut avisé })ar la défenderesse qu'elle ne pouvait accepter ses services; ·

Attendu que l'engagement dont le demandeur se prévaut, a été consenti en sa faveur par un sieur Voituron, alors administrateur de la société défenderesse et que celle-ci oppose à l'action, une fln de non recevoir déduite de ce que le dit Voituron n'avait pas qualité pour en~rag·er le demandeur;

Attendu qu'aux termes de l'article 22 des statuts constitutifs de la société défen­deresse c'est le Conseil d'administration qui, sauf délég·a!ion de ce pouvo·r, nomme et révoque les employés et salariés de la Société, détermine leurs atlrilmtions, fixe

· leurs traitements et émoluments; Attendu qu'à supposer que le sieur Voituron exerçât encore dans le courant de

septembre '1929 les fonctions d'administrateur de la société défenderesse; encore cette qualité ne luf donnait-elle pas, à moins de délégation spéciale, le pouvoir d'en­gager un employé pour compte de ce.lle-ei ; que la Société défenderesse ne peut être engag·ée vis-à-vis des tiers par le sieur Voituron que dans les limites des pou­voirs qui lui ont été confiés. par les statuts ; que le demandeur sei·ait mal venu à invoquer son ig·norance, puisque la publication officielle de l'acte social a dù le con­vaincre de l'étendue du mandat des administrateurs;

Attendu enfin qu'il n'est pas articulé que le Conseil d'administration de la défen­deresse ait délég·ué au sieur Voituron le pouvoir d'engager les Employés et qu'il n'est pas davantag·e établi ni même allég·ué que la défenderesse ait ratifié expressé­ment on tacitement l'engagement du demandeur ; que ce dernier doit s'en prendre à lui-même d'avoir manqué de circonspection et de prudence;

Attendu que la défenderesse n'étant pas tenue de l'engagement pris, sans pouvoir rég·nliPr par son administrateur Voituron et non ratifié par elle, il est sans intérêt d'apprécier les autres moyens de fait qu'elle soulève ;

Par ces motifs, Le Tribunal, sans avoir égard à toutes conclusions contraires, déclare le deman­

deur non fondé dans son action, l'en déboute et le condamne aux dépens.

Observations. - Décision conforme aux principes. Cfr. G'and, 26 aoùt 1922, Revue, no 2456 ; Gand, 7 mm 19.24, Revue, 1925, no 2623.

N° 3129

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1-32 JtJR!S.PR tJDl<;N CE

No 3130. - Tribunal de commerce de Gand (3e ch.). 29 décembre 1930.

I\iM. Claeys, Vice·prés. ; Reyniers et Branquaer, juges; 1\iaraite, référ. ; Plaid. : }\'{Ires Vermast cJ.F. Dauwe.

(Beekman cf Sinia)

Société anonyme. -Vente d'actions.~ Compétence. - 1. Administra­teur.- Administrateur délégué.- Mandat civil.

II. Souscription d':i.ctions à la fondation d'une société anonyme;- Acte civil en principe.

1. L'administ1;ate1tT, même délégué, cl'nne ou de plusiett1'S sociétés anonymes n'est pas comme tel, commerçant; ces fonctions n'impliquent que l'existence d'un mandat . âvU; la coexi_stence de pl1tsieurs mandats semblables ne peut avoir pmt1' effet de modi­~er l'essence ni le caractère de chacun de ceux-ci.

II. La participation à la fondat'ion cl' une société anonyme et la stJuscription d'actions est en principe ttn acte civil de placement ; sauf preuve contraire de l'intention initiale de les acquérir pour les ret•endre.

Attendu que l'action tend à obtenir la résolution, aux torts du défendeur, d'une convention verbale de vente ayant pour objet 97 titres et condamnation de celui-ci

, à restituer la somme de Hi.OOO fr. indùment encàissée, avec les intérêts légaux depuis le 4 mars 1.930 et les dépens ;

Attendu que c'est à bon droit que le défendeur oppose l'incompétence de ce tri­bunal pour connaitre de la demande, en prétendant quel' opération litig·ieuse n'est ni subjectivement ni objectivement commerciale ;

Attendu que le défendeur, qui lors de la vente exerçait les fonctions d'adminis­trateur délégué de la société anonyme << Flandria ll n'était pas commerçant;

Qu'eût-il même été adminislt•ateur de plusieurs sociétés ainsi qu'il le déclare · dans l'acte constitutif; encore ne posséderait-il pas cette qualité;

Qu'en effet il est de doctrine et de jurisprudence constantes que les fonctions d'admiilistrateur ou même celles d'administratem; délégué pour la gestion journa­lière des affaires d'une société anonyme n'impliquent que l'existence d'un mandat civil, puisque ceux-ci n'agissent pas en leur nom personnel mais uniquement en celui de l'être m01•al dont ils sont les organes lég·aux et que c'est la société qui, exerçant des actes de commerce, revêt seule la qualité de commerçant (A. RoLAJSD, De la responsabilité des aclmiÎ1istrateurs dans les so

1

ciétés anonymes en ~elg·ique, nos 204 et 200, pp. 244 et 245, nombreuses jurispru~ences en note ; - Etudes de Ml\'1. le Référendaire DENEus J. F. C. '1887 p. 3051 et A. GonDYN J. F. C. 1900, p. 82 ; - BELTJENS, Encycl. dr comm. belg·e, t. I, Il0 28, p. 14 ; - LYON-CAEN et RENAULT, Dr. comm. t. I, no 204 bis, p. 210 et nos 834 et 1013; - Cass. '18 février 1884, Pas., 1886-1-78);

Que la juridiction consulaire ùe serait compétente que s'il s'ag·issait d'une action intentée contre les administrateurs par la société elle=même ou par les actionnaires en cette qualité, ce en vertu des dispositions spéciales de l'article 12, 2° 'de la loi

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JURISPRUDENCE 133

du 2::5 mars ,1876 qui attribue expressément aux lrilmnaux de commerce << les con­testations entre associés ou entre administrateurs et associés pour raison d'une société de commerce ». "

Qu'en l'espèce il s'ag-it d'un litig·e entre un administrateur et un tiers n'exerçant pas un droit social mais son droit propre ; que la coexistence de plusieurs mandats semblables ne peut raisonnablement avoir rour effet de modifier l'essence ni le caractère de chacun de ceux-ci;

Attendu que e'est la nature de l'obligation dans le chef du défendeur qui déter­mine la compétence (art. 13 de la loi du 25 mars -1876) ;

Attendu qu'il appert des éléments de la cause que le défendeur, en fondant la société « Flandria » et en soliscrivant 125 titres n'_a eu uniquement en vue que d'~ffectuer le placement avantageux de capitaux faisant partie de son patrimoine ;

Que s'il céda, le -13 février '1930, 97 actions au demandeur, ce ne fut qu'occasion­nellement et parce qu'il se désintéressait d'une affaire dont il abandonnait la g·es­tion pour se consacrer exclusivement à la direction d'une nouvelle;

Qu'il existe donc eq l'espèce des présomptioi1s suffisantes pour permettre au tri­bunal, souverain appréciateur, de décider qu'au moment de la souscription des titres, le défendeur n'a cerlainement pas eu l'intention de les revendre et n'a donc. point ag"i dans un but de lucre ou de spéculation qui seul peut imprimer à son acte le cat·actère commercial, ou tout au moins, le faire réputer comme tel (NAMUR, Dr. comm. t. I, no 48;- Liég-e, Hi mars 1843, Pas., 1843, II, 257;

Attendu que ces présomptions appal'tenant à la classe de celles dites « juris tan­tum n peuvent donc être détruites par la preuve contraire. ·

Que le derqandeur n'apporte néannioins ni n'offre d'apporter celle-ci; Par ces motifs, " .

Le Tribunal.. se déclare incompétent, raUone materiae; déclare, partant, l'action non recevable, en conséquence en déboutè le demandeur, le condamne aux dépens.

Observations. - Décision confol'me à une doctrine et une jurispru­dence constantes. Cft•. Revue, 1907, no 1833; - 1911, no 2110; ~ 1927, no 2781; ....:...}928, Il0 2875; -1929, n°2965;- 1930, n°305l.

No 3131. ......; Tribunal de commerce de Bruxelles (13c ch.). 24 mai 1930.

MM. Verleysen, Viee-prés.; Louneville, référ. ; 1\'Jtres J. Dumont et Colon, avocats. (Morisseattx cf Soc. an. Banque de l'Union Bruxelloise).

1. Société anonyme.- Administrateur délégué.- Revocabilité.- Con­vention dite de louage de services ayant pour but de mettre obstacle à l'exercice du droit de révocation. - Nullité. -'Responsabilité. -

· Opérations inscrites à un compte ouvert au nom d'un syndicat inexis­tant.- Opérations personnelles à l'administrateur délégué.

II. Droit de rétention. - Conditions d'exercice.

L La révocabilité des admi1iistratenrs est un principe d'ordre pllblic. Il en est de même du mandat d'aclministratenr-délégué. Est nnlle 1tne conve1ttion clilë de louage de

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134 JURISPRUDENCE

services, ay{mt pour but ll'el·ltller la loi et lle mettre obstacle à l'e.xercice du droit absoltt de l'évocation.

Il est inadmissible que l'administrateztl'-délegué ne connaisse pas les titulairës des comptes ouverts dans les livres de let société. Les opérations effectuées pour compte d'un syndicat, dont it ne peut établir l'e;r-:istence, doivent être considérées comme personnel­les à 'l'administmtenr-délégué.

II. Si le droit de rétention doit être étendn par voie d'analogie à des cas qtû ne sont pas formellement prévus JHU' la législature, il ne peut se justifier que si la dette au sujet de laqztelle le détenteur oppose ce droit, a pris naissance à l'occasion de la chose détenue.

Attendu que le 29 octobre 1929, la société anonyme Banque de l'Union bruxel­loise a assig·né l\'Iorisseaux au paiement de la somme de 208.000 fr. contre remise de 800 titres de la Soc. an. Banque de l'Union Bruxelloise, achetés au nommé Sury, inscrits dans ses livres au nom d'un prétendu syndicat B.· U. B. radicalement inexistant et payés a.u moyen de ses fonds ;

Attendu que le 5 novembre '1929 l\'Iorisseaux a assigné la Soc. an. Banque de l'Union Bruxelloise pour s'entendre condamner :

1 o à lui 1)ayer la somme de 300.000 fr. indemnité forfaitaire p1:évue pour le cas de résiliation d'une convention verbale du fer octobre 1927 le désig·nant pour exer­

-cer les fonctions d'administrateur délégué, directeur ; 2°) à lui restituer 130 titres de la Société Orfèvrerie Wiskemann et .à lui payer la

somme de 5-.000 francs en réparation du préjudice subi du fait de son refus de restiluer les dits titres;

Attendu que ces actions sont connexes; qu'Il échet de les joindre; I. ---'- En ce qui concerne l'indemnité forfaitaire de 300.000 franes réclamée par

Morisseaux. Attendu que le 20 aoùt 1927 la Soc: an. Banque de l'Union Bruxello·ise disait à

. Morisseaux : << Sur la présentation de notre président du conseil lVI. Sury nous 11 avons l'honneur de vous offril· cl· entrer chez nous à titre d'administrateur-délég-ué. » Outre les tantièmes affectés à ce l)OSte, il vous ser·ait allot~é de~ appointements » mensuels de six mille fr. Pour vous permettre de prendre une décision en con­J> naissance de cause nous vous offrons de venir vous rendre compte de notre » org·anisation. Toutes les questions de détail pourront alors être mises au point » entre vous et notre président n ;

Attendu que l\'Iorisseaux ayant sollicité un contrat lui garantissant cette situation pour une durée de dix années, le président du conseil lui faisait savoir le 25 àoût 1927 que l'a])sence de ses collaborateurs direct~ l'empêchait de répondre d'une manière précise à sa demande qu'il ajoutait : « Je me permets toutefois de vous » faire remarquer que la période de dix ans fixée comme limite de contrat ne pour­» rait être donnée qu'en cas de direction, et non pas con1me administrateur. Vous » savez que Je mandat d'adiuinistratem appartient à ~me majorité d'actionnaires » qui peut toujours en disposer>> ; . 1 -

Attendu que le 2 septembre 1927 la Société anmwme Banque de l'Union Bruxel­loise déclarait à M:orisseaux : « Comme suile à àos différents entretiens et sur la » proposition de notre conseil d'administration, nous avons l'honneur de vous

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JURISPRUDENCE 13'5

>> offrir les fonctions d'administrateur-délég-ué, ·directeui· à la Banque de l'Union >> Bruxelloise. Les pouvoirs qui vous seront conférés en ce~te qualité seront déter­» minés dans le contt·at à établîr entre vous et notre établissement ; ils compor.-: >> tet'ot1t sans restriction aucune, tous les actes, tant ceux de g·estion journalière » que- èeux qui eng-ag-ent notre banque vis-à-vis de tiers. Ce .contrat mentionnera » expressément les actes pour lesquels les sig-natures conjointes de notre président » ou vice-président et de l'administrateur délég-ué seront requises ;

Attendu que le 5 septembre i 927 ,.1\Iorisseaux infül'mait la société de son accord et de ce :qu'il se proposait d'entrer en fonctions le 14 novembre et demandait que sa nomination ne fùt connue du public qu'a]wès que s9n chef, absent pour le moment, en eùt été avisé par ses soins.

Attendu qu'en sa. séance du 10 septembre 1927 le conseil d'administration appelait Moris~~aux aux fonctions d'administrateur-délég-ué; que cett.e décision luL était officiellement notifiée le i4 octobre 1927.

Attendu que, le 'i ?~' octobre 1927 intervenait entre Morisseaux et la société repré­sentée par le ·président .de son consèil d'administration en vertu d'une -délibération de ce conseil; en date elu 10 septembre 1927, une convelltion par laquelle la Banque de l'Union Bruxellois-e confiant à 1\Iorisseaux la direction de ses affaires commm~~ ciales; qu'elle lui reconnaissait les cc pouvoirs les plus étendus de ·gestion et d'ad­ministration » ; que les actes, pour lesquels la signature de Morisseaux eng·ag·erait la société, étaient déterminés comme suit : «Il pourra seul, chez la: Banque Natio­nale, toutes administrations publiques et privées, toutes banques ou corres})Olldaüts, belges et étrang-ers, ouvrir « tous comptes qu'iljug·erait utiles, faire toutes opération;; » de refrait et de dé pot, titres OlL espèces, en toucher le montant ou en donner » quittance et décharge, signer toute correspondance. Effectuer auprès des adminis­» tt·ations des postes, des télégraphes, des téléphones, des contributions, .des che­» mins de fer ou toutes entreprises publiques ou privées, tous retraits de plis, » titres ou espèces, en do~uier quittance ou décharg-e. Arrête1; tous comptes, nro­» duire à toute faillite ou liquidation, transiger, poursuivre, taJlt en demande lU' » ,qu'en défendeur; constituer tous huissiers, avocats et avoués qu'il jug·erait utile » aux besoins de la société, cette énumét·ation étant énonciative et non limitative. » Toutefois, pour tous retraits de fonds, sa signature devra être accompagnée d'une » sig-nature autorisée. Les sig·natures conjuintes du président ou d'ùnadministra­» teur autorisé et de M. Jacques Morisseaux, signant en qualité de directeur, seront n cependant requises pour tes actes et opérations qui n'entrent pas dans le cadre » courant des opét·ations de la société.

Attendu que sans doute on peut concevoir que l'administrateur-délég-ué d'une société soit en même fenips l'en'lployé de celle-ei enJ'aison de fonctions qu'il remplit indépendamment de son. mandat ;

Que, si le directeùr proprement dit est un mandataire, chargé par délég-ation dè la g·estion journalière de la société, ainsi que de la représentation de la société e~1 ce qui conyeme cette g·estion au même titre que l'administrateîu· délégué, le direc­teur .technique travaillant pour la société, en dirig·eaut une partie déte1:minée des services sociaux, est. un employé lié à la société par un çontrat de louag·e dè services .. ;

Attendu que 1\'Iorü:seaux n'occupait aucu11 emploi technique ;

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136 JURISPRUDENCE

- . Qu'en Jui èo'fifiant <<la direction· de· ses affaires commerciales n la Bailque de

l'Unidh~ Bruxelloise le charg·eait eu réalité· de la direction des affaires sociales·; qu'on ne voit pas, eu elf:et, quèlle pouv~it èlre ·son activité en dèhors de ses 'affaires commerciales.

Qu'on ne peut d'ailleurs co.nsidérer comme directeur leclmique un- (,}ir,:ecteur investi des pouvoirs les plus étendus, non seùlem'ent là gestiün;:mais l'administration; .

Attendu que les pouvoirs dont jouissait Morisseaux etaie1lt dè telle nature qU'Us ne pouvaient, êtt•e confiés qu'à un administrateur; que s'il fallait admettre que la convention susdite constitue un contrat de louage de services, elle aurait pour effet de lui conserver les mêmes pouvoirs en cas de I'etrait de son mandat;

Att~udu qu'il résulte d'ailleurs des pourparlers qui ont donné naissance à la conv~ntion, qu'il n'a jamais été question de conférer à :Morisseaux, outre le,mandat d'ad,niilistrateur délég·ué que la société lui offrait, le 20 àoût 1927, un e,mploi de directeur technique ; · -

Que le titre de directeur n'a été joint à celui d'administrateur-délégué, que pour g·arantir à Morisseaux l'exercice de ses fonctions pendant une durée de dix ans;

Attendu que la révocabilité des admirristratems édictée 11a1• les articles 53 et b5 des lois coordonnées sur les sociétés commerciales est un principe d'ordre public;

Attêndu que l'administrateur délégué est un administr~tem· investi de pouvoirs conférés au conseil d'administration ; que ses fonctions sont de même nature que celles dévolues à ce conseil; que le conseil d'administration dont les membres n'ont que des pouvoirs essentiellement précaires, ne saurait délég·uer que des tlüuvoirs ayant le mème caractè1·e ; que la délégation donnée par le conseil d'administration est, pàr conséquent, révocable comme le mandat d'administrateur ;

Attendu qu'il ne peut appartenir au conseil d'administr:)tion d'éluder là loi et de mettt;e obstacle à l'exercice du droit absolu de révocation, ~ien stipulant au .profit ,de l'administrateur-_délég·ué le paiement d'une indemnité en cas de retrait de la délég·:üion, ni en lui assurant au moyen d'un contrat qualifié contrat de louag·e de services, la permanence de ses pouvoirs et de ses émoluments.

A t'tendu que toute convention de ce s·eme est illicite comme contraire à une dis­. position formelle de la loi et ne peut sortir ses effets alors même que, comme en l'espèce, sa nullité n'est pas invoquée;

Il.· - En ce qui concerne la demande de restitution de 130 titres de la société anonyme Orfèvrerie Wiskemann ;

Attendu que 1\'lorisseaux reconnaît que 20 titres ont été remis, sur sa demande, à son beau-père le 12 octobre f929;

Attendu que la société anonyme Banque de l'Union Bru~elloise prétend qu'elle est en di·oit d'exercer sur les 1 t 0 titres restants un droit de rétention pour se couvrir d'une, créance qu'elle possède contre Morisseaux, créance qui fait l'objet de l'action pendante devant le tribunal sous le no 3833;

Attendu que si le droit de rétention doit être étendu par voie d'analog·ie à des cas qui I}e sm~t pas fol·~nellement prévus par le lég·islateur, il ne peut se ju~tifier que s'il y a connexité entre l'oblig·ation de restituer la chose et la créauee du détenteur; qu'il faut que la dette au sujet de .laquelle le détenteur oppose ce droit ait pris naissance à l'occasion de la chose détenue ;

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JDRISP RUDENCE 137

Que cette condition se rencontre dans toutes les hypothèses où la loi accorde le droit de rétention;

Qu'aux· tet•mes: de l'article.188~ du Code civil, l'emprunteur ne peut pas retenh· là chose prêtée pa11 c'ompeilsation de ce que le prèteur lui doit;

Attendu· qu'il n'existeaucmie cohnexité entre le dé pot de titres effectué entre les mains de la Sodété Anonyme Banqùe de l'Union Bruxelloise et la créance qu'elle ;prétend avoh·. contre l\'Iorisseaux;

'Qü'i111e ,~~agit même pas d'une eréance liquide et exigible ; "Attendu' que le~refus de restituer les titres n'est par conséquent pas ju~tifié; \Attendu ·-ctue :~lonisseaux n'apporte pas la preuve de la réalité du préjudice qu'il

'}Wétetid .3NOil' ·SUbi ; III. ~En ce qui concerne la demande de paiement de la somme de 6.250 franes

pour appointements échus le 1er juin 1929 et dus à MOJ'isseaux en qualité de direc· teur gérant.

Attendu que le 3 avril l929, 1\Jorisseaux a déclaré mettt·e à la disposilioh du conseil d'administt·ation soli mandat d'administrateur-délégué;

Attendu qu'ainsi qu'il a été dit Ci-dessus, il ne remplissait aucune autre fonctiou, la convet~tion dite de louag·e de sm:vice intrrvenue le l er octobre 1927 ayant unique­ment pour but d'éluder les. dispositions légales ;

Attendu que cette convention est nulle en tant qu'elle doit avoir pour effet de conserver à }\forisseaux ses pouvoirs et ses émoluments, nonobstant la perte de sa qualité d'administrateur-délégué; .

Attendu qu'il n'ad'ailleurs rempli pucune fonction en mai 1929 ; Attendu qu'en raison du caractère illég·al de la convention, le trilmual ne peut,

·bien que leur débition ne soit pas: contestée, par la société, reconnaître à Moris­seauxle droit à des· émoluments pb ur mai 1929;

IV .. - En ce qui concerne la de}nande de paiement de la somme de 208.000 fran es contre remise de 800 actions de 1~ Banqu'e de l'Union Bruxelloise. ·

Attendu que le 9 janvier '1929 le nomméSury demandait à Morisseaux d'être son interprêtê auprès du, con.seiJ d'adJ~inistration pour le prier d'accepter sa démission tant d'administrateur, que de pré~dent de la Banque de l'Union Bruxelloise;

. Attendu que le 10 janvier ,J 929 :Morisseaux accusait réception de cette co'mmuni­, cation et lui déclar~it :

« Afin d'apurer divers comptes de la Banque et déférant à votre désit', je vous » marque à nouveau l'accord que je vous ai déjà transmis verbalement sur les n points suivants ;

• >> fo) Le compte A. Imbert débjteur de . >> sera amorti complètement par votre cession à la Banque de ")) li5 parts de fondateur de la Soc. Belge pour le Commerce au

>> Katang·a ; · · >> 2°) Vous m'avez expl'imé le désir de reprendre :

- n. a) 7. 723 actions Dentelles Stiry que la Banque de l'Union • Bruxelloise possè,çle, étant entendu que ces titres vous seraient

cédés au pris de 100 fr. par titre soit » b) La créance que nous po,ssédons à charg·e de la firme

• Hanselman à

>> soit au total

fr . il6.126.00

Jr. 772.300.00

fr. 614.483.85

fr.1.502.914_.8ES

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138 JURISPRUDENCE

>> So) Le compte automobile sera complètèment amül'ti par n no~ soins;

. >> -4°) Vous offrez en échang·e :

>> a) ·i. 760 actions de capital de la Tannerie :Moderne Belg·e au n prix forfaitaire de 300 fr. l'une soit fr. 528.000.00

,> b) 450 1)arts de fondateur de la Tannerie :Modeme Belge au n pl'ix forfaitaire de 650 fr. l'une suit · fr. 292.500.00

>> c) 200 actions de capital cie la :Soeiété Belg'l~ pom le com->> merce au Ratanga soit au prix ùe 5DO francs fr. ·100.000.00

n cl) 200 actions de capital de la Cie Cafegas , • fr. · 50.000i00 n e) 20 actions de capital de la Cie Hotelkatt . fr. 10.000.00 n f) JOO actions-de capital de la· Ste Ame Orfèvrerie Wiske- .

n mann, les dits titres étant libérés de ·125 fr. chacun . fr. ·12.300.00 n g) 250 parts de fondateur de la Ste Ame Sobelkatt au prix de

n · LOOO fr. forfaitaire l'une soit fr. 250.000.00 » Je ·demande d'autre part à mes collèg-ues de vous re1wendre

n 1.000 actions de la Banque de l'Union Bruxelloise au prix for-» 'faitaire de 260 fr. par titre fr. 260.000.00

n soit au total fr..' 1.503.000.00

n Le produit de cette veuLe sera, ainsi que convenu, entt'e nous, atrecté au rachat » que vous effectuez de 7. 723 actions de la Ste Ame Dentelles Sury, , de . la cré.anee » de 6l4.488.85 fr. à charg·e de la firme Han~elmaÏJ, que possède la Banù1,1e, de

)'Union Bruxelloise au débit. de U6.126 fr: de M. Imbert.» , ,1,_. .. , .

.Attendu qu'au cours de cette .séance, tenue le même jour, le conseil d'Administra­tion a déclaré approuver les termes cie. la communication Iaite à Sury au no.Q'Î- de J!l société par Morisseaux; . .... ,,. __

Attendu que ce même jour, lO jatwier 1929, a eu lieu ~l'échan~re dont question ci-dessus; qu'un compte «Syndicat 5. U. B. >ta été crédité de '1000 actions de- ·la Banqu~ l'Union Bruxelloise et débité de la somme de 250.000 fr.; _ _ .. ,

Attendu que ~00 actions ayant déjà été reprises par 1\'Iori.sseaux la société anonyme la Banque de l'Uni.on Bruxelloise ;réclame paiement des 800 titres restants, soit 208.COO francs, le prétendu <<Syndicat B. U. B. n étantjnexistant; -.

Attendu qu'il importe peu que les diverses inscl'iptionf?J aient été faites dan~ les livres de la société d'après les fiches établies 11ar Sury ; · ,,

Que l'échang-e, même par simple jeu d'écritures sans tradiction réelle; n'a r;u être effectué que sur l'ordre de Morisseaux, administrateur-délég·ué;

'Qu'aucun employé n'eut consenti à opérer un echange aussi important sans y avoir été autorisé par l'admiliistrateur~délég·ué ; · , ·

Attendu que s'il a v ait estimé que l'inscription au compte << Syndicat B. U :·B. » avait été faite abu,sivement, 1\'Iorisseaux, qui a dli néces~ail'ement .en avoir connais­sance, eùt fait réparer cette irrég-ularité;

Attendu que 1\'Iorisseaux ne tente même pas cl'établil'·'l'existence de ce << Syndicat B. U. B.n;

'Qu'il est inadmissible qu'il ne connaisse pas les titulaires des coniptes ouverts dan~ les livres de la société ;

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JURISPRlTDENCE J39

Attendu que dès avant l'enti'ée de 1\'Iorisseaux ù la Banque de l'Uniou Bruxelloise, un compte cc Syndicat B. U. B. >> était ouvert dans les livres de la société; qu'il renseignait de nombreuses qpérations d'achat et de vente portant sur des aclions de la société anonyme Banque de l'UÙion Bruxelloise ; · Attendu que, constatant l'existence d'un- compte dont il ne connaissait pas le titulaire, l\'Iorisseaux eut dù prendre aussit6t les dispositions voulues pour mettre fin à cette situation anormale ;

Attendu qu'au cùntraire de nombreuses 11pérations d'achat et de vente d'actions de-la société anonyme Banque de l'Union Bruxelloise ont encore été effectuées pour ce compte;

Attendu qu'à défaut de titulaire conn\1, ces opémtions n'ont pu être faites que sm· l'ordre de 1\iorisseaux, administrateur-délégué ; qu'il est d'ailleurs constant que celui-ci a fait virer au dit compte, pour le débit de son propre compte 2l 012 fr .. le -17 janvier 1928, 9.100 fr. le 24 janvier 1928, 17.142,25 fr. le 17 février 1928 et 39.465,55 fr. J~ 21 avril1928 ;

Attendu qu'il faut, dès, lors, admettre que le compte (<Syndicat B. U. B. >>

servait à i·exécution cl'o11érations pei'Soimelles à .Morisseaux et que celui-ci en était devenu le titulaire réel ;

Attendu que la demande est par conséquent fondée ; Qu'ii appartient à l\'Iorisseaux de faire valoir éventuellement ses dl'Oits contre les

tierê qui auraient pris des engagements- au sujet des titres ·dont s'agit ; - Par ces motifs,

Le Tribunal, écartant toutes conclusions aut~·es, plus amples ou contraires, joint les causes comme coimexes ;

Statuant sur l'actîon no 4275 : la déclare non fondée en tant qu'elle a pour objet le paiement d'une indemnité forfaitaire de 300.000 fr- et d'une somme de 5000 fr., à tH1·e de dommages-intérêts -et en déboute 1\'Iorisseaux quant à ce : condamne la société anon~me Banque de l'Union Bruxelloise à restituer à l\1orisseaux 110 litres de la société anonyme Orfèvrerie Wiskemann ; met la moitié des dépens à charge de chacune des parties ; ·

Donne acte à la défenderesse cl~ ce qu'elle évalue l'action en tous et chacun de ses chefs, pour satisfaire ,aux lois sm· la compétence et le ressort, à plus de 300.000 fr.; lui donne acte de ce qu'elle se réserve de poursuivre ultérieurement, à charge du demandeur, la réparation du préjudice par elle subi à la suite.des fails de gestion et des actes faits hors mandat pat' le demandeur ;

Statuant sur l'action no 9:6 : réçoit l'opposition de la société anonyme Banque de l'Union Bruxelloise au jugement par déf-aut rendu le 10 juillet 19 ~9, produit en expédition enregistrée ; met le dit jug·ement à néant; déclare l'action non fondée 'en déboute 1\'Iorisseaux et le c::Jndamne aux dépens ; mèt toutefois les frais préjudi­ciaux à charg·e de l'opposante ;

Statuant par l'action no 3833 : condamne 1\'Iorisseaux à payer à la Banque de l'Union Bruxelloise la somme de 208 00() fr. aug·mentée des intérêts ù 6 p. c. l'an à dater dü lO janvier 1929, ce contre remise de 800 actions de la société anonyme Banque de l'Union Bruxelloise; le condamne aux dépens ;

Donne acte à la demanderesse de ce qu'elle se réserve de pomsuivre ultérieure-

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140 JURJSPRUDENCF.

ment contre le défendeur le recouvrement du prix de 3i4 actioi1s de la Banque de l'Union Bruxelloise achetées les U et 29 janvier !929;

Donne acte à 1\'lorisseaux, pour valoir ce que de droit, de ses réserves quant au caractère donunag·eable des allégations produites par la sociét.é anonyme Banque de l'Union Bruxelloise par l'org·ane de ses mandatairss actuels.

Déclüre le jug-ement exécutoire, nonobstant appel, mais moyennant caution. ·

Observations. - Le principe cle la révocabilité de.s administrateurs, même délégués, est d'OL·dee public. Le jugement ci-dessus le rappelle en termes nets et il en tire cette conséquence que, même non invoquée par les pàrties, la nullité de toute clause tendant à abolir ou eut.rayer cette révocabilité, devrait être constatée ~t sanctionnée d'office par les teibunaux. .

Le contrat de louage de servjces n'est d'ailleurs·nullemeut incom­patible avec le mandat d'admiuisti·ateur délégué. La dénomînation même d'administrateur délégué sous laquelle par er1·em· ou inadver­tance, l'intéressé exercerait les fonctions cle dii·ecteur régies par le louage de services ne suffirait pas pour changer la nature de ces ·fonctions. - BI'Üxelles, 27 déc. 1907, Revue, 19.08, 11° 1867 ; -Bruxelles, 11 fév1·ier 1908, Revue, 1893;- Bordeaux, l9Juill. 1909, Revue, 1910, ll0 2035 ; - Bruxelles, 15 mars 1909, Revue, 1910, ll0 2092.

En pareil cas, les fù11ctions d'administratem· d celles de directeur suivent, quant à Pexécution, la durée, la révocation etc. des J•ègles ditféren tes.

La dist.inction- .petlt être difficile, et est n~cessairement un cas d'espèce.

Le tribuuàl peut d' aillem·s avoir à dépister en certains cas le.s com­lrinaisons imaginées pour masquer sous une dualité appat·ente de rap­pol'ts juridiques, l'in ten ti on cle restreindl'e la eévocabilité ess~nt.iélle du mandat d'administrateur. L'espèce _examinée dans le jugement ci-dessus offee l'exemple d'un de ces cas de collusion en vue d'éluder la loi.

La doctrine elu jugement sur la nat.m·e du mandat de l' aclministra­tem•.:délégué est conrorme à l'enseignement général.

. N° 3131

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JtJlUSPRUùENCE 141

No 3132. -.Cour d'appel de Bruxelles (98 ch.). - 22 mars 1930. MM. Symons, prés. ; Louveaux, avocat ~rénéral; Pl. : Mtres Feye cf Rommel, avocats.

(Banque de Crédit Commercial cf Etat mnances). Impôt sur le revenu.- Taxe mobilière.- Versements anticipatifs sur

actions. -Assimilation des intérêts aux dividendes d'actions:

Le versementpar leqttell'actionnalre libère son titre ne donne pas lieu à 1tn droit de créance; la libération d'une action ne peut modifier le caractère du titre; que le verse­ment soit obligatoire, ou qu'il soit facultatif ou anticipati{, l'actionnaire.qui a liberé son titre est et ne peut être qu'acf'ionnai1·e.

Les conventions intervenues entre associés ne pezwent imprimer un dou.ble caractère it l'action libérée et partager celle-ci en deuJJ {racl'ions : l'une demeurée action et l'mttre créance.

La détermination du tau ;-r: de la taxe mobilière est basée non pas sur le caractère fixe ou variable d'Il J'e11en1t mais bien sur le caractère ,juridique de l'élément productif de revenu.

Attendu que la société requérante réclame, pour cause de surtaxe,îe rembourse­ment partiel de la taxe mobilière afférente aux revenus attribués à ses titres pour les exercices sociaux 1925 et t926; qu'elle conteste la débition d'une somme de 40.277 fr. perçue sur les intérêts qu'ell.e s;est engag·ée à servir sur les versements anticipatifs à ceux de ses actionnaires qui se sont libérés au delà de la quotité appelée;

Attendu que le fisc a considéré ces versements volontaires et anticipatifs comme partie intégTante de l'action, et le revenu perçu sur ces versements comme un divi­dente taxable aux taux de 22 °/o, tandis que la société requét•anle soutient que les dit.s ve1•sements anlicipatifs ont donné naissance, au profit de l'actionnaire, à un droit de créance dont le revenu _fixe ne veut être taxé qu'au taux frappant les inté-rêts d'oblig·ations ou de créances; ·

Attendu que le versement par lequel l'actionnaire libère son titre, ne donne pas lieu à un droit de créance, qu'en effet l'on ne peut affirmer, sans énoncer une con­tradiction manifeste, qu'en libérant son action l'aclionnaiJ·e acquiert un droit de créance pour la partie afférente au versement effectüé et joint désormais à sa qualité d'actionnaire celle de créancier ; la libération d'une action ne peut modifier le caractère du titre ; le détenteur d'une action lihél·ée demeure actionnaire pour le tout : il ne peut, tout en étant actioimaire pour une partie, devenir créancier pour une autre partie; que le :versement soit obligatoire, ou qu'il soit facultatif ou anticipatif, l'actionnaire qui a libéré son titre est et ne peut être qu'actionnaire : par son.versement anticipatif, il s'est libéré en sa qualité d'associé de son engage­ment de fournir des apports et s'est affranchi de l'oblig·ation de répondre aux appels de· fonds éventuels ; le versement libératoire participe donc nécessairement du caractère de l'action libërée;

Attendu il est vrai, que pom démontrer, que les versements litig·ieux onrJa -nature de créance, la requérante fait valoir que l'actionnaire qui libère anticipati­venient son action, a droit, en vertu des statuts sociaux, à un intérêt fixe et invariable

N 11 3132

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142 JUR1Sl>RtJDENC~

de 5 °/oet que les· statuts stipulent également qu'anemie modifièation de ce talJX ne peut êlre déc· dée que moyennant la -facui té1iour lés intéressés de~ retirer ieurs' ver­sements (article 9 des sJatuts);

Atteadu que les stipulations sociales âvenues sous l'empire de la liberté des conventions lient les parties intéressées qui peuvent aiJJsi rég·ler à leur g·uise la répartition des bénéfices et l'attribution d'un revenu fixe, qu'elles qualifient impro­prement d'intérêts, à certaines fraetions du capital social : elles peuvent également régler, moyennant certaines conditions, la modification du taux stipulé;

Mais attendu que eês clauses diverses, uniquement conclues aux fins de régler les droits respectifs des actionnaires et leurs rapports vis-à-vis les uns des autres, ne,peuvent produire quel qu'effet vis-à-vis des tiers que si elles ne heurtent· pas des principes essentiels et si elles ne contreviennent pas à des règles d'ordre public;

Attendu qu'en l'éspèce les conventions intervenues entre associés ne peuvent imprimer un double caractère à l'action libérée et partag·er celle-ci en deux frac­Uons : l'une demeurée action et une fraction créance; que, d'autre part, le revenu fixe de 5 °/o ne pourra être alloué à l'actionnaire, qui a effectué le versement anti­cipatif, que si le bilan fait apparaître un bénéfice qui autorise l'attribution de sem­blable revenu à titre de dividende; flUe, de même, le titre ayant été libéré par un versement facultatif, ce versement, hien que volontaire, est définitivement acquis au capital statutaire, comme le versement obligatoirement appelé, il constitue l'apport ou la mise sociale, et nul retrait ne sei'a plus autorisé que par les voies lég·ales de la réduction du capital social;

Attendu que la détermination du taux de la taxe mobilière est basée non pas sur le caractère fixe ou variable du revenu, mais bien sur le caractère juridique de .l:élément productif de revenu;

Qu'il résulte des éléments qui précèdent qu'à bon droit le directeur ou la décision- entre11rise a appliqué le taux de 22 °/o aux revenus tiUe la société requé­rante qualifie d'intérêts anX: versements anticipatifs, mais qui, au reg-ard de la loi et du Fisc, ne peuvent constituer que des dividendes d'actions;

Par ces motifs, Déclare le recours non fondé ...

Observations. -Voir, sous le No 3133 ci-après, l'arrêt de la Cour de ca~sation du 25 févr'iee 1931, qüi a cassé cet arrêt. Il y a lien, cependant, de fail'e remar'qner ici que la Cour d'appel commettait deux erreurs de fait concernant les clausès.régissant les versements anticipatifs liUgieux : les statuts stipulaient un intérêt fixe de 5°/o a passer par frais généraux; le payem·ent de ces intérêts n'était donc ntûlement conditionné par la réalisation de bénéfices autorisant ce payement à titre de dividende. D'autre part, il était formellement stipulé que les versements anticipatifs pouvaient être retir'és au cas ou l'assemblée génér'ale viendrait a modifier le taux de l'intérêt : il était

·donc- inexact de déclarer, avec l'ai'rêt, que " 1inl retrait ne sera plus autorisé que par les voies légales de la réduction du capital social ".

M.F. N° 3132