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NOTE A PROPOS DE QUELQUES CONTREMARQUES EMPREINTES SUR DES MONNAIES DE NÉRON Author(s): F. de Saulcy Source: Revue Archéologique, Nouvelle Série, Vol. 19 (Janvier à Juin 1869), pp. 415-424 Published by: Presses Universitaires de France Stable URL: http://www.jstor.org/stable/41735000 . Accessed: 19/05/2014 09:42 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Presses Universitaires de France is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Revue Archéologique. http://www.jstor.org This content downloaded from 194.29.185.254 on Mon, 19 May 2014 09:42:44 AM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

NOTE A PROPOS DE QUELQUES CONTREMARQUES EMPREINTES SUR DES MONNAIES DE NÉRON

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NOTE A PROPOS DE QUELQUES CONTREMARQUES EMPREINTES SUR DES MONNAIES DENÉRONAuthor(s): F. de SaulcySource: Revue Archéologique, Nouvelle Série, Vol. 19 (Janvier à Juin 1869), pp. 415-424Published by: Presses Universitaires de FranceStable URL: http://www.jstor.org/stable/41735000 .

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NOTE

A PROPOS DB QUELQUES CONTREMARQUES

EMPREINTES SUR DES MONNAIES DE NÉRON

Les contremarques des monnaies antiques sont intéressantes à étu- dier; elles sont dignes de l'attention des numismatistes. C'est ce que nous allons essayer de démontrer par un exemple.

Les monnaies vulgaires de l'empereur Néron présentent parfois certaines contremarques dont l'explication ne peut causer la moindre hésitation, mais dont l'histoire détaillée offre quelque intérêt. Je vais donc examiner le plus brièvement possible l'origine de ces contremarques.

Commençons par les monnaies frappées à Rome même par l'auto- rité du sénat, c'est-à-dire les espèces de cuivre portant la signature officielle S. C, « senatus-consulto. » De toutes les monnaies de cuivre à l'effigie de Néron, la plus vulgaire est le moyen bronze offrant au reversles lettres S. C., placées aux côtés d'une Victoire volant vers la gauche et tenant un bouclier sur lequel on lit : S. P. Q. R. (sena- tus populusque romanus). (Cohen, noS 246 à 254, variétés du même type.)

Est-ce bien un bouclier sur lequel la Victoire pose la main? J'en doute. Il suffit de regarder la pièce en question pour partager mon incertitude; car si c'est un bouclier, il est bien petit et bien singu- lièrement dessiné. Ne serait-ce pas plutôt le globe terrestre sur lequel la Victoire met sa puissante main, tandis que toute l'étendue de ce globe porte la marque souveraine du sénat et du peuple ro- main? Comme certains deniers d'Auguste (Cohen, pl. XXI, n08 40 et 41) nous offrent la Victoire tenant une couronne et une palme, de-

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416 REVUE ARCHÉOLOGIQUE. bout sur un globe, et que là il n'est pas possible de voir un bouclier» il faut bien admettre que le monde terrestre, orbis terrarum , dès Fépoque d'Auguste, était représenté par un globe, et qu'il est plus naturel de retrouver un type parfaitement analogue, mais plus ex- plicite encore, sur nos monnaies de Néron, que de supposer la con- stitution d'un type banal et ne signifiant pour ainsi dire rien. A quel moment et pour quelle raison cette contremarque a-t-elle été appli- quée sur les monnaies les plus répandues de Néron? Telle est la question qui se présente tout d'abord et qui se résout pour ainsi dire d'elle-même (1).

Feu le duc de Blacas a publié dans la Revue numismatique de 1862 un travail extrêmement intéressant, dans lequel il décrit une riche série de monnaies romaines autonomes, frappées en dehors de l'autorité impériale, aussitôt après la mort de Néron. Il n'y a donc rien que de très-naturel à supposer que, pour constater les droits qu'il venait de recouvrer, le sénat fit tout d'abord appliquer la contremarque S. P. Q. R. sur l'effigie de Néron et sur la monnaie la plus vulgaire de cet empereur. Peut-être aussi fut-ce Galba qui fit tout d'abord contremarquer ces monnaies, pendant qu'il était encore en Espagne.

Si nous passons maintenant à certaines monnaies provinciales du même empereur, nous verrons se reproduire non pas le même fait, mais un fait du même ordre et qui nécessairement a eu la même cause. C'est au monnayage de Tripoli de Syrie que nous allons nous reporter. Tous les numismatistes connaissent de jolis MB. offrant au droit la tête très-reconnaissable de Néron, mais sans légende, et au revers les têtes accolées des Dioscures, accompagnées de la légende TPITTOAITflN. Cette monnaie est très-commune et se retrouve dans toutes les collections; mais rien n'est plus rare que de la rencontrer sans contremarque. Cela est si vrai que le cabinet impérial des médailles, qui en contient une dizaine d'exemplaires, n'en offre pas un seul qui ne soit muni d'une contremarque appli- quée sur le cou de l'effigie de Néron. Ces contremarques sont telle- ment claires par elles-mêmes que leur sens saute aux yeux; et Mionnet, qui les avait comprises sans le moindre effort, les a toutes expliquées dans son vaste recueil.

Trois contremarques distinctes ont été appliquées sur les monnaies de Néron frappées à Tripoli, à mesure qu'elles rentraient à l'atelier

(1) Parmi les 959 monnaies de Néron, tirées en 1864 du gué de Saint-Léonard, près Mayenne, se trouvaient 16 MB., portant la contremarque S. P. Q. R.

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CONTREMARQUES EMPREINTES SUR DES MONNAIES DE NÉRON. 417

monétaire de cette ville pour y subir une modification imposée, sans aucun doute, par un décret formel de l'autorité compétente.

Voici quelles sont ces contremarques :

1. |M» g M .

2. I Kf o"Fo I et BSE.

3. [h/p '£S' et

Elles se lisent sans difficulté. 1. IMP (erator) GAL (ba). 2. UAP{erator) OTHO. 3. IMP (erator) VES (pasianus).

Sur un très-grand nombre de monnaies de ce genre qui m'ont passé par les mains, je n'en ai jamais rencontré une seule présen- tant un monogramme applicable à Yitellius. Nous devons donc essayer, l'histoire à la main, de nous rendre compte et de la présence des trois monogrammes recueillis jusqu'ici, et de l'absence du mono- gramme de Yitellius.

Dans la dernière année du règne de Néron, Yespasien guerroyait contre les Juifs révoltés, et son fils Titus qui l'accompagnait, prenait une part très-active aux opérations de la guerre. Était-il dévoué de cœur au souverain que la populace adorait comme un dieu et que toutes les hautes classes de la société romaine exécraient comme un monstre? Nous ne saurions guère le deviner; mais ce que nous pouvons affirmer en toute connaissance de cause, c'est que l'illustre général, s'il avait au cœur l'ambition de revêtir quelque jour la pourpre des césars, savait à merveille attendre et dissimuler cette ambition.

Vespasien était rentré à Gésarée après une laborieuse et brillante campagne, lorsqu'il y apprit la mort de Néron, qui n'avait trouvé que dans le suicide un refuge assuré contre la haine des Romains. Il s'était poignardé après un règne de treize ans et huit jours, nous dit Flavius Josèphe, le célèbre historien des Juifs. C'est au mois de juin de l'année 68 de l'ère chrétienne que ce tragique événement s'accomplit. Néron était monté sur le trône en 54, à la mort de Claude, son beau-père par alliance (1). Comme il était né à Antium

(1) Claude avait épousé en 49 Agrippine, sœur de Caligula, laquelle était déjà veuve de Domitius Ahenobarbus, père de Néron? et en deuxièmes noces du consu-

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418 REVUE ARCHÉOLOGIQUE. en 37 de J.-C., Néron avait dix-sept ans lorsqu'il devint empereur. Il avait donc régné un peu plus de treize ans, ainsi que le dit Josèphe, et il mourut âgé d'un peu plus de trente ans.

La cause de sa mort fat la défeclion de toute son armée et celle de la garde prétorienne elle-même, à la nouvelle de la révolte de Vindex et du soulèvement des légions d'Espagne, qui avaient salué empereur Sulpicius Galßa. Celui-ci, qui était né en l'an 3 av. J.-C.* était donc âgé de soixante-onze ans, lorsqu'il reçut le titre d'empe- reur. En apprenant la mort de Néron, il prit le titre de César et arriva bientôt à Rome, où il fut acclamé par le sénat et par les pré- toriens. Cette faveur populaire fut de courte durée, car, nous dit encore Josèphe, après sept mois et sept jours de règne, il fat mas- sacré au milieu du Forum par lés soldats de la garde prétorienne. Marcus Salvius Othon, qui avait pris part à la révolte de Galba, comme préfet de la Lusitanie, ameuta les troupes contre le nouvel empereur qui venait d'adopter Pison Frugi, et qui avait eu la mala- dresse de présenter à l'armée son fils adoptif, sans parler de gratifi- cation. Quelques jours après, Othon était maître de l'armée et Galba périssait victime de son avarice. Aussitôt ce meurtre accompli, les prétoriens saluèrent empereur Othon, qui avait été l'âme du complot.

Que se passait-il en Syrie pendant que ces événements s'accom- plissaient à Rome?

Yespasien, nous l'avons déjà dit, était rentré à Césarée lorsqu'il apprit la mort de Néron; mais il est certain qu'il ne fut pas informé du môme coup de l'accession de Galba au trône, puisque nous ap- prenons par Josèphe que, ne sachant qui allait succéder à l'empereur mort, il se décida à rester dans l'inaction et à attendre les ordres du nouveau souverain. Peu après il sut que Galba avait été mis à la tòte de l'empire, et il se décida à lui envoyer son fils Titus pour le féli- citer et lui demander ses instructions.

On était en hiver, dit Josèphe, lorsque Titus partit de Césarée avec Agrippa II, roi des Juifs; ils avaient pris terre en Achaïe après une très-pénible traversée, et pendant qu'ils s'y reposaient, avant de reprendre la mer, arriva la nouvelle de la mort de Galba et de la proclamation d'Othon.

Grande fut la perplexité de Titus, qui était porteur de félicitations pour Galba et non pour Othon. Il prit rapidement son parti et re-

laire Passienus Crispus. Agrippine réussit à faire adopter son fils Néron par Claude en 50, au détriment de Britannicus son véritable fils, né de Messaline en 42. Chacun 8 ait que Néron empoisonna celui-ci en 55,

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CONTREMARQUES EMPREINTES SUR DES MONNAIES DE NÉRON. 419

tourna en hâte auprès de son père, pendant que le roi Agrippa con- tinuait sa route vers Rome. Une fois de retour à Césarée, Titus se concerta avec son père, et tous les deux comprirent que ce qu'ils avaient de mieux à faire en pareille occurrence, c'était de tempo- riser encore et d'attendre les événements.

Il paraît que l'ordre d'agir, expédié par l'empereur Othon, parvint enfin à Vesp3sien, puisqu'au dire de Josèphe, à la date du 5 du mois macédonien de Daisios (29 avril 69 de J.-C.), il quitta Césarée à la tête de son armée pour envahir la Judée et en achever la soumis- sion. La Gophnilique et l'Acrabatène (districts de Djifneh et d'Akra- beh) furent envahies tout d'abord et occupées militairement, avec les villes de Béthel (Beïtin) et d'Ephraim (Thaïebeh). Vespasien parut môme devant Jérusalem, mais sans en commencer le siège. De là Cerealis, un des généraux qui marchaient sous ses ordres, se dirige.) sur l'Idumée et alla brûler Hebron. Après cette brillante campagne, il ne restait plus aux Juifs que les places de Jérusalem, d'Hérodium (Djebel-Foureïdis), de Massada (Sebbeli) et de Machœ- rous (M'kaour). Yespasien, après avoir rempli son programme de guerre, rentra de nouveau à Césarée, son quartier général.

Nous avons vu que Vespasien n'entra en campagne que le 29 avril, et, pour qui connaît le climat de la Syrie, c'est bien tard. Mais le général romain, nous lavons dit plus haut, avait, de con- cert avec son fils, attendu des ordres de Rome avant de prendre une décision. Si dès cette époque, ainsi que le retour précipité de Titus à Césarée le rend très-vraisemblable, Yespasien et Titus rê- vaient pour eux l'autorité suprême, ils s'entendaient à merveille à cacher leurs vœux secrets. Il n'était que trop évident que l'empire romain, depuis la mort de Néron, était en pleine révolution; quel- ques mois avaient suffi pour amener la chute de Galba, vieillard simplement coupable d'une maladresse à l'égard des avides préto- riens, et à l'égard de celui qui, jusqu'à l'adoption de Pison, s'était montré un lieutenant fidèle. Othon, qui était né en 32 de J.-C., n'avait que trente-sept ans lors de son accession au trône; il eût donc été dangereux peut-être de s'attaquer à un homme dans toute la force de l'âge. Aussi Vespasien jugea-t-il prudent d'obéir et d'attendre. Il ne devait pas attendre longtemps, comme on va le voir.

Le règne d'Othon fut très-doux. On a prétendu que le sénat ne voulut pas le reconnaître; mais c'est là un fait plus que douteux. Il était à peine assis sur le trône qu'une terrible nouvelle parvint à Rome : les légions de Germanie s'étaient insurgées et avaient pro- clamé empereur Aulus Vitellius, nommé par Galba légat de la Ger-

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420 REVUE ARCHÉOLOGIQUE. manie inférieure. Ce Vitellius, né en Tan 15 de J.*C., avait donc cinquante-quatre ans en 69. Il avait été l'un des compagnons de dé- bauche de Tibère à Caprée, puis tour à tour l'ami de Caligula, de Claude et de Néron, dont il avait capté la bienveillance, soit par son habileté à conduire les chevaux, soit par son talent de beau joueur. Les légions de la Germanie inférieure avaient pris en haine le gou- vernement de Galba; elles proclamèrent Vitellius empereur. Les autres légions de la Germanie supérieure, de la Belgique, de la Lyonnaise et de la Bretagne adhérèrent à ce choix, et Vitellius, après avoir grossi son armée d'une foule d'aventuriers empruntés à toutes les nationalités de la Germanie, se dirigea sur Rome, où les prétoriens venaient de donner le souverain pouvoir à Othon. Celui- ci n'hésita pas et courut au-devant de son compétiteur.

Le choc des deux armées eut lieu à Bedriac, dans les Gaules (à ce que dit Josèphe, qui oublie d'ajouter le mot cisalpines). Les troupes de Yitellius, commandées par Valens et Cecina, furent battues le premier jour; mais le lendemain, le combat ayant recommencé, elles remportèrent la victoire. Othon, qui était à Brexellum (Ver- ceil), en apprenant sa défaite, renonça à la lutte et se donna la mort de sa propre main. Il avait régné trois mois et deux jours, à ce que nous dit Josèphe.

Les généraux d'Othon passèrent immédiatement sous les drapeaux de Vitellius, et celui-ci fit son entrée à Rome, où ses honteuses pro- digalités lui eurent bientôt aliéné tous les esprits. Il est bon d'ajou- ter, du reste, que les mercenaires étrangers que Vitellius traînait derrière lui, ne trouvèr ent rien de mieux à faire, à leur entrée à Rome, que de livrer la ville au meurtre et au pillage, et que cela ne contribua pas peu à préparer la prompte ruine du nouvel empereur.

Vespasien venait de rentrer à Césaçée après sa campagne de l'an 69, lorsqu'il apprit la mort d'Othon, le pillage de Rome et la proclamation de Vitellius. Il en fut indigné, et dès ce moment son parti fut pris; mais la prudence ne gâte jamais rien, pas même les projets des ambitieux; et Vespasien, qui le savait à merveille, eut le talent de se faire forcer la main par ses soldats qui l'adoraient. Assez longtemps il se donna !le mérite de refuser la couronne que ses légions lui offraient, et il poussa l'habileté jusqu'au point de se faire menacer de mort par ses partisans, s'il ne consentait à prendre réso- lûment le titre d'empereur.

L'hiver était revenu pendant que cela se passait en Syrie, et il y avait loin de Césarée à Rome. Par mer, la voie en cette saison était aussi dangereuse que longue. Quel parti prendre?

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CONTREMARQUES EMPREINTES SUR DES MONNAIES DE NÉRON. 42 i

Vespasien, une fois décidé à se révolter contre Vitellius, comprit qu'il fallait avant tout se rendre maître de l'Egypte, véritable gre- nier du peuple romain et asile certain en cas de non-succès. D'ail- leurs, affamer Rome, c'était porter le coup le plus fatal à Vitellius, si le sort des armes était favorable à celui-ci. La Syrie entière ac- clama sans hésitation Yespasien, qui se rendit à Béryte, où il reçut les députations de toutes les grandes villes qui lui envoyaient à i'envi des félicitations et des couronnes d'or.

La souveraineté de Vitellius ne fut donc pas acceptée un seul instant en Syrie, et pour ce pays ce fut Vespasien qui succéda immé- diatement à Othon. Dès lors, il est tout simple que les espèces de Néron frappées à Tripoli, et qui ne furent maintenues en cours qu'à l'aide d'une contremarque, ne nous présentent que les noms de Galba, d'Othon et de Vespasien. Il n'y a aucune chance de retrouver jamais sur ces monnaies la contremarque de Vitellius.

Mais revenons aux événements. Vespasien avait en Egypte un ami dont il était sûr : c'était le Juif

Tibérius Alexander, qui administrait cette province. Il lui écrivit à Alexandrie pour lui faire connaître son acceptation de l'empire et lui demander ses bons offices. Déjà le pays avait reconnu le gouver- nement de'Vitellius, puisqu'il existe des monnaies de cet empereur frappées à Alexandrie. Tibérius Alexander se hâta de convoquer le peuple, de lui lire les dépêches de Vespasien et de lui montrer que a Syrie entière l'avait acclamé. On ne connaissait pas Vitellius, tout le monde connaissait Vespasien comme un général et un administra- teur du plus grand mérite; la révolution fut donc terminée sur l'heure, et le parti de Vitellius fut bientôt abandonné par l'Egypte entière.

Nous avons dit, il n'y a qu'un instant, que l'hiver était venu pen- dant que cet événement s'accomplissait en Syrie et en Egypte; il n'y avait donc pas à songer à faire passer par mer une armée en Italie.

Mucianus fut placé à la tête de cette armée, qui dut prendre sur-le- champ la voie de terre, et se diriger vers l'Europe par la Cappadoce et la Phrygie.

La 3e légion, alors cantonnée en Mœsie, avait pour légat Antonius Primus; elle acclama Vespasien , et se souleva en proclamant la déchéance de Vitellius, qui envoya immédiatement contre elle Cecina Allienus, le vainqueur d'Othon. Les deux corps d'armée se. trouvèrent en présence sous les murs de Crémone; Cecina n'hésita pas à trahir la cause de Vitel lius et à passer sous les drapeaux de Vespasien.

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422 REVUE ARCHÉOLOGIQUE. La nuit suivante, les soldats de Cecina eurent honte de leur défec-

tion et voulurent mettre à mort leur général ; mais les tribuns parvinrent à les empêcher d'exécuter ce projet, et les décidèrent à se contenter d'envoyer à Yitellius Cecina chargé de chaînes.

Nous avons dit que les armées de Vespasien et de Yitellius étaient en présence. Antonius Primus, informé de ce qui se passait dans le camp des Vitelliens, fit prendre les armes à ses troupes et les attaqua sur l'heure. lis essayèrent de se réfugier dans Crémone; mais la roule leur fut coupée, et il s'en fit un effroyable massacre. Crémone elle-même fut livrée au pillage. Dans cetle terrible affaire, l'armée de Yitellius, composée de 30,200 hommes, fut anéantie. De son côté, Primus perdit 4,500 hommes, et le traître Cecina ful chargé de por- ter cette bonne nouvelle à Vespasien, qui le combla d'honneurs. A juger par ce fait seul, je crois avoir le droit de penser que Ves- pasien avait longtemps médité le projet d'usurper la couronne im- périale.

Le massacre de Crémone fut le premier acte du drame qui devait se terminer par la mort de Vitellius.

Flavius Sabinus, frère de Vespasien, était préfet de Rome. A rap- proche ďAntonius Primus, il réussit pendant la nuit à s'emparer du Capitole. Au petit jour, il y était rejoint par Domitien, son neveu, que suivait toute la jeune noblesse de la capitale. Vitellius, alors plus pressé de se venger de Sabinus que de s'opposer à la marche de Primus, lança ses bandes mercenaires sur le Capitole, qui fut en- levé et incendié. Le temple de Jupiter fut lui-même pillé et brûlé. Domitien parvint à s'échapper ; mais son oncle, pris les armes à la main, fut amené devant Vitellius, qui le fit mettre incontinent à mort.

Le lendemain même, Antonius Primus pénétrait dans Rome et combattait victorieusement sur trois points les défenseurs de Vitel- lius, qui furent mis en pièces. Vitellius enfin fut traîné hors du palais impérial par la populace exaspérée ; il était ivre à ne pouvoir se tenir debout, et il fut massacré après un règne de huit mois et cinq jours. Cela eut lieu, dit Josèplie, le 3 du mois d'apellaeus (27 octobre 79 de J.-C.); mais cette date est fausse. Cinquante mille cadavres jonchèrent à ce moment les carrefours et les rues de Rome.

Le lendemain Mucianus entrait à Rome, faisait cesser le massacre et attribuer la régence à Domitien jusqu'à l'arrivée de son père.

Vespasien, qui était arrivé vers la fin de l'hiver à Alexandrie, y apprit les événements que nous venons de raconter et se décida à passer immédiatement en Italie, après avoir chargé soa fils, Titus, d'aller entreprendre le siège de Jérusalem.

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CONTREMARQUES EMPREINTES SCR DES MONNAIES DE NÉRON. 423

Maintenant, récapitulons les dates qui nous sont nécessaires pour fixer l'époque à laquelle chacune des trois espèces de contremarque appliquées aux monnaies de cuivre de Néron frappées à Tripoli de Syrie ont pu être employées ; mais n'oublions pas de tenir compte des difficultés de toute nalurc et, par conséquent, des lenteurs for- cées qui ont dû retarder la venue des nouvelles et l'adoption des mesures monétaires dont il s'agit. Nous croyons être dans le vrai en admettant que six semaines, à tout le moins, se sont écoulées entre la date des événements accomplis à Rome et celle à laquelle ces évé- nements" purent être connus à Tripoli. Cela bien entendu, dressons le tableau qui peut nous guider dans nos recherches.

Il va sans dire que les dates que nous inscrivons à ce tableau sont celles que nous empruntons à l 'Art de vérifier les dates , et qui sont beaucoup plus dignes de confiance que toutes celles fournies par Joséphe ; car nous savons de reste ce que valent en général les chiffres énoncés par cet écrivain.

Néron se tue le 9 juin G8. Comme" il était monté sur le trône le 13 octobre 54, il a régné en réalité treize ans sept mois et vingt-sept jours.

Galba est proclamé par le sénat le 9 juin G8 et assassiné le 16 janvier 69, avec Pison Frugi, qu'il avait adopté et créé césar cinq jours auparavant. Galba a donc régné en réalité neuf mois et quatorze jours.

Othon est proclamé par le sénat et par le#peuple le 16 janvier 69. Il perd la bataille de Bedriac, entre Vérone et Crémone, près de

l'Oglio, le 14 avril 69. Le lendemain IS, il se tue en disant : « Il vaut mieux qu'un pé-

risse pour tous, que tous pour un. » Othon a donc régné trois mois ou quatre-vingt-dix jours. Yitellius est proclamé le 2 janvier 69 à Cologne. Le 25 mai, il traverse le champ de bataille de Bedriac, jonché de

cadavres en putréfaction, et il y prononce ces abominables paroles : « Un ennemi mort sent toujours bon. »

Il est massacre le 20 décembre 69. Enfin Yespasien est proclamé à Alexandrie le l*r juillet 69, et le

3 du même mois dans toute la Judée. Il l'est à Rome le jour même de la mort de Vilellius.

Vespasien meurt le 24 juin 79. Cela posé, qu'a-t-il dû se passer en Syrie, en prenant six semaines

pour la durée du temps nécessaire à l'arrivée des nouvelles de Rome ? Ou n'a pu savoir la mort de Néron à Tripoli que vers le 24 juillet

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424 REVUE ARCHÉOLOGIQUE. 68. Les dispositions adoptées pour amener la démonétisation des monnaies de Néron, par une contremarque au nom de Galba, n'ont pu être mises en vigueur au plus tôt que vers le commencement d'août 68. La nouvelle de la mort de Galba n'a pu arriver à Tripoli que vers le i" mars 69. Par conséquent, c'est vers le 10 mars 69 qu'a commencé l'emploi de la contremarque d'Olhon.

La nouvelle de la mort de celui-ci n'a pu parvenir à Tripoli que vers le 1" juin 69; c'est donc alors que l'emploi de la contremarque d'Olhon a cessé.

Du 1er juin au 1er juillet 69 ont été frappées, à Alexandrie, des monnaies au nom de Vitellius. Le 1er juillet 69 leur fabrication a dû cesser.

Comme Vespasien tenait la Syrie entière dans ses mains, et comme il n'a pas voulu reconnaître Vitellius, il n'a pu être fait usage à Tri- poli d'une contremarque au nom de Vitellius. Si par hasard il en avait été appliqué une de cette nature, elle n'aurait pu être em- ployée que pendant quinze ou vingt jours tout au plus; mais, je le répète avec une entière conviction, cela n'a pas eu lieu.

En résumé, la contremarque de Galba n'a pu êlre appliquée sur les monnaies tripolitaines de Néron qu'entre le 1er août 68 et le 1" mars 69, c'est-à-dire pendant huit mois au plus.

Celle d'Othon n'a pu être employée qu'entre le 10 mars et le 1er juin 69, c'est-à-dire pendant un peu plus de deux mois.

Enfin, celle de Vespasien n'a pu être en us3ge qu'à partir du 10 juillet 69 et pendant un temps qu'il n'est pas possible de déter- miner, puisqu'on ne connaît pas, que je sache, de monnaies tripoli- taines de Vespasien, autres que les pièces de Néron contremarquées.

F. de Saulcy.

Paris, le 16 avril 1869.

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