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NOUVEAUTI S I PIDI MIOLOGIQUE, DIAGNOSTIQUE ET THI RAPEUTIQUE EN MYCOLOGIE MI DICALE Marie-Elisabeth Bougnoux a L es infections fongiques invasives,quelle que soit leur origine, endo- gene ou lice & renvironnement, sont une cause importante de mor- bidite et de mortalit6 chez les patients hospitalises. En effet, les don- nees de surveillance les plus recentes montrent que les levures du genre Candida constituent le quatrieme groupe de micro-organismes isoles des hemocultures chez les patients hospitalises [9]. Pneumocystisjiroveci et Aspergillus fumigatus sont les deux prin- cipales especes fongiques responsables d'infections respiratoires chez les patients immunodeprimes (ID). En I'absence de prophy- laxie specifique, les incidences respectives de la pneumocystose et de I'aspergillose pulmonaires sont comprises entre 5-16 °,/oet 15-20 o/0 chez les patients ayant eu une greffe allogenique de cel- lules hematopo'i'etiques et entre 0,6-40 % et 1,5-1 8 % chez les patients au decours d'une greffe d'organe [10, 11, 12, 13]. L'importance et la gravite de ces infections fongiques (mortalite attri- buable comprise entre 40 et 70 %) ont justifie rutilisation syst~- matique d'une chimioprophylaxie centre P. jiroveci et la mise en place de mesures environnementales de prevention du risque aspergillaire [2, 3]. Ces mesures preventives ont permis une dimi- nution importante de rincidence de ces deux infections, notamment dans les six premiers mois suivant la greffe. Cependant, du fait de I'intensification des traitements immunosuppresseurs au cours de la GVH, de I'augmentation du taux de survie & court terme des patients et des problemes de tolerance associes & I'utilisation de chimioprophylaxies anti-infectieuses, I'epidemiologie et la chrono- Iogie des infections respiratoires fongiques chez les patients ID se sont modifiees. Les infections fongiques respiratoires sont desor- mais d'apparitions plus tardives et dues & des especes fongiques dites emergentes, telles que les infections dues aux champignons de la famille des Zygomycetes, ou & des especes plus resistantes aux antifongiques et aux anti-Pneumocystis disponibles [7]. Dans ce contexte, la mise en place recente de systemes specifiques de surveillance des infections fongiques, par I'intermediaire d'obser- vatoires tant nationaux que regionaux, permettra une meilleure com- prehension de I'evolution de leur epidemiologie et, in fine, de deve- lopper des strategies de prevention adaptees & leur evolution dans les differents groupes de patients & risque. Les progres en mati~re de diagnostic des infections fongiques repo- sent essentiellement sur I'amelioration des systemes d'hemocul- tures, qui ont permis de reduire le delai de detection de positivite des cultures [8] au cours des candidemies, sur le developpement de methodes d'identification mol~culaires des champignons [1,4] et sur la mise au point de tests diagnostiques appliques & des pre- levements non invasifs, comme, par exemple, la detection d'ADN de P. jiroveci par amplification genique sur le liquide de ringage de la bouche pour le diagnostic de pneumocystose pulmonaire [5, 6]. aUnite postulantede biologieet pathogenicit6 fongiques Institut Pasteur 25-28, rue du Docteur-Roux 75724 Pariscedex 15 © Elsevier SAS. Supplement au N ° 369, Revue Frangaise des Laboratoires, janvier 2005 35

Nouveautés épidémiologique, diagnostique et thérapeutique en mycologie médicale

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Page 1: Nouveautés épidémiologique, diagnostique et thérapeutique en mycologie médicale

NOUVEAUTI S I PIDI MIOLOGIQUE, DIAGNOSTIQUE ET THI RAPEUTIQUE EN MYCOLOGIE MI DICALE

Marie-Elisabeth Bougnoux a

L es infections fongiques invasives, quelle que soit leur origine, endo- gene ou lice & renvironnement, sont une cause importante de mor-

bidite et de mortalit6 chez les patients hospitalises. En effet, les don- nees de surveillance les plus recentes montrent que les levures du genre Candida constituent le quatrieme groupe de micro-organismes isoles des hemocultures chez les patients hospitalises [9]. Pneumocystisjiroveci et Aspergillus fumigatus sont les deux prin- cipales especes fongiques responsables d'infections respiratoires chez les patients immunodeprimes (ID). En I'absence de prophy- laxie specifique, les incidences respectives de la pneumocystose et de I'aspergillose pulmonaires sont comprises entre 5-16 °,/o et 15-20 o/0 chez les patients ayant eu une greffe allogenique de cel- lules hematopo'i'etiques et entre 0,6-40 % et 1,5-1 8 % chez les patients au decours d'une greffe d'organe [10, 11, 12, 13]. L'importance et la gravite de ces infections fongiques (mortalite attri- buable comprise entre 40 et 70 %) ont justifie rutilisation syst~- matique d'une chimioprophylaxie centre P. jiroveci et la mise en place de mesures environnementales de prevention du risque aspergillaire [2, 3]. Ces mesures preventives ont permis une dimi- nution importante de rincidence de ces deux infections, notamment dans les six premiers mois suivant la greffe. Cependant, du fait de I'intensification des traitements immunosuppresseurs au cours de la GVH, de I'augmentation du taux de survie & court terme des

patients et des problemes de tolerance associes & I'utilisation de chimioprophylaxies anti-infectieuses, I'epidemiologie et la chrono- Iogie des infections respiratoires fongiques chez les patients ID se sont modifiees. Les infections fongiques respiratoires sont desor- mais d'apparitions plus tardives et dues & des especes fongiques dites emergentes, telles que les infections dues aux champignons de la famille des Zygomycetes, ou & des especes plus resistantes aux antifongiques et aux anti-Pneumocystis disponibles [7]. Dans ce contexte, la mise en place recente de systemes specifiques de surveillance des infections fongiques, par I'intermediaire d'obser- vatoires tant nationaux que regionaux, permettra une meilleure com- prehension de I'evolution de leur epidemiologie et, in fine, de deve- lopper des strategies de prevention adaptees & leur evolution dans les differents groupes de patients & risque. Les progres en mati~re de diagnostic des infections fongiques repo- sent essentiellement sur I'amelioration des systemes d'hemocul- tures, qui ont permis de reduire le delai de detection de positivite des cultures [8] au cours des candidemies, sur le developpement de methodes d'identification mol~culaires des champignons [1,4] et sur la mise au point de tests diagnostiques appliques & des pre- levements non invasifs, comme, par exemple, la detection d'ADN de P. jiroveci par amplification genique sur le liquide de ringage de la bouche pour le diagnostic de pneumocystose pulmonaire [5, 6].

a Unite postulante de biologie et pathogenicit6 fongiques Institut Pasteur 25-28, rue du Docteur-Roux 75724 Paris cedex 15

© Elsevier SAS.

Supplement au N ° 369, Revue Frangaise des Laboratoires, janvier 2005 35