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UN AN APRÈS CHARLIE : BESOIN DE LIBERTÉ, D'ÉGALITÉ, DE FRATERNITÉ. PLUS QUE JAMAIS. Jeudi 7 janvier 2016 - N° 2132 - Hebdomadaire - 15, rue Furtado - 33800 BORDEAUX - Prix : 0,80 euro

Nouvelles N° 2132

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Nouvelles N° 2132 du 7 janv.

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UN AN APRÈS CHARLIE :

BESOIN DE LIBERTÉ, D'ÉGALITÉ, DE FRATERNITÉ. PLUS QUE JAMAIS.

Jeudi 7 janvier 2016 - N° 2132 - Hebdomadaire - 15, rue Furtado - 33800 BORDEAUX - Prix : 0,80 euro

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2 • Les Nouvelles 7 janvier 2016

ACTUALITÉ

Depuis le premier janvier Christine Texier a quitté ses responsabilités de rédactrice en chef des Nouvelles, elle est remplacée par Christelle Danglot. C’est une page qui se tourne. Celle d’une camarade qui a commencé comme maquettiste dans notre journal à la fin des années « 80 », pour devenir en 2006 rédactrice en chef de notre hebdomadaire. Première femme rédactrice, il y a apporté sa touche per-sonnelle, et se consacra entièrement chaque semaine à notre hebdo. Au contact de Christelle, elle a su détecter ses qualités, et proposé que celle-ci la remplace.

C’est un beau passage de relais.

L’équipe des Nouvelles lui souhaite une bonne continuation, tout en sachant qu’elle ne sera jamais bien loin.

Fred Mellier, directeur des Nouvelles

VOTRE HEBDOMADAIRE

Du changement à la rédaction

Alors que La Poste testait une tournée du dimanche sous prétexte de colis de Noël à livrer, une quarantaine de militants CGT se sont rassemblés devant l’agence colis de La Poste à Bruges, le 20 décembre 2015, pour bloquer la distribution. « Le dimanche doit rester un temps de repos pas de travail » déclarait le syndicat des activités postales et de télécommunications de la Gironde qui appelait les salariés à ne pas être « complices d’un recul social majeur ». « Contrairement à ce que peut prétendre le patronat, ce sont les bas salaires et la précarité qui poussent les collègues à venir travailler ce jour-là. Le volontariat a bon dos ! »

Pour la CGT, le dimanche doit rester un élément de cohésion sociale permettant des moments familiaux, d’accéder aux loisirs, au sport, à la culture…

LA POSTE

Non au travail du dimanche !

FONCTION PUBLIQUE

Journée d’action du 26 janvier 2016Dans un courrier adressé à Marylise Lebranchu, ministre de la Fonction publique, le lundi 4 janvier 2016, Baptiste Talbot, secrétaire général de la fédération des ser-vices publics à la CGT, annonce une journée d’action à l’appel des organisations syndicales CGT, FO et SOLIDAIRES, le 26 janvier, « compte-tenu des orientations actuelles du gouvernement ».

Dans un mois doivent s’ouvrir des négociations salariales dans la Fonction publique, après plus de cinq ans de gel de la valeur du point d’indice et l’échec des négociations portant sur les Parcours professionnels carrières et rémunérations.

Les organisations syndicales demandent une augmentation significative de la valeur du point d’indice, prenant en compte l’inflation subie depuis plusieurs années ; des mesures générales permettant de compenser les pertes de pouvoir d’achat ; le développement de l’emploi public statutaire par des créations nettes, dans les nombreux secteurs qui en ont besoin ; les moyens financiers à la hauteur des besoins de service public et la défense d’un service public de proximité garant de la cohésion sociale.

Dans le cadre de cet appel unitaire, la Fédération CGT des Services publics dépose un préavis de grève de 0 à 24 h pour la journée du mardi 26 janvier 2016, préavis couvrant l’ensemble des personnels de son champ de syndicalisation.

En plus de revendications unitaires, la Cgt demande, entre autre, l’arrêt de la réforme territoriale et la défense et le développement des garanties statutaires.

AQUITAINE-LIMOUSIN-POITOU-CHARENTES

Nos engagements en 2016 pour la grande régionCommuniqué de presse d’Olivier Dartigolles, porte-parole du PCF, le lundi 4 janvier 2016.

COMPLÉMENTAIRES SANTÉ

Tous couverts désormais ? Pas vraiment

Si, comme l’a indiqué François Hollande lors de ses vœux, nous sommes bel et bien dans un « état d’urgence économique et social » alors, ce dont notre pays a besoin, ce n’est pas d’un « large » rassem-blement avec la droite mais d’une politique de gauche et de mesures d’urgence. Cette question sera au cœur de l’action des communistes en 2016. Osons la refondation de la gauche avec toutes celles et tous ceux qui refusent, au nom d’un climat de peur, à faire le deuil de valeurs progressistes et de com-bats pour la justice, la solidarité et la paix.

Avec plus de 100 000 suffrages lors du premier tour des élections régio-nales le 7 décembre dernier dans la nouvelle grande région Aquitaine/limousin/Poitou-Charentes, le mode de scrutin prive le front de gauche d’une légitime représentation dans la nouvelle assemblée régionale installée lundi 4 janvier à Bordeaux. Cela n’est pas une bonne chose pour la nouvelle collectivité et pour les populations. Alors que notre société va mal, que la crise démocratique et politique s’aggrave et que l’avenir de nos terri-toires est menacé par l’acharnement d’une politique gouvernementale et européenne injuste et inefficace, le pluralisme politique est plus que jamais nécessaire.

Le temps électoral est un moment de l’engagement politique.

Nous allons poursuivre, sous d’autres formes, le travail engagé au cours des derniers mois pour faire connaître et enrichir nos propositions et nos solutions pour la grande région.

Nous allons prolonger le difficile travail engagé lors de la précédente mandature par nos élus.

Comment ?

D’abord par une veille perma-nente sur les décisions prises par la nouvelle collectivité régionale. Comme nous l’avons indiqué lors de la campagne, nous serons extrême-ment attentifs au risque de ruptures des politiques publiques par une aggravation des inégalités territo-riales. Nous proposerons, à l’échelle de chaque département, la mise en place d’un observatoire citoyen – composé d’acteurs de la vie locale, de militantes et militants associatifs, de syndicalistes, d’élus locaux – pour suivre, au plus près des territoires, les effets d’une réforme territoriale privilégiant la concurrence aux coopérations, la concentration des richesses aux partages. Le maintien et le développement des services publics locaux feront l’objet d’une campagne de proximité.

L’emploi reste la préoccupation

première. La politique régionale d’aides aux entreprises ne peut plus se passer de l’expertise et des propositions du monde du travail et des représentants des salariés. Là encore, osons la démocratie et la transparence. Seuls des comités de suivis et d’évaluation, à l’échelle des bassins d’emplois, peuvent permettre d’y voir plus clair sur l’utilisation réelle des fonds publics par les entre-prises. Nous ferons des propositions précises au nouvel exécutif régional et nous sommes prêts à y apporter notre contribution. L’interpellation des banques est indispensable. Elles doivent assumer leur responsabilité territoriale.

Une question va être posée plus fortement au cours de la prochaine période : quel avenir pour la jeu-nesse ? Alors que F. Hollande s’était engagé à en faire la grande priorité de son quinquennat, rien n’a été réglé. Les récentes annonces sur l’apprentis-sage et le service civique ne sont pas au niveau des enjeux. Nous appelons à une conférence régionale ouverte à la société civile, aux organisations de la jeunesse, pour véritablement avancer sur des dispositifs opéra-tionnels et garantissant l’autonomie des jeunes et leur insertion sociale et professionnelle, en utilisant au mieux et d’abord les services publics natio-naux de formation professionnelle et d’orientation.

Quelque 3 300 000 Français n’ont pas de complémentaire santé. La mise en œuvre de l’accord national interprofessionnel qui oblige toutes les entreprises de souscrire, avant le 1er janvier 2016, un contrat collectif d’assurance complémentaire santé pour leurs salariés avec un financement partagé entre l’employeur et les travailleurs, laisserait la grande majorité d’entre eux à découvert, selon une étude de l’Institut de recherche et de documentation en économie de la santé.

La réforme de l’ANI prétend ré-pondre à l’objectif fixé par François Hollande en 2012 : « Une complé-mentaire santé pour tous ». Complé-mentaire, on le sait, devenue indis-pensable pour se soigner, au point que, selon des études, le risque de renoncer à des soins est multiplié par deux pour les personnes qui en sont démunies. En 2012, 5 % de la popu-lation, soit environ 3,3 millions de personnes, n’étaient pas couverts. Mais l’ANI, au-delà de son vice profond, sa nature inégalitaire, ne devrait guère changer la donne. Sur les 4 millions de salariés employés dans une entreprise qui n’avaient pas

souscrit de contrat collectif, seuls 400 000 n’étaient pas couverts en individuel. Surtout, outre les agents de la fonction publique, la réforme « laisse de côté l’ensemble des gens qui sont hors du monde du travail et qui sont de plus en plus nombreux : retraités, chômeurs de longue durée, jeunes précaires, souligne-t-on à la Mutualité. Or, c’est principalement dans cette population qu’on trouve les gens qui renoncent à financer une complémentaire ». Le premier motif étant le manque de moyens finan-ciers. Un actif devenant retraité voit en moyenne sa cotisation à la mutuelle tripler…

80 % RESTERAIENT NON COUVERTS

L’Irdes, Institut de recherche et de documentation en économie de la santé, s’est livré à une simulation pour évaluer les effets du dispositif de l’ANI sur la non-couverture par une complémentaire. Résultat : « Parmi l’ensemble des individus ne bénéficiant d’aucune complémentaire santé en 2012, 80 % resteraient non couverts après la généralisation. » Et « des inégalités sociales perdu-reraient » : « En effet, après l’ANI, les plus de 70 ans, les inactifs, les

individus en mauvaise santé » et les personnes à faible revenu « reste-raient le plus souvent concernés par la non-couverture », précise l’Irdes. La désaffiliation pourrait même s’accroître du fait de la hausse des tarifs des contrats individuels que la mise en œuvre de l’ANI devrait engendrer.

Pour la Fédération des mutuelles de France (FMF), c’est clair : « L’amé-lioration réelle de la couverture des salariés et de l’ensemble des Français ne peut s’envisager qu’en renforçant le régime obligatoire de Sécurité sociale, solidaire et universel, et en cessant l’ éparpillement de l’argent public dans des dispositifs toujours plus segmentants. » Pas moins de huit types d’aide à l’acquisition d’une complémentaire (CMU-C, ACS, ANI, etc.) existent à ce jour et un neuvième, pour les seuls retraités, est en préparation. La FMF préco-nise un système d’aide individuelle unique, dégressif selon le revenu, et non lié au statut. Qui pourrait être financé avec la manne d’argent public aujourd’hui versée aux entre-prises pour les contrats collectifs.

Yves Housson, l’Huminité, mardi 5 janvier, 2016

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Les Nouvelles 7 janvier 2016 • 3

EditorialACTUALITÉ

Résolument, meilleurs vœux !

Rarement une nouvelle année aura autant été porteuse d’angoisse, voire de peur.

Jamais, depuis de très longues années, la société n’a été aussi violente.

Violence de perdre son emploi ou de ne pas en trouver un, violence de ne pas pouvoir boucler la fin du mois, violence de la répression sociale et patronale, violence de ne pas pouvoir loger sa famille décemment, etc.

À cette violence est venue s’ajouter celle, aveugle, des fous de dieu qui ont frappé par deux fois en cette année 2015. Attaque contre la liberté de penser, de croire ou de ne pas croire, de blasphémer, de caricaturer et de rigoler. Attaque contre l’égalité et la fraternité lorsque de nouveau le simple fait d’être juif justifie l’assassinat. Puis une nouvelle attaque insensée, inimaginable contre la jeunesse, la culture, la fête, la rencontre, la diversité… une attaque contre la vie.

Notre peuple a cherché dans le rassemblement la force de surmonter le choc, puis submergé par la culture instrumentalisée de la peur, pour des raisons politiciennes, par les médias et le pouvoir, les solutions de replis et de rejet de l’autre ont fait leur chemin.

Ce choc et cette violence sont renforcés par la dérive idéologique du président de la Répu-blique et du Premier ministre qui veulent désor-mais constitutionnaliser le régime d’exception d’état d’urgence et les idées anciennes de l’extrême droite et de la droite extrême.

La logique de la recomposition politique à marche forcée est évidente, elle menace l’existence même de la gauche. C’est aussi la volonté de dresser un écran de fumée pour continuer à détruire des droits sociaux, dont le Code du travail. Les militants communistes, comme leur peuple, sont touchés et en re-cherche de solutions, d’autant plus que l’outil Front de gauche a failli…

Paradoxalement, cette période de danger est porteuse de renouveau pour le camp de l’alter-native progressiste. En effet, de très nombreux citoyens, militants, sont en recherche, comme nous, de réponses politiques rassembleuses pour refonder une espérance. Ce potentiel alternatif dépasse très largement le périmètre du Front de gauche. Les communistes devront mettre toute leur intelligence et leur force dans ce travail de rassemblement. Fidèles à leur histoire bientôt centenaire, ils montreront alors l’utilité et la modernité du Parti communiste français.

C’est pourquoi, résolument, je nous souhaite une très bonne année 2016 !

Stéphane DenoyelleMembre du Conseil

Départemental PCF 33 Maire de Saint-Pierre-d’Aurillac

CONSTITUTION

Les espoirs déchus de François Hollande après ses vœuxAvec l’article de Sébastien Crépel, dans l’Humanité du lundi 4 janvier 2016

APPEL UNITAIRE

« Sortir de l’état d’urgence »

Lors de son allocution télévisée du 31 décembre, le président de la Ré-publique a échoué à convaincre les adversaires de l’inscription dans la Constitution de la déchéance de nationalité élargie à tous les Français binationaux. À gauche comme à droite, les condamna-tions se multiplient.

Ils sont quatorze parlementaires PS seulement sur 397 (287 députés et 110 sénateurs) à avoir manifesté leur soutien au projet présidentiel d’inscrire dans la Constitution la possibilité de déchoir de leur natio-nalité les Français binationaux. Dans une tribune publiée sur le jdd.fr, cette poignée de fidèles (…) estime le temps « venu de sortir du silence afin de soutenir le président et défendre les principes de la patrie des droits de l’homme » (…) Tout en reconnaissant que la proposition du chef de l’État « suscite débats, polémiques, voire invectives ».

LE PRÉSIDENT S’ENTÊTE

Dans son allocution télévisée à l’occasion de ses vœux aux Français à la veille du Nouvel An, le chef de l’État n’a guère pu ignorer, en effet, le tir de barrage venu de tous les rangs contre sa proposition. (…) Mais si le président s’entête, il marche sur des œufs. En témoigne la surprenante disparition dans son discours de toute référence aux binationaux, pourtant seuls visés par le projet, quand il avait lourdement insisté sur le sujet devant le Congrès du Parlement, le 16 novembre. (…) Un silence qui signe le malaise à la tête de l’État devant l’ampleur de la contes-

tation d’une mesure vue comme un reniement des fondamentaux de la gauche, voire de la République. François Hollande a eu beau tenter de se hisser au-dessus de la mêlée en déclarant que « le débat est légitime » et qu’il « le respecte », le président n’a guère convaincu, même dans ses propres rangs. Dimanche 3 janvier, de nouvelles voix influentes chez les socialistes se sont élevées pour réclamer l’abandon de la déchéance de nationalité. Sur Europe 1, l’ancien ministre de la Culture et de l’Éduca-tion nationale, Jack Lang, a fait savoir à son tour qu’il était « personnellement contre cette idée de déchéance de natio-nalité, surtout si une discrimination est établie entre binationaux et les autres ». Une opinion identique à celle affir-mée sur la même radio par Jacques Attali, l’ancien conseiller de François Mitterrand, pour qui la déchéance « est une mauvaise idée ».

UNE MESURE TOTALEMENT INEFFICACE

Ces prises de position s’ajoutent à la liste toujours plus longue des personnalités de gauche opposées à cette réforme, venues aussi bien du PS, d’EELV et du Front de gauche. À l’instar du secrétaire national du PCF, Pierre Laurent, qui a réagi à l’allocution du chef de l’État en jugeant que « le maintien, malgré les alertes de la société civile, de l’extension de la déchéance de nationalité aux binationaux, (est) totalement contraire au discours de François Hollande sur la patrie, sur l’unité des Français ». Mais aussi de dirigeants de droite comme Alain Juppé et Nathalie Kosciusko-Morizet, décidés à ne pas se laisser piéger par la reprise d’une

proposition commune au FN et à Nicolas Sarkozy, auquel ils s’opposent dans leur parti.

Pour ces adversaires de la déchéance, celle-ci ne sera d’aucune efficacité, étant entendu que les criminels visés n’ont que faire de leur appartenance à la nation française, voire de leur vie tout simplement. (…) Le premier mi-nistre lui-même a d’ailleurs concédé ce point à ses adversaires. « L’effica-cité, ici, (…) n’est pas l’enjeu premier », a-t-il reconnu le 23 décembre. « C’est une mesure (…) à caractère haute-ment symbolique. » Mais – et c’est là le second principal argument des opposants – cette « symbolique » revendiquée est désastreuse, car elle stigmatise une partie des Français en raison de leurs origines. Olivier Faure, député PS qui est tout sauf un « frondeur », fustige un projet qui instaure une « nationalité à deux vitesses ». « La déchéance établit un lien causal implicite entre terrorisme et immigration, » expliquait-il dans les Échos le 31 décembre. « Le terrorisme n’a pas de nationalité. Il les a toutes. »

Comment l’exécutif compte-t-il réunir la majorité des 3/5e nécessaire pour réviser la Constitution au Congrès ? Certains, y compris parmi les détracteurs de la déchéance des binationaux, caressent l’idée d’une mesure d’exception devant laquelle tous les Français seraient « égaux ». Soit la possibilité de déchoir tout Français, binational ou non, à l’ins-tar des propositions de NKM, de Jean-Pierre Chevènement ou de l’écologiste Jean-Vincent Placé… quitte à dénoncer les engagements internationaux de la France de ne pas créer d’apatrides ! Soit lui substituer une peine d’« indignité nationale », calquée sur celle inf ligée à cer-tains collaborateurs à la Libération, comme l’ont suggéré Anne Hidalgo et le socialiste Jean-Pierre Mignard… mais dont on ne voit guère la plus grande « efficacité » dans la lutte contre le terrorisme.

« Avec le mariage pour tous, on avait une France qui aime. » a réagi Olivier Dartigolles, porte parole du PCF, « Avec la déchéance pour tous, on a un pays qui ne s’aime plus mais qui fera le bonheur des terroristes car c’est très justement leur objectif ultime. Nous faire vaciller sur nos valeurs essentielles, consubstantielles de la République et de la déclaration des droits de l’Homme et du citoyen. Cette surenchère doit cesser. »

Après l’appel « Nous ne céderons pas ! » (www.nousnecederonspas.org), une centaine d’organisations ont rendu public le texte « Sortir de l’état d’urgence ».

« En réaction à l’horreur des atten-

tats, l’ état d’urgence a été décrété par le gouvernement, puis aggravé et prolongé pour une durée de trois mois. Nos organisations ont immédiatement exprimé leurs craintes vis-à-vis de ce régime d’exception ; ces craintes sont aujourd’hui confirmées par l’ampleur

des atteintes aux libertés constatées depuis quelques semaines. Nous assis-tons à un véritable détournement de l’ état d’urgence qui cible également des personnes sans aucun lien avec des risques d’attentat. Ces abus doivent cesser. »

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4 • Les Nouvelles 7 janvier 2016

CHARLIE, UN AN APRÈS

PIERRE SAUVEY

« Oui, plus que jamais, il faut redonner l’espoir. La République doit être là pour chacun »

HOMMAGE

Portrait d’Ahmed Merabet, par C215

Ce numéro des Nouvelles est imprimé le 7 janvier, une date qui résonne encore douloureusement, un an après les attentats à Charlie Hebdo, à Montrouge, à l’Hyper Casher. Ces événements ont amené Pierre Sauvey, pour le club de la presse, à prendre la parole, 4 jours après, sur une place des Quin-conces noire de monde. Avec lui, comme nous l’avons fait lors de la fête de l’Huma, nous poursuivons le débat sur les valeurs de la Répu-blique, la liberté d’expression et la liberté de la presse.

Le 11 janvier 2015 à Bordeaux, devant la foule, tu avais dis : « Nous avons tous la respon-sabilité, et particulièrement les élus et l’État, de faire vivre vraiment, concrètement, et pas seulement par des incantations, les valeurs de la République. Il faut redonner l’espoir. La Répu-blique doit être là pour chacun et ne laisser personne aux mains des extrémistes ». Un an après où en sommes-nous ?Pierre Sauvey. Cela reste malheu-reusement plus vrai que jamais. Les attentats de 2015 vont bien au-delà de la remise en cause de la liberté d’expression ou de la liberté de la presse, premières visées le 7 janvier. Il y a eu aussi Montrouge, l’Hyper Cacher, l’horreur absolue du 13 novembre, et tant de pays frappés … Daesh a déclaré la guerre à tout ce qui est différent de lui, partout dans le monde. En France, il tente d’exa-cerber la division et la haine. Il réussit en partie : les actes islamophobes ont été multipliés par 3 en 2015 (bilan de la Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme et l’antisémi-tisme) et le Front national a obtenu 6,5 millions de voix aux élections régionales.

Or, d’où viennent les terroristes de Daesh ? Comme l’a montré le cher-cheur Pierre Beckouche, « ces djiha-distes viennent de communes pauvres et surtout de zones urbaines sensibles » (1). Et où se trouvent les gros bataillons d’électeurs du Front national ? Dans les communes pauvres, les zones urbaines sensibles ou les zones rurales qui se sentent abandonnées !

Alors oui, plus que jamais, « il faut redonner l’espoir. La République doit être là pour chacun et ne laisser personne aux mains des extrémistes ». Heureusement, il semble que l’on commence à en prendre le chemin. La formation de 500 000 deman-deurs d’emplois supplémentaires, le développement de l’apprentissage, les grands travaux pour la crois-sance verte annoncés par François Hollande dans ses vœux, s’il ne s’agit pas de promesses creuses, vont dans le bon sens. Dans la métropole bordelaise et en Aquitaine il y a des actions et des projets pour conforter la cohésion sociale et la présence des services publics. Mais il faut aller plus loin, il faut remettre de l’humain, de la solidarité, de la fraternité, de la liberté, de l’égalité, de la laïcité et de la tolérance ! Il faut penser et agir pour « l’humain d’abord » ! L’aban-don du soutien aux associations par certaines municipalités ou certains conseils départementaux va de ce point de vue là dans le mauvais sens.

Apparemment, tu as participé à plusieurs initiatives et débats sur la liberté de la presse depuis, qu’en retiens-tu ? P.S. Il y a eu une vraie demande pour cela après le 7 janvier. À la fois au niveau des collèges et des lycées, mais aussi dans des associations d’éducation populaire, des syndicats ou des foyers de jeunes travailleurs… Il était important d’expliquer que la liberté d’expression et la liberté de la presse font bien partie des fonde-ments de notre pays, depuis l’article 11 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789, que le droit au blasphème existe en France, et qu’il y a séparation du politique et du religieux, de l’Etat et de la religion, depuis la loi du 9 décembre 1905 ! Il n’est ni interdit d’avoir une religion quelle qu’elle soit, ni de ne pas en avoir, et chacun doit être respecté dans sa croyance ou dans sa non croyance, mais cela reste du domaine personnel ! Il faut aussi expliquer que l’on ne peut pas tout dire au nom de la liberté d’expres-sion : par exemple le négationnisme, l’incitation à la discrimination, la haine ou la violence raciale sont des délits. C’est pour cela notamment que Charlie et Dieudonné, ce n’est

pas la même chose ! Cela ne va pas forcément de soi pour tout le monde, et il est important de continuer à le dire.

Mis en place en réaction aux attentats du 13 novembre, l’État d’urgence est apparu, notamment pour le mouve-ment citoyen en marge de la COP 21 comme un outil de répression. Son inscription dans la Constitution ne repré-sente-t-elle pas un réel danger pour la liberté d’expression ?P.S. Plusieurs syndicats de journa-listes s’opposent à l’état d’urgence et son inscription dans la Constitution. Son utilisation lors de la COP 21 a effectivement montré les dangers potentiels qu’il représente. Ce pour-rait être une arme très inquiétante contre la liberté d’expression si un parti non démocratique accédait au pouvoir dans le futur…

Sur la liberté de la presse com-ment vois-tu l’avenir ?P.S. D’une grande complexité ! La loi sur le renseignement a créé de l’in-quiétude chez les journalistes. Et la France n’était que 38e au classement mondial 2015 de la liberté de la presse établi par Reporters sans Frontières. Elle devrait dégringoler en prenant en compte l’attentat contre Charlie-Hebdo. Mais, alors que l’information circule de plus en plus facilement grâce au numérique, le danger vient aussi pour moi de la concentration de plus en plus importante des groupes de presse, de la baisse du nombre de journalistes dans les rédactions et de leur précarisation de plus en plus importante. Si les citoyens veulent conserver une information fiable et indépendante, il faut qu’ils acceptent de la payer.

Propos reccueillis par Christelle Danglot

1 - « Terroristes français : une géographie sociale accablante » par Pierre Beckouche, Professeur à l’université Paris I Panthéon Sorbonne, Libération du 28 décembre 2015.

Sur l’initiative de ses collègues du commissariat du XIe, de sa famille et de ses amis, l’artiste urbain C215 a réalisé cet hommage à Ahmed, au 62 bd Richard Lenoir, à deux mètres de l’endroit où le policier a été lâchement abattu, le 7 janvier 2015.

« Au delà de l’ émotion d’avoir peint cette œuvre devant sa maman, son frère et ses sœurs éplorés, commente l’artiste, vous comprendrez tous le message et le sens symbolique de cette œuvre porteuse de valeurs républicaines. Vive la mixité, vive la laïcité, vive la tolérance. »

Dessin de l’affiche du film « L’Humour à mort » de Daniel et Emmanuel Leconte, par Coco, dessinatrice de Charlie Hebdo et l’Humanité.

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Les Nouvelles 7 janvier 2016 • 5

LIBERTÉ DE LA PRESSE

DANS LE MONDE

110 journalistes ont été assassinés en 2015TVA PRESSE EN LIGNE

Le mauvais coup du gouvernementFrançois Bonnet pour Mediapart

EN TURQUIE

Depuis sa prison, le message de Can Dündar

DÉBAT

Les Agoras de l’Humanité

Au terme de l’année 2015, le bilan est accablant : 110 journalistes ont été assassinés en raison de leur métier ou sont décédés de morts suspectes. Ils sont au moins 787 à avoir été tués dans l’exercice de leur profession depuis 2005. Établi chaque année depuis 20 ans, le bilan annuel des exactions contre les journalistes constitue un des piliers essentiels du travail de RSF, aux côtés de celles et ceux qui risquent leur vie pour nous informer.

Le nombre très élevé de reporters tués au cours de l’année, qui porte à 787 le total des journalistes tués dans l’exercice ou en raison de leurs fonctions depuis 2005, est imputable à une violence de plus en plus délibérée contre les jour-nalistes. Il révèle aussi un échec des initiatives en faveur de leur protection. Le secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-moon affirmait dans son rapport annuel sur la sécurité des journalistes et la question de l’impunité le 6 août 2015 : « Je suis profondément inquiet par l’ incapacité à réduire la fréquence et l’ampleur des violences ciblées aux-quelles sont confrontés les journalistes et l’ impunité presque absolue pour de tels crimes. »Des groupes non-étatiques per-pètrent des exactions ciblées tandis que de trop nombreux États ne se conforment pas aux obligations assi-gnées par le droit international. En 2014, deux tiers des reporters tués dans le monde l’avaient été en zones de conflits. En 2015, la proportion s’est complètement inversée : deux tiers des journalistes tués l’ont été « en temps de paix ».

Même dans les capitales éloignées des conflits armés, les journalistes peuvent être frappés, comme ce fut le cas le 7 janvier avec l’attaque de Charlie Hebdo à Paris. Le 8 octobre, le directeur de Charlie Hebdo, Riss, déclarait : « Nous n’avons quasiment jamais envoyé de journalistes en zone de guerre (…). Le 7 janvier, c’est la guerre qui est venue à nous ». Homi-cides liés ou non à leur profession ? Les motifs de la mort de 43 repor-ters au cours de l’année demeurent indéterminés, en raison du manque d’enquêtes officielles impartiales et approfondies, du fait de la mauvaise volonté des États ou de la difficulté dans des régions instables ou de non droit. Ces « motifs indéterminés » reflètent le problème de l’impunité des crimes commis contre les jour-nalistes dans de nombreuses régions du monde (Amérique latine, Asie-

Pacifique, Moyen-Orient et Afrique sub-saharienne).L’attaque contre Charlie Hebdo fait de la France le troisième pays le plus meurtrier pour les journalistes dans l’exercice de leurs fonctions en 2015. Une tragédie inédite : jamais un pays occidental n’avait connu une telle hécatombe. Depuis le mois de janvier, les journalistes ou collabo-rateurs de Charlie Hebdo vivent sous haute protection. Certains se voient encore aujourd’hui contraints de changer régulièrement de logement. La journaliste chargée des questions de religion et d’islamisme expliquait en mai dernier qu’elle vivait tantôt à l’hôtel tantôt chez des proches. Elle insistait sur la difficulté d’exercer son métier avec de telles menaces, et notamment sur l’impossibilité de faire des reportages sous escorte policière.

Par 40 voix contre 22, les députés ont rejeté, le 15 décembre, deux amendements, l’un du socialiste Christian Paul, l’autre de l’éco-logiste Eva Sas, qui visaient à corriger la situation aberrante et discriminatoire que subit depuis des années la presse en ligne. Cette dernière a en effet été taxée à 19,6 % puis 20 % jusqu’en février 2014, quand la presse imprimée bénéficiait d’une TVA à taux réduit de 2,1 %. Cette distorsion manifeste de concurrence, dénon-cée par Mediapart, le site Arrêt sur Images et par le syndicat profes-sionnel de la presse indépendante d’information en ligne (SPIIL, 150 titres adhérents), a lourdement pesé sur le développement de sites d’information indépendants.

Elle a créé de graves contentieux avec l’administration fiscale. Le fisc a en effet infligé de très lourds redresse-ments assortis de pénalités à plusieurs sites qui appliquaient cette TVA à taux réduit : 4,1 millions d’euros sont exigés à Mediapart, 540 000 euros à Arrêt sur images, environ 500 000 euros au groupe Indigo Publications.C’est pourtant par la mobilisation de ces sites indépendants et du SPIIL que la loi avait pu être changée en février 2014, accordant enfin ce qui était promis depuis 2008 et les États généraux de la presse, c’est-à-dire cette égalité fiscale et un même taux de TVA de 2,1 %. La situation avait alors été jugée suffisamment grave pour que cette loi soit adoptée à l’unanimité tant à l’Assemblée qu’au Sénat, ce qui est pour le moins inhabituel.Mais en pleine régression par rapport au développement de l’économie numérique, et dans une atmosphère de règlements de comptes avec des sites qui visiblement dérangent le pouvoir, le gouvernement s’est bruta-lement mis en travers de la correction demandée à l’origine par des députés de tous les groupes parlementaires (LR, UDI, PS, EELV, PC) dans le

cadre du débat sur le budget recti-ficatif 2015.(…) La loi de juin 2009 reconnaît aux journaux numériques le sta-tut d’entreprises de presse : même devoirs et mêmes droits, donc. Or le code fiscal n’a pas été corrigé à cette occasion et a continué à considérer les sites d’information comme des « services en ligne », à ce titre taxés à 19,6 % puis 20 %, selon une règle-mentation issue d’une directive euro-péenne… de 1991, quand internet en était à ses balbutiements !Il s’agit « de mettre en cohérence le droit de la presse et le droit fiscal », a rappelé mardi le député socialiste Christian Paul. Il ne s’agit donc nullement d’une « amnistie fiscale » ou d’un « passe-droit », comme ont pu le dire certains députés, mais de la correction d’une disposition fiscale archaïque entrant en collision avec le droit de presse. (…)Mais Christian Eckert, n’a rien voulu entendre. Reprenant les arguments énoncés lors de la première lecture, le secrétaire d’État au budget a surtout pris soin de s’assurer de la présence d’un nombre de députés suffisant, à droite comme à gauche, pour organiser le rejet de l’amendement en discussion. (…)Le gouvernement, qui subventionne massivement la presse papier (plus d’1 milliard d’euros d’aides directes et indirectes), montre ainsi une fois de plus sa méfiance envers les développements de l’économie numérique. Ayant épuisé toutes les voies de recours auprès de l’admi-nistration fiscale, Mediapart est désormais mis en demeure de régler l’ahurissant redressement exigé, de 4,1 millions d’euros, dont 1,3 million de pénalités.Plus que jamais, dans cette France placée en état d’urgence par un pou-voir aux abois, où l’extrême droite s’installe au centre du jeu politique et dicte l’agenda, nous avons besoin d’une presse libre, indépendante, irrévérencieuse, offensive dans ses enquêtes et ses prises de position.

Les agoras de l’Humanité. Un an après Charlie, deux mois après les attentats, quelle République. Le for-mat des Agoras de l’Humanité a pour but de (re)donner sa place à la pensée, au débat d’idées, à la réflexion appro-fondie, à l’écoute et au pluralisme. Pour chaque thème, les personnalités

invitées disposeront d’une trentaine de minutes pour exposer leur pensée. Puis, une trentaine de minutes sont prévues pour permettre l’échange avec le public et le débat. Elles se tien-dront samedi au Musée de l’Histoire de l’Immigration à Paris, 293, avenue Dausmenil, 75012 Paris.

Emprisonné par le régime turc, à Istanbul, depuis le 26 novembre 2015, le rédacteur en chef du jour-nal d’opposition Cumhuriyet, Can Dündar, a écrit à l’Humanité depuis sa cellule. (Publié le 29 décembre, 2015)

« Isolé dans ma cellule, en taule, je lis la biographie de Frédéric Joliot-Curie (physicien communiste – NDLR)… Il vivait dans les années où toute l’Europe faisait face au fascisme. En tant qu’homme de science, en tant qu’intellectuel, il avait écrit : « M’enfermer dans mon

laboratoire a été toujours séduisant pour moi. Mais je me demandais en même temps, qui peut avoir intérêt à mes découvertes ? J’avais donc com-pris, en travaillant tranquillement dans mon coin, qu’ il fallait que la science ne puisse pas servir des buts sales, les préparatifs de guerre, qu’ il fallait qu’elle serve la paix. Dès lors, je devais être dans les rangs de ceux qui luttaient pour la paix (1). »En fait, j’ai moi-même été parfois séduit par la pensée de m’enfermer dans ma bibliothèque afin de pou-voir écrire mes livres. Mais cette même prise de conscience qu’a eue Joliot-Curie nous a poussés, moi et mes collègues, vers la lutte dans les rangs démocrates.Puis-je laisser mon pays entre les mains d’un régime totalitaire ?Pouvons-nous nous enfermer dans nos bureaux, au lieu de travailler sur les dossiers sur lesquels nous avons enquêté, découvrant la corruption du pouvoir, la politique de guerre

civile, le trafic d’armes ?Parce que nous avons répondu « non » à cette option, et parce que nous avons poursuivi la voie de Frédéric Joliot-Curie, parce que nous avons pris le parti de la paix, parce que nous sommes contre le despotisme et sa censure, nous nous retrouvons en prison et isolés dans nos cellules.Par la leçon et l’expérience fran-çaises, nous savons très bien qui gagnera à la fin.C’est pour cela que nous résistons avec ténacité et croyance.Nous sommes solidaires de tous nos collègues qui, dans les différents coins du monde, luttent pour les mêmes causes.Nous croyons que c’est cette soli-darité qui peut libérer l’humanité de la haine, de l’oppression et de la guerre. »

(1) Retraduit du turc.

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6 • Les Nouvelles 7 janvier 2016

INTERNATIONAL

ESPAGNE

Podemos, un interlocuteur incontournable

MUMIA ABU-JAMAL

La peur doit changer de camp

Après les élections générales du 20 décembre qui ont dessiné un pay-sage politique éclaté, l’Espagne paraît ingouvernable. Si aucune coalition n’est formée d’ici deux mois, le retour aux urnes sera inévitable.

Une semaine après les élections gé-nérales du 20 décembre, les grandes manœuvres du chef de la droite espagnole, Mariano Rajoy, pour se maintenir au pouvoir n’avaient toujours pas abouti. Si le Parti popu-laire (PP-droite) au pouvoir reste la première force du pays avec 28,72 % des suffrages et 123 députés, il essuie un vote sanction des plus sévères puisqu’il perd la majorité absolue, établie à 176 sièges, et près de 3,5 millions de voix.

En mettant fin au bipartisme, 73 % d’électeurs ont profondément trans-formé le Parlement espagnol et ont transformé la formation d’un gou-vernement en véritable casse-tête. Jusqu’ici, les socialistes du PSOE ont rejeté le scénario d’une grande coalition à l’allemande et celui d’une abstention qui, additionnée à celle des députés libéraux de Ciudadanos, permettrait à Rajoy, chef du Parti populaire (PP), de former, au nom de la « stabilité », un gouvernement minoritaire.

La formation emmenée par Pedro Sanchez arrivée en deuxième po-sition, avec 22 % de voix perd 1,4 million d’électeurs et vingt parlementaires. L’alternative pour le PSOE, en cas d’échec de Rajoy, serait de se tourner vers la gauche anti-austérité et les formations nationalistes et indépendantistes représentées aux Cortes.

Podemos, qui s’est présenté pour la première fois à des élections lors des européennes de juin 2014, fait une entrée fracassante aux Cortes. Il a totalisé pas moins de 5,18 mil-lions de voix et 69 députés. Mais la jeune formation ne semble pas pressée de conclure un accord avec le PSOE, pilier, avec le PP, du système politique hérité de la transition. Elle pose ses « lignes rouges » : modifi-cation de la loi électorale, bouclier pour les droits sociaux, mécanisme révocatoire pour le chef du gou-vernement à mi-mandat, etc. Sur-tout, Podemos conditionne toute alliance à la tenue d’un référendum d’autodétermination en Catalogne. Inacceptable, pour les barons du PSOE, qui accusent Pablo Iglesias de vouloir mettre à mal « l’unité de l’Espagne ».

Faute de coalition gouvernementale dans les deux mois, un retour aux urnes serait inévitable. Scénario

que Podemos ne verrait pas d’un mauvais œil…

« Le bipartisme, qui a régné au cours des trente dernières années, est battu en brèche », réagissait aux résultats des élections Olivier Dartigolles, porte-parole du PCF. Le score de Podemos « est très positif et s’ inscrit dans un mouvement européen. Ces derniers mois, ses candidats ont su parler à l’ensemble du peuple pour l’ inviter à prendre une autre direc-tion, se donnant comme objectif la contestation à la fois des politiques libérales et d’austérité et du sys-tème politique incarné par le bipar-tisme. Quand bien même les tenants de l’ordolibéralisme en Europe ont voulu faire de la Grèce un exemple, 2015 reste marquée par la victoire de Syriza en janvier, par ce qui se passe en Grande-Bretagne avec Jeremy Corbyn, par le gouvernement de gauche au Portugal et, aujourd’hui, par l’audience de Podemos. Ces expé-riences, dans des conditions propres à chaque pays, démontrent à ceux qui, il y a quelques années, parlaient de fin de l’ histoire qu’existe, à l’ échelle de l’Europe, un mouvement ouvrant de nouvelles espérances contre l’aus-térité et pour la justice sociale. Ces expériences appellent non à un repli national mais à un changement de politique de l’UE et à la solidarité des peuples contre l’austérité. »

« Sauvons Mumia ! » Ce cri qui a résonné aux quatre coins du monde depuis trente-cinq ans a permis d’empêcher l’assassinat légal du journaliste afro-améri-cain, affirme Michel Guilloux dans son édito de l’Humanité, le 30 décembre. Mumia Abu-Jamal clame son innocence depuis le procès raciste et tronqué qui l’a condamné sans preuve en 1982.

Un vaste mouvement internatio-nal de solidarité a permis d’empê-cher la peine de mort réclamée par ceux qui, comme le « juge » de l’époque, déclaraient : « Je vais les aider à frire ce Nègre ». Les mêmes tentent aujourd’hui de prendre leur revanche.

Gravement malade, Mumia se voit

refuser les soins auxquels il a droit. Il aura fallu une nouvelle mobilisation et un appel, autour du directeur de l’Humanité et député européen, Patrick Le Hyaric, d’une centaine d’élus nationaux et européens de toutes sensibilités pour arracher une audience devant statuer sur cette situation insupportable. Mais l’administration pénitentiaire est allée jusqu’à falsifier les documents qu’elle présentait aux juges. Cette nouvelle forfaiture démontre un acharnement monstrueux et à quel point la vie de Mumia ne tient qu’au prix de sa volonté et de la force de la campagne de soutien qui ne doit pas relâcher sa vigilance. Le nouveau gouverneur, démocrate, de l’état de Pennsylvanie est allé contre les racistes, désavoués aussi au niveau fédéral sur certains points.

De Jefferson à Chicago, le racisme sévit chaque jour. Le fait nouveau est que, désormais, l’insupportable n’est plus nié mais suscite de plus en plus de réactions. « Nous qui constatons combien le venin colonial agit et est utilisé de ce côté-ci de la Méditerranée ne pouvons qu’ être avec ceux qui veulent éradiquer les surgeons de l’esclavagisme de ce côté-là de l’Atlantique », conclue Michel Guilloux.

BURUNDI

Amnesty International dénonce des exécutions extrajudiciaires« Les forces de sécurité ont tué de façon systématique des dizaines de personnes, notamment avec des exécutions extrajudiciaires, pen-dant la journée la plus sanglante de la crise qui va s’aggravant au Burundi. »

« Les forces de sécurité ont tué de façon systématique des dizaines de personnes, notamment avec des exé-cutions extrajudiciaires, pendant la journée la plus sanglante de la crise qui va s’aggravant au Burundi. » Dans un rapport intitulé « Mes enfants ont peur. Aggravation de la crise des droits humains au Burundi »,

l’organisation de défense des droits de l’homme Amnesty International détaille les informations qu’elle a réunies sur les exécutions extraju-diciaires, les arrestations arbitraires et les pillages perpétrés par des poli-ciers à Bujumbura le 11 décembre 2015. « Les méthodes utilisées ce jour-là par les forces de sécurité ont représenté une dramatique escalade en termes d’ampleur et d’ intensité par rapport aux précédentes opérations. Des hommes ont été traînés hors de chez eux et tués à bout portant, et d’autres ont été abattus au moment même où la porte s’ouvrait », affirme Lynne Muthoni Wanyeki, directrice régionale à Amnesty International.

TURQUIE

Erdogan rêve de faire taire l’opposition de gaucheRecep Tayyip Erdogan, le président turc, s’en est une fois de plus pris vertement au coprésident de la formation de gauche pro-kurde (Parti démocratique des peuples, HDP), Selahattin Demirtas, ac-cusé de félonie après qu’il a évoqué dimanche dernier l ’autonomie comme perspective possible pour le Kurdistan turc. En vérité, le leader de l’opposition de gauche au régime islamo-conservateur a simplement déclaré que les Kurdes de Turquie devaient décider s’ils voulaient vivre en autonomie ou « sous la tyrannie d’un homme ». Mais pour Erdogan, cette position est insupportable et constitue une trahison. La justice turque a ouvert une enquête à l’encontre de Selahattin Demirtas, accusé de crimes « contre la Consti-tution et son fonctionnement ».

Alors que le régime a engagé une opération militaire d’une ampleur inédite, avec près de 10 000 mili-taires dans les villes du sud-est de l’Anatolie, Erdogan ne veut rien entendre. Les combats contre les militants du PKK font de nom-breuses victimes civiles : 129 selon le HDP. Les médias indépendants turcs décrivent des scènes de guerre dans la vieille ville de Diyarbakir, avec des habitants privés d’eau, d’électricité et d’accès aux soins. Dans ce contexte de violences extrêmes, le HDP dénonce les couvre-feux imposés dans toutes les villes kurdes de Turquie. « On ne permet même pas à la population d’enterrer ses morts, accuse Figen Yüksekdag, l’autre coprésidente du HDP, au Parlement. L’État fait la guerre à son peuple. »

DJIBOUTI

La dictature de Guelleh réprime et massacreMorts : 28. Blessés : 52. Disparus : 34. Prisonniers : 13. La liste nomi-native provisoire établie par la Ligue djiboutienne des droits de l’homme (LDDH) jette une lumière crue sur l’effroyable massacre perpétré le 21 décembre dernier par le régime djiboutien. Ce jour-là, la police, puis la garde présidentielle et l’armée tiraient à balles réelles sur la foule rassemblée pour une cérémonie traditionnelle à Bouldhouqo, dans le faubourg de Balbala.

Quelques heures après la tuerie, alors que l’USN tenait une réunion de crise, les barbouzes du régime conduisaient « un véritable raid »

contre les opposants, cibles, à leur tour, de tirs à balles réelles. L’assaut a causé de graves blessures au pré-sident de l’USN, Ahmed Youssouf Houmed, à l’ancien ministre de la Justice Hamoud Abdi Souldan et au député Saïd Houssein Robleh. Tous ont été transportés à l’hôpital militaire français Bouffard.

Ce déchaînement de violences s’ins-crit dans une logique répressive qui connaît depuis un an un dangereux crescendo, symptôme de la fébrilité du dictateur Ismaïl Omar Guelleh, candidat à un quatrième mandat en avril 2016, après la révision constitu-tionnelle contestée de 2010.

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Les Nouvelles 7 janvier 2016 • 7

PCF

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M. VILLEFLOSE Guy, Aubie-et-EspessasM. CARRIERE Bernard, Castets-en-DortheComité local du Parti de gauche, GradignanMme LOUBET Annie, BèglesMme BORDACHAR Claire, St-Denis-de-PileMme HARAMBURU Johana, BordeauxMme GUILLARD Liliane, MaransinM. SOULE Jacques, VillenaveM. LAFON André, Fragues-St-HilaireMme BARATRA Jeanne, GradignanM. GROS Serge, Carbon-BlancM. LAUR Christian, Ste-EulalieMme FACCHINETTI Jeanine, VillenaveM. VALENTIN Bernard, St-Médard-d’EyransM. GONZALEZ Serge, BèglesM. & Mme DU PIN Yvan, CambesM. & Mme GARCIA José, St-Caprais-de-BdxM. GAI Christian, YvracM. FERNANDEZ Alexandre, BordeauxM. DOMINIQUE Joël, Castillon-la-BatailleM. VALADE David, MerignacM. BERRON J-Pierre, FloiracMme FLATTET Mireille, Vendays-MontalivetM. METEREAU Michel, Le-Bouscat

M. VOLPILHAC Patrick, VillenaveMme GUILLAUME Gaelle, BordeauxM. GARRIDO François, VillenaveSection de MerignacM. CERTAIN Charles, AbzacM. PEREZ Jesus, St-Caprais-de-BordeauxSection de BèglesMme LOUBET Annie, BèglesMme DURON Dominique, BèglesMme CASAMAJOR Béatrice, BèglesM. NICOLEAU Yves, BordeauxM. DUBERTRAND Michel, BordeauxM. LAMAISON Cyprien, Le-BouscatM. DANEY Claude, St-MaixantMme DUPART Nicole, BèglesMme BERNARD Muriel, SallesM. QUERBES Michel, BèglesMme QUERBES Françoise, BèglesM. CONSTANTIN Alain, EysinesMme DEMARTY Paulette, BassensM. DOMINGUEZ Hugues, BassensM. FITTE Alain, SoussansM. LAMOTHE Bernard, Cestas

Ils ont donné : 7 285€

BORDEAUX

Repas de sectionVendredi 15 janvier, 20h, salle Pierre Tachou, Bacalan

Réservation : [email protected] // 06 88 96 87 03

• Jeudi 21 janvier, 18h. Rencontres d’Espaces Marx accueille Jacques Ralite, autour de son livre « La pensée, la parole, la politique » à La Machine à Lire.

ESPACES MARX

Rendez-vous de janvier

LA FRANCE EN COMMUN

Invitation à écrire un projet d’émancipation humaine

Ce texte est une invitation au débat, un point de départ et non un point d’arrivée.Rédigé par le Comité national du projet du Parti communiste français et rendu public le 20 mai à l’occasion du lance-ment d’une «Convention nationale du projet» (www.pcf.fr/71357), ce document rassemble des réflexions pour des nou-veaux chemins d’émancipation, il pro-pose des chantiers d’action prioritaires ou des mesures d’urgence ouverts à toutes les contributions pour les enrichir et les redéfinir.

CONGRÈS 2016 DU PCF

La France du progrès existe encoreLe 20 mai 2015, le comité du projet lançait les travaux en vue d’une convention nationale sur le Projet prévue au printemps 2016. De cette journée est sorti un texte : «La France en commun»

APRÈS LE CHOC

Pour un printemps d’espéranceRéaction à l’article d’Hervé Le Corre paru dans le numéro 2129 des Nouvelles de Bordeaux.

Les rédacteurs de ce texte pré-cisaient qu’il était « un point de départ et non d’arrivée », « une invitation à construire ensemble le nouveau projet d’émancipation humaine qui nous rassemblera pour retrouver l’espoir ».

Soumettant au débat « des réflexions pour une nouvelle société, ainsi que les grands axes pour un programme d’ac-tion », il propose aussi « 15 chantiers d’action jugés prioritaires et 15 mesures d’urgence pour engager une sortie de l’austérité et se dégager des dogmes du libéralisme » afin d’être « utiles immédiatement aux mobilisations ».

À la lueur des événements tragiques de l’année 2015, son introduction, qui souligne la lucidité et l’espoir porté par des millions de nos conci-toyens, est plus que jamais d’actualité au moment où se pose la reconstruc-tion de la gauche :

« Il y a dix ans, les Français avaient raison, un grand nombre de forces disaient NON à l’Europe libérale en rejetant le traité constitutionnel européen. Ce vote a été bafoué. Aujourd’hui plus encore, un autre avenir hors de l’austérité est néces-saire.

La France du progrès, que d’aucuns souhaitent toujours faire taire, existe encore. Elle dénonce le pouvoir de la finance et connaît la valeur du travail

qu’elle ne supporte pas de voir déva-lorisé et précarisé. Elle comprend qu’un nouveau modèle productif doit être inventé. Elle sait que nous n’avons qu’une planète et que nous devons la protéger. (…)

Elle s’est levée, le 11 janvier, meurtrie, pour défendre le vivre-ensemble et la liberté d’expression. Ces femmes et ces hommes qui font la France savent qu’elle n’est pas une entité figée mais se nourrit du brassage des cultures et des savoirs.

Oui, cette France existe ! Elle doit aujourd’hui écrire son histoire en retrouvant le goût de l’action com-mune et du rassemblement. Nous sommes avec elles et avec eux, car nous partageons les mêmes exi-gences, les mêmes espoirs. »

Depuis, les agoras de l’Humanité (www.humanite.fr) ont été lancées et commencent à se tenir dès ce 9 jan-vier sur le thème « Quelle République : Liberté, égalité, fraternité ». Le journal l’Humanité contribue pour sa part en publiant des avis, contributions, réactions… sans donner de leçon.

CONTRIBUER

Un site internet collaboratif a été ouvert afin de recueillir les contri-butions de toutes celles et ceux qui partagent ces mêmes exigences, ces mêmes espoirs.

contribuer.projet.pcf.fr

EN GIRONDE

La participation à cette élaboration, la préparation du congrès du PCF qui aura lieu début juin, vont se tra-duire en Gironde par l’organisation de débats publics, de début février jusqu’à la fête de l’Humanité 33 en mai et le congrès départemental fin mai.

Simultanément, les communistes sont invités à animer, dans leurs sections, au plus près de leurs lieux de vie et de travail, les réflexions et les actions qui permettront une co-construction large et dynamique avec nos concitoyens, si possible dans la convivialité. La rencontre en ce début d’année de tous-tes les adhérents-tes permettra de les inviter à y prendre leur place.

Inventer, ré-inventer, faire vivre des alternatives de progrès, à partir des questions et de la recherche commune de solutions, franchir les obstacles et enrayer la résignation, voilà des chantiers actifs qui peuvent re-donner envie de s’engager dans la re-construction d’une gauche qui ne renonce pas face à la finance.

Ch. Texier Animation de la Vie du PCF

Quel plaisir de retrouver la plume acérée d’Hervé Le Corre dans Les Nouvelles du 17 décembre 2015… Dommage que la raison en soit funeste. Et oui, comme lui, la « Une » du journal « l’Humanité » au len-demain du 1er tour des élections régionales m’a profondément troublé. Comment oser feindre la surprise face aux résultats trop hauts du F-Haine et trop bas du FdG, surtout quand son directeur P. Le Hyaric fait une référence marxiste « au reflet du mouvement réel » ? Un lecteur du blog de Jean Luc Mélenchon savait à l’avance que tous les ingrédients étaient réunis pour arriver à ce désastre. Un FdG à l’image brouillée depuis les municipales, sans ligne claire avec des alliances à géométrie variable selon les régions empêchant toute campagne nationale, les consé-quences des attentats et des flux de migrants, le cynisme tactique de Hollande et la complicité des médias, annonçaient à coup sûr le terrible résultat.

Les partis de gauche et écologiques sont incapables aujourd’hui de susciter l’espoir, de donner une pers-pective nouvelle. Combien de jeunes (les repas de Noël en ont sûrement fait écho), combien de chômeurs, d’ouvriers sont restés à la maison le

6 décembre ? Pourquoi ne croient-ils plus que le vote peut changer la vie, pourquoi ce désespoir et ce nihilisme destructeur… « No futur » criaient les punks dans l’angleterre tatchérienne des années 80… Que pourraient crier les jeunes bacheliers, étudiants, sans diplômes, paysans, ruraux, ban-lieusards dans la France des années Hollande, lui qui devait réenchanter le rêve français…

Quelle mascarade ! Comment redon-ner confiance en la politique et en la République ? Comment avons-nous pu laisser la démocratie confisquée par quelques familles ? Comment a-t-on pu laisser notre pays dériver vers le libéralisme effréné sans réac-tion syndicale ou politique ? Quelles batailles ont-été perdues ?

Pour répondre au choc, « l’Huma-nité » propose à des personnes faisant autorité de dégager des issues progressistes au cours d’agoras…mais ce n’est pas suffisant, on le sait bien… C’est en bas, chacun dans son quartier, son village, son lieu de travail (si on en a un), qu’il va falloir mener le combat pour refaire vivre la fraternité, défendre la liberté et exiger l’égalité. Partout, dans les partis, les syndicats, les associations, les adhérents doivent reprendre la

parole et dépasser le doux ronron des appareils. Partout il faut faire preuve d’invention, de créativité, sans tabou, quitte à sortir du cadre.

Partout il nous faut reprendre une parole confisquée et oser se confron-ter à un état social réel et non fantasmé ou travesti, même si cela fait mal. Pourquoi par exemple les chefs syndicaux refusent de voir et de prendre en compte dans les stra-tégies de lutte que l’appel à la grève n’est quasiment plus suivi, sauf rare exception ?

Comme le dit Hervé, nous rentrons dans un hiver politique et démo-cratique ce qui est paradoxal en ce décembre si doux. Mais faisons en sorte qu’il soit le plus court et le moins dévastateur possible.

Profitons-en pour labourer en pro-fondeur la société et notre pensée politique, préparons un Printemps qui renouera avec ses prédécesseurs, qu’ils soient français ou arabes. On ne sait jamais à l’avance com-ment lèveront les graines semées. Et comme l’a écrit Neruda « Nos ennemis peuvent couper toutes les fleurs, ils ne seront jamais maîtres du printemps. »

Lionel Chollon, Maire de Loupiac

à télécharger sur : http://www.pcf.fr/71357

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8 • Les Nouvelles 7 janvier 2016

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Les Nouvelles de Bordeaux

CULTURES & SOLIDARITÉS

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AU MUSÉE D’AQUITAINE

La guerre que nous n’avons pas vue« C’est un trou de verdure où chante une rivière… »

Ainsi commence un célèbre sonnet de Rimbaud, Le dormeur du val (oct. 1870). Cette impression de verdure et de douceur, nous la ressentons en regardant, accrochés aux murs, dès la première salle, des dizaines de tableaux de format différent, mais tous constitués de l’addition variable de rectangles peints de même dimension.

Juan Manuel Echavarria, artiste plasticien et vidéaste, a proposé avec constance à de jeunes enrôlés dans des forces militaires ou sous contrainte par des paramilitaires, ou des guerilleros, de traduire sur ces tableaux, librement, ce qu’ils ont fait et ce qu’ils ont vu.

Nous nous trouvons devant des toiles dont on distingue d’abord la fraîcheur et les maladresses. Les peintres ne sont visiblement pas des professionnels, encore moins des artistes reconnus ou à reconnaître… On pense à les rattacher au courant des peintres naïfs. Erreur totale! Nous avons sous les yeux le « récit », maladroit et brutal, des exactions commises, souvent sous la contrainte violente… par ceux-là même, sou-vent très jeunes, qui peignent. Ils disent tous la beauté et le calme des campagnes de Colombie, où s’est déroulée depuis plus d’un demi-siècle « la guerre que nous n’avons pas vue », nous colombiens des villes, et au-delà, nous toutes et tous, européens, occidentaux, peu curieux des horreurs perpétrées depuis des années dans ce pays lointain. Mais enfin, dans notre langue, si le mot campagne désigne les beautés d’un paysage, il désigne aussi… une expédition militaire, et ces tableaux nous montrent les deux, l’expression, dans une verdoyante campagne, des campagnes crues, pleines de chair, de sang et d’exactions, de l’armée, des para-militaires (ces mercenaires d’extrême droite), des trafiquants, et des Farc (forces armées révolution-naires colombiennes).

« La guerre que nous n’avons pas vue », après le premier regard porté vers ces tableaux, nous la voyons soudain, brutalement, avec des tâches rouges, des corps tronqués, des noyés, des silhouettes d’hommes en armes… Elle nous envahit, puis se précise quand nous allons « à la source », en lisant (à ne pas manquer, en bas à droite de chaque oeuvre) les circons-tances et les conditions qui ont fait

d’un jeune un bourreau, un assassin, un complice d’horreurs. Et le voici qui explique, anonymement, les atrocités qu’ il est arrivé, en peignant, à raconter.

Certains auront trouvé par ce moyen leur thérapie, leur sauvegarde. Le Suédois (surnommé ainsi par ses compagnons d’atelier, en raison de ses cheveux blonds et de ses yeux bleus), peintre de fleuves-cimetières flottants, a déclaré: « j’ai changé la gâchette contre un pinceau ». Tous, loin de là, ne sont pas parvenus à changer…

D’une toute autre façon les photos en couleurs superbes de Juan Manuel Echavarria, avec chacune en leur centre un tableau d’école ayant perdu son usage, témoignent des ravages d’une guerre ayant perduré des dizaines d’années, et qui a frappé les enfants en plein coeur, leur vie et leur scolarité détruites, dans les coins les plus reculés des montagnes colombiennes.

Et puis ne manquez pas, au centre de l’expo, la salle occupée par les oeuvres des femmes du village Mampujan.

Elles ont, collectivement, résisté aux incursions des paramilitaires qui voulaient faire payer à leur commu-nauté sa proximité avec un chemin emprunté par les guerilleros. Non seulement ces femmes ont empêché l’exécution de 8 otages, mais elles ont enquêté sur leur propre origine afri-caine et raconté, sur des tapisseries collectives faites de bouts de tissu, leur histoire, l’esclavage, leurs luttes, et leurs rêves. On comprend qu’elles aient conquis une reconnaissance dans toute la Colombie, et au-delà.

L’opiniâtreté de Juan Manuel Echa-varria, la détermination de Marie Estripeaut-Bourjac, l’utile coordina-tion de Daniel Gonzalez, et l’accueil particulièrement bien venu de cette expo dans les salles du Musée d’Aqui-taine se sont conjugués.

Ne manquez pas cette rencontre difficile, mais si nécessaire, si émou-vante.

V T

Au musée d’Aquitaine, jusqu’au 6 mars. Tous les jours sauf le lundi et les jours fériés de 11h à 18h- 4 €/réduit pour les groupes 2 €.

« Hippocrate et Philo »

Je jure, la main droite levée à hauteur de l’épaule, la gauche posée sur le serment. J’aurai l’amour de l’homme et l’amour de l’art, j’aurai un com-portement professionnel conforme aux attentes du malade et à ceux de la science, j’aurai de la considération pour mes maitres et collègues, et j’enseignerai à mes disciples.

Philothée se ronge les sangs près de la cheminée, ses règles ne sont encore une fois pas revenues à cette lune, elle est pâle. Avant son mariage elle craignait de ne pas pouvoir donner de fils à son mari mais depuis elle a peur de ne pouvoir tous les élever. Sa nourrice, fidèle accompagnatrice depuis son enfance, l’a suivie dans cette nouvelle famille. Elle est sa mère, sa solution, sa douceur, sa tranquillité. Elle comprend et va chercher le méde-cin, Il n’est pas loin, à deux heures de marche en direction d’Epidaure, au sud. Il l’avait déjà aidée à avoir ses fils alors qu’elle doutait, elle n’était qu’une ignorante, lui connaissait.

L’époque la plus favorable à la conception de tes enfants se situe après les règles, à ce moment où se manifeste un élan instinctif vers l’union intime avec ton époux, où ton corps n’est ni déficient, ni empli et lourd d’ivresse ou d’indigestion. S’il y a conception ton corps gonflera de la semence germée, Si c’est un garçon ton teint sera ensoleillé et tu ressentiras une énergie, une vitalité nouvelles qui te pousseront à faire attention à toi.

Mais si la conception n’est pas souhaitable alors tu devras retenir ta respiration et te retirer légèrement de ton homme, tu te lèveras immédiatement et te laveras à l’eau froide. Tu pourras aussi te préparer un enduit de miel et d’huile de myrte blanc qui empêchera la semence masculine de s’attarder dans ta matrice.

Philothée sait qu’elle aura mal mais garde toute confiance en Monsieur Hippocrate, ce médecin de Cos, issu d’une lignée d’Asclépiades, mi-dieu mi-soignant. Il a édifié un code de conduite pour les médecins auprès des malades. Il ne dort jamais et cherche. Il veut trouver la solution médicale, il observe, il note, il écoute, il enseigne.

Si tu ne peux garder cette grossesse, qu’elle n’est pas issue d’un amour adultère, alors tu pileras des écorces de pin et de sumac à parts égales que tu feras macérer dans du vinaigre de Cimolôs. Tu prendras des bains de siège à l’huile de lin et tu fabriqueras un tampon de laine enduit de graines de giroflée.

Philothée et Climène ont suivi le protocole mais les règles ne sont pas revenues.

Je vais maintenant te saigner et gratter l’intérieur de ta matrice avec une épine de forgeron, tu boiras du vin, te taperas le bas du ventre avec ce bâton, tu sauteras ensuite les pieds joints tous les jours jusqu’aux saignements. N’oublie pas ensuite la tisane de romarin et de rue afin de ne pas tomber dans l’infection qui te tuerait. Je reviendrai te voir dans six jours.

Hippocrate est reparti sur son âne et des siècles d’obscurantisme religieux ont anéanti toutes ses recherches.

Un jour j’ai juré, la main droite levée et la gauche sur le coeur…

CHRONIQUE

par Jeanne R.M.