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MARCHE CITOYENNE À BORDEAUX, LE 14 FÉVRIER (page 2) Pesticides Jeudi 11 février 2016 - N° 2137 - Hebdomadaire - 15, rue Furtado - 33800 BORDEAUX - Prix : 0,80 euro

Nouvelles N° 2137

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Nouvelles N° 2137 du 11 fév.

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Page 1: Nouvelles N° 2137

MARCHE CITOYENNE À BORDEAUX, LE 14 FÉVRIER (page 2)

Pesticides

Jeudi 11 février 2016 - N° 2137 - Hebdomadaire - 15, rue Furtado - 33800 BORDEAUX - Prix : 0,80 euro

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2 • Les Nouvelles 11 février 2016

ACTUALITÉ

PATRICK LE HYARIC

La révision de la Constitution anticonstitutionnelle ?Extraits de la déclaration du 5 février

APRÈS L’ÉMISSION DE FRANCE 2

Les pesticides et nos enfants en danger…

« (…) Notre droit, depuis 1789, est imprégné de cette prévention à nous déjouer des pulsions pour que vive le contrat implicite qui permet la vie en commun, au-delà de nos différences. (…) N’est-ce pas dans les moments exceptionnels qu’il convient juste-ment de protéger les fondements du contrat social, de se convaincre et de convaincre l’ensemble des citoyens de ne pas céder à la peur ?Notre droit, aussi imparfait soit-il, a intégré cette exigence de prudence en stipulant dans son article 89 que la Constitution ne peut être révisée lorsque l’intégrité du pays est menacée. Or, le Président et le Premier ministre ne cessent de clamer que notre pays serait en guerre.Si notre Constitution ne peut être révisée lorsque le pays est en guerre, c’est justement pour éviter que ne se prennent, sous le coup d’une émotion mauvaise conseillère ou dans un contexte de suspension des libertés, des décisions qui contreviendraient aux principes fondamentaux qui régissent la vie en commun.En ânonnant que la France était en guerre -alors que la Constitution indique, dans son article 35, que seul le Parlement peut autoriser la « déclaration de guerre »-, le Président et le gouvernement ont entretenu le climat de panique que les terroristes ont cherché à introduire dans le pays et légitimé les coups de canif portés aux principes fondamentaux de la République.Ce climat particulièrement délétère qui se propage dans les interstices de la société conduit à une puissante dérive de « l’État de droit » vers un « État de sécurité » permanent : état d‘urgence constitutionnalisé pour un recours sans frein aux mesures d’exception, agrémenté de l’inscrip-tion dans la norme suprême du droit de la déchéance de nationalité belle et bien réservée aux binationaux, puis d’une réforme majeure de la procé-dure pénale au détriment de l’autorité judiciaire, attentatoire au principe car-dinal de séparation des pouvoirs. Or, l’article 66 de la Constitution prévoit que c’est l’autorité judiciaire seule qui

est garante des libertés individuelles, et non le Conseil d’État ou toute autre autorité administrative dépendante du pouvoir politique. Ce cocktail explosif menace l’équilibre sur lequel repose le droit républicain. Mais surtout, n’agissent-ils pas en dépit de la Constitution, en bravant aussi bien ses lettres que son esprit ?Concernant la déchéance de nationa-lité, même ses plus farouches partisans s’accordent à reconnaitre son inutilité dans la lutte contre le terrorisme. Sa seule « qualité » sera, malgré les artifices rédactionnels visant à ôter le mot « binational », de créer en France deux catégories de citoyens. Ce n’est plus le citoyen sujet universel de droit mais l’individu selon son origine ou celle de ses parents qui comparaitra devant la loi, pour le même crime et désormais pour le même délit, avec un traitement différencié.(…) Le droit, s’il reste toujours à par-faire et s’il reste trop souvent au service des puissants, est un instrument pour sortir les individus de leur commu-nauté respective, de leur condition de naissance, et pour penser l’universel.Il faut de toutes nos forces refuser cette fuite en avant. Il est dès aujourd’hui possible de fédérer largement contre le projet de révision de la Constitution. Ce n’est pas qu’un problème de droit ; c’est l’idée même d’une citoyenneté mise sous couvercle qui nous inquiète, une dépossession grandissante des citoyens et de leurs prérogatives au profit de leurs représentants. Pour que la vraie politique retrouve ses droits et pour préserver nos libertés, refusons cette révision de la Constitution ! »

Le calendrier du gouvernement

5-10 février. L’Assemblée nationale examine le projet de loi constitution-nelle de « protection de la nation », avant de procéder à un vote solennel.16 février. Débat parlementaire sur la prolongation au-delà du 26 février de l’état d’urgence.17 février. Présentation en Conseil des ministres du projet de réforme du Code de procédure pénale, pour un examen parlementaire prévu à partir du mois de mars.

Des millions de Français ont regar-dé l’émission de télévision « Cash Investigation », le 02 février dernier sur l’utilisation des pesticides en France et ses conséquences sur la santé. La Gironde y apparaît comme un département particu-lièrement touché. Ce n’était pas un scoop, des citoyens, des victimes lancent l’alerte depuis plusieurs années (1) mais les réactions n’ont pas manquées.

Étonnement ? Colère ? Électrochoc ? En tous cas, des visages et des corps, parfois d’enfants, sont devenus sujets de rapports, d’études, de statistiques, de chiffres. Des victimes mais aussi des coupables… Cette enquête for-midable, réalisée par Élise Lucet pour France 2, est faite à charge contre des multinationales mais elle est frus-trante car elle alimente le fatalisme. Une carte de France aux départements colorés selon le niveau d’utilisation de pesticides montre une Gironde noire, le secteur viticole étant le plus grand utilisateur de pesticides. La faute aux industries agrochimiques ? Oui. Mais pas seulement… Dans le domaine agricole, l’accu-mulation des profits au cœur du sys-tème capitaliste néolibéral demande toujours plus de rendement, une course au prix, à la taille des exploi-tations… Ce qui implique des choix de cultures, des systèmes de cultures faisant appel à l’utilisation croissante d’intrants chimiques. Peu importe l’avenir de la planète, la santé des sols, des plantes, celles de toutes les espèces vivantes, parmi lesquelles les humains. Les multinationales, les banques, les assurances et leurs cohortes d’experts, d’avocats, de lob-byistes sont les rouages de ce système mortifère. Les politiques au pouvoir en sont les complices, par convic-tion (au nom d’intérêts partisans), par compromis (pour préserver des activités, des emplois, des structures), par renoncement (s’opposer demande du courage). Des textes de grande portée (Proto-cole de Kyoto, Accord de Paris), des Directives européennes (REACH), des lois nationales (Grenelle, Biodi-versité), des Plans (Phyto), sont votés. Mais ils sont moyennement ou très peu contraignants, parfois réécrits avec report des échéances… Des organisations sans élus telles l’OMC, la Banque mondiale, le FMI ou

encore la Commission européenne veillent au maintien du système. Les politiques au pouvoir votent toujours et encore l’aggravation de la concur-rence, son institutionnalisation à tous les niveaux, sous couvert d’équité ou de baisse des prix, ou bien d’accords commerciaux. Sur les pesticides, on sait tout mainte-nant, ou presque. Alors on fait quoi de ces informations ? On fait comment pour contraindre, pour peser, pour changer ? Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture, interrogé par Élise Lucet, finit par lâcher : « Je suis par-faitement conscient que c’est une bombe à retardement, un danger pour la santé, pour l’environnement et peut-être même pour l’économie. » D’accord. Lorsque Corinne Lepage, grande prêtresse de l’Écologie politique, ancienne ministre de l’Environnement, écrit sur Twitter « avoir voulu interdire l’atrazine en 1995, sans y parvenir, les lobbys étant plus puissants qu’un ministre », elle contribue à discréditer les politiques. Bien sûr des associations œuvrent à proposer des voies alternatives réconciliant le citoyen et son envi-ronnement. Ainsi « se renseigner », « s’alimenter autrement », « voir les choses plus largement », c’est nécessaire. Mais cela ne suffira pas. Les liens entre agriculture, alimentation et lutte contre la précarité doivent devenir un axe de réflexion pour les politiques publiques. Et il est clair que le monde ne changera pas sans l’irruption de la société civile, des jeunes notamment. Envisager la reconversion de l’agricul-ture en bio nécessite un engagement politique majeur à tous les niveaux de la société, qui demande une vision globale, de long terme et des moyens financiers et humains. Se défaire des multinationales, de leur emprise sur tous les domaines de la vie. Les coûts induits par les pratiques de ces sociétés pèsent lourd sur la Collectivité (santé, dépollution, aménagements, chômage). Les citoyens payent par leur consommation, par leurs impôts, les investissements pour leur pro-tection, pour les réparations. Pour sortir des produits phytosanitaires qui polluent durablement la terre, l’air, l’eau et tuent à petit feu les humains, les insectes, les animaux, il faut reconfigurer l’ensemble des systèmes agricoles. Il faut refondre la fiscalité, interdire les glyphosates (herbicides), les néonicotinoïdes (tueur d’abeilles), les OGM. Il faut punir les entreprises

qui ne respectent pas les interdictions, réorienter l’argent public, faire payer les réparations par les multinationales et les utilisateurs, privilégier le marché local, relocaliser les productions, créer des fonds décentralisés pour soutenir ici les filières fruits et légumes, là les filières d’élevage extensif, ou encore les petits viticulteurs en AOC. Tout cela est concrètement possible. Le monde que nous voulons n’est pas celui de Monsanto ou de Bayer, il est à l’opposé de ça. Notre pays a besoin de plus de solidarité, donc de paysans bien rémunérés et en bonne santé sur tout le territoire. Pour cela, notre pays a besoin de plus de démocratie, d’une refonte de ses institutions, de nou-velles règles et de nouveaux pouvoirs pour le peuple.

Cathy Daguerre

1 - Voir notamment L’Humanité,www.humanite.fr/pesticides-plainte-contre-une-negligence-assassine-572470

À lire aussi, le témoignage « Viticulteur, je contamine mes voisins, mes ouvriers et moi », sur le site de Rue89 Bordeaux, le 4 février.

APPEL

Pour une marche blanche contre les pesticidesRendez-vous dimanche 14 février 2016 à 14h Place Bey Berland à Bordeaux«Vous êtes nombreux aujourd’hui dans notre société, à être conscients et inquiets des dangers des pesticides, encore plus nombreux grâce au repor-tage Cash Investigations d’Elise Lucet du 2 février dernier qui a touché le grand public. Ce documentaire a confirmé la dangerosité de nombreux produits homologués et la mise en danger de la santé des enfants, des riverains et des agriculteurs. Il a mon-tré l’impunité des firmes de l’industrie chimique, la complicité de nos élus. Il légitime par ailleurs, les actions en justice engagées ici en Gironde pour faire reconnaitre la responsabilité des pesticides dans la mort de profession-nels de la Viticulture. Aujourd’hui, la Gironde est montrée du doigt, comme département le plus consommateur de pesticides CMR (cancérogènes, mutagènes ou repro-toxiques), mais ce n’est plus seulement l’affaire des viticulteurs, nous sommes tous concernés. Si la société civile veut protéger ses enfants elle doit montrer sa volonté de faire cesser le déni et l’omerta des institutions viticoles.»Avec La Confédération Paysanne 33, Générations Futures, Collectif Alerte Pesticides Léognan, Les Amis de la Terre, Allassac ONGF

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Les Nouvelles 11 février 2016 • 3

EditorialACTUALITÉ

Non à l’institutionnalisation de l’État d’urgence !

Si nous écoutons les médias actuellement, il est très peu question de révision constitutionnelle et d’état d’urgence. En effet, il n’est question que de déchéance de nationalité. Or, c’est bien d’une réforme constitutionnelle dont il s’agit. Ne prenons pas cette modification à la légère : elle favorise, dans l’urgence, un climat anxiogène dans notre société. La réforme constitution-nelle présentée fait courir le risque d’un régime d’exception permanent et d’une aggravation des atteintes aux libertés ciblant des personnes sans aucun lien avec des risques d’attentats.

C’est une mauvaise réponse alors que des lois existent déjà pour lutter contre le terrorisme, mais encore faudrait-il renforcer les moyens de la Police et de la Justice. Au lieu de ça, le manque de moyens de la Justice est devenu structurant et l’autorité judiciaire est marginalisée au profit du parquet et des préfets, c’est-à-dire du pouvoir exécutif. La justice doit être indépendante pour qu’elle puisse correctement faire son travail.

De plus, l’état d’urgence n’augmente pas l’effi-cacité ni la réactivité de la lutte antiterroriste. Depuis le 13 novembre dernier, au total, sur les 464 infractions qui ont été relevées dans ce cadre, seules 4 étaient en rapport avec une activité terroriste. Les procédures de droit com-mun, ne court-circuitant pas la justice, sont plus efficaces pour rechercher, prévenir et punir les infractions. Le choix du gouvernement n’est donc pas guidé par l’efficacité mais par une grave dérive sécuritaire.

Ce climat de peur qui gangrène notre société, divise notre peuple en créant une catégorie de sous-citoyens suspects (les binationaux) et banalise un état d’exception en l’inscrivant dans la Constitution. Ce sont de graves reculs du droit, des libertés et de la démocratie. C’est une manœuvre du pouvoir qui vise à polariser le débat public sur le sécuritaire. C’est pourquoi les communistes s’opposent vigoureusement à la modification de la constitution. À l’instar des Goodyear, condamnés à huit mois de prison pour avoir voulu sauver leur emploi, c’est l’ensemble de notre peuple, des organisations syndicales et des associations qui peuvent voir leurs actions suspectées et même criminalisées. Il s’agit d’un véritable danger pour notre démocratie.

Sophie ElorriMembre de l’exécutif du PCF 33

et membre du Conseil national

SYNDICALISTES SOLIDAIRES

Face aux « patrons voyous » et à « la justice de classe »

« Solidarité, émotion, détermina-tion, déclarait la CGT Aquitaine, sont les mots qui caractérisent les 80 rassemblements dans toutes la France, le 4 février, pour dé-fendre les libertés syndicales, pour dénoncer l’arbitraire patronal et condamner la violence sociale des licenciements et des conditions de vie et de travail dégradées. »

À Bordeaux, pendant qu’une déléga-tion portait les pétitions en préfecture, les syndicalistes rassemblés au pied du bâtiment à l’appel de la CGT, Soli-daires et la FSU, étaient nombreux. Ils sont ensuite partis en manifes-tation jusqu’à la place des Droits de l’Homme, « pour le symbole ».« C’est excessivement grave ce qui se passe, commente Corine Versigny, secrétaire générale de l’Union départe-mentale CGT. C’est la première fois que des camarades sont condamnés à de la prison ferme. Ils vont se retrouver der-rière des barreaux avec des prisonniers de droit commun. Voyez-vous comment on traite les salariés qui défendent leur emploi ? » Pour la responsable syndicale, « cette décision de justice participe de la même démarche que la volonté de constitu-tionnalisation de l’état d’urgence et la déchéance de nationalité. Ce n’est pas comme ça qu’on combat le terrorisme mais, par contre, c’est une façon de faire taire ceux qui réclament leur dû et qui relèvent la tête. »Elle dénonce la criminalisation des

salariés qui défendent leur emploi, l’outil industriel, les services publics, qui dénoncent « les pratiques de voyous des patrons ». « Les camarades de Goodyear, poursuit-elle, défendaient leur outil industriel, leur emploi alors que cette multina-tionale affichait un profit de plus de 2 milliards d’euros après versement de l’impôt, qu’il avait été versé aux action-naires plus de 800 millions d’euros. Malgré ça, la multinationale avait décidé de fermer cette entreprise qui faisait du bénéfice. Et derrière ces 2000 et quelques emplois, nos camarades de Goodyear défendaient aussi tous les emplois indirects. Ils se battaient pour l’ intérêt général. »« Ce sont les salariés aujourd’hui que l’on envoie en prison, criminalisés comme nos camarades d’Air France qui, pour deux chemises déchirées, alors qu’ils défendaient les emplois, se retrouvent licenciés ». « Aujourd’hui gouvernement et patronat ont décidé de taper dur sur le monde du travail qui relève la tête. Nous ne devons pas nous laisser intimi-der. C’est bien ça qu’ils veulent, nous intimider et nous faire taire. Nous avons raison de nous battre pour nos emplois, pour nos outils industriels. »La CGT appelle les salariés à se mobiliser contre toutes ces actions de criminalisation de l’action syndicale. « Si le gouvernement a voulu faire taire la colère que je sens gronder partout, ajoute Corine Versigny, il a échoué car la plupart des salariés que nous rencontrons sont scandalisés de tels traitements. En Gironde, nous avons

nos camarades de Ford eux aussi mis sur la sellette. En 2012, 2014, ils étaient au salon de l’automobile pour défendre leur emploi et l’emploi induit. Ils ont osé monter sur un capot de voiture et lancer quelques confettis, imaginez le drame ! Une plainte à l’époque avait été déposée et étouffée. Comme par hasard, après Air France et les Goodyear, cette plainte est réactivée. Quand un militant de la CGT est attaqué, c’est toute la CGT qui est attaquée ! C’est dans la solidarité que nous nous en sortirons. » Une solidarité appréciée par les salariés de Ford, dont un des représentant remercie l’assem-blée. « Ça fait chaud au cœur de voir tout ce monde mobilisé quand on est attaqué », dit-il.Comme le dit la responsable dépar-tementale de la CGT, Goodyear, Air France, c’est la partie visible de l’ice-berg car il y a eu la plainte des Fonde-ries Belier dont elle a eu elle-même à se défendre, il y a le salarié de TBC mais aussi ceux de Continental, une inspec-trice du travail, un salarié de Tefal, des salariés de La Poste, des militants de la Confédération paysanne, comme le rappelle un responsable de Solidaires. « Demain ça peut être n’importe lequel d’entre nous », prévient-il. « Les licen-ciements vont continuer et c’est une manière pour le gouvernement de dire qu’il y a des limites au droit syndical. Les licencieurs, ce sont eux les coupables car un licenciement c’est aussi une atteinte à l’ intégrité humaine et même à la vie quand des personnes se suicident dans les entreprises. »« Les mises au placard, les harcèlements, vous connaissez tout ça très bien, rap-pelle Corine Versigny en s’adressant aux manifestants. Et vous avez ce courage de continuer à vous battre. Car c’est quand on se bat qu’on vit et qu’on est debout. »

CGT, Solidaire et la FSU souligneNT la nécessité de l’unité syndicale dans une telle période et espèrent que les organisations syndicales qui n’étaient pas présentes le seront la prochaine fois.

Christelle Danglot

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4 • Les Nouvelles 11 février 2016

ACTUALITÉ

LES DIVIDENDES PLEUVENT…

Les suppressions d’emploi aussiEn décembre dernier, Pôle emploi a comptabilisé 5 475 200 deman-deurs d’emploi inscrits en catégorie A, B et C (sans emploi du tout ou avec une activité réduite). Soit une progression de 0,6 % sur un mois et de 5 % sur un an.

Le gouvernement qui espère renverser la courbe en 2016, mise essentielle-ment sur les 500 000 formations et les 150 000 services civiques annon-cés afin de faire glisser autant de demandeurs vers la catégorie D, moins visible. Les grands groupes, qu’il refuse de contrarier, continuent en effet de supprimer par milliers les emplois.Après la SNCF en décembre, EDF mi-janvier, c’est au tour de STMicroe-lectronics, Servier, Mahle Behr, Sanofi

ou encore Vallourec d’annoncer de nouvelles charrettes. Hormis Vallou-rec, fabricant de tubes pour l’industrie pétrolière qui, pénalisé par la chute des cours de l’or noir, va fermer les laminoirs de Saint-Saulve (Nord) et Deville (Ardennes) et supprimer 600 postes, les autres groupes ont en commun de faire des bénéfices.La palme du plus juteux résultat revient à Sanofi qui a distribué 3,5 milliards d’euros en 2015, et qui, dans le cadre d’un plan « d’économies » de 1,5 milliard d’euros d’ici à 2018, va supprimer 600 emplois sur les 27 000 qu’il compte en France. Le site d’Ambarès-et-Lagrave pourrait être impacté, selon les syndicats, l’usine de fabrication de comprimés et gélules pourrait voir 70 postes supprimés par des départs en pré-retraites.

Le laboratoire Servier, qui veut « se séparer » de 610 de ses 690 visiteurs médicaux au nom d’une « nécessaire adaptation pour assurer sa pérennité » selon la direction, a vu son bénéfice passer de 77 à 352 millions d’euros pour l’exercice 2014-2105.La palme du cynisme revient à Mahle Behr. Après avoir imposé en 2013 un accord de compétitivité (gel des salaires, suppressions de 5 RTT et licenciement de 159 salariés), l’équi-pementier automobile (324,5 millions d’euros de bénéfice) veut encore bais-ser ses « coûts de production de 8 % » en supprimant 180 postes.Enfin, STMicroelectronics, dont l’État détient 13,4 % du capital, mal-gré 104 millions d’euros de bénéfice, va détruire 1 400 emplois dans le monde dont 430 en France.

PÔLE EMPLOI/CONVENTION UNEDIC

Salariés, chômeurs et précaires mobilisésLe 8 février, les syndicats CGT, FSU et Sud Pôle emploi, avec le soutien des associations de chô-meurs, appelaient à la grève dans plusieurs régions pour protester contre la fermeture des agences de Pôle emploi l’après-midi.Dans le même temps, le comité na-tional Chômeurs et Précaires CGT organise des réunions d’information avant le démarrage, le 22 février, de la négociation de la nouvelle Conven-tion Unedic déterminant les droits à

l’assurance chômage. « Nos mobilisations peuvent faire reculer les pires destructions, comme le démontrent les actions unitaires de 2014, le recours au Conseil d’État du 5 octobre 2015, ou l’avenant remettant en cause les droits rechargeables non épuisables.Face à la réduction du service aux demandeurs d’emploi, face au risque d’un nouveau recul des droits, agissons toutes et tous ensemble pour des droits nouveaux ! »

AVANT-PREMIÈRE À L’UTOPIA BORDEAUX

Merci patron !Clôture de la 13e édition La classe ouvrière c’est pas du cinéma, avec le film de François Ruffin, suivi d’un débat avec le réalisateur (sor-tie nationale le 24 février).David peut-il encore l’emporter contre Goliath ? Dans un style un peu inspiré par Michael Moore, des pieds nickelés picards peuvent-ils faire tanguer la multinationale LVMH, premier groupe de luxe

au monde, et effrayer son PDG, Bernard Arnault, l’homme le plus riche de France ?François Ruffin, ancien reporter pour l’émission Là-bas si j’y suis de France Inter, collaborateur au Monde diplomatique, est rédacteur en chef, journaliste et animateur du journal Fakir. Il a notamment publié Les Petits Soldats du journalisme, La Guerre des classes et Quartier Nord.

BIG CONF

J’ai (vraiment) mal au travailÀ l’heure où le code du travail et les droits et les protections des salariés sont attaqués, quelles sont nos manières de résister ?Pour ne pas céder à la fatalité, l’Uni-versité Populaire de Bordeaux, en partenariat avec la CGT33, organise une rencontre avec Xavier Mathieu

(ex-ouvrier Continental et acteur) et François Ruffin (journaliste et réalisateur de Merci Patron !), ainsi que Laurent Melito et Dominique Pinsolle, ce samedi 13 février de 17h à 20h, à la Bourse du travail, cours Aristide Briand, Bordeaux.Entrée prix libre.

BORDEAUX MÉTROPOLE

Le service civique ne doit pas cacher le chômage de masseLe dernier conseil de Métropole a été l’occasion d’un vote pour la mise en place conjointe du service civique volontaire entre la mairie de Bordeaux et la Métropole. Pas opposés au principe, les élus com-munistes ont regretté son utilisa-tion pour masquer les désastres du chômage de masse. Explication de vote par Jacques Padie.

« Le service civique fut créé en 2010, et doit s’adresser à des jeunes de 16 à 25 ans désireux d’apporter leur contribu-tion au mieux vivre, notamment des personnes en difficulté. Depuis, ce dispositif a été renforcé chaque année par le gouvernement actuel. En 2015, il concerna 120 000 jeunes et l’objectif est d’atteindre la moitié d’une classe d’âge d’ici 2018 soit 350 000 jeunes. Dans le même temps, le budget qui lui est consacré passera de 300 millions d’euros à un milliard d’euros, d’ici 2 ans. Sacré effort dans cette époque de

pénurie revendiquée ! Il faut dire que le champ d’application de ce service volontaire s’est profondément élargi allant des associations aux collectivités locales, ministères et administrations en passant même par des entreprises à but non lucratif. En fait, le service civique s’est éloigné de sa vocation initiale, à savoir renforcer la cohésion et la mixité sociale. En ces temps où 23 % des jeunes de moins de 25 ans sont au chômage, ces petits contrats, payés 500 € mensuels dont 100 € à la charge de l’employeur, sont surtout considérés par ces volon-taires comme une expérience profes-sionnelle de plus, faute d’un véritable emploi. En effet, seulement 10 % de ces jeunes disent l’effectuer pour des raisons citoyennes. De plus, en 2012, 42 % d’entre eux possédaient un niveau équivalent ou supérieur à Bac+2 et 18 %, un niveau allant de la licence au doctorat. Dès 2014, la Cour des Comptes alertait sur le fait que les principaux bénéficiaires l’assi-

milaient plus à un outil d’insertion, brouillant ainsi les objectifs initiaux. Il n’est pas audacieux de constater que le recrutement des volontaires du service civique calque parfaitement les réorganisations du travail en rapport avec l’austérité comme à Pôle emploi ou à la Caisse d’allocations familiales où ils aident à la mise en place de la dématérialisation des dossiers. Cette vision ne peut pas être démentie après les dernières propositions du président de la République qui confirme la pré-carisation de l’emploi et la remise en cause du Code du travail entrainant de fait une dégradation de la protec-tion sociale des salariés.Officiellement, le Volontariat du Service Civique ne devrait pas se substituer au travail des salariés, mais démentie par les faits, nous pensons qu’il ne faudrait pas que la belle idée du service civique s’oppose à celle du service public et c’est pour cela que nous voterons contre cette délibération. »

Alors que depuis le lundi 8 février, l’inscription à Pôle Emploi se fait obligatoirement par Internet, des militants d’AC ! ont occupé les locaux de Pôle Emploi à Bègles. Ils dénoncent la dématérialisation des démarches, mais aussi la multiplication des

contrôles et la fermeture au public des agences tous les après-midi.En fait, depuis le 11 janvier, Pôle Emploi réserve le flux des réceptions spontanées le matin, et ne reçoit plus que sur rendez-vous l’après-midi (de 12h30 à 16h30 les lundi, mardi et

mercredi, de 12h30 à 15h30 les ven-dredi, fermé le jeudi).

PÔLE EMPLOI BÈGLES

AC ! s’oppose à la dématérialisation des démarches

À lire sur Rue89 Bordeaux du 9 février : Ces chômeurs ne « lolent » pas le 100 % web à Pôle Emploi

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Les Nouvelles 11 février 2016 • 5

ACTUALITÉ

BORDEAUX

Lescure : Il va encore y avoir du sport !

OPTIONS ET SECTIONS ARTISTIQUES OU LANGUES

Œuvrer à un mariage entre arts, culture et éducation

Ouverte depuis 2012, la réflexion sur le devenir du complexe sportif de Lescure fait débat et les projets municipaux rencontrent une forte opposition. Pas de quoi perturber Alain Juppé qui reste droit dans ses bottes…

C’est un fait, le départ des Girondins de Bordeaux qui jouent maintenant leurs matchs au grand stade de Bor-deaux-Lac, n’a pas éteint la vocation sportive du complexe du boulevard d’Ornano. D’abord, parce que les rugbymen de l’Union Bordeaux-Bègles ont pris possession à temps plein du stade Chaban-Delmas. Ensuite et surtout parce que les espaces multisports de Lescure sont toujours très fréquentés. Dans une ville en déficit chronique d’équipe-ments sportifs, le Parc Lescure est donc un joyau qu’il s’agit de mettre en valeur et de protéger. Mais tout le monde ne s’y prend pas de la même manière.Voyant le changement de destination du stade arriver, la mairie de Bor-deaux a en effet, dès juin 2012, lancé un appel à idées pour réfléchir sur son devenir. Depuis, l’appel à idées s’est mué en appel à projets et une série de « concertations publiques » a permis en 2012-2013, de définir un cahier des charges. Pour les utilisateurs et riverains de Lescure, il y a une certitude : le lieu doit conserver, voire renforcer sa vocation sportive et le stade, dernier témoin de l’architecture Art déco en France, doit être préservé. Épaulée par des riverains connaisseurs (un profes-seur reconnu en histoire de l’Art déco, des architectes, des sportifs et professeurs d’éducation physique…), la mobilisation prend rapidement forme. D’abord, autour d’un blog (la tribune de lescure.fr), puis d’un col-lectif « Préservons Lescure » qui réunit plusieurs centaines de sympathisants, issus des associations locales.Ensemble, ils contestent le projet, aujourd’hui retenu en « avant-pro-jet » par la mairie de Bordeaux. Pensé par l’architecte Pierre Ferret et porté par un groupement d’entre-

prises autour de Vinci, le projet entend « décloisonner » le parc pour transformer ce « stade en ville » en un « stade urbain » ou « jardin des sports » (1). Ainsi, les grilles qui entourent le complexe Lescure dispa-raîtraient, pour joindre notamment les espaces sportifs au jardin de la Béchade par une liaison piétonne sur la rue Léo-Seignat. Les pistes d’athlétisme (400m et 110m/haies) ainsi que les deux frontons de pelote basque disparaissent au profit d’un jardin ouvert au public, à l’arrière du stade… Sur le côté est, le centre sportif Albert-Thomas, construit en 1998 serait détruit pour relocaliser une partie de ses équipements ave-nue du parc Lescure, dans une salle multisports de 1 694 m2 (2346 m2 auparavant). Rue Albert-Thomas, ce sont des résidences pour étudiants et seniors, des bureaux et des apparte-ments qui sont censés donner vie à un espace « intergénérationnel ». Enfin, la grande arche des boulevards sera l’ouverture d’une halle accueillant un marché alimentaire et des boutiques. Le stade lui-même serait donc acces-sible au pied des tribunes, réduites à 25 000 places, pour laisser place à des loges et salon de réception qui se nicheraient au haut des virages populaires Nord et Sud.

Témoin du style Art déco

Habitant du quartier, engagé dans le collectif en sa qualité de vice-Pré-sident de l’Association de Défense et d’Animation du lotissement des Camélias, le communiste Daniel Leymarie s’inquiète grandement de ce projet qui réduit la plaine des sports à un « jardin sportif » de 1,5 ha et s’attaque à l’architecture Art déco du stade, dernier témoin en France de ce style. Les fameux esca-liers « vénitiens » adossés aux tribunes disparaitraient. « Rien n’est définitif », a répondu l’architecte qui porte le projet (2), faisant immédiatement valoir que si le stade a été inauguré en 1938 avec ces escaliers, ils avaient « été rapportés par l’architecte de la ville, Jacques d’Welles, qui s’est emparé du projet », et non par « celui qui est considéré comme le concepteur

des qualités architecturales reconnues aujourd’hui », Raoul Jourde. Long débat d’historiens en perspective… Débat de géomètres à prévoir aussi tant le décompte des espaces effec-tivement consacrés au sport est difficile à la lecture du projet retenu par la mairie.

Mobilisation de riverains

Mais les débats sont bien plus simples : faut-il par exemple laisser ouverts des équipements sportifs, au risque de les confisquer aux utilisa-teurs actuels (de 500 à 800 personnes par jour dont de très nombreux scolaires) ? Faut-il, par exemple, priver tous ces utilisateurs, tous ces jeunes scolaires d’équipements et d’installations sportives qui ont fait le bonheur de si nombreuses généra-tions ? Ou doit-on consacrer encore de la place aux commerces dans une ville qui est déjà sur-équipée ? Pour les membres du collectif, la réponse est claire : c’est non. La pétition qu’ils ont initiée (3) a aujourd’hui recueilli près de 2 500 signatures en ce sens et les élus écologistes au Conseil muni-cipal ont déposé une contribution demandant que toutes les réponses à l’appel à projet soient réétudiées pour prendre mieux en compte l’avis des riverains et des utilisateurs.Côté mairie, l’adjoint de quartier assure aussi que « rien n’est figé ». Mais Alain Juppé siffle lui-même la fin de la partie, renvoyant les opposants à des postures conservatrices : « Le projet se heurte aux préoccupations des habitants dont la principale ambition est que rien ne change », a-t-il lancé. Les manifestants de 1995 n’étaient pas mieux traités. Mais il avait quand même dû retirer son projet…

Vincent Bordas,avec l’aide amicale des membres du

collectif « Préservons Lescure »

1 - www.bordeaux2030.fr/bordeaux-de-main/parc-lescurechabandelmas

2 - « Les rénovateurs de Lescure répondent aux critiques », Rue 89.com

3 - « SOS stade Chaban-Delmas » sur www.change.org

Tous les coups voudraient bien être permis contre les milieux artis-tiques, les collèges, les lycées, les universités. L’état d’urgence rêve de faire oublier l’état d’urgence sociale, l’état d’urgence culturelle, l’état d’urgence artistique…

Dès la première semaine de février, à Bordeaux et à Talence, le monde des enseignants, des artistes, des élèves, a agi, exprimé ses craintes et ses exi-gences lors de deux manifestations aussi différentes que convergentes…La première, mardi 2 Février, avait un caractère officiel, rituel, symbolique. Catherine Marnas, la directrice du Tnba, n’ a pas manqué de le souligner dans son allocution liminaire. Il s’agissait, après la présentation d’un travail théâtral remarquable d’élèves de première du lycée Montesquieu, de fêter et d’officialiser les relations suivies entre le Tnba et les lycées d’Aquitaine à option(s) théâtre. Les proviseurs des lycées de Nérac (47) de Parentis (40) et de Bordeaux (33) ont défendu ces enseignements option-nels avec conviction. Enseignants et artistes intervenant dans ces sections étaient présents. Ils ont apprécié la fermeté avec laquelle Marie-Laure Piroth, au nom de T.E.A (Théâtre, Éducation, Aquitaine) est intervenue auprès du Recteur pour la défense de cet enseignement (1). Le Recteur s’est engagé à maintenir les moyens de ces options pour la rentrée 2016 et cette concession n’est pas sans rapport avec la mobilisation des intéressé-e-s. Mais rien n’est dit pour la suite et les inquiétudes sont justifiées.Mercredi 3 février, en salle de mu-

sique, à La maison des Arts (Bor-deaux III), une cinquantaine de par-ticipants se sont rassemblés. Pour la première fois depuis longtemps, des enseignants de disciplines artistiques différentes et de niveaux différents se sont réunis et unis. Mais aussi des artistes et des élèves, des étudiants. Les élèves de terminale-théâtre d’Orthez (2), des profs de fac d’arts plastiques, de musique, de cinéma, deux représentants de syndicats, des enseignants de sections artistiques des établissements de Langon et de Libourne notamment, étaient présents dans l’assemblée. Ces sections à option artistique sont vitales, et on ne peut que se féliciter de constater que, becs et ongles, elles sont portées et défendues, dans un monde où d’aucuns, du plus haut niveau de l’État jusqu’à la commune, rêvent de promouvoir les « événements » artistiques et leur marchandisation, de substituer la communication à la culture.Se battre pour la pérennisation et le développement de ces options artistiques, en étroite relation avec les professionnels, c’est œuvrer ici et maintenant pour un mariage entre arts, culture et éducation.

Vincent Taconet

1 - À signer, l’Appel de Saint Etienne : www.lappeldesaintetienne.fr

2 - Dans la pétition « Ne tuons pas nos options », qu’elle a lancée, Gina Urrutia (17 ans) écrit : « Cela veut-il dire que les gens à petits moyens ne méritent qu’une petite culture ? »

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6 • Les Nouvelles 11 février 2016

INTERNATIONAL

RENCONTRE

« Il faut des pressions économiques car un processus démocratique n’a aucune chance de fonctionner »Tali est traductrice. Cette militante de l’opposition israélienne de 32 ans vit en territoire palestinien. Elle est membre active de BDS.

BOYCOTT, DÉSINVESTISSEMENT, SANCTIONS (BDS)

Un mouvement citoyen, international

SOIRÉE DU « COLLECTIF SOLIDARITÉ AL QARARA »

L’enfer de Gaza…

Comment, en tant que citoyenne israélienne, vivez-vous la colonisation des territoires palestiniens ?

En tant que citoyenne israélienne je ne vis pas la colonisation des terres palestiniennes.Le système est construit de telle façon que nous ne sentons pas les réper-cussions de notre violence coloniale. L’apartheid s’exprime non seulement dans l’unilatéralité de l’injustice vécue par une partie de la population mais aussi dans le fait que l’autre partie, privilégiée, ne voit pas l’injustice.Mais en tant qu’opposante israélienne, je vis et je respire la colonisation. Je vois les gens que j’aime et les amis tout perdre en un instant, quand on les isole et qu’ils deviennent partie intégrante de la punition collective.

Qu’est-ce qui vous a amenée à devenir militante de BDS ?

Grandir dans la société israélienne et tenter de dénoncer le crime que comet l’État en notre nom nous conduit toujours droit dans le mur. Les réactions face à notre activisme sont de plus en plus violentes et cela se voit. Pour la plupart d’entre nous, la seule façon d’obtenir des résultats est de faire pression sur l’État d’Israël par des moyens économiques parce qu’un processus démocratique n’a aucune chance de fonctionner. Pour commencer, les Palestiniens n’ont aucun mot à dire par rapport à leur destin. Ils sont mis à l’écart, boycottés, exclus de la démocratie, ce qui revient à dire qu’il n’y a pas de démocratie. Il faut mesurer ensuite la véhémence que l’État d’Israël oppose aux droits de l’homme, leur système est basé sur les crimes de la colonisation. Il faut enfin prendre en compte que nous parlons de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité, et probablement aussi de génocide. Tous ces crimes

sont sanctionnés par des instances juridictionnelles internationales. Ce qui veut dire que le monde a le devoir d’intervenir.

Entre Israël et Palestine, comment s’articule l’action de BDS localement ?

L’une des revendications est l’éga-lité des droits pour les Palestiniens à l’intérieur d’Israël. Le mouvement BDS est constitué de tous les compo-santes de la société palestinienne : les populations de Gaza, de Cisjordanie et de l’intérieur d’Israël ainsi que des réfugiés palestiniens du monde entier. Le clivage entre ces groupes est le résultat de l’épuration ethnique, des politiques contre la liberté de mouve-ment (contrôles, chekpoints…) et de retour des réfugiés. C’est pourquoi nous recherchons l’unité entre toutes ces composantes.

Au premier ministre français, Manuel Valls, qui affirme que tous les mili-tants pour le boycott sont antisémites, qu’aimeriez-vous dire ?

Ma nièce est un bébé juif. Elle est citoyenne d’Israël. Elle a exactement le même âge qu’Ali Bawabsha qui a été brûlé par des colons israéliens. Je ne veux pas que des bébés brûlent. Je pense que M. Valls voit les choses à l’envers : le fait de brûler la famille Bawabsha est un pogrom raciste et ce n’est pas un acte isolé. De tels pogroms sont systématiquement encoura-gés. La diffamation du mouvement BDS est un acte contre les droits de l’homme et leurs défenseurs et va à l’encontre du consensus international qui dit que les droits de l’homme doivent toujours être respectés et revendiqués. Je pense que M. Valls a le devoir d’être un leader politique plus responsable. Surtout venant d’un État qui se considère comme faisant partie du « monde éclairé. »

En 2005, des militants propalesti-niens lancent à travers le monde un appel au « boycott, au désinvestisse-ment et aux sanctions contre Israël ». Le mouvement, inspiré du boycott de l’Afrique du Sud dans les années 1980 et appelé « BDS », s’oppose à l’occupation israélienne par des appels répétés au boycott de compagnies israéliennes et étrangères opérant dans les colonies israéliennes ou dans les territoires occupés.En France, où le mouvement s’est lancé en 2009 après la guerre de Gaza,

on compte une cinquantaine d’asso-ciations et d’organisations signataires. De nombreux débats, notamment sur la nature du boycott, traversent ce mouvement parfois instrumentalisé à des fins politiques, peu louables, de divisions et de haine. Mais la majorité des citoyens qui s’emparent de BDS en France et dans le monde, veulent sur-tout imposer à Israël le respect des lois et décisions internationales, mettre fin à la colonisation et à l’apartheid imposé aux Palestiniens. Ils veulent une paix juste et durable.

Le « Collectif Solidarité Al Qara-ra » organisait, samedi 6 février à l’école de Saint-Pierre d’Aurillac une rencontre pédagogique et conviviale sur le sujet palestinien avec deux invités de marque : Taou-fik Tahani, président national l’Association France Palestine Solidarité et Ibrahim Kashan, président de l’Association pour le Développement humain à Al Qa-rara qui est intervenu par Skype 1 depuis Gaza. Un grand, très grand moment d’émotion et de liberté au-dessus des murs et des miradors qui enferment Gaza, victime depuis plusieurs années d’un blocus inhu-main !

Tous les ans, Solidarité Al Qarara invite une personnalité nationale afin qu’elle développe son « propre regard sur la Palestine ». L’invité du 6 février était Taoufik Tahani, le président national de l’Association France Palestine Solidarité.Dans la première partie de cette ren-contre, Taoufik Tahani a abordé, à la demande de Michel Hilaire, co-pré-sident du collectif, le cheminement de son engagement de franco-marocain en faveur des Palestiniens ; cet enga-gement très affectif de jeune étudiant marocain s’est bâti plus concrètement, ensuite, à la lecture des écrits et sous l’influence des idées d’Abraham Ser-faty, militant antisioniste convaincu, issu d’une famille juive de Tanger. Il a ensuite expliqué comment le gouvernement israélien foulait aux pieds les décisions internationales concernant la création d’un État palestinien alors que les négociations d’Oslo avaient déjà représenté un compromis très désavantageux pour les Palestiniens. Ceux-ci avaient accepté de ne revendiquer que 22 % du territoire sachant que 60 % de ce même territoire leur était attribué sous l’appellation « Zone C » c’est à dire sous autorité militaire israélienne. Il a également expliqué comment le grignotage illégal des colonies et la « judaïsation » de Jérusalem étaient de véritables provocations visant à rendre impossible tout futur accord et la constitution d’un État palestinien. Cette politique de la terre brûlée ne laisse entrevoir aucune solution, attise la haine et nourrit tous les ter-rorismes au point que des intellectuels juifs de plus en plus nombreux s’in-quiètent d’une disparition, à terme, d’Israël si aucune solution viable n’est recherchée laissant comme seule issue

un déchaînement sans précédent de violences. La volonté d’Israël de donner enfin un caractère religieux à ce conflit, notamment en reven-diquant l’esplanade des mosquées, rend impossible tout règlement car si on peut négocier « politiquement » sur les questions de colonisation et d’occupation, on ne négocie pas sur « le religieux » qui a, par essence, un caractère sacré et divin.Pour Taoufik Tahani, seule une ini-tiative internationale forte (réunion, conférence…) comme l’a proposé dernièrement le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, peut permettre de débloquer la situa-tion. Le déséquilibre (militaire, finan-cier, économique…) entre Israëliens et Palestiniens est si important qu’il est illusoire de les laisser négocier en tête à tête « c’est comme si on enfermait un loup et un agneau dans une pièce en leur demandant de s’entendre, c’est impensable… sauf à changer tous les jours d’agneau… ». Il a appelé égale-ment à intensifier la campagne BDS (Boycott Désinvestissement Sanction) contre Israël en s’indignant des déci-sions gouvernementales françaises (en particulier la circulaire Alliot-Marie encore en vigueur aujourd’hui) visant à criminaliser cette action qui ne vise pourtant qu’à obliger Israël à respecter le droit international. Le boycott a fait ses preuves dans le passé en particulier concernant l’Afrique du Sud mais la loi française l’interdit pour un seul pays, Israël, l’assimilant à de l’anti-sémitisme. Selon Taoufik, la décision de l’autorité palestinienne de solliciter son adhé-sion à la Cour Pénale Internationale et de demander une enquête sur les crimes de guerre commis par Israël peut faire évoluer la situation dans le sens du respect du droit. Cette analyse a bien sûr été suivie d’un débat où ont été notamment abordés l’inquiétante incapacité des différents courants palestiniens à s’entendre, le rôle du Fatah et de Mammoud Abbas, ainsi que des doutes sur l’efficacité du « boycott » quant à l’emploi de travail-leurs palestiniens.

Témoignage en direct

Vers 19h30, Ibrahim Kashan le pré-sident de l’Association pour le Déve-loppement Humain est apparu sur le tableau blanc de la classe primaire pour parler, par Skype 1, de la situation à Gaza. Moment d’émotion pour tous les participants.Malgré les promesses de dons et de

reconstruction pris par la commu-nauté internationale, la situation à Gaza est au point mort avec un siège et un blocus terribles et le non-respect de tous les engagements. Les matériaux de reconstruction ne rentrent pas, certains sont mêmes interdits, comme le bois, sous prétexte qu’il peut servir à construire des tunnels. « Dans certains quartiers, on dirait que les bombarde-ments ont eu lieu la veille et les gens vivent encore dans les ruines ». L’élec-tricité ne fonctionne que quelques heures par jour désorganisant le travail des (rares) usines encore en fonction, des écoles, et toute la vie familiale. Les pêcheurs renoncent à prendre la mer sous le feu des bâtiments de guerre israéliens qui leur tirent des-sus, privant ainsi les Gazaouis d’une ressource importante venue de la mer. Ceci alors que l’accord de cessez-le-feu avait autorisé la pêche aux Palestiniens sur une distance encore plus grande des côtes. Les paysans d’Al Qarara ont vu leurs plantations dévastées lors de la guerre de 2014 et n’ont plus le courage de replanter, d’autant plus que le coût de la vie et des produits a tellement augmenté qu’ils deviennent inaccessibles à la plupart des habitants durement plombés par des taxes du Hamas qui contrôle Gaza sous une poigne de fer, restreignant fortement les libertés.

Une terrible lutte contre les traumatismes de guerre

Il nous a confirmé que l’essentiel du travail de l’association, outre les aides de premier secours humanitaires, était de développer les activités de soutien scolaire et de jeu pour les enfants (deux salles supplémentaires viennent d’être construites dans le local de l’association) afin de combattre les traumatismes de guerre qui affectaient très fortement les familles. Ibrahim Kashan semble avoir perdu son optimisme. « C’est intenable, a-t-il dit, mais le monde entier nous ignore. On parle de la Syrie, de L’Irak, de l’Afrique mais pour Gaza, c’est le silence alors que c’est terrible : plus de travail, plus de lien social, on ne sait même plus qui paie les fonctionnaires qui pour la plupart n’ont même plus de boulot faute d’infrastructures, on meurt à petit feu… Dans la situation actuelle, si les frontière s’ouvrent, il faut s’attendre à un exode massif de plus d’un million de personnes. »Difficile de mener une action dans ces conditions désespérées mais l’associa-tion Solidarité Al Qarara a fait le pari de continuer son travail d’aide finan-cière et d’encouragement à leurs amis palestiniens. Ibrahim Kashan (qui n’avait pas accès à l’image de l’assem-blée) a retrouvé le sourire quand il a entendu le tonnerre d’applaudisse-ments spontanés qui ont clôturé la fin de la rencontre. Il s’est mis lui-même à applaudir avec ses trois enfants assis près de lui. Ce soutien qui lui a fait « chaud au cœur » !

Michel Hilaire1 - Logiciel de communication (écrit, son, vidéo) à distance, par internet

Plus de 40 personnes assistaient à cette soirée présentée par Michel Hilaire, un des trois co-présidents de « Solidarité Al Qarara » avec Anne Larrouy (Saint-Pierre d’Aurillac) et Philippe Lasserre (Fargues de Langon).

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Les Nouvelles 11 février 2016 • 7

PCF

37E CONGRÈS DU PCF

Je participe !MACHINE À LIRE

Rencontre avec Patrice Cohen-SeatJeudi 18 février à 18h30, autour du livre « Peuples ! Les luttes des classe au XXIe siècle », publié aux éditions Démopolis.Pourquoi les peuples européens sont-ils impuissants à défendre les acquis sociaux et démocratiques obtenus suite aux luttes politiques du siècle dernier ? La lutte des classes a-t-elle disparu ou doit-on considé-rer, comme le suggère le milliardaire Warren Buffet, qu’elle a été gagnée par les dominants ? Dans son livre, Patrice Cohen-Séat revient, d’un point de vue historique et théorique, sur les ressorts de la lutte des classes, sur l’épuisement du socialisme d’État ainsi que sur les

évolutions des sociétés occidentales mondialisées. Il ne s’agit pas de renoncer mais il devient urgent de repenser un projet de société et un projet politique qui soient articulés, de redonner un sens et un contenu aux classes sociales et notamment à la classe ouvrière. Comme le précise Gérard Mordillat dans sa préface, « l’essai de Patrice Cohen-Séat nous place devant nos responsabilités. La première est de rendre aux classes populaires la conscience d’elles-mêmes, de leur force, de leur intelligence, de

leur capacité à penser le monde en dehors du modèle néo-libéral qui les condamne. »Patrice Cohen-Séat est avocat et président de l’association Espaces-Marx. Il a exercé des responsabi-lités au sein du Parti Communiste Français. Il a publié, en 2007, chez Calmann-Lévy Communisme. L’ave-nir d’une espérance.La rencontre, proposée par l’Espaces Marx, sera animée par Vincent Tiberj.

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Solidarité avec le peuple kurdeBordeaux, le 8 février 2016Ce week-end, Erdogan a commis un nouveau massacre contre les kurdes de Turquie en exécutant 67 personnes à Ciziré.Le déchaînement de violence contre les Kurdes constitue un crime contre l’humanité qui a déjà fait, en quelques semaines, plusieurs milliers de victimes et 200 000 déplacés dans les villes placées sous blocus par l’armée et la police.Les attentats, les assassinats poli-tiques, les arrestations d’élus et de journalistes s’amplifient. Les bombardements contre les forces kurdes, notamment le PKK, qui combattent les criminels de Daesh,

s’intensifient en Syrie (Rojava) et en Irak. Les migrants qui fuient les conflits sont livrés, sur le territoire turc, aux trafics mafieux dans l’impunité la plus totale.Pendant ce temps, la France, l’UE et l’OTAN se rendent complices d’Erdogan par leur silence, leur soutien et leur soumission à ses injonctions.La fédération de la Gironde du PCF exprime sa solidarité avec les démocrates turcs, le peuple kurde et avec le co-président du HDP, S. Demirtas, aujourd’hui gravement menacé. La duplicité et le cynisme avec R.T. Erdogan doivent cesser.

La France et l’UE doivent peser de tout leur poids pour faire respecter la démocratie et les droits humains en Turquie.Elle s’associe à toutes les manifesta-tions et rassemblements décidés par les Kurdes de Bordeaux et l’associa-tion Franco-kurde.Le silence de la France doit cesser face à ces massacres. Erdogan doit être condamné par la communauté internationale et l’Union euro-péenne.

Sébastien LabordeSecrétaire départemental de la fédération de Gironde du PCF

TERRORISME

Résistance et solidaritéMi-janvier, Sébastien Laborde, secrétaire départemental, au nom de la fédération de Gironde du PCF, adressait une lettre de sou-tien à M. Tareq Oubrou, imam et grand recteur de la mosquée de Bordeaux, menacé de mort par les terroristes, suite à ses décla-rations où il affirme son refus de vivre dans un climat de peur, ce qui serait la première victoire des terroristes…

Le dirigeant girondin l’a assuré de son soutien le plus total face aux menaces qu’il doit affronter : « Ces menaces apportent, s’il en était besoin, la preuve que c’est la Répu-blique toute entière qui est dans la ligne de mire des terroristes et, en

son sein, tous ceux qui se battent pour le vivre ensemble, la tolérance et la paix.C’était déjà le cas à Paris où la rédaction d’un journal et des lieux de vie culturelle ont été attaqués. C’est le cas dans le monde, quand les touristes qui veulent découvrir la richesse culturelle d’une ville comme Istanbul sont visés. Et en Syrie comme en Irak ou en Afgha-nistan, ce sont des populations qui voudraient simplement vivre digne-ment qui sont quotidiennement frappées depuis trop longtemps.Je dois saluer aussi la dignité avec laquelle vous affrontez cette situa-tion. Je partage entièrement votre opinion : notre pays est soumis à la peur permanente et c’est exactement

l’effet recherché par les terroristes.Pour les contrer, il faut reprendre le chemin de l’échange citoyen, du dialogue laïc et de la réponse politique. Comme vous le souli-gnez parfaitement, les politiques étrangères des grandes puissances ont contribué à produire le chaos sur lequel prospèrent les assassins aujourd’hui à l’oeuvre. En retour, les actes de ces derniers font prospérer les forces du repli et de la haine sur notre continent.Notre pays a la force de casser cette spirale infernale. Votre com-portement est un atout salutaire dans ce sens et, au nom du Parti communiste de Gironde, je vous en remercie. »

Les 5 et 6 mars prochain, le conseil national adoptera sa proposition de base commune de discussion sur les trois objectifs du congrès : le sens de notre combat communiste et notre projet pour la France ; les perspectives pour les échéances électorales de 2017 ; les transformations du PCF. La contribution des communistes dans cette première phase de débat est essentielle. Pour l’animer, le PCF organise des « débats de la semaine » :congres.pcf.fr/81673Ceux des deux dernières semaines sur les classes populaires et des points clés comme « la question écologique » ou « la République, la France, l’ identité » ont débouché sur nombre de propo-sitions concrètes. 45 contributions ont été reçues par la commission « transparence des débats » ou sur le site du congrès :congres.pcf.frSur des thèmes variés : le com-munisme, la crise systémique, la révolution numérique, le travail, l’entreprise, les salaires, la jeunesse, l’Europe, la démocratie, la presse, l’analyse des régionales, les enjeux de 2017, le Front de gauche, la gauche, le PCF et ses transformations, le travail de ses directions, ses élus, le lien avec les classes populaires, la communi-cation… merci à tous les camarades qui ont déjà déposé leur contribution. Afin que le débat progresse, des

compte-rendus et synthèses se re-trouvent dans la rubrique « l’Écho du débat » :congres.pcf.fr/81908La qualité du Congrès de juin dépend beaucoup de ce travail collectif. N’hésitez pas à vous lancer, il n’y a pas de petite contribution !Bien entendu, ces outils ne se subs-tituent pas aux espaces de débat traditionnels. Ils doivent au contraire permettre de susciter des rencontres de qualité entre les communistes et leurs concitoyens. En Gironde, en plus de la réflexion et des initiatives des sections, 4 débats sont co-organisés avec le Conseil départemental du PCF 33 en mars et avril :Europe. Semaine du 7 mars, à Bègles : « Comment les démocraties européennes, les peuples européens peuvent-ils déjouer les coups d’ état financiers ? »République. Semaine du 21 mars, à l’Université : « Comment refonder la République ? » Travail. Semaine du 4 avril sur la rive droite : « Code du travail, quels droits pour les salariés ? » Animation d’une campagne « 0 chômeur, tous travailleurs » dans la durée.La gauche. Semaine du 18 avril à Bordeaux : « Quelle perspective de progrès social et démocratique ? »

BASSENS. Notre camarade JEAN DORNIAS, conseiller municipal à Bassens de 1989 à 2001, puis adjoint de 2001 à 2014, n’est plus. L’hommage du Parti communiste et de ses amis, de l’ADECR, lui a été rendu lors de ses obsèques, le 9 février au crématorium de Montussan, par Josyane Maestro, maire-adjointe de Bassens. (extraits)«Toujours à l’écoute, cherchant sans relâche à trouver les meilleures solutions pour apporter des réponses adaptées aux gens qui te sollicitaient, tes conseils clairvoyants ont tant de fois été appréciés, tout cela tu le faisais naturellement car tu étais porteur d’espoir et de confiance dans les êtres humains.»«Tes engagements syndicaux à la CGT, tes engagements politiques au sein du Parti Communiste Français, en homme scrupuleux, honnête, combatif, t’ont amené à des responsabilités importantes»… «Tu as été de ceux qui «parlent haut pour tous les damnés de la terre», tous ceux qui se battent pour une société plus juste.»«Sur la fin de ton dernier mandat, tu as exprimé une grande fatigue qui nous inter-rogeait»… «Ta famille t’était fondamentale… Saches que tes amis et camarades seront au plus près de Nicole et des enfants pour les soutenir et les accompagner, plus particulièrement encore dans cette période si douloureuse»…»Les commu-nistes et leurs amis resteront fidèles à tes idéaux.»

Carnet

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8 • Les Nouvelles 11 février 2016

AVIS DE CONSTITUTION

Suivant acte reçu par Maître Clé-ment BALLADE, Notaire Associé 15, route de Léognan, le 26 janvier 2016, a été constituée une société civile immobilière ayant les caractéristiques suivantes :La dénomination sociale est : NATU-RAN’IMMOLe siège social est fixé à : BORDEAUX (33800), 331 Boulevard Jean Jacques BOSC.

La société a pour objet : l’acquisition par voie d’achat ou d’apport, la propriété, la mise en valeur, la transformation, la construction, l’aménagement, l’ad-ministration, la location et la vente (exceptionnelle) de tous biens et droits immobiliers, de tous biens et droits pouvant constituer l’accessoire, l’an-nexe ou le complément des biens et droits immobiliers en question.Durée de 99 années à compter de son immatriculation au RCS de BordeauxLe capital social est fixé à la somme de : 1 000 €

Le premier gérant de la société est : Madame Amélie DUBERNET, épouse de Monsieur Marius Gilbert DUBER-NET, demeurant à CAPIAN (33550) 52 chemin de Lavergne.

Pour avis, Le notaire

Il a été décidé de constituer une société dont les caractéristiques sont les suivantes :Forme : SASDénomination : CR & CG consultSiège social : 8 avenue Pasteur 33185 Le HaillanObjet social : Etudes, conseils, gestion de projets et cessions immobilièresCapital : 1 000 €Président : M. Lionel ROUZEAU né le 25/03/1965 à Pessac, domicilié 105 avenue Pasteur 33185 Le Haillan.Directeur Général : M. Stéphane GAILLOT né le 26/10/1977 à Metz (57), demeurant 2 impasse de la Libération 33440 Ambarès et Lagrave.

Immatriculation au RCS de Bordeaux en cours,

Pour avis,

ANNONCES LÉGALES

CULTURES & SOLIDARITÉS

Les Nouvelles de Bordeaux et du Sud-Ouest S.A.S. au capital de 37 000 eurosAssociés (à parts égales) : L. Chollon, F. Mellier, S. LabordeDirecteur de la publication : Frédéric MellierAbonnement 1 an : 25 euros. Abonnement de soutien : 40 eurosRédaction, composition, impression : S.A.S. Les Nouvelles de Bordeaux et du Sud-Ouest15, rue Furtado - 33800 BORDEAUXTél. 05 56 91 45 06 - Fax 05 56 92 61 01 - Annonces légales : [email protected]é : [email protected] - Redaction/Proposition d’article : [email protected] nbso.frCommission paritaire de presse : 0113 C 85932

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CHRONIQUENOUVELLES IDÉES REÇUESpar Gérard Loustalet Sens

Ayant désormais acquiescé à tous les dogmes de l’économie néo-libérale, il était logique que la social-démocratie s’attache à valoriser maintenant des thèmes qui relèvent de la philosophie politique de la droite, en particulier l’ordre, la hiérarchie, l’autorité. Hollande, avec sa roublardise habituelle (parler de machiavélisme à son propos serait lui faire beaucoup d’honneur), a placé ses hommes liges, Macron et Valls, potentiels rivaux, sur ces deux créneaux : Macron, chargé de lever par tous les moyens tous obstacles à l’exploitation maximale de la force de tra-vail par le capital ; Valls, chargé de veiller au silence dans les rangs et à ce que les têtes se baissent face aux injonctions de l’oligarchie.

Selon Max Weber, l’Etat contemporain « dans les limites d’un territoire donné revendique pour son propre compte le monopole de la violence physique légitime » (Le Savant et le Politique, 1919). C’est donc cette violence légitime que Valls est chargé d’appli-quer. Il ne s’en prive pas. Quels sont les objectifs ? Tout d’abord le maintien de l’ordre et avant tout de l’ordre social, ce qui doit dépasser toute autre consi-dération, conformément au propos prêté à Goethe : « je préfère commettre une injustice que souffrir un désordre ». Le maintien de l’ordre social n’est pas le seul fait des forces policières et militaires. Autrefois l’Eglise s’en mêlait, aujourd’hui, ce sont les médias. Rappelons- nous cette incroyable séquence, en 2009, où l’on vit Pujadas harceler Xavier Mathieu, délégué CGT de Continental Clairoix, pour lui faire désavouer, en direct à la télévision, ses camarades manifestant devant la sous-préfecture de Com-piègne… Pujadas ne parvint pas à ses fins mais son rôle indigne de misérable supplétif du maintien de l’ordre était apparu au grand jour… La violence de l’Etat n’est pas que physique, elle est aussi largement symbolique et, en cela, inaperçue.

On en est au point où Valls reprend les obssessions mêmes de la droite vis à vis des étrangers avec par exemple cette violente sortie aux allures d’extrême-droite, en septembre 2013, sur les Roms qui ne voudraient pas « s’intégrer » et auraient « vocation à rentrer en Roumanie ». C’est ce que les politiciens, jamais à court d’un cliché, appellent « dire la vérité aux Français ». C’est qu’il en faut du « courage  » pour s’attaquer à cette population ultra-minoritaire, fragile, démunie, dénigrée et rejetée partout… Valls, quel homme d’Etat ! Tout cela a un parfum de cette droite furieuse des années 30 où l’étranger était traité de « racaille », de « vermine », de « pègre », de « métèque »… C’est toute une politique national-sécuritaire qui est alors mise en place. Exemple, cette infâme circulaire Chautemps du 2 août 1933 indiquant que « l’introduction en France des Israëlites chassés d’Allemagne doit se poursuivre avec une extrême circonspection ». La majeure partie de ces réfugiés étaient issue des classes moyennes (universitaires, professions libérales) et de la petite bourgeoisie (artisans, petits commerçants) (Gérard Noiriel, Immigration, racisme et antisémitisme en France. XIXe-XXe siècles, 2007, p.391). Cela rappelle quelque chose.

La stratégie national-sécuritaire, dans les années 30, encourageait les bassesses de la xénophobie et les pratiques sordides de la délation… Certains, à Nice, par exemple, dénonçaient le trop grand nombre de concierges italiens… Il y a toujours de tristes sires prêts à dénoncer le voisin… La police en est friande. On y retrouve notre actualité avec l’article 9 de la loi de 1927 sur la déchéance de nationalité qui commençait à s’appliquer alors à l’encontre des militants communistes naturalisés français. Ainsi « Thomas Olszanski, un mineur d’origine polonaise, respponsable de la CGTU, est-il privé de la nationa-lité française en 1932 et expulsé en 1934. La même année, 77 mineurs polonais de Leforest, travaillant pour la compagnie de l’Escarpelle (Pas-de-Calais) sont eux aussi expulsés parce qu’ils ont mené une grève au fond de la fosse » (Gérard Noiriel, o.c. p.400). Comme on voit, Hollande et sa clique n’ont rien inventé : ils se contentent de reprendre les pires traditions d’une droite scélérate et obtuse pour qui il n’est pire tare que d’être à la fois ouvrier et étranger.

Maintien de l’ordre et xénophobie

MÉMOIRE DE L’ESCLAVAGE

Célébrer le 4 février pour célébrer et réhabiliter les combats de ceux qui résistèrent

Le 4 février, l’association Mémoire et Partage organisait la commé-moration du 222e anniversaire de la première abolition de l’esclavage dans les salons de l’hôtel de ville de Bordeaux.

Karfa Sira Diallo, directeur de Mé-moire et Partage animait cette soirée à laquelle participait Marik Fetouh, adjoint au maire de la ville de Bor-deaux et Angèle Louviers du Comité national pour la mémoire et l’histoire de l’esclavage.Le président de l’association, Patrick Serres, a rappelé que ce crime contre l’humanité extermina 45 millions de noirs victimes de la traite et de l’escla-vage. « Car pour être tout à fait cohérent avec l’ histoire, la traite occidentale fut malheureusement accompagnée (précédée et/ou suivie) par la traite orientale et la traite intra africaine. Pour nous Bordelaises et Bordelais, Girondins, ce ne furent pas moins de 508 expéditions d’armateurs, soit en commerce triangulaire soit en droiture qui générèrent 150 000 déportations d’esclaves africains. » « Ces enfants, ces femmes et ces hommes déracinés, maltraités, terrifiés trouvèrent pourtant les ressources morales et physiques de résister. » « Si cette première abolition de l’esclavage émerge donc en 1794, elle est indubitablement liée à la révolte des esclaves eux-mêmes et leur lutte mais aussi aux idéaux de notre 1re révolution de 1789.Le même processus va se renouveler pour la date de l’abolition de l’esclavage du 27 avril 1848, plus connue, qui fait suite à la 2ème révolution et à l’avènement de la 2ème République. »« C’est donc pour célébrer et réhabiliter à la fois ces combats des esclaves eux-mêmes, mais aussi celui de ces femmes et hommes blancs qui, à contre courant et souvent minoritaires au départ, osèrent dirent à leurs congénères que celui qui enchaîne, qui avilit, qui rejette ou

exploite l’autre parce que différent : s’enchaîne lui-même, se sclérose et régresse. Et c’est en cela que Mémoires et Partages s’ancre dans le présent et veut influer sur l’avenir. »« Bien au-delà de la victimisation et de la culpabilisation, le travail mémoriel concourt, à son niveau, à éviter les fan-tasmes liés aux non dits, à permettre à tous d’accepter son histoire lucidement, sereinement, de manière apaisée. » Invité à prendre la parole pour le Parti communiste français et les élus communistes, Sébastien Laborde a salué le travail de mémoire de l’asso-ciation sur Bordeaux et la Gironde, « notamment le travail que mène Karfa depuis une vingtaine d’année, qui est, de notre point de vue très important car on ne peut pas comprendre le monde dans lequel nous vivons, la société dans laquelle nous vivons, sans connaître notre histoire. » Il a rappelé que le Parti communiste était co-organisa-teur, il y a deux ans, d’ une première conférence pour faire connaître cette date du 4 février 1794 à Bordeaux. « Nous avions accepté parce qu’elle est intéressante à plus d’un titre. D’abord, elle montre la portée de la révolution de 1789 qui en venant à l’appui des luttes d’esclaves dans les Caraïbes conduit à cette première abolition. Ensuite, elle montre que rien n’est jamais acquis, aucun droit. La société dans laquelle nous vivons aujourd’hui nous le rappelle parfois cruellement, particulièrement ces dernières années dans une société déchirée, marquée par la crise où le racisme, les discriminations perdurent. Ce travail de mémoire nous permet de lutter contre ce racisme et nous permet de réaffirmer que ce que nos ancêtres ont été capables de faire en 1794, nous devons être capable de le faire dans la société d’aujourd’hui, encore plus fortement. »« À l’instar de ce qui se fait à Nantes, avec des instances, un mémorial, un musée, pour populariser le travail de mémoire, la ville de Bordeaux dont le port était un lieu important du com-

merce triangulaire, devrait avancer en ce sens dans les années qui viennent. » Jean-Pierre Lefebvre de l’association des Amis du Clown Chocolat à Bor-deaux a évoqué la découverte de ce personnage formidable. Né à Cuba en 1868, ce fils d’esclaves « nègres mar-rons », a été vendu à 8 ans et placé dans une ferme située en Espagne près de Bilbao d’où il s’enfuira. Après l’exercice de nombreux métiers son amour de la danse et du spectacle l’amènera à l’exercice du clown et à la rencontre d’un autre clown anglais, Footit le clown blanc. Le duo Foo-tit et Chocolat, (clown blanc, clown noir) rencontrera un succès colossal mais c’est dans l’anonymat et la misère que le clown Chocolat décèdera le 4 novembre 1917 au 43 rue Saint-Seurin à Bordeaux. Le personnage a fait l’objet de la « Quinzaine du clown Chocolat » à l’Espace Saint-Rémi du 2 au 13 février (programme sur www.assopourquoipas33.over-blog.com).

Après les diverses interventions, l’his-torienne Catherine Coquery Vidro-vitch a présenté une conférence très intéressante sur l’histoire du racisme sur laquelle nous reviendrons.

CD