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NUMERO 1 : mars - avril 2012
L 14186 - 1 - F: 5,00 € - RD
Numéro 1 mars / avril 20125 euros
paprikamag.com
LISBONNE revisite sa gastronomie
restos, bars, recettes, spécialités, shopping...
nos 50 pagesgourmandes
P.24
Antoine de Maximypasse à table P.14
recettes pour un menu exotique
P.96
BONNESRAISONS
DE GOÛTER LE BÉARN
P.87
5VOTRE
NOUVEAU
MAGAZINE
DE VOYAGE
N°1
MARS-AVRIL paprika • 03
Paprika ! Il en aura fallu une
sacrée dose pour lancer
un magazine papier, en
pleine crise de la dette et à
un mois de la présidentielle.
En même temps, nous
sommes tous les deux
venus au monde l’année du
choc pétrolier. Depuis, nous
avons grandi avec la hausse
du chômage, le creusement
des déficits, la désindus-
trialisation... Pas une
année sans une révision à
la baisse des prévisions
de croissance ou un déficit
abyssal du trou de la sécu.
Et nous savons que ce
n’est pas fini, puisque, en
ce qui nous concerne, nous
nous dirigeons tout droit
vers une nouvelle crise,
celle de la quarantaine...
Seulement, nous avons
découvert de puissants
remèdes pour dissiper
la sinostrose : voyager,
partager, découvrir,
goûter aux bonnes
choses. ! C’est pourquoi,
pour ce premier numéro,
nous avons choisi de
braquer les projecteurs sur
une ville que nous aimons
et qui nous enthousiasme :
Lisbonne. Vous savez sans
doute que le Portugal a été
très touché par la dernière
tempête financière.
Pourtant, malgré ces
temps difficiles, Lisbonne a
faim. De nouveautés et de
rencontres. Comme nous.
Derrière les fourneaux,
ça s’active et même les
vénérables institutions,
comme la Conserveira
de Lisboa, font appel à
de jeunes designers pour
dépoussiérer les recettes
qui ont fait leur succès.
C’est cet insatiable et
formidable appétit que
nous avons voulu vous
présenter ici.
En attendant d’avoir votre
billet d’avion en poche,
Paprika vous propose aussi
de voyager sans (trop)
bouger de chez-vous.
En explorant une région
française, par exemple, en
organisant une visite
insolite des alentours de la
Gare de Lyon, ou encore, en
allant découvrir comment
le fumet des plats d’un chef
italien s’est retrouvé sous
nos latitudes. Alors, prêts
pour le départ ?
L’EDITO
édité par Paprika ProductionsSAS au capital de 10 000 euros
Siège social 27, rue Gutenberg, 93 500 PantinRCS Bobigny 539 171 025
Président et directeur de la publication Alexandre Zalewski([email protected])
Rédaction en chef Jennifer Gallé([email protected]) et Alexandre Zalewski ([email protected])
Direction artistique et réalisation Jennifer Gallé([email protected])
Graphisme/Design Bianca Marvin(biancaelisamarvin.fr)Illustrations Marie Capriata(laboutiquedemarie.webnode.com)
Ont participé à ce numéro Claudia Portas, Nilton Rasoilo, Géraldine Grob-Dufour (infographie),Elisabeth Roger (correction), SamiaCherki (iconographie), Romain Bely, Marie Grézard.
Communication et presse Naoielle Benhamadi +33 (0)6 60 11 27 [email protected]
ISSN : en coursDépôt légal : à parution
Impression RotocayfoCarretera de Caldes km 3.008130 - Santa Perpetua de MogolaBARCELONE - ESPAGNEContact distribution Philippe Rondel 07 61 61 86 32
Photo ACF (p.99) Christian Boisseaux/La Vie
L 14186 - 1 - F: 5,00 € - RD
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LISBONNE revisite sa gastronomie
restos, bars, recettes, spécialités, shopping...
nnooss 5500 ppaaggeessggoouurrmmaannddeess
P.24
Antoine de Maximypasse à table P.14
recettes pour un menu exotique
P.94
BONNESRAISONS
DE GOÛTER LE BÉARN
P.85
5
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VOTRE
NNOOUUVVEEAAUU
MAGAZINE
DE VOYAGE
NN°°11
PHOTO : CLAUDIO ANDRADE
ALEXANDRE ZALEWSKI & JENNIFER GALLÉ
a u m e n u
foRmuLe expRess
P.22 Où manger vite (et bien !) à la Gare de Lyon, à Paris
P.24 La destination
Les ingrédients du renouveau lisboète
agenda
P.06 Les rendez-vousgourmands à ne pas rater + un road trip gastronomique au pays de Mad Max
04 • PaPrika maRs-aVRiL
en images
P.20 Vos photos de voyage les plus appétissantes
À la terrasse du Café Darwin.
Le Cantal fête les bœufs gras.
fLaconsà découVRiR
P.84 Marsyas souffle un vent nouveau sur les vins libanais
chRoniqued’un hit cuLinaiRe
P.82 Hamburger, les dessous d’un succès mondial
P.96
Recettes des quatrecoins du monde
P.14
suR Le gRiLLes recettes d’Antoine de Maximy pour se faire inviter à dîner
nouRRituResspiRitueLLes
P.94 Notre sélection de livres + la chronique de Didier Pourquery
chefs Venusd’aiLLeuRs
P.76 Ciacco ou l’Italie en croûte de sel
en fRance
P.87 Cinq talents duBéarn et du Pays Basque à découvrir
maRs-aVRiL PaPrika • 05
Francis Miot, le roi de
la confiture, à Pau.
Aux fourneaux, Massimo.
06 • paprika MARS-AVRIL
FESTIVAL À VOIR ET À MANGER ET FESTIVAL DU LIVRE CULINAIRE AU 104 (PARIS), DU 7 AU 19 MARS
Qui aurait dit que le 104,
le nouvel écrin hype de
l’art contemporain parisien,
deviendrait un haut lieu de la
gastronomie ?
Le centre culturel, qui a élu
domicile dans les anciens
bâtiments du Service muni-
cipal des pompes funèbres
de la capitale, peut s’enor-
gueillir d’accueillir début
mars deux manifestations
dédiées à la cuisine et à la
gastronomie, mais sans qu’il
y soit uniquement question
de tester et de déguster.
Honneur aux “anciens”, tout
d’abord. Pour sa troisième
année d’existence, et fort
d’un succès grandissant
(+ 40 % de fréquentation
en 2011), le Festival du Livre
culinaire ouvrira ses portes
du 7 au 11 mars prochain,
pour présenter les der-
nières nouveautés dans le
monde de l’édition.
Plus de 4 000 ouvrages
seront exposés pour l’occa-
sion. Et, puisque la lecture
ouvre l’appétit, les grands
chefs qui ont œuvré dans
ces beaux livres viendront
faire une démonstration de
leurs meilleures recettes.
La liste des personnalités
conviées est impression-
nante, à commencer par l’in-
vité d’honneur, Michel Roux,
cuisinier français multi-
étoilé à Londres, ou encore le
facétieux chef Abdel Alaoui
que l’on a pu voir sur Canal+
et France 5.
La Chine investit les lieux
Cette année, c’est la Chine
qui aura la vedette. Trente-
cinq personnalités de la gas-
tronomie chinoise seront
présentes pour faire décou-
vrir cette cuisine raffinée et
trop souvent caricaturée.
On pourra même déguster
des vins chinois.
Pour cette troisième édi-
tion, le Festival a par ailleurs
désigné la bière comme
produit star. Et c’est une
femme, Cécile Delorme, fon-
datrice de la cave à bières
Brewberry à Paris, qui sera
chargée de faire découvrir
la boisson la plus bue au
monde, après l’eau et le thé,
lors de différents ateliers de
dégustation.
Le menu du Festival du livre
culinaire est déjà extrême-
ment copieux. Cela ne l’em-
pêche pas de s’enrichir
cette année de la première
édition du festival à voir et à
manger, qui se tiendra éga-
lement au 104 entre le 10 et
le 19 mars prochains.
Performances artistiques,
conférences sur la mixité
sociale et les pratiques culi-
naires, à voir et à manger va
lui aussi vous faire voyager à
travers les saveurs et les
habitudes alimentaires.,
INFOS : 104.FR
Au 104, la cuisinec’est tout un roman
AGENDA
à FAIRE EN FRANCE
Comme l’an passé, le très fantasque
chef argentin Chakall sera de la fête.
MARS-AVRIL paprika • 07
LES TERSONS AUBRACA PIERREFORT (15), LES 24 ET 25 MARS
La tradition des bœufs gras
remonte au Moyen Âge. On
en trouve les premières
traces à Bazas, en Gironde,
dès 1283. Il s’agissait d’un
privilège octroyé aux bou-
chers de se promener avec
leurs animaux le jeudi gras.
Aujourd’hui encore, les
bœufs sont à l’honneur à
Bazas. Mais si vous voulez
les admirer, il faudra atten-
dre l’édition 2013, car les
bêtes ont déjà défilé le
16 février dernier. Ou alors
vous rendre dans une autre
ville, car cette tradition
s’est étendue, jusqu’à Paris
où des défilés sont men-
tionnés dès 1739.
On compte même des dé-
clinaisons en Belgique et en
Italie. Pierrefort, dans le
Cantal, a aussi décidé de
fêter les bœufs gras les 24
et 25 mars prochains.
Cette manifestation est
une belle occasion pour ce
petit village de mettre en
valeur ses traditions mon-
tagnardes. Ainsi, dès le sa-
medi, les curieux pourront
visiter une fromagerie. Une
visite de ferme est prévue
l’après-midi, avec une pré-
sentation du travail des
chiens de troupeau. Mais le
gros des festivités aura lieu
le dimanche, avec une expo-
sition des bêtes et le défilé
des bœufs proprement dit.
Les organisateurs ont
même prévu un atelier cui-
sine avec un chef et des ani-
mations plus pittoresques,
comme des démonstra-
tions du jeu de boules car-
rées. Ne riez pas : Pierrefort
organise chaque année un
championnat d’Europe de la
discipline. ,
Les bœufs gras font des petits dans le Cantal
ET AUSSI
Menton zeste la capitale du citronFÊTE DU CITRON DE MENTON (06), JUSQU’AU 7 MARS Il reste quelques jours pour vous rendre à Menton et
admirer les chars décorés ou les sculptures géantes
faites d’agrumes. Menton importe près de 150 tonnes
de citrons et d’oranges pour fêter le fruit du soleil, cul-
tivé depuis le XVe siècle dans la région. C’est au XIXe que
sa culture atteint son apogée : en 1810, la production
locale dépassait les 2 000 tonnes par an. La première
fête dédiée a lieu en 1934, alors que la ville est encore le
premier producteur européen. Il s’agissait alors de di-
vertir les riches touristes. Mais la spéculation foncière,
les maladies et surtout la concurrence de l’Italie et de
l’Espagne auront raison de l’agrumiculture menton-
naise. Aujourd’hui, la municipalité tente de redynamiser
la culture du fruit en or, en déposant un dossier pour
obtenir une Indication géographique protégée. Pour
l’instant, avec 200 tonnes par an, la production du ci-
tron de Menton est encore confidentielle. Mais la ville
entend profiter de la renommée internationale de
l’événement pour faire découvrir les qualités gusta-
tives propres au citron de Menton. Un événement qui
ne vous laissera pas un goût... acide !
Il n’y a pas que le ski dans la vieFESTIVAL DE LA GASTRONOMIE RÉGIONALE À COMBLOUX (74), DU 12 AU 16 MARS Et si on profitait de vacances à la montagne pour aller...
manger ! La station de Combloux, en Haute-Savoie, a
bien compris qu’il n’y a pas que le ski dans la vie, et
organise du 12 au 16 mars prochain un festival de la gas-
tronomie régionale et du patrimoine. Pendant ces qua-
tre jours, de nombreuses animations sont au
programme : marché “à l’ancienne”, avec vente de pro-
duits locaux, sorties en raquettes avec pause thé,
bugnes (beignets) et rissoles (chaussons fourrés) ou
encore un concours de farcement, où une trentaine de
plats seront élaborés, notés par des chefs cuisiniers et
dégustés.
Que le meilleur coulommiers gagne !FOIRE INTERNATIONALE AUX FROMAGES ET AUX VINS DE COULOMMIERS (77), DU 26 AU 29 MARS
Quelle bonne idée de réunir à l’occasion d’une foire deux
aliments faits l’un pour l’autre. La 44e édition de la foire
aux Fromages et aux vins de Coulommiers permettra de
découvrir la production de plus de 350 exposants.
L’occasion d’élire le meilleur coulommiers et le meilleur
brie de la région ou d’admirer les animaux exposés pour
l’occasion.
08 • paprika MARS-AVRIL
FÊTE DE LA LAMPROIE À SAINTE-TERRE (33), LES 28 ET 29 AVRIL
Les fêtes culinaires sont
l’occasion de découvrir de
véritables curiosités. Ainsi,
Sainte-Terre, en Gironde,
fête à la fin avril un animal
pour le moins original : la lam-
proie. Ce n’est pas un
poisson, mais un vertébré
primitif parasite. La lamproie
n’a pas de mâchoire, mais un
disque buccal constitué de
nombreuses dents poin-
tues qui lui permettent de
s’accrocher à un poisson
lorsqu’elle est en mer, d’en
râper la peau et d’en aspirer
la chair, un peu à la manière
d’une sangsue.
Son physique ingrat ne l’em-
pêche pas d’être un mets
très recherché dans le Sud-
Ouest. Et cette fête à
Sainte-Terre est l’occasion
de découvrir la bête, avec
l’incontournable repas dan-
sant (la lamproie est bien
sûr au menu), les intronisa-
tions de la Confrérie de la
Lamproie, le marché de pro-
duits régionaux, une exposi-
tion pour mieux connaître la
lamproie, et un vide-grenier
le dimanche.,
Une drôle de bestiole à la casserole
FOIRE AUX JAMBONS DE BAYONNE (64), DU 5 AU 8 AVRIL
Selon la légende, le premier jambon de Bayonne était un jambon de sanglier. Au XIVe, Gaston Phœbus aurait abattu unanimal qui serait tombé dans lessources d’eau salée de Salies.C’est la saison suivante que labête aurait été retrouvée, bienconservée par le fameux sel. C’estainsi que pour obtenir l’Indicationgéographique protégée “deBayonne”, un jambon doit avoirété salé dans les salines locales etpendant au moins sept mois. LaFoire au jambon est une véritableinstitution, qui a débuté en 1462.Vingt-six artisans charcutiersviendront représenter l’industrielocale qui compte 2 000 éleveursde porcs, une vingtaine d’entre-prises de salaison et une cinquan-taine d’artisans qui produisent unmillion trois cent mille jambons.
Outre des dégustations decharcuterie et un concours de lameilleure omelette au jambon, la foire organise le traditionnelconcours du meilleur jambon fermier, dont les trois lauréats seront vendus aux enchères.,
Bayonne se paieune tranche
MARS-AVRIL paprika • 09
La Gironde folle de l’asperge
Le crabe, roi de la mangroveFÊTE DU CRABE DE MORNE-A-L’EAU (98), LE 8 AVRIL
La Corée n’est pas la seule à fêter le crabe. En France
aussi, nous avons notre manifestation dédiée au
crustacé. Il suffit de traverser l’Atlantique et se rendre
à Morne-à-l’Eau, en Guadeloupe, où se tient, le 8 avril,
la 20e édition de la journée du Crabe et de la mangrove.
L’an dernier, la manifestation a attiré 15 000 visiteurs,
qui sont venus assister au concours de recettes au
crabe, à ceux des attacheurs et des mangeurs de crabe
ou aux courses de crabe. Cette journée permet aussi de
sensibiliser le public à l’importance de la mangrove et du
besoin de la protéger. ,
FÊTE DE L’ASPERGE DU BLAYAIS À ETAULIERS (33), LES 28 ET 29 AVRIL
Saviez-vous que l’asperge
est une excellente source
d’antioxydants et qu’elle en
contiendrait plus que le bro-
coli ? Qu’elle est très riche
en vitamine B9, et qu’on lui
prêtait autrefois des ver-
tus contre le mal de dents.
Certains pensent même
qu’elle aurait des effets
aphrodisiaques. Voilà en
tous cas de très bonnes rai-
sons de fêter ce petit lé-
gume. C’est ce qui sera fait,
pour la douzième année
consécutive, à Etauliers, les
28 et 29 avril prochains.
Omelette géante à l’as-
perge, ateliers de cuisine,
démonstrations de re-
cettes par des grands chefs,
tout a été prévu pour célé-
brer l’asparagus officinalis.
Nul besoin d’être un incondi-
tionnel de l’asperge pour
faire le voyage en Gironde.
Vous pourrez assister au
ballet pyrotechnique le
samedi soir, déguster des
côtes de Blaye ou faire le
plein de salaisons, de miel,
de chocolat ou de fromages
auprès des 60 exposants
présents.
A noter : la présence cette
année d’Yvan Cadiou, cuisi-
nier nomade et chroniqueur,
qui viendra accompagné de
sa “cook case”. ,
©Anne
Bécel,A
merika
ndo
10 • paprika MARS-AVRIL
FESTIVAL DU CRABE DE YEONGDEOK (CORÉE DU SUD), DU 8 AU 12 MARS
La légende dit qu’il y a très longtemps,
le crabe des neiges était un mets de
roi et que les crustacés qui leur
étaient réservés étaient élevés dans
le sable pour leur donner un goût par-
ticulièrement fin et délicat. De nos
jours, la ville portuaire de Yeongdeok
reste la capitale coréenne du Chionoe-
cetes opilio. Chaque année, autour de
Daeboreum, lors de la premiere pleine
lune du calendrier lunaire (à la mi-
mars), le crabe des neiges est à l’hon-
neur et à toutes les sauces. Il y a bien
sûr les animations incontournables,
comme le petit tour sur un véritable
bateau de pêche, la pêche au crabe
dans une piscine improvisée ou encore
les danses et les chants folkloriques.
Mais c’est aussi l’occasion de dégus-
ter du crabe des neiges sous toutes
ses formes : soupe de crabe des
neiges (daegetang), nouilles au crabe
des neiges, bibimbap au crabe des
neiges... On trouve même le tradition-
nel kimchi, généralement fait à base de
chou chinois, réalisé à partir de crabe
fermenté et pimenté. C’est bien sim-
ple : ce sont plus de 100 000 spéci-
mens qui sont vendus chaque année.
Yeongdeok organise même une vente
aux enchères, un concours de décou-
page de poisson, un concours de cui-
sine au crabe et un concours
d’engloutissement de crustacé pour
que personne ne reste sur sa faim. ,
INFOS : ENG.YD.GO.KR
AGENDA
à FAIRE
DANS LE MONDE
Yeongdeok sort les pinces
MARS-AVRIL paprika • 11
T O U J O U R S E N C O R é ELors du Festival de Maehwa (du 17 au 23 mars),près de la ville de Gwangyang,on vient pour admirer lesMaehwa (les abricotiers duJapon) en fleurs. Les arbresdonneront ensuite des fruits,les maesil en coréen ou ume en japonais, des prunes un peuacides que l’on mange séchéeset salées. Vous trouverez, biensûr, tous les produits dérivésdes maesil dans le village deMaehwa.
SLOW FOOD MARKET À STUTTGART (ALLEMAGNE),DU 12 AU 15 AVRIL
On peut être une multina-
tionale et œuvrer pour le
développement local. Le
mouvement Slow Food, né
en Italie dans les années 80,
en réaction au développe-
ment des fast-food, a fait
des petits dans le monde
entier et compte désor-
mais des adeptes un peu
partout en Europe, en Amé-
rique du Nord et en Asie. Et
ce qui n’était qu’un mouve-
ment de défense d’un cer-
tain art de vivre est devenu,
au fil des ans, un véritable
mouvement citoyen, qui
œuvre tant pour l’éduca-
tion du goût que pour la
promotion des productions
locales ou la défense de la di-
versité des semences.
Le mouvement Slow Food
organise un peu partout
des événements pour pro-
mouvoir le “bien-manger”,
dont cette grande foire à
Stuttgart qui se tient mi-
avril.
Fromages, fruits et lé-
gumes, poisson, viande,
charcuteries, vin, chocolat,
confitures, pains... Ici, on
trouve son bonheur tout en
découvrant des spécialités
d’Outre-Rhin produites par
des défenseurs du “bon, pro-
pre et juste”. Les curieux
pourront ainsi découvrir,
parmi les 400 exposants
présents sur le salon, les
miels Imkerei Kasper, qui
proviennent de différentes
ruches en Europe, ou en-
core, s’arrêter sur le stand
de la société ALB-Gold Teig-
waren, un fabriquant de
pâtes du Sud de l’Allemagne
qui propose des féculents
aux œufs et au... chocolat,
au pain d’épice ou au citron
vert ! ,
INFOS :MESSESTUTTGART.DE/SLOWFOOD
La slow food fait escale à Stuttgart
S é A N C E D E
R A T T R A P A G E
Vous avez raté le Slow foodmarket de Stuttgart ? Rienn’est perdu pour le moisd’avril, mais il faudra aller un peu plus à l’est. Belgrade organise, les 21 et 22 avril le “supernaturalfood”, qui vise à promouvoirdes produits serbes fabriqués selon les méthodes traditionnelles. Le festival se tient dans lequartier d’Ada Huja, à l’estde la ville, sur la rive droitedu Danube, à environ 4 km du centre-ville. Infos : supernaturalfest.com
12 • paprika MARS-AVRIL
TASTES OF THE OUTBACK DANS LES FLINDERS RANGES(AUSTRALIE), DU 30 MARS AU 2 AVRIL
Goûter l’Outback australien,
ça se mérite. Pour profiter du
festival “Tastes of the Out-
back” de Flinders Ranges, il
vous faudra d’abord vous ren-
dre de l’autre côté de la pla-
nète (compter une vingtaine
d’heures de vol). Ensuite, aller
à Adelaïde, cinquième ville de
l’île continent, à (seulement)
1 374 km à l’ouest de Sydney.
De là, de préférence, louer une
voiture. Emporter de quoi
passer quelques jours en
autarcie, prendre beaucoup
d’eau, un téléphone portable
et, éventuellement, quelques
cours de mécanique.
En route pour les Flinders Ranges
Partir en direction du nord-
ouest par l’A1, puis l’A87 (ça ne
s’invente pas) qui mène à Alice
Springs, la plus grosse ville,
avec ses 20 000 âmes, du
centre de l’Australie. C’est ici
que le challenge débute : réus-
sir, en quatre jours, à faire
toutes les animations qui au-
ront lieu pendant ce festival
pour le moins... épars.
Premier arrêt à O’Reilly’s
Orchard, dans la forêt de Wir-
rabara, au nord-est de Port
Pirie, à 200 km d’Adelaïde.
David et Jackie vous accueille-
ront dans leur ferme bio pour
aller récolter les fruits et lé-
gumes du jardin et préparer
un bon repas.
Après vous être bien sus-
tenté, petit crochet par Pe-
tersborough, à une centaine
de kilomètres à l’est, pour visi-
ter le musée des trains à va-
peur et assister au son et
lumière dédié au “cheval de
fer”. Vous pourrez surtout y
déguster les productions lo-
cales, notamment d’huile
d’olive. Direction ensuite
Melrose, au nord-ouest de
Petersborough, près du
Mount Remarkable National
Park, où est organisée une dé-
gustation des riesling,
cabernet sauvignon et shiraz
du domaine Bundaleer. Il ne
faudra pas trop abuser tout
de même, car il faut ensuite
reprendre la route pour Port
Augusta pour assister au “bal
de l’Outback”, où, après le
dîner de spécialités locales, la
nuit se finira sur la piste de
danse. Là encore, il faudra
garder un peu de forces.
Ce n’est en effet qu’avec
les trois prochaines
étapes que vous entrerez à
proprement parler dans le
parc national des Flinders
Ranges.
Premier arrêt au Rawnsley
Park Station, sur Wilpena
Le goût du bush australien
MARS-AVRIL paprika • 13
Road, qui organise un barbe-
cue dans un cadre grandiose.
Rendez-vous ensuite au Wil-
pena Pound Resort, dans le
parc, pour un pique-nique à
Stokes Hill. Enfin, direction
Blinman, au nord de Flinders
Ranges, au Wild Lime Cafe, qui
propose pour l’occasion des
menus inspirés du bush.
En piste pour Innamincka
Si vous ne frôlez pas l’over-
dose de kilomètres, il reste
une étape. De Blinman, repren-
dre la B83 et rouler vers le
nord jusqu’à Lyndhurst. De là
(vous aviez bien entendu pris
la précaution de louer un 4x4
à Adelaïde), prendre la Strze-
lecki Track, une piste de 466
km qui vous mène à Inna-
mincka, petit bourg qui
compte... 12 résidents perma-
nents. Le Innamincka Hotel
(vous ne pouvez pas le rater)
propose, le temps du festival,
“un vrai retour aux sources”
avec de la viande grillée au bar-
becue accompagnée de vins
australiens. Pour finir, vous
ferez partie de ces privilégiés
qui assisteront à la séance de
cinéma en plein air, sous les
étoiles du désert. Le pro-
gramme ne dit pas quel film
sera projeté, mais ça vaut le
détour, non ? ,
INFOS : TASTESOFTHEOUT-BACK.COM.AU
T O U J O U R S
E N A U S T R A L I E
20E FOOD AND WINE FESTIVAL DE MELBOURNE(AUSTRALIE)
L’Australie est riche d’événe-ments culinaires. L’un desplus importants a lieu à Melbourne, début mars. Lesgourmands sont invités à assister à des prestations degrands chefs, comme RenéRedzepi, Massimo Bottura ou Ben Shewry. On pourra également déguster des vinsde la région, visiter les jardinsà bière ou bien encore parti-ciper au plus long repas dumonde.Infos : melbournefoodandwine.com.au
Le service de bus pour se rendre sur les différents lieux du Festival
n’est pas forcément le moyen de transport le plus fiable...
Jackie dans sa ferme bio.
14 • paprika MARS-AVRIL
SUR LE GRIL
Antoine de Maximypasse à table
Il est devenu un expert en matière d’hospitalité. L’homme à la chemise rouge s’est fait inviter par la terre entière pour son émission
“J’irai dormir chez vous”. Paprika a voulu en savoirun peu plus, en allant, non pas dormir,
mais interviewer Antoine chez lui.
1 alExandrE zalEwski U Ed. dE la MartinièrE/bonnE piochE
MARS-AVRIL paprika • 15
uand on arrive
chez Antoine, on
a l’impression
de retrouver un
vieil ami qui ne vous recon-
naîtrait pas. Il est même im-
possible de le vouvoyer tant
on a partagé de choses
avec lui, confortablement
assis dans notre canapé. On
a ri de le voir s’endormir en
Ethiopie entassé dans une
pièce minuscule avec une
fratrie de marathoniens. On
a eu peur quand il s’est
aventuré dans les quartiers
délabrés de la Nouvelle-
Orléans. On s’est émus de le
voir se coucher à même le
sol avec des hommes qui
n’avaient rien, au Mali ou sur
une plage de Californie. On a
partagé ses fous rires et
ses moments de solitude…
En pénétrant dans le foyer
et l’intimité d’inconnus du
monde entier, Antoine de
Maximy a surtout réussi à
entrer dans le cœur des
téléspectateurs. Il était
donc naturel de demander à
cet infatigable provocateur
de rencontres de nous
parler des repas qui l’avaient
marqué au cours de ses
pérégrinations. Et de savoir
pourquoi il avait décidé de
poser, pour un temps, ses
valises.
J’ai cru comprendre que tu arrêtais “J’irai dormir chezvous”. Les voyages chez
l’habitant, c’est fini ? Non ! C’est ce qui a été dit,
mais je vais être clair. Je
n’arrête pas : je fais simple-
ment une pause. Au-
jourd’hui, je me consacre
entièrement à mes projets.
J’ai très envie de réaliser un
long métrage de fiction,
que je suis en train d’écrire.
Et je m’aperçois que ce
n’est pas facile et que cela
prend du temps !
Est-ce que le concept del’émission s’essouffle ?
Je ne pense pas.
Je n’ai ressenti
aucune lassi-
tude ni au-
près de mes
produc-
teurs, ni
auprès du
public. Mais il
est possible
que dans deux ou
trois ans, les gens commen-
cent à en avoir assez. Et puis
je serai moi-même peut-être
fatigué. Si je veux faire un
long métrage, entre le mo-
ment où je le décide et le
moment où il sera réalisé, il
va se passer au moins trois
ans. C’est pour cela qu’il
faut que je m’y mette.
Tu as tout montré de “J’irai dormir chez vous” ?
Non ! Il y a les trente-cinq
épisodes qui ont été diffu-
sés, plus dix-huit autres qui
sont sur un format plus
court, ainsi que deux longs
métrages, les jeux Olym-
piques de Vancouver et de
Pékin, le Tour de France, sans
oublier les bonus. Au total,
j’ai réalisé, tout seul sur huit
ans, soixante-dix heures de
programmes et écrit deux li-
vres. Pas mal, non ?
Dans les épisodes qui ont été diffusés, il semble plus facile d’être invité à manger qu’à dormir, non ?
Bien sûr que c’est plus facile.
Quand je mange
avec quelqu’un,
je suis assis en
face de lui.
Il y a un
échange,
une conver-
sation. D’une
certaine ma-
nière, mon hôte
peut me surveiller.
Par contre, si je passe la nuit
chez lui, lui aussi va devoir
dormir. Il faut donc qu’il ait
suffisamment confiance en
moi, car il va devoir abaisser
la garde et, en quelque
sorte, me donner les clés de
la maison.
L’avantage de se faire invi-
ter à dîner, c’est que cela
peut faciliter les choses
pour ensuite passer la nuit.
C’est plus facile en tout cas
que de demander directe-
ment à être hébergé. Mais, à
l’inverse, il y a eu de nom-
breuses fois où il était claire-
ment établi que je ne
viendrais que dîner. Et puis il
y a eu d’autres situations
où je n’ai même pas de-
mandé à rester, parce que
j’ai vu qu’il n’y avait pas de
place ou alors je sentais que
cela ne servait à rien d’insis-
ter pour dormir là.
Le moment du repas, c’est im-portant dans tes rencontres ?
Pas toujours. C’est impor-
tant en France et en
Europe. Aux Etats-Unis, en
revanche, c’est plus factuel.
L’idée est d’abord de se res-
SA bIo
Antoine est né en 1959 à Lyon. Il arrête ses études en seconde, après avoir redoublésa troisième. Après plusieurspetits boulots, il réussit às’engager dans la section cinéma de l’armée. Cette expérience le mèneranotamment au Liban. Après trois ans dans ce service, il est engagé par lachaîne CBS News. Il couvrira la guerre Iran-Irak et se rendra plusieurs fois en Israël. Il se tourne ensuite vers lesdocumentaires animaliers etscientifiques et réalise unetrentaine de documentaires,dont Emmenez-moi, AnimalZone, Au-delà des DunesouLes nouveaux mondes, avantde commencer, en 2004, “J’irai dormir chez vous”.
“Aux Etats-Unisles repas sontplus factuelsqu’en Europe.”
Antoine de Maximy
Q
16 • paprika MARS-AVRIL
taurer. Les Américains ont
un peu moins tendance à
manger de façon festive.
Chez eux, le repas n’est pas
un moment particulier qui
va sceller une amitié. En
France, et dans beaucoup
d’autres cultures, quand on
déjeune ou que l’on dîne
avec quelqu’un, on est
passé à une étape supé-
rieure de la relation. Il y a une
vraie notion de partage et
de moment privilégié.
Est-ce plus compliqué de se faire inviter dans les pays pauvres ?
Ce n’est pas une question
de richesse. Il y a des gens
qui peuvent être pauvres
par rapport à nous autres,
Occidentaux, et qui ne se
sentent ni pauvres, ni mal-
heureux. Du coup, le voya-
geur n’est pas mis sur le
même plan. Il n’est ni supé-
rieur, ni inférieur : c’est
quelqu’un à part, presque
d’un autre monde, que l’on
accueille avec curiosité. Au-
jourd’hui, c’est un peu diffé-
rent. La télévision et
Internet ont modifié la per-
ception du voyageur et
donc l’accueil qui lui est ré-
servé. Mais je m’adapte. Et
finalement, je m’adapte plus
à l’individu que j’aborde qu’au
pays en lui-même.
Tu arrives toujours avec une bouteille de vin ?
Non ! Pas aux émirats ou en
Iran ! La question qui se pose
souvent, c’est plutôt est-
ce que je fais des
cadeaux ou non. Moi, je
donne pratiquement tou-
jours quelque chose. En gé-
néral, j’essaie de faire un
cadeau qui soit adapté à la
situation. Je vais par exem-
ple offrir un Thermos si je
vois que ça peut être utile.
Mais ça peut être aussi de
laisser de l’argent. Je ne le
donne que le lendemain,
parce que je ne paie pas un
service : je fais un cadeau.
C’est normal. Certaines fa-
milles qui ont peu font un
réel effort pour m’accueillir.
Emportes-tu des cadeaux avec toi ?
Très peu. Je travaille en to-
tale autonomie et je ne veux
pas me charger. Je l’ai fait à
Cuba, où j’ai emporté des
bricoles que j’ai données sur
place. Mais en général, non,
je ne prévois rien de spécial.
Le repas qui t’a laissé le meilleur souvenir ?
C’était en Iran, à la fin de
mon voyage. Je n’avais pas
très bien mangé là-bas. Et le
dernier repas chez la per-
sonne qui m’avait hébergé a
été le meilleur de tout le
voyage. Je me rappelle que
ce dîner m’avait fait vrai-
ment du bien, même si je ne
me souviens plus de ce j’ai
mangé !
Le pire ?
Un des pires, d’un point de
vue gastronomique, c’est
en Ethiopie. J’étais chez les
Hamers, une tribu du Sud du
pays. Il y avait une calebasse
qui contenait de la farine de
sorgho rouge. Et franche-
ment, ce n’est pas très bon.
Disons, plus exactement,
que la céréale est très
sèche et qu’elle n’a pas vrai-
ment de goût. Mais c’est
leur seule denrée, et eux
en mangent tous les jours.
Et puis cela ne m’a pas empê-
ché de passer un très bon
moment en leur compagnie.
T’est-il arrivé de mettre les pieds dans le plat ?
Lors d’un repas aux émirats,
on me propose des dattes.
Mon hôte est un sexagé-
naire très sympa, très mar-
rant. Il y a toute la famille qui
est là. Et moi, je plonge la
main gauche dans le plat, ce
qui ne se fait pas du tout,
évidemment. Je m’en rends
compte et je me mets à
rire en disant : “Hou là ! C’est
la main gauche !” Et tout le
monde éclate de rire. Quand
on tombe sur des gens sym-
pas, il n’y a jamais vraiment
de problèmes.
Y a-t-il eu des choses bizarres que tu as dû avaler ?
Une fois, j’ai bu une sorte
d’alcool aromatisé par une
cinquantaine de mygales !
Dans ce cas, je fais totale-
ment abstraction de ce que
je suis en train d’ingurgiter.
Tout comme un étranger qui
mange un fromage, en
France, essaie de ne pas pen-
ser qu’il s’agit, à la base, de
lait pourri ! J’ai retenu que
l’alcool avait un goût de miel,
pas qu’il était aromatisé par
des boyaux de mygales.
As-tu déjà refusé de manger certaines choses ?
Non, mais j’ai refusé de
reprendre du lait de jument
fermenté en Mongolie. J’en
ai bu, mais ensuite, mon
hôte m’a menacé de me res-
servir si je ne finissais pas
ma bière. J’ai préféré finir ma
bière !
Tu cuisines souvent ?
Je fais toujours à manger. Je
n’achète jamais de plat cui-
siné, même quand je suis
seul ou quand je n’ai pas le
temps. Il suffit de mettre de
l’eau à chauffer, de verser
des nouilles dans l’eau bouil-
“J’ai refusé de reprendre du laitde jument lors demon voyage enMongolie !”
Antoine de Maximy
MARS-AVRIL paprika • 17
En Chine
Au Japon
En Nouvelle-Zélande
Dans le Sud de la France
Au Mali
18 • paprika MARS-AVRIL
lante et d’attendre dix mi-
nutes. Par contre, cela
m’est arrivé très rarement
lors de mes tournages. Une
fois, en Mongolie, j’ai fait la
cuisine chez des gens. Un
repas bien français, avec des
pommes de terre sarla-
daises. Le maître de maison
a été très déstabilisé
par le fait que je
serve la viande
saignante. Il a
finalement
trouvé ça
bon, mais je
ne suis pas
sûr qu’il ait
recommencé.
Une autre fois,
au Maroc, j’ai ap-
porté de quoi faire le repas.
Quand je suis allé dans le dé-
sert, j’ai pris avec moi des lé-
gumes et des poulets, et on
a pu faire un repas de fête.
Tu aimes une gastronomie en particulier ?
La cuisine française, c’est
quand même pas mal. En
plus, en France, on peut goû-
ter des saveurs du monde
entier, et comme j’apprécie
également la cuisine asia-
tique...
Et qu’est-ce qui te plaît dansla cuisine française ?
La variété. Parce que je
déteste manger tout le
temps la même chose.
Tu vas souvent au restaurantdans les pays que tu visites ?
Oui, je suis bien obligé. Je ne
trouve pas toujours des
gens qui veulent m’inviter.
Et puis je bouge souvent.
Sur un tournage de dix jours,
j’arrive, en moyenne, à me
faire inviter cinq fois, soit
cinq repas sur une ving-
taine.
Et comment leschoisis-tu ?
Comme tout
dans l’émis-
sion : au ha-
sard. Je n’ai
pas de guide
avec moi. Et c’est
d’ailleurs pour cela que
je sais de quoi je parle quand
je donne mon avis sur la gas-
tronomie d’un pays. Quand
je voyage, je vais dans les
restaurants de monsieur-
tout-le-monde, pas dans
ceux qui sont sélectionnés
dans les guides de voyage.
Et dans certains pays, la pe-
tite gargote du midi où les
autochtones viennent faire
leur pause déjeuner, eh bien
!, ce n’est vraiment pas gé-
nial. évidemment, il y a des
bons restaurants dans tous
les pays. Et évidemment, ces
adresses sont dans tous les
guides. Donc, selon moi, on
ne peut réellement appré-
cier la cuisine d’un pays que
quand on voyage sans filet.
Un pays où tu as mangé un platparticulièrement bon ?
Je n’ai pas de plat particulier
en tête. Mais j’ai l’exemple in-
verse. Au Canada, j’ai goûté à
la spécialité locale : la pou-
tine. C’est une barquette de
frites, avec du cheddar et
de la sauce barbecue. Eh
bien, je crois que c’est le
plat le plus plouc que j’ai ja-
mais mangé ! La poutine
dans un pays civilisé, je ne
me l’explique toujours pas.
Le pays qui m’a le plus sur-
pris, je dirais que c’est le
Japon. Ne serait-ce que
parce qu’en France, on a une
très mauvaise idée de ce
qu’est la cuisine nippone. On
l’assimile aux sushis, alors
que les Japonais en man-
gent finalement très peu.
Leur cuisine est assez va-
riée.
Une bonne adresse à nous recommander ?
Un petit restaurant japo-
nais à Paris : le Kyobashi,
117, rue Saint-Maur (XIe).
Question subsidiaire : pourquoi la chemise rouge ?
Je pars systématiquement
avec six chemises rouges, in-
cluant celle que je porte.
Quand on réfléchissait à
l’émission, j’avais dit aux pro-
ducteurs que je m’habillerais
de la même manière du
début à la fin, pour faciliter
le montage. Et puis on s’est
dit que l’idéal serait de por-
ter la même couleur pen-
dant toute la série.
Pour ce qui est du choix
du rouge, il y avait deux rai-
sons. La première, c’est que
c’est une couleur qui se voit
bien. Et la deuxième, c’est
que comme nous n’avions
pas d’argent et que j’avais
déjà deux ou trois chemises
de cette couleur. ça coûtait
moins cher de compléter la
collection que de racheter
six chemises jaunes !
Son LIVRE
Avec ses caméras qui le filment non-stop et sous tousles angles, on croyait tout savoir des voyages d’Antoine.Il suffit cependant de lire lescarnets de notre bourlingueurpréféré pour comprendre qu’iln’en est rien. En couchant surle papier les étapes de “JDCV”,Antoine livre des anectodes,retrace le fils des événementsqui l’ont conduit à ce que l’onvoit. L’homme à la chemiserouge en profite égalementpour se dévoiler un peu, parbribes, en revenant sur son iti-néraire ou encore en livrantses émotions. Un très beaucarnet de voyage. J’irai dormir chez vous, carnetsd’un voyageur taquin, éditions de La Martinière, 240 pages, 25 euros
“Quand je voyage,je vais dans les restos de
monsieur-tout-le-monde.”
Antoine de Maximy
Cocktail surprenant à Mexico“à la mescalerie Corazon de Maguey, à deuxpas de la maison de Frida Kalo, on peut déguster des cocktails élaborés à partir dumescal, cet alcool tiré de l’agave (ici associéau concombre). Les verres à mescal ont unecroix gravée dans le fond, si vous voyez Jésus,vous en avez trop bu ! Sur le bord du verre, lapoudre foncée et épicée contient des... versbroyés... Santé !” POSTÉPAR YANN
Un délice algérien
“Voici la chakhchoukha : unplat de fête découvert prèsde Biskra en Algérie. Après une longue préparation deboulettes de pâte à la semoule, les galettes trèsfines sont cuites sur uneplaque, les unes sur les autres. Puis ce mille-feuilleest émietté et recouvertd’un bouillon rouge de légumes (tomate, oignon,pomme de terre, courgette,pois chiche) et de mouton,parfumé au paprika et auras el hanout.” POSTÉPAR LAURENCE
Au “bar à sucre” de La Paz“Nous avons savouré ce très copieux goûter dans un “bar à sucre” de La Paz, en Bolivie... pour seulement 2,40 €.” POSTÉPAR JOCELYNE ET THOMAS
La saveur des souvenirsA chacun de ses numéros, Paprika publiera les plus belles photos de vos découvertes culinaires... Pour cela, rien de plus simple : rendez-vous sur paprikamag.com pour nous proposer vos meilleurs clichés
20 • paprika maRs-avRiL
vos voyages en images
Soyons honnêtes. Même si
la SNCF s’est lancée dans
de gros travaux de restau-
ration et qu’elle promet de
nouvelles enseignes à l’été,
dont un Daily Monop’,
un kiosque Fauchon et
une boulangerie Paul,
il n’ y a pas de miracle.
L’offre gastronomique à la
Gare de Lyon n’est pas
folichonne. Et comme les
voyageurs y sont toujours
pressés, les échoppes ont
depuis longtemps adopté
un code (informel) de
bonne conduite : augmen-
ter les prix de manière à ne
pas avoir de monnaie à
vous rendre et ainsi vous
permettre de gagner du
temps pour ne pas que
vous ratiez votre train...
• Pour boire un café Vous avez le temps de
sortir vous dégourdir les
jambes. Et au moins de tra-
verser le boulevard Diderot
pour aller siroter votre
petit noir en terrasse del’Européen, par exemple,
ou chez de l’un de ses voi-
sins. Le prix du café inclut
bien sûr la vue imprenable
sur la gare, son beffroi
unique au monde et
ses superbes taxis.
• Pour manger un sandwichSortez rue de Bercy puis
prenez à gauche en
direction du ministère de
l’Economie. Marchez cinq
minutes. Vous allez croiser
la rue de Rambouillet qui se
prolonge par la rue Villiot.
Engagez-vous dans la rue
Villiot. Vous tomberez sur
une petite boulangerie très
sympathique. “Farinez-vous”revendique une démarche
solidaire et responsable,
en utilisant des matières
premières issues de pro-
ducteurs locaux, de l’agri-
culture bio ou raisonnée ou
des produits équitables.
En matière de ressources
humaines, la boulangerie a
Qu’on le veuille ou non,lorsqu’on part, il y a despassages obligés. Lastation service, la gare,l’aéroport... autant delieux de transit conçuspour être instantané-ment familiers et répon-dre à ces besoins vitauxet impérieux que sont la pause-pipi, la pausesandwich ou l’achat decadeaux de dernière minute. Ce sont des endroits tellement formatés que même lemeilleur roman ne suffitgénéralement pas àtromper l’ennui. Paprikaa voulu explorer cespoints névralgiques eten faire des destinationsà part entière. Parce que c’est toujours par là que commencent les voyages. Premièreétape : la Gare deLyon, à Paris, où transitent chaque annéeplus de 80 millions de voyageurs.
VOUS N’AVEZ QUEQUELQUES MINUTES...
VOUS AVEZ UNE DEMI-HEURE...
9Menu expReSS à ...
La Gare de Lyon
F
22 • paprika MARS-AVRIL
choisi d’aider et de former
des adultes en reconver-
sion. Même les belles
tables en bois proviennent
de chênes issus de forêts
durablement gérées. C’est
un peu plus cher que dans
une boulangerie tradition-
nelle, mais on est toujours
mieux rassasiés en man-
geant utile, n’est-ce pas ?
• Pour faire un voyageIl suffit de sortir de la gare,
de prendre le boulevard
Diderot en direction de
Nation, de marcher une
centaine de mètres et
de s’arrêter chez
Gastronomie Russe, qui,
comme son nom l’indique en
cyrillique sur la devanture,
est une épicerie fine spé-
cialisée dans les produits
de l’ex-URSS. A l’intérieur,
c’est la caverne d’Ali Baba,
avec des charcuteries de
toutes sortes, des bocaux
de cornichons en saumure,
à l’aneth ou à la feuille de
chêne, du thé, des Sprats
de Riga et, bien sûr, un mur
entier dédié à la vodka.
En quelques minutes, vous
pourrez faire croire que
vous revenez d’un voyage
dans les steppes de Sibérie.
• Pour retomber en enfanceMais il y a mieux. A une cin-
quantaine de mètres de la
Gare de Lyon, il est possible
de faire un voyage... dans le
temps ! Pour cela, il faut se
rendre au 3, rue Michel-
Chasles dans la confiserieOlga. Dans cette petite
boutique, les douceurs ont
le goût des souvenirs d’en-
fance. Il suffit d’évoquer
quelques noms pour re-
monter le temps : calissons
d’Aix, pralinés de Montargis,
bêtises de Cambrais,
sucettes au caramel
Pierrot, pâte de réglisse,
pastilles de Vichy, zan, rou-
doudous... Il y a forcément
la friandise que vous alliez
chiper dans la boîte en fer
sur le buffet de votre
grand-mère.
Difficile de ne pas conseiller
d’aller déjeuner au TrainBleu, LE restaurant de la
Gare de Lyon. L’établisse-
ment est une véritable
institution, plus que cente-
naire, et propose un cadre
grandiose avec peintures,
dorures à foison, barres de
cuivres, banquettes en cuir
et parquets cirés. Les prix
sont à l’avenant. : menu "de
base" à 56 euros et menu
dégustation à 98 euros,
assortis d’un service très...
parisien.
Si vous préférez quelque
chose de plus simple, sor-
tez de la gare, prenez la
rue de Lyon, en face, sur une
centaine de mètres, puis
tournez à droite rue Traver-
sière. Passez sous le Viaduc
des arts, vous tomberez
sur L’encrier, qui propose à
midi un menu entrée, plat,
dessert à 14,50 euros.
C’est bon et bon marché...
mais souvent pris d’assaut.
Si c’est le cas, vous
pourrez toujours vous
replier en face, chez Peppe,
une épicerie italienne très
colorée. ,
VOUS AVEZ PLUS D’UNE HEURE...
bon à SAVoIR
DANS LE QUARTIER,PAPRIKA A AUSSI REPÉRÉ...
• Le bar-resto Les Combusti-bles, 14 rue Abel, à cinq minutes de la gare, qui pro-pose des concerts au moinstrois fois par semaine. Plussympa que d’errer dans lescouloirs de la gare le soir !
• Le Viaduc Café, 43 av. Daumesnil, juste à côté, propose, lui, un “Jazz brunch”,le dimanche entre 12h30 et15h30. Si vous êtes en famille,il y a des jeux prévus pour lesenfants, et même des anima-teurs, pour que les parentspuissent écouter le concerttranquillement avant d’allerprendre le train.
• Si vous aimez les brunchs et
que vous poussez un peu plusloin sur le boulevard Diderot,vous allez croiser la rue Crozatier, et, au n°3, il y a Miss Terroir, un repaire àbrunchs copieux et délicieuxle week-end.
• À côté de GastronomieRusse, il y a un caviste, Lesdomaines qui montent, quipropose des déjeuners du terroir. En attendant d’y être
vraiment, prenez une boufféede campagne avec un confitde canard ou une carbonadede bœuf sauce morille accompagné d’un petit vingouleyant à souhait.
•Enfin, pour à peine le prixd’un sandwich, les étudiantsen transit peuvent aller man-ger au Resto U, 45, bd Diderot,situé juste après le Viaduc desarts.
w
MARS-AVRIL paprika • 23
24 • paprika MARS-AVRIL
Lisbonne revisiteses classiques
L A D E S T I N A T I O N
Bienvenue dans la ville des contrastes. Bienvenue dans la capitale qui a érigé la simplicité en principe gastronomique, tout enayant plus de 300 manières d’accommoder lamorue. Bienvenue dans une ville enterrée parses créanciers, mais dont les faubourgs sont réinvestis par de jeunes chefs décomplexés.C’est cette Lisbonne-là que nous sommes allés chercher. Une cité opiniâtre et chaleureuse qui se renouvelle sans cesse...pour notre plus grand plaisir.
DOSSIER RÉALISÉ PAR JENNIFER GALLÉ & ALEXANDRE ZALEWSKI
MARS-AVRIL paprika • 25
BALADE GOURMANDEEN VILLE paGE 34
COMMENT BIEN CHOISIR SON PORTOpaGE 74
AUGUSTA NOUS INVITE A DÎNERpaGE 70
À l’Antiga pasteleria de Belém.
MARS-AVRIL paprika • 27
guIDE DE SuRVIE
A Lisbonne comme un poisson dans le Tage
La ville en brefLisbonne (570 000habitants) est uneville mystérieuse,
un peu revêche, qui ne sedonne pas au premiervenu. Il vous faudra doncapprivoiser ses quartiers enapprenant à vous repérerdans les méandres de sesruas et autres “traversas”.Il faudra ensuite prendreen compte ses petits pavésnoirs et blancs et revoirvotre façon de marcher.
Ce n’est qu’après avoirdompté ses dénivelés quela belle sera à vous.
Y allerAllers-retours audépart de Paris, àpartir de 180 euros.
L’aéroport est très prochedu centre-ville. Comptezune vingtaine de minutesavec l’Aero-bus (n°91)pour arriver à la Praça doRossio. Plus sportif : le bus.A partir de 24 euros l’alleravec Eurolines, mais il fautprévoir un minimum de 24 heures de voyage. Unecarte d’identité suffit pourrejoindre le Portugal.
La meilleure saisonSans aucun doutele printemps etl’automne. En été,
les températures dépas-
sent facilement les 30°C etl’hiver peut se révéler assezrude. Vous aurez donc desérieuses chances d’avoirdu beau temps et des tem-pératures très clémentesaux intersaisons.
Le coût de la viePar rapport à laFrance, Lisbonneest très bon mar-
ché. Il faut savoir qu’auPortugal, le salaire mini-mum est de 565,83 eurospar mois, soit deux foismoins que dans l’Hexa-gone. Lisbonne est donc,de manière générale, trèsabordable et il n’est pasrare de trouver des menuscomplets (entrée, plat,dessert, café) à moins de 8 euros. Pour les mordus deshopping, vous trouverezdes prix très attractifs
dans les grandes enseignesde prêt-à-porter, qui sontde 20 à 30 % moins chersqu’en France.
HébergementComptez au mini-mum 50 euros lanuit pour un hôtel
type Ibis en centre-ville.Vous pouvez égalementtrouver des chambresmoins chères dans des au-berges de jeunesse. Ainsi,l’Albergo Odisseo, près dela station Avenida, proposedes chambres individuellesà 20 euros en basse saisonet à 30 euros pendant lasaison touristique. Atten-tion à réserver pendant les ponts de mai. La villeattire de très nombreux touristes à cette période etil peut devenir compliquéde trouver une chambre.
Les transportsLisbonne possèdeun métro compre-nant quatre lignes,
un réseau de bus et surtoutun tramway, avec les fameux n°25 et n°28. Pourprofiter pleinement de ceréseau, vous pourrez ache-ter des billets qui offrentun nombre illimité de trajets pendant 24 heurespour 5 euros.
Les guides à emporterNe partez pas sansles incontourna-bles Guide du
Routard et Lonely Planet.Pour trouver les must en unclin d’œil, optez pour leCartoville Lisbonne (ed.Gallimard). Enfin, les gourmands se réfèrerontau Goutez Lisbonne (ed.Angès Viénot).
Et pour ne pas vous noyer dans les menus...
• petit déjeuner :pequeno-almoço • déjeuner : almoço• dîner : jantar• végétarien : vegetariano (m), vegetariana(f)
• “A votre santé !” :“Tchim-tchim ! Saude !”
• “L’addition, s’il vousplaît” : “A conta, se faz favor.”
• pain : pão• sel : sal• poivre : pimenta
• boisson : bebidas• café : café• thé : chá
• jus : sumo• eau : agua• bière : cerveja• vin : vinho
• viande : carne• agneau : borrego• bœuf : bife• porc : porco• mouton : cabrito• jambon : presuntos
• œuf : ovo• volaille : aves• dinde : peru• canard : pato
• légume : vegetais• fruit : fruta• pomme de terre, patate : batata• salade : salada
• dessert : sobremesa• glace : gelado
• poisson : peixe• morue : bacalhau• thon : atumpeixe espada• rouget = salmonete• saumon = salmao• sole = linguado• sardine = sardinha
Pour profiter au mieux de votre séjour dans la capitale portugaise, suivez le guide !
28 • paprika MARS-AVRIL
ertaines choses
sont immuables à
Lisbonne et c’est
tant mieux. Cette incroya-
ble lumière dorée, d’abord,
qui vous enveloppe, qui
vous cajole et qui vous
console de tout dès la des-
cente d’avion. Un vrai ca-
deau des dieux qu’on
apprécie d’autant plus que
le temps chagrin s’éternise
au Nord.
La prévenance discrète des
Lisboètes, ensuite. Leur
distance polie n’est jamais
de l’indifférence. Ici, vous
serez tranquille sans vous
sentir isolé.
Les occasions de plaisirs
simples et renouvelables à
l’infini, enfin. Surtout.
Comme de pouvoir flâner
dans les ruelles du vieux
quartier de Graça, de gri-
gnoter au comptoir un pão
de Deus (pain de Dieu) ac-
compagné d’un crémeux
meia de leite (café au lait),
de lézarder en terrasse
après une assiette de
poulpes grillés rafraîchie
d’une bière, d’aller au
musée, puis, sur un coup de
tête, de prendre le large en
longeant la rive nord du
Tage pour contempler la
ligne d’horizon.
Où comment réunir les déli-
catesses citadines et les
coups de fouet maritimes
en un seul et même endroit.
Mais on sent, ces jours-ci,
la ville traversée par des
vents contraires.
Celui de la crise... qui souffle
très fort. Le nouveau sys-
tème de taxes mis en place
à la demande du FMI et de
Bruxelles fait grincer les
dents des Portugais. Ils
sont d’ailleurs nombreux,
parmi ceux qui ont l’âge de
pouvoir y penser, à envisa-
ger de hisser les voiles pour
tenter leur chance ailleurs.
Le cousin brésilien, en plein
boom économique et par-
tageant la même langue,
attire plus d’un candidat à
l’exil. Et le gouvernement
ne fait même pas mine de
vouloir les retenir...
De la place pour du neuf
D’autres vents, moins puis-
sants mais bien plus en-
ivrants, balayent aussi
la capitale portugaise.
Comme celui du renouveau
dans les assiettes.
Pour qui n’est pas retourné
à Lisbonne depuis plusieurs
années, il sera très réjouis-
sant de découvrir toutes
ces nouvelles adresses où
l’on se réapproprie le patri-
moine culinaire tout en
perpétuant cet art du
quotidien propre à la ville.
Des chefs résolument
créatifs, - Susana Marga-
c
LA VILLE
La douceur de vivre, contre vents et marées
MARS-AVRIL paprika • 29
rida Da Gloria Felicidade à la
Taberna Ideal, Ljubomir Sta-
nisic au 100 maneiras ou
encore Vitor Sobral à la
Cervejaria da Esquina, pour
ne citer qu’eux -, ravissent
les papilles des curieux. Ils
parviennent à marier tradi-
tion et innovation dans
des établissements où l’on
se sent bien. Et d’autres
endroits, qui vous font lar-
guer les amarres le temps
d’une soirée, continuent
de fleurir. Comme le très
lascif Pensão Amor, dans le
quartier de Cais do Sodré,
un ancien hôtel de passes
remis au goût du jour où
l’on peut prendre un verre
dans une ambiance genti-
ment décadente. Ou en-
core le Sea Me, une
ancienne poissonnerie de-
venue LE restaurant de
fruits de mer de la ville.
Promenade gourmande
C’est cette Lisbonne-là,
toute à la fois fière, douce,
nonchalante et inventive, -
certes un peu abasourdie
par les difficultés écono-
miques mais qui refuse à se
laisser aller au pessimisme
en cultivant ce trésor de la
douceur de vivre -, que
nous avons voulu vous
faire partager. Aussi, nous
vous embarquons pour
une balade à travers ses
quartiers où nous avons
cherché à percevoir les
battements de ce nou-
veau cœur lisboète. Sans
oublier, bien sûr, de rendre
hommage en chemin aux
charmes éternels de la ville
de Fernando Pessoa : ses
délicieuses pastelarias où
le poète aimait à passer
des journées entières, ses
marchés aux étals de pois-
sons débordants, ces pe-
tits restos où l’on grille la
sardine, ses jardins perchés
sur les collines où l’on ad-
mire le soleil couchant en
sirotant une limonade...
Une promenade gour-
mande qui vaut le détour.
Absolument.
Un immense merci à Nadia, Claudio, Augusta, Ana Isabel,Claudia, Nilton, Marie et Sonia,nos chers amis lisboètes, quinous ont donné les clés de leurville. Obrigada !
çA bLOguE !
Avant de partir, commencez par visitlisboa.com. C’est le siteofficiel où vous trouverez tout cequ’il y a à savoir avant de partirpour la capitale portugaise. Il faut également jeter un œil aublog golisbon.com, en anglaisseulement, mais ultra-complet.Pour la communauté gay, signalons le lisbonnegay.blogspot.com, en français.
1 JENNIFER GALLÉ
LeS SpécIALItéS cuLInAIReS de LISbonne
Bienvenue dans l’usine à pasteis Il existe un magasin à Lisbonne qui a le monde à ses pieds. L’AntigaConfeitaria de Belém est l’unique endroit qui vend les authentiquespasteis de Belém, ces petits flans qui rendent fou de gourmandise
Impossible d’y échapper. Le
pastel de Belém est à la gas-
tronomie lisboète ce que le
fado est à la musique portu-
gaise : incontournable.
Ce petit flan rond, lové dans
un lit de pâte feuilletée, se
déguste à toute heure de
la journée, de préférence
tiède, saupoudré de cannelle
et accompagné d’un café.
On trouve des pasteis de
nata partout dans Lis-
bonne. Mais les seuls pas-
teis de nata qui peuvent
porter la dénomination
“pasteis de Belém” se trou-
vent, logiquement, dans le
quartier de Belém, à proxi-
mité du monastère des Hié-
ronymites (Mosteiro dos
Jerònimos).
Une recette secrète
En 1834, suite à la Guerre li-
bérale de 1820, un décret im-
pose la fermeture de tous
les monastères du pays.
Pour survivre, les religieux
qui restèrent sur place offri-
rent au magasin voisin des
pâtisseries à vendre... les fa-
meux Pasteis de Belém, fa-
briqués selon la “recette
secrète” du monastère, qui
se transmet depuis 1837
entre maîtres pâtissiers.
Aujourd’hui encore, ils ne
sont que trois à connaître la
recette exacte et à élaborer
la préparation pour le légen-
daire petit flan dans la
“chambre des secrets”, pièce
tenue bien fermée par une
porte blindée.
Dans le laboratoire, les em-
ployés mettent la pâte feuil-
letée dans les moules, qui
sont placés sur de grandes
plaques de cuisson. Une ma-
chine se charge ensuite de
les remplir de le quantité
exacte de crême. Ils sont en-
suite passés aufour pen-
dant 30 minutes à une
température de 400°C.
Une fois cuits, on les dé-
moule et on les place l’un
sur l’autre pour qu’ils res-
tent tièdes. Ils sont en-
suite amenés directement
en salle pour être dégustés.
Et ils n’ont pas vraiment le
temps de refroidir : vendus
environ un euro pièce, la
confeiteria écoule, en
moyenne, 20 000 pasteis
par jour, et ce 365 jours par
an.
Non stop
Pour régaler tous les gour-
mands, le magasin, qui ne
vend ses pasteis qu’au
comptoir ou en salle, est ou-
vert de 8 heures à minuit
l’été et 23 heures l’hiver. Une
amplitude horaire qui ne
vous dispensera sans doute
pas de faire la queue !
C’est bon à savoir !Pour éviter de faire la queue,
il suffit d’entrer dans la confeitaria, de passer le comptoir etd’aller vous installerdirectement dansl’une des trois salles(dont la dernière est
immense). Au moins, si vous devez attendre, vous
serez assis !
Pastel ou pasteis ?Cela dépend uniquement devotre gourmandise : savoir si vous pouvez vous contenterd’un “pastel” ou s’il faut plusieurs “pasteis” pour vous rassasier !
U1 ALEXANDRE ZALEWSKI
30 • paprika MARS-AVRIL
LA Recette
LES PASTEIS DE NATA
Pour 12 pasteis : • 1/2 l de lait• 250 g de sucre • 40 g de farine• 6 jaunes d’œuf• sel• une gousse de vanille• une pâte feuilletée
• Dans une casserole,faites chauffer le lait.Ajoutez le sucre, la farineet la vanille et bien mé-langer. Retirez du feu etlaisser refroidir. Ôtez lagousse de vanille. Ajoutez les jaunes d’œuf. Mélangez. • Tapissez des petitsmoules de pâte feuilleté.Ajoutez la crème. Fairecuire pendant vingt mi-nutes à four très chaud(minimum 200/210°C). Les pasteis doivent êtredorés. • Sortez-les du four, et déguster tiède, avec unpeu de cannelle.
Certains préconisent de mélanger 5 jaunes et unœuf entier plutôt que sixjaunes. D’autres font, aupréalable, un sirop avecle sucre, mélangé à unpeu d’eau. Ce sirop estajouté au lait, à la farineet à la vanille et mélangéau bain marie. D’autresproposent de rajouter unpeu de citron... Vous l’aurez compris : à vousd’élaborer votre proprerecette secrète !
INGRÉDIENTS
COMMENT S’Y PRENDRE
MARS-AVRIL paprika • 31
LeS SpécIALItéS cuLInAIReS de LISbonne (SuIte)
Nos 5 incontournables à LisbonneDifficile d’arrêter sonchoix sur cinq spéciali-tés indissociables de Lisbonne. C’est partialet discutable. Nousavons donc triché, enparlant d’autres spécia-lités, comme les pasteis,le porto, le fromage oules sardines dans nosdifférentes rubriques,pour ne garder que ce qui nous paraissait indispensable à une viedouce au bord du Tage.
Des biscuits à tous les étages C’est le sport favori des Lisboètes. Dès le petit matin, les habitants aiment prendre un “bolo” avec leur café.Outre les fameux “pasteis”, on trouve toutes sortes dedouceurs aux noms alléchants : pào-de-lò, doce deovos, bolo de mel... La liste des tentations est sans fin.
Les en-cas règnent dans les cafésPour le déjeuner, les Lisboètes nes’installent pas forcément à table.On va à la pastelaria pour y prendrela sopa (soupe) du jour, accompa-gnée d’un sandwich. Un déjeunerléger souvent complété après lasortie des bureaux par un nouveau grignotage.
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32 • paprika MARS-AVRIL
LeS SpécIALItéS cuLInAIReS de LISbonne (SuIte)
Nos 5 incontournables à LisbonneLe presunto
a de la cuisseLe Portugal a aussi ses grands crus de
jambon. Comme en Espagne, on trouve des porcs noirs, élevés en plein air, et engraissés aux glands. Les meilleurs
portent l’appellation d’origine protégéePresunto de Barrancos.
La ginja est dans la rueLa ginja est un alcool à la cerise typiquement portugais. Mais c’est surtout la manière de laconsommer qui est typique :il faut aller dans une Ginjinha, petit stand de ruequi vend de la ginja au verre.On la consomme debout,sur le trottoir.
La morue danstous ses étatsIl faut presqu’un an pourgoûter toutes les manièresd’accommoder la morue. Il y aurait, en effet, 365 manières de la cuisiner. Unedes plus communes est labacalhau à bràs, de la morueavec des pommes de terrefrites, des œufs, des oignonset des olives.
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34 • paprika MARS-AVRIL
MARS-AVRIL paprika • 35
pARcouRS gouRMAndS dAnS LISbonne
Morceaux choisis
1. PARQUE DAS NAÇÕES
• POUR PRENDRE UN CAFéPortela, dans le centrecommercial Vasco deGama.
• POUR DéjEUNER AU sOlEil OrizonPraca do Chile, 8-A.
2. DE XABREGAS À ALFAMA
• NOURRitUREs CUltUREllEs Museu Nacional do Azulejo Rua da Madre de Deus, 4 ; mnazulejo.imc-ip.pt
• POUR DéjEUNERDelidelux Avenida infante D.Henrique ;delidelux.pt
• POUR bOiRE UN VERREBuvette de l’Igreja da Graça(largo da Graça).
• POUR éCOUtER DU FADOBaiúcaRua de são Miguel, 20.
3. BAIXA ET ROSSIO
• POUR GRiGNOtER UNE PâtissERiE Et bOiRE UN CAFé OU UN tHéBake the difference Rua de são josé, 23 ;bakethedifference.com
Outra face da LuaRua da Assunção, 22 ;aoutrafacedalua.com
• POUR DîNER Solar dos PresuntosRua das Portas de santoAntào, 150 ;solardospresuntos.com
• NOURRitUREs CUltUREllEs MUDE (Museu do Design e da Moda)Rua Augusta, 24 ;www.mude.pt
• sHOPPiNGConserveira de LisboaRua dos bacalhoeiros, 34 ; conserveiradelisboa.pt
4. DU CHIADO A PRINCIPE REAL
• A FAiRE Elevador de Santa Justa Rua Aurea,rua de santa justa
• POUR bOiRE UN VERRE Bar de l’hotel Bairro AltoPraca luis de Camoes, 2 ;bairroaltohotel.com
Bairrus bodega Rua da barroca,bairrusbodega.com
Pavilhào ChinêsRua Dom Pedro V, 89 ; barpavilhaochines.blogspot.com
• POUR bRUNCHER VéGétARiENEnvy Chiado Rua Garrett, 10 ;Pateo de siza.
• sHOPPiNGSolar do vinho do Porto Rua de sào Pedro de Alcântara, 45 ; ivdp.pt
• POUR PRENDRE UNE GlACEArtisani IcecreamAvenida Alvares Cabral, 65 A/b ;artisanigelado.com
• POUR DîNERPensão AmorRua do Alecrim, 19.
Bota Alta traversa da Queimada, 37.
TavaresRua da Misericórdia, 37 ;tavaresrico.pt.
Sol e Pesca rua Nova do Carvalho, 44 ;solepesca.com
Sea me Rua do loreto, 21 ;peixariamoderna.com
100 maneirasRue teixeira, 35 ;restaurante-100maneiras.com
5. DE CAMPOLIDE ÀCAMPO D’OURIQUE
• POUR GRiGNOtER UNE PâtissERiE EN PRENANt UN CAFéPastelaria Versailles Av. da Republica, 15 A.
O Melhor Bolo de Chocolate do Mundo Rua tenente FerreiraDurào, 62 A ;omelhorbolodechocolate-domundo.com
• NOURRitUREs CUltUREllEsParça de Touros Campo Pequeno ;campopequeno.com
Igreja da Nossa Senhora de Fàtima Avenida Marquês de tomar, 104.
• POUR DéjEUNERCasa do PeixeMercado do 31 de janeiro, Rua Engenheiro Vieira dasilva.
Devagar Devagarinho traverssa larga, 15.
• POUR DîNER Tasca da Esquina Rua Domingos sequeira, 41 C ;tascadaesquina.com
Cervejaria da Esquina Rua Correia teles, 56 ;cervejariadaesquina.com
6. BELÉM
• POUR UNE PâtissERiEAntiga pastelería deBelémRua de belem, 84.
Pastelaria Nau de Belém Rua De belem, 27/29/31.
NOURRitUREs CUltUREllEs Museu Berardo Praça do império ;museuberardo.pt
• POUR DéjEUNERDarwin’s caféau Champalimaud CentreAv. brasilia, Ala b ;
Dans les pages suivantes, Paprika vous embarque pour six parcours gourmandsen images dans la capitale portugaise. Retrouvez ici toutes nos adresses
36 • paprika MARS-AVRIL
Le quARtIeR
en bRef
sorti de terre à l’occasion de l’Exposition universelle de 1998, le quartier du ‘Parcdes Nations’ surprend et séduit par son allure futuriste. ses bâtimentsimaginés par des archi-tectes à la renommée mondiale réjouiront les esthètes. situé à deux pasdu tage, ce “village” offreégalement de multiples occasions d’échappées. lelong de sa promenade quiborde le fleuve, au-dessusde laquelle se balancent lescabines du téléphérique,restaurants et bars sont légion. Quartier d’affairesoblige, la vie rythmée duParque das Naçoès s’orga-nise autour du majestueux centre commercial Vasco deGama. Faire une virée shopping y devient un vraiplaisir.
� Retrouvez toutes les infos pratiques page 35
Parque das Nações : à l’est, du nouveau !pARcouRS gouRMAndS dAnS LISbonne
1
MARS-AVRIL paprika • 37
Parque das Nações : à l’est, du nouveau !
Une pause caféau centre commercial
En sortant de la station de
métro Oriente, on n’hésite
pas à continuer tout droit,
direction le centre commer-
cial Vasco de Gama. Ancien
pavillon de l’Expo 98 trans-
formé en galerie marchande,
cet élégant édifice abrite
l’une des plus vénérables
enseignes de Lisbonne pour
le café : la maison Portela
(située ici au second niveau).
On y trouve tout ce qui fait
le charme des pauses café à
la portugaise : de sublimes
arabicas accompagnés de
douceurs variées. A comman-
der, un ovos moles de Aveiro,
drôle de petit gâteau dont
l’enveloppe extrafine
cache un cœur fondant
simplement élaboré à partir
d’œufs et de sucre...Une
merveille de délicatesse.
Il suffira ensuite de gagner
l’autre extrémité du bâti-
ment pour rejoindre le Tage.
à MANGER DES yEUx : L’ESTAçAO DO ORIENTE
la gare qui abrite la station Orienteest un véritable bijou de verre etd’acier conçu par l’architecte espagnol santiago Calatrava. Et si lequartier ne se distingue pas par sa vienocture, cela vaut la peine d’attendrela tombée de la nuit pour voir l’édificeilluminé.
38 • paprika MARS-AVRIL
Sous le soleil exactement
Avant de rejoindre le fleuve pour une promenade
vivifiante, on flâne d’un bâtiment de l’Expo 98
à l’autre. A ne pas rater, le Pavillon du Portugal,
qui, sous sa fine voûte en béton, permet
d’apercevoir le ballet aérien des cabines du
téléphérique. A l’heure du déjeuner, on choisit
le restaurant brésilien Orizon. Principal atout de
l’adresse : sa terrasse, la plus ensoleillée du coin.
On s’y régale d’un buffet ou de poulpes
grillés accompagnés d’une bière locale pour un
peu plus de dix euros... bain de soleil compris !
1. Parque das Nações
MARS-AVRIL paprika • 39
Les restos de poisson
pullulent
à quelques mètres de la
promenade plantée de pins le
long du Tage s’alignent les
restaurants de poisson.
Les serveurs alpaguent les
visiteurs pour proposer
l’inévitable bacalhau.
Clairement destinés aux
touristes, ces établissements
sont un peu boudés par les
Lisboètes. Ces derniers vous
conseilleront plutôt d’aller voir
du côté du Mercado, 31 de
Janeiro, derrière la place
Saldanha, pour déguster
un bon poisson grillé.
(rendez-vous en page 62).
à MANGER DES yEUx : L’OCEONARIO
Cet impressionnant aquarium, le plus grandd’Europe, offre une pause rafraîchissante.Une partie de sa façade est recouverte desublimes azulejos, imaginés par l’Américainivan Chermayeff et représentant, sous uneforme numérique, la vie sous-marine.
40 • paprika MARS-AVRIL
De Xabregas à Graça :le charme de la vieille ville
pARcouRS gouRMAndS dAnS LISbonne
LeS quAR-
tIeRS en bRef
Des dédales de rues étroitesqui grimpent sec, de la musique qui s’échappe desfénêtes, un marché auxpuces, des églises et desmonastères, des grils où l’onfait cuire des viandes et des kilos de sardines quandvient juin et que la ville entière célèbre le petit poisson gras. bienvenuedans la lisbonne de cartepostale... qui n’a cependantrien perdu de son authenti-cité. Dans les vieux quartiersde Xabregas, Alfama etGraça, il faut savoir prendrele temps de se perdre. C’estainsi que l’on fera d’éton-nantes découvertes commeces nouvelles adresses quifleurissent autour de la garesanta Apolonia ou, encore,ces restaurants de fado où l’on peut pousser la chansonnette.
� Retrouvez toutes les infos pratiques page 35
2
MARS-AVRIL paprika • 41
Un déjeuner enpaix au musée des azulejos
Situé dans le quartier de
Xabregas, ce joli musée un peu
isolé vaut vraiment le détour.
De la gare Santa Apolonia, il
faudra donc prendre le bus 794
pour s’y rendre... ou consentir à
marcher vingt bonnes minutes le
long de la voie ferrée. Niché au
cœur d’un monastère du XVIe
siècle, le lieu retrace cinq cents
ans d’histoire des azulejos, ces
carreaux de faïence qui ornent
les façades des bâtiments
portugais. Le restaurant du
musée est à l’image du lieu qui
l’abrite : calme et élégant. Le bleu
distinctif des azulejos règne ici
en maître et les tables donnent
sur un petit jardin luxuriant.
On y goûte une cuisine
traditionnelle (les plats du jour
ne dépassent pas 8 euros) très
honnête. Le cadre fait le reste.
42 • paprika MARS-AVRIL
2. De Xabregas à Graça
MARS-AVRIL paprika • 43
Le repaire desbobos
lisboètes
C’est devenu l’adresse
incontournable des
gourmets de la capitale,
amateurs de design et de
produits triés sur le volet.
Situé juste en face de la gare
Santa Apolonia, le Delidelux,
imaginé par deux
architectes, offre ainsi une
sélection de vins portugais
et étrangers à donner le
tournis. Le reste est à
l’avenant : fromages,
jambons, gâteaux d’ici et
d’ailleurs s’étalent sur les
étagères d’un mobilier très-
stylé : on n’a que l’embarras
du choix. Et l’intérêt pour cet
endroit pas comme les
autres croît à mesure qu’on
se dirige vers le fond du
magasin. On y découvre,
derrière une immense baie
vitrée, une large terrasse qui
donne sur le fleuve. En tête-
à-tête avec le Tage, on
pourra, pour une dizaine
d’euros, déguster un très
copieux plateau de
fromages portugais
accompagné d’un verre de
Dao. Le staff, qui sait de quoi
il parle, met un point d’hon-
neur à détailler l’origine et les
caractéristiques des
produits servis. Les samedis
et dimanches on y sert, pour
environ 14 euros, un
des meilleurs brunches de
la capitale. Un must...
à condition d’arriver avant
13 heures pour éviter le rush.
44 • paprika MARS-AVRIL
à MANGER DES yEUx : LE CASTELO DE SãO JORGE
Construit sur la plus haute colline de lisbonne, qui en compte sept, le château offre un point de vue exceptionnel au moment du coucher de soleil.
2. De Xabrégas à Graça
Apéritif avec vue
La jolie église du vieux quartier deGraça jouit d’un panorama à couper le
souffle. à cet endroit, quelques dizaines de tables s’organisent
autour d’un petit kiosque qui propose des boissons fraîches et du
café. Le lieu idéal pour tester la bière locale tout en se familiarisant
avec la géographie lisboète.
Au marché aux puces
Au Campo (place) de
Santa Clara à Graça, tout
autour du Panthéon, se
déploie le joli fouillis d’un
marché aux puces haut
en couleurs. On peut y
chiner des heures durant
sans oublier de s’arrêter
pour un snack dans
l’un des nombreux petits
restos du coin.
Dépaysement garanti.
MARS-AVRIL paprika • 45
Soirée dans un resto fado
Le coucher de soleil embrase
le ciel lisboète. Du Castelo São
Jorge, on savoure chaque
minute de ce spectacle gran-
diose. La nuit s’installe peu à
peu, Il est temps de regagner
les ruelles tortueuses de
l’Alfama pour une soirée dans
un resto fado. Attraction
touristique de la capitale, les
établissements proposant un
repas sur fond de musique
sont légion... et pas toujours de
bonne tenue. Voici une adresse
originale à ne pas rater : le
Baiúca de Alfama. Ici, on vient
pour le Fado Vadio, cette ver-
sion amateure du chant mélan-
colique indissociable de l’âme
portugaise. Les clients inter-
rompent leur repas à tour de
rôle et entonnent leur com-
plainte à la volée.
Un spectacle très émouvant
dans un lieu hautement
convivial.
46 • paprika MARS-AVRIL
De Baixa à Rossio : dans la ville basse pARcouRS gouRMAndS dAnS LISbonne
LeS quAR-
tIeRS en bRef
Au cœur de lisbonne,battent baixa et Rossio.Fruit de la reconstruction dela ville après le tremblementde terre de 1755 par le marquis de Pombal, ce mini-quartier étonne parses larges avenues et sesrues qui se coupent à angledroit. C’est le point de pas-sage obligé pour aller vers lebairro Alto ou l’Alfama. Et cen’est pas parce que le quartier est central, donc,touristique, qu’il faut lesnober. baixa et Rossio recèlent encore d’adresses incontournables, comme la Confeitera Nacional, l’épicerie centenaire Manueltavares ou les petites Ginjinhas qui servent despetits verres d’alcool de cerise.Et, plus haut, autourdu Coliséu, les enfilades de restaurants peuvent combler tous les appétits.
� Retrouvez toutes les infos pratiques page 35
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MARS-AVRIL paprika • 47
Le café vintageest servi !
Ce n’est pas à proprement
parler une halte gastronomique
puisqu’il s’agit... d’une friperie.
Mais si Outra face da Lua (l’Autre
face de la lune) mérite de
figurer ici, c’est qu’elle offre une
pause originale et agréable au
visiteur en mal de découvertes.
C’est l’endroit idéal pour faire
une halte, prendre un thé,
fouiner dans les rayons de
fringues, déguster un petit cup-
cake et reprendre sa route vers
les hauteurs de l’Alfama.
De Baixa à Rossio : dans la ville basse Des pâtisseries 100 % végétaliennes
C’est une petite boutique un peu en retrait du Baixa qui témoigne à elle seule de l’esprit
de renouveau qui règne à Lisbonne. A l’extérieur, rien qui ne la distingue des pastelaria
traditionnelles mais Bake the difference a ceci de particulier que c’est la première
pastelaria végétalienne de Lisbonne. Léonice, la patronne, a commencé a développer
ses recettes dès 2006, pour une clientèle d’initiés. Et le bouche-à-oreille a fait le reste.
48 • paprika MARS-AVRIL
L’art de bien se
conserver
Pensiez-vous qu’un jour, on
vous dirait : “il faut absolu-
ment que tu ailles acheter
des sardines dans ce
magasin !” Pis : une de vos
connaissances, récem-
ment rentrée de Lisbonne,
vous a fait l’affront de
vous offrir des boîtes de
conserve, et, pis encore,
vous vous êtes surpris à
trouver ça génial. La
Conservaria de LIsboa,
petit magasin de
conserves de produits de
la mer, a appliqué à la lettre
ce vieux principe marketing
qui veut que ce soit dans
les vieux pots que l’on fait
les meilleures soupes.
Le magasin n’a pas changé
depuis son ouverture,
en 1930. Les employés
continuent à emballer à la
main, sous vos yeux, les
petites boîtes en fer blanc.
Et le cabinet de design Boq,
qui a revu l’identité visuelle
des trois marques déte-
nues par la Conservaria
(Tricana, Prata do Mar et
Minor) pour ses 80 ans, a
bien pris soin d’aller fureter
dans les archives pour y
puiser son inspiration.
Résultat, on est impres-
sionné par ces piles infinies
de sardines, de thon et de
poulpe en boîte et à toutes
les sauces. On n’a qu’une
envie : acheter la collection
entière pour pouvoir
rapporter un peu de ce
design délicieusement
rétro à la maison.
3. De Baixa à Rossio
MARS-AVRIL paprika • 49
Un classique à la page
C’est une véritable
institution... qui sait vivre
avec son temps. Au Solar de
Presuntos, installé depuis
1974 à proximité du Coliséu,
dans le quartier de Rossio, on
choisit son vin de façon très
tactile : en tapotant sur un
iPad ! Une pratique qui étonne
un peu tant on mise ici sur les
basiques de la bonne cuisine
portugaise. Comme quoi, on
peut très bien perpétuer la
tradition tout en étant
technophile. Et il est à souhai-
ter que certaines choses ne
changent jamais ici : l’atmo-
sphère bon enfant, le
service aux petits soins,
la générosité des plats et la
recette du Doçe da avo Luisa,
une merveille d’onctuosité et
de fondant qui clôt de la
plus belle façon un dîner
(30 euros environ, vin
compris) entre les murs de
cette vénérable maison.
à MANGER DESyEUx : LE MUSéE DU DESIGN ET DE LA MODE installé dans les anciens locaux de la banque nationale d’Outre-mer, ce nouveau lieu donne unpetit coup de jeune à baixa. On peut y découvrirune belle collection de vêtements et d’objets design du XXe siècle.
50 • paprika MARS-AVRIL
Rien de tel qu’un petit tour au
marché pour avoir une photographie
de la vie lisboète. Mercado de Campo
d’Ourique, mercado de Arroios...
Lisbonne compte une multitude de
marchés couverts où règne une am-
biance populaire et accueillante. On y
trouve les produits de base de la cui-
sine locale. Sur les étals de poissons,
les sardines tiennent une place de
choix. On y trouve également une
multitude de fruits et de légumes. Si
vous êtes en quête de souvenirs, allez
regarder ce que proposent les
fromagers : queijinhos do Alentejo,
Castelo Branco, Queijo da Serra... les
spécialités sont infinies. Il faut d’ail-
leurs absolument goûter au fromage
de brebis amanteigado, équivalent
laitier du fondant au chocolat :
on découpe une ouverture sur le
haut du fromage, pour le déguster à
la cuiller. Un vrai délice. Comme sur
tous les marchés, l’idéal est d’arriver
relativement tôt, vous pourrez ainsi
aller prendre un cafezinho et un bolo
au comptoir d’une des pastelaria du
marché et vous mêler aux marchands
locaux venus faire une courte pause.
Le plus beau marché couvert se situe
au sud de la ville, juste en face de la
station de métro Cais do Sobre, sur
la route qui mène à Belem. Cette halle,
majestueuse, de 10 000 mètre
carrés, a été inaugurée le 1er janvier
1882, et ce n’est que depuis une
dizaine d’années qu’elle n’est plus
réservée aux seuls grossistes.
C’est aussi un bon point de départ
pour remonter vers le Bairro Alto,
un peu plus au nord.
Un tour au marché
MARS-AVRIL paprika • 51
52 • paprika MARS-AVRIL
Du Chiado à Principe Real :là où bat le cœur de la ville
pARcouRS gouRMAndS dAnS LISbonne
LeS quAR-
tIeRS en bRef
boutiques de céateur, restaurants à la mode, enfilade de bars... C’est ici, le plus souvent en sedonnant rendez-vous sur la Praça (place) luis deCamoès, à deux pas de la station de métro baixa-Chiado, que les lisboètes entament leurs virées nocturnes. Dès les beauxjours, les ruelles du bairroAlto, qui attirent la jeunesselocale, sont noires demonde. Moins exhubérant, plus sélect, le Chiado ravirales gourmets exigeants.C’est ici qu’on trouve parmiles meilleures tables de lacapitale portugaise. Et, pourceux qui aiment prendre leur temps et cultiver la douceur de vivre, prendre ladirection de Principe Real,situé au nord du bairro Alto.
� Retrouvez toutes les infos pratiques page 35
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MARS-AVRIL paprika • 53
Sur le toit, les cocktails
Pour admirer les sublimes couchers de soleil qui
embrasent les cieux lisboètes en sirotant un
mojito sur fond de musique gentiment lounge,
direction le bar de l’hôtel cinq étoiles Bairro
Alto. Une fois le lobby passé, on s’engouffre
dans un minuscule ascenseur qui conduit
au sixième ciel. A l’heure de l’apéro, les places
sont souvent rares mais quand on trouve
à s’asseoir, on en reste bouche bée.
Pour éviter la cohue, on pourra opter
pour la pause café en journée, la terrasse
accueillant la clientèle à partir de 12h30.
Les balbutiements végétariens
Les adresses veggies ne sont pas légion
à Lisbonne. Niché au fond d’une cour du
Chiado, le restaurant Envy, à la déco
soignée, propose le dimanche, un copieux
brunch pour une dizaine d’euros. Au menu,
un buffet composé de salades et une
sélection de plats chauds. Simple et bon.
à MANGER DES yEUx :L’ELEVADOR DE SANTA JUSTA
Marquant la frontière entreles quartiers de baixa et duChiado, le style néogothiquede l’ascenseur de santajusta fait imanquablementlever les yeux au ciel ! Qui l’emprunte pourra bénéficier d’un point de vueimprenable sur la villebasse.
54 • paprika MARS-AVRIL
Des restos pour tous les goûts
Conceptuels, surprenants, incontournables, conviviaux, branchés... Chaque visiteur en quête d’une bonne table trouvera la
sienne dans les quartiers du Chiado et du Bairro Alto. En voici quelques-unes à ne pas rater (de haut en bas et de gauche à
droite) : pour son ambiance lascive, la Pensão Amor. Rusticité et efficacité au menu du Bota Alta, établi à Lisbonne depuis les
années 70 et spécialiste de plats typiquement portugais. Autre must, le très chic Tavares (ouvert au XVIIIe siècle !), dont le
nouveau chef Aimé Barroyer enchante les papilles des Lisboètes. Planqué dans une petite rue en descendant vers Cais do
Sodré, le très original Sol e Pesca propose des menus élaborés à partir de... conserves de poisson. Sa déco, composée de cen-
taines d’hameçons, vaut à elle seule le détour. Enfin, on se presse au Sea Me, l’adresse du moment. Installés à de grandes
tablées, on déguste des fruits de mer mais c’est pour son burger, un des meilleurs de la ville, que les Lisboètes y reviennent.
4. Du Chiado à PrincipeReal
MARS-AVRIL paprika • 55
Au royaume de la cuisine
fusion
D’aucuns diront que
100 Manieras est l’endroit
“branchouille” du moment
et qu’il n’a rien à voir avec
LA Lisbonne authentique. Il
est vrai qu’avec sa déco,
pas toujours réussie, qui
mélange classique et mo-
derne (on préfère d’ailleurs
l’ambiance feutrée du
premier étage, non
fumeur), ses beautiful
people et son armada de
serveurs débordés, on
peut légitimement se
poser la question. Mais il
suffit de passer à table
pour changer d’avis. Le
chef, Ljubomir Stanisic,
débarqué de Belgrade à
l’âge de 12 ans, a fait ses
classes dans les plus
grandes cuisines du pays et
trouve son inspiration à la
fois dans son héritage culi-
naire (böreks yougoslaves
aux épinards), dans les hit
de la world food (hambur-
ger à la saucisse portu-
gaise, tartare de thon) et
dans les classiques de la
cuisine portugaise
(bolinhas de bacalhau,
morue grillée). Tout cela
donne une cuisine
inventive, très fine et
succulente, pour une note
d’un peu plus de 40 euros
(vin compris), somme
toute, plutôt
raisonnable.
à MANGER DES yEUx : PRAçA DOS RESTAURADORES
la majestueuse place marquele point de rencontre entre lavieille ville et la nouvelle, quiétend ses larges avenues modernes vers le nord. C’estaussi ici qu’on peut emprunterle funiculaire qui arpente latrès pentue calçada da Gloriapour rejoindre le bairro Alto.
56 • paprika MARS-AVRIL
4. Du Chiado à Principe Real
MARS-AVRIL paprika • 57
Le vin joue des coudes
Si les nuits chaudes du Bairro Alto carburent à la bière,
un bar à vins proposant de jolis flacons est en passe
de tirer son épingle du jeu noctambule. Au Bairrus
Bodega, on trouve à la carte des crus exclusivement
portugais. Et ça marche ! Une clientèle de trentenaires,
lassée des extravagances des cadets dans les rues
adjacentes, se donne rendez-vous ici. Il faudra
compter autour de 15 euros pour une bonne bouteille.
à MANGER DES yEUx : LE kIOSqUE
DE LA PRAçA DE LUIS CAMOESPoint de ralliement des noctambules lisboètes,
la Praça (place) possède un kiosque toujours
très fréquenté.
58 • paprika MARS-AVRIL
Les amoureuxdu porto ontleur institut
Blotti au cœur d’un palais
du XVIIIe siècle, le Solar do
Vinho do Porto, à la lisière
du Bairro Alto, propose
quelque deux cents
références du vin cuit.
Ouvert jusqu’à minuit,
cet endroit d’exception à
l’atmosphère tout aussi
feutrée que cosy attire
les connaisseurs.Mais
la dégustation reste
tout à fait abordable :
compter de
1 à 5 euros le verre.
à MANGER DES yEUx, LE MIRADOURO DE SAO PEDRO DE ALCANTARA situé tout à côté du solar do Viho doPorto, ce délicat jardin offre une impressionnante vue sur la ville basseet les vieux quartiers d’Alfama et deGraça.
4. Du Chiado à Principe Real
MARS-AVRIL paprika • 59
L’incroyable bric-à-brac du Pavilhao Chinês
Un spot incontournable dans le très joli quartier
du Principe Real. Dans cette maison du XIXe siècle,
le propriétaire a accumulé une incroyable collection
d’objets hétéroclites. Un endroit tout indiqué pour
prendre un verre et se laisser aller à la rêverie.
à MANGER DES yEUx : PRAçA DE PRINCIPE REAL
le jardin situé sur la Praça (place) du quartier de Principe Real possède un
bassin d’eau sous lequel se cache un petitmusée installé dans le Reservatório da
Patriarcal, ancien réservoir d’eau. Une curiosité à ne pas manquer.
Les parfums 100 % portugais d’Artisani
En poussant un peu au-delà de Principe Real, on atteint le quartierdu Rato pour s’accorder une pausesucrée chez le glacier Artisani. Ici, ontrouve des parfums qui s’inspirent de spécialités typiquement portu-gaises, comme la crème aux œufs oule bolo rei, la galette des rois locale.
60 • paprika MARS-AVRIL
De Campolide à C.d’Ourique : comme des LisboètespARcouRS gouRMAndS dAnS LISbonne
LeS quAR-
tIeRS en bRef
Au nord de la ville basse(baixa) s’étendent lesvastes avenues de la lisbonne moderne. On n’ycroise pas beaucoup de touristes mais des lisboètesaffairés qui se rendent autravail et investissent lesrestaurants et autres pâtisseries à l’heure du déjeuner. si ces nouveauxquartiers n’ont pas lecharme de la vieille ville, ils possèdent bien d’autresatouts comme la magnifique collection d’art moderne de la FondationGulbenkian ou encore l’impressionnant Parque(parc) de Monsanto. En direction du sud-ouest, on atteind l’irrésistiblequartier de Campo d’Ourique où il fait bon vivre.son grand marché très réputé alimente les trèsbonnes tables du coin.
� Retrouvez toutes les infos pratiques page 35
5
MARS-AVRIL paprika • 61
à MANGER DES yEUx : PRAçA DE TOUROS
Cette imposante arène de 8 000 places construite au XiXe siècle accueille le public amateur de corridas. seule différence avec le voisin espagnol : ici, le taureau aura la vie sauve.
De Campolide à C.d’Ourique : comme des Lisboètes
Au comptoir de Versailles
Pour qui aime la douce
atmosphère des pâtisseries
lisboètes, un crochet par
Versailles s’impose. Vieille
d’un siècle, cette institution
accueille à la pause de midi
tout ce que le quartier
moderne de Saldanha
compte de salariés affamés.
L’espace restaurant est
plein, qu’importe, on s’installe
au comptoir pour apaiser sa
faim grâce au plat du jour.
Une armée de garçons
veillent au grain, tous prêts à
bondir sur les percolateurs
pour prépaper l’espresso
qui accompagnera une des
très nombreuses spécialités
pâtissières de la maison.
Dans ce décor un peu
suranné et douillet, on
peut passer des heures à
observer le va-et-vient de
la clientèle et le ballet des
serveurs évoluant avec
adresse sous les grands
lustres.
62 • paprika MARS-AVRIL
Vive la cuisine du marché
Situé au premier étage du bâtiment qui abrite le Mercado (marché) do
31 Janeiro, à deux pas de la Praça (place) Duque de Saldanha, le restaurant Casa
do Peixe porte bien son nom : ici, on vous apporte les poissons du jour sur un
plateau. Ne reste plus qu’à désigner l’heureux élu. Fréquentée par une clientèle
d’habitués, cette cantine séduit autant par la qualité de ses produits que par la
bonne humeur qui y règne. On entend les cuisinières s’esclaffer aux fourneaux
tandis que le serveur anticipe en vous entretenant des merveilleux desserts qui
vous attendent. Au final, on aura mangé comme quatre pour un peu moins de
20 euros (vin compris). L’adresse idéale pour les faims de loup !
5. De Campolideà Campo d’Ourique
MARS-AVRIL paprika • 63
Dans les bouis-bouis autour de l’hôpital Santa-Marta
Quand on descend à la station de métro Avenida,
au-dessous de la Praça Marquès de Pombal, on passe
devant le magasin LVMH pour rejoindre la rua de
Santa Marta. On y trouve un alignement de petits
restos sans prétention, qui proposent des menus à
moins de 10 euros. Notre préféré, le Devagar Devaga-
rinho, est un peu en retrait, Traversa Larga. Une
réplique miniature, mais imposante, d’un bateau de
pêche accueille les visiteurs. La pêche du jour y est ex-
posée. On choisit son poisson que le cuisinier grille
devant vous sur son barbecue intérieur. C’est simplis-
sime, authentique, frais et délicieux. Le restaurant
organise également certains jours des concours de
fado. Un vrai coup de cœur.
à MANGER DES yEUx :IGREJA DA NOSSA SENhORA DE FATIMA située à proximité de la fondation Calouste Gulbenkian,cette église possède de magnifiques vitraux signés Almada Negreiros. Un petit bijoud’architecture religieuse contemporaine.
64 • paprika MARS-AVRIL
La guerre du gâteau au chocolat est déclarée !
Bras Carlos Lopez possède une minuscule boutique dans le quartier de Campo
d’Ourique où il assure élaborer... le meilleur gâteau au chocolat du monde (à droite).
Rien que ça. Un coup marketing de génie qui lui assure aujourd’hui une rénommée
grandissante hors du Portugal : il a ouvert une enseigne à Madrid, une autre à Rio
et on trouve désormais sa merveille à New York. Qu’on juge la ficelle un peu grosse
ne suffit pas à éteindre la curiosité. Imanquablement, on ira goûter sa spécialité,
pour pouvoir mieux moquer la prétention du pâtissier après coup. Et, en effet, on
a trouvé bien meilleur que le sien ! Dans le quartier d’Alcantara, au cœur de la
LX Factory, cette incroyable ‘usine culturelle’ qui réunit de jeunes créateurs, se
trouve la jolie boutique Landeau qui propose, pour 3 euros la part, l’autre meilleur
gâteau au chocolat du monde (ci-dessus) et... peut-être même bien de l’univers !
5. De Campolide à Campo d’Ourique
Les divinstapas de
Vitor Sobral
Le très populaire chef
portugais est chez lui
dans le quartier de
Campo d’Ourique.
Il y a deux adresses :
la brasserie Cervejaria da
Esquina et le restaurant
de tapas Tasca
da Esquina. Dans ce
dernier, il se saisit des
produits phares de
la cuisine portugaise
pour mieux les magnifier.
On goûtera, par exemple,
de la morue crue sur un
lit pommes allumettes, le
tout surmonté d’un œuf
au plat.Une formule
propose même aux
curieux une série de
tapas dont on ne sait
rien avant de les avoir
dans son assiette. C’est
le chef qui décide et c’est
toujours délicieux.
MARS-AVRIL paprika • 65
66 • paprika MARS-AVRIL
Belem : retour vers le futurpARcouRS gouRMAndS dAnS LISbonne
Le quARtIeR
en bRef
à belém, on fait le grandécart temporel. les témoi-gnages glorieux du tempsdes Grandes découvertes (le navigateur Vasco deGama repose d’ailleurs dansl’église du sublime Mosteirodos jeronomis) côtoient lessignes du présent abritésdans l’impressionnant Centro Cultural de belem etson Museu berardo, à la trèsbelle collection d’artcontemporain. C’est aussiici que l’on trouve les célébrissimes pasteis debelém (voir notre reportagep.30), petites tartelettesfourrées de crème brûlée qui déplacent les foules. belém possède encore bien d’autres atouts comme cesbars design installés le longdu tage, sans oublier la surprenante Fondation Champalimaud, cachéederrière la tour de belém.
� Retrouvez toutes les infos pratiques page 35
5
MARS-AVRIL paprika • 67
Les autres pasteis
Les pasteis de Belém, élaborés à l’Antigua Confei-
taria, jouissent d’une telle réputation (méritée !)
que les pâtissiers du coin auront dû sérieusement
se creuser la tête pour attirer les hordes de
gourmands dans leurs boutiques. A la Pastelaria
Nau, on a opté pour l’originalité. Ici, les petites
galettes sont fourées d’une pâte... à la bière.
Et c’est Sagrès, la marque locale, qui en est le
fournisseur officiel. Une drôle d’idée qui donne un
résultat étonnamment goûtu. Passé le craquant
de la pâte, le cœur fondant ravit le palais.
Si la boutique ne paye pas vraiment de mine,
ces pasteis-là n’ont rien à envier à leurs célèbres
cousins et offrent une jolie alternative dont il ne
faut pas se priver.
à MANGER DES yEUx : LA TORRE DE BELEM bâtie au XVie siècle, la célèbre tour, postée sur la rivedu tage, se détache fièrementsur le bleu du ciel.
68 • paprika MARS-AVRIL
Déjeuner enchanteur à la Fondation
Champalimaud
C’est une adresse à
découvrir absolument. Mais,
pour cela, il faudra dépasser
la Tour de Belém, qui marque
généralement la fin de la
visite du quartier, et
marcher une dizaine de
minutes sur un bout de
trottoir le long d’une route à
quatre voies... On apercevra
alors les courbes blanches
de la sublime Fondation
Champalimaud. Conçu par
l’architecte indien Charles
Correa, ce bâtiment abrite
des laboratoires de
recherche, un auditorium,
une zone d’exposition et ... le
magnifique restaurant
Darwin. Si la grande salle
séduit par sa déco
revisitant la théorie de
l’évolution du scientifique
britannique dont le restau-
rant emprunte le nom, rien
ne vaut un déjeuner sur sa
terrasse. De là, on admire la
Torre de Belém, on rêve en
observant les allers et
venues des mouettes et on
se régale d’un risotto de
saumon à l’encre de seiche
(pour un peu moins de
20 euros, vin compris).
Un pur moment de bonheur.
6. Belém
MARS-AVRIL paprika • 69
Une enfilade de bars design
En revenant de la Torre de Belém en direction du Padrao dos
Descobrimentos (le monument des Découvertes), on longe, au bord
du Tage, une série de bars élégants où les Lisboètes viennent lézarder.
6. Belém
à MANGER DES yEUx : LE MUSEU BERARDOle musée abrite, depuis 2006, l’incroyable collection
d’art contemporain du richissime josé berardo.
70 • paprika MaRS-aVRiL
DîNER CHEZ “L’HabitaNt”
À la tabled’Augusta
U1 JENNIFER GALLÉ
MaRS-aVRiL paprika • 71
l y a d’abord son grand
rire sonore en guise de
bienvenue. Augusta, la
trentaine, infirmière de
formation et chef de ser-
vice dans un hôpital de Lis-
bonne, nous reçoit chez elle.
Dans sa bande de copines -
elle a d’ailleurs convié pour
nous accompagner ce soir
Nadia et Anna-Maria -, LA
cuisinière, c’est elle.
Le volume de son chat,
même pas un an et déjà prêt
pour les combats de sumo
catégorie matou, nous met
la puce à l’oreille : ici, on ne
fait pas semblant de man-
ger ! Augusta a pensé à tout
et, pour ce repas “typique-
ment” portugais, elle a opté
pour l’incontournable “ba-
calhau à brás” en plat princi-
pal. De la morue, des frites,
une omelette : tout cela en
un seul et même plat mis en
musique par son incompara-
ble tour de main. Mais,
chaque chose en son temps.
D’abord, l’apéro !
Vin doux et confitures
On débouche une bouteille
de Quinta da Alorna, un vin
blanc doux, servi bien frais
pour accompagner deux
beaux plateaux de fromages
et de charcuteries. Le chat
rapplique et miaule en quête
d’une friandise. On l’ignore
superbement.
“J’ai fait les confitures moi-
même”, précise-t-elle avec
une pointe de fierté en dési-
gnant trois petites coupes
remplies de purée de fruits
et de légumes (ce soir-là, du
melon, de la citrouille et de
la tomate).
De la confiture, pour quoi
faire ? Accompagner le
requeijão, pardi ! Sorte de
ricotta portugaise, cette
spécialité se tartine sur du
pain avec de la marmelade.
Divin ! Il sera tout aussi inu-
tile de chercher à résister
au Sao Jorge, à l’Estrela ou
au Castelo Branco, trois
somptueux fromages qui
nous embarquent pour un
tour du Portugal.
à peine a-t-on le temps de
s’enquérir dans le détail des
différents types d’enchidos
(saucissons) sélectionnés
par la maîtresse de maison,
qu’on la retrouve, poêle à
la main, prête à passer à
l’action. à la voir s’activer
devant ses fourneaux, recti-
fiant sa sauce , dosant “au
pif”, on comprend que l’on
n’a pas affaire à une débu-
tante. D’où tient-elle ce
talent ? “De ma mère ! Elle
habite à Pombal, en pleine
campagne. Elle m’a transmis
les bases et le goût des
bons produits. Pour le reste,
j’invente !“
L’inspiration des voyages
Adepte de la cuisine fusion,
inspirée de ses différents
voyages en Inde, à Cuba ou
au Japon, Augusta ne fait
cependant pas de chichis.
Elle s’approvisionne au
supermarché pour le non-
périssable. Légumes, fruits
et poissons viennent, eux,
du marché du 31 de Janeiro,
situé à deux pas de son tra-
vail. Quant à la divine huile
d’olive et aux très odo-
rantes herbes fraîches
qu’on trouve dans sa cui-
sine, elles sont issues des
réserves maternelles.
Quelques olives, justement,
ça et là, de la coriandre mé-
langée à du persil, - “il faut
bien un peu de verdure !” - :
Augusta apporte la touche
finale au plat de résistance.
I
“Ma mère m’atransmis
les bases de lacuisine, pour le
reste, j’invente !”
Augusta
72 • paprika MaRS-aVRiL
Il est temps de passer à
table.
Un Duas Castas 2010, vin
blanc élégant de chez Her-
dade do Esporao, un des plus
gros exportateurs vinicoles
du pays, prend le relais pour
le reste du dîner. On trinque
à l’amitié franco-portugaise
et aux prochains voyages
avant de goûter la morue,
crémeuse (un bon point
pour l’omelette) et cra-
quante (un autre pour les
frites) à souhait. On avait
un peu peur, mais non, ce
n’est pas lourd du tout ! Ça
doit être la “verdure”. Du
coup, tout le monde se res-
sert.
Vive la langue de bœuf !
Maintenant qu’on les tient
toutes trois assises et gen-
timent lestées, on passe les
demoiselles sur le gril. Quel
est donc leur plat portugais
favori ? Augusta avoue
‘tout’ aimer et tout manger,
“ même les abats ”, indique-t-
elle, nous con fiant une pas-
sion pour la langue de bœuf.
“Un soir, j’ai convié des amis
à dîner en restant évasive
sur le contenu des as-
siettes. Ils se sont tous ré-
galés mais, le lendemain, en
leur révélant qu’ils avaient
mangé de la langue, tu aurais
dû voir leurs mines décon-
fites ! J’en ai toujours dans
mon frigo. J’adore ça.” Je
jette un œil interrogatif sur
les restes de notre plat. Pas
de doute, c’est bien de la
morue...
Anna-Maria, elle, se régale
volontiers d’un cabidela,
plat de riz au poulet cuit
dans le sang de l’animal.
Nadia fait la grimace. Elle pré-
fère le riz au canard et se
passe très bien de la cuis-
son au sang... Des recettes
surprises aux bizarreries ali-
mentaires, il n’y a qu’un pas
qu’Anna-Maria ne tarde pas
à franchir.
“Ma tante était institutrice
à la campagne et il lui arrivait
souvent de récupérer ses
écoliers dans un drôle d’état
après avoir absorbé, en
guise de petit déjeuner, une
soupe de cheval mort.”. Une
quoi ? “Une soupe de vin
chaud agrémentée de gros
morceaux de pain.” Nul
doute qu’après cela, l’atten-
tion de ses élèves ne devait
pas être à son maximum.
La liqueur de la grand-mère
L’évocation de cette potion
donne des idées à Augusta.
Là voilà qui se lève d’un bond
pour attraper une jolie ca-
rafe de verre opaque ornée
de délicats motifs floraux...
Du dessous, on distingue de
petites boules sombres qui
flottent. Les filles s’esclaf-
fent, Augusta remplit mon
verre comme s’il s’agissait
d’un rite de passage. “Ne
crains rien, c’est ma grand-
mère qui la fabrique !”. Me
voilà rassurée. Cette mysté-
rieuse eau de vie, “élaborée
à partir de ‘medronhos’
(arbuses), c’est le meilleur
digestif du Portugal !”, me
certifie-t-elle dans un sou-
rire complice.” Une fille qui
réussit aussi bien la “bacal-
hau à brás” ne peut pas avoir
tout à fait tort.
On achève le repas sur les
notes sucrées d’un riz au lait
à la cannelle fait maison.
Dans le fond, le dernier mor-
ceaux du CD d’Ana Moura, un
des nouveaux talents du
fado, fait retentir ses
ultimes notes mélanco-
liques, le chat vient se frot-
ter contre les jambes de sa
maîtresse... Il est temps de
rentrer.
On prend congé d’Augusta,
qui démarre son service du
lendemain aux aurores, en
la remerciant pour ce dîner
simple, authentique et
réconfortant... tout comme
elle. ,
“Le meilleur digestif du Portugal !”
Pour 4 personnes• un kg de morue qu’on aurafait dessaler durant 24 heuresen changeant l’eau toute les 6 heures• 4 grosses pommes de terre à frites• 9 œufs • un oignon finement tranché • une gousse d’ail • quelques feuilles de laurier • sel, poivre, muscade • huile d’olive • piment de Cayenne (en option)
• une dizaine d’olives• coriandre et persil hâchés
Vingt minutes de cuisson
• Laissez égoutter la morue. • Coupez vos pommes de terrepour en faire des frites. • Dans une poêle à bordshauts, ou une cocotte, faitesrevenir l’oignon tranché et l’ail
dans de l’huile d’olive. Ajoutez les feuiles de laurier. • Dans une friteuse, préparezvos frites puis égouttez-les. • Quand vos oignons commen-cent à blondir, vous pouvezajouter du piment de Cayenne,c’est selon votre goût. • Mettez la morue dans lapoêle, mélangez-là soigneus-ment à votre sauce. Couvrezune bonne dizaine de minutes. • Battez les œufs en omelette. • Salez la morue et ajoutez dela noix de muscade râpée.• Incorporez délicatement vosfrites à la morue. Mélangez.
• Ajoutez ensuite l’omelette,en la versant en un mince filet. • Laissez cuire en tournant régulièrement. • Veillez à ce que l’omelette nesoit pas sèche. • Une fois cuite, parsemez labacalhau d’olives et du mélange persil-coriandre. • Servez !
“Si c’est trop sec, vous pouvezmettre un peu de lait aprèsavoir incorporé vos œufs”,conseille Augusta.
INGRÉDIENTS
COMMENT S’Y PRENDRE
SON TRUC
TEMPS DE CUISSON
La RECEttE
La bacalhau à brás d’Augusta
MaRS-aVRiL paprika • 73
74 • paprika MARs-AvRiL
Affinés depuis le XVIIe siècle
par les négociants anglais,
les portos se subdivisent
en plusieurs catégories.
C’est ensuite une question
de goût… et de circons-
tances !
Le ruby, assemblage de vins
jeunes de plusieurs millé-
simes, passe deux à quatre
ans en fût. Fruité, jeune, il se
boit à l’apéritif
ou avec des fromages frais.
Le tawny à la robe ambrée
est le fruit lui aussi de plu-
sieurs récoltes. Il bénéficie
d’un élevage plus long, pou-
vant aller jusqu’à quaran-
teans et plus.
Ruby et tawny consti-
tuent une vaste catégorie
où le pire côtoie le meilleur.
Dans le doute, l’on peut
opter pour un Colheita (on
prononce “colieta”) : ce
tawny est le fruit d’un
beau millésime uniquement
et il est élevé au minimum
sept ans en barriques. Ils se
boivent en accompagne-
ment de nombreux des-
serts (amandes, figues) et
peuvent même se marier à
des foies gras ou à une
fourme d’Ambert.
La Rolls Royce du vin cuit
Très différent, le LBV
(Late Bottled Vintage)
est un millésimé vieilli qua-
tre à six ans en fût puis
mis en bouteille, date à la-
quelle il est considéré prêt
à être bu. Ses arômes de
fruits rouges et de choco-
lat le rendent délicieux mais
il n’a pas la corpulence – ni le
tarif - du seigneur des por-
tos : le Vintage. Il s’agit d’un
ruby millésimé qui passe
seulement deux ans en fût
puis est enfermé en bou-
teille où il continue à se fon-
dre parfois pendant
plusieurs décennies. D’une
robe grenat sombre, il dé-
ploie une magnifique pa-
lette aromatique, des
notes de chocolat, de ce-
rise noire, de truffe,
d’épices sur une structure
puissante et tannique. En
raison de son prix (autour
de 100 euros) on le réser-
vera pour les grandes occa-
sions avec un gâteau au
chocolat. Dans tous les cas,
il faut s’assurer que les bou-
teilles de porto possèdent
bien le sceau de garantie
(bande de papier blanche
imprimée, sur le goulot) : il
atteste que le vin a été mis
en bouteille au Portugal
après avoir été contrôlé
par l’ IVP, l’institut des vins
de Porto.
AvANT dE qUiTTER LisbONNE
Comment bien choisir son porto
1 marie Grézard U J.G
LE PORTUGAL
EN FRANCE
Comment faire pour prolonger votre voyage une fois de retour ? La communauté portugaise installée dansl’Hexagone est nombreuseet il est donc relativementfacile de trouver de bons restaurants ou des magasins pour dénichervos doces favoris. Sur leweb, commencez par unevisite sur luso.fr. Vous ytrouverez presque tout cequi concerne le monde lusophone en France. Faites aussi un tour sur lusitanie.fr et portugalvivo.com, deuxsites très complets.
MARs-AvRiL paprika • 75
Que faut-il rapporter ? Dans le quartier de Campo d’Ourique, le charmant magasin Aromas e Sabores est spécialisé dans les produits portugais. L’endroit idéal pour un shoppingd’avant de rentrer en France
de l’huile d’olive Moins connue que celle qui nousvient d’Italie, elle est tout aussibonne ! Choisissez-là de préférencebio et optez pour une bouteille enprovenance de l’Alentejo, la régiondu sud du pays. a partir de 5 € le litre
du “porco preto” C’est une spécialité typiquementportugaise. Elevé en plein air dansla péninsule ibérique, le porc noirpossède une chair savoureuse ettrès goûtue qui fait le délice des gourmets. 59 € le kilo
du fromage Optez pour le Serra da Estrela, du nom de la chaîne de montagnes.Elaboré selon une méthode tradi-tionnelle à partir de lait de brebis, il est crémeux et fera, accompagnéde confiture, un merveilleux dessert.29,75 € le kilo
des “ameixas d’elvas”Mise au point au couvent, la recette de ces délicieuses prunesconfites remonte au XVesiècle. Cesdernières accompagnent tradition-nellement le Sericaia, une sorted’omelette soufflée à la cannelle. 10 € la boîte
76 • paprika Mars-avril
chefs venus d’ailleurs
Duo de choc chez CiaccoPaprika est allé flâner du côté des Italiens deCiacco (Paris, Xe) pour une conversation à bâtons rompus sur les spécificités des cuisineshexagonale et transalpine U1 ALEXANDRE ZALEWSKI
Mars-avril paprika • 77
opson et Mas-
simo ont ouvert
Ciacco en 2008.
Les deux com-
pères, qui viennent d’un
petit bourg de la Brianza,
entre Milan et Bergame, se
sont donné pour mission
d’éduquer les palais français
au goût authentique de
l’Italie. Ils sont même retour-
nés dans la Botte pour re-
cruter leur pizzaiolo. “Pas un
petit jeune mais quelqu’un
qui fait des pizzas depuis
vingt ans”, confie Hopson.
C’est bien simple, le meilleur
compliment pour le chef,
Massimo, c’est quand un
Italien vient lui dire qu’il a re-
trouvé le goût de l’Italie
dans ses plats. Endiamo !
C’est quoi, l’idée derrièreCiacco ?
hopson : Nous voulions pro-
poser une cuisine italienne
authentique. Je ne voulais
pas que la cuisine aille vers le
client, mais que le client aille
vers les plats. Donc nous
avons, dès le début, pro-
posé une cuisine “à l’ita-
lienne”. Par exemple, si
Massimo fait une scalopine
(escalope), il ne sert pas de
pâtes en accompagnement.
Ça, c’est de la cuisine franco-
italienne ! Ici, la scalopine est
servie avec sa sauce et un
peu de salade.
Comment a réagi votre clientèle ?
hopson : Ça a été un peu dur
au début. Et ça l’est encore !
Aujourd’hui, on me demande
toujours des pâtes ou du riz
en accompagnement. Seule-
ment, chez nous, les pâtes
se mangent en sauce, en
premier plat. Le repas italien
se décompose ainsi : anti-
pasti, primo piatto, secundo
piatto, dolce et café. Et le
deuxième plat, constitué
d’une viande ou d’un pois-
son, est accompagné par
des légumes ou de la sa-
lade... pas par des pâtes !
Le repas italien typique, avecles antipasti, les deux plats etle dessert, il perdure ?
massimo : Non, c’est vrai-
ment le repas pour les
grandes occasions. ou
certains repas d’af-
faires. Il faut bien avoir,
au moins, cinq ou six
heures devant soi pour
en venir à bout !
hopson : Depuis que je suis
en France, j’ai perdu l’habi-
tude du repas italien com-
plet. Je n’y arrive plus ! Je
me suis “francisé” : je me
contente d’un plat unique,
éventuellement d’une en-
trée en plus du plat.
massimo : Moi non plus, je n’y
arrive plus ! Quand je rentre
en Italie, ma mère me
dit : “Mais, tu ne manges
plus ?” Avant, je pouvais ava-
ler des pâtes et enchaîner
sur un autre plat derrière !
Quand vous retournez en Italie, que demandez-vous àvotre mère de cuisiner ?
massimo : Il faut qu’elle fasse
des pâtes au four. Le jour de
mon arrivée et le jour de
mon départ. Et du ragoût de
viande ! Je lui réclame aussi
des pizzas.
hopson : Des légumes !
J’adore la manière qu’elle a
de cuisiner les radicchios et
les champignons. J’essaie
aussi d’aller le plus possible
au restaurant quand je suis
en Italie, pour voir un peu
comment évoluent les
choses.
Justement, comment évolue-t-elle, la cuisine italienne ?
hopson : On a connu une pé-
riode un peu similaire avec ce
qu’a traversé la France, où
les plats étaient plus beaux
à voir qu’à manger. Le
concept s’est un peu
essoufflé. Puis il y a eu la cui-
sine fusion. Ça, c’était plu-
tôt marrant : manger des
sushis entre un classique
italien et du foie gras, c’est
original ! Là encore, c’est un
peu passé de mode. On
revient aujourd’hui à des
choses très basiques, des
saveurs simples. On assiste
à un retour aux sources,
avec des choses plus natu-
relles, moins travaillées.
Pour vous, quels sont les ingrédients clé de la cuisinetransalpine ?
hopson : L’ail et l’huile d’olive.
massimo : L’ail, la tomate et
le basilic.
Dans la cuisine française, vousaimez quoi ?
hopson : Les plats du Sud-
Ouest. Le canard notam-
ment
massimo : Ma préférence va
aux plats roboratifs, comme
le cassoulet.
Et vous n’aimez pas ?
hopson : Mais j’aime tout !
Même quand je ne connais
pas et que ça ne m’emballe
pas forcément tout de
suite. Par exemple, l’apéritif.
En Italie, comme en France,
l’apéritif a pour fonction
d’ouvrir l’appétit. C’est
pourquoi, chez nous, on va
servir quelque chose de
très sec à boire. En France,
on peut boire du pastis ou
quelque chose avec un goût
h
“En France, c’est la culture du platunique.En Italie,
c’est tout le contraire.”
Hopson
78 • paprika Mars-avril
sucré. C’est le genre de
choses auxquelles j’ai eu du
mal à me faire.
massimo : Avant de vivre ici,
je ne connaissais pas la cui-
sine française. En fait, je suis
davantage fan de produits
simples que l’on retrouve
partout que d’une façon
particulière de cuisiner .
D’autres cuisines qui vous inspirent ?
massimo : J’aime bien les cui-
sines asiatiques, en particu-
lier la cuisine japonaise. Cela
m’inspire : ils osent des mé-
langes de saveurs que les
Italiens ne s’autorisent pas.
La cuisine japonaise... quelsplats en particulier ?
massimo : Les ramen, les
woks. J’aime leur manière de
cuisiner les pâtes. Rien à
voir avec ce qui se fait en
Italie. Et j’aime l’utilisation
qu’ils ont des sauces su-
crées ainsi que leurs
mélanges viande - légumes.
Quel est votre plat fétiche ?
massimo : J’aime bien cuisi-
ner le poisson. Je trouve
que c’est agréable à travail-
ler. Un peu plus difficile que
la viande mais j’estime que
cela permet d’avoir un peu
plus de fantaisie.
hopson : Pour moi, tout ce
qui inclut des fruits de mer.
Parce qu’on y met de l’ail, du
basilic et de l’huile d’olive.
Sinon, le spaghetto, même si
ce n’est pas un plat... Je ne
peux juste pas m’en passer.
Y a-t-il une chose que vous ne cuisinerez plus jamais àCiacco ?
massimo : Le risotto aux
langoustines et aux zestes
d’orange ! Le problème, c’est
que la langoustine était mé-
langée avec le risotto : les
clients avaient l’impression
de ne pas en avoir pour leur
argent. Je l’ai refait ensuite
en laissant la langous-
tine entière. Visuelle-
ment, c’était parfait.
Pour moi, c’était un
risotto magnifique.
Un vrai voyage !
Mais j’avais beau
mettre trois belles
langoustines, ce
n’était jamais assez,
les gens étaient tou-
jours déçus. Du coup, j’ai
arrêté ce plat.
Et à la maison, vous mangezitalien ?
hopson : Franchement, je ne
fais pas beaucoup la cuisine
chez moi. Mais quand ça
m’arrive, il s’agit de plats
qu’on retrouve ici : des
pâtes, des rôtis...
massimo : Je fais souvent du
risotto. Comme ma mère en
Italie. Quand elle n’a plus rien
dans ses placards, elle se
débrouille avec un risotto !
Retrouvez-vous facilement vos ingrédients transalpins
fétiches dans la capitale ?
massimo : Oui ! On trouve,
par exemple, tout ce qu’il
faut pour les pâtes dans
n’importe quel supermar-
ché. On se fournit tout
aussi facilement en
jambon de Parme. La seule
différence avec un magasin
spécialisé, c’est que le jam-
bon n’est jamais tranché
assez finement !
Des adresses à conseiller ?
massimo : Nous avons
plusieurs endroits privilé-
giés. Comme le marché des
Enfants Rouges (IIIe) ou en-
“J’aime les cuisines asiatiques, tout
particulièrement celledu Japon. Elles osent beaucoup plus !”
Massimo
Massimo (à gauche) et Hopsonforment une fine équipe.
Mars-avril paprika • 79
core chez Paisano,
rue Saint-Maur(XIe). Dans
cette boutique, il y a des
produits vraiment intéres-
sants pour la cuisine de
tous les jours . On trouve
également des choses
assez pointues aux rayons
fromage et charcuterie.
Mais, surtout, il y a de
petites choses, pas chères,
et incontournables, comme
les conserves. Pour moi,
c’est un magasin idéal à
destination des Italiens ex-
patriés en France. On
trouve ainsi du Chinotto ou
de la Sanguinella, des bois-
sons qui traversent peu la
frontière ainsi que de la
Panna Chef, cette crème
que l’on trouve dans tous
les supermarchés transal-
pins. Cela se présente dans
de petits paquets. Il n’y a, à
ma connaissance, pas
d’équivalent de ce produit
en France. Et elle est plus
onctueuse, plus crémeuse
et plus épaisse que la
crème fraîche. On y trouve
aussi des anchois. Parce
qu’en France, les anchois en
boîte, ça n’existe pas.
Vraiment ?!
massimo : Enfin, ce n’est
pas tout à fait la même
qualité. Comme pour les
pâtes. On trouve beau-
coup de Barilla par ici. Or, en
Italie, c’est l’équivalent de
Panzani. Pourtant, elles
sont vendues pratique-
ment au même prix que les
Cecco, qui, pour nous, sont
de “vraies” pâtes italiennes.
Selon vous, les Françaisconnaissent-ils bien la cuisinede la Botte ?
massimo : Oui, même si ça se
résume souvent pour eux
aux pâtes et aux pizzas.
hopson : C’est déjà pas mal !
Parce que même les pâtes,
ce n’est pas évident pour
tout le monde. Je me sou-
viens avoir vu en Espagne
quelqu’un préparer ses
pâtes de manière très origi-
nale. Il a pris une casserole,
y a versé de l’eau froide,
a ajouté ses pâtes et tous
ses ingrédients puis a
mis tout ça sur le feu et m’a
dit : “Quand il n’y a plus
d’eau, c’est prêt !”
Et les fast-food, vous y allez ?
hopson : Je suis client des
kebabs, uniquement.
Un péché mignon ?
hopson : Les glaces, comme
tous les Italiens ! Là-bas, on
en mange tout le temps ...
même en hiver !
Et les glaces françaises ?
hopson : Euh... Il va falloir y
travailler encore un peu ! Si
vous voulez vous régaler
avec de glaces italiennes à
Paris, allez chez Pozzetto,
rue du roi de Sicile, dans le
IVe. Goûtez ses glaces au
yoghourt et aux pistaches.
Un pur délice !
CIACCO
9, rue René Boulanger, Paris Xe
Menu à 11,50 euros le midi (pizza + café)
Menu à 20 euros le soir (entrée + plat + dessert)
w
c i a c c O K é Z a K O ?
Nos deux compères ontchoisi un nom évocateur :Ciacco est un personnagede la Divine comédie qui apparaît dans le troisièmecercle de l’Enfer. Dans letexte de Dante, Ciacco leFlorentin a été puni pourpêché de... gourmandise :on s’en serait presque
douté !
p O u r l a p e t i t e h i s t O i r e
Avant d’ouvrir Ciacco avecMassimo en 2008, Hopsonet sa femme, Marika, ontdéjà sévi au 37, de la rueOberkampf, dans le XIe
arrondissement de Paris.Depuis 2004, l’Osteria Dell’Anima, petit restaurantd’une quinzaine de cou-verts, propose des plats depâtes fraîches, faites
maison. Aujourd’hui, c’estMarika qui tient le restau-rant. “Nous avons uneclientèle fidèle qui vientdepuis huit ans. Tout lemonde se connaît. Et l’endroit est tellementpetit que les gens sontamenés à se parler. Ça crée des liens !”
80 • paprika Mars-avril
la recette
Le bar en croûte de Ciacco
• un bar de 450/500 g• un kg de sel• trois blancs d’œuf• romarin
Vingt minutes
• Dans un bol, versez le kilo de sel et ajoutez les troisblancs d’œufs. Bien mélanger. • La mixture est prête quand le sel ne colle plus à la main. • Mettez le bar vidé et écaillédans un plat. • Bien refermer le ventre du poisson.• Commencez par placer le mélange sel/blancs d’œuf àl’endroit de l’ouverture, afind’éviter que le sel ne pénètre à l’intérieur du bar. • Ajoutez un peu de romarin etrecouvrir le reste du bar parune croûte de sel uniforme. • Avec une cuiller, dessiner desécailles sur la croûte de sel. Le plat est prêt !• Placez le bar au four. Atten-tion : “Il faut absolument que
le four soit bien chaud(290/300°C), recommande Massimo. Comptez vingt minutes pour la cuisson”, précise le chef. • La croûte de sel absorbe la chaleur et permet de cuire le poisson plus rapidement. Elle permet également de préser-ver son humidité. Le bar gardetout ainsi son mœlleux.”
• “Au moment de servir, j’accompagne le bar de légumes grillés et d’huiled’olive”, explique Massimo. Le bar est servi en salle danssa croûte de sel dorée par lacuisson. C’est Hopson qui secharge, à la table, de casser lacroûte et de servir le poissondans l’assiette du client. “40%du goût provient de ce petit rituel”, explique-t-il. “A Ciacco, nous avons choiside servir ce plat parce que cepoisson a une chair très particulière, précise Hopson.Mais on peut faire la recetteavec n’importe quel autrepoisson, du poulet ou de la viande rouge. C’est d’ailleurs un mode de cuissonqui marche très bien avec le rosbif.”
Au risque de déclencher un incident diplomatiquefranco-italien sur la paternité de la recette, Massimo achoisi de nous concocter ce plat qu’il propose à la carte.“On le retrouve dans tous les restaurants de la côte italienne”, plaide-t-il. Quoi qu’il en soit, ce plat prouveque c’est bien l’œil qui ouvre l’appétit. Démonstration !
INGRÉDIENTS
TEMPS DE CUISSON
COMMENT S’Y PRENDRE
LE TRUC DU CHEF
Mars-avril paprika • 81
la recette
Le bar en croûte de Ciacco
82 • paprika MARS-AVRil�
CHRONiquE��D’uN��Hit��CuliNAiRE
Le triomphe XXL du hamburger
En un peu plus d’un siècle, le
hamburger est devenu un
incontournable de l’alimen-
tation mondiale. Jugez plu-
tôt. McDonald’s vend,
chaque seconde, entre
58 et 75 unités selon les
sources, de ce petit sand-
wich fait d’un steack de
bœuf haché placé entre
deux tranches d’un pain
rond. Pourtant, rien ne pré-
disposait ce “steack de
Hambourg” à connaître un
tel succès. Car, à l’origine, il
ne s’agit que de tranches de
bœuf découpées et mélan-
gées à de l’oignon, de l’œuf
et de la chapelure, qui
constituaient les repas des
marins faisant la traversée
entre l’Europe et les Etats-
Unis au XIXe siècle. Et quand,
au début du XXe siècle, le
hamburger trouve sa forme
définitive, il a déjà une répu-
tation sulfureuse avec de
sérieuses réserves quant à
la qualité de sa viande. Au
point que White Castle, la
première chaîne de restau-
rants à hamburger, place
ses grils sous le nez des
clients afin qu’ils puissent
directement juger de la qua-
lité des steaks...
C’est en Californie que naît
la culture “fast food”, en pa-
rallèle avec le développe-
ment de l’automobile et des
drive-in. Et il est difficile de
dissocier le hamburger des
frères McDonald, qui vont
assurer le succès du sand-
wich en ouvrant en 1940
leur propre drive-in.
En 1948, ils changent le
concept. Fini le service dans
les voitures. Finis aussi les
plats qui nécessitent four-
chettes et couteaux. Le
menu est réduit à neuf
items, dont le hamburger et
les frites. Verres et as-
siettes sont désormais en
carton, et les employés
sont assignés à une seule
tâche. Cette taylorisation
leur permet de vendre un
hamburger deux fois moins
cher que la moyenne.
Aujourd’hui McDo compte
plus de 30 000 restaurants
dans le monde et est de-
venu un des symboles de la
mondialisation. Standardisa-
tion du goût, industrialisa-
tion de l’alimentation,
“McJobs”, obésité : le ham-
burger contient tous les in-
grédients de la malbouffe.
Pourtant, avec près de deux
milliards d’unités écoulées
par an rien que par McDo, le
monde n’est pas encore
près de l’indigestion.
FRENCH�PARADOX
La France, ce pays de la gastronomie, où des activistes emmenés parJosé Bové n’hésitent pas à démonter un McDonald’s ,à Millau en 1999, est aussi,pour la marque américaine,“le pays le plus rentableaprès les États-Unis”, expliquait son patron, Jim Skinner, en 2009. La France compte plus de 1 300 enseignes, etconsomme 90 millions de hamburgers par an.
Symbole de la malbouffe pour certains, produit incontournable de l’alimentation modernepour d’autres, ce sandwich connaît depuis son invention un succès qui ne se dément pas
1ALEXANDRE ZALEWSKI
DRU
Selon le WWF, il faut 2 400litresd’eau pourproduire un hamburger.Soit près de deux fois plus que les besoins annuels en eau d’un êtrehumain.
McDonald écoule58 hamburgerschaque seconde dans le monde.
Selon Eric Schlosser, auteur de Fast Food Nation, les Américainsmangent 13 milliardsde hamburgers par an.
Ils dépensent également134 milliardsde dollars par an dans lesfast-foods : plus qu’enfilms, livres, magazines, journaux, vidéos et musique réunis.
90 millionsde hamburgers sont vendus chaqueannée en France.
MARS-AVRil paprika • 83
l’éPOPéE��DES��PiONNiERS�
Charlie et ses boulettes
Les premières traces du hamburger sont à chercher ducôté du Wisconsin en 1885. CharlieNagreen n’arrivait pas à vendreses boulettes de viande à la fête du comté d’Outagamie. Il a l’idée de les mettre entre deuxtranches de pain pour qu’ellessoient plus faciles à manger.
Un drôle de château White Castle est la premièrechaîne de restaurants à ne vendre que des hamburgers, à 5 cents le sandwich.
La révolution McDoLes frères Mc Donald tiennent depuis huit ans un drive-in. Ils enont assez de remplacer la vais-selle cassée et de payer des em-ployés à servir les clients dans leurvoiture. Ils repensent leur restau-rant et inventent le fast-foodmoderne. Ray Kroc, un placier enhachoirs, fera le reste en signantavec les deux frères un accordpour développer les franchises.
Des frangins inspirésA la même époque, Franck etCharles Menches, d’Akron, dansl’Ohio, font des sandwichs à lasaucisse de porc. Un jour, en rupture de stock, ils remplacent le porc par du bœuf haché.
Un fiston pas en resteAprès le Wisconsin et l’Ohio, c’est l’Oklahoma qui revendique la paternité du hamburger,puisqu’Oscar Weber Bilby a l’idée de remplacer le pain classique par les petits pains – les premiers buns – de sa mère.
t 1885
1885
1891
1921
1948
tt
tt
84 • paprika Mars-avril
Des vins libanais, on ne
connaît souvent que les
trois domaines Kefraya,
Musar ou Ksara. Une cavale-
rie lourde solidement im-
plantée en Europe, dans le
réseau des restaurants de
la diaspora notamment, et
qui totalise à elle seule
80 % environ des volumes.
C’est elle qui a habitué le
consommateur à un style
particulier : des robes ap-
proximatives, des nez cuits
et épicés, des bouches évo-
luées et chaudes. Et puis, il y
eut Marsyas. Et, avec lui, la
naissance d’un autre goût,
moderne : limpide et lisible,
éclatant de fruits frais et
vif. “C’est un vin non com-
munautaire, mais un grand
vin du Liban que nous vou-
lons réaliser” commente
simplement Karim Saadé, à
la tête du vignoble, avec son
frère Sandro.
Les deux fils de Johnny
Saadé, ex-copropriétaire de
la CMA-CGM, une puissance
de l’affrètement maritime,
conduisent aujourd’hui les
colossales affaires de leur
père reconverti dans l’im-
mobilier, la gestion de capi-
tal, le tourisme… et le vin.
C’est eux qui sont à l’origine
de ce domaine de 52 hec-
tares situé, comme la plu-
part des vignobles libanais,
dans la vallée de la Bekaa,
longue et étroite bande fer-
tile à 900 mètres d’altitude.
Dans la “vallée de Noé”
A l’ouest, les contreforts
arides du Mont-Liban, aux
routes enneigées l’hiver. A
l’est, ceux du Mont Anti-
Liban, dont la ligne de crête
dessine la frontière avec la
Syrie.
Grenier du pays, avec ses
étés longs et chauds, sa
pluie et ses nuits fraîches, la
“vallée de Noé”, en référence
au lieu de sépulture du pro-
phète, forme une mosaïque
de cultures maraîchères et
céréalières, baignée d’une
douce lumière. Le tabac, le lin
(ou naguère le cannabis) y
prospèrent tout comme la
vigne, implantée plus volon-
tiers sur le revers sud-est
du Mont-Liban.
En 2003, les deux frères dé-
tectent un terrain en friche,
semé de rochers et voué au
stockage de taules de ma-
tériel militaire, héritage de la
dernière guerre. “Il aura fallu
un permis du ministère de la
Défense pour que l’armée
sorte de la parcelle !”, se
souvient Karim.
De ces terres calcaires
n’ayant jamais rien enfanté
naîtra “Marsyas”, antique
nom de la vallée ainsi que dis-
ciple de Dyonisos au malheu-
reux destin, symbolisant la
liberté…
Pour en faire un domaine
exemplaire, Karim et Sandro
ont fait appel au renommé
consultant bordelais Sté-
phane Derenoncourt (il
conseille de nombreux do-
maines en France et à
l’étranger, comme le do-
maine familial du réalisateur
Francis Ford Coppola en
Californie). Mieux que per-
sonne, celui-ci sait faire jaillir
la fraîcheur et la soie dans
des vins par définition so-
laires. Cabernet-sauvignon,
merlot, petit verdot et
bientôt cabernet-franc par-
ticipent avec la syrah à la
complexité de la cuvée de
rouge. Veloutée, digeste,
fruitée et dense, elle repose
sur un bel équilibre classique
tandis que sa version en
blanc se révèle d’une surpre-
nante élégance : un vin déli-
cieusement ample et
sensuel.
A l’ombre du géant Kefraya
Ironie de la géographie, à
quelques centaines de mè-
tres, Kefraya, orgueilleuse
forteresse d’un style
désormais désuets aligne
ses quelque 300 hectares
de vignes mais Marsyas
continue de s’épanouir à
l’ombre de ce géant, avec
une série d’impeccables mil-
lésimes depuis le premier du
domaine, 2006. Small is
beautifull…
flacons à découvrir
Marsyas, un vin divin Emblématique d’une “nouvelle vague” vinicole au Liban, ce domaine récent bouscule les codes traditionnels en cultivant la légèreté et la grâce
1 MaRie gRézaRD U DR
• Marsyas rouge2008, 29 €• Marsyas blanc2009, 25 €• wineandco.com
Mars-avril paprika • 85
Le vignoble Marsyas dans la plaine de la Bekaa.
Les frères Saadé.
Mars-avriL paprika • 87
5 découvertes
savoureuses en direct...
du Béarn & du Pays Basque
Première étape de notre parcours, on s’arrête ici pour déguster des rouleaux de printemps...au confit de canard !
Le resto le Chaudron est
situé à l’entrée d’Oloron-
Sainte-Marie. Une sorte de
poste-frontière avancé qui
vous permettra de pénétrer
le territoire du Béarn.
Comme examen de passage,
deux rouleaux de printemps
d’un genre peu commun.
Lancez-vous et croquez
dans l’inconnu ! Vous verrez,
une fois fendue, la feuille de
riz libère un joli coulis de
pommes caramélisées et
une onctueuse compote
d’oignons. Vous pensez qu’il
suffit d’aimer le sucré-salé
pour être béarnais mais
vous faites fausse route...
Si, dans cette première
manche très disputée,
la pomme et le sucre ont
mis K.O, tout en douceur,
la compote d’oignon, le
deuxième round met en
scène un adversaire d’un
tout autre acabit. Accouru
des plaines voisines de
Lasseubetat, le voici : le
confit de canard. La viande
fait “cric cric” entre vos
dents, la compote pommes-
oignons enveloppant le
tout. De la place pour la
suite ? Attaquez-vous à l’en-
trecôte oloronaise asso-
ciant cèpes, poivrons et
jurançon. N’ayez pas peur,
vous êtes désormais un
authentique béarnais ! ,
À Oloron-Sainte-Marie, le confit de canard est voyageur
1
Le chef Sébastien Allen en pleine action.
U1 ROMAIN BÉLY
Paprika vous entraîne sur les routes de France à la rencontre de ceux qui font vivre la gastronomie locale
88 • paprika Mars-avriL
Les nems au canard engloutis, on file à Paupour nous entretenir avecFrancis Miot, l’inventeurdes coucougnettes, la spécialité locale. Un per-sonnage haut en saveurs.
“Né en 1948 à Pau, Francis
Miot est un autodidacte. En
1987, il obtient le titre du
Meilleur confiturier de
France.” S’il parle de lui à la 3e
personne, c’est que ce
Delon de la marmelade a un
parcours professionnel pas
comme les autres. D’abord
organisateur de tournois de
bowling dans les années
1970 puis VRP chez Lotus, il
devient entrepreneur dans
le matériel hôtelier et peut
se targuer aujourd’hui d’être
une des figures paloises les
plus connues.
En 1984, il décide de se lan-
cer sur les marchés avec
une recette toute simple : la
galette à la semi-confiture
de myrtilles. “Semi-confi-
ture” car Francis Miot choi-
sit délibérément d’atténuer
la teneur en sucre de sa
mixture. Il faut compter
800 grammes de sucre pour
un kilo de myrtilles dans
une confiture classique,
300 grammes dans celle de
notre touche-à-tout. La re-
cette attire le badaud et
Miot crée sa petite entre-
prise vite florissante. Avec
sa femme et un copain pâ-
tissier, il écume les routes
du Sud-Ouest. L’hiver à
Argelès-Gazost dans les
Pyrénées, l’été à Pau, dans
les Landes et le Gers. “En
trois ans, j’ai pu me payer
une maison”, fanfaronne-t-il.
Sur l’autoroute de la célébrité
En 1985, c’est la consécra-
tion. Le Palois décroche le
titre de “champion de
France de confiture et
de pâte de fruit”. Le
début de la notoriété.
“A l’époque, j’étais cor-
respondant à “la Répu-
blique des Pyrénées”. On
est au mois d’août, il n’y a
pas de rugby, pas de foot-
ball, pas de crimes. Alors le
journal décide de faire une
double page sur ‘le pape
béarnais de la confiture’ :
c’est l’explosion”. Suivront
de nombreux articles dans
“Sud Ouest Dimanche”, “Cui-
sines et vins”, “Biba”, “Paris
Match” et des reportages
sur FR3…
1988, 1990, 1991 : Miot de-
vient “champion du monde
de confiture”. Il fréquente
du beau linge : “Jean-Pierre
Coffe me fait une super
pub.” Le confiturier gagne
300 à 400 nouveaux clients
chaque mois. Son entre-
prise passe au stade indus-
triel. On n’a encore rien vu...
1990, Miot met au point
des confitures sans sucre
où un concentré de
pommes remplace le sac-
charose. Le papier glacé fait
le reste. “Les femmes
voyaient des mannequins à
la taille fine dans les maga-
zines, rappelle le confiseur.
Mes confitures sans sucre
sont tombées à point
nommé.” L’entreprise se
transforme en petit empire.
L’histoire pourrait s’arrêter
là mais, entre-temps, un
autre “buzz” est né.
En 1998, alors qu’il visite un
client berruyer peu après le
Printemps de Bourges, il
s’arrête devant une affiche
équivoque qui propose de
“Déguster les couilles des
Négresses vertes”. Une pro-
motion légèrement dou-
teuse pour un nougat vert
au caramel mou. En repre-
nant le volant Francis Miot
annonce à son épouse :
“on va faire les couilles
d’Henri IV !”. Madame optera
pour un terme légèrement
plus châtié... Les “coucou-
gnettes” sont nées.
Pau a sa spécialité
à Pau, le maire André Labar-
rère se plaint que sa ville
n’ait pas de spécialité . Miot
propose alors de faire de ses
“coucougnettes” d’Henri IV,
“le vert galant”, l’équivalent
des calissons d’Aix. Son divin
bonbon s’organise autour
d’une amande grillée entou-
rée de chocolat et de pâte
d’amande rose. Avant d’être
un formidable coup de pub,
sa trouvaille est un délice.
Francis Miot, qui a vendu la
majorité des parts de son
entreprise en 2006, a laissé
la maison avec un chiffre
d’affaires de 6,7 millions
d’euros par an. Dont 2 mil-
lions rien qu’en coucou-
gnettes !,
À Pau, le roi de la confiture vous salue
“A l’ère des mannequins à la taille fine, mes
confitures sans sucresont tombées à point
nommé.”Francis Miot
2 Dans l’usine à coucougnettes.
Mars-avriL paprika • 89
90 • paprika Mars-avriL
Après Pau, on part à la rencontre de Jean-BernardHourçourigaray et dePierre Chilo qui tiennentdeux établissements aussi réputés que perdus enplein cœur de la Soule...
C’est à croire qu’ils pren-
nent un malin plaisir à entre-
tenir leur inaccessibilité. Il
nous aura fallu les traquer
des jours entiers pour réunir
les deux chefs embléma-
tiques de la Soule, ce mor-
ceau de Pays Basque encore
peu touristique et pour-
tant si délicieusement
carte postale.
“Chilo est toujours en re-
tard”, nous prévient Jean-
Bernard Hourçourigaray, le
patron de Chez Château à
Esquiule. On patiente tandis
que “Chilo”, gérant de l’hôtel-
restaurant du même nom
à Barcus, l’autre bonne
adresse que conseillent les
gastronomes du Piémont,
emprunte les routes si-
nueuses qui serpentent
entre forêts, frontons de
pelote, clochers et cayolars
(des cabanes utilisées par
les chasseurs).
Au bout d’une heure, le voici
poussant la porte de La
Pilota, à Pau, où nous leur
avons donné rendez-vous.
Les deux chefs se connais-
sent bien. Ils partent en va-
cances ensemble, chassent
la bécasse et la palombe en-
semble et il leur arrive de
partager leur cuisine.
Après des expériences pari-
siennes, l’un et l’autre ont
repris l’affaire familiale dans
le village de leur enfance.
Une épicerie dépôt de pain à
Esquiule, 500 âmes, pour
Jean-Bernard. Un petit res-
taurant traditionnel à Bar-
cus, 700 habitants et des
poussières, pour Pierre.
Autant dire, deux trous pau-
més dont ils sont fiers.
Dépaysement total
“Les gens ne viennent pas
chez nous par hasard, ré-
sume Jean-Bernard Hour-
çourigaray. Ils retrouvent
l’esprit des petits villages.
Quand ils arrivent de Pau ou
de Bayonne, c’est le dépay-
sement total. Ils se croient
au bout du monde !” Est-ce
le secret de leur popularité ?
En tout cas, l’ex-champion
de France de pelote basque
la cultive allègrement. “Le
mobilier est très classique,
et le service est simple.” Pas
de chichis, “nous sommes là
pour proposer des produits
À Esquiule et à Barcus, deux chefs dans leurs tanières3
Esquiule.
Pierre Chilo (à gauche)et son compère
Jean-Bernard Hourçourigaray.
Mars-avriL paprika • 91
locaux originaux”. à table,
Chez Château, on déguste
du veau faisandé aux girolles
et aux écrevisses, du canard
aux cèpes, des gâteaux de
truite et tout le gibier que le
patron rapporte de la
chasse. Chez Pierre Chilo, la
carte affiche du grenadin de
veau aux morilles, de
l’agneau de lait des Pyré-
nées à la piperade blanche
ou encore un croustillant de
pommes de terre aux pieds
de porc.
Cuisine soignée
“C’est très difficile de faire
tourner un “gastro” dans
des endroits perdus en pro-
vince, reconnaît Pierre,
passé par le Concorde
Lafayette à Paris. Nous
avons eu la chance d’avoir
repris des affaires de famille.
Mais il faut renouveler la
clientèle. J’ai ouvert un hôtel
et j’ai changé de cuisine. Pas
une mince affaire.” Exit donc
la brasserie à la papa et bon-
jour le restaurant gastrono-
mique où s’élabore une
cuisine rigoureuse.
“C’est bien plus difficile de
tenir un restaurant à
Esquiule qu’à Pau ou à Paris”,
confirme son complice, qui a
choisi de s’exporter pour
durer. Après Esquiule, Jean-
Bernard a repris un restau-
rant à Billère, puis un à Pau et
un autre à Oloron. Un par-
cours très béarnisant pour
l’ancien sportif qui un jour
acheta tous les “Sud Ouest”
du bureau de tabac d’Es-
quiule pour que personne ne
découvre qu’on l’y appelait
“le Béarnais”.
Jean-Bernard Hourçouriga-
ray partage ainsi son temps
entre la cité royale la se-
maine et Esquiule, du ven-
dredi au dimanche. Il a sa
petite préférence. “J’aime la
nature, la chasse, les cham-
pignons. Je suis esquiulais
dans l’âme.” Peu de risque
donc de le voir abandonner
son adresse familiale.
“Chilo”, lui, reste à Barcus. La
gestion de son hôtel et la
révolution permanente de
sa cuisine accaparent l’es-
sentiel de son temps. Le
reste n’est que broutilles et
longs trajets.,
À Esquiule et à Barcus, deux chefs dans leurs tanières
La recette
LA PIPERADEBLANCHE pAr pierre Chilo
Très vieux plat tradition-nel du pays Basque, il aété initié par les bergersqui partaient en estiveavec tous les ingrédientscités ci-dessous. ChezChilo, à Barcus, la piperade blanche estservie avec l’agneau delait, une autre spécialitédes pyrénées.
• ½ pain rassis• 250g de talon de jambon de Bayonne cuit • 3 échalotes• 6 piments au vinaigre• du sel• du piment d’espelette• 2 verres de jus du jambon cuit
• Commencez par cuire le talon de jambon 2 à 3 heures et conserver la valeur de 2 verres du jus. Faites ensuitesuer les échalotes, ajoutez la mie depain rassis, les pi-
ments, et humidifiezavec le jus de jambon. • Coupez le jambon en petits dés. • Faites mijoter letout une bonneheure, ajoutez à lafin un peu de piment
d’espelette. • Servez !
INGRÉDIENTS
COMMENT S’Y PRENDRE
Pierre Chilo (à gauche)et son compère
Jean-Bernard Hourçourigaray.
92 • paprika Mars-avriL
Michel Cassou-Debat est le chef du réputé Sissinou, posé en plein centre de Biarritz, toutprès de la plage. Un peucomme une erreur de livraison tant la sobriétéassumée de son restaurant contraste avec le chic de la cité balnéaire. C’est que leshow est dans l’assiette !
Nourri au lait des plus
grandes toques hexago-
nales, le chef du Sissinou a
un CV long comme le bras.
Formé à l’école hôtelière de
Morlaàs, au nord de Pau, le
fils, frère et neveu des sel-
liers les plus célèbres du
Béarn a très vite galopé
vers d’autres enclos. Com-
mis au Crillon et au Grand Vé-
four, il a été chef de partie
au Petit-Nice à Marseille et
chez Troisgros à Roanne. Lui
cite pourtant volontiers
son expérience auprès de
Yafa Edery, la reine des trai-
teurs parisiens, l’inventeure
des canapés sans pain qui
ont fait (paraît-il) un tabac
dans la jet set… Le chef pré-
fèrerait-il la cuisine au milli-
mètre carré aux spécialités
bien de chez lui ? Il n’y a là
rien d’incompatible ! Après
tout, son cerveau possède
deux hémisphères.
Si le droit l’embarque du
côté des grands chefs pari-
siens, le gauche est bien ins-
tallé dans cette région
pluvieuse du Sud-Ouest. “Je
suis complète-
ment béar-
nais. J’aime
les plats
canaille,
la cuisine
avec les
a b a t s ” ,
déclare-t-il
f ièrement.
Un œil sur la
carte, on acquiesce en zyeu-
tant avec envie le “pressé
de tête de veau et tomates
confites” ou encore le “ris de
veau au citron confit”.
En pleine écriture de sa nou-
velle carte au moment où
nous le rencontrons, Michel
Cassou-Debat s’en va au
marché pour humer les lé-
gumes et du côté des ports
de la côte pour voir les pois-
sons. “L’inspiration naît avec
les produits, explique-t-il.
Avec l’humeur aussi ! Si vous
êtes bien dans votre tête,
vous pouvez être très ins-
piré.” On l’imagine dans sa
cuisine de poupée, en train
de goûter un velouté, de lier
une sauce maison. Mais, en
fait, non.
Sur la page blanche du menu
“Je prends une feuille
blanche, je couche les mots
sur le papier et je fais les ma-
riages dans ma tête.” La cas-
serole est donc imaginaire. A
chaque saison, son esprit
prend des allures de fait-
tout hologramme où il jette
les ingrédients qui compo-
seront ses cinq entrées,
plats et desserts. Après des
heures de réflexion, la feuille
blanche disparaît sous les
ratures. Viennent ensuite
les temps laborieux de faire
les essais.
Pour nous, l’heure du test a
sonné. Dans l’assiette, on
retrouve les deux facettes
du chef globe-trotter. Ses
makis de tourteau au
À Biarritz, un créatif aux fourneaux
“l’inspiration naîtavec les produits.et avec l’humeur
aussi !”
Michel Cassou-Debat
4
Le chef du Sissinou rêve à ses prochains menus.
Mars-avriL paprika • 93
Les Jardins de Bakéa
propose une cuisine du
Sud-Ouest classique mais
audacieuse. Le foie gras y
est décliné à toutes les
sauces.
Eric Duval est normand et
il a ses attaches en Seine-
et-Marne, au pays du
Coulommiers. C’est donc
en toute logique que son
restaurant Les Jardins de
Bakéa s’est spécialisé
dans le foie gras. On rem-
bobine. “Prenez un ca-
membert. Il sera toujours
meilleur en Normandie
qu’ici.” Et, ici, à Biriatou, un
patelin coincé entre Hen-
daye et l’Espagne, les ca-
nards sont assurément
meilleurs qu’à Cherbourg...
Ils sont en tout cas bien
plus rapides. A peine le
foie est-il isolé dans les
Landes, qu’il vogue en J7
jusqu’au marché de Saint-
Jean-de-Luz pour être ra-
mené au bercail par le
chef himself.
Si Eric Duval cuisine
l’agneau de lait des Pyré-
nées, sa spécialité, c’est
le foie gras. Preuve en est
l’incroyable longévité du
“Foie Gras de Canard
Poêlé, Sauce à l’Hydromel
Basque”, des majuscules à
tous les mots depuis
vingt ans sur la carte.
Ce foie frais poêlé est
servi tout chaud, adossé
à une mini tarte tatin. Le
tout enveloppé d’une
sauce aigre-douce prépa-
rée au jurançon moelleux
et déglacée à l’hydromel
du coin. Le foie chaud se
divise en presqu’îles fon-
dantes dans la bouche
quand le croquant de la
tatin nous interpelle avec
ses notes sucrées. Un pur
délice !
Le chef insiste pour que
nous goûtions son “co-
quelet dans sa croûte de
sel”. Une viande blanche
mœlleuse magistrale-
ment arrosée d’une énig-
matique sauce “ivoire” qui
finit de nous conquérir.
Quel est donc le secret
de ce divin coulis ? Le chef
occupé en cuisine, la ser-
veuse se charge de nous
éclairer : “Je crois bien que
c’est le foie gras”... ,
À Biarritz, un créatif aux fourneauxconcombre accompagnés
de guacamole nous trans-
portent quelque part entre
le Mexique et le Japon...
avant que la deuxième as-
siette nous ramène illico au
pays. Son bar rôti entouré
d’une fricassée de palourdes
est en effet un classique du
Pays Basque et le haricot
tarbais, une vieille habitude
bigourdane. Mais leur ma-
riage reste pour le moins
inattendu. Les gros haricots
imprégnés de salsa verde
sont d’ordinaire plus dans
leur assiette avec un gigot
d’agneau. Ils se marient
pourtant merveilleusement
avec ce poisson très fin.
Assiette après assiette, on
note que chaque plat, - l’es-
calope de ris de veau pané
n’y échappera pas -, est ac-
compagné d’une pincée de
piment. Après tous ces
voyages culinaires, on ne sait
plus trop si la plante vient
d’Amérique du Sud ou de la
toute proche Espelette. En-
core une affaire d’hémi-
sphère...,
À Biriatou,le foie gras est roi
5
Eric Duval connaît son foie gras sur le bout des doigts.
94 • paprika MArs-AVril
nourritures spirituelles
Des mots pour vousmettre l’eau à la bouche Dans notre panier : la cuisine des monastères, des recettes de pro pour devenir un expert en dim sum, des spécialités à base de bonbons ou encore une BD à la plancha !
Gastronomesinspirés Rôti de veau au vin joyeux,millet au fromage émietté etaux noisettes, biscuits de la joie, élixir de violette... Laurence et Gilles Laurendonont (re)cueilli, comme autant de beaux fruits, les recettes des monastères. On y découvre le savoir-faireet les traditions de celles etceux qui vivent retirés dumonde... mais pas de ses délices gustatifs. Basée surles principes de l’autosuffi-sance et du respect des produits et des saisons, cettegastronomie simple et délicate est magnifiée ici parles sublimes photographiesde Richard Boutin. Un ouvrage qui apaise l’esprit et aiguise l’appétît.
Recettes et secrets des monastères, Laurence etGilles Laurendon, éditionsMarabout, 272 pages, 20,90 euros.
MArs-AVril paprika • 95
Plaisirs coupables
Lancée en 2011, les treize premiers ouvrages des Recettes cultesau Carambar,à la Vache qui rit, au Nutellaou au Kiri ont déjà été vendus à plus d’un million d’exemplaires. Devant ce suc-cès, Marabout récidive avec30 recettes cultes aux fraisesTagada, au chocolat Milka, au Mars ou aux Smarties. On craque !Les 30 recettes cultes, éd. Marabout, collection “Les tout-petits”, 64 pages, 3,50 euros par volume.
A la mode de Hong-Kong
Mikaël Petrossian, spécialistedes dim sum, ces irrésistiblesraviolis chinois qu’on dégusteà la vapeur, grillés ou frits, nous guide pas à pas pour les réussir à la maison. Salées ou sucrées, à la viandeou végétariennes, les bouchées vapeur n’aurontplus de secret pour vous. Dim sum comme à Hong-Kong, de Mikaël Petrossian, éd.Marabout, collection “Les petits plats”, 72 pages, 7,90 euros.
Cuisine interne
Quelle bonne idée a eue Gallimard d’adapter lesplanches que Guillaume Longtient sur son blog (long.blog.lemonde.fr) et de les rassem-bler dans ce désopilant A boire et à manger. L’auteur,fin gastronome, explique endessins ses recettes, croqueses critiques de restaurant et raconte “sa” cuisine en BD.Un vrai régal.A boire et à manger, de Guillaume Long, éd. Gallimard, 20 euros.
a me fait bien marrer quand j’entends les
Parisiens parler de Bordeaux comme d’une ville
“froide” et “bourgeoise”. Mon Bordeaux à moi
a le goût de morue et l’accent bordeluche du
marché des Capuçins, des usines de Bègles ou des quais
de Bacalan, bien loin des Chartrons… Oui, je sais, on n’a
pas l’habitude d’associer Bordeaux à la morue. Et pour-
tant, j’ai vu quand j’étais tout “drolle” (gamin) partir du
quai de Bacalan, au nord de la ville, un bateau de pêche
vers Terre Neuve. Derrière lui, s’allongeait un hangar à sel.
Les péniches du Midi venaient le remplir et on y puisait de
quoi gaver les cales des chalutiers. Au retour, les morues
toutes plates étaient dessalées, séchées, resalées. Ça
se passait au sud de la ville, à Bègles. Aujourd’hui plus
connue pour son député maire écologiste et son premier
mariage gay en France, cette banlieue ouvrière coincée
entre les voies de chemin de fer, les boulevards de cein-
ture, la Garonne et les jardins maraîchers fut pendant
près d’un siècle la capitale française de la morue, avec
Fécamp. Dans les années 1840, il y avait de la place là-bas,
de bonnes sources, du vent… tout ce qu’il faut pour
installer des sécheries : à même l’herbe ou sur des “pen-
dilles”. Il en existe toujours une, fondée en 1843, qui
maintient la tradition. Ça sentait fort dans ce coin.
Les bourgeois parlaient du “faubourg des odeurs”. N’em-
pêche, il y avait de quoi se régaler. La morue, on la faisait
par chez moi en salade, pochée puis effilochée avec des
anchois, des câpres et des fines herbes. à la basquaise
aussi, quand, dans la sauteuse, les piments rouges se
mêlaient aux tomates et l’eau de pochage de morue
avant de rejoindre le poisson tout blanc. Les jours de
fête, c’est à la bordelaise qu’on mangeait le “stockfish” ;
le jambon, le vin rouge, l’ail, les poireaux, les oignons et
les pruneaux venaient tenir compagnie à la reine de Terre-
Neuve. Bègles, Bacalan, Chartrons… l’accent de ce plat-
là réconciliait tout le monde.
Chaque année, début juin, se tient à Bègles la Fête de la MorueInfos : fetedelamorue.mairie-begles.fr
Ç
LA CHRONIQUE DE
DIDIER POURQUERYDirecteur adjoint des rédactions du quotidien Le Monde
De Bacalan à Bègles,Bordeaux, c’est aussi la morue !
Ça sentait fort dans ce coin-là, les bourgeois parlaient du ‘faubourg des odeurs’
Nécessaire de voyage
“Ticket to” est une nouvellecollection lancée par la Martinière à mi-cheminentre le guide de voyage et lebeau livre. Il s’agit de donnerau candidat au départ depremières impressions devoyage, grâce à de sublimesphotos ainsi que des vidéossur Internet. Premier départpour la Thaïlande dès le 1ermars.Thaïlande, par Gaspard Walter, éd. La Martinière, collection “Ticket to”, 352 pages, 25 euros.
96 • paprika mars-aVriL
recettes du monde afrique
Île de Goréepréparation : 15 min • cuisson : 10 min • pour 4 personnes
• 200 g de darne de capitaine(ou de bar)• ½ poivron rouge• ½ poivron vert• ½ oignon rouge• ½ carotte• ½ piment• ½ racine de manioc• 1 cive• huile de tournesol• vinaigre de vin• sel, poivre
Faites chauffer unecasserole d’eau salée.Faites bouillir le pois-son10 minutes. Égouttez-le. Retirezles arêtes et émiettezla chair. Réservez. Coupez les poivrons, le manioc et la carotteen fins bâtonnets.Coupez finement l’oignon rouge et lacive. Hachez le piment
épépiné.Faites une vinaigretteen versant petit à petitl’huile dans du vinaigreassaisonné au piment.Mélangez les légumes ensemble. Assaisonnezde vinaigrette.Dressez sur le dessusquelques miettes de poissons. Dégustez frais.
Recette extraitede La cuisine deMoussa (éd. First),d’Alexandre BellaOla, 187 pages,16,90 €.
• 1 cocotte - 1 sauteuse• 1 kg de morceaux debœuf à braiser (jumeau,macreuse, aiguillette…)• 800 g de potiron• 2 oignons moyens• 4 gousses d’ail• 1 petit morceau degingembre frais• 1 petit piment vert• coriandre moulue• curcuma - cumin• 1/2 c. à c. de poivre• 1 c. à c. de piment moulu• 2 c. à s. d’huile de colza• 1 bouquet de coriandrefraîche• 50 g de beurre – sel
• Dans une cocotte, faites revenir la viande coupée en petits morceaux avec 1 cuillerée à soupe d’huile.Quand elle a pris une bellecouleur, remplacez les morceaux par les oignons et l’ail émincés. Ajoutezle beurre, et faites revenir 2 à 3 minutes.
• Ajoutez dans la cocotte la moitié du gingembre râpé, 2 cuillerées à caféde coriandre en poudre, 2 cuillerées à café de cumin, 1 cuillerée à café de pimentmoulu et le poivre.
Mélangez le tout et remettezla viande. Mouillez avec 20 cld’eau. Couvrez et laissez mijoter 1 h 30 à feu doux.
• Épluchez et coupez le poti-ron en dés réguliers. Émincezle piment et faites-le revenirdans une sauteuse avec 1 cuillerée d’huile. Ajoutezles dés de potiron, 1 cuilleréeà café de coriandre moulue,le reste du gingembre râpé etsaupoudrez d’1 pincée decumin et d’une autre de curcuma. Mélangez et salez.
• Arrosez le potiron et les
épices de 5 cl d’eau. Couvrezet laissez cuire 30 minutesenviron à feu très doux, en remuant régulièrement. Vousdevez obtenir une sorte decompote. Servez la viandeavec le cari de potiron, et décorez de coriandre fraîche.
recettes du monde inde
Bœuf de Madras, cari de potironpréparation : 30 min • cuisson : 2 h • pour 4 personnes
Recette extraite de Qu’est-ceque tu mijotes ? de CamilleChaptal, collection “Toquades” (éd. First), 86 pages, 6,90 €.
mars-aVriL paprika • 97
98 • paprika mars-aVriL
recettes du monde
• 1 moule à gâteau de 21 cm de diamètre• 2 bols - 1 grille
• 100 g de beurre mou• 175 g de sucre• 2 œufs• 25 cl de yaourt nature type velouté• 225 g de farine• 3 cuil. à café rases de levure chimique• 2 pincées de sel• beurre pour le moule
Pour la croûte du gâteau, façon crumble : • 50 g de beurre• 50 g de cassonade• 50 g de noix de pécan concassées• 2 cuil. à soupe bombées de farine• Préchauffez le four à 180 °C (th. 6) ou à 165 °C (chaleur tournante).• Beurrez le moule et mettez-le au frais.
• Préparez le crumble. Dans un bol, mélan-gez la cassonade, la farine et les noix depécan. Ajoutez le beurre et incorporez-ledu bout des doigts afin d’obtenir une chapelure grossière. Couvrez puis réservezce mélange au frais.
• Dans un grand bol, mélangez le beurre etle sucre jusqu’à obtenir une consistancecrémeuse. Incorporez les œufs un par un.Ajoutez le yaourt, puis la farine,la levure, le sel. Mélangez.
• Versez la pâte dans le moule beurré puis lissez la surface. Parsemez lasurface du gâteau avec le crumble. Enfournez pour 30 minutes. Vérifiez lacuisson avec la lame d’un couteau, elledoit ressortir sèche. Laissez tiédir pendant15 minutes, puis démoulez sur la grille.
amérique du nord
Coffee cakepréparation : 25 min • cuisson : 30 min • pour 8 personnes
Recette extraite deCookies, muffinsand Co, de PascalWeeks, collectionToquades (éd.First),86 pages, 6,95 €.