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Presses Universitaires du Mirail Historia doble de la Costa. I. Mompox y Loba by Orlando FALS BORDA Review by: Jacques Gilard Cahiers du monde hispanique et luso-brésilien, No. 36, Numéro consacré à l'Amérique centrale (1981), pp. 154-157 Published by: Presses Universitaires du Mirail Stable URL: http://www.jstor.org/stable/40852709 . Accessed: 14/06/2014 02:26 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Presses Universitaires du Mirail is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Cahiers du monde hispanique et luso-brésilien. http://www.jstor.org This content downloaded from 195.34.79.228 on Sat, 14 Jun 2014 02:26:58 AM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

Numéro consacré à l'Amérique centrale || Historia doble de la Costa. I. Mompox y Lobaby Orlando FALS BORDA

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Presses Universitaires du Mirail

Historia doble de la Costa. I. Mompox y Loba by Orlando FALS BORDAReview by: Jacques GilardCahiers du monde hispanique et luso-brésilien, No. 36, Numéro consacré à l'Amérique centrale(1981), pp. 154-157Published by: Presses Universitaires du MirailStable URL: http://www.jstor.org/stable/40852709 .

Accessed: 14/06/2014 02:26

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être la source privilégiée de l'historien et de l'ethnologue. Avec l'œuvre américaine d'Alexandre de Humboldt, nous sommes en présence d'un voyageur « modèle », à la fois itinérant et résidant, esprit curieux et cultivé, sachant dégager l'essentiel sans se perdre dans l'anecdotique. Puisse la lecture de l'anthologie établie avec bonheur par Ch. Minguet convaincre les derniers sceDtiaues.

Jean-Paul Duviols.

Orlando FALS BORDA. - Historia doble de la Costa. I. Mompox y Loba. - Bogotá, Carlos Valencia Editores, 1979. - 324 p.

Cet ouvrage d'Orlando Fais Borda, premier d'une série dont l'am- pleur finale n'est pas précisée ici, constitue d'ores et déjà une réfé- rence fondamentale pour quiconque veut étudier les réalités humaines et la culture de la Côte Atlantique colombienne, et il comble au pas- sage d'importantes lacunes dans la connaissance de l'histoire natio- nale. Tout un processus ignoré, et pourtant bien original, de l'Améri- que métisse est tiré au clair par ce premier volume. Fais Borda recons- titue l'histoire d'une sous-région jusqu'ici insuffisamment étudiée - Mompox et une partie du bas Magdalena - depuis la conquête jus- qu'au seuil de l'histoire républicaine, en mettant particulièrement l'accent sur la trajectoire des familles seigneuriales qui ont contribué à modeler cette société à partir du XVIIe et surtout du début du XVIIIe siècle. En même temps, cette reconstitution de la trajectoire des grandes familles permet de retracer l'histoire des luttes populai- res de cette zone, fournissant une solide base et une réelle légitimité aux conflits actuels et futurs. Car ce livre n'est pas seulement un livre d'histoire et de sociologie; c'est aussi un texte politique, un texte d'action destiné à déboucher sur des luttes contemporaines dont il se nourrit déjà et qu'il contribue à nourrir.

A bien des égards, son titre peut paraître modeste. Double, cette « histoire » que propose Fais Borda l'est effectivement, et de plus d'une façon. Ne serait-ce que par l'existence de ces deux « canaux de communication » qui conduit à lire le livre deux fois, par les pages de gauche puis par celles de droite; d'abord par l'anecdote - celle de la recherche proprement dite et celle de l'histoire historique - , ensuite par l'analyse et la réflexion, théorique, méthodologique ou autre. Double également par ce jeu entre le présent et le passé, entre la connaissance et l'action, entre la recherche documentaire et la mé- moire populaire, entre les élites et la plèbe. Mais, finalement et par- dessus tout, multiple, du fait que les deux canaux de lecture ne se complètent et ne prennent tout leur sens que par de nombreuses inter-

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relations : lecture faite d'échos et de réactions. On aboutit en fait à une multiplicité de sens qui fait de ce livre - historique, répétons-le, mais aussi raisonnablement et savoureusement hérétique - à la fois une source de savoir et une source d'émotion. Ce premier tome de Historia doble de la Costa est aussi une œuvre fort proche de la plus simple et de la meilleure littérature. D'abord par sa tendance - inévitable là où l'histoire, le climat et la

faune secrète (le « comején », si redoutable pour qui veut consulter des papiers, même récents, dans les régions de la Côte Atlantique) - à boucher au prix d'un peu d'imagination les trous irrémédiables qu'op- pose au chercheur une documentation incomplète; il y a là une ten- dance à inférer qui n'est pas si loin de la plus honnête imagination du roman historique. Et le « canal » des pages de gauche nous propose parfois de véritables scènes, des scènes recréées (la mort d'un noble de Mompox au XVIIIe siècle), qui appartiennent à une véritable acti- vité de fiction : on n'est pas si loin de certaines pages de Carpentier. Et autre référence littéraire qui s'impose : l'épopée, celle qui est incluse dans toute conquête et dans toute fondation, deux situations dont l'histoire américaine, par la force des choses, n'a pas été avare. L'ouver- ture des chemins de El Paso à Tenerife puis Cerro de San Antonio, la fondation des villages de la rive droite du Magdalena dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, bien qu'évoquées avec une certaine discrétion (Fais Borda semble avoir flairé dans ces pages une tentation et un « danger » littéraire), constituent une véritable épopée historique que les résonances mythiques rapprochent de la littérature. Fais Borda, en tout cas, reconquiert sur l'oubli un territoire idéal, celui de la fon- dation d'un monde, que la littérature et le cinéma colombiens pour- raient très avantageusement exploiter.

Mais le lien le plus évident est celui qui s'établit avec la littérature dite de témoignage (ne serait-ce que par le fait qu'il y a recours à, et enrichissement de, la mémoire collective). Dans le contexte colombien (et même mieux : dans le contexte régional), on pense inévitablement à ce livre important, quoique trop peu connu, qu'est Historias de raca- mandaca de David Sánchez Juliao. L'identité des méthodes utilisées dans ces deux livres, celle des buts poursuivis, et - pourrait-on ajou- ter - la proximité personnelle de Sánchez Juliao et Fais Borda, amè- nent à penser que la frontière entre l'histoire et la littérature de témoignage peut être fort vague ou même inexistante. On peut d'ail- leurs noter que Fais Borda se désigne à un moment donné, avec modestie mais fort judicieusement, comme « l'écrivain principal » de son livre, en une formule qui rappelle celle de « gestor de novela- testimonio » qu'employait il y a quelques années le Cubain Miguel Barnet. Quant à la ressemblance avec le livre de Sánchez Juliao, on

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signalera un épisode - le passage soupçonneux de l'autorité (p. 166 A) - qui rappelle un moment du dernier récit de Historias de vaca- mandaca. La recherche d'archives, l'enquête orale et les intentions politiques de Fais Borda le conduisent à illustrer lui aussi, inévita- blement, une des voies fécondes de la littérature hispano-américaine d'aujourd'hui (cf. Barnet, Neira, Pozas, Poniatowska) et constituent une contribution originale à la littérature universelle à travers la récupération d'un processus et d'une réalité humaine difficilement réductibles à une tradition littéraire occidentale.

On le voit, ce livre de Fais Borda s'inscrit dans un mouvement con- temporain qui déborde la simple recherche historique et sociologique. On reconnaît là un signe de cette quête d'identité qui affecte aussi la littérature et l'art en général, signe d'une époque de la pensée et de la sensibilité hispano-américaines. Mais c'est aussi, au-delà de son cortège de riches notations humaines (le « canal » de lecture des pages de gauche), un apport scientifique plus qu'appréciable : l'établisse- ment de l'histoire d'une sous-région, d'une région, d'un pays; une lacune comblée dans l'histoire américaine (Mompox, première ville de l'actuelle Colombie à proclamer l'Indépendance, avait un passé relativement mal connu); un efficace dépouillement d'archives en- core vierges, digne de la nouvelle école historique colombienne (et, au passage, un coup sérieux, un de plus, porté à l'académisme natio- nal); et un début d'analyse militante du présent.

En s'intéressant à la zone de Mompox, Fais Borda éclaire comme jamais encore on ne l'avait fait les processus de l'histoire de la Côte Atlantique colombienne. Autrement dit, il touche à toute une partie de la Colombie qui appartient à d'autres réalités géographi- ques et humaines : le grand complexe du bassin caraïbe, dont la plus grande partie du pays (la Colombie « historique ») est exclue. Cette appartenance extranationale, Fais Borda ne l'évoque pas (il veut faire œuvre régionale), mais elle est sensible tout au long de son livre, ne serait-ce que par certaines allusions au rôle du climat tro- pical et d'un métissage spécifique dans les composantes de la « cul- ture amphibie » et de la « société antiseigneuriale » dont il parle longuement.

On sent là une grande intuition et en même temps une possible faiblesse scientifique du livre. Le saut est très grand, trop grand peut-être, entre les deux premières parties et la troisième et der- nière. Dans celle-ci apparaît « la pregunta básica » qui est : « ¿ A qué se debe la tolerante fluidez de la sociedad costeña ? ». C'est bien une question fondamentale, en effet, pour quiconque effectue des recherches sur cette partie de la Colombie. Mais elle reste assez éloignée du thème et des époques traités dans ce premier volume.

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Quels éléments relient encore, après les probables transformations du XIXe siècle, notre époque à l'époque coloniale ? Cette question n'est envisagée que trop brièvement dans le livre. C'est un peu rapi- dement que la seule Cartagena (coloniale - et actuelle ?) est exclue des bienfaits de la « campechanía costeña ». Pourquoi pas la Santa Marta coloniale et la Santa Marta bananière des années 1920, dont l'élite résidait de préférence à Bruxelles et Paris et faisait ses études à Louvain ? Et la Barranquilla du XXe siècle, considérée comme démocratique, mais cela en fonction des seuls critères de sa propre bourgeoisie d'importateurs, de commerçants et d'entrepreneurs ?

Ce point faible que nous signalons ici découle en fait de la nature même de l'ouvrage, ouvrage historique et de combat tout à la fois : Fais Borda voulait aller au devant de son public, les leaders popu- laires de la zone de Mompox, proposer et recevoir, révéler et écouter. Ce troisième et dernier chapitre est une synthèse provisoire; il n'est là que pour soulever des échos et des débats qui lui donneront plus tard une forme nouvelle et une nouvelle efficacité. On peut soup- çonner qu'il y a dans quelques-unes de ses certitudes et dans ses intuitions une grande justesse que des recherches postérieures (sur le XIXe et le XXe siècles) devraient confirmer et approfondir. Mais il est clair que nous sommes ici devant une tentative d'un genre nou- veau et que parler de déductions hasardeuses équivaudrait à recourir à un langage et à un système de pensée que Fais Borda ne reconnaî- trait pas ou ne reconnaîtrait plus.

Si insuffisances il y a, elles proviennent de circonstances indépen- dantes de la volonté de l'auteur, mais non indépendantes du proces- sus global colombien qu'il contribue à éclairer ici. Fais Borda et sa femme, la sociologue María Cristina Salazar, ont été victimes, au début de 1979, de la pire des vagues de répression abusive et indis- criminée que permet le décret 1923 du 6 septembre 1978, appelé « Sta- tut de sécurité ». Le livre que nous avons entre les mains aurait dû être assez différent de ce qu'il est pour l'instant; mais il est, par là aussi, lié à l'histoire nationale qu'il étudie et révèle.

Ce premier volume de Historia doble de la Costa est un livre utile et indispensable. C'est aussi un beau livre et une œuvre chaleureuse (on doit souligner au passage la richesse et l'humanité - un concept que García Márquez aimait à utiliser dans ses chroniques de ciné- ma - de la documentation photographique originale qui accompa- gne le texte). Et c'est bien, même avec ses limitations de « work-in- progress », la première tentative sérieuse d'étudier globalement la spécificité humaine de la Côte Atlantique colombienne.

Jacques Gilard.

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