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1 Numérique et développement de l’entrepreneuriat-jeunes au Cameroun Digital technology and the development of youth entrepreneurship in Cameroon Par : Dr. Renaud Etiennis OKOMEN TSAGUE Ph. D en droit Privé, Université de Yaoundé II, Cameroun ; Juriste spécialisé en droit des affaires et du numérique, Consultant ; Enseignant-associé à Digital College ; Enseignant à l’Institut Universitaire des Tropiques (UIT-ISTAG) ; Responsable du secrétariat technique de l’Observatoire Africain de la Pratique des Affai res (OAPA/ABCS) Résume : Le numérique, quoi que l’on en pense, constitue la transformation la plus radicale que connaissent les nations depuis la révolution industrielle. Tel Janus, le numérique mérite que l’on en interroge les enjeux économiques et sociaux, sans pour autant en occulter les défis juridiques pour la plupart surmontables. Dans ce sens opérons nous un rapprochement entre numérique et entrepreneuriat question de mieux apprécier l’apport du numérique au développement de l’entrepreneuriat des jeunes au Cameroun. A cet effet, il semble clair que le numérique contribue de façon duale au développement de l’entrepreneuriat des jeunes. C’est, sans coup férir, un émulateur de l’innovation, ferment de la dynamique entrepreneuriale, d’une part ; et, s’avère-t-il, une solution de résilience économique des jeunes entrepreneurs, d’autre part. Mots clés : Numérique Entrepreneuriat Innovation Résilience économique Summary : Digital, whatever one thinks, constitutes the most radical transformation that nations have known since the industrial revolution. Like Janus, digital technology deserves to be questioned about economic and social issues, without ignoring the legal challenges, most of which are surmountable. In tis sense, we are bringing together digital technology and entrepreneurship in order to better appreciate the contribution of digital technology to the development of youth entrepreneurship in Cameroon. To this end, it seems clear that digital technology has made a dual contribution to the development of youth entrepreneurship. It is, without striking a blow, an emulator of innovation, leaven of entrepreneurial dynamic, on one hand ; and, it turns out, an economic resilience solution for young entrepreneurs, on the other hand. Keys words : Digital Entrepreneurship Innovation Economic resilience.

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Numérique et développement de l’entrepreneuriat-jeunes au Cameroun

Digital technology and the development of youth entrepreneurship in Cameroon

Par :

Dr. Renaud Etiennis OKOMEN TSAGUE

Ph. D en droit Privé, Université de Yaoundé II, Cameroun ; Juriste spécialisé en droit des affaires et du numérique, Consultant ;

Enseignant-associé à Digital College ; Enseignant à l’Institut Universitaire des Tropiques (UIT-ISTAG) ;

Responsable du secrétariat technique de l’Observatoire Africain de la Pratique des Affaires (OAPA/ABCS)

Résume :

Le numérique, quoi que l’on en pense, constitue la transformation la plus radicale que connaissent les nations depuis la révolution industrielle. Tel Janus, le numérique mérite que l’on en interroge les enjeux économiques et sociaux, sans pour autant en occulter les défis juridiques pour la plupart surmontables. Dans ce sens opérons nous un rapprochement entre numérique et entrepreneuriat question de mieux apprécier l’apport du numérique au développement de l’entrepreneuriat des jeunes au Cameroun.

A cet effet, il semble clair que le numérique contribue de façon duale au développement de l’entrepreneuriat des jeunes. C’est, sans coup férir, un émulateur de l’innovation, ferment de la dynamique entrepreneuriale, d’une part ; et, s’avère-t-il, une solution de résilience économique des jeunes entrepreneurs, d’autre part.

Mots clés :

Numérique – Entrepreneuriat – Innovation – Résilience économique

Summary :

Digital, whatever one thinks, constitutes the most radical transformation that nations have known since the industrial revolution. Like Janus, digital technology deserves to be questioned about economic and social issues, without ignoring the legal challenges, most of which are surmountable. In tis sense, we are bringing together digital technology and entrepreneurship in order to better appreciate the contribution of digital technology to the development of youth entrepreneurship in Cameroon.

To this end, it seems clear that digital technology has made a dual contribution to the development of youth entrepreneurship. It is, without striking a blow, an emulator of innovation, leaven of entrepreneurial dynamic, on one hand ; and, it turns out, an economic resilience solution for young entrepreneurs, on the other hand.

Keys words :

Digital – Entrepreneurship – Innovation – Economic resilience.

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Introduction :

Sur le continent africain, et partant au Cameroun, les jeunes et les femmes constituent les catégories sociales ayant d’immenses difficultés à trouver un emploi et à gagner un revenu décent (Manfred Kouty et Mallaye Douzounet, 2020 : p.136). Selon des statistiques de la Banque Africaine de Développement, la majeure partie des jeunes n’a ni emploi stable, ni perspectives d’avenir économique (BAD, 2018). Les chiffres à ce niveau sont évocateurs d’un mal profond à l’insertion professionnelle de la classe jeune de la population1 ; ce qui occasionnerait des coûts économiques, pour le moins sérieux. En effet, le chômage des jeunes, en freinant la croissance économique, tend, selon Coward et al. (2014), à démoraliser les concernés qui, au final, n’ont plus ni l’envie ni la capacité de mener une vie (Manfred Kouty et Mallaye Douzounet, 2020 : p.136). Qui plus, on n’en est à penser que c’est, dans une certaine mesure, l’absence d’opportunité qui alimente conflit et instabilité politique ; voire, la tendance à l’émigration à risque2. Et pourtant, la solution face aux difficultés d’accès à l’emploi repose de plus en plus, et c’est un secret de polichinelle, sur l’entrepreneuriat. D’ailleurs la Stratégie Nationale de développement 2020-2030 en fait le leitmotiv de son pilier relatif à la promotion de l’emploi et à l’insertion économique (MINEPAT, 2020 : p.86). Même si, les inadéquations et contraintes inhérentes à l’environnement économique nationale poussent le jeunes sur la voie de l’entrepreneuriat de subsistance et informel ; ne donnant pas de créer des entreprises innovantes3 et pérennes. Face à cet état de chose, le numérique émergent, semble-t-il est porteur de solutions4.

Dans un environnement où la révolution numérique s’accélère, insufflant un état d’esprit de pionnier et bouleversant au passage nos mode vie et de pensée (Frédéric Brunet, 2013 : p.4) jusqu’à constituer, selon Marcello Vitali-Rosati (2014), une véritable culture (pp.63-75), il importe de scruter l’horizon tracé par ce qu’il est convenu d’appeler la nouvelle économie.

Le numérique constitue un nouveau monde (Emmanuel Netter, 2017 : p.23)5 qui donne prime, dit-on, à l’agilité, à la vitesse et à l’innovation en favorisant l’émergence d’une nouvelle vague entrepreneuriale qui se cristallise au niveau des clusters territoriaux, où la demande suscite l’offre et où l’open innovation, le fonctionnement en réseaux et l’ouverture au monde constituent les conditions de succès (Frédéric Brunet, 2013 : p.4). Le phénomène est fortement exalté dans la littérature économique de ces dernières décennies (David et Wright, 1999 ; David, 2001 ; Von Tonzelman, 2003 ; Bayer, 2002). D’ailleurs, une certaine doctrine y voit comme une nouvelle révolution industrielle (Adel Ben Youssef, 2014 : p.2) ; soit dit en passant, la troisième du genre. En effet, les technologies numériques sont aujourd’hui responsables de la transformation radicale que connaissent les modes de production, de consommation et d’échange (Adel Ben Youssef, 2014 : p.2). Et on parle alors d’économie numérique référence faite à l’emploi devenu quasi-incontournable des technologies de l’information et de la communication dans presque la totalité des secteurs et segments de la vie économique (Gaëlle Dejo et Melaine Nsaikila, 2017 : p.2). Ainsi perçu, le numérique est dorénavant mis à contribution dans le cadre des stratégies de réduction de la pauvreté. Or, quand on sait qu’une stratégie de réduction de la pauvreté excluant l’emploi et

1 On parle d’environ 35% de jeunes femmes et 20% de jeunes hommes ; relevant le chômage des jeunes (15 à 35 ans) au double de celui des personnes adultes (BAD, 2018). 2 Cela, compte tenu des voies très souvent emprunté. On a encore le souvenir frais de ces camerounais réduits à l’esclavage en Lybie et de ceux-là, qui perdent la vie en traversant le désert ou la mer méditerranée (bozayeurs comme ils se font appeler) 3 D’ailleurs, encourager l’innovation ne rentre-t-il pas dans le neuvième Objectif de Développement Durable (ODD) ? 4 Il en va ainsi dans la mesure où, il permet de surmonter les obstacles et autres contraintes de l’écosystème économique camerounais ; et aussi, de créer des entreprises innovantes et à fort potentiel de croissance (M. Kouty et M. Douzounet (2020), p.137). 5 Voir dans le même sens, Frédéric Brunet (2013), Le numérique, levier d’une croissance, Rapport de la Commission Economie et Croissance, CCI, Paris-Ile-de-France, p.4.

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le marché du travail est par essence vouée à l’échec, on comprend tout de suite la position de l’Union Africaine ; qui estime au regard du chômage ambiant des jeunes que le développement durable de l’Afrique passe par l’exploitation du dividende démographique (Union Africaine, 2020 : p.1). Cela implique d’aller au-delà des possibilités limitées d’emploi formel pour les jeunes, de créer et d’exploiter des possibilités de gagner sa vie de manière décente6 et contribuer à la réalisation de l’agenda 2063(Union Africaine, 2020 : p.1). Aussi, importe-t-il sans toutefois occulter les défis afférents au numérique7, en en interrogeant les enjeux économiques (Justine

Diffo Tchunkam, 2020 : pp.59-71) et sociaux, d’apprécier le concours des technologies numériques au développement de l’entrepreneuriat-jeunes au Cameroun.

A ce sujet, en nous appuyant sur l’importante littérature sur le numérique mis en rapport avec l’entrepreneuriat des jeunes ; et, en observant l’engouement autour et en faveur des technologies du numérique, il semble indéniable que le numérique exalté ici et là comme une véritable niche d’opportunités pour la jeunesse, se présente comme la « terre promise » du développement socio-économique et de l’insertion professionnelle des jeunes au Cameroun. D’ailleurs, à l’échelle africaine, le numérique est perçu comme un levier important de l’Agenda 2063 de l’Union Africaine pour bâtir tel que souhaité une « Afrique intégrée, prospère et pacifique (…), représentant une force dynamique sur la scène internationale » (Union Africaine, 2020 : p.1).

En effet, très tôt perçu comme un émulateur de l’innovation, ferment de l’esprit entrepreneurial, le numérique peut être envisagé, dans le contexte actuel marqué par la résurgence et la recrudescence du Covid19, comme une solution de résilience économique des jeunes entrepreneurs (2). Une hypothèse de travail dont la vérification ne peut être cernée indépendamment d’une clarification préalable des concepts de numérique et d’entrepreneuriat (1).

1. L’appréhension des concepts de « numérique » et d’ « entrepreneuriat »

1.1. Conceptualisation du numérique

Le numérique qui est aujourd’hui en train de révolutionner complètement nos vies de tous les jours à une vitesse fulgurante, n’est pas d’appréhension aisée. Toute chose pouvant justifier l’attention portée à ce concept dans le cadre de notre étude. En effet, apparaît-il clairement, le numérique ne peut plus être présenté comme une sorte de jouet destiné aux seuls férus des technologies. Plus qu’avant, il s’agit désormais, peut-on le dire ainsi, du centre de la vie moderne. D’ailleurs, les technologies numériques s’incrustent peu à peu dans nos vies pour constituer ce que Marcello Vitali-Rosati (2014) nomme la culture du numérique ; référence faite à l’emploi devenu systématique des technologies de l’information et de la communication dans la presque totalité des aspects de nos vies. Ainsi parle-t-on dorénavant de gouvernance numérique, économie numérique, e-éducation, e-management etc. Une révolution dont la compréhension réside dans l’assimilation des caractéristiques et enjeux du numérique.

1.2.1. Vers une « culture numérique » ?

6 Référence faite à l’ODD n°8 relatif à la promotion de la croissance économique inclusive, le plein emploi productif et le travail décent. 7 Parlant d’actions et réalisations nécessaires à la réduction de la fracture numérique et de la facture du numérique (Voir dans ce sens, R. E. Okomen Tsague (2020), La fiscalité du commerce électronique dans l’espace OHADA : éclairage rétrospectif et perspectives d’évolution à la lumière des systèmes fiscaux européens et nord-américains, Université de Yaoundé II-Soa, FSJP, Juin 2020, pp. 41 et s.). Et par ailleurs en termes de défis juridiques, l’encadrement de l’économie numérique (voir dans ce sens, R. E. Okomen Tsague (2018), La dématérialisation de l’activité économique amorcée par l’AUDCG. Enjeux économiques et défis juridiques dans l’espace OHADA, EUE, Beau Bassin, 2018. www.morebooks.fr

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Le vocable « numérique » est de plus en plus présent dans notre vocabulaire. Selon Marcello Vitali-Rosati (2014), « il [parlant du numérique] est entrain de devenir un mot passe-partout qui sert à définir un ensemble de pratiques qui caractérise notre quotidien et donc nous avons peut-être encore du mal à saisir la spécificité » (p.64). En effet, il n’y a pas longtemps de cela, alors qu’émergeaient déjà les concepts de « nouvelles technologies de l’information et de la communication », « nouveaux médias », « environnement virtuel » ou tout simplement d’informatique ou électronique, le numérique se réduisait à l’information et à la communication.

Pourtant aujourd’hui, le numérique plus qu’un mode d’information ou un instrument de communication constitue désormais tout un mode de vie8 avec l’avènement et la diffusion de l’Internet et donc, le web dans les années 1990. Désormais, le numérique s’imprime et s’exprime dans l’espace où nous vivons tant et si bien que Marcello Vitali-Rosati (2014) estime, plus que jamais, que « le numérique est l’espace dans lequel nous vivons » (p.69). Puis il ajoute : « il ne s’agit d’outils au service des pratiques anciennes, mais d’un environnement dans lequel nous sommes plongés, qui détermine et façonne notre monde notre culture » (p.69). C’est dire actuellement que le numérique est systématiquement utilisé dans tous les aspects de nos vies9. En clair, il semble aujourd’hui erroné de concevoir le numérique comme cette technique, jadis, de reproduction du réel qui s’oppose à l’analogique. Car, le numérique qui modifie profondément nos pratiques et leur sens ; voire, notre façon d’être dans le monde10, constitue une « véritable culture avec ses enjeux sociaux, politiques et éthiques fondamentaux » (Marcello Vitali-Rosati, 2014, p.69). Enjeux dont il importe dès à présent d’en faire l’économie à la suite d’une brève présentation des caractéristiques du numérique.

1.1.2. Caractéristiques et enjeux du numérique.

Les caractéristiques du numérique découle de l’essence même de l’Internet qui, à ce jour, en a révolutionné l’utilisation. Il s’agit essentiellement de :

- Ubiquité. C’est-à-dire, la possibilité réelle pour les usagers des technologies numériques de fournir ou d’accéder aux donnée et informations à l’échelle planétaire et à partir de n’importe quel point du globe (voir dans ce sens Renaud E. Okomen Tsague, 2018, p.35).

- Rapidité. En effet, l’Internet en évoluant offre aujourd’hui aux internautes une plateforme de communication en temps réel. Toute chose favorisant l’illusion d’un rapprochement physique des agents opérant sur la toile (Idem, 2018, p.36).

- Interactivité. Selon Renaud E. Okomen Tsague, ceci suppose que l’usager du numérique dispose de la possibilité d’échanger avec l’automate ou directement avec un autre utilisateur qui pourrait être le fournisseur, l’acheteur, l’employeur,, l’employé, etc… (p.36).

- Universalité. Cette caractéristique traduit l’ouverture tout public de l’offre du numérique ; en terme de produits et de services.

- Immatérialité. En effet, on a toujours pensé -que ce soit à tort ou à raison- que l’environnement numérique serait caractérisé par un espace immatériel qui s’opposerait à l’espace matériel non numérique (Marcello Vitali-Rosati, 2014, p.72). Mais cette caractéristique du numérique se trouve relativisée par Marcello Vitali-Rosati qui postule pour la multiplicité du

8 C’est dans ce sens qu’il est de moins en moins plausible, comme il y’a quelques temps, de rapprocher le numérique du virtuel ou de l’opposé à l’analogique ; si tant est qu’il s’est imprimé et s’exprime désormais dans notre réalité, notre quotidien en est presque totalement imprégné. 9 Il en va ainsi dès lors qu’en plus de s’informer et de communiquer sur le web, on y organise sa journée, on y achète ses produits, on y gère ses comptes bancaires, on y exerce son activité professionnelle, on y joue, on y exprime des émotions et bien d’autres. 10 Bien entendu, à l’ère du numérique cela se matérialise dans notre changement, entre autres, de façon de penser, de comprendre, de gérer l’attention, de percevoir le temps et l’espace.

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numérique. Cette Multiplicité qui, dit-il, se traduit par la facilité de transmission et la convertibilité des objets numériques (Marcello Vitali-Rosati, 2014, p.73). Plus loin, l’auteur fait constater que la multiplicité dont s’agit est déterminée par deux causes à savoir : la « discrétisation »11 et la « médiation »12. Et dès lors, convient-il de le repréciser, la somme de ces caractéristiques ne dissimule que très mal les nombreux enjeux du numérique. En effet, perçu comme un important levier de la croissance économique (Justine Diffo Tchunkam, 2020, pp.59-72) et de l’emploi, le numérique dont la révolution semble-t-il, est en marche, constitue une importante source d’innovation. C’est par ailleurs la transformation la plus radicale que connaissent les nations depuis la révolution industrielle ; et dont, la principale vertu est l’essor de l’économie numérique.

Parlant d’économie numérique13, notons d’emblée que ce concept très tôt connu sous le vocable de « nouvelle économie », s’est mué par la suite en « économie de l’information et du savoir » au début des années 2000. Concept très en vogue actuellement, l’économie numérique tente de conceptualiser l’ensemble des activités qui sont liées directement ou indirectement aux technologies de l’information et de la communication (TIC). C’est ainsi que le MEDEF14 (2008) la définit comme l’ensemble des secteurs basés sur les TIC, que ce soit en production ou en usage (Figure 1). Le secteur producteur étant constitué des technologies numériques (Internet, téléphone mobile, logiciels informatiques, plateformes numériques et tous les autres outils servant à recueillir, stocker, analyser et partager des informations sous forme numérique). Le secteur utilisateur quant à lui comporte la santé, l’éducation, le tourisme, l’agriculture, la finance et les banques et la gouvernance. L’introduction des technologies numériques dans le secteur utilisateur a permis le développement de nouveaux services innovants (encore appelés leapfrogging) dans plusieurs domaines : la santé (e-santé, télémédecine, mobile-health, healthtech), l’agriculture (agritech), le commerce (e-commerce), l’éducation (e-learning), la banque (e-banking, mobile- banking, mobile-money), la finance (Fintech), l’assurance (Insurtech) et la gouvernance (e-government), etc. Aussi, y voit-on dorénavant un ferment de l’entrepreneuriat dont la conception mérite quelques précisions.

Figure 1 : Représentation graphique de l’économie numérique

11 Il s’agit du processus d’échantillonnage qui permet de transformer le contenu réel en une série de chiffre. C’est une caractéristique du numérique qui est à la base de la facilité de gestion des objets numériques et de leur transformabilité. 12 Entendu comme le processus d’interprétation nécessaire pour tout objet numérique. Et là, il s’agirait d’interpréter une série de chiffre en base 2 pour la comprendre en tant que code et d’interpréter ensuite ce code pour le rendre accessible et compréhensible pour l’usager. 13 Cette appellation du phénomène date de 2010. 14 Mouvement des entreprises de France.

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Source : Manfred Kouty et Mallaye Douzounet, 2020 : p.139.

1.2. Intelligibilité du concept d’entrepreneuriat

Il s’agit d’un concept pluriel qui se trouve fortement impacté par le numérique.

1.2.1. L’entrepreneuriat : un concept pluriel

Le concept d’entrepreneuriat, quant à lui, est difficile à définir au regard du grand nombre de disciplines dont il relève (Filion, 1997 ; Chollet, 2002). On peut néanmoins retenir, à la suite de St-Jean et Duhamel (2017), que le concept d’entrepreneuriat englobe non seulement l’acte de création d’une nouvelle entreprise, mais aussi celui de reprise d’une entreprise existante. Selon la typologie proposée par Reynolds et al. (2001), on distingue l’entrepreneuriat de nécessité et l’entrepreneuriat d’opportunité. Le premier signifie qu’un individu choisit d’entreprendre faute d’opportunité (pas de meilleur choix s’offrant à lui). Dans ce cas, l’entrepreneuriat relève plutôt de l’auto-emploi de subsistance. En revanche, l’entrepreneuriat d’opportunité découle d’une vraie conviction. Il est tourné vers la saisie d’une occasion perçue par l’entrepreneur. Dans ce cas, on parle d’un entrepreneuriat de croissance ou d’un entrepreneuriat innovant, mu par l’ambition d’innover et de faire croître son activité. Au fur et à mesure que le niveau de développement économique s’accroît, la prévalence de l’entrepreneuriat motivé par l’opportunité ou par l’innovation augmente et le taux d’entrepreneuriat motivé par la nécessité diminue. L’entrepreneuriat chez les jeunes est celui qui concerne les individus de la tranche d’âge des 18 à 35 ans (St-Jean et Duhamel, 2017). Pour Meda Adama et al. (2017), un tel entrepreneuriat implique le développement de comportements, de compétences et d’opportunités entrepreneuriales pour les jeunes dès l’école secondaire et jusqu’à l’âge adulte. Ainsi compris, l’entrepreneuriat, sous le prisme conceptuel, est aujourd’hui fortement impacté par la montée du numérique

1.2.2. L’entrepreneuriat : un concept fortement impacté à l’ère du numérique

Sur le plan conceptuel, le numérique affecte l’entrepreneuriat de manière directe et indirecte (Thurik et al., 2002 ; Chollet, 2002 ; Williams et Morawczynski, 2017 ; St-Jean et Duhamel, 2017). De manière directe, le numérique accroît les opportunités entrepreneuriales en facilitant l’intégration dans la chaîne de valeur mondiale (CVM). En effet, l’économie numérique modifie le

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processus de production classique de biens et services, à travers la sous-traitance ou le partage de la production. Grâce aux plateformes numériques, des activités à forte intensité de compétence, autrefois effectuées dans les pays développés, sont aujourd’hui réalisées dans les PED. C’est ainsi que les géants de la technologie comme Google, Intel, Microsoft, Nokia, IBM et Vodafone sont de plus en plus présents en Afrique et y délocalisent certaines de leurs activités.

De façon indirecte, en revanche, le numérique est pourvoyeur de ressources nécessaires à l’essor de l’entrepreneuriat. De nos jours, l’entrepreneur y a accès en un seul clic. En effet, l’économie numérique permet aux jeunes entrepreneurs de surmonter les contraintes à l’entrepreneuriat en leur fournissant deux types de ressources. Il s’agit de :

(i) ressources informationnelles, qui participent à l’identification de l’opportunité entrepreneuriale (les idées sur les produits/services, les informations sur le marché et les procédés de fabrication, etc.) ;

- ressources risquées, au sens où elles impliquent une prise de risque pour ceux qui les fournissent (financement, équipements, main-d’œuvre, première commande, etc.). En diminuant les coûts d’acquisition de l’information et en rendant un plus grand nombre d’informations disponibles en toute transparence et en temps réel, les technologies numériques ouvrent la voie à de nouvelles transactions. Outre les ressources informationnelles, la création d’une entreprise nécessite aussi des ressources financières et humaines. Dans ces conditions, l’économie numérique, grâce au développement des services bancaires (e-banking, mobile-banking, mobile-money) et financiers (Fintech, Insurtech, crowdfunding)15 en ligne, permet aux jeunes entrepreneurs d’avoir accès aux ressources financières. Par ailleurs, grâce aux nombreux réseaux d’aide à la création d’entreprise en ligne, le jeune entrepreneur peut renforcer ses capacités et apprendre de nouveaux métiers.

Bien édifié sur les concepts de numérique et d’entrepreneuriat, il importe dans la suite de relever la contribution du numérique au développement de l’entrepreneuriat des jeunes au Cameroun.

2. L’apport du numérique au développement de l’entrepreneuriat-jeunes au Cameroun

La question de l’entrepreneuriat-jeunes est au cœur du développement des pays de l’Afrique, considérée selon des données des Nations unies comme le continent le plus jeune du monde16 (Voir figure 2).

Figure 2 : Représentation graphique de la population jeune dans le monde

15 Désignant respectivement les start-up qui fournissent des services financiers et d’assurance grâce à des solutions innovantes. 16 L’Afrique est peuplée à plus de 60% de personnes âgées d’au plus 25 ans.

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Source : Données des Nations unies, 2017.

C’est d’ailleurs la jeunesse de sa population qui en fait à l’heure actuelle, le continent le plus dynamique en matière d’entrepreneuriat des jeunes ; l’activité entrepreneuriale étant toujours très poussée chez les groupes âgés entre 25 et 34 ans (voir tableau 1).

Tableau 1 : Taux d’activité entrepreneuriale par groupe d’âge et Région dans le monde

Source : Données de GEM (Global Entrepreneurship Monitor), 2016.

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Cette dynamique entrepreneuriale chez les jeunes Africains se manifeste aussi à travers la culture entrepreneuriale et l’engagement entrepreneurial. La culture entrepreneuriale est définie par la mesure de désirabilité des individus de faire de l’entrepreneuriat un choix de carrière valorisant (St-Jean et Duhamel, 2017). Elle précède l’engagement entrepreneurial et affecte la création d’entreprise. Trois principaux indicateurs permettent d’appréhender la culture entrepreneuriale : l’entrepreneuriat en tant que bon choix de carrière, l’attention des médias envers l’entrepreneuriat et le statut élevé accordé aux entrepreneurs qui réussissent. Dans ce sens, assiste-t-on à un rapide développement des attitudes entrepreneuriales (voir tableau 2) et à un renforcement certain de l’engagement entrepreneurial (voir tableau 3).

Tableau 2 : Evolution de l’attitude entrepreneuriale dans le monde

Source : Données de GEM (Global Entrepreneurship Monitor), 2016.

Tableau 3 : Evolution de l’’engagement entrepreneurial par continent

Source : Données de GEM (Global Entrepreneurship Monitor), 2016.

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Cet état de l’entrepreneuriat en Afrique, s’avère-t-il, permet d’entrevoir le numérique dans le contexte économique camerounais, à la fois, comme un émulateur de l’innovation (2.1) favorable au développement de l’entrepreneuriat de l’innovation ; et, comme une solution de résilience économique des jeunes entrepreneurs (2.2).

2.1. Numérique comme émulateur de l’innovation

L’économie numérique portée par les technologies numériques révolutionne l’entrepreneuriat dans le monde et en Afrique en particulier. De façon générale, les données empiriques montrent une forte convergence entre l’activité entrepreneuriale et les performances numériques dans un pays. En effet, sur la figure 3 ci-dessous, on observe une forte corrélation entre l’Indice global d’activité entrepreneuriale et l’indice de performance numérique (IPN17). Cela traduit l’existence d’un lien étroit entre la dynamique entrepreneuriale et les technologies numériques.

Figure 3 : Représentation de la corrélation entre évolution numérique et entrepreneuriat

Source : Données de GEDI (Global Entrepreneurship and Development Institute), 2016.

De nombreuses études (entre autres GSMA18, 2018 ; Hjort et Poulsen, 2017 ; AFD19, 2017) soulignent en effet que le développement rapide des TIC, et notamment la pénétration croissante d’Internet et du téléphone mobile, est la principale locomotive de l’entrepreneuriat dans le monde. C’est principalement le cas en Afrique où, selon les données de la Global System Mobile Association (GSMA), en 2018, le nombre d’abonnés à l’Internet mobile a doublé pour atteindre

17 L’IPN est un indicateur qui permet de mesurer la transformation numérique d’un pays en prenant en compte quatre critères : la fourniture de réseaux, l’intérêt des consommateurs pour les technologies numériques, l’environnement institutionnel et l’innovation. Plus un pays a un IPD élevé, plus sa performance numérique est forte. 18 Global System Mobile Association (GSMA). 19 Agence française de développement (AFD).

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435 millions, soit un taux de pénétration de 34 % (GSMA, 2018). De la même source, le nombre d’utilisateurs d’Internet mobile en Afrique va passer à 500 millions d’ici 2020. Cette pénétration rapide d’Internet mobile offre des opportunités immenses aux jeunes entrepreneurs africains et est à l’origine de la montée de l’entrepreneuriat émergent d’opportunité. Ainsi que le montre l’étude de Manfred Kouty et Mallaye Douzounet (2020), l’entrepreneuriat émergent d’opportunité (67,5 %) domine l’entrepreneuriat émergent poussé par la nécessité (28,9 %) (p.148) (Figure 4). Ce qui confirme l’argument selon lequel les individus empruntent la voie de l’entrepreneuriat lorsqu’ils perçoivent les opportunités (St-Jean et Duhamel : 2017 ; Williams et Morawczynski : 2017).

Figure 4 : Représentation graphique de la typologie d’entrepreneuriat émergent en Afrique

Source : Données de GEM (Global Entrepreneurship Monitor), 2016.

L’émergence des start-up en Afrique est la preuve que les jeunes Africains saisissent les opportunités offertes par le numérique. Partout en Afrique, les jeunes s’efforcent d’imiter les succès de la Silicon Valley aux États-Unis. Les exemples les plus connus sont : l’Afrique du Sud avec la Silicon Cape, le Kenya avec la Silicon Savannah, le Nigéria avec la Silicon Lagoon et le Cameroun avec la Silicon Mountain. Grâce aux technologies numériques, ils peuvent contourner les contraintes à l’entrepreneuriat et lever les ressources financières qui leur font tant défaut. D’après les résultats de l’étude de l’AFD (2017), l’accès aux financements reste une difficulté majeure pour l’entrepreneuriat en Afrique. Les raisons évoquées sont : l’absence d’options de financement dédiées aux start-up ; la lourdeur des garanties bancaires exigées ; la forte aversion au risque des banques africaines ; et les taux d’intérêt élevés. Dans ces conditions, l’économie numérique à travers le développement des financements numériques permet aux jeunes entrepreneurs africains d’avoir accès aux ressources financières. Ce financement numérique se fait soit par l’octroi de crédits directement sur les plateformes en ligne ou par téléphone mobile (e-

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banking, mobile-banking, mobile-money), ou soit indirectement en facilitant l’accès au crédit (Fintech, crowdfunding20).

A ce sujet, Justine Diffo Tchunkam (2020) observait la capacité du numérique à booster l’ADN de l’entrepreneur et à l’occasion d’une de ses leçons magistrales, elle en administrait la preuve. Selon Justine Diffo Tchunkam, l’activation de l’ADN d’entrepreneur qui sommeille en chacun d’entre nous passe par des réflexes qu’il est convenable de développer, à savoir :

- croire qu’il est largement possible de surmonter les schémas de conditionnement construit et entretenu par le social, en tentant sans cesse de repousser nos limites ;

- développer et entretenir une passion contagieuse, si forte qu’elle nous permet de relativiser les obstacles de parcours, les frustrations et les potentiels échecs ;

- prendre le risque d’être différent pour faire la différence et probablement devenir une référence ;

- flairer les bonne opportunités et travailler positivement pour trouver le filon d’or susceptible de transformer radicalement l’existence et la nôtre avec ;

- surtout, rester focus sur ses objectifs au sens de l’autodiscipline.

En effet, la dynamique observée avec le recours systématique aux outils technologiques permet d’affirmer sans risque de se tromper que la transformation la plus radicale que connaissent les nations depuis la révolution industrielle est bien la révolution numérique en cours dont la principale vertu est l’essor de l’économie numérique. Ainsi, observe-t-on, au-delà de la transformation irréversible des habitudes en faveur de la gouvernance numérique, à une constante mutation de l’écosystème entrepreneurial favorable à une croissance exponentielle des économies. Et dans le sens de cette marche, on voit émerger des projets ambitieux, tentant de tirer parti des niches d’opportunités qui encouragent l’entrepreneuriat numérique et faisant, de ce fait, bouger la créativité par le développement de solutions numériques capables de transformer la gouvernance et d’améliorer la performance de nos organisations (voir tableau 4).

Tableau 4 : Quelques initiatives nationales d’entrepreneuriat de l’innovation porté par des jeunes camerounais.

N° Projets Domaines Nom du promoteur

descriptif Références Prix remportes

1 EMDi Securities

TIC et transformation digitale des entreprises

Dr N’TCHATAT TOUNYA Fabrice Léonel (Ets Lex Enim Omnia)

Outil de gestion optimale de titres immatériels

Email : [email protected] Tel : 675 02 47 11

2 TAGUS DRONE

TIC TAGUIA KANA Borel

Conception et montage de drones solaires

www.tagusdrone.com

Challenges startupper 2016

3 MADCON Conception DONGO Conception et Facebook : YEIC 2019 : Young

20 Financement participatif, il désigne respectivement des start-up qui fournissent des services financiers et d’assurance grâce à des solutions innovantes.

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3D et montage 3D

Vanyle montage des machines d’impression 3D

MADCON 3D Entrepreneurship Innovation Challenge ; Fonds Prototypage 2020 ; Youth Connect.

4 MADSUS ELECTRONICS

TIC Nelson ANONG

Conception de dispositif électronique (Leaders nationales)

Facebook : MADSUS

Hub Africa 2019 ; Commonwealth 2018.

5 ASSO TIC (online market)

BEKONO Esther

Plateforme de vente et de livraison en ligne

www.asso.shop

6 MEYE Protect

TIC MEYE Stéphane Premier antivirus africain

www.meyeprotect.com

YEIC : Young Entrepreneurship Innovation Challenge ; MINJEC 2019

7 KIRO Games

TIC Olivier MADIBA

Premier jeu vidéo africain (Orion)

www.kirogames.com

Challenges startupper 2016

8 CYTOH TIC et santé Véronique BOUMTJE

Premier microscope électronique capable de détecter rapidement le cancer du sang

Facebook : Véronique BOUMTJE

YEIC : Young Entrepreneurship Innovation Challenge ; Innovation Week 2020.

9 PRP (Pocket Recovery Phone)

TIC Serge ZAMBO Conception et montage du premier antivol de smartphones

Facebook : pocket recovery phone

Promote 2019 ; Hub Africa 2019 ; Commonwealth 2020 ; GETEC 2019 ; YEIC : Young Entrepreneurship Innovation Challenge ;

2.2. Numérique comme solution de résilience économique des jeunes entrepreneurs

Le numérique se présente aussi bien comme une solution de résilience économique des jeunes entreprises. La récente crise sanitaire de COVID 19 permet de l’attester, s’il en était encore besoin. Si ces dernières années ont été marquée des difficultés liées au contexte de crise sanitaire de COVID 19, on peut tout de même remarquer la résilience impressionnante des petites entreprises africaines et camerounaises. Alors que les géants planétaires du commerce électronique ont vu leurs transactions et bénéfices augmenter, les petites et les moyennes entreprises ont dû se battre pour leur survie. Pour cause, les PME africaines sont traditionnellement des entreprises en « dur » pour lesquelles le commerce en ligne constituerait encore un luxe. Ainsi, un des défis dans le contexte camerounais actuel consiste à s’assurer que ces petites entreprises ne sont pas laissées pour compte dans le processus en cours de transformation digitale de l’espace économique.

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Il s’agit, dans ce sens, de leur permettre de bénéficier au même titre que les grandes entreprises de l’accélération, au sens de Justine Diffo Tchunkam (2020a), de la société digitale dans le contexte camerounais. Cette dynamique qui, s’avère-t-il, est appuyée par une forte pénétration du mobile et une consommation croissante de data dictée par la nécessité de respect des mesures barrières prises dans le cadre de lutte contre la propagation du Corona Virus (voir figure 5).

Figure 5 : courbe de consommation de data après des opérateurs de téléphonie au Cameroun de Janvier à Mai 2020.

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Pour les PME camerounaises, le digital se trouve essentiel à leur redressement et surtout à la croissance de leurs activités. Et dans ce sens, Justine Diffo Tchunkam (2020a) conclut-elle que le développement de l’écosystème numérique, au-delà de la résilience économique même, constitue un support très robuste susceptible de porter la reprise économique, de même que la relance des activités des entreprises dont le principal challenge est la gestion de la période post COVID 19.

Conclusion

Rendu au terme de notre réflexion sur la thématique autour de la contribution du numérique au développement de l’entrepreneuriat-jeunes au Cameroun, il nous est donné de constater que le numérique connu comme la transformation la plus radicale que connaissent les nations depuis la révolution industrielle, est d’une importance duale dans le développement de l’entrepreneuriat des jeunes en Afrique ; et partant, au Cameroun. Dans ce sens, avons-nous indiqué que le numérique comme émulateur de l’innovation, constitue un véritable moteur de la dynamique entrepreneuriale. En effet, comme l’observe Justine Diffo Tchunkam (2020a), le numérique peut booster l’ADN d’entrepreneur qui sommeille en chacun d’entre nous. De plus, il s’avère, comme le montre une étude de Manfred Kouty et Mallaye Douzounet (2020) (p.148), favorable à la migration des jeunes de l’entrepreneuriat de subsistance ou de nécessité vers l’entrepreneuriat de croissance ou d’opportunité (voir figure 4, supra).

Toujours dans l’optique de caractériser l’apport du numérique au développement de l’entrepreneuriat-jeunes, nous avons fait observer que le numérique constituait une solution de résilience économique des jeunes entrepreneurs. D’ailleurs, les récentes difficultés économiques alimentées par la recrudescence de la pandémie de COVID 19 ont donné l’occasion de bien apprécier la place du numérique dans la lutte pour la survie des activités des jeunes entreprises. On a coutume de dire fièrement que « le Cameroun de demain » ; c’est-à-dire, « le Cameroun que nous voulons »21 (MINEPAT, 2020 : p.38) repose sur sa jeunesse. Qu’il apparaît désormais incontestable que le numérique, très tôt perçu comme une niche d’opportunités pour les jeunes, constitue « la terre promise » du développement socio-économique et de l’insertion professionnelle des jeunes au Cameroun. C’est, pour ainsi dire, un véritable moteur de la dynamique entrepreneuriale des jeunes. Et dès lors, doit-on pointer du doigt la nécessité pour les pouvoirs publics d’apporter leur appui à cette dynamique de développement économique ; notamment :

- En favorisant le développement de compétences entrepreneuriales. Notons, dans ce sens, que des efforts louables sont faits dans le contexte camerounais. Ainsi, une grande attention est portée à la formation des jeunes dans les métiers et, de plus en plus, dans les métiers du numérique (IAI, ISTAG, UIT, etc.).

- En conseillant, encadrant et accompagnant les jeunes ; comme c’est le cas à travers les divers programmes d’insertion économique des jeunes camerounais pilotés par le Ministère en charge de la jeunesse via la plateforme numérique de l’Observatoire National de la Jeunesse (ONJ).

- En fournissant aux jeunes entrepreneurs des soutiens financiers et en développant des infrastructures pour l’entrepreneuriat.

21 Référence faite à la vision 2035 qui ambitionne de faire du Cameroun, « un pays émergent, démocratique et uni dans sa diversité ».

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Bibliographie sélective

- A. Ben Youssef (2014), TIC et croissance économique : la diversité des fractures numériques. Enseignements tirés des pays du Sud et de l’Est de la méditerranée, Researchgate, 36 pages. http://www.researchgate.net/publication/237500843

- A. Beitone, A. Cazorla, Chr. Dollo et A-M. Drai (2013), Dictionnaire de science économique, 4e éd., Armand colin, Paris.

- D. Clerc et J-P. Piriou (2011), Lexiques des sciences économiques et sociales, 9e éd. Mise à jour, La Découverte.

F. Brunet (2013), Le numérique, un levier de croissance, Rapport de la commission économie et croissance, adopté en Assemblée Générale, le 19 décembre 2013, CCI, Paris-Ile-de-France, 38 pages. Disponible sur : http://www.etudes.cci-paris-idef.fr

- G. Dejo et M. Nsaikila (2017), « Economie numérique au Cameroun : challenges et perspectives », Nkafu Policy Institute.

- J-Y. Kitantou (2016), Le numérique. Une révolution en marche !, Analyse, CPCP, Coll., 20 pages. www.cpcp.be/etudes-et-prospectives

- J. Schumpeter (1972), Capitalisme, socialisme et démocratie, Paris : Payot.

- J. Schumpeter (2005), Alternatives économiques, Poche 21. http://www.alternatives-economiques.fr/joseph-schumpeter-1883- 1950.fr_art_222_27858.html

- J. Diffo Tchunkam (2020), « Défis de développement du numérique et croissance : les perspectives camerounaises », In Défis du droit des affaires en Afrique, Mélanges I, Harmattan, série Droit, éditions africaines (sous la direction de Didier Loukakou et Boubou Keita), pp.59-71.

- J. Diffo Tchunkam (2020a), « COVID 19 et TIC : le numérique, accélérateur de la société digitale », consultable sur : www.digitalbusiness.africa

- M. Kouty et M. Douzounet (2020), « L’entrepreneuriat à l’ère du numérique en Afrique », In B. Boudarbat et A. Ali Baye (2020), Développement économique et emploi en Afrique francophone, chapitre 6, Presses Universitaires de Montréal (PUM), pp.136-151.

- M. Vitali-Rosati (2014), « Pour une définition du numérique », In Pratique de l’édition numérique (sous la direction de Marcello Vitali-Rosati et Michael E. Sinatra), Presses universitaires de Montréal, Montréal, Chapitre 4, pp.63-75.

- M. Langeneger (2015), « Le numérique : facteur de croissance économique », La vie économique.

- M. Ottou (2018), « Processus d’émergence d’une « jeunesse androïd » et construction d’une nouvelle figure entrepreneuriale à l’ère de l’économie numérique au Cameroun : le téléchargeur de produits culturels à Yaoundé », In Lien social et politiques, n°81, pp.102-120.

MINEPAT (2020), Stratégie Nationale de Développement 2020-2030 (SND30). Pour la transformation structurelle et le développement inclusif, Cameroun Emergent, 1re édition, 214 pages. Disponible sur : www.minepat.gov.cm

- OCDE (2012), Synthèse sur l’entrepreneuriat des jeunes. L’activité entrepreneuriale en Europe, Luxembourg, Office des publications de l’Union Européenne, 25 pages.

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- R.E. Okomen Tsague (2021) « Emergence du numérique et employabilité au Cameroun », Communication, 2ème Colloque du Réseau Scientifique des Femmes universitaires en Gestion et en Economie, FSEG/UYII sous le thème : « Développement durable, bien - être et qualité de vie : regards croisés », 03 et 04 mars 2021, Atelier n°11 : Stratégie des entreprises et pratiques de gestion – TIC, transition numérique et intelligence artificielle – Mondialisation, habitudes de consommation, bien-être et qualité de vie, Université de Yaoundé II.

- R.E. Okomen Tsague (2018), La dématérialisation de l’activité économique amorcée par l’AUDCG. Enjeux économiques et défis juridiques dans l’espace OHADA, EUE, Beau Bassin. www.morebooks.fr.

- UA (2020), Promouvoir l’entrepreneuriat des jeunes en Afrique, Note d’orientation, 30 pages.

- UIT (2014), Les débouchés du numériques : solutions innovantes utilisant les TIC au services de l’emploi des jeunes, Rapport, 85 pages.