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numéro 4 2 0 0 0 Actes du colloque Béton, révolution, architecture des 26 et 27 Novembre 1999

numéro 4 - Infociments · 2020. 4. 29. · 1- Bétons ultra-hautes 20 performances (BUHP) 2- Spécifications, 21 prescriptions architecturales parements,esthétique 3- Traitements

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  • numéro 4 2 0 0 0

    Actes du colloque Béton, révolution, architecture des 26 et 27 Novembre 1999

  • Les carnets de l’École Française du Béton - Photo 1ère de couverture : UNESCO - Paris - Espace de méditation, architecte : Tadao Ando, photo :Philippe Maffre - Photo intérieure de couverture : cœur de la Défense, architecte : J.-P.Viguier, photo : Guillaume Maucuit-Leconte - Directeur de lapublication :Yves Malier - Rédacteur en chef : Jacques Cortade - Crédits photos : Hervé Abadi, Betocib, Bouygues, Cimbéton, Cerib, Lafarge, DenisMoreg, Jean-Marie Monthiers, Patrick Müller - Dessins : Franck Hammoutène - Secrétariat de l’École Française du Béton : Annie Launay CIMBETON - 7, Place de la Défense - 92974 Paris-la-Défense cedex - Téléphone : (+33) 01 55 23 01 07 - Fax : (+33) 01 55 23 01 10

  • En premier lieu, merci auxnombreuses personnes présentes, quiont répondu à la provocation du titrede ce colloque “Bétons : Révolution -Architecture ?”

    En effet le propos du colloque esttourné vers les architectes pour lessolliciter sur les conditions d’appro-priation des nouveaux bétons, dans laconception architecturale et réfléchiravec eux sur les transformations etmutations du processus de créationque ceux-ci peuvent entraîner. Nousinvoquons donc le mot révolution,non pas au sens banalisé de ce qui estsurprenant, mais au sens d’uneremise en cause, d’un changementdans l’appréhension et l’organisationdu monde habité qui ne saurait selimiter à des questions de constructionet de produits. L’esprit ici est dudomaine de la recherche et de la formation.

    Il faut dire quelques mots sur l’ori-gine de ce colloque. Depuis trois ans,notre école, dans le cadre du pro-gramme de recherche BHP 2000 adéveloppé en coopération avec l’ÉcoleFrançaise du Béton, un enseignement“d’architecture et structure” portantsur les BHP, s’adressant à des étu-diants en fin du cursus. Très vite ceux-ci ont pris conscience des nouvellespossibilités de ces BHP qui, pour lesarchitectes, pourraient - au delà desconditions techniques de production -devenir des éléments moteurs inhérentsau processus de conception, voire demodélisation. On est ainsi très vitepassé du matériau industriel perfor-mant à l’objet didactique avec pourobjectif de faire travailler autrementces futurs architectes.

    Il est rapidement ressorti que l’ex-ploitation et la mise en œuvre de cesBHP allaient permettre de nouveauxvolumes, de nouveaux défis à la statiqueet à l’équilibre, donc à d’autres formeset ordonnancements. Qu’il s’agissed’équipements ou de logement, l’en-semble de ces nouvelles performances,

    y compris en matière de coût, d’usageet de maintenance, est appelé à faireévoluer les prescriptions de l’archi-tecte. Il en va de même pour l’évolu-tion des enjeux fondamentauxarchitecturaux et urbains : enjeu denotre environnement bâti et de l’amé-nagement de l’espace, enjeu de la villeet de ses échelles, enjeu d’ambiance,d’ergonomie et d’image du bâti,enjeux économiques. A cela s’ajoutentd’autres conditions de durabilité desbâtiments, ce qui interpelle l’archi-tecte aussi dans sa responsabilitésociale.

    Ainsi, l’interaction entre le conceptet sa matérialisation BHP impose auxresponsables de la formation desarchitectes d’intégrer l’approche de cenouveau matériau en terme d’expéri-mentation, de recherche et d’enseigne-ment. Il nous est alors apparu commeune évidence que nous avions - l’ÉcoleFrançaise du Béton, ses grands parte-naires, et l’École d’Architecture deParis-Villemin - une responsabilité entermes d’information et de formationvis à vis des architectes. Nous devionsdonc dans une parfaite mixité de cul-ture et d’intéraction permanentearchitecture/ technique développer desactions de formation continue sur cesquestions. Ce colloque est en quelquesorte la séance inaugurale d’un cycled’actions de formation continue en lamatière.

    Bien évidemment et pour répondreà quelques inquiétudes, il ne s’agit pasde donner une tribune à tel ou telmatériau ou de primer telle ou tellearchitecture. Il s’agit, dans la limite detemps impartie de donner la parole,dans un esprit de recherche, à des spé-cialistes et auteurs d’architecture enbéton, sachant que d’autres interve-nants seront invités à participer auxfutures sessions de formation conti-nue. En bref, cohérence entre concep-tion et matériau, nouvelles façons deconcevoir recherche et prospective,utopie technique, en un mot révolu-tion est la toile de fond de ces débats.�

    Editorial (Sylvie Clavel, Directrice de l’École d’Architecture Paris-Villemin*)

    S o m m a i r eEditorial 1/2

    Conférences :1- Un matériau 3/5révolutionnaire

    2- Bétons hautes 6/7performances : formulation

    3- Bétons : la matière 8/9des parements4- Un matériau 10/11

    synonyme de liberté ?5- Béton, 12/13

    matière de l’espace6- Bétons de fibres 14/15

    métalliques 7- Béton :masse et légèreté, 16/17

    lumière et contraste8- Plasticité, finesse, 18

    élancement9- Les bétons à 19

    ultra-hautes performances

    Ateliers :

    1- Bétons ultra-hautes 20performances (BUHP)

    2- Spécifications, 21prescriptions architecturales

    parements,esthétique3- Traitements des surfaces 21

    et des matières4- Bétons hautes 22

    performances : béton fraiscompositions, rhéologie

    5- Champs d’applications 23architecturales - Travauxd’étudiants de 4ème année

    Tables rondes :

    Bétons : Révolutions - 24/25architecture ?

    La matière de tous 26/27les possibles ?

    Conclusion 28

    Le comité d’orientation 29

    Comment adhérer à l’EFB 29

    1

    * A compter du 01/12/99, Directrice de l’École d’Architecture de Versailles

  • 2

    En introduction à ce colloque il est naturel de présenter l’ÉcoleFrançaise du Béton en particulierpour celles et ceux qui ne la connaî-traient pas encore. L’objectif de cetteécole est de favoriser l’information sur le béton et ses progrès auprès detous les acteurs de la construction.

    A la différence de certaines indus-tries comme l’automobile où il existeun nombre limité de constructeurs etd’acteurs, dans le monde de laconstruction se trouve une foule d’ac-teurs qui ont des fonctions différentes.On trouve en effet les concepteurs, lesentreprises, les maîtres d’ouvrages. Cesacteurs sont très nombreux, divers,dispersés et de tailles extrêmementvariées. Pour leur faire passer lesinformations, il est nécessaire d’avoirdes catalyseurs capables d’activer cettetransmission. Née de ce constat et desnécessités qui en découlent, l’ÉcoleFrançaise du Béton joue ce rôle decatalyseur.

    Comme le souligne son président Y. Malier, il s’agit d’une école sansmurs, très ouverte, qui apporte ses ser-vices aux établissements de formation existants. Sa création est récente, et après unephase de montée en puissance, elleatteint son régime de croisière. Elle estprésidée par Y. Malier, qui est à l’ori-gine de sa création. Elle fonctionneavec un comité d’orientation quiregroupe une quarantaine de per-sonnes représentant l’ensemble desprofessions de la construction : lesconcepteurs, les maîtres d’ouvrages,les maîtres d’œuvre, les établissementsd’enseignement et aussi l’administration.

    L’École Française du Béton assurebien évidement des missions de forma-tion et d’information sous forme deconférences, de colloques, de docu-mentations. L’édition d’un bulletinpériodique de l’école permet d’infor-mer toutes les personnes interéssées sur

    les progrès du matériau, sur les mani-festations organisées par l’ÉcoleFrançaise du Béton. Enfin, elle inter-vient aussi en matière de labelisationd’ouvrages ou de documents de façonà fournir aux différents acteurs de lafilière construction des outils de mise àjour des connaissances.

    En effet, le béton est un matériauqui progresse sans arrêt comme il sera possible de s’en rendre compte tout aulong de ce colloque.

    La logistique de l’école est assuréepar CIMBÉTON, auprès de qui sontdisponibles de la documentation ettoutes les informations concernant lesactions de formation menées par l’École Française du Béton. �

    L’E.F.B. (Michael Téménidès, Directeur Général Cimbéton)

    “une école sans murs,très ouverte qui apporte

    ses services aux établissements de formation existants ”

  • Conférence 1

    Un matériau révolutionnaire ( Yves Malier, Président de l’EFB)

    Le béton est un matériau

    en pleine révolution. Si l'on fait

    un peu d'histoire, de 1900

    à 1980 le béton a été un maté-

    riau dont les propriétés ont été

    essentiellement "figées", tant du

    point de vue de la couleur,

    de la rugosité de surface,

    de la porosité interne que des

    propriétés mécaniques telles

    la résistance à la compression,

    le module d'élasticité,

    la (faible) résistance en traction,

    la relativement modeste

    aptitude à la non-fissuration

    ou encore l'ouvrabilité.

    Toutes ces propriétés étaient

    quasiment identiques et,

    à quelques variations assez

    minimes près, le même béton

    était toujours utilisé.

    L'évolution des bétons à partirde la décennie 80

    RÉDUIRE LA PRÉSENCE DE L'EAU

    Depuis le début des années 1980, unegrande pluralité de bétons est à notre dis-position avec aujourd'hui des propriétéstout à fait "gouvernables". Cette évolutions'est développée à partir des travauxeffectués sur le rôle de l'eau dans lebéton. Globalement, l'eau est utiliséepour deux types d'actions, l'hydratationet l'ouvrabilité du béton. L'hydratation vadonner au béton ses propriétés méca-niques. En fait très peu d'eau est néces-saire pour hydrater le ciment contenudans le béton ; cependant une impor-tante part complémentaire d'eau est ajou-tée afin d'obtenir une bonne ouvrabilitédu béton donc une bonne mise en placedans les coffrages. Cette eau complémen-taire, que l'on a longtemps cru nécessaireà la mise en œuvre, reste à l'état d'eaulibre dans le béton durci et son lentdépart au contact du milieu extérieurplus sec, va générer beaucoup de microdéfauts tels les microfissurations, micro-ruptures, déformations différées deretrait et de fluage, etc.L'approche globale, avec les bétonsmodernes va donc consister à réduirecette eau notamment en obtenant la flui-dité du mélange, à l'état frais, par d'autresvoies.

    MAÎTRISER LA FLOCULATION

    Comme toutes les poudres mélangéesdans un liquide, les grains de ciment onttendance à s'agglomérer entre eux du fait

    de la polarité de ce liquide. Les grains deciment ont un diamètre moyen de 10 à50 microns. Dans la pratique, lors de lamise en œuvre dans le béton, ils ne res-tent pas à l'état de grains isolés mais seregroupent pour constituer des agglomé-rats (les flocs) bien plus gros. Ces flocspiègent une partie de l'eau destinée à lafluidité. La présence des flocs réduitdonc l'ouvrabilité, ce qui a pour consé-quence un ajout d'eau dont les nuisancesen terme de qualité future du béton vien-nent d'être évoquées.Des produits "défloculants" (les super-plastifiants) mis au point à partir desannées 1980 et en très constante amélio-ration aujourd'hui permettent de casserles flocs et d'obtenir une meilleure répar-tition des grains de ciment. Grâce à cela,les bétons présentent une meilleure rhéo-logie avec pourtant, moins d'eau. Parailleurs, les grains étant mieux répartis larésistance est plus homogène et amélio-rée (cf. photos 1 et 2).

    OPTIMISER LE MÉLANGE GRANU-LAIRE

    Une des évolutions des bétons récentsest donc liée à la réduction de l'eau ;l'autre voie de progrès est en relationavec les théories modernes de la phy-sique (P.-G. de Gennes - E. Guyon) surl'optimisation des empilements granu-laires. En simplifiant beaucoup, on peutdire que du point de vue de la compacitéet de la résistance, les meilleurs empile-ments granulaires sont ceux qui fontappel à quatre échelles de grains. De cefait, le béton classique est relativementcondamné, car il ne fait appel qu'à trois

    Panier d'oursins ou roche homogène ? that's the question !Deux bétons de chantier faits par les mêmes ouvriers, le même jour,

    l'un par formulation ordinaire (B30) l'autre par emploi d'un défloculant (B60)Chantier de Joigny, réalisation Novembre 1988, grossissement x 5000.

    Photo 1 : B30 Photo 2 : B60

    3

  • Conférence 1

    échelles de grains : l'échelle centimé-trique avec les cailloux, l'échelle millimé-trique avec les sables, l'échelle dequelques dizaines de microns avec lesciments. Les théories relatives aux empi-lements de grains optimisés, montrentque la quatrième échelle de grains qu'ilfaut introduire est de l'ordre de 0,1 à 0,5micron. Ainsi avant même l'hydratation,qui reste, bien sûr, essentielle, le mélangegranulaire obtenu sera parfaitement opti-misé. Dans la pratique, diverses "ultra-fines", et notamment les fumées de silice,ont cette propriété et leur emploiconduit donc à une considérable amélio-ration des performances mécaniques. Parailleurs, ces microbilles ont aussi poureffet de lubrifier les grains plus gros quesont le ciment, le sable, les graviers etdonc d'avoir ainsi une fluidité et uneouvrabilité naturelles tout en réduisantencore l'eau de malaxage.

    LE BÉTON, UN MATÉRIAU AUXPROPRIÉTÉS GOUVERNABLES ET DONC PRESCRIPTIBLES

    Ces deux voies, défloculer et optimiser lemélange granulaire, sont à la base detoutes les améliorations des bétonscontemporains. Ainsi, par la composi-tion, on peut obtenir des bétons qui ontdes propriétés tout à fait gouvernables.Cela signifie que l'on peut désormais agirsur quatre familles de propriétésconstructives :

    1 - sur la consistance et l'ouvrabilitédu béton frais. Il est possible d'obtenirdes bétons très fluides (cas du bétonautoplaçant) ou au contraire avoir desbétons de très hautes performances trèsfermes (cas des bétons extrudés),

    2 - sur les propriétés mécaniques dubéton, qu'il s'agisse de la résistance à lacompression,de la résistance au très jeuneâge, du fluage, de la résistance en traction,de l'aptitude à résister à la fissuration,etc.

    3 - sur la durabilité liée à l'évolutioninterne du matériau ou de la durabilitéliée aux agressions externes dues à l'environnement,

    4 - sur les aspects esthétiques, auniveau de la micro rugosité de surface, dela couleur, de l'aptitude au moulage demicro-formes, de l'aptitude au polissage,au lavage, etc.

    Il existe donc une foule de propriétésconstructives qui sont maintenant pro-grammables, avec cette notion de plura-lité des bétons. Cela a des conséquencessur la façon d'aborder le projet en seposant d'abord l'ensemble des problèmesde conception, de méthodes de construc-tion, de maintenance voire d'adaptabilitéfonctionnelle future de l'ouvrage pour endéduire les propriétés que l'on voudraobtenir.

    Ainsi le choix du béton le plus adapté estvraiment au cœur du projet et à traversles possibilités de ce choix le rôle dumaître d'œuvre est considérablementrenforcé, notamment dès la prescription.

    Les bétons modernes àl’écoute de la science, ou duNobel de physique au Nobeld'économie.

    La valorisation de ces nouveaux bétonsappelle une analyse macro-économiquedu projet. Sans doute, doit-on tirer lesconséquences de certains aspects desthéories du Prix Nobel d'économie,Maurice Allais. Ainsi on peut dire que lemoindre coût d'une opération n'estjamais la somme des moindres coûts dechacun des constituants de cette opéra-

    tion. Appliqué à la construction en bétoncela signifie que la construction la moinscoûteuse n'est jamais celle qui est réali-sée avec le béton le moins coûteux.

    Cette idée va totalement à l'encontre dupoint de vue le plus répandu dans lemilieu du BTP. Il s'agit donc bien là d'unequestion de fond, voire d'un changementculturel. Il en résulte que la recherche dela plus juste prescription implique pourl'architecte une approche système duprojet qui analyse toutes les phases del'acte de construire en s'attachant à mul-tiplier les interactivités entre ces phases.

    Corollairement, il est donc intéressantd'évoquer les évolutions au niveau decertaines propriétés constructives évo-quées précédemment et ce qu'ellesimpliquent car cela a ou aura des consé-quences sur l'économie globale des pro-jets. En ce qui concerne la consistance etl'ouvrabilité on peut penser que les inno-vations vont porter sur les process deconstruction, les méthodes et la planifi-cation. On peut penser par exemple àdes pompages sur de très longues dis-tances ou à de très hautes altitudes, à desbétons autoplaçants ou autonivelants, àdes coulages sous pression de piècesmoulées, à des extrusions sur longue dis-tance, etc.

    Bref, beaucoup de nouveaux processsont permis grâce à cette possibilité de"programmer" les bétons. Pour les nou-velles méthodes, il faut citer la suppres-sion de la vibration des bétons. Ce quipermet d'éliminer sur le chantier unesource de bruit et d'insécurité dont lesretombées sont positives pour lesouvriers et pour le voisinage.A la fois au niveau des méthodes et de laplanification, les nouvelles possibilitésd'agir sur le béton frais ou jeune autori-sent des décoffrages très rapides car lesrésistances mécaniques nécessaires sontmaintenant obtenues en quelquesheures.

    Il en résulte des bouleversements dans laplanification, l'ordonnancement de chan-tiers, dans la gestion du matériel et parconséquent dans les investissements del'entreprise et in fine dans les prix derevient de la construction.

    4

    Ainsi,par la composition,

    on peut obtenir des bétonsqui ont des propriétés

    tout à fait gouvernables.

  • Conférence 1

    De hautes performances méca-niques au service de nouveauxdesigns

    Au sujet des innovations sur les proprié-tés mécaniques, il est évident qu'il y auradans les années à venir un développe-ment des structures en arc, exploitant leshautes résistances en compression et,plus encore, des structures triangulées enbéton seul ou en construction mixteacier-béton … si cette dernière parvient àse rénover et à s'écarter des seulsconcepts qui ont fait son succès à l'ori-gine (1960).

    On peut ainsi obtenir des structures enbéton similaires à des structures métal-liques, sans en avoir les inconvénients. Ilexiste tout un champ de formes nou-velles ou anciennes qui vont être misesen valeur par les nouvelles propriétésmécaniques du matériau. Les portéesvont, elles aussi, évoluer. Ainsi, en préfa-brication, on sait que les éléments écono-miques courants à inertie constanteprésentent des perspectives modestestant au niveau des portées que de laconception architecturale.L'emploi du béton plus performantrepousse les seuils habituels et de nou-veaux marchés s'offrent à ces produits.Dans les bâtiments industriels, parexemple, des solutions allégées améliore-ront la compétitivité des structures enbéton face à la construction métallique.Cela est également vrai vis à vis du boislamellé-collé.

    Ces nouveaux bétons induisent de nou-velles technologies. Ainsi, par exemple,dans la précontrainte classique, l'enro-bage des câbles conduit à des dimensionstransversales importantes de béton. Ilrésulte de ces fortes épaisseurs que lebéton ne peut généralement pas être sol-licité au-delà de 30 à 40 Mpa. Avec la précontrainte extérieure, il est possiblede réduire drastiquement l'épaisseur deces mêmes éléments en béton et de solli-citer ainsi le matériau à de plus hautesrésistances. Il en résulte bien sûr, uneréduction du poids propre de l'ouvrageparticulièrement favorable à l'économie.Les premiers ouvrages en précontrainteextérieure datent de 1982, les perspec-

    tives sont très grandes avec un potentield'allégement important des structures etdes formes qu'il appartient au maîtred'œuvre, à l'architecte d'utiliser et devaloriser. Dans un autre domaine, en pré-fabrication, les propriétés plus homo-gènes des bétons de peau donnentd'excellentes qualités mécaniques de sur-face et on peut penser pour l'avenir à destechniques d'assemblage par boulon-nage, par collage, de nature à bouleverserles techniques de montage in situ des élé-ments préfabriqués en simplifiant consi-dérablement techniques et délais demontage.La très grande fluidité de ces bétons et lefait qu'il n'est plus utile de les vibrer per-met la mise en place d'inserts dans lespièces préfabriquées avec une précisionmicrométrique

    .

    Enfin ces nouveaux bétons permettentde répondre aux évolutions de l'ap-proche de la maintenance. On se dirigevers une prévision et une prise encompte de la durée de vie des ouvrages,ou de la durée de vie de telle ou tellepièce d'un ouvrage. Il en va de mêmepour la prise en compte de l'évolutionpossible des fonctions des ouvrages etdonc de leur adaptabilité future.

    Architectes,maîtres d’œuvre ! …vous avez dit chefs d’orchestre !

    Pour conclure, la pluralité des bétons, àcondition de bien l'utiliser, est un formi-dable outil de pouvoir qui conforte lerôle de chef d'orchestre du maîtred'œuvre. Il lui donne le moyen de pro-poser au maître d'ouvrage un projetcohérent économiquement en termed'approche globale, au sens de la macro-économie, c'est à dire d'approche inté-grant la conception, la construction, lamaintenance et l'adaptabilité future del'ouvrage.

    Bien sûr, comme tous les outils de pou-voir, l'utilisation de celui-ci implique desdevoirs. Dans ce cas, il m'apparaît trèsclairement que le devoir essentiel, impé-ratif, est de se former à la connaissancede ces nouveaux matériaux. J'observe,pour être souvent appelé à l'étranger afinde contribuer à la définition du pro-gramme de formation des architectes quecertains pays sont résolument engagésdans cette voie.

    J'observe aussi, avec tristesse, que, actuel-lement, sur ce sujet, la situation françaisen'est guère exemplaire et n'est guèretournée vers l'avenir. C'est pour moi uneraison de plus pour souligner la qualitéde l'effort fait - dans l'indifférence géné-rale des tutelles semble-t-il - par certainsprofesseurs et directeurs d'écoles d'archi-tecture et par certains architectes.

    C'est aussi pour moi l'occasion de direcombien à l'École Française du Béton,nous croyons à l'intérêt d'actions commecelles qui nous rassemblent, architecteset ingénieurs, durant ces deux jours defructueux travail. �

    Bibliographie :

    - E.Guyon (préface P.G.de Gennes) -

    Granites et fumées, Ed. 0. Jacob, 1997 ;

    - M. Allais - Traité d’économie, Ed. ce. juglard, 1994 ;

    - Y.Malier - les bétons à hautes performances,

    Ed.Presses ENPC, 1992.

    5

    On se dirige vers une prévision

    et une prise en compte de la durée de vie

    des ouvrages

  • Conférence 2

    Cet exposé a pour

    objet d'aborder les principes

    de formulation des BHP

    en se limitant volontairement

    aux caractéristiques de

    résistance en compression

    et de comportement

    à l’état frais.

    L'observation de la microstructure d'unematrice de ciment durcie révèle qu'elleest relativement poreuse, comme lemontre une photo au microscope élec-tronique à balayage d'un gel de silicate decalcium hydraté (fig. 1). La porosité totalepeut atteindre 20 % à 40 %. Or, en obser-vant la résistance relative de différentsmatériaux en fonction de leur porosité,on obtient une courbe maîtresse de typehyperbolique,montrant que beaucoup dematériaux répondent au même principe :la diminution de la porosité conduit àune augmentation de la résistance, etcette augmentation s’accroît plus rapide-ment vers les faibles porosités.

    En considérant le béton comme un maté-riau composite à 2 phases (la matricecimentaire et les granulats), la recherchedes hautes résistances conduit logique-ment à utiliser des granulats et unematrice de hautes résistances.La courbe montrant la distributionporeuse de la matrice cimentaire (fig. 3),courbe qui ne comprend pas la porositédes hydrates, laquelle est de l’ordre de 2nanomètres, fait ressortir deux classesdistinctes, que l’on peut décrire demanière simplifiée. A l'échelle de 20nanomètres (1 nanomètre = 10-6 milli-mètre) on constate une première catégo-rie de porosité, qui dépend peu de lagamme de résistance du matériau etsemble plus difficile à faire varier. Dansun domaine allant de 0,1 micron jusqu'aumillimètre, la porosité est principalementdue à la présence de l’eau non liée chimi-quement (qui peut donc s’évaporer), despores aux interfaces entre les granulats etla pâte de ciment, des bulles d'air, desmicrofissures. C’est sur cette gamme depores que l’on peut agir pour consoliderla matrice cimentaire et atteindre des

    résistances plus élevées.En ce qui concerne les granulats, lesexpériences montrent qu’à forte concen-tration granulaire (en pratique supérieureà 60 % en volume, ce qui représente auxalentours de 1800 kg de granulats par m3

    de béton) la résistance en compressionaugmente avec cette concentration. Deplus, par l’utilisation de petits granulatson améliore encore la résistance en com-pression. Sur ce dernier point, deuxmécanismes peuvent être avancés : lamatrice subit des concentrations decontraintes au voisinage des granulats eten particulier des gros, et cette concen-tration est moins grande en présence depetits grains, ou la résistance de lamatrice est augmentée par le frettageexercé par les granulats, ce frettage étantplus marqué en présence de petits grains.De ces observations, on peut conclureque pour augmenter la résistance dubéton, il faut diminuer la porosité de lamatrice et optimiser le squelette solide(granularité : distribution de taille desgrains, forme des grains, résistancepropre des grains,…).

    COMMENT DIMINUER LA PORO-SITÉ DE LA MATRICE

    Déjà en 1892, Ferret établissait une loiqui proposait d'inclure dans la pâte deciment, le maximum de ciment pour unminimum d'eau. L'analyse de la résistanceen compression d'une pâte de cimentdurcie en fonction de la proportion deciment fait apparaître une courbe nonlinéaire (fig. 4).Avec un ciment modernede résistance assez élevée (les résistancesmesurées selon la norme peuvent dépas-ser 70 MPa), il est possible d'obtenir despâtes de ciment dont les résistancesdépassent les 100 MPa. La difficulté estcependant de pouvoir réaliser dans lapratique ces mélanges qui sont alors trèssecs. Pour le béton, on suit l'évolution desa résistance en fonction du rapport E/C(rapport de la masse d'eau à celle deciment pour un m3 de béton) (fig. 5).Ainsi, un rapport E/C inférieur à 0,4 cor-respond au domaine des BHP (la résis-tance dépasse alors 50 MPa).Cependant, dans la pratique, plus le rap-port E/C diminue, plus le mélangedevient difficile à réaliser car il n'y a plusassez d'eau pour assurer la fluidité.

    Bétons hautes performances : formulation( Robert Le Roy, Docteur ENPC)

    6

    6040

    Porosité (%)

    Rés

    ista

    nce

    rela

    tive

    200

    20

    40

    60

    80

    100

    Stainless Steet Sintered AluminaZirconia Plaster of ParisIron

    Rayon de porosité

    dV/d

    r

    1 nanomètre 1/10e µm 10 µm 1mm

    Microfissures - bulles d'air - interfaces

    1er pic à 20 nm

    figure 2

    00

    50

    0,2 0,4 0,6 0,8

    Mélange ciment - eau

    Rés

    ista

    nce

    en c

    om

    prés

    sio

    n(P

    Ma)

    Volume de ciment / volume total

    100150200250300350400450500

    figure 4 : La loi de Féret (1892)

    figure 3 : Distribution classique dela porosité du béton ordinaire

    figure 1

  • Conférence 2

    Une quantité importante d'air est alorsprise dans le mélange,ce qui crée de nou-veau de la porosité et fait chuter la résis-tance (fig. 5). Il faut fluidifier ce mélangepour ne pas entraîner d'air. La solutionconsiste alors à défloculer. En solution, àla surface des grains de ciment sont loca-lisés des charges électriques. Les ions decharges différentes font que les grainss'attirent et forment des "petits paquets"appelés des flocs. Au sein d’un floc lesgrains sont solidaires les uns des autres etse déplacent ensemble.

    Quand il y a eu défloculation ce sont lesgrains qui se déplacent individuellementles uns par rapport aux autres. Il enrésulte que sans défloculation le volumeapparent de poudre est plus grand quelorsqu'il y a eu défloculation, puisque lesflocs entraînent avec eux une certainequantité d’eau (fig. 6).Si le volume apparent diminue la visco-sité diminue (fig. 7) et donc la déflocula-tion permet de fluidifier. Les produits quipermettent de défloculer sont connussous le nom de superplastifiants. Defaçon schématique le mécanisme princi-pal de défloculation fonctionne de lafaçon suivante : les copolymères dusuperplastifiant qui ont une affinité avecle ciment par attirance électrostatique,viennent se plaquer en couche très fines(mécanisme d’adsorption) autour desgrains de ciment. Les couches qui recou-vrent les grains ne peuvent pas s'interpé-nétrer et de ce fait les grains ne peuventplus floculer (à ce mécanisme appelérépulsion stérique peut s’ajouter celui derépulsion électrostatique).En sachant ainsi fluidifïer et réduire laquantité d’eau, il est alors possible defaire une pâte de ciment fluide de hauteperformance.

    L’OPTIMISATION DE L’EMPILE-MENT GRANULAIRE

    Les effets granulaires peuvent êtreimportants pour les BHP ; on peut eneffet obtenir des variations de près de20% de la résistance en ne modifiant quela courbe granulométrique.L’optimisation granulaire est donc uneétape importante de la formulation. Pourchaque classe granulaire, il existe desmélanges optimums de grains qui per-mettent d'obtenir la porosité minimumdu système.La recherche de l’optimum peut s’effec-tuer théoriquement, par des modèlesplus ou moins sophistiqués, ou expéri-mentalement. En se plaçant à la propor-tion optimale de granulat et de sable, eten conservant un même rapport E/C, ilest possible de réduire le volume de lamatrice de ciment, tout en conservant lafluidité désirée. Outre un léger gain derésistance, il en résulte aussi une écono-mie, ainsi qu’une diminution du retrait et du fluage.

    En fait, ce concept de compacité desmélanges granulaires, utilisé depuis long-temps pour toutes les catégories debéton, peut s’appliquer aussi auxpoudres. Ainsi comme le sable entre lesgravillons, des ultrafïnes peuvent jouer lerôle de petits éléments entre les grains deciment, conduisant ainsi à une possiblediminution de l’eau dans le mélange touten préservant les propriétés de mise enœuvre. Ces ultrafines existent ; la plus uti-lisée est la fumée de silice, sous produitde l’électrométallurgie. Il s'agit de petitessphères principalement constituées dedioxyde de silicium (SiO2), 10 à 100 foisplus petites que les grains de ciment.Utilisé avec un superplastifiant, pourassurer la défloculation, on constate qu’ilexiste également des proportions deciment et de fumée de silice optimalesconduisant à une fluidité maximale. Legain obtenu sur le dosage en eau permetainsi d’augmenter encore la résistance(loi de Féret).Finalement, on s’aperçoit que l’optimisa-tion granulaire s’effectue sur 4 niveauxde tailles de grains, dont l’étendue va du10ème de micron au centimètre.

    LA RÉACTION POUZZOLANIQUE

    En plus de la contribution à la fluidité, lesmicrosilices sont chimiquement actives.A l’instar de la réaction du silicate de cal-cium avec l’eau pour créer les hydrates,elle se combine avec la chaux qui s’estlibérée pendant l’hydratation du ciment,pour former à son tour un silicate de cal-cium hydraté résistant. La microstructurea été ainsi renforcée.

    Le respect des règles énoncées ici permetde réaliser des bétons de plus de 100 MPade résistance en compression. Plusieursouvrages d’art ont été construits en Francedès les années 80-90 avec cette gamme de bétons. Poussées à l’extrême, cesméthodes permettent de repousserencore les limites et d’obtenir des maté-riaux de près de 200 MPa de résistance encompression, avec des rapports E/Cproches de 0,2.On quitte alors le domaine des hautes performances pour entrer dans celui desbétons “ultra-performants”.�

    7

    0

    0,5

    0,4 0,6 0,8 1

    Rés

    ista

    nce

    e/c

    B0BHP

    0,2

    1

    1,5

    2

    V1 V1 > V2 V2

    Vis

    cosi

    Volume de poudre

    figure 5 : Résistance du béton parrapport à celle du ciment

    figure 6 : La floculation augmente levolume apparent des particules fines.Défloculation obtenue par les super-plastifiants.

    figure 7 : Viscosité en fonction duvolume de poudre

  • Conférence 3

    Le béton

    architectonique n’est pas

    une invention nouvelle.

    En philosophie est appelé

    architectonique un

    raisonnement de synthèse.

    Le transfert du terme

    à l’architecture ainsi qu’à

    d’autres domaines est aisé.

    Un béton est dit architectonique

    (ou architectural ce qui

    est synonyme) lorsqu’il est

    un élément de synthèse

    entre la technique et

    l’esthétique. Cette nécessaire

    harmonie qui doit exister

    entre les caractéristiques

    techniques, les caractéristiques

    architecturales et les

    caractéristiques de parement

    d’un béton sont primordiales

    pour que le béton soit,

    par sa qualité, un matériau

    digne de ce nom.

    ACQUÉRIR CONNAISSANCE ETEXPÉRIENCE

    La technique du béton est du domaine de la connaissance. En effet, il fautacquérir de l’expérience, gérer ungrand nombre de paramètres, maîtriserla chimie et la physique du matériau,procéder à un assemblage complexe decomposants, etc. L’aspect sensible et lasignification du béton, c’est à dire sonparement est du domaine de la culture.Cela est très lié à la sensibilité des inter-venants, par exemple les bétons brutsde Le Corbusier n’ont rien à voir avecceux de Tadao Ando. L’un n’est passupérieur à l’autre, tout simplement cesdeux architectes sont d’époques et decultures différentes et leurs sensibilitéssont différentes. il ne serait pas sérieuxd’aborder la notion de parement bétonsans mettre l’accent sur cette relationtrès forte qui existe entre l’expressiondu béton et la sensibilité de son auteur.Il existe une poétique du béton quis’exprime par ses formes, ses couleurset ses textures. Le terme “béton matièreà réflexion” illustre l’essence même dumatériau béton qui nécessite de s’ins-crire dans une rigueur technique touten donnant une large place à l’expres-sion sensible et par conséquent à lapoésie.

    LE PAREMENT EXPRESSION PRO-FONDE DU BÉTON

    Il n’existe pas de système pour faire desparements de béton. Cela ne peut seréduire à un catalogue comme parexemple pour le papier peint. La notion

    d’un béton décoratif, qui n’existeraitque pour sa beauté est à banir. Qualitésesthétiques et performances techniquesdu béton vont le plus souvent de paire.Le parement ne constitue en aucunemanière une décoration du béton. Il estbien au contraire l’expression profondedu béton. Le parement n’est pasquelque chose de rajouté sur le béton ilexprime la réalité, la vérité du matériau.Il est important lorsqu’on utilise dubéton de tout mettre en œuvre pourque la vérité de ce matériau soit déjà sapremière caractéristique au niveau de lacommunication.

    LE PAREMENT BRUT VÉRITÉ DUMATÉRIAU

    Le parement brut est le premier degré decette vérité du matériau. Souvent décriécet aspect brut de décoffrage est perçude façon négative par le grand public,quile considère comme une prestation basde gamme. Pourtant de nombreux archi-tectes s’intéressent toujours à cetteforme de vérité et de simplicité de l’ex-pression du béton. Les progrès en courspermettent d’obtenir une bonne qualitéde ces parements. Il s’agit ici de l’esthé-tique du grain le plus fin de la composi-tion, du grain de ciment, qui constitue lacouche de contact avec l’extérieur. Si deshyperfines sont présentes dans la com-position du béton, c’est leur grain qui est présent en priorité. Il en résulte lacréation de véritables “bétons delumière”. Homogènes et d’une belle cou-leur naturelle, ils se mettent à vibrer avecla lumière.

    Bétons : la matière des parements ( Jean-Pierre Aury, Plasticien)

    8

  • Conférence 3

    TRAITEMENTS MÉCANIQUES ETCHIMIQUES

    Pour tous les autres aspects, les pare-ments sont travaillés. Ils s’obtiennent enenlevant de la matière. Ceci peut se fairede façon mécanique ou de façon chi-mique. La voie mécanique (bouchardage,grésage, polissage...) se rattache à la tradi-tion du travail de la pierre.

    La voie chimique (lavage, acidage,désacti-vation...) est liée à des procédés plusrécents. Chacune de ces démarches apour but de faire apparaître le squelettedu béton. Dans tous les cas, il est fonda-mental de travailler la composition miné-rale du béton, non seulement au niveaude la granularité mais aussi au niveau dela qualité esthétique de tel ou tel compo-sant de la formulation.

    Il existe deux grandes familles, les pare-ments sélectifs et les parements inté-graux. Les premiers concernent lesparements pour lesquels le traitement aenlevé une partie de la composition

    superficielle. Il s’agit par exemple desbétons désactivés. Les composants nesont pas altérés, ils sont simplement déga-gés. Pour les seconds, le traitement éclatela couche fine superficielle, et crée desimpacts sur les granulats dégagés. Il en estainsi dans le cas d’un grenaillage ou d’ungrésage, pour un polissage les granulatssont taillés.

    Par essence, le béton appartient audomaine minéral. Le ciment est un miné-ral, il est issu de la terre, a subi un traite-ment et redevient roche sous une autreforme.Les composants essentiels du bétonsont minéraux. Cette affinité avec lemonde minéral renvoie à la nature, auxroches, à la matière, à la notion de texture.A l’état naturel les roches offrent des mul-titudes de parements et de textures.A travers une série de diapositive J.-P.Auryillustre l’aspect minéral du béton, le lienavec les architectures de pierres et pré-sente différents aspects de la poétiquedu béton exprimée à travers le jeu desformes, des couleurs et des textures. �

    Si des hyperfines sont présentes dans

    la composition du béton,c’est leur grain qui

    est présent en priorité.Il en résulte la création

    de véritables “bétons de lumière”

    9

  • Conférence 4

    Le béton accompagne

    l'histoire de l'architecture

    dans ce siècle.

    Il a conduit, voire obligé,

    les architectes à fonctionner

    différemment. Le béton armé

    offrait en effet cette qualité

    extraordinaire d'être le premier

    matériau à permettre de

    transformer le dessin, dans

    toutes ses acceptions, en projet :

    il n'y avait plus de limite. Et en

    corollaire ce danger gigantesque

    que toute volonté devienne

    constructible. L'art de construire,

    fondement de l'architecture, fra-

    gilisé au point de s'évanouir

    dans le formalisme ou l'igno-

    rance. Parler aujourd'hui de

    techniques et de bétons qui per-

    mettent de transformer tout fruit

    de l'imagination en figure

    concrète et matérialisée, c'est

    aussi dire combien l'architecture

    est indispensable pour donner

    du sens, et inscrire dans l'histoire

    et la culture l'utilisation des

    techniques et des matériaux.

    Parce que matériau d'une libertéextrême, mais d'une facilité trompeuse,le béton s'est ainsi trouvé écartelé entreles dimensions opposées de l'inventionet de la prospective, de la contrainte etde la coercition.

    Avec l 'émergence du béton unelignée d'inventeurs et de créateursrénovent l'art de bâtir et renouvèlentl'architecture.

    Avec ces mêmes qualités qui ont présidé à ce mouvement de progrès,le béton outil de l'urbanisation brutale

    et de l'uniformisation acculturée estdevenu synonyme d'indestructibilitéautant que de contrainte et inhumanité.

    Présentation de la faculté dessciences et techniques de Tours

    DEUX ÉCHELLES DE LECTURE

    Franck Hammoutène présente deux réali-sations qui témoignent de son travail avecle béton. La Faculté des sciences et destechniques à Tours, livrée en 1996, s'élève

    dans un parc. Le bâtiment adossé à unespace boisé préservé répond à desrègles strictes de gabarit. Deux échellesse lisent, l'une basse répond auxconstructions voisines des années 60 àR+2, l'autre haute est une émergence enretrait par rapport à l'axe principal ducampus.Tout ce qui est lié à l'enseigne-ment, salles des cours, de TP, laboratoires,etc, est constitué d'éléments de pro-gramme très souples qui doivent êtrereconfigurables, ouverts, lisibles dans leurfonctionnement et aisément identifiables.A l'opposé, les locaux réservés à larecherche sont plus introvertis.Cette séparation lisible dans le pro-gramme est traduite dans l'espace. Ainsiles niveaux bas directement accessiblespour les locaux destinés à l'enseignementet aux étudiants.Dans les étages supérieurs plus secrets etfermés les laboratoires de recherche. Lapartie basse du bâtiment est en rapportdirect avec le sous-bois, la partie hautedomine les frondaisons et émerge ducampus. Cette organisation est retrans-crite dans la structure de l'édifice et dansl'épannelage des volumes.

    VÉRITÉ STRUCTURELLE ETCONSTRUCTIVE

    En partie basse, chaque élément de laconstruction est dessiné pour être com-pris, clairement lu et donné un référentimmédiat en terme d'échelle.Dans la partie haute, une mantille de filsd'aluminium, assurant la protectionsolaire, trouble la lecture et l'échelleréelle de la masse abstraite d'un volumepresque aveugle, monolithique, émer-geant des frondaisons, posé sur le socledes locaux d'enseignement. Ce socle, lui,est constitué de plateaux entièrementlibres et traversants permettant des confi-gurations variées. Les matériaux sont utili-sés bruts sans que le second œuvre soitjamais synonyme d'habillage ou demaquillage.Le béton est préfabriqué ou coulé enplace. De couleur noire, il est teinté dansla masse et des granulats de la Loireentrent dans sa composition, accrochantdes reflets mordorés dans la masse. Leparement est sablé ou bouchardé avantd'être lasuré et verni. Ce traitement per-met d'obtenir une homogénéité d'aspect

    Un matériau synonyme de liberté ? (Franck Hammoutène, Architecte)

    10

  • Conférence 4

    et de résultat malgré les aléas inhérentsaux savoir-faires ou aux modes construc-tifs.Dans ce projet la vérité structurelle etconstructive du matériau répond parfaite-ment à la vérité du plan,de la coupe et dufonctionnement.

    Présentation d’une église encours de réalisation à la Défense

    L'église Notre Dame de Pentecôte estactuellement en cours de construction àla Défense dans un site avec de fortescontraintes, à proximité de la voûte duCNIT. Elle est en fait construite en frangedu parvis, en encorbellement sur le bou-levard circulaire. Sa situation un peu enretrait par rapport à l'axe de la Défense,tout en étant parfaitement très visible,dit sa volonté d'être à la fois en retrait et présente au monde.

    INVENTER UNE ÉGLISE

    Aujourd'hui, il n'existe plus de typologieinstitutionnelle pour les églises.La traduc-tion cohérente et immédiatement identi-fiable par chacun de ce qu'est un lieu deculte, n'est plus convenue. Il faut doncinventer ce que peut être un tel édificedans un tel contexte. Une réponse auraitconsistée à créer un événement plastiquemisant sur la forme et le dessin pour 0

    susciter la reconnaissance ou l'émotion.Au contraire la solution retenue prend leparti de constituer un lieu qui raconte leparcours d'un individu : extrait du parvisde la Défense, il quitte un monde excitantde vitesse, de mouvement, de rencontres,de commerces, d'affaires..., va suivre uncheminement qui le conduit vers un lieude questions, de communication, ou desolitude absolue, c'est selon...L'architecture de l'édifice raconte cettehistoire. L'obligation de construire l'églisesur plusieurs niveaux, va multiplier leslieux de transition ; l'espace se resserre, lalumière devient indirecte, le monde exté-rieur s'oublie... puis la lumière derrièrel'autel. Toute cette progression veutaccompagner la personne,vers un lieu oùelle peut s'abstraire un temps du mondeenvironnant.

    PERFORMANCE STRUCTURELLE

    Sur le plan constructif, le bâtiment disposeen tout et pour tout de 6 points d'appuis.Ces six colonnes de 5 m de haut sont lespoints permettant de fonder l'ouvrage enpassant à travers la gare routière, le réseauRATP, la voirie, une route nationale enter-rée en tunnel, etc. Sur cet ancrage au sol,vient se poser une boite indéformable enbéton B 60 qui constitue un socle artifi-ciel. Ce socle va supporter sur trois appuiset un pignon le volume enchâssé de lasalle de l'église, et les 40 m d'élévation quicorrespondent au module supérieur et auvoile d'acier et de verre opale percé de lacroix. La performance de structure est iciobligée par les contraintes d'implantationdu projet. Le béton de structure est couléen place, les éléments non structurels sontpréfabriqués.

    Pour conclure, Franck Hammoutène sou-ligne que les enjeux d'aujourd'hui ne sontpas dans la technique. Ils sont plutôt dansla forme que l'on donne au monde. Il estfondamental pour les architectes d'arriverà écouter, à comprendre et à donnerforme. Quelques soient les options debase, les pensées, les théories, les goûts, lesconvictions de chacun, nos architecturesdoivent s'ancrer sans se grimer, ni se mas-quer dans la vérité de notre époque der-rière des faux-semblants qui les placent endécalage et donnent le sentiment d'être àla traîne des réalités du temps. �

    “La solution retenue prend

    le parti de constituer un lieu qui raconte

    le parcours d’un individu.” 11

    1

    1

  • Conférence 5

    Si le béton

    est un matériau minéral,

    il se différencie de la pierre

    par le fait qu’on le coule

    pour le mettre en œuvre.

    Le travail de l’architecte

    consiste à emprisonner de

    l’espace et le béton est le seul

    matériau capable de le faire

    avec autant d’évidence.

    Il a une qualité fondamentale,

    qui est la continuité parfaite

    de sa matière. Le béton

    n’a absolument pas besoin

    d’être soudé, boulonné, etc.

    Il est en lui-même une

    continuité de matière

    et est le seul matériau

    d’architecture présentant

    cette caractéristique.

    Cette observation peut paraître simple.Mais il faut avoir présent à l’esprit qu’ac-tuellement l’architecture est par tropredevable de ce qui se passe dans lemonde. Elle suit un peu l’évolution del’industrie automobile. Aujourd’hui, lesvoitures, ce qui est logique, sontconstruites par morceaux et non plusmoulées ou fabriquées d’une pièce. Lesarchitectes, qui ont le souci d’être à lapage, veulent faire leurs bâtimentscomme des voitures. Ceci est incohérentet absurde, car l’architecture se trouveainsi privée de cette permanence decette pérennité qui lui donne une dimen-sion d’éternité. Plus l’architecture estfaite comme un objet de consommation,plus l’homme perd cette capacité qu’il ade défier la mort en faisant de l’architec-ture. Nous sommes aujourd’hui devantune fracture terrible. Un bâtiment aaujourd’hui une durée de vie inférieure àcelle de son architecte. Pour la premièrefois dans l’histoire, un architecte a uneforte probabilité de voir disparaître deson vivant les bâtiments qu’il a dessinés.Un bâtiment dépend du programme.

    Ce dernier n’est plus aujourd’hui unenécessité, ni une responsabilité. Il existeune démission complète de la sociétéface au programme qui est incapable dedire ce qu’elle veut pour le futur. La pen-sée dominante tend à croire que moinsles choses sont définies plus la liberté estgrande. Actuellement, un bâtiment peuttout à fait changer de programme avantson achèvement. Il existe des résistancesface à cela, qui se battent pour que l’ar-chitecture ne soit pas à l’image de cetteforme de démission.

    Présentation de projets

    LE BÉTON, UN MATÉRIAU NATU-REL CONTRÔLÉ

    L’Historial de Péronne est entièrementen béton. Un béton blanc, brut, seul, carl’édifice n’est pas exposé à la pollution, ilest derrière un château médiéval. Le siteest une parfaite image de l’écologie nor-dique. Le béton vit et vieillit parfaitementbien, il fait parti du paysage. Ce bâtimentillustre tout ce que représente ce maté-riau. D’une part on y trouve le bétonmatière, le béton beauté, le béton texture,le béton lumière et d’autre part le bétonpeint, le béton lourd, le béton léger, lebéton qui franchit. Le béton est mer-veilleux parce qu’il est artificiel. C’est dela pierre artificielle, du minéral artificiel,c’est la nature contrôlée.Quand il faut mettre un revêtement, celarevient à habiller un bâtiment. Dans lepassé on s’habillait pour sortir en ville. Siun édifice se trouve en pleine pollution, ilpeut s’avérer nécessaire de l’habillerpour que son béton ne soit pas désho-noré, comme cela a été fait au muséed’Arles. Mais à l’intérieur le béton decette architecture est intégralement pré-sent et reste beau.

    FABRIQUER AUTANT D’ESPACETENU PAR L’ARCHITECTURE QUED’ESPACE INTÉRIEUR

    Avec le concours d’Evry en 1970, les loge-ments de la Noiseraie à Marne la Valléeen 1975 la logique de construction par cof-frage tunnel a été poussée à sonparoxysme. Avec les améliorations dusecond œuvre, il est possible aujourd’huide faire des bâtiments de logements plusperméables,plus fins.Par exemple les deuxprojets de logements pour la Hollandedémontrent que l’on peut fabriquer de laspatialité et des volumes dans la ville, quine sont pas opaques. L’opacité d’un pâtéde maison n’est plus admissible. On sou-haite avoir la transparence du cœur d’îlotsur la périphérie. Ceci est déjà un peutraité dans l’ensemble de logement deColombes où les bâtiments présentent unecertaine perméabilité. La seule modernitépossible telle que l’entend Henri Ciriani,consiste à fabriquer autant d’espace tenupar l’architecture que d’espace intérieur.

    LE BÉTON ASSURE LA PÉRENNITÉDE L’ŒUVREPour la maison de la petite enfance deTorcy, tout un travail de programmationet de participation a eu lieu. Cependantdes changements politiques ont provo-qué des changements divers de pro-grammes. Malgré tous ces aléas unechose est restée, l’architecture en béton.Au-delà de l’anecdote, ceci démontreque le béton assure la pérennité del’œuvre et tout le reste est d’une grandebrièveté. Tout ce qui est important etstrictement essentiel pour une œuvresera en béton, pour le reste les matériauxpeuvent avoir une pérennité moindre.Par contre, il est primordial pour lebéton, qu’avec le moins il puisse faire leplus toujours. Le béton n’est pas le lieude l’opacité, il est l’opacité minimum.

    Béton, matière de l’espace (Henri Ciriani, Architecte)

    12

    1

  • Conférence 5

    VERS UNE ESTHÉTIQUE DEL’ÉQUIVALENCE ENTRE L’HORI-ZONTALE ET LA VERTICALE

    Depuis le projet de Torcy, tout le travail deH. Ciriani va porter sur une volonté d’abs-traction, qui est le symbole, le signe, de laprétention d’un architecte face à la réalitéphysique. Pour pouvoir atteindre cetteabstraction il faut que l’horizontale soitl’équivalent de la verticale.Comment fairepour que ce qui s’appuie verticalement etce qui franchit ait la même force, la mêmematérialité. Le béton est le seul matériauqui permet de voir une ligne ou un planhorizontal, devenir vertical et revenir àl’horizontale. Savoir tenir de l’espace, lemettre en tension, transformer la matièremême de l’espace, ceci est la charge fon-damentale du béton.

    Dans tous les projets de concoursrécents, Avignon, Compiègne, Pontoise,etc, une esthétique de l’équivalence entrel’horizontale et la verticale s’installe. D’unprojet à l’autre elle cherche, elle apprendà connaître une nouvelle abstraction.Cette abstraction calme et sereineaccepte et aime la gravité, mais n’en estpas esclave. Quand on sait traiter la gra-vité, elle donne de l’émotion. Il est fonda-mental que la gravité soit la raison mêmedu travail de l’architecte.Actuellement, laplupart des gens pense qu’il n’y a pas de

    futur.Le futur n’est plus synonyme de pro-grès, il faut donc vivre, penser, au plusvite. La vitesse génère l’oubli, seul ce quiest lent produit de la mémoire. Plus per-sonne n’est intéressé par la mémoire. Letravail dans tous les derniers projetsrevient sur ce qui est essentiel comme lagravité. Il faut inventer une architecturelégère qui parle plus de la gravité que lespyramides égyptiennes. Les architectesdoivent continuer à avoir des désirs denouveauté, de spatialité. Qu’ils soientcapables de surprendre les gens pour lesémouvoir par l’architecture. Avec desbétons de haute résistance d’un coût peuélevé, on pourrait faire une architecturefabuleuse. Il est aussi primordial que lebéton soit à la pointe du progrès en per-mettant aux architectes de faire des pro-jets de haute technologie, qui restentsimples. Le béton ne doit pas apparaître“vieux jeu” face à d’autres matériaux.

    UNE PETITE MAISON TRAVERSÉEPAR LA MER

    La petite maison au Pérou, se dresse enbord de plage. Il s’agit d’un cube ouvert.Le terrain en pente oblige à développerun système tripartite. La partie inférieurefait socle et abrite un garage fermé parune porte en “Makrolon” translucide ettrès légère. La maison s’enroule autour

    d’un espace vide qui traverse toute la mai-son et dans lequel est planté un palmier.Les matériaux et les couleurs donnent làune atmosphère de fraîcheur et le senti-ment d’être en vacances. Au-dessus s’or-ganise la partie inférieure de l’habitation,les chambres des enfants et les services.Une piscine en longueur regarde vers lamer. Au dernier niveau se trouve l’étagenoble et en suspension sur sa double hau-teur donne la chambre de maître. Sonvolume cubique présente tout son poidsau-dessus de l’espace de la salle à manger,à l’inverse l’espace en creux de lachambre à coucher est prolongé par laterrasse aménagée au-dessus, qui sembleprendre avec elle l’espace de la plage.D’un côté ce cube paraît peser de toutson poids sur l’espace de la maison etd’un autre point de vue il démontre exac-tement le contraire.

    Cette maison se propose de modifier latypologie des maisons de plage, où généra-lement la maison regarde la plage. Dans ceprojet, la maison met la plage à l’intérieur.La maison semble traversée par la mer. Lebéton est peint en blanc ou verni dans sesparties laissées brutes. Verticaux ou hori-zontaux tous les voiles font 12,5 cmd’épaisseur. Tout ce qui n’est pas l’essen-tiel de la maison, c’est à dire tout ce quin‘est pas en béton est traduit dans unepolychromie de jaune,noir, rose, rouge...�

    “Le béton n’est pas le lieu de l’opacité,

    il est l’opacité minimum.”

    13

    1

  • Conférence 6

    Pour introduire de façon

    simple la notion de béton

    de fibre métalliques, on peut dire

    qu’il s’agit d’un béton armé

    à l’échelle locale. Il faut savoir

    que comme les armatures

    traditionnelles de béton armé, les

    fibres ont pour objectif de maî-

    triser la fissuration. Cette confé-

    rence a comme but de démontrer

    qu’il existe une relation intime

    entre les fibres et les fissures.

    A la différence du béton armé où

    les armatures sont placées dans

    le coffrage avant le

    bétonnage, les fibres métalliques

    sont mélangées avec les autres

    constituants du béton pour

    former un matériau spéficique

    appelé le béton de fibres.

    Du fait du mélange des fibres

    à l’intérieur de la matrice, ces

    dernières sont obligatoirement

    courtes et impliquent l’aspect

    local évoqué précédemment.

    La petite taille des fibres

    va avoir un effet sur l’échelle à

    laquelle elles interviennent à

    l’intérieur du matériau. Comme

    les fibres métalliques jouent le

    même rôle que les armatures

    traditionnelles en ce qui concerne

    la fissuration, on peut

    remplacer ces armatures soit

    en totalité soit partiellement par

    les fibres. Pour les architectes,

    cette perspective peut offrir une

    grande liberté, car il est possible

    de passer de formes contraintes

    liées aux armatures, à des

    formes beaucoup plus libres.

    SPÉCIFICITÉ DU BÉTON DE FIBRESMÉTALLIQUES PAR RAPPORT À SAMISE EN ŒUVRE

    Pour bien appréhender le béton de fibresmétalliques. Il faut bien connaître lesspécificités du béton de fibres par rapport à sa mise en œuvre. La plusimportante particularité concernel’orientation préférentielle des fibres quidépend de deux paramètres, les tech-niques de mise en œuvre et le fait que lebéton ait à s’écouler ou non dans les cof-frages.Pour sa mise en œuvre, le béton estsoit coulé, soit projeté. Dans le cas dubéton coulé, on peut utiliser une pompeou une benne munie d’un manchon.Dansces deux situations, il est clair que lesfibres vont être orientées de façon préfé-rentielle avant d’arriver dans le coffrage.Le béton de fibres est alors structuréd’une certaine manière. Si l’on utilise unebenne sans manchon, l’orientation préfé-rentielle des fibres est moindre. Ainsi onconstate que le choix de la technique decoulage utilisée n’est pas indifférent àla structuration du béton de fibres dansle coffrage. Même si l’on utilise au départune formulation identique, in fine selon latechnique de coulage on n’obtient pas lemême béton de fibres. Il est donc trèsimportant de retenir que le béton defibres est structuré au travers de la tech-nique de mise en œuvre. Il faut aussi tenircompte de l’écoulement d’un béton defibre à l’intérieur d’un coffrage. En effetles fibres s’orientent d’une manière préfé-rentielle en fonction des directionsd’écoulement. Ainsi on peut choisird’avoir un principe de mis en œuvre avecpeu d’écoulement ou au contraire avecbeaucoup d’écoulement, ce qui va avoirune conséquence sur la structuration ulté-rieure du béton de fibre.

    Dans des structures assez élancées, ilexiste un phénomène de ségrégation desfibres lié à la pesanteur, qui peut être for-tement réduit en en tenant compte dèsla formulation. Cette ségrégation dépendde la fluidité du béton, mais aussi de ladimension des fibres. Par exemple, desfibres légères par rapport à la fluidité dumatériau induiront une moindre ségréga-tion par rapport à des fibres plus grandeset plus lourdes. Le choix d’une fibren’est par conséquent pas du tout indé-

    pendant du type de structure à réaliseret du type de mise en œuvre retenu.

    Il existe aussi une relation entre lesdimensions des fibres, le pourcentage defibres introduit et la maniabilité du béton(c’est à dire l’aptitude d’un béton à semettre en œuvre). En matière de maniabi-lité deux règles de l’art s’imposent.Premièrement, pour un dosage de fibredonné, plus le rapport longueur de lafibre sur diamètre est élevé plus la mania-bilité est mauvaise. Deuxièmement, àmême rapport longueur sur diamètre dela fibre et à même pourcentage de fibres,plus une fibre est courte plus le béton estmaniable. Partant de ces deux données, ilfaut savoir qu’à maniabilité fixée, il estpossible d’introduire soit un pourcentageélevé de fibres courtes soit un pourcen-tage plus faible de fibres longues. Ceci esttrès important pour le béton de fibres,car en fonction de ce choix on obtient infine des caractéristiques mécaniques dubéton de fibres totalement différentes. Lanécessité de connaître l’ingénierie dumatériau et tous ces aspects technolo-giques de mise en œuvre est évidente,compte tenu des conséquences qui endécoulent.

    Bétons de fibres métalliques (Pierre Rossi, Directeur de recherche au L.C.P.C.)

    14

  • Conférence 6

    FISSURES ET ÉTAPES DE FISSURATION

    Au sujet des fissures, on distingue lesmicrofissures et les macrofissures. Lesmicrofissures sont des fissures très petitespar rapport au volume de béton sollicité.Ces fissures ont des conséquences trèslocalisées dans une structure. Une macro-fissure ne peut pas être considéréecomme petite par rapport au volume debéton sollicité, ce qui veut dire que sa pré-sence a des conséquences nocives àl’échelle de la structure. La fissure devientpréjudiciable lorsqu’elle met en péril lastructure. Si l’on sollicite une pièce debéton en traction, on constate schémati-quement trois phases de fissuration. Unephase de microfissuration diffuse, qui cor-respond au comportement de matériau dela pièce. Au fur et à mesure de l’augmenta-tion de la sollicitation, les microfissurescroissent, se rejoignent. On parle de locali-sation ou de coalescence des fissures.Enfin elles deviennent des macrofissuresqui ont un impact sur le comportement dela pièce de béton dans la structure.

    LES RÉPONSES DES FIBRESMÉTALLIQUES À LA FISSURATION

    Face à ces trois étapes de fissuration lesfibres métalliques apportent des solutions.Au niveau de la microfissuration, les fibrespermettent de “coudre” les microfissureset d’éviter leur propagation, ce quiempêche ou retarde l’apparition demacrofissures. Dans le cas d’apparition demacrofissures, les fibres peuvent encoreagir comme “coutures” des macrofissures.Elles interviennent à l’échelle de la struc-ture en apportant de la capacité portanteet de la ductilité. Il est évident que ce nesont pas les même fibres qui vont agirdans l’un ou l’autre cas. Pour agir sur lesmicrofissures il faut utiliser un très grandnombre de fibres de petit diamètre (micro-fibres). Cela permet d’améliorer grande-ment les caractéristiques à l’échelle dumatériau. Pour les macrofissures, il faut uncertain ancrage des fibres pour cela ellesdoivent être plus longues (macrofibres)afin de pouvoir agir.Toute l’ingénierie dubéton de fibres métalliques repose sur lefait de savoir à quelle échelle doit porterl’action et dans quel but, ce qui induit lasolution micro ou macrofibres. Pour agiraux deux échelles il suffit de mélanger des

    microfibres avec des macrofibres (fibrescourtes et fibres longues).Cette tendancesse développe dans le cadre des bétonsultraperformants.

    L’APPLICATION DES BÉTONS DEFIBRES DANS LES STRUCTURESDE DIMENSION MODESTE

    Si l’on souhaite que les fibres soientactives au niveau structurel, cela veut direque le domaine d’application des bétonsde fibres concerne les structures dedimensions modestes (poutrelles, coquesminces...). Il est aussi très intéressant depenser au couplage du BHP et des fibres.Le BHP permet de diminuer les dimen-sions, mais il est fragile et nécessite l’ap-port de renforts pour la durabilité. Lesfibres de leur côté ont besoin d’unematrice très adhérente pour fonctionnerau mieux. La logique de ces deux maté-riaux conduit naturellement à les marier.

    Une étude faite en laboratoire démontrel’efficience du mélange fibres métalliqueset BHP. Cette étude avait comme objet devoir de quelle façon il est possible de rem-placer, par des fibres métalliques, tous lesaciers passifs et tous les aciers de com-pression dans une poutre en béton de très

    haute performance. Les seules armaturesconservées sont les aciers de flexion dits“filants”. Une comparaison de comporte-ments mécaniques entre une poutrearmée en BHP classique et une poutre enBHP contenant des fibres à été réalisée.Les résultats de la comparaison font appa-raître que pour des structures de dimen-sions modestes, le béton de fibre faitlargement jeu égal avec le béton armé.Cette observation concerne le comporte-ment ultime,car si l’on regarde le compor-tement en service, là où les fissures sontde petites dimensions, le béton de fibresest largement supérieur au béton armé.On peut donc dire que le béton de fibresaméliore la pérennité des structures oudes coques de petites dimensions. A celas’ajoute une plus grande liberté de créa-tion formelle, due au fait qu’une grandepartie des armatures est remplacée pardes fibres.

    Comme cela a été dit précédemment, onpeut mélanger des fibres courtes et desfibres longues. Dans un matériau de labo-ratoire où l’on effectue ce type demélange, il est possible d’envisager lasuppression de toutes les armatures clas-siques. Le béton obtenu est très ductile etpermet d’atteindre les 70 MPa en tractionpar flexion. Au LCPC un projet va débu-ter prochainement. Il a pour objectif l’in-dustrialisation de ce type de matériauxde demain ou d’après-demain.Pour cela ilfaut établir un partenariat avec les archi-tectes. Car cela nécessite de travailler sur

    “Le béton de fibres améliore la pérennité

    des structures ”

    15

  • Conférence 7

    Plusieurs raisons

    sont à l’origine de l’intérêt

    de l’architecte Jacques Ripault

    pour le béton. En premier lieu le

    béton est le matériau qui intègre

    le mieux deux aspects

    fondamentaux d’un bâtiment qui

    sont la masse et la lumière.

    Les architectures de la Grèce

    antique font bien apparaître que

    les architectes de l’époque

    travaillaient sur des questions

    de masse, de profondeur,

    d’épaisseur, de répétition,

    sur le rapport de l’architecture

    avec le paysage...

    A partir de références

    de cette époque qui peuvent

    être vues comme fondatrices

    de l’idée d’architecture,

    il est intéressant de voir com-

    ment dans l’histoire, d’autres

    architectes ont intériorisé

    les idées de masse et de lumière

    et les ont travaillées.

    Ainsi, par exemple dans l’architecture deLe Corbusier un volume massif en bétondevient lumière diaphane. Masse et légè-reté établissent un dialogue, la lumièrejouant sur le matériau dur et massif donneune impression de légèreté. Le béton estun matériau qui associe l’idée de volumeà l’idée de masse et l’idée de volume asso-ciée à la lumière constitue ce qui va fairechanter les espaces en donnant une vie etune autre dimension au matériau.

    Autre aspect très important, le béton estun matériau qui définit des espaces et lesfabrique. En regardant le Salk Institute deL. I. Kahn, on comprend comment ce bâti-ment en béton “fabrique la terre et s’op-pose au ciel”. Le béton est aussi unmatériau de modénature comme l’adémontré C. Scarpa au cimetière Brion. Ilest solidaire avec la terre, tout en étantprésent, il sait s’estomper dans le rocher,ce que l’on constate parfaitement dans lecas de la maison de C. Malaparte à Caprisignée par A. Libera. A l’opposé, avec larampe du bassin des pingouins du zoo deLondres, B. Lubetkin fait flotter une lamede béton dans l’espace. Le lourd devientici image de légèreté, le matériau se trans-forme en expression de l’apesanteur.Le théâtre populaire de la ville de Sciaccadessiné par G. Samona est resté inachevé.Cette architecture inoccupée est aujour-d’hui encore présente car elle a été édifiéeen béton,témoignage de la pérennité et del’étonnante consistance du matériau.

    Présentation de projets

    LOGEMENTS RUE BISSON À PARIS

    Dans l’immeuble de logements de la rueBisson, premier bâtiment réalisé à Parispar l’agence J. Ripault et D. Duhart, lebéton est utilisé sous forme d’élémentspréfabriqués, d’une manière pratiquementsystématique. Le projet est conçu avecl’idée que les espaces sont délimités pardes parois en béton qui sont la véritéconstructive du bâtiment. L’utilisationd’éléments préfabriqués correspond à lavolonté de fabriquer les espaces par unassemblage régulier de composants. A celas’ajoute l’idée d’un “bâtiment soulevé” quiconfère une autonomie à l’immeuble dansun lieu “serré” caractéristique du tissuurbain parisien. En harmonie avec l’écri-ture architecturale, le béton permet d’obte-nir les portées nécessaires et l’élancementqui concrétisent les intentions.

    LOGEMENTS ZAC SEINE RIVEGAUCHE À PARIS

    L’écriture des volumes, des plans, des sur-faces s’accompagne aussi d’un travail surla modénature du béton, sur son aspectde surface, sa couleur... Pour l’immeuble

    de logements de la ZAC Seine-Rive-Gauche la totalité des parois vues sont enbéton poli blanc contenant des granulatsde marbre blanc de Carrare. Ce bétonchange de couleur avec la lumière. Lafaçade est dessinée pour être opaque etouverte. A la fois claustras, garde-corps,brise-soleil, les lignes horizontales enbéton qui composent cette façade per-mettent de voir la Seine depuis chaquelogement tout en préservant son intimité.

    CENTRE UNIVERSITAIRE PORTROYAL - RENÉ CASSIN À PARIS

    Le centre universitaire Port Royal - RenéCassin est encore aujourd’hui le projetque J. Ripault considère comme le plusenrichissant. Il s’agit sur une petite par-celle, d’un édifice de taille modeste quicomprend deux grands amphithéâtres etpeut accueillir plus de 1500 étudiants.C’est en fait un travail en coupe qui a per-mis de trouver la bonne solution poursuperposer les amphithéâtres. Et le bétona permis de la réaliser et d’exprimer lejeu des transparences, de l’espace, desmasses soulevées et des volumes. Dès legros-œuvre terminé, la vérité de l’édificeest révélée par le béton. L’espace de labibliothèque enserré entre les deux amphi-théâtres se dilue par les systèmes de cir-culation,donnant la lisibilité des corps dubâtiment, soulevés ou suspendus.

    Béton : masse et légèreté, lumière et contraste(Jacques Ripault, Architecte)

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  • Conférence 7

    CENTRE CULTUREL À MEUDONLe centre culturel de Meudon se dresse surun site spacieux en face du conservatoirede musique. La salle de spectacle a unecapacité de 500 places. Ce projet en bétonblanc pousse assez loin le travail sur l’idéede masses soulevées et sur les voilescourbes. L’entreprise Quillery a coulé pource projet des voiles de 7,50 m de hauteuravec du béton auto-plaçant produit parBRC. La salle est un fût cylindrique décollédu sol. Elle est enveloppée par une sorted’enchaînement de foyers dont les volumesorthogonaux révèlent de l’intérieur commede l’extérieur l’émergence du volume de lasalle. C’est en fait la lumière naturelle quiglisse le long du cylindre au droit de la jonc-tion entre la salle et les foyers et marque lacésure entre les volumes. Du fait des hau-teurs de coulage obtenues avec le bétonauto plaçant le cylindre haut de 15 m a étécoulé en deux passes. Un travail importantsur le calepinage a eu lieu entre architecteset entreprises, pour trouver un équilibreentre la logique du béton auto plaçant et lecalepin voulu par l’architecte. Sur l’en-semble du projet le béton apparent pré-sente une très bonne qualité de parement.Son unité convient tout à fait au travail surla volumétrie développée ici.

    CENTRE CULTUREL À MEAUXLe centre Culturel de Meaux met enœuvre du béton préfabriqué et du bétoncoulé en place. Le béton préfabriqué selit comme un élément d’enveloppe tan-dis que le béton coulé exprime l’idée demasse et de compression. Le volume dela salle de spectacle est entièrement

    coulé en place, la sous-face laissée bruteest seulement peinte pour obtenir uneplus grande luminosité dans le hall-foyer,qui vient en partie se loger dessous. Despoutres en encorbellement portent lespanneaux préfabriqués, dont la disposi-tion permet d’orienter les arrivées delumière ou de mettre en scène des vuescadrées sur la ville de Meaux.

    La présence dans cette architecture demasses ou de parois soulevées contribueà délimiter des espaces ouverts qui sonten même temps tenus. La lumière vient yjouer des contrastes assez forts. La per-ception est confrontée en permanence àune opposition entre le plein et le vide,où d’une façon paradoxale le pleinsemble être en haut et le vide en bas.Pour J. Ripault cela fabrique des lieux quiont une incontestable intensité.Dans la salle le béton reste brut pourdonner un aspect urbain, soulignant qu’ils’agit d’un lieu public de la cité, où leshabitants se retrouvent pour voir tel outel spectacle. La présence du béton ren-voie à l’idée de façade alors que le bois etle tissu ont une image plus intime. Dansla partie médiathèque, la sous-face de lacouverture est en béton brut qui gardel’empreinte des planches de coffrage.

    SIÈGE D’EDF-GDF À BREST

    Le siège d’EDF-GDF à Brest (en béton pré-fabriqué) est une autre illustration du tra-vail sur des masses pleines opaques enopposition avec des éléments ouverts,transparents, en jouant sur une oppositionassez brutale entre le plein et le vide. �

    “Le béton est un matériau

    qui définit les espaces et les fabrique ”

    17

  • Conférence 8

    Présentation de l’ESPEMENde Poitiers

    Le propos de l’architecte J.-P. Lott s’ap-puie, en premier lieu, sur la présentationdu bâtiment de l’ESPEMEN à Poitiers qu’ila conçu et qui est terminé depuis deuxans. Il s’agit d’une École de formation des personnels administratifs de l’Éduca-tion Nationale. Située à Paris, elle a étédélocalisée en périphérie du site duFuturoscope de Poitiers. Cette écolereçoit des stagiaires pour une duréed’une semaine à quinze jours. Le bâti-ment d’une superficie de 15 000 m2, doitcontenir l’ensemble des activités permet-tant le bon déroulement de ces stages.L’édifice, de taille importante, est consti-tué de différents éléments abritant unepartie de programmes spécifiques (héber-gement de 120 chambres, restaurant de1000 rationnaires, un auditorium, unebibliothèque, des salles de cours, etc.), letout composant un ensemble unique etcohérent. Le jeu des formes et la plas-tique autorisés par le béton permettentde figurer l’ensemble des éléments deprogramme. Dans le cadre de cette archi-tecture, le béton est idéal pour figurer lesidées apparues dès les premières études,pour donner image aux concepts et vrai-ment construire les dessins. L’abstractionqu’il autorise est fondamentale pour J.-P. Lott dans son travail d’architecte.

    UN BÂTIMENT QUI CRÉE SONPROPRE PAYSAGE

    Du fait de la petite dimension du terraind’assiette, le bâtiment s’inscrit dans undécaissé d’un niveau. Ceci permet de créerdes espaces de recul et de développer la

    volumétrie souhaitée, afin de donner de larespiration et de l’élancement au bâtiment.Il en résulte que le sol général est à unniveau en dessous du terrain naturel. Ainsiles plans inclinés, les voûtes, les coques quicaractérisent cette architecture font ensorte que l’édifice semble très lié à son siteet qu’il donne le sentiment d’en émerger.Lelien du bâtiment avec le terrain lui-même est plus fort qu’avec l’environnementconstruit. Ce bâtiment assez introverti créelui-même son propre paysage et son rapportà ce site peu urbain. La façade principale est marquée par la présence d’une grandecoque en béton qui abrite le hall principalet l’amphithéâtre. Le béton démontre qu’ilest parfaitement adapté à cette architec-ture de volumes et de courbes, ainsi qu’autravail sur la liberté des formes.

    LA COQUE EN BÉTON ABRITE LE HALL

    Sous la coque, lehall principal quise développe surplusieurs niveauxest à l’échelle dubâtiment. Il révèletout un jeu decoursives et donneaccès aux diffé-rentes zones d’ac-tivités de l’école.Dans s a p lu s grande dimension,

    cette coque a une portée de 80 m.La per-ception spatiale est liée à cette expres-sion du franchissement. Partout lalumière naturelle agrémente les lieux desa présence et accompagne les mouve-ments des formes et la mise en scènedes circulations.

    LE BÉTON SCULPTE CETTEARCHITECTURE

    Dans ce projet comme dans d’autres, letravail sur les formes arrondies se déve-loppe aussi bien en plan qu’en coupe.Le béton préfabriqué ou coulé en placepermet de résoudre les problèmes deportées, les décalages de plans, les mou-vements de courbes, etc... Il permet derésoudre parfaitement toutes les formesgrâce à des coffrages spécifiques. Cebâtiment s’est construit dans des délaiscourts puisque le chantier n’a duré que10 mois et son coût de l’ordre de 6 000 Fle m2 SHON est peu élevé.Tout l’édificeest construit en béton gris, l’ensembleétant ragréé et peint. Pour recouvrir les coques, des résines étanches sontutilisées.

    Présentation de l’ESIEE d’Amienset d’autres projets

    D’autres opérations ont été réalisées pré-cédemment dans le même esprit, commel’ESIEE à Amiens. Cette école a 5 ans. Dela même façon que dans le projet dePoitiers, un grand hall donne depuis lerez-de-chaussée accès à tous les élémentsdu programme.La partie la plus spécifique est ici lacoque qui accueille les trois amphi-théâtres de l’école. Reposant sur un soclecirculaire de 18 m, son diamètre en partiehaute est de 50 m. Elle est entièrementréalisée en béton avec une précontraintecirculaire. Le béton a été coulé dans unvaste coffrage définissant la forme de lacoque.Cet ouvrage est calculé à la fissurationpréjudiciable. Pour le Palais de Justiced’Evreux, un vaste mur incliné avec undévers de 14 m donne à l’édifice soncaractère institutionnel. Dans les bâti-ment de l’université d’Evreux, onretrouve une architecture faite decourbes et de coques. La coque qui abritela bibliothèque franchit 70 m sans pointsintermédiaires. Enfin le collège Kennedyqui vient de se terminer au Mans se situedans un quartier très déstructuré. Sonarchitecture de volumes plastiquescherche à donner une identité au lieu et àcréer un événement. �

    Plasticité, finesse, élancement (Jean-Pierre Lott, Architecte)

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  • Conférence 9

    Les bétons fibrés ultraperformants(BFUP) déclinent toute une série de pro-priétés importantes (physiques, méca-niques, esthétiques, durabilité ...). Ce sonten premier des matériaux de structurequi présentent des très hautes résistancesmécaniques. C’est cette résistance quipermet de les classer, car d’elle découlentles autres propriétés. Ainsi dans toute lagamme des bétons, on peut établir unecertaine classification avec une raisongéométrique d’ordre 1,5. De 20 à 30 MPaon parle de bétons ordinaires, de 30 à 50MPa de béton de structure, de 50 à 80MPa de béton de haute performance,de 80 à 130 MPa de béton de très hauteperformance et de 130 à 200 MPa debéton de ultra-haute performance.Lorsque ces derniers, fibrés, présententen plus un comportement ductile entraction, on les appelle bétons fibrésultra-performants (BFUP).

    L’OFFRE EN BFUP

    Dans le domaine des BFUP, il existeaujourd’hui deux produits industriels surle marché. L’un, appelé Ductal®, estdéveloppé par trois partenairesBOUYGUES, LAFARGE, RHODIA; l’autredénommé BSI est produit par une filialedu groupe EIFFAGE.A cela s’ajoute les tra-vaux du LCPC qui continue à travaillersur cette famille de matériaux. Le maté-riau de marque Ductal® recouvre unegamme assez large de BFUP allant de 150MPa à 240 MPa en compression, avec descomportements en tractions ductiles.Dans le domaine de la rhéologie cesbétons peuvent être totalement auto-plaçants, être à “zéro slump”, ce qui per-met des fabrications d’éléments parextrusion. Au niveau des propriétés desurface, les capacités sont extraordinaires.Il est possible de reproduire avec une trèsgrande qualité d’état de surface toutes lestextures possibles de peaux coffrantes. Lapalette des couleurs, qui s’étend du blancau noir profond en passant par toutes lesnuances colorées, est très riche.

    LES PROPRIÉTÉS DES BFUP

    Lorsqu’on effectue des essais de flexionsur des éprouvettes non armées, lesbétons ordinaires, les bétons de structureet les bétons de haute performance pré-sentent ce que l’on appelle une rupture

    “fragile”. Cela signifie que lorsque lalimite élastique du matériau est atteinte, ilse produit une rupture brutale et instan-tanée. De plus un matériau qui présenteun comportement fragile est très sensibleaux premiers défauts, et les valeurs de sarésistance en traction sont très disper-sées. Il en résulte que pour tous cesbétons les armatures passives sont indis-pensables pour reprendre les efforts detraction, les contraintes transversales, etéviter le comportement fragile.

    La ductilité est la propriété majeure detous les BFUP. Par exemple, les BFUP de lamarque Ductal® offrent une résistanceen traction de l’ordre de 45 MPa. Celareprésente un véritable saut technolo-gique, car avec ce matériau il n’est plusnécessaire d’avoir des armatures passives.Le Ductal® peut contenir des fibresmétalliques lorsque les résistances méca-niques sont privilégiées ou des fibrespolymères lorsque l’aspect de surface estprépondérant. Si des résistances au jeuneâge importantes sont recherchées, il estpossible d’utiliser un traitement ther-mique classique. Dans ce cas l’hydratationdu matériau est totalement terminée et àla sortie du traitement le matériau estinerte, il a épuisé son retrait, le moduled’YOUNG ne change plus, les résistancesmécaniques n’évoluent plus. Pour tous lesessais conventionnels de durabilité lesrésultats montrent des performances quipeuvent être qualifiées d’extraordinaires.Par exemple, pour le gel-dégel aucunevariation n’est décelée, pour la profon-deur de carbonatation, les mesures sontinférieures au millimètre (ce qui n’est pra-tiquement pas mesurable)...

    QUELQUES RÉALISATIONS ENBFUPParmi les réalisations faisant appel à ce typede matériau, il faut citer la passerelle pourpiétons de Sherbrooke au Canada, réali-sée en éléments préfabriqués par unepetite entreprise. La poutre inférieure pré-sente une section de 18 x 40 cm,le hourdissupérieur est une dalle nervurée dontl’épaisseur en partie courante est de 30 mm,les diagonales courantes sont des tubesmétalliques fins remplis de béton (le métalne joue pas de rôle direct dans la résis-tance, il sert de coffrage perdu et améliorele comportement du matériau à la rupturepar un effet de confinement), la précon-trainte est assurée par des câbles exté-rieurs. De façon générale, le BFUP est enforte synergie avec les techniques de pré-contrainte et plus particulièrement la pré-contrainte extérieure ou par fils adhérents.

    L’utilisation de BFUP dans les auto réfrigé-rants de la centrale nucléaire de Cattenomdémontre l’intérêt de ce matériau qui peutrésister à des atmosphères extrêmementagressives.

    Autres exemples, à la Réunion, desplaques d’ancrage en Ductal® rempla-cent ici la fonte en étant moins cher etplus durable.Pour la nouvelle gare TGV deMonaco la réalisation de panneaux acous-tiques en Ductal® permet de répondreaux exigences de finesse de la résille sou-haitée par l’architecte. Au-delà de cesquelques exemples, huit secteurs d’appli-cations importants des Ductal® sontidentifiés au stade actuel, les structures debâtiment, le béton architectonique debâtiment, les ouvrages d’art, le nucléaire(génie civil et confinement), etc. �

    Les bétons à ultra-hautes performances(Paul Acker, Directeur des projets des recherches nouveaux bétons /Lafarge)

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    1

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  • Atelier 1

    Au cours de cet atelier,

    les participants ont montré

    le plus vif intérêt pour les

    propriétés des nouveaux bétons

    à ultra-hautes performances

    (BUHP) qui ont été présentés.

    Une large place a été laissée

    au dialogue, en privilégiant

    la démarche d’un atelier plutôt

    que celle d’une conférence ex

    cathedra. Les propriétés excep-

    tionnelles de ces matériaux,

    dont l’origine réside dans leur

    microstructure multi-échelle,

    ont été illustrées en partant de

    l’échelle millimétrique, qui est

    celle des plus grosses particules

    constitutives, puis en allant

    jusqu’à l’échelle moléculaire.

    Les propriétés mécaniques, dont les plusnovatrices sont la ténacité (résistance à lamicro-fissuration) et la ductilité (défor-mabilité sous charge sans rupture fragile,capacité à dissiper l’énergie de rupture,par exemple en cas de séisme), sont liéesà l’interaction fibre-matrice. La dimensiondes fibres est ajustée en harmonie avec ladimension des plus grosses particules dela matrice. Leur adhérence est contrôléepar la chimie de surface, et par le remplis-

    sage de la couche de contact fibre-matrice (auréole de transition) par desparticules ultra-fines et par les hydratesdu ciment. La résistance en compression,typiquement supérieure à 200 MPa, estliée à l’absence de porosité capillaire, et àl’exploitation maximale de la réactionpouzzolanique des fumées de silice, pourcréer des hydrates plus résistants.

    Les aspects de surface, proches des céra-miques, ont été illustrés par divers échan-tillons de Ductal® qui ont circulé dans lasalle. La capacité des Ductal® à épouserdans les plus fins détails les surfaces cof-frantes est liée à la distribution des finesdans la gamme du micromètre, et à lamaîtrise de l’affinité physicochimiqueentre la pâte et la peau coffrante. Diversaspects de surface, lisse, satiné, mat,brillant, structuré, peuvent être obtenus,en évitant la présence de bulles à l’inter-face, quelle que soit la teneur en airocclus du béton.

    La durabilité exceptionnelle de ces maté-riaux est liée à plusieurs aspects :

    • L’absence de porosité capillaire (poresde taille supérieure au micron)

    • La porosité à très petite échelle, celledu nanomètre (nanopores) n’est pasconnectée. Ainsi, une espèce étrangère(CO2 atmosphérique, ions chlorure,molécules diverses…) qui diffuse à tra-vers le matériau doit parcourir un trajetextrêmement tortueux à travers leshydrates eux-mêmes pour progresser.Les coefficients de perméabilité et dediffusivité des Ductal® sont parexemple 10 à 100 fois inférieurs à ceuxdes roches naturelles les plus com-pactes, comme le granit.

    • Le contenu en clinker résiduel, quipermet au matériau de lutter efficace-ment contre divers agresseurs chi-miques en reformant de nouveauxhydrates, même dans le cas extrêmed’une microfissuration d’origine méca-nique. Ainsi, il a été démontré que, nonseulement ce clinker résiduel neconstitue pas une source de gonfle-ment potentiel, mais qu’au contraire ilcontribue à la résistance chimique dumatériau.

    • La grande stabilité chimique deshydrates, qui présente un état de