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La vie des objets. D'ustensiles banals à objets de collection by Thierry BonnotReview by: Gabriel SegréÉtudes rurales, No. 167/168, Objets en crise, objets recomposés (Jul. - Dec., 2003), pp. 365-367Published by: EHESSStable URL: http://www.jstor.org/stable/20123018 .
Accessed: 28/06/2014 12:24
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Comptes rendus
Thierry Bonnot, La vie des objets. D'usten
siles banals ? objets de collection. Paris, MSH,
2002, 246 p. (? Ethnologie de la France ?). Les objets ont une existence bien remplie
qui se d?roule selon plusieurs ?tapes (produc
tion, ?change, distribution, consommation...) et qui est caract?ris?e par une diversit? de fonc
tions et de r?les. Tant?t des marchandises tant?t
des choses singuli?res ou singularis?es, les
objets ne poss?dent pas une identit? unique. Le
r?le de l'ethnologue consiste alors ? identifier
l'ensemble de ces ?tapes, ? pr?senter les mul
tiples modifications de statut de ces objets, ?
?clairer leur circulation dans l'espace social, ?
analyser les rapports que l'on entretient avec
eux ainsi que le regard que l'on porte sur eux.
T. Bonnot entreprend ce travail sur un ensemble
d'ustensiles du quotidien (produits c?ramiques de petites et moyennes entreprises) fabriqu?s en
Sa?ne-et-Loire et qui font partie aujourd'hui du
patrimoine culturel local. Il ?tudie leur histoire ?
travers les pratiques et les discours de leurs
usagers et d?tenteurs.
Une m?me poterie de gr?s peut ?tre consi
d?r?e comme un produit industriel qui t?moigne de la vitalit? ?conomique d'un village, ou
comme un objet indispensable de la vie quoti
dienne, remplissant ainsi la fonction qui est ?
l'origine de sa fabrication. Cette poterie peut encore constituer un t?moignage d'une activit?
disparue ou d'un pass? (familial ou public) r?
volu. Sa place dans l'espace social : une vitrine
de mus?e, une cour d'usine, une cave, un gre
nier, lui conf?re son statut et d?finit ou modifie
la fa?on dont on le per?oit. T. Bonnot rend
compte du processus de fabrication et ?tudie les
repr?sentations sociales li?es aux diff?rentes
?tapes : l'extraction de la mati?re premi?re, le
fa?onnage, le s?chage, la cuisson... Il s'int?resse
aux techniques utilis?es, ? la morphologie des
objets, aux protagonistes concern?s (tourneurs,
potiers, chauffeurs...), aux marques recon
nues... Il prend en consid?ration les modes de
perception et d'attribution de valeur marchande
et esth?tique Le lecteur suit la circulation de cer
tains de ces objets dans les diff?rentes sph?res
d'?change (les march?s de l'ancien, les foires
aux Puces, les brocantes). Des exemples con
crets mettent au jour la construction et la d?cons
truction des identit?s. Les objets peuvent ainsi
successivement ?voquer des souvenirs d'en
fance, devenir des curiosit?s mus?ographiques, servir de r?cipients, se d?grader en d?chets, ou
encore, ?tre utilis?s comme des mat?riaux de
remploi ou constituer des t?moignages histo
riques ou ethnographiques. On comprend que le
statut de l'objet n'est pas immuable, loin s'en
faut. De prime abord, sans identit?, produits de
s?rie, les objets uniformis?s acqui?rent parfois une identit? individuelle, localis?e, voire embl?
matique, historique. Les entretiens men?s aupr?s des propri?
taires permettent de saisir le rapport aux objets ? travers les g?n?rations et la fa?on dont ils
circulent et se transmettent parmi les hommes.
T. Bonnot explique les logiques de ? sauve
garde ?, c'est-?-dire de conservation et de
protection de ces choses. Il observe les circons
tances de leur acquisition et d?crit les r?gles
qui commandent leur transmission familiale.
Divers t?moignages illustrent le mode de fonc
tionnement du collectionneur : ses strat?gies, les crit?res d'identification des ?l?ments qui constitueront sa collection, les facteurs d?ter
minant l'acquisition. La collection elle-m?me
est ?clair?e sous un jour nouveau tandis que le
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Comptes rendus
366 lecteur est confront? aux diff?rents profils des
rassembleurs d'objets. L'auteur explique en
suite les divers modes d'appropriation des ob
jets, et les modes de qualification sociale (ou de
rel?gation) par leurs propri?taires. Certains us
tensiles conservent leur fonction initiale, d'au
tres en sont d?pouill?s et acqui?rent un prestige nouveau li? ? leur forme et ? leur anciennet?.
T. Bonnot propose une analyse tr?s d?taill?e des
raisons multiples de F obsolescence de ces ob
jets. Cependant l'inutilit? absolue n'existe pas, comme l'attestent les discours et les pratiques des personnes interrog?es. S'il perd sa fonction
premi?re, l'ustensile s'en voit attribuer une ou
plusieurs autres, ne serait-ce que celle de servir
d'?l?ment de d?cor, de s'offrir aux regards. On peut observer parfois des usages sur
prenants ou inattendus, qui permettent une
v?ritable appropriation de l'objet. Des transfor
mations ? physiques ? sont aussi apport?es de
temps en temps. L'auteur d?crit les nombreux ? d?tournements fonctionnels ? de l'ustensile
qui remettent en cause l'usage normal en fa
veur d'un ? usage incongru ?. En outre un objet
peut ?tre utilis? dans un but pr?cis lors d'une
p?riode de son existence sociale, puis, dans une
autre p?riode, r?pondre ? une toute autre fina
lit?. Son d?tenteur peut devenir non plus seu
lement utilisateur mais cr?ateur. L'?tape ? finale ? de l'existence de l'objet, c'est-?-dire
son aboutissement provisoire, est celle de son
rangement, mise en espace significatif de son
statut (selon qu'il est dissimul? ou au contraire
mis en valeur, utilis? ou expos?). Exclus, d?
class?s, rel?gu?s (dans le jardin accueillant les ? objets du dehors ?) ou au contraire expos?s dans un but d?coratif (dans le salon, lieu de re
pr?sentation de soi), les objets participent ? la
qualification de l'espace. Utilis?s, ils sont int?
gr?s au monde quotidien et rang?s, donc invi
sibles, g?n?ralement dans la cuisine, qui est
l'espace v?ritablement fonctionnel de la mai
son. Sacralis?s et donn?s ? voir, certains d'en
tre eux expriment le respect, la c?l?bration des
anciens, de l'Histoire (de la r?gion, de l'usine, de la famille...). Cette exhibition des objets dans l'espace domestique est r?v?latrice de la
valeur que le propri?taire leur accorde. Leur
place concr?te et symbolique peut ?voluer vers
le rebut ou la requalification. Tous ces objets peuvent ?tre rassembl?s en
une collection, laquelle constitue une mise en
sc?ne particuli?re, souvent syst?matique, pri
vil?giant la s?rie. L'auteur observe ainsi les
diff?rentes tactiques de mises en espace chez
plusieurs collectionneurs. Ceux-ci (? l'instar
du conservateur de mus?e) se font les protec teurs d'un pass? r?volu, les garants d'une m?
moire, les promoteurs d'un lieu, d'une r?gion
qui s'incarne dans ces objets gard?s et pr?ser v?s d'un autre temps.
Recourant ? la m?thode ethnographique Th. Bonnot s'attache ? analyser les ? logiques sociales ? l'oeuvre derri?re les repr?sen tations ?, expliquant ? ce qui rel?ve de la cons
truction sociale dans les modes de mise en
espace, les r?cits - histoires de vie des objets -
les transmissions, les ?changes, les pratiques de ceux qui les manipulent ?. Que dit le d?ten
teur sur l'objet et sur son acquisition? Qu'en fait-il? Que sait-il de ce que l'on en faisait?
Quel devenir lui pr?voit-il? En posant ces questions ? ses informateurs, T. Bonnot
recueille un mat?riau ethnographique tr?s riche
qui le conduit ? montrer les relations entre su
jets et objets, les liens personnels ou collectifs
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Comptes rendus
avec ce patrimoine mat?riel, les modes d'ap- ^67 propriation et d'attribution de la valeur. Cette
?tude, loin de se limiter ? une ethnographie des
poteries de gr?s de la Vall?e de la Bourbince, ?claire d'un jour nouveau le rapport que l'on
entretient avec l'univers mat?riel dans notre
soci?t? occidentale.
Gabriel Segr?
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