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Réalité et enjeux de l’observation
De l’observation à l’action : matinée d’échange -Alain Trugeon- Mémorial ACTe 9 avril 2016
Observer pour comprendre… et mieux agir Données/indicateurs
De l’histoire très ancienne En Égypte ancienne
par le biais de vestiges conservés des traités médicaux (papyrus Ebers, Edwin Smith – XVIe siècle avant notre ère) * une longue partie traite de connaissances empiriques et d'observations.
L’observation à la base d’autres travaux retrouvés ayant montré que les Égyptiens se sont intéressés à la mortalité de leur population * en relevant notamment des différences sensibles entre la mortalité des populations de la Haute-Égypte par rapport à celles la Basse-Égypte.
De l’histoire moins ancienne . En Angleterre en 1538, un document était rempli pour chaque décès et des statistiques de mortalité hebdomadaire et annuelle étaient systématiquement effectuées (bills of mortality)
Travaux de Graunt en 1662 (Natural and Political Observations… Upon the Bills of Mortality) Première analyse épidémiologique (et de démographie statistique) au sens actuel : * analyse en profondeur de ces bulletins de mortalité en évaluant d’une part les sources d’erreurs et de biais, * Mise en évidence des régularités dans les séries de décès et les pics épidémiques, de taille variable, qui furent attribués à des épidémies récurrentes de peste.
Après la révolution française, se soucier du bien de l’État, c’était également se soucier de la santé des citoyens.
De l’histoire plus récente .
William Farr : classification des causes médicales de décès, avec définition des dénominateurs ayant surtout pour but de faire prendre conscience aux gouvernements des mesures de prévention sanitaire.
Un autre stimulant pour les recherches en santé publique fut l’impact de la révolution industrielle sur les modes de vie. Louis René Villermé : tableau de l’état physique et moral des ouvriers employés avec attention particulière du rapport existant entre l’état de santé des ouvriers et leurs conditions socio-économiques.
Un nouveau type d’observation épidémiologique D’une étude principalement descriptive des épidémies de maladies infectieuses et transmissibles, l’épidémiologie serait devenue le lieu privilégié de l’analyse statistique des étiologies complexes de tout type de pathologie au milieu du XXe siècle.
L’intégration et l’adaptation des techniques issues de la statistique mathématique, principalement développée dans les années trente par des Britanniques comme Ronald Fisher et Karl Pearson, auraient contribue a ces principales modifications. Méthodes d’enquête d’observation qui sont associées avec le traitement de la causalité et de la multifactorialité des maladies.
Une loi, des moyens Les moyens informatiques qui se sont développés en termes de puissance permettent à de nombreuses équipes désormais de travailler sur de très volumineuses bases de données.
Une loi Huygens pose le premier le problème de l'application du calcul des probabilités a d'autres domaines que celui des jeux de hasard. Il travaille ainsi sur l'espérance de vie humaine, a partir de données récoltées a Londres, en liaison avec des problèmes de rentes et annuités. Jacques Bernoulli va explicitement fonder cette application du calcul des probabilités à d’autres thématiques.
La gestion de ces bases de données devient alors un des axes forts de l’observation de la santé dans son acceptation large mélangeant technicité et expertise.
Observation de la santé
En France : de moins 60 à MNSS
« Avoir la santé, c’est pouvoir travailler ! »
On est passé du concept simpliste de l’absence de maladie qui se traduisait dans certains milieux par :
Question épidémiologique dans la période des années cinquante
à une acceptation plus large en rapport
avec la définition de l’OMS* qui comprend :
* « La santé est un état complet de bien-être physique, mental et social qui
ne consiste pas seulement en l’absence de maladies ou d’infirmités… »
bien-être et qualité de vie
environnement
adaptation des populations
- Années 60 : notion qui s’élargit
1re publication réalisée par l’Inserm sur « l’état sanitaire des Français » à la fin
de la préparation du Ve Plan 1966-1971 qui dépasse la seule connaissance des
équipements sanitaires et sociaux ; création d’une section statistique au
ministère de la santé et reprise par l’Inserm de l’exploitation des causes de
décès.
1977 : congrès du Centenaire de la Société française
d’hygiène, de médecine sociale et du génie sanitaire
« Bases scientifiques de décisions en santé publique »
- Années 70 : Volonté de structuration
VIe Plan 1971-1976 – réflexion sur les composantes définissant « l’état de santé
de la population » : démarche épidémiologique et dispositif alliant national et
régional ; élaboration de tableaux statistiques cherchant à consolider le lien
entre l’information et la décision ; appropriation du terme d’indicateurs par
les professionnels de santé après ceux du social et de l’économie.
Congrès du Centenaire (1877-1977)
« Bases scientifiques de décisions en santé publique »
La question qui se posait déjà tournait autour de l’augmentation actuelle
des dépenses de santé. C’est pourquoi il devenait essentiel de pouvoir
mesurer l’efficacité des actions entreprises.
Dans ce contexte, des indicateurs devaient être utilisés afin de permettre
de connaître :
les moyens de la collectivité pour maintenir et améliorer l’état de santé,
les caractéristiques sanitaires, sociales, économiques des individus
et des groupes composant cette population.
Il est alors défini que ces indicateurs doivent répondent à certains
critères, notamment de stabilité, de spécificité et d’exactitude, qu’ils
soient fidèles et significatifs de ce qu’ils représentent.
- Années 80 : Décentralisation et rapports sur la santé
Rapport du doyen Cabanel « Pour une meilleure connaissance de l’état
sanitaire des Français » qui a pour objet l’amélioration de la connaissance
de l’état sanitaire des Français en vue d’adapter les différents moyens
d’intervention sur la santé aux besoins réels de la population.
Propose parmi les mesures formant le plan d’action la création d’observatoires
de la santé en parallèle aux observatoires économiques de l’Insee sur le
modèle de deux existants (ORS IDF et Orsas Lorraine)
La direction générale de la santé rédige une brochure sur les indicateurs de
santé, qui commence par cette phrase :
« Poser le problème des indicateurs de santé, c’est poser le problème de la
politique de santé. »
Échelons statistiques renforcés en région -Sesi-
Deux rapports (84 & 89) sur « La santé en France »
Première loi de décentralisation qui n’aborde pas la santé
Apparitions de structures : registres, ORS…
Développement de la recherche en santé publique et évaluation en santé
1982 : CRÉATION DE 4 OBSERVATOIRES DE LA SANTÉ
ACTEURS RÉGIONAUX
COMITÉ CONSULTATIF RÉGIONAL
PROGRAMMES RÉGIONAUX
DE PROMOTION DE LA SANTÉ
O.R.S. DÉTERMINATION
DES BESOINS
LORRAINE
NORD
PAS-DE-CALAIS BRETAGNE
Places des observatoires régionaux de santé (circulaire 4 mars 1982)*
* 2e circulaire en juin 1985 qui précisait les missions et suggérait une composition des CA
AQUITAINE LANQUEDOC-ROUSSILLON
- Années 90 : Nouveaux outils, nouvelles préoccupations
Création du HCSP, qui va publier trois rapports sur l’état de santé des Français,
RNSP puis InVS, Afssa, Afssaps, URML, ARH, Urcam,
CRS, CNS, Drees (succède au Sesi)
Dynamique des tableaux de bord régionaux sur la santé
PMSI, Psas puis PRS, Praps
- Année 2009 : Loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la
santé et aux territoires (HPST du 21 juillet) avec la création des agences
régionales de santé et des CRS qui se voient accoler d’un A, dans le
contexte de la RGPP et notamment l’apparition des DRJSCS
- Années 2000-2005 : Nouvelles structures aux niveaux national et régional,
fertiles en textes de loi (4 mars 2002 et 9 & 13 août 2004) : création de l’Inpes,
l’Afsse(t), INCa, IDS
GRSP, PRSP, CRS modifiées et harmonisées avec CNS
Réflexion sur les besoins à des niveaux géographiques infra régionaux
- Année 2016 : Loi de modernisation de notre système de santé (26 janvier)
avec la création de l’Agence nationale de santé publique -Santé publique
France-, de l’Institut national des données de santé, apparition des GHT
Des lois récentes structurantes (HPST du 21 juillet 2009 et MNSS du 26 juillet 2015)
La loi du 21 juillet 2009 : l’aboutissement d’un processus
Réforme du système de santé français : la régionalisation de la
politique de santé, engagée depuis le milieu des années 90, passe
à une autre étape avec cette loi.
Avril 2010 : création dans chacune des 26 régions de France d’une
agence régionale de santé (ARS).
L’ARS a pour mission de mettre en place la politique de santé dans la
région. Elle est responsable de la sécurité sanitaire, des actions de
prévention, de l’amélioration de l’accès à des soins de qualité et de
l’organisation territoriale du système de santé.
La loi du 21 juillet 2009 : l’observation de la santé mentionnée comme
primordiale dans la mise en œuvre de la politique de santé
Art. L. 1431-2. − Les agences régionales de sante sont chargées, en
tenant compte des spécificités de chaque région :
« 1o De mettre en œuvre au niveau régional la politique de sante
publique définie en application des articles L. 1411-1-1 et L. 1411-2,
en liaison avec les autorités compétentes dans les domaines de la
sante au travail, de la sante scolaire et universitaire et de la protection
maternelle et infantile.
«À ce titre :
« a) Elles organisent, en s’appuyant en tant que de besoin sur les
observatoires régionaux de la sante, la veille sanitaire, l’observation
de la sante dans la région, le recueil et le traitement des signalements
d’évènements sanitaires ;
…
La loi du 26 janvier 2016 : rassembler les acteurs de la santé autour
d’une stratégie partagée (227 articles)
Article 193 : Créer les conditions d’un accès ouvert aux données de santé
« IV. – Pour le système national des données de santé et pour les traitements
utilisant des données à caractère personnel issues de ce système :
3° L’accès aux données s’effectue dans des conditions assurant la
confidentialité et l’intégrité des données et la traçabilité des accès et
des autres traitements, conformément à un référentiel défini par
arrêté des ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et du
numérique, pris après avis de la Commission nationale de
l’informatique et des libertés ;
Article 160
1° Le a du 1° de l’article L. 1431-2 est ainsi rédigé :
« a) Elles organisent l’observation de la santé dans la région, en
s’appuyant en tant que de besoin sur les observatoires régionaux de
la sante, ainsi que la veille sanitaire, en particulier le recueil, la
transmission et le traitement des signalements d’événements
sanitaires ; »
Calendrier des décrets d’application
Système national des données de santé : catégories et mise à
disposition des données. Mai 2016
Information des personnes concernées quant à la réutilisation
possible de données, à des fins de recherche, d’étude ou d’évaluation,
et aux modalités d’exercice de leurs droits. Juillet 2016
Une observation nécessairement partagée
L’information dont les responsables de la santé
ont besoin pour la prise de leurs décisions n’est pas seulement
celle relative à la santé proprement dite :
Information sur les besoins de la collectivité
Éducation, logement, emploi, environnement, etc…
Information sur les contraintes à prendre en considération
Habitudes, traditions, législation, etc….
Information sur le comportement d’autres espaces de décision
Consommateurs, médecins, progrès techniques et scientifiques,
opinion publique, etc…
En résumé : bien qu’intégrées au système de santé, les structures
traitant de l’information doivent aussi pouvoir être identifiées du reste
du système et être indépendantes quant à leur réflexion, leurs
analyses et leurs productions.
Santé
Social
Décision
Médico-social État des lieux
Offre Pratiques
de recours
Décision
Territoire
La quadrature du triangle
Quel territoire pour quelles données ?
L’analyse des données et la prise de décision doivent prendre en compte une
réalité statistique, une réalité du terrain et une réalité politique.
Ces trois réalités s’inscrivent parfois dans des unités géographiques
différentes.
Comment alors concilier ces diverses déclinaisons ?
D’un point de vue technique, cela nécessite de disposer de matrices de
passage d’une unité géographique à une autre avec une base minimale
nécessaire
la commune (l’iris)
en intégrant la contrainte statistique de ne pas contrevenir aux dispositions de
la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique et aux libertés et en conformité
avec la loi du 7 juin 1951 sur « l'obligation, la coordination et le secret en
matière de statistiques ».
- Communes, quartier, iris
(commune unité satisfaisante pour une toute petite partie des communes car souvent trop petites et,
pour les plus importantes, le quartier ou l’iris est parfois plus pertinent)
- Cantons
(compromis entre réalité statistique et finesse, difficulté sur les grosses communes notion de pseudo
canton, pas d’arbitrage politique)
- EPCI, Pays
(EPCI de taille fort voisine au canton, base des politiques locales, définis en avril 2016 1er janvier
2017, s’associait au pays par construction)
- Territoires de santé
(de taille variable suivant les régions, le plus souvent départemental parfois régional)
- De nombreux autres territoires
(territoires de proximité, bassins de vie, bassins gérontologique, circonscriptions d’action sociale,
bassins formation emploi, zones d’emploi…)
Une diversité d’unités géographiques
classe 3
classe 4
classe 2
classe 1
classe 5
classe 6
0 30 60 km0 30 60 km 0 30 60 km 0 150 300 km
0 75 150 km
© EDITERRA & GeoConcept SA
Paris 2010, reproduction interdite
classe 7
Indicateurs liés au
système de santé
INFORMATIONS Observation
Prévisions
Décisions
Actions Évolutions
De l’observation à l’action
Des diagnostics de santé comme outils d’aide à la décision
Des diagnostics de santé avec comme objectifs :
d’améliorer la connaissance de la situation socio-sanitaire par les
acteurs (élus, professionnels, population)
de recenser les ressources locales (professionnels, associations,
équipements…) qui sont susceptibles d’être mobilisées pour la mise
en œuvre des actions
de générer un consensus autour de ces constats
de déterminer quels problèmes doivent être traités en priorité
de repérer les facteurs qui peuvent être favorables à l’action ou qui,
à l’inverse, risquent de constituer des freins
de mobiliser les acteurs en vue d’un travail commun vers une
programmation d’actions locales
De nombreux acteurs en région peuvent participer à la construction des
diagnostics :
Une observation « généraliste » menée au niveau régional
Les fonctionnalités au sein des institutions et organismes régionaux
contribuant aux recueils et à l’analyse de données
Des dispositifs spécifiques par thème (santé, logement, transport, emploi
…) ou par populations (mère et enfant, jeunes, séniors…)
Une ressource à mobiliser et à coordonner pour accompagner la
définition, la mise en place et le suivi des politiques sanitaires et médico-
sociales
Enjeux
Des travaux à affiner sur la relation santé environnement
Des outils à construire pour disposer d’une état des lieux
médico-social parallèle à celui de la santé et du social
Des indicateurs de santé plus précis sur la population en âge
d’être active en complément de ce qui se fait sur les jeunes
(en établissements d’enseignement) et sur les personnes âgées
(santé travail et… santé non travail)
Le lien entre santé et social et notamment le rôle des
plateformes sociales et sanitaires
Relation épidémiologie/efficience du système (coût)
De nature technique…
Des bases de données au niveau des iris
Des données au niveau de la commune, par rapport au code postal
Les appariements de fichiers pour permettre le lien santé social
Au moins un module social dans les recueils santé
Extension régionale pour des enquêtes nationales s’inscrivant dans la
stratégie nationale de santé (ou réflexion sur des modélisations possibles)
La prise en compte permanente des contraintes statistiques
Une méthodologie rigoureuse, aussi bien pour les approches quantitatives
(outils communs et validés de construction, calcul et analyse des indicateurs)
que pour les approches qualitatives complémentaires avec un axe essentiel,
l’articulation entre le niveau régional et le niveau national
…technique (suite)
Coût des fichiers de données
Conventions partenariales
SNDS et sécurisation de l’accès aux données à caractère personnel (CASD ?)
Paysage nouveau avec loi Notre et MNSS
Une nouvelle approche intégrative, couvrant le champ sanitaire et le champ
médico-social, le soin et la prévention, l’ambulatoire et les prises en charge
en établissement… nécessitant un abord pluri-thématique
Un pilotage en synergie entre commanditaires et opérateurs avec un
nécessaire partage des connaissances entre utilisateurs, décideurs et usagers
Une réflexion sur les outils à utiliser en concertation avec les acteurs des
territoires qui seront retenus pour la détermination des priorités et des
actions
Le choix de vouloir reposer ou non sur l’observation pour accompagner les
politiques publiques et donc in fine les moyens à y consacrer
D’essence politique
La preuve du besoin d’une observation de la santé et d’outils pour la permettre
n’est plus à faire, l’histoire étant là pour nous le rappeler…
… avec le fait que si la santé a son décideur, d’autres acteurs sont également
indispensables dans l’amélioration du l’état de santé.
L’information sur la santé demeure toujours insuffisante à tout niveau alors
que pourtant les moyens de traitement se sont développés…
… dans un contexte d’Open data mais parallèlement de sécurisation renforcée
certes indispensable mais qui ne doit pas entraver pour autant les travaux
Nécessaires à l’accompagnement des politiques publiques territorialisées.
Les démarches qualité et l’expertise quant à l’utilisation des bases de données
complexes doivent être renforcées collectivement pour que les décisions
soient de façon pragmatique mieux optimisées et efficientes…
...et ce d’autant plus avec la prise en
compte
de la modification du paysage institutionnel
et du contexte économique actuel
D’ou un constat !
2 questions pour conclure
Après un recul de plus d’un demi-siècle, peut-on considérer que l’observation de la santé a contribué à la collectivité France ? Assurément oui, les ORS ayant pris une part importante pour sa contribution
Je vous remercie
Le métier d’observateur s’est profondément modifié, avec une accélération ces toutes dernières années mais avec des contraintes nouvelles. Quelle place alors pour une observation régionale ? Une observation régionale, et surtout adaptée aux différents territoires infra de décision qui sont nombreux, a toute sa place, aujourd’hui encore plus qu’hier, dans un modèle qui reste à réinventer entre les différents interlocuteurs que ceux-ci soient des utilisateurs, des producteurs, des experts ou des décideurs avec le souci permanent de conserver l’être humain au centre de toute orientation