odontologie

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  • Thrapeutique tiopathogniquede la carie dentaire

    Y Hakel

    Rsum. La maladie de la carie dentaire a connu une diminution substantielle chez les enfants et les jeunesadultes dans la plupart des pays industrialiss, mais reste la principale cause de ldentation.Jusqu ces dernires annes, la dentisterie stait focalise sur le traitement mcanique et chirurgical dessquelles de la carie dentaire par la ralisation de cavits ou par le remplacement des obturations.Actuellement, une meilleure connaissance de la maladie permet danticiper sur ltablissement des lsions parlinstauration des stratgies qui permettent de prvenir, de contrler la maladie et, dans le cas o elle estinstalle, darrter ou de rendre rversibles les lsions initiales par des thrapeutiques non invasives. Lediagnostic devient donc provisoire. Seules les lsions actives sont restaures.Lapproche mdicale individuelle et personnalise du patient pratique au cabinet dentaire permet desupprimer les causes de la maladie lors de la phase prventive, mais aussi dvaluer le risque carieux partirde la dtermination : de lindice du taux de renouvellement de la plaque aprs prophylaxie mcanique, dunombre de caries traites et non traites (bilan clinique et radiographique), des analyses microbiologiques dela salive, de la motivation lhygine buccodentaire et aux soins prventifs, et du mode alimentaire.Des thrapeutiques non invasives sont mises en place. Il sagit de prvenir le dveloppement de la carie parune information et une instruction du patient aux techniques dhygine buccodentaire visant liminer lefacteur tiologique, de prvenir les rcidives des caries par un contrle mcanique professionnel de la plaque,de prvenir, ralentir, arrter ou rendre rversibles les lsions carieuses infracliniques par lapplication de vernis la chlorhexidine et/ou au fluor. Les observations pidmiologiques ont dmontr que lutilisation combinedes agents de scellement des sillons dentaires et des agents fluors topiques tait efficace.Par ailleurs, une harmonisation dans les mthodes combines de fluoration simpose pour viter lessurdosages et lapparition de la fluorose dentaire. Seuls les dentifrices fluors sont recommands dans lescommunauts fluores ou non fluores. 2001 Editions Scientifiques et Mdicales Elsevier SAS. Tous droits rservs.

    Mots-cls : carie, risque carieux, prvention, reminralisation, fluor, fluorose, chlorhexidine, scellement desillons, analyse salivaire.

    Introduction

    Les objectifs de la thrapeutique tiopathognique de la carie sontdempcher linitiation du processus carieux ou dcourter celui-cidans les premiers stades de son dveloppement. La carie dentairepeut tre prvenue par des thrapies connues et matrises et pardes interventions prcoces. Les stratgies dintervention dans lathrapeutique tiopathognique reposent sur la connaissance de lanature de la carie dentaire, la dtermination des facteurs desusceptibilit et lvaluation du risque.

    Facteurs de cariosusceptibilit

    PIDMIOLOGIE DE LA CARIE DENTAIRE

    Plusieurs tudes attestent que la prvalence des caries dans les paysindustrialiss tend diminuer. Les pays scandinaves, par exemple,

    Youssef Hakel : Professeur des Universits-praticien hospitalier, chef du dpartement dodontologieconservatrice-endodontie, universit Louis Pasteur, institut national de sant et de recherche mdicale(INSERM U-424), facult de chirurgie dentaire, 1, place de lHpital, 67000 Strasbourg, France.

    montrent une importante rduction de lactivit carieuse durant ladernire dcennie, ainsi quune diminution de ldentation. Mais,paralllement, dans certains pays de lEurope du Centre et de lEst,la prvalence des caries reste leve. Il existe en effet de grandesvariations entre les pays et il apparat que certaines populations deniveau socioconomique dfavoris prsentent encore desprvalences de carie leves. La frquence des caries chez les adultesest proportionnelle lge ; chez les sujets plus gs, on note unenette augmentation des caries radiculaires.Les effets bnfiques dune prvention bien applique sur larduction des lsions carieuses pour une tranche dge donne dunepopulation sont mis en vidence par la diminution de lindice CAO.Lindice dun sujet est la somme de ses dents caries (C), absentespour cause de carie (A) et obtures (O), alors que lindice de lapopulation est la moyenne des indices des sujets.En 1981, la Fdration dentaire internationale et lOrganisationmondiale de la sant (OMS) [27] ont adopt comme premierindicateur global de la sant dentaire une moyenne de lindice CAOinfrieure 3 lge de 12 ans pour lan 2000. En 1991, lOMS aramen cet indice moins de 1,5 lge de 12 ans pour lan 2015(tableau I) [98].La comparaison des indices CAO 12 ans dans les divers paysdEurope prouve quun certain nombre de pays ont dores et dj

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    Toute rfrence cet article doit porter la mention : Hakel Y. Thrapeutique tiopathognique de la carie dentaire. Encycl Md Chir (Editions Scientifiques et Mdicales Elsevier SAS, Paris, tous droits rservs), Odontologie,23-010-F-10, 2001, 21 p.

  • atteint les objectifs de lOMS pour lan 2000, notamment lEuropedu Nord. En France, deux enqutes pidmiologiques nationales ontt entreprises en 1987 et 1991. Elles ont concern un chantillonreprsentatif de plus de 18 700 coliers gs de 6 15 ans [16]. Lacomparaison des rsultats entre 1987 et 1991 montre une importantediminution de la prvalence de la carie tous les ges, tant auniveau des dents permanentes que des dents temporaires. LindiceCAO 12 ans est pass de 4,24 en 1987 2,59 en 1991, soit unerduction de 38,91 %. Dans les pays scandinaves, en Angleterre eten Suisse, les prvalences moyennes de la carie sont infrieures 2,grce aux mesures de prvention collectives bases sur la fluorationde leau de boisson ou du sel de table depuis de nombreuses annes.Les pays dEurope de lEst prsentent des indices CAOgnralement moyens ou levs et tendant augmenter [65].La situation de la prvalence de la carie dentaire outre-Atlantiquemontre de grandes disparits. On relve aux tats-Unis un indiceCAO moyen de 1,4 12 ans. Cet indice trs bas est le fruit demesures de prvention collectives bases principalement sur lafluoration de leau de boisson, dbutes dans les annes 1950. AuCanada, la prvalence de la carie est plus leve quaux tats-Unis.Cependant, une rduction importante de la prvalence carieuse at observe ces 15 dernires annes la suite de la fluoration deleau de boisson qui concerne la moiti de la population, deprogrammes de prvention en milieu scolaire, de lusage trsrpandu de supplments fluors et des scellements des puits etsillons dentaires.Alors que les donnes disponibles sont abondantes pour lespopulations jeunes, elles sont en nombre limit pour les adultes. Lesactions de prvention commencent se concrtiser chez ladultejeune. En effet, on observe une diminution des caries chez les adultesjeunes dans les pays o le dclin sest amorc dans les annes 1970.Dans la tranche dge moyenne des 35-44 ans, la proportion de dentsobtures a augment. Plusieurs tudes menes aux tats-Unis et enAngleterre font apparatre, dans tous les groupes dge, unerduction du nombre de dents caries et de dents absentes, et,paralllement, une augmentation des dents soignes [97]. De faongnrale, bien que la prvalence des caries ait diminu de faonnotable chez les jeunes adultes dans plusieurs pays industrialiss, lacarie continue dtre la principale raison de ldentation.Dans les pays en voie de dveloppement, prvalence carieusebasse, on note une tendance laugmentation des indices de carie.Dans une enqute nationale effectue aux tats-Unis entre 1988 et1991, sur 12 138 sujets gs de plus de 18 ans [97], il apparat que lescaries radiculaires ou cervicales se dveloppent dans les plus hautestranches dge. Pour lensemble de la population tudie, on value 22,5 % la proportion de patients prsentant des caries radiculaires,6,9 % pour la tranche dge 18-24 ans, et 55,9 % pour la tranche75 ans et plus.Pour rpondre la question : Quelles sont les raisons principalesqui font que les personnes ges de 20 25 ans ont moins de cariesque celles dil y a 30 ans ? , un questionnaire de 25 items portantsur lalimentation, les fluorures, la plaque, la salive, les matriauxdentaires, le praticien et les autres facteurs a t envoy 52 expertsinternationaux de pays technologiquement dvelopps [13].Lvaluation de limportance des facteurs expliquant la rduction

    de la carie est ralise partir dun score allant de 0 4. Lvaluationpar les experts de limpact des divers facteurs sur la diminution dela carie prsente de grandes variations. Seuls les fluorures sontretenus par 40 experts sur les 52 consults. Le fluor contenu dans lesptes dentifrices est retenu par 63 % des experts concerns commele facteur expliquant lui seul la diminution de la carie dans uneproportion de plus de 40 % (score 4).Le rle de llimination de la plaque semble controvers ; personne lheure actuelle ne peut affirmer avec certitude que le brossage desdents rduit la carie dentaire. En effet, aucune corrlation na jamaist tablie entre la quantit de plaque et la carie, ce qui nest pas lecas pour les gingivites et les maladies parodontales. Par ailleurs, larduction de la carie de ces trois dernires dcennies concidegalement avec laugmentation exponentielle de lusage desantibiotiques, mais ce facteur na pas t retenu par les experts.Cependant, il existe des particularits, au Japon par exemple, odepuis 1970 la carie dentaire dcline, alors que lusage du fluor restelimit. La diminution de consommation des sucres dans ce payspendant cette mme priode constitue vraisemblablement le facteurle plus dterminant [63].

    NATURE DYNAMIQUE DU PROCESSUS CARIEUX

    La carie dentaire est un processus dynamique avec des priodes deprogression alternant avec des priodes darrt ou de rparation.Les priodes actives de la maladie varient considrablement dansleur dure et leur intensit entre diffrents groupes de population,dindividus, et, pour un mme patient, en fonction de lge et peut-tre selon les moments de la journe. Comme toute maladie,lvolution du processus dpend de lquilibre instable entrelintensit des facteurs pathologiques et la rponse biologique dedfense. Il existe une multitude de facteurs influenant cet quilibretels que des facteurs gntiques, physiologiques, socioculturels,alimentaires, salivaires [38]. Lvaluation de lun de ces facteurspourrait constituer un marqueur biologique de prdiction delinitiation, du dveloppement ou de larrt dun processuscarieux [55]. Linitiation de la lsion carieuse au niveau dune surfacedentaire, lmail au niveau coronaire ou le cment dune racineexpose, est souvent explique par des sries de phnomnesphysicochimiques dans lesquels les acides produits par lemtabolisme de la plaque bactrienne induisent unedminralisation de subsurface des tissus calcifis de la dent.Lvolution va dpendre de lquilibre entre les facteursphysicochimiques tels que la solubilit des tissus calcifis et le pH,la permabilit et la concentration ionique dans lenvironnement dela dent. Cependant, ce phnomne biologique est modul par lescellules salivaires scrtoires responsables de la qualit et de laquantit de salive prsente et par des cellules locales et distantesintervenant dans les mcanismes de dfense immunitaire. Cesphnomnes montrent combien la carie dentaire, processusbiologique complexe et dynamique, ne peut tre dfinie en termesdobservation dune perte de substance au niveau dune surfacedentaire.Le dveloppement dune lsion carieuse met en jeu des interactionsde nombreux facteurs entre lenvironnement de la cavit buccale etla surface des tissus calcifis de la dent. Le processus carieux estiniti par la fermentation des hydrates de carbone par les bactriesde la plaque qui vont produire une varit dacides organiques etfaire chuter ainsi le pH. Dans un premier temps, le proton (H+) estneutralis par le systme tampon de la plaque et de la salive maislorsque le pH continue baisser, le milieu sappauvrit en ions OH

    et PO43 qui ragissent avec H+ pour former H2O et HPO42.Lapatite de lmail est dissoute lorsque la phase aqueuse devientinsature par rapport la phase cristalline et que le pH descend endessous de la valeur critique de 5,7 [5, 6].La dissolution de lmail ou du cment est dfinie comme unedissolution chimique des cristaux dapatite par les acides produitspar le mtabolisme des bactries.La lsion rosive et carieuse correspond une dissolution acide dela surface de la dent par des agents acides. La lsion carieuse est

    Tableau I. Objectifs de lOrganisation mondiale de la sant pourlan 2015 en Europe.

    ge Objectifs

    - 6 ans 80 % ou plus indemnes de caries- 12 ans Indice CAO infrieur 1,5- 18 ans Pas de dents absentes pour causes de carie- 35-44 ans Indice CAO infrieur 10

    Moins de 2 % ddents90 % des personnes dentes devraient avoir au moins 20 dentsnaturelles

    - 65-74 ans Moins de 10 % ddents

    Indice CAO : somme, pour un sujet, de ses dents caries (C), absentes pour cause de carie (A) et obtures (O).

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  • caractrise par la prsence dune lsion de dminralisation desubsurface recouverte par une couche de surface minralise.Lrosion affecte directement la surface de la dent et rsulte de laconsommation excessive dagrumes et de nombreuses boissons etjus de fruits acides.Les modifications ultrastructurales peuvent rendre visibles leslsions carieuses aprs une srie de dminralisations-reminralisations qui peuvent se drouler sur quelques mois ouquelques annes.Les interactions entre les proprits de solubilit et de dissolutionde lapatite dune part et les ractions dadsorption du fluor lasurface de lapatite dautre part vont entraner larrt ou lareminralisation de la lsion. Le fluorure de calcium (CaF2) joue lerle de rservoir de fluor ; des globules de fluorure de calciumrecouverts de phosphate et de protines ont t dcrits [66] dont lasolubilit augmente lorsque le pH diminue. Aprs applicationstopiques de fluor des concentrations de 1 2 % (vernis, gels), leCaF2 prcipite dans les micropores et microcanaux des lsionscarieuses de lmail [44], entranant le blocage des voies de passagevers la zone de dminralisation de subsurface : on parle alors delsion arrte. Les apports de faibles doses de fluor sur des priodesplus longues (dentifrices, bains de bouche) favorisent lareminralisation et la rversion des lsions [87].

    RELATION ENTRE PLAQUE BACTRIENNEET CARIE DENTAIRE

    La carie dentaire est une maladie infectieuse transmissible,provoque par les bactries cariognes de la cavit buccale quicolonisent la surface dentaire en formant un biofilm communmentappel plaque dentaire. La dminralisation acide des tissus calcifisde la dent est induite par des acides organiques qui sont produitspar le mtabolisme des sucres des bactries de la plaque dentaire.La flore bactrienne buccale est constitue de plus de 250 taxons enassociations intragnriques ou intergnriques. Organise sousforme dun biofilm multignrique, elle est associe audveloppement de la pathologie carieuse mais aussi parodontale.Deux types de plaque dfinis en fonction de leur localisationanatomique sont dcrits : la plaque supragingivale implique dansla pathologie carieuse et la plaque sous-gingivale associe auxpathologies gingivales et parodontales. Certaines espces telles queStreptococcus mutans, S. sobrinus et Lactobacillus, identifiables dansce biofilm, sont cariognes et constituent les espces colonisatricesprimaires des surfaces dentaires par interaction avec des molculesdorigine salivaire. Le dnominateur commun de ces bactriescariognes est, dune part que celles-ci sont susceptibles de coloniserles surfaces dentaires selon des mcanismes saccharose-dpendantset -indpendants, dautre part quelles produisent des acidesorganiques, notamment de lacide lactique, capables de dissoudre lafraction inorganique apatitique des dents partir des glucidesalimentaires. La colonisation initiale des surfaces dentaires par lesbactries cariognes est une tape saccharose-indpendante au coursde laquelle les micro-organismes se fixent sur la pellicule exogneacquise, constitue principalement de glycoprotines salivaires [40].La seconde tape de la formation du biofilm est saccharose-dpendante. Grce leur quipement enzymatique englucosyltransfrases (GTF), les bactries cariognes laborent despolysaccharides extracellulaires incorpors dans la matriceinterbactrienne de ce biofilm. Ces polysaccharides sont despolymres solubles (dextranes) et insolubles (mutanes) du glucose.Les espces bactriennes de la flore buccale expriment des facteursde virulence (tableau II) dont les effets sont observables localementet certains distance : facteurs de colonisation (adhsines), depersistance (agressines, toxines, impdines, protines de stress,facteurs dinhibition, effecteurs de limmunit) et de destructiontissulaire (agressines, acidognicit, activits protasiques, activitspro-inflammatoires). Les streptocoques de la cavit buccalecolonisent les surfaces dentaires par lintermdiaire des adhsines(I/II, Lrals) qui sont des constituants protiques de la paroibactrienne. S. mutans joue un rle cl la fois dans le

    dclenchement et le dveloppement du processus carieux grce

    son mtabolisme de type homofermentaire (fig 1), mais aussi sacapacit produire des homopolymres de glucose liaison 1-6(dextranes solubles) synthtiss par des GTF. La plupart des souchesde S. mutans possdent trois gnes codant pour des enzymessynthtisant des polymres insolubles (gtfB, gtfC) et solubles (gtfD).Les GTF participent aux capacits dadhrence des streptocoquescariognes par lintermdiaire des polymres de glucose quellessynthtisent [14, 67]. Les enzymes impliques dans le stockageintracellulaire des polysaccharides seraient aussi des lments decariognicit.La dtermination du taux de S. mutans dans la cavit buccale ou un site dentaire prsente une grande importance dans la prdictionde la carie et le diagnostic des patients haut risque carieux [48]. Lesnumrations des colonies se font facilement au cabinet dentaire parle test CRT Bacteriat (Vivadent, France). Dans une tude prospectivesur 2 ans, 78 % des caries de sillons diagnostiques avaient tprdites. Une corrlation positive a t tablie entre lincidencecarieuse et le taux de S. mutans [11]. S. mutans associ Lactobacillusprend une autre signification. La mise en vidence de ces deuxespces prs dune lsion proximale indique la progression de cettelsion et, prs dune surface radiculaire, indique le risque dedveloppement dune carie radiculaire [11]. Une tude rcente montreque le pronostic des caries de sillons peut tre tabli dans 78 % descas par la dtermination du taux de S. mutans avec une valeurprdictive positive de 29 % et ngative de 92 % [84]. S. mutans etLactobacil lus sont fortement associs linitiation et audveloppement de la carie de lmail. Par consquent, lutilisationde la combinaison de plusieurs espces en rapport avec un site peutservir dindicateur de ltat ou de linitiation dune lsion chez unindividu.Par mthode tlmtrique, Imfeld, ds 1978, a montr que le rinageavec une solution sucre 10 % entranait une importante chute depH, en dessous dun pH de 4 au niveau de la plaque interdentairede 3 jours [52]. Firestone [29] a mesur lvolution du pH sur diffrentssites interproximaux par la mme technique aprs rinage avec une

    Tableau II. Facteurs de virulence de Streptococcus mutans .

    - Adhrence- Agrgation interespces- Synthse de dextranes- Production dacide lactique- Synthse de polyoside intracellulaire- Survie en milieu acide

    JT

    Saccharose

    Saccharose 6PScr B

    glc6P + fru Glc1P + fruGTF A

    Glycolyse PSI

    H+

    Dex Bglc

    Glycolyse

    PTS msm msm

    IsomaltotrioseDextranase

    DextranesMutanesGTF B C D

    PBMC

    1 Mtabolisme du saccharose chez Streptococcus mutans . GTF B, C, D : gluco-syltransfrase B, C, D ; PB : paroi bactrienne ; MC : membrane cytoplasmique ; PTS :systme de transport des sucres phosphotransfrase-dpendants ; msm : systme detransport des sucres dpendant de lopron msm ; Scr B : saccharose-phosphorylase ;GTFA : saccharose-polyphosphorylase ; Dex B : dextrane-glucosidase ; PSI : polymrede glucose intracellulaire ; glc : glucose ; fru : fructose.

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  • solution sucre 10 % (fig 2). Llimination mcanique de la plaqueinterdentaire parat essentielle dans la diminution de la carie. Dansles pays europens, ce contrle de la plaque interdentaire par le fil,les brossettes ou autres moyens est pratiqu par moins de 10 % dela population.La dtermination de la quantit de plaque et de sa localisation chezle patient ne donne pas dinformation sur lge de la plaque et surson taux de renouvellement. Lindice de taux de renouvellement dela plaque (ITRP) mis au point et valid par Axelsson [4] est unlment de diagnostic important dans lvaluation du risque carieux.

    RELATION ENTRE ALIMENTATION ET CARIE DENTAIRE

    Rle des sucres dans la cavit buccale

    Les tudiants qui avaient suspendu leur hygine buccodentairependant 3 semaines et qui se rinaient avec une solution sucre 50 % neuf fois par jour dveloppent des caries. Les lsions carieusessont arrtes 1 mois aprs la reprise du contrle de la plaque etdutilisation de fluor [93]. Loe et al [59] ont repris la mmeexprimentation mais en associant un rinage biquotidien lachlorhexidine (CHX) 0,2 %. Aucune carie na t observe pendantla dure de lexprimentation mene chez des tudiants. Cesrsultats confirment que la plaque dentaire est le facteur tiologiqueet que le sucre est un facteur de risque externe.Lanalyse des tudes cliniques montre que le contrle chimique dela plaque par la CHX peut entraner plus de 46 % de rduction de lacarie [91]. Les dentifrices et les autres agents fluors montrent unerduction de seulement 25 % de la carie. La CHX agit directementsur le facteur tiologique alors que le fluor est un facteur externequi modifie le risque carieux agissant sur la phase minrale.Le dveloppement de la carie dentaire est en rapport avec certainsconstituants de lalimentation. Cependant, la carie nest pasconsidre comme une maladie de nutrition. Le processus carieuxest plutt considr comme une affection rsultant des effets locauxde la surconsommation par voie buccale de certains typesdaliments. Ceux-ci sont essentiellement constitus par diversglucides assimilables qui ont des potentialits cariognes variables.La consommation de glucides a progressivement augment depuisle Moyen ge. Jusquau XVe sicle, les sucres taient surtout rservsaux classes privilgies et la consommation moyenne par personnetait de lordre de 1 kg par an. Actuellement, dans les paysindustrialiss, la consommation moyenne par personne est de lordrede 40 kg par an (50 kg pour lAustralie et 30 kg pour lEspagne).Historiquement, les sucres ont connu un dveloppement sans pareil :la production totale annuelle de sucre qui tait de 8 millions detonnes en 1900 est passe 83 millions en 1973. Le sucre produit partir de la canne sucre a connu le dbut de son extension enEurope, surtout aprs les voyages de Christophe Colomb, alors quelexploitation du sucre de betterave sest dveloppe partir duXVIIIe sicle. Dans lalimentation humaine, les glucides proviennentnon seulement des sucres de betterave et de canne, mais galement

    des fruits et des produits amylacs, des crales, pommes de terre etlgumineuses. Tous ces glucides peuvent tre mtaboliss plus oumoins rapidement par les bactries cariognes pour couvrir leurbesoin en nergie [38].

    La corrlation entre consommation de glucides et carie dentaireressort galement de ltude de certaines populations qui, pour desraisons de changements denvironnement, ont modifi rapidementdes habitudes alimentaires ancestrales.

    Pendant des gnrations, lalimentation des Inuits du Groenland secomposait principalement des produits de la pche et de la chasseet tait pauvre en glucides. Ces Inuits ne prsentaient pratiquementpas de caries. Limplantation de bases militaires sur leur territoirependant la Seconde Guerre mondiale a entran une modificationspectaculaire de leurs habitudes alimentaires avec consommation deglucides. La carie dentaire prit immdiatement des proportionsimportantes.

    Une illustration tout aussi difiante est celle des habitants de Tristanda Cunha, groupe dles anglaises situes dans locan Atlantique louest du cap de Bonne-Esprance. Les autochtones de ces les senourrissaient essentiellement de produits de la pche. Leurs dentstaient pratiquement indemnes de caries. Par suite druptionsvolcaniques, les habitants de Tristan da Cunha ont d tre vacusen Angleterre o ils ont consomm une livre de sucre par semaineet par personne. Les examens dentaires ont montr que 50 % desmolaires permanentes taient caries chez les sujets jeunes de moinsde 20 ans [38].

    Un autre exemple de corrlation entre la consommation de glucideset la carie dentaire est fourni par une maladie rare, savoirlintolrance hrditaire au fructose. Il sagit dun trouble dumtabolisme du fructose, conditionn gntiquement et li unedficience en aldolase fructose-1, phosphate du foie. Chez les sujetsatteints de cette maladie, la consommation daliments contenant dufructose ou du sucre de canne provoque des nauses, desvomissements et une sudation excessive pouvant aller jusqu desconvulsions et au coma. Lingestion de glucides tant donc trsfortement rduite chez ces malades, plus de la moiti sont indemnesde caries et prsentent une trs faible prvalence carieuse [38].

    Potentiel cariognique des aliments

    Lalimentation joue un rle essentiel dans la formation et ledveloppement de la carie dentaire. Les observations ralises invitro, chez lanimal et chez lhomme, ont mis en vidence unerelation entre la frquence de consommation des sucresfermentescibles et la frquence carieuse [12]. Lalimentation agitlocalement sur le mtabolisme de la plaque et particulirement sursa capacit produire des acides. Le pH est le facteur dterminantdans la balance dminralisation/reminralisation de lmail (fig 1).Le principe des mesures intraorales du pH est lune des mthodesles plus simples pour dterminer la cariognicit potentielle desaliments [24, 52, 79]. Le potentiel cariognique est li leur contenu ensucres. Les sucres le plus frquemment rencontrs danslalimentation sont le glucose et le fructose (monosaccharides), lesaccharose, le maltose et le lactose (disaccharides), lamidon(polysaccharide). Le saccharose est considr comme le pluscariognique :

    il constitue la forme sucre la plus courante ;

    il est facilement fermentescible en acides organiques par lesbactries de la plaque ;

    il favorise la colonisation de la cavit buccale par S. mutans ;

    il augmente la quantit de la plaque en servant de substrat parproduction des polysaccharides extracellulaires.

    Cependant, plusieurs travaux montrent que le glucose, le fructose etle sucre inverti sont galement fortement cariogniques [12, 52]. Lelactose a le potentiel cariognique le moins lev par rapport ausaccharose, au glucose et au fructose. Tous les tests de mesure dupH de la plaque interdentaire montrent dans tous les cas une chute

    JT

    Temps

    PlaquepH

    1

    2

    3

    4

    4 3 21

    2 Baisse du pH de la plaque quatre niveaux interproximaux diffrents aprs rin-age avec une solution de glucose 10 % [29].

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  • de pH, mais plus prononce pour le fructose, le glucose, le maltoseet le saccharose. Le pH considr comme critique est de 5,7 [52]. Ence qui concerne lamidon, les rsultats semblent dpendre de laforme sous laquelle il est consomm. Lamidon naturel, non cuit, estnettement moins cariognique que les autres sucres. Firestone et al[29, 30] montrent que lamidon associ au saccharose seul devient pluscariognique et cette cariognicit augmente avec la frquence deconsommation. La frquence carieuse basse enregistre est plus enrapport avec la frquence rduite de consommation quavec le typede sucre dans lalimentation. La figure 3 montre les frquenteschutes de pH en corrlation avec le nombre de repas ou de collationsdans la journe [23]. Par ailleurs, la rduction de la frquence desrepas potentialise leffet anticarie du fluor.

    Concentration en sucre

    La chute de pH et sa dure sont plus prononces aveclaugmentation des concentrations en sucre. Cependant, les teststlmtriques intraoraux ne montrent pas de diffrences trsimportantes entre des solutions de concentrations de 2,5 10 %. Lesdiffrentes solutions font chuter le pH pour une longue dure. LepH critique peut tre atteint dans la plaque interproximale, mmeavec des solutions sucres de 0,1 1 % [52]. Les teneurs en sucredpassant 10 % ne provoquent pas plus de baisse de pH. Cependant,le saccharose est galement un facteur important dans la synthsedes polysaccharides extracellulaires de la plaque ; par consquent,la consommation frquente daliments haute teneur en sucre est dconseiller.

    Rmanence des sucres dans la cavit buccale

    Les proprits physiques et organoleptiques des aliments telles quela taille des particules, la solubilit, ladhrence, la texture et le gotinfluencent les habitudes alimentaires, le flux salivaire et le sjourdes sucres dans la cavit buccale. Pendant et aprs la mastication,les aliments sont limins sous leffet de la salive, grce lactivitdes muscles masticatoires de la langue, des lvres et des joues. Ladure dlimination est prolonge par des facteurs propres ladenture ou par une forte viscosit de la salive ou par une faibleactivit musculaire.Les sucres contenus dans les fruits, les lgumes et les boissons sontnormalement limins de la cavit buccale en 5 minutes. Ceuxapports par les chewing-gums, les caramels et les bonbonssubsistent dans la cavit buccale pendant 20 40 minutes.La grande rsistance la mastication de certains aliments et laconsommation de certains corps gras rduisent le temps de prsencedes sucres en bouche. La mastication, aprs consommation desaccharose, de produits fromags, de cacahutes, de chewing-gumssans sucre, neutralise trs rapidement le pH de la plaque [10, 52].Les variations individuelles dans la vitesse dlimination des sucreset les habitudes alimentaires sont des facteurs aussi importants quele choix des aliments pour tablir la cariognicit dun rgimealimentaire.

    Composants alimentaires protecteurs

    Les aliments qui rduisent activement les effets des sucresalimentaires en inhibant la dminralisation, en rduisant ou enprvenant la formation ou laccumulation des acides dans la plaquesont considrs comme ayant une action thrapeutique. Desinhibiteurs naturels de la dminralisation sont prsents dansplusieurs aliments tels que lacide phytique dans les crales, lacideglycyrrhizinique dans les produits de rglisse et un facteur nonidentifi dans le cacao. Certains facteurs sont supprims par leraffinage des produits. Des effets bnfiques sont galementattribus aux fromages, en raison de leur teneur leve en calciumet en phosphates et de leur action inhibitrice de la glycolyse [50].La stimulation salivaire par les chewing-gums sans sucre induit uneffet favorable sur la reminralisation, le mtabolisme de la plaqueet llimination des lactates de la plaque [50, 57].Des inhibiteurs de la dissolution acide de lmail ont t galementproposs comme additifs dans les aliments, tels que des phosphatesorganiques et inorganiques [23].

    Substituts du sucre

    De nombreuses recherches ont t entreprises pour trouver dessubstituts de saccharose. Les nombreux dulcorants disponibles,caloriques ou non, sont utiliss de faon restreinte et rglemente.Les substituts non caloriques du sucre, classs non cariogniques, lasaccharine, le cyclamate et laspartame, sont utiliss commedulcorants dans les boissons, le caf et le th.Le fructose, le galactose et le sucre inverti gardent un potentielcariognique lev. Les alcools de sucre, tels que le sorbitol et lelycasin, possdent un potentiel cariognique faible, alors que celuidu xylitol est considr comme nul.Le xylitol est prfrable au sorbitol et au lycasin dans les produitsfrquemment consomms. Ces dulcorants sont utiliss dans leschewing-gums, les pastilles, les bonbons et les mdicaments. Leurconsommation doit tre rduite en raison de leur effet secondairelaxatif. En prvention, le but principal consiste rduire laconsommation des produits sucrs et particulirement leurfrquence. Toutefois, les dulcorants sont recommands pour desproduits de quantit rduite consomms frquemment [10].

    RELATION ENTRE SALIVE ET CARIE DENTAIRE

    Facteurs organiques non spcifiques

    La cavit buccale est protge contre la carie dentaire par desfacteurs immunitaires et non immunitaires. Les facteurs nonimmunitaires, synthtiss localement dans les glandes salivaires,sont essentiellement des protines enzymatiques (tableau III).Le lysozyme a des proprits antimicrobiennes dterminantes quilaissent supposer une corrlation avec lactivit carieuse [89].Cependant, toutes les tudes cliniques ne confirment pas cettehypothse.

    JT

    8,0

    7,0

    6,0

    5,0

    8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 heurespH

    pla

    que

    petitdjeuner

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    chocolatbanane JT

    8,0

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    8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 heures

    pH p

    laqu

    e

    petit djeuner caf djeuner th dner caf

    3 Corrlation entre la frquence des repas et collations par jour et les chutes de pHchez deux sujets A et B ayant deux modes alimentaires diffrents (daprs Edgaret Higham [23]).

    *A*B

    A. Repas + collations + boissons sucres.B. Repas + boissons non sucres.

    Odontologie Thrapeutique tiopathognique de la carie dentaire 23-010-F-10

    5

  • La lactoferrine, comme le lysozyme, est capable dinhiber lesbactries cariognes. Sa dtermination napparat pas essentiellepour poser un diagnostic dans la prdiction de la carie.Le systme peroxyde se compose de trois facteurs (enzymes,thiocyanate [SCN] et peroxyde dhydrogne [H2O2]) et a une actionprotectrice multiple aussi bien antibactrienne, antimutagniquequantiarcinognique. Son adjonction dans les ptes prophylactiquesdonne des rsultats cliniques controverss.Des composs organiques tels que les mucines ont des capacitsdagglutiner des bactries buccales. Les mucines sont desglycoprotines de haut poids molculaire qui interviennent dansladhsion et lagglutination des bactries la surface des apatites.Cohen et al [20] ont montr dans la salive submandibulaire dungroupe rsistant la carie une activit dagglutination trois foissuprieure celle dun groupe cariosensible. Le groupe de protinesriches en histidine participe linhibition de la croissance et de lamultiplication bactrienne.La dtermination dans la salive totale dune activit leve duneenzyme bactrienne telle que le sucrase, indique une consommationleve en sucres. Cependant, aucune corrlation ne peut tre tablieavec lactivit carieuse.La scrtion des glandes submandibulaires et de la parotide contient8 10 mg de lipides dans 100 mL de salive. Des diffrencesquantitatives sont observes dans la composition en lipides de lasalive provenant de sujets cariorsistants et de sujets cariosensibles.Les lipides comme les mucines ont des capacits de modifierladhrence des bactries la surface de la dent [82].

    Facteurs organiques spcifiques

    Le systme de dfense spcifique du milieu buccal repose sur lesconstituants du complment, activable par deux voies, dont onconnat le rle dans le chimiotactisme et la granulation desbasophiles, et sur les immunoglobulines (Ig). Les lments ducomplment sont apports par le fluide gingival.Les Ig des salives humaines sont essentiellement les IgAS(scrtoires) (tableau III). Ces IgAS se retrouvent dans toutes lesscrtions externes (salives, larmes, colostrum, scrtions intestinaleset bronchiques) o elles constituent le principal mdiateur delimmunit humorale. Une petite quantit dIgA non scrtoires estprsente dans le fluide buccal, sans doute apport par le fluidegingival. Prs de 30 % des IgAS du fluide buccal trouvent leurorigine dans les scrtions des glandes salivaires mineures. Les IgASexercent leur effet antibactrien [53] de plusieurs faons par :

    inhibition de ladhrence bactrienne aux surfaces :

    par agglutination des micro-organismes ;

    par rduction de lhydrophobicit ;

    par blocage des adhsines bactriennes ;

    neutralisation des toxines et enzymes bactriennes ;

    inhibition de la pntration dun antigne travers les surfacesmuqueuses ;

    opsonisation par les polynuclaires et macrophages muqueux.On trouve aussi dans le fluide buccal, en petites quantits, des IgG,IgA non scrtoires et IgM apportes essentiellement par le fluidegingival.Des interactions synergiques ou antagonistes entre les diverssystmes antimicrobiens peuvent modifier leurs effets [77].En conclusion, il apparat que des recherches sont ncessaires pourla mise au point de tests qui intressent lactivit antimicrobiennetotale, ainsi que la capacit de la salive dagglutiner les bactries etde prvenir leur adhsion lhydroxyapatite. Ces tests, combinsaux tests physicochimiques et aux analyses bactriennes, pourrontconstituer un biomarqueur valable dans le diagnostic decariosusceptibilit.

    Facteurs inorganiques

    Solubilit de lmail

    Il est bien tabli que les concentrations leves de calcium, dephosphate inorganique et de fluor dans la salive et/ou un pH levprotgent lmail de la dminralisation en stabilisant la phaseminrale (tableau IV). Cependant, la majorit du calcium est lie auphosphate et des protines complexes, et le calcium restant librevarie considrablement dun individu lautre.La concentration de fluor salivaire varie trs peu, seulement soninterprtation est influence par lapport alimentaire et lesapplications topiques de fluor. Plusieurs tudes ont prconis unecorrlation entre lactivit carieuse, les concentrations de calcium oude phosphate et le pH. Mais ces associations nont pas de valeurdiagnostique dans la prdiction de la carie. Il en est de mme de laconcentration de fluor salivaire et de la carie.

    Flux salivaire

    Le flux salivaire semble influencer la concentration initiale des sucresdans la cavit buccale et leur limination ainsi que celle des acidesde la plaque (tableau IV). Il est bien connu que la xrostomie et lesscrtions anormalement rduites de salive augmentent la sensibilit la carie. Cependant, le dbit salivaire varie considrablement entreles individus dans un rapport de dix [68]. Le paramtre flux descrtion salivaire pris en considration seul naurait donc pas devaleur dans la prdiction de la carie dentaire. Sullivan etSchrder [86], en retenant la valeur de flux salivaire (< 0,7 mL/min)comme un facteur de risque, nobservent un dveloppement de lacarie aprs 1 an que chez 54 % des sujets prsentant un flux salivaireinfrieur ce seuil critique. Dans tous les cas, le syndrome de labouche sche li (tableau V) la xrostomie ou lhypofonction desglandes salivaires est rechercher dans lvaluation du risquecarieux. Les causes principales relvent le plus souvent detraitements mdicamenteux (tableaux VI, VII).

    Pouvoir tampon

    Le pouvoir tampon est li au systme bicarbonate, acide carboniqueet bicarbonates (tableau IV). Ce facteur apparat tre important ; soneffet est prononc quand la scrtion est stimule par mastication,

    Tableau III. Principales protines antimicrobiennes de la salivetotale.

    Protines non immunoglobulines

    - Lysozyme- Lactoferrine- Systme peroxydase salivaire (enzymes-SCN-H2O2)- Systme myloperoxydase (enzyme-SCN-/halide-H2O2)- Agglutinines- Glycoprotines de la salive parotidienne- Mucines- Microglobuline b2- Fibronectine- Protines riches en histidine- Protines riches en proline

    Immunoglobulines

    - Immunoglobulines A scrtoires- Immunoglobulines A non scrtoires- Immunoglobulines G- Immunoglobulines M

    Tableau IV. Facteurs protecteurs de la salive.

    - Ions Ca2+ et PO43-

    - Pellicule- Tamponnement par les bicarbonates- Flux salivaire (dilution des sucres)- Clairance buccale (vacuation des sucres)- Contenu en ions fluorure (reminralisation)- Facteurs immunologiques et antibactriens

    23-010-F-10 Thrapeutique tiopathognique de la carie dentaire Odontologie

    6

  • do lintrt de recommander la mastication de chewing-gum sanssucre aprs chaque repas. Le pouvoir tampon varie galement dansune grande mesure entre les individus de 3,6 7,8 [68].Plusieurs tudes ont montr une corrlation ngative entre lepouvoir tampon de la salive ou la concentration inorganique de lasalive et lactivit carieuse.La plaque bactrienne sert de rservoir dions, son pouvoir tamponest dix fois suprieur celui de la salive. Ces ions sont librs quandle pH diminue lors de la glycolyse, aussi linterprtation desrsultats concernant les concentrations dions salivaires et le pH dela plaque est-elle complexe. Selon des donnes rcentes, il apparatdifficile de corrler lactivit carieuse avec les facteurs inorganiquesou physiques de la salive. Les raisons sont certainement lies

    ltiologie multifactorielle de la carie. Par consquent, il serait plusjudicieux de dvelopper des tests de prdiction de la cariecombinant la salive et la plaque [38, 68].

    MAIL ET CARIE DENTAIRE

    Caractristiques morphologiques

    Certaines tudes, en tablissant une corrlation entre la taille desdents temporaires ou permanentes et lactivit carieuse, montrentque les dents de petite taille sont plus rsistantes la cariedentaire [21]. Cependant, les mesures effectues lchelleindividuelle nont pas de valeur de diagnostic de sensibilit la cariedentaire.Certaines variations morphologiques peuvent galementprdisposer la carie dentaire. La forme des cuspides et laprofondeur des sillons sont prendre en considration. Lamorphologie dentaire, et tout particulirement celle des sillons, restenanmoins un facteur individuel de prise en considration de lancessit deffectuer ou non un scellement des sillons dentaires.

    Structure et ultrastructure de lmail

    La prsence dune couche dmail de surface aprismatique dunepaisseur de 10 30 m pourrait constituer un facteur de plusgrande rsistance la carie dentaire. Cependant, la localisation etltendue occupe par cette couche aprismatique peuvent tre trsvariables. Ces variations existent non seulement entre la denturetemporaire et la denture permanente, mais dune dent lautre etdun site lautre la surface de la mme dent [43].Linitiation du processus carieux la surface de lmail prismatiquese fait linterface prisme-substance interprismatique. Cette zonecorrespond la gaine prismatique minralise chronolo-giquement aprs la substance interprismatique et le prisme lors dudveloppement embryologique de la dent [31, 44]. La prsence de cesvoies de passage explique la prsence de la lsion de subsurfacedans la carie dbutante de lmail. Le fluor pourrait agir ce niveaupour favoriser la reminralisation partielle ou totale de ces lsionsinfracliniques.Les observations ultrastructurales de lmail cari montrentgalement des lsions selon des plans cristallographiquesdtermins lchelle du monocristal de lapatite de lmail. Ladissolution initiale du cristal qui se dveloppe de faonanisotropique le long de laxe pourrait correspondre desdislocations observes ce niveau [31].Lutilisation de la microscopie haute rsolution associe aux calculsdimages permettant lheure actuelle de visualiser des sitesioniques et des dfauts cristallins de lmail normal et cari peutcontribuer la comprhension des mcanismes de dissolution etdaction des fluorures. Le blocage ventuel de ces sites deprdilection du dveloppement initial du processus carieux, aussibien lchelle du prisme que du cristal, ncessite encore plus derecherches.

    Composition chimique de lmail

    Fluor et cariosusceptibilit

    Plusieurs tudes ont tent dtablir une corrlation entre la teneuren fluor de la surface de lmail et la frquence carieuse. Cependant,les rsultats de ces tudes varient considrablement en fonction delimportance de lchantillon, de la technique de biopsie de lmailutilise, de la dent choisie et du site de lmail retenu. Parconsquent, il apparat difficile de considrer la simple biopsie delmail comme un indicateur valable de la sensibilit la cariedentaire dun individu ou dune population.La distribution du fluor dans lmail des dents temporaires etpermanentes est en relation avec la teneur en fluor de leau deboisson. La teneur en fluor dcrot rapidement de la surface delmail vers la jonction amlodentinaire, qui se traduit par une

    Tableau V. Symptmes buccaux associs lhypofonctionnementdes glandes salivaires.

    Symptmes principaux

    - Bouche sche (xrostomie)- Soif- Dysphagie- Dysphonie- Difficults manger des aliments secs- Besoin davaler de leau au cours des repas- Difficults porter des prothses- Frquentes interventions pour garder une bouche humide- Frquentes douleurs et irritations de la gorge, ressemblant une amygdalite

    Autres symptmes

    - Sensations de brlure et de chatouillement, particulirement sur la langue- Sensations anormales au goter (dysgueusie)- Garde un liquide son chevet la nuit- Fissures et gerures au coin des lvres

    Symptmes normaux associs la xrostomieet lhypofonctionnement des glandes salivaires

    - Gorge sche- Yeux : vision trouble ; brlures, sensations de dmangeaisons ; sensations desable, de grumeaux ; utilisation rgulire de gouttes- Vagin : scheresse, dmangeaisons, brlures, vaginites rcurrentes- Peau sche- Constipation frquente- Scheresse nasale

    Tableau VI. Principales causes dhypofonctionnement des glandessalivaires et de la xrostomie.

    - Mdicaments ayant une incidence sur la scrtion salivaire- Irradiation thrapeutique, particulirement dans les rgions du cou et de la tte- Maladies systmiques- Conditions rhumatismale (maladies vasculaire-collagne et des tissus conjonctifs)exemple : syndrome de Sjgren- Dysfonctionnement du systme immunitaire, exemple : sida- Dsordres hormonaux, exemple : diabte- Dsordres neurologiques, exemple : maladie de Parkinson- Dshydratation- Dsordres psychiques, exemple : dpression- Anorexie nerveuse, malnutrition, jene frquent- Mnopause- Lithiase des glandes salivaires- Vieillissement- Baisse de lactivit de mastication (rgime alimentaire liquide, aliments mous)

    Sida : syndrome de limmunodficience acquise.

    Tableau VII. Mdications ayant une incidence dpressive sur lascrtion salivaire.

    - Sdatifs - Antihistaminiques- Anorexignes - Antiallergisants- Antidiarrhiques - Neuroleptiques- Prparations antiacniques - Antiparkinsoniens- Antirhumatismaux - Psychotropes- Antispasmodiques - Diurtiques- Antidpresseurs - Anxiolytiques

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  • relation logarithmique entre la teneur en F de lmail et laprofondeur partir de la surface. La microdistribution est bientablie par Weatherell et al [94] et les rsultats principaux sont :

    le fluor saccumule dans lmail lors du dveloppement et sonincorporation lmail continue aprs lruption de la dent ;

    lessentiel du fluor la surface de lmail est acquis avantlruption et secondairement pendant la phase de maturationpostruptive ;

    la capacit de la surface de lmail dacqurir le fluor diminueavec lge et la maturation de lmail ;

    la distribution de fluor au niveau des diffrentes localisations dela mme dent est trs complexe et varie au cours de la vie de ladent ;

    labrasion et lusure rduisent la teneur en fluor des bordstriturants et des faces occlusales ;

    lmail incorpore le fluor plus rapidement en prsence dunehypominralisation ou dune dminralisation acidognebactrienne ;

    le fluor exerce une action protectrice de degr variable selon lessites la surface de la dent ; le plus grand degr de protectionaccord aux fluorures concerne les surfaces lisses et, dans unemoindre mesure, les puits et les sillons dentaires ; la protection estplus grande sur les surfaces vestibulaires et linguales ou palatinesque sur les faces msiales et distales ; les dents antrieures sontmoins protges que les postrieures ;

    leffet protecteur de la fluoration dpend essentiellement de lafluoration du milieu environnant de la dent dans la phasepostruptive.

    Oligolments et cariosusceptibilit

    Les principaux oligolments associs lactivit carieuse sont lestrontium, le slnium, le plomb, le cuivre, le lithium et le zinc. Dansune analyse mene sur 451 chantillons dmail portant sur unecinquantaine doligolments, une corrlation positive est tablieavec la frquence carieuse pour le manganse, le cuivre et lecadmium, et une corrlation ngative est note avec laluminium, lefer, le slnium et le strontium [21].Toutefois, les oligolments peuvent se dplacer en profondeur delmail partir de la surface et vers le milieu extrieur lors duprocessus carieux. La concentration dun oligolment la surfacede lmail au moment de linitiation du processus carieux est plusimportante que sa concentration dans lmail total. Par consquent,lanalyse de lmail total ou de surface ne peut pas constituer unindicateur valable de la prdisposition la carie [21].

    Solubilit de lmail et cariosusceptibilit

    Le prlvement de lmail par biopsie pour dterminer la teneur enfluor peut tre utilis galement pour lanalyse de la solubilit et deson ventuelle corrlation avec la sensibilit la carie. La solubilitde lmail peut tre corrle dautres oligolments que le fluor.Les tudes ralises chez lhomme ne montrent aucune corrlationsignificative entre la solubilit de lmail et la prdisposition lacarie dentaire [21].

    Dtermination du risque carieuxDes biomarqueurs physicochimiques, microbiologiques,biochimiques et immunologiques ont t utiliss isolment ou ensrie dans des tests cliniques de prdiction de la carie dentaire. Lacombinaison de plusieurs tests est souvent ncessaire pour tablirune bonne prdiction.

    TESTS PHYSICOCHIMIQUES

    Taux de scrtion salivaire partir de la quantit totale de salive accumule dans la cavitbuccale, il est possible de dterminer le dbit salivaire.

    Habituellement, le taux de scrtion salivaire est mesur aprsstimulation la paraffine pendant une priode de 5 minutes. Ce tauxdoit tre suprieur 3,5 mL ( 0,7 mL/min) ; sil tait plus faible,une deuxime valuation lors dune consultation ultrieure devraitapporter une confirmation. Le risque carieux est lev si cette valeurest infrieure 0,2 mL/min. Lhyposialie constitue un facteur derisque lev pour la carie et lrosion dentaire. Les causes les plusfrquentes de ce taux de scrtion salivaire rduit sont constituespar les effets secondaires de la prise de certains mdicaments, parlandropause, la mnopause, lanxit et par les maladies du tissuconjonctif (tableaux VI, VII) [74]. Les nombreux symptmes de labouche sche sont relever lors de linterrogatoire (tableau V).

    Pouvoir tampon salivaire

    Le pouvoir tampon salivaire est dtermin trs facilement par lamthode CRT Buffert (Vivadent, France). Un pouvoir tampon faibleindique un risque plus grand de caries et drosions. La stimulationdu dbit salivaire par une alimentation adquate et par lamastication de chewing-gums augmente gnralement le pouvoirtampon. La mesure du pH a une valeur diagnostique trs limite,bien que le pH infrieur 5,3 soit considr comme un facteur derisque [25].

    TESTS MICROBIOLOGIQUES

    numration de Streptococcus mutans

    La dtermination des taux de S. mutans et de Lactobacillus a unegrande importance dans la prdiction de la carie [9] . Lesnumrations des colonies se font facilement au cabinet dentaire parle test (Vivadent). Pour la dtermination de Lactobacillus et de S.mutans, une lamelle recouverte dun milieu slectif base dagar estimprgne de chaque ct de 1 mL de salive recueillie pralablementpar stimulation la paraffine. Cette double lamelle place dans untube capuchon viss est incube pendant 48 heures 37 C.Le schma de distribution des colonies de Lactobacillus sur une dessurfaces de la lamelle est compar un tableau dvaluationstandard qui comprend quatre catgories : 103, 104, 105, 106 unitsde colonies en formation (UCF).Pour la dtermination des S. mutans, les colonies dnombres surune des deux faces de la lamelle sont classes selon quatre niveauxcomparativement au tableau dvaluation :

    0 UCF : pas de croissance ;

    1 20 UCF : moins de 105 S. mutans UCF/mL de salive ;

    21 100 UCF : 105 106 S. mutans UCF/mL de salive ;

    plus de 100 UCF : plus de 106 S. mutans UCF/mL de salive.Les numrations leves en Lactobacillus sont souvent associes une consommation leve de saccharose et constituent parconsquent un diagnostic de mauvaises habitudes alimentaires. Lacombinaison des deux tests est ncessaire pour une meilleureprvision. Des patients avec des numrations faibles en S. mutanspeuvent tolrer des quantits plus importantes de sucresfermentescibles dans leur alimentation, ce que rvlent lesnumrations leves en Lactobacillus, comparativement despatients avec des numrations leves en S. mutans (> 105

    UCF/mL).Par ailleurs, les patients montrant des taux levs en S. mutans nesont pas ncessairement dans un tat dactivit carieuse leve sileur alimentation est pauvre en sucres, ce que montre unenumration faible en Lactobacillus [9].

    Indice du taux de renouvellement de la plaque (ITRP)

    LITRP mis au point et valid par Axelsson [4] est un lment dediagnostic important dans lvaluation du risque carieux. Laquantit de plaque forme sur les faces dentaires 24 heures aprsleur nettoyage mcanique professionnel est la rsultante des

    23-010-F-10 Thrapeutique tiopathognique de la carie dentaire Odontologie

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  • interactions de nombreux facteurs tiologiques, externes et internesmodifiant le risque carieux et les facteurs protecteurs tels que :

    la population bactrienne buccale totale ;

    la qualit de la flore bactrienne buccale ;

    lanatomie et la morphologie des surfaces de la dent ;

    le degr dhumidification et la tension superficielle des surfacesde la dent et des restaurations ;

    le taux de scrtion salivaire et autres proprits de la salive ;

    lingestion des sucres fermentescibles ;

    la mobilit de la langue ;

    lexposition aux forces masticatoires et labrasion par lesaliments ;

    le stade druption des dents ;

    le degr dinflammation gingivale et le volume dexsudationgingivale ;

    les habitudes individuelles dhygine buccale ;

    lutilisation de fluor ou autres produits prventifs tels que desagents chimiques de contrle de la plaque.Cet ITRP ncessite au pralable une mise zro mcaniqueprofessionnelle de la plaque dentaire et une interruption de brossagedentaire. Le patient est convoqu au cabinet dentaire 24 heures plustard et lon ralise une rvlation de la plaque. lexclusion desfaces occlusales, six sites sont examins par dent : les facesvestibulaires, les espaces proximaux msiovestibulaire etdistovestibulaire, les faces linguale ou palatine, les espacesproximaux msiolingual ou msiopalatin et distolingual oudistopalatin. Pour dterminer lITRP, les sites dentaires o la plaqueest prsente sont totaliss et ce total est multipli par 100 puis divispar le nombre des dents et des sites examins.

    Nombre des sites avec plaque x 100Nombre des dents examines x 6

    ITRP =

    chelle de classification et signification de lITRP :

    score 1 : 1 10 % des faces recouvertes de plaque = risque carieuxtrs faible ;

    score 2 : 11 20 % des faces recouvertes de plaque = risque carieuxfaible ;

    score 3 : 21 30 % des faces recouvertes de plaque = risque carieuxmodr ;

    score 4 : 31 40 % des faces recouvertes de plaque = risque carieuxlev ;

    score 5 : plus de 40 % des faces recouvertes de plaque = risquecarieux trs lev.Dans de nombreuses tudes longitudinales, lITRP a t valid etcorrl lindice gingival (GI), lindice de plaque (PI), lalimentation pendant les 24 heures o lhygine buccodentaire at suspendue et au S. mutans salivaire.La combinaison de lITRP et du test S. mutans prsente unesensibilit de 93 % et une sensibilit de 61 % dans la prdiction durisque carieux [6].Les sujets ITRP suprieur au score 3 dveloppent, sur une priodede 5 ans, cinq fois plus de caries proximales que les sujets ITRP descore 1-2 associ un taux de S. mutans salivaire faible. Dans unepopulation prvalence carieuse faible, la proportion des patients risque reprsente 25 30 % o le score ITRP est suprieur ou gal 3 et le taux de S. mutans salivaire moyen ou lev (fig 4).LITRP permet galement dvaluer les sites risque dans la cavitbuccale o la plaque se reforme 24 heures aprs son limination,mcaniquement, en absence de mesures dhygine buccodentaire.La plaque se reforme essentiellement sur les faces proximalesmsiolinguales et distolinguales des prmolaires et molaires

    mandibulaires (> 80 %), ensuite sur les faces proximalesdistovestibulaires et msiovestibulaires des molaires mandibulaireset maxillaires (> 70 %). noter labsence de plaque sur les facespalatines des dents maxillaires (fig 5).Ces sites de prdilection de la raccumulation de la plaqueconstituent des indicateurs pour la motivation et linstruction destechniques dhygine buccodentaire. Dans une tude longitudinalemene pendant 3 ans So Paulo, llimination de la plaque auniveau des sites risque avant le brossage de toutes les dents permetde rduire la carie de 60 % sur les prmolaires et de 50 % sur lesmolaires par rapport au groupe tmoin qui procdait uniquement un brossage dentaire de toutes les dents [7].

    TESTS BIOCHIMIQUES ET IMMUNOLOGIQUES

    Le test de la saccharase salivaire indique lactivit en invertase de lasalive, par consquent il donne uniquement des informationssimilaires lnumration des Lactobacil lus . Les testsimmunologiques mis au point pour lusage clinique ne sont pasefficaces. Les concentrations salivaires totales en IgG et IgA ne sontpas en corrlation avec lactivit carieuse [83]. Les systmesenzymatiques salivaires posent les mmes problmes ; cependant,ils pourraient offrir des possibilits de prvention de la carie dentairepar leur incorporation dans les ptes dentifrices et les produitsdhygine buccale [88].

    SCORE ITRP

    Aucun risque 25 %

    Risque faible50 %

    Risque modr20 %

    Risque lev5 %

    1 2 3 4 + 5Taux SM / mL de salive

    0

    > 0,5 million

    0,5 - 0,9 million

    1 million

    4 Prdiction du risque carieux bas sur la combinaison du test de Streptococcusmutans (SM) et de lindice du taux de renouvellement de la plaque (ITRP). Aucunrisque carieux : test S. mutans ngatif ; risque carieux faible : test S. mutans positifavec un score ITRP 1 ou 2 ; risque carieux modr : test S. mutans positif avec un scoreITRP 3 ; risque carieux lev : test S. mutans lev avec un score ITRP 4 ou 5 [6].

    JT

    MVDV26

    MAXILLAIRE

    TOTAL

    MPDPV

    P

    16

    23

    TOTALMANDIBULEMVDV MLDL

    VL

    15

    3

    10,5

    %

    ITR

    P

    40

    30

    20

    10

    0

    - 10

    - 20

    - 30

    - 40

    2733

    7,513

    5 Indice du taux de renouvellement de la plaque (ITRP) en 24 heures sur les surfa-ces dentaires au niveau du maxillaire et de la mandibule aprs nettoyage prophylacti-que [4, 5]. MVDV : msiovestibulaire et distovestibulaire ; MLDL : msiolingual et dis-tolingual ; MPDP : msiopalatin et distopalatin ; L : lingual ; V : vestibulaire ; P :palatin.

    Odontologie Thrapeutique tiopathognique de la carie dentaire 23-010-F-10

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  • La dtermination du taux de scrtion salivaire, la mesure depouvoir tampon, lnumration des S. mutans et des Lactobacillus etla dtermination de lITRP devraient faire partie de touteconsultation initiale ou de maintenance de chaque patient pourvaluer le risque carieux et tablir une stratgie de traitementstiopathogniques adapts. Ces quatre tests sont dune aideprcieuse au diagnostic, au mme titre que lexamenradiographique.

    Traitements tiopathogniques

    CONTRLE DE LA PLAQUE ET CARIE DENTAIRE

    Contrle mcanique de la plaque

    Llimination de la plaque et des dbris alimentaires constitue unemesure indispensable la sant buccodentaire. Aujourdhui, 90 %des populations des pays industrialiss brossent leurs dents plus oumoins rgulirement. Cependant, les enqutes pidmiologiques nesont pas unanimes sur la relation entre le brossage et ledveloppement de la carie dentaire. Certaines tudes montrent unecorrlation positive entre la frquence de brossage et la frquencecarieuse [2]. Les investigations se sont orientes vers des enqutessupervises qui considrent plus leffet du nettoyage que le fait dese brosser. Les rsultats des diffrentes enqutes montrent que leffetdu brossage nest effectif que sil est ralis avec un dentifricefluor [51].Aprs son limination, la plaque supragingivale se raccumulelentement ; en labsence de soins, elle reste limite pendant 2 jours,puis augmente considrablement pour atteindre un maximum aprs7 jours. Cependant, de grandes diffrences existent dans lerenouvellement de la plaque entre les diffrents patients. Un certainnombre de facteurs prdisposent cette raccumulation de plaque.La rtention de plaque est favorise par les caries, les obturationsdbordantes ou aux bords dfectueux, les dfauts dadaptationmarginale des couronnes et inlays, les obturations non polies, letartre supragingival et les racines dnudes non polies.La dtection de la plaque rvle par les nombreux colorantsobjective les zones de rtention et guide le patient lors du brossage.Cependant, pour les zones interproximales difficilementcontrlables, il existe des accessoires qui permettent llimination dela plaque ce niveau. Quand les espaces interdentaires sontsuffisamment larges, la brosse interdentaire permet un nettoyageoptimal. Les btonnets interdentaires contribuent llimination dela plaque interdentaire grce leur texture en bois souple et fibreuxet leur forme adapte. Le fil de soie savre ncessaire si la papilleremplit lespace interdentaire.Les hydropulseurs employant un ou plusieurs jets, avec ou sanspulsations, montrent une efficacit incontestable dans lliminationdes dbris alimentaires et constituent un excellent complment debrossage mcanique particulirement recommand aux porteurs deprothses ou dispositifs orthodontiques. La ncessit dun dentifriceest parfois discute, llimination de la plaque dpend plus de latechnique et du temps consacr que du dentifrice. Cependant, ledentifrice reste lunique support rptitif de la motivation pourlhygine dentaire et la sensation de fracheur de la bouche apporte par les essences contenues dans les dentifrices constitue larcompense immdiate de lexcution fastidieuse du brossage.Des tudes cliniques supervises mettent en vidence une relationentre le pouvoir abrasif mesur in vitro et lefficacit clinique dudentifrice, et ce pour un mme type dabrasif. Le problme decompatibilit entre labrasif et lagent thrapeutique,particulirement le fluor, a t largement tudi. Le mono-fluorophosphate (MFP) est compatible avec tous les abrasifs alorsque le fluorure de sodium (NaF) et le fluorure dtain (SnF2) sontlimits aux abrasifs ne contenant pas de calcium. Malgr les rsultatsdiffrents obtenus dans les essais cliniques, les dentifrices fluorscontribuent la rduction de la carie dentaire constate dans

    plusieurs pays industrialiss et particulirement dans ceux oaucune mesure prventive collective systmatique navait t prise.Llimination de la plaque mcaniquement par des professionnelsconstitue un lment dterminant dans la prvention primaire ousecondaire des caries dentaires. Le nettoyage seffectue laide debrossettes et de cupules montes sur un contre-angle tournant 7 000 tours par minute (rpm). Une pte prophylactique fluore etcontenant un abrasif est applique sur toutes les surfaces dentaireset dans les espaces interproximaux. Des contre-angles modifisassocis une instrumentation adapte sont proposs pour lenettoyage des espaces interproximaux par des mouvements de va-et-vient (Profint). Une instrumentation spcifique est propose avecce contre-angle pour llimination des obturations dbordant dansles espaces interproximaux.Des polisseurs projetant de fines particules sont proposs pourliminer ou parfaire le nettoyage des surfaces dentaires maisprsentent le risque de dtriorer les limites marginales desobturations. La mise sur le march dappareillages de conceptionnouvelle facilite leur utilisation, constitue une aide au diagnosticprcoce des lsions carieuses, et facilite la prparation auxscellements des sillons [36].Les techniques de nettoyage retardent la formation de la plaque de24 48 heures et permettent une meilleure application des agentsthrapeutiques tels que les vernis fluors ou la CHX. La frquencedu nettoyage mcanique professionnel de la plaque est de deux foispar an chez le patient faible risque carieux et de trois six foischez le patient risque carieux lev.

    Contrle chimique de la plaque

    Le caractre fastidieux de lutilisation quotidienne dune techniquede brossage rigoureuse, durant toute la vie, ncessite une fortemotivation, une certaine habilet et une bonne instruction. En outre,de nombreuses personnes, handicapes physiquement oumentalement, sont incapables de mettre en uvre correctement lestechniques prconises. Les recherches se sont orientes vers la miseau point dagents chimiques agissant un ou diffrents niveauxpour inhiber la colonisation bactrienne, la croissance et lemtabolisme bactrien ou modifier lcologie et la biochimie de laplaque (tableau VIII). Compte tenu des effets secondaires desantibiotiques, il est exclu de les utiliser de faon systmatique dansla prophylaxie de la plaque dentaire.Ce contrle chimique de la plaque peut tre assur par le patient oupar le professionnel. Le meilleur contrle est garanti par lacombinaison du contrle mcanique et chimique de la plaque assurpar le patient et supplment par le professionnel. titre dexemple,lautocontrle se fait par lutilisation de ptes dentifrices contenantnon seulement des agents abrasifs mais aussi des agents antiplaqueou antimicrobiens tels que le lauryl sulfate de sodium, le fluorstanneux, le triclosan-copolymre ou la CHX. Ces diffrents agentspeuvent galement se retrouver dans des gels, des bains de boucheou du chewing-gum.Pour le contrle chimique professionnel de la plaque, il existedautres composs libration progressive de principes actifs telsque les vernis la CHX.La frquence de ces sances est fonction de lvaluation du risquecarieux. Elle est intensive chez le patient haut risque carieux, dedeux trois fois par mois. Pendant la phase de suivi, de rvaluationdu risque et de maintenance, la frquence est rduite deux ou troissances par an tant que le patient est class en risque carieux faible.

    Tableau VIII. Effets potentiels du contrle chimique de la plaque.

    - Prvenir la formation de la plaque- Rduire le taux de formation de la plaque- Contrler la formation de la plaque- Rduire, dsorganiser ou liminer la plaque existante- Altrer la composition de la flore de la plaque- Exercer une activit bactriostatique ou bactricide sur la microflore- Altrer lnergie de surface de la dent pour rduire ladhrence de la plaque- Inhiber les facteurs virulents librs par la plaque

    23-010-F-10 Thrapeutique tiopathognique de la carie dentaire Odontologie

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  • Classification des agents de contrle chimique de la plaque

    Agents cationiques

    Ces agents sont en gnral plus performants que les agentsanioniques ou non ioniques en raison de leurs liaisons aux chargesngatives de surface des bactries Gram positif et Gram ngatif,ce qui rduit le nombre de bactries ou leur pathogncit [1].Plusieurs groupes cationiques ont t tests et/ou utiliss pour lecontrle chimique de la plaque (tableau IX).De ces agents, la CHX apparat tre la plus efficace, suivie du citratede zinc et du fluor stanneux. La CHX est utilise dans diffrentesformulations galniques telles que les gels, les vernis, les bains debouche, les dentifrices...Son efficacit est confirme par de nombreuses tudes in vivo [58]. LaCHX se prsente sous forme galnique allant de 0,1 0,2 %(poids/volume). Elle doit son efficacit son pouvoir dlution partir des surfaces dentaires et buccales vers la salive. Les bains debouche apportent une rtention de 30 34 %.Il est bien tabli que la CHX inhibe la formation de la plaquedentaire quand elle est utilise deux fois par jour en rinage buccal une concentration de 0,2 %. Sa rmanence prolonge dans la cavitbuccale rend son efficacit plus effective.La CHX possde galement une affinit avec lhydroxyapatite.Lutilisation dune solution de prbrossage Lysoplact (Pierre FabreMdicament, France), contenant de la CHX, rduit ladsorption desprotines la surface de lapatite ou facilite leur dsorption [47].La CHX reste lantiseptique le plus recommand dans la prventionde la plaque dentaire. Son inconvnient est la coloration en brundes surfaces dentaires et de la langue par les bains de bouche. Elleest indique lorsque les mthodes mcaniques doivent tresuspendues ou temporairement renforces et chez le patient hautrisque carieux mais surtout, dans ce dernier cas, sous forme devernis. Elle permet linhibition partielle de la plaque supragingivaleet prsente une activit spcifique sur S. mutans [40]. On a constatque lusage dun vernis contenant de la CHX associe au thymol(Cervitect, Vivadent) [32] entrane la rduction de la carie des sillons.Dautres tudes cliniques attestent une rduction de la carieradiculaire de 45 60 % aprs application de ce vernis antimicrobien.Ce vernis semble particulirement indiqu chez les jeunes patientsporteurs dappareils orthodontiques fixs [80].Petersson et al [71] ont observ, pendant une dure de 3 ans, ledveloppement et la progression des caries proximales chez desenfants gs de 12 ans et rpartis en deux groupes traits tous les 6mois par application dun vernis de CHX 1 % (Cervitect,Vivadent) et dun vernis au fluor 0,1 % (Fluorprotectort, Vivadent)pour le premier et uniquement dun vernis fluor pour le second.Les deux traitements savrent efficaces, mais aucune diffrencestatistiquement significative na t releve entre les deux groupes,alors que la combinaison des deux vernis est efficace dans larduction de S. mutans de la salive et de la plaque [90].Laction antiplaque du SnF2 a t confirme dans plusieurs tudescliniques. Lassociation fluorure damine et SnF2 sembleparticulirement prometteuse et plus efficace que la CHX 0,1 % [78].Les ammoniums quaternaires se rvlent moins efficaces que la CHXdans le contrle de la plaque [78].

    Le rle des antiseptiques et des antibiotiques ne peut tre quetransitoire, additionnel ou suppltif.

    Agents anioniques

    Le surfactant, sulfate de sodium lauryl, est lagent chimiqueanionique le plus frquemment utilis dans le contrle chimique dela plaque. Il entre souvent dans la composition des dentifrices oudes bains de bouche comme dtergent. Il est inactiv par les agentscationiques telle que la CHX.

    Agents non ioniques

    La listerne et le triclosan sont les plus utiliss dans le contrlechimique de la plaque, suivis par dautres composs phnols(tableau X).Lagent antibactrien non ionique, le triclosan, associ uncopolymre dther polyvinylmthyle et dacide malique, prsentelavantage de rduire la plaque, les gingivites, le tartre et les caries,sans effet secondaire et sans modifier lcologie de la microflorebuccale [92].Lavenir est aux composs qui combinent plusieurs actions tels que :

    triclosan associ au citrate de zinc (Pepsodentt) ;

    triclosan associ un copolymre (Colgatet) ;

    triclosan associ du fluor (Colgate Plust) ;

    triclosan associ du MFP de sodium, du citrate de zinc et ausulfate de sodium lauryl (Pepsodent Ultrat) ;

    CHX associe au NaF et au lactate de zinc (Crestt, Procter etGamble) ;

    fluorure stanneux associ du fluorure damine (Mridolt).Llimination mcanique de la plaque par le patient nest pastoujours possible au niveau des puits et sillons ainsi quau niveaudes espaces interproximaux ; ainsi, le contrle chimique de la plaquesavre tre une mthode de supplmentation transitoire lorsquelleest ralise par le patient et priodique lorsquelle est applique parle professionnel. Dans la cavit buccale, seulement une vingtainedespces bactriennes sur les 350 prsentes sont incrimines dansles maladies parodontale et carieuse. Par consquent, pour prserverlcologie et lquilibre de la cavit buccale, laction antimicrobiennedevrait tre mieux cible et transitoire.

    FLUOR DANS LA THRAPEUTIQUE TIOPATHOGNIQUE

    Mcanismes daction du fluor

    Lamlioration de la cristallinit par fluoration de lapatite et larduction de la solubilit acide de lmail sont les deux mcanismesproposs (tableau XI). Le fluor peut avoir une action sur lacomposition de la flore microbienne et/ou sur lactivit mtabolique

    Tableau IX. Agents chimiques cationiques de contrle de la plaque.

    Dtergents bisbiquanidiques CHX et alexidine

    Ammoniums quaternaires Chlorure de ctylpyridiniumChlorure de benzthoniumBomide domiphon

    Sels de mtaux lourds Cuivre, tain et zinc

    Pyrimidines Hextidine

    Extraits de plantes Sanguinarine

    CHX : chlorhexidine.

    Tableau X. Agents chimiques non ioniques de contrle de la plaque.

    - Phnol- Thymol- Listrine (thymol, eucalyptol, menthol, salicylate de mthyle)- Triclosan- 2-Phlyphnol- Hexyl rsorcinol

    Tableau XI. Effets potentiels des fluorures au contact direct aveclmail et la dentine.

    - Forment la fluoroapatite/hydroxyapatite fluore, moins solubles que lhydroxyapa-tite- Inhibent la dminralisation- Favorisent la reminralisation- Inhibent le mtabolisme bactrien- Rduisent la permabilit de la structure dentaire- Inhibent la formation de la plaque

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  • des micro-organismes, mais la teneur en fluor de la salive estrelativement rduite pour avoir un rel effet antibactrien. Laconcentration de fluor dans la plaque est comprise entre 15 et 75ppm.Au cours de lamlogense, la prise de fluor amliore la cristallinitdes phosphates de calcium en cours de formation. Le fluor favorisela stabilit des cristaux au sein de la maille cristalline en produisantdes liaisons hydrogne avec loxygne des ions hydroxyle. Le fluoroccupe galement les sites laisss vacants par les ions hydroxyle [95].Laugmentation de la stabilit de la structure cristalline va induireune rduction de la solubilit de lmail. Ce mcanisme ne peutavoir lieu que pendant la phase prruptive de formation de lmail.Laction prventive du fluor a t longtemps attribue sonincorporation dans lmail avant lruption dentaire. lheureactuelle, les preuves scientifiques supportant cette thorie sontfaibles.Les informations rcentes montrent que le fluor incorpor danslmail lors du dveloppement naugmente pas de faon significativela rsistance de la dent au dveloppement du processus carieux. Ladiffrence de solubilit rduite entre lhydroxyapatite et lafluorapatite nexplique pas la rduction du taux de carie observedans les rgions hyperfluores. La diffrence de teneur en fluor delmail selon quil est form dans les rgions fluores ou nonfluores, est galement trs rduite, infrieure 1 000 ppm lasurface de lmail. Les techniques de prvention qui permettentdexposer les surfaces dentaires de faibles concentrations de fluorsur des priodes prolonges sont plus efficaces que lingestion dequantits leves de fluor espaces dans le temps.Dans un modle exprimental, il est dmontr que la dissolutionacide de lapatite est contrle par la diffusion des ions linterfacesolide/liquide [72, 73]. Au cours des temps initiaux, le fluor acclre ladissolution, entranant laccumulation linterface du calcium et duphosphate qui va secondairement rduire la dissolution de lapatite[33, 34]. Ce modle montre tout lintrt de leffet cariostatique du fluorpar application topique. Lessentiel des ractions physicochimiquesse produit la surface de lapatite.De nombreuses tudes in vitro et in vivo ont montr les effets dufluor sur la carie dbutante de lmail. Le fluor exerce un effet dereminralisation, particulirement faible concentration. Au coursdes frquentes chutes de pH, lincorporation du fluor dans lescouches superficielles de lmail est facilite. Les dentifrices et bainsde bouche fluors fournissent rgulirement la salive et la plaque enfluor. Les rserves ainsi constitues peuvent tre utilises au momentde la dissolution acide de lmail.

    Apport du fluor par voie systmique

    Fluoration de leau

    La fluoration de leau potable pour la prvention de la carie dentaireest devenue la mesure de sant publique la plus rpandue aumonde. Plus de 275 millions de personnes (3 % de la populationmondiale) consomment de leau fluore, dont 145 millionsuniquement pour les tats-Unis, soit 56 % de la population totale.En Europe, peu de pays ont opt pour la fluoration de leau potable, lexception de lIrlande o 67 % de la population consomment deleau fluore depuis 1996. Des distributions deau fluore sontassures dans des villes comme Ble, en Suisse, et Sville, enEspagne. De nombreuses tudes dmontrent que la prsence dufluor dans leau potable, raison de 1 ppm, assure une rduction de50 % de la carie dentaire chez lenfant. Les adultes bnficientgalement de cette fluoration en dveloppant moins de caries. Dansles rgions o leau est fluore, ils prsentent un nombre de cariesradiculaires rduit de moiti [76, 85]. Actuellement, en raison des autresvecteurs de fluor largement rpandus, les diffrences entre lesrgions fluores et non fluores ont tendance diminuer et sont delordre de 18 35 %.Les composs chimiques utiliss par la fluoration sont le NaF,lhexafluorosilicate et lacide hexafluorosilicique. La concentrationoptimale du fluor dans leau se situe entre 0,7 et 1,2 ppm, en fonction

    des conditions climatiques. Des taux plus levs pourraient rduireencore plus la frquence carieuse, mais en augmentant les risquesde la fluorose de lmail. Mme si lefficacit et linnocuit de lafluoration ne sont plus dmontrer, la fluoration de leau potablereste une mdication de masse qui soulve des controverses.

    Fluoration du lait

    La fluoration du lait constitue une alternative la fluoration de leau.Cette mthode semble moins efficace. En effet, le fluor se lie aucalcium contenu dans le lait pour former le fluorure de calcium quiest moins absorb que le fluorure de sodium au niveau du tractusdigestif. Par ailleurs, cette mthode pose de nombreux problmesdorganisation, de distribution et de contrles, mme si ce procdest le vecteur qui sadresse le plus directement la population vise.

    Fluoration du sel

    Le sel de table est disponible actuellement, fluor 250 mg/kg. Cettemesure alternative leau fluore est prconise en Suisse, enColombie, en Hongrie, au Mexique, et, depuis le 6 novembre 1986,en France. Les taux de rduction des caries observs varient entre 35et 50 % [76]. Le sel de cuisine reprsentait 41 % des ventes en Franceen 1996.

    Supplments fluors

    Diffrentes prparations assurent un supplment de fluor par voiesystmique sous forme de gouttes ou de comprims. En labsencede fluoration de leau, ces supplments sont administrs durant laphase de formation de lmail qui prcde lruption. Cessupplments fluors ont donn lieu de nombreux essais cliniquesqui ont montr une rduction du taux de carie au niveau des dentstemporaires et permanentes, mais dans une proportion variant entre26 et 80 %. Plusieurs facteurs influencent les rsultats obtenus,particulirement la dure de ltude, lge o le traitement estamorc et le choix laiss aux patients dappartenir un groupe testou contrle. Les premires tudes ont t souvent menes dans desconditions qui ne rpondent plus aux critres scientifiques exigsaujourdhui.Ladministration dun additif fluor ds la naissance donne demeilleurs rsultats que lorsquelle dbute entre 4 et 5 ans. Les mmeseffets sont observs sur les dents permanentes des enfants dgescolaire. Le taux relativement rduit de caries par rapport lafluoration de leau sexplique essentiellement par la baisse demotivation lie aux contraintes poses par ladministrationprolonge de ces supplments.Lefficacit des supplments fluors avant la naissance est trscontroverse [56]. Leffet protecteur optimal du fluor a lieu lors de laminralisation de la surface de lmail qui se produit dans la phaseprruptive qui, pour la plupart des dents, est postnatale. Destudes rigoureuses ont montr des effets positifs des additifs fluorsen phase postruptive chez les enfants en ge scolaire, lorsque lessupplments fluors, sous supervision, sont maintenus en boucheavant dtre avals. Des rductions de carie sont observes de 20 28 %.Il existe une controverse importante concernant la posologie dessupplments fluors. Lge de lenfant, le contenu en fluor de leaupotable et des autres apports fluors (alimentation, dentifrice fluoraval) dterminent la dose du complment fluor. Les difficultssont lies au risque de provoquer une fluorose dentaire parsurdosage pendant la phase de formation de lmail. Lessupplments fluors ingrs avant lruption dentaire constituent unfacteur de risque de fluorose dentaire jusqu lge de 6-7 ans, aussibien dans les rgions fluores que non fluores. Les supplmentsfluors ne sont plus recommands pour les enfants de moins de6 mois. Un groupe dexperts de la communaut europenne sestprononc, ds 1991, en faveur dune supplmentation fluoretardive de 0,5 mg partir de lge de 3 ans et limite aux enfants risque.La diminution de la prvalence des caries, laugmentation de laprvalence des fluoroses et la faible compliance pour ce procdplaident pour un rexamen de la prise de supplments fluors [38].

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  • Fluor en application topique

    Application professionnelle du fluor

    Les principaux composs fluors appliqus par des professionnelsse prsentent sous forme de solutions aqueuses, de ptes deprophylaxie, de gels ou de vernis.

    Solutions aqueuses

    Les trois composs les plus utiliss sont le NaF, le fluorophosphateacidul (FPA) et le SnF2.Lapplication topique de la solution aqueuse se fait laide dunapplicateur ou dun pinceau sur les dents propres, sches etcorrectement isoles du milieu salivaire. Le NaF est utilis ensolution aqueuse une concentration de 2 % (1 % F soit 10 000ppm), le SnF2 de 8 % (2 % F soit 20 000 ppm) et le FPA est composde 1,23 % F (12 300 ppm) de NaF dans une solution dacidephosphorique 0,1 M et pH 3,2.

    Le taux de rduction de la carie augmente avec le nombre desapplications. Le nombre dapplications varie entre 1 et 4 par an. Letaux de rduction moyen de la carie dentaire est de 29 % pour leNaF, 32 % pour le SnF2 et de 28 % pour le FPA [76].

    Ptes de prophylaxie

    Lusage de ces ptes est recommand dans la prophylaxie et lepolissage qui prcde une application topique de fluor. tant donnleur caractre abrasif, lusage de ces ptes compense la perte de fluorde la couche de surface au cours de la prophylaxie. Les ptesprophylactiques ne jouent aucun rle direct dans la prvention de lacarie. Le nettoyage prophylactique est complt par un agenttopique plus efficace comme celui des vernis fluors. Le caractreabrasif de ces ptes est valu en RDA (abrasion de la dentineradioactive). Pour le polissage et le nettoyage mcaniqueprofessionnel radiculaire ainsi que pour le polissage desrestaurations au composite, 40 90 RDA sont prconiss, alors quepour des nettoyages mcaniques professionnels rguliers, 100 200RDA sont recommands.

    Gels fluors

    Les gels fluors sutilisent dans des gouttires usage unique. Lamthode est simple, rapide et largement accepte par les enfants. Lecompos fluor utilis dans les gels est lAPF qui assure unerduction moyenne du taux de carie de 23 %. La pratique de laprophylaxie professionnelle pralable nest pas ncessaire. Lesrecommandations consistent laisser en place les gouttires pendant4 minutes et le patient ne doit ni rincer, ni boire ou manger pendant1 ou 1 heure et demie aprs lapplication du gel fluor. Deuxapplications sont recommandes par an [76].

    Vernis fluors

    Ces prparations favorisent un contact prolong de fluor avec lasurface de lmail, permettant une meilleure incorporation. Le NaF 5 % (2,3 % F) en solution alcoolise est lagent actif du vernisDuraphatt (Johnson & Johnson). Le Fluor Protecteurt (Vivadent) estune laque polyurthane contenant du difluorosilane (0,1 % F). LeBifluorid 12t (Voco) (6 % F) est un compos associant du NaF 6 %et du CaF2 6 %. Rcemment, cette teneur en fluor a t rduite demoiti. Les vernis adhrent la surface de lmail pendant plus de12 heures. Cette mthode requiert une prophylaxie pralable lapplication du vernis. Les tudes cliniques montrent une rductionde la carie par ce procd allant de 20 70 % [70]. Chez le patient haut risque carieux, il est recommand de rpter lapplicationinitiale trois fois dans un intervalle de 7 10 jours ; par la suite, lafrquence dapplication des vernis est de deux quatre fois par an(tableau XII). Lapplication exprimentale dun vernis associant laCHX (Cervitect, Vivadent) et du fluor (Fluor Protectort, Vivadent)donne les meilleurs rsultats de rduction de la dminralisation insitu par rapport aux deux vernis appliqus sparment [100].

    Autoapplication des composs fluors

    Lautoapplication permet au patient des applications plusfrquentes. La mthode la plus courante est le brossage des dentsavec un dentifrice fluor. Cependant, les solutions, les gels et lesptes de prophylaxie peuvent tre employs avec la brosse dents.Dautres mthodes font appel lusage des porte-empreintes et aurinage de dents avec une solution fluore.

    Dentifrices fluors

    lheure actuelle, 90 % des dentifrices vendus dans les paysindustrialiss contiennent du fluor et on estime que plus de450 millions de personnes utilisent rgulirement des dentifricesfluors, mais ceci ne reprsente que 10 % de la population mondiale.Leur efficacit et leur innocuit ne sont plus dmontrer et leurutilisation explique la rduction de la carie enregistre dansplusieurs pays industrialiss nayant pas souscrit des programmescollectifs de fluoration. Les composs employs dans les dentifricessont le NaF, le MFP (Na2PO3) et le SnF2.Les amines fluores sont galement utilises en Europe. Les effetsprotecteurs de ces diffrents composs se situent entre 25 et 30 % [55].Cependant, le degr defficacit du dentifrice varie en fonction desformules. La rglementation europenne prconise une limitemaximale de 0,15 % F (1,5 mg F/g de dentifrice, soit 1 500 ppm)dans les dentifrices. La lgislation franaise attribue un statutdiffrent aux dentifrices selon leur dosage en fluor. Pour uneconcentration suprieure 1500 ppm F, le dentifrice estcommercialis uniquement en pharmacie avec une autorisation demise sur le march, alors que pour des concentrations infrieures ougales 1 500 ppm F, le dentifrice est considr comme un produitcosmtique. Gnralement, les dentifrices pour adulte contiennent1 000 1 500 ppm F (0,1 0,15 % F ou 1 mg 1,5 mg/g F de pte)et les dentifrices pour enfant des concentrations infrieures 600ppm F (250 ppm F en moyenne).

    Bains de bouche fluors

    Aprs la fluoration de leau, les bains de bouche fluors constituentla mthode la plus courante pour lutter contre la carie. Lesprparations sont base de NaF en concentration de 0,05 % pourlusage quotidien et de 0,2 % (1 000 ppm F) pour lusagehebdomadaire. La rduction de la carie est de 25 30 %. Cettemthode est utilise dans des programmes de prvention en milieuscolaire. La mme mthode est galement prescrite domicile avecdes bains de bouche de NaF 0,05 % (225 ppm F). Cette mthodeprsente des risques dingestion de quantits non ngligeables desolution par les enfants de moins de 6 ans.Le rinage buccal par 10 mL dune solution 0,025 % (225 ppm F)pendant 1 minute aprs chaque brossage dentaire est considrcomme un supplment suffisant pour le contrle des caries chez lepatient haut risque carieux. Leffet de ces bains de bouche estencore plus efficace lorsque ceux-ci contiennent en plus des agents

    Tableau XII. Diffrentes situations ncessitant lapplication topi-que de vernis (fluor-chlorhexidine) aprs prophylaxie mcanique pro-fessionnelle de la plaque.

    - Patients risque carieux (C2-C3)- ge risque : 5-7 ans, 11-13 ans- Traitements orthodontiques- Grossesse- Mdication altrant la scrtion salivaire- Radiothrapie, dialyss, maladie de Crohn- Hypersensibilit dentinaire- Reflux acides- Xrostomie- nologues- Mtiers du sucre- Personnes ges- Expositions radiculaires- Dsordres psychiques- Toxicomanes

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  • antiplaque (triclosan + copolymre + lauryl sulfate de sodium,Colgate Totalt ou CHX + amine fluore + SnF2, Mridolt).

    Gels fluors

    Les gels fluors sont neutres (NaF) ou acides (FPA). Leur teneur enfluor est de 0,5 %. Les gouttires individuelles sont ralises par lepraticien qui fournit la quantit suffisante de gel pour la priodeconcerne. La dure dapplication est dau moins 4 minutes. Cettemthode savre trs efficace avec des taux de rduction allantjusqu 70 % en milieu non fluor et jusqu 35 % en milieu fluor [76].Cette mthode est largement prconise chez les patients hautrisque et particulirement en prvention de lostoradioncrose chezles irradis de la sphre oropharynge.

    Chewing-gums fluors

    Les chewing-gums fluors sont recommands pour stimuler lascrtion salivaire, tout en constituant un supplment fluor plusefficace que les bains de bouche. Ils sont fortement indiqus chez lespatients haut risque carieux et particulirement lorsque la scrtionsalivaire est infrieure 0,7 mL/min. Des chewing-gum