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8/3/2019 Oeuvres de Mgr de Segur (Tome 7) http://slidepdf.com/reader/full/oeuvres-de-mgr-de-segur-tome-7 1/545 ŒUVRES DE  r TROISIÈME SÉME TOME SEPTIÈME TROISIÈME ÉDITION PARIS • LIBRAIRIE SAINT-JOSEPH TOLRA, LIBRAIRE-ÉDITEUR 112, RUE DE HENNES, 112 1887 Traduction et reproduction réservées

Oeuvres de Mgr de Segur (Tome 7)

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    UVRESDE

    r

    TROISIME SME

    T O M E S E P T I M E

    TROISIME DITION

    PARIS LIBRAIRIE SAINT-JOSEPH

    T O L R A , L I B R A I R E - D I T E U R11 2, RUE DE H E N N E S , 1121887

    Traduction et reproduction rserves

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    Biblio!que Saint Librehttp://www.liberius.net Bibliothque Saint Libre 2010.

    Toute reproduction but non lucratif est autorise.

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    AURKAU* Imprimerie de

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    L E

    O N C O M B A TDE LA FOI

    Le Son Combat de laFoi a t compos d'abord pour les Assocsde l'uvre de Saint-Franois de Sales, dont Mgr do S^ur tait \n prsident. Cette (uvre aj'ant pour butla conservation, la prservation et la dfense de la foi dans les rangs des catholiques,un opuscule de ce genre tait tout naturellement indiqu pour tous les bons fidles qui

    s'enrlaient sous la bannire de saint Franois' de Sal es.Afin de gnraliser le bien que faisait ce petit livre, l'auteur l'a lgrement retouchen supprimant ce qui tait propre aux Associs de l'uvre, C'est dans ces conditionsqu'il s'est rpandu bientt en grand nombre en France et l'tranger. Il a t traduit dans presque toutes les langues de l'Europe, et en Arabe par les soins du vnrable Archevque maronite de Beyrouth.

    Il a t honor, comme La plupart des ouvrages de Mgr de Sgur, des flicitationset des bndictions du Suuverain-Pontii'e

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    Voici le Bref posloliquo par lequel Pus IX a daign accueillirl'hommage du Bon Combat de la Foi, le 17 juillet 1872, en la vingt-

    septime anne de son prodigieux, douloureux et incomparablePontificat :

    a PIE IX, PAPE, Cher fils, Salut et Bndiction Apostolique.

    Vous avez voulu accompagner de vos souhaits, de vos vux*et de vos fidles hommages l'anniversaire de Notre lvation auSouverain-Pontificat, que la divine Bont Nous a permis rcemment d'atteindre; et vous y avez ajout surabondamment vos pr

    sents, afin d'affirmer de plus en plus la rare tendresse de votrecur envers Nous cl votre zle envers la foi catholique. Ce nouveautmoignage de vos sentiments, trs-cher fils, Nous a cl trs-agrable. Le dvouement remarquable e profond do voire meenvers Nous, qui brille merveilleusement dans vos lettres, et cetteobissance envers le Saint-Sige Apostolique, que Nous connaissonspar exprience, rclamaient en effet vos hommages en cette cir

    constance. Votre nouvel opuscule le Bon Combat de la Foi, que vous

    Nous avez en mme temps envoy, a rendu vos vux encore plusagrables. Dans cet crit, vous voulez prmunir, principalement la

    jeunesse, contre les graves prils que la foi rencontre de nos jours;et vous prsentez les motifs et les moyens par lesquels la foi peutse conserver pleine

    etentire,

    etmme s'accrotre

    etporter

    desfruits. Bien que Nous n'ayons encore pu prendre connaissance de ce

    nouvel ouvrage, Nous ne doutons pas que vous n'ayez atteint fortement et entirement votre but.

    Dsirant toujours le vrai bien de votre illustre patrie, Ne "asdemandons DIEU que la nouvelle gnration apprenne se sou

    mettre et s'attacher en toutes choses la doctrine et la directiondu Sain't-Sige Apostolique, et qu'elle s'accoutume faire usagedes salutaires secours de la Religion, que Dieu a tablie pour fonder

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    dans les mes la vie de la grce, et l'augmenter et la justifier danscelles qui l'ont dj reue.

    En suppliant celte intention la divine Bont, Nous vousre-nouvclons, trs-cher iils, tous Nos romerciments, et vous donnons

    en signe de Notre bienveil lance toute particulire, comme gage detous les dons clestes, la Bndiction Apostolique, pour vous, pourvotre famille et tous ceux pour lesquels vous Nous la demandez.

    Donn Rome, prs Saint-Pierre, le 17 juillet 1872, en la vingt-septime anne de notre Pontificat.

    P I E I X , PAPE.

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    LE

    BON COMBAT

    DE LA FOI

    Aujourd'hui la foi est branle dans une multituded'mes ; et c'est tou t simple : l'enseignement, l' ducation, les habitudes prives et publiques, les journaux, lapolitique, les ides courantes, tout contribue battreen brche nos plus saintes croyances . Mme parmi leschrtiens pratiquants, la foi manque souvent de solidit ; il lui faut des tais, afin d'empcher des ruinessrieuses.

    Ce petit opuscule , que tout le mo nd e pour ra compr en dr e, si je ne me t rom pe, n 'a pas d'aut re objet. C'estun tai. Puisse-t-il soutenir quelque muraille chancela nt e! PuisSe-t-il aider la gr ande uvre des pa si eursdes mes n ces temps-ci , savoir : la conservation de

    la foi et de la vie chrtiennes parmi les enfants del'glise,

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    G LE BON COMBAT

    I

    Qu'il iaut grandement estimer le don sacr de la oU

    La foi est la substance et la base du salut. Toute la

    vie chrtienne repose sur la foi; et comme la vie ternelle n'est au tre chose que le dveloppement parfaitdans le ciel et la divine rcompense de la vie chrt iennemene sur la terre, il faut reconnatre que la foi est la vie ternelle ce que le gland est au chne, ce que la

    source est au fleuve. Estimer sa foi, c'est estimer sonsa lu t; fortifier sa foi, c'est fortifier son salut, c'est consolider son bonheur ternel.

    Qui ne prend soin de sa san t? Qui ne veille srieusement ses affaires ? Quiconque en agirait autrement

    serait considr juste titre comme un fou. Et cependant qu'est-ce que le pauvre petit bonheur que procurent en ce monde et la sant et la fortune, en comparaison du grand bonheur ternel qui nous attend auParadis? Or, c'est la foi, c'est la puret et la vivacit dela foi qui nous assurent la possession de ce bonheur.

    Savez-vous pourquoi il y a si peu de chrtiens fervents, d'hommes de prire, de pnitence, de sacrifices?Savez-vous pourquoi les serviteurs de D i e u trouvent sipeu d'cho lorsqu'ils parlent d'uvres purement spirituelles, exclusivement religieuses? C'est que chez les

    chrtiens, mme chez les chrtiens pratiquants et pieux,la toi n'est pas assez vivante. Elle est pure : oui, sans

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    DE LA FOT 7

    doute ; mais elle ressemble souvent ces maigres pelilsruisseaux d'eau trs-limpide, dont le filet est si mince,qu'au lieu de fconder toute la prairie, il suffit peine

    faire pousser quelques touffes d'herbe, quelques pauvres petites fleurs sur son passage. "Vienne une bonnefonte de neige ou bien une bonne pluie qui grossisse lasource, et voici que la prairie tout entire, jusque-ldessche et infertile, se couvre d'une herbe paisse et

    verdoyante.Telle est la grce de la foi. Jugeant l'arbre par ses

    fruits, selon la rgle vanglique, jugeons de la qualit,et de la mesure de notre foi, par la fcondit de notrevie ch rt ie nne, au dedans et aiv dehors . Hlas ! quelle

    humiliante lumire !El cependant, je le rpte : la foi, c'est tout le chrtien. C'est la vigueur de la foi qui fait toute notre forcesp ir it ue ll e; c'est elle qui enfante les saintes penses etles dvouements religieux; c'est elle qui porte et fconde

    la prire, le zle de la gloire de DIEU et du salut desmes, l'amour de l'glise, l'nergie dans les combatsde la vie et toute l'efflorescence des vertus catholiques.'C'est la foi qui por te la sa intet ; cette mesure ne t rompepoint : la taille d'un Saint, vous pouvez m esurer lesproportions de sa foi.

    Le don de la foi est la premire des grces quel'homme reoit au Baptme., au moment o il devient,en JSUS-CHRIST, enfant de DIEU et de l'glise ; et sur cefondement , l'glise travai lle ra sans in terruption lever, jour par jour, heure par heure, le vivant et immor

    tel difice de la sanctification du fidle. Le premier objetde l'enseignement catholique, de la prire, des sacre-

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    S L E BON COMBAT

    ments, de la communion et en gnra l de la vie de lapit, c'est, dans la pense de l'glise, de consolider la oi de ses enfants, de la faire grandir, de lui faire' pro

    duire toutes les Lellos fleurs, tous les excellents fruitsqu'en attend JSUS-CHRIST , La premire fonction du sacerdoce, de l'piscopat et de la Papaut elle-mme,qu 1 est-ce, sinon de donner la lumire de la foi ceuxqui ne l'ont point encore reue, et de la conserver pure,

    vivante, pleine d'nergie et de ferveur, en tous ceuxqui ont le bo nheur de la possder dj?

    La lumire qui brillera pour nous pendant toute l'ternit et que la thologie appelle la vision intuitive, ne sera, au fond, que la lumire de la foi, dveloppe,

    paracheve, pleinement panouie, dpouille de tousses voiles. Les ralits divines que, par la misricordedu bon DIEU , nous verrons un jour dcouvert dans leciel, ce sont les mmes que, par la foi, nous connaissonsici-bas sans les comprendre, que nous possdons sans

    les voir.Voyez donc combien est profonde la parole de l'Es-pri t-Saint , qui nous dclare, en saint Paul , que la foiest la substance des ralits qui font ici-bas notre esprance, et l'essence des ralits clestes que nous nevoyons pas encore. Oui, la foi, la foi chrtienne et catholique, c est la vrit divine, la vrit infaillible et ternelle, qui illumine, comme un soleil sans tache, le cielde notre me; c'est la lumire de l'ternit qui brillepour nous dans le temps ; la lumire des Anges qui sereflte sur la ter re pou r clairer le pler inage des hommes.

    La foi est le trsor des trsors, la grce des grces.Elle doit nous tre plus chre que la vie.

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    D E LA FOI

    II

    Qu'il faut combattre pour garder sa foi,surtout dans d e s temps comme ceux-ci.

    J'ai combattu le bon combat, j'ai conserve la foi, crivait saint Paul peu de temps avant de mourir. Au mo

    ment de notro mort, il faudra que chacun de nous puisse

    en dire autant.La foi est co mme la vie : elle ne se conserve pas toute

    seule. Nous l'avons reue, il faut l'entretenir; il faut laconserver et la dfendre. Nous prenons toute sorte deprcautions pour entretenir, conserver et dfendre lavie de notre corps ; il faut en faire autant et plus encorepour cette vie suprieure dont la foi est la base, et qu'on

    appelle la vie surnaturelle, la vie de la foi.C'est une vie vritable;,aussi vritable et bien plus

    excellente que la vie du corps. Elle vient de l'unionsanctifiante de notre me avec JSUS-CHRIST , commel'autre vient de l'union vivifiante de notre corps avec

    notre me. JSUS-CHRIST est la vie cleste et divine desmes; la foi, c'est sa lumire, que l'Esprit-Saint rpanden nous par la grce; et il faut tout prix, en tendonsbien ceci, tout prix, aux dpens mme de notre sant,de notre repos, et, au besoin, de notre vie, rester fidles JSUS-CHRIST , demeurer en sa grce, conserver le divintrsor de la foi.

    Il le faut , malgr les difficults du dedans , malgr les

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    10 LE BON COMBAT

    difficults du dehors . Ces difficults sont nombreuses :11 ne faut pas nous le dissimuler. Le ciel est une conqute ; la vie chrt ienne, un combat ; JSUS-CHRIST est

    un chef d'arme, et l'glise est une sociL militante;le monde est une grande arne o Satan et les mondainscombattent avec acharnement JSUS et les soldats deJSUS,

    Donc, pour conserver le don de la foi, il nous faut

    combatt re ; nous mar ch on s entours d'ennemis : lesmauvais exemples, la contagion de l'indiffrence, deserreurs courantes, du naturalisme, et de l'esprit dervolte qui souffle au jourd'hu i si puis samment de touscts. Nous avons craindre et viter les piges des

    mauvaises doctrines, del fausse politique, du faux enseignement, des lectures malsaines. Et, de plus, nousavons lutter contre des ennemis intrieurs non moinsdangereux, qui tous, si nous les laissions faire, seraientcapables d'altrer d'abord, puis d'obscurcir, puis dediminuer, puis enfin d'teindre, en nos mes baptises,la divine lumire de la foi.

    Quel combat ! Il s'tend sur toute la ligne de notreexistence. Pas un point n'est toujours et compltementen sret; pas un ge, pas une position*. Il faut combattre; c'est la loi. Celui-l est perdu, qui dpose lesarmes; et, tant que dure la vie, l'ennemi est l, cherchant, sous mille formes, nous attirer dans ses pigeset nous faire perdre la vie de la foi d'abord, puis la foielle-mme.

    Nous qui avons le bonheur de comprendre le don c

    leste de la foi, et qui prenons cur les intrts de lafoi chez les autres, nous devons tout spcialement om-

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    DE LA FOI 11

    battre bravement, pour nous-mmes et en nous-mmes,ce bon combat de la foi. Char16 bien ordonne commence par soi-mme, dit le provorbe; rion de plus

    vrai. Nous voulons conserver la foi chez nos frres ;commenons par la conserver en nous et autour de nous.Nous voulons la ranimer chez les autres : commenonspar la prserver de toute atteinte en nous-mmes, etpar prendre tous les moyens capables de fair de nous

    de vritables fidles. Per so nne ne donne, ce qu'il n 'a point : si nous ne commenons par n ous-mmes, nous

    ne pourrons comba tt re efficacement, au profit des a u tres, le bon combat de la foi.

    Dans les temps de- rvolution que nous t raversons,

    cette nergie est plus indispensable que jamais . Dansnotre pauvre France, ravage depuis plus de trois siclespar tant d'erreurs et de ngations, nous sommes commels habitants de ces pays marcageux dont l 'atmosphremalsaine empoisonne le sang et engendre facilement la

    fivre. La fivre maligne, la fivre pernic ieuse et t rs-pernicieuse que nous avons tous redouter, c'est ce ra'tionalisme qui s'insinue partout, comme un air mphy-tique, et qui mine insensiblement en chacun de nous lavie de la foi, le rgne de JSUS-CHRIST dans nos mes. Ledanger est universel; le Pape P I E I X nous en a avertissolennellement par sa clbre Encyclique du 8 dcembre 1 8 6 4 ; prenons-y garde, et puisqu'il faut vivre danscette atmosphre, prenons nos prcautions et, cote quecote, conservons notre foi.

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    LE BON COMBAT

    III

    De la pleine obissance au Saint-Sige,condition premire d'une foi pure et parfaite.

    La premire de toutes les rgles en cette matire, c'estl'obissance catholique.

    La foi est fille de l'obissance. C'est la soumissioncordiale et entire de notre esprit la vrit rvle,qui nous est infailliblement enseigne par le Vicaire de

    JSUS-CHRIST, et fidlement transmise par nos vqueset par nos prt res . L'incrdulit est une rvolte : la foiest une soumission, soumission lgitime, raisonne etraisonnable ; soumission noble et excellente s'il en fut

    jamais, car c'est la soumission la vrit, c'est la sou

    mission la plus indiscutable des autorits : l'au tor itmme de DIEU parlant au monde par le Chef infailliblede son glise. N'est-il pas souverainement draisonnablede se soustraire, en quoi que ce soit et sous quelqueprtexte que ce soit, une autorit pareille? N'est-il pasinsens de rsister la vrit?

    La vie chrtienne, disons-nous, repose sur la foicomme sur sa base; la foi, son tour, repose sur l'enseignement du Saint-Sige, sur l'obissance pleine etentire cet enseignement infaillible. Au point de vuede l'autori t et de l' ense ignement , le Pape et l'glise

    c'est tout un , co mm e disait jad is notre saint Franoisde Sales. L'enseignement de l'glise, l'enseignement du

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    D E L A FOI 1 5

    Pape, qui personnifie l'glise, voil donc la grande rglede la vraie foi (1).

    Veillons avec un soin infini carter de notre intelli

    gence, non-seulement tout ce qui est contraire cettergle si simple et si sre, mais encore n'y laisser entrerrien qui no soit selon cette rgle. Il faut tre trs-dlicaten matire de foi, et par consquent en matire d'obissance. C'est l une des marques les plus certaines de

    'p rdes ti na ti on ; et chac un de nous doit s'efforcer, parcette fidlit dlicate , d' assure r sa vocation et son lection, comme dit saint Pierre.

    Notre sicle a peu de foi, parce qu'il a peu d'obissance. Sa maladie principale, c'est, de l'aveu de tous,

    l'esprit d'indpendance vis--vis des autorits les pluslgitimes. Ce mal infecte mme des catholiques d'ailleurs sincres et mme pieux ; il insinue jusque dans leplus in time de le ur esprit je ne sais quel penchant

    juger humainement les actes et les jugements les plus

    graves de l'autorit religieuse. On voit des laques, des'femmes du monde, de tout jeunes gens, critiquer avecune facilit dsolante les enseignements du Sige-Apos-tolique, admettre ceci, rejeter cela, et se faire pour ainsidire eux-mmes des doctrines, sans s'inquiter de savoir si elles sont conformes ou non la rgle suprmede la foi.

    Il y a l, comme on le voit, un pril immense, non*seulement pour la pit, mais pour la foi elle-mme.

    (1) Qu'on juge par l de la gravit fondamentale de L'erreur des

    sectes protestantes qui prtendent que l'Ecriture sainte, la Bible,comme elles disent, est la rgle de la foi! Dans la sainte glise, largle de la foi doit tre et est vivante, comme l'glise elle-mme.

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    1 4 L E B O N C O M B A T

    C'est comme cela que commencent les hrsies. Surcette pente de l'esprit propre, c'est--dire de l'orgueilet de la rvolte, on glisse plus rapidement qu'on ne

    pense, et un beau jour on se trouve au fond mme del'abme : on a perdu la foi ; on se rvolte ouvertement.

    L'obissance au Saint-Sige doit donc tre, au pointde vue de la conservation de la foi, le premier de nossoucis. Il faut lui sacrifier sans hsiter toutes les consi

    drations individuelles d'amiti, de respect, de dfrence, d'estime,-de reconnaissance, de dvouement; ilfaut lui sacrifier surtout toutes les mesquines habiletsde coterie et d'esprit de parti, soit politique, soit religieux. Ce dernier surtout est dangereux, parce qu'il se

    couvre d'apparences catholiques et pieuses- Il nouspousse toujours (et c'est l son principal caractre) substituer en pratique, sinon en thorie, l'autorit toutepersonnelle d 'un chef de file, soit la que , soit prtre , soitmme Evque, l'autorit divine et suprme du Pontife

    Romain cl dos Sacres-Congrgations Romaines .J'ose appeler sur ce point toute votre attention, monbien cher lecteur. C'est le fond mme de la question dela soumission catholique, et par consquent de la foi.Nous ne sommes les disciples d'aucun homme, d'aucundocteur, d'aucun vque; notre doctrine n'est la doctrine ni de celui-ci, ni de celui-l; nous ne sommes genoux ni devant la rputation, ni devant le savoir, nidevant le gnie, ni mme devant la vertu personnelle :nous sommes genoux aux pieds du Vicaire de J SU S-CHRIST ; notre doctrine est celle du Chef infaillible de

    l'glise; nous sommes avec ceux qui sont aveu- lui;nous sommes contre ceux qui sont contre lui*

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    D E LA FOI 1 5

    Qn est avec lui, non pas quand on fait-de belles phrases et de grandes protestations de d vo ue me nt , maisquand, en pratique, on est docile ses enseignements,

    et quand la conduite tout entire, quand les actes repondent aux paroles. C'est la grande rgle vang lique et.apostolique. Notre-Seigneur ne nous a-t-il pas dit : Au

    jour du jugement beaucoup se prsenteront, disant : Seigneur, nous avons parl, nous, avons prch en

    votre nom; nous avons fait de grandes "choses; et illeur sera rpondu : ce Je ne vous,connais point. Retirez-vous de moi , vous tous dont les uvres ont 't mauvaises. Ce ne sont point ceux qui auront dit : Se igneur ,Seigneur, qui en trer on t dans le ro yaume des cieux,

    mais ceux-l seulement qui au ro nt accompli la volontde mon Pore cleste. Et saint Jean nous dit a sontour: Mes.enfants, ne nous contentons point d'aimeren paroles; aimons en vrit, et prouvons notre amourpar nos uvres. C'est cela que nous pouvons reconnatre si nous sommes enfants de la vrit.

    Ces paroles ne sont pas moins vraies par rapport auVicaire de JSUS-CHRIST que par rapport JSUS-CHRISTlui-mme. Pour tre un vrai catholique, il ne sufft pasde belles phrases : il faut des actes ; il faut une soumis

    sion sincre, une obissance totale d'esprit, de cur etpar consquent d'action et de condui te l'gard duChef suprme de l'glise, et surtout l 'gard de tousses enseignements, sans exception. De grce! retenezbien ceci : sans exception.

    Faute de demeurer ainsi dans la vrit, au moyend'une trs-sincre obissance, beaucoup de bonnes mesont failli entrer tout rcemment dans les voies de la r-

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    1 6 LE BON COMAT

    volte, du schisme et de l'hrsie, l'occasion, d'abord del'Encyclique de 18G4, et ensuite du dcret du Concile duVatican sur l'infaillibilit du Vicaire de JSUS-CHRIST . Des

    circonstances semblables peuvent se reprsenter plustt qu'on ne pense : que l'expr ience du pass prservel'avenir. Prenons bien garde l'esprit de parti, aux enthousiasmes irrflchis et personnels.

    Demeurons catholiques, purement et simplement; ca

    tholiques, c'est--dire entirement soumis d'avance tout ce que le Souverain-Pontife jugera propos d'enseigner, de dcider, de condamner. Comme l'glise, lePape n'est pas seulement infailliblement assist pourdfinir la vrit doctrinale, mais encore pour la dfinir

    avec op po rtu nit ; il ne peut outre-passer ses droit s. Iln'y a donc, il ne peut y avoir aucun prtexte l'insoumission.

    Laissons s'garer hors de la voie royale de la vrit etde l'obissance les prsomptueux qui substi tuent leur

    infaillibilit personnelle celle du Vicaire deDIEU

    ; neles suivons pas, ne nous perdons pas avec eux, et conservons notre foi en combattant contre notre esprit propreet contre le leur avec les a rmes divines d'une humblesoumission et d'une foi parfaite.

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    DE LA FOI 17

    IV

    De l'importance des lectures et surtout des journauxau point de- vue de la foi.

    Nous vivons, il faut l'avouer, dans des temps prilleux"en ce qui concerne les ides. Grce cette folie (c'est lenom que lu i donnen t, de la pa rt de DIEU , les Souverains-Pontifes Grgoire XVI et Pie IX), grce cette folie qu'onappelle la libert de la presse, et qu'on devrait bien plutt

    appeler la licence de la presse, le monde est littralementinond d'un dluge de livres, de brochures, de revues,de jo ur na ux qu i, sous mille formes , inoculent le veninde toutes les erreurs dans toutes les classes de la socit.Cet empoi sonnement sys tmatique a co mmen c avec le

    protestantisme, qui a proclam, de la part du.pre dumensonge , la libert de tout penser , de tout dire etde tout crire, en matire de religion. Voltaire et Rousseau ont fleuri sur ce te rr ain, sur ce tden de Lu ther etde Calvin, et ils ont proc lam une libert plus lar geencore : la libert de tout penser, de tout dire et de toutcrire, non plus seulement en matire de religion, maisen philosophie, en politique, en toutes choses* De ce renversement fondamental de la rgle de la foi, de la vritet du bon sens sont ns ces fameux principes libraux etrvolutionnaires, en tre lesquels brille au premie r ra nd

    la trs-rvolutionnaire et trs-impie libert de la presse.Cette libert est l'empoisonnement des intelligences ta-

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    1 8 LE BON COMBAT

    bli en pr incipe el prat iqu sur Loule la ligne ; enfants,coliers, jeunes gens, jeunes filles, ouvriers, bourgeois, lettrs, savants, pauvres, riches, personne n'y

    chappe.De l un immense danger, non-seulement pour la pu

    ret des murs el pour le bon sens public, mais encoreet surtout pour la puret de la foi. Il y a peu de livres quisoient intacts cet gard, mme parmi les livres d'en

    seignement lmentaire. Et pour les journaux, c'est bienpis encore. Je mets en fait que sur quatre mille cinq cents

    journaux et publications priodiques qui s impriment,dit-on, en France, il n'y en a pas deux cents qui soientir rprochables au point de vue de l'orLhodoxie. Mme

    pa rm i les jour na ux dits religieux, beaucoup se laissententraner par des systmes et des partis-pris, qui donnent tout propos des entorses la doctrine catholique et subordonnent les enseignements du Saint-Sige leurspetites ides personnelles. Je le rpte, il y a peu, trs-

    peu de journaux et de livres qui chappent ces cartsde l'ignorance ou des prjugs.

    Or, qui ne lit un ou mme plusieurs journaux? Quelssont ceux qui ont la conscience assez dlicate, l' meassez fortement trempe, pour rsister toujours la

    manie quasi gnrale de savoir tout ce qui se dit, de liretout ce qui se publ ie de marquant , de quelque part que celavienne? Avec une modestie toute moderne, on se dit: Cela ne me fera point de mal . Ceto,uteur, ce journal n 'estpas religieux, je le sais d'avance ; donc, pour moi, il n'ya pas de danger. D'ailleurs, je ne lis cela qu'au point devue du style, ou bien po ur m 'amuser , ou bien encorepour pouvoir en parler avec mes amis. Je ne lis ce livre

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    DE LA FOI 19

    impie , ou h r ti que, que pour pouvoir mieux le rfuteret dfendre ainsi la religion ; et sous ces beaux prtextes, on se plonge tranquillement dans des eaux empoi

    sonnes d'er reurs souvent fort subti les. Comme on n' afait pralablement, aucune tude philosophique, thologique ou historique srieuse, capable de servir d'antidoteau venin que Ton avale, on amasse plaisir au fond deson intelligence quantit d'erreurs, de prjugs et de so-

    phismes, qui y grandissent insens iblement la faveurdes passions du c ur , et, dans un moment donn, sedressent devant la foi comme autant d'objections redoutables, dont on ne voit poijit la solution. Et la foi estbranle. Souvent mme on croit l'avoir perdue; et le

    dmon, profitant de ce trouble et de cette crise, se ruecomme un furieux contre la pauvre me, qui s'est pourainsi dire livre d'avance, par son imprudence et sa prsomption.

    Combien n'ai-jc pas connu d'mes qui se sont perdues

    par des lectures inconsidres! Parmi les jeunes* genssur tout, et auss i pa rmi les jeunes femmes, ce pr il est l'ordre du jour . C'est la curiosit , c'est l'espr it d' indpendance, c'est la vanit qui les poussent tout lire. J'ai

    ' connu Paris un pa uvr e petit collgien de quinze ans ,honnte et intelligent, qui, ayant lu un livre irrligieux,malgr la dfense de son pre, avait si bien perdu la foi,qu'il niait tranquillement, avec une certaine conviction,les bases fondamentales, non-seulement de la Religion,mais m me du bon sens. Je me de mand e parfois, disait-il entre autres choses, si telle personne, dont je vois passer le cercueil, est bien rellement morte; si je suis rellement ce que je su is , si j' ex is te et si ma vie n'es t pas un

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    2 0 L E BON COMBAT

    rve? Ce pauvre garon-l n'al lait -il pas droit Cha-renton?

    J'ai connu un jeune homme d'environ dix-sept ans

    qui, s'tant permis de lire certains crits de Rousseau, futtellement branl dans sa foi par les subtilits et les so-phismes de ce trop illustre fou, qu'il s'imagina, lui aussi,ne plus croire rien. Puni par o il avait pch, il entradans des obscurits et dans un dsespoir incroyables. Il

    pleurait, il sanglotait. Je suis perdu, me disait-il, perdusans ressource ! C'est horrible. Je suis le plus malheureux des tres. Cet tat dura prs de trois ans, pendantlesquels l'infortun voulut plusieurs fois attenter savie. Je ne puis vivre ainsi , rptait -il, sans croyances,

    sans religion, sans D I E U , sans rien. Ma famille est toutechrtienne; moi seul, je suis rprouv! Un beau jourenfin, la lumire se fit, et cette pauvre victime des mauvais livres jura, mais un peu tard, qu'on ne l'y reprendrait plus.

    J'ai galement connu, entre bien d'autres, une jeunedame, d'un esprit distingu et fort agrable, qui se laissapersuader par un libre-penseur de lire quelques-unes deslucubrat ions de Jouffroy, de Renan et de Proudhon ;brodant sur le tout, elle lut deux ou trois livres protestants , toujours pour savoir ce que c'tait . La malheureuse cra ture , prise au pige par la pa tt e, en estencore se dbattre contre une foule de doutes plus ridicules, plus absurdes les uns que les autres, relativement aux vrits les plus lmentaires de la foi et dubon sens. Elle a bien, au fond de son me, le sentiment

    et mme la certitude que ses doutes ne sont que desniaiseries ; mais , elle auss i, punie par o elle a p ch,

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    D E L A P 0 I 2 1

    s'en trouve poursu ivie comme par un essaim de mo us tiques.

    Soyez donc trs-svres sur vos lectures : soyez-le

    pour vous-mmes ; soyez-le pour ceux de votre maison.Combien de paren ts laissent la porte de leurs enfantsde dangereux liv res , qu i, pou r rien au mo nde , ne lai s-

    seraient leur porte du poison ou des ' armes feu !Bien souvent la bibliothque d'un chteau est une dplo

    rable pharmacie o les enfants et les domest iques vontpuiser discrtion les drogues les plus malsaines, lesplus mortels poisons. Et Ton est chrtien; et l'on se confesse, l 'on communie, sans scrupule!

    Un vrai catholique ne devrait pas ad me t tr e dans sa

    bibliothque, ni m m e laisser en tr er dans sa maison unseul livre suspect au point de vue de la foi ou des murs,encore moins un seu l livre mis YIndex. Y? Index estprcisment le sti gma te impr im par le Souverain-Pontife aux livres pe rver s ou simplement danger eux, que

    les enfants de l'glise ne doivent point lire sans permi ssion spciale. Le mpris pratique des censures de Y Indexa t, au tmo ig nag e du Pape Pie VI, l'une des causesqui ont influ le plus dir ectement su r les tr iomphes del' impi t et des ides rvolut ionnaires la fin du der

    nier sicle.Egale men t u n vr ai catholique ne devra it tolre r sousaucun prtexte dans sa maison un jo ur na l ou un e revuedont l'esprit fv en dsaccord, je ne dis pas seulementavec la foi proprement dite, mais,avec l'esprit du Saint-Sige. La lecture du journal est une de ces influencesquotidiennes, pe rmanen te s, qui n'agissent que peu peu sur le jugement ; mais cette action est d' au tant plus

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    profonde qu'elle est plus lente et plus secrte. C'est l,qu 'on ne se le dissimule point , un e des causes les plusrp an du es de l'all ration des vra is princ ipes catholiques

    dans un e foule d'excellentes familles, et sur tou t d jeunes gens , pieux et pu rs pa^ le c ur , mais moi ti rvolutionnaires par les ides.

    Entre les feuilles et les revues dites ca thol iques, lespires sont celles qui enveloppent leurs prjugs de for

    mes plus dlicates et d'apparences plus loyales et plusmielleuses.

    Que chacun examine donc sa conscience cet ga rd,et qu'il rforme tout ce que la foi rprouve dans sa bibliothque, dans ses lectures et dans ses journaux.

    V

    Dangers de certaines amitis et liaisons suspectes

    au point de vue de la foi.

    Il y a des liaisons dangereuses pour les murs ; il y ena galement de dangereuses pour la foi. Ce sont les liaisons avec cette catgorie de libres-penseurs, d'impies oud'hr tiques qui font de la pr op ag an de et aiment fairedes adeptes . Leur nombre est, D I E U merci, assez rest re in t ; car, par mi les monda ins et les gens qui viventloin de D I E U , quat re-vingt-dix-neuf su r cent ne sont quades indiffrents, sans fiel contre la Religion, et incapa

    bles d'branler dessein la foi d 'aut rui. Mais si, parmalheur, vous veniez rencon trer sur le chemin de

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    DE LA FOI 23

    votre vie un de ces sectaires d' incrdul it, nn de ces

    ennemis actifs de la sainte glise et de la foi, prenezgarde vous . Le sectaire impie ou le secta ire hr tique

    ressemble ces se rpen ts fascinateurs qui at ti rent peu peu dans leur gueu le monst rueuse les pauvres btes,assez btes pour ne pas se soustraire immdiatemen t l'influence terrible de leurs regards.

    Oui, il y a dans le commer ce de certains libres-pen

    seurs spirituels et audacieux je ne sais quelle fascinationsatan ique, insignifiante en elle-mme., tant qu 'on voudra , mais qui atti re et ch ar me la vani t prsomptueused'une quanti t de personnes. Les conversat ions que cesgcns-l entament volontiers sur ou plutt contre la Reli-

    ' gion, laissent dans l'in tell igence des tr aces funestes lafoi ; comme ces limaces qui, sur les feuilles et les fleurso elles passent, laissent une trane, de glu immo nde.

    Un de ces lib res-penseu rs , acadmicien fort connu ,tait atteint d'une maladie dont il ne pouva it reven ir .

    Une dame de sa conna issance, chr ti enne du monde,voulut aller le voir pou r la conver tir . Le lendemain, ensortant de chez lu i, elle vint me trouve r tout effare:' Mon D I E U , mon DIEU , s'cria-t-elie, que je suis malheureuse ! Vous savez, M***? c'est un de mes amis. J'ai

    t le voir ; j ' a i essay de le ramener la Religion. J'aicaus au ,moins qu at re heures avec lu i ; et il m 'a enlevma foi. Je suis tou te tr oubl e ; je ne sais plus o j ' e nsuis. Il m' a dit, il m ' a dmontr que la te rre n ' taitqu'un grand fromage; que nous n'tions tous que des

    miles; qu'il n'y avait pas d'me ni de DIEU . Je regrettede lui avoir par l de tout cela. Je n'ai pas de chance ; jesuis bien malheureuse.

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    Je ne pus m'empcher de rire en entendant les lamentations de la pauvre crature. Une autre fois, lui dis-je,vous n'i rez pas faire de la phi losophie et de la tho

    logie transcendantes avec le premier-venu. Qui cherchele pril, y prira. Vous n'avez que ce que vous mritez ; et je lui rappelai cependant, pour la remettre un peu, lesdeux ou trois grandes vr ils de bon sens sur lesquellesrepose, comme sur un roc inbranlable, tout l'difice de

    la foi chrtienne. Elle s'en alla un peu console, et hu it jours aprs revin t m'annoncer , toute tr iomphante, queson illustre acadmicien venait de se confesser et de remplir tous ses devoirs religieux. Un vieux camarade decollge, devenu prtr e, ayan t appr is la gravi t de son

    tat, tait venu le voir, et l'avait dcid, sans aucunerhtorique, se rconcilier avec le bon D I E U .

    Et voil la force des convictions de nos libres-penseurs !

    Evitez, croyez-moi, de vous l ier avec des gens sans

    foi. Nos liaisons ne doivent nous tre ni nuisibles nimme inutiles ; or le moindre mal qui puisse rsulter deVintimit avec un incrdule ou un hrt ique , c'est quenous ne devenions pas hr tique ou incrdule com melui. Il faut viser plus haut , et tacher de puiser dans nosliaisons un nouvel lment de fidlit au service de D I E U .a Qui se ressemble, s'assemble, dit le proverbe. Nepourrait-on pas dire avec autant de raison : Qui s'assemble, se ressemble? Ce serait s'abuser trangementet bien mal connatre le cur humain que de regardercomme indiffrentes, au point de vue de la foi, les liai

    sons, et surtout les liaisons intimes. Il y a des exceptions la rgl e; mais je crois pouvoir dire que presque tou-

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    DE LA FOI 25

    jours ces liaisons font plus de mal h la partie chrtiennequ'elles ne font de bien h la partie incroyante.

    Si l'amour proprement dit venait s'en mler, ce

    serait un pril de premie r ordre. J'ai connu Pari s un jeune homme, chrtien prat iquant , qui allait se faireprotestant, soi-disant par conviction, afin de pouvoirpouser sans remords la fille d'un pasteur luthrien.

    Rien n'est plus utile l'me qu'un ami bien solidement

    catholique. On s'appuie sur lui en toute occasion ; on leconsulte;-on puise en son coeur des trsors de force, defidlit, de persvrance. La foi vive est comme le feu :unis ensemble, les charbons ardents s'embrasent mutuellement, doublent leur chaleur premire, et si par

    accident quelques-uns d'ent re eux venaient noircir et menacer de s'te indre, ils re trouveraient la splendeuret la flamme.

    Tels sont les vrais amis chrtiens. Rien de plus important , pour la conservation de notre foi et de notre pit,

    que de veiller de prs nos liaisons et de ne pas joueravec notre cur.

    Notons ici qu 'au point de vue de la foi, il y d' au tresliaisons dangereuses et trs-dangereuses : ce sont lesamit is folles et mondaines, qui , sans por te r directement atte inte no tr e foi, battent en brche la prat iquede cette foi, la vie de la foi. Dans la jeunesse sur tout, cedanger est l'ordre du jour. En nous entranant dans lavoie du plaisir et dans lasduction des frivolits, un amitourdi nous fait un mal aussi rel, quoique moins radical, que s'il s'attaquait directement k nos croyances. De

    mme que les essences dlicates s'vaporent vite et facilement lorsqu 'on agi te beaucoup le flacon qui les con-

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    tient et qu'on nglige d'en boucher l' ouve rture; de

    mme, la vie de la foi, le sens et l'espr it de la foi s'vaporent promptemcnt quand on se laisse entraner dans

    une vie frivole et mondaine. Du cur et des sons, le malmonte la tte ; la lumire del vrit chrtienne s'obscurcit insensiblement; on en arrive d'abord a ne plussent ir , puis ne plus comp rendr e les choses de Tordre

    su rnat ur el ; on se trouve dgot de la pr i re , des sacre

    ments ; ds lors on les ngl ige, on s'en loigne ; et ens'en loignant, on ta ri t en soi les sources de la gr ce, etpar consquent de la foi, qui est la premire de toutesles grces.

    Je le rpte donc : tous tant que nous sommes, veillons

    nos liaisons et nos in timi ts, si nous voulons resterintrieurement lis, unis l'Auteur et Consommateurde notre foi, qui est JSUS-CHRIST , lumire et vie de nos

    mes. C'est lui qui doit tre notre premier ami, et le plusintime de nos intimes. Sa divine amiti repousse toute

    amiti qui serait capable d'en altrer la tendresse etd'attrister son trs-bon et trs-adorable Cur.

    VI

    Quelles sont les erreurs contre lesquellesil faut plus spcialement se mettre en garde ?

    Ce sont les erreurs contemporaines, qui fleurissent

    plus part iculirement dans le temps et dans le pays o

    nous vivons. Ce n'est pas qu'elles soient en el les-mmes

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    DR LA FOI 27

    plus dangereuses que les au t re s ; mais c'est par ce ctque le grand Sducteur attaque plus directement et plusactuellement la citadelle de notre foi. Tournons donc

    plus spcialement nos efforts vers le point o noussommes plus spcialement menacs.

    Chaque sicle voit na t re , grandi r et passer u n grand'nombre de ces nuances du mensonge. Le fond est tou jours le mme : c'est le blasphme permanent de Satan

    et du mo nd e cont re l'existence de DIEU , la divinit deJSUS-CHRIST , et l'autorit du Pape et de l'glise. Toutesles erreurs qui ont menac, menacent et menaceront

    jusqu' la fin des temps la foi des chrt iens , rent rentdans ce cadre qui rsume tout.

    Les erreurs distinctives de notre sicle sont nes de larvolte anticatholique du seizime sicle et de la rvolteanlichr tienne du dix-huitime. Elles se confondent, avectoutes leurs nuances, dans ce que le Saint-Sige a condamn solennellement en 1864, sous le nom de naturalisme. C'est encore ce que, dans le langage vulgaire, onappelle l ar el ig io n de l'honnte homme, par opposition la religion de JSUS-CHRIST . Cette religion-l est lareligion de ceux qui n'en ont pas.

    Le naturalisme est une erreur universelle, qui touchea to u t : la rel igion propr eme nt dite, l'ducation, lapolitique, etc., et qui ds lors a une trs-grande porte.C'est la ngation la fois thorique et pratique de Tordresurnaturel, c'est--dire des droits divins et du rgne deNotre-Seigneur JSUS-CHRIST sur le monde. JSUS-CHRIST,vrai DIEU et vrai homme, a reu du Pre cleste la toute-

    puissance au ciel et su r la terre; tout lui a t donn,tout sans exception. Il a donc droit de rgner sur tnnt:

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    28 L E BON C O M B A T

    sur les socits aussi bien que sur Jes individus, sur lesrois, su r les gouvernements et sur les peuples, sur leslois et sur les institutions sociales, sur la politique, c'est-

    -dire sur la direction du mouvement et de la vie dessocits; su r la li ttrature, sur les sciences et sur lesar ts ; sur l'ducation et la formation de la jeunesse , surl'enseignement tous les degrs , sur les familles, su rl' humani t tout ent ire. Ce droit est divin, inal inable;

    et JSUS-CHRIST l'exerce officiellement dans le monde,par le ministre galement divin et suprme de sa sainteglise. Cette souverainet universelle a exclusivementpour but de faire rgner ici-bas la vrit, le droit, la justice, le bien, l'ordre et la paix ; elle a pour but le bonheur

    de tous et de chacun, ici-bas d'abord, puis dans l' ter- nit. Loin d'absorber et d'anantir les droits infrieurs,elle les protge au cont ra ire, les sauvegarde et les p r serve de toute al t ra tion. Elle est aux socits et auxgouvernements ce qu'est aux familles l'autor it du curou du confesseur. C'est une direction spirituelle, dans lesens le plus la rge de ce mo t, donne de la part de D I E Uaux gouvernants et aux gouverns, aux princes et auxpeuples, afin de les empche r de violer la loi divine-et afinde leur faire accomplir en toutes choses les volonts deJSUS-CHRIST, le souverain Seigneur du monde.

    Mais pour respecter pratiquement les droits de JS US -CHRIST et le ministre sacr de l'glise, il faut d'abordconnatre JSUS-CHRIST , croire en lui , et couter l'glisequi parle aux hommes en son nom. C'est, hlas !.ce quene fait plus le monde moderne. Prpare par deux sicles

    dnga tions, la Rvolution a proclam en 1 7 8 9 que lasocit ne reconnaissait plus JSUS-CHRIST pour son Roi,

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    J)E LA FOI 29

    ni l'glise pour sa Mre et sa directrice. Elle a proclam,comme des droits sacrs de l'homme et do l socit,l'incrdulit, l'hrsie, l'indiffrence en matire de

    'croyance et de religion; et, par consquent, la libert de tout nier comm e de tout croire, de tout dire , de toutimpr imer , sans au tr e contrle que celui de la policematrialiste de l'tat.

    De cet immense blasphme, le plus tendu qui ait

    jamais t profr depuis le comme nc eme nt du mo nde ,de cette apostasie radicale et universelle est ne, parrapport la foi, une indiffrence systmatique qu'onappel le le naturalisme, c'-est--dire la substitution, rigeen p rincipe social, de la na tu re la grce , de l'tat

    l'glise, de la ra ison la Rvlation, de l 'homme JSUS-CHRIST. Le Pape P I E I X , dans sa clbre Encyclique et

    'dans le Syttabns du 8 dcembre 1864, a co ndam n , avectoutes ses nuances et toutes ses formules, cette grandeer re ur , et l a signale comme le da ng er principal de

    notre sicle.Quelques catholiques, vaguement imbus des prjugscontemporains, et craignant sans doute de trop accorder Notre-Seigneur et son glise, n'ont pas accept,comme ils le devaient , les infaillibles enseignementsdu Saint-Sige cet gar d. Dans l'espoir ch imr ique deramener >la foi les ignorant s et les libres-penseurs, ilsont form une espce de tiers-part i en tre l'glise et laRvolution, entre la vrit et l'erreur; sans oser rienprciser bien catgoriquement , ils veulent a ttnuer lesenseignements de l'glise, combattr e pour la foi su r unau tre te rrain que celui o le Saint-Sige dclare qu'i lfaut combat tre ; hommes de peu de foi, ils s'appuient

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    30 LE BON COMBAT

    plus volontiers sur l'opinion publique que sur la vrit :ils s'appuient sur Csar, dans les pays o rgne Csar, etsur le peuple, dans les pays dmocra tiques o r gne le

    peuple; ils semblent avoir plus de confiance dans lesmoyens humains que dans l'autorit infaillible du Vicairede JSUS-CHRIST. Avec des in ten tions souvent bonnes etmme chrtiennes, ils proclament, au fond, les mmesprincipes que les rvolutionnaires, savoir la lgitimit

    et l'excellence in tr insque de la sparation de l'glise et. de l'Etat, de l' indpendance absolue de la socit civileet politique l'gard de la vraie re ligion ; la lgi timi tde la libert do la presse , de la libert et de l'galit des

    cultes.

    C'est l, qu'on le sache bien, l' erreur fondamentalede notre temps. C'est le naturalisme d'un certain nombrede chrtiens, qui dtestent trs -sincrement le na tu ra lisme absolu, l'incrdulit, l'indiffrence en matire defoi, et qui cependant, sous prtexte de faire de la poli

    tique et non de la religion, oubl ient et violent les principes les plus import an ts , spa rant ce qu'il faut seule

    ment distinguer. Sans le savoir, surtout sans le vouloir,ils sor tent du camp catholique, et donnent la main auxennemis de l'glise.

    Ceux qui sont assez peu clairvoyants pour professerles principes de ce na tura li sme mi tig s'appellent lib

    raux. La libert est, en effet, leur drapeau favori ; et parlibert, ils entendent, non la trs-sainte et trs-bonnelibert que DIEU donne ses enfants et que son glise

    claire et prserve, mais l'indpendance vis--vis de cottesouverainet universelle* de JSUS-CHRIST et de l'glise,dont nous parlions tout l'heure.

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    DE LA FOI 3 1

    La plupar t de ces chr tiens sont dupes de leur imagi

    nation et de leur cur. Ils savent mal les choses; ils ontpeu ou point de notions saines et solides en fait de doc

    tr ine ; ils sont sduits par ce qu'il y a de gn reux danscertaines aspirations et tendances de notre sicle. Beaucoup d'entre eux sont a rdents et cher chen t faire des

    proslytes, su rtou t dans les rangs de la jeunesse . Ils ont*des journaux, des revues ; ils se surfont les uns les aut res

    avec une habilet persvrante, avec un dvouementdigne d'une meilleure cause. Parmi eux, comme jadisdans le parti semi-jansniste, on voit figurer des noms

    fort honorables, et, ainsi que cela arrive dans toutes les

    erreurs srieuses, les noms d'un certain nombre d'eccl

    siastiques, mme haut placs.Le Souverain-Pontife nous a donn cet gar d dj bien

    des avertissements officieux et mme officiels. Pour n'en

    citer qu'un seul, voici ce que P I E IX disait, au mois de juin 1871, une dpu ta tion de catholiques de France :

    Mes chers enfants , il faut que mes paroles vous disentbien ce que j'ai dans le cur. Ce qui afflige votre pays etl'empche de m rit er les bndict ions du ciel, c'est cemlange des pr incipes. Je dira i le mot, et ne le ta irai

    point : ce que je crain s, ce ne sont pas tous ces mis

    rables de la Commune de Par is , vrais dmons d'enferqui s'agitent sfur la terre. Non, ce n'est pas cela; ce que

    je crains, c'est cette malheureuse politique. Le libralismecatholiquet voil le vritable flau.

    Je l'ai dit plus de quarante fois ; je vous le rpte,

    cause de l 'amour que je vous porte. Oui, c'est ce jeu de.bascule qui fait la Religion le plus de tort . Il faut sansdoute prat iquer la char it, faire ce qui est possible pour

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    32 LE BON COMBAT

    att ire r ceux qui s' garent; mais pour cela, il n'est pasbesoin de partager leurs opinions.

    Prenons donc bien garde de nous laisser emporter par

    ce courant du na tura li sme et du libralisme contemporains. Il nous loignerait d'abord, puis finirait par nousdtacher de l'glise, de JSUS-CHRIST et de la foi. Il y a lla matire d'une vaste et trs-grave hrsie, aux troisquarts condamne dj, et qui, selon toute apparence,

    sera bientt officiellement stigmatise, comme l'a tcette autre doctrine hrtique que l 'on regardait nagureencore comme soutenable, co mme vra ie, comme traditionnelle, sous le nom de gallicanisme. Le gallicanismeet le libralisme sont de la mme famille. Prnons

    garde.Ne nous faisons les part isans d' aucun homme enmat ire de doctrine : notre foi n'est point huma ine, maisdivine ; et aux yeux d'un chrti en, les homm es , mmeles plus vnrs et les plus vnrables par leur caractre, ne mr itent not re dvouement et nos sympathiesqu'en proportion de leur dvouement la vrit divine,c'est--dire la foi cathol ique-romaine, c'est--direencore au Saint-Sige Apostolique, incorruptible gardien,organe suprme et infaillible de cette vri t . Voil laseule mesure, ou du moins la mesure principale laquelle nous devons avant tout apprcier un catholique,un prt re , un vque . Est-il pleinement avec le Pape?nous sommes avec lui ; nous le suivons avec bonheu r .Est-il en opposition avec le Pape, avec les enseignementset les directions du Pape ? il cesse d'tre notre homme, et

    ' nous ne pouvons plus, en conscience et en scurit, marcher sous son drapeau

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    DE LA FOI 33

    3

    En matire de doctrine, attachons-nous donc indisso

    lublement au Souverain-Pontife. Le suivre, ce n'est pas

    suivre un homme, c'est suivre JSUS-CHRIST ; demeurer

    isoumis d'esprit et d cur , ses ense ignements, tousses enseignements, c'est demeurer dans la vrit, dans lapuret de la foi.

    Dans ce temps-ci plus que dans tout autre, prenonsd meessantes prcautions cont re la fivre du natural isme,

    de l'indiffrence et de l'espr it de rvolte. Vivons de la viede la foi ; et que tout en nous soit hautement, fe rmementcatholique : les penses , les ju gem ent s , les sympathies ,les discours, les dvouements et les uvres.

    VT

    Des principales maladies morales qui menacent la foiet a vie de la foi dans les mes.

    La lumire et la vie de la foi n'ont pas seulement pourennemis les tnbres impures de l 'erreur; elles sontgalement menaces par d'autres maladies morales, qui,

    sans s'attaquer aussi directement l'intelligence, l'atteignent indirectement, mais trs-profondment. ,

    Ces maladies peuvent se ranger en quatre catgories :les premires ont pour sige la tte ; les secondes, le curelles sens; les troisimes, l 'estomac; les quatrimes, la

    bourse et la caisse.Les maladies morales qu i menacent la foi pa r la ttesont d'abord l'ignorance religieuse, puis l'orgueil.

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    34 LE BON COMBAT

    Voyez les pauvres gens qui ne croient pas, ou du moinsqui vivent, parlent et agissent comme s'ils ne croyaientpas. La plupart sont ignorants comme des Turcs. J'en

    tends ignorants en mal ire de re ligion; car on peut trefort savant en mathmatiques, en chimie, en mdecine,en agriculture, en archologie, voire mme en astronomie, et ne pas savoir un tratre mot de son catchisme.N'ai-je pas connu Paris un trs-illustre et trs-savant

    membre de l'Institut qui, depuis vingt ans, me disait-il, ne s'occupait que de la lune, ne vivait que dans lalune, ne pensait qu' la lune! Le pauvre savant lisaitassidment le Sicle^ souscrivait de bonne foi la fameuse statue de Voltaire qui, pendant prs de deux ans,

    a agit tout Paris ; mais il ne se doutait pas de ce qu'taitJSUS-CHRIST. Il savait la lune par cur, et ignorait totalement pourquoi il tait en ce monde. Pauvre scienceignorante !

    En ce temps-ci, l'ignorance religieuse est malheureu

    sement l'ordre du jour, surtout chez les hommes. Elleprovient de l'enseignement et ins truction rationalistesdont la dtestable Universit sature depuis trois quartsde sicle nos jeunes gnra tions. La France recueille cequ'elle a sem : pour recueillir des chrtiens, il faudrait

    semer les doctrines et les habi tudes qui font les ch rtiens. Dans la plupart des maisons d'ducation^)) l'enseignement catholique tient si peu de place, qu'on peut hardiment le dclarer n u l ; et l'encre rational iste del'Universit vient altrer promptement le pauvre petitfilet de vrit que le zle d'un aumnier s'efforce de fairecouler, malgr mille obstacles, dans les mes.

    L'oubli pratique de DIEU rsulte directement de cette

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    D E LA FOI 35

    ducation sans foi. Je voyais un jour un je un e homme qui

    sortait d'un de nos lyces los plus renomms pou* la: fer

    met de la discipline et la force des tudes . Je lui recom

    mandais de vivre en chrtien, et, pour cela, de penser

    souvent au bon DI EU , et de s'habituer vivre pour lui,

    travailler , souffrir pour lui. J'essaye de le faire, me

    rpondit-il; mais quand je prie, il me semble que je ne

    parle personne, que je parle dans le vide. Au lyce,

    nous tions habitues vivre sans . Et ce pa uvr e jeune homme, d'ailleurs bon et instruit, avait remportdans son lyce, en rhtorique, le premier prix d'instruction religieuse ! Si le phnix en tait l, o donc en taientles autres?

    Et puis, quelle ins truction religieuse acquie rt -on d'habitude, partir de treize ou quatorze ans? Aprs lescatchismes, on n'apprend plus rien. On oublie promp-tement le peu qu 'on avait appr is ; et l'on en ar ri ve uneignorance de sauvage, en tout ce qui concerne les vrits

    sacres dont le Fils de D I E U a illumin le monde. On nesait pas ; et ds lors on ne croit pas. Ou bien, ce qui estpis encore , la suite d' tudes et de lectures malsaines,on imagine un chr is tianisme absurde, impossible, qu'onprend pour l'enseignement de la foi; on se rvolte, et

    avec raison, contre ces normits, que l'glise n'a jamaisenseignes et qui sont une abominable caricature de lafoi; on dclare qu'on ne croit pas, qu'on ne croira jamais. Cette nuance de l'ignorance est la plaie de presquetous les hommes instruits qui n'ont pas t levs chrtiennement. Premire maladie de la tte, au point devue de la foi : l'ignorance.

    La seconde, non moins dangereuse, est l 'orgueil, qui

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    30 LE BON COMBAT

    s'entte et se rvolte. Il s'entte sottement ne pas vouloir s'instruire: il se rvolte follement contre l'autoritsacerdotale qui veut l'instruire, ou contre l'autorit de la

    vri t qui se propose et tout ensemble s'impose sonintell igence. Il rpte la parole du dmon : Je ne mesoumettrai point.

    Sachez-le bien, il n'y a pas autre chose clans la tte del'incrdule : ou le vide de l'ignorance, ou le ple-mle de

    la demi-science et ctes prjugs, ou enfin le gonflementde l'orgueil, de la fausse science et.de la rvolte.

    De la tte, descendons au cur. L encore, la foi courtdes dangers, des dangers trs-grands.

    La corruption du cur ressemble la corruption do

    Ges marcages d'o s'exhalent des miasmes, des vapeurspestilentielles qui infectent l 'air et le chargent de brumesplus ou moins paisses. Il en est de mme des mauvaisespassions : tant que le cur est pur , laul que l'eau estlimpide, l'atmosphre de Tome est pure aussi, et rien

    n'empche le soleil de vrit, JSUS-CHRIST , de luire jusque dans les paisibles profondeurs de la conscience; maisds qu'arr ive la corruption, les br umes du cur monten t la tte, obscurcissent le jugement, et, lorsque ce dsordre se prolonge, elles finissent par substituer les tnbres la lumire. Comme nous le disions tout l'heure,on croit qu'on ne croit plus ; on vit et on parle comme sil'on ne croyait pl us . Chez les jeunes gens surtout, ledanger de la foi,vient p resque toujours du cur et dessens.

    Un pieux dominicain qui prchait, il y a quelques annes, une grande retraite de jeunes ouvriers de Paris,fut pri de s'efforcer de ramener la foi un pauvre jeune

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    DE LA FOI 37

    LmAio de quinze h seizo ans. Il tait bien bon jadis,lui di t -o n; mais depuis , il est tout chang! Il dit qu'iln'a plus la foi. Il n'a plus la foi? dit le Pre ; amenez-le-

    moi; je connais cela. On le lui amena, en effet. Le jeune ouvrier voulut d'abord entamer une espce de discussion ; mais mesure que le Pre lui parlait, il baissait le ton et bientt il fut rduit au silence. Comme lebon Relig ieux continua it , l'exhorter , et l'engagea it

    mmo se p r pa re r aux pques , il l ' int er rompit b rus quement, et d'une voix sourde il murmura ces horribles

    paroles : Je voudrais tre un chien. Un chien ! s'crialo pauvre-Pre, stupfait de ce rsultat inattendu de sesexhortations. Y pensez-vous, mon pauvre ami? Vous

    voudriez tre un chien? Oui, rpondit l'autre demi-voix ; au moins, je pourrais faire le mal sans remords.

    C'est en cela que se rsu me , quatre-v ingt-dix-neuf foissur cent , la prtendue incrdu lit des jeunes gens malvivants : Pouvoir faire le mal sans re mords.

    Prenons-y bien garde : la puret du-cur influe directement sur la foi. Si nous voulons conserver le chastotrsor de nos croyances, soyons purs et chastes ; veillons

    sur notre cur; veillons sur nos sens.La troisime espce de maladie morale qui menace la

    foi, et la vie de la foi, vient de l'estomac.Oui, de ' l ' e s tomac , c'est--dire des habitudes sen

    suelles, de la bonne chre, de la mollesse, du luxe et dece culte du bien-tre qui se substitue peu peu au culte

    austre et cleste de JSUS-CHRIST . Principalement parmi

    les gens leur aise, les proccupations du confortable,et, disons le mot, de la gourmandise, occupent dans lavie la place d'honneur. Ds lors, Notre-Seigneur se voile

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    .18 LE BON COMBAT

    la face ; il se retire peu peu, ne voulant pas, ne pouvantpas demeurer en des tres qui ont fait leur DIEU de leurvent re , selon l'nergique parole de saint Paul . La Sen

    sualit tue la foi; olle la noie dans les vins exquis, et l'touff, l'ensevelit sous les mille recherches des insatiables volupts de la chair.

    Enfin le quatrime danger vient de la bourse, de lacaisse. Quand on est trs-riche, on est difficilement chr

    tien; parce que, "pour tre chrtien, pour tre vritablement disciple de JSUS-CHRIST , il faut tre pauvre d'es-prit, c'est--dire dtach des biens de la ter re ; or,l'exprience le prouve, plus on est riche, plus on tient ses richesses; plus on a, plus on veut avoir. Pour tre

    chrtien, il faut tre humble ; et les riches, aduls depresque tout le monde, sont facilement vaniteux, hautains et pleins d'eux-mmes. Pour tre chrtien , il fauttre charitable, sympathique aux pauvres, bon, pnitent,mortifi ; or les riches, et surtout les trs-riches, sont fa

    cilement gostes, indiffrents l'gard des malheureux,et profondment immortif is . De cet te difficult fondamentale, pour tre vraiment chrtien, nat pour lesriches un danger trcs-rsrieux au point de vue de la.croyance pratique aux austres vrits de l'vangile. Ilscroient sans peine les vrits spculatives qui no les gnent pas; et ils se dtournent instinctivement de toutescelles qui condamnent leur vie mondaine et luxueuse.

    Mais Lla caisse est un danger bien plus direct encorepour la foi lorsqu'elle contient de l'argent mal acquis. Onsait fort bien que, pour servir JSUS-CHRIST, il faudraitcommencer par rendre ce qu'on a vol ; et comme on neveut pas le rendre, on trouve aussitt, dans le fond de sa

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    D E L FOI 39

    caisse, une quantit d'arguments blancs et jaunes, pluspremptoires les uns que les autres, pour se dmontrer,

    h soi-mme, hlas! et quelquefois aux autres* qu'il if y a

    pas de DIEU , que JSUS-CHRIST n'est pas DIEU , que nousn'avons pas d'me, qu'il n'y a pas d'enfer, que les prtressont des hypocr ites et des fourbes , que la confession estun infme abus, que la sainte Eucharistie n'est pas leCorps de Notre-Seigneur, que les Religieux, et surtout

    les Jsuites, sont les ennemis du genre humain. Toutcela s'lve du fond de la caisse, et monte la tte,comme la fume de l'encens s'lve de l'encensoir.

    Le fils d'un trs-riche banquier venait de terminer sonducation, qui avait t heureusement confie un pr

    cepteur honnte et chr tien . Le jeune homme avait dix-huit ans; il tait entr depuis quelques mois, titred'associ, dans les bureaux de son pre. Pques approchait. Son ancien matre le rencontre, et change aveclui quelques paroles amicales, ce Et les pques, mon

    cher? ajoute-t-il. Le temps approche. J'ospre que vousne l'oubliez pas? Mes pque s? rpond d' un air assezdgag le jeune associ. Non, je ne les ferai pas. Je necrois plus tout cela. Vous ne croyez plus? Allonsdonc! Est-ce que vous vous moquez de moi? Est-ce que

    je ne,sais pas ce que vous savez et ce que vous croyez?Est-ce moi que vous parlez, mon ami? Et, comme le

    jeune homme ne rpondait pas, le digne prcepteur semit lui rappeler br ivement la cer titude absolue de lafoi. Assez! fit le jeune homme en lui met tant la mainsur le bras et en l 'i nter rompan t avec un embarras vi

    sible, assez! Vous avez raison, et la preuve, c'est que je le sens. Mais, ajouta-t- il en rougissant malgr lui,

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    40 LE BON COMBAT

    si je faisais ce que vous mo demandez , et si j 'taisce que vous voulez, je ne pourrais plus faire ri'affaires.

    Il n'y avait rien rpondre . A dix-huit ans, la caisse

    parlait dj plus haut que la'conscience. Qu'est-ce quecela doit tre quarante, cinquante ou soixante ans, aubel ge de la for tune faite, de la perfection acquise!, Inordulit de tte, incrdulit de cur, incrdulitd'estomac, incrdulit de caisse : telles sont donc les

    quatre catgories o rentrent toutes les incrdulits. Cesont les quat re corps d'arme que l' ennemi de la foi me t

    en campagne pour dvaster l'Eglise en branlant et, s'ilse peut, en renversant l'difice de notre foi. Ce sont lesquatre grandes maladies morales qui minent dans les

    mes la vie sacre et surnaturelle de la foi. Elles nousmenacent tous par un ct ou par un au tre. Veillons,combattons comme de bons soldats de JSUS-CHRIST, et

    conservons tout prix notre belle foi, gage et fondementdu salut.

    VIII

    De la ncessit absolue d'une solide instructionreligieuse.

    La premire maladie qui menace la foi dans les mestant l'ignorance, le remde se devine de lui-mme :

    c'est l'instruction religieuse.Plus que jamais une bonne et solide instruction reli

    gieuse est ncessaire aux catholiques. Dans aucun tempspeut-tre, l'air n'a t rempli de plus de fausses ides, de

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    DE LA FOI 41

    plus de prjugs qu'en ce temps-ci. Ce n'est peut-tre lafaute de personne, en part icul ier : c'est une consquencedes ruines intellectuelles et morales, accumules en-

    Europe depuis plus d'un sicle. Les j o u r n a u x , quiparlent tort et travers de ce qu'i ls igno rent , ' ysont aussi pour beaucoup. Presque partout le manque deprt res, de Religieux et de Religieuses fait que l' inst ruc-tion chr tienne de la jeunesse est trs- insuffisante, et

    l'instruction de l'adolescence presque nulle. Les fidleseux-mmes ont souvent de grandes privations endurer cet gard. Ce n'est pas la faute des prtres; la plupartfont ce qu'ils peuvent ; mais l o* il en faudrai t dix, ouau moins cinq, il y en a un. Absorbs par'les travaux

    extrieurs du ministre, puiss de fatigues, les bonsprtres ne peuvent donner qu'un temps trs-reslreint hl'tude et pa r consquent la prparat ion srieuse del'enseignement. Et puis, combien djeunes gens, combien de laques, su rtout dans la classe ouvr ire , chap

    pent compltement leur action! Dans la plupart de nos. grandes villes, la propor tion est effrayante.

    L'instruction religieuse arrive no.us par trois voies,La premire, qui regarde plus spcialement l'enfance,ce sont les catchismes . On ne saura it trop les recom

    mander. Les petits et grands catchismes sont, avec leBaptme, la base du salut, parce qu'ils sontle dveloppement du don de la foi. Le ministre du prtre catholique, dans les catchismes, est quelque chose d'incom-

    - parable. C'est sans contredit le premier et le plus douxdevoir de la charge pastorale. Les parents et les matreschrtiens, s'ils comprennent leur vocation, doivent imprimer leurs enfants un profond respect pour les cat-

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    4g LE BON COMBAT

    chismes, et faire passer le grand devoir de l'instructionchrtienne avant toutes les autres tudes, avant tous lesdevoirs. Que de ngligences , hlas! et quelles dsas

    treuses ngligences dans la plupart des familles !La seconde voie par o l' ins truct ion religieuse arr ive

    aux fidles, c'est l'enseignement oral que l'glise distribue sous mille formes ses enfants par le ministre desprtres, Les prnes du dimanche, les instructions fami

    lires que les curs font leurs paroissiens, soit auxOffices de l'glise, soit la prire du soir et dans lesrunions de pit, les prdications plus suivies del'-vent, du Carme et du Mois de MARIE : telles sont lesformes ordinaires que revt l'enseignement pastoral.

    On ne saurait trop le recommander l'assiduit deschr tiens qui ont cu r d'entreten ir et de dvelopperen eux le don de la foi. Rien ne remplace les instructionsofficielles du prtre. Elles sont accompagnes de lagrce spciale de son min istr e; elles sont toutes , d'une

    manire plus ou moins parfaite, la parole de D I E U . Il estvrai, le min ist re de cette parole sainte tant un h o m meet non un Ange, la vrit qu'il nous prsente se trouvetoujours revtue de formes imparfaites, qui en affaiblissent la divine splendeur ; mais sous l'enveloppe de paille,il y a toujours le froment, et l'exprience est l qui lemontre, les mes sincres et bonnes l'y trouvent toujours. Elles font comme les petits oiseaux qui, sans s'arrter l'enveloppe plus ou moins paisse des grains oudes fruits que leur sert la bonne Providence, y trouventfacilement et suffisamment leur nourriture.

    On se plaint souvent des mauvais sermons, des ser

    mons ennuyeux. Neuf fois sur dix, c'est la faute de Tau-

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    diteur. Le prtre de JSUS-CHRIST n'a pas pour vocationde dire loquemment de belles choses, mais de dire simplement de saintes choses. Tout prtre est prdicateur

    en ce sens, bien que tout prt re ne soit pas orateu r,ce Mes frres, disait en ouvran t un e stat ion de carme levnrable M. Deguerry, si cruellement immol en hainede l'glise; mes frres, souvenez-vous que ce n'est pasmoi qui vais faire ici de bons ou de mauvais sermons, ce

    sera vous. Mes sermons seront bons, s'ils vous font dubien ; et ils vous feront du bien, si vous les coutez avecde bonnes dispositions. Ils seront mauvais s'ils ne vousfont pas de bien; et s'ils ne vous font pas de bien, ce seravotre faute. Rien de plus vrai.

    a La foi entre par les oreilles, dit saint Paul. La parole du prtre est une parole vivante, qui porte avec ellela grce divine de la foi, comme le rayon de soleil porteavec lui la chaleur de la vie. Notre-Seigneur veut quetoutes ses grces nous arrivent par les mains de son

    glise, qui est son pouse et notre Mre. Voil pourquoinous devons entendre et couter la parole du prtre. Sila foi ressemble en beaucoup d'mes un pastel effac,sans relief, sans vie, cela tient la plupart du temps ladsertion des Offices publics o l'ense ignement sacer

    dotal es

    #

    t di stribu aux fidles.Donc, sanctifions tous nos dimanches, non-seulementpar l'assistance la Messe, mais encore par l'assiduit auxinstructions religieuses, et soyons fidles suivre autant

    xque possible, avec rgularit et bonne volont, les prdications ordinaires et extraordinaires de notre paroisse.Entre autres, attachons-nous aux prnes, courte? instructions familires, dispenses chaque di manche , du

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    44 LE BON COMBAT

    haut del chaire parles pasteurs immdiats de nos mes.

    Rien de plus excellent, rien de plus pratique que ce conseil, ai 1 point de vue de l'instruction religieuse, et par

    consquent de la conservation de la foi.Enfin, la troisime voie par o la lumi re de la vri t

    arrive jusqu' nous, ce sont les bonnes lectures.On le conoit, cette voie n'est jamais qu'accessoire, et

    ne peut remplacer l'enseignement oral. Il faut cependant

    ne pas la ngliger. Elle supple bien des lacunes.Mais i l . faut choisi r avec circonspect ion les livres

    d'instruction religieuse dont on veut se nourrir. Il estbon de consulter auparavant , et de ne pas s'en rappo rterau premier-venu . Il y a des gens qui rec omm an den t

    comme excellents des livres pitoyables, ot qui, par cettelgret, font beaucoup do mal . Le plus simple et lafois le plus sr est de consulter son confesseur ou soncur, ou quelque autre prtre clair et pieux.

    Les bibliothques paroissiales ne renfermant en gn

    ral que des livres de choix, peuvent tre trs-utilespour affermir et dvelopper l' inst ruction des bons fidles.

    Ne l'oublions donc jamais : la foi est la lumire du salut , et, comm e le dit Notre-Seigneur, la vie ternelle co)i-

    siste vous connatre, mon Pre, vous, le seul vrai D I E U ,

    ainsi que JSUS-CHRIST qi'vous avez envoy. a Connatre,voil le point de dpart, le fondement du salut ternel.Or, pour connat re , il faut s' ins tru ire, s 'inst ruire tou

    jours, s'instruire de plus en plus.

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    DE L FOI 45

    IX

    Comment la prire et la pit sont ncessairespour conserver la foi.

    Si la lumire de la foi tait une lumire naturelle,comme la science des math m at iq ue s. pa r exemple, la

    pit ne serait nullement ncessaire pour sa conservation. Qu'on soit bon, qu'on soit mauvais, les vrits mathmat iques n'en dem eu rent pas moins fixes dans

    l'esprit.Il n'en est pas de mme des vrits chrtiennes. Elles

    atteignent l' ho mme tout entier , font la guerre son or

    gueil, ft. tou tes ses passions, l'obligent prat iq ue r desvertus difficiles, et n' appara issent son espr it qu'avec

    une longue queue de devoirs. On l'a dit avec raison : Ledcalogue ostla queue du symbole, et bien souvent l o,le symbole passerait sans aucune difficult, le dcalogues'embarrasse et ne passe pas. Les gens qui repoussent la

    foi parce qu'ils ont, intrt ne pas croire, ressemblent

    ces enfants dont le cerf-volant ne peut s'enlever parceque des broussail les ou des branche s d'arbres le retien*nent par la queue.

    Ds lors on conoit, je ne dis pas seulement l'impor

    tance, mais la ncessit d'une vraie et solide pit pourconserver intact, pur de tout alliage, et bien vivant, letrsor sacr de la foi. La pit garde la foi, comme unebonne fille dfend et garde sa mre, La foi engendre la

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    4 L E BON COMBAT

    pit, et son tour la pit soutient et enrichit la foi. C'est pa rti r du jour o j ' a i cess de servir et d'aimerle bon DI EU , me disait jadis un ancien rvolutionnaire

    converti, c'est partir du jour o j'ai abandonne laprire et les sacrements, que la lumire de la foi a cessde diriger ma vie; si bien que, pendant de longues annes, j ' a i cru l'avoir to ta lement pe rdue . Ma pauv re foi !ah ! elle tait morte en mon cur corrompu. Elle ressem

    blait ce feu sacr que les Isral ites avaient enfoui,avant de partir de Jrusalem pour la captivit, dans lesprofondeurs d'une citerne; au retour, il brlait encore,mais miraculeusement, au milieu d'une boue noire etftide. Il en est ainsi, par la mis ri co rde divine, de

    presque tous les chrtiens indiffrents. Leur foi est plutt ensevelie que morte. Il est cependant'vrai ddireque pratiquement ils ont perdu la foi.

    Or, l'me de la pit, c'est la pri re . On pourrai t dfinir un chrt ien pieux un ho mme qui prie. Qu'est-ce,

    en effet, que la pit, sinon la vie en JSUS-CHRIST , l 'unionsanctifiante et aimante de JSUS-CHRIST avec le chrtien,du chrtien avec JSUS-CHRIST? Et la prire n'est-elle pascomme la respiration de cette vie, comme l'me de cetteunion? Quand nous prions, Notre-Seigneur s'unit in trieurement et actuellement nous; et de notre ct, nousnous levons vers lui , nous nous unissons lui par l'adoration, pa r l'amour, par l'action de grces , pa r l'humili tde la confiance et du repentir.

    La prire est la source de la grce; et comme la foi estla grce des grces-, la prire est une sorte de canal quidu ciel fait couler en notre me l'eau vivante de la divinelumire, rejaillissant la vie ternelle : La source de

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    D E LA FOI 4*?

    celle eau vive, c'est JSUS-CHRIST , Roi cleste; la terrequ'elle doit arroser et fconder, c'est notre esprit, notrecur, notre volont; c'est tout nous-mmes. Sans le ca

    nal de la prire, comment la grce de JSUS-CHRIST , comment l'Esprit de lumire et 4 de vie arriverait-il du ciel la terre, de JSUS-CHRIST nous ?

    Prions donc beaucoup ; prions souvent, et prions bien.L est le secret de la pit : et par consquent, l est

    aussi le secret de la foi vive et profonde. Emports parles affaires eL pa r le tourbi llon d'un monde, plus tourbillonnant que ja ma is , il n'y a plus beaucoup de chr tiens qui fassent de la prire leur grande gloire. Il enrsulte un affaiblissement gnral de la vie de la foi ; par

    un cercle vicieux inextricable, la diminution de la prireproduit la diminution de la foi, et son tour la diminution de la foi.augmente la diminution de la prire.

    Nos pres priaient bien plus que nous. Dans les classesinstruites, beaucoup de laques, mme trs-occups, r

    citaient rgu li reme nt chaqu e jour l'Office divin ; laplupart des dames pieuses rcitaient l'Office de la Sainte-Vierge; et presque personne, dans les rangs du peuple,ne passait une journe sans entendre le matin de bonneheure la sainte Messe, sans rc iter pu bli que men t lesprires de F Anglus, et sans' dire chaque jour le chapelet,quelquefois mme le Rosaire. On priait alors parce qu'oncroyait, et l'on croyait parce que l'on priait. On respiraitla foi pleins poumons, parce qu'elle tait solide et vigoureuse; et cette forte respiration entretenait merveilleusement la sant de l'me.

    Pourquoi ne ferions-nous pas ce que faisaient nos

    pres? DIEU a-t-il chang? Son vangile, ses comman-

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    48 LE BON COMBAT

    dments ont-ils t modifis? L'esprit de l'glise n'est-ilpas toujours le mme? Les moyens de sanctification nesont-ils pas, aujourd'hui comme jadis, la porte de

    tous les hommes de bonne volont? Enfin, les dangersont-ils diminu, pour nous permettre de dposer ainsiles a rmes?Hlas ! ils sont bien plus redoutables en cetemps-ci* que dans les sicles de foi, o les inst itut ionspubliques , loin d'en traver c omme aujourd'hu i la fidlit

    des chrtiens, l'aidaient au contraire et la sauvegardaientpuissamment.

    Donc, faisons, s'il se peut , mieux enco re; organisonsnotre vie chrtienne avec plus de vigilance et de prcaution : il s'agit tout simplement de jqe point pr ir . S'il est

    permis aux matelots de dormir et de prendre du bontemps lorsque le ciel est serein, lorsque la mer est tranquille, il n'en est plus ainsi pendant la tempte, lorsquele pril est im mi nen t et que la simple ngligence pe uttout perdre.

    La pit et la prire : ces deux paroles doivent treinscrites en grosses lettres, en tte du programme detous ceux qui veulent conserver leur foi et s'adonner

    utilement aux uvres de propagation et de conservationreligieuses.

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    DE LA FOI 49

    X

    De l'importance de l'Oraison ce mme point de vue.

    La prire est l'expression gnrale qui dsigne l'lvation de notre pense et l'application de notre cur aubon D I E U . L'oraison est cet exercice spcial de prire quinous fait consacrer rguli remen t chaque jou r un certain temps la pense approfondie des vri ts du salut.

    C'est un exercice de rflexion et de mditation, tout diffrent de la prire vocale : celle-ci se sert de la parolepour lever et unir l'me JSUS-CHRIST ; celle-l, plusintrieure, plus recueillie, plus compltement spirituelle, ne s'expr ime point au dehors et se passe ent reJSUS-CHRIST et l'me, dans le secret, dans l'intimit ducur.

    Rien de plus simple que l'oraison. Au fond, ce n'estautre chose qu'une rflexion srieuse et habituelle cequi mrite le plus les rflexions trs-srieuses et continuelles d'un chrtien ici-bas. Faire oraison, c'est se r

    server prud emm ent chaque jour un certa in temps pourpenser tout de bon l'ternitQ, la loi de D I E U , auxprceptes et aux conseils de l'vangile, la justice infinie et la trs-douce misricorde de Notre-Seigneur , la ncessit du salut, de la prire, de la vie et des-vertus

    chrtiennes; la ncessit d'tre toujours prt paratredevant D I E U et aux divers moyens que 1 glise nous pr-

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    sente pour faire ie bien et pour viter le mal, pour gagner le ciel et pour chapper l'enfer.

    Rflchir rgulirement et srieusement sur les vri

    ts de la foi, bases de la vie ch rtienne : voil ce quec'est que faire oraison. N'est-ce pas, je le demande, cequ'il y a"de plus lmentaire et mme de plus indispensable dans le travail de la sanctification? N'est-ce pas lemoyen le plus indiqu ppur un chrtien, de s'enraciner

    dans la vie de la foi, dans le zle et dans l'amour de la foi?Tout le monde peut faire oraison ; tout le monde de

    vrait faire oraison ; parce que tout le monde peut et doitrflchir. Hlas ! on passe sa vie rflchir et rflchirtrs-consciencieusement, trs-assidment sur les mille

    et une affaires qui rempl issen t la vie ; affaires de fortune, affaires de famille, combinaisons d'intrts, prparation de carrire et d'avenir, prparation mme departies de plaisir : rien n'chappe la vigilance et lapuissance de nos rflexions. Une seule affaire fait exception; une seule. Et laquelle?"la seule qui soit vritablement ncessaire; l'affaire pour laquelle nous sommescrs et mis au monde, la grande affaire de notre salutternel et de notre sanctification.

    Ah! pour celle-l, on ne trouve plus le temps d'y penser! S'astreindre y rflchir srieusement chaque matin pendant un quart d'heure parat une exagration.Le temps qu'on y emploie est quasi rput du tempsperdu. Y consacrer une heure sur vingt-quatre, ,y consacrer mme seulement une demi-heure, c'est, au diredel plupart, vouloir entrer dans des voies'de perfec

    tion qui ne sont la porte que des prtres et des Religieuses*

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    Il y a dans cette antipathie si gnrale l'gard del'oraison quelque chose de surnaturel. C'est videmmentune influence secrte de l 'ennemi de nos mes qui ne

    veut pas que nous nous appesantissions sur des vritsd'o dcoulent avec force les lumires, les grces et lesimpressions les plus capables de faire de nous de vraisserviteurs de D I E U . Le dmon sait que ce la terre est dsole d'une dsolation profonde, parce que personne ne

    rflchit en son cur, comme dit l'Ecriture. Il le sait,et il agit en consquence.

    Un jour, saint Dominique, ravi en esprit dans le couvent des Frres-Prcheurs de Bologne, vit Satan sousune forme sensible, et au nom de Notre-Seigneur J SU S-

    CHRIST il lui commanda d'approcher et de rpondre. Illui demanda entre autres quel profit il pouvait avoir surles Frres.dans la salle du chapitre, o ils se runissaientpour faire chaque jour leur oraison. Le mauvais espritlui rpondit : Je les y fais arriver le plus tard possible ;

    je les en retire le plus tt possible; et pendant qu ' i l sjsont, je tche de faire en sorte qu'ils s'oublient eux-mmes.

    Voil tout le secret des difficults que l'on entendlever de toutes parts contre la sainte et sanctifiantepratique de l'oraison. C'est la traduction et le vrai sensde ces objections que chacun s'est faites et a entendufaire .aux autres : Je n'ai pas le temps de faire oraison. Je ne sais .pas faire orai son. C'est trop difficile defaire oraison. J'ai essay plusieurs fois et je n'ai pasrussi. J'ai des distractions tout le temps, et j'y perds

    ma peine. Cela me fatigue la tte. Je n'ai pas d'endroit pour me recueillir suffisamment. Je ne suis pas

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    assez saint pour faire oraison, etc. Devant une foi vive,toutes-ces difficults s'vanouissent, comme une bullede savon devant la chaleur d'un rayon de soleil.

    Croyez-moi, mettez-vous faire tous les jours aumoins un quart d'heure d'oraison. Qu'est-ce que cela,un pauvre petil quart d'heure, dans toute une journe?Une demi-heure vaudrait bien mieux, parce qu'elle vousrecueillerait davantage et vous unirait plus intimement

    Notre-Seigneur ; mais enfin, je ne" vous en demandepas tant; accordez-moi un quart d'heure.

    Mais un quart d'heure bien rgulirement, chaque jour, le matin immdiatement aprs le lever, dans lesilence de votre chambre, avant toute autre occupation.

    C'est l le moment le plus favorable, et presque toujoursle plus commode. S'il le faut, levez-vous un peu plustt. Quelques minutes de repos de plus ou en moins nefont rien la sant ; ma is si elles vous permettent defaire votre petite ora ison, elles au ront une importanceimmense sur votre pit et sur la grande uvre de votre

    salut.

    Ces quelques minutes, ce petit quart d'heurej celadeviendra l'me de la journe, l'me et la vie de votrepit, la vigueur de votre foi et de votre zle pour leservice de DIEU . Si, par l'oraison, vous entrez tous les

    jours en communication intime avec Notre-SeigneurJSUS-CHRIST , vous puiserez en son divin Cur des lumires qui vous sont inconnues et qui vous faciliterontsingulirement le grand travail de la vie chrtienne.Vous y puiserez la volont et la force ncessaires pour

    bien combatt re les ennemis du dedans et les ennemisdu dehors. Quoi de plus utile, je vous le demande, qu'un

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    pareil exercice, pour un vrai soldat de JSUS-CHRIST?Quant la manire de faire oraison, notre bon saint

    Franois de Sales l'explique tout au long dans son-admi

    rable Introduction la vie dvote. Permettez-moi de vousy renvoyer et de vous dire simplement ici que la grosseaffaire, dans l'oraison, ce n'est pas la mthode qu'onemploie, mais l'union avec JSUS-CHRIST . Pourvu quel'esprit, le cur , la mmoire, l'me en un mot s'unisse

    au bon D I E U , s'applique lui, s'excite de bons sentiments de pit, de repentir, d'humilit, d'esprance,surtout d'amour et de ferveur, peu importent et les mthodes et les moyens.

    Ce que, par exemple , je ne saurais trop vous re com

    mander, c'est, au dbut mme de votre cher petit quartd'heure, de vous mettre avec une volont ent ire en lasainte prsence du bon D I E U , devant qui et en qui voustes, de ne pas sort ir une seule minute par votre fautede cette sanctifiante prsence ; d'y rent re r doucement,mais immdiatement, ds que vous vous apercevrezd'une distraction, et de ne jamais vous dcourager cause des dist ract ions. Peu peu vous vous habituerez vous recueillir moins imparfaitement. Il en est del'oraison comm e de tous les travaux : on apprend- labien-faire en la faisant, et force de la faire.

    Ce que je vous recommanderai encore, c'est de pr parer voire oraison, c'est--dire de d te rminer d'avanceet bien nettement la pense de foi dont vous vous occuperez. Choisissez la veille au soir votre sujet d'oraisonpour le lendemain matin.

    Que ce sujet soit toujours trs-simple et trs-fcond.Par exemple : Je suis chrtien ; je suis cathol ique. Viv-je

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    en ch r ti en et en ca thol ique? Qu'ai-je rformer enmes penses, en mes habitudes? Je puis mour ir au

    jourd'hui. Suis-je prt paratre devant DIEU? Ma con

    science est-elle bien nette? Mes confessions sont-ellessincres? Que ferai-je et que ne ferai-je plus l'avenir?Je communie souvent; JSUS-CHRIST est ma vie et monPain de vie : que fais-je pour correspondre une grcesi excellente? Qu'y a-t-il en moi, en mon esprit, en mon

    cur , e tc. , qui empche mo n Seigneur de vivre et dergner pleinement en moi? Je dois tre un hommede prires : comment est-ce que je prie? Repentir dupass ; forte rsolution pour l'avenir. D I E U est tout enmoi; moi je ne suis rien par moi-mme; rien que nant,

    misre et pch. Tout le bien qui est en moi vient deDIEU , est DIEU, est pour DIEU . Adoration, anantissement, rsolution d'tre humble devant DIEU et devantles hommes ; et autres penses de ce genre que F Imitation fournit avec une richesse intarissable.

    La lecture mdite du texte mme de l'vangile estencore une source prcieuse de sujets d'oraison, d'affections pieuses, de re tour s sur so i-mme et de saintes r solutions.

    Mais, ce dont je puis vous as surer , c'est que vous nepouvez prendre un moyen plus efficace que l'oraisonpour vous affermir dans la lumire et dans la vie de lafoi. Si' par un miracle malheureusement impossible,tous les chr tiens, sans exception, se met ta ient 1 commencer toutes les journes par un quart d'heure de bonnes rflexions chrtiennes,, de bonne lecture mdite,

    accompagne des sent iments et des rsolutions qui d couleraient tout naturellement de ces penses, le monde

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    XI

    De la frquente communion, comme moyen trs-puissant

    de conserver et de fortifier sa foi.

    La foi, nous l'avons vu, est le fondement de toute lavie chrtienne. Elle est la te rr e fconde o poussent toutes

    les vertus catholiques. Or, pour produire de riches moissons, la terre a besoin, non-seulement d'tre laboure etexpose aux influences vivifiantes de l'air et du soleil,mais encore d'tre engraisse.

    Il en est de mme de cette terre surnaturelle qui s'appelle la foi et que D I E U a misr icordieusement dposepar sa grce sur les couches infrieures de notre nature,ravages par le pch originel et striles pour le ciel.Par le ministre de ses pr tres , l 'glise cultive cetteterre sac re; elle la soumet , par l 'enseignement, auxinfluences fcondantes de la vrit; par les industries de

    son zle, elle l'imprgne d'air et de rose; par le fer bienfaisant de la confession et de la direction spirituelle, elle

    changerait de face vue d'il, efc il n'y aurait pas besoind'autres institutions publiques pour rendre, presquesans transition, a la sainte glise et au monde chr tien

    la paix, l'esprance et le bonheur.Rptons donc tous notre bon Seigneur la pr i re

    que lui adressaient un jour ses Aptres : Domine, docenos orare; Seigneur, apprenez-nous prier, apprenez-nous faire oraison !

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    en pn tre les profondeurs, elle la laboure, la re tourneet en ext irpe les ronces et les mauvaises herbes . Maisc'est au moyen de la sainte Eucharistie, c'est en la satu

    rant de la Chair divine et du Sang de JSUS-CHRIST qu'ellel'engraisse, l'enrichit et la fconde.

    Au sain t-sacrement de l'autel, Notre-Seigneur est, eneffet, l 'aliment et la force de notre foi. La foi, c'est la viede notre me : l'Eucharis tie, c'est le pain, l'alimenta

    tion de cette vie.La vie de la foi ne peut pas plus se passer de l'Eucha

    ris tie , que la vie du corps n peut se passer du pain quisoutient et renouvelle ses forces. Dans l'ordre de la grcecomme dans Tordre de la nature, il fout vivre pour pou

    voir manger , mais aussi il faut ma nger po ur pouvoirvivre. La foi et la communion, ces deux ides sont donccorrlatives, insparables.

    Voulez-vous avoir une foi bien vivante, bien vigoureuse, bien panouie? Communiez ; communiez souvent ;

    communiez trs-souvent ; et communiez saint