Ostiguy et al 2006

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www.irsst.qc.caInstitut de recherche Robert-Sauv en sant et en scurit du travail, mars 2006

TUDES ET RECHERCHES

Les nanoparticulesConnaissances actuelles sur les risques et les mesures de prvention en sant et en scurit du travail

Claude Ostiguy, Direction des oprations, IRSST Gilles Lapointe, Rpertoire toxicologique, CSST Luc Mnard, Direction de la prvention inspection, CSST Yves Cloutier, Hygine du travail, IRSST Mylne Trottier, Proximeduc Michel Boutin, Services et expertises de labotatoire, IRSST Monty Antoun, Centre de documentation, CSST Christian Normand, NanoQubec

RAPPORT

Avis de non-responsabilit LIRSST ne donne aucune garantie relative lexactitude, la fiabilit ou le caractre exhaustif de linformation contenue dans ce document. En aucun cas lIRSST ne saurait tre tenu responsable pour tout dommage corporel, moral ou matriel rsultant de lutilisation de cette information. Notez que les contenus des documents sont protgs par les lgislations canadiennes applicables en matire de proprit intellectuelle.

Cliquez recherche www.irsst.qc.caCette publication est disponible en version PDF sur le site Web de lIRSST. Cette tude a t finance par lIRSST. Les conclusions et recommandations sont celles des auteurs.

CONFORMMENT AUX POLITIQUES DE LIRSST

Les rsultats des travaux de recherche publis dans ce document ont fait lobjet dune valuation par des pairs.

IRSST- Les nanoparticules : connaissances actuelles sur les risques et les mesures de prvention en SST

SOMMAIREDe nouveaux matriaux aux proprits uniques Une nouvelle rvolution industrielle samorce autour des nanotechnologies. Lengouement, maintenant plantaire, se traduit par des investissements annuels de plusieurs milliards de dollars en recherche et dveloppement (R-D). Dans un contexte o les technologies actuelles permettent de manipuler la matire et de synthtiser des produits lchelle atomique, les nanoparticules dmontrent des proprits totalement diffrentes des produits de mme composition mais de plus forte taille. Lre des nanomatriaux et des nanotechnologies nous promet des dveloppements et des perces scientifiques majeures qui affecteront de faon permanente le quotidien de chacun dans un avenir rapproch. Plusieurs de ces produits sont dj utiliss et de nombreux organismes estiment un march mondial annuel de lordre de 1 000 milliards de dollars amricains ds 2015. Bienvenue dans le nanomonde o tout se passe lchelle du nanomtre (nm), soit le milliardime de mtre (10-9 m). Les nanotechnologies couvrent un large domaine multidisciplinaire o les activits de recherche et dimplantation industrielle se sont dveloppes extrmement rapidement au niveau mondial au cours de la dernire dcennie. Des physiciens, chimistes, biologistes, ingnieurs, lectroniciens et divers spcialistes des matriaux, de procds et dapplications travaillent conjointement sur des objets de dimensions nanomtriques. Les nanoparticules peuvent tre produites par toute une srie de procds chimiques, physiques ou biologiques parmi lesquels certains sont totalement nouveaux et innovateurs alors que dautres existent depuis fort longtemps. En effet, de nouvelles technologies permettent de construire des matriaux, atome par atome, ce qui leur confre souvent des proprits fort diffrentes des matriaux usuels. Les nanoparticules et les nanotechnologies ne reprsentent pas uniquement une autre tape vers la miniaturisation. cette chelle, le comportement des particules est domin par les effets quantiques. Celles-ci peuvent tre confines dans une petite structure, prsenter de grandes fractions surfaciques et dmontrer toute une srie de phnomnes et de proprits uniques, non rencontrs chez les matriaux de plus grande taille. Une synthse des connaissances existantes simpose Lobjectif principal de ce bilan consiste produire une synthse des connaissances scientifiques actuelles sur les nanoparticules en portant une attention particulire aux risques la sant et aux moyens de prvention de lexposition des travailleurs qubcois aux nanoparticules produites selon de nouvelles approches. Cette revue inclut les nouvelles nanoparticules (nanotubes de carbone, fullernes, puits quantiques, nanopigments de dioxyde de titane, certains mtaux de dimensions nanomtriques) mais exclut les produits de dimensions nanomtriques issus de la combustion lors de diffrents procds industriels (missions de moteurs diesel, fumes de soudage, fumes de divers procds industriels) de mme que les produits de dimensions nanomtriques dj fabriqus grande chelle telles les fumes de silice. Le dveloppement de nouveaux produits La recherche visant la production, la mise en march et lutilisation de nouveaux nanomatriaux est excessivement importante et reprsente des objectifs stratgiques de dveloppement conomique durable, notamment en Asie, en Europe, aux tats-Unis, au Canada et au Qubec. Les utilisations potentielles des nanoparticules sont prvoir dans des secteurs dactivits trs diversifis allant du domaine biomdical llectronique, en passant par la mtallurgie, lagriculture, le textile, les revtements, les cosmtiques, lnergie, les catalyseurs, etc. Des matriaux anti-corrosion, des vitresOstiguy et al., fvrier 2006

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autonettoyantes, des mdicaments dlivrs directement au site atteint ou des peintures anti-graffitis ne reprsentent que quelques exemples des applications possibles. Des centaines de travailleurs qubcois dj potentiellement exposs Le Qubec compte environ 200 professeurs-chercheurs actifs dans ce domaine et plus de 1000 tudiants rpartis dans presque toutes les universits et certains cgeps ainsi que dans plusieurs centres de recherche. La majorit de ces personnes sont potentiellement exposes des nanoparticules. Environ une quarantaine dentreprises qubcoises oeuvrent actuellement dans la production des nanomatriaux ou sont en phase de dmarrage, ce qui est quatre fois plus quil y a deux ans peine. De plus, il faut tenir compte que le Qubec importe des nanoparticules dans diffrents domaines, dont le textile, o des travailleurs-utilisateurs sont dj exposs. Les principaux effets la sant Quoique la R-D visant le dveloppement de nouveaux produits, limplantation industrielle et la mise en march soit en bullition depuis plus dune dcennie, les efforts de recherche visant la comprhension des effets sur la sant suite des expositions professionnelles ou des risques que posent les nanoparticules la scurit du travail sont beaucoup moins avancs. Nanmoins, un certain corpus de connaissances dmontre clairement une plus grande toxicit des particules nanomtriques comparativement aux particules plus grosses, de dimensions micromtriques et ce, pour une mme substance. Ces donnes soutiennent ainsi certaines recommandations de traiter les nanoparticules dune certaine substance comme un nouveau produit ayant sa propre toxicit. La principale voie dabsorption en milieu de travail demeure la voie respiratoire, comme pour les autres poussires. Les tudes toxicologiques dmontrent clairement que la trs petite taille des nanoparticules est un lment-cl au niveau de la toxicit, surtout au niveau des particules non ou peu solubles. Premirement, le site de dposition pulmonaire variera beaucoup en fonction de la granulomtrie de la particule. Ainsi, aucune particule de 1 nm natteindra les alvoles pulmonaires, le tout se dposant au niveau des sites suprieurs des poumons. Les particules de 5 nm se dposeront de faon relativement uniforme au niveau du nez et du pharynx, de la trache et des bronches et finalement au niveau des alvoles. Les nanoparticules de 20 nm se dposeront plus de 50 % au niveau alvolaire. Deuximement, les tudes toxicologiques ont dmontr que la toxicit dune nanoparticule tait relie la surface de la particule et non sa masse. Troisimement, les proprits de surface, la capacit induire des radicaux libres ou librer certains ions peuvent galement influer substantiellement sur la toxicit. Plusieurs effets pulmonaires ont t documents dont la capacit de certaines nanoparticules induire des granulomes pulmonaires. Les donnes actuellement disponibles semblent indiquer par ailleurs que labsorption cutane serait relativement limite. La translocation, cest--dire la capacit se dplacer vers dautres sites dans lorganisme, est une autre caractristique importante des nanoparticules insolubles. En effet, celles-ci russissent franchir lpithlium pulmonaire et se rendre aux sites interstitiels puis au systme sanguin qui peut ainsi les distribuer partout dans lorganisme. Ces particules peuvent galement se rendre directement au cerveau, entre autre, via le nerf olfactif pour les nanoparticules captes au niveau nasal. Les nanoparticules peuvent galement franchir les barrires intestinales, cellulaires et placentaires. Dailleurs, dans le domaine pharmaceutique, on fonde beaucoup despoirs thrapeutiques sur le fait que certaines nanoparticules peuvent franchir la barrire hmato-encphalique et pntrer directement dans le cerveau. Certaines nanoparticules modifient les paramtres sanguins et saccumulent dans certains organes dont le foie et la rate. Par ailleurs, des tudes pidmiologiques dmontrent une corrlation significative entre le taux de dcs par maladies cardio-respiratoires et la teneur en particules de dimensions nanomtriques lors dpisodes de pollution atmosphrique.Ostiguy et al., fvrier 2006

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Lvaluation quantitative du risque la sant des travailleurs Le manque important de connaissances scientifiques nous met en prsence dune grande incertitude relativement aux risques poss par les nanoparticules. Actuellement, quoique de nombreux effets toxiques aient t dmontrs chez lanimal, une valuation quantitative du risque sur lun ou lautre des nouveaux nanomatriaux est peu prs impossible raliser. Nanmoins, les recherches en toxicologie sorganisent et plusieurs rsultats sont dj publis. Un rapport IRSST (Ostiguy et al., 2006) regroupe le dtail de lensemble des connaissances toxicologiques rpertories spcifiques aux nanoparticules. La synthse des nanoparticules Les nouvelles nanoparticules sont principalement synthtises selon quatre grandes approches : en phase gazeuse, par dposition de vapeurs, par chimie des solutions et par broyage. Plusieurs procds de production de nanoparticules sont relativement semblables aux procds de production chimiques existants. Les limites des connaissances actuelles En regard de lestimation des risques la sant et la scurit du travail associs aux nanoparticules, les informations actuellement disponibles permettent de conclure que :i

les quatre principaux procds de production peuvent conduire une exposition professionnelle par voies pulmonaire, cutane ou par ingestion; les procds en phase vapeur offrent le plus grand potentiel dexposition pendant ltape de la synthse des nanoparticules. Par contre, tous les procds peuvent conduire lexposition du travailleur par les trois voies dabsorption pendant les tapes de rcupration, densachage et de manipulation des poudres qui sont souvent sous forme de nanoparticules agglomres les unes aux autres; pour viter lagrgation des particules, plusieurs procds auront une tape post-synthse visant modifier la surface de la particule, souvent en la recouvrant dune autre substance organique ou inorganique; cette opration a un impact sur la toxicit de la nanoparticule; les outils actuels dvaluation de lexposition des travailleurs normalement utiliss en hygine industrielle sont mal adapts lapplication aux nanoparticules en milieu de travail. Il nest actuellement pas possible destimer lexposition des chercheurs, tudiants et travailleurs partir de donnes de la littrature. Les quelques donnes disponibles suggrent que les expositions peuvent tre substantielles lors de la manipulation des poudres; les connaissances scientifiques actuelles sur la toxicit des nanoparticules sont insuffisantes pour pouvoir faire une valuation quantitative du risque. cause de leur grande surface spcifique, plusieurs nanoparticules offrent un important potentiel de ractivit pouvant conduire des incendies ou des explosions et des mesures spcifiques de prvention doivent tre mises en place afin dviter de tels vnements.

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Dailleurs, plusieurs organismes de recherche en sant et scurit du travail et en environnement, tels NIOSH et EPA aux tats-Unis de mme que le HSE en Angleterre ou lINRS en France, ralisent actuellement des recherches afin de dvelopper de nouvelles connaissances permettant ventuellement de faire des valuations quantitatives de risque pour lexposition des travailleurs. Pour bien comprendre les effets de lexposition aux nanoparticules chez lhomme, beaucoup de recherches sont requises. Elles devraient permettre dlucider plusieurs lacunes majeures :

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a) les connaissances actuelles sur la toxicit et les voies dabsorption de ces produits sont trs limites; b) les outils permettant dvaluer lexposition professionnelle doivent tre adapts aux caractristiques de mesure requis en fonction de la toxicit des nanoparticules; c) les expositions relles doivent tre mesures; d) lefficacit des moyens de contrle et des quipements de protection personnelle doit tre value. La prvention : un aspect essentiel mettre en place Le contrle de lexposition professionnelle aux nanoparticules comporte plusieurs inconnues. En effet, les approches existantes au contrle par encoffrement ou la protection respiratoire lors de linhalation devraient tre efficaces mais cette efficacit reste dmontrer. Le contrle de lexposition par ventilation la source ou ventilation gnrale pose un dfi puisque les nanoparticules ont plus tendance se comporter comme un gaz quun solide. Lefficacit pratique de tels systmes doit tre documente avec soin. Au niveau de la protection personnelle par voie cutane, il nexiste presque pas de donnes. Des vtements jetables de type Tyvek sont recommands dans un contexte o il est probable que les mthodes bases sur les autres quipements actuels de protection personnelle ne permettent pas une protection adquate. Les cartouches filtrantes haute efficacit devraient fournir une protection respiratoire efficace. Mme en labsence de lensemble des connaissances requises pour lvaluation du risque ou de lefficacit des moyens de contrle disponibles, plusieurs pays ont commenc lgifrer pour protger les travailleurs dexpositions potentielles afin de prvenir le dveloppement de maladies professionnelles. Jusqu ce que leurs effets sur lenvironnement ou sur lhomme soient adquatement documents, des mesures de prvention strictes devraient tre prises titre de prcaution afin de limiter lmission de ces produits autant dans lenvironnement de travail qu lextrieur. Conclusion Alors que beaucoup de recherches sont en cours pour le dveloppement et la mise en march des nanoparticules, la recherche visant valuer les risques potentiels de ces produits pour les travailleurs en nanotechnologie nen est qu ses dbuts. Les informations actuellement disponibles suggrent que ces produits puissent tre toxiques et que les moyens actuels de protection puissent ne pas tre aussi efficaces quon le croit. Au Qubec seulement, NanoQubec estime quenviron 2000 personnes oeuvrent dans le domaine des nanomatriaux, principalement en milieu scolaire, faisant actuellement de ces gens, la plus importante population potentiellement expose ces matriaux. Limplantation industrielle sacclre, le Qubec comptant environ quatre fois plus dentreprises quil y a deux ans peine. Il faut aussi noter que des nanoparticules sont importes et que nous disposons de trs peu dinformations sur les utilisations qui en sont faites de mme que sur les conditions de mise en uvre et lexposition des travailleurs. Suivis recommands Limplantation de mesures strictes de prvention doit tre favorise auprs de lensemble de ces clientles afin de prvenir le dveloppement de maladies professionnelles. Lvaluation des expositions professionnelles devrait tre documente. Un suivi rgulier de lvolution de la connaissance scientifique relie la toxicologie et lhygine industrielle aurait avantage tre ralis afin de pouvoir soutenir et informer efficacement le monde du travail qubcois dans un objectif de prvention du dveloppement de maladies professionnelles relies aux nanoparticules.Ostiguy et al., fvrier 2006

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TABLE DES MATIRES

SOMMAIRE _____________________________________________________________ii 1. INTRODUCTION _______________________________________________________ 1 2. OBJECTIFS ____________________________________________________________ 3 3. METHODOLOGIE ______________________________________________________ 3 4. TERMINOLOGIE, CLASSIFICATION, CARACTERISTIQUES ET PROPRIETES DES NANOPARTICULES ________________________________________________ 4 4.1 Terminologie ________________________________________________________ 4 4.2 Classification ________________________________________________________ 6 4.3 Caractristiques et proprits des nanoparticules __________________________ 6 i Les fullernes______________________________________________________ 6 i Les nanotubes de carbone ____________________________________________ 7 Les nanofils _______________________________________________________ 8 i i Les nanomousses de carbone__________________________________________ 8 i Les puits quantiques ________________________________________________ 8 Les dendrimres____________________________________________________ 9 i i Autres nanoparticules _______________________________________________ 9 4.4 Outils de caractrisation des nanoparticules ______________________________ 9 5. DVELOPPEMENT, PRODUCTION ET UTILISATION DE NANOPARTICULES 10 5.1 Efforts de recherche et de dveloppement _______________________________ 10 i Les efforts de recherche au niveau mondial _____________________________ 10 i Les efforts de recherche au niveau nord-amricain________________________ 11 Les efforts de recherche au niveau canadien _____________________________ 12 i i Les efforts de recherche au niveau qubcois ___________________________ 12 i Les nanoparticules les plus tudies ___________________________________ 13 5.2 Procds de fabrication_______________________________________________ 13 i Les procds en phase gazeuse _______________________________________ 14 i La synthse par dposition de vapeurs _________________________________ 15 i La formation de collodes ___________________________________________ 15 i Les procds mcaniques dattrition ___________________________________ 15 5.3 Applications des nanotechnologies______________________________________ 16Ostiguy et al., fvrier 2006

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6. NANOPARTICULES ET EFFETS LA SANT _____________________________ 19 6.1 Risques la sant relis des nanoparticules spcifiques ___________________ 19 6.2 Particules de dimensions nanomtriques et ultrafines______________________ 25 7. LES NANOMATRIAUX, LEUR COMPORTEMENT ET LEUR DTECTION DANS LAIR __________________________________________________________ 36 7.1 Dfinition __________________________________________________________ 36 7.2 Formation et comportement des particules nanomtriques ou ultrafines ______ 37 Diffusion ________________________________________________________ 37 i i Coagulation et agglomration ________________________________________ 37 i Sdimentation gravitationnelle _______________________________________ 38 Resuspension _____________________________________________________ 38 i 7.3 Dtection des nanoparticules __________________________________________ 38 i Appareils de mesure directe de la concentration __________________________ 39 i Batteries diffusion________________________________________________ 40 Compteurs de noyaux de condensation (CNC) ___________________________ 40 i i Analyseurs de mobilit lectrique _____________________________________ 41 i Impacteurs en cascades _____________________________________________ 42 Appareils de mesure directe de la surface _______________________________ 43 i 8. EXPOSITION AUX NANOPARTICULES___________________________________ 44 8.1 Potentiel dexposition professionnelle lors de la synthse de nanoparticules laide de procds conventionnels _____________________________________ 44 8.2 Mesure de lexposition professionnelle lors de la synthse de nanoparticules laide de procds conventionnels _____________________________________ 46 8.3 Exposition professionnelle lors de lutilisation de nanoparticules ____________ 47 9. CONTROLE DE LEXPOSITION _________________________________________ 48 9.1. Lvaluation du risque _______________________________________________ 48 9.2. Stratgies de matrise des risques et du contrle des nanoparticules _________ 49 i Les techniques dingnierie __________________________________________ 50 i Les moyens administratifs___________________________________________ 52 i La protection personnelle ___________________________________________ 53 10. PRVENTION ________________________________________________________ 55 10.1 Risques dexplosion _________________________________________________ 55 10.2 Prvention et lutte contre les incendies _________________________________ 56 10.3 Entreposage _______________________________________________________ 56 10.4 Autres aspects de prvention _________________________________________ 57Ostiguy et al., fvrier 2006

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11. RGLEMENTATION ET RECOMMANDATIONS __________________________ 58 11.1 Des rgles dthique indispensables ____________________________________ 58 11.2 Rglementation en Europe et dans les pays europens ____________________ 58 11.3 Rgion Asie-Pacifique _______________________________________________ 59 11.4 Amrique du Nord__________________________________________________ 59 i Les tats-Unis ____________________________________________________ 59 i Le Canada _______________________________________________________ 61 i Le Qubec _______________________________________________________ 61 12. PRINCIPAUX INTERVENANTS QUBCOIS_____________________________ 62 13. AXES POTENTIELS DE RECHERCHE___________________________________ 63 14. CONCLUSION ________________________________________________________ 65 15. BIBLIOGRAPHIE _____________________________________________________ 66 16. QUELQUES SITES WEB DINTRT ____________________________________ 78

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1. INTRODUCTIONLe prfixe nano signifie un milliardime (10-9). Donc, un nanomtre (nm) quivaut un milliardime de mtre. La nanotechnologie sintresse la cration ou la manipulation de particules et de matriaux ayant au moins une dimension nanomtrique, normalement de moins de 100 nm, que ces matriaux soient produits partir de lorganisation structure de groupes datomes et de molcules ou par la rduction lchelle nanomtrique de matriaux macroscopiques (Aitken et al., 2004). Quoique le dveloppement des nanotechnologies soit une science multidisciplinaire trs moderne, la fabrication, par la nature et par lhomme, de nanomatriaux date de temps immmoriaux. En effet, plusieurs structures naturelles, dont les protines de mme que le diamtre de lADN rpondent cette dfinition de nanomatriaux alors que les virus reprsentent les plus petits nano-objets naturels fonctionnels. Pour illustrer les ordres de grandeur en cause, soulignons que le diamtre dune molcule dADN est de lordre de 2 12 nanomtres (nm), un globule rouge a un diamtre de 5 000 nm et un cheveu humain fait de 10 000 50 000 nm de diamtre (www.nano.gov). Les romains de lre pr-chrtienne introduisaient dj des mtaux ayant des dimensions nanomtriques dans la fabrication de verrerie et une tasse dcrivant la mort du roi Lycurgus (vers 800 BC) contient des nanoparticules dor et dargent, ce qui permet de la faire passer du vert au rouge fonc lorsquune source lumineuse est introduite lintrieur (Poole et Owens, 2003). Certaines colorations de peintures mayas, tout comme le lustre de poteries de la Renaissance italienne sont dus lintroduction de nanoparticules mtalliques (Ambassade de France, 2004). Les vitraux des grandes cathdrales de lpoque mdivale contiennent galement des nanoparticules mtalliques. La photographie, dveloppe aux XVIIIe et XIXe sicles est un exemple plus rcent de lutilisation de nanoparticules, ici constitues de particules dargent sensibles la lumire (Poole et Owens, 2003; Ratner et Ratner, 2003). De nombreux produits de condensation, provenant souvent de processus de combustion tels les fumes diesel, les missions de fourneaux industriels et les fumes de soudage contiennent galement des nanoparticules cause de leur faible granulomtrie. Pour la seule anne 1993, la synthse de six millions de tonnes de noir de carbone de haute surface spcifique, ralise par pyrolyse la flamme, a produit du carbone poudreux de dimensions nanomtriques (IARC, 1996). La combustion ou la pyrolyse la flamme est galement utilise pour la production de masse de fumes de silice, de dioxyde de titane ultrafin et de mtaux ultrafins, tous de dimensions nanomtriques (Aitken et al., 2004). De plus, la dfinition des nanoparticules bases sur leurs dimensions permet lintroduction des collodes et de sols utiliss depuis plus de cent ans. Faraday, en 1857, avait dj dcrit lutilisation dor collodal dans le cadre de ses expriences (Aitken et al., 2004). Depuis, la science des collodes a beaucoup volu. Les nouveaux collodes sont utiliss pour la production de mtaux, doxydes et de produits organiques et pharmaceutiques. Avec une dfinition aussi large, il devient donc important de cibler lobjet de ltude. Richard Feynman, prix Nobel de physique 1965, spculait ds 1960, sur les possibilits et le potentiel de matriaux nanomtriques et sur le fait que la manipulation datomes individuels permettrait de construire de trs petites structures dont les proprits seraient trs diffrentes des structures de mme composition plus volumineuses. Avec les dveloppements technologiques majeurs des dernires dcennies, il est maintenant possible de manipuler des atomes un un. Il a t dmontr que ces structures ont effectivement des proprits uniques, do lintrt de la recherche dans ce domaine, spcialement au cours de la dernire dcennie. En fait, les articles dcrivant les nanomatriaux peuvent tre diviss en deux grandes catgories (Kohler et Fritzsche, 2004; Holister et al., 2003) : a) ceux qui sont produits en assemblant des atomes individuels; cest lapproche ascendante (bottom-up) b) ceux qui sont produits en subdivisant des matriaux en vrac des dimensions nanomtriques; cest lapproche descendante (top-down). Dans un cas comme dans

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lautre, leurs dimensions sont plus petites que les longueurs critiques qui caractrisent la majorit des phnomnes physiques, ce qui leur confre des proprits uniques. Les nanomatriaux dmontrent souvent des proprits caractristiques telles une force extraordinaire, des proprits lectriques, physiques ou chimiques insouponnes et totalement diffrentes de celles des mmes produits ayant des dimensions plus importantes. Les domaines o les utilisations commerciales actuelles sont les plus importantes au niveau financier se situent au niveau du polissage mcano-chimique, des rubans denregistrement magntiques, des crans solaires, des supports catalytiques pour le secteur des transports, le biotiquetage, les recouvrements lectroconducteurs et les fibres optiques. Les domaines biomdical et pharmaceutique, llectronique, la mtallurgie, lagriculture, le textile, les revtements, les cosmtiques, lnergie et les catalyseurs sont dautres secteurs o des applications sont en dveloppement (www.Nano.gov/html/facts/appsprod.html). Roco (2004) considre que lpoque des nanotechnologies est dj entre dans sa seconde gnration. La premire gnration portait sur les nanostructures passives telles les recouvrements, les nanoparticules, les mtaux nanostructurs, les polymres et les cramiques. La gnration actuelle porte pour sa part sur les nanostructures actives telles les transistors, les amplificateurs, les mdicaments cibls et les structures adaptatives. Les nanoparticules et les nanotechnologies sont considres comme lobjet de la prochaine rvolution industrielle. La recherche y est en trs forte croissance et tous les pays industrialiss y voient la possibilit de dveloppements et des applications dans une multitude de domaines ainsi que des retombes conomiques potentielles colossales. Les gouvernements de mme que les grandes entreprises dveloppent des plans stratgiques et investissent massivement en recherche. titre dexemples, lEurope en a fait un de ses sept sujets prioritaires de recherche thmatique et y investit 1,3 milliards deuros pendant la priode 2002-2006 (www.cordis.lu/nmp/home.html). Aux tatsUnis, le National Nanotechnology Initiative (NNI) dispose dun budget dun milliard de dollars pour la seule anne 2005 (www.nano.gov). Le gouvernement canadien construit actuellement un centre de recherche en Alberta, qui sera ddi uniquement aux nanotechnologies. Le gouvernement fdral prpare galement un plan national en nanotechnologies. Le Qubec sest dot de NanoQubec pour favoriser le transfert et la mise en march des applications dveloppes en milieu universitaire et pour valoriser lutilisation des nanotechnologies dans la recherche de solutions aux problmes actuellement rencontrs par les entreprises du Qubec dans tous les secteurs industriels (http://nanoquebec.ca/nanoquebec_w/site/index.jsp). Malheureusement, une trs faible proportion des recherches sur les nanoparticules sintresse aux risques la sant et la scurit en milieu de travail de mme qu lenvironnement et la sant des populations. Le champ des nanomatriaux et nanotechnologies est trop vaste, trop multidisciplinaire et volue trop rapidement pour pouvoir tre couvert de faon exhaustive. Nanmoins, le prsent rapport, bas sur une revue de littrature stendant jusquen juin 2005, vise dresser un portrait global des nanomatriaux et des nanotechnologies ainsi que leurs principales applications potentielles avec une emphase particulire sur la situation qubcoise et les risques connus la sant et la scurit pour les travailleurs de mme que les aspects de prvention. Lvolution rapide des dveloppements technologiques a dj permis le dmarrage dune quarantaine dentreprises de nanotechnologie au Qubec (http://nanoquebec.ca/nanoquebec_w/site/index.jsp). Des efforts particuliers de transfert devront tre mis en place afin de soutenir de faon efficace les entreprises et les diffrentes quipes de recherche qubcoises dans les aspects de prvention datteinte la sant et la scurit des travailleurs produisant ou utilisant ces substances.

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2. OBJECTIFSLes nanoparticules peuvent tre produites par une srie de procds biologiques, chimiques ou physiques dont plusieurs sont connus depuis longtemps et dautres utilisent de nouvelles technologies. La nanoscience peut tre dfinie comme tant lhabilit de faire des choses mesurer, voir, prdire et fabriquer lchelle des atomes et des molcules et dexploiter les nouvelles proprits spcifiques cette chelle. Les recherches actuelles visent la production de nouvelles nanoparticules qui dmontrent des proprits uniques. Lobjectif principal de ltude consiste dresser un bilan des connaissances scientifiques actuelles sur les nanoparticules produites en utilisant de nouvelles technologies ou en utilisant des technologies connues pour produire de nouveaux matriaux. Seule cette catgorie de particules nouvelles et diffrentes fera lobjet de la prsente tude. Une emphase particulire sera porte lidentification des risques la sant et aux moyens de prvention mettre en place afin de prvenir le dveloppement de maladies professionnelles en milieu de travail qubcois. Ltude vise galement dvelopper une expertise qubcoise en sant et scurit au travail (SST) relative la nanoproduction et aux nanoparticules. Cette expertise permettra de soutenir efficacement les quipes de recherche et les entreprises synthtisant ou utilisant ces produits.

3. METHODOLOGIEEn parcourant de faon sommaire les informations disponibles sur les nanoparticules lors de llaboration du protocole visant la production de ce bilan de connaissances, les auteurs ont ralis que les tudes parues dans la littrature scientifique permettant destimer les risques et de mesurer lexposition des travailleurs ces nanoparticules fabriques selon les nouvelles approches sont trs limites. Par consquent, il a t dcid de procder llaboration de ce bilan partir:i

dune analyse de la littrature scientifique dans les revues avec comits de pairs via les approches couramment utilises pour ce type de recherche. La recherche documentaire a t ralise par linformathque de lIRSST et le centre de documentation de la CSST. Parmi les principales bases de donnes et moteurs de recherche consults, il convient de mentionner MedLine, Toxline, PubMed, Inspec, Coppernic, Embase, Ntis, Ei, Compendex, SciSearch, Pascal, Alerts, Teoma et Scirus. Plusieurs mots-cls ont t utiliss en franais et en anglais dont nanotoxicologie, nanotechnologie, nanoparticule, nanomatriau, effet la sant, toxicit, toxique. Cette information est particulirement utile afin de documenter la toxicit des nanoparticules; dune recherche par internet afin, principalement, de documenter les types de procds permettant la fabrication de ces produits de mme que la description de ces produits, de leurs proprits et de leurs usages potentiels; de lutilisation de rapports synthse de comits reconnus dexperts internationaux en nanoparticules et en nanotechnologie; des informations recueillies auprs dintervenants qubcois cls directement impliqus dans le domaine des nanotechnologies; de discussions au sein du comit ditorial du rapport.

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4. TERMINOLOGIE, CLASSIFICATION, CARACTERISTIQUES ET PROPRIETES DES NANOPARTICULES4.1 Terminologie En hygine industrielle, la dimension des particules formant un arosol solide revt une trs grande importance car le comportement des particules dans lair, les stratgies de contrle des expositions de mme que la possibilit dinspirer ces particules qui pourront par la suite se dposer diffrentes localisations dans larbre pulmonaire sont directement relies au comportement arodynamique de ces particules, donc leurs dimensions. Cest ainsi que le document EN 481 du Comit europen de normalisation (1993) donne des dfinitions claires qui font consensus des poussires inhalables, respirables et thoraciques. Par contre, la littrature scientifique relie au domaine des nanoparticules ne permet pas actuellement de conclure une dfinition unique relativement aux dimensions de ces particules. De plus, si les particules ultrafines et les nanoparticules occupent des domaines de granulomtries comparables, chaque auteur propose une plage de dimensions diffrentes (Brouwer, 2004; Jacobson et Seinfeld, 2004). Nanmoins, la majorit des auteurs considrent que les nanoparticules ont une dimension infrieure 100 nm. Avec une dfinition aussi tendue, les nanoparticules pourraient tre classifies en trois grandes catgories : les nanoparticules dorigine naturelle, celles dj produites en grandes quantits depuis des dcennies et finalement, celles produites par les nouvelles technologies. La Commission europenne (2004b) proposait tout le moins de distinguer entre les nanoparticules libres (celles qui seront discutes dans ce document) et les particules lies qui sont moins susceptibles de causer des risques la sant cause de leur inaptitude tre biodisponibles. Parmi les nanoparticules dorigine naturelle, certaines sont dorigine biologique dont lADN avec un diamtre de lordre de 2,5 nm de mme que plusieurs virus (10 60 nm) et bactries (30 nm 10 Pm) alors que dautres sont dorigine minrale ou environnementale dont, par exemple, la fraction fine du sable de dsert, la fume dhuile, le smog, les fumes originant dactivit volcanique ou de feux de fort et certaines poussires atmosphriques. Parmi les nanoparticules dorigine humaine, certains procds industriels bien connus tels la synthse du noir de carbone par pyrolyse la flamme conduit des particules fortement agglomres dont les composantes de base ont des dimensions nanomtriques (IARC 1996). Dautres matriaux sont galement produits grandes chelles des fins commerciales par des procds haute temprature. Par exemple, la fume de silice, les particules ultrafines doxyde de titane et des mtaux ultrafins (Aitken et al., 2004; Teague 2004). Des procds de dposition par flamme et par plasma sont dj couramment utiliss dans lindustrie du recouvrement mtallique. Les pigments de peinture ont souvent des dimensions de 80 100 nm. De plus, le soudage gnre un panache de fumes dont les particules lmentaires, avant agglomration, ont des dimensions de 10 50 nm. Les procds de combustion (diesel, essence, barbecue, charbon et plusieurs procds industriels) produisent galement des nanoparticules de 7 40 nm (Teague, 2004). De nombreuses applications actuelles importantes utilisent des particules de dimensions nanomtriques issues de procds chimiques conventionnels. titre dexemple, le secteur automobile utilise des convertisseurs catalytiques base de recouvrements dun mtal prcieux tel le platine ou le palladium qui prsente de grandes surfaces spcifiques, ce qui permet la combustion rapide et efficace des gaz dchappement des vhicules. Des nanoparticules drives dargile renforcent et augmentent la rsistance du plastique largement utilis dans la fabrication de composites. De tels composites se retrouvent dj dans les panneaux extrieurs de vhicules routiers, les pare-chocs, le bas de la carrosserie ou le panneau de bord, etc. Les catalyseurs base de zolites

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sont des matriaux avec des pores de moins dun nanomtre qui, en 2001, taient dj utiliss pour le traitement annuel de plus de sept milliards de barils de ptrole et de produits chimiques. Dans le cadre du prsent rapport, les auteurs ont considr quatre dfinitions complmentaires des nanoparticules. Selon Kohler et Fritzche (2004), les nanostructures ou nanoparticules sont dfinies selon leurs dimensions gomtriques induites par des procds externes de mise en forme, de sorte que la mise en forme, lorientation et le positionnement sont raliss par rapport un systme de rfrence externe, telle la gomtrie dun substrat. Les nanostructures doivent avoir au moins une dimension de moins de 100 nanomtres et peuvent en compter deux ou trois . Selon ISO (2004), une nanoparticule est une particule avec un diamtre suffisamment petit pour que les proprits physiques et chimiques diffrent de faon mesurable de celles des matriaux en vrac. Le diamtre maximal nominal mais non exclusif est de 40 nm . Ces dfinitions saccordent avec celle retenue par le US National Nanotechnology Initiative (2004) savoir que les nanotechnologies reprsentent des recherches ou des technologies o le dveloppement se produit lchelle atomique, molculaire ou macromolculaire avec une chelle de longueur de 1 100 nm; la cration ou lutilisation de structures, dquipements ou de systmes qui ont de nouvelles proprits et fonctions relies leur dimension; la capacit de contrler et de manipuler lchelle atomique. Finalement, la dfinition de la Royal Society et de la Royal Academy of Engineering (2004) est probablement celle qui rsume le mieux lapport et laspect nouveaut des nanomatriaux en considrant que la nanoscience est ltude des phnomnes et la manipulation de matriaux aux chelles atomique, molculaire et macromolculaire o les proprits diffrent significativement de celles plus grande chelle. Les proprits des nanostructures sont donc plus directement relies celles des molcules individuelles qu celles du matriau en vrac (Kohler et Fritzche, 2004; Royal Society and Royal Academy of Engineering, 2004). Cette situation conduit des proprits trs diffrentes, voire uniques des nanoparticules. Les principes mmes de la chimie et de la physique classique des matriaux solides doivent tre remplacs par des approches quantiques, bases sur les probabilits ou chaque atome, chaque molcule peut assumer un rle important et o les interactions entre ces derniers deviennent un enjeu majeur sur le comportement de lensemble. Ce ne sont donc plus les paramtres mcaniques classiques des solides qui priment mais les dimensions molculaires et atomiques individuelles et les interactions qui dterminent larrangement, la stabilit, la flexibilit et la fonction des nanostructures. Deux facteurs principaux peuvent tre responsables des changements de proprits observs pour les nanoparticules : une surface relative par unit de masse beaucoup plus importante et une prdominance des effets quantiques. La premire tant responsable des changements de ractivit qui peut saccrotre considrablement avec une diminution de leur taille tandis que la seconde, observe pour des particules de quelques dizaines de nm, explique les changements au niveau des proprits optique, lectrique, mcanique et magntique (Brouwer et al., 2004, Royal Society and Royal Academy of Engineering, 2004).

La dfinition des nanotechnologies renvoie donc des activits menes lchelle atomique et molculaire, ainsi quaux principes scientifiques et aux proprits nouvelles qui peuvent tre apprhendes et matrises au travers de ces activits. Ces proprits peuvent tre observes et exploites lchelle microscopique ou macroscopique, par exemple pour mettre au point des matriaux et des dispositifs dots de fonctions et de performances nouvelles (Commission des Communauts europennes, 2004).

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4.2 Classification Compte tenu de lobjectif gnral du document et que la production de nouveaux nanomatriaux constitue un champ de recherche trs actif, seulement les produits les plus courants seront brivement dcrits. Pour plus de dtails, il est recommand de consulter ldition spciale du Journal of Materials Chemistry portant sur la prparation de nanomatriaux (Rao, 2004). Rao et al. (2004) ont galement publi un volume dcrivant la thorie, la synthse, les proprits et les applications de ces produits. Sommairement, les nanomatriaux peuvent tre classifis en terme de dimensionnement des nanostructures impliques (Royal Society and Royal Academy of Engineering, 2004). Ainsi, les puits quantiques ou nanocristaux, les fullernes, les particules, les prcipits, les collodes et les catalyseurs sont confins au domaine nanomtrique dans les trois dimensions. Les nanotubes, les dendrimres, les nanofils, les fibres et fibrilles possdent deux dimensions nanomtriques alors que les recouvrements de surface, les films minces et les interfaces ont une seule de leurs dimensions qui soit nanomtrique. Les systmes une dimension, tels les films minces ou les surfaces manufactures ont t utiliss depuis des dcennies dans le secteur de llectronique, de la chimie et de lingnierie. La production de films minces ou monocouches sont maintenant chose courante dans le domaine de llectronique tout comme lutilisation de surfaces produites sur mesure est courante dans le domaine des cellules solaires ou de la catalyse. Ces domaines sont connus et les risques bien contrls. Les proprits des systmes deux dimensions (nanotubes de carbone, nanotubes inorganiques, nanofils et biopolymres) sont moins bien comprises et les capacits manufacturires moins avances. Finalement, certains systmes 3-D tels les nanomatriaux naturels et produits de combustion, oxydes mtalliques, noir de carbone, doxyde de titane (TiO2), doxyde de zinc (ZnO) sont bien connus alors que dautres tels les fullernes, les dendrimres et les puits quantiques reprsentent les plus grands dfis en termes de production et de comprhension des proprits (Royal Society and Royal Academy of Engineering, 2004). 4.3 Caractristiques et proprits des nanoparticules Les nanoparticules dmontrent des proprits qui diffrent des matriaux en vrac desquels ils proviennent. En gnral, lintgration de nanoparticules visera la modification de proprits lectriques, mcaniques, magntiques, optiques ou chimiques. (Hett, 2004). En voici les principales :i

Les fullernes

Les fullernes sont des cages sphriques contenant de 28 plus de 100 atomes de carbone (voir reprsentation schmatique ci-contre). La forme la plus tudie, synthtise pour la premire fois en 1985 (Kroto et al.), contient 60 atomes de carbone, le C60 (Holister et al., 2003). Cest un ballon creux constitu de pentagones et dhexagones de carbone interrelis, limage dun ballon de soccer (Holister et al., 2003; Hett, 2004). Les fullernes constituent une classe de matriaux dmontrant des proprits physiques uniques. Ils peuvent tre soumis des pressions extrmes et retrouver leur forme originale lorsque la pression est relche. Figure 1 : Reprsentation schmatique dun fullerneOstiguy et al., fvrier 2006 Page 6

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Ces molcules ne se combinent pas entre elles, leur donnant ainsi un potentiel important dapplication comme lubrifiant. Lors de la fabrication de fullernes, certains atomes de carbone peuvent tre remplacs par des atomes dazote et former des molcules qui peuvent se lier, produisant ainsi un matriau dur mais lastique. Les fullernes, modifis ou non, ont galement dmontr un potentiel important comme catalyseur (Holister et al., 2003). Ils possdent des proprits lectriques intressantes et il a t suggr de les utiliser dans le domaine lectronique allant de lentreposage des donnes la production de cellules solaires (Holister et al., 2003). En les incorporant des nanotubes de carbone, le comportement lectrique des fullernes est modifi, crant des rgions dont les proprits semiconductrices varient, offrant ainsi des applications potentielles en nanolectronique. Leurs proprits Figure 2 : Reprsentation schmatique optiques varient avec les longueurs donde trouvant dun fullerne modifi ainsi des applications en tlcommunications. Les fullernes tant des structures vides aux dimensions semblables plusieurs molcules biologiquement actives, ils peuvent tre remplis de diffrentes substances et trouver des applications mdicales (Holister et al., 2003).i

Les nanotubes de carbone

Dcouverts depuis peine plus dune dcennie, les nanotubes de carbone constituent une nouvelle forme de molcules de carbone. Enrouls dans un rseau hexagonal datomes de carbone, ces cylindres creux peuvent avoir des diamtres aussi petits que 0,7 nm et atteindre plusieurs millimtres de longueur (Hett, 2004). Chaque bout peut tre ouvert ou ferm par une demi-molcule de fullerne. Ces nanotubes peuvent avoir une seule couche (comme une paille) ou plusieurs couches (comme une affiche enroule dans un tube) de cylindres coaxiaux de diamtres croissants dans un axe commun (Iijima, 1991). Les nanotubes de carbone multicouches peuvent atteindre des diamtres de 20 nm (Aitken et al., 2004). Les petites dimensions couples aux proprits physiques, mcaniques et lectriques remarquables des nanotubes de carbone en font un matriau unique (Kohler et Fritzche, 2004; Pautrat, 2003; Ratner et Ratner, 2003). Ils dmontrent des proprits mtalliques ou semiconductrices, selon la faon dont le feuillet de carbone est enroul sur lui-mme. La densit de courant que peut transporter un nanotube est extrmement leve et peut atteindre le milliard dampres par mtre carr (Pautrat, 2003, Aitken et al., 2004), ce qui en fait un supraconducteur (Ratner et Ratner, 2003).

e

Figure 3 : Reprsentation schmatique de nanotubes de carbone monocouches, multicouche ou contenant dautres lments

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Lgers et flexibles, la rsistance mcanique des nanotubes de carbone est plus de soixante fois suprieure aux meilleurs aciers, mme si leur poids est plus de six fois infrieur (Ratner et Ratner, 2003, Aitken et al., 2004). Ils dmontrent galement une trs grande surface spcifique, sont dexcellents conducteurs thermiques (Hameed Hyder, 2003), dmontrent des proprits lectroniques uniques o ils offrent une configuration tridimensionnelle. Ils dmontrent galement une grande capacit dabsorption molculaire (Maynard et al., 2004). De plus, ils sont chimiquement et thermiquement trs stables (Hameed Hyder, 2003).i

Les nanofils

Les nanofils sont des particules conductrices ou semi-conductrices avec une structure cristalline de quelques dizaines de nm avec un rapport longueur/diamtre lev. Des nanofils ont dj t produits base de silicium, de cobalt, dor ou de cuivre. Ils sont utiliss pour le transport des lectrons en nanolectronique. Ils pourraient tre constitus de diffrents mtaux, oxydes, sulfures et nitrures.i

Les nanomousses de carbone

Les nanomousses de carbone constituent le cinquime allotrope connu du carbone, aprs le graphite, le diamant, les nanofibres de carbone et les fullernes. Dans la nanomousse de carbone, des lots datomes de carbone, typiquement de 6 9 nm, sont interrelis au hasard pour former une structure solide tridimensionnelle trs lgre et spongieuse qui peut agir comme semi-conducteur. Les nanomousses de carbone dmontrent des proprits magntiques temporaires (Health and Safety Executive, 2004b).i

Les puits quantiques

Important domaine de recherche depuis cinq ans environ, les puits quantiques (galement appels nanocristaux ou atomes artificiels) reprsentent une forme spciale de nanocristaux sphriques de 1 10 nm de diamtre. Ils ont t labors sous forme de semi-conducteurs, disolants, de mtaux, de matriaux magntiques ou doxydes mtalliques. Le nombre datomes des puits quantiques, qui peuvent varier de 1 000 100 000, en fait ni une structure solide tendue, ni une entit molculaire (Aitken et al., 2004). Les principales recherches ont port sur les puits quantiques semi-conducteurs qui dmontrent des effets quantiques distinctifs selon les dimensions. La lumire mise peut tre ajuste la longueur donde dsire en modifiant la dimension de lensemble (Aitken et al., 2004). Figure 4 : Diffrentes formes de puits quantiques montrant lorganisation des atomes individuels.

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Les dendrimres

Les dendrimres reprsentent une nouvelle classe de polymres structure contrle et de dimensions nanomtriques. Ils sont considrs comme des lments de base pour la synthse grande chelle de nanostructures organiques et inorganiques avec des dimensions de 1 100 nm et dmontrant des proprits uniques. Les dendrimres permettent un contrle prcis, atome par atome, de la synthse de nanostructures en fonction des dimensions, de la forme et de la chimie de surface dsire. Compte tenu que les dendrimres peuvent tre labors afin de montrer des caractristiques hydrophiles ou hydrophobes, leurs utilisations pourront tre trs diversifies. Avec diffrents groupements ractifs de surface, on envisage notamment sen servir abondamment dans le domaine mdical et biomdical (Tomalia, 2004; Goddard et al., 2003). Compatibles avec les structures organiques telles lADN, ils peuvent galement tre fabriqus de faon pouvoir interagir avec les nanocristaux mtalliques et les nanotubes ou encore possder une capacit dencapsulation ou dmontrer une fonctionnalit unimolculaire (Tomalia, 2004).i

Autres nanoparticules

Plusieurs nanoparticules ont tendance sagglomrer et former des structures en chanes ou avec de multiples branchements. Sont normalement regroups dans cette catgorie les fumes de soudage, les fumes de silice, le noir de carbone et autres nanoparticules qui sont souvent synthtises par pyrolyse la flamme. Ces nanoparticules peuvent inclure des mtaux, des oxydes mtalliques, des semi-conducteurs, des cramiques et du matriel organique. Ils peuvent galement inclure des composites avec, par exemple, un noyau mtallique et un recouvrement doxyde ou dalliage (Aitken et al., 2004). Les collodes, connus depuis longtemps, sont de dimensions nanomtriques. Ces nanoparticules ne seront pas considres dans la prsente tude. 4.4 Outils de caractrisation des nanoparticules La caractrisation des nanomatriaux et la comprhension de leur comportement est primordiale pour le dveloppement de nouvelles applications et la production de nanomatriaux de faon reproductible et fiable. La nanomtrologie de procd utilise des instruments de prcision et de trs haute sensibilit, pouvant mesurer des dimensions souvent infrieures au nanomtre. Ces instruments permettent la manipulation datomes individuels de mme que la mesure de longueurs, de formes, de forces, de masses, de proprits lectriques ainsi que dautres proprits physiques. On y retrouve notamment les techniques faisceau lectronique incluant la microscopie lectronique transmission haute rsolution. Les techniques de sonde balayage incluent la microscopie lectronique effet tunnel et la microscopie lectronique force atomique. Les manipulateurs optiques permettent la manipulation et la mesure datomes individuels (Royal Society and the Royal Academy of Engineering, 2004).

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5.

DVELOPPEMENT, PRODUCTION NANOPARTICULES

ET

UTILISATION

DE

Le dveloppement de nanoparticules et de nanotechnologies reprsente un des domaines de recherche actuellement les plus actifs travers le monde. Plusieurs pays industrialiss en font une priorit stratgique de dveloppement technologique, conomique et socital durables. En effet, ds 2001, on estimait un march mondial potentiel atteignant le billion1 de dollars amricains ds 2015 (Roco et Bainbridge, 2001). En 2003, le dpartement du commerce et de lindustrie britannique estimait un march mondial de 100 milliards de dollars amricains ds 2005 (Arnall, 2003). La cration du US Nanobusiness Alliance, du Europe Nanobusiness Association et du Asia-Pacific Nanotechnology Forum dont le seul objectif vise la commercialisation de nanoproduits illustre bien limportance anticipe de ces marchs de mme que la concurrence internationale dans le domaine (Arnall, 2003). Le Qubec fait de mme via NanoQubec. 5.1 Efforts de recherche et de dveloppementi

Les efforts de recherche au niveau mondial

Une tude publie en 2002 concluait que de 1989 1998, le taux daugmentation de publications scientifiques sur les nanomatriaux augmentait un rythme annuel de 27 % (Compano et Hullman, 2002). Ces donnes indiquaient que plus de 30 pays taient impliqus en recherche dans le domaine, les plus actifs tant les tats-Unis, le Japon, la Chine, la France, la Grande-Bretagne et la Russie qui regroupaient 70 % des publications. Toujours en 2002, Holister concluait que 455 compagnies prives et 271 institutions acadmiques et entits gouvernementales taient dj impliques dans la recherche dapplications court terme en nanotechnologie travers le monde (Holister, 2002). Depuis, ce domaine na cess de prendre de lampleur. Le fait quau cours des cinq dernires annes, de nombreux pays aient dvelopp des plans stratgiques et aient dcid dinvestir massivement en recherche en nanotechnologies se traduira par une poursuite de laugmentation darticles scientifiques sur le sujet de mme que par une diversit des aspects couverts par ces recherches. Roco (2001, 2003) rapportait que les investissements gouvernementaux taient passs de 432 millions $US en 1997 plus de 2,98 milliards en 2003. Actuellement, les efforts de recherche au niveau mondial sont estims plus de 8 milliards $US pour la seule anne 2005, dont environ 40 % proviendraient du secteur priv (Royal Society and Royal Academy of Engineering, 2004; Commission des Communauts europennes, 2004; Maynard, 2005). Une revue dtaille des investissements internationaux a t ralise par Waters (2003) de mme que par la Commission europenne (2004a). En dpit de ces investissements colossaux visant le dveloppement de nouvelles applications commerciales, les recherches dans le domaine de la sant et de la scurit du travail nen sont qu leur dbut. Cinq principaux pays asiatiques sont fortement impliqus en recherche dans le domaine du dveloppement de nouveaux produits: le Japon, la Chine, la Core du Sud, Tawan et Singapour. Le Japon reprsente le principal intervenant asiatique dans le domaine et dispose dune politique de dveloppement compltement intgre o le gouvernement y voit la cl de son redressement conomique (Arnall, 2003; Waters, 2003). En 2003, le gouvernement a investi lquivalent de 800 millions de $US au domaine des nanotechnologies (Feigenbaum et al., 2004) alors que lentreprise1 Billion : mille milliards ou un million de millions

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prive en a investi 830 millions additionnels (Waters, 2003). Le dpartement du commerce et de lindustrie britannique rapporte, ds 2002, que les premires usines de fabrication de nanotubes de carbone et de fullernes sont en construction au Japon (Department of Trade and Industry, 2002). Le 6e programme-cadre structurant europen (Commission europenne, 2002), appel nanoforum, ddie 1,44 milliards $US pour la priode de 2002-2006 (Waters, 2003) et vise dvelopper un rseau de recherche et de communication europen intgrant tous les aspects des nanotechnologies allant du monde des affaires, au domaine scientifique et linformation destine au grand public (Hameed Hyden, 2003). En mai 2004, la Commission adoptait un plan travers lequel elle proposait une stratgie europenne scuritaire, intgre et responsable. Suite de larges dmarches de consultation auprs de ses membres, le 7e programme-cadre structurant europen (Commission des communauts europennes, juin 2005), propose daccrotre les investissements de lUnion europenne en R-D afin de renforcir la position europenne dans ce domaine au niveau mondial. Parmi les objectifs spcifiques de cette initiative europenne, on retrouve la recherche interdisciplinaire long terme afin de comprendre les phnomnes impliqus, matriser les procds et dvelopper des outils de recherche. On sintresse particulirement aux nanobiotechnologies, aux techniques de nanoingnierie, aux implications dans les domaines de la sant et des systmes mdicaux, de la chimie, de lnergie, de loptique, de lalimentation et de lenvironnement. Ce programme europen couvre galement la production et la transformation de matriaux multifonctionnels, limplication de lingnierie pour le dveloppement de matriaux et le dveloppement de nouveaux procds et de systmes manufacturiers flexibles et intelligents. ces efforts europens, il faut ajouter linitiative spcifique de plusieurs pays. Waters (2003) estime que lensemble des investissements europens se situera entre 3,8 et 7,8 milliards pendant la priode 2002-2006. Par contre, lentreprise prive y semble beaucoup moins active quaux tats-Unis ou au Japon. Parmi les pays europens les plus actifs, on retrouve lAllemagne, la Grande-Bretagne, la France, la Suisse, la Belgique et les Pays-Bas. Dautres pays europens sont galement actifs en R-D en nanotechnologies mais les investissements sont plus limits : lIrlande, le Luxembourg, lItalie, lAutriche, le Danemark, la Finlande, la Sude et la Norvge.i

Les efforts de recherche au niveau nord-amricain

Aux tats-Unis, le National Nanotechnology Initiative (NNI) vise acclrer le dveloppement de nouvelles connaissances en nanotechnologie et faciliter leur intgration dans des technologies commercialement viables (Roco et Bainbridge, 2001; National Research Council, 2002; Hameed Hyder, 2003). Cette agence, cre par le gouvernement central amricain, soutient un important programme de recherche multidisciplinaire sur les nanotechnologies et couvre spcifiquement cinq grands axes : la recherche fondamentale, les grands dfis, le dveloppement de centres et de rseaux dexcellence, le dveloppement de linfrastructure et finalement, les implications sociales, thiques et lgales impliquant la formation de la main duvre en nanotechnologies. Plus spcifiquement, le NNI sintresse la R-D portant sur les matriaux nanostructurs, la fabrication lchelle nanomtrique, la dtection et la protection contre les agents chimiques, biologiques, radiologiques et explosifs, linstrumentation et la mtrologie, les aspects lectronique, photonique et magntique des nanoparticules, de mme que les applications de soins de sant, thrapeutique et diagnostique, la conversion et lentreposage de lnergie, la robotique et finalement, les procds permettant une amlioration des aspects environnementaux. Le budget annuel du NNI, son dpart en 2000, tait de 422 millions de US$ (Roco et Bainbridge, 2001). Il na cess de crotre pour atteindre 961 millions de US$ en 2004 avec une fraction de plus de 25 % alloue au dpartement de la dfense (Roco, 2004). De ce montant, le NNI, via une entente avec NIOSH, consacre seulement 1,5 million de US$ la recherche en sant et scurit du travail

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(Teague, 2004). Le budget de NIOSH passe 3,07 M$US en 2006 (Castranova, 2006). Le NNI coordonne la recherche dans 10 centres fdraux dexcellence. De plus, au moins 30 universits amricaines comptent des units de recherche en nanotechnologies et le National Science Foundation compte les nanotechnologies parmi ses six secteurs prioritaires de recherche (Arnall, 2003). Soulignons galement que de nombreux tats amricains investissent galement dans la R-D en nanotechnologie. Il est estim que les fonds privs investis en R-D aux tats-Unis sont du mme ordre de grandeur que les fonds publics (Waters, 2003). Dj en 2003, on estimait que 140 compagnies produisaient commercialement des nanoparticules impliquant 44 lments diffrents du tableau priodique (ETC, 2003). Une enqute mene en 2004 identifie 875 compagnies de nanotechnologies implantes ou en phase de dmarrage aux tats-Unis offrant plus de 475 produits (Roco, 2004).i

Les efforts de recherche au niveau canadien

Via le conseil national de recherche, le Canada a reconnu limportance des nanotechnologies et s'est dot, en 2001, d'un Institut national en nanotechnologies, lINNT, qui dispose dun budget de 125 millions de dollars pour la priode 2001-2005 auquel lAlberta contribue financirement. Quoiquun institut de 10 000 m2 disposant dquipements de pointe soit actuellement en construction Edmonton, le Canada na pas encore dvelopp de plan stratgique global permettant de coordonner lensemble des efforts de recherche au niveau national. Nanmoins, le bureau de dveloppement commercial de lINNT vise devenir un centre de coordination permettant dacclrer la capacit de lindustrie canadienne innover et lancer avec succs de nouvelles nanotechnologies sur le march. Outre lINNT qui est actuellement localis lUniversit dEdmonton, plusieurs grandes entreprises albertaines soutiennent leffort de recherche en nanotechnologie. On y compte notamment PtroCanada, SciMed Laboratories, Celonex, BigBangWidth, Westaim Biomedical et Biotools Incorporated (Fiegenbaum et al., 2004). Le gouvernement albertain a investi 60 millions de $CAN et a galement construit dimportantes installations pour les technologies biopharmaceutiques (Fiegenbaum et al., 2004). Quoique plusieurs provinces canadiennes comportent des groupes de R-D en nanotechnologies, aucune ne semble avoir une dmarche structure au niveau provincial, sauf le Qubec. Environnement Canada dmontre galement beaucoup dintrt pour les nanotechnologies et a rcemment mandant Science-metrix afin de faire le point dans ce domaine spcifique (Bergeron et Archambault, 2005).i

Les efforts de recherche au niveau qubcois 2

Le Qubec, la suite notamment d'un rapport du Conseil de la science et de la technologie (2001) intitul Les nanotechnologies : la matrise de l'infiniment petit , et de laperu de la recherche sur les nanotechnologies ralis par Lebeau en 2001, a dtermin un plan daction sur les nanotechnologies. Dveloppement conomique et rgional et recherche Qubec (2005) ciblent quatre axes de recherche prioritaires : la biotechnologie et les applications pharmaceutiques, les matriaux nanostructurs pour larospatiale et lindustrie automobile, la photonique et les tlcommunications et finalement, lnergie. Le Qubec sest dailleurs dot de NanoQubec qui a comme mandat de favoriser le dveloppement et la valorisation des nanotechnologies et en faire un vecteur de croissance conomique et sociale. Toutes les grandes universits qubcoises comptent des chercheurs actifs (environ 200 rpartis dans une cinquantaine dquipes) en nanotechnologie et NanoQubec diffuse un rpertoire dtaill (http://nanoquebec.ca/nanoquebec_w/site/index.jsp) des chercheurs et des entreprises en 2 Le lecteur peut consulter le chapitre 12 pour plus dinformations sur les principaux intervenants qubcois dans le domaine des nanotechnologies.Ostiguy et al., fvrier 2006 Page 12

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nanotechnologie au Qubec sur son site web. Une description plus dtaille des principaux intervenants qubcois est retrouve au chapitre 12.i

Les nanoparticules les plus tudies

La recherche la plus active dans le domaine des nanoparticules porte sur les nanotubes de carbone o lon anticipe une grande varit dapplications dans de nombreux domaines. Parmi ceux-ci, on considre lutilisation de nanotubes en lectronique, en lectrochimie, comme renforcements mcaniques pour les composites haute performance, comme metteurs de rayons cathodiques, comme moyen de production dnergie ou pour emmagasiner lhydrogne ou encore comme gabarits pour la cration dautres nanostructures, par exemple, produire des nano-fils mtalliques en emplissant les tubes de carbone. La force exceptionnelle des liens unissant les atomes de carbone dans une structure de nanotubes en font un candidat idal pour en faire des agents de renforcement dans des composites. Parmi les autres utilisations envisages, les nanotubes de carbone pourraient tre utilises comme sonde pour limagerie haute rsolution, en nanolithographie, pour faire des nanolectrodes ou encore comme vecteurs pour transporter des mdicaments des endroits spcifiques dans lorganisme humain (Kohler et Fritzche, 2004; Danish Institute of Fundamental Metrology 2002; Pautrat, 2003; Ratner et Ratner, 2003) . 5.2 Procds de fabrication Les nanoparticules peuvent tre synthtises selon diffrentes approches. Il convient de partager les nanoparticules produites selon la mthode ascendante ou la mthode descendante. Par lapproche ascendante (buttom-up), les nanoparticules sont construites atome par atome ou molcule par molcule. Plusieurs stratgies sont possibles pour faire de tels matriaux : la synthse chimique, lautoassemblage et lassemblage par positionnement individuel en sont les principales. La synthse chimique est bien connue et permet la production de nanoparticules en trs grandes quantits alors que lassemblage par positionnement individuel des atomes requiert des mthodologies de microscopie trs peu productives. Lautoassemblage rfre aux techniques de production dans lesquelles les atomes ou les molcules sorganisent elles-mmes pour former une structure ordonne lchelle nanomtrique (Arnall, 2003; Siegel et al., 1999). La formation de cristaux partir dune solution sursature est un exemple dautoassemblage o une production de masse est envisageable. Dans lapproche descendante (top-down), une grande structure est graduellement sous-dimensionne jusqu atteindre des dimensions nanomtriques. La gravure leau forte, lingnierie de prcision, la lithographie et le broyage sont des approches courantes. Plusieurs de ces techniques sont couramment utilises en salle blanche dans lindustrie lectronique o les conditions de production et de sant et scurit du travail sont normalement bien contrles (Royal Society, 2003; Feigenbaum et al., 2004). Dans le prsent document, seules les approches les plus couramment utilises et susceptibles de fortement exposer les travailleurs lors de la production de nanoparticules en grandes quantits sont traites. Les dveloppements en cours visent optimiser certaines proprits spcifiques telles la taille (diamtre, volume, longueur), la distribution granulomtrique, les proprits de surface, la puret, le recouvrement de surface, la facilit de manipulation ou le rendement dans une approche de production de masse. Quatre principales approches sont actuellement considres pour la production grande chelle de nanoparticules et sont bases sur les diffrents mcanismes qui sont responsables de leur formation (Aitken, 2004; Siegel et al., 1999; Dresselhaus et al., 2001):

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les procds par condensation en phase gazeuse, qui regroupent la pyrolyse la flamme, lvaporation haute temprature et la synthse dans un plasma, impliquent des phnomnes de nuclation et dvaporation (approche ascendante); la synthse par vaporation puis dposition de vapeurs (approche ascendante); la formation de collodes par des ractions chimiques avec solvants en phase liquide ou collodale impliquant des phnomnes de prcipitation contrle (approche ascendante); les procds mcaniques par attrition (approche descendante).

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Les procds en phase gazeuse

Les procds en phase gazeuse sont bass sur des phnomnes dvaporation et de nuclation. La nuclation implique la conversion dune phase vapeur une phase particulaire. Elle est observe principalement par condensation dune vapeur sursature lors dune dtente adiabatique, lors dune trempe rapide de lcoulement gazeux contenant une vapeur et/ou lors de la raction chimique de deux produits. Elle est dite homogne lorsque les particules formes sont composes entirement du mme matriau qui se trouvait en phase vapeur et htrogne lorsque la condensation seffectue sur des particules dj existantes. Suite leur formation par nuclation, les particules peuvent continuer de crotre suite la condensation. La condensation et/ou nuclation provenant de procds de combustion ou de mtallurgie forment souvent des particules dont le diamtre peut varier entre 1 et 10 nm. Dans certaines situations, il est galement possible de former des particules de plus grande taille dont le diamtre peut dpasser 100 nm. Plusieurs procds peuvent tre utiliss pour la production de nanoparticules en phase gazeuse : la pyrolyse la flamme, le plasma de micro-ondes, le plasma thermique, les racteurs haute temprature ou par four coulement, la pulvrisation, lvaporation de gouttelettes de mme que toute une srie de mthodes impliquant le laser telles lablation au laser, la pyrolyse induite par laser et la vaporisation au laser (Kruis et al., 1998; Lebeau, 2001; Swihart, 2003; Aitken et al., 2004). Puisque ces mthodes de synthse en phase gazeuse sont bases sur une nuclation de vapeur sursature suivie de la croissance dune particule par condensation, coagulation et capture, il sagit donc dune mthode ascendante o la nanoparticule est construite atome par atome. Le choix du procd sera souvent fonction du produit dsir. Dans ces procds, la formation de vapeurs se produit en chauffant un prcurseur solide, liquide ou gazeux dans un racteur darosols haute temprature puis les vapeurs sont entranes par un gaz-vecteur pour obtenir une vapeur sursature dans une zone plus froide pour permettre la condensation. Le refroidissement de la vapeur peut tre obtenu par expansion rapide, par un mlange avec un gaz plus froid ou par raction chimique. La mthode est particulirement bien adapte la production de nanoparticules de mtal. Cette approche permet galement de contrler la morphologie des particules ou encore de produire des oxydes en utilisant un gaz vecteur riche en oxygne ou des nitrures en utilisant un gaz riche en azote. Le procd de nuclation de la vapeur sursature sinitie par la formation dun noyau solide trs petit. Ce dernier croit en dimension par condensation htrogne ou par raction de surface, par collision et par coagulation. Les collisions entre de telles particules peuvent produire des agglomrats lgrement lis, se regroupant sous forme de chanes. Le contrle des conditions exprimentales permet de produire des nanoparticules dmontrant des proprits diffrentes. Plusieurs composs de dimensions nanomtriques sont produits partir de procds en phase gazeuse. titre dexemples, des fumes de silice (SiO2) et des particules ultrafines de TiO2 sont produites par pyrolyse la flamme partir de loxydation de leurs chlorures dans une flamme doxygne et de mthane. La production de nanoparticules dargent, de gallium et de galne (sulfure de plomb) a t ralise au four

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coulement alors que des nanoparticules de silicium ont t prpares par pyrolyse au laser (Aitken et al., 2004). Pour le lecteur dsirant plus dinformations sur ces procds, Kruis et al. (1998) et Swihart (2003) expliquent en dtail ces procds de production alors que Aitken et al. (2004) en font un rsum. Kruis et al. (1998) considrent que les mthodes de synthse en phase gazeuse permettent un bon contrle des spcifications des nanomatriaux tels les dimensions, la cristallinit, le degr dagglomration, la porosit, lhomognit chimique, la puret et la stchiomtrie tout en tant bien adaptes la production grande chelle en milieu industriel.i

La synthse par dposition de vapeurs

Ces mthodes sont couramment utilises dans le domaine des semi-conducteurs. Sommairement, de la vapeur forme par pyrolyse, rduction, oxydation ou nitration est dpose sous forme de film dpaisseur contrle sur la surface dun disque semi-conducteur. Ces techniques peuvent tre regroupes sous le nom de dposition en phase vapeur ou CVD (chemical vapor deposition). De plus, cette mthode de synthse a galement t utilise pour la production de nanoparticules de TiO2 (Nakaso et al., 2002), de ZnO (Gao et Wang, 2005) et de SiC (Honda et al., 2003). Des dpts de dimension nanomtrique peuvent galement tre obtenus par dpt physique en phase vapeur ou PVD (physical vapor deposition) comme dans le cas de la pulvrisation cathodique. Avec cette technique, la couche dpose sur le substrat est forme datomes arrachs une cathode par bombardement dions lourds provenant dune dcharge lectrique dans un gaz rare, en gnral de largon. Lapplication la plus importante de cette mthode en nanotechnologie pourrait tre la production de nanotubes de carbone. En effet, cette mthode est actuellement considre comme tant trs prometteuse et permettrait une production grande chelle de nanotubes de carbone (Singh et al., 2003).i

La formation de collodes

La premire utilisation documente de mthode collodale remonte Faraday qui a prpar des collodes dor ds 1857. Cette technique de synthse trs connue est utilise de faon courante dans de nombreux procds chimiques industriels (Holmberg, 2002). Sommairement, des particules prsentant une charge lectrique sont maintenues disperses dans un liquide suite aux forces rpulsives qui sexercent entre elles. Les mthodes collodales permettent la prparation de grandes quantits de produits et sont adaptes la production de nanoparticules. Les recherches actuelles visent donc tablir les conditions permettant la production de grandes quantits de nanoparticules de formes dfinies et dont la distribution de taille des particules est assez troite. Cette mthode est base sur des principes assez simples bien quil puisse tre difficile de contrler certaines ractions de faon uniforme surtout pour les racteurs de plus grande taille. Cette mthode prsente galement lavantage dtre assez peu coteuse mettre lchelle et de ncessiter moins dnergie que les autres procds de synthse de nanoparticules. Les nanoparticules produites incluent des mtaux, des oxydes mtalliques, des produits organiques et pharmaceutiques. Ces collodes peuvent demeurer en suspension liquide pour la distribution ou lusage ou peuvent tre filtrs ou schs pour produire des poudres.i

Les procds mcaniques dattrition

Seuls procds dapproche descendante considrs dans ce document, les procds mcaniques par broyage ou par attrition partent de larges particules et les fractionnent jusqu obtenir des dimensions nanomtriques. Lattrition consiste donc en une rduction mcanique de la taille du matriau laide

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de frottement et dimpacts haute nergie. La poudre traiter est insre lintrieur dun rcipient contenant des billes de plus grande taille servant dagent de broyage. Par diffrents mcanismes, une grande nergie est fournie ces billes et la poudre se trouvant prise entre deux de ces billes lors dune collision entre celles-ci est successivement dforme plastiquement et lastiquement puis fracture en plusieurs morceaux. Le procd mcanique dattrition peut tre utilis pour plusieurs objectifs diffrents tels la rduction de la taille des particules, la transformation en une structure amorphe, la croissance de la taille des particules, la modification de la forme des particules, le mlange ou la formation dalliage entre deux matriaux, lagglomration entre des particules ou pour modifier ou changer les proprits du matriau. Cependant, lobjectif principal de lattrition est la rduction de la taille des particules (De Castro et Mitchell, 2002). La rduction des dimensions des matriaux par broyage est un procd industriel bien connu permettant de produire des matriaux de plus en plus fins avec des capacits de production relativement leves. La production des particules les plus fines tait connue sous lappellation de micronisation. La production de particules de dimensions nanomtriques est appele broyage ultrafin ou nano dimensionnement et est normalement effectue en voie humide. Les particules obtenues par broyage peuvent prsenter des caractristiques nanomtriques deux niveaux diffrents. Premirement, les particules elles-mmes peuvent tre de taille nanomtrique. Par contre, ceci nest possible que dans certaines conditions particulires et pour certains matriaux spcifiques comme les cramiques trs fragiles. Dans tous les cas, la distribution de taille des particules est relativement large comparativement celles que lon peut rencontrer dans les diffrentes approches ascendantes et les procds mcaniques dattrition ne sont gnralement pas utiliss pour produire des nanoparticules. Mende et al. (2003) ont ainsi produit des suspensions de carborundum et dalumine de 50 nm laide dune chambre de broyage quipe de plaques rotatives perfores. Merisko-Liveridge et al. (2003) ont produit des nanoparticules de mdicaments peu solubles dans leau avec des granulomtries de lordre de 150 nm. Ces deux tudes ont ncessit la stabilisation des solutions afin dviter la recombinaison des particules. Les poudres produites par les procds mcaniques dattrition sont surtout recherches pour la structure cristalline des particules. Les particules produites par ce procd prsentent une structure hautement cristalline dont la taille des cristaux est souvent entre 1 et 10 nanomtres bien que la taille des particules soit encore de lordre de plusieurs microns. Les matriaux prsentant une structure nanocristalline comportent des avantages importants au niveau de la duret, de la rsistance aux fractures et de la ductilit basse temprature comparativement aux matriaux dont les cristaux sont de lordre du micron (De Castro et Mitchell, 2002). 5.3 Applications des nanotechnologies Le potentiel conomique anticip des nanotechnologies est phnomnal et il est prvu que les nanoparticules se retrouveront dans une multitude dapplications touchant une foule de secteurs dactivits. Borm (2005) rapporte que quelques 2954 kilogrammes de nanotubes de carbone monoparoi ont t produits au niveau mondial en 2003. Le Japon, qui en a produit 1000 kg, prvoit accrotre sa production 120 000 kg/an sur cinq ans. Parmi les champs dapplication ou les nanoparticules permettront daccrotre les performances des matriaux existants, il convient de retenir plusieurs applications actuelles ou envisages (NanoQubec, site internet; Kohler et Fritzche, 2004; Danish Institute of Fundamental Metrology 2002; Pautrat, 2003; Ratner et Ratner, 2003; The Royal Society and Royal Academy of Engineering, 2004; National Science and Technology Council, 2003 ; Roco et Bainbridge, 2001 ; National Nanotechnology Initiative, 2004 ; US Department of Health and Human Services, site internet2004 ; Wood et al., 2004 ; Salata, 2004 ; Morrison et al., 2003 ; Malsch et al., 2004 ; EPA, 2003 ;

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Feigenbaum et al., 2004 ; Hameed Hyder, 2003 ; Commission des Communauts europennes, 2004a, 2004b ; Taylor, 2002). Pour une description dtaille des applications potentielles des nanoparticules, il est suggr de consulter Hameed Hyder (2003).

Industries automobile et aronautique : matriaux renforcs et plus lgers; adhsifs; liquides rhologiques lectriques et magntiques plus performants; peintures extrieures avec effets de couleurs, rsistant aux gratignures, lastiques et sur lesquelles la salet na pas prise; vhicules plus lgers, plus rapides, plus scuritaires; routes, ponts, pipelines, systmes ferroviaires plus durables, plus fiables; recouvrements anticorrosion; senseurs optimisant les performances des moteurs; dtecteurs de glace sur les ailes davion, pneus qui durent plus longtemps et recyclables; plastiques incombustibles ; Industrie de llectronique et des communications : mmoires haute densit et processeurs miniaturiss; nouvelles cellules solaires, batteries et cellules combustion; composantes optolectroniques incluant le laser; vitesses de traitement plus rapides; plus grande capacit denregistrement; bibliothques lectroniques de poche; couplage silice/substances organiques; composantes digitales logiques; ordinateurs et jeux lectroniques compacts ultrarapides avec lectronique, fils et ordinateurs quantiques; cran plat clairement brillant; Industrie chimique et des matriaux : cramiques, pigments, poudres, catalyseurs multifonctionnels et plus efficaces; fils plus lgers et plus rsistants; inhibiteurs de corrosion et alliages rsistant la corrosion; technologies de collage sans colle; nouvelles technologies de soudage; couches fonctionnelles (isolation thermique, anti-adhsif, antistatique); peintures, vitres et vtements photo-actifs et autonettoyants; membranes pour la sparation des matriaux (traitement deau, dialyse); catalyseurs structurs; recouvrements ultra rsistants; outils de coupe extrmement durs et rsistants; Industrie pharmaceutique, biomdicale et biotechnologique: nouveaux mdicaments et agents actifs incluant les cosmtiques, crmes solaires et crmes protectrices; nouvelles surfaces adhsives mdicales anti-allergnes; amlioration des mdicaments actuels, mdicaments sur mesure dlivrs uniquement des organes prcis de lorganisme; surfaces bio-compatibles pour implants; vaccins oraux base de nanoparticules; production de nanoparticules magntiques partir de support biologique et production de matriaux biocompatibles; ingnierie et rgnration tissulaires; interface neurones-transistors; Soins de sant : Les nanomatriaux permettront de mieux voir lintrieur du corps, de mieux soigner et de mieux rparer : moyens diagnostics miniaturiss implants en vue de lobtention de diagnostics prcoces; en chirurgie, ingnierie tissulaire et implants avec des revtements nanotechnologiques pouvant amliorer la biocompatibilit et la bioactivit; senseurs multifonctionnels; analyse dADN; construction dappareils dultraprcision, systmes danalyse et de positionnement, meilleurs systmes optiques; moyens indits pour remdier des handicaps svres tels la surdit, la ccit ou certaines paralysies; membranes pour dialyse; mdecine prventive avec mini-senseurs hautement sensibles, microlaboratoires, biopuces haute densit; diagnostic prcoce, prvention et traitement du cancer; biodtection de pathognes; dtection de protines, ingnierie tissulaire; destruction de tumeurs par chauffage; nergie : Nouvelle gnration de cellules photo-voltaques; clairage plus conomique; batteries et cellules de combustion compactes avec larges surfaces internes; emmagasinage de lhydrogne sur nanotubes; lasers puits quantiques; meilleure efficacit de conversion de lnergie solaire et olienne; fentres intelligentes; matriaux isolants plus efficaces ;

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Secteur manufacturier : ingnierie de prcision pour la production de nouvelles gnrations de microscopes et dinstruments de mesure; de nouveaux processus et de nouveaux outils pour manipuler la matire au niveau atomique; nanopoudres incorpores dans des matriaux en vrac avec des proprits spciales telles que des senseurs qui dtectent des bris imminents et des contrles en mesure; fabrication de matriaux inspirs de la biologie; Environnement et cologie : chimie slective; membranes collodales; catalyseurs slectifs; protection des organismes sensibles et diminution des missions de CO2; couches non toxiques fonctionnelles des senseurs multifonctionnels pour dpollution environnementale; production deau ultrapure partir de leau de mer; meilleure utilisation, rcupration et recyclage des ressources existantes; pesticides et fertilisants plus efficaces et moins dommageables; analyseurs chimiques spcifiques et multi-substances en temps rel; Scurit des procds : racteurs zolites compacts; nouvelles technologies de collage; protection des copies (cartes de crdit et de dbit, billets de banque); ajustement de standards lchelle atomique, les procds auto-organiss; contrle de la qualit lchelle atomique; procds de fabrication avec senseurs conduisant une production avec moins de dfauts; Dfense : dtecteurs dagents chimiques et biologiques; circuits lectroniques beaucoup plus efficaces; matriaux et recouvrements beaucoup plus rsistants; textiles lgers et performants qui se rparent eux-mmes; systmes de surveillance miniaturiss; systmes de guidage plus prcis.

Plusieurs nanomatriaux sont dj utiliss commercialement (Teague, 2004; Royal Society and the Academy of Engineering, 2003; Commission europenne, 2004a). titre dexemples, il suffit de mentionner lutilisation doxydes mtalliques dans des cramiques, doxydes de zinc, de fer, de crium et de zirconium, de mme que pour le recouvrement anti-gratignures pour les lentilles, dans certains cosmtiques et des crans solaires. On estime actuellement lutilisation annuelle de 1000 2000 tonnes mtriques doxydes mtal