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p Nobel d’économie MOOC : Vecteur des communs de la connaissance ? Sciences en marche MONDES UNIVERSITAIRES MONDES UNIVERSITAIRES le snesu ACTUALITÉ ENTRETIEN Mathieu Grégoire MENSUEL DU SYNDICAT NATIONAL DE L ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR - N ˚628 OCTOBRE 2014 DOSSIER Faites du sport ! Faites du sport !

P 01 Couv 628:P 01 Couv - SNESUP · 2016-10-07 · fi SOMMAIRE SOMMAIRE fi MENSUEL D’INFORMATION DU SYNDICAT NATIONAL le snesup DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR - N˚ 628 OCTOBRE

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pNobel d’économie MOOC : Vecteur des communs

de la connaissance ?Sciences en marche

MONDES UNIVERSITAIRES MONDES UNIVERSITAIRES

le snesuACTUALITÉ E N T R E T I E N

Mathieu Grégoire

M E N S U E L D U S Y N D I C A T N A T I O N A L D E L ’ E N S E I G N E M E N T S U P É R I E U R - N ˚ 6 2 8 O C T O B R E 2 0 1 4

D O S S I E R

Faites du sport !Faites du sport !

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Plus d’un mois après la rentrée univer-

sitaire, la hausse des effectifs étudiants,

notamment dans les filières scientifiques

des universités se confirme, traduisant

l’aspiration légitime de nombreux jeunes

à accéder à des études supérieures.

Se confirme également une situation bud-

gétaire pour les formations, les services et

les laboratoires encore aggravée et des annonces d’aus-

térité, dans le Projet de Loi de Finances 2015, qui ris-

quent de frapper durement les universités.

L’occasion est saisie par certains (notamment la CPU)

pour réintroduire la demande de sélection à l’entrée

des universités et l’augmentation des droits d’inscription.

Le SNESUP-FSU est opposé à toute tentative en ce sens. Il

défend une nécessaire relance de la démocratisation

de l’accès aux études supérieures et le lien fondamental

entre la formation et la recherche.

Des moyens existent, notamment par une refonda-

tion du CIR, pour qu’un plan pluriannuel pour l’emploi

scientifique, concernant toutes les catégories de per-

sonnels (ingénieurs, techniciens, administratifs, ensei-

gnants, enseignants-chercheurs, chercheurs), soit mis

en œuvre pour les universités et les organismes de

Après Sciences en marche, ne pass'arrêter en chemin !

ACTUALITÉ 5

• Élections professionnelles4 décembre 2014

• Mobilisations : Sciencesen marche… et après ?

• Barème des cotisationssyndicales 2014-2015

VOIX DES ÉTABLISSEMENTS 8

MÉTIER 16

• Vacataires : coup de balai à l'ENSAE et àl'Institut Polytechniquede Grenoble

• Rapport d’informationsénatorial sur la LoiSauvadet Un an après : un bilan très décevant

MONDES UNIVERSITAIRES 17• Le monde des BTS :

l’autre enseignementsupérieur

DOSSIER 9Faites du sport !À l’Université, c’est une autre réalité qui apparaît.Intégré dans une catégorie générique, les activi-tés physiques, sportives ou artistiques (APSA), lesport n’y est pratiqué que par 20 % des étu-diant.e.s, faute de moyens, quand dans certainesgrandes écoles il est devenu obligatoire (PascalAnger). La filière dédiée aux Sciences et Tech-niques des Activités Physiques et Sportives(STAPS) connaît de grandes difficultés. Des uni-versités en sont réduites à limiter leur capacitéd’accueil en recourant au tirage au sort ! (AnneRoger) Pourtant, les pratiques sportives pour-raient contribuer à changer en profondeur cer-taines conceptions sur lesquelles l’ordre établirepose. Des recherches en sciences sociales per-mettent d’engager ainsi une déconstruction de lasupposée supériorité biologique de certains indi-vidus sur les autres, des hommes sur les femmesou des coureurs de fond africains sur les autres(Anne Saouter et Manuel Schotté).Il y a donc lieu de s’inquiéter de l’avenir d’unefilière, les STAPS, qui devrait avoir toute sa placeà l’Université (Christian Couturier).

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• MOOC : vecteurdes communs de la connaissance ?

• Académie dessciences : le CréditImpôt Recherche

• Nobel d’économie :Jean Tirole

INTERNATIONAL 20• Fédération mondiale

des travailleursscientifiques (FMTS) :réunion du Conseilexécutif annuel

• Séminaire « Science et éducation »

ENTRETIEN 21• Mathieu Grégoire

CULTURE 22• Une perspective

analytique :le système inégalitaire

3

recherche, afin de résorber la précarité

et de répondre aux missions de service

public pour l'enseignement supérieur

et la recherche.

C’est ce qui a été exigé fortement par

8 000 manifestants à l’arrivée du mou-

vement Sciences en marche, vendredi

17 octobre 2014 à Paris. Le SNESUP-

FSU se félicite du succès de cette manifestation, auquel

il a contribué. C’est une réussite, qui pointe l’urgence

de répondre aux revendications portées dans les uni-

versités et les laboratoires et qui doit nous encourager

à poursuivre la mobilisation.

Dans l’immédiat, alors que le débat parlementaire sur

le budget 2015 se poursuit, le SNESUP-FSU demande à

être reçu par les présidents de groupes parlementaires.

Il appelle toutes les organisations de l’intersyndicale de

l’ESR, à bâtir, dans l’unité la plus large, les conditions

pour prolonger activement le mouvement engagé et

faire que, tous ensemble, nos revendications sur les

budgets et l’emploi scientifique aboutissent.

Dans toutes les universités, le SNESUP-FSU doit

relayer et amplifier cette démarche. C’est notre affaire

à tous !

Claudine Kahane et Marc Neveucosecrétaires généraux

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4ÉPHÉMÉRIDE HONG KONG

Les étudiants contre l’oligarchieColonie britannique depuis 155 ans (1842), Hong Kong est devenu en 1997 une

région administrative spéciale de la République populaire de Chine. Le mandat del’actuel chef de l’exécutif, Leung Chun-ying, prend fin en 2017. Comme ses prédécesseurs,celui-ci a été nommé par Pékin, sur proposition d’une assemblée de huit cents notableslocaux. Son successeur sera élu au suffrage universel mais les candidats seront touschoisis par Pékin.Refusant cette ingérence et cette absence de démocratie, des habitants de Hong Kong,majoritairement des étudiants manifestent pacifiquement et se font grève. Le 26 septembre2014, les manifestants ont été violemment réprimés. Le 28 septembre, un mouvementOccupy central s’installait dans la cité. La Confédération des Syndicats de Hong Kong(HKCTU) a organisé une grève le 29 septembre ; elle « condamne avec force » laviolence policière et « exige un système électoral juste afin de mettre fin à l’obstacleque représente un gouvernement qui favorise le monde des affaires ». Elle appelle àsigner une pétition internationale1. l Marc Delepouve

1. http://www.hkctu.org.hk/web/en/online_petition.html?id=6

MOBILISATIONS DANS L’ESRLa CPCN et 660 directeurs delabo rejoignent le mouvementLa première salve du mois est partie de la CPCN (Conférence des Présidents de

section du Comité National). Dans le sillage des revendications du Comité nationalextraordinaire du 11 juin 2014, la CPCN, réunie le 1er octobre, adoptait une motiondans laquelle : « Elle apporte son soutien au mouvement Sciences en Marche, dont lademande de redéploiement partiel du Crédit Impôt Recherche rejoint également lesanalyses et propositions du Comité national ».Le 13 octobre, quelques jours avant l’arrivée de Sciences en Marche à Paris et aprèsune réunion ayant rassemblé plus de 300 directeurs de laboratoire le 24 septembre,François Hollande a reçu une lettre signée de 660 directeurs de labo bien décidés àfaire savoir que « nos laboratoires sont dans un état dramatique ».Dans cette lettre, ils écrivent notamment : « Une réforme du Crédit Impôt Recherche(CIR) permettrait de financer une autre politique et notamment, un plan pluriannuelambitieux pour l’emploi scientifique (...). À titre d’exemple la création de 3 000 postesreprésente une somme de 180 millions d’euros soit 3 % du CIR qui s’élève à plus de6 000 millions d’euros ! » Entre des initiatives sporadiques de ce type, celles d’associations,collectifs, instances de l’ESR et le travail de fond des organisations syndicales, la conver-gence des revendications est en marche. l Fabrice Guilbaud

DÉCRET CNUHaro sur le principed’indépendance desenseignants-chercheurs !Le Comité Technique des personnels enseignants titulaires et stagiaires de statut Universitaire(CTU) était convoqué le 13 octobre pour examiner le projet de décret relatif au conseilnational des universités (CNU). Par ce projet le gouvernement poursuit ses visées desape du statut national des enseignants-chercheurs (EC). Il ne prévoit pas moins quel’ouverture du CNU à des « chercheurs du niveau des directeurs de recherche et deschargés de recherche exerçant dans les établissements et les organismes de recherche ». Des chercheurs de centres privés participeraient ainsi aux procédures de recrutementet de gestion de carrière des EC, après avoir été élus, ou plus sûrement en faisantpartie du tiers des membres du CNU nommés par le ministère... Sans aucune obligationde diplôme, leur lien avec les universités pourrait se limiter à avoir été nommés dansun conseil d’administration !Le SNESUP-FSU s’est exprimé avec force contre cette disposition aberrante. À l’exceptiondu SGEN-CFDT qui s’est abstenu, ayant affirmé être favorable à une telle ouverture,tous les syndicats ont voté contre ce projet. l Philippe Aubry

5 NOVEMBRE-20 NOVEMBRE

Conseil supérieur de la Fonction publique d’État

13 NOVEMBRE

• Commission administrative• Conseil supérieur de l’Éducation

17 ET 18 NOVEMBRE

Réunion du groupe de travail du TUAC sur l’éducation, la formationet les politiques de l’emploi

DU 17 AU 22 NOVEMBRE

Semaine d’action à l’initiative des syndicats de l’éducation de la FSU

18-19 NOVEMBRE

Conseil délibératif fédéral national

20 NOVEMBRE

Comité de suivi des agents non titulaires

24 NOVEMBRE-25 NOVEMBRE

CNESER

25 NOVEMBRE

• Réunion des élus CNU• Mise en ligne sur Galaxie

des rapporteurs CNU pour lesdossiers de qualifications

DU JEUDI 27 AUDIMANCHE 30 NOVEMBRE

16e édition du Salon européen de l’éducation (porte de Versailles)

1ER DÉCEMBRE

Journée mondiale de lutte contre le SIDA

4 DÉCEMBRE

Élections professionnelles

p M E N S U E LD U S Y N D I C A TN A T I O N A L D EL ’ E N S E I G N E M E N TS U P É R I E U RSNESUP-FSU78, rue du Faubourg-Saint-Denis,75010 Paris - Tél. : 01 44 79 96 10Internet : www.snesup.fr

Directeur de la publication : Guy Odent

Coordination des publications : Thierry Astruc

Rédaction exécutive :Laurence Favier, Fabrice Guilbaud, Isabelle de Mecquenem, Christophe Pébarthe

Secrétariat de rédaction :Latifa RochdiTél. : 01 44 79 96 23

CPPAP : 0 111 S07698 D 73

ISSN : 0245 9663

Conception et réalisation : C.A.G., Paris

Impression :SIPE, 10 ter, rue J.-J. Rousseau, 91350 Grigny

Régie publicitaire :Com d’habitude publicité, Clotilde Poitevin. Tél. : 05 55 24 14 [email protected]

Prix au numéro : 0,90 € • Abonnement : 12 €/an

Illustration de couverture : © Jeffrey Murphy

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À l’heure où nous écrivons ces lignes,les listes et les professions de foi

pour les différents scrutins (CTMESR,CTU, CT locaux, CCP, CAPA et CAPN),vont être déposées dans les prochainsjours (avant le 23 octobre 2014).Dans chaque université ou établisse-ment, il est particulièrement important deconcentrer maintenant les efforts sur :• La campagne : il appartient à chaquesection, en lien avec les camarades desautres syndicats de la FSU (SNASUB,SNCS, SNEP, SNICS, SNUACTE, SNUAS-FP selon les cas) de diffuser et deconvaincre de voter pour la FSU et sessyndicats. À cet effet :– un modèle de profession de foi CTd’établissement a été envoyé à chaquesection syndicale, qui a pu l’adapter etl’enrichir en fonction des élémentslocaux ;– un 8 pages de la FSU sera bientôt dis-ponible, servant de base à la discussionavec les personnels pour convaincre dela pertinence du vote FSU. Il insiste surla nécessité de reconstruire un servicepublic de l’enseignement supérieur et dela recherche démocratique, impliquantune rupture urgente de la politiquescientifique et de formation pour l’ave-nir du pays, pour sa jeunesse. Il contientdes éléments spécifiques sur les diffé-rents scrutins (CTMESR, CTU, CT locaux,CCP, CAPA et CAPN) ;– des documents spécifiques parviendrontégalement aux sections pour le CTU ;– les sections peuvent organiser desréunions à laquelle des représentantsnationaux des syndicats de la FSU pour-ront participer.

• L’organisation des scrutins : le minis-tère se décharge de cette organisationsur les universités et les établissements.Nos multiples interventions auprès duministère ont conduit à des dispositionsréglementaires et des circulaires cadrantmieux l’organisation des élections, mais lavigilance des sections est fondamentale.En particulier, il faut être particulière-ment attentif aux possibilités de votepar correspondance et les faire connaîtreaux collègues. En effet, aucun vote parprocuration n’est possible.Il faut désigner les délégués de liste etassurer la présence de camarades de laFSU sur les lieux de vote et lors dudépouillement.En outre, il faut demander la mise à dis-position d’une liste de diffusion pourchaque organisation syndicale déposantdes listes de candidature nationalementou localement, afin d’informer tous lespersonnels dans des conditions d’équitélors de la campagne électorale (tracts,messages de rappel pour le scrutin, etc.).Des informations sont régulièrementmises en ligne sur le site du SNESUP-FSU(http://snesup.fr/Le-Snesup/Dossiers-actu?cid=3875). Vous y trouverez notam-ment un diaporama pour expliquer lesenjeux de ces élections, la circulairecontenant les renseignements pratiquespour les scrutins (CT, CCP, éventuelle-ment commissions consultatives des doc-torants contractuels) et plus générale-ment les textes réglementaires deréférence, et le calendrier des opéra-tions électorales.Le scrutin du 4 décembre va se dérouleralors que le paysage syndical de l’en-

seignement supérieur a considérable-ment évolué ces derniers mois : l’Auto-nome Sup a rejoint le SNPREES dansFO, le SNPTES a quitté l’UNSA et seprésentera seul au CTMESR, un nou-veau syndicat UNSA – UNSA ITRF-Bi-O– est créé. Ce scrutin va donc remodelerle paysage syndical de l’ESR pour lesannées à venir, mais il entrera aussi enrésonance avec de nombreux débatsgénéraux (choix économiques, modèlesocial...) ainsi qu’avec nos combats pourune autre conception de l’avenir de l’en-seignement supérieur et de la recherche.Ainsi, ce scrutin comporte une dimen-sion politique indéniable. Il nous fautdonc y affirmer fortement les positionsde la FSU, syndicat de transformationsociale.

Voter et faire voter pour la FSU et leSNESUP-FSU aux élections profes-sionnelles du 4 décembre 2014 dansla Fonction Publique, c’est décisifpour :◗ élire les représentants des salariésdans les instances consultatives (CT,CAP, CCP) pour défendre les reven-dications des personnels et notreconception du service public de l’ESR ;◗ éviter la remise en cause perma-nente de la « représentativité » desorganisations syndicales par un tauxde participation élevé des personnels ;◗ mesurer la représentativité des orga-nisations syndicales, par leurs scoresrelatifs. La FSU a pour objectif dereconquérir la première place dans laFPE et à être représentatif dans la FPT.Le SNESUP-FSU doit y contribuer. l

ÉLECTIONS PROFESSIONNELLES

4 décembre 2014 :voter et faire voter FSU et SNESUP-FSU

Les élections professionnelles du 4 décembre vont concerner tous lespersonnels titulaires et non titulaires des trois fonctions publiques (plus de 5 millions d’agents). Contribuer à faire réussir la FSU dans notresecteur est un enjeu majeur.

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C’est un pari gagné pour le mouve-ment Sciences en marche qui annon-

çait, à quelques jours du 17 octobre, laparticipation de milliers de personnelsde l’Enseignement supérieur et de laRecherche (ESR) à Paris. De 7 000 à10 000 personnes ont défilé pour cettemarche revendicativedont l’objectif était deconvaincre nos élusqu’une politique d’ave-nir ne pouvait se pas-ser d’un plan d’urgence— en terme d’emploiet de budget — poursauver la recherchefrançaise.Co-organisée parSciences en marche etl’intersyndicale del’ESR (SNESUP-FSU, SNCS-FSU, SNTRS-CGT, etc.), la manifestation a condenséun large panel, tant géographique – avecla convergence des participants aux défi-lés pédestres et cyclistes de Sciences enmarche – que disciplinaires, avec lesbanderoles du Muséum national d’his-toire naturelle, du Collège internationalde philosophie, de l’INRA Versailles, del’association des sociologues enseignant-e-s du supérieur, de l’Observatoire deParis-Meudon, de l’Hôpital Necker, de laLigue Européenne Contre la Maladied'Alzheimer, du Collectif des Jeunes enSciences de l’Univers, de l’Institut

ET APRÈS ?Pour autant, le succès de cette manifes-tation ne doit pas masquer les difficultésà faire entendre nos revendications. Inter-rogée le 15 octobre sur l’opportunité d'unplan ambitieux pour l’emploi scientifique,madame Fioraso annonce sans rire devantles parlementaires avoir « (...) demandéaux organismes de recherche qu’ils pren-nent toutes leurs responsabilités et qu’ilsdonnent la priorité à l’embauche desjeunes docteurs, à leur insertion, à l’in-sertion des post-docs plutôt qu’aux fins decarrière. » (sic) Voilà de quoi résoudre le« problème » du sous-financement du GVT(glissement vieillesse technicité) en offrantgénéreusement des tenure tracks pourles jeunes chercheurs (après qu’ils aientécumé quelques post-docs).Le ralliement sur les questions de déve-loppement de l’emploi scientifique et deson financement par le redéploiementd'une partie du montant du CIR doitdépasser le simple effet d’aubaine. C’esttout le contexte d’un plan de créationsd’emplois qu’il faut garantir notammentpar la défense des statuts des personnelset la remise en cause des regroupementsd’établissements. Conçus sur des basesd’idéologie de la compétition, d'injonctionà la mutualisation des moyens et régispar des statuts qui limitent gravementl’expression des personnels, ces regrou-pements s’opposent aux valeurs decoopération et de démocratie. Loi LRU, loiFioraso, une logique dévastatrice pourl'ESR est à l’œuvre contre laquelle il fautagir. Après s’être assis – aux assises de2012 – après avoir marché et pédalé en2014, capitalisons sur les mobilisationsen cours pour que Sciences en marche nereste pas une marche... de dupes. l

Jacques-Monod ou encore de l’INRAP.Si les couleurs de Sciences en marcheétaient omniprésentes dans le cortège,la diversité des participants est à lamesure de la prise de conscience dans lacommunauté de l’ESR qu'il y a péril en lademeure et urgence à se mobiliser, avec

la présence d'institu-tions (les commissionspermanentes du CNUet du Comité Nationaldu CNRS étaient repré-sentés, ainsi que le CSdu CNRS) et de per-sonnalités dont plu-sieurs médaillé-e-s duCNRS, Jean Rossier enson habit vert d’acadé-micien ou Rachid ElGuerjouma, président

de l’université du Maine.Parmi les nombreuses prises de parole onnotera celles des députées Marie-GeorgesBuffet (gauche démocrate et républi-caine) et Isabelle Attard (apparentée éco-logiste) dont les amendements sur laréorganisation du CIR viennent d'êtrerejetés lors de l'étude du projet de loi definance pour 2015 à l’assemblée nationale.Les témoignages et revendications deplusieurs précaires ont fait écho à leurforte participation, dont le très impliquéCollectif des précaires de la rechercheou le Collectif contre la précarité Pou-chet/CNRS.

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tLe ralliement sur les questionsde développement de l’emploi

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redéploiement d'une partie dumontant du CIR doit dépasser

le simple effet d'aubaine.

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MOBILISATIONS

Sciences en marche… et après ?

Sciences en marche… ça a marché ! Le succès de la parade de l’Enseignementsupérieur et de la Recherche a produit son effet médiatique jusqu’au pointd'orgue du 17 octobre à Paris. Une étape bienvenue dans les mobilisations quidoivent s’amplifier.

➔ par Didier Chamma, membre de la Commission Administrative

M E N S U E L D ’ I N F O R M A T I O N D U S Y N D I C A T N A T I O N A L le snesup D E L ’ E N S E I G N E M E N T S U P É R I E U R - N ˚ 628 O C T O B R E 2014

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BARÈME DES COTISATIONS SYNDICALES 2014-2015�

Cotisation hors barème et contractuels : cotisation annuelle = 7,7 % du traitement brut mensuel.Collègues à temps partiel ou en CPA : cotisation au prorata.Retraités : cf. barème retraités.Enseignants hospitalo-universitaires : + 50 % tous indicesFonctionnaires détachés sur emploi d’enseignant-chercheur : cotisation correspondant à l’indice de rémunération.

Corps/Échelons (et chevrons) 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11

Certifiés/PLP/PTA ENSAM 130 € 140 € 147 € 155 € 164 € 174 € 185 € 198 € 211 € 228 € 245 €

Biadmissibles 137 € 149 € 157 € 164 € 174 € 187 € 198 € 211 € 228 € 245 € 257 €

Assistants 137 € 149 € 164 € 178 € 191 € 201 € 211 € 228 € 251 €

Agrégés/PT ENSAM 141 € 164 € 178 € 193 € 207 € 224 € 237 € 255 € 274 € 292 € 306 €

MCF/M-Assistants 169 € 191 € 210 € 232 € 251 € 268 € 279 € 292 € 306 €

Certifiés HC 185 € 209 € 224 € 239 € 259 € 276 € 292 €

Agrégés HC / MCF HC / PR2 245 € 260 € 274€ 292 € 306 € (A1) 329 € (A2) 342 € (A3) 359 €

PR1 306 € (B1) 359 € (B2) 374 € (B3) 395 € (C1) 416 € (C2) 425 € (C3) 434 €

PR EXC (D1) 434 € (D2) 454 € (D3) 474 € (E1) 474 € (E2) 492 €

Vacataires 36 €

Lecteurs 71 €

Maîtres de langue 93 €

Doctorants contractuels 80 €

ATER 98 €

Le montant de la cotisation des actifs titulaires est calculé selon la formule : indice x taux, avec une valeur du taux fixée à 0,373 en 2012/2013et inchangée pour 2013-2014. Pour les non-titulaires (hors vacataires et contractuels) le montant de la cotisation est fixé à 4,8 % du traitement mensuel brut.

ATTENTION : COMPTE TENU DES DISPOSITIONS FISCALES, LE COÛT EFFECTIF DE VOTRE COTISATIONEST DE 34 % DU VERSEMENT EFFECTUÉ SELON LES INDICATIONS DE LA GRILLE.

L’attestation de cotisation vous sera envoyée en début 2015 pour un règlement transmis avant le 31/12/2014.

RENOUVELEZ VOTRE COTISATION SYNDICALE POUR CETTE NOUVELLE ANNÉE UNIVERSITAIREFAITES ADHÉRER DE NOUVELLES ET NOUVEAUX COLLÈGUES POUR 2014-2015

Les chèques libellés à l’ordre de « SNESUP » sont à remettre à votre trésorier de section ou à envoyer à« SNESUP, trésorerie, 78, rue du Faubourg-Saint-Denis, 75020 Paris

FORMULAIRE 2014-2015 D’ADHÉSION nn DE RENOUVELLEMENT nn DE MODIFICATION nn

nn M. nn Mme

NOM D’USAGE ................................................................................................................................................................................. Prénom ............................................................................................. Date de naissance .............................................................................

Établissement : ............................................................................................................................................................................ Composante : ............................................................................................................................................................................................................................

Corps : ..................................................... Classe : ....................................... Échelon : ......................................... Discipline :...................................................... Section du CNU :..............................................................................................................

Unité de recherche : ........................................................................... Organisme : .............................................................................................................................. Section au CoCNRS : ................................................................................................

Tél. domicile : .................................................................................................... Tél. portable : ......................................................................................................................... Tél. prof. : .......................................................................................................................................

Adresse électronique pour courriel SNESUP (très lisible, merci) ...............................................................................................................................................................................................................................................................................

L’indication d’une adresse électronique usuelle (de préférence personnelle) est de première importance pour une information interactive entre le syndicatet ses adhérents, tant pour les questions générales que pour le suivi des questions personnelles.

Adresse postale pour les publications et courriers SNESUP et FSU ..................................................................................................................................................................................................................................................................

.................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

Date ............................................................................. Signature Formulaire et règlement à transmettre à un responsable SNESUP local ou à envoyer à : SNESUP-FSU, 78, rue du Faubourg-Saint-Denis, 75010 Paris

Les informations recueillies dans le présent questionnaire ne seront utilisées et ne feront l’objet de communication extérieure que pourles seules nécessités de la gestion ou pour satisfaire aux obligations légales et réglementaires. Elles pourront donner lieu à exercice du droitd’accès dans les conditions prévues par la loi n° 78-11 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés du 6 janvier 1978.

Vous pouvez régler votre cotisation par chèque (libellé à l’ordre de « SNESUP ») ou choisir le règlement par prélèvement automatique qui permet le fractionnementde la cotisation en fois s’il est contracté en début d’année.Dans ce cas, demandez le formulaire d’autorisation de prélèvement à [email protected] ou au 01 44 79 96 16, ou téléchargez-le (http//www.snesup.fr/Le-Snesup/Se-syndiquer) afin de le renvoyer signé et accompagné d’un RIB avec cette fiche.

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COMUE HESAM

Communiqué du SNESUPde Paris 1, 8 octobre 2014COMUE, rien ne va plus ! L’annonce, le 18 septembre dernier, du départ

de quatre, voire de cinq, établissements de la COMUE heSam illustrela faillite d’une méthode que le SNESUP de Paris 1 n’a cessé de dénon-cer depuis plusieurs mois. Elle souligne le caractère artificiel de regrou-pements négociés dans le secret, sans la moindre concertation avec lespersonnels censés les mettre en œuvre.Cet échec est largement imputable aux autorités de tutelle des établis-sements, ministère et rectorat de Paris, qui ont fixé un calendrier de dis-cussion intenable et qui ont multiplié les pressions et les menaces, en par-ticulier financières, sur les établissements. Précipitation et contrainteont envenimé les rapports entre ces établissements : force est de consta-ter aujourd’hui que des partenariats scientifiques, plus anciens que la loide 2013 créant les COMUE, s’en trouvent compromis. Ces autorités detutelle se taisent aujourd’hui, au nom d’une prétendue « autonomie », etlaissent les établissements, dont Paris 1, dans de lourdes incertitudes juri-diques et financières, en particulier sur le devenir des financements liésau dispositif « Paris Nouveaux Mondes ».Le SNESUP rappelle que les regroupements ne doivent s’envisager quedans le cadre d’une véritable coopération entre établissements, sur la basede projets scientifiques et pédagogiques de qualité, discutés par lespersonnels dans une large concertation. l

LORRAINE

Économiser en supprimant des postesÀ l’Université de Lorraine, les finances font défaut. Selon le président,

5 millions sont à économiser sur la masse salariale, la moitié enheures complémentaires, l’autre moitié en emplois. Sur les 300 postesvacants, toutes catégories confondues, ce sont 70 à 80 postes qui serontgelés c’est-à-dire, finalement, supprimés. Le dispositif mis en place l’andernier, reporté cette année, le sera de nouveau l’an prochain, n’en dou-tons pas. Des centaines d’emplois de fonctionnaires sont menacés. Au-delà de la contrainte budgétaire mise en avant, c’est une politiqueconcertée par les gouvernements successifs et acceptée par les présidentsd’université qui vise à réduire le nombre de fonctionnaires pour passerà des emplois de contractuels, moins coûteux et plus malléables.À la rentrée, le président a annoncé qu’il faudrait bientôt définir « leslignes directrices de notre future offre de formation et de notre straté-gie de recherche ». Supprimer des emplois est une aubaine pour impo-ser des restructurations de la formation et de la recherche. Si l’on y ajoutele fait que l’UL est candidate aux concours IDEX/ISITE, lesquels orien-tent les formations et la recherche dans des directions « valorisables »,« rentables », « attractives », on se demande encore comment le présidentpeut écrire qu’il a la « volonté politique de préserver (...) nos missionsde service public ».La section SNESUP de l’UL a appelé les collégiums et pôles scientifiquesà publier tous les postes vacants, pour toutes les catégories de person-nels. Elle tient des AG pour construire des analyses, exprimer lesconséquences sur les formations, la recherche et les conditions de tra-vail et, surtout, élaborer des actions à mener pour préserver lesemplois. l

Nicolas Grégori, secrétaire de section

COMUE SORBONNE - UNIVERSITÉ AU MUSÉUM NATIONAL D’HISTOIRE NATURELLE

La triste comédie de l’adoption des statuts de la ComUE

UPEC

Les licences de philosophie et d’allemand menacées«Àl’UPEC, l’UFR Lettres et Sciences Humaines et ses équipes pédagogiques

travaillent depuis deux ans sur une offre de formation cohérente et nova-trice pour le prochain plan quinquennal. Quelques jours seulement avant latenue du conseil académique, la présidence de l’UPEC a prévenu qu’elle netransmettrait pas au ministère les demandes d’accréditation pour la Licencede philosophie et le parcours Licence d’allemand LLCE. En revanche, la présidence de l’UPEC a inscrit une mention de masterHumanités numériques dans le dossier d’accréditation sans consulter l’UFR.C’est, à notre connaissance, une première en France qui bouscule les pré-rogatives des UFR et des équipes pédagogiques !Au-delà de la Licence de philosophie et de la Licence d’allemand LLCE, c’estun ensemble de formations novatrices qui est remis en cause. C’est parexemple le cas du double parcours philosophie-médecine (unique enFrance) et de la classe préparatoire littéraire partenariale entre l’universitéet le lycée Léon Blum de Créteil. Il n’existe qu’une autre classe préparatoirede ce type en Île-de-France, elle a ouvert en 2012 et c’est déjà un grand suc-cès avec plusieurs admis aux grandes écoles et un apport de bons étudiantsà l’UPEC).Grâce à la mobilisation des étudiants, des enseignants et des personnels admi-nistratifs, le Conseil Académique a obtenu que ces 2 licences réintègrent ledossier d’accréditation qui a alors été voté à l’unanimité par le CA. Ce dos-sier va être soumis au vote du CA le 17 Octobre avant transmission auministère. » l Catherine Deville, secrétaire de sectionSTRASBOURG

En visite à Strasbourg, Geneviève Fiorasoméprise les organisations syndicalesDe la visite de G. Fioraso le 3 octobre dernier, les collègues de l’Uni-

versité de Strasbourg garderont certainement amertume et colère etretiendront trois leçons.La première est que G. Fioraso préfère la communication aux mesures effi-caces. Venue pour animer une table ronde sur l’insertion profession-nelle, elle vantera, devant un parterre choisi, l’action de son gouvernementalors que la politique qu’elle conduit laisse sans emploi 37 % des diplômésà bac +5 et plus. Et on voit mal comment les réductions budgétaires, lesgels de postes et l’amputation des formations pourraient faciliter l’inser-tion des étudiants...La deuxième leçon est que le cabinet de G. Fioraso ne daigne pas répondreaux courriers de demande d’entrevue des organisations syndicales et faitsous-traiter le travail de négociation par les fonctionnaires du renseigne-ment intérieur : la limitation à 4 représentants dans une université quicompte plus d’une dizaine d’organisations de personnels et d’étudiants aconduit l’intersyndicale à refuser ces conditions méprisantes. Ce n’estqu’une heure avant une très hypothétique rencontre que G. Fioraso aaccepté huit représentants alors que les conditions matérielles n’étaientplus réunies. La troisième leçon est que la seule réponse que le gouvernement apporteà nos revendications pressantes est une présence policière massive sur noscampus : la manifestation bruyante d’une centaine d’étudiants et per-sonnels n’a rencontré qu’un cordon de CRS, avant que ne fusent desinsultes déplacées entre quelques étudiants et un président d’universitépeu digne de ses fonctions. Ces incidents auraient pu être évités si une délé-gation avait été reçue. La secrétaire d’État serait bien inspirée lors de sesprochains déplacements de mettre le dialogue social à son agenda afin d’en-tendre vraiment la souffrance et la colère qui montent. l

Pascal Maillard, secrétaire de section

De façon autoritaire, la direction du Muséum arefusé d’entendre la demande des person-

nels en inscrivant le vote des statuts de la ComUESorbonne Universités à l’ordre du jour du Comitétechnique le 24 juin 2014, puis à celui du Conseild’administration le 3 juillet. Aucun délai deréflexion ne devait être accordé. Tel était l’oukaseimposé par la DGESIP pour les vingt-quatre pro-jets qui devaient être soumis au CNESER. Pourtantle 22 juillet le CNESER n’eut à en juger que quatreet les rejeta... Il fallait aller vite pour que le vote au CA inter-vienne dans une configuration toujours à l’avan-

tage de l’administration (composition du CA : 12nommés et extérieurs pour 10 élus). Le votedevait avoir lieu avant la signature du décret desnouveaux statuts du Muséum le 2 octobre, ce quiaurait permis aux syndicats démissionnaires deréintégrer le CA dans une configuration équilibrée(11 nommés et extérieurs et 11 élus) et de fairecapoter le projet de la direction.Celle-ci a donc choisi la marche forcée en refusantd’entendre les personnels qui s’étaient réunis enassemblée générale le 3 juin sur la question –Comment le choix d’un regroupement va-t-il trans-former le Muséum ? L’assemblée avait décidé de

respecter le moratoire d’un an demandé par leCNESER du 19 mai 2014. Le CA du Muséum du 4 juillet a adopté le projetde statuts de la ComUE à la majorité qualifiée (plusdes deux-tiers des administrateurs ont voté pour).Le vote de certains élus associatifs est allé dans lesens de celui de la direction générale et du FCS-SU et à l’opposé des souhaits exprimés par le per-sonnel. Le seul syndicat siégeant au CA a préféréne pas siéger, contraint en cela par le refus du pré-sident intérimaire du Muséum d’en reporter la déli-bération. l

Sections SNESUP et SNASUB du Muséum

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À l'Université, c'est une autre réalité qui apparaît. Intégré dans une catégorie générique,

les activités physiques, sportives ou artistiques (APSA), le sport n'y est pratiqué que par

20 % des étudiant.e.s, faute de moyens, quand dans certaines grandes écoles il est devenu

obligatoire (Pascal Anger). La filière dédiée aux Sciences et Techniques des Activités

Physiques et Sportives (STAPS) connaît de grandes difficultés. Des universités en sont

réduites à limiter leur capacité d'accueil en recourant au tirage au sort ! (Anne Roger)

Pourtant, les pratiques sportives pourraient contribuer à changer en profondeur

certaines conceptions sur lesquelles l'ordre établi repose.

Des recherches en sciences sociales permettent d'engager ainsi une déconstruction de la

supposée supériorité biologique de certains individus sur les autres, des hommes sur

les femmes ou des coureurs de fond africains sur les autres (Anne Saouter et Manuel Schotté).

Il y a donc lieu de s'inquiéter de l'avenir d'une filière, les STAPS, qui devrait avoir

toute sa place à l'Université (Christian Couturier).

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Faites du sport !‘ Dossier coordonné par Christophe Pébarthe et Claire Pontais

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Le sportpour tous

futurs cadres du pays en leur permettantl’accès à des savoirs, des compétences, uneculture générale, une formation à l’analysecritique, à la recherche, bref, une capacité às’adapter au monde et à le transformer. Lesport, phénomène culturel incontournableet massif, fait partie de cette formation dehaut niveau pour tous.

Les obstacles au développementdes APSA à l’UniversitéLe principal : la non-reconnaissanceinstitutionnelle de leur valeur culturelle etuniversitaire. La persistance du dualismecorps-esprit, entre autres, relègue le sportau rang de sous-culture, comme un simpledivertissement, objet de consommation, ou

entretien de la « machinecorps ». Pourtant c’est toute lapersonnalité qui est en jeu dansla pratique physique.

Trois autres obstaclesà lever• Le manque de temps lié àune situation sociale qui oblige50 % des étudiantes à travaillerpour financer leurs études.• La non-reconnaissance dusport dans les cursus de for-mation et donc sa non-inscrip-tion dans l’emploi du temps.

• Le manque de moyens (postes, budget,équipements...).

Le SNEP-FSU soumet au débatdes propositions concrètes, nonexhaustives, pour lever ces obstacles • La mise en place d’une Unité d’enseigne-ment obligatoire(3) (UEO) inscrite dans l’em-ploi du temps sur au moins un des sixsemestres du cycle licence dans tous les cur-sus. Cela permettrait, de plus, de développerla pluridisciplinarité de ces cursus.• L’obligation de proposer une UE sportfacultative (UE libre ou facultative) à chaquesemestre du cursus universitaire.• Des postes d’enseignants EPS titulaires etde BIATOSS.• Un budget de fonctionnement du SUAPS

de chaque université atteignant au moins1,5 % du budget de fonctionnement global decelle-ci (avec des crédits État fléchés sur labase de 15 euros par étudiant). Ce qui consti-tuerait un véritable « plan Marshall » pour ledéveloppement du sport universitaire.• Des installations sportives universitaires àconstruire, à rénover, à entretenir.Tout cela finalisé dans la construction d’unprojet d’éducation physique et sportive uni-versitaire (PEPSU) adapté au monde de l’Uni-versité, des étudiants et des personnels.

Au final pour quelles pratiques ?• Une offre d’APSA très large qui va de tousles sports (collectifs, de raquettes, de com-bats, de plein air, aquatiques, d’entretien...)aux arts du cirque, en passant par le yoga,les danses, etc.• Des connaissances diversifiées, parexemple centrées sur les techniques et tech-nologies des activités, ou sur le seul bien-être,ou en lien avec une discipline universitaire(histoire, médecine, droit, sociologie...), ouencore sur l’acquisition de compétences plustransversales (maîtrise de soi, savoir ani-mer...).• Des modalités de pratiques diversifiées.• Une progression et une évaluation acces-sibles à tous, du débutant à l’expert, que cesoit en pratique facultative ou obligatoire.Ces propositions que les SUAPS pourraientgénéraliser, pour tous et toutes, « que l’on soitdébutante ou experte ! », visent un véritabledroit pour chacune à s’initier, reprendre oupoursuivre une pratique sur son temps per-sonnel et dans sa formation. Bref, un regardnouveau ou enrichi sur soi, le sport et lesautres.Contact : [email protected] l

(1) Rapport Fabre en 1994, rapport Auneau-Diagana

en 2009...

(2) Les SUAPS sont les structures qui ont pour

mission d’offrir, organiser, enseigner et animer la

pratique des APSA. Elles s’occupent aussi généra-

lement de la compétition interuniversitaire dans le

cadre de la FFSU (Fédération française du sport

universitaire) et des associations sportives.

(3) Première mesure préconisée dans le rapport

Auneau-Diagana.

Pratique physique, sportive ou artistiquepour tous et toutes :un droit à conquérir à l’Université

Par faute de moyens, trop peu d’étudiant.e.s pratiquent une activité sportive à

l’Université. L’État, qui se désengage des services publics, n’investit que trop peu dans

les infrastructures sportives. À cela s’ajoute le mépris pour cette discipline.

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‘ par Pascal Anger , responsable secteur SUAPS au SNEP-FSU

Tous les discours et rapports officiels(1)

s’accordent sur l’importance de la pratiquedu sport à l’université ; « sport » étant entendudans son sens le plus large, englobant l’en-semble des activités physiques, sportives ouartistiques (APSA). Moyen de formation et deréussite, facteur d’équilibre et d’enrichisse-ment, sa pratique devrait être effective pourtoutes et tous.Pourtant, faute de moyens et de reconnais-sance, moins de 20 % des étudiants, enmoyenne, pratiquent un sport à l’universitéalors que près de 70 % souhaiteraient enfaire. Les budgets des SUAPS(2) (Servicesuniversitaires des activités physiques) repré-sentent en moyenne 0,5 % des budgets desuniversités. L’État n’offre qu’un poste de pro-fesseur d’EPS pour2 300 étudiants. Lesinstallations sportivessont insuffisantes ouvétustes et le sport neconnaît qu’une faiblevalorisation dans lesétudes, quand celaexiste. Le passage à laLRU avec les RCE et lapolitique austéritairen’ont rien arrangé.Alors que nombre degrandes écoles ontrendu le sport obliga-toire dans leur formations (ENA, Polytech-nique...), seules de très rares universités l’ontmis en place. Pourquoi ce qui est légitimepour l’élite ne l’est pas pour tous les étu-diantes ? L’université a comme mission de former les

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et de reconnaissance,

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des étudiants,

en moyenne, pratiquent

un sport à l’université

alors que près de 70 %

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IERLicence STAPS :

la capacité d’accueil en questionEn raison du manque d’infrastructures, les UFR STAPS ont mis en place une sélection

sous la forme d’un tirage au sort pour répondre au nombre grandissant d’inscriptions

de ces dernières années. L’avenir des étudiant.e.s décidé à la loterie ?

‘ par Anne Roger , MCF STAPS, université de Lyon 1

«Des groupes à 45, des salles trop petitesqui posent des problèmes de sécurité, un

tirage au sort, un manque de moyens pourouvrir de nouveaux groupes... Cette rentrée estune catastrophe. Je ne sais pas comment nousallons réussir à travailler... et à finir l’année. »Cette collègue du STAPS de Créteil ne fait mal-heureusement que décrire la réalité vécuepar une grande part des enseignantes et étu-diantes en STAPS en cette rentrée 2014. Vic-times de leur succès, les études en STAPSvoient de plus en plus d’étudiants qui sou-haitent s’y inscrire. Entre capacité d’accueillimitée ou tentative de ne laisser personne decôté, les solutions trouvées localement sontdiverses et créent une iniquité de traitemententre étudiants au niveau national.

Un avenir professionnel soumis autirage au sort : est-ce acceptable ?Là où des capacités d’accueil ont été affi-chées, le tirage au sort a parfois été le moyenutilisé pour sélectionner les heureux élus.Près de 80 étudiants ont par exemple étérefusés à Toulouse. Même situation à Créteil,à Nantes...Des étudiants avec un projet professionnelpourtant construit et mûri de longue date sesont vu refuser l’accès à l’inscription alorsque c’était pourtant leur seul vœu sur le sys-tème Admission Post-Bac (APB). Certainsavaient même anticipé leur choix en choisis-sant l’option EPS au Bac... pour rien, puisquele sort en a décidé autrement. Faut-il alors évo-quer les coups de fil tous azimuts en urgencedes parents désemparés et inquiets pour l’ave-nir de leurs enfants ? Comment ne pas se sen-tir victime d’une injustice quand, sans aucuneautre raison que le manque de chance, tout unprojet s’effondre ? Que répondre quand on estenseignant dans ces structures et face à cesincompréhensions ? Est-ce aux collègues d’as-sumer de telles responsabilités ? Des élèves brillants écartés, d’autres acceptéset qui, pour nombre d’entre eux, ne finirontpas l’année une fois qu’ils auront mesuré ledécalage entre leurs attentes, souvent spor-tives, et la réalité du cursus brassant des exi-gences scientifiques, théoriques et pratiques.Trois possibilités alors pour les jeunes victimesdu tirage au sort : s’inscrire une année dansune autre filière en espérant avoir plus dechance l’année prochaine, faire définitive-

ment le deuil d’un cursus dans lequel ilss’étaient projetés avant même d’avoir pu yentrer ou encore tenter leur chance dans unautre STAPS sans capa-cité d’accueil, loin dechez eux... Panoramades possibles, peuréjouissant et prenantindubitablement peuen compte le futur étu-diant d’un point de vuehumain. À Chambéry,un tirage au sort a étéréalisé à chaque phased’admission APB, passeulement lors de ladernière phase. Leseffectifs ont ainsi étéprogressivement affinés et certains des étu-diants refusés se sont finalement inscrits àGrenoble, centre sans capacité d’accueil.

Des effectifs pléthoriques oudes capacités d’accueilDans les structures n’ayant pas mis en place decapacité d’accueil, il y a gonflement des effec-tifs. À Reims, ils sont ainsi passés de 650 à 950en une seule année et la politique de l’établis-sement a été d’accepter toutes les demandes.À Grenoble, Lyon, Saint-Brieuc, Valence, etquelques autres centres, même choix de ne pasfixer de capacité d’accueil et donc là aussi desgonflements plus ou moins importants. Cesstructures ont de fait organisé les enseignementsen augmentant le nombre de groupes. « Amphisbondés » ou « rentrée chaude » soulignent toutde même les collègues, pour qui l’augmenta-tion des effectifs a entraîné également « desheures supplémentaires acceptées pour le bonfonctionnement ». À Rouen, les collègues ont été mis devant des

difficultés importantes. « Nous avions décidéde ne pas autoriser les inscriptions pendant laphase de procédure complémentaire. La ren-

trée aurait pu être rela-tivement sereine. Maisle recteur a décidé uni-latéralement de per-mettre aux bacheliersqui n’en avaient pasformulé le vœu lors dela première phase del’inscription de suivredes études en STAPS.Cette décision est inter-venue le 25 août,désorganisant l’UFR etdégradant les condi-tions de sécurité et

d’accueil des étudiants. « Nous venons devoter une motion à l’unanimité en CG pourfaire savoir au recteur notre désaccord avec sadécision et la manière dont il l’a prise. » À Dijon, la solution choisie a été largement tra-vaillée en amont par tous les acteurs impliquésdans l’orientation des étudiants pour tenterd’identifier au plus près les besoins et de fixerune capacité d’accueil qui s’en approche leplus possible, tout en ayant en tête qu’il n’étaitplus possible de continuer à laisser gonfler leseffectifs sans mettre en péril la qualité desenseignements. Ainsi, la solution a été d’ac-cepter tous les vœux 1 APB du secteur. Cettesolution semble assez répandue pour calerles capacités d’accueil sur les besoins. Vic-times de cette solution : les élèves ayant choisiles STAPS en vœu 2 et les réorientations. De toute évidence, il est urgent de réfléchircollectivement et en profondeur à la gestionde ces effectifs, ainsi qu’à la mise en place desolutions les moins pénalisantes possible, à lafois pour les enseignantes et les étudiantes. l

tDes élèves brillants écartés,

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Pourquoi étudier le rugby ?

Rien ne me prédestinait à ce sujet. Aucunmembre de ma famille n’avait joué au rugby.C’est au moment de la soutenance de monmémoire de maîtrise en anthropologie, consa-cré à l’identité d’une ville de la banlieue bor-delaise, Bègles, que la suggestion m’a étéfaite. Mais j’ai véritablement pris consciencequ’il y avait un sujet, un peu plus tard, lorsquel’équipe de Bègles a remporté le Champion-nat de France (1991). Une grande ferveurs’empare de la ville, les gens s’embrassent, jesuis prise par ce grand moment de liessepopulaire. Comment ne pas penser que lerugby peut être un vecteur d’identité localecomme disent les sociologues ? Pour mon tra-vail de recherche, une thèse aujourd’huipubliée (Être rugby. Jeux du masculin et duféminin, Petite Bibliothèque Payot, 2013,rééd.), j’ai adopté la démarche classique del’anthropologue, celle de l’observation parti-cipante, c’est-à-dire s’intégrer à ce mondeque je ne connaissais pas, en l’occurrencel’équipe de rugby de Bègles, passer des soi-rées avec les joueurs, etc. Bref, la femme,chercheuse en sciences sociales, que j’étaisallait s’immerger dans un monde d’hommes.

Précisément, le rugby, du moins de l’exté-

rieur, apparaît comme un monde d’hommes,

un monde dans lequel la place des femmes

semble réduite voire inexistante. Cette sur-

représentation du masculin a-t-elle posé un

problème à la chercheuse que vous êtes ?

Quand j’ai commencé ma recherche, j’étaispleine d’a priori et j’imaginais que ce seraitdifficile pour une femme d’entrer dans lemonde du rugby. C’était du reste ce que

j’entendais autour de moi. Une fois monétude de terrain commencée, j’ai rencontrédes gens intrigués par ce que je faisais,qui ne voyaient pas de problèmes majeursà ce que je puisse les « étudier ». Toutefois,la place de l’anthropologue n’était passimple à construire, entre les femmes desjoueurs et les « groupies » qui tournentautour de l’équipe. Il y a pu avoir uneforme de chaperonnage qui est une marquede la domination masculine, bien entendu.Il m’a fallu jouer avec les codes, savoir parfoisme comporter comme un homme (en clair,boire sans s’arrêter de grandes quantités d’al-cool, « tenir » toute la nuit), écouter sans pro-tester des blagues machistes ou homophobes.

Pensez-vous que cette recherche aurait été

menée différemment pas un chercheur ?

Un collègue, Sébastien Darbon, a mené uneenquête similaire auprès de l’équipe de rugbyde Saint-Vincent-de-Tyrosse, dans les Landes(qui a donné lieu à un livre) Rugby, mode devie. Ethnographie d’un club, Saint-Vincent-de-Tyrosse, Paris, 1997, Editions Jean-MichelPlace). Il a vécu plusieurs mois sur place et afini par être véritablement reconnu par le club.Si différence il y a, elle porte sur les sujets abor-dés. Lui, il pouvait parler des groupies sur lemode de la connivence « entre hommes »,quand moi j’ai choisi de ne pas le faire, pouréviter de produire des confusions. Mais j’ai puparler avec les joueurs de leurs relations avecleurs épouses, avec leur mère, des questionsauxquelles mon collègue n’avait pas pensé. Enla matière, il y a donc complémentarité.

Une anthropologue chez les joueurs de rugbyEn observant une équipe de rugby, l'anthropologue Anne Saouter fait apparaître

l'articulation complexe qui existe entre le masculin et le féminin dans une pratique

sportive marquée par l'affrontement physique. Elle montre que si le sport peut

confirmer l'ordre établi, notamment la domination masculine, il peut aussi émanciper

les individus.

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Les Panthères roses

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Venons-en à présent au contenu de votre

recherche. Quel masculin se dessine-t-il depuis

une équipe de rugby ?

Cette question appelle une réponse en plu-sieurs points. Peut-être faut-il commencer pardire que depuis mon terrain et la publicationde mon livre, les choses ont changé. Le rugbys’est ouvert au grand public quand il fut pen-dant longtemps un sport pour connaisseurs,pratiquants ou anciens pratiquants. À certainségards, il est devenu un spectacle. Les spec-tateurs ont changé, ils n’hésitent pas à faire lahola, ce qui était impensable auparavant.L’ambiance particulière d’un match de rugbyn’a toutefois pas disparu (le public est bienmoins violent, la police est absente ou presquedes abords des stades). Les joueurs ont éga-lement changé, leur corps en particulier. Onpense aux calendriers bien sûr, dans lesquelsla gestuelle sportive disparaît au profit depositions lascives. C’est aussi l’émergenced’une forme d’individualisation dans un sportéminemment collectif. Le masculin change.

Il n’y a donc pas d’éternel masculin ?

Pas plus qu’il n’y a d’éternel féminin ! L’équipede rugby et plus généralement ce sport mon-trent surtout comment la masculinité, ou dumoins une forme de masculinité se construit.Il est possible de parler dans ce cas d’hyper-virilité qui, il y a peu, pouvait se manifesterpar des éléments physiques disgracieux. Ainsi,tel joueur était fier d’exhiber ses oreilles en

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M E N S U E L D ’ I N F O R M A T I O N D U S Y N D I C A T N A T I O N A L le snesup D E L ’ E N S E I G N E M E N T S U P É R I E U R - N ˚ 628 O C T O B R E 2014

chou-fleur (les deux pour le talonneur),marque physique de son engagement dans etpour le collectif, en l’occurrence la mêlée.Dans ce cas, le masculin se traduit par lecourage physique, l’engagement du corps.Du reste, le rugby suppose un corps collec-tif pendant le match, avec un temps importantde métamorphose dans le vestiaire. Sur le ter-rain, on assiste à une désérotisation des corpsqui enlève toute connotation sexuelle, enl’occurrence homosexuelle, alors même quece sport implique de très nombreux contacts,entre joueurs d’une même équipe mais aussiavec les joueurs de l’équipe adverse. Bien sûr,il faudrait tenir compte de la position sur leterrain. Les avants (i.e. ceux qui composent lapremière ligne de la mêlée) n’ont pas lamême culture du corps que des joueurs plusen retrait.

L’hypervirilité du rugby ne va donc pas sans

des éléments, comme le toucher, qui trouble

le masculin. N’y aurait-il pas du féminin

dans ce sport homosexué ?

Une première manière de répondre consisteà évoquer le rugby féminin. Quand j’ai suivides équipes féminines, pendant leurs entraî-nements, lors de rencontres sportives, j’ai puremarquer qu’elles avaient du mal à se sentirlégitimes au féminin, tant qu’elles évoluaientdans la sphère du jeu. Les noms des postesn’étaient par exemple pas féminisés, elles necontestaient pas que le trophée remis àl’équipe gagnante du championnat représen-tent des joueurs masculins, certaines nel’avaient d’ailleurs pas remarqué. Parfois, elless’insultaient même au masculin !Il y a toutefois des différences, même si cesont les mêmes règles. On peut citer le cas ducomportement sur le terrain. Le rapport à laviolence n’est pas le même. Ainsi, un coup depoing donné sous la mêlée peut être malvécu dans un match de rubgy féminin, c’est-

à-dire constituer un problème qu’il faut régler,alors qu’il n’en pose aucun pour les hommes.Au contraire, si le toucher est bien vécu par lesjoueuses, la troisième mi-temps des hommesmontre que cette caractéristique du rugbydoit être mise à distance. Ils la tournent alorsen dérision, notam-ment en parodiantdes gestes sexuels :s’embrasser, semettre la main aufesse, simuler le coïtpar derrière ; tout lemonde doit alorsfaire semblant. N’endéduisez pas quel’homophobie seraitla règle ! L’homo-sexualité existe dansle rugby comme ailleurs et elle n’est pas res-sentie comme un problème particulier. Onsait, mais on n’en parle pas. Comme dans lereste de la société, c’est le placard qui domine,ni plus, ni moins.

Curieusement pour un sport qui valorise à ce

point le combat, l’affrontement physique,

vous n’évoquez pas les différences physiques

entre les hommes et les femmes.

Parce que ce n’est pas aussi simple. Pendantlongtemps, il ne faut pas l’oublier, l’argumentbiologique a été utilisé pour exclure lesfemmes des pratiques sportives. Puis, lors-qu’il a bien fallu faire une place aux femmes,c’est une place particulière qui leur a été assi-gnée avec l’injonction de rester des femmes.Ainsi, lorsque la Fédération française de rugbya habillé les joueuses pour les déplacementsde Coupe du monde, le choix s’est porté surles tailleurs et les talons hauts. Et tant pispour celles qui n’en avaient pas l’habitude, lesentiment de bien faire devait l’emporter surcelui du ridicule ! À l’évidence, le sport contri-

bue à la pérennité de la domination mascu-line. Les noms d’équipe en témoignent. Il nes’agit pas de noms sérieux : les Pachydermes,les Bleuettes, etc. Comme si le féminin étaitune parodie au masculin.

Le sport serait-il alors une institution destinée

au maintien de l’ordre, social et genré ?

J’ai découvert le monde du sport avec leregard d’une anthropologue. Je ne connaissaisrien au rugby. Puis, en m’intéressant par lasuite à d’autres disciplines sportives, j’ai pumettre en évidence un élément récurrent : ils’agit de créations faites par les hommes pourles hommes. Depuis, je travaille sur le corps

des femmes dans lechamp sportif, sur lacapacité du sport àpolicer les corps (unlivre est prévu chezPayot), à les discipli-ner, comme diraitMichel Foucault.Mais le sport peutêtre aussi un outil delutte, un moyen derésistance contrel’ordre établi, contre

la domination masculine, notamment en don-nant la même capacité physique, en ame-nant à ne plus craindre le corps de l’autre.L’histoire a donné aux hommes un tempsd’avance. Dans les disciplines depuis long-temps féminisées, les performances habi-tuelles des femmes aujourd’hui sont lesrecords des sportifs d’hier. Il ne s’agit pas deprôner l’indifférenciation des sexes, mais sur-tout de montrer les effets possibles d’uneindifférenciation des pratiques. Dans un autredomaine, l’émulation des filles qu’on ne des-tinait pas auparavant à l’apprentissage desmathématiques, en côtoyant les garçons sur lesmêmes bancs d’école, a donné les résultatsqu’on connaît. Et on ne leur a pas appliquédes barèmes inférieurs ! Une telle émulationdans le sport, en indifférenciant les attentes etles discours dès l’enfance, pourrait contribuerà changer les représentations sur les sexes età bousculer les stéréotypes de genre. Unerévolution ! l

Propos recueillis par

Christophe Pébarthe

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tEn m’intéressant par la suite

à d’autres disciplines sportives,j’ai pu mettre en évidence unélément récurrent : il s’agit decréations faites par les hommes

pour les hommes.

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Affrontement physique :une affaire d’hommes ?

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Depuis plusieurs décennies, les coureursissus d’Afrique de l’Est et d’Afrique du

Nord sont omniprésents au sommet de lahiérarchie internationale dans le domainede la course à pied. Leurs succès sont rap-portés de façon quasi invariable à un sup-posé talent inné pour les épreuves de longuedurée. Bien que très répandue, la croyance dans ledon naturel de ces coureurs est pourtantsans fondement. Après avoir opéré un retourcritique sur les différents avatars des modesd’explication naturalisants, je propose, dansmon ouvrage La Construction du « talent »,une grille d’interprétation alternative en mefocalisant sur le cas des athlètes marocains,qui ont été particulièrement performants surle plan mondial du milieu des années 1980au milieu des années 2000.Les succès de ces coureurs procèdent d’unedouble construction sociale : constructionde l’offre, tout d’abord, avec le façonne-ment de pratiquants rompus aux exigencesdu sport de haut niveau au Maroc. Loin derelever d’une génération spontanée, l’émer-gence de quantités d’athlètes compétitifsdans ce pays s’enracine dans une longue his-toire qui a débuté durant le Protectorat et quia débouché, dans les années 1980, sur lacréation d’un système étatique, sans équi-valent dans les autres disciplines sportives,de détection et de formation de coureurs àpied. Construction de la demande ensuiteavec l’arrivée d’une forme tout à fait parti-culière de professionnalisme à compter desannées 1980 : celui-ci étant fondé sur uneabsence de salariat, une généralisation desrémunérations à la prime et une distributionparticulièrement inégalitaire des gains, laplupart des athlètes se retrouvent dans unesituation aussi incertaine que difficile sur leplan matériel. Cette situation a conduit à cequ’une large partie des coureurs européensdéserte le marché athlétique international,laissant ainsi la place à d’autres, à mêmed’accepter la précarité qu’il induit.L’image qui s’impose n’est donc pas celled’une supériorité foncière des athlètes afri-cains mais celle d’un remplacement des

élites athlétiques internationales. Considérerque le succès des coureurs marocains relèvede la rencontre de deux histoires indépen-dantes (celle, d’une part,du développement d’unmodèle étatique de pro-duction d’athlètes auMaroc et celle, d’autrepart, de l’émergence d’unmodèle professionnel trèsparticulier en athlétisme)permet d’ailleurs d’expli-quer pourquoi les athlètesmarocains ont progressi-vement cessé d’occuperles avant-postes dans lescompétitions internatio-nales : quand les condi-tions qui sous-tendaient leur réussite ontcessé d’être réunies, leurs résultats ontdécliné.Ces considérations socio-historiques attestentque les capacités de performance sont mode-lées par des dynamiques historiques quidépassent les athlètes. Une sociologie de lagenèse sociale des succès sportifs ne peut

cependant pas se contenter de décrire lesconditions de réussite d’un groupe. Elle sedoit d’intégrer une réflexion relative à la

manière dont, à l’intérieurde cette population, sedistribuent les devenirsindividuels, sous peine devoir resurgir, au seinmême d’un cadre d’inter-prétation conçu pour leséliminer, des résidus d’ex-plication par le don.C’est dans cette optiqueque j’ai mené uneenquête ethnographiquede longue durée, aussibien au Maroc qu’enFrance, auprès d’athlètes

de rangs différents (depuis le débutant jus-qu’au champion olympique) afin de mettreen évidence la manière dont se construitune carrière sportive et comment les aspi-rants à la réussite se différencient entre eux.Ces investigations ont permis de montrerque les ressources nécessaires à la perfor-mance dépassent de beaucoup le strict cadrede la scène athlétique. Depuis l’inégale pro-pension à endurer l’ascétisme qu’exige lapratique intensive de la course à pied jusqu’àla possession d’appuis qui facilitent l’inser-tion dans le circuit compétitif international,les dispositions et ressources à posséderpour développer et faire valoir ses capacitésathlétiques sont aussi nombreuses quevariées. Comprendre le déroulement d’unecarrière sportive impose donc de la penseren relation avec les autres dimensions del’existence de l’athlète et en lien avec les dif-férentes ressources dont il dispose. C’est enprocédant de la sorte que l’on peut mettre aujour l’ensemble des conditions sociales qui,bien qu’apparemment extérieures à la car-rière sportive, déterminent son déroulementet son issue. l

*La Construction du « talent ». Sociologie de la

domination des coureurs marocains, Paris,

Raisons d’agir (cours et travaux), 2012.

tL’image qui s’impose

n’est donc pas celle

d’une supériorité

foncière des athlètes

africains mais celle

d’un remplacement

des élites athlétiques

internationales.

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Une question de talent ?De la domination des coureurs marocains

Manuel Schotté nous explique pourquoi la course de fond a été particulièrement dominée

par les coureurs marocains et pourquoi cette discipline s’est développée dans

certains pays d’Afrique. L’auteur a enquêté sur le terrain et livre plusieurs explications

de ces performances sportives.

‘ par Manuel Schotté*, MCF à l’Université de Lille 2 et chercheur au CERAPS

Hicham El Guerrouj, à gauche,double champion olympiqued’Athènes en 2004 ; ici à côtéde Carlos Garcia

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Il ne s’agit pas d’être inutilement alarmiste,mais juste un peu lucide. Résumons.

La dernière réforme de la formation a insti-tutionnalisé la « perte » des étudiants quiconstituaient le gros des effectifs auparavant.Aujourd’hui, toutes les UFR ne sont paslogées à la même enseigne. Ici l’inscriptionadministrative est à l’ESPE, là à l’UFR, icic’est la guerre entre l’UFR et l’université, làtout se passe pour le mieux dans le meilleurdes mondes. Dans tous les cas, l’UFR n’estplus seule dépositaire du master préparantau concours de professeur d’EPS commeça l’était avant 2013. Stricto sensu, c’est la find’une filière complète « éducation-motri-cité » au sein des STAPS. En clair, la ques-tion de l’éducation et de l’intervention, quiest au fondement de la discipline, est som-mée d’être exclue des STAPS pour « appar-tenir » désormais aux ESPE (dont les STAPSfont partie, ce qui rajoute à l’imbroglio),qui sont censées avoir une partie éducative(non enseignante) totalement impensée. Aminima, il est anormal qu’il ne soit pluspossible en STAPS d’avoir un master qui for-merait à l’intervention « éducative » dansles APSA.Il est évident que ceux qui, historiquement,se sont battus contre cette filière, se réjouis-sent. Mais il n’est pas sûr qu’il n’y ait pasd’incidence à terme sur les STAPS dans leurensemble, car on pourrait imaginer un écla-

tement des STAPS dans différents domaines.Le jeu de regroupements de libellés delicence et de mas-ter, sous couvert de« lisibilité », n’est passans risque : celuid’une invisibilité. LeSNEP, pour sa part,a milité pour lacréation d’undomaine « STAPS ».Historiquement, sur le plan épistémologique,au plan structurel, tout permet de justifier l’ir-réductibilité de ce domaine aux autres.

Dernier point qui interroge, c’est la pers-pective de carrière en STAPS, qui influence

évidemment lesorientations en mas-ter et en doctorat.En clair, lessciences de la vie(neurosc iences ,physiologie, biomé-canique...) sontvalorisées dans les

qualifications des MCF, et encore plus chezles PR. Chez ces derniers, on trouve sur lapériode 2008-2011 (rapport du CNU),23 qualifiés en physio, contre 0 en sciencesde l’éducation, 8 en socio, 4 en histoire. Latendance est la même au niveau des pro-motions. Au bout du compte, on peut poser uneénième fois la question : quelle est l’identitédes STAPS ? On répondra : cinq filières...ce n’est pas un argument « universitaire » quitient la route. Que veut-on faire de cette dis-cipline ? Le SNEP-FSU invite tous les acteursà se mettre autour d’une table, avant que lafilière ne soit broyée par la machine qui n’aque Shanghai en ligne de mire. l

Quel avenir pour les STAPS ?

L’Université subit des bouleversements qui ont des impacts différents selon les disciplines

universitaires. Les STAPS, dont l’assise réelle et symbolique n’est pas très large, peuvent être à

terme dans une situation difficile qui pourrait déboucher sur une disparition pure et simple.

tStricto sensu,

c’est la fin d’une filière complète

« éducation-motricité »

au sein des STAPS.

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‘ par Christian Couturier , secrétaire national du SNEP-FSU

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L’association EPS et sociétéD

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Le SNEP-FSU a créé une association, le centre EPS & Société, quiregroupe toutes celles et ceux qui recherchent un espace dedébat original et exigeant sur l’EPS, le sport scolaire, leursrapports aux pratiques sociales sportives et artistiques. Ce qui nous réunit  : l’émancipation detoutes et tous. L’association publie la revue Contre Pied,reconnue et citée de plus en plus souventdans les copies du CAPEPS et de l’agréga-tion ! Elle organise séminaires et colloques,impulse la réflexion en s’appuyant à la foissur les chercheurs et les enseignants pourmieux comprendre la réalité de l’EPS, dumétier d’enseignant, du sport scolaire, etappréhender simultanément ce qui se joued’essentiel et d’humain dans le champ despratiques sociales artistiques et sportives.Universitaires ou enseignants de statut

second degré, si ces questions vous intéressent… vous pouvezadhérer et recevoir la revue !Contact : [email protected]

Sur le site : • De nombreuses ressources  sur les APSA.• Un dossier qui change tous les trois mois(bientôt, « Préparez-vous aux concours »)avec des contributions théoriques, poli-tiques, sociologiques, historiques... • La mise en ligne des Contre Pied épuisés(EPS, quelle référence culturelle, Nata-tion, Sports co, Compétition, etc.). • Un kiosque pour suggérer des lectures. • Les formulaires pour adhérer et/oucommander nos numéros.

M E N S U E L D ’ I N F O R M A T I O N D U S Y N D I C A T N A T I O N A L le snesup D E L ’ E N S E I G N E M E N T S U P É R I E U R - N ˚ 628 O C T O B R E 2014

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VACATAIRES

Coup de balai à l’ENSAE et àl'Institut Polytechnique de Grenoble

Les statuts de vacataire de l'enseignement supérieur sont un paradispour les employeurs publics. Les grands écoles usent et abusent desvacataires en toute quiétude. Le but est d’économiser en rémunérantun travail sans payer les cotisations sociales.

‘ par Heike Romoth etFrançoise Papa,membres du secteurSituation des Personnels

RAPPORT D’INFORMATION SÉNATORIAL SUR LA LOI SAUVADET

Un an après : un bilan très décevantDans notre précédent supplément au mensuel de février, nous avionsdénoncé l’inadaptation de la loi Sauvadet pour résorber la précarité dansl’enseignement supérieur. Les conditions de titularisation prévues parla loi restent toujours trop restrictives.

‘ par Valérie Huardmembre du secteurSituation des Personnels

L ’ENSAE-ParisTech est laGrande Ecole de l’Econo-

mie, de la Statistique et de laFinance. Suite à une réorga-nisation, les vacataires delangues vivantes ont apprisde manière peu courtoisequ’ils n’étaient pas prévussur les emplois du temps dela rentrée, alors qu’ils effec-tuaient des tâches d’ensei-gnement pérennes depuis denombreuses années. Certainsn’avaient plus d’emploi prin-cipal depuis longtemps. Leurrecrutement en tant quevacataire était devenu illégalet ils auraient dû êtreemployés sous un autre sta-tut. D’autres ont toujours leuremploi principal, mais leursenseignements ne corres-pondent en rien à la défini-tion de la vacation, voilà cequi inquiète l’administration.Les critères retenus dans lesjurisprudences sont les sui-vants : exécution d’un actedéterminé, absence de conti-

Le rapport d’informationsénatorial publié le 28

juillet dernier fait le bilan àmi-parcours de l’applicationde la loi Sauvadet. Celle-cidevait lutter contre la préca-rité dans la fonction publiqueet elle aboutit à la conforter.

Même si les ministères « ontjoué » le jeu, ouvrant 2 000postes dans l’enseignementsupérieur, on est loin ducompte, selon ce rapport, etsurtout loin des besoins quenous avions évalués entermes statistiques. En effet,les statistiques en 2011-2012du MESR annonçaient 28 121enseignants non permanentssans compter le vivier desplus précaires que sont lesvacataires. La comparaisondes chiffres montre l’ineffica-cité de cette loi qui continuede laisser sur le bord du che-min un nombre sans cessecroissant d’enseignants nonéligibles.Pour les personnels éligibles,la loi ne donne pas plus sa-tisfaction. En matière de ti-tularisation dans la Fonction

publique d’État, on constated’abord un désintérêt desagents pour la titularisationquand elle s’accompagned’une perte de revenu résul-tant de l’entrée au bas del’échelle dans la grille indi-caire des fonctionnaires etquand elle implique desobligations de mobilité. En-suite on observe une surre-présentation des agentscontractuels de catégorie Adans le processus de la titu-larisation. Il en résulte lemaintien dans la précarité desagents recrutés sur des postesd’exécution. Suite à cesconstations, le rapport nepropose aucune propositionpour accompagner la titulari-sation. En matière de CDisa-tion, les sénateurs constatentque l’automaticité prévue par

la loi n’est pas immédiate, ceque nous confirmons vu lenombre d’agents contractuelsnous demandant d’intervenirpour faire appliquer la loi ausein des Universités.Le rapport conclue que le15e plan de titularisation de-vrait répondre au protocolesigné le 31 mars 2011 entrel’État et six organisations syn-dicales. Cette conclusion esttotalement surréaliste dans lesens où les trois axes de cetaccord ne sont pas respec-tés. Ceux-ci, rappelons-leétaient formulés ainsi : ap-porter une réponse immé-diate aux situations de pré-carité constatées ; prévenirleur reconstitution ; amélio-rer les droits individuels etcollectifs des contractuels etleurs conditions d’emploi. l

nuité dans le temps, rému-nération à l’acte, absence delien de subordination directeà l’autorité hiérarchique.Résultat : en septembre, l’EN-SAE était encore en train dechercher des vacataires surdes listes de diffusion de spé-cialistes.Malgré le changement degouvernement il y a deux ansdéjà, la situation des vaca-taires de l’enseignement su-périeur n’a pas évoluée, com-me le montre le cas del'ENSAE, mais aussi celui del’Institut Polytechnique deGrenoble où le même constatest fait : on se débarrasse devacataires de langues ayantpour certains plus de quinzeans d’ancienneté. Motif offi-ciel : « l’enseignement deslangues a été ré-organisé etnous n’avons plus besoin devos services ». Après vingtans de service, certains sontremerciés sans justification nicourrier car « ils ne sont pas

personnels de l'éta-blissement » et qu'onne peut pas répondreà tout ceux qui de-mandent des vaca-tions. Et pourtant, làaussi, on recherchedes vacataires. Com-me dans biend’autres établisse-ments d’enseigne-ment supérieur quifont rimer précaritéet docilité de leurpersonnel enseignant, gare àcelui ou celle qui ose s’en-quérir de ses droits : c’est laporte assurée. À la précaritéde vacataires sans contratssur des très longues durées,on substitue une précaritéplus courte car moins sus-ceptible de conduire à desCDIs de fait.Malgré de nombreuses inter-ventions du SNESUP au mi-nistère de l’Enseignement su-périeur et de la Recherche, lasituation de ces collègues res-

te inchangée. Dans le cadredes restrictions budgétaireset des gels de postes, la va-cation est la solution miraclepour pourvoir les heuresd’enseignement au moindrecoût. De plus, l’absence d'en-gagement de la part de l'em-ployeur conduit à des situa-tions inconcevables dans unÉtat de droit : se retrouver àla porte sans préavis, ni noti-fication. La fonction pu-blique : le paradis des em-ployeurs ! l

tAprès vingt ans de service,certains sont remerciés sansjustification ni courrier car

« ils ne sont pas personnels del'établissement » et qu’on ne peut

pas répondre à tous ceux quidemandent des vacations.

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tLa comparaison des chiffresmontre l’inefficacité de cetteloi qui continue de laisser surle bord du chemin un nombre

sans cesse croissantd’enseignants non éligibles.

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Deux livres récents viennent nous lerappeler en explorant deux pôles

opposés dans la hiérarchie scolaire, celuides classes prépa d’un côté (Muriel Dar-mon, Classes préparatoires. La Fabriqued’une jeunesse dominante, La Décou-verte, 2013), celui des Sections de Tech-nicien Supérieur de l’autre (SophieOrange, L’Autre enseignement supérieur.Les BTS et la gestion des aspirations sco-laires, PUF, 2013). Deux points com-muns à ces deux pôles : la sélection àl’entrée et leur localisation dans leslycées.Cependant les classes préparatoiresaccueillent 7 % des bacheliers quand prèsd’un bachelier sur cinq (19 %) poursuitses études en STS (7 % en IUT, 32 % àl’université hors IUT et 7 % dans d’autresformations). Selon Sophie Orange, « ladimension sélective d’une filière n’induitpas nécessairement son caractère élitiste »(p. 3). Les STS sont bien des « forma-tions sélectives de masse ». C’est à ellesqu’on s’intéressera ici.Focalisées sur les trajectoires étudiantesen STS, l’auteure propose « une sociolo-gie des aspirations scolaires » consistantà « tenir ensemble l’étude des mécanismesd’élaboration des aspirations et l’analysedu système de contraintes objectives aux-quelles elles sont soumises » (p. 6). L’ana-lyse se veut à la fois longitudinale etinstitutionnelle. Longitudinale parce que fondée sur unsuivi de cohorte de neuf cent étudiantsde l’académie de Poitiers pendant troisans, de l’entrée au lycée jusqu’à sept

mois après la sortie de la formation. Unpremier résultat intéressant : au départ53 % envisageaient une poursuited’études après leur formation ; à l’arrivée,28 % sont en poursuite d’études.Institutionnelle parcequ’il s’agit de com-prendre « commentl’institution agit sur lesaspirations des étu-diants ». (p. 9).

L’ORIGINE SOCIALE,FACTEUR DÉTERMINANTAujourd’hui, « l’entréeen STS se caractérisepar une sureprésenta-tion des minorités del’enseignement supérieur que sont lesbacheliers d’origine populaire, les bache-liers technologiques et les bacheliers pro-fessionnels » (p. 17). Cela est le fruit d’unprocessus de différenciation des publicsIUT et BTS. L’observation des flux entre1970 et aujourd’hui montre la place gran-dissante prise par les bacheliers générauxdans les IUT tandis que les BTS ont vuaffluer davantage de bacheliers tech-niques puis professionnels. À cette modi-fication des origines scolaires correspondune sur-représentation des enfants desclasses populaires en STS (30 % desentrants aujourd’hui contre 18 % en IUT)et une sous-représentation des enfants decadres supérieurs (15 % contre 25 % enIUT). « Sorte d’enseignement secondaireprolongé » (par l’unité de lieu et deméthode), les STS, dont les effectifs ontgrossi, se sont banalisées tant elles assu-rent la satisfaction de « la nouvelledemande d’enseignement supérieur descatégories populaires au cours de laseconde massification scolaire des années1990. » (p. 28).Les STS apparaissent comme un pôle deprojection privilégié des bacheliers d’ori-gine populaire (47 % des élèves de ter-minale dont le père est ouvrier ont fait un1er vœu en STS). La présence de STS enmilieu rural ou à proximité des lieux devie familiaux constitue un attrait fort pourles bacheliers de milieu populaire. Deplus, la forme scolaire des STS repré-

sente une perspective d’avenir plus pro-bable pour des enfants et des parentspeu dotés en ressources scolaires alorsque l’université leur apparaît commeimpensable, car « hors champ pour une

large fraction de cesnouveaux étudiants ».(p. 53). Le « Petit supé-rieur » des STS est lelieu de rencontre entredes aspirations popu-laires pour le supérieur(conformes à la normede poursuite d’études)qui entrent en affinitéavec une forme sco-laire adaptée.Ainsi, du côté institu-

tionnel, la sélection est d’abord fondéesur le calibre de l’élève moyen qui fait« montre de retenue scolaire et géogra-phique » (p. 82). Ensuite, au cours de laformation, un travail de mise à distancede la figure de l’étudiant est opéré, sibien que les enseignants de STS privilé-gient dans leurs évaluations « le témoi-gnage du labeur contre l’aisance, l’ex-pression du travail contre le don, lamanifestation de la bonne volonté contrela précocité intellectuelle » (p. 94). LesSTS offrent l’espace-temps d’une « réas-surance scolaire » aux étudiants desmilieux populaires mais il produit aussiun « double cloisonnement avec les autresfilières de l’enseignement supérieur. Cloi-sonnement formel et explicite : la fai-blesse des passerelles, le flou des équiva-lences, l’éloignement géographique.Cloisonnement informel et implicite : letype de dispositions acquises et le type desavoirs transmis, qui les positionnent –symboliquement cette fois – à part del’enseignement supérieur » (p. 194). Encela, les STS sont un « autre enseigne-ment supérieur » isolé. Les réformesrécentes auront pour effet d’accentuercet isolement tant elles se bornent àreconduire l’aiguillage des bacheliersprofessionnels (et technologiques) versles BTS et donc à confiner une « autre »jeunesse populaire (celle des campagnesnotamment) dans cet autre enseigne-ment supérieur. l

LE MONDE DES BTS

L’autre enseignement supérieurOn ne le dira jamais assez, l’enseignement supérieur ne se résume pasaux universités. Au sortir des lycées, les élèves se présentent devant une garede triage offrant différentes voies d’accès à l’enseignement supérieur.

➔ par Fabrice Guibaud

tLes STS apparaissent comme

un pôle de projectionprivilégié des bacheliers

d’origine populaire (47 %des élèves de terminale dont

le père est ouvrier ont faitun premier vœu en STS).

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Des élèves d’une classe de BTSmultimédia préparant leur projet

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MOOC

Vecteur des communs de la connaissance ?

Le choix du modèle économique déterminera si les MOOC ne sont qu’unmirage de la démocratisation de l’accès aux savoirs et à la connaissance.

➔ par Emmanuelle Nigues, membre de la Commission Administrative

Dès le début des années 2000, denombreuses universités américaines

se sont impliquées dans des pro-grammes d’enseignement en ligne. Cequi change avec les MOOC, c’est lanécessité d’ajouter unencadrement et desinteractions entre lesétudiants. On peutconsidérer qu’il existedeux types de MOOCaux États-Unis :• Les cMOOC (c pour« connectiviste ») s’exé-cutent sur des plates-formes d’apprentis-sage open source etsont dirigés par desuniversitaires dans lecadre de leur activitéuniversitaire. Leur modèle pédagogiqueest l’apprentissage par les pairs. Ellessont associées à leurs institutions fon-datrices : Abathasca et les universités duManitoba au Canada.• Les xMOOC sont des versions enligne de formats traditionnels d’ap-prentissage (cours magistral en vidéos)sur des plates-formes de logiciels pro-priétaires appartenant à des entreprisesprivées. Elles disposent de relationscontractuelles et commerciales avec lesuniversités. Les trois principaux four-nisseurs de plates-formes sont edX,Udacity et Coursera.Les MOOC ne sont ni une révolutiontechnologique, ni une révolution péda-gogique, la véritable révolution résidedans la volonté des établissements dedonner accès gratuitement à leursenseignements via le Web. Il ne fautpas oublier qu’ils ne peuvent existerqu’en passant par une plateforme.Cependant, les modèles économiquesde ces plateformes divergent. Aprèss’être centrées principalement sur l’en-seignement supérieur, les plateformessemblent, aujourd’hui, s’orienter vers lesecteur privé. Après une logique d’investissement, ilfaut maintenant trouver les businessmodels, et l’espoir d’une démocratisa-tion de l’enseignement supérieur avec

un accès gratuit et mondialisé à laconnaissance grâce aux MOOC sembles’éloigner peu à peu. Le changement demodèle économique semble désormaisamorcé aux États-Unis, alors que

le concept arrive àpeine en France. Onva donc plutôt versdes modèles Free-mium, comme ceuxproposés pour certainsabonnements aux res-sources numériquesdans les bibliothèquesuniversitaires.Le MOOC est l’avatarde la surabondance dusavoir, accessible partous sur Internet. Si lemodèle économique

reste à créer, les MOOC ne vont pasdisparaître. Entre altruisme et marketing,les établissements utilisent les MOOCcomme un outil de communication auservice de la concurrence. Communs dela connaissance versus marchandisa-tion du savoir : l’enseignement supé-rieur français doit se décider.Se pose alors un certain nombre dequestions d’ordre pratique auxquellesles institutions et les enseignants vontdevoir répondre. Les MOOC sont géné-ralement développés par un ou deuxprofesseurs, mais qui est propriétaire ducours ? C’est donc un enjeu de pro-priété intellectuelle qui est posé : soiton utilise les licences Creatives Com-mons, soit le professeur devient auteur,

l’université son éditeur et elle le rému-nère. Cependant, dans la logique desbiens communs de la connaissance, lapropriété intellectuelle fait figured’« enclosure ». Les pouvoirs publics ontalors une responsabilité dans la mise enœuvre de normes juridiques nationaleset internationales adaptées au numé-rique éducatif, dans un équilibre entredomaine public et domaine privé.La question de la certification est éga-lement problématique. Or, la tendanceforte observée dans les MOOC estl’évaluation par les pairs, donc uneévaluation horizontale. Cela remet enquestion les modes d’évaluation tradi-tionnelle de nos systèmes éducatifs.Et, le certificat ne peut remplacer undiplôme. Dans l’état actuel, la remised’un diplôme semble inadaptée aumodèle MOOC. La question de l’éva-luation est primordiale. Comment éva-luer massivement les connaissances etles compétences acquises par chaqueapprenant ? La certification est ellegratuite ? Si le modèle semble s’essouffler auxÉtats-Unis, la Chine arrive en force surle marché des MOOC. La prestigieuseuniversité Jiao-Tong de Shanghaï (cellequi a créé le classement mondial desuniversités) vient de fédérer 19 institu-tions chinoises d’enseignement supé-rieur. La Chine veut permettre à cesétudiants de suivre des cours en ligneet d’obtenir ainsi des crédits. On entrealors dans une autre dimension où leMOOC vient remplacer les cours enprésentiel. Là aussi, les MOOC consti-tuent un outil de promotion pour lesinstitutions au niveau mondial. EnAfrique francophone, un portail(OCEAN) propose une vingtaine deMOOC qui pallient les manques desuniversités africaines.Enfin, les MOOC ne concernent pasque l’enseignement supérieur : lesen-treprises parlent de COOC (CorporateOnline Open Courses), pour formermassivement, et à moindre coût,les salariés, et répondre ainsi aux obli gations en matière de formationcontinue. l

tLes pouvoirs publics ont une responsabilité dans

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mieux dynamiser la recherche et l’inno-vation. » Pendant que le débat parlemen-taire sur le budget 2015 s’est ouvert et àl’heure où, « dans l’enseignement supé-rieur et la recherche, la bataille de l’emploi

est déclenchée » (cf. appel intersyndicaldu 6 octobre) ce ralliement à la revendi-cation d’une réforme du CIR est évidem-ment bienvenu tant il vient renforcer unmouvement social de plus en plus large.l

NOBEL D’ÉCONOMIE

Jean Tirole, symbole del’élitisme transatlantique ?À travers ce prix, c’est tout un système que l’on récompense :le triomphe de la logique du marché concurrentiel sur laprotection des salariés. À quand un Nobel de gauche ?

améliorer le fonctionnement des mar-chés. À l’opposé d’un autre Français trèslu aux États-Unis actuellement, T. Piketty,

ses travaux ne font pasl’objet de débatspublics, même lors-qu’ils qu’ils portent surle thème central de laréforme du marché dutravail. C’est un peu letriomphe paradoxal dela dismal science(science lugubre) : le

coût d’entrée de ses travaux théoriquesest élevé et ses textes grand-public ontl’attrait des études les plus austères duministère des finances.J. Tirole a aussi contribué, avec la Tou-louse School of Economics, à importer enFrance le modèle de l’université d’excellenceà l’américaine : généralisation de l’anglaisdans les cursus, financements publics etprivés massifs captés par une fondation dedroit privé, systèmes d’incitation à la pro-ductivité scientifique (avec des gains indi-viduels indexés aux performances). Aumodèle élitiste des grandes écoles, l’éco-nomie version TSE a ainsi substitué, oumieux hybridé, une autre forme d’élitisme,que l’on pourrait appeler l’élitisme transat-lantique. Le Nobel 2014 consacre cettehybridation soutenue par les pouvoirspublics, les grandes entreprises et encenséepar les médias et le monde de la finance. l

Après Gérard Debreu (1983) et MauriceAllais (1988), J. Tirole est le troisième

Français à obtenir le Nobel d’économie.Comme tout lauréatdudit prix, il devientun oracle appelé à seprononcer sur lesgrandes questions éco-nomiques et socialesdu moment.Faisant suite à un nor-malien mathématiqueset un polytechniciendu corps des Mines, c’est un polytechni-cien du corps des Ponts qui a doublé lesjeunes « nobélisables », désormais plussouvent normaliens : T. Piketty, E. Duflo,P. Aghion sont les plus cités (la biblio-métrie permet de déterminer les candidatssérieux au Nobel). Le système desgrandes écoles continue de produire desreprésentants de l’excellence telle qu’elleest définie dans la discipline : haut niveaude mathématisation, publications dansdes revues américaines, carrières aumoins partiellement effectuées aux États-Unis (naturalisation dans le cas deDebreu, thèse et début de carrière auMIT pour Tirole) sont les préconditionsd’accès au Graal.J. Tirole incarne une science économiqueà double face : d’un côté, elle « racontedes histoires » à partir de fictions mathé-matiques, de l’autre, elle intervient pour

ACADÉMIE DES SCIENCES

L’Académie propose de réformerle Crédit Impôt Recherche

Le communiqué de presse de l’Académie des sciences du 8 octobre 2014 a faitpart de ses inquiétudes concernant la situation de la recherche et suggèreune nouvelle définition du rôle du CIR.

➔ par Fabrice Guilbaud

➔ par Frédéric Lebaron, professeur de sociologie, Université de Versailles Saint-Quentin.

L’Académie des sciences avait surpris enpréconisant la suppression de l’AERES

en septembre 2012, période marquée parle lancement des Assises de l’Enseigne-ment supérieur et de la Recherche,pseudo-concertation qui ne fut que pré-texte à l’adoption de la loi Fioraso pro-mulguée en juillet 2013.Mais l’Académie des sciences ne se pro-nonce pas seulement sur l’organisationde la recherche au plan institutionnel, elles’exprime également sur son budget. Le 16décembre 2013 – le SNESUP était alors enpleine campagne contre l’austérité dansl’enseignement supérieur et la recherche –elle envoyait un « “cri d’alarme” sur lefinancement de la recherche », titre d’uncommuniqué qui, pointant la « diminu-tion constante » des « crédits récurrents » etla baisse concomitante des crédits del’ANR, précisait en conséquence que « lesrestrictions apportées mettent directementen péril la vie d’équipes et de laboratoires ».Ce cri d’alarme n’était assorti d’aucuneproposition mais concluait sur la nécessitede « sanctuariser la recherche ».Le 8 octobre dernier, dans un communi-qué au titre plus timide, « Inquiétudesdans les laboratoires de recherche », l’Aca-démie des sciences regrette que « l’Agencepour l’Évaluation de la Recherche et del’Enseignement Supérieur semble avoirseulement changé de nom ». L’illustreinstitution s’inquiète également, du boutdes lèvres, de la question de l’emploiscientifique lorsqu’elle mentionne que« la France commence à perdre lesmeilleurs talents des nouvelles généra-tions ». Surtout, sur l’appréciation de lasituation budgétaire, l’Académie enfoncele clou (« la situation ne fait hélas ques’aggraver ») et sort quelque peu de samesure habituelle en se positionnant clai-rement au sujet du CIR : « une partie ducrédit-impôt-recherche, servant actuelle-ment de soutien à des secteurs éloignés dela recherche scientifique et de l’innova-tion, pourrait être redirigée vers les besoinsréels des laboratoires tout en continuantà soutenir les jeunes entreprises inno-vantes. Une redéfinition du périmètre ducrédit-impôt recherche permettrait de

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accréditées dans les agences de l’ONU,aux cotés des internationales syndicaleset des associations de scientifiques.Le conseil exécutif 2015 se déroulera àBarcelone et traitera de l’énergie, ques-tion clef pour la justice, la paix et lasurvie même de l’humanité. l

Ce fut un séminaire public dédié authème « science(s) et éducation »,

autrement dit à une réflexion sur le sujetdélaissé, voire méprisé, de l’éducationque l’humaniste Erasme qualifiait pourcette raison de « partie la plus cras-seuse » de la philosophie. Au moment où les connaissances issuesdes recherches scientifiques n’ont jamaiseu autant d’importance, puisqu’elle sous-tendent et déterminent les mutationséconomiques et culturelles qui affectenttous les pays de la planète, il est crucialde réfléchir aux finalités, conditions eteffets de l’éducation. Tout particulière-ment en matière de sciences et de tech-niques, dont dépend la vie (et survie)quotidienne des individus dans dessociétés dites de « l’information », sujetsur lequel le séminaire a voulu poser desanalyses lucides et donc critiques. S’il est un bien commun de l’humanité,

ce sont bien les connaissances a d’em-blée soutenu Jean-Pierre Kahane, et ils’agit, a-t-il insisté, de « s’approprier col-lectivement » cette source de richesseque constitue la connaissance, afin d’ins-tituer une véritable démocratie fondéesur le « partage des savoirs ». Se référantà la démocratie selon Montesquieu, lemathématicien et académicien a pris lecontrepied du modèle de « l’économiede la connaissance » dont il a dénoncéavec une rare vigueur les risques deconcentration et de confiscation du pou-voir. La réflexion de Jean-Pierre Kahanea bien évidemment affronté la place etle rôle crucial de l’Internet dans cettenouvelle configuration du savoir. Mais ila d’abord tenu à distinguer rigoureuse-ment le « savoir » de l’« information ». Ladifférence est majeure puisque mêmequand elles sont correctes et scientifi-quement fondées (comme celles de la

météo), les informations ne constituentpas un savoir et servent davantage à« formater en douceur ceux qui en sontles bénéficiaires ». Le conférencier aensuite déconstruit le grand mythe de ladémocratisation du savoir par l’Inter-net, censé faire sauter les obstacles del’accès aux connaissances et permettreaux chercheurs de diffuser librementleurs travaux. Une vision moins eupho-rique a été décrite, tout en soulignant legrand espoir que représentent les« archives ouvertes ». Celles-ci favori-sent ce grand dessein de l’appropriationcollective des connaissances pourlaquelle Jean-Pierre Kahane milite. Nepouvant retracer l’intégralité et larichesse de ce séminaire, je me per-mets de renvoyer le lecteur au site inter-net de la FMTS pour en prendreconnaissance et poursuivre cette revi-gorante réflexion. l

Séminaire « Science et éducation »On ne saurait suffisamment saluer l’initiative de Jean-Paul Lainé d’avoirorganisé ce séminaire dans le cadre des travaux du Conseil exécutif de la FMTSréuni à Paris pendant une semaine.

➔ par Isabelle de Mecquenem

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4. La crise environnementale, l’épuise-ment des ressources, les dérèglementsclimatiques, la question de l’énergie doi-vent etre présentés en évitant le doubleécueil que sont le scientisme et l’anti-science.Le premier bilan dressé par le secrétariatest très positif : les points soulignés sontla participation, l’accueil et les condi-tions de travail, la qualité des débats duCE et du séminaire, le travail par groupesthématiques et la feuille de route adop-tée comprenant les textes à finaliser lorsde la prochaine conférence télépho-nique de ce secrétariat international.Une nouvelle étape a été franchie aprèsl’élargissement de la Fédération produitlors de l’assemblée générale de Russie.Il faut poursuivre son développementnotamment vers les scientifiques du sec-teur privé et définir plus précisémentson rôle, sa spécificité parmi les ONG

FÉDÉRATION MONDIALE DES TRAVAILLEURS SCIENTIFIQUES (FMTS)

Réunion du Conseil exécutif annuelDu 22 au 24 septembre s'est tenu le conseil exécutif annuel de la FMTS, à Meudon-Bellevue, dans les locaux du CNRS, à l’invitation du SNCS-FSU. 23 membres sur 30 avaient fait le déplacement, représentant 15 organisations de11 pays ; en outre 16 invités ont participé aux travaux.

Les débats en plénières et les groupesde travail ont porté sur :

1. Le développement du recours à laguerre comme moyen de résolution d’unproblème politique ou économique avecle rôle historique dévastateur des puis-sances occidentales.2. La crise politique, économique etsociale qui se développe en Europe :crise prétexte à la marchandisation de larecherche, à la remise en cause dumétier de chercheur permanent et à laprécarisation généralisée.3. Le développement du « repli sur soi »,de l’intolérance et de l’irrationnel sansaucun doute provoqué par la mondiali-sation qui – telle qu’elle est mise enœuvre – tend à uniformiser, standardiseret à broyer les plus faibles. En outre, lesgrands moyens d’information et de com-munication entretiennent l’ignorance,les a priori et les confusions.

➔ par Jean-Paul Lainéprésident de la FMTS

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milieu des années 1960. Mais c’est à partirde 1979 qu’elles prennent leur formeactuelle et deviennent l’enjeu central desluttes des intermittents. Les premières misesen cause par le CNPF (ex Medef) et les pre-mières manifestations d’intermittents datentde 1986. Cela fait près de trente ans quedure ce conflit social qui se ranime à chaquefois que le patronat tente de supprimer oude faire reculer ces droits au chômage adap-tés à l’emploi discontinu.

Ton analyse, à partir du cas des inter-mittents, consiste aussi à donner desorientations de réformes et/ou de luttespour d'autres travailleurs ?L’expérience vécue depuis longtemps parles intermittents du spectacle est devenuecelle de millions de salariés « intermittents del’emploi ». Chaque mois, sur 5 millions dechômeurs recensés par Pôle Emploi, 1,7 mil-lions sont en « activité réduite » et un alloca-

INTERMITTENCE DU SPECTACLE ET PROTECTION SOCIALE

ENTRETIEN AVEC Mathieu Grégoire(1)

Maître de conférences en sociologie, université de Picardie Jules-Verne

L’accord sur le régime d’assurance chômage des artistes et techniciens du spectacle,signé par le patronat et trois syndicats (CFDT, FO, CFTC) le 22 mars 2014, a ranimé

un cycle de luttes débuté en 1986. Son enjeu principal, une sécurité salariale adaptéeà la discontinuité de l’emploi, permet de s’interroger sur la généralisation possible

de ce modèle à la situation de millions de salariés « intermittents de l’emploi ».

tLa lutte des intermittents révèle

un enjeu crucial pour tout lesalariat car elle esquisse une autresortie possible de la précarité et

du chômage de masse.s

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Quels sont les enjeux, au cours duXXe siècle, des luttes des intermittents ?L’enjeu de leurs luttes a toujours été lemême : trouver les moyens d’assurer unecondition sociale digne et une sécurisationdes salaires à des travailleurs dont l’emploi estdiscontinu. Mais les moyens privilégiés poury parvenir ont beaucoup varié. Je distinguetrois grandes logiques. La première, qui pré-vaut dans l’entre-deux-guerres, consiste soità imposer une « souveraineté syndicale » surle marché du travail grâce à une syndicali-sation massive qui permet d’opposer auxemployeurs une discipline et une solidaritésans faille, soit à créer la rareté de manièremalthusienne sur le modèle des professionsrèglementées. La deuxième logique, quidomine jusqu’au début des années 1980, aété celle de la promotion d’une stabilisationde l’emploi. Puisque les droits sociaux sesont fondés en France sur le modèle de l’em-ploi stable, les syndicats du spectacle sontalors tentés de réduire la spécificité de l’in-termittence et de promouvoir un emploi plusstable. La troisième logique s’appuie sur lerégime d’indemnisation chômage et consisteà défendre la socialisation du salaire : certesl’emploi demeure discontinu mais un salaireindirect permet de lisser les droits et assureune relative stabilité des ressources. C’estcet enjeu principal qui mobilise les intermit-tents depuis près de trente ans.

Comment s'est mis en place le statutactuel, par qui et quand a-t-il été atta-qué ?Il n’y pas de « statuts » simplement des «annexes » au règlement de l’assurance chô-mage qui établissent une indemnisationadaptée à la discontinuité de l’emploi desintermittents. Cette adaptation se justifie parle fait qu’en droit du travail le CDD estconsidéré comme la norme dans un certainnombre de professions du spectacle. Ledroit ne fait là que sanctionner un usage his-torique car les artistes du spectacle ont tou-jours connu une intermittence de leuremploi. Les « annexes 8 et 10 » des artisteset techniciens du spectacle sont nées au

taire du RSA sur trois travaille. Or, dans le« modèle social français », qui s’est largementconstitué sur la base de l’emploi stable, la dis-continuité de l’emploi est un handicapmajeur : elle se traduit par des salaires faibleset incertains doublés d’un accès restreint à laprotection sociale.Dans ce contexte, la lutte des intermittentsrévèle un enjeu crucial pour tout le salariat carelle esquisse une autre sortie possible de laprécarité et du chômage de masse. Cettelutte nous incite à prendre acte du fait, qu’aupoint où nous en sommes, il est illusoire depenser qu’il soit possible de créer les sept mil-lions de CDI nécessaires au retour au pleinemploi. Surtout, faire de ce très hypothé-tique plein emploi la condition préalable à laconstitution de nouveaux droits revient à yrenoncer. À l’inverse, le cas des intermittentsincite à la constitution d’un deuxième pilier dumodèle social capable d’assurer, pour tous lessalariés à l’emploi discontinu, une continuitédu salaire et des droits sociaux. Il ne s’agit pasde dire « tous intermittents » mais de penserune « flexi-sécurité » progressiste dans laquellela frange la plus flexible du salariat bénéfi-cierait d’un salaire socialisé permettant defaire en sorte que ce qui représente aujour-d’hui une menace, la précarité, devienne uneposition sinon enviable au moins acceptablepour les salariés.

Quel est l'enjeu immédiat des rencontresentre représentants patronaux et syn-dicaux gestionnaires de l’UNEDIC dansle cadre de la commission nommée parM. Valls l’été dernier ?C’est de faire en sorte que les premiersconcernés, les intermittents, puissent enfinfaire entendre leurs propositions. Ce qui atoujours été impossible dans le cadre de lagestion « paritaire » de l’assurance chômagequi confère au MEDEF un rôle prédominantdans la prise de décision. l

Propos recueillis par Fabrice Guilbaud

(1) Auteur de Les Intermittents du spectacle.Enjeux d’un siècle de lutte, Paris, La Dispute,2013.

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22UNE PERSPECTIVE ANALYTIQUE

Le système inégalitaireUn ouvrage précieux réunit deux cent-quinze auteurs et présenteen cinq cents entrées un saisissant tableau des inégalités.

La conscience de l’étendue et duchamp des inégalités, de leur per-

pétuation, voire de leur aggravation,ne saurait suffire. Il faut, en effet,pour les combattre efficacement, unevision aussi précise que possible desdomaines de la vie sociale concernéset des liens qu’ils nourrissent entreeux. C’est à ce travail, à la fois des-criptif et normatif, que se livrent lesnombreux auteurs réunis par AlainBihr et Roland Pfefferkorn dans cetrès précieux Dictionnaire des inéga-lités. On peut difficilement trouver,dans la sociologie française contem-poraine, de guides plus avertis.L’étude de cette problématiqueoccupe les deux directeurs depuis detrès nombreuses années et leursapports sont décisifs. Il s’agit priori-tairement de dévoiler les mécanismessociaux qui produisent les inégalitéset proposer des politiques socialescapables de les combattre, sans pourautant négliger la lutte contre lesdiscriminations grâce aux outils dudroit. On se référera, dans cette pers-pective, parmi beaucoup d’autres,aux items « Libération », « Emancipa-tion » et « Justice », ce dernier étant décliné dans nombre deses dimensions (avec, néanmoins, une absence : pas d’entréespécifique consacrée à la justice sociale). L’étude, notons-le,ne se limite pas au cadre national, et c’est heureux tant nousavons besoin d’une théorie de la justice globale (« Sen » et« capabilités » ne sont heureusement pas oubliés).La diversité des registres étudiés, avec la minutie qu’autorisecelle des spécialistes mobilisés (provenant majoritairement dessciences sociales, mais n’oubliant ni les philosophes, ni lesjuristes, ni même les médecins) ne laisse aucun regret sub-stantiel. Pour reprendre une typologie bien connue, on peutessayer de cerner en trois mots les domaines couverts :l’avoir, le savoir et le pouvoir (à cet égard, la pauvreté et laprécarité constituent de parfaites démonstrations des liensstructurels entre les différents types de privations).Cette tri-partition permet aux lecteurs de suivre, selon leurs intérêts,de nombreuses pistes : celle des données chiffrées et des ana-lyses sur le patrimoine, les revenus, la richesse et la pauvreté,le chômage, l’exclusion, etc. ; celle des inégalités face àl’école en termes de sexe, mais également à travers notam-ment ses aspects sociospatiaux, sans négliger les questions del’appentissage et de la formation professionnelle ou encoredes filières scolaires ; celle enfin des possibilités de maîtrisersa vie (autonomie, espace, etc.), sans lesquelles la citoyennetéest vidée de sa substance. Mais les items étudiés débordent

cette tripartition comme en témoi-gnent les développements consacrésau racisme, à la xénophobie, à l’eth-nologie, à l’esclavage, à la prison ouencore à l’universalisme.

TOUTES LES DIMENSIONSDES INÉGALITÉS SOCIALESL’apport essentiel de l’ouvrage est dedégager le caractère systémique desinégalités. Les auteurs établissentcette systémicité en montrant quenous avons affaire à un processuscumulatif, lequel exprime la relativespécificité du néolibéralisme : lesprivilèges s’accumulent chez les plusaisés tandis que, à l’autre pôle del’échelle sociale, ce sont les handi-caps qui s’additionnent. Le systèmedes inégalités dispose ainsi d’unegrande capacité à se reproduire degénération en génération. Ainsi lesinégalités face à la santé sont large-ment déterminées par celles desconditions de travail. Ou encore lesinégalités face au logement ont desconséquences bien connues sur laréussite scolaire. Comme A. Bihr etR. Pfefferkorn l’écrivaient dans un

livre antérieur, « par le biais du capital culturel et scolairequ’elle transmet, chaque catégorie sociale détermine puis-samment la destinée des individus qui en sont issus : plusl’origine sociale d’un individu est élevée, plus il aura dechances d’atteindre un niveau d’études élevé et, compte tenude la liaison forte entre formation et emploi, plus il pourraatteindre lui-même une position sociale élevée. Et l’inversese vérifie tout autant »(1). L’existence de tels rapports inégalitaires pose évidemment laquestion de la légitimité de l’ordre social qui les fondent,autrement dit du phénomène de domination qui en assure lapérennité. Et, à cet égard, on peut considérer la dominationmasculine comme paradigmatique. Malgré le développe-ment de la scolarisation des filles, l’entrée massive desfemmes dans l’activité professionnelle et la maîtrise de lafécondité, les hommes continuent, dans l’espace public,d’accaparer l’essentiel des positions de pouvoir et laissent lesfemmes, dans l’espace privé, assurer la grande majorité destâches. Il n’est pas exagéré de dire que la division sexuelledu travail explique largement la perpétuation du statut d’in-fériorité de la femme.On l’aura compris, la lecture est vivement recommandée, tantla thèse est solide et les chemins qui l’étayent diversifiés. l

(1) Déchiffrer les inégalités, Paris, Syros, 1999, p. 97.

‘ par Alain Policar

tL’existence de tels rapports inégalitaires

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