Palomar  - intermédialité et archéologie de la vision - Antonio Costa

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  • 7/30/2019 Palomar- intermdialit et archologie de la vision - Antonio Costa

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    Palornar:intermdialitet archologie de la vision

    Antonio Costa

    R S U M Se situant dans la discussion des implications thoriques e t mthodologiques des sugges t ions de GrardGenet te e t d 'Umberto Eco, l 'a rt ic le se propose d ' tudier les; interactions entre mdias dans le sicle du cinma. En particulier, on examine l ' interaction entre lemodle c inmatographique et l 'cri ture l i t tra ire parl 'analyse d'un roman d'Italo Calvino, Palornar-, on convoque galement d'autres textes, aussi bien de l 'crivainitalien que d'autres auteurs, tous textes qui ont pourobjet l 'exprience visuelle, le regard et la reprsentationdu point de vue. On arrive ainsi tracer une sorte d'ar-chologie de la vision, avec des rfrences souterrainesaux dispositifs qui ont prpar l 'avnement du cinma(notamment la chronophotographie de Marey et le revolver astronom ique d e Jann sen).A B S T R A C TThrough a discussion of the theoret ical and methodological implications of the propositions of Grard Genet te and Umberto Eco, this s tudy proposes to correlate the interaction between mdias in the century ofcinema. In particular, the interaction between the cinematographic model and li terary writing will be examined through the analysis of a novel by halo Calvino{Palornar) and other nearly contemporary texts by thisItalian author and others, whose texts concentrate onthe visual experience, the gaze, and the representationof a point of view. The object of this essay is to trace a

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    sort of archeology of vision using references tha t und erlie the devices that paved the way for the coming of cinema (Marey's chronophotography, Jannsen's astronomic revolver, etc.).

    L'effet reboundGrard Genet te cr i t dans son Nouveau Discours du rcit,texte o il s'amuse dplaire aux partisans les plus zls de lanarratologie littraire et cinmatographique (tout en ayant t lethoricien lucide de Tune et, peut-tre, l ' inspirateur involontairede l'autre) : la diffrence du cinaste, le romancier n'est pasoblig de mettre sa camra quelque part : il n'a pas de camra. Mais , juste aprs, il se repent de cette affirmation radicale etajoute en note : Il est vrai qu'il p eu t au jou rd'h ui, " effet rebound" d 'un mdium sur l ' au t re , fe indre d 'en avo i r une (p. 49) .Il y a eu en premier lieu un effet rebound de la littrature surle cinma. Depuis sa naissance, le cinma a systmatiquementpill la littrature, tirant d'elle les histoires raconter et transposant en images, souvent pour un public analphabte, les classiques et les livres succs. Mais il a surtout cherch incorporerle dispositif de la narration littraire. Dans le cinma muet, travers les intertitres, l 'criture se glisse dans la continuit del'image. En outre, la mtaphore du livre feuillet vient renforcermaintes fois le droulement de la narration; c'est le cas, entreautres de Blud of Satan Dagbog {Feuillets arrachs au livre deSatan, 1921) par Carl Th. Dreyer, auteur qui dans sa product ion muette a su employer la parole au-del de sa fonct iond'illustration et d'explication, en la transformant en un lmentqui constitue le tissu visuel et symbolique du film. Mais avecl'avnement du cinma parlant, il devenait possible de rendrepleinement la force de suggestion de la voix en recourant au narrateur hors cadre. C'est mme par l 'emploi d'une proprit duparlant (et de la radio l) que le cinma a pu matrialiser ce que,dans le roman, on dsignera mtaphoriquement par voix narratrice et narrateur-je. L'effet rebound de la littrature sur lecinma concerne aussi, bien videmment, la critique cinmatographique, qui a transpos d'un champ l 'autre les principales

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    catgories critiques et qui a adapt au cinma, de faon plus oum oins p ertine nte, les modles interprtatifs de la littrature.Si on effectue le parcours dans l'autre sens, celui de l'effet rebound du cinma sur la littrature, on constate que les modlesvisuels ont souvent t incorpors la l i t tra ture du s icledernier, de la littrature am ricaine des annes trente et q uar ante Tcole du regard des annes soixante. Il a toutefois fallu lescontributions plutt rcentes de la narratologie pour souligner lejeu des influences mutuelles, et ce, partir des notions de focalisation, de point de vue, d'observateur, etc. Franois Jost, auteurd 'une recherche complexe sur la typologie narra t ive mi-chemin entre le roman et le cinma, a explicit son ambition deparvenir une narratologie compare (p. 9). De son ct,Genette a rappel que la narratologie moderne, qui s'est sur toutdveloppe en France, d'o elle a amplement conditionn la recherche internationale, a eu son po int de dp art dans u ne u vresouven t i n jus t emen t oub l i e , L'Age du roman amricain deClaude-Edmonde Magny 2 . Il s'agit d'une rflexion lucide sur lescond it ionnem ents mu tuels du cinm a et de la l i ttrature l'poque de Faulkner, Dos Passos e t Hemingway, mais aussi deHawks, Welles et Huston de mme que, en Europe, de Camus,Sartre et Malraux. La problmatique souleve par le l ivre deMagny a eu des chos dans la critique cinmatographique, parexemple quand Rohmer, propos de la relation entre la littrature et le cinma amricains au dbut des annes cinquante,crit que finalement la littrature rend au cinma ce que le cinma lui avait prt: [...] le got pour l 'ellipse, le trait prcis,le visuel (p. 14). Franois Jost affirme que l'application au cinma de la problmatique de la focalisation est pertinente, etmme, qu'elle trouve sa raison d'tre et son fondement dans lecinma. Affirmation paradoxale? Non, si l 'on pense que l 'emploi (mtaphorique) du mot focalisation drive de l 'optique. Enparaphrasant Rohmer, on pourrait dire que la narratolgie rendau cinma ce que le cinma lui avait prt.

    S'agirait-i l alors d 'un simple emprunt l inguist ique ? Il fautpenser qu'il y a d'autres enjeux. McLuhan nous l 'a appris, lesmdias en tant que prolongements de nos sens, changent nos relations avec le monde environnant, et donc, notre faon de luiPalomar: in term diali t e t archologie de la vision 171

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    correspondre et de le reprsenter. Comme Max Milner l 'a dmontr, les dcouvertes scientifiques et les dveloppements de latechnologie optique sont troitement lis aux configurations dufantastique dans la littrature du XIXe sicle. Mais l'ide mmedu fantastique et les techniques de sa reprsentation littrairedcoulent d'un largissement de l 'exprience perceptive, rendupossible grce aux nouveaux instruments et aux diffrentes applications de l 'optique : les microscopes, les microscopes solaireset les tlescopes dans le domaine scientifique, les fantasmagoriesde Robertson et ce qui s'ensuit dans le domaine du spectacle. Cefort condi t ionnement de l ' imaginaire visuel par l ' imaginairetechnologique se manifeste d'autant plus au XXe sicle, alors quel'imaginaire cinmatographique rsultat et point d'agrgationde nombreuses technologies joue un rle dcisif dans la construction de notre imaginaire visuel qui, comme l 'a dj dit ItaloCal vino dans un e de ses Leons amricaines^ est l 'une des composantes essentiel les de l ' imaginaire l i t traire (1988, p. 81-98).Calvino confirme ainsi, bien qu'indirectement, la pertinence etl'efficacit de la relation suppose par Jost entre le cinma et lalittrature pour dgager des catgories narratologiques significatives.Il ne sera pas ncessaire ici d'entrer dans le dtail des travauxde Genette et de Jost. Certes, il serait facile de soulever des questions de mthode par rapport des passages dsinvoltes du planmtaphorique au littral, et vice versa, qui caractrisent l 'emploide catgories comme la focalisation, le point de vue, le pointd'coute, etc., dans l 'lan d'une fureur analytique qui, par exemple, conduit Jost dcomposer la notion de focalisation de Gene t te en ocu la r i sa t ion et aur i cu l a r i sa t i on ( p . 3 7 - 5 9 ) .Disons simplement que l 'ancienne catgorie de la focalisation sefondait sur des rfrences quilibres et apaisantes l'optique,rfrences faites pour rassurer le sens commun ; tandis que l 'oculaire et 1'auriculaire de Jost, produits de l'poque des cyborgset de l 'hyperralisme, voquent d ' inquitantes tables d'anato-mie, des enchevtrements de fils, des oprations chirurgicales etdes organes artificiels. Finalement, les chercheurs sont possdspar le mme imaginaire visuel que celui des peintres, des cinastes et des romanciers.

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    Cette prolifration terminologique, tous ces petits monstreslexicaux qui se pressent autour de nous, rappellent la tratologiede Luigi Serafini o, selon la fine analyse de Calvino, [...]l ' ana tomique e t l e mcanique changent l eur morphologie (1984, p . 150) 3 . Il ne s'agit pas d'un jugement de valeur. Lesmonstres , e t avec eux les mtamorphoses e t les mtaphores ,naissent Calvino nous le rappelle [...] dans la contigutet la permabilit de tout territoire de l'existence (p. 149). Lemlange entre l'univers de l'criture et celui de la vision (les dispositifs techniques, les images reproduites, les images dessines),le rsultat de cette contigut, de cette permabilit dont nousparle Calvino propos de Serafini, nous renvoie avec insistance Palomar.Palomar ? Q ui ?Qui est ce monsieur Palomar, s inon un pet i t m o n s t r e comme ceux de la tratologie du peintre et dessinateur Luigi Serafini ? Comme les monstres de Serafini, avec lesquels il partageles traits nets mais schmatiques des figures des bandes dessines, monsieur Palomar a un corps qui semble ne pas se terminer par la tte, mais par un trange dispositif optico-mcaniqueou lectronique. Une camra, peut-tre, ou une camra vido.Ou encore un tlescope, ou un capteur fibres optiques. Plussimplement, s 'agirait-il d'une miniaturisation du miroir du tlescope de ce mont Palomar dont i l est l 'homonyme? Dans cejeu entre le subjectif et l ' instrumental, et mme dans la mtaphore constitutive du personnage, on recherche une sorte d'objectif corrlatif d'une vue sans sujet, ou encore de l'anantissement de la subjectivit en une fonction perceptive : [...] le moine serait-il rien d'autre que la fentre travers laquelle le monderegarde le monde ? (1985, p . 112)4 .Dans les minutieuses descriptions de Calvino, le regard demonsieur Palomar semble parfois bouger avec une rgulari tchronomtrique, comme le regard de la camra dans les panoramiques guids par la perfection gomtrique des paliers billes,et dans les volutions de la steady cam associant d'abstraites rgularits une lgret liquide. Plus souvent, les dispositifs voqus par le regard de monsieur Palomar ont quelque chose

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    d'ancien. Des stades primitifs de l 'volution technologique semblent ressortir dans les comportements et les obsessions de ceproduit terminal de l 'ge de la vue mcanique, et des modlesprcdents de l 'volution biologique se manifestent dans descomportements humains, selon les thories d'Henri Laborit , quiont inspir Mon oncle d'Amrique (Alain Resnais, 1980). Chapitre aprs chapitre, on pourrait aussi dire squence aprs squence, monsieur Palomar semble tre destin parcourir denouveau les lieux, les stades de cette obsession visuelle qui soudedans une continuit floue et ambigu la fin du XIXe sicle celledu XXe sicle. Peut-tre, parce qu'il y a de la part de Palomar lechoix de se construire un rapport au monde limit l 'observation des formes visibles (1985, p. 56) 5 , son itinraire est-il destin passer maintes fois par les lieux figs de cette prminencedu visible qui a domin l ' imaginaire scientifique pendant un sicle et qui se conclut avec l'invention du cinma. Ainsi, le regardde Palomar semble parfois fonctionner comme le fusil chrono-photographique d'Etienne J. Marey; et d 'autres fois, comme lerevolver pho tog rap hiq ue de Pierre-Jules C . Janssen.

    Monsieur Palomar la plage, devant le problme de la lecture d'une vague , semble revivre toutes les obsessions de la recherche opt ique-physiologique du professeur Marey, dont lep remie r f i lm chronopho tograph ique s ' i n t i t u l e j us t emen t LaVague (1890). Grce ses recherches sur l ' impression photographique du mouvement, Marey figure parmi les pionniers du cinma. Ces recherches l 'ont amen la mise au point d'un systme d 'enregis t rement ( le chronophotographe) e t l 'bauched'un systme de projection des images en mouvement. Mareytait un mdecin, un physiologiste : il se proposait d'analyser lemouvement, de traduire en courbes et en diagrammes les aspectsque l 'il humain, trop plong dans le tourbillon de la vie, nepouvait saisir et fixer. S'il a abandonn ses recherches sur leprojecteur chronophotographique, c 'est qu' i l ne voyait aucunintrt projeter sur l'cran la vie telle qu'elle est. Son idal at atteint quand [...] les images animes se sont immobilisesen des figures gomtriques : l'illusion des sens s'est vanouie,mais elle a fait place la satisfaction de l'esprit (Deslandes,p. 144).

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    Monsieur Palomar la plage rappelle une gravure trs connuedes historiens du cinma des origines, qui montre Marey aubord de la mer avec son fusil chronophotographique, le dispositif avec lequel il chercha fixer dans des tracs trs rigoureux lapalpitat ion indfinie de l 'univers, retenir, garder la trace[...] des mouvements les plus subtils, les plus fugitifs de la vie (Collet, p. 41). Certes, avec cette ide de la matrise absolue duvisible, Marey est compltement plong dans l ' idologie de lasouverainet du regard (l'il absolu qui fait de la vie un cadavre)dont parle Michel Foucault dans son Archologie du regard mdical (1963). Comme Marey, dont il semble revivre les obsessions,monsieur Palomar scrute dans le ciel le vol des oiseaux en cherchant une mthode pour [...] fixer dans les moindres dtails lepeu qu'il arrive voir (1985, p. 64) 6 . En effet, cette ide defixer tout ce qui est fuyant, merveilleusement exprime dans lechapitre L'invasion des voles , prsente des analogies extraordinaires avec les crits de Marey : franchir les limites de la visiontrop implique dans le tourbillon de la vie, compromise dans lem ou ve m en t con vulsif du vol, saisie par les fantm es d u d sir ;trouver l'ordre, la symtrie, la rgularit mesurable, possder cequi nous chappe par le signe, la trace, le nom.Monsieur Palomar n'ignore pas que cette obsession de figerles choses, de les nommer, de les classer, a pour effet de les ptrifier: [. . .] son regard transforme chaque plat en un document de l 'histoire de la civil isation, en un objet de muse (p. 7 3 ) 7 , l it-on dans le chapitre Palomar fait le march. Cequi nous frappe pourtant, parmi les rsultats des exercices chro-nophotographiques de Marey, c 'est , sans aucun doute, la sculpture en bronze des diffrentes tapes du vol d 'un goland,extraordinaire aussi du point de vue esthtique pour ses anticipations du futurisme et du cubisme 8 . L'impression de musifi-cation du frmissement la fois rgulier et haletant de la vieest trs forte : l e rsu l ta t e s t , jus tement , mons t rueux, tan tdonn qu'i l se produit dans la contigut du mobile et de l ' immobile, du flottant et du rigide, de la rptition et de la diffrence, de l'unit et de la pluralit. cet gard, il n'est pas anodin que Calvino ait plac en introduction Collezioni di sabbia,qu'il faudrait lire en parallle avec Palomar**, un article de 1974

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    qui donnera, plus tard, par un jeu de mise en abyme, son titreau livre et dans lequel on lit ceci :Et pourtant, celle qui a eu la constance de poursuivredes annes durant cette collection savait ce qu'elle faisait , savait o elle voulait arriver: peut-tre justement loigner d'elle le vacarme des sensations dformantes etagressives, le vent confus du vcu, et avoir pour elleenfin la substance sableuse de toutes choses, toucherla structure de silice de l 'existence (1986, p. 16-17)10 .

    Jean Collet , en commentant les thmes de la recherche deMarey, rappelle que dans Le Septime Sceau (Bergman, 1956), ily a un jongleur qui essaie d'apprendre son fils un numro extraordinaire consistant immobiliser une balle au beau milieude sa trajectoire. Il associe cet exercice l'image, au dbut dufilm, de l'aigle planant et fig en vol que Bergman tire de l'Apocalypse. Co llet crit :[...] cet oiseau ptrifi e n vol no us livre la significationdu texte johannique et du fi lm la fois : i l marquel'instant paradoxal o le temps cesse d'exister, instantau seuil de la m or t [...] o l 'ho m m e do it avoir la rvlation ultime, la connaissance suprme, le secret de lavie (p. 41).

    Monsieur Palomar scrute l 'univers dans l 'espoir de pouvoiraccde r , pour ra i t -on d i re en pa raphra san t B lancho t , une deuxime vue . Personnage tragique et burlesque la fois ilest suspendu entre l'intriorisation du temps vcu et l 'objectiva-t ion de comportements machinaux e t rp t i t i f s , Pa lomaradapte les modalits de son regard l 'aptitude analytique desdiffrents outils de l'histoire de la vision . Ainsi est-il toujourssur le point de nous rendre, tout comme le fusil chronophoto-graphique de Marey, le profil ptrifi de l'univers, la sublimationabstraite (ou la dgradation mcanique ?) du frmissement vitaldes choses. Comme Janssen avec son revolver astronomique, Palomar interroge les traces visibles de l'volution des astres dansl 'univers , cherchant les correspondances entre l ' t roi te perspec t ive te r res t re e t l ' immensi t des espaces c les tes . Maisqu'arrivera-t-il , quand il pointera son tlescope sur les orbites

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    traces par le cours de sa vie, plutt que sur celles des constellations ? :Que verra - t - i l ? Son monde in t r i e u r l u i a ppa ra t r acomme l ' immense ro ta t ion d 'une spi ra le lumineuse ?Verra-t-il les toiles et les plantes naviguer en silencesur les paraboles et les ellipses qui dterminent son caractre et son destin ? Contemplera-t- i l une sphre lacirconfrence infinie qui a pour centre le moi et qui ale centre en tous ses poin ts (19 85 , p. 117) n ?

    Le regard et le tressaillementPalomar semble destin poursuivre sans cesse sa recherche et enrichir avec une prcision maniaque son encyclopdie desmouvements, sa collection de perceptions, son catalogue de sensations, son talage d'vnements. Ce qu'il cherche et qui luichappe toujours est une chose rare et prcieuse : elle est rvledans le chapitre Le monde regarde le monde. Monsieur Palomar cherche [...] une de ces heureuses concidences dans lesquelles le monde veut regarder et tre regard en mme temps (1985, p. 113)12. Il n'est pas difficile de voir l une rfrence lathorie phnomnologique de la vision nonce par Merleau-Ponty ou, dans le domaine du cinma, par Andr Bazin (qui s'estinspir de cette thorie)13. L'une de ces concidences se trouve dcrite dans le deuxime chapitre, Le sein nu. Elle est marquepar un cart , par une diffrente consistance de la vision :

    Maintenant, en parcourant la plage du regard avec uneobjectivit impartiale, il fait en sorte qu' peine la poitrine de la femme entre dans son champ visuel. On yre ma rque une d i sc on t inu i t , un c a r t , p re sque unclair. Le regard avance jusqu' effleurer la peau tendue,se retire, comme s'il apprciait, avec un lger tressaillement, la diffrente consistance de la vision et la valeurparticulire qu'elle assume, et pour un instant il se suspend en l'air, dcrivant une courbe qui, de faon evasive et la fois protectrice, accompagne le relief du sein distance, pour reprendre ensuite son cours comme side rien n'tait (p. 17) 14 .

    Greimas, qui a consacr ce chapitre une analyse exemplaire(p. 23-33), a certes ra ison quand i l rappel le la concept ionPalomar: intermdialit et archologie de la vision 177

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    d'Husserl de la perception et souligne que l 'objet esthtique(dans ce cas-l la poitrine de la femme) ne se constitue dfinitivement qu ' t ravers la product ion d 'une discont inui t sur lecontinu de l'espace visuel (p. 28) 1 5 . Mais ce que Greimas ne relve pas, c'est que, dans tout le chapitre, l 'analyse des mouvements du regard de Palomar, le passage du plan gnral au dtail , l ' ide mme de discontinuit terme que le cri t iqueemprunte directement Calvino entre les diffrents moments de la vision, bref, tous les aspects qui caractrisent mieuxl'imaginaire visuel inspirant ce texte renvoient avec insistance la technique de tournage cinmatographique (sans compter larelation de voyeurisme qui s'tablit entre le sujet et l 'objet, unautre renvoi une si tuation typiquement cinmatographique).Il s'agit d'un exemple splendide d'effet rebound: Calvino-Palomar, comme le romancier dont parle Genette, semble feindre d'avoir une camra ; il semble mme regarder la ralit travers l'objectif. L ' i d e m m e d e d i s c o n t i n u i t , d ' c a r t , d econsistance diffrente de la vision est en parfaite correspondanceavec la dfinition, autant intuitive qu'analytique, de subjectif.Il s'agit ainsi d'une sorte de rencontre entre l 'objectivit impartiale du regard de monsieur Palomar (qui s'attribue une qualittypique du regard cinmatographique) et la subjectivit du dsirmenant le mouvement mme du regard produire une des configurations du ralisme ontologique dont Bazin parlait. Configuration qu i app arat trs pro che des con ditio ns dans lesquelles l 'nigme de la vision se ralise en tant que, d'aprs Merleau-Ponty, [...] concordance spontane entre l 'aspect subjectif etl 'aspect objectif du phnomne, et [. . .] harmonie entre lesprojets moteurs et le monde aperu (Sordini, p. 179). la manire de Genette et d'Eco, on pourrait affirmer queCalvino matrise avec une efficacit enviable la camra subjective. Dans ce cas, l'effet rebound ne fonctionne pas seulementsur le plan de l'criture, mais aussi sur celui de la rception : unelecture de ce genre implique l'activation des soi-disant scnarios visuels intertextuels ou scnarios iconiques dont parleUmberto Eco (p. 81), proches des configurations du langage cinmatographique. L'trange configuration de ce plan subjectifparticulier (li un mouvement, un regard mobile, qui ritre

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    son parcours jusqu'au point o il aperoit une diffrence, uncart) voque le mouvement du regard. Mouvement qui, devantune anamorphose, attend l ' instant o la prise de vue exacte provoquera finalement le jaillissement de l'image cherche, dsire,le dvoilement, le sens cach de l 'enchevtrement apparemmentinforme des lignes 16. La lecture visuelle du monde de CaI-vino, suppose la capacit de saisir l 'cart, la discontinuit, lesdiffrences sans lesquelles [...] le regard glisse sur une surfacelisse et sans prises. Les perceptions de l'cart et de la diffrence,fugaces et intermittentes, sont en jeu dans l'conomie du dsir,parce qu'elles ouvrent le regard sur des dimensions diverses, rgles par des espaces et des temps diffrents : c'est ce qui lie ladiscontinuit au tressaillement, au frmissement.Le mot tressaillement (trasalimento) n'est pas nouveau dansle lexique de Calvino: il figurait dj dans un des chapitres japonais de Se una notte d'inverno un viaggiatore, o l 'on traitede la percept ion de la d i scont inui t dans le champ visue l(p . 156). Ce mme mot , trasalimento, apparat aussi dans la traduction italienne d'un texte de Starobinski consacr au thmedu regard et du dsir o, malgr sa fonction distincte (il est attribu la forme observe et non pas au regard), il prsente desanalogies singulires avec l'aptitude rgissant le regard de monsieur Palomar; tant qu'il semble lgitime d'en supposer la connaissance par Calvino. Dans L'il vivant, Starobinski rappellequ'en franais le mot regard, qui dsigne la vision oriente, n'indiquait originairement pas l 'action de voir, mais plutt l 'attente,la proccupation,, la garde, la sauvegarde, et il poursuit ainsi :Regarder est un mouvement qui vise reprendre sousgarde. . . L'acte du regard ne s 'puise pas sur place: i lcomporte un lan persvrant , une reprise obst ine,comme s'il tait anim par l 'espoir d'accrotre sa dcouverte et de reconqurir nouveau ce qui lui est en traind'chapper. Ce qui m'intresse est le destin de l 'nergieimpatiente qui habite le regard et qui dsire autre chose

    que ce qui lui est donn : guet tant l ' immobil i t dans laforme en mouvement, l 'afft du plus lger frmissem e n t 17 dans la figure au repos, demandant rejoindrele visage derrire le masque, ou cherchant se reprendre la fascination vertigineuse des profondeurs pour

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    re trouver, la surface des eaux, le jeu des refle ts(p. 11-12) .Entre la ptrification et le tressaillement (frmissement), entre lavrit ultime et le vide inaugural de chaque regard, s'tendent lerpertoire, l 'exposition et la collection infinis.Ce n'est pas fortuit si, dans Collezione di sabbia (un ouvrageconsacr des cartes, des muses, des expositions, des encyclopdies, des collections, des rpertoires, rels ou imaginaires), laposit ion centrale est occupe par la section Il raggio dellosguardo Le rayon du regard 1 8. Celle-ci s'ouvre sur untexte la mmoire de Roland Barthes, presque entirement consacr La Chambre claire, un l ivre sur la photographie , oumieux, sur l ' imaginaire photographique crit par un auteur dontl 'uvre [...] consiste obliger l'impersonnalit du mcanismelinguistique et cognitif tenir compte de la corporit du sujetvivant et mortel (1984, p. 78). Le texte conclusif consiste enune cri t ique de Locchio e Videa. Fisiologia e storia dlia visione deRuggero Pierantoni, un livre qui, en traant l 'histoire des mythes lis la vision, amne Calvino se demander s'il ne faudrait pas tirer la conclusion que l 'esprit humain fonctionne seulement grce aux mythes et que [...] l 'alternative ne rside qued a n s l 'a d o p t i o n d ' u n c o d e m y t h i q u e p l u t t q u ' u n a u t r e (p. 126).Si Palomar est l 'histoire d'une obsession visuelle, Collezione disabbia est en quelque sorte l'archologie de cette obsession. Ilraggio dello sguardo contient un passage consacr aux fouillesarchologiques de Settefinestre, prs d'Orbetello. Ici, Calvinoci te un nologisme, traulare (de l 'anglais trowel: t rue l l e ) ,forg par les ouvriers des fouilles. Par ce verbe, explique-t-il, ondsigne l 'opration de mettre jour, de photographier et de dessiner, de figer couche aprs couche, fragment aprs fragment, lesrestes du pass (p. 87-93).Si cette petite truelle introduite par les archologues anglaispeut tre considre comme l 'emblme symbolique de la nouvelle archologie , Collezione di sabbia est une tentative de traulare les diffrentes couch es de cet imag inaire visuel do nt Palomaroffre un rpertoire significatif. Des automates de Neuchtel l'iconographie des faits divers, des monstres en cire du doc-

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    teur Spitzer aux freaks de Leslie Fiedler (et de Tod Browning), dela lecture visuelle de l 'empire des signes japonais aux rcits du fantastique, Calvino visite et relit les lieux et les moments de la formation de l ' imaginaire visuel notre poque.Mme si dans Palomar il n'y a pas de rfrence explicite au cinma, l 'effet rebound et la prsence d 'obsessions typiques del'archologie du cinma font de ce texte l 'un des plus significatifs pour l 'tude des rapports entre la littrature et les mdias l're actuelle, rapports sur lesquels Calvino reviendra dans Visibilit, la quatrime de ses Leons amricaines, non sans un accent nostalgique pour un ge archaque des mdias : Mon exprience et ma formation initiale sont dj celles d'un hritier dela " civilisation des im ages ". L'image visuelle l 'emporte sur l 'expression verbale, une poque comme la ntre [.. .] o la lit trature, sans plus se rclamer d'une autorit ni d'une traditionqui serait son origine et sa fin, mise sur la nouveaut, sur l 'originalit, sur l 'invention (1989, p. 149-150).Devant l 'inflation des images prfabriques, il y a, selon Calvino, deux voies possibles : la voie du postmodernisme qui consiste [...] recycler les images uses, en les insra nt dan s u nnouveau contexte qui en modifie le sens , employer ironiquement l ' imaginaire de la culture de masse ou introduire [.. .] legot du merveilleux, hrit de la tradition littraire, dans desmcanismes narratifs qui en renforcent le pouvoir d'tranget(p . 141). L'autre voie est celle que suit Samuel Beckett, et quiconsiste [...] faire le vide po ur r epa rtir zro , en r du isan t[. . . ] au minimum les lments visuels et le langage, commedans un monde aprs la fin du monde (p. 154).Palomar se situe au carrefour de ces deux voies. Il y a un videprogrammatique construi t autour de ce personnage qui scrute lasurface des choses, explore d'une manire obsessionnelle les dtails, rduit sa relation au monde une relation visuelle. Ainsi, ilrevit, comme nous avons cherch le dmontrer, une archologie de la vision, une stratigraphie des relations visuelles. Ily a quelque chose de mcanique, de non naturel dans les diffrentes attitudes auxquelles Palomar adapte son regard. Il s'agitpourtant de la mme automatici t du grand burlesque, qui rendles hros du cinma muet tragiques et drisoires la fois. C'est

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    ainsi qu' la fin, nous imaginons monsieur Palomar: avec lestraits d'un hros du burlesque amricain, un Buster Keaton dsormais sans ge qui, comme dans Film (Beckett et Schneider,1965) , survit dans les limbes d'une aprs-histoire, avec la terreurque les cauchemars de son (ou de notre) histoire ne reviennentle hanter.Texte franais tabli avec

    le concours de Silvestra MarinielloUniversit de Bologne

    N O T E S1 II ne faut pas oub lier que le cin ma son ore doit beau cou p la radio , tan t sur leplan du dveloppement technique qu'en ce qui concerne la rhtorique des effets sonores.2 Voici ce qu e Gen ette a crit pro po s de cet essai dan s Nouveau Discours du rcit(Paris: Seuil , 1983): Cette tude aujourd 'hui mconnue, et que l 'on pi l le souventsans le dire et parfois sans le savoir, fut bien des gards le point de dpart de la nar-ratologie franaise, stimule travers elle par la rencontre du roman amricain et de latechnique cinmatographique. Son oubli dans la bibl iographie du Discours du rcit es t

    tout fait caractristique et d'autant plus injustifiable que, l 'ayant lue et admire dssa premire publication, je l 'avais signale en 1966, dans le dossier du n 8 de Communications. Souvenir expos clipses (p. 44). En effet, dans Communications (n 8,1966) , Genette cri t que l ' tude de Magny a fortement contr ibu reverser sur lal i t trature l ' intrt que la nouveaut des moyens cinmatographiques avait susci t autour des problmes de la technique narrat ive (p. 166).

    3 Le texte sur Luigi Serafini n'est pas com pris dans l 'dition franaise de Collezionedi sabbia.

    4 En italien : [.. .] forse l ' io non altro che la finestra attraverso la quale il mondoguarda i l mondo (I talo Calvino, Palomar, Tor ino : Einaudi , 1983, p . 116) .5 En italien : Q u a n d o P a l o m a r s'era accorto di quanto approssimativi e votat ial l 'errore sono i cr i ter i di quel mondo dove credeva di t rovare precisione e norma universale, era tomato lentamente a costruirsi un rapporto col mondo limitato aWosserva-

    zione delleform e visibili (I talo Calvino, Palomar, Tor ino: Einaudi , 1983, p . 54; c ' es tmoi qui souligne).6 En ital ien : [. . .] fissare nei m in im i dettagli il poc o che riesce a vedere (ItaloCalv ino , Palomar, Tor ino: Einaudi , 1983, p . 63) .7 En italien : [. . . ] i l suo sguardo trasforma ogni vivanda in un documento di s to-ria dlia civilt, in un oggetto da museo (I talo Calvino, Palomar, Tor ino : Einaudi ,1 9 8 3 , p. 72) .8 Voir en particu lier la Sculpture en bronze du vol de goland (1887), conserve aumuse de Beaune et reproduite dans un ouvrage de Michel Frizot int i tul La Chrono-

    photographie (Dijon : Associat ion des Amis de Marey, 1984, p. 39).9 En ce qui conce rne les rappo rts entre Palomar et Collezione di sabbia, on se reportera aux propos de Gian Carlo Ferret i dans Le cpre di Bikini. Calvino giornalista e

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    saggista 1945-1985 (Roma: Editori Riunit i , 1989, p . 145-153). Ferre tt i y montre lestrs troits liens existant entre la srie jounalistique de Collezioni di sabbia et la srielittraire de Palomar.10 En italien : Eppure, chi ha avuto la costanza di portare avanti per anni questaraccolta sapeva quel die faceva, sapeva dove voleva arrivare, forse proprio per allon-tanare da se il frastuono dlie sensazioni deformanti e aggressive, il vento confuso delvissuto , ed avre final m en te p er se la sostan za sabb iosa d i tu tte le cose, tocc are lastruttura silicea dellesistenza (Italo Calvino, Collezione di sabbia, Mila n o : Garzan t i ,1984, p. 13).11 En italien : Cosa vedr ? GIi apparir i l suo mondo interiore corne un calmoimmenso ruotare d'una spirale luminosa? Vedr navigare in silenzio stelle e pianetisulle parabole e le ellissi che determinano il carattere e il destino ? C o n te mp le ra u n asfera di circonferenza infinita che ha l 'o per centro e il centro in ogni punto ? (ItaloCa lv ino , Palomar, Torino : Einaud i , 1983 , p . 121-122) .12 En i ta l ie n: [ . . . ] una di quelle fortun ate coinciden ze in cui i l m on do vu oleguardare ed essere guardato nel medesimo istante (Ita lo Calvino, Palomar, Torino :Einaudi, 1983, p . 117).13 ce sujet, on consultera l 'ouvrage de Du dle y Andr ew, Andr Bazin (New York :Oxford University Press, 1979, p. 229 ssq).14 En italien : Ora, nel far scorrere il suo sguardo sulla spiaggia con oggettivit im-parziale, fa in modo che appena il petto dlia donna entra nel suo campo visivo, sinoti una discontinuit, uno scarto, quasi un guizzo. Lo sguardo avanza fino a sfiorarela pelle tesa, si ritrae, corne apprezzando un lieve trasalimento la diversa consistenzadlia visione e Io spcia le valore che essa acquista , e per un momento si t iene amezz'aria, descrivendo una curva che accompagna il rilievo del seno da una certa dis-tanza, e lusivamente ma anche prote tt ivamente , per poi r iprendere i l suo corso corneniente fosse (Italo Calvino, Palomar, Torino : E inaud i , 1983 , p . 56) .15 Voici ce que dit exac teme nt Algirdas Julien Greim as : Dot de la fonction syntaxique du sujet, construit au milieu du champ perceptif par la protensivit du regard,l 'obje t esthtique ne se consti tue qu 'en produisant de la discontinuit sur le continude l 'espace visuel (De l'imperfection, Pr igueux : P ie r re Fan lac , 1987 , p . 28) . Onpourra se reporter, en ce qui concerne les rapports entre ros et discontinuit , auxrflexions de Calvino dans Collection de sable (Paris: Seuil , 1984, p . 111-112), rflexions portant sur les gravures erotiques japonaises.16 En ce qui concerne les rapports entre vue ana m orph ique e t vue c inm atogra phique , voir l 'a rt ic le d 'Antonio Costa e t Manlio Brusatin , Visione {Enciclopedia, vol.14, Torino: Einaudi, 1981, p . 1110-1138). Sur les rapports entre travell ing e t anamorphose, voir l 'ouvrage de Pascal Bonitzer, Dcadrages. Cinma et peinture (Paris :dit ions de l 'toile , 1985, p . 93-95). Bonitzer cri t : Ce que dmontrent les anamorphoses, c 'est que la peinture a , non moins que le c inma et depuis longtemps, sinon depuis toujours, affaire au mouvement. Le point de vue se dplace et ce dplacement est un dplacement de sens. Au cinma aussi , le mouvement d 'appareil , leschangements de plan, sont le mouvement mme du sens (p . 95).17 II faut rem arque r que le trad ucte ur italien du texte de Starobins ki a trad uit frmissement par ce trasalimento (Jean Starobinski, L'occhio vivente, T o r in o : E n a u d i ,1975 , p. 7).18 La trad uct ion franaise (partielle) ne respecte pas la stru ctu re de l 'ditio n ital ienne.

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