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parasitologie | actualités 5 OptionBio | lundi 9 mars 2009 | n° 414 E n Europe, le paludisme importé touche environ dix mille per- sonnes et provoque une cen- taine de décès par an. Son diagnos- tic repose sur des techniques de microscopie optique (goutte épaisse et frottis mince) avec lesquelles tous les biologistes ne sont pas familiers, ce qui peut rendre des tests de dia- gnostic rapide (TDR) intéressants. Place des tests de diagnostic rapide Les TDR sont capables de détecter en moins d’une demi-heure des antigè- nes des Plasmodium dans une goutte de sang. Ils se présentent sous forme de kits individuels prêts à l’emploi. La plupart détectent un antigène spécifique de P. falciparum, l’HRP2 (secrété pendant les stades asexués ou par les gamétocytes jeunes) et une isoenzyme de la LDH “pan-malaria”, persistant plus ou moins longtemps dans le sang. Ils ne nécessitent pas un personnel spécialisé. Concernant P. falciparum, ces TDR ont une excellente précision chez les voyageurs non immuns de retour de zone d’endémie. Cepen- dant, ils ne peuvent pas se subs- tituer à la microscopie, car ils ne quantifient pas la parasitémie. Sauf exception, ils n’identifient pas les autres espèces de Plasmodium ; et il existerait des mutations de l’antigène HRP2. En France métropolitaine, on peut pro- poser la détection de l’antigène HPR2 en support de la microscopie optique quand le laboratoire reçoit moins de 100 demandes de recherche de para- sites et diagnostique moins de 10 cas de paludisme par an. Des cas graves importés du Sahel Le paludisme d’importation à P. fal- ciparum de l’enfant a fait l’objet d’une enquête française rétrospec- tive sur la période 1996-2005. Sur 4 150 enfants de 0-15 ans hospitali- sés pour ce motif, 3 299 avaient une forme simple et 851 une forme grave d’après les critères OMS 2000. Les facteurs indépendants, pré- dictifs de la survenue d’une forme grave étaient l’âge inférieur à 2 ans (odds-ratio [OR] = 3,2 ; p < 0,0001) et le séjour dans un pays du Sahel (p = 0,0001). Des actes thérapeutiques majeurs étaient significativement plus fré- quents en cas d’âge inférieur à 2 ans, de séjour dans un pays du Sahel, de thrombopénie (<100 000/mm³), d’absence de prophylaxie. Il en était de même pour les hospitalisations en réanimation. Les critères OMS les plus prédictifs de ces actes étaient l’ané- mie sévère, un coma, une prostration et des convulsions répétées ; les plus prédictifs d’une hospitalisation en réanimation étaient une détresse respiratoire, un coma, une prostration et l’absence de prophylaxie. Une chimioprophylaxie indispensable Considérée isolément, la parasitémie devait dépasser 8 % pour indiquer la nécessité de soins intensifs. La prévention du paludisme pendant le séjour en pays d’endémie est donc essentielle. Elle repose sur les mesu- res antivectorielles et la chimiopro- phylaxie. Cette dernière n’évite pas la contamination, mais elle prévient l’apparition des signes cliniques dus à P. falciparum. Le choix du médicament dépend d’abord du degré de résistance à la chloroquine des souches dans le pays de destination. La durée de prise ne dépassera pas 3 à 6 mois selon les produits ou leurs asso- ciations. Les enfants et les femmes enceintes et allaitantes constituent des cas particuliers. | JEAN-MARC RETBI © www.jim.fr Paludisme importé : état des lieux En Europe, le paludisme importé touche environ dix mille personnes. Son diagnostic repose sur des techniques de microscopie optique, mais il pourrait être facilité par l’emploi des tests de diagnostic rapide (détection de l’antigène HPR2). Les enfants en bas âge sont particulièrement concernés par les actes thérapeutiques majeurs, comme une hospitalisation en réanimation. Essentielle, la prévention repose toujours sur une double approche : lutte contre le vecteur et chimioprophylaxie. Sources 28 e Réunion interdisciplinaire de chimiothérapie anti-infectieuse, 4-5 décembre 2008, Paris. Thellier M et Danis M. Tests de diagnostic rapide du paludisme : faut-il étendre leur utilisation dans les pays du Nord ? Brousse G. Prévention actuelle du paludisme. Mornad P et al. Paludisme grave chez l’enfant en France de 1996 à 2005. © A. Duarte - Fotolia.com L’infection grippale se fait par cap snatching Des chercheurs du Laboratoire européen de biologie moléculaire (EMBL) et du laboratoire biologie structurale des interactions entre virus et cellule hôte (CNRS, Grenoble) ont déterminé le mécanisme grâce auquel le virus de la grippe peut prendre le contrôle des cellules humaines et s’y multiplier. La polymérase (enzyme virale), grâce à une partie d’une sous-unité appelée PA, qui copie le matériel génétique du virus et force ainsi le mécanisme de la cellule hôte à synthétiser les protéines virales, en capturant un petit fragment appelé “coiffe” (cap snatching) sur les molécules d’ARN des cellules hôtes et l’ajoute au sien. La PA devient donc une cible thérapeutique fondamentale. Source : www.cnrs.fr d’après Dias A et al. The cap–snatching endonclease of influenza virus polymerase resdes in te PA subunit, Nature, 4 février 2009.

Paludisme importé : état des lieux

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parasitologie | actualités

5OptionBio | lundi 9 mars 2009 | n° 414

En Europe, le paludisme importé touche environ dix mille per-sonnes et provoque une cen-

taine de décès par an. Son diagnos-tic repose sur des techniques de microscopie optique (goutte épaisse et frottis mince) avec lesquelles tous les biologistes ne sont pas familiers, ce qui peut rendre des tests de dia-gnostic rapide (TDR) intéressants.

Place des tests de diagnostic rapideLes TDR sont capables de détecter en moins d’une demi-heure des antigè-nes des Plasmodium dans une goutte de sang. Ils se présentent sous forme de kits individuels prêts à l’emploi. La plupart détectent un antigène spécifique de P. falciparum, l’HRP2 (secrété pendant les stades asexués ou par les gamétocytes jeunes) et une isoenzyme de la LDH “pan-malaria”, persistant plus ou moins longtemps dans le sang. Ils ne nécessitent pas un personnel spécialisé.Concernant P. falciparum, ces TDR ont une excellente précision chez les voyageurs non immuns de retour de zone d’endémie. Cepen-dant, ils ne peuvent pas se subs-tituer à la microscopie, car ils ne quantifient pas la parasitémie. Sauf exception, ils n’identifient pas les autres espèces de Plasmodium ; et il existerait des mutations de l’antigène HRP2.En France métropolitaine, on peut pro-poser la détection de l’antigène HPR2 en support de la microscopie optique quand le laboratoire reçoit moins de 100 demandes de recherche de para-

sites et diagnostique moins de 10 cas de paludisme par an.

Des cas graves importés du SahelLe paludisme d’importation à P. fal-ciparum de l’enfant a fait l’objet d’une enquête française rétrospec-tive sur la période 1996-2005. Sur 4 150 enfants de 0-15 ans hospitali-sés pour ce motif, 3 299 avaient une forme simple et 851 une forme grave d’après les critères OMS 2000.Les facteurs indépendants, pré-dictifs de la survenue d’une forme grave étaient l’âge inférieur à 2 ans (odds-ratio [OR] = 3,2 ; p < 0,0001) et le séjour dans un pays du Sahel (p = 0,0001).Des actes thérapeutiques majeurs étaient significativement plus fré-quents en cas d’âge inférieur à 2 ans, de séjour dans un pays du Sahel, de thrombopénie (<100 000/mm³), d’absence de prophylaxie. Il en était de même pour les hospitalisations en réanimation. Les critères OMS les plus prédictifs de ces actes étaient l’ané-mie sévère, un coma, une prostration et des convulsions répétées ; les plus prédictifs d’une hospitalisation en réanimation étaient une détresse respiratoire, un coma, une prostration et l’absence de prophylaxie.

Une chimioprophylaxie indispensableConsidérée isolément, la parasitémie devait dépasser 8 % pour indiquer la nécessité de soins intensifs.La prévention du paludisme pendant le séjour en pays d’endémie est donc

essentielle. Elle repose sur les mesu-res antivectorielles et la chimiopro-phylaxie. Cette dernière n’évite pas la contamination, mais elle prévient l’apparition des signes cliniques dus à P. falciparum.Le choix du médicament dépend d’abord du degré de résistance à la chloroquine des souches dans le pays de destination. La durée de prise ne dépassera pas 3 à 6 mois selon les produits ou leurs asso-ciations. Les enfants et les femmes enceintes et allaitantes constituent des cas particuliers. |

JEAN-MARC RETBI

© www.jim.fr

Paludisme importé : état des lieux

En Europe, le paludisme importé touche environ dix mille personnes. Son diagnostic repose sur des techniques de microscopie optique, mais il pourrait être facilité par l’emploi des tests de diagnostic rapide (détection de l’antigène HPR2). Les enfants en bas âge sont particulièrement concernés par les actes thérapeutiques majeurs, comme une hospitalisation en réanimation. Essentielle, la prévention repose toujours sur une double approche : lutte contre le vecteur et chimioprophylaxie.

Sources28e Réunion interdisciplinaire de chimiothérapie

anti-infectieuse, 4-5 décembre 2008, Paris.

Thellier M et Danis M. Tests de diagnostic rapide

du paludisme : faut-il étendre leur utilisation dans

les pays du Nord ?

Brousse G. Prévention actuelle du paludisme.

Mornad P et al. Paludisme grave chez l’enfant en

France de 1996 à 2005.

© A

. Dua

rte

- Fo

tolia

.com

L’infection grippale se fait par cap snatching

Des chercheurs du

Laboratoire européen de

biologie moléculaire (EMBL)

et du laboratoire biologie

structurale des interactions

entre virus et cellule hôte

(CNRS, Grenoble) ont

déterminé le mécanisme

grâce auquel le virus de

la grippe peut prendre

le contrôle des cellules

humaines et s’y multiplier.

La polymérase (enzyme

virale), grâce à une partie

d’une sous-unité appelée

PA, qui copie le matériel

génétique du virus et force

ainsi le mécanisme de la

cellule hôte à synthétiser

les protéines virales,

en capturant un petit

fragment appelé “coiffe”

(cap snatching) sur les

molécules d’ARN des

cellules hôtes et l’ajoute au

sien. La PA devient donc

une cible thérapeutique

fondamentale.

Source : www.cnrs.fr

d’après Dias A et al. The

cap–snatching endonclease

of influenza virus polymerase

resdes in te PA subunit,

Nature, 4 février 2009.