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MARIETTE Cyvard Congrès 1908 1 MARIETTE Cyvard Papus Le congrès de la maçonnerie spiritualiste 1908 Conséquences du congrès Documents de revues Crptrad Noeux les mines 2012

Papus Congres Franc-maconnerie 1908

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MARIETTE CyvardCongrès 1908

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MARIETTE Cyvard

Papus

Le congrès de la maçonnerie spiritualiste

1908Conséquences du congrès

Documents de revues

Crptrad Noeux les mines 2012

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Préambule

L’objectif de ce cahier est de mettre à votre disposition une série de documentsrelatifs à FRANC‐MAÇONNERIE : Congrès Spiritualiste de juin 1908, organisé par Papus.

Au cours de ce congrès, Papus tente d’entraîner derrière lui les forces de lamaçonnerie spiritualiste. J’ai repris l’article de Robert Amadou paru dans la revue « l’autremonde ». Il est encore difficile de négliger ce « terroriste1 » du Martinisme même si lestravaux des hommes du XXIe siècle commencent à se créer un espace vital non négligeable.

J’ai peu commenté les textes retrouvés, l’intérêt me paraît se situer dans leur mise àdisposition. Il y a des lacunes, puisque certains documents me sont manquants. Si parmiracle non seulement vous en disposiez mais acceptiez de les mettre en partage, je suisévidemment preneur !

Le partage des richesses de l’Esprit appauvrit ceux qui enterrent les Talents. Lesautres se souviennent : le Maître saura reconnaître leurs efforts.

Les événements semblent prouver que le spirituel pourrait reprendre une place qu’ilmérite dans notre monde dévoré par la valeur monnaie. Les hommes oublient volontiersque l’or et l’argent ne se mangent pas. De la même façon, ils ne se souviennent plus que leblé pour devenir pain de nourriture nécessite des efforts et le respect de sa biologie. Ils nereconnaissent plus la part du spirituel comme un besoin aussi nécessaire que le besoin derespirer ou de se nourrir ! Certains besoins peuvent se laisser mourir, d’autres reprendreforce et vigueur. Ils exigent l’exercice du devoir d’exister.

Cyvard MARIETTE‐LENGAGNEAgent technique de surface dans le temple !

1Terroriste puisque ses travaux constituent toujours des références difficilement contournables et que le

chercheur consciencieux reste stupéfait et parfois terrorisé par la masse de documents et le travail remarquable

réalisé par Robert ! Le dernier ouvrage de réelle valeur pour la recherche signé Michelle Nahon laisse un peu

d’espoir pour les chercheurs du futur ! Ouf ! Ni Baader, ni Amadou n’avaient pu accéder à tous les documents

existants ! Faivre s’inscrit toujours, sans oublier Nicole Chaquin, et quelques autres, dans cette lignée qui sème

la terreur chez les débutants. Osez chercher, et vous trouverez ! Parfois des éléments bien connus et bien

répertoriés mais apparemment nos amis sont passés à quelques millimètres sans les voir. La recherche reste

possible. Certains comme Baillet commencent à pointer des roses en bouton qui risquent de nous apporter bien

des joies !

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FRANC­MAÇONNERIE : Congrès Spiritualiste de juin 1908. Compte Rendu complet des Travaux du Congrès et du Conventmaçonnique Spiritualiste... Paris, Libr. Hermétique, 1910. Br. Textes de Papus, Victor Blanchard, L. Combes, Phaneg, Quintor,Ernest Bosc, H. Durville, Synésius, A. Journet, etc. A partir de la p. 211 : Travaux du Convent Maçonnique des Rites Spiritualistes.

Réf. biblio. : Titre L'initiation ; hypnotisme, théosophie, kabbale, science occulte, franc‐maçonnerie, Volumes 80 à 81 Publié 1908

Compte rendu complet des travaux du congrès et du convent maçonnique spiritualiste :spiritualisme, christianisme ésotérique, magnétisme et sciences annexes, maçonneriespiritualiste.

LE GRAND CONGRES SPIRITUALISTEDE JUIN 1908 par Robert AMADOU

Un document rarissime et très recherché constitue le principal de la présente étude:Congrès spiritualiste de juin 1908, sous la présidence du Docteur Papus. Compte renducomplet des travaux du Congrès et du Convent maçonnique spiritualiste. Spiritualisme,Christianisme ésotérique, Magnétisme et Sciences annexes, Maçonnerie spiritualiste.

Quoique cet ouvrage ait été édité en 1910, par la Librairie hermétique, 4, rue deFurstenberg, à Paris (imprimé par Renaudie, 18, rue de Sèvres), les exemplaires, sans doutepeu nombreux, en ont presque tous disparu. Marie‐France James, qui ne comprend guèremais explique bien et sait trouver des textes, n'a pu consulter le « document rare et rendupratiquement inaccessible par le fait que son tirage a été limité aux souscripteurs » (I). Et des'affliger, avec tant d'autres. A notre connaissance, en effet, aucun exemplaire dans aucunebibliothèque publique, et seulement deux exemplaires détenus par deux collectionneursparticuliers. Maint étudiant m'a sollicité de rendre de nouveau accessible cette mined'information.

Voici donc le fameux compte rendu. Outre sa rareté, l'intérêt historique qu'il présentejuste aussi, et surtout cette remise au jour. Voici donc; voici, au juste, le compte renduparticulier du Convent maçonnique spiritualiste,'" dont le titre exact est : Conventmaçonnique des rites spiritualistes. Ce convent était concomitant du Congrès spiritualiste, etle livre se divise en trois parties: la première partie contient le résumé des travaux du Comitéd'organisation provisoire; la seconde comprend les diverses communications faites auCongrès spiritualiste ainsi que le procès‐verbal du Convent maçonnique; enfin, la troisième secompose des principaux articles publiés par la grande presse sur les différents travaux descongressistes spiritualistes. Pour aujourd'hui, il s'agira donc du Convent maçonnique. (2).

Un Congrès spiritualiste avait eu lieu en 1889 (3); un Congrès spirite et spiritualisteinternational, à Paris, en 1900 (4). Or, en mai 1907, le Voile d'Isis, directeur Papus, rédacteuren chef Etienne Bellot, annonce que ses deux responsables, qui se sont adjoint PaulMarchand, préparent la première session d'un Congrès de l'occultisme. La réunion se tiendra

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les 9, 10 et 11 du même mois, en l'hôtel des Sociétés savantes, rue Danton. Le compte renduofficiel parait dans le Voile d'Isis de juin et il inclut la liste des membres de la commissionchargée de préparer la seconde session du Congrès de l'occultisme, pour la premièrequinzaine d'octobre. Est‐il téméraire de supposer que le Congrès spiritualiste de 1908réalisera, sous une forme modifiée, ce projet‐là?

Première circulaire, publiée dans le Voile d'Isis, de janvier 1908:

LE CONGRES SPIRITUALISTEPremière année

•L'Initiation (20° année) mensuelle.Le Voile d’Isis (11e année)mensuel.

Hiram (mensuel).Ces publications, aidées de l'excellent Journal du Magnétisme, vont entreprendre

l'organisation d'un Congrès spiritualiste en juin 1908.

Congrès Spiritualiste de juin 1908Sous la présidence du Docteur PAPUS

COMPTE RENDUComplet

des Travaux du Congrèset du

Convent maçonnique SpiritualisteSpiritualisme— Christianisme ésotérique

Magnétisme et Sciences annexes —Maçonnerie Spiritualiste

PARISLibrairie Hermétique

4, rue de Furstenberg, 41910

L'AUTRE MONDE N° 96[26]

C'est notre jeune confrère Chacornac qui sera chargé de toute la partieadministrative de ce Congrès avec le Voile d'Isis comme organe officiel. Un Conventmaçonnique des Rites spiritualistes sera organisé à la même époque par l'Ordre Martinistesous la direction de notre Frère Teder, 33°. Si nous pouvons ne pas voir se réaliser lesmauvais clichés sociaux qui flottent dans l'astral depuis si longtemps, nous espérons obtenirun gros succès avec ce Congrès. Inutile de dire que nous accepterons avec plaisir l'aide detous nos confrères de la Presse spiritualiste. PAPUS (5).

De la deuxième circulaire, dans le Voile d'Isis, de février, ces lignes concernent lasection maçonnique: « Enfin, il est urgent que les Français rattachés aux formationsmaçonniques soient mis à même d'établir un parallèle avec la véritable franc‐maçonnerietraditionnelle et spiritualiste et les extraits d'ignorance et d'erreurs qu'on débite en Francesous couleur maçonnique.

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Aussi, sans tenir compte des injures ni des prétentions à la régularité exclusive de ceux quine seraient reçus dans aucune loge sérieuse de l'Etranger, allons‐nous organiser un Conventdes Rites spiritualistes dont les loges proclament en tête de leurs Planches : Le GrandArchitecte de l'Univers. Notre Frère Détré (Teder), 33e, aura la haute direction de cetteimportante section, Des tenues blanches alternant avec les tenues réservées permettront àtous nos adhérents d'assister aux fêtes maçonniques données à cette occasion.

Pour terminer l'organisation préliminaire, rappelons la nécessité d'une ententecommerciale entre les divers éditeurs s'occupant de publications occultistes, magnétiques etspirites. Une Section de Propagande sera établie pour rechercher les bases possibles d'unetelle entente.

Dès maintenant le Voile d'Isis va centraliser, sous la direction du jeune Chacornac,toute la partie administrative du futur Congrès.

L'Initiation va présider au groupement des Ecoles Occultistes.Le Journal du Magnétisme va s'occuper de la Section Magnétique du Congrès, sous la

direction de Durville.La Revue Hiram organisera le Convent Maçonnique en faisant appel aux Suprêmes

Conseils amis et aux autres à l'occasion.Enfin, nous ferons d'ici un mois les démarches en vue de l'appui d'un ou de plusieurs

journaux spirites.S'ensuit, dans le volume qui a repris è peu près le texte précédent, la « COMPOSITION

DU COMITE D'ORGANISATION PROVISOIREPrésident: M. le Docteur Papus.Membres: MM. Beaudelot, docteur Biagini, Charles Blanchard, Bonnet, H. Brouilloux, F.Dace, Desjobert, Ch. Dubourg, Durville fils, Faugeron, Genty, R. Guénon, Etienne Garin,Albert Jounet, Merle, Albert et Léon Noël, Phaneg, Schmid, Teder et Thomas.Secrétaire: M. Victor Blanchard.Secrétaire adjoint: M. Paul VeuxTrésorier: Chacornac.

En juin, le Voile d'Isis affiche le programme et, en août, entreprend de publierquelques‐unes des communications faites au Congrès spiritualiste proprement dit. En juillet,cependant, le même journal aura salué le succès du congrès et mis en souscription, au prix de5 F, le volume imprimé des actes, 200 pages environ, avec la photographie des principauxoccultistes. (L'Initiation de juin avait déjà lancé l'idée).

En août aussi, le Voile fournit la composition du Comité international d'actionspiritualiste que le congrès, avant de se clore, a constitué; Beaudelot, Blanchard, Bosc,Chacornac, Camille Chaigneau, commandant Darget, Dace, Gabriel Delanne, Léon Denis,Durville, Mme d'Orino, Dubourg, Mme Camille Flammarion, Albert Jounet, Leymarie,commandant Mantin, Papus, Phaneg, Synésius, Teder, Veux.

Cette liste méritait d'être, ainsi que dessus, reproduite telle quelle, car le volume desactes ne la reprendra pas. Ce volume, au demeurant, le Voile en réitère la souscription enseptembre et, en novembre, le déclare sous presse. Puis c'est le silence. Le livre ne sortira pasavant l'année 1910, et ce ne sera pas chez Lucien Chamuel, contrairement à l'attente. Unefois de plus, le bon Chamuel fut défaillant: Il n'avait rien d'un négociant, le malheur est que,par amour des livres, de l'occultisme et des occultistes, il avait ouvert boutique de librairie etd'édition. « Vient de paraître » annonce l'Initiation de décembre 1909.

Ouvrons au chapitre de notre actuelle compétence:

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« Travaux du Convent Maçonnique des Rites spiritualistes ».

CONVENT MAÇONNIQUE DES RITES SPIRITUALISTESPUISSANCES MAÇONNIQUES ET ORDRES AFFILIES

REPRESENTES AU CONVENT MAÇONNIQUE

Il ne nous est pas possible, afin d'éviter les indiscrétions, d'entrer dans trop de détailssur la composition du Convent.

Au premier appel des organisateurs, 17 puissances maçonniques et 3 ordres affiliésavaient répondu en envoyant des délégations spéciales.

La revue Hiram en a donné la liste que voici:1° Le Grand‐Orient et Souverain Sanctuaire 33e de l'Empire d'Allemagne ;2eMaçonnerie Arabe «Les Fils d'Ismaël»;3° Le Suprême Conseil Universel de la Maçonnerie Mixte;4° La Grande Loge Symbolique Espagnole (Rite National Espagnol);5° Le Souverain Grand Conseil National Ibérique;6° Le Rite Ancien et Primitif de la Maçonnerie (Angleterre et Irlande);7° La Grande Loge Swedenborgienne d'Angleterre;8° La Grande Délégation portugaise du Rite National Espagnol;9° La Grande Loge du Cap‐Vert;10° Le Rite Bleu de la République Argentine;11° La Grande Loge des Maçons Anciens et Acceptés de l'Etat de l'Ohio;12° La Grande Loge Saint‐Jean des Francs Maçons Anciens et Acceptés de l'Etat deMassachusetts;13° La Grande Loge provinciale d'Allemagne du Rite Swedenborgien;14° La Grande Loge Swedenborgienne de France;15° Le Suprême Conseil 33e du Mexique;16° Le Suprême Conseil de l'Ordre Maçonnique Oriental de Misraïm et d'Egypte pour l'Italie;17° L'Ordre des Illuminés d'Allemagne;18° L'Ordre des Rose‐Croix ésotériques;19° L'Ordre Martiniste;20° L'Ordre Kabbalistique de la Rose‐Croix.D'autres puissances, au nombre de 14, se firent également représenter, mais la décision aété prise qu'on ne les ferait pas connaître publiquement. Leurs délégués arrivèrent le 9 juin.

Photo de TEDER (Charles Détré) 1855‐1918

Les Travaux du Convent débutèrent par une Tenue blanche qui eut lieu le 7 juin, auTemple du « Droit Humain. (6), sous la Présidence d'honneur du Frère John Yarker, 33e, et laPrésidence effective du Frère Dr Papus, 33°.Le Frère Papus ouvrit les Travaux devant une salle archicomble, par l'allocution suivante :

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DISCOURS DU DOCTEUR PAPUS 33e 90e 99e

Président du Suprême Conseil de l'Ordre Martiniste, Délégué général de l'OrdreKabbalistique de la Rose‐Croix ; etc.Très Illustres Frères, Très chère S!ur et Très cher Frère,Mesdames, Messieurs,

La réunion de ce soir quelque modeste que soit son cadre, comparé aux Templesmaçonniques de l'Etranger a cependant une importance considérable.

La Franc‐Maçonnerie vraie est une science adaptable à des actions sociales.Sans l'intégralité de son symbolisme, sans la connaissance des enseignements

patents ou secrets issus de ce symbolisme, la Franc‐Maçonnerie perd tous ses moyensd'action.

Or, les Obédiences maçonniques fonctionnant en France ont volontairement détruittout ou partie de l'enseignement symbolique et des clefs réelles de la Franc‐Maçonnerie.[juillet ‐ 27]

Il suit de là que, malgré leur orgueil et leurs tendances à traiter d'irréguliers et defaux frères tous ceux qui sont encore rattachés au symbolisme traditionnel, ces obédiencesn'ont plus de maçonnique que le nom et les formes les plus rudimentaires. Ce sont des clubspolitiques, des réunions d'assistés comprenant quelques rares assistants. Et la charitématérielle, la protection forcée et la recherche d'influences politiques sont les grandsmobiles secrets de ces clubs à forme maçonnique.

On sait tellement tout cela, on sait tellement le danger de la vérité et de la lumière,qu'on fuit toutes les recherches historiques, toutes les documentations sincères, et onaccable d'injures, on excommunie tous ceux qui veulent que la Lumière Maçonnique soitautre chose qu'une flamme de lycopode.

Aussi, nous vous avons convié T! Ill! T! venus de tous les points du globe, afin derallumer les flambeaux éteints à la lumière du flambeau de l'espérance encore debout.

Initiés pour la plupart aux Centres hermétiques en correspondance avec lesfraternités de la Rose‐Croix, vous êtes les descendants et les dépositaires de ce senshermétique qui, seul, permet la compréhension et l'adaptation de la Science maçonnique.C'est pourquoi je suis persuadé qu'en dépit des attaques haineuses, en dépit des injures etdes excommunications qui ne nous atteignent pas plus que l'index papal, notre réunion aurapar la suite une importance considérable.

Les historiens futurs de la Franc‐Maçonnerie seront obligés de reconnaître qu'à unmoment donné dans cette France qui semblait perdue à jamais pour l'enseignementsymbolique ‐ une réunion d'hommes venus de partout, représentant les Obédiencesmaçonniques où la Science traditionnelle est encore intégralement conservée, a voulurévéler la vérité, montrer les fausses origines de ceux qui veulent opprimer et rétablir enfinla lumière de l'étoile flamboyante.

Je ne saurais trop remercier devant vous notre Ill! F! et ami Teder qui s'est attelé àla tâche ardue de la révision historique.

Considérez‐le bien, mes F!, regardez‐moi aussi, et assurez‐vous que nous sommesdeux êtres différents tant par l'aspect extérieur que par les conceptions intellectuelles. Celavous permettra par la suite quelques bons moments de gaieté lorsque vous verrez les

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puffistes2, incapables de réfuter les arguments historiques irréfutables, qui prétendent quenous ne formons qu'un seul et même individu. Mais la charité fraternelle doit dominertoutes les querelles de personnes et nous devons être charitables pour les ignorants, pourles demi‐savants de la Maçonnerie que le temps et le travail suffiront à éclairer – mêmelorsque bannis de l'univers entier, considérés par leur étalage d'athéisme comme moins quedes hommes, ils se drapent dans les quelques bribes de symbolisme enfantin échappées auxmassacres pour se croire plus réguliers que les millions de maçons répandus dans tout lereste de l'univers.

Une petite étincelle suffit à allumer un grand feu. Cette étincelle ‐ nous l'espérons ‐commencera son oeuvre ce soir.

L'antique barque d'Isis, Paris, devait devenir le centre d'un renouvellement de laScience maçonnique, en dehors de tout sectarisme, en dehors de toute politique, en dehorsde toute ambition personnelle.

Cette oeuvre, nous l'entreprenons aujourd'hui, appuyés par nos amis de France,d'Angleterre et d'Irlande, d'Allemagne, de Suède, de Bohème, de Suisse, d'Italie, d'Espagne,du Portugal, de Grèce, de Turquie, d'Egypte, du Cap Vert, de la République Argentine, duBrésil, du Mexique et des Etats‐Unis d'Amérique.

Nous espérons arriver lentement mais sûrement à la constitution de la Fédérationdes Suprêmes Conseils et des Grandes Luges de l'Univers, à la constitution d'un véritableSecrétariat International de la Science maçonnique.

Pour cette oeuvre, les hommes ne comptent pas. Que nous disparaissions demain,l'élan est donné, l'!uvre continuera. Et c'est la sensation de notre force qui nous rendpatients. C'est la connaissance de cette loi qui permit à Hiram de rétablir l'ordre hiérarchiquedu quaternaire dans le chaos anarchique du cercle sans point. C'est la connaissance de cetteloi et de ses adaptations au camp mystérieux du 32° qui nous permet de poursuivre notre!uvre avec le calme nécessaire sans nous inquiéter des misérables questions matériellesnon plus que de la quantité de nos membres.

La qualité nous suffit.Mais il est temps de poursuivre nos travaux. Je laisse la parole à l'Ill! F! Téder et je

vous remercie encore d'être venus en si grand nombre assister à la pose de la premièrepierre de ce nouvel édifice maçonnique auquel la femme participera au même titre quel'homme.

Le F! Papus passa ensuite le maillet au F! Teder, 33e.Ce dernier, prenant alors la parole, nous donna la Conférence que nous publions plus

loin In‐extenso.Le succès du conférencier fut grand, comme bien on pense, car l'auditoire était de

ceux qui, en dépit des divergences d'opinions, savent reconnaître ‐ comme disait le F!Thiers ‐ qu'il n'y a rien de plus condamnable, lorsqu'on s'est promis de dire aux hommes lavérité sur les grands évènements de l'Histoire, que de la déguiser par faiblesse, de l'altérerpar passion, de la supposer par paresse et de mentir sciemment ou non à son siècle et auxsiècles à venir.

Beaucoup comprirent l'intention des révélations qui furent faites au sujet du Grand‐Orient de France, et aucun contradicteur ne se présenta, bien que quelques membres duG! O! fussent présents.

2Puffiste [pyfist] issu de l’anglais, se prononce pouffiste, Puff signifie enflure, bouffée et donc au figuré

charlatanisme, il a pris le sens de banqueroutier, de charlatan, de menteur, de « Barnum », sans que lui soit

attribué le sens de faiseur de publicité ou de réclame.

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A la demande des FF! Téder et Piron, la S! A. Gédalge, 18e voulut bien donnerquelques renseignements relatifs à l'Ordre Mixte du « Droit Humain ».

Elle fit comprendre, comme on le verra plus loin, que le « Droit Humain » n'est pas unRite spiritualiste, mais une réunion d'esprits éclectiques et libres, fortement reliés par unemorale unique et par quelques grandes idées communes: recherche de la vérité, pratique dela Fraternité universelle, de la Justice, conviction absolue de l'Egalité des êtres humains, àquelque sexe, race ou croyance qu'ils appartiennent. Elle insista fortement sur le principemixte, donnant l'équilibre humain, et sur la pratique de la Liberté de penser, absolumentnécessaire pour permettre de faire travailler d'un commun accord au Bien et à la Justice, leMatérialiste et le Spiritualiste, l'Athée, le Croyant ou le simple Etudiant des Mystères de laNature. Et elle termina en disant quelle reconnaissance les membres de l'Ordre Mixteéprouvaient pour ses fondateurs et tout particulièrement pour la regrettée Maria Deraismeet le T! Ill! F! Dr Georges Martin.

La péroraison de notre sympathique et vaillante S! fut saluée d'une salved'applaudissements. La clôture des Trav! fut ensuite prononcée et leur reprise renvoyée àla Tenue spéciale du 9 juin.

Celle‐ci eut lieu à 8 h et demi du soir au jour indiqué, et après tuilage régulier.

PROCES‐VERBAL DE LA TENUE SPECIALE DU 9 juin 1908, présidée par le T! Ill! F! Teder,33e, 90e, 95e; Inspecteur Général du Martinisme en Angleterre; Membre de l'OrdreKabbalistique de la Rose‐Croix ; Délégué de l'Ordre des Rose‐Croix ésotériques ; etc.

Le F! Teder présidait. Après avoir ouvert les Trav!, il remercia tout d'abord les FF!délégués d'être venus en si grand nombre pour participer à l'oeuvre du F! Dr Papus; il eutun mot aimable pour chacun d'eux et il ajouta: « Je vous présente à tous, le salut fraternel etl'assurance de la sympathie profonde de notre Président d'honneur, l'Ill! F! John Yarker,Grand Maître Général du Rite Ancien et Primitif pour l'Angleterre et l'Irlande, dont j'ail'honneur d'être, pour aujourd'hui, le substitut en France. Seul, le grand âge de notrevénérable ami, qui fut le camarade et le compagnon d'armes de l'Ill! F! Garibaldi et del'Ill! F! Mazzini, l'a empêché de venir prendre part aux trav! du Convent, mais il m'achargé de vous dire qu'il était de coeur parmi vous… »

Il prononça ensuite un discours que nous devons nous abstenir de publier, car si toutpeut être dit quand le Temple est couvert, tout ne peut pas être rapporté au dehors. Nousnous bornerons donc à quelques citations que rien ne nous empêche de donner :« Un Maçon, a dit le F! Teder, doit s'évertuer à étudier ce qu'on appelle la science occulte,science qui ‐ comme le constatait fort bien autrefois le F! Ragon ‐ révèle à l'homme lesmystères de sa nature, les secrets de son organisation, les moyens d'atteindre à sonperfectionnement et au bonheur, enfin l'arrêt de sa destinée. Cette étude fut celle deshautes initiations égyptiennes; et si, du temps du F! Ragon, elle fut reconnue nécessaire,croyez bien que rien n'est changé aujourd'hui et qu'elle n'est pas moins indispensablequ'autrefois... »

Puis encore :«Il y a, en Maçonnerie comme en religion, un exotérisme et un ésotérisme à l'étude

desquels chacun de nous doit s'appliquer, s'il veut arriver à la découverte de la véritééparpillée dans la diversité des cultes, des écoles, des classes, des degrés, et qui devient Unepour celui qui, après avoir passé les dehors, est devenu capable d'embrasser d'un coup d'oeiltout ce qui se rattache au gouvernement du monde.

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La Bible, clef de toutes les vérités, le jeu des nombres, les religions, le magnétisme, lathaumaturgie, la psychologie, l'astrologie, la kabbale, la magie, l'hermétisme, sont deschoses qui demandent à [28 L'AUTRE MONDE N° 96] être étudiées et méditéesprofondément et avec patience. La connaissance de ces choses conduit à la connaissance duGrand Oeuvre. Alors on possède le secret de la transmutation: on sait faire du caillou undiamant, c'est‐à‐dire du malheureux un heureux, du misérable un honnête homme, unrégénéré, et du régénéré un éducateur, un apôtre, capable d'entreprendre et de faire degrandes choses en se sacrifiant pour le bien commun de l’humanité. Le méchant seul, quiveut simplement trouver dans la science occulte les moyens de satisfaire son orgueil, sespassions, son égoïsme et de dominer son semblable, perd son temps: il fait oeuvre de fou,d'imbécile, ne comprendra jamais, glissera, tombera sous la risée publique, et ce sera là sonchâtiment... »

Ensuite, dans un autre ordre d'idées : « Etant le lien invisible qui unit entre ellestoutes les religions et toutes les politiques, la Franc‐Maçonnerie Universelle est spiritualistedans son essence. Ceux qui se détachent de ce principe et des Statuts séculaires qui leconfessent, ceux‐là pèchent par ignorance ou sont des sectaires et des rebelles travaillantcontre le bien général. A cet égard, laissez‐moi vous rappeler ce que disait autrefois unhomme qu'on a beaucoup admiré dans le monde et qu'on y a même glorifié comme unapôtre et un prophète: le F! Joseph Mazzini.

« Les théories politiques, disait‐il, ont besoin d'une sanction religieuse. La volontéuniverselle est une base convenable aux gouvernements. Mais si l'on ne met pas enévidence les principes généraux qui régissent le monde, si l'on ne les réduit pas en maximes,en lois reconnues, on n'aura jamais une volonté universelle. La découverte de ces principes etleur inviolabilité, déduite d'une origine supérieure au pouvoir de l'individu, est justementl'oeuvre de la civilisation actuelle... La religion et la politique sont inséparables. Sans religion,la science politique ne peut enfanter que le despotisme et l'anarchie... La religion est leprincipe éducateur suprême... L'idéal est en Dieu : on doit coordonner les sociétés de manièreà ce qu'elles se rapprochent le plus près possible de cet idéal, à ce qu'elles en réalisent la plusgrande somme possible; et, sectateurs de sa loi, nous devons chercher à y conformer nosactes. La pensée, c'est l'esprit : la traduction de cette pensée en action, en oeuvres visiblesextérieures, c'est le fait social.

Ainsi prétendre séparer entièrement les choses de la terre et celles du du ciel, letemporel et le spirituel, n'est ni moral, ni logique, ni possible...C'est sur ce principe reprend le F! Teder ‐ que reposent tous les gouvernements sensés. Jerépète donc que la Maçonnerie, qui est le trait d'union invisible entre tous les cultes dumonde, doit être et de demeurer le trait d'union ésotérique entre tous les partis politiqueset toutes les sectes religieuses d'un même Etat. Ceci étant bien compris, vous devezconcevoir la raison d'être et le but réel de la Maçonnerie, vous devez forcément comprendreque les Maçons sont les pierres vivantes du Temple idéal dont parlait le F!Mazzini et que lerôle de la Maçonnerie doit se borner à celui d'éducatrice et de médiatrice...

Encore un passage à noter:… «Sans la femme, la famille ne peut exister: sans famille, il n'y a pas de société

possible. La femme est donc la collaboratrice de l'homme; elle n'en est pas, n'en doit pasêtre la chose, le meuble, l'esclave. Ici, vous comprendrez que l'oeuvre de Maria Deraisme etde l’illustre F!Dr Georges Martin est une oeuvre admirable à laquelle tous les maçonsdignes de ce nom doivent donner leur appui.

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« Le Suprême Conseil Universel Mixte est un centre auquel se rattachent déjà denombreuses obédiences étrangères dont les constituions permettent ce rattachement. Or,vous le savez, l’objet du Convent que nous avons organisé est d'établir à Paris le centre d'uneFédération Universelle réunissant en un faisceau toutes les forces éparses de la Maçonnerieuniverselle qui observent fidèlement la Loi fondamentale ‐ celle du G! A! D! L’U!

Laissez‐moi vous dire, avant de vous donner lecture de nos v!ux, que le principal denos désirs est de ramener à nous, à la France, l’amitié de l'Universalité des Maçons, amitiéque nous avons perdue par la faute d'une bande de sectaires, dont l'irrégularité maçonniquevous est aujourd’hui connue, et qui ont transformé la plupart des Loges Françaises en clubspolitiques et en tremplins électoraux.

Je suis certain que pas un d'entre vous ne protestera contre cette idée. Il peut y avoirdiversité d'enseignements dans nos Ecoles, dans nos Rites, mais tous nous sommes unis surce point : l’universelle Fraternité, et non pas la fraternité aux bornes étroites d'une coterie... »

Son discours terminé, le F! Teder donna lecture des voeux des organisateurs duConvent. Après une légère discussion portant sur quelques détails sans importance, larésolution suivante fut adoptée à l’unanimité.Fin au prochain numéro... juillet 1985

LE GRAND CONGRES SPIRITUALISTE DE juin 1908 par Robert

AMADOU (deuxième et dernier article)

Le document que voici est rarissime, très recherché. Un premier article l'a présenté etlargement cité. L'étude et l'édition se terminent ci‐après. Ainsi le lecteur disposera d'une mineà peine exploitée d'information sur le mouvement occultiste alentour Papus et sescompagnons, sur diverses sociétés d'initiation au début du siècle, la plupart maçonnique maisnon pas toutes, dont beaucoup ont survécu ou se sont métamorphosées jusqu'à nos jours.[14 L'AUTRE MONDE N° 97]

VOEUX des ORGANISATEURS DU CONVENT MAÇONNIQUE INTERNATIONAL relatifs àla Fédération Maçonnique Universelle

CONGRES DES FRANCS­MAÇONS INTERNATIONAUX pour l'établissement d'une Fédération Maçonnique Universelle soumiseaux anciennes Constitutions reconnaissant le G! A! D! L! U!

I. ‐ La Fédération Maç! Universelle a pour but l'union et le progrès de tous les RitesMaçonniques qui la composent.

2. ‐ Chaque Rite fédéré conserve son autonomie complète, son organisationintérieure et ses statuts, sans que la Fédération ait à s'en occuper.

3. Chaque Rite fédéré s'engage seulement à recevoir frat! les membres des autresRites également fédérés et à établir des relations frat! avec tous les Rites de la Fédération.

4. Pour organiser et centraliser les efforts de la Fédération Maç! Universelle, unBureau Central est établi à Paris (France), sous le titre de Secrétariat de la Fédération Maç!Universelle.

5. ‐ La Fédération Maç! Universelle groupera autour des Rites fédérés existant dansun pays les nouveaux éléments qui pourront être constitués.

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6. ‐ Quant aucun Rite fédéré n'existe dans une contrée, la Fédération Maç!Universelle se réserve le droit d'établir des formations rattachées à l'un des Rites fédérés,sans avoir à tenir compte des protestations des Rites non fédérés établis dans ladite contrée.

7. Quant un Rite Maç! établi dans une contrée quelconque refuse d'entrer enrelations avec la Fédération Maç! Universelle, ladite Fédération se réserve le droit d'établirdans ladite contrée des formations d'un Rite fédéré.

SECRETARIAT

8. ‐ Le Secrétariat de la Fédération exerce les fonctions suivantes:a) Il tient à jour le registre des Rites Maç! faisant partie de la Fédération;Tout rite Maç! possédant au moins trois Loges au moment de sa demande d'affiliation peutfaire partie de la Fédération Maç! Universelle en adhérant simplement aux Statuts de celle‐ci;Jusqu'à nouvel ordre, l'adhésion n'entraîne aucuns frais.b) Le Secrétariat organise des Cours et des Etudes sur l'Histoire, le Symbolisme et les gradesde la Franc‐Maçonnerie;Ces enseignements seront ensuite écrits et communiqués aux Rites fédérés.Chaque Rite fédéré prendra soin de conserver ces travaux pour son usage particulier et de nepas les communiquer aux Rites non fédérés.c) Chaque Rite fédéré nomme, en adhérant à la Fédération, un délégué qui se mettra enrapport avec le Secrétariat.d) Le Secrétariat soumettra aux écrivains Maç! les plus réputés chacune des questionsd'instruction qui sont mises à l'étude, et il publiera au besoin l'avis de chacun de ces écrivainssur chaque question.

RESOLUTION ADOPTEE PAR LE CONGRES DES FRANCS­MAÇONS INTERNATIONAUX et relative à l'institution duSuprême Grand Conseil et Grand­Orient du Rite Ancien et Primitif de la Maçonnerie pour la France et ses dépendances

LE CONGRES DE PARIS du 9 juin 1908.Considérant3:1. ‐ Que des discussions se sont élevées depuis longtemps entre divers Rites Maç! quiprétendent chacun être réguliers et qui ne veulent pas reconnaître la régularité des autresRites Maç! souvent de constitution très ancienne ;2. ‐ Que l'Histoire impartiale de la Franc‐Maç! prouve qu'à l'origine de chacun des Ritesactuellement pratiqués dans les divers pays civilisés, il y a de tels éléments d'irrégularitéqu'aucun Rite ne peut prétendre régenter les autres à ce sujet;3. ‐ Qu'antérieurement à 1690, une Maçonnerie a existé en Angleterre dont les Statuts ontété violés par les fondateurs de la Maçonnerie dite Orangiste, et, plus tard, en 1717, par lesfondateurs de la Grande Loge de Londres ‐ ce qui montre d'une manière évidentel'irrégularité de la Maçonnerie dite Orangiste et de la Grande Loge de Londres appeléeGrande Loge d'Angleterre;4. ‐ Qu'il est matériellement impossible à la Grande Loge d'Angleterre, dont les Archives neremontent pas au‐delà de 1723, de prouver la régularité de son origine, alors que les faits

3Une telle série de considérations implique que nul n’est régulier ni irrégulier, que toute formation devient

régulière par sa « pratique » et le nombre des participants et par la qualité de ses travaux. Par conséquent, les

notions de filiation et de régularité deviennent caduques.

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historiques prouvent, sans réplique possible, sa parfaite irrégularité au point de vue de laMaçonnerie Primitive;5. ‐ Que le Grand Orient de France ne peut fournir aucun document justificatif de sa proprerégularité, alors qu'il prétend que le premier Grand‐maître, en France, fut un comte deDerwentwater, lequel n'a jamais eu aucun pouvoir de la Grande Loge d'Angleterre, et que ledeuxième Grand‐maître fut un comte d'Harnouester, lequel n'a jamais existé.6. ‐ Que par conséquent, si le Grand‐Orient est fondé sur un mensonge historique, il estforcément irrégulier au premier chef;7. Que le Grand‐Orient de France est né, en 1773, d'une rébellion contre la Grande‐Loge deFrance, alors soumise aux anciennes Constitutions; qu'il a été organisé par des Maçonsfactieux chassés officiellement de la Fraternité Maçonnique, et qu'il est devenu davantageirrégulier, quand, en 1877, il s'est retranché de la Maçonnerie universelle;8. ‐ Que si les fondateurs anglais de la Grande Loge de Londres, en 1717, se sont reconnus ledroit, tout en manquant à leurs devoirs et à leurs serments antérieurs, de fonder uneMaçonnerie nouvelle dite moderne, ce droit appartient d'autant mieux à tous ceux qui nesont tenus par aucune obligation;9. ‐ Que si le Grand‐Orient s'est greffé sur des irrégularités et des impostures historiques,tous les hommes libres d'attaches ont le droit de fonder tel Rite Maç! qui leur plaît et quece Rite sera certainement plus régulier que celui du Grand‐Orient de France.

A DECIDE, à l'unanimité de ses membres, de constituer à Paris, un Suprême Grand Conseil etGrand‐Orient du Rite Ancien et Primitif de la Maçonnerie pour la France et ses dépendances,d'accepter du Souverain Sanctuaire et Grand‐Orient de Berlin la Patente constitutive, etd'établir un Bureau central sous le titre de Secrétariat de la Fédération MaçonniqueUniverselle.Paris, ce 9 juin 1908, E V (sc. Ere vulgaire)Après le vote, cette Résolution fut transcrite, sous forme de procès‐verbal, dans le Livre d'Ordu Grand‐maître Général du Souverain Sanctuaire du Grand‐Orient de Berlin, présent auConvent. Trois 33e et onze 30e signèrent ce document qui appartient désormais à l'histoire(1) Les F! P (Papus), R. (Reuss), T. (Teder), 33e, et les FF! H.B. (Brouilloux), B.B. (Biagini?),A.B. (Beaudelot), V.B. (Blanchard), P.S. (Schmidt), L.G. (Gastin), E.D. (Dace), J.D. (Desjobert) ,P.L. (Phaneg), et E.G. (Garin) 30e.Une autre Résolution fut également adoptée à l'unanimité; la voici:

V!UX COMPLEMENTAIRES

Le Convent maçonnique des Rites spiritualistes, réuni à Paris le 9 juin 1908, a émis les voeuxsuivants qui, après discussion, ont été adoptés à l'unanimité :1. ‐ A la suite des divulgations qui ont été faites dans le monde profane, il est utile d'ajouterun nouveau signe aux signes habituels de reconnaissance maçonnique;2. ‐ Il est utile de changer le titre des grades maçonniques à partir du 25e degré du RiteEcossais, afin de les adapter à la vie contemporaine sans rien modifier au symbolisme;3. Une commission sera nommée ayant pour but l'étude détaillée et la mise au point du 32edegré du Rite Ecossais considéré sous le caractère de grand constructeur social.4. ‐ Le Secrétariat de la Fédération Maçonnique Universelle se mettra en rapport avec tousles Rites affiliés, à l'effet d'établir une échelle officielle de correspondance des gradesmaçonniques dans tous les Rites.

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L'Ordre du jour étant épuisé, une triple Bat! d'allég! salua les FF! délégués et lesorganisateurs du Convent, et la clôture des Trav! fut prononcée.Ajoutons que, les 23 et 24 juin, le Souverain Sanctuaire et le Grand‐Orient de Berlin tint deuxassemblées à l'effet d'examiner la question que lui soumit son Grand‐maître Généralrelativement à la première résolution votée par les membres du Convent. A l'unanimité desmembres actifs de cette Puissance Maçonnique étrangère, la décision fut prise d'accorderaux signataires du procès‐verbal porté au Livre d'Or, la Patente constitutive d'un SuprêmeGrand Conseil Général des Rites [août 1985 15] Unis et Grand‐Orient pour la France et sesdépendances.

Cette patente a été signée et scellée le 24 juin à Berlin.D'autre part, le F Teder, 33°, a été nommé chef du Secrétariat de la Fédération

maçonnique Universelle.Les deux conférences alléguées plus haut, chacune à sa place chronologique, sont

éditées ensuite. Pour mémoire, la première, par Teder, déclare «l'irrégularité du Grand‐Orientde France»; en fait, l'irrégularité de la franc‐maçonnerie moderne, depuis la fondation de laGrande Loge de Londres et les constitutions dites d'Anderson. Ce n'est point de la bonnehistoire, ni quant à la maçonnerie britannique ni quant à la maçonnerie française. Mais larevendication du caractère ésotérique de l'Ordre ne laisse pas d'émouvoir et, un peuobscurément, frappe juste. De même, à première vue, l'hypothèse que l'ancienne maçonnerieservait mieux que la nouvelle, tradition et initiation. Hélas, Teder, s'il n'avait pas tort dedénoncer la «voie substituée » avant la lettre, où le Grand Orient de France (mais aussi laGrande Loge de France d'alors qui avait refusé le mage Papus) s'était engagée, méconnaît lanature essentiellement traditionnelle et initiatique du noachisme instaurateur de la franc‐maçonnerie andersonienne. (De nos jours encore, on s'y trompe).

De l'ésotérisme, voire du spiritualisme, en revanche, la soeur Gédalge, «déléguée parle chapitre mixte de chevaliers Rose‐Croix du 18e degré», se démarque. Sa communicationporte la parole du « Droit Humain » et du « Droit Humain », en sa branche française, c'est‐à‐dire privé de ses éléments théosophiques originels.

Ailleurs, au fil du compte rendu, le Convent se glisse: allusions dans les actes duCongrès spiritualiste proprement dit, anecdotes recueillies dans les articles de journaux. Encorrélation, relevons la tenue blanche organisée par la loge le Sphinx de l'Ordre martiniste, etla tenue de la Grande Loge swedenborgienne; et, plus encore peut‐être, le «toast» de «l’Ill!F! P.‐R., Grand‐Maître du Grand‐Orient de Berlin ». Ne serait‐ce pas le personnage clef ?

Avant le Congrès spiritualiste, d'autres congrès avaient illustré le même genre.D'autres, après lui, eurent lieu; ils furent tous de moindre ampleur ou plus spécialisés; sansfiliation historique avec celui de 1908, qui était l'oeuvre, le triomphe de Papus et des siens.(Le déclin n'allait pas tarder).

Après le Convent maçonnique, d'autres essais seront tentés d'établir une fédérationdes ordres et sociétés initiatiques: FUDOSI, FUDOFSI (7). Plus d'un demi‐siècle aura passé et iln'est pas improbable que l'entreprise de 1908 ait servi sinon de modèle, au moinsd'inspiration.

Au vrai, la différence des titres est significative. Le Convent maçonnique des ritesspiritualistes fut surtout maçonnique. Certes, des sociétés d'initiation y ont participé qui nerelevaient pas de la franc‐maçonnerie: l'ordre des Rose‐Croix ésotériques, l'Ordre martiniste,l'Ordre kabbalistique de la Rose‐Croix; l'ordre des Illuminés d'Allemagne n'était, il n'est quepara‐maçonnique. Mais l'Eglise gnostique, par exemple, partie au Congrès spiritualiste, s'ycantonna. (Fabre des Essarts, le patriarche, sous le nom de Synésius, y intervint afin de

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défendre sa légitimité et celle de sa seule Eglise; c'est à l'occasion du congrès, ce semble, queRené Guénon, l'un de ses secrétaires, après avoir travaillé dans son comité d'organisation,rencontra cette Eglise où il ne tardera pas à être consacré évêque).

L'évènement capital du Convent, à mes yeux, l'un de ses futurs bénéficiaires le résumeainsi. 1908: «Constitution à Paris, à la suite du Congrès Maçonnique Spiritualiste tenu en juindans le Temple du Rite du Droit Humain, d'un Souverain Grand Conseil Général du Rite deMemphis‐Misraim pour la France et ses dépendances. La Patente Constitutive est délivréepar le Souverain Sanctuaire d'Allemagne, signée et scellée le 24 juin, à Berlin, par le Grand‐maître Théodor Reuss (Peregrinos) qui assistait au Congrès de Paris. Le Grand‐maître et leGrand‐maître adjoints sont le Docteur Gérard Encausse (Papus) et Charles Détré (Teder). LaLoge Humanidad, précédemment rattachée au Rite National Espagnol, devient Loge‐Mèrepour le Rite de Memphis‐Misraim en France». (8)

Théodor Reuss (1855‐1923) (9), Pérégrinos‐Reuss, c'est, en effet, le grand maître duGrand Orient de Berlin, dont le nom et même le hiéronyme ne sont jamais donnés, dans notrevolume imprimé, que sous la forme de leurs initiales. Singulier personnage entre bien dessinguliers: ancien militant socialiste, fort ardent à propager les rites maçonniques, ou pseudomaçonniques (mais ceci est une autre histoire), dans les premières années du XXe siècle;fondateur, avec Engel, dans des circonstances mal éclaircies, des Illuminati, comme unerésurgence, selon leur intention, de la société fondée au XVIIIe siècle par le Bavarois AdamWeishaupt; l'un des patrons de l'Ordre des Templiers d'Orient (O.T.O.). Plusieurs de sesfondations subsistent en Allemagne, en Suisse, en Grande‐Bretagne et aux Etats‐Unisd'Amérique.

Il avait appris, en 1901, que Papus avait reçu d'un autre extravagant, John Yarker(1833‐1913), le rite swedenborgien, à vocation maçonnique, qu'Emmanuel Swedenborg n'apas fondé, et établi à Paris une loge de cette obédience, INRI n° 14. Reuss prit langue. Enretour de ses bons offices envers Papus, celui‐ci consacra, ou fit consacrer, je ne sais,Peregrinus, évêque gnostique. La revue allemande de Théodor Reuss, Oriflamme, n'en soufflemot, mais ses deux numéros de l'année 1908 attribuent une large place au convent parisiende 1908.

L'O.T.O., selon Aleister Crowley, qui en fut membre éminent, est une « Academiamasonica », et Reuss assista en juillet 1920, à Zurich, au Congrès de la Fédérationmaçonnique internationale. Sur la même ligne des efforts de fédération, fût‐ce au champlimité de la franc‐maçonnerie, inscrivons un épisode de l'histoire de Memphis‐Misraïm,passés le convent et la patente de 1908. Papus mourut en 1916, Teder, son successeur, en1918. Mais, durant la guerre, le rite s'était endormi. De son côté, Reuss avait succédé, enqualité de grand hiérophante, à Yarker, depuis 1913; il accorda, le 10 septembre 1919, à JeanBricaud une nouvelle charte pour la constitution en France d'un Souverain Sanctuaire deMemphis‐Misraïm. Et le 30 septembre, le Suprême Conseil des Rites confédérés des Etats‐Unis lui délivre une autre charte afin d'établir en France un Suprême Conseil des Ritesconfédérés (Early Grand Scottish Rite, Memphis‐Misraim, Royal Order of Scotland, etc.)

Au cours de la séance de clôture du Congrès spiritualiste, le mardi 9 juin, dans l'après‐midi, Victor Blanchard, secrétaire général du congrès, lut une proposition de Paul EdgardHeydet, relative à une Confédération Spiritualiste Universelle. Papus enchaîna: « Plusieurscongressistes ont émis le voeu de fonder un Secrétariat Spiritualiste International ». Cetteproposition‐là fut adoptée à l'unanimité et Papus continua en annonçant la constitution d'unComité international d'action psychique... Ces beaux rêves, qui en appelaient non seulement

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à toutes les sociétés occultistes, maçonniques ou non, mais encore aux individualités,semblent n'avoir eu aucune suite.

Seul, un article signé par Papus le 30 novembre 1909, dans Oriflamme de décembre1909 (et reproduit dans l'Initiation de janvier 1910) appelle aux «actes» sous le titre:«Secrétariat maçonnique international (Union des Rites maçonniques)». Mais d'actes, point.

De même, l'année 1908 qui devait être la première d'une série de congrèsspiritualistes (à en croire le titre d'une circulaire dans le Voile d'Isis) sera aussi la dernière: Iecongrès n'aura pas de second.

NOTES

(1) Esotérisme et christianisme autour de René Guénon, Paris N.E.L., 1981. p. 97.(2) Dans nos extraits, l'orthographe originale a été respectée; la présentation aussi,notamment l'usage abusif des capitales initiales et des abréviations maçonniques. Quelquescoquilles ont été corrigées. Des titres pris à la table des matières ont été ajoutés commeintertitres.(3) Congrès spirite et spiritualiste international, 9‐16 septembre 1889 Librairie spirite, 1890.Voir Papus « Congrès spirite et spiritualiste international, (Paris, 1889) «L'Initiation »,octobre 1889, pp. 1‐24. En corrélation (et dans une même coïncidence avec l'expositionuniverselle de 1889): Congrès international de 1889. Le magnétisme humain appliqué ausoulagement à la guérison des maladies. Rapport général d'après le compte‐rendu desséances du Congrès, Paris, G. Carré, 1890. (Un seul occultiste parmi les intervenants: OswaldWirth !).Déjà ce congrès aurait dû entraîner, selon l'espoir de ses organisateurs, une fédération dessociétés occultistes. Papus, dans L’Initiation d'avril 1889, évoque une possible coordinationde leurs journaux et il ajoute: « Le groupement de tous ces organes devrait être le préludedu groupement de toutes les sociétés vers un but commun, mais qui pourra réaliser cetteunion ? Il appartient à la Providence de le décider». Et cette note en bas [16 L'AUTREMONDE N°97] page: «Un pas immense vient d'être réalisé pour ce groupement. Après uneentente entre tous les groupes spirites, il a été décidé qu'un comité exécutif formé d'undélégué au moins et de trois au plus de tout groupe spiritualiste (théosophique, kabbaliste,spirite, etc.) serait formé. Ce comité exécutif préparera le grand congrès spiritualiste qui seratenu à Paris, le 1er septembre. La réunion du comité aura lieu, 1, rue de Chabanais, lemercredi 24 avril. S'adresser pour tous renseignements à M. Leymarie, à cette adresse.» (p.18).(4) Voir notre article dans l'Autre Monde, n° 77: « Démonstration de l’archéomètre parPapus ».(5) Hiram, au premier chef (directeur Papus, rédacteur en chef Teder), mais aussi l'Initiation,et parfois le Journal du Magnétisme (directeur Henri Durville) ont fourni sur le congrès de1908, tant avant qu'après la réunion, des renseignements généralement identiques àcertains de ceux que procurait le Voile d'Isis.(6) Le Temple du Droit Humain était, à l'époque, sis, 51, rue du Cardinal Lemoine, Paris, Ve(R.A.)(7) Voir Serge Caillet, Sâr Hieronymus et la FUDOSI, Paris Cariscript, sous presse, (sur laFUDOSI ; notre préface esquisse l'aventure de la FUDOFSI).(8) Voir J. Bricaud, Notes historiques sur le Rite ancien et primitif de Memphis‐Misraïm, nouv.éd., Lyon, Annales initiatiques, 1938, p. 11. Le même auteur rappelle (ibid.) qu'en 1902, JohnYarker était devenu grand hiérophante du rite de Memphis‐Misraïm et que le Souverain

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Sanctuaire d'Angleterre, dont il était grand maître, avait constitué un Souverain Sanctuairepour l'Allemagne: grand maître, Theodor Reuss.

Une exacte histoire de Memphis‐Misraim reste à écrire. Même Bricaud, susnommé,n'est pas toujours sûr.(9) Sur le personnage et son activité touffue, Ellie Howe et Helmut « Theodor Reuss:Irregular Freemasonry In Germany, 1900‐23 », Ars Quatuor Coronatorum 1978, vol. 91(1979), pp. 28‐46.Robert AMADOUAOUT 1985

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Textes sortis de la revue l’initiationPage 196 Revue l’initiation année 1908 numéro :

PARTIE PHILOSOPHIQUE ET SCIENTIFIQUECette partie est ouverte aux écrivains de foute Ecole, sans aucune distinction, et chacun d'euxconserve la responsabilité exclusive de ses idées.

CONGRÈS SPIRITULISTE DE 1908Le Congrès spiritualiste tenu du 7 au 10 juin a remporté un succès complet. Le

programme a été exactement suivi et les nombreux congressistes en ont parcouru toutes lesétapes sans fatigue excessive.

Le succès financier du Congrès permet au Comité d'organisation de mettre enmarche un volume qui renfermera les communications les plus intéressantes ainsi que tousles articles de la presse quotidienne consacrés au Congrès.

C'est là, en effet, un fait à noter. Le Congrès de 1908 est une des rares manifestationscollectives du Spiritualisme qui ait ému à ce point la grande presse que chaque séance étaitrésumée dans les principaux journaux.

La constitution du Comité spiritualiste international et la Fédération maçonniqueainsi que l'établissement des secrétariats annexes constituent la conclusion véritablementpratique de ce Congrès qui laisse ainsi des traces aussi fécondes que durables.

L'Initiation et le Voile d'Isis peuvent être fiers d'avoir été les promoteurs d'un telsuccès.Nous publions dès maintenant les principales communications faites au Congrès.[Congrès SPIRITUALISTE DE 1908 197]

DISCOURS D'OUVERTURE

MESDAMES, MESSIEURS,

Venez assister au Congrès réunissant en un groupe compact les diverses formationsde l'armée spiritualiste.

Pendant longtemps, on a considéré les spiritualistes comme de doux rêveurs imbusdes idées d'un autre âge. Maintenant, les temps ont changé. Des hommes éminents par leurcaractère intellectuel, des expérimentateurs sérieux, des chercheurs de bonne foi ontcontrôlé les faits psychiques qui forment la base expérimentale de nos études et ils en ontaffirmé la réalité en dehors de toute explication théorique. La Presse s'est émue et desenquêtes ont été ouvertes un peu partout, enquêtes dans lesquelles on a dit beaucoup debien et aussi beaucoup de mal des doctrines spiritualistes.

Le moment est donc favorable pour montrer l'état actuel de nos forces, l'organisationde nos sociétés et leur rayonnement considérable à l'étranger. Nous essaierons de plusd'indiquer le caractère hautement utile au point de vue social de tous ces groupements.

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Voilà pourquoi le Congrès spiritualiste vous apparaîtra sous divers aspects que je vaism'efforcer de préciser dès maintenant.

Tout d'abord, nous vous présenterons l'état actuel [198 L'INITIATION] de nos forcesréparties dans nos sociétés, nos correspondants dans les divers pays, nos journaux et noslibraires.

C'est la revue avant la bataille.Puis, nous aborderons l'étude des théories devant, à notre avis, constituer la science

de demain qui rendra au spiritualisme sa véritable place en dehors de tout cléricalisme et detout sectarisme.

La séance du lundi après midi est consacrée à la revue des expériences pratiques dela médiumnité et aussi à l'étude du christianisme ésotérique.

Nous nous efforcerons de démontrer que les savants qui nient les faits psychiques ouqui proposent des conditions d'expériences impossibles à réaliser sont, en général, malpréparés à ces études qu'ils ne connaissent que par ouï‐dire et qu'il faudra bientôt lesplaindre, quand l'évidence et la multiplicité des faits aura classé ces sceptiques dans lacatégorie des retardataires qui, jadis, niaient la possibilité des chemins de fer, puis dutéléphone, puis du phonographe sans parler de leurs ancêtres qui se moquaient de Galvaniet de ses grenouilles électrisées.

Le caractère intrinsèque de la Vérité est de s'imposer par ses seules forces et savictoire est toujours sûre parce qu'elle possède pour elle deux facteurs admirables, le tempset la multiplicité des voies de démonstration.

C'est parce que nous sommes sûrs de posséder la Vérité que nous attendons lescontradictions avec calme et fermeté et c'est parce que nous sommes également sûrs, étantdes précurseurs, de ne pas profiter [CONGRÈS SPIRITUALISTE DE 1908 199] matériellementdu succès certain de nos idées, que nous sommes d'autant plus heureux de cette lutte.

Mais si nos doctrines n'étaient considérées que sous le point de vue soit de lathéorie, soit de l'expérimentation psychique, elles perdraient une grande partie de leurforce. En effet, le spiritualisme prétend apporter une aide puissante à la solution de laquestion sociale.

A côté des oeuvres d'assistance morale et spirituelle, le spiritualisme est peut‐être laseule voie de salut qui s'offre aux sociétés contemporaines lentement détruites dans leursoeuvres vives par le scepticisme des gouvernants et le bas sensualisme des gouvernés.

Ne croyant à rien en dehors du monde matériel actuel, les hommes seraient bien sotsde ne pas satisfaire leurs instincts et de ne pas considérer l'argent comme le seul but et leseul moyen d'agir.

Aussi, malgré la morale laïque enfantine et le képi du gendarme qui est sa principalemanifestation, les gouvernés ne veulent plus remplir aucun devoir et veulent l'exerciceintégral de leurs droits.

Le matérialisme est une étape nécessaire de la libération des cerveaux obscurcis parles faux enseignements cléricaux, mais ce n'est qu'une étape et non un but.

Les nouvelles croyances à la responsabilité effective de l'individu, à la continuité del'existence après la mort ne peuvent prendre place dans la conscience des peuples que parl'adhésion de la science aux théories spiritualistes après justification rigoureuse des faits quidémontrent ces théories.[200 L'INITIATION]

Les sociétés futures seront transformées par la certitude des deux véritésfondamentales du spiritualisme contemporain : la Survivance et la Réincarnation.

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C'est la certitude de la réincarnation qui a fait accomplir aux Japonais des foliesd'héroïsme lors des dernières guerres et le mépris de la mort qui est la conséquence decette certitude enfante des peuples capables de défendre vaillamment leur indépendance etleur nationalité.

Par contre, les nations matérialistes sont préparées à toutes les compromissions et àtoutes les défaites par l'absence de tout ressort moral.

Si le Matérialisme est une étape dans l'évolution cérébrale et non un but, cela nousapparaîtra plus nettement encore à propos des études maçonniques.

La Franc‐Maçonnerie est une création d'hermétistes.Sa constitution, ses symboles, sa lutte séculaire contre l'obscurantisme clérical le

démontrent à tout observateur sérieux.Or, cette vénérable institution a été accaparée en France par des ignorants de

l'hermétisme et de ses enseignements, qui ont méconnu les enseignements traditionnels,détruit le symbolisme et tripatouillé les Rituels pour transformer en association politiquel'antique institution initiatique.

L'Étranger où la Franc‐Maçonnerie a conservé son caractère originel, a protestécontre ce matérialisme maçonnique et les excommunications pour cause d'irrégularité ontsurgi de toutes parts.[CONGRES SPIRITUALISTE DE 1908 201]

Fidèle à la tactique des ancêtres martinistes qui ont organisé les Convents deWillemsbadt et de Lyon, nous avons appelé au travail non pas des arrivistes ni despoliticiens, mais bien tous les centres où se trouvent des hommes assez instruits de laScience maçonnique pour préparer l'adaptation des Rituels à l'époque actuelle.

Nous sommes encore émus de la spontanéité avec laquelle on a répondu de partoutà notre appel et cela nous est un précieux encouragement pour l'avenir. Les travauxhistoriques de notre Frère Teder auront été d'un précieux secours à cette occasion et je suisheureux de lui adresser, à ce propos, nos plus vives félicitations.

Ainsi organisation de la Propagande spiritualiste, étude des théories, mise en état desrecherches expérimentales concernant les faits psychiques, détermination des adaptationssociales du spiritualisme, réforme du symbolisme maçonnique et justification des traditionshermétiques de cet Ordre, telles sont les questions que vous aurez à aborder pendant ladurée du Congrès.

Avant de terminer, je tiens à remercier tous les professeurs de l'École hermétique,tous les FF! de nos Loges martinistes, tous les membres des nombreuses sociétés amies quinous ont si puissamment aidés dans l'organisation de nos réunions.

Vous les verrez, du reste, à l'oeuvre et vous leur adresserez vous‐mêmes, j'en suisconvaincu, les éloges et les encouragements qu'ils sauront si bien mériter.

PAPUS.

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L'ALCHIMIEMESDAMES, MESSIEURS,Je viens vous parler d'alchimie.Ne vous semble‐t‐il pas, à ce mot « alchimie », voir revivre soudain d'une vie fugitive, commeen une vision cinématographique, les vieux laboratoires poussiéreux qu'agrémentaient sibien chauves‐souris crucifiées et crocodiles rêveurs suspendus aux plafonds ; puis, dans unrepli sombre de cet immense grimoire, il ne me vient pas de terme qui rende mieux mapensée, pressenti plus que vu un mouvement lent, quelque chose comme un hochement debarbe blanche au‐dessus de l'athanor au feu silencieux, dénotant seul que quelqu'un vit là.Et l'impression que vous en ressentez est celle d'une lente agonie, d'une mort imminente, lamort d'une science !Non ! Mesdames, messieurs, la science ne meurt pas.Rien ne se perd, tout se crée, ou plutôt comme l'a si bien dit un de nos savantscontemporains : tout se transforme, lentement, gravement, avec cette certitude, cettemaîtrise que le penseur reconnaît si bien dans la main de Celui qui peut tout et sourit del'en‐ [CONGRÈS SPIRITUALISTE DE 1908 203] thousiasme et du désespoir de l'homme quicroit si facilement pouvoir tout.

Mais auparavant, mesdames, messieurs, je croirais faillir à mon devoir si jen'évoquais aujourd'hui trois noms qui me sont chers, moi qui ne suis encore qu'étudiant encette science à laquelle, par une intuition étrange, viennent s'abreuver nos savantsmodernes, avant chaque découverte ; trois êtres grands autant que modestes.

Deux ont disparu ; le troisième s'éteint peut‐être à cette heure, presque dans lamisère, bafoué, ridiculisé, mais dont les découvertes ont passé, faisant frémir ceux quicroient en l'avenir, et terrorisant d'autres.

J'ai cité Louis Lucas, Albert Poisson, Tiffereau.Il ne m'appartient pas de faire leur apologie, je ne m'en sens pas capable. La lecture

de leurs oeuvres, la connaissance de leur vie, de ce qu'ils ont souffert, suffisent à qui veutréfléchir pour les juger. Je vous disais tout à l'heure que l'alchimie n'était pas morte. Qu'est‐ce, en fait, que l'alchimie ? C’est la « chimie intégrale », tout chimiste consciencieux tomberafatalement dans son domaine. Sur quoi se base‐t‐elle ? La Synthèse ! Or, on sait quelbouleversement amena dans la Science M. Berthelot en établissant la synthèse. Et quellesprécautions prit‐il, mon Dieu, quels tâtonnements quand on considère les travaux deParacelse, Flamel, Bacon, Lulle et tant d'autres. Becquerel et la lumière noire, Crookes et lesrayons X, Curie et le radium, Moissan le diamant, Frémy le rubis n'ont fait rien qu'alchimie,mais, comme M. Jourdain, hélas ! sans le savoir. [204 L'INITIATION]

Et beaucoup de savants seraient très étonnés d'apprendre que les alchimistesconnaissaient le radium, employaient le radium, à un état plus essencifié même, mais ils nel'appelaient pas le radium, là est toute la différence !

Il me semble qu'avec les noms que je viens d'avoir l'honneur de vous citer, l'alchimien'est point morte, bien qu'elle ait raccourci son nom, et c'est ce qu'il fallait démontrer.

Les matérialistes ont la prétention d'expliquer tout par la matière ; au delà : plus rien,le vague, le vide.

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Soit ! à une condition toutefois, c'est que ce vague, ce vide, soient encore de lamatière et nous arriverons à nous entendre.

Ce qui est plus grave, c'est la façon dont ils ont interprété l'axiome de Lavoisier :Rien ne se perd, rien ne se crée.

L'alchimie a dévoyé là. Basée sur les corps simples (on dit maintenant prétendussimples, et c'est un progrès) on nous apprend que du soufre et du mercure cela fait dusulfure de mercure, et que pour faire du sulfure de mercure, il faut du mercure et du soufre.

Répondons par les faits :Sur une plaque de verre propre, étendons de la poudre de verre, arrosons‐la d'eau

distillée, par conséquent pure, et semons‐y quelques graines germant facilement.Si nous avons eu soin de peser notre graine, et que nous pesions notre récolte, nous

remarquons, et c'était [CONGRÈS SPIRITUALISTE DE 1908 205] à prévoir, que cette récolteest de beaucoup supérieure en poids à la graine semée (dans cette remarque enfantine estcontenue toute la vérité !) ; mais, allons plus loin : analysons notre graine et notre récolte ;nous remarquons dans cette dernière de la potasse, du soufre, des oxydes de fer, demanganèse, en quantité de beaucoup supérieures aussi à celles trouvées dans la graine.Comment ces matières se sont‐elles formées ? Est‐ce aux dépens du verre ? Il n'a paschangé de poids, d'aspect ni de propriétés ; de l'air ? mais l'air n'en contient pas et,d'ailleurs, il était facile de le filtrer ; de l'eau ? Même réponse.

N'y aurait‐il pas eu là une transmutation des éléments oxygène, hydrogène, azote ?—Mystère !

Continuons d'expérimenter.Prenons une cloche tubulée à sa partie supérieure, fermons cette tubulure par un

bouchon de verre que traversera une tige de cuivre munie à sa partie plongeant dans lacloche d'une boule garnie de pointes. Faisons le vide dans cette cloche après y avoirintroduit de la potasse pure. Remplaçons l'air par de l'oxygène et mettons notre tigemétallique en rapport avec une bonne machine statique.

Dans l'obscurité, l'expérience est frappante. Nous voyons les effluves électriquespénétrer la potasse cependant que l'oxygène diminue de volume. Rajoutons de l'oxygène etchargeons, jusqu'à refus, notre potasse d'électricité. Analysons alors le produit formé.

Étant donné que nous n'avons mis là, que de la potasse et de l'oxygène en présence,nous devons retrou‐ [206 L'INITIATION] ver ces mêmes éléments. Erreur 1 nous avons là de«l'azotate de potasse ».

D'où vient cet azote ? Mystère !Nous pourrions ainsi multiplier les faits, et nos convictions se raffermiraient encore

sur l'unité de la matière.Continuons d'expérimenter dans un autre ordre d'idées.Fermons le circuit d'une pilé Bunsen par un fil de platine choisi en conséquence. Le

courant passe, rien ne le dénote ; sauf la déviation d'une aiguille aimantée.Fermons de la même façon le circuit de deux piles Bunsen: de la chaleur se dégage,

très appréciable. Fermons le circuit de trois piles : le fil rougit et éclaire.Voilà donc de l'électricité, force réputée simple, qui nous donne au contact d'une

matière unique: le platine, du magnétisme, de la chaleur, de la lumière.N'y aurait‐il, par hasard, qu'une seule force ? C'est ce que tous les alchimistes ont

prouvé, ce que nos physiciens prouvent tous les jours et ce que nous ne voulons pasadmettre.

Donc, si la force est une, nous pouvons la condenser à l'aide de la matière.

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Si cette matière est une, nous pouvons, aidé par la force, la faire passer par sesdifférents modes, la faire vivre, évoluer, à l'égal des végétaux et des animaux.

Et je viens de vous donner avec ces dernières paroles le grand arcane de la Science :l'Analogie. Il est vrai, sans mensonge, certain et très véritable, [CONGRÈS SPIRITUALISTE DE1908 207] que ce qui est en haut est comme ce qui est en bas, ce qui est en bas comme cequi est en haut, pour accomplir le miracle de l'unité.(Table d'Hermès).Mais je ne veux pas insister sur de trop profondes théories; et, me rangeant pour un instantdu côté du matérialisme, je dirai qu'un seul fait vaut mieux que cent hypothèses.— A‐t‐on fait de l'or ?— Oui ! et je vous donnerai le moyen facile d'en faire, rassurez‐vous vite, pas beaucoup !

Tiffereau, dont je vous parlais tout à l'heure, a réalisé la production de l'or artificiel.Voici son procédé :Ayant dans de l'acide azotique pur, dissout de l'argent et exposé le tout au violent

soleil du Mexique où il était alors, il vit se déposer, au sein de la liqueur, une poudre noireinsoluble dans les acides forts, soluble seulement dans l'eau régale et donnant à l'analysetoutes les, réactions de l'or.

C'était bien, en effet, de l'or précipité.Quand Tiffereau présenta à qui de droit le résultat de ses recherches, il lui fut

répondu ceci : « Quand vous en aurez fait 1 kilogramme, vous viendrez nous trouver. »Il fit de l'or artificiel par d'autres procédés encore, il prouva synthétiquement dans de

vulgaires pots de fleurs, l'évolution des placers d'or.Cela n'a point suffi. Toutes ses expériences sont tombées, pardon, ont été précipitées

à l'oubli, d'où [208 L'INITIATION] elles sortiront, soyez‐en sûrs, vivaces et fortes. Rien ne seperd !

Mais je vous ai promis un moyen de faire de l'or, le voici :Faites dissoudre séparément dans de l'eau distillée du sulfate de fer et du

chlorhydrate d'ammoniaque. Mélangeons ces dissolutions dans une cuvette photographiqueet ajoutons avec précaution de l'ammoniaque. Il se forme à la surface du liquide unepellicule irisée, à reflets métalliques fort jolis qui n'est autre qu'un miroir d'or.

Recueillons cette pellicule et après l'avoir lavée à l'éther, dissolvons‐la dans dumercure ; nous aurons un amalgame d'or facilement dissociable par Ies procédés ordinaires,l'électrolyse en particulier.

Cette expérience, nous l'avons faite cent fois, d'autres que nous l'ont faite, il est doncimpossible de nier la transmutation.

J'abuse de votre temps, mesdames, messieurs, et je vais abréger.Qu'est‐ce que la pierre philosophale ?Une poudre rouge qui, projetée dans un métal en fusion, opère sa transformation en

un métal supérieur, argent ou or.Causons d'analogie.Le fait est le même dans toute fermentation. Là, sous l'influence d'une matière

étrangère, d'un déterminatif, eût dit Louis Lucas, nous voyons une masse organique setransformer. Cela ayant lieu dans le monde organique doit avoir [CONGRÈS SPIRITUALISTEDE 1908 209] lieu dans le monde minéral, et quiconque en nierait la possibilité seraitimmédiatement renvoyé à la genèse du salpêtre sous l'action d'un ferment : le bacillenitrifiant.

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La pierre philosophale n'est pas autre chose qu'un ferment minéral, faisant, si vousme permettez l'expression, lever une pâte métallique.

Pourquoi les alchimistes ont‐ils caché sous des phrases ambiguës la composition decette pierre ?

Les alchimistes n'ont pas caché plus la composition de la pierre que M. Berthelotn'eût caché la composition de la saccharine sous le nom, baroque peut‐être, d'acideanhydrorthosulfamide benzoïque ou la formule : C6H4COSO2AzH.Les alchimistes s'adressaient aux savants de leur ordre, leurs écrits sont clairs, seulement ilfaut savoir lire, et l'on ne nous apprend plus à lire au grand livre de la vie.Vous parler du soufre, du mercure et du sel n'a rien de plus extraordinaire que de vousparler du benzyle, du cyanogène ou de l'ammonium.

La guerre fut déclarée à cause des termes terre, eau, air, feu, il eût fallu dire, pourêtre sur le chemin de la vérité : solide, liquide, gazeux, radiant. Quand donc cesserons‐nousces guerres de mots ! Mais terminons.

Une dernière objection, la principale.La pierre philosophale a‐t‐elle existé ?Notre maître, M. le docteur Papus, l'a surabondamment prouvé, et je renverrai les

personnes dési[210]reuses d'être convaincues, à l'ouvrage qu'il fit paraître, intitulé : De lapierre philosophale ; preuves irréfutables de son existence. Il ne me reste, mesdames,messieurs, qu'à vous remercier de votre bonne attention. A remercier M. le docteur Papusdu moment qu'il m'accorda pendant lequel j'ai du vous ennuyer très fort, et à remercier lespersonnes qui voudraient bien apporter leurs lumières pour nous guider sur ce grand cheminde l'art spagyrique encombré de ruines aujourd'hui.QUINTOR.

!

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Revue l’initiationPARTIE PHILOSOPHIQUE ET Scientifique : Cette partie est ouverte aux écrivains de touteEcole, sans aucune distinction, et chacun d'eux conserve la responsabilité exclusive de sesidées.

Première base du Congrès spiritualiste de 1908

Le voyageur qui après une course pénible atteint un sommet de montagne s'arrêteavec plaisir pour embrasser d'un coup d'!il le chemin parcouru. C'est ainsi qu'il est bon aubout de plusieurs années d'efforts de résumer le résultat acquis et c'est pour une telleoeuvre que les congrès sont utiles.

Mais le propre d'un congrès bien organisé c'est d'éviter tout sectarisme et de faireappel à toutes les bonnes volontés en vue de l'intérêt supérieur. Voilà pourquoi c'est unlarge congrès spiritualiste que nous voulons organiser en juin 1908 en groupant pendantquelques séances les forces actuellement éparses.

Ce sont les sociétés et les journaux occultistes qui organiseront ce Congrèsspiritualiste, mais en ouvrant toutes grandes les portes à nos confrères spirites etmagnétiseurs. Nous ne sommes pas de ceux qui rougissent de leurs frères de combat, et siles spirites nous ont trouvé à leurs côtés chaque fois qu'il s'est agi de livrer bataille pour ladéfense de l'idéalisme, nous ne voulons pas bien que ne partageant pas toutes , leurs idées,traiter nos frères spirites en profanes comme [LE CONGRÈS DE 1908 103] le font lesprétendus savants s'occupant de psychisme et nous serons fiers de consacrer une section denotre Congrès au spiritisme vrai en faisant appel aux écrivains spirites pour la direction decette section.

De même qu'on a voulu oublier les services considérables rendus à la causespiritualiste par les spirites, on a traité dédaigneusement les efforts désintéressés desmagnétiseurs auxquels l'hypnotisme est redevable de son existence et de ses succès. Unesection magnétique sera donc créée dans notre congrès pour centraliser les résultatsactuellement acquis en France et à l'étranger.

Enfin il est urgent que les Français rattachés aux formations maçonniques soient misà même d'établir un parallèle entre la véritable franc‐maçonnerie traditionnelle et lespiritualiste et les extraits d'ignorance et d'erreurs qu'on débite en France sous couleurmaçonnique. Aussi sans tenir compte des injures ni des prétentions à la régularité exclusivede ceux qui ne seraient reçus dans aucune loge sérieuse de l'étranger, allons‐nous organiserun Convent de Rites spiritualistes dont les loges proclament en tête de leurs Planches LeGrand Arch! de l'Un! Notre F! Détré Teder 33e aura la haute direction de cetteimportante section.

Des tenues blanches alternant avec les tenues réservées permettront à tous nosadhérents d'assister aux fêtes maçonniques données à cette occasion.

Pour terminer l'organisation préliminaire rappelons la nécessité d'une ententecommerciale entre les divers éditeurs s'occupant de publications occultistes, [104L'INITIATION] magnétiques et spirites. Une section de propagande sera établie pourrechercher les bases possibles d'une telle entente.Dès maintenant le Voile d'Isis va centraliser, sous la direction du jeune Chacornac, toute lapartie administrative du futur Congrès.

L'Initiation va présider au groupement des Écoles occultistes.

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Le Journal du Magnétisme va s'occuper de la section magnétique du Congrès, sous ladirection de Durville.

La revue Hiram organisera le Convent maçonnique en faisant appel aux suprêmesconseils amis et aux autres à l'occasion.

Enfin nous ferons d'ici un mois les démarches en vue de l'appui d'un ou de plusieursjournaux spirites.

Pour le moment nous ne voulons aucune souscription. Selon nos habitudes nousorganiserons tout à nos frais pour commencer et nous ne ferons appel à nos lecteurs quelorsque nous aurons la certitude d'une réussite à peu près certaine (1).PAPUS.(1) Les réunions du Congrès auront lieu le dimanche 7 juin (2 séances), lundi 8 (3 séances) etmardi 4 (2 séances). Excursion le mercredi.

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Ordre martiniste.Les Souverains Délégués Généraux, les Délégués et les Chefs de Loges sont priés de préparerdès maintenant :1° Un rapport indiquant l'état de l'Ordre dans les pays qu'ils représentent.2° Les v!ux et les demandes qu'ils seraient heureux de voir adopter et mettre en pratiquepour le bien de l'Ordre martiniste.Ces renseignements seront nécessaires pour le Congrès de juin 1908.Le Suprême Conseil.

Le Congrès occultiste de juin 1908

Tous nos lecteurs sont invités à faire dès maintenant les propositions qui leur sembleraientutiles pour le prochain congrès.[280 L’Initiation 1908 N° 3]Nous serons heureux d'avoir pour cette organisation les idées de nos amis et de lesappliquer dans la mesure du possible.Les questions qui intéressent chacun peuvent être précisées des maintenant.

Adresser toutes les communications et les adhésions à M. Chacornac 11, quai Saint‐Michel,Paris.

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CONGRÈS SPIRITUALISTE DE 1908

Aux SPIRITUALISTES DE TOUTE ÉCOLE.Chaque jour, les doctrines matérialistes voient se rétrécir le champ de leur action. En

littérature, dans la science, dans la philosophie, et même dans le journalisme et la viesociale, on tend à la recherche de nouvelles lois qui amènent les intelligencescontemporaines vers un spiritualisme non plus dogmatique, mais dérivé des recherchesexpérimentales.

Les phénomènes psychiques de toute nature, les faits d'hypnotisme, de télépathie, despiritisme et de médiumnité sont considérés comme des faits positifs par beaucoup desavants contemporains et ne sont plus niés systématiquement que par une poignée deretardataires ou de sectaires. De tous côtés, on tend à rechercher la théorie de ces diversphénomènes et il est juste que les Spiritualistes ayant été à la peine revendiquentpubliquement le résultat légitime de leur effort.

On voudrait inventer les théories si anciennes de l'astral, du périsprit et desprojections fluidiques en les déformant et en changeant leur nom. On voudrait nier toutecommunication possible entre le monde [2 L'INITIATION avril 1908] des vivants et le pland'au‐delà de la mort. On méconnaît la grande portée sociale de la diffusion de la doctrine dela Réincarnation et des Existences successives.

Aussi, le moment nous a‐t‐il semblé favorable pour grouper de nouveau toutes lesfractions de la grande armée spiritualiste en un Congrès où seront abordés les différentspoints de vue soulevés par chacun des problèmes qui sont posés à la Science et à l'Art dedemain.

En dehors de toute École et de tout sectarisme, nous appelons au Congrèsspiritualiste de 1908 toutes les bonnes volontés.

Une salle de six cents places sera mise sept fois à la disposition des orateurs, etl'organisation des sections permettra un travail fructueux.

Dès maintenant sont organisées les sections suivantes :Théorie des Faits psychiques ;Étude de la Médiumnité et formation des Médiums;Renaissance du Symbolisme et son adaptation à la Science actuelle ;Étude de l'Enregistrement des Forces psychiques ;Tradition Hermétique et son adaptation ;Réincarnation et action sociale ;Propagande et édition des journaux et des livres spiritualistes ;Secrétariat spiritualiste international.

D'autres sections seront organisées ultérieurement,Que tous ceux qui veulent aider ce Congrès envoient dès maintenant leur adhésion. On peutadhé[1908 CONGRES SPIRITUALISTE DE 1908 3]rer dès maintenant, sans envoyer desouscription. Que ceux qui ont des communications à lire ou à faire lire nous en avisent dèsmaintenant.

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Et que tous les amis du spiritualisme se mettent au travail.Envoyer les souscriptions et les adhésions à M. P. Chacornac, 11, quai Saint‐Michel,

Paris.Le Congrès se tiendra du 7 au 9 juin, au Palais des Sociétés savantes, et comprendra,

outre les réunions, des séances de cinématographe et de projections, des excursions et desexpériences.

Nous faisons appel à tous et nous accepterons tous les concours avec la plus grandereconnaissance.Pour le Comité d'organisation provisoire,Docteur PAPUS.

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CONGRÈS SPIRITUALISTE DE 1908L'organisation du Congrès Spiritualiste se poursuit normalement.Les frais matériels sont déjà presque entièrement couverts, et nul doute que tout ne

soit en ordre le jour de l'ouverture.Quant à l'organisation proprement dite du Congrès, elle est commencée sous les

meilleurs auspices.Le dimanche 17 mai les commissions préparatoires ont été nommées et chacune a

reçu une tâche déterminée et distincte.La commission de propagande, la commission de l'exposition rétrospective des

instruments et souvenirs provenant des anciens maîtres, des Chartes et Diplômes délivréspar les formations françaises et les sociétés affiliées, ces commissions ont commencé leurstravaux.

Les noms des présidents d'honneur et des présidents effectifs du Congrès serontpubliés dès l'ouverture.

Nous nous tenons à la disposition des délégués de province ou de nos amis del'Étranger qui, comptant venir au Congrès, désireraient retenir des logements [98L'INITIATIONMAI 1908] à Paris. Il leur suffira d'écrire à la rédaction de l'Initiation.

Voici du reste le programme des séances, qui sera peu modifié dans le programmedéfinitif devant être distribué le premier jour de réunion.

PROGRAMME DES SÉANCES ET DES TRAVAUX

DIMANCHE 7 juin, 10 HEURES DU MATINGrande salle des Palais des Sociétés Savantes, 8, rue Danton, Paris.Réception des délégués. Constitution des sections et des divers Bureaux. Distribution descartes aux souscripteurs et aux auditeurs.Communications diverses (de 11 heures à midi).

DIMANCHE, 2 HEURES APRÈS‐MIDIDiscours d'ouverture par Papus ;Discours du secrétaire général : La propagande et les grandes sociétés ;La presse spiritualiste;Communications diverses concernant la propagande, la littérature et le spiritualisme.

DIMANCHE SOIR, A 9 HEURESTenue blanche maçonnique au Temple du droit humain, 51, rue du Cardinal‐Lemoine.Tenue ouverte à tous les membres du Congrès.Les Mart!, les Fr! des rites spiritualistes et les FF! et les SS! des rites affiliés sont priés dese décorer.

[1908] CONGRÈS SPIRITUALISTE DE 1908 ‐ 99]

L'Avenir de la maçonnerie. L'adaptation des sciences à l'Initiation maç! La Femme et laMaçonnerie mixte.

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LUNDI 8 JUIN, 9 HEURES DU MATINGrande salle des Sociétés savantes.La Théorie occultiste et le Spiritualisme ;Le lendemain de la Mort, d'après les diverses Écoles (Invitation aux Théosophes).Immortalisme et Psychisme. Utilité de l'Occultisme pour le progrès des Sciences.Communications diverses.

LUNDI, 2 HEURES APRÈS‐MIDILe Sujet et le Médium. La Médiumnité et ses résultats.Les Sociétés d'études psychiques. Les Organisations d'études familiales. Formation dessujets. Formation et étude des médiums. Une séance bien conduite. Un Centre d'études bienorganisé. Règles précises pour les études psychiques.Le Christianisme ésotérique (Président: A .Jounet).

LUNDI, 9 HEURES DU SOIRGrande séance de gala ;Expériences pratiques. Appareils enregistreurs.La Musique et ses effets psychiques. Le Cinématographe et ses adaptations occultes.Diverses pratiques et instruments enregistreurs. La Photographie et les faits psychiques.

[100 L'INITIATION]

MARDI 9 JUIN, IO HEURES DU MATINL'Action sociale et les Sociétés spiritualistes. Le Spiritualisme scientifique seul salut dessociétés actuelles. Erreur de l'éducation matérialiste des sociétés.Les Ignorances et les Fautes de la maçonnerie en France. Constitution d'un centrespiritualiste international d'Etudes sociales. L'invisible dans le social et le culte familial.

MARDI 9 JUIN, APRÈS‐MIDIClôture du Congrès actif et v!ux. Discours de clôture et constitution des sociétés futures.Fédération de forces spiritualistes. Délégués spiritualistes de toute École. Secrétariatinternational.

MARDI 9 JUIN, 8 H 30 DU SOIRTenue Maç! spéciale réservée aux délégués des Rites étrangers et aux FF. des Ritesespagnols, du Rite swédenborgien, du Rite mixte (ainsi qu'aux SS. de ce Rite et de l'Ordremartiniste munis chacun de leurs insignes.

Discussion des v!ux du Convent Maç! des Rites spiritualistes. Présidence du F. Teder.

MERCREDI 10 JUIN APRÈS MIDI.Les membres du Congrès munis de leur carte seront conduits en excursion pour visiter lesprincipaux monuments symboliques de Paris; l'étude des Portails de Notre‐Dame de Paris etde la Tour Saint‐Jacques sera spécialement détaillée.

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PAPUS.

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Le Christianisme ésotériqueCOMMUNICATION AU CONGRÈS SPIRITUALISTE (juin 908.)MESDAMES, MESSIEURS,

La lettre tue.Mais, heureusement, la lettre meurt.L'esprit ne meurt point. Il ne faut donc pas s'effrayer des crises morales et religieuses

de notre temps. C'est l'agonie de la lettre. Il faut s'attacher à l'impérissable esprit.Nul ne pourra s'y attacher mieux que vous, spiritualistes libres et sincères, car ce qui

vous intéresse dans la religion, c'est son esprit. C'est l'âme, l'immortalité et Dieu. Lesquestions de culte, de hiérarchie et de politique absorbent trop certaines Églises. Celadevient le principal. Quant au Créateur infini, généreux, immensément sauveur, à l'âmeimmortelle, à ses relations psychiques avec son Père céleste et les autres âmes, enveloppéesou dégagées de la chair, cela devient l'accessoire.

C'est demeuré le principal pour vous, et pour le Christ.Imaginez que des chrétiens primitifs ressuscités pénètrent dans l'un de vos groupes

d'étude. Ils n'y [LE CHRISTIANISME ESOTÉRIQUE 137] seraient pas dépaysés. Le souci de l'Au‐Delà, l'union psychique avec Dieu et les chères âmes disparues, les phénomènes deprémonition et d'inspiration, de voyance, passionnaient, autant que vos groupes, lesassemblées des premiers chrétiens. Et les charismes d'alors impliquaient ce que nousappelons aujourd'hui le psychisme.

Mais imaginez ces chrétiens primitifs ressuscités pénétrant dans telle réunion sacréeoù un maître décide l'avenir de l'Église. Ils y seraient fort dépaysés. Le souci de l'En‐Deçà leury paraîtrait l'emporter sur le souci de l'Au‐Delà et le goût de conserver le pouvoir en cemonde sur le goût d'explorer l'autre monde. Ils verraient que la question vitale, c'estdésormais la question de hiérarchie, de commandement.

Et, si vous ne régnez, vous vous plaignez toujours.Les chrétiens antiques s'ébahiraient du Jésus nouveau, le Jésus caporaliste.Mais le Christ véritable a dit : « Celui qui voudra sauver sa vie, la perdra ».Et il serait légitime d'en conclure : Celui qui voudra sauver son autorité la perdra. »Car, dans l'ordre divin, ce qu'on veut garder pour soi‐même, à tout prix, on le perd, et

l'on sauve ce qu'on abandonne à Dieu.

!Préservons‐nous d'imiter ces esclaves des choses du dehors, ces hallucinés du visible.

Ne cherchons pas comme eux, le Christianisme dans l'extérieur le [38 L'INITIATION] plusépais, dans la politique et l'oppression. Ne le cherchons même pas d'abord dans son histoireet les faits externes de l'Évangile. Mais cherchons d'abord le Christianisme dans l'intérieur, etdécouvrons‐le au fond de notre âme. Par la foi, l'expérience intime, la mystique et la raison,par le concours lucide et ardent de toutes nos facultés, acceptons et arrivons à vivre et àprouver, en nous, les vérités religieuses primordiales, le Dieu infini, la vertu, l'immortalité,l'espoir du salut de tous et de l'éternelle gloire en Dieu. La foi nous fait accepter ces vérités.L'expérience intime et la mystique nous les font sentir et vivre. Enfin la raison nous lesprouve, car notre raison démontre que l'Infini est sans limites dans la durée comme dansl'espace, qu'il ne manque pas des facultés, intelligence, amour et volonté qu'il nous donne etque le néant l'atteste impossible. Or l'Infini possédant volonté, intelligence, amour, c'estDieu même, la vertu n'est que la subordination du moi à l'Infini, l'immortalité résulte de

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l'impossibilité du néant. Et l'espoir du salut de tous et de l'éternelle gloire en Dieu n'est quela déduction logique de cette immortalité et d'un Dieu sans limites dans sa miséricordecomme dans son existence.

Alors, appuyé sur ces vérités, ayant senti et prouvé le Divin et l'humain, nouspouvons méditer par la raison, accepter par la foi l'union suprême de ces deux termes, leplus haut idéal concevable: l'Homme‐Dieu.

Et tous les autres mystères du Christianisme, nous les ramenons à l'étatd'expressions, de dépendances [LE CHRISTIANISME ÉSOTÉRIQUE 138] de cette véritégénérale : la divinisation humaine. Ici nous aurions le droit de faire halte, car nous avons déjàconquis l'essentiel du Christianisme ésotérique. Dieu et l'homme spirituel pour bases etl'Homme‐Dieu pour but, voilà cet essentiel. Quoi de plus simple ? Et, en même temps, quoide plus sublime, de plus insondable ? Il ne faut pas se figurer que les vérités réellementésotériques sont très nombreuses, très enchevêtrées. Au contraire, ce qu'il y a de plusprofond, c'est ce qu'il y a de plus simple. Mais l'éternité ne suffira pas à épuiser lesmagnificences, les découvertes, les béatitudes que cette simplicité renferme. Commeéquation, comme formule, rien de moins compliqué que les trois termes : Divin, humain etleur synthèse. Et les innombrables abîmes de l'omniscience tiendraient dans ce cadre.

!En discernant au fond de nous le Christianisme ésotérique essentiel, nous acquérons

l'intuition qui nous permet de le saisir dans les textes de la Tradition. Suivre la méthodeopposée, apporter un texte à ceux qui n'ont pas ranimé en eux‐mêmes l'intuition à la foismystique et rationnelle, c'est incohérent. C'est exiger la fonction sans le concours del'organe. Ouvrez l'Évangile devant un homme qui dort. Il ne lira pas. Il faut le réveiller. Or,tels que la nature nous a faits, nos aptitudes religieuses sont assoupies. Ii faut les réveiller aucontact de la lumière intérieure. Et, quand elles ont lu, en nous, le Christianisme vivant, alorselles peuvent le relire, à travers [140 L'INITIATION] nos yeux de chair, dans le Christianismetextuel, traditionnel.

Et le Christ idéal, évoqué d'abord dans notre esprit, nous le retrouvons dans le Christhistorique. Cette méthode qui commence par Dieu et l'âme et non par l'extérieur, pasmême par la vie terrestre de Jésus, la Tradition l'autorise. Ce n'est point une fantaisiemoderne. C'est la méthode de l'Évangile selon saint Jean. Car saint Jean commence par « laLumière qui éclaire tout homme venant en ce monde », la révélation de Dieu à l'âme et il netraite qu'ensuite du Verbe fait chair, du Christ de l'histoire. C'est la méthode logique etdéfinitive. Saint Jean, écrit après les Synoptiques, doit leur être regardé comme supérieur. Làaussi il faut dire : « Les derniers seront les premiers ».

J'aurais pu, en aide à l'intuition mystique et rationnelle proprement dite, invoquer lesphénomènes du psychisme moderne. Je rappelais, au début de cette brève conférence, queles chrétiens de l'ère apostolique les avaient pratiqués. Mais vous les connaissez trop pourque j'y insiste. L'Ésotérisme religieux, d'ailleurs, s'occupe surtout du rapport de cesphénomènes avec l'intuition et laisse à la science la critique de leurs aspects matériels.

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L'Homme‐Dieu ne signifie pas l'homme substitué à Dieu.Le Christianisme du dehors, exotérique, si, dans sa doctrine officielle, il n'a jamais

voulu ou jamais [LE CHRISTIANISME ÉSOTÉRIQUE 141] osé une pareille substitution, l'arendue possible dans les tendances inconscientes de bien des fidèles, par la manière obscuredont il s'est exprimé et par l'orientation qu'il a laissé prendre au culte.

La doctrine théorique défend, saint Thomas d'Aquin le précise, de dire que Jésus, entant qu'homme, est Dieu.

Néanmoins, la plupart de ceux qui n'adoptent pas le Christianisme ou qui l'ont quitté,gardent l'impression que l'homme Jésus est Dieu dans le Christianisme.

Et ce n'est pas tout à fait leur faute. On aurait dû nettifier, par des divulgationspopulaires et claires, qu'en l'être complexe Homme‐Dieu, c'était Dieu seul qui était Dieu,ainsi qu'en nous c'est l'âme qui est âme.

Et l'on aurait dû réserver très nettement, très évidemment à Dieu la même placesouveraine et sans égale dans la prédication et le culte que dans la doctrine.

Il ne faut jamais perdre de vue les vérités premières qui dominent les autres et quenulle spéculation théologique ultérieure n'a le droit de changer. Ce qu'il y a d'abord decertain, dans le mystère de la Trinité, c'est que Dieu est unique ; dans le mystère del'Incarnation, c'est que Dieu seul est Dieu ; dans le mystère de la Rédemption, c'est que Dieunous sauve. Et aucun développement, aucune subtilité n'ont licence d'affaiblir cescertitudes. Les Églises chrétiennes oublient trop souvent l'esprit, sinon la lettre officielle deces grands axiomes. Tout va, chez les protestants, au Christ, auteur de la justification; chez[142 L'INITIATION] les catholiques, au Christ mystique, à l'Eucharistie, à la Vierge et auxSaints. On dépouille l'Éternel de ses prérogatives. Inconsciemment, les Églises tendent à fairede Dieu le roi Lear de la religion.

Nous, chrétiens ésotériques, nous maintenons rigoureusement, au contraire, lesaxiomes qui obligent les mystères du Christianisme au respect absolu de l'Éternel et de laraison. Et ce respect, cette authentique et lucide orthodoxie facilitent notre accord avec lesspiritualistes et théistes libres que choquent, à juste titre, les hérésies, les idolâtries d'allureet d'accent des orthodoxies prétendues.

Et nous n'avons rien de sectaire. Nous nous allions sur les vérités qu'ellesreconnaissent comme nous, n'en reconnaîtraient‐elles qu'une seule, avec toutes les Églises,toutes les religions, toutes les philosophies, toutes les doctrines. Et nous n'exigeons pointqu'elles nous rendent la pareille. L'Humanité Une ne se réaliserait jamais si l'on attendait,pour s'allier, la réciproque. Il sied d'avoir la magnanimité de recueillir partout ce que l'onrencontre de vrai et de bien et d'en faire la synthèse malgré les désaveux, peut‐être leshaines de certains de ceux chez qui l'on rencontre ce bien et ce vrai.

Il ne faut excommunier que l'excommunication. Ne perdons pas cependant lafranchise énergique de proposer à nos frères qui les repoussent ou les négligent les véritésautres que celles qu'ils admettent comme nous. Tolérance et apostolat coexistent : l'on tendune main à tout le monde, et, de l'autre main, on lève tout le drapeau ![LE CHRISTIANISME ÉSOTÉRIQUE 143]

C'est ainsi que, d'accord avec les spirites non chrétiens et les théistes sur les véritésreligieuses antérieures à l'Homme‐Dieu, nous leur proposons ce mystère qu'ils ne confessentpas encore. De plus, maintenant, nous les invitons à dépasser et nous dépassons lasommaire notion de l'Homme‐Dieu que je vous ai précédemment éclaircie. Nous les invitonsà nous suivre dans l'étude approfondie des mystères du Christianisme.

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Examinons la Trinité. Dieu est unique absolument. Le Christ le déclare. Il reprend àson compte, en l'Évangile selon saint Marc, la parole de l'Ancien Testament : « Écoute, Israël,le Seigneur ton Dieu est le seul Dieu. » Mais, dans cette unité absolue, peut‐il subsister deséléments irréductibles. Il en subsiste dans nos sensations. Nous avons deux ternaires de sens: un ternaire comprenant la vue, l'ouïe et l'odorat, et un autre comprenant le goût, letoucher actif (sens de la dureté, de la mollesse), et le toucher passif (sens du froid, de lachaleur). Pour abréger, ne considérons que le premier ternaire. Vue, odorat, ouïeappartiennent à l'unité du même sujet, qui est nous. Pourtant, le parfum, le son, la couleur,s'avèrent, comme sensations, mutuellement irréductibles. Dans les phénomènes desynesthésie, une sensation en provoque une différente ; par exemple, dans l'auditioncolorée, un son provoque une couleur, mais son et couleur n'en restent pas moinsirréductibles mutuellement. Et le parfum aussi est à jamais quelque chose d'original etd'irréductible ! Alors pourquoi nier qu'en l'unité de Dieu, comme [144 L INITIATION] en lanôtre, il subsiste des éléments très distincts ?

Et si on contemple l'Humanité et la nature, la distinction la plus puissante, la plusgénérale qu'on y observe, c'est la polarité, la sexualité, avec leurs trois termes, équilibre,expansion virile, attraction féminine. Elle se retrouve dans l'esprit sous forme de troispouvoirs intellectuels et moraux : l'équilibré, l'expansif et l'attractif. C'est un ternairespirituel analogue qui, en Dieu, constitue la Trinité. Il ne faut pas méconnaître, sans pourtantconfondre la chair et l'esprit, le caractère moralement viril de l'expansion divine et lecaractère moralement féminin de la divine attraction. La Trinité ainsi comprise s'harmonise,en effet, avec la chaîne immense de toutes les polarités créées. Elle repose sur des véritésnaturelles évidentes et sans nombre, qui la confirment. L'électricité, l'aimant, les couleurscomplémentaires, les acides et les bases de la chimie, les hémisphères de la terre, les soleilset lu planètes, les étoiles conjuguées, les polarités des plantes, des animaux, du corps et del'âme humaine, tout témoigne en faveur de la Trinité ésotérique et profonde. La Trinitéexotérique ou l'élément féminin se dénonce à peine, indiqué dans le symbole de la Colombeest loin d'offrir autant de certitude et de sérieux.

On se demande pourquoi l'expansion virile s'est manifestée de préférence dans lemonde, pourquoi le Verbe descendit en Jésus plutôt que l'éternelle Colombe dans unefemme. Peut‐être que, si la Divinité avait paru avec une âme et une forme de femme en cemonde, elle l'aurait trop sauvé. La Divinité [LE Christianisme ésotérique 145] Femme seserait attachée à son oeuvre avec plus de détail et de ténacité. Et, surtout, elle n'aurait paslaissé les domestiques, les prêtres devenir maîtres et refaire, pour la plier à leur Commodité,l'!uvre de la Maîtresse. Le monde ne méritait pas, sans doute, un salut aussi achevé.

Peut‐être encore, vu la tonalité attractive du Féminin divin, est‐ce en mode attractif,en mode de sur‐assomption, au c!ur du Paradis, que s'accomplira, un jour, l'Incorporationde la Femme‐type dans la Divinité, alors que c'est en mode expansif et du Ciel vers la Terre,que s'est accomplie l'Incarnation de la Divinité dans l'Homme‐type.

Du reste, le prodige qui s'est effectué avec une intensité suprême dans le Christ etqui s'effectuera peut‐être, un jour, avec une intensité complémentaire dans la Vierge, estopérable avec une intensité moindre, dans chaque homme, chaque femme.

Un des motifs qui font rejeter le Christianisme par beaucoup de penseurs modernes,c'est que le Christianisme exotérique enseigne ses mystères comme des Caprices, desexceptions; tandis que pour la science et la philosophie modernes ; tout est loi.

Mais le christianisme ésotérique comprend différemment les mystères. S'il admet desintensités particulières de l'action d'une loi (et la science ne les repousse pas à priori), il ne

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les sépare pas, cependant, de la loi générale. Aujourd'hui, le grand public est mûr pour cettemanière de penser secrète de l'élite ancienne. Il veut, après le Christianisme d'exception, leChristianisme‐loi. Or, la doctrine chrétienne éso‐[146 l’initiation]térique révèle une présencede Dieu en chaque homme, chaque femme, et la possibilité, pour quelques‐uns dès ici‐bas,pour tous au moins dans la vie future, d'une sorte d'Incarnation personnelle. Cette présence,cette possibilité: sont la loi générale dont la vie du Christ constitue l'intensité suprêmementdivine.

Saint‐Paul avoue une sorte d'Incarnation dès ici bas en lui quand il déclare : « Jecomplète, par mes souffrances, la passion de Jésus.», et : « Ce n'est pas moi‐même qui vis,c'est le Christ qui vit en moi. » Cet état sublime, que des héros comme saint Paul atteignenten ce monde, tous peuvent l'atteindre graduellement dans l'Au‐Delà. Donc, à l'avenird'immortalité des théistes, des spirites et des occultistes non chrétiens, le Christianismeésotérique ajoute un avenir de divinisation; universelle.

Et; voilà l’orthodoxe saint Grégoire de Nysse proclamait sans être entendu, cetteuniversalité : « Nous ne doutons pas, disait‐il, que tous seront un seul corps du Christ et quel'image de Dieu resplendira en tous également. »

C'est la formule du Progrès absolu, l'égalité, la fraternité et la liberté en Dieu et à undegré que la Révolution n'osa pressentir.

C'est l'espoir inouï de la ferveur et de la grandeur humaines. Et, comme Dieu nousaime, c'est aussi l’espoir de Dieu !

Albert Jounet