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Mémoire présenté devant l’ENSAE ParisTech pour l’obtention du diplôme de la filière Actuariat et l’admission à l’Institut des Actuaires le 15/11/2019 Par : Maxime Godin Titre : Évaluation du respect permanent des exigences de capital dans le cadre de l’ORSA d’un assureur épargne par « Least Squares Monte Carlo » Confidentialité : NON OUI (Durée : 1 an 2 ans) Les signataires s’engagent à respecter la confidentialité indiquée ci-dessus Membres présents du jury de la filière Entreprise : Mazars Actuariat Nom : Alexandre Guchet Christian Y. Robert Signature : Membres présents du jury de l’Institut Directeur(s) du mémoire en entreprise : des Actuaires Nom(s) : G. Guillotin et M.-A. Mechergui Signature(s) : Autorisation de publication et de mise en ligne sur un site de diffusion de documents actuariels (après expiration de l’éventuel délai de confidentialité) Signature du responsable entreprise Secrétariat : Signature du candidat Bibliothèque : Ecole Nationale de la Statistique et de l’Administration Economique (ENSAE) 5, avenue Henry Le Chatelier - 91120 PALAISEAU, FRANCE

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Mémoire présenté devant l’ENSAE ParisTechpour l’obtention du diplôme de la filière Actuariat

et l’admission à l’Institut des Actuairesle 15/11/2019

Par : Maxime Godin

Titre : Évaluation du respect permanent des exigencesde capital dans le cadre de l’ORSA d’un assureurépargne par « Least Squares Monte Carlo »

Confidentialité : NON OUI (Durée : 1 an 2 ans)

Les signataires s’engagent à respecter la confidentialité indiquée ci-dessus

Membres présents du jury de la filière Entreprise : Mazars ActuariatNom : Alexandre Guchet

Christian Y. Robert Signature :

Membres présents du jury de l’Institut Directeur(s) du mémoire en entreprise :des Actuaires

Nom(s) : G. Guillotin et M.-A. MecherguiSignature(s) :

Autorisation de publication et demise en ligne sur un site dediffusion de documents actuariels(après expiration de l’éventuel délai deconfidentialité)Signature du responsable entreprise

Secrétariat :

Signature du candidatBibliothèque :

Ecole Nationale de la Statistique et de l’Administration Economique (ENSAE)5, avenue Henry Le Chatelier - 91120 PALAISEAU, FRANCE

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Remerciements

Je tiens d’abord à remercier Mazars Actuariat et l’ensemble de l’équipe pour leur accueil pendant4 mois.

Je remercie mes deux encadrants, Gaëtan Guillotin, senior manager, et Mohamed-Amine Me-chergui, consultant senior, pour leurs conseils et leur aide précieuse tout au long de la rédactionde ce mémoire. Je les remercie également pour la confiance et la grande liberté d’initiative qu’ilsm’ont accordées.

Je remercie enfin Pierre Marion, ingénieur des Mines, pour son regard profane. Son apport m’apermis de faciliter la lecture de ce travail par des non-actuaires.

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Résumé

Mots clés : épargne en euros, directive « Solvabilité II », capital de solvabilité requis (SCR),« simulations dans les simulations », « Least Squares Monte Carlo » (LSMC), évaluation internedes risques et de la solvabilité (ORSA), évaluation du respect permanent des exigences de capital.

Ce mémoire s’intéresse à l’évaluation du respect permanent des exigences de capital par un assu-reur fictif commercialisant des contrats d’épargne en euros, et plus particulièrement à son aspectpluriannuel. En effet, l’évaluation interne des risques et de la solvabilité (ORSA) prévoit quel’assureur doit projeter sa solvabilité future le long de son plan stratégique. Cependant, le calculdu Solvency Capital Requirement (SCR) d’un assureur vie est particulièrement complexe, notam-ment du fait des interactions entre actifs et passifs et des options que comportent les contratsd’épargne en euros. Dans le cadre des modèles internes, il repose généralement sur la méthode« simulations dans les simulations ». Bien que précise, cette approche est extrêmement consom-matrice en termes de temps de calcul : l’utiliser pour l’évaluation prospective de la solvabilité,qui requiert plusieurs calculs du SCR, est ainsi difficilement envisageable.

Ce mémoire propose une alternative reposant sur la méthode « Least Squares Monte Carlo »(LSMC). Celle-ci a en effet déjà été mise en œuvre avec succès pour le calcul du SCR d’assureursvie dans le cadre du « pilier 1 » de la directive « Solvabilité II ». L’apport principal de ce mémoire,nouveau à notre connaissance, est de proposer une implémentation effective de la méthode « LeastSquares Monte Carlo » le long d’un plan stratégique clairement établi, avec des applicationsconcrètes à la gestion des risques.

Dans un premier temps, ce mémoire met en place les différents outils nécessaires au calcul deréférence du SCR en vision modèle interne par « simulations dans les simulations » : modèlede projection des flux de trésorerie (modèle « ALM »), modélisation des facteurs de risque etgénérateur de scénarios économiques market-consistent pour les simulations secondaires.

Dans un deuxième temps, la méthode LSMC est mise en œuvre et ses résultats sont comparésavec ceux produits par le calcul de référence du SCR de l’assureur fictif, permettant d’évaluerles erreurs commises et de valider le choix de ce « proxy » pour le calcul des exigences de capitalréglementaire. En outre, une extension de la méthode au-delà de la régression polynomiale,reposant sur des techniques de régression non-paramétrique, est proposée.

Dans un troisième temps, l’évaluation du respect permanent des exigences de capital de l’assureurfictif est réalisée en utilisant une extension de la méthode LSMC. Cette extension permet decalculer le SCR de l’assureur de fin 2018 à fin 2021 dans différents scénarios plus ou moinsfavorables (croissance ou stagnation de l’encours, hausse ou baisse des rachats, hausse ou baissedes taux ou encore krach boursier, etc.). Cette projection du SCR permet de déterminer lesconditions au-delà desquelles l’assureur quitte sa zone d’appétence aux risques. Elle permetégalement d’esquisser un plan d’action contre la baisse des taux basé sur la réassurance bilancielle.

Ce mémoire a ainsi permis de réaliser concrètement l’évaluation du respect pluriannuel des exi-gences de capital d’un assureur vie commercialisant des contrats d’épargne en euros, dépassantles difficultés opérationnelles inhérentes à la complexité des modèles internes en assurance vie.

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Abstract

Keywords: non-unit-linked savings, “Solvency II” directive, Solvency Capital Requirement(SCR), “nested stochastics”, “Least Squares Monte Carlo” (LSMC), Own Risk and SolvencyAssessment (ORSA), continuous compliance with the capital requirements.

This work studies the assessment of the continuous compliance with the capital requirements bya mock insurer selling non-unit-linked savings contracts. The focus is on the pluriannual side ofthis assessment. The Own Risk and Solvency Assessment (ORSA) requires the insurer to forecastits future solvency level throughout its business plan. However, the computation of the SolvencyCapital Requirement (SCR) of a life insurer is particularly challenging. These difficulties are dueto the interaction between assets and liabilities and to the options included in non-unit-linkedsavings contracts. When internal models are used, the computation of the SCR generally relieson “nested stochastics”. Although accurate, this approach is particularly time-consuming. Usingthe same approach for computing many SCRs, as required by the prospective assessment of thesolvency level, is impractical.

This work proposes an alternative based on a “Least Squares Monte Carlo” (LSMC) approach.Such methods have already been successful in computing the SCR of life insurers under “Pillar1” of the “Solvency II” directive. Our main contribution consists in extending the method to theORSA environment, enabling the insurer to forecast its solvency level in the various scenarios ofits business plan.

As a first step, this work sets up the different tools required for the benchmark computation of theSCR, using a mock internal model and “nested stochastics”. This includes an Asset and LiabilityManagement (ALM) model which forecasts future cashflows, the modelling of risk factors and amarket-consistent economic scenarios generator used for secondary simulations.

As a second step, the LSMC computation of the SCR of the mock insurer is implemented andits results are compared to those produced by the benchmark method. This comparison is usedto evaluate errors and to validate the choice of this proxy to compute the regulatory capitalrequirements. In addition, an extension of the LSMC method beyond the traditional polynomialregression, which relies on non-parametric regression, is discussed.

As a third step, the assessment of the continuous compliance with the capital requirements ofthe mock insurer is implemented. This implementation is based on an extension of the LSMCapproach. This enables the insurer to compute its SCR from the end of 2018 to the end of 2021in more or less favourable scenarios (growth or stagnation of the activity, decrease or increasein interest rates, market crash, etc.). Projecting the SCR allows to determine the limits abovewhich the insurer leaves its risk appetite zone. It also enables to sketch an action plan againstthe decrease in interest rates based on financial reinsurance.

Through this work, the assessment of the pluriannual compliance with the capital requirementsof a life insurer selling non-unit-linked contracts has been concretely implemented, helping toovercome the operational difficulties caused by the complexity of life insurers’ models.

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Table des matières

Remerciements i

Résumé ii

Abstract iii

1 Introduction 1

2 Présentation de l’assureur A, un assureur épargne fictif 32.1 Assurance vie épargne : contrats en euros . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32.2 Situation de l’assureur A . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5

2.2.1 Placements financiers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52.2.2 Portefeuille de contrats et réserves . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

3 Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II » 83.1 Principes fondamentaux de valorisation du bilan prudentiel . . . . . . . . . . . . 8

3.1.1 Quelques rappels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83.1.2 Cadre mathématique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

3.2 Générateur de scénarios économiques market-consistent . . . . . . . . . . . . . . 123.2.1 Présentation du modèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133.2.2 Schéma de discrétisation exact . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163.2.3 Calibrage market-consistent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

3.3 Modèle de projection des flux de trésorerie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193.3.1 Modélisation des actifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193.3.2 Modélisation des passifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 203.3.3 Modèle « ALM » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 213.3.4 Paramètres et hypothèses . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25

3.4 Bilan prudentiel de l’assureur A . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26

4 « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement 314.1 Définition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 314.2 Modélisation des facteurs de risque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33

4.2.1 Risques de marché . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 344.2.2 Risques de souscription vie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 404.2.3 Quelques remarques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41

4.3 « Calcul complet » par « simulations dans les simulations » . . . . . . . . . . . . 424.4 Calcul du Solvency Capital Requirement de l’assureur A . . . . . . . . . . . . . . 444.5 Relations entre les postes du bilan prudentiel de l’assureur A et les facteurs de

risque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 464.5.1 Actifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 464.5.2 Best Estimate . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46

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Table des matières

4.5.3 Net Asset Value . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46

5 Alternatives au « calcul complet » du Solvency Capital Requirement 515.1 Principales alternatives au « calcul complet » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51

5.1.1 « Least Squares Monte Carlo » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 525.1.2 « Curve Fitting » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 525.1.3 « Replicating Portfolios » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 525.1.4 « Accélérateur Devineau-Loisel » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 525.1.5 Choix du « proxy » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53

5.2 Régression aux moindres carrés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 535.3 Cadre mathématique de la méthode « Least Squares Monte Carlo » . . . . . . . . 555.4 Choix du modèle de régression . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57

5.4.1 Régression linéaire polynomiale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 575.4.2 XGBoost . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 575.4.3 MARS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58

5.5 Calcul alternatif du Solvency Capital Requirement de l’assureur A par la méthode« Least Squares Monte Carlo » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 585.5.1 Approximation de la fonction de valorisation des passifs . . . . . . . . . . 595.5.2 Comparaison des distributions des pertes . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62

6 ORSA et respect permanent des exigences de capital 646.1 Besoin global de solvabilité et appétence aux risques . . . . . . . . . . . . . . . . 65

6.1.1 Besoin global de solvabilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 656.1.2 Appétence aux risques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66

6.2 Plan stratégique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 666.2.1 Croissance de l’encours . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 666.2.2 Plan de réduction des frais . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 676.2.3 Rachats structurels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 676.2.4 Marchés financiers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 686.2.5 Tableau synthétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68

6.3 Projection des indicateurs financiers non-prudentiels de l’assureur A . . . . . . . 686.3.1 Actifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 686.3.2 Collecte des primes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 706.3.3 Niveau de revalorisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 706.3.4 Résultat comptable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71

6.4 Évaluation prospective de la solvabilité de l’assureur A . . . . . . . . . . . . . . . 716.4.1 Adaptation de la méthode « Least Squares Monte Carlo » à l’évaluation

du respect permanent des exigences de capital . . . . . . . . . . . . . . . . 726.4.2 Projection de la Net Asset Value . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 726.4.3 Projection du Solvency Capital Requirement et du ratio de solvabilité . . . 73

6.5 Mise en place d’un plan d’action pour faire face à la baisse des taux . . . . . . . 756.5.1 Diversification de l’activité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 756.5.2 Couverture bilancielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 756.5.3 Détermination d’un seuil d’alerte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76

7 Conclusion 78

Note de synthèse 80

Executive Summary 86

Table des figures 92

v

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Table des matières

Liste des tableaux 94

Bibliographie 95

Annexes 97

Annexe A Paramètres des lois de comportement des assurés 98

Annexe B Données de calibrage du générateur de scénarios économiques 100

vi

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Chapitre 1

Introduction

L’évaluation interne des risques et de la solvabilité (Own Risk and Solvency Assessment ouORSA) est définie par l’article 45 de la directive « Solvabilité II » :

« Dans le cadre de son système de gestion des risques, chaque entreprise d’assurance et deréassurance procède à une évaluation interne des risques et de la solvabilité. Cette évaluationporte au moins sur les éléments suivants :(a) le besoin global de solvabilité, compte tenu du profil de risque spécifique, des limites ap-

prouvées de tolérance au risque et de la stratégie commerciale de l’entreprise ;(b) le respect permanent des exigences de capital prévues au chapitre VI, sections 4 et 5, et

des exigences concernant les provisions techniques prévues au chapitre VI, section 2 ;(c) la mesure dans laquelle le profil de risque de l’entreprise s’écarte des hypothèses qui sous-

tendent le capital de solvabilité requis prévu à l’article 101, paragraphe 3, calculé à l’aidede la formule standard conformément au chapitre VI, section 4, sous-section 2, ou avec unmodèle interne partiel ou intégral conformément au chapitre VI, section 4, sous-section 3. »

Si l’évaluation du Solvency Capital Requirement prévue par le « pilier 1 » de la directive « Sol-vabilité II » est aujourd’hui bien intégrée par les assureurs vie, la mise en place du processusORSA et son utilisation effective pour la prise de décisions stratégiques présentent toujours uncertain nombre de difficultés, notamment opérationnelles. A ce titre, ce mémoire se concentresur l’évaluation du respect permanent des exigences de capital (point (b) de l’ORSA) pour unportefeuille de contrats d’épargne en euros, et plus particulièrement sur son aspect pluriannuel.

L’objectif de cette évaluation est d’assurer que la solvabilité future est intégrée dans la prisede décisions stratégiques, et notamment dans le cadre du plan stratégique de l’assureur, quis’échelonne généralement de trois à cinq ans. Le plan stratégique comporte plusieurs scénarios quisont plus ou moins favorables à l’assureur. Chaque scénario comporte notamment des hypothèsesd’évolution de l’encours et des marchés financiers. L’assureur estime alors sa rentabilité danschacun des scénarios. Cependant, il évalue également comment son exposition aux risques évolue.Par exemple, l’assureur peut s’intéresser à l’évolution de son ratio de solvabilité dans le cas d’unebaisse des taux ou d’un krach boursier.

L’évaluation du respect permanent des exigences de capital est particulièrement complexe car samise en œuvre « naïve » requiert de réaliser dans chaque scénario du plan stratégique et à chaquedate future un calcul du Solvency Capital Requirement. Or, le calcul d’un seul Solvency CapitalRequirement à la date d’évaluation du bilan engendre déjà bien des difficultés opérationnelles. Dessolutions alternatives sont donc nécessaires pour y remédier. La méthode « Least Squares MonteCarlo » a déjà prouvé qu’elle pouvait se substituer au « calcul complet » du Solvency CapitalRequirement par « simulations dans les simulations ». Ce mémoire cherche ainsi à étendre cesrésultats à l’évaluation du respect permanent des exigences de capital.

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Chapitre 1. Introduction

Ce mémoire s’organise autour de la mise en œuvre de l’évaluation du respect permanent desexigences de capital par un assureur fictif : l’assureur A. Tout au long du mémoire, les méthodesproposées sont donc mises en œuvre en s’appuyant sur l’exemple de cet assureur fictif.

Le mémoire s’articule autour des trois grandes étapes qui ont structuré l’ensemble des travauxréalisés :

1. la mise en place des outils de calcul du Solvency Capital Requirement (modèle ALM, mo-délisation des facteurs de risque et générateur de scénarios économiques market-consistent)et le calcul de référence du Solvency Capital Requirement de l’assureur A par « simulationsdans les simulations » (Chapitres 3 et 4) ;

2. la mise en œuvre de la méthode « Least Squares Monte Carlo », la comparaison des résultatsde cette méthode avec ceux obtenus par « calcul complet » et la validation du « proxy »retenu (Chapitre 5) ;

3. la généralisation de la méthode « Least Squares Monte Carlo » à l’évaluation du respectpermanent des exigences de capital dans le cadre de l’ORSA (Chapitre 6).

Cette structure reflète la contribution principale de ce mémoire : étendre l’utilisation de la mé-thode « Least Squares Monte Carlo » depuis son utilisation bien documentée dans le cadre du« pilier 1 » pour le calcul du Solvency Capital Requirement à l’ORSA prévue dans le « pilier2 », et plus spécifiquement à l’évaluation pluriannuelle du respect permanent des exigences decapital.

Dans le détail, le mémoire s’organise de la manière suivante. Le Chapitre 2 présente l’assureurfictif et les contrats d’épargne en euros qu’il commercialise. Le Chapitre 3, après quelques rappelssur le bilan prudentiel « Solvabilité II », décrit comment l’assureur fictif met concrètement enœuvre sa valorisation. Le Chapitre 4 présente la mise en œuvre du « pilier 1 » de la directive« Solvabilité II » par la méthode de référence, c’est-à-dire le « calcul complet » du Solvency CapitalRequirement par « simulations dans les simulations ». Le Chapitre 5 étudie des alternatives au« calcul complet » du Solvency Capital Requirement basées sur la méthode « Least Squares MonteCarlo ». Enfin, le Chapitre 6 s’intéresse à la mise en œuvre de ces méthodes alternatives pourl’évaluation du respect permanent des exigences de capital prévue par l’ORSA. Le Chapitre 7conclut ce mémoire et donne quelques perspectives pour de futurs développements.

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Chapitre 2

Présentation de l’assureur A, unassureur épargne fictif

L’assureur A est un assureur vie commercialisant comme unique produit des contrats d’épargneen euros. Établi en France, il est soumis à la réglementation française (Code des Assurances)ainsi qu’à la réglementation européenne (directive « Solvabilité II »). La Section 2.1 rappelleles principaux éléments constitutifs des contrats d’épargne en euros. La Section 2.2 présentel’assureur fictif utilisé dans les applications des différentes méthodes présentées tout au long dumémoire.

2.1 Assurance vie épargne : contrats en euros

Cette section rappelle brièvement le fonctionnement des contrats d’assurance épargne en eurosfrançais. Elle aborde notamment les dispositions contractuelles couramment impliquées dans cescontrats ainsi que les contraintes réglementaires. Une compréhension fine du fonctionnement deces contrats est en effet nécessaire pour réaliser la valorisation du bilan prudentiel « SolvabilitéII ». En effet, celle-ci s’appuie sur une modélisation exhaustive du fonctionnement de l’entreprised’assurance (garanties offertes et structure des coûts associés).

Un contrat d’épargne en euros est un produit d’assurance vie individuelle qui prévoit le versementd’un capital à l’échéance du contrat, c’est-à-dire lorsque survient le décès de l’assuré ou lorsquecelui-ci décide de racheter son contrat. En échange de cette prestation, l’assuré paye une prime.Celle-ci peut être unique et payée à la souscription ou fractionnée en plusieurs versements pro-grammés. En outre, le contrat peut prévoir des versements libres supplémentaires qui viennentaugmenter le montant de la prestation versée en fin de contrat.

Le caractère assurantiel de ce produit provient des garanties financières fournies par l’assureur.D’une part, celui-ci garantit aux assurés une revalorisation de leur épargne à un taux contrac-tuel, appelé taux minimum garanti (TMG). D’autre part, en complément de cette garantie derevalorisation s’ajoute une contrainte de participation aux bénéfices réglementaire permettantun partage des bénéfices entre assureur et assurés. Cette participation aux bénéfices trouve sonorigine dans le fait que, d’une part, les bénéfices financiers proviennent en partie d’actifs enreprésentation de l’engagement de l’assureur vis à vis des assurés et que, d’autre part, du faitdes contraintes réglementaires de gestion prudente, les hypothèses de tarification et de provi-sionnement utilisées par l’assureur sont généralement défavorables aux assurés. Une partie desbénéfices réalisés doit ainsi leur revenir. Les contrats peuvent par ailleurs prévoir des clauses departicipation aux bénéfices contractuelle.

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Chapitre 2. Présentation de l’assureur A, un assureur épargne fictif

La suite de ce chapitre présente plus en détails les éléments principaux des contrats d’épargneen euros.

Provision mathématique Pour des contrats d’épargne en euros, la provision mathématiquecorrespond au montant capitalisé de l’épargne de l’assuré.

Taux minimum garanti Le taux minimum garanti (TMG) est un taux contractuel qui définitla revalorisation minimale du contrat à laquelle s’engage l’assureur. Ce taux est défini dans unpremier temps à la souscription et stipulé dans les conditions générales du contrat. Le TMGsatisfait des contraintes réglementaires de niveau et de durée fixées par le Code des Assurances.Ainsi, il ne peut excéder 60% du taux moyen des obligations d’État. Par ailleurs, un TMGstrictement positif ne peut être garanti que pour 8 ans au plus. Néanmoins, un TMG nul constituetoujours un engagement de la part de l’assureur, surtout dans un contexte de taux négatifs. Ilsignifie en effet que l’assureur garantit à tout instant le capital investi par l’assuré.

Participation aux bénéfices réglementaire L’article L. 331-3 du Code des Assurancesdispose que « les entreprises d’assurance sur la vie ou de capitalisation doivent faire participerles assurés aux bénéfices techniques et financiers qu’elles réalisent, dans les conditions fixéespar arrêté du ministre de l’économie et des finances ». Cette participation prend la forme d’unerevalorisation de la provision mathématique des contrats ou d’une dotation à la provision pourparticipations aux bénéfices. La participation aux bénéfices réglementaires est ainsi égale à lasomme de 85% des produits financiers et de 90% du résultat technique (100% s’il est négatif).Cette participation aux bénéfices minimale est nette de chargements sur encours. La participationaux bénéfices peut être incorporée partiellement ou totalement aux provisions mathématiques,le reliquat étant doté à la provision pour participation aux bénéfices.

Provision pour participation aux bénéfices Cette provision technique est utilisée par l’as-sureur pour lisser dans le temps les taux de revalorisation servis aux assurés. Elle peut aussi servirla politique commerciale de l’assureur en permettant de servir des rémunérations avantageusesà certaines typologies d’assurés. En effet, la provision pour participations aux bénéfices n’estpas spécifique à un contrat, voire même à un groupe de contrats, mais bien commune à tous lesassurés d’un même canton. L’assureur dispose par ailleurs d’un délai de 8 ans pour distribueraux assurés le montant doté à cette provision lors d’un exercice comptable, en revalorisant alorsla provision mathématique.

Participation aux bénéfices contractuelle L’assureur peut s’engager à une participationaux bénéfices contractuelle. Par exemple, l’assureur peut s’engager à redistribuer 90% des pro-duits financiers des actifs en représentation de l’épargne de l’assuré. La participation aux bénéficescontractuelle peut être brute ou nette de chargements.

Rachats et avances L’assuré a la possibilité de récupérer partiellement ou totalement sonépargne par le mécanisme de rachat, partiel ou total. Une pénalité contractuelle est alors géné-ralement appliquée. L’assuré peut aussi souhaiter vouloir disposer d’un capital sans pour autantmettre fin à son contrat d’assurance vie. Le mécanisme de l’avance permet à l’assuré d’obtenirun emprunt garanti par son épargne, à taux avantageux, et dont le montant est limité à unefraction de la provision mathématique.

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Chapitre 2. Présentation de l’assureur A, un assureur épargne fictif

Versements libres Si le contrat d’épargne en euros est basé sur un échéancier de versementsprogrammés, il est généralement possible d’effectuer des versements libres au cours du contrat.Toutefois, certaines contraintes, définies contractuellement, peuvent porter sur ces versements :montant, date, modulation du TMG, etc.

Chargements Les chargements sont des prélèvements effectués par l’assureur sur l’épargne del’assuré. Ils servent à couvrir les différents frais supportés par l’assureur :

— les chargements d’acquisition : fraction prélevée sur les versements effectués. Ces charge-ments permettent de financer les frais d’acquisition tels que la rémunération des apporteursd’affaires ;

— les chargements sur encours : fraction prélevée sur la provision mathématique. Ces charge-ments servent à couvrir les frais de l’assureur (frais d’administration, frais de gestion dessinistres, etc.).

Fiscalité Les revalorisations sont soumises à des prélèvements sociaux (CSG, CRDS, etc.). Lesrachats partiels ou totaux sont quant à eux soumis au prélèvement libératoire dont le taux variesuivant l’ancienneté du contrat. Les rachats sont fortement conditionnés par cette variabilité dutaux de prélèvement libératoire en fonction de l’ancienneté du contrat. Par ailleurs, la fiscalitéde l’assurance vie est avantageuse par rapport à la majorité des contrats d’épargne bancaires, cequi en fait un des placements favoris (en montant) des Français.

Durée de vie du contrat La durée de vie typique d’un contrat d’épargne en euros est supé-rieure à 8 ans. En effet, à partir de cette ancienneté, l’assuré dispose de certains avantages fiscaux.Dans le cas du décès de l’assuré, la totalité de l’épargne constituée est versée aux bénéficiaireset le contrat prend fin.

2.2 Situation de l’assureur A

Cette section présente quelques éléments essentiels de la situation de l’assureur A. La Table2.1 présente son bilan comptable simplifié. Les deux sections suivantes précisent la nature desactifs et des passifs présents dans ce bilan et en donnent quelques perspectives historiques etprospectives.

Actifs (ke) Passifs (ke)Liquidités 32 564 Fonds propres 44 111Actions 59 207 Réserve de capitalisation 2 757

Obligations 523 019 Provision pour participation aux bénéfices 16 541Provisions mathématiques 551 381

Total 614 790 Total 614 790

Table 2.1 – Bilan comptable simplifié de l’assureur A au 31/12/2018.

2.2.1 Placements financiers

Les actifs financiers de l’assureur A sont répartis en trois classes : des liquidités, des actions etdes obligations d’État.

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Chapitre 2. Présentation de l’assureur A, un assureur épargne fictif

L’assureur dispose de liquidités (trésorerie) rémunérées au jour le jour selon un taux d’intérêtcourt. Au 31/12/2018, ce taux est négatif, ce qui signifie que la rémunération des liquidités estégalement négative.

Les actions détenues par l’assureur sont diversifiées sur l’ensemble des entreprises du CAC40 desorte que le prix de marché de la poche actions est parfaitement indexé sur l’évolution de cetindice boursier. La poche actions de l’assureur présente un niveau de plus-values latentes de 10%.Chaque année, l’assureur se fixe comme objectif de sécuriser au moins 10% de ses plus-valueslatentes sur les actions en en vendant une partie.

Enfin, les obligations détenues par l’assureur sont des obligations assimilables au Trésor (OAT)de maturité 10 ans à l’achat. L’assureur procède à l’achat des obligations en fin de chaqueannée civile. La Figure 2.1 représente l’historique des taux des OAT 10 ans du 31/12/2009au 31/12/2018. La Table 2.2 détaille plus précisément la poche obligataire de l’assureur au31/12/2018. Du fait de la baisse des taux, celle-ci est globalement en situation de plus-valuelatente (5,84 %). La légère moins-value latente de 0,013% sur les obligations achetées à la fin2018 (dernière ligne du tableau) s’explique par l’utilisation de la courbe des taux de l’EIOPApour valoriser les obligations d’Etat. L’assureur vient d’entamer un cycle de réinvestissement :dans le contexte actuel de taux bas, il s’attend donc à une baisse progressive de ses rendementsobligataires.

La gestion d’actifs de l’assureur poursuit une allocation cible fixe des actifs en valeur de marché,les liquidités, les actions et les obligations représentant respectivement 5%, 10% et 85% des actifs.

31/12/2009

31/12/2010

30/12/2011

31/12/2012

31/12/2013

31/12/2014

30/12/2015

30/12/2016

29/12/2017

31/12/2018

Date

1, 0

1, 5

2, 0

2, 5

3, 0

3, 5

Tau

xd

esO

AT

10an

s(%

)

Figure 2.1 – Historique des taux des OAT 10 ans du 31/12/2009 au 31/12/2018.

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Chapitre 2. Présentation de l’assureur A, un assureur épargne fictif

Échéance (années) Nominal (ke) Taux facial Valeur de marché (ke)1 42 745 3,60% 44 4322 64 834 3,35% 69 5563 77 145 3,15% 84 8874 72 661 2,25% 79 3515 42 721 2,43% 47 7166 47 034 0,84% 48 7297 44 803 1,00% 46 7618 40 169 0,68% 40 7749 30 706 0,79% 31 18910 60 201 0,71% 60 193

Table 2.2 – Composition détaillée de la poche obligataire de l’assureur A au 31/12/2018.

2.2.2 Portefeuille de contrats et réserves

Au 31 décembre 2018, l’encours du portefeuille de l’assureur A s’élève à 551 381 ke répartis sur125 578 contrats. L’âge moyen des assurés du portefeuille (avec pondération par les provisionsmathématiques) s’élève à 52,74 ans. L’encours moyen par assuré est de 4 391 e.

Historiquement, l’assureur A a offert des taux minimum garantis élevés jusqu’en 2009, date àlaquelle il a commencé graduellement à baisser les taux garantis offerts pour atteindre 0% (brutsde chargements sur encours) à partir de 2014. Cette baisse des taux minimum garantis coïncideavec la baisse des taux des OAT 10 ans constatée plus haut. Il a par ailleurs mis en œuvre unepolitique d’incitation aux rachats de ses contrats anciens à TMG élevés et peu rentables quiexplique que l’ancienneté de son portefeuille ne remonte qu’à 10 ans au maximum. Les autresdispositions contractuelles n’ont pas changé au cours du temps et sont donc les mêmes pourchaque génération de contrats, avec des perspectives stables pour les contrats futurs :

— participation aux bénéfices financiers contractuelle de 90%, payable immédiatement ;

— limitation en durée du TMG initial au maximum réglementaire de 8 ans ;

— versements libres illimités sans modulation du TMG ;

— chargements d’acquisition de 3% ;

— chargements sur encours annuels de 0,6% ;

— pénalités de rachat de 0,5% au cours des 10 premières années du contrat.

L’assureur A a par ailleurs constitué une provision pour participation aux bénéfices de 16 541 kequi représente 3% de ses provisions mathématiques.

La réserve de capitalisation, constituée lors de réalisation de plus-values obligataires et repriselors de réalisations de moins-values obligataires, s’élève à 2 757 ke. Elle s’ajoute aux fondspropres dont le montant est égal à 44 111 ke.

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Chapitre 3

Valorisation du bilan prudentiel« Solvabilité II »

Ce chapitre expose la méthode de valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II » utilisée parl’assureur A. Pour commencer, la Section 3.1 rappelle les principes fondamentaux de valorisationdu bilan prudentiel « Solvabilité II ». Dans un deuxième temps, la Section 3.2 décrit le générateurde scénarios économiques market-consistent retenu. Puis, la Section 3.3 décrit le modèle deprojection des flux de trésorerie futurs de l’assureur A, communément appelé « modèle ALM »pour Asset and Liability Management . Enfin la Section 3.4 présente la mise en œuvre du calculdu bilan prudentiel de l’assureur A au 31/12/2018.

3.1 Principes fondamentaux de valorisation du bilan prudentiel

3.1.1 Quelques rappels

Les normes comptables françaises sont fondées sur plusieurs grands principes, dont notammentle principe du coût historique et le principe de prudence. En conséquence, les actifs financiersdétenus par une entreprise d’assurance sont comptabilisés à leur valeur d’achat, tandis que lesprovisions techniques (essentiellement les provisions mathématiques pour un assureur commer-cialisant des produits d’épargne en euros) sont évaluées de manière prudente en retenant deshypothèses définies par le Code des Assurances. La réglementation « Solvabilité I » s’appuyaitsur le bilan comptable pour définir une marge de solvabilité qui constituait un seuil minimalpour les fonds propres comptables. Elle reposait donc essentiellement sur le triptyque suivant :

— des provisions techniques évaluées de manière prudente, dans le respect du Code des As-surance ;

— des actifs admissibles comptabilisés à leur coût historique ;

— une exigence de marge de solvabilité essentiellement proportionnelle aux provisions mathé-matiques.

Si ce bilan répond à certaines exigences comptables, il est cependant peu adapté à une utilisationdans un cadre prudentiel. En effet :

— comme les actifs sont comptabilisés à leur coût historique, le bilan comptable est peusensible aux marchés financiers alors que ceux-ci constituent pourtant une source de risqueimportante pour les assureurs épargne vu le montant des encours sous gestion ;

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

— les hypothèses de calcul des provisions techniques ne sont pas spécifiques aux risques aux-quels est exposé l’assureur ;

— les risques relatifs à l’adossement entre l’actif et le passif ainsi qu’aux interactions entre cesdeux éléments ne sont pas pris en compte.

En conséquence, la directive « Solvabilité II » met en place son propre référentiel pour définirle capital économique nécessaire à l’activité de l’assureur. Dans ce référentiel, on ne parle plusde bilan comptable mais de bilan économique, où les actifs et les passifs sont valorisés dans uneapproche market-consistent. En d’autres termes, cela signifie que la valeur d’un élément du bilann’est plus évaluée selon un principe de coût historique ou de prudence mais plutôt au prix auquelcet élément s’échangerait à la date de valorisation du bilan.

Ce choix d’un bilan économique comme base pour les calculs prudentiels sous-tend une visionliquidative de la solvabilité. En effet, si les fonds propres économiques sont négatifs, cela signifieconcrètement que le produit issue de la vente de tous les actifs détenus ne suffirait pas à financerla cession des passifs souscrits. Dans ce cas, l’entreprise est en situation de ruine économique.Afin de limiter la survenance d’une telle situation, il faut donc que les fonds propres économiquessoient suffisants, c’est-à-dire supérieur à un certain seuil. Dans le cadre de « Solvabilité II », ceseuil est appelé capital de solvabilité requis (Solvency Capital Requirement). Il est déterminé desorte qu’avec une probabilité de 99,5%, les fonds propres économiques à horizon un an soientpositifs et correspond ainsi à un quantile de la distribution des pertes à horizon un an.

Comme le bilan comptable, le bilan prudentiel se présente sous la forme d’un tableau comportantdeux colonnes, avec à gauche les actifs et à droite les passifs. La Table 3.1 représente une visionsimplifiée de ce bilan.

Actifs Passifs

Placements financiers Fonds propres économiques

Provisions techniques

Marge de risqueMeilleure estimation

Table 3.1 – Vision simplifiée du bilan prudentiel d’un assureur.

3.1.1.1 Actifs

Comme expliqué ci-dessus, les actifs sont valorisés en valeur de marché. Pour des actifs liquidescotés sur les marchés financiers, le mark-to-market, c’est-à-dire la cotation directe des actifs surles marchés financiers, est utilisé. Cependant, pour certains actifs, les prix de marché ne sontpas disponibles . Dans ce cas, la valorisation repose sur un mark-to-model. La valeur d’un actiffinancier non coté est alors celle produite par des modèles financiers. Ceux-ci sont typiquementcalibrés pour reproduire les prix de marché d’un panier d’actifs cotés et liquides appelé panier decalibrage. Cette approche est supposée garantir le caractère market-consistent de la valorisationdes actifs non cotés. Cette nécessité d’utiliser le mark-to-model pour les actifs non cotés constitueune source de difficultés pour la valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II ».

En tout état de cause, dans le cadre d’une valorisation prospective du bilan prudentiel, commepar exemple dans le cadre d’une évaluation du bilan à horizon un an, on ne dispose pas descotations directes sur les marchés financiers. Il est alors indispensable de recourir à des modèlesfinanciers pour valoriser tous les actifs financiers détenus par l’assureur.

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

3.1.1.2 Passifs

La difficulté évoquée ci-dessus pour la valorisation des actifs non cotés est encore plus prégnantepour la valorisation des passifs. En effet, les passifs d’assurance ne sont pas cotés sur les marchésfinanciers. Cependant, la réglementation « Solvabilité II » impose de les valoriser à un prix demarché afin d’établir le bilan prudentiel et de calculer le montant des fonds propres économiques.Le principe de market-consistency implique donc la détermination d’un prix d’échange pour leportefeuille de contrats détenu par l’assureur. Les provisions techniques portées au passif dubilan prudentiel correspondent à ce prix d’échange. Dans la suite du mémoire, elle sont égalementappelées valeur économique des passifs. Celles-ci se décomposent comme la somme de la meilleureestimation (Best Estimate) et d’une marge de risque (Risk Margin).

3.1.1.2.1 Best EstimateLe Best Estimate est défini par l’article 77, paragraphe 2, de la directive « Solvabilité II »

comme correspondant à « [...] la moyenne pondérée par leur probabilité des flux de trésoreriefuturs, compte tenu de la valeur temporelle de l’argent (valeur actuelle attendue des flux detrésorerie futurs), estimée sur la base de la courbe des taux sans risque pertinents ». Dans lecadre d’un portefeuille de contrats d’épargne en euros, ces flux de trésorerie correspondent à ladifférence entre d’une part les primes, y compris les chargements d’acquisition et d’autre part lasomme des prestations, des commissions, des frais et des charges de placement.

3.1.1.2.2 Risk MarginL’article 77, paragraphe 3, de la directive « Solvabilité II » dispose que la Risk Margin est « [...]

calculée de manière à garantir que la valeur des provisions techniques est équivalente au montantque les entreprises d’assurance et de réassurance demanderaient pour reprendre et honorer lesengagements d’assurance et de réassurance ». Ainsi, par définition, les provisions techniquessont égales à la valeur d’échange des engagements souscrits par l’assureur. Si celui-ci souhaitaitcéder ses engagements à un autre assureur, il devrait théoriquement payer un montant égalaux provisions techniques. Le paragraphe 5 du même article précise encore que la Risk Margincorrespond au « [...] coût que représente la mobilisation d’un montant de fonds propres éligibleségal au capital de solvabilité requis nécessaire pour faire face aux engagements d’assurance et deréassurance pendant toute la durée de ceux-ci ». Ce coût se calcule sur la base d’un taux de coûtdu capital fixé par l’EIOPA et révisé périodiquement.

Selon une étude réalisée par Mazars [Mazars, 2017] basée sur les rapports sur la solvabilitéet la situation financières (RSSF, données publiques) d’entreprises d’assurance françaises, à fin2016, la Risk Margin des organismes d’assurance vie représente entre 0,25% et 2% des provisionstechniques.

Le calcul de référence de la Risk Margin repose sur l’estimation des capitaux réglementaires futursactualisés selon la courbe des taux sans risque pertinents. Comme la mise en œuvre d’un tel calculest parfois complexe, l’article 58 du règlement délégué de la directive « Solvabilité II » prévoitl’utilisation de simplifications, classées en deux types selon qu’elles estiment individuellementles capitaux réglementaires futurs à chaque date ou bien directement leur somme actualisée.L’orientation 61 des « Orientations sur la valorisation des provisions techniques » publiée parl’EIOPA propose quatre alternatives applicables lorsque le Solvency Capital Requirement estcalculé par la formule standard.

L’adaptation de ces méthodes dans le cadre du calcul du Solvency Capital Requirement par l’ap-proche modèle interne se trouve en dehors du champ d’étude de ce travail. Cependant, la méthode3 de l’orientation 61, basée sur la duration modifiée du passif pourrait probablement être adaptéeaux travaux présentés dans ce mémoire. Enfin, l’utilisation de la méthode 4, basée sur une règle

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

de proportionnalité par rapport au Best Estimate, n’affecterait pas les résultats obtenus puisqueles provisions techniques seraient simplement plus élevées selon un facteur supposé constant dansle temps.

Par souci de simplification, la Risk Margin sera donc supposée nulle dans l’ensemble du mémoire.Les provisions techniques seront donc directement égales au Best Estimate. Les fonds propreséconomiques s’obtiennent alors comme l’actif net (Net Asset Value), c’est-à-dire la différenceentre la valeur de marché des actifs et les provisions techniques, ici réduites au Best Estimate.Il s’agit d’une hypothèse courante dans les mémoires d’actuariat traitant de l’utilisation de« proxys » pour le calcul du Solvency Capital Requirement [Haguet, 2013, Traoré et Keilani,2014, Gauville, 2017, Mechergui, 2018].

Ainsi, la valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II » nécessite d’être capable de projeterl’activité de l’entreprise sur un horizon de temps long qui correspond à l’extinction des engage-ments souscrits par l’assureur. Cette projection repose sur une modélisation extensive, à la foisdu fonctionnement de l’entreprise, des contraintes réglementaires en vigueur, du comportementde ses assurés et de l’évolution de son environnement extérieur, en particulier financier. Elle doitpermettre de déterminer la série des « flux de trésorerie futurs » et de prendre en compte « lavaleur temporelle de l’argent ». Par ailleurs, le fait que les flux futurs doivent être pondérés par« leur probabilité » implique l’utilisation d’un modèle stochastique.

3.1.2 Cadre mathématique

La suite de cette section expose un cadre mathématique traduisant la définition réglementaire desprovisions techniques et permettant leur calcul. Les notations utilisées dans la suite du mémoires’inspirent de [Barrera et al., 2018] qui étudie le calcul du capital économique dans un contexteanalogue.

Un scénario d’évolution de l’assureur et de son environnement est modélisée abstraitement parun processus stochastique Z = (Zt)0≤t≤T à valeurs dans Rq tel que Z0 = z sur un espaceprobabilisé (Ω,F ,P). Z est supposé markovien non-homogène par rapport à sa propre filtrationF = (Ft)0≤t≤T . T désigne l’horizon d’extinction des engagements de l’assureur. Zt = (t, Zt)dénote l’extension homogénéisée de Z. Pour tout 0 ≤ s ≤ t ≤ T , Z[s,t] et Z[s,t] dénotent lestrajectoires des processus Z et Z entre s et t.

Le facteur d’actualisation stochastique entre deux dates s et t telles que s ≤ t est noté

β(Z[s,t]) = β(s, t) = exp(−∫ t

sru du) (3.1.1)

où rt désigne le taux d’intérêt spot au temps t.

La valeur économique des actifs et des passifs à la date t, respectivement notées At et BE t, sontsupposés Ft-mesurables. L’actif net est noté NAV t = At − BE t pour Net Asset Value.

Une des hypothèses centrales du modèle est l’existence d’une mesure de probabilité Q équivalenteà P et d’une fonction ψ telle que pour tout 0 ≤ t ≤ T , on a

BE t = EQ[ψ(Z[t,T ])|Ft]. (3.1.2)

La fonction ψ permet de calculer les flux de trésorerie futurs et de les agréger en utilisant lesfacteurs d’actualisation stochastiques β. Si Cu est la valeur algébrique des flux de trésorerie autemps u, alors Cu est Fu-mesurable et on a

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

ψ(Z[t,T ]) =∑

t≤u≤Tβ(Z[t,u])Cu(Z[t,u]). (3.1.3)

La variable aléatoire ψ(Z[t,T ]) est appelée valeur actuelle nette (Net Present Value) des flux detrésorerie futurs au temps t dans le scénario Z[t,T ].

Comme le processus Z est markovien et homogène par rapport à la filtration F, il existe unefonction Ψ telle que

Ψ(Zt) = EQ[ψ(Z[t,T ])|Zt] = EQ[ψ(Z[t,T ])|Ft] = BE t. (3.1.4)

Ψ est la fonction de valorisation économique des passifs. Cette fonction est inconnue au sens oùil n’y a pas en général de formule fermée permettant de l’évaluer.

Les équations (3.1.2) et (3.1.3) s’interprètent au regard de la définition du Best Estimate donnéepar le paragraphe 2 de l’article 77 de la directive « Solvabilité II » de la manière suivante :

— l’espérance correspond à la pondération des flux par leur probabilité ;— le conditionnement à Ft correspond à la meilleure estimation en prenant en compte l’in-

formation disponible au temps t ;— l’utilisation d’une mesure de probabilité Q, équivalente à la mesure de probabilité histo-

rique P, mais différente de cette dernière, reflète le caractère market-consistent du modèleutilisé pour le calcul des prix de marché des actifs financiers et la valorisation économiquedes passifs. Cette mesure de probabilité est aussi appelée mesure de probabilité « risque-neutre » ;

— la multiplication des flux de trésorerie par les facteurs d’actualisation permet la prise encompte de la valeur temporelle de l’argent.

Le Best Estimate s’exprime comme une espérance conditionnelle à l’information disponible autemps t de la valeur actuelle nette des flux de trésorerie futurs. En général, on ne dispose pasde formule fermée pour le calcul de cette espérance conditionnelle, c’est-à-dire qu’il n’y a pas deformule explicite pour la fonction Ψ. Le calcul du Best Estimate repose alors sur une méthodeMonte-Carlo : étant donné Zt, l’information disponible au temps t, on simule M réalisationsindépendantes de la variable aléatoire ψ(Z[t,T ]) sous la probabilité Q. En notant ces réalisationsψ(Zj[t,T ]) pour j = 1, . . . ,M , la moyenne empirique

BE t =1

M

M∑j=1

ψ(Zj[t,T ]) (3.1.5)

fournit un estimateur consistant du Best Estimate. En effet, de part la loi forte des grandsnombres, BE t converge presque-sûrement vers BE t quand M tend vers l’infini. En pratique, ona bien sûr M < ∞ : il est donc nécessaire d’adresser le problème du choix du nombre M descénarios stochastiques nécessaires à la valorisation des passifs. Il s’agit d’un compromis entrela précision désirée et le temps de calcul disponible. La Section 3.4 apportera des éléments deréponse pratique à cette question.

3.2 Générateur de scénarios économiques market-consistent

La modélisation de l’environnement extérieur s’appuie sur un générateur de scénarios écono-miques. Il s’agit d’un modèle capable de produire des scénarios stochastiques d’évolution de

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

grandeurs économiques et financières, telles que le cours des actions, les taux d’intérêt, le tauxd’inflation, etc.

L’article 22 du règlement délégué de la directive « Solvabilité II » précise notamment les critèresque doivent respecter de tels modèles pour le calcul du Best Estimate visé à l’article 77 de ladirective « Solvabilité II » :

« Les entreprises d’assurance et de réassurance fixent des hypothèses concernant les paramètreset scénarios futurs des marchés financiers qui sont appropriées et conformes à l’article 75 de ladirective 2009/138/CE. Lorsque l’entreprise d’assurance ou de réassurance recourt à un modèlepour produire des projections de paramètres et scénarios futurs des marchés financiers, celui-cirespecte l’ensemble des exigences suivantes :

— il génère des prix d’actifs cohérents avec les prix des actifs observés sur les marchés finan-ciers ;

— il ne suppose aucune opportunité d’arbitrage ;— le calibrage des paramètres et des scénarios est cohérent avec la courbe des taux sans risque

pertinents utilisée pour calculer la meilleure estimation visée à l’article 77, paragraphe 2,de la directive 2009/138/CE. »

Ainsi, le générateur de scénarios économiques doit notamment être construit en cohérence avec lacourbe des taux sans risque publiée par l’EIOPA et avec les prix des actifs cotés sur les marchésfinanciers : c’est la market-consistency. Cette market-consistency est typiquement assurée par unchoix adapté des paramètres lors de l’étape de calibrage du modèle qui s’effectue en utilisant lesprix du panier d’actifs dont on souhaite reproduire le mark-to-market. L’utilisation de modèlesfinanciers pour lesquels il existe une probabilité « risque-neutre » garantit par ailleurs l’absenced’opportunité d’arbitrage.

Dans le cadre du mémoire, trois classes d’actifs financiers sont modélisées :— l’actif monétaire (actif sans risque) ;— un indice « actions » (actif risqué) ;— des obligations zéro-coupons sans risque de crédit.

Le modèle utilisé est un modèle simple qui repose sur une modélisation des taux d’intérêt par lemodèle de Hull-White à un facteur et de l’indice « actions » par un modèle de Black-Scholes. Cemodèle est intéressant à plusieurs égard :

— le prix des obligations zéro-coupon s’exprime par une formule fermée, ce qui permet devaloriser rapidement les obligations détenues par l’assureur ;

— le modèle admet une discrétisation exacte simple qui facilite sa simulation et évacue lesbiais imputables à la discrétisation des équations différentielles stochastiques régissant lemodèle ;

— la courbe des taux est exogène, ce qui permet de reproduire simplement la courbe des tauxsans risque de l’EIOPA ;

— les produits dérivés simples de taux (swaptions) et sur actions (calls) se valorisent parformule fermée, permettant un calibrage rapide des paramètres du modèles sur les prixde marché de ces dérivés et assurant la market-consistency du générateur de scénarioséconomiques.

3.2.1 Présentation du modèle

Le générateur de scénarios économiques est basé sur un modèle mixte Black-Scholes et Hull-White à un facteur proposé par [Brigo et Mercurio, 2006]. Cette section présente ce modèle enutilisant le formalisme de Heath, Jarrow et Mortons (cadre HJM).

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

On rappelle que l’évolution de l’assureur et de son environnement est modélisé par un processusmarkovien non-homogène Z sur l’espace probabilisé filtré (Ω,F ,P, (Ft)t≥0). Cette section décritla dynamique sous la mesure de probabilitémarket-consistent Q équivalente à P d’un sous-vecteurdu processus Z correspondant aux marchés financiers.

Le modèle comporte quatre paramètres fondamentaux :— a > 0 qui correspond à la vitesse de retour à la moyenne du taux d’intérêt spot ;— σ > 0 qui correspond à la volatilité normale du taux d’intérêt spot ;— η > 0 qui correspond à la volatilité lognormale de l’indice « actions » ;— ρ ∈]− 1 ; +1[ qui est la corrélation entre le facteur de risque de taux et le facteur de risque

sur actions.A la date t, le taux d’intérêt spot est noté rt, la valeur de l’indice « actions » est notée St et leprix d’une obligation zéro-coupon qui paye 1 à la date T ≥ t est noté P (t, T ).

Le taux forward instantané en t de maturité T , noté f(t, T ), est défini par la relation

f(t, T ) = −∂T ln (P (t, T )) (3.2.1)

de sorte que

P (t, T ) = exp

(−∫ T

tf(t, u) du

)(3.2.2)

et

rt = f(t, t). (3.2.3)

Enfin, le facteur d’actualisation stochastique est noté

βt = exp

(−∫ t

0ru du

). (3.2.4)

3.2.1.1

A l’instant initial t = 0, la courbe zéro-coupon, c’est-à-dire l’ensemble des prix des obligationszéro-coupon P (0, T ) pour tout T ≥ 0, ainsi que le prix spot S0 de l’indice « actions » sontobservés sur les marchés financiers.

La dynamique des prix des obligations zéro-coupon est régie par l’équation différentielle stochas-tique

dP (t, T ) = rtP (t, T )dt+ Γ(t, T )P (t, T )dW 1t (3.2.5)

avec comme condition terminale

P (T, T ) = 1 (3.2.6)

où pour tout 0 ≤ t ≤ T , la fonction de volatilité Γ, déterministe, vérifie

Γ(t, T ) = −σa

(1− exp(−a(T − t))), (3.2.7)

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

tandis que l’indice « actions » S est solution de l’équation différentielle stochastique

dSt = rtStdt+ ηSt

(ρdW 1

t +√

(1− ρ2)dW 2t

)(3.2.8)

avec S0 fixé, où W = (W 1,W 2) est un mouvement brownien bidimensionnel standard sous lamesure de probabilité Q.

Le taux d’intérêt spot et les prix des obligations zéro-coupon vérifient la relation usuelle

P (t, T ) = EQt

(exp

(−∫ T

tru du

)). (3.2.9)

La dynamique du taux spot est donnée par l’équation différentielle stochastique

drt = (ν(t)− art) dt+ σdW 1t (3.2.10)

avec comme condition initiale r0 = f(0, 0), où ν est une fonction déterministe choisie pourreproduire la courbe des taux à l’instant initial suivant la relation

ν(T ) = af(0, T ) + ∂T f(0, T ) +σ2

2a2

(1− e−aT

)2. (3.2.11)

L’équation 3.2.10 justifie que le paramètre a soit appelé « vitesse de retour à la moyenne ». Elleest en effet très proche de celle du processus d’Ornstein-Uhlenbeck pour lequel ν est constant.Dans ce cas, le processus oscille autour de ν/a : quand il s’éloigne de cette valeur d’équilibre, ila tendance à s’en rapprocher par la suite, et ce d’autant plus vite que a est petit.

3.2.1.2 Prix des obligations zéro-coupon

Le prix des obligations zéro-coupon est donné par la formule de reconstruction

P (t, T ) = A(t, T )e−B(t,T )(rt−f(0,t)) (3.2.12)

A(t, T ) =P (0, T )

P (0, t)exp

(− σ2

4a3(1− e−2at)(1− e−a(T−t))2

)(3.2.13)

et

B(t, T ) =1

a

(1− e−a(T−t)

). (3.2.14)

Il est important de remarquer que cette formule ne fait intervenir que les paramètres fondamen-taux du modèle et le spread entre le taux spot rt et le taux forward instantané f(0, t). Ainsi, lavariable d’état qui régit le prix des obligations zéro-coupon n’est pas tant le taux d’intérêt spotque l’écart entre celui-ci et le taux forward instantané correspondant.

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

3.2.2 Schéma de discrétisation exact

Cette section rappelle les solutions des équations différentielles stochastiques régissant le modèlepour en déduire un schéma de discrétisation permettant de simuler exactement et efficacementdes scénarios économiques. Le schéma de discrétisation est exact, au sens de [Planchet et al.,2009]. L’analyse mathématique permettant de réaliser cette simulation exacte est adaptée de[Ostrovski, 2013] pour inclure l’indice « actions » et sa corrélation avec le facteur de risque detaux.

Soit

xt = rt − γ(t) (3.2.15)

où γ est un processus déterministe défini par

γ(t) = f(0, t) +σ2

2a2(1− exp(−at))2. (3.2.16)

D’après [Ostrovski, 2013], x est solution de l’équation différentielle stochastique

dxt = −axtdt+ σdW 1t (3.2.17)

avec comme condition initiale x0 = 0. De plus, la solution de l’équation (3.2.17) est donnée parla relation

xt = xse−a(t−s) + σ

∫ t

se−a(t−u) dW 1

u . (3.2.18)

Par ailleurs, d’après le théorème de Fubini stochastique, le processus intégré vérifie la relation

∫ t

sxu du = xs(1− e−a(t−s)) +

σ

a

∫ t

s[1− e−a(t−u)] dW 1

u . (3.2.19)

Enfin, on a la relation

∫ t

0γ(u) du = − lnP (0, t) +

σ2

2a2

(2

ae−at + t− 1

2ae−2at − 3

2a

). (3.2.20)

La simulation du modèle repose sur les relations

βt = exp

(−∫ t

0γ(u) du

)exp

(−∫ t

0xu du

), (3.2.21)

P (t, T ) = A(t, T ) exp

(−B(t, T )

(xt −

σ2

2a2(1− e−at)2

))(3.2.22)

et

St = S0 exp

(∫ t

0ru du− η2

2t+ η(ρW 1

t +√

1− ρ2W 2t )

)=S0

βtexp

(−η

2

2t+ ηWt

)(3.2.23)

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

où Wt = ρW 1t +

√1− ρ2W 2

t est un nouveau mouvement brownien sous Q.

Les trois relations précédentes montrent que la simulation de l’indice « actions » S, du facteurd’actualisation β et du prix des zéro-coupons P se ramène à la simulation des processus (xt),(∫ t

0 xu du) et (Wt). Il s’avère qu’il est possible de simuler exactement ces trois processus. Pour cefaire, on note un vecteur d’état yt = (xt,

∫ t0 xu du, Wt)

′ et pour deux dates s < t on s’intéresse àla loi de l’accroissement yt − ys conditionnellement à ys.

On montre qu’il s’agit d’une loi normale multivariée dont l’espérance et la matrice de variance-covariance peuvent toutes les deux être explicitement calculées. Le calcul repose sur les identités(3.2.18) et (3.2.19). On a ainsi que le vecteur yt−ys est normalement distribué conditionnellementà ys avec les paramètres :

E(xt − xs

∣∣ys) = xs(e−a(t−s) − 1), (3.2.24)

E(∫ t

sxu du|ys

)=xsa

(1− e−a(t−s)), (3.2.25)

E(Wt − Ws

∣∣ys) = 0, (3.2.26)

Var(xt − xs

∣∣ys) =σ2

2a(1− exp(−2a(t− s))), (3.2.27)

Var

(∫ t

sxu du

∣∣ys) =σ2

a2

(t− s+

2

aexp(−a(t− s))− 1

2ae−2a(t−s) − 3

2a

), (3.2.28)

Var(Wt − Ws

∣∣ys) = t− s, (3.2.29)

Cov

(xt − xs,

∫ t

sxu du

∣∣ys) =σ2

2a2(1− exp(−a(t− s)))2, (3.2.30)

Cov(xt − xs, Wt − Ws

∣∣ys) =ρσ

a(1− exp(−a(t− s))), (3.2.31)

Cov

(∫ t

sxu du, Wt − Ws

∣∣ys) =ρσ

a(a(t− s)− 1 + exp(−a(t− s))). (3.2.32)

Ce résultat est largement dérivé du Théorème 1 de [Ostrovski, 2013]. Les paramètres correspon-dant au processus W qui n’est pas présent dans [Ostrovski, 2013] se déduisent simplement parapplication de l’isométrie d’Itô aux Équations (3.2.18) et (3.2.19).

Ainsi, il est possible de simuler yt connaissant ys à l’aide d’un vecteur gaussien standard de taille3. A présent, l’objectif est de pouvoir simuler le processus y à des dates t0 = 0 < t1 < · · · < tN .Si le pas de discrétisation est constant et égal à ∆ = T

N , la matrice de variance-covariance dela loi de yti+1 − yti sachant yti ne dépend que des paramètres (a, σ, η, ρ) du modèle et de ∆.En notant Σ cette matrice de variance-covariance, il est possible de calculer numériquement sadécomposition en valeurs singulières, c’est-à-dire des matrices orthogonales P et Q et une matricediagonale D à coefficients diagonaux positifs et décroissants telles que Σ = PDQ′. Soient alorsB = PD1/2 et A la matrice de taille 3× 3 définie par

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

A =

e−a∆ 0 01− e−a∆ 1 0

0 0 1

. (3.2.33)

Soient yt0 = (0, 0, 0)T et pour i = 0, . . . , N − 1

yti+1 = A× yti +B × εi+1, (3.2.34)

où (εi)1≤i≤N est une collection de N variables aléatoires i.i.d. suivant la loi normale centréeréduite en dimension 3. La loi de (yt0 , . . . , ytN ) correspond à la loi du processus y discrétisé auxtemps t0 = 0 < t1 < · · · < tN . La formulation sous forme de récurrence linéaire vectoriellepermet une implémentation très efficace de cette méthode de simulation. En effet, les matricesA et B ne dépendent pas de la simulation et peuvent ainsi être réutilisées d’une simulation àl’autre. En pratique, pour simuler M trajectoires i.i.d., il suffit de remplacer les vecteurs yti etεi par des matrices de taille 3 ×M et d’utiliser la formule de récurrence donnée par l’Équation(3.2.34).

3.2.3 Calibrage market-consistent

Le calibrage des paramètres du modèle repose sur la reproduction du mark-to-market d’un panierd’actifs financiers cotés et liquides par le mark-to-model. Cette procédure permet de s’assurerque les scénarios générés par le modèle soient market-consistent. Théoriquement, la fonctiondéterministe ν est déterminée en utilisant la courbe des taux initiale et l’équation (3.2.11). Enpratique, du fait de la méthode de simulation utilisée et de la formule de reconstruction deszéro-coupons, il n’est même pas nécessaire de calculer explicitement ν, ce qui évite le problèmede dérivation de la courbe des taux EIOPA pour laquelle seules des maturités entières sontdisponibles. Les quatre autres paramètres σ, a, η et ρ sont choisis pour reproduire les prix decertains produits dérivés sur actions et de taux. Cette approche nécessite de disposer de formulesfermées pour l’évaluation des produits dérivés utilisés lors du calibrage. L’un des intérêts dumodèle retenu est que de telles formules existent, notamment pour le call européen et la swaptioneuropéenne [Brigo et Mercurio, 2006].

Les paramètres sont calibrés en deux étapes : d’abord, les paramètres du modèle de taux (a et σ)sont choisis de sorte à reproduire le plus fidèlement possible la nappe de volatilité des swaptions àla monnaie. Puis, les paramètres du modèle action (η et ρ) sont choisis de manière à reproduire lavolatilité des calls sur l’indice CAC40 à la monnaie. L’erreur minimisée est l’erreur quadratique.

Ce calibrage en deux étapes est justifié par la prépondérance des obligations dans les actifs del’assureur. Le calibrage a été réalisé en utilisant les données de marché au 31/12/2018. La courbedes taux sans risque utilisée est celle de l’EIOPA. Ces données sont reproduites dans l’AnnexeB. La Table 3.2 consigne les valeurs des quatre paramètres calibrés.

Paramètre Valeura 0,020992865σ 0,007020486η 0,17359454ρ -0,058359594

Table 3.2 – Calibrage des paramètres du générateur de scénarios économiques market-consistentau 31/12/2018.

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

3.3 Modèle de projection des flux de trésorerie

Cette section vise à expliciter la modélisation de l’activité de l’assureur A. En particulier, elles’intéresse aux interactions entre les actifs et les passifs. Cela justifie le terme de « modélisationALM » souvent utilisé. Néanmoins, le modèle ne se limite pas à la gestion actif-passif maisl’englobe puisque l’objectif est de pouvoir établir tous les flux de trésorerie futurs en fonctionde la réalisation des scénarios économiques. Le calcul des flux de trésorerie futurs est en effetindispensable pour l’évaluation du Best Estimate tel que défini par la directive « Solvabilité II ».En reprenant le cadre mathématique défini dans la Section 3.1, ce modèle décrit l’évolution duprocessus Z pour la partie non couverte par le générateur de scénarios économiques présenté dansla Section 3.2. Il comprend notamment le calcul de la valeur actuelle des flux de trésorerie futursψ(Z[t,T ]).

Mazars Actuariat dispose d’un modèle de projection de flux de trésorerie d’un portefeuille decontrats d’assurance vie épargne en euros. Ce modèle a été développé dans le cadre de travaux deRecherche et Développement pour d’autres mémoires. Dans le cadre de ce mémoire, nous avonsporté le modèle existant de R vers Python. L’objectif principal de ce portage était de réduire letemps de calcul. Cet objectif a été atteint avec un facteur d’accélération de l’ordre de 10.

En outre, les améliorations suivantes ont été apportées :

— intégration d’un générateur de scénarios économiques market-consistent (Section 3.2) ;

— mise en place d’un générateur de facteurs de risque et application des chocs au calcul duBest Estimate (Section 4.2) ;

— utilisation de plusieurs processeurs pour les simulations.

C’est ce modèle qui est utilisé pour la valorisation du bilan prudentiel de l’assureur A. Le restede cette section aborde quelques points essentiels du modèle de projection des flux de trésorerie.

La Figure 3.1 représente graphiquement l’organisation générale d’un modèle de projection desflux de trésorerie futurs d’un assureur épargne. Les marchés financiers ont été décrits dans lasection précédente. La modélisation des actifs et des passifs sont décrites dans les deux sous-sections qui suivent. Enfin, la dernière sous-section décrit le fonctionnement interne du modèle :management actions, comptabilité, réglementation et flux de trésorerie.

3.3.1 Modélisation des actifs

L’actif de l’entreprise d’assurance est uniquement composé d’instruments financiers. Trois classesd’actifs sont présentes dans le bilan de l’entreprise :

— des liquidités, rémunérées au taux d’intérêt spot ;

— des actions ne payant pas de dividendes (i.e. les dividendes sont réinvestis), indexées surl’indice « actions » des marchés financiers ;

— des obligations d’État à taux fixe. Ces obligations payent des coupons annuels selon untaux facial fixé à l’achat. Le nominal est remboursé à l’expiration de l’obligation. Toutesles obligations ont la même maturité lors de leur achat et sont achetées au pair (le coûtd’achat est égal au nominal de l’obligation).

La valeur de marché des liquidités est toujours égale à leur valeur faciale (coût historique).La position de l’assureur dans cet actif peut être négative. Cela correspond à une situation oùl’entreprise emprunte pour financer son activité.

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

Figure 3.1 – Schéma de l’organisation d’un modèle de projection des flux de trésorerie d’unassureur épargne.

La valeur de marché des actions peut différer de leur valeur comptable en cas de plus-values oude moins-values latentes. En effet, en normes françaises, les actions sont comptabilisées à leurcoût d’achat.

Par simplification, la valeur comptable des obligations est constante et égale au nominal jus-qu’au remboursement de celui-ci. Lors du remboursement du nominal, le compte « placementsfinanciers » est crédité tandis que le compte « banque » est débité (pour rappel, un compte debilan à l’actif augmente lorsqu’il est débité et diminue lorsqu’il est crédité). Dans le cadre du« pilier 1 » de la réglementation « Solvabilité II », les obligations émises par les États membres del’Union européenne ne sont pas soumises à des exigences de capital au titre du risque de crédit.Cela justifie la non-prise en compte de ce risque dans la modélisation des obligations. Ainsi, lavaleur de marché des obligations peut être déterminée comme la somme des flux (coupons etremboursement du nominal) actualisés selon la courbe des taux sans risque pertinents. Lors desréinvestissements, le taux facial est déterminé par absence d’opportunité d’arbitrage en fonctionde la structure par termes de taux d’intérêt.

3.3.2 Modélisation des passifs

Le passif de l’assureur est composé de quatre éléments principaux :

— les fonds propres comptables, composés des fonds propres initiaux et du résultat comptable.Du fait du report à nouveau, les fonds propres comptables peuvent devenir négatifs (lesrecapitalisations éventuelles ne sont pas modélisées) ;

— la réserve de capitalisation, qui est dotée en cas de réalisation de plus-values obligataires etreprise dans le cas de réalisation de moins-value obligataires. La réserve de capitalisationest toujours positive ou nulle ;

— la provision pour participations aux bénéfices : les assureurs vie ont la possibilité de ne pasdistribuer immédiatement la participation aux bénéfices. Ils disposent d’un délai de huitans. L’assureur la provisionne dans un compte dédié. Du fait du délai de redistribution

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

maximal, les dotations sont comptabilisées par année et les reprises s’effectuent de la do-tation la plus ancienne à la dotation la plus récente. Cette provision est toujours positiveou nulle.

— les provisions mathématiques, qui correspondent à l’encours de l’épargne des assurés.

Comme les fonds propres ne sont pas cantonnés, les produits financiers générés par les actifs enreprésentation des quatre éléments du passif listés ci-dessus sont répartis de manière proportion-nelle entre assurés et assureur. La part liée aux engagements envers les assurés correspond ainsiaux produits financiers issus des actifs en représentation des provisions mathématiques et de laprovision pour participation aux bénéfices. Réglementairement, au moins 85% de ces produitsfinanciers doivent être redistribués aux assurés.

Le portefeuille de contrats est divisé en groupes aux caractéristiques homogènes appelés modelpoints. Les caractéristiques principales sont les suivantes :

— âge ;— ancienneté ;— nombre de contrats ;— montant de la provision mathématique ;— taux minimum garanti (TMG) à la souscription ;— durée de garantie du TMG à la souscription (maximum 8 ans) ;— taux de participation aux bénéfices contractuelle ;— taux de chargement sur encours ;— taux de chargement d’acquisition ;— taux de pénalité de rachat.

3.3.3 Modèle « ALM »

Le déroulement d’un exercice comptable est modélisé selon les règles suivantes et dans l’ordre oùcelles-ci sont présentées :

3.3.3.1 Collecte des primes

Les primes sont collectées, les chargements d’acquisition prélevés et la prime nette est dotée à laprovision mathématique. Le niveau des primes versées est déterminé par le modèle présenté dansle paragraphe 3.3.4.1. Les chargements d’acquisition sont proportionnels aux primes collectées.Le taux de chargement d’acquisition est une des caractéristiques du model point. Tous ces fluxsont supposés avoir lieu en début d’année. Conformément à la « frontière des contrats » viséeaux articles 17 et 18 du règlement délégué de la directive « Solvabilité II », les versements libresne sont pas pris en compte pour le calcul du Best Estimate.

3.3.3.2 Évolution des actifs

En début d’année, l’assureur paye ses frais d’investissement modélisés comme proportionnels à lavaleur comptable de l’actif. Puis, les actifs évoluent selon la réalisation des marchés financiers :encaissement des coupons des obligations et de la rémunération des liquidités, enregistrement dela variation en valeur de marché des obligations et des actions puis remboursement du nominaldes obligations arrivant à échéance.

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

3.3.3.3 « Management actions »

Cette section décrit les « management actions » du modèle de projection des flux de trésorerie.Dans le modèle utilisé par l’assureur A, ces décisions, qui ont lieu en fin d’année, concernentla gestion des actifs financiers et la politique de participation aux bénéfices. Les « managementactions » sont particulièrement importantes dans le cadre de la gestion des risques puisqu’ellesdéterminent les leviers de pilotage utilisés par le management dans le cas de situations défavo-rables.

3.3.3.3.1 Gestion d’actifs Tout d’abord, les plus-values latentes sont sécurisées selon unerègle fixe de réalisation des plus-values. Par exemple, l’assureur A réalise systématiquement 10%de ses plus-values latentes sur actions. Ensuite, la gestion d’actif poursuit une allocation cible envaleur de marché. L’assureur A a pour allocation cible 85% en obligations, 10% en actions et 5%en liquidités. Cette allocation est considérée constante dans le temps. Pour chaque classe d’actifs(hormis le cash qui sert d’ajustement), le modèle détermine la valeur de marché cible et procèdeaux ventes et aux achats le cas échéant. Dans le cas (extrême) où la valeur de marché de l’actifest négative (cas où la balance du cash est fortement négative, par exemple si les fonds propressont négatifs), tous les actifs financiers sont vendus pour réduire la position short en cash le pluspossible. Les plus et moins-values obligataires sont gérées conformément à la réglementation enutilisant la réserve de capitalisation.

3.3.3.3.2 Participation aux bénéfices L’algorithme de participation aux bénéfices se dé-roule comme suit. L’objectif est de distribuer les produits financiers de l’année entre les assuréset l’assureur. Vu la nature des actifs détenus par l’assureur, les produits financiers sont exclusive-ment composés des intérêts rémunérant les liquidités, des plus-values réalisées sur les actions etdes coupons des obligations. Si le taux d’intérêt court est négatif ou si ce sont des moins-valuesqui sont réalisées sur les actions, il faut également prendre en compte ces pertes financières.Enfin, il faut également soustraire les frais d’investissement que supporte l’assureur. Ce calculdes produit financiers totaux (PF totaux) correspond à la relation

PF totaux = intérêts + plus ou moins-values sur actions + coupons− frais d’investissement.

Comme les fonds propres ne sont pas cantonnés, une règle de proportionnalité est utilisée pourrépartir les produits financiers entre les différents éléments du passif. L’algorithme détermine lapart de produits financiers liés aux engagements envers les assurés dans les produits financiers (PFeng. assurés) comme étant égale à la somme des valeurs comptables de provisions mathématiques(PM totales) et de la provision pour participation aux bénéfices (PPB) rapportée à la valeurcomptable totale du bilan (VC bilan). Si la somme de la valeur comptable des fonds propreset de la réserve de capitalisation est négative, alors, la part des assurés est égale à 100% desproduits financiers. Ce calcul correspond à la relation

PF eng. assurés = min

(PM totales + PPB

VC bilan, 1

)× PF totaux.

L’assureur doit au moins respecter ses engagements contractuels (taux minimum garanti et parti-cipation aux bénéfices contractuelle) et ses obligations réglementaires (participation aux bénéficesréglementaire). Pour ce faire, l’assureur pourra éventuellement dégager des produits financiersadditionnels en réalisant des plus-values supplémentaires sur les actions ou bien enregistrer despertes sur les fonds propres si les engagements contractuels y obligent.

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

Idéalement, l’assureur sert une revalorisation cible déterminée par le taux servi par la concurrence.En effet, dans le cas où l’assureur ne sert pas ce taux concurrent, les rachats augmenteront l’annéesuivante. Pour ce faire, l’assureur peut réaliser des produits financiers supplémentaires et effectuerdes reprises sur la provision pour participation aux bénéfices. Les paragraphes 3.3.4.2 et 3.3.4.3donnent plus de détails sur la modélisation du taux concurrent et la modélisation des rachatsrespectivement.

Revalorisation contractuelle Tout d’abord, l’algorithme détermine la revalorisation contrac-tuelle correspondant aux engagements de l’assureur. Pour cela, il calcule pour chaque model pointle maximum entre la revalorisation garantie et la participation aux bénéfices (PB) contractuelle.

Le revalorisation garantie est calculée pour chaque model point i en appliquant le taux minimumgaranti (TMGi) à la provision mathématique de début de période, augmentée des primes nettesde chargements d’acquisition et notée PMi, suivant la relation

revalorisation garantiei = TMGi × PMi.

La participation aux bénéfices contractuelle (PB contractuellei) d’un model point i est calculée àpartir du taux de participation aux bénéfices contractuelle, du montant de la provision mathéma-tique (PMi) rapporté aux provisions mathématiques totales et du niveau des produits financierssuivant la relation

PB contractuellei = taux de PB contractuellei ×PMi

PM totales× PF eng. assurés.

La revalorisation contractuelle d’un model point i est donc le maximum entre ces deux quantités

revalorisation contractuellei = max (revalorisation garantiei,PB contractuellei) .

Si les produits financiers des assurés sont suffisants pour servir la revalorisation contractuelle(c’est le cas si le rendement des actifs est suffisamment élevé par rapport au TMG moyen duportefeuille), aucune autre action n’est requise. Sinon, l’algorithme réalise, si possible, des plus-values latentes supplémentaires sur les actions. Ensuite, il utilise la part des produits financiersde l’assureur. Enfin, si tout cela n’a pas suffi pour dégager les produits financiers nécessaires àla revalorisation contractuelle, une perte sera enregistrée.

Revalorisation cible L’algorithme détermine un « taux concurrent », qui correspond au tauxservi par la concurrence, puis le niveau de revalorisation cible, i.e. le maximum entre la revalori-sation que donnerait le taux concurrent et la revalorisation contractuelle. Pour un model pointi, cela correspond à la relation

revalorisation ciblei = max (revalorisation contractuellei, taux concurrent× PMi) .

Ensuite, l’algorithme détermine les produits financiers nécessaires à la revalorisation cible. Puis,l’algorithme réalise la reprise minimale sur la provision pour participation aux bénéfices, quicorrespond à la « règle des 8 ans ». Si cela n’est pas suffisant, il effectue une reprise supplé-mentaire sur la provision pour participation aux bénéfices, dans la limite de la reprise annuellemaximale définie par la règle de gestion de la provision pour participation aux bénéfices. Parexemple, l’assureur A s’est fixé comme règle de ne jamais reprendre plus de 85% de la provision

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

pour participation aux bénéfices la même année. En cas de besoin, des plus-values latentes sup-plémentaires sur actions sont réalisées. Si cela n’est pas suffisant, la revalorisation cible ne serapas versée en totalité. Si la différence entre la revalorisation cible et la revalorisation contrac-tuelle est inférieure à la reprise minimale sur la provision pour participation aux bénéfices, alors,une revalorisation additionnelle sera tout de même versée, conduisant à une sur-satisfaction desassurés.

Participation aux bénéfices réglementaire Si la revalorisation nette des chargements surencours est inférieure à la participation aux bénéfices réglementaire (85% des produits financierset 90% du résultat technique (100% s’il est négatif)), la différence est dotée à la provision pourparticipation aux bénéfices.

3.3.3.4 Revalorisation des provisions mathématiques

Les provisions mathématiques sont revalorisées. En même temps, les chargements sur encourssont prélevés sur l’épargne des assurés et les prélèvements sociaux sont calculés sur la base de larevalorisation nette.

3.3.3.5 Vieillissement, décès et rachats

Les prestations au titre des décès et des rachats sont versées en fin d’année. La modélisation de lamortalité et du comportement de rachat des assurés est présentée plus bas dans les paragraphes3.3.4.3 et 3.3.4.4. La valeur unitaire de la prestation est égale à la provision mathématique globaledu model point divisée par le nombre de contrats. Dans le cas d’un rachat, une pénalité, dont letaux est fixé contractuellement par model point, est appliquée. Le montant total des prestationsbrutes de pénalités est repris sur la provision mathématique et les prestations nettes de pénalitéssont payées. Par ailleurs les model points vieillissent : l’âge moyen et l’ancienneté augmententtous les deux.

3.3.3.6 Paiement des frais de l’assureur

Par simplification, tous les frais sont proportionnels à un montant de référence. Ainsi, il n’y apas de modélisation de coûts fixes ou de coûts unitaires.

Les différents frais de l’assureur sont payés en fin d’année, après revalorisation des contrats :

— frais d’acquisition, basés sur les primes brutes de chargement d’acquisition ;

— frais d’administration, basés sur la provision mathématique après paiement des prestations ;

— frais de gestion, basés sur le montant des prestations versées, brutes de pénalités de rachat.

3.3.3.7 Impôts sur les bénéfices et report à nouveau

Le résultat brut d’impôts de l’exercice est calculé puis le cas échéant, l’impôt sur les sociétés estpayé. Enfin, la perte ou le profit net d’impôts est affecté aux fonds propres (report à nouveau).L’assureur ne distribue donc pas de dividendes dans le modèle.

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

3.3.3.8 Cas spécial de la dernière année de projection

Lors de la dernière année de projection, tous les assurés survivants rachètent leur épargne aprèsrevalorisation. Cela signifie que les provisions mathématiques sont versées sous forme de presta-tions de rachat aux assurés. En outre, le reliquat de provision pour participation aux bénéficesest également versé aux assurés sous forme de prestations de rachat. La réserve de capitalisationest quant à elle attribuée aux actionnaires.

3.3.4 Paramètres et hypothèses

3.3.4.1 Modélisation des primes

La modélisation des primes repose sur une décroissance géométrique selon un taux constant λ.La collecte annuelle globale d’un model point d’effectif n et d’ancienneté u en début d’année estdonnée par

n(1− λ)uΠ0 (3.3.1)

où Π0 représente le versement initial moyen d’un assuré du model point.

Pour rappel, en application de la « frontière des contrats », dans le cadre du calcul du BestEstimate, les versements libres ne sont pas pris en compte. Cela correspond à la situation oùλ = 1. Dans un cadre prospectif, en lien avec son plan stratégique qui sera présenté dans leChapitre 6, l’assureur A considère que le taux de chute λ est homogène pour tous les assurés deson portefeuille et constant dans le temps. Il l’estime à 85%.

3.3.4.2 Modélisation du taux concurrent

Le taux concurrent est modélisé comme la moyenne de trois taux : le « taux du concurrentagressif », le « taux du livret A » et « le taux d’un nouvel entrant ». Ces trois taux sont présentésci-dessous.

3.3.4.2.1 Taux du concurrent agressif Le taux d’un concurrent agressif est modélisécomme le rendement d’un portefeuille investi sur des actions et des obligations de maturitéfixée. L’allocation est supposée constante dans le temps. L’assureur A a fixé la part des actionsdans le portefeuille du concurrent agressif à 30% et la maturité des obligations à 10 ans. Leconcurrent est dit agressif car fortement investi sur les actions.

3.3.4.2.2 Taux du livret A Le taux du livret A est modélisé par le taux zéro-coupon dematurité un an.

3.3.4.2.3 Taux d’un nouvel entrant Le taux d’un nouvel entrant est modélisé comme letaux zéro-coupon de maturité donnée, en pratique 10 ans.

3.3.4.3 Modélisation des rachats

Les rachats sont décomposés entre rachats structurels et rachats conjoncturels.

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

3.3.4.3.1 Rachats structurels Les rachats structurels correspondent aux rachats que lesassurés effectuent pour des raisons indépendantes de la conjoncture économique. Il s’agit desaléas de la vie : achat d’un bien immobilier, paiement de frais médicaux, etc. Dans ce modèle,les rachats structurels dépendent uniquement de l’ancienneté de l’assuré et sont exprimés enpourcentage de la provision mathématique du model point, ou de manière équivalente du nombrede contrats. Une forme possible est un taux de rachat structurel constant par ancienneté mis àpart des pics pour des anciennetés égales à 5 et 8 ans correspondant à des avantages fiscaux del’assurance-vie. La table de taux de rachat structurel est présentée dans la Table A.1 en annexe.

3.3.4.3.2 Rachats conjoncturels Les rachats conjoncturels sont les rachats expliqués parles conditions actuelles des marchés financiers. Plus précisément, modéliser ces rachats supposela prise en compte des assurés qui, réactifs à la conjoncture économique, rachèteront leur contrats’ils estiment pouvoir obtenir un meilleur rendement sur un produit concurrent. Compte tenude la difficulté d’isolation des effets conjoncturels dans l’historique des rachats, la modélisationdes rachats conjoncturels pose problème aux assureurs. Pour y remédier, l’ACPR a proposé dansles orientations nationales complémentaires du QIS 5 une loi de rachat conjoncturel en fonctiondu spread de taux entre le taux servi par l’assureur et le taux attendu par l’assuré, noté ∆. Atravers la valeur de six paramètres τmin, τmax, α, β, γ et δ, l’ACPR propose deux lois de rachatsconjoncturels, l’une correspondant à un plancher minimum de rachat, l’autre à un planchermaximum. Il est recommandé aux assureurs de choisir les paramètres de leur loi dans l’intervalledélimité par les plafonds minimum et maximum. Ainsi, le taux de rachat conjoncturel est donnépar

τ(∆) =

τmax si ∆ < α

τmax∆−βα−β si α ≤ ∆ < β

0 si β ≤ ∆ < γ

τmin∆−γδ−γ si γ ≤ ∆ < δ

τmin si δ ≥ δ

. (3.3.2)

Il s’agit en fait d’une fonction continue, décroissante et linéaire par morceaux comprise entreτmin < τmax. Les valeurs préconisées par l’ACPR, ainsi que celles effectivement retenues dans lemodèle, sont indiquées dans la Table A.2 en annexe.

3.3.4.4 Modélisation de la mortalité

La mortalité est modélisée en utilisant une table de mortalité par âge. L’assureur A a retenu latable réglementaire TH 00-02 - décès. Il s’agit d’une simplification. La table TH 00-02 - décèsest reproduite dans la Table A.3 en annexe.

3.4 Bilan prudentiel de l’assureur A

A partir de l’ensemble des éléments présentés dans les sections précédentes, il est désormaispossible de réaliser le bilan prudentiel de l’assureur A. Il convient d’une part de calculer la valeurde marché des actifs qu’il détient, et d’autre part d’estimer la valeur économique de ses passifsen utilisant la méthode Monte-Carlo décrite dans la Section 3.1.

La Table 3.3 regroupe les caractéristiques des 40 model points composant le portefeuille decontrats de l’assureur A au 31/12/2018. Les autres paramètres utilisés pour la projection desflux de trésorerie sont consignés dans la Table 3.4.

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

Âge Ancienneté Nombre de contrats Provisions mathématiques (ke) TMG40 10 1 831 7 126 3%50 10 4 309 19 565 3%60 10 4 848 25 155 3%70 10 3 232 12 577 3%39 9 1 254 4 857 2,5%49 9 2 951 13 333 2,5%59 9 3 320 17 142 2,5%69 9 2 213 8 571 2,5%38 8 2 006 7 730 2,5%48 8 4 720 21 219 2,5%58 8 5 310 27 281 2,5%68 8 3 540 13 640 2,5%37 7 2 433 9 330 1%47 7 5 726 25 613 1%57 7 6 441 32 930 1%67 7 4 294 16 466 1%36 6 2 293 8 747 0,5%46 6 5 395 24 013 0,5%56 6 6 069 30 873 0,5%66 6 4 046 15 437 0,5%35 5 1 279 4 854 0%45 5 3 009 13 325 0%55 5 3 385 17 132 0%65 5 2 256 8 566 0%34 4 1 434 5 415 0%44 4 3 374 14 864 0%54 4 3 796 19 111 0%64 4 2 531 9 556 0%33 3 1 368 5 125 0%43 3 3 218 14 068 0%53 3 3 621 18 087 0%63 3 2 414 9 044 0%32 2 1 236 4 522 0%42 2 2 909 12 414 0%52 2 3 272 15 960 0%62 2 2 182 7 980 0%31 1 1 039 3 292 0%41 1 2 444 9 035 0%51 1 2 749 11 617 0%61 1 1 833 5 809 0%

Table 3.3 – Composition du portefeuille de contrats de l’assureur A au 31/12/2018.

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

Catégorie

Param

ètre

Base

Valeu

r

Eng

agem

ents

contractue

lsDurée

dega

rantie

N.A

.8an

sGaran

tieplan

cher

N.A

.ou

iParticipa

tion

auxbé

néfic

escontractue

lleprod

uits

finan

ciers

90%

Cha

rgem

ents

Cha

rgem

ents

d’acqu

isition

prim

escolle

ctées

3%Cha

rgem

ents

suren

cours

provisions

mathé

matique

s0,6%

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alitéde

rachat

valeur

derachat

0,5%

Fiscalité

Impô

tssurlesbé

néfic

esbé

néfic

es28

%Prélèvements

sociau

xrevalorisation

15,5

%

Participa

tion

auxbé

néfic

esRep

rise

minim

ale

PPB

15%

Rep

rise

max

imale

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85%

Tau

xcible

N.A

.taux

conc

urrent

(cf.§3.3.4.2)

Gestion

d’actifs

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splus-value

saction

splus-valuesaction

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cation

cible-action

svaleur

demarchéde

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cation

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ligations

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Allo

cation

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isition

prim

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Racha

tsstructurels

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cf.§

3.3.4.3

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xpa

ramètrespo

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calcul

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atede

l’assureu

rA.

28

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

La Figure 3.2 représente la distribution empirique de la valeur actuelle nette des flux de trésoreriefuturs de l’assureur A au 31/12/2018. Cette figure illustre le caractère aléatoire de cette quantité.Le trait en pointillé rouge correspond à la moyenne empirique de cette distribution, et donc àla valeur estimée du Best Estimate. Cette quantité s’élève à 591 466 ke. L’écart-type de ladistribution est quant à lui estimé à 24 320 ke. Cependant, la forme de la distribution estclairement asymétrique, avec une queue droite plus lourde que la queue gauche, ce qui exclutl’utilisation de la loi normale pour la modéliser.

400 500 600 700 800 900 1000 1100

VAN des flux de tresorerie futurs (Me)

0

200

400

600

800

1000

1200

Figure 3.2 – Distribution empirique de la valeur actuelle nette (VAN) des flux de trésoreriefuturs de l’assureur A au 31/12/2018.

La Figure 3.3 représente la convergence de l’estimateur BE t de la valeur économique des passifsau 31/12/2018, pour un nombre de scénarios M allant jusqu’à 10 000. La Figure 3.4 représentel’écart relatif entre la valeur de l’estimateur pour M = 10 000 simulations et les estimateursintermédiaires (M < 10 000). Pour assurer un écart relatif inférieure à 0,5%, un nombre desimulations minimal fixé à M = 1 000 est retenu.

La Table 3.5 décrit le bilan prudentiel de l’assureur A au 31/12/2018. La valeur de marché del’actif est égale à 651 281 ke, avec des plus-values latentes de 10 % sur les actions et de 5,84 %sur les obligations. Les provisions techniques, égales au Best Estimate en l’absence de prise encompte de la Risk Margin, sont égales à 591 466 ke. Par différence, les fonds propres économiquess’élèvent à 59 815 ke.

Actifs (ke) Passifs (ke)Liquidités 32 564 Fonds propres économiques 59 815Actions 65 128 Provisions techniques 591 466Obligations 553 589Total 651 281 Total 651 281

Table 3.5 – Bilan prudentiel de l’assureur A au 31/12/2018.

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Chapitre 3. Valorisation du bilan prudentiel « Solvabilité II »

0 2000 4000 6000 8000 10000

Nombre de simulations M

580

600

620

640

660

Ap

pro

xim

atio

nd

uB

est

Est

ima

te(Me

)

Figure 3.3 – Convergence de l’estimateur BE t du Best Estimate de l’assureur A au 31/12/2018.

2000 4000 6000 8000 10000

Nombre de simulations M

−0, 4

−0, 2

0, 0

0, 2

0, 4

Eca

rtre

lati

f(%

)

Figure 3.4 – Écart relatif de l’estimateur BE t du Best Estimate de l’assureur A au 31/12/2018en fonction du nombre de simulations M .

30

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Chapitre 4

« Calcul complet » du Solvency CapitalRequirement

Ce chapitre s’intéresse au calcul du Solvency Capital Requirement, minimum réglementaire defonds propres que doit détenir l’assureur pour poursuivre son activité et faire face à des situationsextrêmes en termes de risques financiers et actuariels.

En premier lieu, la Section 4.1 donne la définition du Solvency Capital Requirement dans l’ap-proche par modèle interne retenue par l’assureur A. Elle précise notamment le cadre mathéma-tique permettant de l’exprimer comme la value-at-risk de niveau 99,5% d’une perte économique àhorizon un an. La Section 4.2 détaille la modélisation des facteurs de risque (risques de marché etrisques de souscription vie) retenue pour le calcul du Solvency Capital Requirement de l’assureurA. La Section 4.3 présente la problématique de « simulations dans les simulations » soulevée parcette formulation sous forme de value-at-risk et rappelle la méthode de référence, aussi appelée« calcul complet », utilisée pour sa résolution. Puis, la Section 4.4 présente la mise en œuvredu calcul du Solvency Capital Requirement de l’assureur A au 31/12/2018 par la méthode deréférence. Enfin, la Section 4.5 analyse les relations entre les facteurs de risque retenus et lesdifférents postes du bilan prudentiel de l’assureur A au 31/12/2019.

4.1 Définition

La réglementation « Solvabilité II » prévoit dans le cadre du « pilier 1 » que les fonds propreséconomiques d’un assureur doivent être supérieurs à un seuil appelé capital de solvabilité requis(Solvency Capital Requirement). Le Solvency Capital Requirement peut être estimé selon une« formule standard » déterminée par l’EIOPA ou à partir d’un modèle interne propre à l’assureuret homologué par son superviseur. L’approche retenue par l’assureur A est celle du modèle interne.

Dans cette approche, le Solvency Capital Requirement correspond au montant de fonds propreséconomiques dont doit disposer l’entreprise aujourd’hui pour s’assurer qu’avec une probabilitésupérieure à 99,5%, elle ne sera pas en situation de ruine économique dans un an. Cette définitionrepose ainsi sur trois éléments principaux :

— la ruine économique, qui correspond à la situation où l’actif de l’assureur, évalué en valeurde marché, est inférieur à la valeur économique des passifs. Autrement dit, il s’agit d’unesituation où les fonds propres économiques sont négatifs ;

— l’horizon d’un an, qui impose ainsi de connaître la distribution des fonds propres dans unan. Le montant des fonds propres dans un an est en effet aléatoire car sa valeur dépend de

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

la réalisation de certains facteurs de risque ;

— le seuil de 99,5%, qui indique que la probabilité de survenance à un an de la ruine écono-mique doit être inférieure à 0,5%. Ce seuil correspond ainsi à une période de retour de 200ans puisque l’horizon est annuel.

Dans le Chapitre 3 qui précède, une méthode de valorisation du bilan prudentiel permettant decalculer les fonds propres économiques a été présentée. Le calcul du Solvency Capital Require-ment nécessite une étape supplémentaire : l’assureur doit pouvoir valoriser son bilan de manièreprospective. Il s’agit donc de déterminer la valeur de marché des actifs ainsi que le niveau desprovisions techniques dans un an, pour en déduire par différence la valeur des fonds propreséconomiques. Cependant, ces quantités ne sont pas déterministes mais bien aléatoires : ellesdépendent entre autres de la réalisation des marchés financiers, du comportement des assurés,voire même des actions entreprises par l’assureur. En valorisant de manière prospective son bilanprudentiel, l’assureur cherche à déterminer avec quelle probabilité sa situation se dégradera aupoint d’atteindre la ruine économique. Il s’assure en particulier que cette probabilité est infé-rieure au seuil règlementaire de 0,5%. Dans le cas contraire, il met en place avec son superviseurdes mesures correctives pour rétablir son niveau de solvabilité.

En reprenant les notations de la Section 3.1, la ruine économique de l’entreprise au temps t cor-respond à la survenance de l’évènement NAV t < 0. L’objectif du Solvency Capital Requirementest de maintenir à un niveau contrôlé la probabilité de survenance de cet évènement.

Ainsi, la contrainte de solvabilité règlementaire à la date t, à horizon un an et au niveau α =99, 5%, s’écrit :

Pt(NAV t+1 < 0) ≤ 1− α. (4.1.1)

Le Solvency Capital Requirement est alors formellement défini comme le montant de fonds propreséconomiques minimal à détenir pour respecter la contrainte de solvabilité règlementaire à la datet :

SCRt = infc ∈ R : Pt(NAV t+1 < 0|NAV t = c) ≤ 1− α. (4.1.2)

La non-linéarité de la relation entre NAV t et NAV t+1, qui est due aux interactions entre lesactifs et les passifs de l’entreprise, ne permet pas d’exploiter directement la relation précédentepour déterminer le Solvency Capital Requirement. En pratique, l’approche retenue repose plutôtsur l’utilisation de la value-at-risk au niveau α de la perte économique à horizon un an. Cetteperte se définit comme la variation de la Net Asset Value de l’entreprise, en prenant compte dela valeur temporelle de l’argent. Pour 0 ≤ t ≤ T − 1, la perte sur la période [t, t+ 1] s’écrit

Lt+1t = NAV t − β(t, t+ 1)NAV t+1. (4.1.3)

La définition du Solvency Capital Requirement donnée par l’équation (4.1.2) est ainsi remplacéepar

SCRt = VaRαt [Lt+1t ], (4.1.4)

où VaRαt [Lt+1t ] désigne la value-at-risk conditionnelle à Ft de la variable aléatoire Lt+1

t au niveauα. Celle-ci correspond au quantile au niveau α de la distribution de Lt+1

t sous la probabilité Pconditionnellement à Ft. Elle est définie par

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

VaRαt [Lt+1t ] = infl ∈ R : Pt[Lt+1

t > l] ≤ 1− α. (4.1.5)

Les hypothèses sous-jacentes à l’utilisation de la value-at-risk pour le calcul du Solvency CapitalRequirement sont le cantonnement des fonds propres et l’investissement des fonds propres sup-plémentaires au taux sans risque [Devineau et Loisel, 2009]. En pratique, les fonds propres d’unassureur épargne en euros ne sont pas cantonnés ni exclusivement investis sur l’actif sans risque.Cependant, l’utilisation de la value-at-risk pour le calcul du Solvency Capital Requirement restela pratique standard approuvée par le superviseur.

Le « pilier 1 » de la directive « Solvabilité II » impose un calcul trimestriel du Solvency CapitalRequirement. L’entreprise contrôle ensuite que son ratio de solvabilité (ratio entre les fondspropres économiques et le Solvency Capital Requirement)

SRt =NAV t

SCRt(4.1.6)

est supérieur à 100%. Si c’est bien le cas, alors la contrainte de solvabilité règlementaire définiepar l’équation (4.1.1) bien respectée : l’entreprise sera en situation de ruine économique dans unan avec une probabilité inférieure à 1− α = 0, 5%

4.2 Modélisation des facteurs de risque

L’approche par modèle interne requiert la modélisation des risques auxquels sont exposés l’assu-reur. La directive « Solvabilité II » prévoit un certain nombre de modules qui doivent être intégrésdans le calcul du Solvency Capital Requirement. A titre de simplification, seule une partie de cesrisques sera effectivement prise en compte :

— le risque de marché, défini aux termes de l’article 13 de la directive « Solvabilité II » comme« le risque de perte, ou de changement défavorable de la situation financière, résultant,directement ou indirectement, de fluctuations affectant le niveau et la volatilité de la valeurde marché des actifs, des passifs et des instruments financiers ». Le module de risque a étéensuite décomposé en plusieurs sous-modules. Dans le cadre de ces travaux, deux sous-modules ont été modélisés :

— le risque de taux d’intérêt, qui correspond au risque lié aux changements affectant lacourbe des taux d’intérêts sans risque. Ce risque couvre non seulement la hausse oula baisse générale des taux d’intérêt mais aussi d’autres déformations potentielles dela structure par termes des taux d’intérêt sans risque.

— le risque sur action qui correspond au risque lié à la hausse ou à la baisse des prix desactions,

— le risque de souscription vie, défini aux termes de l’article 13 de la directive « SolvabilitéII » comme « le risque de perte ou de changement défavorable de la valeur des engage-ments d’assurance, en raison d’hypothèses inadéquates en matière de tarification et deprovisionnement ». Ces travaux se sont focalisés sur deux sous-risques :

— les risques de mortalité et de longévité provenant de l’utilisation d’hypothèses demortalité inadaptées pour l’évaluation des provisions techniques Best Estimate,

— le risque de rachat structurel qui correspond à l’utilisation d’hypothèses inadéquatessur le comportement de rachat structurel (i.e. indépendant de la conjoncture écono-mique) des assurés.

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

Un nombre restreint de facteurs de risque a été retenu car l’objectif principal du mémoire n’estpas la réalisation d’un modèle interne mais bien l’évaluation du respect permanent des exigencesde capital dans le cadre de l’ORSA.

En reprenant les notations de la Section 4.1, la suite de cette section décrit la dynamique duprocessus Z sous la mesure de probabilité historique P pour la partie correspondant aux marchésfinanciers (taux et actions) et aux hypothèses de calcul des provisions techniques (taux de rachatstructurel et taux de mortalité).

Les facteurs de risque au temps t sont notés Ft où désigne le risque concerné (e pour le risque

sur actions (equity), r pour le risque de taux (rates), qx pour le risque de mortalité et τu pour lerisque de rachat).

4.2.1 Risques de marché

Cette section présente la modélisation des deux risques de marché retenus. Pour rappel, les risquesde marché à modéliser sont le risque de taux d’intérêt et le risque sur actions. L’évolution desfacteurs de risque se fait à un horizon h fixé, par exemple h = 1 mois. Concrètement, les processusà modéliser sont le processus (univarié) (St) qui représente l’évolution temporelle de la valeur del’indice « actions » et le processus (fonctionnel) (Rt) qui représente l’évolution temporelle de lacourbe des taux zéro-coupon pour des échéances avant la maturité θ ∈ [0, T ].

4.2.1.1 Risque sur actions

Le modèle retenu pour le risque sur actions repose sur une approche Black-Scholes simple àimplémenter : les log-rendements sont notés F et = log(St/St−h). Le processus (F et ), qui représentedonc le facteur de risque action, est donc supposé stationnaire et gaussien. Son espérance estnotée µe et son écart-type σe.

4.2.1.2 Risque de taux

Le risque sur actions et le risque de taux d’intérêt présentent des natures intrinsèquement diffé-rentes car si le premier est fondamentalement fini-dimensionnel, voire même ici unidimensionnelcar un seul indice « actions » est utilisé dans l’ensemble des modèles, il n’en va pas de même pourle risque de taux qui concerne un continuum de facteurs de risque (courbe des taux zéro-couponen fonction de la maturité). La formule standard propose une approche basée sur des chocs upet down. Or, les déformations de la courbe des taux sont de nature extrêmement variées et ne serésument pas à des hausses et des baisses pour toute échéance avant la maturité. Dans l’idéal, lamodélisation du risque de taux d’intérêt doit être capable de reproduire de telles déformations.

Pour se ramener à un problème fini-dimensionnel, la courbe des taux est échantillonnée sur unensemble de maturités fixées θ1, . . . , θK . Rt = (R(t, θ1), . . . , R(t, θK))′ dénote désormais le vecteurde dimension K composé des différents taux zéro-coupon à la date t. En pratique K = 150 etles échéances avant la maturité vérifient θi = i pour i = 1, . . . ,K (en années). On suppose parailleurs que le processus (∆Rt) défini par ∆Rt = Rt−Rt−h est stationnaire. En d’autres termes,c’est la variation à horizon h de la courbe des taux et non pas directement la courbe des tauxqui est modélisée. Les chocs de la courbe des taux seront donc des chocs additifs, contrairementaux chocs sur l’indice « actions » qui sont multiplicatifs.

Le risque de taux est désormais fini-dimensionnel mais reste de dimension K relativement élevée.Or, estimer la loi (multivariée) de K = 150 facteurs de risque est difficile. En effet, une approche

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

simple telle que la modélisation gaussienne nécessiterait l’estimation de plus de 10 000 para-mètres, ce qui n’est pas faisable en pratique vu les données disponibles. Il est donc souhaitablede réduire la dimension du risque de taux à k << K.

Un modèle à k = 3 << K = 150 facteurs a été choisi pour modéliser le processus (∆Rt). Lelecteur pourra trouver une présentation détaillée des modèles à facteurs dans un cadre statiquedans [Lawley et Maxwell, 1962] et peut se référer à [Bai, 2003] pour le cadre dynamique utiliséici.

Les modèles à facteurs constituent une approche largement répandue pour la modélisation de lacourbe des taux (voir par exemple [Litterman et Scheinkman, 1991]), où les trois facteurs sonttraditionnellement interprétés comme le niveau (level), la pente (slope) et la courbure (curvature)de la courbe des taux.

Le cadre dynamique utilisé par [Bai, 2003] est repris dans le reste de cette section :

∆Rt = µr + F rt · Λr + ξrt (4.2.1)

où :

— µr est l’espérance du processus (∆Rt) ;

— (F rt ) et (ξrt ) sont deux processus stationnaires indépendants de dimension k et K respec-tivement. Le processus (F rt ) correspond aux facteurs communs (common factors) tandisque (ξrt ) correspond aux composantes idiosyncratiques (idiosyncratic components) non ex-pliquées par les facteurs communs. On suppose aussi que le facteur de risque « actions »(F et ) et les composantes idiosyncratiques du modèle de taux (ξrt ) sont indépendants ;

— (F rt ) est centré et réduit i.e. EP(F rt ) = 0 et EP(F rt Frt′) = Ir ;

— (ξrt ) est centré ;

— Λr est une matrice de taille k ×K dont les colonnes sont appelées les factor loadings.

Des hypothèses techniques supplémentaires sont nécessaires pour assurer l’identifiabilité et latractabilité du modèle. Ces considérations ne sont pas détaillées dans ce mémoire mais le lecteurintéressé pourra se référer à [Bai, 2003].

Essentiellement, l’équation (4.2.1) fournit une décomposition de la matrice de variance-covariancedu processus (∆Rt). Pour rappel, les facteurs communs (F rt ) ne sont pas directement observés,il s’agit de variables latentes. Seul le processus (∆Rt) est directement observé.

Enfin, pour simplifier encore, le processus des facteurs de risques de marché (Fmt ) (m pourmarket) formé en concaténant le facteur de risque action (F et ) et les facteurs de risque de taux(F rt ) est supposé gaussien.

4.2.1.3 Procédure d’estimation

L’approche retenue pour l’estimation du modèle présenté dans la section précédente est basée surla technique de l’analyse en composantes principales (ACP) proposée par [Bai, 2003]. En effet,bien que les modèles à facteurs gaussiens soient parfois estimés par maximum de vraisemblance[Lawley et Maxwell, 1962], la modélisation de la courbe des taux utilise traditionnellement l’ACPpour l’estimation des factor loadings. De plus la mise en œuvre du maximum de vraisemblancenécessite des outils lourds tels que le filtre de Kalman [Doz et al., 2011]. Il est donc apparujudicieux de conserver une approche simple basée sur l’ACP, mais au demeurant justifiée d’unpoint de vue théorique.

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

Des observations (F eti ,∆Rti) pour i = 1, . . .M sont disponibles. Une notation matricielle pour lemodèle à facteurs est adoptée :

∆R = µr + F rΛr ′ + ξr (4.2.2)

où ∆R est la matrice des observations de taille M ×K, F r est la matrice (inconnue) des facteurscommuns de taille M × k et ξ est la matrice (inconnue) des composantes idiosyncratiques detaille M ×K.

La procédure d’estimation utilisée est la suivante :

— estimation de µr par la moyenne empirique des observations µr = 1M

∑Mi=1 ∆Rti ;

— estimation de F r par F r dont les colonnes sont formées par les k premiers vecteurs propres(rangés par valeurs propres décroissantes) de la matrice de variance-covariance empiriquedes observations ∆R ;

— estimation des factor loadings Λ′ par Λ′ = (F r′F r)−1F r

′(∆R− 1K · µr

′) = F r

′(∆R− 1K ·

µr′)/N , i.e. par régression linéaire aux moindres carrés des observations centrées ∆R−1K ·

µr′sur les facteurs communs estimés F r ;

— estimation des composantes idiosyncratiques ξr par ξr = ∆R− 1K · µr′ − F rΛr ′ ;

— estimation des paramètres µe et σe de la loi marginale de (F et ) par la moyenne et l’écart-typeempirique des observations ;

— estimation des corrélations entre les facteurs de risques taux (F rt ) et le facteur de risqueaction (F et ) par les corrélations empiriques entre F e et F r.

4.2.1.4 Mise en œuvre

L’EIOPA publie mensuellement la courbe des taux sans risque utilisée par les entreprises d’as-surance pour la valorisation de leur bilan prudentiel. La cotation journalière de l’indice CAC40est également facilement accessible. On dispose ainsi de M = 43 observations des variationsmensuelles de la courbe des taux de l’EIOPA et des log-rendements mensuels de l’indice CAC40,échelonné entre décembre 2015 et juillet 2019. La procédure d’estimation décrite dans la sectionprécédente pour un horizon h = 1 mois peut donc être mise en œuvre. Par ailleurs, les paramètresestimés sont ramenés à une échelle annuelle en multipliant les espérances par 12 et écart-typespar√

12.

La Figure 4.1 représente les factor loadings Λr estimés. La forme attendue pour chacune descomposantes est globalement retrouvée. En effet, la première composante principale est de signeconstant positif, la seconde composante correspond bien à une augmentation de la pente de lacourbe des taux et la troisième composante, qui présente deux points d’inflexion, correspondà une accentuation de la courbure. Cependant, la valeur de la première composante principalen’est pas constante pour toutes les maturités, contrairement à ce que l’on peut trouver dans lalittérature [Litterman et Scheinkman, 1991]. La présence de taux négatifs complexifie peut-êtrel’interprétation des résultats de l’analyse en composantes principales.

La Figure 4.2 représente la valeur estimée annualisée du paramètre µr qui correspond à la ten-dance d’évolution de la courbe des taux ou encore au choc annuel moyen sur l’historique dispo-nible. Chacune des composantes de ce paramètre est négative, ce qui traduit le contexte actuelde baisse des taux prolongée.

La Table 4.1 regroupe les valeurs estimées des paramètres annualisés des lois marginales des4 facteurs de risque de marché. Pour rappel, on a supposé que le processus (Fmt ) est gaussien

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

0 20 40 60 80 100 120 140

Echeances avant la maturite (annees)

−2, 5

0, 0

2, 5

5, 0

7, 5

10, 0

12, 5

Ch

oc

(b.p

.)niveau

pente

courbure

Figure 4.1 – Estimation des factor loadings Λr du modèle de taux à facteurs.

0 20 40 60 80 100 120 140

Echeances avant la maturite (annees)

−30

−25

−20

−15

−10

Ch

oc

(b.p

.)

Figure 4.2 – Tendance d’évolution des taux zéro-coupon µr.

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

stationnaire. De plus, par construction, les trois facteurs de risque de taux sont centrés et réduits.Enfin, la Table 4.2 regroupe les corrélations estimées entre les quatre facteurs de risque. Parconstruction, la corrélation entre les trois facteurs de risque de taux est nulle.

µ σ

actions F e 0,046 0,128taux - niveau F r1 0,000 3,464taux - pente F r2 0,000 3,464

taux - courbure F r3 0,000 3,464

Table 4.1 – Estimation des paramètres annualisés des lois marginales des quatre facteurs derisque de marché.

F e F r,1 F r,2 F r,3

actions F e 1,000 0,21 -0,244 0,045taux - niveau F r,1 0,21 1,000 0,000 0,000taux - pente F r,2 -0,244 0,000 1,000 0,000

taux - courbure F r,3 0,045 0,000 0,000 1,000

Table 4.2 – Estimation des corrélations entre les quatre facteurs de risque de marché.

Enfin, pour vérifier que le choix de la loi normale est approprié pour la modélisation des facteursde risque de marché, un diagramme quantile-quantile des facteurs de risque reconstruits Fmcontre la distribution normale est réalisé. En effet, l’utilisation de la loi normale pour modéliserles facteurs de risque de marché est une hypothèse forte qui impacte directement le niveau duSolvency Capital Requirement car les queues de distribution de la loi normale sont susceptibles desous-estimer la fréquence des évènements extrêmes. La Figure 4.3 permet d’apprécier l’ampleurdes écarts à la normalité, notamment dans les queues de distribution. Cet écart est particu-lièrement sévère pour le facteur de risque de taux « pente » (Figure 4.3c). Cependant, commel’analyse de la sensibilité de la Net Asset Value aux différents facteurs de risque le montrera dansla Section 4.5, il s’agit d’un facteur de risque auquel l’assureur est peu sensible, ce qui rend plusacceptable cette inadéquation de la loi normale.

4.2.1.5 Simulation

La structure de dépendance temporelle des processus (Fmt ) et (ξrt ) a volontairement été laisséeflexible, tout comme la loi marginale de (ξrt ). En pratique, si la date de clôture est notée t0 etqu’on souhaite simuler St0+h = St exp(F et0+h) et Rt0+h = Rt0 + ∆Rt0+h, il faudrait spécifieret estimer complètement ces structures de dépendance temporelle et la loi des composantesidiosyncratiques de taux.

L’hypothèse simplificatrice que F et0+h et ∆Rt0+h sont indépendants de l’information Ft0 dispo-nible au temps t0 permet de s’affranchir de cette étape. De plus, les composantes idiosyncratiquesde taux ξrt0+h seront supposées nulles. En effet, par construction des composantes communes etdes factor loadings, la variance de ces composantes est faible. Les trois premières composantesde l’ACP de la matrice de variance-covariance de ∆R représentent en effet 90, 172% de la va-riance totale. Une alternative possible aurait consisté à utilisation une méthode bootstrap pourreproduire les variabilités idiosyncratiques de taux.

La simulation des facteurs de risque de marché est alors très simple puisque la loi à simulerest celle d’un vecteur gaussien multivarié corrélé. La Figure 4.4 représente des chocs de tauxcorrespondant à des chocs indépendants sur les trois facteurs de risques pour différents quantiles.

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

−2 −1 0 1 2

quantiles empiriques

−2

−1

0

1

2

qu

anti

les

theo

riqu

es

(a) risque « actions » F e

−2 −1 0 1 2

quantiles empiriques

−2

−1

0

1

2

qu

anti

les

theo

riqu

es

(b) risque « taux - niveau » F r,1

−2 −1 0 1 2

quantiles empiriques

−5

−4

−3

−2

−1

0

1

qu

anti

les

theo

riqu

es

(c) risque « taux - pente » F r,2

−2 −1 0 1 2

quantiles empiriques

−2

−1

0

1

2

qu

anti

les

theo

riqu

es

(d) risque « taux - courbure » F r,3

Figure 4.3 – Diagrammes quantile-quantile des facteurs de risque de marché reconstruits Fmpar rapport à la loi normale pour la période allant de décembre 2015 à juillet 2019

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

−100

0

100N

ivea

u(b

.p.)

−25

0

25

Pen

te(b

.p.)

0 20 40 60 80 100 120 140

Echeances avant la maturite (annees)

−20

0

20

Cou

rbu

re(b

.p.)

0,5%

5,0%

95,0%

99,5%

Figure 4.4 – Chocs de taux annuels à différents quantiles pour les facteurs de risque niveau,pente et courbure.

4.2.2 Risques de souscription vie

Dans le cadre de ce mémoire, la modélisation des risques de souscription vie retenue demeuresimple. Elle repose essentiellement sur des chocs uniformes sur les taux de rachats structurels etles taux de mortalité, suivant la loi lognormale.

4.2.2.1 Risque de rachat structurel

Pour le risque de rachat structurel, l’approche et les paramètres utilisés dans [Mechergui, 2018]sont réutilisés. Ce risque est modélisé par un choc uniforme multiplicatif permanent sur les tauxde rachat structurel par ancienneté. Soient (τt,u) les taux de rachat structurel par ancienneté uutilisés pour le calcul des provisions techniques à la date t. Le modèle est décrit par l’équation :

τt+h,u = min(exp(F τut+h)τu, 1

)(4.2.3)

où F τut+h le facteur de risque rachat structurel au temps t+h. Le facteur de risque (F τut ) est supposésuivre une loi normale pour laquelle les paramètres retenus sont ceux calibrés par [Mechergui,2018].

4.2.2.2 Risques de mortalité et de longévité

En l’absence de données pour étudier précisément les risques souscription vie, un modèle trèssimplifié qui s’inspire de la formule standard et de l’approche utilisé par [Mechergui, 2018] pourle risque de rachat structurel a été choisi.

Soient (qt,x) les taux de mortalités annuels par âge x utilisés au temps t pour le calcul desprovisions techniques. Les risques de mortalité et de longévité sont modélisés conjointement par

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

un choc multiplicatif uniforme permanent sur les taux de mortalité annuels. Le modèle est décritque l’équation :

qt+h,x = min(exp(F qxt+h)qt,x, 1

)(4.2.4)

où F qxt+h le facteur de risque de mortalité et de longévité au temps t. Le facteur de risque (F qxt ) estsupposé de loi normale calibrée de sorte que les chocs de longévité (−25%) et de mortalité (+15%)prescrits par la formule standard de la directive « Solvabilité II » correspondent respectivementaux quantiles à 0, 5% et à 99, 5% de la distribution du facteur de risque.

4.2.2.3 Calibrage

Les paramètres calibrés des facteurs de risques sont regroupés dans la Table 4.3. Aucune corré-lation n’a été modélisée entre les différents facteurs de risque de souscription vie.

µ σ

mortalité et longévité F qx -0,074 0,083rachat structurel F τu -0,029 0,499

Table 4.3 – Estimation des paramètres des lois marginales des deux facteurs de risque desouscription vie.

4.2.3 Quelques remarques

4.2.3.1 Adaptation dans un cadre multi-périodique et infra-périodique

Dans les deux sous-sections précédentes, l’horizon temporel pour la réalisation des facteurs derisque h est fixé. Pour étendre le modèle à un cadre dynamique multi-périodique ou infra-périodique, une approche simple est retenue, en supposant que les chocs aux dates successivessont non corrélés. Les chocs s’accumulent alors simplement au fur et à mesure du temps, demanière multiplicative pour le risque sur actions et les risques de souscription vie et de ma-nière additive pour le risque de taux d’intérêt. Pour passer d’un horizon h à un horizon h′, onutilise une règle de proportionnalité. Comme les chocs sont gaussiens, cette approche n’est pascomplètement arbitraire puisque la loi des facteurs de risque reste stable par la transformationutilisée.

4.2.3.2 Équivalence des mesures de probabilité historique P et market-consistent Q

En théorie, les probabilités P et Q sont censées être équivalentes. En pratique, le choix desmodèles pour l’évaluation du Best Estimate et la diffusion des facteurs de risque ne sont pascompatibles avec cette hypothèse. Cette incompatibilité entre en conflit avec l’absence d’op-portunité d’arbitrage. Ceci constitue une des limites du modèle de calcul du Solvency CapitalRequirement qui devrait probablement être levée si l’on souhaitait l’utiliser dans un cadre réelet non fictif. On peut cependant remarquer qu’il s’agit d’une pratique de place a priori acceptéepar le superviseur.

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

4.3 « Calcul complet » par « simulations dans les simulations »

Comme expliqué dans la Section 4.1, le Solvency Capital Requirement au temps t, noté SCRt,correspond au quantile de niveau α de la distribution d’une certaine variable aléatoire Lt+1

t .Cependant, la fonction de répartition de Ltt+1 conditionnellement à Ft n’est pas connue explici-tement. Il n’est donc pas possible de résoudre directement l’équation (4.1.5), ce qui requerraitd’inverser cette fonction de répartition.

La solution classique à ce problème est d’utiliser une méthode Monte-Carlo pour l’estimationde la value-at-risk. Supposons qu’on s’intéresse à la value-at-risk de niveau α d’une variablealéatoire L dont on sait simuler K copies indépendantes, que l’on note Li pour i = 1, . . . ,K.Sous l’hypothèse de continuité de la fonction quantile de L en α, le quantile empirique de niveauα, noté LbαKc:K , est un estimateur convergent de VaRα[L].

En rappelant que

NAV t = At − BE t, (4.3.1)

BE t = Ψ(t, Zt) = EQt [ψ(Z[t,T ])], (4.3.2)

et en notantφ(Z[t,t+1]) = At − β(Z[t,t+1])At+1, (4.3.3)

on a en faitLtt+1 = φ(Z[t,t+1]) + β(Z[t,t+1])EQ

t+1[ψ(Z[t+1,T ])]− EQt [ψ(Z[t,T ])]. (4.3.4)

Cependant, la présence des deux espérances conditionnelles dans l’équation 4.3.4, qui corres-pondent à l’évaluation de la valeur économique des passifs en t et t+ 1 respectivement, empêchede recourir à cette solution classique. En général, il n’existe en effet pas de formule fermée pourla fonction de valorisation économique des passifs Ψ. Il est ainsi nécessaire d’évaluer ces deuxespérances par Monte-Carlo, comme présenté dans la Section 3.1.

Ainsi, des approches alternatives sont nécessaires. L’approche reconnue comme la plus précise,aussi appelée « calcul complet », repose sur des « simulations dans les simulations » (voir [Gordyet Juneja, 2010] pour une présentation dans un cadre général non spécifique à l’assurance). LaFigure 4.5 illustre graphiquement cette méthode.

Concrètement, on se place à une date t fixée. A cette date, toute l’information pertinente, c’est-à-dire la tribu Ft, est représentée par la variable aléatoire Zt, car on a supposé Z markovien parrapport à sa propre filtration F = (Ft)0≤t≤T .

En premier lieu, on commence par dresser le bilan prudentiel de l’entreprise d’assurance, ensuivant la méthodologie décrite au Chapitre 3. Notamment, la valeur économique des passifsBE t = EQ

t [ψ(Z[t,T ])] est estimée à l’aide de M trajectoires du processus Z entre les dates t etT , simulées sous la probabilité Q conditionnellement à Zt et notées Z

j[t,T ] pour j = 1, . . . ,M . La

valeur économique des passifs estimée en t est notée

BE t =1

M

M∑j=1

ψ(Zj[t,T ]). (4.3.5)

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

Figure 4.5 – Schéma descriptif du « calcul complet » du Solvency Capital Requirement par« simulations dans les simulations ».

Une fois cette première étape réalisée, il faut à présent chercher une estimation de la distributiondu bilan de l’entreprise d’assurance à horizon un an. Pour ce faire, K trajectoires indépen-dantes du processus Z sont simulées entre les dates t et t + 1, sous la probabilité historique Pet conditionnellement à Zt. Elles sont notées Zi[t,t+1] pour i = 1, . . . ,K. Puis, pour chacune deces trajectoires, un nouveau bilan prudentiel à la date t + 1 est réalisé, en utilisant la mêmeméthodologie que pour la valorisation du bilan prudentiel de l’entreprise à la date t. Notam-ment, pour chacune des trajectoires Zi[t,t+1], aussi appelées scénarios primaires ou historiques,

un bouquet de M ′ trajectoires Zi,j[t+1,T ] est simulé. Ces trajectoires sont aussi appelées scénariossecondaires ou risque-neutres, car simulées sous la probabilité Q conditionnellement à Zit+1. Pourchaque scénario historique i, un estimateur de la valeur économique des passifs en t+ 1 est ainsidisponible. Il est noté

BEi

t+1 =1

M ′

M ′∑j=1

ψ(Zi,j[t+1,T ]). (4.3.6)

On dispose alors de K réalisations d’une perte approchée

Lt+1t

i

= φ(Zi[t,t+1]) + β(Zi[t,t+1])BEi

t+1 − BE t. (4.3.7)

La value-at-risk VaRαt [Lt+1t ] est alors estimée par le quantile empirique de niveau α des pertes

approchées (Lt+1t

i

)1≤i≤K . Ce choix d’estimateur repose sur l’hypothèse que la distribution de laperte approchée est suffisamment proche de celle de la vraie perte.

La méthode simulations dans les simulations diffère de l’estimation classique d’un quantile parméthode Monte-Carlo par deux aspects fondamentaux :

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

— les distributions des variables aléatoires Lt+1t et Lt+1

t conditionnellement à Ft sous la pro-babilité P sont différentes ;

— les K réalisations de la variable aléatoire Lt+1t ne sont pas indépendantes du fait du terme

commun BE t.La convergence de cette méthode quand M , M ′ et K tendent vers l’infini est ainsi loin d’êtreévidente. Elle est établie par exemple dans [Gordy et Juneja, 2010], sous des hypothèses jugéescependant peu vraisemblables par [Barrera et al., 2018].

En tout état de cause, cette approche nécessite de simuler un grand nombre de scénarios, à la foissecondaires, pour assurer la convergence des Best Estimates, et primaires, pour que la distributionempirique des pertes représente fidèlement la distribution réelle, notamment dans la queue dedistribution droite. Le choix des nombres de simulations M , M ′ et K est ainsi particulièrementdélicat, et s’articule sur un compromis entre la précision et le temps de calcul alloué.

4.4 Calcul du Solvency Capital Requirement de l’assureur A

Cette section met en œuvre le « calcul complet » du Solvency Capital Requirement de l’assureurA au 31/12/2018 est mis en œuvre.

Pour le « calcul complet » du Solvency Capital Requirement,K = 10 000 scénarios primaires sontsimulés avec pour chacun d’eux un bouquet de M ′ = 1 000 scénarios secondaires. Le choix dunombre de scénarios secondaires M ′ a été effectué ex ante sur la base du calcul du Best Estimateau 31/12/2018 présenté dans le chapitre précédent. La Figure 4.6 représente la convergence del’estimateur du Solvency Capital Requirement en fonction du nombre de scénarios primaires.Pour rappel, l’estimateur utilisé est le quantile empirique de niveau 99,5% des pertes approchéesobtenues par « simulations dans les simulations ».

La valeur retenue pour le Solvency Capital Requirement est de 23 483 ke, ce qui représente unratio de solvabilité de 255%. Cette valeur est supérieure à la moyenne de la place qui s’élève àfin 2018 à 225% pour les assureurs vie d’après [ACPR, 2019]. Cependant, il convient de rappelerque par simplification, seule une partie des risques de l’assureur A a été pris en compte dans lecalcul du Solvency Capital Requirement. Par exemple, le risque opérationnel n’a pas été inclus.Le ratio de solvabilité réel de l’assureur A est ainsi certainement plus faible.

En tout, 10 millions de simulations du modèle de projection des flux de trésorerie futurs ont éténécessaires pour le calcul du seul Solvency Capital Requirement au 31/12/2018. A raison d’environ0,06 secondes pour chaque simulation, cela représente un temps de calcul total d’environ unesemaine. Ce temps de calcul très long illustre la nécessité qu’il y avait à améliorer en termes detemps de calcul le modèle de projection des flux de trésorerie futurs. Cependant, ces simulationspeuvent être parallélisées sur des machines comportant plusieurs cœurs de calcul : les calculs ontété ainsi effectués sur une machine comportant 22 processeurs.

Pour terminer cette analyse, il est intéressant d’évaluer l’incertitude dans l’estimation du SolvencyCapital Requirement. Pour ce faire, une approche bootstrap est mise en œuvre : elle consiste àré-échantillonner la distribution empirique des pertes et à calculer pour chacun des échantillonsbootstrap une nouvelle valeur du Solvency Capital Requirement. On en déduit alors un intervallede confiance à 99% pour la valeur du Solvency Capital Requirement. La Figure 4.7 représentela valeur du Solvency Capital Requirement pour différents niveaux α ainsi que l’intervalle deconfiance associé. Elle illustre également l’augmentation de la difficulté d’estimation à mesureque l’on avance dans la queue de distribution puisque l’intervalle de confiance s’élargit avec leniveau. L’intervalle de confiance bootstrap à 99% pour le ratio de solvabilité est ainsi donné par[238% ; 272%].

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

0 2000 4000 6000 8000 10000

Nombres de simulations primaires K

0

5

10

15

20

25A

pp

roxim

atio

nd

uS

olv

ency

Ca

pit

al

Req

uir

emen

t(Me

)

Figure 4.6 – Convergence de l’estimateur « calcul complet » du Solvency Capital Requirementde l’assureur A au 31/12/2018.

90 92 94 96 98

Niveau α (%)

10

12

14

16

18

20

22

24

26

Ap

pro

xim

atio

nd

ela

valu

e-a

t-ri

sk(Me

)

Figure 4.7 – Intervalle de confiance bootstrap pour l’estimateur « calcul complet » de la value-at-risk de l’assureur A au 31/12/2018 pour différents niveau α.

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

4.5 Relations entre les postes du bilan prudentiel de l’assureur Aet les facteurs de risque

Cette section présente et analyse les relations constatées entre les différents postes du bilanprudentiel de l’assureur A au 31/12/2019 et la réalisation des différents facteurs de risque. Lesscénarios utilisés pour la réalisation des figures correspondent au 10 000 scénarios primairesutilisés pour le calcul du Solvency Capital Requirement dans la section précédente. La droiteen pointillé rouge correspond à la régression linéaire de la quantité représentée sur l’axe desordonnées sur celle représentée sur l’axe des abscisses. L’équation indiquée sur chaque graphiquedonne les paramètres estimés de cette régression.

4.5.1 Actifs

La Figure 4.8a représente la valeur de marché de l’actif en fonction du facteur de risque « actions ».Comme attendu, il y a une relation positive entre ces facteurs de risque puisqu’une hausse desactions entraîne mécaniquement une hausse de la valeur de marché de l’actif de l’assureur A.

La Figure 4.8b représente quant à elle la valeur de marché de l’actif en fonction du facteur derisque de taux « niveau ». Une valeur élevée de ce facteur de risque se traduit par une baissede l’actif en valeur de marché car les obligations en stock perdent de leur valeur quand les tauxaugmentent.

Comme illustré par les Figures 4.8c et 4.8d, les deux autres risques de taux (« pente » et « cour-bure ») ont des effets moins marqués sur la valeur de marché de l’actif.

En ce qui concerne les facteurs de risque de souscription vie, la Figure 4.8e permet de constaterune relation négative entre le facteur de risque de rachat et la valeur de marché de l’actif : celatraduit le fait qu’en cas de hausse des rachats, les prestations versées seront plus importantes,impliquant une baisse de l’actif lors de leur paiement. Le risque de mortalité (Figure 4.8f) apparaîtcomme peu relié à la valeur de marché de l’actif. Cela s’explique par la prédominance des rachatssur les prestations décès dans le cas de l’assureur A.

4.5.2 Best Estimate

La Figure 4.9a illustre la relation positive entre le rendement des actions et la valeur du BestEstimate de l’assureur A au 31/12/2019 : cette relation s’explique car une revalorisation addi-tionnelle sera servie en cas de forte croissance des actions. La relation entre hausse des tauxet Best Estimate (Figure 4.9b) est négative, tout comme dans le cas de l’actif. Celle-ci s’ex-plique principalement par la diminution des facteurs d’actualisation. La hausse des taux conduitégalement à une hausse des rachats conjoncturels et donc à une baisse du Best Estimate.

4.5.3 Net Asset Value

Les deux sous-sections précédentes ont mis en lumière les effets de chaque facteur de risquesur la valeur de marché des actifs et les provisions techniques Best Estimate de l’assureur A.Cependant, la quantité d’intérêt lors du calcul du Solvency Capital Requirement est la Net AssetValue, c’est-à-dire la différence entre les actifs et les provisions techniques Best Estimate. Ainsi,les effets de chaque facteur de risque peuvent se compenser.

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

Dans le cas du risque « actions », l’effet positif sur l’actif l’emporte sur la hausse des provisionstechniques : cela est conforme à l’intuition puisque du fait du partage des produits financiersentre assureur et assurés, une partie des plus-values réalisées sur les actions revient à l’assureur.

En ce qui concerne le risque « taux - niveau », la baisse des provisions techniques est plusimportante que celle de la valeur de l’actif : les provisions techniques diminuent plus que lavaleur de marché de l’actif en cas de hausse des taux. Cela traduit une différence de durationentre l’actif et le passif.

Enfin, en ce qui concerne le risque « rachats », c’est l’effet de diminution de l’actif qui l’emporte :une hausse des rachats se traduit par une (légère) baisse des fonds propres économiques : l’assu-reur est plus sensible à une hausse des rachats qu’à une baisse, ce qui sous-tend que le portefeuillede l’assureur est rentable : il perdrait de la marge future en cas de hausse des rachats.

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

(a) risque « actions » F e (b) risque « taux - niveau » F r,1

(c) risque « taux - pente » F r,2 (d) risque « taux - courbure » F r,3

(e) risque « rachats » F τu (f) risque « mortalité » F qx

Figure 4.8 – Relations entre les facteurs de risque et la valeur de marché de l’actif de l’assureurA au 31/12/2019.

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

(a) risque « actions » F e (b) risque « taux - niveau » F r,1

(c) risque « taux - pente » F r,2 (d) risque « taux - courbure » F r,3

(e) risque « rachats » F τu (f) risque « mortalité » F qx

Figure 4.9 – Relations entre les facteurs de risque et le Best Estimate de l’assureur A au31/12/2019.

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Chapitre 4. « Calcul complet » du Solvency Capital Requirement

(a) risque « actions » F e (b) risque « taux - niveau » F r,1

(c) risque « taux - pente » F r,2 (d) risque « taux - courbure » F r,3

(e) risque « rachats » F τu (f) risque « mortalité » F qx

Figure 4.10 – Relations entre les facteurs de risque et la Net Asset Value de l’assureur A au31/12/2019.

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Chapitre 5

Alternatives au « calcul complet » duSolvency Capital Requirement

Ce chapitre s’intéresse aux alternatives au « calcul complet » du Solvency Capital Requirement,avec un focus particulier sur la méthode « Least Squares Monte Carlo » retenue pour une utili-sation dans le cadre de l’ORSA.

La Section 5.1 commence par présenter et comparer les différentes alternatives déjà proposées etmises en œuvre pour le calcul du Solvency Capital Requirement. Cette analyse conduit à retenirla méthode « Least Squares Monte Carlo » comme « proxy ». Afin de faciliter la présentationdétaillée de la méthode « Least Squares Monte Carlo » et de préparer la discussion sur sonextension au-delà du cadre habituel de la régression linéaire polynomiale, la Section 5.2 rappellequelques éléments essentiels de la régression aux moindres carrés. Puis, la Section 5.3 présenteen détails la méthode « Least Squares Monte Carlo ». La Section 5.4 propose une discussion surl’extension de la méthode au-delà du cadre habituel de la régression linéaire polynomiale. Enfin,la Section 5.5 met en œuvre la méthode décrite dans les sections précédentes et compare sesrésultats avec le calcul de référence du Solvency Capital Requirement réalisé au Chapitre 4 au31/12/2018 dans le cas de l’assureur A.

5.1 Principales alternatives au « calcul complet »

Du fait de la complexité des modèles internes des entreprises d’assurance vie et des limitationsdu hardware disponible, le nombre de simulations à mettre en œuvre pour le calcul du capitalréglementaire engendre des difficultés opérationnelles. Notamment, la réalisation de plusieurs« calculs complets », par exemple à des dates différentes ou pour des jeux de paramètres différents,est difficilement envisageable. Face à ce constat, des méthodes alternatives aux « simulationsdans les simulations » ont été développées, comme le « Least Squares Monte Carlo » [Krah et al.,2018, Broadie et al., 2015], le « Curve Fitting » [Mechergui, 2018], les « Replicating Portfolios »[Natolski et Werner, 2014] ou encore l’ « accélérateur Devineau-Loisel » [Devineau et Loisel, 2009].Ces méthodes sont appelées « proxys » en référence au terme anglais proxy liability modelling.Plusieurs mémoires d’actuariat s’intéressent à la mise en œuvre de ces « proxys » pour le calculdu Solvency Capital Requirement d’un portefeuille de contrats d’épargne en euros français (voir[Traoré et Keilani, 2014] pour la méthode « Least Squares Monte Carlo », [Mechergui, 2018] pourla méthode « Curve Fitting », [Trabelsi, 2010] pour les « Replicating Portfolios » et [Le Mer,2010] pour l’« accélérateur Devineau-Loisel »). La suite de cette section présente succinctementces différentes alternatives et explique le raisonnement ayant conduit au choix de la méthode« Least Squares Monte Carlo » pour l’évaluation du respect permanent des exigences de capital.

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Chapitre 5. Alternatives au « calcul complet » du Solvency Capital Requirement

5.1.1 « Least Squares Monte Carlo »

La méthode « Least Squares Monte Carlo » repose sur la mutualisation des scénarios secondairesentre les scénarios primaires. En effet, intuitivement, deux réalisations proches de Z[t,t+1] condui-ront à des situations proches en termes de bilan prudentiel, et donc de valeur du Best Estimate.Au lieu de calculer précisément le Best Estimate dans chaque scénario primaire, en simulant unbouquet de scénarios secondaires, une seule simulation secondaire est réalisée. Celle-ci fournitune estimation non biaisée mais bruitée du Best Estimate. Cependant, en utilisant des méthodesde régression, il est possible de réduire le bruit. En définitive, on obtient un « proxy » de valori-sation économique des passifs qui permet de calculer le Best Estimate pour toute réalisation desfacteurs de risque sans réaliser de simulations supplémentaires. Ce « proxy » est ensuite direc-tement utilisé pour calculer le Solvency Capital Requirement. Le « Least Squares Monte Carlo »repose ainsi sur un grand nombre de scénarios primaires suivis d’un seul scénario secondaire.

5.1.2 « Curve Fitting »

L’interpolation est au «Curve Fitting » ce que la régression est au « Least Squares Monte Carlo ».Dans le cas du « Curve Fitting », une forme paramétrique (un polynôme ou des splines parexemple) est calibrée. Elle exprime la valeur des fonds propres à horizon un an en fonctionde différents facteurs de risques. Un certain nombre de scénarios primaires sont choisis à dired’experts, et la valeur des fonds propres économiques est calculée dans chacun d’entre eux enutilisant des simulations secondaires. Ensuite, la forme paramétrique est calibrée par interpolationde la valeur des fonds propres calculée dans chaque scénario primaire. Cela fournit une estimationde la distribution de la perte à un an, permettant d’en déduire le Solvency Capital Requirement.Le « Curve Fitting » repose ainsi sur un faible nombre de scénarios primaires suivis d’un grandnombre de scénarios secondaires.

5.1.3 « Replicating Portfolios »

Dans l’approche par « Replicating Portfolios », les flux de trésorerie futurs de l’assureur sontconsidérés comme parfaitement réplicables par un portefeuille d’actifs financiers appelé « porte-feuille répliquant ». Par absence d’opportunité d’arbitrage, à chaque date future, la valeur desflux de l’assureur est égale à la valeur des flux du « portefeuille répliquant ». La value-at-risk de laperte de l’assureur est donc identifiable à la value-at-risk d’un portefeuille d’actifs financiers. Les« Replicating Portfolios » permettent ainsi de calculer le Solvency Capital Requirement à partirde scénarios primaires seulement. Les actifs financiers composant le « portefeuille répliquant »sont choisis par des experts. Le calibrage est généralement effectué grâce à une régression auxmoindres carrés.

5.1.4 « Accélérateur Devineau-Loisel »

L’« accélérateur Devineau-Loisel » est une adaptation du « calcul complet » par « simulationsdans les simulations ». L’idée principale de cette méthode est de localiser les situations les plusadverses en termes de solvabilité et de ne calculer le Best Estimate que pour ces réalisations desfacteurs de risque. L’objectif est ainsi de limiter le nombre de scénarios primaires dans lesquels leBest Estimate est calculé par des simulations secondaires. L’algorithme estime le Solvency CapitalRequirement en commençant par prendre en compte uniquement les scénarios primaires les plusextrêmes et en incluant de plus en plus de scénarios primaires, de moins en moins extrêmes,jusqu’à stabilisation de l’estimateur.

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Chapitre 5. Alternatives au « calcul complet » du Solvency Capital Requirement

5.1.5 Choix du « proxy »

Après étude des travaux précédemment effectués au sein de Mazars Actuariat ([Traoré et Keilani,2014, Mechergui, 2018]), l’analyse de différents avis d’experts [Koursaris, 2011a, Natolski etWerner, 2014, Pelsser et Schweizer, 2016] et la lecture de [Broadie et al., 2015], l’approche « LeastSquares Monte Carlo » est apparue comme la plus pertinente, à la fois comme méthode de calculdu Solvency Capital Requirement mais aussi dans une perspective d’utilisation dans le cadre del’ORSA. Ce choix s’appuie sur les motifs suivants :

— vitesse : le nombre de simulations à mettre en œuvre pour obtenir des résultats d’uneprécision satisfaisante à l’aide du « Least Squares Monte Carlo » est faible ;

— choix des scénarios primaires : la méthode « Least Squares Monte Carlo » permet d’utiliserun nombre important de scénarios primaires, qui couvrent un ensemble varié de réalisationsdes facteurs de risque, contrairement au « Curve Fitting » et aux « Replicating Portfolios »qui sont limitées à un nombre restreint de scénarios primaires souvent choisis à dire d’ex-perts ;

— validation : la fonction de valorisation des passifs estimée par la méthode « Least SquaresMonte Carlo » peut être validée en utilisant les techniques usuelles de validation des ré-gressions ;

— fondements théoriques : la méthode « Least Squares Monte Carlo » bénéficie d’un cadred’analyse mathématique [Gordy et Juneja, 2010] qui permet d’établir sa convergence ;

— flexibilité : la méthode « Least Squares Monte Carlo » permet de prendre en compte unnombre important de facteurs de risque, y compris non financiers, contrairement aux « Re-plicating Portfolios ». Elle permet d’utiliser tout type de méthodes de régression, contrai-rement au « Curve Fitting » qui s’appuie exclusivement sur l’interpolation par des splinesou des polynômes ;

— automatisation : la méthode « Least Squares Monte Carlo » est facilement automatisable,contrairement aux autres méthodes nécessitant des jugements à dire d’experts. Notam-ment, la possibilité d’utiliser des méthodes de régression quelconques autorise la sélectionautomatique de modèles.

5.2 Régression aux moindres carrés

Comme évoqué dans la Sous-Section 5.1.1, la régression aux moindres carrés constitue une pierreangulaire de la méthode « Least Squares Monte Carlo ». Cette section propose donc quelques rap-pels sur la régression aux moindres carrés. Cela facilitera l’introduction du cadre mathématiqueformel de la méthode « Least Squares Monte Carlo » dans la section suivante.

Dans la suite, on note (X,Y ) un couple de variables aléatoires à valeurs dans Rq × R défini surun espace probabilisé (Ω, F , P).

Si Y est intégrable, i.e. E(|Y |) < +∞, alors l’espérance conditionnelle de Y sachant X, notéeE(Y |X), est une variable aléatoire intégrable σ(X)-mesurable telle que pour toute fonction h deRq dans R mesurable et bornée, E(Y h(X)) = E (E(Y |X)h(X)).

Si de plus Y est de carré intégrable, i.e. E(|Y |2) < +∞, alors toute fonction g∗ solution duproblème de minimisation

g∗ ∈ argming∈L2(Rq ,B(Rq),PX)

E((Y − g(X))2

)(5.2.1)

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Chapitre 5. Alternatives au « calcul complet » du Solvency Capital Requirement

vérifie

E(Y |X)PX−p.s.

= g∗(X). (5.2.2)

La mesure PX est l’image par X de la mesure de probabilité P, définie pour A ∈ B(Rq) parPX(A) = P(X ∈ A). L’espace de fonctions L2(Rq,B(Rq),PX) correspond à l’ensemble des fonc-tions de carré intégrable par rapport à PX , i.e. l’ensemble des fonctions mesurables g de Rq dansR telle que E(|g(X)|2) < +∞.

Dans les problèmes de régression usuels auxquels s’intéressent les statistiques, P n’est pas connueexplicitement : on dispose seulement de K observations (Xi, Yi) pour i = 1, . . . ,K de même loique (X,Y ), où K est donc fixé. Alternativement, dans le cadre de la méthode « Least SquaresMonte Carlo » par exemple, P est connue (c’est le modèle d’évolution de l’assureur et de sonenvironnement) mais la relation entre X et Y est trop complexe pour que g∗ puisse-t-être calculéedirectement. Dans ce cas, on est capable de simuler des réalisations indépendantes (Xi, Yi) pouri = 1, . . . ,K de même loi que (X,Y ), pour K aussi grand que l’on veut.

Cette première remarque amène à remplacer P par une version empirique obtenue à partir desobservations. La fonction g∗ est alors approximée par une fonction g solution du problème deminimisation empirique

g ∈ argming∈L2(Rq ,B(Rq),PX)

1

K

K∑i=1

(Yi − g(Xi))2 . (5.2.3)

En pratique, l’espace des fonctions de carré intégrable intervenant dans les définitions de g∗ et deg ne peut pas directement être utilisé : celui-ci est « trop grand ». On remplace donc cet espacepar un espace plus petit G inclus dans L2(Rq, B(Rq) , PX). La meilleure approximation de g∗

dans G, notée g∗G , est alors définie par

g∗G ∈ argming∈G

E((Y − g(X))2

). (5.2.4)

De même que pour g∗ , le calcul direct de g∗G n’est pas possible, soit parce que P n’est pas connue,soit parce que la relation complexe entre X et Y rend le calcul impossible. On utilise alors lesobservations pour calculer

gG ∈ argming∈G

1

K

K∑i=1

(Yi − g(Xi))2 . (5.2.5)

En pratique, le choix de G doit s’effectuer de sorte que tant l’erreur d’approximation (écart entreg∗ et g∗G) que l’erreur statistique (écart entre g∗G et gG) soient petites. Ces deux erreurs sonten effet en compétition l’une avec l’autre : un choix de G plus complexe, i.e. avec une erreurd’approximation plus faible, entraînera le plus souvent une erreur statistique plus élevée.

A titre d’exemple, le choix le plus connu pour G est celui conduisant à la régression linéaire : Gest alors l’espace vectoriel de dimension q + 1 formé par les fonctions affines en x ∈ Rq. Dansce cas, gG se calcule simplement par formule fermée. Cependant, il ne s’agit pas du seul choixpossible. Ainsi, un autre choix simple est celui des histogrammes : l’espace est découpé en cellulescubiques disjointes et les fonctions considérées sont constantes sur chacune des ces cellules. Cechoix de G revient alors à effectuer une moyenne des observations Yi dans chaque cellule.

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Chapitre 5. Alternatives au « calcul complet » du Solvency Capital Requirement

5.3 Cadre mathématique de la méthode « Least Squares MonteCarlo »

Cette section présente le cadre mathématique de la méthode « Least Squares Monte Carlo »appliquée au calcul du « Solvency Capital Requirement ».

La méthode « Least Squares Monte Carlo » est généralement présentée dans un cadre statique[Koursaris, 2011b, Haguet, 2013, Traoré et Keilani, 2014, Krah et al., 2018] et dans le cas restrictifde la régression linéaire polynomiale. S’inspirant de [Barrera et al., 2018], la présentation qui suitest plus générale, en autorisant des méthodes de régression aux moindres carrés quelconques et enla formulant dans un contexte dynamique. La Figure 5.1 illustre graphiquement l’idée principalede cette méthode : remplacer le bouquet de simulations secondaires pour le calcul des BestEstimate à horizon un an par un proxy calibré en utilisant une seule simulation secondaire parscénario primaire.

Figure 5.1 – Schéma descriptif du calcul du Solvency Capital Requirement par la méthode« Least Squares Monte Carlo ».

En quelques mots, le pivot de cette méthode est l’estimation de la fonction de valorisation despassifs Ψ par une méthode de régression aux moindres carrés. Alors que la méthode « simulationsdans les simulations » procède à une estimation ponctuelle de la fonction Ψ par Monte-Carlo ensimulant un bouquet de scénarios secondaires, la méthode « Least Squares Monte Carlo » chercheà éviter la simulation de ce bouquet. Ainsi, pour chaque scénario primaire, on ne simulera qu’unseul scénario secondaire. Au lieu de disposer d’une estimation précise de la valeur économique despassifs pour cette réalisation des facteurs de risque, seule une estimation, certes non biaisée, maisnéanmoins très bruitée, est disponible. Mais grâce à des techniques de régression aux moindrescarrés, il est possible de mutualiser les scénarios secondaires entre les scénarios primaires prochespour améliorer la précision des estimations.

Comme dans le cadre du « calcul complet », on se place à une date t fixée. A cette date, toutel’information pertinente, c’est-à-dire la tribu Ft, est représentée par la variable aléatoire Zt.

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Chapitre 5. Alternatives au « calcul complet » du Solvency Capital Requirement

Le bilan prudentiel initial est valorisé de la même manière que pour le « calcul complet ». No-tamment, une estimation de la valeur économique des passifs en t, notée BE t, est calculée.

Pour établir la distribution du bilan prudentiel à horizon un an, l’approche est néanmoins diffé-rente. Comme expliqué plus haut, l’élément principal est l’estimation de la fonction de valorisa-tion des passifs Ψ. Étant donné un espace de fonctions G définies sur Rq et à valeurs dans R, lameilleure approximation de Ψ au sens des moindres carrés est donnée par

Ψ∗G(t+ 1, ·) = argming∈G

EP[EQ[(ψ(Z[t+1,T ])− g(Zt+1)

)2 |Zt+1

]|Zt]. (5.3.1)

L’écriture sous forme de deux espérance conditionnelles imbriquées permet de bien préciser lesmesures de probabilité sous lesquelles évolue Z : probabilité historique P conditionnellement àZt sur [t, t+ 1] puis probabilité market-consistent Q conditionnellement à Zt+1 sur [t+ 1, T ].

Comme il n’est pas possible de calculer directement Ψ∗G(t+ 1, ·), une méthode de régression estutilisée. K trajectoires du processus Z sont simulées entre les dates t et t+ 1, sous la probabilitéhistorique P conditionnellement à Zt. Ces trajectoires sont notées Z

1,i[t,t+1] pour i = 1, . . . ,K. Puis,

ces trajectoires primaires sont chacune complétées par un unique scénario secondaire Z1,i[t+1,T ]

simulé sous la probabilité Q conditionnellement à Zt+1 = Z1,it+1.

Ces scénarios sont appelés scénarios de calibrage car ils serviront à calibrer la fonction de valori-sation des passifs Ψ. En effet, la variable aléatoire ψ(Z1,i

[t+1,T ]) fournit une estimation très bruitéede la valeur économique des passifs en t + 1 dans le scénario i dont la vraie valeur est donnéepar Ψ(Z1,i

t+1) = EQ[ψ(Z[t+1,T ])|Zt+1 = Z1,i

t+1

].

La régression aux moindres carrés des estimations bruitées sur les facteurs de risque s’écrit

ΨG(t+ 1, ·) = argming∈G

1

K

K∑i=1

(ψ(Z1,i

[t+1,T ])− g(Z1,it+1)

)2. (5.3.2)

Bien sûr, comme expliqué dan la Section 5.2, ΨG(t+ 1, ·) 6= Ψ∗G(t+ 1, ·) 6= Ψ(t+ 1, ·). Cependant,si l’espace de fonctions G est bien choisi, tant l’erreur d’estimation (différence entre ΨG(t+ 1, ·)et Ψ∗G(t+ 1, ·) ) que l’erreur d’approximation (différence entre Ψ∗G(t+ 1, ·) et Ψ(t+ 1, ·)) serontfaibles. La fonction ΨG(t+ 1, ·) est appelée « proxy » de valorisation des passifs.

Une fois le « proxy » obtenu,K ′ trajectoires du processus Z sont simulées entre les dates t et t+1,sous la probabilité historique P et conditionnellement à Zt. Ces trajectoires sont notées Zi[t,t+1]

pour i = 1, . . . ,K ′. Elles sont appelées scénarios de prédiction car utilisées pour la prédiction dela distribution des pertes.

Les scénarios de calibrage (Z1,i[t,T ])1≤i≤K et les scénarios de prédiction (Zi[t,T ])1≤i≤K′ sont donc

différents. Cela permet de ne pas avoir de corrélations entre ΨG(t + 1, ·) et les scénarios deprédiction, facilitant l’analyse de la convergence de la méthode.

Pour chacune de ces trajectoires, en utilisant la fonction de valorisation des passifs estiméeΨG(t+ 1, ·), une perte approchée

Lt+1t

i

= φ(Zi[t,t+1]) + β(Zi[t,t+1]) BEi

t+1︸ ︷︷ ︸ΨG(t+1,Zi

t+1)

− BE t (5.3.3)

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Chapitre 5. Alternatives au « calcul complet » du Solvency Capital Requirement

est calculée. La value-at-risk VaRαt [Lt+1t ] est alors estimée par le quantile empirique de niveau α

des (Lt+1t

i

)1≤i≤K .

5.4 Choix du modèle de régression

[Broadie et al., 2015] étudie la convergence de la méthode Least Squares Monte Carlo dans lecas spécial où G = L2 est séparable et admet une base de Hilbert explicite. Dans la majorité destravaux s’intéressant au calcul du Solvency Capital Requirement par la méthode « Least SquaresMonte Carlo », G est un espace vectoriel de dimension finie adapté à la régression linéaire auxmoindre carrés, typiquement un ensemble des polynômes multivariés [Koursaris, 2011b, Riche,2011, Hörig et Leitschkis, 2012, Haguet, 2013, Traoré et Keilani, 2014, Krah et al., 2018]. Nousregroupons ces méthodes sous le terme générique de « Least Squares Monte Carlo paramétrique ».Cependant, [Barrera et al., 2018] propose d’utiliser des espaces G plus généraux, s’appuyant surdes méthodes issues de la régression non-paramétrique. [Gauville, 2017], en utilisant des méthodesde gradient boosting comme « proxys » pour le calcul du Solvency Capital Requirement, s’inscrit enfait dans un cadre alternatif au « Least Squares Monte Carlo paramétrique », que nous appelons« Least Squares Monte Carlo non-paramétrique ».

La suite de cette section présente différents modèles de régression envisageables dans le cadrede la mise en œuvre de la méthode « Least Squares Monte Carlo » pour le calcul du SolvencyCapital Requirement.

5.4.1 Régression linéaire polynomiale

Un choix classique pour G dans le cadre du « Least Squares Monte Carlo » est celui conduisantà la régression linéaire polynomiale. Il s’agit d’une régression linéaire multivariée ordinaire oùl’espace des variables a été enrichi par des interactions polynomiales.

Cependant, cette méthode présente un compromis entre qualité de l’approximation et erreurstatistique puisque le nombre de coefficients à estimer est égal à

(q+dq

)où q représente le nombre

de variables explicatives et d le degré maximal des polynômes considérés. Face à cette diffi-culté, il est souvent nécessaire de recourir à des méthodes de sélection de modèles pour déter-miner quelles sont les interactions à retenir. Dans le cadre de la méthode « Least Squares MonteCarlo », la sélection du modèle de régression linéaire polynomiale repose le plus souvent sur desapproches « step-wise » [Haguet, 2013, Krah et al., 2018]. Cependant, ces approches peuvents’avérer consommatrices en termes de temps de calcul, peu transparentes ou difficiles à automa-tiser. L’utilisation de la régression linéaire pénalisée LASSO pour Least Absolute Shrinkage andSelection Operator [Tibshirani, 1996] en anglais constitue une approche alternative intéressante.En effet, il s’agit d’une méthode de régression facile à mettre en œuvre qui intègre directementla sélection de modèles.

5.4.2 XGBoost

Le gradient boosting est une méthode d’apprentissage supervisé qui combine les résultats d’unensemble de modèles « faibles » afin de fournir une meilleure prédiction. Il s’agit ainsi d’uneméthode d’agrégation de modèles. « XGBoost » [Chen et Guestrin, 2016] est une implémenta-tion open-source du gradient boosting d’arbres de décision. Cet algorithme est particulièrementefficace dans les problèmes de classification et de régression sur des données tabulaires, comme en

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Chapitre 5. Alternatives au « calcul complet » du Solvency Capital Requirement

témoigne son taux de succès sur la plate-forme de compétions Kaggle. Dans le cadre du « LeastSquares Monte Carlo », cette méthode est intéressante a priori à plusieurs titres :

— le succès de son utilisation pour le calcul du Solvency Capital Requirement d’un assureur-retraite par [Gauville, 2017] ;

— son efficacité éprouvée dans les problèmes de régression sur données tabulaires dans le cadredes compétions Kaggle ;

— le caractère local de la méthode, qui est basée sur des arbres de décision ;

— la facilité d’automatisation.

5.4.3 MARS

La régression multivariée par spline adaptative (en anglais MARS pour « Multivariate adaptiveregression splines ») est un modèle de régression non-paramétrique introduit par [Friedman,1991]. Ce modèle de régression repose sur l’utilisation de splines pour modéliser la relation entrela variable à expliquer et les variables explicatives. Cependant, le choix des nœuds est adaptatif :il dépend des données à disposition et n’est pas fixé à priori, ce qui rend la méthode non-paramétrique. Dans le cadre du « Least Squares Monte Carlo », cette méthode est intéressantea priori à plusieurs titres :

— en utilisant des splines pour modéliser les relations entre les variables, cette méthode derégression se rapproche de la méthode d’interpolation par splines utilisée dans un cadre«Curve Fitting » par [Mechergui, 2018]. Toutefois, elle en diffère car d’une part, elle est bienune méthode de régression et non d’interpolation et d’autre part, elle est non-paramétriquecar le choix des noeuds s’effectue de manière adaptative ;

— le caractère local de la méthode, qui est basée sur des splines ;

— la facilité d’automatisation ;

5.5 Calcul alternatif du Solvency Capital Requirement de l’assu-reur A par la méthode « Least Squares Monte Carlo »

Cette section présente la mise en œuvre de la méthode « Least Squares Monte Carlo » décrite dansla Section 5.3 pour le calcul du Solvency Capital Requirement de l’assureur A au 31/12/2018.L’objectif est ainsi de valider l’utilisation de cette méthode en comparant les résultats obtenusavec ceux issus du « calcul complet » mis en œuvre dans le Chapitre 4. Dans un premier temps, onprocède à l’approximation de la fonction de valorisation des passifs Ψ en comparant les résultatsdes différentes méthodes de régression présentées dans la Section 5.4. Dans un second temps,les distributions des pertes obtenues par les différents « proxys » de valorisation des passifs sontcomparées avec la distribution de référence obtenue par « calcul complet ». Cette dernière étapepermet de valider le choix du modèle de régression et d’évaluer l’erreur commise en utilisant un« proxy ».

Au total, 50 000 scénarios ont été simulés : ce choix est motivé par les travaux précédents réaliséssur le sujet [Haguet, 2013, Traoré et Keilani, 2014]. Parmi ces scénarios, les 10 000 premiers sontles mêmes que ceux utilisés pour le « calcul complet » et serviront de scénarios de prédiction.Les 40 000 autres scénarios sont nouveaux et serviront de scénarios de calibrage.

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Chapitre 5. Alternatives au « calcul complet » du Solvency Capital Requirement

5.5.1 Approximation de la fonction de valorisation des passifs

Les différents modèles sont estimés à partir de la base formée des 40 000 scénarios de calibrage.Celle-ci comprend les réalisations des facteurs de risque et de la valeur actuelle nette des flux detrésorerie futurs à horizon un an (c’est-à-dire de la somme des flux de trésorerie futurs actua-lisés). Quatre modèles de régression sont mis en œuvre : une régression linéaire, une régressionpolynomiale de degré 3, XGBoost et MARS (degré maximal 3).

La qualité des approximations de la fonction de valorisation des passifs est évaluée de deuxmanières :

— d’une part en comparant le « proxy » du Best Estimate avec la valeur actuelle nette desflux de trésorerie futurs, sur des données non utilisées pour l’estimation des modèles ;

— d’autre part, en comparant le « proxy » du Best Estimate avec l’approximation fournie parle « calcul complet ».

La Figure 5.2 représente la valeur actuelle nette des flux de trésorerie futurs en fonction du« proxy » du Best Estimate pour 10 000 scénarios non utilisés dans l’estimation des modèlesde régression. La qualité d’un modèle peut s’évaluer graphiquement en vérifiant que le nuagede points s’aligne sur la première bissectrice. Il est cependant normal de constater une certainevariabilité autour de cette droite car la valeur actuelle des flux de trésorerie futurs est aléatoired’espérance le Best Estimate.

Par ailleurs, on observe une certaine hétéroscédasticité : le coefficient de variation (rapport entreécart-type et espérance) de la valeur actuelle des flux de trésorerie futurs augmente avec le BestEstimate, ce qui explique la forme des nuages de points. La forme des nuages de points est aussien accord avec la Figure 3.2 qui représente l’histogramme de la distribution de la valeur actuelledes flux de trésorerie futurs de l’assureur A au 31/12/2018 : en effet, cette figure permettait déjàde constater l’asymétrie dans la distribution des flux de trésorerie, avec une queue droite pluslourde que la queue gauche.

Ces figures permettent de valider au global que les quatre méthodes de régression sont à mêmede capter la relation entre les facteurs de risque et le Best Estimate puisque effectivement, ladroite rouge en pointillé passe bien au centre des différents nuages de points. Cependant, ellesne permettent pas de comparer facilement les performances relatives des modèles de régression.

La Figure 5.3 représente les quatre « proxys » du Best Estimate obtenus par Least SquaresMonte Carlo en fonction du Best Estimate obtenu lors du « calcul complet » du Solvency CapitalRequirement. Pour ce type de figure, la qualité d’un modèle s’évalue en vérifiant que le nuage depoints s’aligne parfaitement avec la première bissectrice. Moins il y a de variabilité du nuage depoints autour de cette droite, plus le modèle est satisfaisant.

Visuellement, la régression linéaire et MARS donnent des « proxys » de meilleure qualité que larégression polynomiale ou que XGBoost. Les nuages de points des Figures 5.3b et 5.3c présententun niveau de variabilité plus important que ceux des Figures 5.3a et 5.3d. Cela est confirmé par laTable 5.1 qui présente une estimation out-of-sample de la racine de l’erreur quadratique moyenne(RMSE) des différents modèles. Cette quantité correspond à l’erreur (au sens L2) commise enutilisant les « proxys » du Best Estimate à la place du Best Estimate calculé par simulationssecondaires. Plus cette erreur est petite, meilleure est la qualité de l’approximation.

La mauvaise performance du modèle non-paramétrique XGBoost est particulièrement décevante.En effet, il s’agit du modèle le moins performant des 4. Malgré une optimisation des hyper-paramètres de ce modèle par une méthode de grid-search et de cross-validation, il n’a pas étépossible d’obtenir de meilleures performances. A contrario, la bonne performance du modèle

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Chapitre 5. Alternatives au « calcul complet » du Solvency Capital Requirement

(a) régression linéaire (b) régression polynomiale

(c) XGBoost (d) MARS

Figure 5.2 – Valeur actuelle nette des flux de trésorerie futurs en fonction du Best Estimate del’assureur A au 31/12/2019, calculé par différents « proxys »

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Chapitre 5. Alternatives au « calcul complet » du Solvency Capital Requirement

linéaire est surprenante. Il signifie en effet que le Best Estimate peut être correctement approchépar une fonction linéaire des facteurs de risque. Cette remarque amène à la Figure 4.9 dans lechapitre précédent, qui représente le Best Estimate obtenu par « calcul complet » en fonctiondes facteurs de risque. Cette figure montre en effet la prédominance de trois facteurs de risque(« actions », « taux - niveau » et « rachats ») dans la variabilité du Best Estimate. Le caractèrequasi-linéaire du Best Estimate sous-tend que la convexité du passif est faible, c’est-à-dire quel’importance de la valeur temporelle des obligations et des garanties financières (options derachat et TMG) n’est pas prépondérante dans le montant des provisions techniques. Cette faibleconvexité des passifs peut notamment s’expliquer à la lumière du niveau des taux minimumgaranti qui est faible, puisque le TMG élevé des contrats les plus anciens n’est plus garanti(limite de 8 ans) et que le niveau de garantie actuelle est fixé à 0% (brut de chargements surencours).

(a) régression linéaire (b) régression polynomiale

(c) XGBoost (d) MARS

Figure 5.3 – Best Estimate calculé par différents « proxys » en fonction du Best Estimate del’assureur A au 31/12/2019, obtenu par « calcul complet ».

modèle RMSE (k e)regression lineaire 3 030

regression polynomiale 3 709XGBoost 4 116MARS 2 845

Table 5.1 – Racine de l’erreur quadratique moyenne (RMSE) des différents « proxys » du BestEstimate de l’assureur A au 31/12/2018.

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Chapitre 5. Alternatives au « calcul complet » du Solvency Capital Requirement

Pour terminer, il est intéressant de discuter des propriétés essentielles que doit avoir un bon« proxy » de valorisation économique des passifs pour pouvoir être efficacement utilisé dansl’estimation d’un quantile extrême de la distribution des pertes. D’une part, le « proxy » doit eneffet être capable d’ordonner les réalisations des facteurs de risque par la valeur de la Net AssetValue. D’autre part, il doit être capable d’évaluer le plus précisément la Net Asset Value pourles réalisations de facteurs de risque proches du quantile que l’on cherche à estimer. Ainsi, laprécision de l’estimation pour des valeurs faibles ou moyennes du Best Estimate n’est pas aussiimportante que la précision pour les valeurs élevées.

5.5.2 Comparaison des distributions des pertes

La Figure 5.4 représente les diagrammes quantile-quantile des distributions des pertes « proxys »par rapport à la distribution des pertes « de référence », obtenue par « calcul complet », pourchacun des 4 modèles de régression considérés. Un zoom sur la queue droite (niveaux supérieursà 90%) a été effectué car les quantiles d’intérêt sont situés dans cette partie de la distributiondes pertes. La droite rouge en pointillé représente la première bissectrice et correspond auxquantiles de référence obtenus par « calcul complet ». La zone verte correspond à l’intervalle deconfiance bootstrap à 99% déjà présenté dans la Section 4.4. Enfin, la courbe noire représente lesquantiles de la distribution des pertes « proxy » par rapport aux quantiles de référence. Ainsi,pour qu’un « proxy » reproduise de manière satisfaisante le Solency Capital Requirement obtenupar « calcul complet », il est nécessaire que la courbe noire soit proche de la droite rouge enpointillé. Idéalement, celle-ci doit se trouver à l’intérieur de la bande verte.

En prenant en compte ces critères visuels, le modèle présentant la meilleure performance estle modèle MARS (Figure 5.4d). La Figure 5.4a montre que le modèle linéaire conduit à unesous-estimation du Solvency Capital Requirement. Cette sous-estimation est en adéquation avecla Figure 5.3a qui permet de constater que le modèle linéaire sous-estime les Best Estimates lesplus élevés. Cette sous-estimation est moins prononcée dans le cas du modèle MARS (Figure5.3d), ce qui fournit une explication potentielle aux meilleures performances de ce modèle.

La Figure 5.4 permet également de constater la difficulté rencontrée par la méthode « LeastSquares Monte Carlo » pour reproduire les quantiles les plus extrêmes. En effet, pour tous lesmodèles à l’exclusion du modèle MARS, l’écart entre le quantile « proxy » et le quantile deréférence s’accroit avec le niveau α.

La Table 5.2 consigne les écarts absolus et relatifs entre les différentes estimations du SolvencyCapital Requirement par les « proxys » et le « calcul complet » pour des niveaux égaux à 60%,80% et 90% et 99,5%. Cette table confirme que le modèle MARS reproduit le plus fidèlementle Solvency Capital Requirement. Cette performance ne se limite pas à la queue de distributiondroite mais s’étend bien à l’ensemble de la distribution puisque l’écart relatif reste à des niveauxplus faibles pour des quantiles de niveau 60% et 80%. Cela conduit à retenir le modèle MARScomme modèle de régression pour l’approximation de la fonction de valorisation économique despassifs par « Least Squares Monte Carlo ».

Le modèle MARS estime le ratio de solvabilité à 250%, ce qui correspond à une erreur deseulement 5 points de pourcentage. Cette valeur se trouve dans l’intervalle de confiance du ratiode solvabilité établi par méthode bootstrap dans la Section 4.4.

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Chapitre 5. Alternatives au « calcul complet » du Solvency Capital Requirement

10 12 14 16 18 20 22 24

quantile calcul complet (Me)

10, 0

12, 5

15, 0

17, 5

20, 0

22, 5

25, 0

qu

anti

le

pro

xy

(Me

)

(a) régression linéaire

10 12 14 16 18 20 22 24

quantile calcul complet (Me)

10, 0

12, 5

15, 0

17, 5

20, 0

22, 5

25, 0

27, 5

qu

anti

le

pro

xy

(Me

)

(b) régression polynomiale

10 12 14 16 18 20 22 24

quantile calcul complet (Me)

10

15

20

25

30

qu

anti

le

pro

xy

(Me

)

(c) XGBoost

10 12 14 16 18 20 22 24

quantile calcul complet (Me)

10, 0

12, 5

15, 0

17, 5

20, 0

22, 5

25, 0qu

anti

le

pro

xy

(Me

)

(d) MARS

Figure 5.4 – Diagrammes quantile-quantile de la distribution des pertes approchées par diffé-rents « proxys » par rapport à la distribution de référence obtenue par « calcul complet ».

écart absolu (ke) écart relatif (%)niveau α (%) 60 80 90 99,5 60 80 90 99,5

modèleMARS -67 -260 275 446 -2,4 -4,2 2,8 1,9

XGBoost -80 10 213 5 425 -2,9 0,2 2,2 23,1regression lineaire 1 005 824 45 -6 535 6,9 13,2 0,5 -27,8

regression polynomiale 157 949 1 210 2 747 5,8 15,2 12,5 11,7

Table 5.2 – Erreurs commises en utilisant les différents « proxys » pour le calcul du SolvencyCapital Requirement de l’assureur A au 31/12/2018.

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Chapitre 6

ORSA et respect permanent desexigences de capital

L’évaluation interne des risques et de la solvabilité (Own Risk and Solvency Assessment ouORSA) est définie par l’article 45 de la directive « Solvabilité II » :

« Dans le cadre de son système de gestion des risques, chaque entreprise d’assurance et deréassurance procède à une évaluation interne des risques et de la solvabilité. Cette évaluationporte au moins sur les éléments suivants :(a) le besoin global de solvabilité, compte tenu du profil de risque spécifique, des limites ap-

prouvées de tolérance au risque et de la stratégie commerciale de l’entreprise ;(b) le respect permanent des exigences de capital prévues au chapitre VI, sections 4 et 5, et

des exigences concernant les provisions techniques prévues au chapitre VI, section 2 ;(c) la mesure dans laquelle le profil de risque de l’entreprise s’écarte des hypothèses qui sous-

tendent le capital de solvabilité requis prévu à l’article 101, paragraphe 3, calculé à l’aidede la formule standard conformément au chapitre VI, section 4, sous-section 2, ou avec unmodèle interne partiel ou intégral conformément au chapitre VI, section 4, sous-section 3. »

L’ORSA est un processus interne d’évaluation des risques et de la solvabilité de l’assureur. Ilpermet d’identifier, de mesurer et de gérer les éléments de nature à modifier la solvabilité oula situation financière de l’entreprise. Il doit identifier tous les risques auxquels l’assureur estexposé, tout en tenant compte de leurs modifications au cours du temps dans le cadre du planstratégique de l’entreprise.

L’objectif principal de ce mémoire est l’étude du deuxième élément de l’ORSA : « respect per-manent des exigences de capital », et plus particulièrement de sa dimension pluriannuelle. Pourse conformer aux exigences réglementaires, l’assureur doit notamment projeter sa solvabilité lelong de son plan stratégique qui s’échelonne le plus souvent sur 3 à 5 ans : c’est la dimensionprospective de l’ORSA.

Il s’agit d’une différence fondamentale avec le « pilier 1 » dans lequel l’assureur n’évalue sasolvabilité qu’à la date de clôture de son bilan. Cependant, le Chapitre 4 a illustré les difficultésopérationnelles que représente le calcul des exigences de capital d’un assureur vie. Mettre enœuvre le « calcul complet » pour plusieurs années et sur différents scénarios du plan stratégiqueapparaît comme extrêmement difficile. La méthode alternative développée et mise en œuvrerepose sur l’approche « Least Squares Monte Carlo » présentée dans le Chapitre 5.

La Section 6.1 définit les notions de besoin global de solvabilité et d’appétence au risque etprésente les simplifications retenues dans le cadre de l’assureur A. Puis, la Section 6.2 introduitles différents éléments du plan stratégique de l’assureur, et en particulier les trois scénarios qui

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Chapitre 6. ORSA et respect permanent des exigences de capital

le composent. La Section 6.3 détaille et analyse la projection du bilan comptable et du comptede résultat de l’assureur le long des différents scénarios du plan stratégique. La Section 6.4commence par expliquer l’adaptation de la méthode « Least Squares Monte Carlo » à l’évaluationdu respect pluriannuel des exigences de capital. Elle présente et analyse ensuite les résultats del’application de cette méthode au plan stratégique de l’assureur A. Enfin, face à la constatationde la surexposition de l’assureur A au risque de baisse des taux, la Section 6.5 propose la miseen place d’un plan d’action et explique notamment comment définir un seuil d’alerte pouvantservir de base à la construction d’une couverture bilancielle par la réassurance financière.

6.1 Besoin global de solvabilité et appétence aux risques

6.1.1 Besoin global de solvabilité

L’article 262 du règlement délégué précise les modalités d’évaluation du besoin global de solva-bilité : « [...]

1. L’évaluation, prévue à l’article 45, paragraphe 1, point a), de la directive 2009/138/CE, dubesoin global de solvabilité d’une entreprise d’assurance ou de réassurance est prospectiveet porte sur l’ensemble des éléments suivants :

(a) les risques, y compris opérationnels, auxquels l’entreprise est ou pourrait être exposée,compte tenu des modifications que son profil de risque pourrait connaître à l’avenirsous l’effet de sa stratégie d’entreprise ou de l’environnement économique et financier ;

(b) la nature et la qualité des éléments de fonds propres ou autres ressources adaptés àla couverture des risques visés au point a) du présent paragraphe.

2. Les éléments visés au paragraphe 1 tiennent compte :

(a) des horizons temporels pertinents pour la prise en compte des risques qu’encourtl’entreprise à long terme ;

(b) de bases de valorisation et de comptabilisation adaptées à l’activité et au profil derisque de l’entreprise ;

(c) des systèmes de contrôle interne et de gestion des risques de l’entreprise, ainsi que deses limites approuvées de tolérance au risque. »

D’après l’analyse du groupe de travail ORSA de l’Institut des actuaires [Lasfargyes et al., 2014],le besoin global de solvabilité est différent du Solvency Capital Requirement défini par le « pilier1 ». Il intègre en particulier les risques jugés significatifs pour l’entreprise et qui ne sont pas prisen compte dans le Solvency Capital Requirement. L’intégration de ces risques s’effectue sur labase d’une cartographie exhaustive des risques. Il comprend non seulement un besoin de fondspropres mais également l’ensemble des moyens spécifiques au profil de risque, à l’appétence aurisque et au plan stratégique de l’assureur. Son évaluation doit s’intégrer dans le plan stratégiquede l’assureur.

6.1.1.1 Cartographie des risques

Dans le cadre de l’ORSA prévue par le « pilier 2 » de la réglementation « Solvabilité II », ilest nécessaire d’identifier les différents facteurs de risque auxquels l’entreprise d’assurance estexposée. Ce processus d’identification des risques ne se limite pas aux risques prévus par le« pilier 1 » pour le calcul du Solvency Capital Requirement : il requiert une analyse plus précisedu profil de risque de l’entreprise.

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Chapitre 6. ORSA et respect permanent des exigences de capital

Dans le cadre de ce mémoire, l’entreprise étudiée étant fictive, la réalisation concrète de cetteanalyse du profil de risque n’est pas véritablement possible. Par simplification, les risques consi-dérés sont les mêmes que ceux pris en compte pour le Solvency Capital Requirement en visionmodèle interne dont le calcul a été présenté dans le Chapitre 4.

D’autres risques auraient pu être pris en compte. A titre d’exemple, il aurait été possible de modé-liser le risque de crédit sur les obligations d’État. Ce risque n’est en effet pas pris en compte dansle calcul du Solvency Capital Requirement. Pourtant, la crise de la dette publique des économieseuropéennes à partir de 2010 (Grèce et Irlande notamment) a illustré que ces obligations sontsoumises, comme celles des entreprises, au risque de défaut. Un acteur utilisant la formule stan-dard pourrait par exemple vouloir modéliser de manière plus fine le risque opérationnel en tenantcompte des risques stratégiques, du risque de réputation ou encore du risque « homme-clé ».

6.1.1.2 Simplification

Les simplifications dans l’analyse du profil de risque de l’assureur A conduisent à considérer queson besoin global de solvabilité est égal au Solvency Capital Requirement tel que défini et calculédans le Chapitre 4.

6.1.2 Appétence aux risques

D’après le groupe de travail ORSA de l’Institut des Actuaires [Lasfargyes et al., 2014], l’appétenceau risque correspond au « [...] niveau de risque maximal que l’organisme accepte de prendre pouratteindre ces objectifs stratégiques. L’appétence au risque s’exprime quantitativement sous formede mesures de risque et de limites. »

Le niveau d’appétence aux risque de l’assureur A est défini en termes de ratio de solvabilité, c’est-à-dire du rapport entre la Net Asset Value et le Solvency Capital Requirement. Celui souhaiteen effet conserver un ratio de solvabilité supérieur à 120 % tout au long de son plan stratégique.Si le ratio de solvabilité projeté n’est pas conforme à ce niveau d’appétence au risque, l’assureurprévoit de mettre en œuvre un plan d’action permettant de corriger la trajectoire de solvabilité.

6.2 Plan stratégique

L’assureur A a établi un plan stratégique à 3 ans. Ce plan stratégique comporte trois scénarios,appelés défavorable, médian et favorable, qui effectuent des hypothèses différentes en termesd’activité de l’assureur, de niveau des frais et de réalisations des marchés financiers. Commel’assureur est fictif, le plan stratégique est très simplifié. Ainsi, les variables d’évolution retenuesdans chacun des scénarios financiers sont au nombre de 5 : encours, frais, rachats structurels,taux d’intérêt et actions. Les rachats conjoncturels seront directement impactés par les conditionséconomiques.

6.2.1 Croissance de l’encours

La variable d’évolution « encours » correspond à la croissance de l’encours de l’assureur, c’est-à-dire la collecte de primes brutes rapportée aux provisions mathématiques totales. Cette croissanceest estimée à 5% dans le scénario favorable, 2,5% dans le scénario médian et 0% dans le scénariodéfavorable.

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Chapitre 6. ORSA et respect permanent des exigences de capital

La croissance de l’encours se répartit entre deux sources : les versements libres effectués par lesassurés déjà en portefeuille (aussi appelé l’in-force) et les nouveaux contrats (new business). Eneffet, le plan stratégique peut projeter des versements libres sur les contrats déjà en portefeuillecar le « frontière des contrats » ne s’applique pas dans ce cas, contrairement au calcul du BestEstimate. Les versements libres de l’in-force sont modélisés comme indiqué dans le paragraphe3.3.4.1. Le taux de chute annuel des primes est toujours égal à 85%.

La structure des model points du portefeuille de l’assureur A (Table 3.3) sous-tend que le newbusiness d’une année est découpé en 4 nouveaux model points d’âge moyen à la souscription30, 40, 50 et 60 ans respectivement. La répartition du new business entre ces classes d’âge n’estpas uniforme : l’âge moyen à la souscription (pondéré par les effectifs) s’élève à 46,7 ans. Cetterépartition du new business par classes d’âge est supposée constante dans le temps. Elle estdéterminée sur la base du stock. L’assureur anticipe par ailleurs une légère hausse de 0,5% paran des versements initiaux moyens des futurs assurés, et ce quelque soit le scénario considéré. LaTable 6.1 indique la répartition des futurs assurés et le niveau de versement initial moyen parclasse d’âge.

Age (années) Part (%) Versement initial moyen (e)30 13 3 15340 30 3 67950 34 4 20560 23 3 153

Table 6.1 – Structure du new business anticipé dans la plan stratégique.

En termes de dispositions contractuelles des futurs contrats, l’assureur ne prévoit pas de chan-gements notables quelque soit le scénario considéré. Ainsi, le taux minimum garanti du newbusiness est fixé à 0% (brut de chargements sur encours) dans tous les scénarios. Le taux departicipation aux bénéfices contractuelle et ceux des divers chargements et pénalités restent aumême niveau que dans la Table 3.4.

Du fait du choix de modélisation, la croissance de l’encours imputable à l’in-force est incom-pressible. C’est donc celle du new business qui est adaptée dans les différents scénarios pourrespecter les hypothèses de croissance du portefeuille au global. Ainsi, le nombre de nouveauxcontrats souscrits varie selon les scénarios du plan stratégique.

6.2.2 Plan de réduction des frais

L’assureur a mis en œuvre un plan de réduction de ses frais. Cet élément fait partie intégrantede son plan stratégique. Dans le cas le plus favorable, il estime que ce plan de réduction desfrais conduira à une baisse de 2% par an de ses frais, relativement à la situation où le plan deréduction des frais ne serait pas mis en œuvre. Il considère que dans le scénario médian, cetteréduction des frais tombe à un 1% par an. Enfin, par prudence, en cas d’échec du plan, l’assureuranticipe une hausse de ses frais de l’ordre de 2% par an.

En termes de modélisation, cela se traduit par une hausse ou une baisse des différents taux defrais par rapport aux valeurs indiquées dans la Table 3.4.

6.2.3 Rachats structurels

Le portefeuille de l’assureur étant rentable, une hausse des rachats structurels lui est défavorable.Ainsi, l’assureur suppose une hausse des rachats structurels de 15% par an dans son scénario

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Chapitre 6. ORSA et respect permanent des exigences de capital

défavorable, et une baisse des rachats structurels de 10% par an dans son scénario optimiste.

6.2.4 Marchés financiers

L’assureur n’inclut que deux éléments financiers dans son plan stratégique : l’évolution des tauxd’intérêts et les rendements des actions. Dans son scénario défavorable, l’assureur suppose unebaisse brutale des taux d’intérêt de 150 b.p. ainsi qu’une perte de valeur des actions de 30%,suivie d’une période atone de deux ans. Dans le scénario médian, les taux restent au même niveauqu’à fin 2018 et les actions croissent à un rythme annuel de 4%, pour un rendement cumulé de12,5%. Enfin, dans le scénario favorable, les taux remontent graduellement de 50 b.p. par antandis que les actions sont en croissance soutenue de 7 % par an, pour un rendement cumulé de22,5%.

6.2.5 Tableau synthétique

La Table 6.2 présente synthétiquement les différents scénarios décrits dans les sous-sections pré-cédentes.

Scénario Année Encours Frais Rachats Taux d’intérêt Actions

défavorable1 +0% +2% +15% -150 b.p. -30%2 +0% +2% +15% +0 b.p. +1%3 +0% +2% +15% +0 b.p. +1%

médian1 +2,5% -1% +0% +0 b.p. +4%2 +2,5% -1% +0% +0 b.p. +4%3 + 2,5% -1% +0% +0 b.p. +4%

favorable1 +5% -2% -10% +50 b.p. +7%2 +5% -2% -10% +50 b.p. +7%3 +5% -2% -10% +50 b.p. +7%

Table 6.2 – Scénarios du plan stratégique de l’assureur A.

6.3 Projection des indicateurs financiers non-prudentiels de l’as-sureur A

Le modèle de projection des flux de trésorerie futurs décrit dans la Section 3.3 permet de projeterle bilan de l’assureur et son compte de résultat dans les différents scénarios du plan stratégique.Cette projection permet notamment de calculer l’évolution de différents indicateurs financiersnon-prudentiels de l’assureur A.

6.3.1 Actifs

Le scénario défavorable présente un niveau de rendement comptable (produits financiers rappor-tés à la valeur comptable des actifs) qui décroît (Figure 6.1) : cela s’explique d’une part à courtterme par la chute des actions qui annule complètement la plus-value latente sur les actions etd’autre part par la baisse des taux, qui, à court terme, rend encore plus négative la rémunérationdes liquidités et, à plus long terme, amène l’assureur à réinvestir une partie de son actif dans desobligations dont le taux facial est négatif et s’élève à -0,76 %.

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Chapitre 6. ORSA et respect permanent des exigences de capital

En tout état de cause, quelque soit le scénario, le rendement comptable de l’actif est amené àbaisser dans les trois prochaines années car la baisse des taux historique (voir Figure 2.1) n’a pasencore produit tous ses effets : l’assureur a encore en portefeuille des obligations dont le tauxfacial est largement supérieur au niveau actuel des taux (voir Table 2.2).

A contrario (Figure 6.3), la baisse des taux provoque une hausse importante du niveau desplus-values latentes sur les obligations.

2019 2020 2021

Exercice

0, 0

0, 5

1, 0

1, 5

Ren

dem

ent

com

pta

ble

(%)

defavorable

median

favorable

Figure 6.1 – Taux de rendement comptable dans les trois scénarios du plan stratégique (% dela valeur comptable totale de l’actif).

fin 2018 fin 2019 fin 2020 fin 2021

Date

0

20

PM

VL

-ac

tion

s(%

)

defavorable

median

favorable

Figure 6.2 – Niveau de plus ou moins-values latentes (PMVL) de la poche actions dans les troisscénarios du plan stratégique.

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Chapitre 6. ORSA et respect permanent des exigences de capital

fin 2018 fin 2019 fin 2020 fin 2021

Date

0

5

10P

MV

L-

obli

gati

ons

(%)

defavorable

median

favorable

Figure 6.3 – Niveau de plus ou moins-values latentes (PMVL) de la poche obligataire dans lestrois scénarios du plan stratégique.

6.3.2 Collecte des primes

La Figure 6.4 permet de vérifier les différences de croissance de l’encours dans les trois scénarios duplan stratégique : en l’absence de new business, les primes collectées dans le scénario défavorabledécroissent géométriquement alors qu’elles continuent de croître dans les deux autres scénarios.La collecte de primes n’est pas nulle dans le scénario défavorable car les versements libres del’in-force sont incompressibles.

2019 2020 2021

Exercice

0

10

20

30

Pri

mes

bru

tes

(Me

)

defavorable

median

favorable

Figure 6.4 – Collecte de primes brutes dans les trois scénarios du plan stratégique.

6.3.3 Niveau de revalorisation

Les taux de revalorisation servis aux assurés (Figure 6.5) évoluent en accord avec les taux derendement de l’actif (Figure 6.1). Par ailleurs, l’écart entre ces deux taux reste positif : l’assureurn’enregistre pas de pertes pour servir la rémunération des assurés, et ce quelque soit le scénarioconsidéré. Cela s’explique par le niveau des taux minimum garantis qui est relativement bas parrapport au rendement de l’actif. Enfin, plus le scénario est défavorable, plus l’écart entre le tauxde rendement de l’actif et le taux servi aux assurés s’amenuise.

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Chapitre 6. ORSA et respect permanent des exigences de capital

2019 2020 2021

Exercice

0, 0

0, 5

1, 0

1, 5T

aux

de

reva

lori

sati

on(%

)

defavorable

median

favorable

Figure 6.5 – Taux de revalorisation net de chargements dans les trois scénarios du plan straté-gique (% des provisions mathématiques totales).

6.3.4 Résultat comptable

Le choix des dénominations « défavorable », « médian » et « favorable » pour les trois scénariosdu plan stratégique s’est effectué ex ante sur la base d’avis d’experts. La Figure 6.6 permet devérifier ex post que ces trois dénominations sont effectivement appropriées. En effet, les profits(nets d’impôts) réalisés par l’assureur dans chacun de ces trois scénarios sont bien en adéquationavec les dénominations choisies. Enfin, quelque soit le scénario du plan stratégique, le résultat del’assureur a tendance à baisser au cours du temps. Ce résultat est à mettre en perspective parrapport à la Figure 6.1 qui montrait une baisse future du rendement de l’actif.

2019 2020 2021

Exercice

0

1

2

3

Res

ult

atn

et(Me

)

defavorable

median

favorable

Figure 6.6 – Résultat net dans les trois scénarios du plan stratégique.

6.4 Évaluation prospective de la solvabilité de l’assureur A

La section précédente a permis d’analyser le compte de résultat et le bilan comptable de l’as-sureur A dans les différents scénarios du plan stratégique. Le résultat de l’assureur constitueun indicateur de pilotage important pour la prise de décisions stratégiques. Cependant, commeexigé par l’ORSA, l’assureur doit aussi prendre en compte son niveau d’exposition aux risques etvérifier que sa contrainte de solvabilité réglementaire sera respectée dans le futur. Cela nécessitedonc de réaliser de manière prospective l’ensemble des calculs du « pilier 1 » dans les différentsscénarios du plan stratégique.

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Chapitre 6. ORSA et respect permanent des exigences de capital

Avec 3 scénarios et un horizon temporel de 3 ans, la mise en œuvre du « calcul complet » exposédans le Chapitre 4 est difficilement envisageable : cela requerrait en effet 9 calculs du SolvencyCapital Requirement.

Dans ce mémoire, l’alternative retenue et mise en œuvre consiste à utiliser le « proxy » développédans le Chapitre 5 et reposant sur la méthode « Least Squares Monte Carlo » pour procéder àces calculs. A la place des 90 000 000 simulations qu’impliquerait le « calcul complet », seules450 000 simulations sont nécessaires en utilisant la méthode « Least Squares Monte Carlo ».

6.4.1 Adaptation de la méthode « Least Squares Monte Carlo » à l’évaluationdu respect permanent des exigences de capital

Plusieurs mémoires d’actuariat ont déjà envisagé l’utilisation des « proxys » présentés dans laSection 5.1 dans le cadre de l’ORSA [Haguet, 2013, Traoré et Keilani, 2014, Mechergui, 2018].Une difficulté soulevée par ces travaux est la non-stabilité temporelle du « proxy » de valorisationéconomique des passifs [Haguet, 2013]. En effet, la réutilisation du « proxy » à des dates futureset dans des situations stressées est difficile à justifier.

La non-stabilité temporelle du « proxy » s’explique principalement par la variation de la composi-tion du passif au cours du temps : le new business vient augmenter la taille de l’encours, le niveaudes réserves (fonds propres, réserve de capitalisation et provision pour participation aux béné-fices) change, etc. Cette dépendance temporelle était déjà rendue explicite dans la présentationdu cadre mathématique de valorisation du bilan dans le Chapitre 3. Le processus Z décrivantl’assureur et son environnement était supposé markovien non-homogène, ce qui conduisait lafonction de valorisation économique des passifs Ψ à dépendre du temps.

Le choix de la méthode « Least Squares Monte Carlo » et son extension à des méthodes derégression non-paramétrique permet de s’affranchir des calibrages et des choix de modèles àdire d’experts pour la mise en œuvre du « proxy ». Il est donc possible de calibrer le « proxy »indépendamment à chaque date et dans chaque scénario du plan stratégique. Cette approchepermet d’éviter la problématique de stabilité temporelle du « proxy ». Le choix du modèle derégression approprié se fait sur la base du calcul de référence à la date de réalisation de l’ORSA (icile 31/12/2018). Le même modèle de régression est donc utilisé dans chaque scénario et à chaquedate future, mais les paramètres seront bien différents car recalibrés dans chaque configuration.Pour recalibrer le « proxy », il est nécessaire de réaliser de nouvelles simulations (multitude descénarios primaires à horizon un an suivi d’un seul scénario secondaire). Cependant, le coût deces simulations est inférieur à celui des « simulations dans les simulations ».

6.4.2 Projection de la Net Asset Value

La Figure 6.7 représente la projection de la Net Asset Value dans les différents scénarios du planstratégique. Le calcul de cette Net Asset Value s’est effectué en utilisant la méthode Monte-Carlodécrite dans la Section 3.1 et déjà mise en œuvre au 31/12/2018 dans la Section 3.4. Le nombrede simulations M utilisées est toujours égal à 1 000.

La Net Asset Value est une quantité importante pour évaluer la solvabilité de l’assureur : il appa-rait en effet au numérateur du ratio de solvabilité. Par ailleurs, la situation de ruine économiquequi définit la contrainte de solvabilité réglementaire s’exprime directement en fonction de la NetAsset Value. L’évolution de la Net Asset Value dans les différents scénarios est bien en conformitéavec la dénomination des différents scénarios et les différences de résultats comptables constatéesplus haut.

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Chapitre 6. ORSA et respect permanent des exigences de capital

fin 2018 fin 2019 fin 2020 fin 2021

Date

0

20

40

60N

etA

sset

Va

lue

(Me

)

defavorable

median

favorable

Figure 6.7 – Net Asset Value dans les trois scénarios du plan stratégique.

La dégradation de la Net Asset Value dans le scénario défavorable s’explique principalementpar la baisse brutale et simultanée des taux d’intérêt et des actions. En effet, la diminution durendement de l’actif impliquée par ce scénario et les garanties financières offertes par l’assureurconduisent l’écart entre le taux de rendement de l’actif et le taux servi aux assurés à s’amenuiser,ce qui signifie que les flux de marge futurs de l’assureur diminuent. Par ailleurs, la hausse desfrais contribue à l’augmentation (relative) du Best Estimate, ce qui dégrade encore plus la NetAsset Value. Enfin, la hausse des rachats induit également une baisse des flux de marge futurs,réduisant également la Net Asset Value. L’effet négatif de ces facteurs de risque sur la Net AssetValue avait déjà pu être mis en avant dans la Section 4.5.

A l’inverse, dans le scénario favorable, la hausse des actions et des taux permet à l’assureur deservir des revalorisations plus élevées. En outre, la structure du passif et de l’actif de l’assureurest telle que la baisse de valeur de marché des obligations imputable à la hausse des taux estcompensée par la baisse des facteurs d’actualisation et la hausse des rachats conjoncturels quiimpactent à la baisse le Best Estimate. De plus, la baisse des rachats augmente les flux de margefuturs de l’assureur, tout comme la baisse des frais, renforçant encore la Net Asset Value.

6.4.3 Projection du Solvency Capital Requirement et du ratio de solvabilité

Le mise en œuvre de la méthode décrite dans la Sous-Section 6.4.1 permet de projeter le SolvencyCapital Requirement dans les trois scénarios du plan stratégique de fin 2018 à fin 2021 (Figure6.8). Comme la Net Asset Value a également été projetée (Figure 6.7), il est possible d’en déduireune projection du ratio de solvabilité (Figure 6.9). Le modèle de régression utilisé est le modèleMARS, le nombre de scénarios de prédiction s’élève à 10 000 et le nombre de scénarios de calibrageà 40 000, comme dans la Section 5.5. Le scénario défavorable fait apparaître une trajectoire desolvabilité en deçà du seuil de tolérance au risque de 120%. L’assureur A, conformément auniveau d’appétence au risque que son conseil d’administration s’est fixé, doit donc mettre enplace un plan d’action.

L’évolution du ratio de solvabilité est le résultat de l’évolution de deux quantités : la Net AssetValue et le Solvency Capital Requirement. L’évolution de la Net Asset Value a été expliquée dansla sous-section ci-dessus. La hausse du Solvency Capital Requirement de l’assureur A dans lescénario défavorable s’explique principalement par la baisse des taux qui sensibilise encore plusl’assureur au risque de taux d’intérêt. Les valeurs relativement extrêmes du ratio de solvabilitédans les scénarios défavorable et favorable reflète le caractère simplifié du modèle interne utiliséainsi que le caractère fictif de l’assureur A.

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Chapitre 6. ORSA et respect permanent des exigences de capital

fin 2018 fin 2019 fin 2020 fin 2021

Date

0

20

40

60

SC

R(Me

)

defavorable

median

favorable

Figure 6.8 – Solvency Capital Requirement (SCR) dans les trois scénarios du plan stratégique.

fin 2018 fin 2019 fin 2020 fin 2021

Date

0

200

400

600

Rat

iod

eso

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ilit

e(%

)

defavorable

median

favorable

Figure 6.9 – Ratio de solvabilité dans les trois scénarios du plan stratégique.

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Chapitre 6. ORSA et respect permanent des exigences de capital

6.5 Mise en place d’un plan d’action pour faire face à la baissedes taux

La section précédente a démontré la forte sensibilité de l’assureur A au risque de baisse destaux au cours des prochaines années. Comme le scénario défavorable du plan stratégique fran-chit largement le seuil d’appétence au risque de l’assureur, celui, conformément à ses règles degouvernance, doit mettre en œuvre un plan d’action pour limiter son exposition au risque detaux. Le plan mis en place par l’assureur A s’articule autour de mesures de moyen terme et demesures de court-terme.

6.5.1 Diversification de l’activité

L’assureur A a conscience que la concentration de son activité sur les contrats d’épargne en eurosn’est pas durable sur le long terme si la baisse des taux se prolonge. Il souhaite donc diversifier sonactivité, à la fois en épargne en développant des contrats multi-supports avec de fortes incitationsà l’arbitrage vers les unités de compte, mais aussi en prévoyance.

Le développement de produits d’épargne en unités de compte permet à l’assureur de diminuerson exposition au risque de marché puisqu’il ne supporte plus de garanties de capital ou de tauxà servir.

La prévoyance permet également de réduire l’exposition au risque de marché mais ouvre la porteà d’autres risques plus actuariels liés à l’état de survie des assurés (incapacité, invalidité etmortalité). L’équipe du risk management doit donc bien s’y préparer.

Cependant, la mise en place de cette stratégie commerciale ne couvre pas le risque de taux àcourt terme puisque les effets escomptés ne seront visibles qu’après un à deux ans.

6.5.2 Couverture bilancielle

Afin de compléter les mesures de moyen terme reposant sur la diversification de l’activité, et enattendant que celles-ci produisent leurs effets de diminution de la sensibilité au risque de taux,l’assureur se tourne vers une couverture bilancielle par un mécanisme de réassurance financière.

L’assureur A a considéré brièvement l’utilisation de produits dérivés de taux pour couvrir sonrisque, par exemple en achetant des floors. Cependant, l’assureur A est réticent à l’idée de déteniren direct des produits financiers dérivés. Son expertise interne sur de tels produits étant limitée,il considère que cela l’exposerait à des risques réglementaires et opérationnels excessifs.

Au contraire, la couverture bilancielle par la réassurance financière permet de construire unecouverture sur mesure du bilan de l’assureur A, en s’appuyant sur l’expertise du réassureur. No-tamment, le choix du montant de couverture, du taux de référence, du seuil de déclenchement etde l’horizon de couverture peut être personnalisé pour répondre au mieux au besoin de l’assureur.

Par ailleurs, cette couverture bilancielle peut s’accompagner d’une couverture des risques desouscription (rachats et mortalité) par des traités en stop-loss. La mise en œuvre d’une tellecouverture doit donc s’inscrire plus globalement dans le cadre de la politique de réassurance del’assureur.

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Chapitre 6. ORSA et respect permanent des exigences de capital

6.5.3 Détermination d’un seuil d’alerte

Dans l’optique des discussions à venir avec ses réassureurs, l’assureur A cherche à déterminer leniveau de baisse des taux au delà duquel son ratio de solvabilité passe en dessous de son niveaud’appétence. Pour rappel, ce niveau est fixé à 120%.

L’assureur établit sept scénarios de baisse des taux, avec un encours en croissance de +2,5% paran, de frais stables (+ 0% par an), des taux de rachats stables (+0% par an) et des rendements desactions de +1% par an. Ces scénarios présentent des niveaux de baisse des taux s’échelonnant de0 b.p. à -150 b.p., qui correspondent respectivement au niveau de baisse des taux des scénariosmédian et défavorable de son plan stratégique. L’emploi de la méthode décrite dans la Sous-Section 6.4.1 permet de projeter le Solvency Capital Requirement dans les différents scénarios debaisse des taux.

Afin de calculer le ratio de solvabilité, il est d’abord nécessaire de calculer la Net Asset Value. LaFigure 6.10 représente l’évolution de la Net Asset Value pour les différents scénarios de baissedes taux. Comme attendu suite à l’analyse présentée dans la Section 6.4, la Net Asset Valueest impactée négativement par la baisse des taux, et d’autant plus que la baisse des taux estprononcée.

fin 2018 fin 2019 fin 2020 fin 2021

Date

0

20

40

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Net

Ass

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alu

e(Me

)

0 bp

- 25 bp

- 50 bp

- 75 bp

- 100 bp

- 125 bp

- 150 bp

Figure 6.10 – Dégradation de la Net Asset Value dans les scénarios de baisse des taux.

La Figure 6.11 représente la projection du ratio de solvabilité dans les différents scénarios debaisse des taux, la ligne horizontale en pointillé rouge correspondant au niveau d’appétence auxrisques défini dans la Section 6.1. Cette figure permet de déterminer le niveau de baisse des tauxau delà duquel le ratio de solvabilité franchit le niveau d’appétence aux risques. En deçà de - 75b.p., la baisse des taux conduit l’assureur en dehors de sa zone d’appétence au risque. Ainsi, sil’assureur constate dans l’année une baisse des taux s’approchant de ce seuil, il peut escomptersortir de sa zone d’appétence au risque en fin d’année et pour le restant du plan stratégique.Ce seuil sera bien sûr plus faible si l’assureur constate la réalisation d’autres facteurs de risquel’affectant de manière adverse, comme par exemple une baisse des actions ou une hausse desrachats.

Ce seuil de 75 b.p. peut constituer un point de départ intéressant lors des discussions avec lesréassureurs. Il s’agit bien sûr d’une première étape qui devrait être suivie d’une évaluation dumontant de la couverture et de sa durée. Par ailleurs, l’assureur devrait également intégrer letraité de réassurance dans la valorisation de son bilan prudentiel, notamment afin d’en évaluerquantitativement l’impact dans les différents scénarios de son plan stratégique.

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Chapitre 6. ORSA et respect permanent des exigences de capital

fin 2018 fin 2019 fin 2020 fin 2021

Date

0

100

200

300

Rat

iod

eso

lvab

ilit

e(%

)

0 bp

- 25 bp

- 50 bp

- 75 bp

- 100 bp

- 125 bp

- 150 bp

Figure 6.11 – Dégradation du ratio de solvabilité dans les scénarios de baisse des taux.

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Chapitre 7

Conclusion

Ce mémoire a présenté la mise en œuvre de l’évaluation du respect permanent des exigences decapital d’un assureur épargne fictif pour ce qui concerne son aspect pluriannuel. Concrètement,la méthode développée permet de calculer le Solvency Capital Requirement à n’importe quelledate future et dans n’importe quel scénario du plan stratégique, en réduisant le temps de calculde plus d’un ordre de grandeur par rapport au « calcul complet ».

La méthode mise en œuvre pour l’évaluation prospective du Solvency Capital Requirement etdu ratio de solvabilité repose sur l’adaptation de la méthode « Least Squares Monte Carlo » àl’ORSA. L’utilisation de cette méthode dans le cadre de l’ORSA a souvent été discutée dansla littérature, particulièrement dans les mémoires d’actuariat. Cependant, son implémentationeffective le long d’un plan stratégique clairement établi, avec des applications concrètes à lagestion des risques, est à notre connaissance nouveau.

Le choix du « Least Squares Monte Carlo » comme « proxy » pour le calcul du Solvency CapitalRequirement a été effectué suite à une analyse de la littérature puis validé en comparant lesrésultats obtenus avec le calcul de référence par « simulations dans les simulations », dans le casparticulier de l’assureur A au 31/12/2018. Cette comparaison des résultats a également permisd’évaluer le niveau d’erreur commise en utilisant un « proxy » pour le calcul du Solvency CapitalRequirement et de l’apprécier au regard de l’incertitude liée à l’utilisation des « simulations dansles simulations ».

Une des contributions principales du mémoire consiste à étendre la méthode « Least SquaresMonte Carlo » aux méthodes de régression non-paramétrique, en utilisant un cadre unifié avec larégression polynomiale plus classiquement utilisée. L’intérêt principal de ces méthodes est qu’ellespermettent d’automatiser le calibrage du « proxy », ce qui facilite grandement l’utilisation du« Least Squares Monte Carlo » dans le cadre de l’ORSA. En effet, l’utilisation du même « proxy »à plusieurs dates et dans des scénarios différents, en particulier stressés, n’est pas justifiée et le re-calibrage indépendant constitue la seule approche évacuant complètement cette problématique.

Ce travail permet d’appliquer très concrètement la méthode « Least Squares Monte Carlo » àl’évaluation du respect pluriannuel des exigences ce capital, puisque celle-ci permet de calculerle Solvency Capital Requirement de l’assureur de manière prospective et dans différents scéna-rios. Elle peut donc tout à fait trouver sa place dans l’arsenal technique mis en œuvre pour laproduction du rapport ORSA.

La méthode développée peut également être utilisée dans une optique de gestion des risques, parexemple pour la conception d’un plan d’action permettant à l’assureur de rester dans sa zoned’appétence au risque. Pour illustrer ce point, la détermination d’un seuil d’alerte de baisse destaux, au delà duquel le ratio de solvabilité de l’assureur A passe sous une barre fixée, et pouvant

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Chapitre 7. Conclusion

servir de niveau de déclenchement à un traité de réassurance bilancielle, a ainsi été réalisée.

D’autres applications que celles présentées dans ce mémoire sont envisageables. A cet égard, nousformulons deux pistes d’extension qui sont laissées pour de futurs travaux :

— le respect continuel des exigences de capital à l’échelle infra-annuelle : l’ORSA prévoitque l’assureur doit respecter les exigences de capital non seulement aux dates de calculdu Solvency Capital Requirement prévues par le « pilier 1 », mais aussi à tout instant.L’utilisation de la méthode « Least Squares Monte Carlo » qui allège significativement letemps de calcul trouve une application naturelle dans ce cadre. Cependant, la stabilitéinfra-annuelle du « proxy » pose question et nécessite des études supplémentaires pourévaluer la fiabilité des résultats ;

— la désagrégation du Solvency Capital Requirement par module de risque : en fournissant un« proxy » du Best Estimate en fonction de la réalisation des facteurs de risque, la méthode« Least Squares Monte Carlo » permet naturellement de calculer des mesures de risquemarginales. De telles mesures permettraient une allocation fine du budget de risque entreles différents risques de l’assureur et trouveraient également leur place dans le cadre del’ORSA.

La mise en œuvre des « piliers 1 et 2 » de la directive « Solvabilité II » pour un assureur épargneen approche modèle interne étant particulièrement complexe, des simplifications ont du être effec-tuées. Ces simplifications, ainsi que le caractère fictif de l’assureur A, peuvent expliquer certainesanomalies, comme des ratios de solvabilité particulièrement élevés ou particulièrement bas. Nousavons cherché à limiter ces situations en choisissant des valeurs réalistes à partir des donnéespubliques disponibles sur la place. Aussi, le choix du modèle de régression pour le « proxy »du Best Estimate s’est effectué dans le cadre particulier de l’assureur A et ne constitue pas unrésultat général. La mise en œuvre de la méthode présentée dans ce mémoire par un assureurréel requerrait de réaliser à nouveau les travaux des Chapitres 4 et 5 dans sa situation spécifique.Néanmoins, le problème mathématique auquel se réduit l’évaluation du respect pluriannuel desexigences de capital sera fondamentalement identique quelque soit l’assureur, et c’est en ce sensque la méthode proposée dans ce mémoire n’en demeure pas moins universelle.

Enfin, il est important de garder à l’esprit que la définition du Solvency Capital Requirementcomme value-at-risk au niveau 99,5% et la complexité des modèles internes des assureurs épargnerend son évaluation toujours difficile. L’incertitude statistique sur le Solvency Capital Require-ment, qu’il soit calculé par la méthode de référence ou bien par un « proxy » tel que le « LeastSquares Monte Carlo », ne pourra jamais être complètement réduite. Il appartient donc à l’as-sureur de prendre en compte cette incertitude, en gardant par ailleurs en tête que ses modèlesde gestion des risques sont de toute façon soumis au risque de modèle.

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Note de synthèse

Ce mémoire s’intéresse à l’évaluation du respect permanent des exigences de capital dans le cadrede l’évaluation interne des risques et de la solvabilité (ORSA) d’un assureur épargne prévue parle « pilier 2 » de la directive « Solvabilité II ».

L’ORSA requiert en effet le calcul prospectif des exigences de capital réglementaire, aussi appeléSolvency Capital Requirement (SCR) dans l’ensemble des scénarios du plan stratégique de l’as-sureur. Or, le calcul d’un seul de ces SCR à une date donnée, comme demandé par le « pilier 1 »,est déjà particulièrement complexe, surtout si l’assureur utilise un modèle interne.

La méthode de référence, qui repose sur des « simulations dans les simulations » (Figure 1),requiert de simuler l’activité de l’assureur et son environnement pendant un an (simulationsprimaires), puis pour chacune de ces simulations, de valoriser les provisions techniques BestEstimate (BE) par des simulations secondaires. Le premier niveau de simulation permet d’établirla distribution de probabilité des fonds propres économiques à horizon un an pour en calculerensuite le quantile à 0,5%, tandis que le second est nécessaire pour valoriser les options et garantiesoffertes par l’assureur à ses assurés dans le cadre des contrats d’épargne en euros (taux minimumgaranti, option de rachat, etc.). En effet, réglementairement, le BE s’exprime comme la sommeactualisée des flux de trésorerie futurs de l’assureur, pondérés par leur probabilité, c’est-à-direcomme une espérance conditionnelle de la valeur actuelle nette des flux de trésorerie futurs.Démultiplier de tels calculs pour la réalisation de l’ORSA n’est pas donc envisageable.

D’un autre côté, des méthodes alternatives ont été développées par les assureurs pour réduire letemps de calcul du SCR. Ce mémoire se concentre sur l’une d’entre elles, appelée méthode « LeastSquares Monte Carlo » (LSMC). En quelques mots, la méthode LSMC (Figure 2) repose sur lamutualisation des scénarios secondaires entre les scénarios primaires : plutôt que de valoriser trèsprécisément les provisions techniques BE pour chaque scénario primaire en utilisant un grandnombre de scénarios secondaires, une approximation non biaisée mais bruitée est calculée surla base d’un seul scénario secondaire par scénario primaire. La méthode LSMC met en suite enplace une régression aux moindres carrés pour estimer la relation entre les facteurs de risque etle BE, ce qui permet de calculer sans simulation secondaire supplémentaire le BE dans n’importequel scénario primaire.

Ce mémoire s’intéresse plus précisément à l’utilisation effective du LSMC dans le cadre de l’ORSAet du suivi de la solvabilité le long du plan stratégique. En effet, si d’autres travaux ont déjàsuggéré une telle utilisation, ils ne proposent pas à notre connaissance d’implémentation dansle cadre d’un plan stratégique complet. La démarche au cœur de ce mémoire peut ainsi êtresynthétisée de la manière suivante :

1. mise en place du calcul de référence du SCR d’un assureur fictif en modèle interne simplifié ;

2. choix du « proxy » LSMC, re-calcul du SCR par LSMC et validation des résultats ;

3. construction d’un plan stratégique, adaptation de la méthode LSMC, mise en œuvre dusuivi de la solvabilité et construction d’un plan d’action.

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Note de synthèse

Figure 1 – Schéma descriptif du « calcul complet » du SCR par « simulations dans les simu-lations ». Le bilan prudentiel en t est valorisé en calculant la valeur de marché des actifs et enestimant les provisions techniques BE par Monte-Carlo. Puis, un grand nombre de bilan pruden-tiel à la date t + 1 sont simulés en fonction de la réalisation de facteurs de risque. Pour chacunde ces bilans, les provisions techniques BE sont aussi valorisées par Monte-Carlo, ce qui expliquele recours à deux niveaux de simulations. Le SCR est alors égal au quantile à 99,5% de la perteéconomique à horizon un an, tenant compte de la valeur temporelle de l’argent et définie parLt+1t = NAV t − β(t, t+ 1)NAV t+1.

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Note de synthèse

Figure 2 – Schéma descriptif du calcul du SCR par LSMC. Le bilan prudentiel en t est valorisécomme dans le « calcul complet ». Cependant, une seule simulation secondaire est réalisée pourchaque scénario primaire. Un modèle de régression aux moindres carrés est utilisé pour calculerle BE sans simulations secondaires supplémentaires. Cette régression permet de mutualiser lesscénarios secondaires entre les scénarios primaires.

En préalable, ce mémoire présente donc la construction de l’ensemble des éléments nécessaires aucalcul du SCR d’un assureur épargne en modèle interne : modélisation ALM (Asset and LiabilityManagement) de l’assureur pour la projection des flux de trésorerie futurs, modélisation desfacteurs de risque et développement d’un générateur de scénarios économiques market-consistent.Du fait de la complexité de l’environnement réglementaire et du caractère fictif de l’assureur, dessimplifications ont été effectuées, en essayant toutefois de limiter leur impact sur les résultatsprésentés.

Par la suite, une discussion sur le choix de la méthode alternative basée sur la littérature exis-tante conduit à retenir la méthode LSMC comme « proxy » de calcul du SCR. Cette méthodeprésente en effet de nombres avantages dont l’existence de fondements théoriques, la flexibilitéet la facilité relative d’automatisation. La méthode LSMC est alors mise en œuvre et ses résul-tats validés par rapport au calcul de référence par « simulations dans les simulations », dansle cadre spécifique de l’assureur fictif étudié. Cette méthode permet de retrouver un ratio desolvabilité jugé suffisamment proche de la valeur de référence, eu égard aux simplifications etaux incertitudes d’estimation (Figure 3).

Cependant, la mise en œuvre effective du LSMC pour le suivi prospectif de la solvabilité se heurteà deux difficultés principales déjà soulignées dans la littérature :

1. la non-stabilité temporelle du « proxy » ;

2. l’intervention humaine à dire d’experts dans le calibrage du « proxy ».

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Note de synthèse

10 12 14 16 18 20 22 24

quantile calcul complet (Me)

10, 0

12, 5

15, 0

17, 5

20, 0

22, 5

25, 0

qu

anti

le

pro

xy

(Me

)

Figure 3 – Diagramme quantile-quantile de la distribution des pertes approchée par LSMC parrapport à la distribution de référence obtenue par « calcul complet », centré sur la queue droite dela distribution (niveaux supérieurs à 90%). La zone verte correspond à un intervalle de confiancebootstrap à 99% pour les quantiles de référence (représentés par la première bissectrice en pointillérouge) tandis que la courbe noire correspond aux quantiles obtenus par le « proxy » LSMC. Lacourbe noire reste globalement dans la zone verte, ce qui traduit la bonne approximation globalede la distribution des pertes par la distribution « proxy ».

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Note de synthèse

Ce mémoire propose une solution concrète et justifiée théoriquement pour lever ces difficultés.La résolution du premier point repose sur le re-calibrage du « proxy » à chaque date et danschaque scénario, qui apparaît en effet comme le seul moyen d’évacuer complètement la pro-blématique de non-stabilité temporelle. Mais un tel choix exacerbe la seconde difficulté liée aubesoin d’intervention humaine dans le calibrage. En effet, si la réalisation d’un unique calibrageavec intervention humaine est acceptable, la réalisation de dizaines de calibrages « à la main »est rédhibitoire. Ce mémoire propose donc une discussion sur l’extension de la méthode LSMCau-delà de son cadre usuel de régression linéaire polynomiale, reposant sur des méthodes de ré-gression non-paramétrique telles que le gradient boosting (XGBoost) ou encore la régression parsplines adaptative (MARS). Ces méthodes sont susceptibles de mieux représenter les relationsentre les facteurs de risque et la valeur du BE comparativement aux régressions linéaires plussouvent utilisées. Par ailleurs, elles peuvent être plus facilement automatisées si elles intègrentdirectement un mécanisme de sélection de modèle.

A l’aide des outils et méthodes ainsi disponibles, la mise en œuvre du suivi de la solvabilité lelong du plan stratégique est alors possible pour un coût de calcul beaucoup plus faible que ce querequerrait le « calcul complet » par « simulations dans les simulations ». Pour un plan stratégiqueavec trois scénarios à horizon trois ans, le nombre de simulations requises passe de 90 000 000 à450 000. La méthode employée permet de projeter le ratio de solvabilité de fin 2018 à fin 2021dans trois scénarios différents (Figure 4).

fin 2018 fin 2019 fin 2020 fin 2021

Date

0

200

400

600

Rat

iod

eso

lvab

ilit

e(%

)

defavorable

median

favorable

Figure 4 – Projection du ratio de solvabilité de l’assureur A dans les différents scénario de sonplan stratégique. La ligne rouge en pointillé correspond à la limite d’appétence au risque fixée à120% par le conseil d’administration de l’assureur A.

Afin d’illustrer l’intérêt pratique de cette méthode en dehors du seul reporting réglementaire,la détermination d’un seuil d’alerte de baisse des taux, en deçà duquel le ratio de solvabilité del’assureur fictif quitte sa zone d’appétence au risque, et pouvant servir de niveau de déclenchementà un traité de réassurance bilancielle, est également mise en œuvre (Figure 5). Cette illustrationfournit un exemple concret d’utilisation du LSMC pour la gestion des risques d’un assureurépargne.

Les deux principales illustrations de l’utilisation du LSMC dans le cadre de l’ORSA d’un assureurépargne ne constituent qu’un aperçu des applications envisageables. A cet égard, nous formulonsdeux pistes d’extension qui sont laissées pour de futurs travaux :

— le respect continuel des exigences de capital à l’échelle infra-annuelle : l’ORSA prévoit quel’assureur doit respecter les exigences de capital non seulement aux dates de calcul du SCRprévues par le « pilier 1 », mais aussi à tout instant. L’utilisation de la méthode LSMC quiallège significativement le temps de calcul trouve une application naturelle dans ce cadre.

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Note de synthèse

Cependant, la stabilité infra-annuelle du « proxy » pose question et nécessite des étudessupplémentaires pour évaluer la fiabilité des résultats ;

— la désagrégation du SCR par module de risque : en fournissant un « proxy » du BE enfonction de la réalisation des facteurs de risque, la méthode LSMC permet naturellementde calculer des mesures de risque marginales. De telles mesures permettraient une allocationfine du budget de risque entre les différents risques de l’assureur et trouveraient égalementleur place dans le cadre de l’ORSA.

fin 2018 fin 2019 fin 2020 fin 2021

Date

0

100

200

300

Rat

iod

eso

lvab

ilit

e(%

)

0 bp

- 25 bp

- 50 bp

- 75 bp

- 100 bp

- 125 bp

- 150 bp

Figure 5 – Projection du ratio de solvabilité de l’assureur A dans différents scénario de baissedes taux. La ligne rouge en pointillé correspond à la limite d’appétence au risque fixée à 120%par le conseil d’administration de l’assureur A.

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Executive Summary

This work studies the assessment of the continuous compliance with the capital requirements inthe case of a life insurer selling non-unit-linked savings contracts. Such an assessment is requiredby the Own Risk and Solvency Assessment (ORSA) provided for in “Pillar 2” of the “SolvencyII” directive.

The ORSA requires the prospective computation of regulatory capital requirements, also calledSolvency Capital Requirement (SCR) throughout all the scenarios of the insurer’s business plan.Yet, the computation of a single SCR at a given date, as required by “Pillar 1”, is alreadyparticularly challenging, especially if the insurer uses an internal model.

The benchmark method, which relies on “nested stochastics” (Figure 1), requires to simulate theinsurer’s business and environment for a year (primary simulations), and then for each of thesesimulations, to valuate the Best Estimate (BE) technical provisions using secondary simulations.The first level of simulation is used to derive the full probability distribution of the insurer’s ownfunds over a one-year period and then compute its 0.5% quantile. The second level is requiredto valuate the options and guarantees of the insurer towards its policyholders over the termsof their non-unit-linked savings contracts (minimum guaranteed rate, surrender option, etc.).Regulatorily, the BE is computed as the sum of cashflows, weighted by their probability, takinginto account the time value of money, i.e. as a conditional expectation of the net present valueof future cashflows. Multiplying such computations to realize the ORSA is impractical.

On the other side, alternative methods have been developed by insurers to reduce the calculationtimes of the SCR. This work focuses on one of these methods, called “Least Squares Monte Carlo”(LSMC). In a nutshell, the LSMC method (Figure 2)) relies on the mutualisation of secondaryscenarios between primary scenarios : rather than valuing very accurately the BE for eachprimary scenario using a large amount of secondary simulations, only one secondary simulationis carried out, yielding an unbiased but very noisy estimation of the BE. The LSMC methodthen uses a Least Squares regression method to estimate the relation between risk factors and theBE, enabling to compute a very accurate estimation of the BE in any primary scenario withoutadditional secondary simulations.

This work delves into the effective use of the LSMC method in the ORSA framework to prospect-ively monitor the solvency level throughout the business plan. If previous works have alreadysuggested such an application, to our knowledge, they do not propose concrete implementationson a full business plan. The approach followed in this work can be summarised as follows:

1. Benchmark computation of the SCR of a mock insurer through a simplified internal model,

2. Selection of the LSMC proxy, computation of the SCR by LSMC and validation by com-parison with the benchmark,

3. Creation of a business plan, adaptation of the LSMC method, implementation of the pro-spective monitoring of the solvency level and sketching of an action plan against the de-crease in interest rates integrated in the risk management system of the insurer.

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Executive Summary

Figure 1 – Diagram of the benchmark computation of the SCR by “nested stochastics”. Theprudential balance-sheet at time t is valued using market-value for assets and Monte Carlo forthe BE technical provisions. Then, a large number of prudential balance-sheets at time t+ 1 aresimulated according to the realization of risk factors. For each of these balance-sheets, the BEtechnical provisions are also valued by Monte Carlo, which explains why two levels of simulationare required. The SCR equals the 99.5% quantile of the economic loss over a one-year period,taking account the time value of money and defined by Lt+1

t = NAV t − β(t, t+ 1)NAV t+1.

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Executive Summary

Figure 2 – Diagram of the LSMC computation of the SCR. The prudential balance-sheet attime t is valued as in the benchmark computation. However, only one secondary simulation iscarried out for each primary scenario. A Least Squares regression model is used to compute theBE without additional secondary simulations. This regression enables to mutualise secondaryscenarios between primary scenarios.

As a first step, this work therefore presents the development of all the elements required tocompute the SCR of a life savings insurer using an internal model: ALM (Asset and LiabilitiesManagement) modelling of the insurer to project future cashflows, modelling of risk factorsand calibration of a market-consistent economic scenarios generator. Due to the complexity ofregulations and the fictional nature of the insurer, simplifications have been made, but we triedto limit their impact on the reported results.

Thereafter, a discussion based on the existing literature leads to select the LSMC method asthe most appropriate proxy for the computation of the SCR. This method as many advantages,including theorical foundations, flexibility and relative ease of automation. The LSMC methodis then implemented and its results are validated with respect to the benchmark computation by“nested stochastics”, in the specific case of the studied mock insurer. The LSMC method enablesto retrieve a solvency ratio deemed sufficiently close to the benchmark value, taking into accountthe simplifications and estimation errors (Figure 3).

Nevertheless, the effective implementation of the LSMC method to prospectively monitor thesolvency level faces two main obstacles, which have already been highlighted in the literature:

1. The time instability of the proxy,

2. The human intervention in the proxy calibration.

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Executive Summary

10 12 14 16 18 20 22 24

benchmark quantile (Me)

10.0

12.5

15.0

17.5

20.0

22.5

25.0

pro

xy

qu

anti

le(Me

)

Figure 3 – QQ-plot of the loss distribution obtained by LSMC against the benchmark distributionobtained by “nested stochastics”, zoomed on the right tail of the distribution (levels above 90%).The green zone corresponds to 99% bootstrap confidence intervals for the benchmark quantiles(represented by the first bisector in red dashes). The black curve corresponds to the quantilesobtained by LSMC. The black curve mostly remains inside the green zone, which means theLSMC proxy provides a good global approximation of the loss distribution.

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Executive Summary

This work proposes a concrete and theoretically justified solution to overcome these difficulties.Solving the first obstacle relies on re-calibrating the proxy at each date and in each scenario. Itappears to be the only way to completely void the time instability of the proxy. However, thischoice worsens the second obstacle. One calibration by hand is acceptable but carrying out tens ofcalibration is prohibitive. This work therefore proposes to extend the LSMC method beyond itsusual linear polynomial regression framework, using non-parametric regression techniques such asgradient boosting (XGBoost) or adaptive spline-based regression (MARS). These methods mayprovide better representation of the relations between risk factors and the BE comparativelyto the more commonly used linear regression. Moreover, they may also be easier to automate,especially if they directly provide a model selection mechanism.

Using these tools and methods, implementing the prospective monitoring of the solvency levelthroughout the business plan is therefore far less computational-intensive then the benchmarkmethod using “nested stochastics”. For a three-year business plan made of three scenarios, thenumber of required simulations falls from 10,000,000 to 450,000. The method enables to projectthe solvency ratio from the end of 2018 to the end of 2021 in three different scenarios (Figure 4).

end 2018 end 2019 end 2020 end 2021

Date

0

200

400

600

Sol

ven

cyra

tio

(%)

low

median

high

Figure 4 – Projection of the solvency ratio of insurer A in the various scenarios of its businessplan. The red line in dashes represents the risk appetite limit fixed at 120% by the governingboard of insurer A.

To illustrate the practical interest of this method beyond regulatory reporting, the method hasalso been used to determine an alert threshold above which the decrease in interest rates wouldpush the insurer’s solvency level below its risk appetite zone (Figure 5). Such a threshold mayserve as a trigger to a financial reinsurance treaty. This application illustrates how the LSMCmethod could concretely be used by the risk management of a life savings insurer.

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Executive Summary

end 2018 end 2019 end 2020 end 2021

Date

0

100

200

300S

olve

ncy

rati

o(%

) 0 bp

- 25 bp

- 50 bp

- 75 bp

- 100 bp

- 125 bp

- 150 bp

Figure 5 – Projection of the solvency ratio of insurer A in various scenarios of decrease in interestrates. The red line in dashes represents the risk appetite limit fixed at 120% by the governingboard of insurer A.

Our two main illustrations of the use of the LSMC method within the ORSA framework onlyprovide a glimpse of all the possibilities. Thereupon, we provide two possible extensions whichare left for future works:

— The infra-annual compliance with the capital requirements: the ORSA provides that theinsurers must respect the capital requirements not only at the SCR computation datesscheduled by “Pillar 1” but also at any time between those dates. To that extent, using theLSMC method, which significantly reduces the computational burden, is a natural idea.However, the time instability of the proxy requires further studies to assess the reliabilityof the method,

— The disaggregation of the SCR by risk module: by providing a proxy of the BE as a functionof risk factors, the LSMCmethod yield several marginal risk measures. Such measures couldbe used to finely allocate the risk budget of the insurer between the different risks it facesand could find a place in the ORSA framework.

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Table des figures

2.1 Historique des taux des OAT 10 ans du 31/12/2009 au 31/12/2018. . . . . . . . . 6

3.1 Schéma de l’organisation d’un modèle de projection des flux de trésorerie d’unassureur épargne. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

3.2 Distribution empirique de la valeur actuelle nette (VAN) des flux de trésoreriefuturs de l’assureur A au 31/12/2018. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

3.3 Convergence de l’estimateur BE t du Best Estimate de l’assureur A au 31/12/2018. 303.4 Écart relatif de l’estimateur BE t du Best Estimate de l’assureur A au 31/12/2018

en fonction du nombre de simulations M . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30

4.1 Estimation des factor loadings Λr du modèle de taux à facteurs. . . . . . . . . . . 374.2 Tendance d’évolution des taux zéro-coupon µr. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 374.3 Diagrammes quantile-quantile des facteurs de risque de marché reconstruits Fm

par rapport à la loi normale pour la période allant de décembre 2015 à juillet 2019 394.4 Chocs de taux annuels à différents quantiles pour les facteurs de risque niveau,

pente et courbure. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 404.5 Schéma descriptif du « calcul complet » du Solvency Capital Requirement par

« simulations dans les simulations ». . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 434.6 Convergence de l’estimateur « calcul complet » du Solvency Capital Requirement

de l’assureur A au 31/12/2018. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 454.7 Intervalle de confiance bootstrap pour l’estimateur « calcul complet » de la value-

at-risk de l’assureur A au 31/12/2018 pour différents niveau α. . . . . . . . . . . 454.8 Relations entre les facteurs de risque et la valeur de marché de l’actif de l’assureur

A au 31/12/2019. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 484.9 Relations entre les facteurs de risque et le Best Estimate de l’assureur A au

31/12/2019. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 494.10 Relations entre les facteurs de risque et la Net Asset Value de l’assureur A au

31/12/2019. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50

5.1 Schéma descriptif du calcul du Solvency Capital Requirement par la méthode« Least Squares Monte Carlo ». . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55

5.2 Valeur actuelle nette des flux de trésorerie futurs en fonction du Best Estimate del’assureur A au 31/12/2019, calculé par différents « proxys » . . . . . . . . . . . 60

5.3 Best Estimate calculé par différents « proxys » en fonction du Best Estimate del’assureur A au 31/12/2019, obtenu par « calcul complet ». . . . . . . . . . . . . 61

5.4 Diagrammes quantile-quantile de la distribution des pertes approchées par diffé-rents « proxys » par rapport à la distribution de référence obtenue par « calculcomplet ». . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

6.1 Taux de rendement comptable dans les trois scénarios du plan stratégique (% dela valeur comptable totale de l’actif). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69

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Table des figures

6.2 Niveau de plus ou moins-values latentes (PMVL) de la poche actions dans les troisscénarios du plan stratégique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69

6.3 Niveau de plus ou moins-values latentes (PMVL) de la poche obligataire dans lestrois scénarios du plan stratégique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70

6.4 Collecte de primes brutes dans les trois scénarios du plan stratégique. . . . . . . . 706.5 Taux de revalorisation net de chargements dans les trois scénarios du plan straté-

gique (% des provisions mathématiques totales). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 716.6 Résultat net dans les trois scénarios du plan stratégique. . . . . . . . . . . . . . . 716.7 Net Asset Value dans les trois scénarios du plan stratégique. . . . . . . . . . . . . 736.8 Solvency Capital Requirement (SCR) dans les trois scénarios du plan stratégique. 746.9 Ratio de solvabilité dans les trois scénarios du plan stratégique. . . . . . . . . . . 746.10 Dégradation de la Net Asset Value dans les scénarios de baisse des taux. . . . . . 766.11 Dégradation du ratio de solvabilité dans les scénarios de baisse des taux. . . . . . 77

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Liste des tableaux

2.1 Bilan comptable simplifié de l’assureur A au 31/12/2018. . . . . . . . . . . . . . . 52.2 Composition détaillée de la poche obligataire de l’assureur A au 31/12/2018. . . . 7

3.1 Vision simplifiée du bilan prudentiel d’un assureur. . . . . . . . . . . . . . . . . . 93.2 Calibrage des paramètres du générateur de scénarios économiquesmarket-consistent

au 31/12/2018. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 183.3 Composition du portefeuille de contrats de l’assureur A au 31/12/2018. . . . . . . 273.4 Principaux paramètres pour le calcul du Best Estimate de l’assureur A. . . . . . 283.5 Bilan prudentiel de l’assureur A au 31/12/2018. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

4.1 Estimation des paramètres annualisés des lois marginales des quatre facteurs derisque de marché. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38

4.2 Estimation des corrélations entre les quatre facteurs de risque de marché. . . . . 384.3 Estimation des paramètres des lois marginales des deux facteurs de risque de

souscription vie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41

5.1 Racine de l’erreur quadratique moyenne (RMSE) des différents « proxys » du BestEstimate de l’assureur A au 31/12/2018. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61

5.2 Erreurs commises en utilisant les différents « proxys » pour le calcul du SolvencyCapital Requirement de l’assureur A au 31/12/2018. . . . . . . . . . . . . . . . . 63

6.1 Structure du new business anticipé dans la plan stratégique. . . . . . . . . . . . . 676.2 Scénarios du plan stratégique de l’assureur A. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68

A.1 Taux de rachat structurel annuel par ancienneté. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98A.2 Paramètres recommandés par l’ACPR pour la modélisation du taux de rachat

conjoncturel. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98A.3 Table de mortalité TH 00-02 - décès. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99

B.1 Courbe des taux sans risque de l’EIOPA au 31/12/2018. . . . . . . . . . . . . . . 100B.2 Volatilités implicites du call sur CAC40 à la monnaie au 31/12/2018. . . . . . . . 101B.3 Nappe de volatilité (b.p.) des swaptions sur EURIBOR à la monnaie au 31/12/2018.102

94

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Annexes

97

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Annexe A

Paramètres des lois de comportementdes assurés

Ancienneté (années) Taux de rachat0 0%1 3%2 3%3 3%4 3%5 4%6 3%7 3%8 8%

9 et plus 3%

Table A.1 – Taux de rachat structurel annuel par ancienneté.

Paramètre Seuil bas Seuil haut Valeur retenueτmin -6% -4% -5%τmax 20% 40% 30%α -6% -4% -5%β -2% 0% -1%γ 1% 1% 1%δ 2% 4% 3%

Table A.2 – Paramètres recommandés par l’ACPR pour la modélisation du taux de rachatconjoncturel.

98

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Annexe A. Paramètres des lois de comportement des assurés

x lx qx (%) x lx qx (%) x lx qx (%)0 100 000 0,489 37 96 939 0,179 74 63 637 3,7681 99 511 0,038 38 96 765 0,195 75 61 239 4,1172 99 473 0,027 39 96 576 0,214 76 58 718 4,5063 99 446 0,022 40 96 369 0,237 77 56 072 4,9384 99 424 0,018 41 96 141 0,264 78 53 303 5,4265 99 406 0,016 42 95 887 0,293 79 50 411 5,9936 99 390 0,014 43 95 606 0,325 80 47 390 6,6607 99 376 0,013 44 95 295 0,360 81 44 234 7,4338 99 363 0,013 45 94 952 0,397 82 40 946 8,3049 99 350 0,012 46 94 575 0,435 83 37 546 9,25310 99 338 0,013 47 94 164 0,472 84 34 072 10,26411 99 325 0,013 48 93 720 0,508 85 30 575 11,35212 99 312 0,016 49 93 244 0,545 86 27 104 12,53313 99 296 0,020 50 92 736 0,582 87 23 707 13,80214 99 276 0,026 51 92 196 0,624 88 20 435 15,15515 99 250 0,037 52 91 621 0,668 89 17 338 16,57616 99 213 0,050 53 91 009 0,715 90 14 464 18,05917 99 163 0,067 54 90 358 0,767 91 11 852 19,62518 99 097 0,083 55 89 665 0,821 92 9 526 21,28919 99 015 0,095 56 88 929 0,875 93 7 498 23,05920 98 921 0,102 57 88 151 0,932 94 5 769 24,92621 98 820 0,105 58 87 329 0,995 95 4 331 26,89922 98 716 0,105 59 86 460 1,066 96 3 166 28,96423 98 612 0,104 60 85 538 1,146 97 2 249 31,12524 98 509 0,105 61 84 558 1,235 98 1 549 33,37625 98 406 0,105 62 83 514 1,335 99 1 032 35,75626 98 303 0,107 63 82 399 1,448 100 663 38,16027 98 198 0,109 64 81 206 1,576 101 410 40,48828 98 091 0,111 65 79 926 1,719 102 244 43,03329 97 982 0,114 66 78 552 1,876 103 139 46,04330 97 870 0,116 67 77 078 2,046 104 75 48,00031 97 756 0,120 68 75 501 2,232 105 39 51,28232 97 639 0,125 69 73 816 2,434 106 19 52,63233 97 517 0,132 70 72 019 2,658 107 9 55,55634 97 388 0,143 71 70 105 2,903 108 4 50,00035 97 249 0,153 72 68 070 3,167 109 2 50,00036 97 100 0,166 73 65 914 3,455 110 1 100,000

Table A.3 – Table de mortalité TH 00-02 - décès.

99

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Annexe B

Données de calibrage du générateur descénarios économiques

Maturité (Y) Taux (%) Maturité (Y) Taux (%)0 0,000 27 1,6781 -0,333 28 1,7382 -0,275 29 1,7973 -0,177 30 1,8544 -0,046 31 1,9105 0,098 32 1,9646 0,238 33 2,0167 0,372 34 2,0668 0,499 35 2,1159 0,618 36 2,16210 0,726 37 2,20711 0,822 38 2,25012 0,909 39 2,29213 0,987 40 2,33214 1,054 41 2,37015 1,105 42 2,40716 1,143 43 2,44317 1,173 44 2,47718 1,202 45 2,51019 1,235 46 2,54220 1,275 47 2,57321 1,322 48 2,60222 1,376 49 2,63123 1,434 50 2,65824 1,494 51 2,68525 1,555 52 2,71026 1,617 53 2,735

Table B.1 – Courbe des taux sans risque de l’EIOPA au 31/12/2018.

100

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Annexe B. Données de calibrage du générateur de scénarios économiques

Maturité Volatilité implicite (%)1W 21,671M 21,032M 20,813M 20,476M 19,639M 18,981Y 18,5718M 17,512Y 17,073Y 16,684Y 16,645Y 16,767Y 17,2010Y 17,98

Table B.2 – Volatilités implicites du call sur CAC40 à la monnaie au 31/12/2018.

101

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Annexe B. Données de calibrage du générateur de scénarios économiques

Maturité/Ten

or1Y

2Y3Y

4Y5Y

6Y7Y

8Y9Y

10Y

15Y

20Y

25Y

30Y

1M12

,12

13,28

19,07

24,11

28,78

29,95

31,01

31,69

32,10

31,66

32,11

31,98

31,85

31,72

2M12

,55

14,91

20,50

25,95

30,19

31,73

32,89

33,58

33,92

34,25

33,75

33,43

33,09

32,81

3M12

,85

15,75

21,93

28,08

32,29

33,59

34,60

35,23

35,51

35,79

35,10

34,61

34,29

33,88

6M14

,50

20,06

25,79

31,42

35,39

36,52

37,53

38,14

38,52

38,86

38,14

37,44

36,95

36,47

9M18

,28

24,30

29,96

35,08

38,45

39,43

40,37

40,85

41,14

41,39

40,34

39,55

39,00

38,44

1Y21

,49

28,27

33,76

37,81

40,67

41,66

42,59

42,99

43,26

43,48

42,28

41,21

40,63

40,02

18M

28,87

34,92

39,38

42,70

44,95

45,70

46,33

46,55

46,63

46,64

45,23

44,27

43,68

43,11

2Y36

,71

42,11

45,32

47,33

48,92

49,43

49,75

49,86

49,79

49,71

47,88

46,70

46,10

45,52

3Y49

,21

51,59

53,39

54,20

54,78

54,95

54,99

54,82

54,55

54,33

51,68

50,32

49,50

48,90

4Y57

,90

57,99

58,67

58,85

58,91

58,87

58,73

58,40

58,02

57,63

54,21

52,53

51,56

50,91

5Y63

,04

62,47

62,25

62,02

61,79

61,52

61,19

60,85

60,44

60,04

56,14

54,41

53,22

52,43

6Y64

,51

63,92

63,56

63,16

62,83

62,53

62,17

61,78

61,35

60,90

56,75

54,73

53,48

52,65

7Y65

,89

65,01

64,47

63,95

63,56

63,22

62,81

62,42

62,01

61,61

57,25

54,98

53,63

52,73

8Y65

,98

65,14

64,61

64,09

63,70

63,38

63,01

62,57

62,10

61,71

57,26

54,84

53,46

52,51

9Y65

,87

65,10

64,56

64,10

63,74

63,38

62,95

62,49

62,06

61,69

57,17

54,67

53,20

52,22

10Y

65,78

64,95

64,44

63,98

63,69

63,25

62,84

62,43

62,08

61,81

57,19

54,51

52,93

51,94

15Y

60,85

60,35

60,00

59,70

59,59

59,29

59,00

58,66

58,38

58,13

53,54

51,57

49,09

47,91

20Y

56,94

55,82

55,62

55,43

55,39

55,13

54,79

54,54

54,30

54,05

49,66

46,36

44,60

43,10

25Y

53,23

52,75

52,48

52,10

51,78

51,41

51,00

50,69

50,41

50,10

45,72

42,55

40,67

39,15

30Y

50,32

49,95

49,80

49,46

49,09

48,55

47,96

47,31

46,74

46,23

42,49

39,36

37,72

36,50

Tabl

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au31/12/2018.

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