70
29 ème PRINTEMPS POETIQUE Partout, la poésie. ANTHOLOGIE

Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

  • Upload
    lydien

  • View
    214

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

29ème PRINTEMPS POETIQUE

Partout, la poésie.

ANTHOLOGIE

Page 2: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

1

La terre est mon bonheur

Guillevic

Page 3: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

2

PARTOUT

Je suis un enfant de partout un enfant de Paris, de Cotonou, un enfant de l’ombre des montagnes des plis rouges d’un pagne. Je suis un enfant des nids de moineaux, de Mulhouse, de Baltimore, des petits bateaux de la baie de Rio et pire encore je suis un enfant de quelque part né de l’amour entre la chance et le hasard. Un enfant avec un nom, un prénom, mais un enfant qu’on appelle Terrien parce que, sans moi, cette planète n’est rien. Alain SERRES in Je suis un enfant de partout Rue du Monde, 2008

Marche le monde sur les pieds sur la tête Marche le monde à l’endroit à l’envers Marche le monde Qu'importe le sens Qu’importe le pas Marche le monde tu lui montreras la voie Jacques FOURNIER in Cairns n° 9

AU LOIN

J’ai regardé au loin J’ai vu quelque chose qui bougeait Je me suis approché J’ai vu un animal Je me suis encore approché J’ai vu un homme Je me suis encore approché Et j’ai vu que c’était mon frère Proverbe tibétain in La Cour couleur Anthologie Rue du Monde

UN SIGNE

Entre les pierres, sur l’écorce des arbres, dans les nuits étoilées, au fond des ravins, sur les chemins, dans les rêves, dans le vent, dans l’eau… je cherche un signe du passé, quelque chose qui me ramène à la voix perdue de mes ancêtres. Umberto AK’ABAL Les traces du jour et de la nuit Patiño, 2008

Page 4: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

3

UN HOMME S’EN ALLA

Un jour un homme s’en alla Avec son baluchon ― Et il marcha Et il marcha Toujours vers l’horizon. Et il avançait, ce bonhomme, Sans jamais s’arrêter Sans faire un somme Sans faire un somme Sans boire ni manger. Dans une forêt à l’aurore Un jour il est entré ― Et depuis lors Et depuis lors Nul ne l’a rencontré. S’il vous arrivait par la suite de le voir quelque part Venez bien vite Venez bien vite Nous le faire savoir !

Daniil KHARMS traduction de Henri ABRIL

Anthologie de la poésie russe pour enfants circé / poésie

LE MENU DU TROU NOIR

1 soleil 1 lune 9 planètes 11 astéroïdes 14 comètes 18 étoiles 23 galaxies 35 nébuleuses 53 quasars Jacques ROUBAUD Menu, menu Gallimard, 2000

AH ! QUE LA TERRE EST BELLE

pour Isabelle

Ah ! que la terre est belle Crie une voix, là-haut Ah ! que la terre est belle Sous le beau soleil chaud ! Elle est encore plus belle Bougonne l’escargot, Elle est encore plus belle Quand il tombe de l’eau. Vue d’en bas, vue d’en haut, La terre est toujours belle, Et vive l’hirondelle Et vive l’escargot. Pierre MENANTEAU Œuvre poétique, tome 3 Soc et Foc, 2000

Ma mémoire est une route Des soleils inaccessibles Y dorment D’un sommeil tourbillonnant Mes terroirs J’y cherche mes racines Mes arbres Ma vérité Jean ZIMMERMANN Car j’ai affaire en ce pays Fédérop, 2000

Page 5: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

4

LITANIES DE L’EXILÉ Et toi, l’exilé : Être de passage, toujours de passage, avoir la terre pour auberge et contempler des cieux qui ne sont pas les nôtres, vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner des chansons qui ne sont pas les nôtres, rire mais d’un rire qui n’est pas le nôtre,

serrer des mains qui ne sont pas les nôtres, pleurer avec des larmes qui ne sont pas les nôtres,

céder à des amours qui ne sont pas les nôtres, goûter à des plats qui ne sont pas les nôtres, prier des dieux, des dieux qui ne sont pas les nôtres, entendre notre nom sans que ce soit le nôtre, penser à ceci, à cela, à ce qui n’est pas nôtre, tendre une monnaie qui n’est pas la nôtre, et suivre des chemins qui ne sont pas les nôtres. …

Et toi, l’exilé : Être de passage, toujours de passage, avoir la terre pour auberge, avoir pour tout bien des choses d’emprunt, ne pas avoir d’ombre, mais des bagages, à moins que demain, demain ou jamais…

Miguel Angel ASTURIAS Poèmes indiens

Gallimard / Poésie

LE VOYAGE

Le voyage on le fait sur un cargo de charbon Reste-t-il un port où l’on ne s’est pas encore battu ? Reste-t-il une tristesse que nous n’ayons pas encore chantée ? L’horizon qu’on voyait chaque matin devant Ne l’a-t-on pas vu chaque soir derrière ? Que d’étoiles ont filé devant nous Frôlant les eaux. Chaque aurore n’était-elle pas le reflet De notre grande nostalgie ? On y va malgré tout, n’est-ce pas, on y va. Nâzim HIKMET, Il neige dans la nuit, Gallimard, 1999

Page 6: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

5

BANGUI

Elle est là Yarné seule devant le fleuve Toute une saison l’Oubangui s’est gorgé de pluies il coule vite Yarné reste sur la rive Elle voudrait bien aller de l’autre côté des vagues et se perdre dans leurs miroirs Elle voudrait découvrir le bout du monde de cette planète toute ronde Elle est là Yarné seule devant le fleuve Elle rit Elle devine qu’ici comme ailleurs le monde n’est pas fini. Yves PINGUILLY in Je suis un enfant de partout Rue du Monde, 2008

j'habite loin de vous un seuil perdu de brume le tumulte y est chose terrible lorsque s’affrontent des êtres redoutables je peuple de mots mes déchirures Amina SAÏD L’une et l’autre nuit Le dé bleu, 1993

POÈME POUR PARTIR DU BON PIED

J’ai pris ma clé à trompette pour enfermer les comètes J’ai pris ma clé à guitare pour enfermer la nuit noire J’ai pris ma clé à tambour pour ouvrir le petit jour Et je suis parti laissant dans mon lit ma clé à piano sol fa mi ré do Alain BOUDET, Poèmes pour sourigoler, Blanc Silex, 1999

Page 7: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

6

MIRAGE

regarde, à l'horizon où s'étagent les collines, le cheval, son rire bruyant, sa chevelure-oriflamme. il gambade dans les prairies de la mémoire, comme un rêve longtemps reclus qui trouve enfin la nuit propice.

Tahar DJAOUT in

"La Sape" 1990 Numéro spécial consacré à 40 poètes francophones

Il voyage à cloche-pied sa valise peut contenir un jour son cou ne sert qu’à son écharpe ses pieds qu’à guider ses souliers il parle plus bas dans son rêve de peur de réveiller son nez il fit un nœud à son mouchoir pour pouvoir se rappeler son corps qu’il oublie sur les bancs publics après lecture de la dernière ligne de sa peau

Vénus KHOURY-GHATA la voix des arbres

Le cherche-midi

Tout vient de loin. Et reste loin. Mais loin de quoi ? De quelque chose qui est loin. Ma main me fait des signes depuis un autre univers.

Roberto JUARROZ Douzième poésie verticale Orphée La Différence

S’asseoir sur les pierres chaudes entre lesquelles pousse la beauté nomade des îles Anne-Marielle WILWERTH, D’îles en ailes, Couleur livres, 2012

Page 8: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

7

SALAH de BAGDAD

à Salah Al Hamdani

À Bagdad il y a un enfant un seul enfant le seul que j’entende le seul que je voie le seul qui compte à cet instant Il avait un fleuve un ciel une maison de toile et un tapis volant (tous les enfants du monde ont un tapis volant c’est leur secret) Mais à cet instant Salah le gamin de Bagdad cherche pieds nus dans les pierres Il cherche son tapis volant sa maison de toile son fleuve son ciel Sous un tapis de bombes Salah cherche son secret dans les ruines Jean-Pierre SIMÉON in Je suis un enfant de partout Rue du Monde, 2008

J’ai bâti ma maison sous la lune, le soleil et les étoiles. Il n’est de meilleur lieu pour vivre dans l’amitié du monde. Jean JOUBERT Poèmes de la lune et de quelques étoiles L’école des loisirs, 1992

Page 9: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

8

ORCHESTRE

Un p’tit hippopotame Tapait sur son tam-tam tam / tam /tam… Avec le fils du lion Qui râclait du violon lon / lon / lon… La fille de l’otarie Était à la batterie tri / tri / tri… Le petit éléphant Soufflait dans l’olifant fan / fan / fan… Le neveu d’la gazelle Avait une crécelle sel/ sel /sel… Bébé caméléon Jouait d’l’accordéon on / on / on… Et les petits têtards Gratouillaient d’la guitare tar / tar / tar… Les enfants de là-bas Leur donnèrent le la la / la / la… Et tous ceux de la terre Tous ensemble chantèrent La la lère la la la… Jean-Claude TOUZEIL Sortie d’animots Donner à Voir, 1994

Une carte postale

Tu m’enverras une carte postale De la douceur des eaux De la chaleur des lumières ! Ici, le Soleil fera place à la Lune La Lune au nuage Le nuage à la nuit. Envoie-moi une carte postale ! Tu m’enverras cette lumière des nuits, Des profonds cratères des Vésuves ! Tu m’enverras ce diamant des ténèbres, De la froideur des igloos ! Envoie-moi une carte postale !

Pacéré TITINGA Refrains sous le Sahel P.J. Oswald

LES EAUX DU GANGE

Au cœur des eaux du Gange j'ai laissé s’en aller une petite lumière sur un blanc nénuphar une bougie sur l’eau qui semble comme un phare et porte nos espoirs au bout de la nuit noire sur les ailes d’un ange au cœur des eaux du Gange Michel PIQUEMAL in Cairns n°8 La Pointe Sarène / Gros Textes, 2011

Page 10: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

9

LETTRE D’UNE MÈRE

Va dans le vaste monde, mon cher enfant, Va vers une vie libre ! Tant que le vent souffle en poupe. Va vers la vaste mer, mon cher enfant, Va vers le monde libre ! Tant qu’il ne fait pas encore noir Et que le crépuscule ne rougit pas le ciel. Lorsque les ombres s’effaceront, Que l’aigle de mer sera retourné à son nid, Que le vent soufflera vers la terre Et que le timonier sera sans boussole, Alors tu pourras revenir vers moi ! Reviens alors, mon cher enfant, Reviens de l’autre côté de la nuit ! Et lorsque ton navire sera près du rivage, Alors nous parlerons De l’amour et de ta vie demain matin.

Asrul SANI Deux cents poèmes indonésiens

mis en français par Louis-Charles Damais Adrien-Maisonneuve

Il n’y a pas de murs Je te le dis il n’y a pas de murs Où nous sommes je chante et je demeure Où nous sommes le présent est sans âge Si je m’éveille avec l’aurore Tu es déjà en ma vie Où nous sommes les sources se délient L’ancre n’est pas voyage Je te le dis Andrée CHÉDID in C’est merveilleux la vie Albin Michel, 2001

Ouvre l’œil et regarde, tu verras ton visage dans tous les visages. Tends l’oreille et écoute, tu entendras ta propre voix dans toutes les voix. Khalil GIBRAN in C’est merveilleux la vie Albin Michel, 2001

Page 11: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

10

MA VIEILLE GODASSE

Clop pfuit clop pfaff clop clop pfuitt… Elle y va de ses petits bruits, Elle grimace, gueule ouverte largement, Révélant ses vilaines dents, Ses dents rouillées, cariées, noires, Mal plantées dans ses mâchoires. On dirait qu’elle se prend Pour un jeune caïman Ou pour un poisson flasque qui nage Dans l’eau tombée des nuages. Vieille chaussure éculée, Avec toi je vagabonde À travers mon petit monde Par les rues ensoleillées.

Julius CHINGONO Zimbabwean Poetry in english,

an anthology by K.Z.Muchemwa Traduction G. Robineau et B. Lorraine

Mambo Press

Quand je serai un oiseau je n’aurai plus jamais le vertige plus jamais la voix enrouée et je sifflerai dans le ciel pour faire avancer le soleil François DAVID Vole vole vole Les Carnets du Dessert de Lune, 2011

Page 12: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

11

OISEAUX DE TURQUIE

Les garçons d’Istanbul jouent à pousser les filles dans le dos pendant que les filles d’Istanbul jouent à caresser les ailes des oiseaux. Et les oiseaux eux ne sauront jamais s’ils sont d’Istanbul du Cap-Vert ou d’Israël depuis qu’une vieille poule a picoré toutes les frontières du ciel. Alain SERRES in Je suis un enfant de partout Rue du Monde, 2008

VOYAGE BLANC

Quand je serai petite je partirai en voyage avec mon sac de plumes. Je choisirai d’aller loin là-bas où il fait blanc sur la banquise. Françoise LISON-LEROY in Je suis un enfant de partout Rue du Monde, 2008

J’aime Barcelone en plein soleil, L’eau quand elle ruisselle, La voix de Luis Llach. J’aime les accents étrangers. … J’aime le bruit de l’aspirateur quand il s’arrête, Les collectionneurs de cartes postales. J’aime dessiner sur la buée des vitres. J’aime le chant des baleines. … J’aime me perdre dans les petites rues, Boire l’eau fraîche des fontaines, Déplier du linge propre. J’aime respirer profondément. … Bruno RUIZ, J’aime, noir et blanc, 1995

Page 13: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

12

IL Y A TOUT

Dans ma chambre il y a tout l’Himalaya dans la bibliothèque l’Océan dans les tableaux l’Amour dans mes poèmes et le ciel par la fenêtre Où irais-je pour être mieux ? CLOD’ARIA Inventaires Le chat qui tousse, 2000

VERS QUOI ?

Vers quel édifice Toutes ces fondations ? Vers quelle destination Toutes ces poursuites ? Vers quelle cible Toutes ces flèches ? Vers quelle durée Tous ces instants ? Vers quel mirage Nos cheminements ? Andrée CHÉDID Par-delà les mots Flammarion, 1995

Va voir dehors si j’y suis va voir en Sologne en Pologne au cimetière à Cythère va voir à la scierie en Assyrie chez Théodore à Brocéliande va voir dehors va voir dedans va voir à la sortie dans les orties va voir va voir si j’y suis Jean-Clarence LAMBERT Trillali trillala Somogy, 1998

Je suis comme Une boîte de couleurs. Blanche le matin Rouge le midi Jaune à quatre heures Bleue chaque soir La nuit rien Les couleurs dorment Quelquefois Elles se mélangent Mohammed DIB in Poèmes tout frais Scandéditions / La Farandole

Page 14: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

13

MOUVANCE

mouvance

toujours plus loin dites-vous jusqu'au bout du monde le voyage le déplacement

toujours plus loin et le bout du monde est bleu

are you going with me

c'est une musique aérienne sur mon signe de balance

et ce bout du monde est bleu je m'imagine au volant d'une voiture à l'harmonica lamenteux des longues

routes où bercent nos corps

alors que la tête va et vient something like out-of-the-body

experiences sur les routes d'Acadie

sur toutes les routes de l'imaginaire mouvance

déraciné apatride sinon pour ce bleu au cœur

qu'on allume autour d'une langue are you going with me

Gérald LEBLANC in La Poésie acadienne

Anthologie Perce-neige / Écrits des Forges, 1999

NOUS, TOUS

Dans le cœur étranger des villes et des neiges avec nos mots unis, en un tableau d’époque nous, tous sans restriction traversons la nuit des tumultes des passions des errances et des visions scandés d’échos venus de l’intérieur des voix nous, tous liés au présent pluriel d’un partage singulier en ce paysage humain nous, tous réinventés Claude BEAUSOLEIL in Nous, la multitude Le Temps des Cerises, 2011

Sur tes cartes du monde Les pays sont de lumineuses broderies Avec une pointe de ciseaux On défait d’un rien Les points de couture des frontières Ce sont les êtres que tu relies serrés d’un fil Marie HUOT Visite au petit matin Al Manar, 2011

RÉUNIR

Partageons L’instant sans labyrinthes Où le temps s’égare Pour mieux nous réunir Andrée CHÉDID Par-delà les mots Flammarion, 1995

Page 15: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

14

CONGO-TCHÉTCHÉNIE

Cet enfant-là qui a des cheveux blonds et la peau blanche ne sait pas que quelque part dans le monde un autre enfant qui a des cheveux noirs et la peau noire lui ressemble Ils ne sont pas jumeaux comme deux gouttes d’eau ils sont parents comme deux gouttes de sang tout simplement depuis longtemps Depuis longtemps chez eux le bleu du ciel qui était mal accroché… est tombé ! Yves PINGUILLY in Je suis un enfant de partout Rue du Monde, 2008

UN SON QUI VOYAGE

un son qui voyage d'un espace à l'autre me rentre dans une oreille et sort par l'autre la mélodie me reste dans la tête elle ne sort pas elle reste stuck dans ma cervelle c'est une mélodie si belle qu'elle doit faire la guerre pour sortir pour naître dans le monde qui la joue et l'écoute que c'est remarquable ce son qui voyage

Mario LEBLANC in La Poésie acadienne Anthologie Perce-neige / Écrits des Forges, 1999

Page 16: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

15

Comment s’y prendre… pour ouvrir les yeux sur le monde sans se perdre de vue ? Dominique SAINT-DIZIER Questions qui posent problème Corps Puce, 2009

J’ai frappé toc toc toc aux portes du paradis un éléphant m’a dit d’entrer j’ai fait trois petits pas aussitôt l’éléphant s’est mis à me piétiner écraser tendrement mes os pour qu’ils ne blessent pas le vent quand mon corps fut aussi plat qu’un tapis volant je me suis assis dessus et j’ai volé longtemps longtemps vers tous les horizons Thierry CAZALS Un éléphant au paradis møtus, 2011

Un beau soir je cueillerai une étoile de mer un rouge-gorge un tigre des neiges un brin de bruyère une baleine à bosse je les poserai au creux de mes mains puis je soufflerai longtemps patiemment amoureusement jusqu’à ce que je sois transporté avec eux au point de départ

Thierry CAZALS Un éléphant au paradis møtus, 2011

Si tu aimes l’étranger Quand tu ne sais pas où tu vas tu t’aimeras demain regarde d’où tu viens Jean-Pierre SIMÉON Proverbe africain

in

Il pleut des poèmes Anthologie

Rue du Monde, 2003

Page 17: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

16

J’ÉCOUTE ISTANBUL

J’écoute Istanbul, les yeux fermés Les voûtes du Bazar sont fraîches, si fraîches Mahmout Pacha est tout grouillant de monde les cours sont pleines de pigeons Des bruits de marteaux montent des docks dans le vent doux du printemps flottent

des odeurs de sueur J’écoute Istanbul, les yeux fermés…

Orhan VELI in

Tour de terre en poésie Rue du Monde, 1998

LE GLOBE

Offrons le globe aux enfants, au moins pour une journée, Donnons-leur afin qu’ils en jouent comme d’un ballon multicolore Pour qu’ils jouent en chantant parmi les étoiles. Offrons le globe aux enfants, Donnons-leur comme une pomme énorme Comme une boule de pain toute chaude, Qu’une journée au moins, ils puissent manger à leur faim. Offrons le globe aux enfants, Qu’une journée au moins le globe apprenne la camaraderie. Les enfants prendront de nos mains le globe Ils y planteront des arbres immortels.

Nazim HIKMET in

La cour couleurs Anthologie

Rue du monde, 1997

Page 18: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

17

De Madrid à Francfort de Paris à Milan de Lille à Istanbul ça roule, ça roule… Ça roule si fort Qu'avant mille ans Les gens de la planète Auront perdu la boule. Xavier BOUGUENEC Y a plus d’enfants Soc et Foc, 2006

J’ai pas d’or dans mes poches. Rien ne scintille à mes doigts. Aux pieds j’ai des galoches et du vent dans les cheveux. Pas de rubis pas de broche, mais du soleil dans les yeux. La forêt toute proche est mon salon luxueux. Tout m’est donné gratuitement : chant du pinson, chant du merle, étoiles du firmament. Sans vos bijoux, sans vos perles je vais très bien merci. Gardez vos sous et vos soucis. Xavier BOUGUENEC Y a plus d’enfants Soc et Foc, 2006

BEAU DÉSERT INTÉRIEUR

Chacun dispose d’un territoire secret Où l’autre ne peut pénétrer. Chacun y garde un peu d’eau Pour la soif. Jean FOUCAULT Voyage en Berbérie Éditions du Jasmin, 2006

Les arbres sont trop attachés à leurs racines pour aller courir le monde. Pour les cailloux, c’est différent. Franck PRÉVOT Les pensées sont toujours des fleurs comme les autres L’Édune, 2011

… messieurs, messieurs les prophètes ne demandez pas leur nom aux arbres ne demandez pas aux vallées leur génitrice le glaive de lumière se détache de mon front et de mes mains jaillit l’eau du fleuve tous les cœurs d’hommes sont ma nationalité voilà je vous laisse mon passeport ! Mahmoud DARWICH, Rien qu’une autre année, Éditions de Minuit, 2003

Page 19: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

18

Qui que tu sois D’où que tu viennes Tu es mon frère Tu viens de loin Mais peu m’importe Tu es mon frère Et je t’accueille À bras ouverts Contre l’horreur De qui te nie Contre l’ignoble Et les insultes Tu viens de loin Et moi aussi Tu viens de moi Et moi de toi De ce pays Où les hommes sont frères Guy ALLIX in

Nous, la multitude Le Temps des Cerises, 2011

À TOUR DE RÔLE

Chaque jour, le matin clair fait le tour de l’univers, histoire de réveiller les mondes, les oiseaux, les mers, les forêts les enseignants, les écoliers. De l’Orient à l’Occident, le soleil ouvre l’école. Sur les tableaux noirs, les morceaux de craie chantent les mots de toutes les langues. Et toujours, toujours quelqu’un étudie : lorsque les jeunes quittent l’école à Pékin, la classe commence pour ceux de Berlin. Quand on va dormir à Alma Ata, on se réveille à Lima, Bogota. Ainsi les enfants se relaient. Ainsi s’en va le monde : ainsi rien n’est perdu, pas même une seconde. Gianni RODARI De la terre et du ciel Rue du Monde, 2010

SAHARA

Sahara Mamelles de sable Qui portent les caresses Des caravanes Sahara Mamelles de sable Qui enveloppent La tiédeur des nuits Bleues

Armand BALIMA in Poèmes d’Afrique pour les enfants Anthologie Le Cherche-midi

Parfois les avions sont rêves de tour du monde de soleils lointains d’ailleurs bien chauds. Mais ces avions-là portent en leurs ventre des billets pour des voyages sans retour dans le noir de la terre dans le froid de la mort. Sylvie LATRILLE Sur le chemin des merles L’épi de seigle, 2003

Page 20: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

19

LE BROCHET

Le brochet Fait des projets. J’irai voir, dit-il Le Gange et le Nil Le Tage et le Tibre Et le Yang-Tsé-Kiang. J’irai, je suis libre D’user de mon temps. Et la lune ? Iras-tu voir la lune ? Brochet voyageur, Brochet mauvais cœur, Brochet de fortune. Robert DESNOS Chantefables, chantefleurs… Gründ, 2000

LA DIFFÉRENCE

à Martine Pour chacun une bouche deux yeux deux mains, deux jambes Rien ne ressemble plus à un homme Qu'un autre homme Alors entre la bouche qui blesse et la bouche qui console entre les yeux qui condamnent et les yeux qui éclairent entre les mains qui donnent et les mains qui dépouillent entre les pas sans trace et les pas qui nous guident où est la différence la mystérieuse différence ? Jean-Pierre SIMÉON La nuit respire Cheyne, 1987

La terre comme un jardin pour tout le monde La terre comme une boule enfin ronde une véritable boule d’amour Est-ce que ça peut sphère ? Jean-Claude TOUZEIL in

Cairns n°9 La Pointe Sarène / Gros Textes, 2011

Soulève ta douleur et marche Tant que cette terre tourne il reste l’espoir d’émouvoir les esclaves qui portent sur leurs épaules la voûte désaffectée du ciel Abdellatif LAÂBI Discours sur la colline arabe L’Harmattan, 1985

Page 21: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

20

Les soirs d'orage tu tranches d'un regard les nœuds du ciel Dans l'odeur des pluies les ombres se délient se défont de leur poids de suie à grands coups d'ailes soudaines déployant tes envies de voyages A chacun de tes pas tu ignores ce que "plus loin" te réserve d'aventures Vers quelle nuit tu vas en songe Tu ne sais si c'est pour toi que les hirondelles -aigües de leur vol - posent leurs pièges à lumière pour baliser ta route Ce que le monde doit te dire tu sais qu'il te le dira à son heure Toi tu marches et tu ne charges tes épaules d'aucune question qui te pèse.

Alain BOUDET -inédit- Locmaria - 17/08/2002

IL PARLE

Il parle avec ses doigts il parle avec ses mains il parle avec ses bras et avec ses épaules il parle de tout son corps il parle de tout son cœur il parle si clairement que dans tous les pays qui parlent mille langues tous les enfants muets savent bien le comprendre et tous les enfants sourds aux mots blessants du monde François DAVID

in Je suis un enfant de partout Rue du Monde, 2008

LA MARELLE

C’est l’heure paisible Où les enfants s’amusent Au jeu de la marelle Leurs éclats de rire montent avec eux De la terre jusqu’au ciel Et font un lit d’étoiles où se blottit la terre André SCHETRITT Eux autres, moi-je et le monde Donner à Voir, 2005

Page 22: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

21

Il a fait un nœud à la ligne d’horizon C’est, dit-il, pour ne pas oublier l’imagination. Robert BOUDET in Poèmes tout frais pour les enfants de la dernière pluie Scandéditions / La Farandole, 1993

Je pose mon poids d’ombre au bord de la fenêtre Je fais un nœud de rêve à mes souliers et je m’en vais sur un chemin taillé pour moi seule à coups de crayon noir au milieu du papier Brigitte RICHTER Œuvre poétique 1993

Il marchait la tête dans les étoiles mais il gardait les pieds sur terre pour sentir à chaque pas battre le cœur des sources André ROCHEDY Descendre au jardin Cheyne, 1987

Au bout de la route, il y a souvent un étranger qui te ressemble. Yvon LE MEN À l’entrée du jour Flammarion, 1984

Page 23: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

22

Étranger prends le temps d’aimer l’arbre accoude-toi à la terre un cavalier t’apportera de l’eau, du pain et des olives amères c’est le goût de la terre et les semences de la mémoire c’est l’écorce du pays et la fin de la légende ces hommes qui passent n’ont pas de terre et ces femmes usées attendent leur part d’eau. Étranger, laisse la main dans la terre pourpre ici il n’est de solitude que dans la pierre Tahar Ben JELLOUN in Poèmes tout frais pour les enfants de la dernière pluie Scandéditions / La Farandole, 1993

MÉTÉO DU CŒUR

Neige à Moscou. Gelée à Prague. Pluie à Paris. Couvert à Honolulu. Éclaircies à La Paz. Soleil à Rio de Janeiro. Et beau temps fixe là où l’on m’aime. Michel MONNEREAU Le soleil oiseleur Le dé bleu, 2000

… se dire aujourd’hui que demain nous irons c’est comme un défi à notre mort car c’est bien de cela dont il s’agit n’est-ce pas non d’y échapper mais bien de résister à son avance à cette usure un peu plus longtemps que possible et de tenter ce pas juste un peu plus loin … Patrick JOQUEL Un emploi du temps de chamois Clarisse, 2008

Page 24: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

23

L’HOMME QUI TE RESSEMBLE

J’ai frappé à ta porte J’ai frappé à ton cœur pour avoir bon lit pour avoir bon feu pourquoi me repousser ? Ouvre-moi, mon frère… ! Pourquoi me demander si je suis d’Afrique si je suis d’Amérique si je suis d’Europe ? Ouvre-moi, mon frère… ! Pourquoi me demander la longueur de mon nez l’épaisseur de ma bouche la couleur de ma peau et le nom de mes dieux ? Ouvre-moi, mon frère… ! Je ne suis pas un noir Je ne suis pas un rouge Je ne suis pas un jaune Je ne suis pas un blanc mais je ne suis qu’un homme Ouvre-moi, mon frère… ! Ouvre-moi ta porte Ouvre-moi ton cœur Car je suis un homme l’homme de tous les temps l’homme de tous les cieux l’homme qui te ressemble !...

René PHILOMBÉ in

Poèmes d’Afrique pour les enfants Anthologie Le Cherche-midi

Page 25: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

24

LA RONDE AUTOUR DU MONDE

Si toutes les filles du monde voulaient s’donner la main, tout autour de la mer, elles pourraient faire une ronde. Si tous les gars du monde voulaient bien êtr’marins, ils f’raient avec leurs barques un joli pont sur l’onde. Alors on pourrait faire une ronde autour du monde, si tous les gens du monde voulaient s’donner la main. Paul FORT in Le Paul Fort Mango jeunesse, 2002

Si tous les crabes du monde Voulaient se serrer la pince De Port Bou à Port-au-Prince On entendrait dans l’onde La mer qui grince La mer qui gronde. C. CLÉMENT, C. HELLINGS, C. NORAC La mer Casterman, 1989

Si toutes les turbines de ton pays Si tous les barrages de tes vallées Si toutes les eaux de tes montagnes Travaillent Si les écluses de tes canaux Si tous les quais et tous les fleuves Charrient ton sang et ta sueur Si tu construis un monde neuf Sur le flux de la joie qui chante Tu es un homme de chez nous Pierre SEGHERS Comme une main qui se referme Bruno Doucey, 2011

Page 26: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

25

Le petit écran t’informe altitude 10000 pieds vitesse 928 km/h cap Nord-Ouest 320° Dehors par le hublot l'océan blanc des nuages t’invite Tu aimerais marcher sans bruit sur leurs vagues Flotter autour de la terre Patrick JOQUEL Que sais-tu des rêves du lézard ? Magnard, 2004

LE MÉHARI DU SAHARA

Le méhari Du Sahara Les nuits sans lune ne dort pas. Inquiet, il vient, Nerveux, il va, De dune en dune, pas à pas : À l’oasis Où tout est noir, La lune lisse est son miroir. Pierre CORAN

Comptines pour que les voyelles s’emmêlent Casterman, 1989

Mes poches craquent de montagnes Je porte l’océan le vent et la douceur la violence des rouges et le tourment des eaux La rumeur des courées et le cri des étoiles me pèsent dans les yeux Le rire des chevaux et le poids d’une enfance me retiennent au pays Je n’irai pas bien loin Dites à la lumière qu’elle ne m’attende pas. Arlette CHAUMORCEL in L’enfance lucide anthologie Unimuse, 1989

LES MOTS DE COULEUR

L’herbe a des mots tout verts qui chuchotent dans l’air. Le vent a des mots bleus qui sont parfois houleux. Le soleil à l’aurore a des mots rouge et or. Et les mots se répondent en repeignant le monde. Guenrikh SAPGUIR in Anthologie de la poésie russe pour enfants Circé, 2000

Page 27: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

26

CHANGER LE MONDE

Changer le monde commence dans ma chambre. Il faudra bien la ranger. Changer le monde commence ici, dans un petit pays. Je verrai les déserts, les océans ensuite. Je suis changeur de monde mais je vais à l’école. Les montagnes et les forêts me remercient de loin. Changer le monde, j’y passe un de ces temps. Fermer les centrales, donner plus d’ailes au vent, parler à une étoile, qu’elle reste au levant, protester dans la rue, rire partout ailleurs, changer le monde avant que se comptent les heures, que je devienne grand. En fait, ça m’arrangerait que vous changiez le monde avec moi. Carl NORAC D’îles en ailes Couleur livres, 2012

TOTO

Dis d’où tu viens Toto ? Je viens par ma mère de Quito et par mon père de Toronto j’ai sept frères et sœurs et un manteau plein de courants d’air comme la cordillère et les hauts plateaux mon père a une grande voiture vert eau et ma mère cette vieille photo où son père et sa mère s’embrassent sur le bateau qui un hiver les conduisit de Quito à Toronto Bernard CHAMBAZ in Je suis un enfant de partout

Rue du Monde, 2008

Page 28: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

27

PIROGUE

Tolli Tolli Vogue ma pirogue. Tolli Tolli Vogue dans l'océan. Sa voile est une palme, Un balai lui sert de rame. Tolli, Tolli Vogue ma pirogue. J'irai vers la Chine, L'Amérique latine et Jérusalem. J'irai partout dans le monde Où il faut semer la paix. Vogue ma pirogue, Tolli, Tolli, Ma pirogue sans haine, Ma pirogue sans chaîne Où je voudrais voir Tous les enfants du monde.

Mbaye Gana KÉBÉ in Poèmes d’Afrique pour les enfants anthologie Le Cherche-midi

DOUCEUR

Premier mai Dans les rues Les manifs Les enfants Dans les épaules Des nuages Le refus Dans les poings Du soleil Les paroles Dans les poitrines Fraternelles La douceur Dans l’extrême Liberté Jean-Claude TOUZEIL in Nous, la multitude Le Temps des Cerises, 2011

LE BOURLINGUEUR

Il prit sa brosse à dents, Son sac de faux croco, Une flûte de Pan, Un pot d’encre de Chine, Un pinceau, un stylo Et du papier machine. Impatient d’être en l’air, Il courut ventre à terre, Jusqu’à l’aéroport. C’était la grève des transports. Pierre CORAN, D’îles en ailes, Couleur livres, 2012

Page 29: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

28

QUAND JE PENSE À LA MER

Quand je pense à la mer C'est à l'eau que je pense, verte et mouvante Pas au poisson, pas au bateau. Quand j'écoute la mer C'est bien l'eau que j'entends, sourde et roulante Et pas le coquillage et pas le vent. Quand j'entre dans la mer Froide et secrète comme un grand abreuvoir C'est moi le coquillage et le bateau Et la vague et le vent et l'eau Et je bois le soleil.

Jacqueline DAOUD in Poèmes d’Afrique pour les enfants anthologie Le Cherche-midi

PARAPLUIE ET PARASOL

Au pays des parapluies S’en alla un parasol. Au pays des parasols S’en alla un parapluie. Ils se rencontrèrent Devant la frontière.

— Viens sur ma toupie ! Dit le parapluie

— Entre sur mon sol ! Dit le parasol. Voilà pourquoi depuis, Entre soleil et pluie, La frontière nouvelle Est un grand arc-en-ciel Pierre CORAN D’îles en ailes Couleur livres, 2012

E

Un jeune Esquimau sur un Éléphant, c'est original et c’est amusant, car l’un vient du froid et l’autre du chaud. Mais un éléphant sur un Esquimau, c'est très dangereux, car ça pèse trop même si ce n’est qu’un éléphanteau.

Pierre GAMARRA ABC Messidor / La Farandole, 1988

Y

Sur un Yacht, un Yack s’embarqua pour aller à Yokohama, mais sur le pont du Yacht, voilà qu’une vague le balaya. Le Yack quitta Yokohama sur une Yole et s’en alla chez son papa.

Pierre GAMARRA ABC Messidor / La Farandole, 1988

Page 30: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

29

DEUX PETITS LAPINS

Deux petits lapins Quatre pommes de pin Ont déjeuné à Moscou Ont soupé à Tombouctou Sont rentrés coucher chez nous. Charles CROS in Poèmes à dire et à manger

Seuil Jeunesse, 2002

DEUX OURSES

Sur la banquise au pôle Deux ourses Rigolent.

— Oh, ces étoiles, Qu’elles sont drôles ! Elles s’appellent comme nous Mais ressemblent à des casseroles… Samuel MARCHAK in Anthologie de la poésie russe pour enfants Circé, 2000

APRÈS LES ANNÉES

« Papa, quand je serai grande, après les années, est-ce que j’aurai un cœur grand comme ça ?

— Oui, il va grandir un peu. — Est-ce que ça veut dire que je pourrai

mettre plus de gens à l’intérieur ? — Pourquoi dis-tu ça ? — Parce que moi, j’aime tout le monde. »

Carl NORAC Petits poèmes pour passer le temps Didier Jeunesse, 2008

PALESTINE II

C’est un jeu d’enfer que ce jet de pierres et de grenades mais j’aurais aimé te lancer mon cœur dans un jeu d’enfant Ali El Hadji TAHAR in Terres d’Afrique anthologie NDZÉ, 2011

J’ai posé le pied sur terre Sans trop savoir où j’allais Plein du soleil et du vent J’ai continué … Yvon LE MEN À l’entrée du jour Flammarion, 1984

Ta maison et ma maison C’est le monde La terre est ronde Voyagerons-nous dans le même sens ?

Yvon LE MEN À l’entrée du jour Flammarion, 1984

Page 31: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

30

Une république de roulottes de frontières disparues à l’aube frontières qu’avec l’ange de son silence la nuit a imposées La marche est l’alliance de ceux qui ont tout perdu De ceux qui rêvent la plaine de l’autre côté de la mer et au pied d’une montagne attendent que le soleil se couche Myriam MONTOYA Traces / Huellas L’Oreille du Loup, 2009

Pour que rien ne s’efface sous la cendre et la neige pour que rien ne s’abrège en chaque instant qui passe laissons les mots partir vers de lointains rivages au bout de leur voyage c’est là-bas qu’ils doivent fleurir Thierry PIET Les jours sans bagages Écho Optique, 2004

LE JARDIN

Des milliers et des milliers d’années

Ne sauraient suffire Pour dire

La petite seconde d’éternité Où tu m’as embrassé Où je t’ai embrassée

Un matin dans la lumière de l’hiver Au parc Montsouris à Paris

À Paris Sur la terre

La terre qui est un astre. Jacques PRÉVERT Paroles Gallimard, 1949

TERRE

Dans ta tombe J'ai lancé Une fleur de ton jardin Trois cailloux de chez nous Et une poignée de terre De ton village Pour que tu retrouves Ton chemin Dans l’autre monde Jean-Claude TOUZEIL Petits cailloux pour Gita Écho Optique, 2007

Page 32: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

31

DEVINETTES DE PARTOUT

DEVINETTES 1 Quelle main pour recouvrir le monde ? (ahtna d’Alaska) 2 Qui voyage plus vite que toi ? ( Indiens Arapahos) 3 je suis debout il s’allonge, je m’allonge, il se met debout (Guadeloupe) 4 Né dans les bois, il vit sur la rivière (Guarani du Paragay) 5 Elle a traversé la rivière sans se mouiller (Kabylie) 6 J’ai quitté un pays où je ne peux revenir (Cameroun) 7 Quatre bouteilles de lait, tête en bas et qui ne coulent pas (Réunion) 8 Je marche, elle reste (Turquie) 9 Qu’est-ce qui fait le tour de la maison sans bras ni jambes ? (France) 10 Pas à toi, pas à moi, à nous tous (Philippines) 11 Né dans un bosquet de bambous, je me referme l’hiver pour m’ouvrir quand vient l’été (Vietnam) 12 Que l’on me retire une lettre, deux lettres, trois lettres, je demeure toujours le même (Seychelles) RÉPONSES

1 L’obscurité 2 Tes pensées 3 Le pied 4 Le canoë 5 L’ombre de l’oiseau 6 L’enfant qui sort du ventre de sa mère 7 Les pis de la vache 8 La trace 9 La clôture 10 La terre 11 L’éventail 12 Le facteur

Jean-Marie HENRY Devinez-moi ! 185 devinettes-poèmes du monde Rue du Monde, 2011

Page 33: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

32

EXIL

Je pense à ceux qui sont restés Amis Parents ou ennemis Comme de rudes sentinelles guettant le feu ou la poussière par vanité ou par amour Je pense à ceux qui sont là-bas et l'exil est une mangue qui éclate sous mes dents doucement comme un baiser la tendresse d'une sœur et la chaleur de l'amitié Je pense à ceux qui sont restés caresser le soleil levant ou poursuivre l'ambition

Amis Parents ou ennemis comme des statues de sel ou des guerriers solennels des rois ou des mécréants Je pense à ceux qui sont restés et que je ne cesse d'aimer.

Élie STÉPHENSON La conscience du feu Ibis Rouge, 1996

Page 34: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

33

ICI

Ici qu'ils montent ou descendent les chemins sont les mêmes qui conduisent au silence Plus rien ne plane par-dessus les haies blanches plus personne ne tremble dans le soir des auvents Demain est un soleil malade que tirent de longs chalands dans les canaux gelés comme les ombres qui me croisent Où s'éteignent les lampes demeure un pays creux où je vais vieux ramoneur de songes aux yeux brûlés par une étoile errante Hugues RICHARD

in La poésie suisse romande

Écrits des Forges / Le Castor Astral / Les Éditions de l'Aire

CITÉ

Six ans au quatorzième étage À la lisière du silence l'enfant sur la pointe des pieds habite un instant de lumière Et c’est dans le feu du regard que la feuille au bout du rameau devient la forêt qu’il espère. Alain BOUDET in Je suis un enfant de partout Rue du Monde, 2008

TU ME GRONDES

parce que j’ai les doigts de toutes les couleurs noir-polar ou jaune-sable des squares parfois blanc-banquise ou rouge-révolution et même bleu-contusion Tu me grondes et tu te trompes mes doigts je les ai trempés dans l’amitié des mains des enfants du quartier des enfants du monde entier Joël SADELER in La cour couleurs Rue du Monde, 1997

SIGNE 26

L’âme ouvre ses fenêtres aux bergeries de l’univers elle s’abreuve à ses océans elle ouvre ses portes au vent des gens de passage elle offre au corps ses plaisirs et le corps lui offre sa vie Maram Al-MASRI Par la fontaine de ma bouche Bruno Doucey, 2011

Page 35: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

34

Pourquoi les vagues sont-elles dehors ? Qui a frappé si fort ? Qui sommes-nous, d'où venons-nous ? Que faisons-nous sur ce morceau de terre Au cœur de la mer indienne ? Que sommes-nous Peuple mauricien ? Quelle qualité de peau avons-nous ? Quelle chair, Quelle nation, quelle espèce Sommes-nous dans l'évolution ? texte traduit du créole par l'auteur

Khaleel TORABULLY dit KHAL

Kot sa parol là? Rôde parole Le Printemps, 1995

ULTRA-MARINE

(extrait) Je suis d’Outre-mer : de la mer de désespérance où de Caracas à Guantánamo s’agitent sur les flots inlassablement les mains vertes d’une humanité naufragée. Je suis outre-mer : de Saint-Domingue à Trinidad parenthèse verte d’îles américaines si riches de leur dénuement et si pauvres de leur richesse. Et je brave à pleins bras la violence des flots vers le soleil vers le soleil vers le soleil Sonny RUPAIRE in Outremer, trois océans en poésie Bruno Doucey, 2011

LE CHANT DES HAÏTIENS

Nous ne sommes pas frères ni mêm’ lointains cousins de toi je suis si loin et pourtant je l’entends… oui, je l’entends ton chant, le chant des Haïtiens Alain-René de NILPERTHUIS in Poètes pour Haïti L’Harmattan , 2010

Page 36: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

35

L’ORANGE

Boris, assis sur un rondin, Mangeait une orange. Quartier après quartier. Nicolas est venu s’asseoir près de lui.

— C’est bon ? — Très bon ! répond Boris. — Ah ? soupire Nicolas.

Si j’avais eu une orange, je l’aurais partagée avec toi.

— Ouais, dit Boris en avalant son dernier quartier d’orange. Dommage que tu n’aies pas d’orange !

Oleg ORIGORIEV

in Hardi hérisson et autres poésies russes Albin Michel Jeunesse, 2011

EN BRETON…

En breton, pour dire « la jument blanche », on dit : « Ar gazeg wenn ». En arabe, on dit : « El fâras lè bêda ». En anglais, on dit : « the white mare ». En esquimau, on ne dit rien parce que chez eux il n’y a pas de juments blanches. En espagnol, on dit : « la yegua blanca ». En flamand, on dit : « de witte merrie ». Comme vous pouvez le voir, toutes ces juments sont très différentes. Mais ce sont toutes des juments blanches. Paul ANDRÉ in

Enfantaisies Sous la lime, 2012

Page 37: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

36

EN FERMANT LES YEUX

Le long de la mer qui bavarde, Sur la plage où marquent les pas, Je rêve à des Îles là-bas, Avec des oiseaux bleus qui gardent Des merveilles et des trésors ; Et des personnages magiques Dansant sur de douces musiques. Le long de la mer sur la plage, Je suis parti sur un nuage, Je vole vers ces paysages. Si tu veux être du voyage, Ferme les deux yeux et regarde En toi l’autre mer qui bavarde, Et qui te fait voir mon poème ; Si tu l’aimes. Georges JEAN Écrit sur la page Gallimard Jeunesse

LA BOUCHERIE

At number one, Le boucher découenne. Al número dos, Le boucher désosse. Et au numéro trois, Le boucher parle chinois. Alain SERRES Salade de comptines Rue du Monde, 2002

L’ENFANCE

Mon enfance aux doigts tachés d’encre ! Les cloches au matin. Le muezzin au crépuscule. Des collections de vieilles boîtes et de timbres anciens, L’échange d’un Ceylan Contre deux Luxembourg. C’est ainsi qu’il s’en est allé Le temps de l’enfance. Il a couru en soulevant de la poussière et des cris À la poursuite d’une balle en chiffons. Une balle en chiffons, De ces chiffons gris de l’Albanie. Ismaël KADARÉ

in Chaque enfant est un poème, anthologie Rue du Monde, 2012

Page 38: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

37

LA GRANDE CHANSON

un jour une grande chanson

déferlera sur la planète Terre avec des mots de toutes les saisons

sucrés et forts de chair de pierre de ciel de sang de neige et d’or

aux couleurs de toutes les fleurs des cent nuances de la peau courant du pôle à l’équateur

avec tous les rayons de la rose des vents une chanson d’amoureux et d’enfants

à s’embrasser à s’envoler avec six milliards de couplets

un refrain à battre des ailes à danser de plaisir

joyeux et vif comme un petit soleil avec le premier mot universel :

SOURIRE

Armand MONJO in

On n’aime guère que la paix anthologie

Rue du Monde, 2003

à Maël, 2 ans Tu marches au hasard dans le plaisir de tes pas un peu à gauche un peu à droite dans l’ignorance des boussoles Ce qui te guide assurément C'est un petit rêve de plein jour Tu déambules à l’intérieur. Alain BOUDET in Cairns n° 3

Page 39: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

38

LES HIBOUX

Ce sont les mères des hiboux Qui désiraient chercher les poux De leurs enfants, leurs petits choux, En les tenant sur les genoux. Leurs yeux d’or valent des bijoux Leur bec est dur comme cailloux, Ils sont doux comme des joujoux, Mais aux hiboux, point de genoux. Votre histoire se passait où ? Chez les Zoulous ? les Andalous ? Ou dans la cabane bambou ? À Moscou ? ou à Tombouctou ? En Anjou ou dans le Poitou ? Au Pérou ou chez les Mandchous ? Hou ! Hou ! Pas du tout, c’était chez les fous ! Robert DESNOS Chantefables, chantefleurs… Gründ, 2000

Tout ces longs parcours et ces fuseaux horaires et les jambes fatiguées des corps qu’il faut porter de monument en monument en plus de la gourde et du sac banane c’est le prix du voyage avec pour récompense la preuve qu’ils sont mieux tellement mieux chez eux que partout ailleurs François DAVID, Oh ! les Amoureux, Sarbacane, 2006

Page 40: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

39

SOURCE RACINE

Quand je parle de mes sœurs De mes frères Je dis MON PEUPLE Je les fonds en un seul Les confonds Je les aime si fort J'en suis jaloux éperdument Je nous aime mon peuple Mes sœurs mes frères De toute la force de ma faiblesse. Eddy GARNIER Prolongement de cassure, Dappiyanp bout monyon (créole haïtien) Écrits des Hautes-Terres / Éditions Paris Méditerranée, 2001

RÊVER

Tourner le dos aux voyages aux rires des cartes postales soleil figé papier glacé Partir en restant là peut-être Retrouver l’enfance en nous-mêmes libérée Partir comme Hélice au pays des merveilles. Alain BOUDET

Carré de l’hypothalamus Donner à Voir, 2001

Page 41: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

40

WATATI BALALOU

Watati Balalou pati navou déla Didon, didon, en quoi tu causes là ? Japonais, Sardino ? Amazodoutuvien ? J’appelle un mien cousin mangeur de sable fin qui parle gazouillis au pays des enfants. Mais ça ne s’apprend pas. On l’a su, on l’oublie, une fois devenu grand. Pef in Chaque enfant est un poème Anthologie

Rue du Monde, 2012

LOIN

Ce qui est face à moi je n’ai pas besoin de le voir parce qu’il est présent. On me dit que j’ai des yeux de rêves, que j’ai des yeux tristes que… que sais-je ?... Mes yeux sont ici mais mon regard est loin. Humberto AK’ABAL Le gardien de la chute d’eau L’Harmattan

JE ME SOUVIENS

Je me souviens du village près de l'Escaut,

D'où l'on voyait les grands bateaux Passer, ainsi qu'on rêve empanaché de vent

Et merveilleux de voiles, Le soir, en cortège, sous les étoiles.

Je me souviens de la bonne saison;

Des parlottes, l'été, au seuil de la maison Et du jardin plein de lumière,

Avec des fleurs, devant, et des étangs, derrière; Je me souviens des plus hauts peupliers, De la volière et de la vigne en espalier

Et des oiseaux pareils à des flammes solaires.

Émile VERHAEREN in

Ça rime et ça rame Anthologie de poètes francophones de Belgique

Labor, 1985

Page 42: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

41

Quand je marche l'univers marche avec moi Je suis le pas dans le pas Je marche à ma rencontre Anne KOLTZ Chants de refus II

Éditions PHI,1995

À l’heure déserte l'infini me traverse Binaire je tremble et me divise L’univers jaillit jungle de couleurs Robert J. MAILHOT D’aube et de torpeur Écrits des Hautes-Terres, 2001

SOIT

se faire silence si l’on veut en soi s’entendre envahir son terrain le mettre quelque temps en sagesses en jachères marcher soit se tenir debout soit mais faire une pause faire halte en soi

Augustin BARBARA Inséparantes Le chat qui tousse, 1998

Éclat noir d’écume Je cours ivre d’océan Ce monde est si neuf

**********

Bercé d’étourneaux Le canal promène un homme Quel bleu formidable

**********

Tu ouvres les bras Le vent t’envole Et tu planes Visage au soleil Patrick JOQUEL Un bleu formidable Le chat qui tousse, 2011

Un instant seul abandonné par le vent je cherche ma terre Nicolas COTTEN Titré Haïkus Les Carnets du Dessert de Lune, 2009

Page 43: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

42

Au creux du chemin du bout du monde la terre bleue de rien À deux pas

********** Mes pas au creux de l’autre on marche à deux refait le monde Pascal ALBERT Le pied au vert Écho Optique, 2009

EXIL

Je porte en moi Le lourd mystère La peine des exclus À jamais disparus Dans les plaines de l’Est Et les forêts glacées L’oiseau frissonne Et son chant lancinant Exhume les traces du passé Je porte en moi La chaîne des esclaves Titubants et transis Sous le joug récurrent Des haines séculaires Je porte en moi L’incertitude Sans attaches et sans patrie Les racines brisées Par l’absence des morts Sans sépulture L’écriture est un naufrage Où s’écueillent les jours Les pays désertés Et les rêves obscurs Le cheminement perpétuel De la mémoire en exil Mireille PODCHLEBNIK Passeur de sens En forêt, 2007

Dans le métro Les enfants jouent, rient, chantent Font des signes de la main Au train d’à côté Envoient même des baisers Nous, on a les yeux rivés au sol Ou dans un livre Ou sur la ligne à suivre C’est la même chose C’est la même chose qu’on veut Antonello PALUMBO Carnet d’un poète assis sur l’horizon Les Carnets du Dessert de Lune, 2005

Page 44: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

43

POÈME POUR CONTINUER SA ROUTE

L’automobile a pétulé L’automobile a démarré L’automobile a klaxonné L’automobile a dépassé L’automobile a dérapé a capoté Elle est cassée ! … Et j’ai appris à pédaler. Mais le vélo a déraillé ! Et le vélo il a crevé Il a ripé dans le fossé … Il est cassé ! Alors j’ai appris à marcher ! Alain BOUDET Poèmes pour sautijouer Les Carnets du Dessert de Lune, 2010

Pendant les vacances je ne t’enverrai pas de cartes postales du Mont-Saint-Michel d’Arcachon ou de Bastia mais un puzzle Comme ça tu penseras plus longtemps à moi Joël SADELER

Dis, c’est grand comment, la vie ? Éditions du Jasmin, 2011

Le nomade a des attaches élargies Son territoire est plus vaste Que celui de nos habitudes sédentaires. Ici Nous sommes En Berbérie Son chez-lui De cet infini-ci À cet infini-là. Jean FOUCAULT Voyage en Berbérie Éditions du Jasmin, 2006

AU REFUGE

Autour de la table en bois Y’avait un chef Iroquois Deux Bretons qui parlaient pas Trois Chiliens et leur lama Quatre Suisses en chocolat Cinq Suédois dans leur sauna Six Turcs avec de gros bras Sept Flamands et leurs cabas Huit Cubains transis de froid Neuf Italiens un peu las Dix Chinois en pyjama… Mais y’avait plus de place pour moi. Claude BURNEAU Par monts et par mots Soc et Foc, 1997

Page 45: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

44

LES ANNÉES PASSENT

Je ne comprends plus La nature du monde Le tourbillon qui m’emporte Me fait suffoquer Je sens que je suis Au carrefour de plusieurs vérités Les années passent Et toujours rien Je regarde plus loin Je vois la misère L’indifférence et la violence La terre malmenée Perd de sa saveur L’intolérance défigure la ville Les années passent Et toujours rien Pourtant je suis faite Pour me planter dans la terre Pourtant je suis faite Pour boire l’eau du ciel Pourtant je suis faite Pour toucher l’écorce des arbres Les années passent Et toujours rien Nous retrouverons-nous À la frontière du monde ? Nous retrouverons-nous Pour bâtir enfin Pierre par pierre La maison de nos rires d’enfance ? Les années passent Les années passent Véronique TADJO

in Tout l’espoir n’est pas de trop Douze voix francophones Le Temps des Cerises

Ainsi immobile où vas-tu ? Tu as jeté le ciel sur tes épaules et la pluie ne peut rien effacer de ton envie de voyage Là-bas sans doute quelqu'un t’attend ou quelque chose Tu ne saurais dire où tu vas mais tu vas dans tes yeux Tu fixes un soleil rouge à l’horizon iris d’un rêve qui te regarde Alain BOUDET Si peu, mais quelques mots La Renarde Rouge, 2006

C’est comme ça la vie Un jour après l’autre Tu salues les fleurs Tu écris des mots doux Et parfois tu as mal Au cœur et à la tête Mais tu vas au soleil Un pas après l’autre Encore un jour, encore une porte Le monde est fait pour toi Tu ouvres doucement Tu te réveilles Marc BARON

Comme un soleil entre deux pluies Pluie d’étoiles, 2002

Page 46: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

45

Un jour m’a dit la vague Je partirai Dans le sillage des bateaux Je visiterai le monde Les zoulous et les esquimaux Les derviches et les navajos Les mandarins et les gauchos J’avalerai toutes les images Je deviendrai la danse de la houle La vague déferlante Et le raz de marée Mais quand je reviendrai J’emporterai pour seul bagage Le souvenir de cette plage Où des enfants jouaient Jean-Max TIXIER Petites histoires de la mer Pluie d’étoiles, 1999

Je me demande si je suis dans la bonne direction.

*******

Je me demande ce que déclarait le douanier Rousseau quand il passait une frontière.

*******

Je me demande où serait arrivé Christophe Colomb si le continent américain n’avait pas existé.

*******

Je me demande où vont les mouches les jours de grand vent.

*******

Je me demande où va le monde, par quel moyen de transport et à quelle heure on va arriver. Pierre BARACHANT Je me demande Atelier du Hanneton, 2005

Page 47: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

46

D’asile en exil, tu verras bien un jour avant que la lumière ne déserte pointer une terre délivrée des cartes, de la brume et des intempéries, une terre dont tu seras l’inventeur, l’habitant de plein soleil, qui sait, et dont tu célèbreras la douceur des collines et des prairies. À marée basse, au fil de la nuit, tu t’en iras, réconcilié avec les ombres ou les saisons, mais pour quelle odyssée ? Max ALHAU D’asile en exil Voix d’encre, 2007

Arrête et médite Le chemin danse au soleil Laisse-toi danser

********

Sur ma carte Michelin court, en bottes de sept lieues, une coccinelle Jacques FERLAY Équinoxes et solstices L’Amourier, 1998

Je sais que les frontières entre deux milieux sont pleines de mystère : ville et campagne, atmosphère terrestre et milieu interplanétaire, maintenant et tout à l’heure… À partir de quand l’un devient l’autre ?

**********

Je sais que je déteste voir les pigeons s’écarter devant moi dans la rue, que cette manière qu’a l’homme d’occuper tout l’espace est désespérante.

********** Je sais que j’ai mis longtemps à voir qu’insulter l’autre, c’est avant tout s’humilier soi-même : par le mépris qu’on s’inspire après coup. Ita NAGA Je sais Cheyne, 2006

Page 48: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

47

SANS FRONTIÈRES FIXES

Bienheureux les fleuves qui n’ont pas de frontières et bienheureux les vents qui sautent les murailles ; ils sont du pays où ils respirent Bienheureuse la nuit que partout on accueille comme une amie de toujours et bienheureux le chêne qui partage son hasard avec le tremble et l’églantier Ah faites-moi un homme comme une rivière comme un vent comme un arbre jouissant du droit du ciel citoyen du songe où son regard se pose Jean-Pierre SIMÉON Sans frontières fixes Cheyne, 2001

MER

Souvent je sens la mer remonter dans mes veines en grande douceur. C’est bon d’être la mer dont l’âme erre et se perd tout autour de la terre. Yves HEURTÉ Chocolats chauds et autres poèmes à savourer Milan, 2001

VISION

Dans le regard des autres Que de solitude Même si votre chaleur Me touche Mon esprit vagabonde Étrange solitude Dans laquelle je vis Aurélie de la SELLE Sans la miette d’un son Tarabuste, 2001

Page 49: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

48

IN LIMINE

Sur le seuil de ma porte, J’ai souri À l’Étoile du Matin, Au lys de la vallée, À la première hirondelle, Aux feuilles mortes. Sur le seuil de ma porte, J’ai cueilli Le vent froid du nord, Des étincelles de neige, Un croissant de lune, Le cri du coyote. Sur le seuil de ma porte, J’ai mûri, En ramassant mes souvenirs, Le soleil, lentement, a reculé, Debout, face au jour qui meurt, J’ai franchi en souriant, Le seuil de ma porte. Lorraine DIOTTE in

La poésie acadienne Perce-Neige / Les Écrits des Forges, 1999

Laissez-moi retrouver Mes racines mes sources Mes marées et mes fêtes J’ai perdu le feu qui me faisait marcher Jean ZIMMERMANN Car j’ai affaire en ce pays fédérop, 2000

Page 50: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

49

WALDEN PONT

à Henry Miller

Les oies sauvages de l’Ontario ne s’arrêtent pas sur l’étang gelé. Elles croisent au-dessus de Concord le cou tendu vers de plus douces terres, ignorant la cabane du sage qui du seuil les regardait passer. Frédéric-Jacques TEMPLE Poèmes américains Jacques Brémond, 1993

EN MARCHANT VERS LE MONT

TREMBLANT

à Gaston Miron

Je suis lac, je mélèze, je raquette, je harfange, je portage, j’épinette Je boucane, je castore, je saumone, je trainaude, j’omble, je truite, j’ourse, j’orignale, je mirone, je hurone, je rondine, j’érablise, je québèque, le cœur en fête, je marche : là est le Sud, aussi.

Frédéric-Jacques TEMPLE Poèmes américains Jacques Brémond, 1993

FABLE

Le zébubus Transportait Noirs et Blancs Indifféremment Il croisa Un crocomobile Qui en faisait Tout autant Et l’éléphanfare Se mit à chanter Que le monde Était bien fait Maintenant Joël SADELER

Poèmes pour ma dent creuse À Cœur Joie, 1986

Être le marcheur attentif patient à démêler dans la toile du jour les éclats laissés par la chute des étoiles. Christine BILLARD Ronces de douleurs La Renarde Rouge, 2007

Page 51: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

50

LE COSMONAUTE ET SON HÔTE

Sur une planète inconnue, un cosmonaute rencontra

un étrange animal ; il avait le poil ras, une tête trois fois cornue,

trois yeux, trois pattes et trois bras ! — Est-il vilain, pensa le cosmonaute

en s’approchant prudemment de son hôte. Son teint a la couleur d’une vieille échalote,

son nez a l’air d’une carotte. Est-ce un ruminant ? Un rongeur ?

Soudain, une vive rougeur colora plus encor le visage tricorne.

Une surprise sans bornes fit chavirer ses trois yeux.

— Quoi ! Rêvé-je ? dit-il D’où nous vient, justes cieux, ce personnage si bizarre sans crier gare ?

Il n’a que deux mains et deux pieds, il n’est pas tout à fait entier.

Regardez comme il a l’air bête, il n’a que deux yeux dans la tête ! Sans cornes, comme il a l’air sot !

C’était du voyageur arrivé de la terre Que parlait l’être planétaire.

Se croyant seul parfait et digne du pinceau, il trouvait au Terrien un bien vilain museau !

Nous croyons trop souvent que, seule, notre tête est de toutes la plus parfaite.

Pierre GAMARRA in

Le fabuleux fablier Rue du Monde, 2001

Page 52: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

51

RONDE DU MONDE ENTIER

Comptine pour tous les enfants, les Italiens, les Abyssins, les Russes et les Anglais, les Américains, les Français… Enfants noirs comme le charbon, enfants rouges comme la brique, enfants jaunes des rues de Pékin où c’est le soir quand vient notre matin, pour les enfants du cœur des glaces qui dorment sous un tas d’étoffes, pour les enfants de la forêt où les singes font sans cesse la fête, pour les enfants de là-bas, d’à côté, de la campagne ou des cités, pour les enfants du monde entier qui font ensemble une grande ronde en se tenant tous par la main, par-delà les parallèles, par-delà les méridiens. Gianni RODARI De la terre et du ciel

Rue du Monde, 2010

Je mènerai mon enfant Partout où je n’ai pas été. Avec lui sur du marbre blanc, Dans des palais d’Orient Je rirai aux gens de couleur. Et aussi sous le soleil clair Qui éclaire toute la terre Pour ceux qui n’ont jamais pu faire Tout ce que j’ai fait, Pour ceux qui n’ont pas vu Tout ce que j’ai vu. Paul ÉLUARD

in Premiers poèmes pour toute ma vie Milan Jeunesse, 2003

Page 53: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

52

MON RÊVE

Mon rêve serait de me réveiller un matin

voir le bleu du ciel non le rouge des terres

croiser un sourire sans traces de soupirs

Mon rêve

serait qu’un jour en marchant je lève les yeux au ciel

sans avoir peur de le rejoindre ce serait voir le fil du temps s’allonger

sans vouloir l’arrêter

Mon rêve Serait qu’un jour

Toutes les couleurs se ressemblent Ahmed Miloud HOUGGANA Pays de paradoxes Art et culture, 2001

CHEMINEMENT

Je ne parle pas de labyrinthes. Jamais je ne les ai connus. J’ai cherché à marcher en ligne droite. Parfois, comme tout poète, j'ai pris une barque de nuages. Et je suis arrivé à tout et à rien. Marche J’ai marché J’ai marché J’ai marché. J’ai marché J’ai marché J’ai marché. Tant ! qu’aujourd’hui je m’assois sur ce banc sans savoir si je suis arrivé.

Artur Eduardo BENEVIDES in

Poésie du Nordeste du Brésil Cahiers bleus, 2002

Page 54: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

53

Dans une pêche rose, les cercles concentriques du cosmos. Minako TSUJI Des oies sauvages partent vers les bras protecteurs du soleil et de la mer. Midorijo ABÉ Le fil se détend. Maintenant, le cerf-volant Est une portion du ciel. Miyoko HASHIMOTO Dans l’avion, je décolle pour l’envers du ciel bleu d’hiver. Monoko KURADA in Du rouge aux lèvres haïjins japonaises La Table Ronde, 2008

J’ai toujours la nostalgie du lointain mais lorsque j’ai atteint ce lointain le proche est de nouveau trop vaste. Peter SANDELIN in

Poésie de Finlande Le Temps Parallèle, 1989

Page 55: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

54

Je t’apporte le poème cette toute petite maison de nuage blanc où tu peux te chauffer en rentrant ou être seul avec toi-même. Ici on ne met pas la table avec des couverts d’argent. Ici on n’a pas déroulé le tapis rouge. Mais je ne veux pas que tu passes la nuit sans un abri. Janina DEGUTYTÉ in Vingt poètes lituaniens d’aujourd’hui Éditions du Petit Véhicule, 1997

LE PINGOUIN

Sur ton glaçon à la dérive tes rêves sont l’argent et l’or des tempêtes que tu esquives la nuit est ton dernier trésor Tu as perdu le sablier la carte des pays lointains la clarté des lacs oubliés la poudre de perlimpingouin Gérard BIALESTOWSKI La pieuvre bricole et autres poèmes Milan, 2000

Page 56: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

55

GIBRALTAR

Ceux-là ne vont pas à la mer pour la mer pas pour nouer leurs rires à la gerbe des vagues pas pour cuire leur sommeil sur le sable ils sont devant la mer debout sous la nuit sans étoiles comme devant l’abîme derrière eux la terre qu’ils aiment harassée dépourvue où il n’y a de choix qu’entre la mort et la mort devant eux rien la mer immense un abîme à franchir comme on doit bien franchir le désespoir ils savent que leur barque est plus fragile qu’un rêve ils savent que là-bas peut-être à l’autre bout du vide la mer recrachera leur corps sur le sable froid ils savent debout devant la mer Jean-Pierre SIMÉON Ici Cheyne, 2009

Page 57: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

56

49ème VERSET

La révolte Au fond de moi Et j’imagine un monde Où le crime cèdera La place à l’amour Je suis un rêveur Vous savez Je crois qu’un jour La vie sera belle Je crois que les frontières Tomberont Que les hommes vivront En frères Je crois que le monde Vivra de chansons Et de poésie Ah je rêve trop ! Lochard NOËL in Anthologie de la littérature haïtienne Mémoire d’encrier, 2003

CAMÉLÉON

Caméléon, prête-moi ta robe verte

Pour cueillir l’herbe des prairies. Prête-moi ta robe grise

Pour pêcher au fond de l’eau, Prête-moi ta robe bleue

Pour prendre un pan du ciel. Prête-moi ta robe rouge

Couleur de feu, Donne-moi ta robe jaune

Couleur de moisson, C’est elle la plus jolie.

Fatou NDIAYE SOW in Le français est un poème qui voyage anthologie de poèmes francophones Rue du Monde, 2006

Page 58: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

57

De rapides nuages filent vers le sud, me laissant à mes solitudes Jacques CANUT Oiseau migrateur survolant le visage Le village aussi

Est de passage Thierry CAZALS

Accroché au ciel le moulin à vent jamais n’a pu s’envoler Paule DOMENECK Si vaste le ciel si vaste le Saint-Laurent d’un bleu à l’autre Sylvie LANGLOIS Du côté du nord L’impatience des talus En manque de neige Jean-Claude TOUZEIL in Chevaucher la lune Anthologie du haïku contemporain en français David, 2001

Page 59: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

58

PETIT-GRAIN-DE-RIZ

Ils m’appellent Petit-grain-de-riz J’ai la peau jaune ils disent oui jaune comme la fleur qui a bu tous les soleils de l’été J’ai les yeux bridés ils disent oui bridés comme ceux du chat qui voit plus loin que la nuit J’ai un chapeau pointu ils disent oui pointu comme des mains jointes pour faire bonjour merci et bienvenue Je suis un enfant d’Asie ils disent oui d’Asie ou de hasard d’Asie ou pas d’ici ou là comme on est tous grands ou petits un petit grain du grand bol de riz Jean-Pierre SIMÉON in Je suis un enfant de partout Rue du Monde, 2008

Tu suis des yeux la flèche rouge de ta boussole Loin là-bas au-delà de la montagne un éléphant de mer t’attend Tu vois tu n’es pas seul au monde Patrick JOQUEL Le bruit d’un brin de bambou que brise un panda ébrèche l’unibers Gros Textes

Page 60: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

59

BOUSSOLE

Midi montre le Nord Trois heures indiquent l’Est Six heures pointent le Sud Neuf heures précisent l’Ouest Et l’aiguille des secondes, modeste trotteuse, en une seule minute, vous fait le tour du monde. PEF Poëtic-Tac Lo Païs, 1994

PALMIER

Le palmier du Gué *

quel voyageur exotique est venu

le planter là en terre

inhospitalière

l’hiver il faut

l’emmailloter bandes

molletières pour un soldat

du froid

il souffre dans ses feuilles pennées

dan son tronc hérissé dans son cœur d’exilé

et même l’été

il reste palmier

pelé en peine

de degrés.

* le Gué de Launay, hameau de la Sarthe où l’auteur a passé son enfance Joël SADELER Trente-six chants d’arbres Lo Païs, 2000

NAÎTRE PLUS LOIN

J’entrevois d’autres cités D’autres espaces D’autres rivages J’aimerai franchir le temps Naître plus loin Rallier l’avenir J’imagine d’autres chimères D’autres désirs D’autres langages J’aime dérouter les ans Vivre plus loin Ressurgir Andrée CHÉDID Naître plus loin Lo Païs, 1997

Page 61: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

60

LA LUNE DE KIEV

Qui sait si la lune de Kiev est aussi belle que la lune de Rome, qui sait si elle est la même ou plutôt sa sœur… « Je suis unique et partout la même, proteste la lune, je ne suis pas qu’un bonnet de nuit posé sur ta tête. Quand je voyage ici, je répands la lumière en veux-tu en voilà, par ici et par là, depuis l’Inde jusqu’au Pérou, du Tibre à la Mer Morte. Et mes rayons voyagent du pôle Sud au pôle Nord sans aucun passeport. » Gianni RODARI De la terre et du ciel Rue du Monde, 2010

Un tout petit secret fait le tour de la terre il traverse les murs les collines les rivières jusqu’aux oreilles d’Arthur c’est mon secret voyageur qui cherche ton petit cœur Françoise LISON-LEROY Les bretelles du crayon LoPaïs / Éditions du Rocher, 2004

Page 62: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

61

UN RÊVE

Si tous les mots du monde voulaient se donner la main

peut-être qu’il y aurait moins de maux à la fin.

François DAVID Les croqueurs de mots Lo Païs / Éditions du Rocher, 2004

LE POÈTE

Jamais jamais je ne pourrai dormir tranquille aussi longtemps que d’autres n’auront pas le sommeil et l’abri ni jamais vivre de bon cœur tant qu’il faudra que d’autres meurent qui ne savent pas pourquoi J’ai mal au cœur mal à la terre mal au présent Le poète n’est pas celui qui dit Je n’y suis pour personne Le poète dit J’y suis pour tout le monde Ne frappez pas avant d’entrer Vous êtes déjà là Qui vous frappe me frappe J’en vois de toutes les couleurs J’y suis pour tout le monde Claude ROY in Paroles des poètes d’aujourd’hui Albin Michel, 1997

Page 63: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

62

Ne cherche pas l’ailleurs Dans l’ailleurs Mais tout près Tout près d’ici Frère Bernard PERROY Cœur à cœur Al Manar, 2006

Je vous écris parce que vous êtes loin, là-bas, de l’autre côté des prairies, des collines, de l’autre côté des montagnes, de l’autre côté du vent, de l’autre côté de l’horizon, là-bas, plus loin que les nuages qui déferlent jusqu’au fond de mon silence. … Je vous vois cependant, là-bas, dans vos villes ou vos villages, de l’autre côté de l’horizon Dans les lumières d’un autre ciel, dans la lumière, peut-être de l’espoir, je ne sais, enfin, dans votre vie. Et c’est à vous que j’écris parce que vous êtes loin Et que le soir revient et puis voici la nuit qui tourne et vire et erre Comme moi qui erre, vire, tourne Sans plus savoir le sens des mots le sens des choses Et qui suis-je donc au bord du soir qui pleure ? Jean ZIMMERMANN Car j’ai affaire en ce pays Fédérop, 2000

Les cerfs-volants soudainement

ont coupé leurs fils envolés migrateurs aux rives de soleil.

J’attends qu’ils reviennent

François DAVID Pommes de pin

Lo Païs / Éditions du Rocher, 2004

Page 64: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

63

LE VOYAGEUR

De Paris à Bruxelles Par ailes d’hirondelle Et à dos de chameau, Bruxelles-Concarneau, Concarneau-Alicante Sur une pie qui chante, Alicante-Amsterdam Sur un hippopotame, Sur un rhinocéros, Amsterdam-Saragosse Et en catamaran De Lisbonne au Liban, À pied ou à moteur, De Madrid à Madère, Je suis le voyageur Des rêves sans frontières. Pierre CORAN J’y suis, j’y rêve Lo Païs / Éditions du Rocher, 2004

LE COQUILLAGE

Sur la plage

un enfant noir m’a dit « il est à toi ce coquillage ? » « Pas à moi, à tous, à toi si tu veux. » Heureux il s’est enfui serrant son trésor, dans un au revoir. Michelle DAUFRESNE Envol Lo Païs, 2000

Page 65: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

64

EXCEPTION

Tous parviennent à destination Le fleuve, le train La voix, le navire La lumière, les lettres Le télégramme de condoléances L’invitation au dîner La valise diplomatique Le vaisseau spatial Tous parviennent à destination Sauf… mes pas vers mon pays Mourid Al-BARGHOUTI in Anthologie de la poésie palestinienne contemporaine Le Temps des Cerises / Maison de Poésie Rhône-Alpes

Enfant d’Afrique mon p’tit copain as-tu du mil as-tu du pain ? Enfant d’Asie aux yeux noisette le p’tit copain de ma planète as-tu du riz dans ton assiette ? Xavier BOUGUENEC Y’a plus d’enfants ! Soc et Foc, 2006

Petit gars

d’où vient ton chocolat d’où vient ton tapioca d’où viennent tes bananes

petit gars ? Connais-tu la savane les déserts, les forêts les banquises ? C’est sous ton ciel, tout ça,

petit gars

Xavier BOUGUENEC Y’a plus d’enfants ! Soc et Foc, 2006

Page 66: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

65

TEMPLE DU SOMMET

Temple du sommet, la nuit : Lever la main et caresser les étoiles. Mais chut ! baissons la voix : Ne réveillons pas les habitants du ciel. LI PO

in Poésie chinoise Albin Michel, 2001

Nuage dis-moi encore les belles soirées d’été le vent doux des genêts les pétales au fond de la gorge le duvet dans les yeux les fruits sucrés du temps Dis-moi les pays traversés le chant des oiseaux des îles Dis-moi les oies sauvages qui passent dans mon cœur et partent vers le sud Michel COSEM Voyages d’hirondelles Pluie d’étoiles, 2004

LA FLAMME

Petits enfants de la terre, il faut apprendre à rêver pour que brûle sur vos paupières une flamme en liberté : oiseau de feu, de clarté qui s’envole, enchante l’air et fait le tour de la terre. Jean JOUBERT La maison du poète Pluie d’étoiles, 1999

Nous irons ensemble dans les galaxies bleues dans les soleils de la magie dans les grands bras de la fraternité Nous planterons des champs de blé et ferons danser les lacs et les cascades Nous mélangerons les colombes Michel COSEM, Lisières futiles et rieuses, Lo Païs, 2000

Page 67: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

66

MONSIEUR TOUT LE MONDE

Monsieur Tout le Monde ne sourit pas

à n’importe qui. N’importe qui

c’est un peu moi Quand je croise Monsieur Tout le Monde.

Je dis : bonjour ! Je crie : ça va ?

Monsieur Tout le Monde Dans l’escalier

Ne me voit pas.

Un jour, je lui dirai que même

si je ne suis pas d’ici, mes dents, comme les siennes, sont blanches quand je souris.

Carl NORAC Petites grimaces et grands sourires

Lo Païs / Éditions du Rocher, 2006

Le chat poursuit la souris Le tigre la gazelle La mangouste le cobra Et le chasseur le lièvre affolé Partout pareil Sur toute la terre Les bêtes poursuivent d’autres bêtes François DAVID Le calumet de la paix Lo Païs, 2002

Page 68: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

67

MONSIEUR Z

— Enfin seul !

dit Monsieur Z en enfermant dehors le monde entier, à double tour. Il tira même le verrou. Il alluma la lumière, il alluma la télévision, il s’installa dans son fauteuil, et du téléviseur le monde se répandit sur le plancher, remplit la pièce, les meubles, les tiroirs. Mais Monsieur Z dormait et ne vit rien du tout. Gianni RODARI La tête du clou Lo Païs, 1996

Nous crions de colère de dégoût de détresse Et puis nous nous taisons par habitude ou par paresse Le vent mieux que nos voix bouleverse le monde. Alain BOUDET Ici là, sur le rivage La Renarde Rouge, 2010

Page 69: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

68

CE QUE DIT LE TAM-TAM

Ce que dit le tam-tam Est au fond de mon cœur Le tam-tam chante L’arrivée de la pluie Le tam-tam chante Le passage des perroquets Le tam-tam chante Le départ des combattants Le tam-tam chante La naissance des jumeaux Ce que dit le tam-tam Est au fond de mon cœur Le tam-tam chante La fleur qui naît et meurt Sans bruit Le tam-tam chante L’aube des temps nouveaux Le tam-tam chante La terre nourrissante Le tam-tam chante Le ciel fleuri d’étoiles Ce que dit le tam-tam Est au fond de mon cœur Le tam-tam chante La solitude de l’exilé Le tam-tam chante Le lever du soleil Le tam-tam chante La vie qui s’ouvre à l’enfance Le tam-tam chante Ce que dit mon cœur Tout bas tout bas.

Pierre-Edgar MOUNDJEGOU MANGANGUE in Le français est un poème qui voyage anthologie de poèmes francophones Rue du Monde, 2006

Page 70: Partout, la poésie. - printempspoetique.free.frprintempspoetique.free.fr/IMG/File/Partout/ANTHOLOGIE_Partout_la... · vivre parmi des gens qui ne sont pas les nôtres, fredonner

69

Allonnes, La Suze, Douarnenez Juillet-septembre 2012

Perché sur ton planisphère tu éblouis d’imaginaire un ou deux lampadaires

ils écoutent alors les degrés de ta boussole

et toi pour mieux savourer tes trésors

tu fermes les yeux tu t’en vas frotter la terre des Amériques

Patrick JOQUEL Perché sur ton planisphère

Lo Païs, 2001