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Pour citer cet article : Costes V. Pathologie buccale et stomatologique. Cas n o 2 : améloblastome unikystique avec contin- gent plexiforme intramural. Annales de pathologie (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.annpat.2014.03.010 ARTICLE IN PRESS Modele + ANNPAT-913; No. of Pages 5 Annales de pathologie (2014) xxx, xxx—xxx Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com HISTOSÉMINAIRE DE LA SOCIÉTÉ FRANC ¸AISE DE PATHOLOGIE Pathologie buccale et stomatologique. Cas n o 2 : améloblastome unikystique avec contingent plexiforme intramural Oral and stomatological pathology. Case 2: Unicystic ameloblastoma with a plexiform tumoral contingent Valérie Costes Département de biopathologie, CHU de Montpellier, 34250 Montpellier cedex 5, France Accepté pour publication le 24 mars 2014 Renseignements cliniques Femme de 28 ans, kyste sur la 48 incluse. Diagnostic Améloblastome unikystique avec contingent plexiforme intramural. Description du cas Kyste centimétrique uniloculaire limité par un épithélium de 5 à 15 couches d’épaisseur (Fig. 1). La couche basale montre un alignement palissadique des noyaux avec polarité inversée (Fig. 2). L’épaisseur de l’épithélium est constituée de cellules stellaires lâches avec, en surface, des cellules luminales plus éosinophiles (Fig. 3). Présence d’un contingent tumoral d’architecture plexiforme dans la paroi du kyste (Fig. 4). Adresse e-mail : v-costes [email protected] http://dx.doi.org/10.1016/j.annpat.2014.03.010 0242-6498/© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Pathologie buccale et stomatologique. Cas no 2 : améloblastome unikystique avec contingent plexiforme intramural

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ARTICLE IN PRESSModele +ANNPAT-913; No. of Pages 5

Annales de pathologie (2014) xxx, xxx—xxx

Disponible en ligne sur

ScienceDirectwww.sciencedirect.com

HISTOSÉMINAIRE DE LA SOCIÉTÉ FRANCAISE DE PATHOLOGIE

Pathologie buccale et stomatologique.Cas no 2 : améloblastome unikystique aveccontingent plexiforme intramural

Oral and stomatological pathology. Case 2: Unicysticameloblastoma with a plexiform tumoral contingent

Valérie Costes

Département de biopathologie, CHU de Montpellier, 34250 Montpellier cedex 5, France

Accepté pour publication le 24 mars 2014

Pour citer cet article : Costes V. Pathologie buccale et stomatologique. Cas no 2 : améloblastome unikystique avec contin-gent plexiforme intramural. Annales de pathologie (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.annpat.2014.03.010

Renseignements cliniques

Femme de 28 ans, kyste sur la 48 incluse.

Diagnostic

Améloblastome unikystique avec contingent plexiforme intramural.

Description du cas

Kyste centimétrique uniloculaire limité par un épithélium de 5 à 15 couches d’épaisseur(Fig. 1). La couche basale montre un alignement palissadique des noyaux avec polaritéinversée (Fig. 2). L’épaisseur de l’épithélium est constituée de cellules stellaires lâchesavec, en surface, des cellules luminales plus éosinophiles (Fig. 3). Présence d’un contingenttumoral d’architecture plexiforme dans la paroi du kyste (Fig. 4).

Adresse e-mail : v-costes [email protected]

http://dx.doi.org/10.1016/j.annpat.2014.03.0100242-6498/© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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2 V. Costes

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Figure 3. Améloblastome unikystique : l’épaisseur del’épithélium est constituée de cellules stellaires lâches avecen surface des cellules luminales plus éosinophiles.

igure 1. Améloblastome unikystique : kyste centimétrique uni-oculaire limité par un épithélium de 5 à 15 couches d’épaisseur.

Pour citer cet article : Costes V. Pathologie buccale et stomatologique. Cas no 2 : améloblastome unikystique avec contin-gent plexiforme intramural. Annales de pathologie (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.annpat.2014.03.010

nicystic ameloblastoma: centimetric uniloculated cyst lined by a to 15 layers thick epithelium.

linique et épidémiologie

’améloblastome intraosseux ou central représente la troi-ième tumeur odontogène après la tumeur tératokystiquedontogène et l’odontome. Il ne doit pas être confondu avec’améloblastome extraosseux périphérique souvent gingivalui a un bon pronostic.

La forme unikystique ou le type plexiforme unikystiquepparaît comme une image claire de la mandibule pos-érieure souvent associée à une dent incluse (dent deagesse), découvert le plus souvent au cours de la secondeu troisième décade (Fig. 5). Il représente 10 à 15 % des amé-oblastomes et survient chez des sujets plus jeunes que laorme solide (quatrième et cinquième décade).

escription histologique [1,2]

yste uniloculaire limité par 5 à 15 couches d’un épithéliumont la couche basale montre un alignement palissadiquees noyaux avec inversion du pôle des cellules basales

igure 2. Améloblastome unikystique : la couche basale montren alignement palissadique des noyaux avec polarité inversée.nicystic ameloblastoma: basal layer exhibit palissading cells witheverse nuclear polarization.

Unicystic ameloblastoma: epithelium thickness is composed of stel-late reticulum-like cells and eosinophilic acanthomatous luminalcells.

Figure 4. Améloblastome unikystique : présence d’un contingenttumoral d’architecture plexiforme dans la paroi du kyste.Unicystic ameloblastoma: presence of a plexiform tumoral contin-gent in the wall of the cyst.

Figure 5. Améloblastome unikystique : image claire bien limitéede la mandibule postérieure droite.Unicystic ameloblastoma: unilocular radiolucency of the right pos-terior mandibule.

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Pathologie buccale et stomatologique. Cas no 2

9301/0 ;

Figure 6. Améloblastome unikystique : forme intraluminale avecprésence de projections d’épithélium améloblastique dans lalumière du kyste.Unicystic ameloblastoma: intraluminal pattern with ameloblasticepithelium projections in the light of the cyst.

Figure 7. Améloblastome unikystique : une forme luminale pure.Unicystic ameloblastoma: pure luminal pattern.

(les noyaux sont alignés au pôle supérieur) (Fig. 2). Dansl’épaisseur de cet épithélium les cellules paraissent stel-laires et les cellules luminales sont volontiers éosinophilesavec un aspect acanthomateux (Fig. 3).

On décrit trois types d’améloblastome unikystique :

Pour citer cet article : Costes V. Pathologie buccale et stomatogent plexiforme intramural. Annales de pathologie (2014), http

une forme intraluminale avec présence de projectionsd’épithélium améloblastique dans la lumière du kyste(Fig. 6), une forme luminale (Fig. 7) et une forme plexiformeou intramurale qui associe en plus une prolifération plexi-forme d’épithélium améloblastique dans la paroi du kyste(Fig. 8).

Les remaniements inflammatoires peuvent altérer lesaspects typiques et peuvent amener à tort au diagnostic dekyste inflammatoire radiculaire.

Par principe, devant toute lésion kystique des mâchoireson recherchera systématiquement, une composante amé-loblastique. L’immuno-histochimie peut être une aide audiagnostic lorsqu’elle est positive. Une positivité incons-tante des cellules basales avec l’anticorps anti-CD56 et descellules stellaires avec l’anticorps anti-calrétinine a étédécrite (Fig. 9) [3,4].

Diagnostic différentiel

Le principal problème est de méconnaître l’épithéliumaméloblastique devant d’importants remaniements inflam-matoires qui modifie l’aspect typique.

PRESS3

Figure 8. Améloblastome unikystique : forme intramurale quiassocie en plus une prolifération plexiforme d’épithélium amélo-blastique dans la paroi du kyste.Unicystic ameloblastoma: intramural pattern: presence of an endo-phytic plexiform epithelial proliferation.

Lorsque le revêtement est clairement de type amélo-blastique on peut discuter la tumeur odontogène kystiquecalcifiante ou kyste de Gorlin.

La tumeur odontogène kystique calcifiante (TOKC),encore appelée kyste de Gorlin, kyste odontogène calci-fiant à cellules fantômes, tumeur dentinogène à cellulesfantômes, kyste odontogène à cellules fantômes calcifié, estune lésion rare qui représente moins de 1 % des kystes etappartient au groupe des tumeurs odontogènes à cellulesfantômes. Elle correspond à une tumeur mixte associant uncontingent épithélial et mésenchymateux [5].

Ce groupe de lésions « odontogènes à cellules fantômes »semble hétérogène.

En effet, le comportement clinique en est des plus varia-bles, de la lésion bénigne à la lésion métastasiante, avec desformes intermédiaires à agressivité locale. Pour l’instant, ilest difficile de préciser s’il s’agit d’entités différentes ou deformes évolutives d’une même tumeur :• la « forme kystique » à évolution bénigne, est individuali-

sée dans la classification OMS de 2005, sous l’appellation« tumeur odontogène kystique calcifiante » ICD-O

logique. Cas no 2 : améloblastome unikystique avec contin-://dx.doi.org/10.1016/j.annpat.2014.03.010

• la « forme solide », qui correspond à un néoplasme plusagressif, est individualisée sous le terme de « tumeur den-tinogène à cellules fantômes » ICD-O 9302/0 ;

• enfin, lorsque la malignité peut être démontrée, la lésionest appelée « carcinome odontogène à cellules fantômes »ICD-O 9302/3.

La TOKC est diagnostiquée à tout âge, avec unmaximum de fréquence dans la deuxième et troisièmedécade et une légère prédominance masculine. Les formesagressives sont observées plus tard, autour de la cinquan-taine.

Il existe des formes intraosseuses centrales et desformes périphériques, extra-osseuses gingivales. Les pre-mières touchent avec une fréquence à peu près égale,mandibule et maxillaires. Elles siègent électivement dansla région canine et prémolaire. Les secondes se présententcomme un nodule gingival exophytique.

L’image radiologique varie du simple kyste à la tumeurentièrement solide, avec dans tous les cas, des calcifica-tions. Dans un tiers des observations, on visualise une dentincluse.

Dans la variante kystique la cavité est bordée par un épi-thélium odontogène, de 4 à 10 cellules d’épaisseur, dont la

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4 V. Costes

Figure 9. Améloblastome unikystique : l’immuno-histochimie peut être une aide au diagnostic lorsqu’elle est positive. Une positivitéinconstante des cellules basales avec l’anticorps anti-CD56 et des cellules stellaires avec l’anticorps anti-calrétinine a été décrite.Unicystic ameloblastoma: immunochemistry can contribute to the diagnosis when positive. A basal cells positivity with anti-CD56 and astellar cells positivity with anti-calretinine have been described.

couche basale est faite de cellules cubo-cylindriques avecdifférenciation améloblastique. Les couches supérieuresressemblent au réticulum stellaire. La présence de cellulesfantômes est caractéristique (Fig. 10). Ces cellules épithé-liales, momifiées par une kératinisation massive, ont unaspect globuleux, avec un cytoplasme acidophile à contoursnets, des noyaux clarifiés ou condensés, parfois absents,l’ensemble rappelant le pilomatrixome cutané (Fig. 11). Lescalcifications sont constantes mais en nombre variable.

L’épithélium repose sur un tissu fibreux, parfois inflam-matoire, qui peut renfermer des micro-kystes satellites etdes îlots de dentine dysplasique (dentinoïde).

Figure 10. Tumeur odontogène kystique calcifiante (kyste de Gor-lin) : kyste limité par un épithélium odontogène de 4 à 10 cellulesd’épaisseur dont la couche basale est faite de cellules cubo-cylindriques avec différenciation améloblastique. Les couchessupérieures rappellent le réticulum stellaire et renferment denombreuses cellules momifiées caractéristiques avec parfois descalcifications.Calcifying cystic odontogenic cyst (Gorlin cyst): cyst lined by a 4 to10 layers thick squamous or stellate epithelium with slight palis-sading of basal cells. Presence ghost cells is characteristic withsometimes calcifications.

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igure 11. Tumeur odontogène kystique calcifiante (kyste deorlin) : il s’agit d’une prolifération mixte épithéliale et mésen-hymateuse avec dépôts de dentine dysplasique (dentinoïde) auontact de l’épithélium.

ogique. Cas no 2 : améloblastome unikystique avec contin-://dx.doi.org/10.1016/j.annpat.2014.03.010

alcifying cystic odontogenic cyst (Gorlin cyst): it is a mixed epi-helial and mesenchymal tumor with juxtaepithelial dentinoideposition.

La TOKC peut être associée à d’autres tumeurs odonto-ènes : odontome (20 % des cas), améloblastome, tumeurdénomatoïde odontogène. . .

La majorité des tumeurs, centrales ou périphériques,ont facilement énucléées et ne récidivent pas.

raitement et évolution

la différence des formes solides qui nécessitent uneésection monobloc les formes kystiques d’améloblastomeeuvent être traitées par énucléation. La forme unikystiqueans contingent intramural a un taux de récidive faible auxlentours de 6 % après énucléation. S’il existe un contingentntramural, le risque de récidive est de 35 % et il est doncmportant de le signaler.

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Pathologie buccale et stomatologique. Cas no 2

POINTS IMPORTANT À RETENIR

• L’améloblastome unikystique présente untaux de récidive beaucoup plus faible quel’améloblastome solide et peut donc être traitépar énucléation simple.

• Le risque est de méconnaître l’épithélium amélo-blastique en cas de remaniements inflammatoiresimportants.

• L’association épithélium améloblastique, cellulesfantômes, calcifications et dentine doit faireporter le diagnostic de tumeur odontogènekystique calcifiante.

Déclaration d’intérêts

L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en rela-tion avec cet article.

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Références

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[2] Philippsen HP, Reichart PA. Unicystic ameloblastoma. Areview of 193 cases from the literature. Oral Oncol 1998;34:317—25.

[3] Cairns L, Naidu A, Robinson CM, Sloan P, Wright JM, Hunter KD.CD56 (NCAM) expression in ameloblastomas and other odonto-genic lesions. Histopathology 2010;57:544—8.

[4] Coleman H, Altini M, Ali H, Doglioni C, Favia G, Maiorano E. Useof calretinin in the differential diagnosis of unicystic ameloblas-tomas. Histopathology 2001;38:312—7.

[5] Regezi JA. Odontogenic cysts, odontogenic tumors, fibroos-seous, and giant cell lesions of the jaws. Mod Pathol2002;15:331—41.