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54 septembre 2009 COLLECTIONS /CARTES A JOUER Les collectionneurs de cartes à jouer sont rarement des joueurs. C’est sans doute le mystère entourant l’origine des cartes qui captive ces collectionneurs. Mais les cartes ne sont pas innocentes. On y laisse son argent et parfois un peu de son âme… Par Benjamin Grandchamp L es modèles anciens associent finesse du tra- vail, beauté du décor et diversité des thèmes. Pour collectionner, il faut donc bien cibler son sujet. Les collections thématiques sont rares : certaines tour- nent autour du tarot, de la cartomancie, des jeux ré- gionaux. D’autres, notamment en Belgique, ne s’inté- ressent qu’aux jokers. Mais la majorité des collectionneurs couvrent toutes les époques et les types de jeux de cartes, à portraits standard (desti- nés au jeu) ou de fantaisie. D’où viennent les cartes ? De la Chine à l’Inde en pas- sant par les Sarrasins, selon certains historiens… C’est sans doute l’un des plus anciens jeux au monde. Il Tarot divinatoire « Grand Etteilla », type III, grand oracle des Dames, Delarue, Paris, fin du XIX e , chromolithographie. Doc. M e Tajan. Jeu des quatre continents, Francfort, 1885. Vendu par la SVV Lelièvre, Maiche, Paris, à Chartres (28), le 19 novembre 2005. Doc. SVV Lelièvre, Maiche, Paris. Jeu de cartes ovales de salon, Leipzig, 1885. Vendu par la SVV Lelièvre, Maiche, Paris, à Chartres (28), le 19 novembre 2005. Doc. SVV Lelièvre, Maiche, Paris. Jeu des drapeaux, Paris, 1816. Vendu par la SVV Lelièvre, Maiche, Paris, à Chartres (28), le 19 novembre 2005. Doc. SVV Lelièvre, Maiche, Paris. Battez, coupez, servez 254_54_59_CARTES_BAT 20/08/09 16:25 Page 54

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Collection, art, antiquités, brocante

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COLLECTIONS/CARTES A JOUER

Les collectionneurs de cartes à jouer sontrarement des joueurs. C’est sans doute lemystère entourant l’origine des cartes quicaptive ces collectionneurs. Mais les cartesne sont pas innocentes. On y laisse sonargent et parfois un peu de son âme…

Par Benjamin Grandchamp

Les modèles anciens associent finesse du tra-vail, beauté du décor et diversité des thèmes.Pour collectionner, il faut donc bien ciblerson sujet.

Les collections thématiques sont rares : certaines tour-nent autour du tarot, de la cartomancie, des jeux ré-gionaux. D’autres, notamment en Belgique, ne s’inté-ressent qu’aux jokers. Mais la majorité descollectionneurs couvrent toutes les époques et lestypes de jeux de cartes, à portraits standard (desti-nés au jeu) ou de fantaisie.D’où viennent les cartes ? De la Chine à l’Inde en pas-sant par les Sarrasins, selon certains historiens… C’estsans doute l’un des plus anciens jeux au monde. Il

■ Tarot divinatoire « Grand Etteilla », type III, grand oracle des Dames,Delarue, Paris, fin du XIXe, chromolithographie. Doc. Me Tajan.

■ Jeu des quatre continents, Francfort, 1885. Vendupar la SVV Lelièvre, Maiche, Paris, à Chartres (28), le19 novembre 2005. Doc. SVV Lelièvre, Maiche, Paris.

■ Jeu de cartes ovales de salon, Leipzig, 1885. Vendu parla SVV Lelièvre, Maiche, Paris, à Chartres (28), le

19 novembre 2005. Doc. SVV Lelièvre, Maiche, Paris.

■ Jeu des drapeaux, Paris, 1816. Vendu par la SVV Lelièvre, Maiche, Paris, àChartres (28), le 19 novembre 2005. Doc. SVV Lelièvre, Maiche, Paris.

Battez, coupez, servez

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proviendrait de Syrie ou d’Egypte. Une autre pisteconduit vers l’Asie. On peut même voir dans le jeu decartes la combinaison subtile des jeux de dés etd’échecs. En tout cas, l’ouvrage le plus ancien où il estquestion de cartes est un manuscrit italien de Pipozzodi Sandro, Trattato del governo della famiglia, daté de 1299.Et dans un manuscrit français de la fin du XIVe siè-cle, Le roman du roi Mahadus, un roi est représentéjouant aux cartes avec trois seigneurs, alors quetrois autres compères les observent.

La folle histoire des cartesLes premières cartes « réelles » sont répertoriéesaux alentours de 1360. Dès cette époque, l’icono-graphie a tendance à se standardiser – pour éviterde distraire l’attention des joueurs, pense-t-on.Mais c’est au XIVe siècle que les jeux de cartes com-mencent à généraliser en Europe. Chaque pays lespratique à sa manière. Les Italiens jouent à la « trap-pola », venue sans doute d’Orient, et le tarot suitde près (voir encadré). Les Français inventent « le pi-quet », les Espagnols « el-hombre », les Anglais le

« whist » et les Allemands le « lansquenet ». On jouepartout, et de plus en plus. A tel point que l’Eglise etle roi s’en émeuvent : en 1254, Louis IX (1214-1270), lefutur Saint Louis, décide d’interdire à tous ses sujetsde jouer aux cartes et aux dés. Mais on continuera àjouer malgré tout, puisque plus d’un siècle plus tard,en 1397, le prévôt de Paris promulgue une ordonnancequi interdit aux gens de métier de jouer aux cartes lesjours ouvrables !Au XVIIe siècle, on s’enthousiasme pour un nouveau jeuparisien, apparu en 1650, sur lequel les rois sont bap-tisés Alexandre, César, Charles (comme Charlemagne)et David, des noms qui évoquent les royaumes grec, ro-main, chrétien et hébreu. Chez les reines, Pallas estJeanne d’Arc, et Rachel devient Agnès Sorel, en l’hon-neur de la Dame de Beauté de Charles VII. Le valet de

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Critères de reconnaissanceLa mention de l’éditeur suppose que les cartessont postérieures à 1850. Au XIXe et auXXe siècles, les principaux éditeurs sont Philibert,Grimaud, Camoin, Gibert et Draeger. PourThierry Depaulis, c’est la production françaisedes années 1950 à 1970 qui incite le plusfortement à chiner et à collectionner : « Lesystème du contrôle fiscal des cartes ayant étédémantelé en 1945 et les contraintesréglementaires supprimées, on assiste à unfoisonnement d’initiatives. Quantité d’éditeursvoient le jour, créant des cartes commé-moratives, publicitaires ou artistiques. Certainsfont travailler des dessinateurs, affichistes etpeintres comme Cassandre, Dali, Léonor Fini,qui renouvellent le graphisme traditionnel desfigures de cartes ». La production de Philibert,

notamment, entre 1955 et 1968, est recherchée descollectionneurs. Il confie à Dubout l’illustration dejeux de cartes sur les thèmes des Trois Mousquetaireset des Pin-ups. Par ailleurs, le grand concours d’unautre éditeur, Grimaud, favorise, de 1973 à 1975,l’apparition sur le marché de nombreux jeux dequalité.

■ Jeu de l’Ancien Régime « au portrait de Paris », Pierre Lebrun,Paris, 1751-1771, gravure sur bois, couleurs au pochoir. Doc. Me Tajan.

■ Jeu au portrait de Guyenne, Hebrart, Toulouse, XVIIIe,gravure sur bois, couleurs au pochoir, 30/32 cartes.

Doc. Me Tajan..

■ Portraits fantaisie français : cartes indiennes, B.P. Grimaud, 1900,chromolithographie. Doc. Me Tajan.

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carreau prend le nom de Lancelot, le chevalier de laTable ronde, et le valet de pique est Lahire, le fidèlecompagnon de Jeanne d’Arc. Les cartes ont un tel im-pact que le sévère Mazarin commande une suite dejeux destinés à l’éducation du jeune Louis XIV. Plustard, on s’inspire des fables de La Fontaine. D’autres ser-vent à apprendre les blasons. Tout est joué et les car-tes s’ornent de portraits. Louis XIV y devient un des roiscélèbres et Marie-Antoinette une bien jolie reine.Entre le XVe et le XVIe siècle, les jeux sont pour la plu-part gravés sur bois et coloriés au pochoir. Une cartegravée sur métal et datée du XVe siècle est évidemmentrarissime. Considérée comme une petite estampe an-cienne, sa cote peut s’élever à 15 000 euros. Au XVIIIe siè-cle, les jeux sont gravés sur cuivre, et désormais moinsrares que ceux des siècles précédents. Les amoureux

de la gravure sur cuivre apprécient l’exactitude et laprécision dans la réalisation de ces cartes.

Quand l’Etat rafle la miseC’est sans doute sous Charles VII (1403-1461), en pleineGuerre de Cent ans, que les « enseignes françaises »– trèfle, carreau, cœur, pique – décorent les cartes.Les artisans sont libres de produire. Enlumineurs, ima-giers ou miniaturistes reproduisent les portraits desgrands de ce monde sur ces petits morceaux de carton.Mais à partir de 1583, ils doivent réaliser leurs cartesselon les codes en vigueur, parce qu’ils doivent payer« l’impôt fermier ». Pas question de lancer un modèleinconnu : l’Etat oblige les cartiers à se servir d’un mêmemoule pour chaque région, neuf au total.L’attitude conventionnelle des personnages, leurs pos-tures stéréotypées s’expliquent par la mise en placed’une réglementation. En 1701, Louis XIV institue un impôt et, pour mieux les contrôler, impose aux cartiers un patron uniforme, dans chaque région. Pour Thierry Depaulis, président de l’Association des

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■ Jeu allemand, deux têtes, 1870. Vendu par la SVV Lelièvre, Maiche,Paris, à Chartres (28), le 19 novembre 2005. Doc. SVV Lelièvre, Maiche, Paris.

■ Pochoirs, portraits en pied, fin XVIIIe siècle. Ph. P. Box.

■ Jeu au portrait du Languedoc, anonyme, 1re moitié du XVIIIe,gravure sur bois, couleurs au pochoir. Doc. Me Tajan..

■ Jeu de Skat du XXe siècle, Allemagne, 1920. Vendu par laSVV Lelièvre, Maiche, Paris, à Chartres (28), le 19 novembre

2005. Doc. SVV Lelièvre, Maiche, Paris.

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La valeur des cartesLa valeur d’un jeu de cartes est fonction de laqualité d’impression, la fraîcheur des couleurs,l’intérêt du graphisme, le bon état de conservation,la présence ou non de l’étui, l’ancienneté… Tousces critères comptent dans l’évaluation d’un jeu.Mais on ne lui demande pas d’être complet quandil date des XVIIe et XVIIIe siècles.On trouve des jeux de cartes anciens de500 euros à plus de 10 000 euros. Il est doncdifficile de donner des prix exacts, chaque jeu decartes, qu’il soit de l’Ancien Régime ou dessinépar Robert Delaunay, ayant une valeur propre.Tout juste peut-on indiquer des fourchettes de prixpour montrer que ces pièces de collection restentencore largement accessibles : un jeu trèsrégional comme celui de l’aluette, daté du

XIXe siècle, peut se trouver entre 100 et 600 euros. Destarots standard de la même époque (type Marseille ouBesançon) s’échangent entre 150 et 3 000 euros. Desportraits régionaux de l’Ancien Régime connaissentaussi des variations pouvant aller de 200 euros à plusde 1 000 euros. Des jeux fantaisie, à caractèrepublicitaire, se vendent entre 50 et 1 000 euros, selonl’époque, la rareté, l’intérêt graphique…collectionneurs de cartes et tarots

(A.C.C.A.R.T.), « c’est l’horreur absoluedans le manque de créativité ».Les jeux de l’Ancien Régime pré-sentent une grande variété de « por-traits » caractéristiques des neuf ré-gions de l’époque. Les cartes deProvence ont un petit format. ALyon, les rois portent leur sceptresur l’épaule, à l’exception du roi detrèfle, qui tient une hachette. Ladame de cœur a la poitrine nue etun corps recouvert d’écailles, tan-dis que les valets de pique et detrèfle ont les cheveux nattés. Le roide carreau du jeu du Languedocporte un sceptre surmonté d’uncroissant et tient une bourse. Le jeude Bordeaux a son valet de pique

qui se déhanche, avec unlion sur son plastron.Toutefois, durant la périoderévolutionnaire, à partir de1794, l’abolition des corpo-rations de métiers et la sup-pression des taxes ont in-cité les cartiers à se libérer

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■ Dong Guan Pai, Hong-Kong, vers 1960.Vendu par la SVV Lelièvre, Maiche, Paris,à Chartres (28), le 19 novembre 2005. Doc. SVV Lelièvre, Maiche, Paris.

■ Cartes faisant partie d’un lot de 32 têtes révolutionnairesau portrait : Minot, Lefer, Pinault et d’autres, Paris, 1794, gravure sur bois,

couleurs au pochoir. Doc. Me Tajan.

■ Jeu de propagande politique,cartier et lieu anonymes, vers 1900.Vendu par la SVV Lelièvre, Maiche,

Paris, à Chartres (28), le 19 novembre2005. Doc. SVV Lelièvre, Maiche, Paris.

■ Moule de tarots Nicolas Conver,1760. Les experts reconnaissent queles traits gravés par Nicolas Conver surles moules en bois de poirier, servantjadis à imprimer le tarot de Marseille,frôlent la perfection. Ph. JP Linuésa.

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■ Jeu de l’Ancien Régime, Liège, 1800. Vendu par la SVV Lelièvre,Maiche, Paris, à Chartres (28), le 19 novembre 2005.

Doc. SVV Lelièvre, Maiche, Paris.

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des modèles imposés de l’Ancien Régime. Si parfoisl’image des monarques, lisible par tous, résiste, onleur ôte leurs attributs comme le sceptre, la couronneou la fleur de lys. On leur préfère le sage visage des phi-losophes. Et voilà Voltaire ou Rousseau qui trônent aleur tour sur les jeux de cartes, devenant des symbo-les de justice et de liberté. Les couronnes, sceptres,ou fleurs de lys font place au bonnet phrygien, lesdames deviennent des « Liberté » et les valets des« Egalité ».

Nouveaux jeux, nouvelle donneLe dos des cartes est resté blanc jusqu’en 1816 en France ;

le papier étant une denrée rare, les cartes à joueront pu porter des annotations de toutes sortes,des ordres d’incarcération, des reconnaissances dedettes, des cartes d’électeurs, des certificats demariage. Ou même des « billets d’abandon », auXVIIIe siècle, seul lien entre l’enfant abandonné à lanaissance et sa famille d’origine.Quantité de jeux publicitaires (face originale etdos à la marque de l’annonceur), ont été édités dèsles années 1870 et tout au long du XXe siècle, dontcertains méritent attention, par exemple un jeude cartes pharmaceutique proposé aux mal-voyants.Le XIXe siècle voit s’épanouir les jeux de fantaisie,cartes romantiques, jeux politico-satiriques ou des-tinés à vanter la mode de l’époque… Les tech-niques d’impression se multiplient et s’améliorent

■ Jeu des costumes parisiens : Gibert, Paris, 1850, eau-forte,couleurs au pinceau. Doc. Me Tajan.

■ Jeu de tarot des proverbes, d’origine autrichienne, Anton Herrl, Graz,1846, taille douce et couleurs au pochoir. Doc. Me Tajan.

■ Colombian souvenir Playing Card C°, Chicago, 1893. Vendu par la SVVLelièvre, Maiche, Paris, à Chartres (28), le 19 novembre 2005.

■ Cartes nationales fantaisie, dites « Première Croisade »,Daveluy, Bruges, 1850, chromolithographie avec couleur or.

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CARNET PRATIQUE

Lire● Les Merveilleuses Cartes à jouer du XIXe siècle, Jean Vérame,éd Nathan, 1989.● Les cartes à jouer, du XIVe au XXe siècle, Henri-RenéD’Allemagne, éditions Hachette, 1906, 2 vol.● Tarot, jeu et magie,, Thierry Depaulis, Bibliothèquenationale, 1984.● L’as de Trèfle. Bulletin trimestriel de l’Association descollectionneurs de cartes et tarots (ACCART), réunissantnombre des collectionneurs et chercheurs de France etd’ailleurs.Site : (mettre à jour)

Visiter● Le Musée français de la Carte à jouer,16, rue Auguste-Gervais, 92130 Issy-les-Moulineaux. Tél. : 01 46 42 33 76.● Le musée sert aussi de siège à l’A.C.C.A.R.T., dont lesmembres sont collectionneurs de cartes et de tarots.

Le tarot de MarseilleD’après les historiens, le tarot serait né auXVe siècle dans les cours de l’Italie du Nord,peut-être à Ferrare. Les exemplaires les plusanciens datent du milieu du XVe siècle. L’arrivéedu tarot en France se situe au début du XVIe

siècle, mais il faudra attendre 1631 pour que les cartiers reçoivent du roi l’autorisation de lesfabriquer. Marseille ne devient le fief de la carteà jouer qu’au XVIIIe siècle : le tarot de Marseille le plus ancien connu à ce jour est celui de Jean-Pierre Payen, daté de 1713. Cinqexemplaires existent dans le monde. Né en1683, ce Marseillais s’installe en Avignon à partir de 1710, dans le but sans doute debénéficier de l’exonération fiscale dont jouissaientles cartiers avignonnais. En 1754, les fabricantsphocéens obtiennent la suppression de cetavantage déloyal. L’âge d’or des maîtres cartiers marseillais peut alors commencer.A partir de 1760, Nicolas Conver dessine etfabrique les lames de tarot dans son ateliermarseillais. Qualité du moule et franchise descouleurs en font l’un des plus célèbres jeuxanciens. Le XVIIIe siècle voit donc apparaître sur le « deux de deniers », les signatures des grandsmaîtres cartiers marseillais : Bourlion, Chosson

ou Tourcaty travaillent tous d’après un modèlequasiment identique.Le XIXe siècle verra s’amorcer le déclin de la dynastie des cartiers. L’ère de l’industrie arrive,l’artisanat fait place au machinisme et, en 1878,Jean-Baptiste Camoin, successeur de la maisonConver, se retrouve seul sur la place.

● Les cartes du tarot se disent « lames ». Composé de78 lames, le tarot de Marseille se divise en 21 atouts,appelés arcanes majeures, 1 lame sans numéro, le mat,40 lames divisées en quatre couleurs (bâtons, coupes,épées et deniers), enfin 16 lames appelées honneurs oufigures (roi, dame, valet et cavalier).

Voir notre carnet d’adresses page 80.

(lithographie, chromolithographie…).Les coins ronds des cartes à jouer appa-

raissent vers 1860, pour se généraliser vingt ans plustard. Pour les cartes anciennes, il est encore bien d’au-tres éléments d’authentification : texture du papier,procédé d’impression, nom du cartier…Le XXe siècle se passionne toujours pour le petit car-ton et les grands peintres laissent leur empreinte surles jeux. Sonia Delaunay imagine en 1964 un ravissant« simultané ». L’imprimeur Draeger édite un jeu« Dali ». Le caricaturiste Dubout se régale des jeux co-miques et invente « le jeu des Trois Mousquetaires »,édité encore par Draeger. La pub s’empare des jeuxédités par la fameuse maison Grimaud.Les amateurs de cartes illustrées de photographies an-ciennes, de costumes ou d’érotica se retrouvent enconcurrence avec les collectionneurs de cartes àthème. ■

■ Cartes du Moyen Age, Bruges, 1875. Vendues par la SVV Lelièvre, Maiche,Paris, à Chartres (28), le 19 novembre 2005. Doc. SVV Lelièvre, Maiche, Paris.

■ La Lune, tarot deMarseille, Editions

Camoin, d’après lesmoules de Nicolas

Conver. Ph. JP Linuésa.

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