Pedagogie Heuristique Construct Ale v F

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Patrick Kalason

VERS UNE PEDAGOGIE HEURISTIQUE CONSTRUCTALE

COMPETENCES PEDAGOGIQUES & INFLUENCE DES FORMES COGNITIVES SUR LES METHODES DENSEIGNEMENT

Publication et communication de recherche en sciences de l'information et des communications

Site : www.kalasonpatrick.com Site : www.constructal.org

Patrick kalason mars 2007

Vers une pdagogie heuristique constructale . Patrick Kalason

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Patrick KALASON

VERS UNE PEDAGOGIE HEURISTIQUE CONSTRUCTALECOMPETENCES PEDAGOGIQUES & INFLUENCES DES FORMES COGNITIVES SUR LES METHODES DENSEIGNEMENT

Mthodologie danalyse des interactions pdagogiques dans linter-culturalit

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DU MEME AUTEUR

Les 7 Styles de vente, Editions dOrganisation (1985) et Pocket Business (1991) Les 7 Styles de vente et dachat, Editions du Puits Fleuri et Editions Celse (2005) Rhtorique de la ngociation : thique et pratique, Editions lHarmattan (2006) Le Grimoire des rois : thorie constructale du changement, Editions lHarmattan (2006) Thorie constructale du lien cultuel : les rites manipulation ou mdiation ? Editions lHarmattan (2006)

Contact : http://www.kalasonpatrick.com

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Remerciements Messieurs Les Professeurs de lENSMA Mustapha Ourahay Omar Rouan Abdellah El Idrissi ainsi qu' Mesdemoiselles Sanae Sidi Hida et Houda Samir pour la traduction des tests en langue arabe

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Lhypocrisie est un vice la mode, et tous les vices la mode passent pour des vertus. Le personnage dhomme de bien est le meilleur de tous les personnages quon puisse jouer aujourdhui, et la profession dhypocrite a de merveilleux avantages. Cest un art de qui limposture est toujours respecte ; et quoiquon la dcouvre, on nose rien dire contre elle. Lhypocrisie est un vice privilgi qui, de sa main, ferme la bouche, a tout le monde et jouit en repos dune impunit souveraine. Don Juan ou le Festin de Pierre Acte V, scne II Molire

Lenseigne est lemblme, la parure et au grade ce que lenseignant est lducation : le symbole vivant dune unit

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CHAPITRE I ENVIRONNEMENT EPISTEMOLOGIQUE ET CULTUREL DANS LENSEIGNEMENT ET LA FORMATION __________________________________________________________________________________

Le cur a des raisons que la raison doit reconnatre La littrature pdagogique est abondante. Alors pourquoi un essai de plus sur cette problmatique et au nom de quelle crdibilit prtendre vouloir y insrer de la nouveaut sans en ralit ne faire que dcliner des sous-ensembles partir de ceux qui existent dj ? Volont de paratre, esprit de polmique, inconscience ou orgueil dun auteur ? Rien de tout cela car il ne sagit pas dans cet essai dajouter une pierre supplmentaire ldifice, mais bien de tenter une dmarche darchitecte partir de ce qui existe ( des degrs de perfection bien diffrents) pour offrir au systme la possibilit de donner plus de cohrence lensemble, en ouvrant les cloisons. Dans le domaine des sciences de lducation, si beaucoup a t dit, force est de constater que les ides saffrontent sans forcment quelles se structurent en une pense capable dembrasser phnomnologiquement lensemble du systme. Le temps est venu pour que la contribution des dcouvertes, issues des sciences de linformation et des communications notamment, fournisse, dans linterdisciplinarit, une la contribution raliste ceux dont le quotidien est de les utiliser. Le temps est aussi rvolu o la seule validit dont puisse justifier nombre de concepts en sciences humaines puissent continuer ltre par le jeu des assemblages de poupes gigognes, dclines en note de bas de page et citations dauteurs, dont au final du dsassemblage le tout ouvrait bien sur des vides consternants. Citer un auteur cest tout autant lhonorer que tenter de sapproprier son aura pour justifier sa posture. Cest la raison pour laquelle lobjet de ces travaux ne consistera pas en une analyse critique des nombreuses thories qui ont jalonn lhistoire des sciences de lducation. Certaines sont plus ou moins compltes, plus ou moins labores mais rien ne permet d'en liminer, rien n'autorise affirmer que lune savrerait plus efficace tant quelles ne seront pas mises en perspective dans leur environnement enfin cartographi. Le traitement de la complexit dune problmatique ne consiste se poser en son sein la question du sens quelle contiendrait, mais de poser la question du sens lorsque la lisibilit le permet. Or en labsence dune cartographie de cette complexit dans le monde de lducation et de la formation, les ides ont trop vite fait de se muter en gnralits idalises et parfois en idologies qui, dinitialement gnreuses, sont grosses aprs coup de ravages barbaresques. Dans ces domaines linconscience peut tre coteuse surtout lorsquon a la charge de prparer les gnrations venir un monde o le changement devient une constante, alors quil na t jusqu maintenant quune succession dpiphnomnes, pisodiquement favorables ou ravageurs lorsquils convergeaient. En dehors de cela lorganisation sociale, les hirarchies, les patrimoines, la pense bnficiaient dune relative quitude. Chaque rflexion nouvelle venait complter lautre dans un mouvement linaire : certaines sagglomraient jusqu former des ensembles conceptuels rigs en thories (parfois en dogmes) au fur et mesure de la complexification des problmatiques et surtout des enjeux. terme des affrontements certaines prenaient lascendant sur les autres en fonction de lintrt des pouvoirs qui les cautionnaient : pouvoirs religieux dans un premier temps, pouvoir conomique dans un second, puis pouvoir dmocratique o la majorit fait force de loi. Moins gouverne par les questions de sens et quelque peu par celles de largent, lapproche consensuelle qui anime nos dmocraties peut tre, si nous ny prenons garde, grosses dimpenss si les valeurs du cur sont seules dcider.

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Plus proccupes par lacquisition dune quantit de connaissances acqurir, les premires coles valoriseront leffort dans la rptition stimul par des mcanismes de sanctions et de gratifications, le tout dirig par des matres qui se devaient lexemplarit. Ctait le prix payer en priode post rvolutionnaire pour dgager une lite capable de succder celle traditionnellement issue de la fodalit. Les rsultats ayant fait leurs preuves, la question de la qualit mergera dans la seconde moiti du sicle dernier o lon prendra plus en compte la dimension ducative de lenseignement. Cest durant cette priode aussi que des thories princeps seront avances et mettront au jour une multitude dapproches pdagogiques innovantes. Actuellement nous sommes en train de dpasser cette poque introspective, celle aussi des tats d'me o l'on essayait de comprendre les particularits de chaque lve, son imaginaire, son histoire personnelle, en esprant isoler le pourquoi de ses ventuelles difficults apprendre. Actuellement nous attachons plus d'importance au comment (aux comportements, aux comptences dclines en savoir, savoir faire, savoir tre (pour les apprenants) et en savoir-faire faire (pour les enseignants)), donc aux consquences de laction, que nous ne nous attachons ses causes. Le comportementalisme gagne du terrain au dtriment de la psychologie introspective. Dans ce contexte la question de lefficacit de lenseignent se trouve pose, parfois de faon abrupte et rentabiliste et dans le meilleur des cas en termes de finalits citoyennes, dconomies quitable et de renforcement du patrimoine culturel. On quitte les raisons du cur pour placer la raison au cur de la socit. Lespoir qui anime ces projets est de faire sortir des esprits une mentalit magique, pr rationnelle, pour arriver une opinion publique lucide dans son approche des domaines scientifiques techniques et socitaux. Il serait faux de croire que les outils modernes de divulgation de la connaissance qui y suffiront. Tout juste peuvent-ils y contribuer tout en dveloppant paralllement une cologie de lignorance. Cest ainsi que la puissance de calcul de nos ordinateurs peut nous faire passer pour vraies les rsultats sans que nous ne nous posions la question de la pertinence du modle partir duquel ils sont produits. Certaines problmatiques sont gres par des spcialistes de la simulation dont la comptence est davantage celle des gros ordinateurs plutt que scientifique, en sorte que leurs prdictions prsentes comme scientifiques entreraient bien, parfois, dans le domaine du divinatoire ! Le milieu est plus consistant que le centre Pour clarifier notre propos, celui-ci consiste nous situer au barycentre (au milieu) de cette triangulation constitue par la quantit, la qualit et la ncessaire nouveaut dans le changement. En effet, l'volution de la fonction ducative soriente maintenant vers celle dun responsable de projet qui se doit d'atteindre des rsultats quantitatifs, qualitatifs autant que princeps, implicitement compris dans le sens donn par la nation quil sert, en grant des moyens parmi lesquels figurent ses propres comptences, celles acqurir, et ceci de faon optimiser celles des apprenants dont charge lui est confies pour que ces derniers sinsrent au mieux dans le monde de demain : celui-ci tant par dfinition quelque peu diffrent de celui dhier, au sein duquel il a t lui-mme form. Ainsi comprend-on aisment que la quantit de connaissances acquises par la logique ne soit pas suffisante cette adaptation et quil faille se poser la question des mthodes qui permettent de trouver les meilleures solutions des problmes envers lesquelles il nexiste pas de connaissances actuellement connues: tout ceci devant tre compris en considrant aussi que le raisonnement par analogie nest pas une affaire de savoir ou de savoir-faire, mais bien celle du savoir tre : une affaire dimplication personnelle. Plac au centre du dveloppent du systme lenseignant a pour fonction de concilier les diverses faons de penser pour rendre le milieu social plus consistant face au changement. Que notre lecteur ne se laisse par bercer par lenvole des propos, si tant est quelle puisse suffire son adhsion. Il ny a ici aucun slogan qui se veuille fdrateur. Le choix des terminologies utilises nont pas pour vocation faire vibrer les cordes sensibles, encore moins de vouloir mouvoir. Les mots retenus, leur articulation en concepts et linterdpendance des concepts entre eux forment bien un tout

cohrent, une construction homogne lintrieur de laquelle il est possible de circuler au grs des besoins.

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Il ne peut y avoir de science (et la pdagogie en fait partie) sans conscience dune certaine unit intrinsque entre les phnomnes observs. Ces travaux imposent au lecteur la mme rigueur quil ne manquerait pas davoir sil tait en prsence de formules mathmatiques, physiques ou chimiques. Tout ingnieur des mines connat la formule du TNT et le dosage des lments qui le constitue. Il sait aussi que son processus de fabrication et dassemblage impose une mthodologie rigoureuse et que son utilisation ncessite une prise de conscience pralable des risques : au total un savoir, un savoir-faire et un savoir tre. Pour lingnieur ces trois notions se doivent dtre valuables, mesurables. Elles permettent de cartographier une situation et den mesurer les risques pour ainsi atteindre lobjectif vis avec un niveau de performance anticip et des risques si possible annihils. Il en est de la pdagogie comme de lingnierie, cette diffrence prs que le temps ncessaire la rectification dune donne errone peut mettre le temps dune gnration. On est dans ce cas plus proche de la manipulation de latome que de celle dun ptard ! Alors le devoir de prcaution doit tre doubl de celui de lanticipation. La pdagogie ne relve pas de la littrature quand bien mme il faille tenir compte des facteurs culturels, des paradigmes qui interfrent ncessairement. Ce nest pas le centre qui doit tre recherch entre deux thses, mais le juste milieu au barycentre dune triangulation factuelle. Passer du respect ladmiration : un changement de paradigme Cest aussi ce stade, au sein de ce milieu, que doivent tre penss les atouts et les faiblesses culturelles dans une perspective denrichissements mutuels. Poser la problmatique de la comptence pdagogique dans un ensemble pluri culturellement monothiste, tel que le sont les trois religions abrahamiques (musulmane, chrtienne et juive) permet de mieux comprendre les points de vue partir desquels le monde peut tre mis en perspective conformment ce que nous y invite la Sourate III du Coran : Allah nulle divinit except lui -, est le Vivant, le Substituant. Sur toi [,Prophte,] Il a fait descendre lEcriture avec la Vrit, dclarant vridiques les messages antrieurs. Il a fait descendre la Thora et Lvangile, auparavant, comme Direction pour les Hommes, et Il a fait descendre la Salvation. La linarit apparente des Textes nest en ralit pas une continuit qui devrait laisserait penser superficiellement quun Texte pourrait prtendre lemporter sur lensemble des Autres. Bien au contraire Ils se renforcent mutuellement en prsentant Chacun une des facettes par laquelle entrevoir la Transcendance partir de lespace gographique et mental au sein duquel les trois cultures voluent et ont faonn leurs communications internes. Cette vision trifonctionnelle convergente, loin de fonctionner par assimilation, favorise les synergies humanistes. Trs schmatiquement les trois Textes mettent en valeur des notions fondamentales : limportance de la loi et des actes dans la culture Juive, limportance de lintention et des actes dans la culture Chrtienne, limportance de la loi et de lintention dans la culture Musulmane. En crivant cela je ne dis en aucun cas que lintention serait inexistante dans la culture Juive ni que la Chrtient serait dnue de toute rfrence la loi ou bien encore que la culture musulmane ne se proccuperait pas de laction, je parle simplement de prvalences culturelles internes, de priorits mises en avant, sans que le caractre universel de chacune puisse tre remis en cause. Ainsi, en mettant laccent sur les complmentaires, les cultures peuvent se renforcer mutuellement tout en valorisant leurs atouts intrinsques. Dans lunivers de lenseignement, le risque serait grand de se contenter de calquer sur soi le modle qui a fonctionn dans une culture voisine sans quil soit adapt aux subtilits de celle qui le reoit. Sans entrer dans trop de dtails le modle ducatif chrtien privilgiera lesprit de conqute, le leadership, llitisme, la domination de la nature, laissant sur le bas-ct de la route ceux des moins

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aguerris cette approche spartiate. Quant lui le monde musulman est plus sensible au maintien de lquilibre socital, une certaine douceur de vivre garantie par lentraide, laccueil et le partage. Il savre capable de rguler plus efficacement le changement socital alors que la culture juive cherchera plus viter les dviances des intentions en privilgiant la codification des actes afin de prserver son unit. Conscient des ces particularits, dont aucune nest non moins louable que lautre, le pdagogue conscient de ses racines doit tre en mesure de comprendre tout ce quun systme scolaire appliqu sans discernement sur un autre pourrait avoir comme effets la fois positifs mais aussi ngatifs : enrichissement de sa propre vision du monde mais aussi scotomisation, privation dune partie de ce qui fait sa spcificit culturelle pour ne pas dire thologique. Pour illustrer ce propos, les constatations du professeur Omar Rouan de lcole Normale Suprieure de Marrakech sur lenseignement des statistiques sont trs instructives. Ayant mis en parallle les capacits dexploitations de donnes statiques par des tudiants canadiens et marocains, les constatations sont les suivantes : habitus tre quasi quotidiennement confronts la prsentation de donnes statistiques dans la vie professionnelle et sociale, les canadiens sont naturellement prompts interprter les graphes. La partie est plus difficile concernant les tudiants marocains : si lacquisition intellectuelle des formules (savoir) ne pose pas plus de difficults quailleurs, linterprtation des rsultats reste cependant abstraite, thorique et formelle. La problmatique pose par cet cart entre la savoir et le ne savoir quen faire ne relve bien videmment pas dun quelconque dysfonctionnement crbral au sein dune culture laquelle les mathmatiques doivent beaucoup. Il nous faut alors aller chercher lexplication ailleurs. La rponse cette question pourrait bien nous venir du physicien et historien des sciences Thomas Samuel Kuhn : une question de paradigme Thomas S. Kuhn tentera dexpliquer la dynamique des sciences non pas simplement d'un point de vue cognitif mais cette fois-ci en tenant compte de facteurs sociaux. Dans son ouvrage emblmatique, La structure des rvolutions scientifiques (1962) il y dveloppe la thse selon laquelle une science progresse de manire fondamentalement discontinue, non par accumulation mais par rupture. Ces rvolutions sont, selon Kuhn, analogues un renversement des reprsentations (ce que les psychologues de la perception appellent un gestalt switch ), un changement de regard. Pour illustrer ce basculement, il emprunte l'exemple du canard-lapin de Jastrow, utilis par Wittgenstein, pour illustrer ce basculement gestaltique.

Selon le regard pos sur ce dessin, on y reconnat alternativement le profil d'un canard ou d'un lapin. Kuhn transpose ce phnomne la science. A un instant donn elle correspondant un tat particulier des croyances sociales porteuses d'un point de vue sur la nature : cest ainsi que le scientifique se confectionne une reprsentation thorique particulire du monde. Celle-ci change ds que le point de vue se modifie.

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Le concept de paradigme, complt par celui de science normale ( la recherche solidement fonde sur un ou plusieurs accomplissements scientifiques passs, accomplissement que tel groupe scientifique considre comme suffisant pour fournir le point de dpart dautres travaux et qui vise augmenter la porte et la prcision de lapplication des paradigmes ) et celui de science rvolutionnaire forment la base du modle kuhnien de l'volution de la science. Mais il arrive parfois que le moteur se grippe lorsquapparat une anomalie, c'est--dire limpression que la nature, dune manire ou dune autre, contredit les rsultats qui gouvernent la science normale et si cette anomalie persiste elle finit par branler la science normale dans son paradigme initial, pour dclencher une crise dbouchant sur une rvolution scientifique. Cette phase rvolutionnaire, qui voit saffronter des thories concurrentes, ne sachve quavec linstallation dun nouveau paradigme. Toutefois, pour actualiser lhypothse de Kuhn, conviendrait-il de prciser que ce changement de paradigme est plus la consquence dun cheminement constructal synergique que fractal dont la rsultante permet la constitution dune forme mieux adapte la circulation des nouveaux flux de pense : ceux accumuls par les bugs successifs du paradigme prcdent qui font pression. Cette rvolution est en ralit apocalyptique au sens tymologique du terme qui signifie entre dans un nouveau monde . Dans le cas pdagogique qui nous occupe, il apparatrait que linterprtation des graphes statistiques (conus dans un paradigme occidental aux fins de prvisions utiles dans un environnement hostile lindividu pionnier) pourrait bien tre une dmarche naturelle pour les uns, mais ne pas ltre naturellement pas pour tous les autres. Il faudrait donc associer au concept de paradigme celui de la scotomisation, phnomne bien connu en neurophysiologie de la vision : la tache de Mariotte. Le refus de la ralit ou de la voir sous un autre angle peut sexprimer par des troubles de la vigilance, dont une des modalits les plus frquentes est la distractivit , qui permet de scotomiser les perceptions extrieures vcues comme dplaisantes ou inutiles. Puisquil ny a ni cne ni btonnet au niveau de la papille optique, elle ne voit pas la lumire : cest la tache aveugle de Mariotte. La vision binoculaire et ladaptation psychique font passer cette tache inaperue qui est compense par le cerveau. Cette zone, cette tache aveugle est appele scotome. Par analogie les psychologues ont tendu cette notion ces effets sur linterprtation de la ralit : la scotomisation. Lutilisation du mot scotome se justifie donc lorsquil sapplique la perception scientifique au sein dun paradigme, notamment dans les sciences souples quand les instruments dobservation et les outils danalyses sont faibles ou inexistants, quand des faits diachroniques sont conus comme accidentels et extrieurs au systme linguistique. Pour Saussure, toute tude synchronique dune langue nous permet dapprhender lquilibre momentan dans lequel elle se trouve. Elle nous livre un rseau de valeurs essentielles que Saussure appelle systme et que lon pourrait bien appeler religion, lorsquil sagit du rassemblement dun tout cohrent de rites et de rituels. Synchroniquement, une langue est un systme : tous les faits linguistiques contemporains, toutes les rgles qui en gouvernent le fonctionnement constituent un ensemble organis de valeurs (et ajoutons cela) afin de faire consensus au sein dun paradigme et exclure (scotomiser) ce qui ne doit pas tre vu, entendu ou dit. Cest aussi, ce niveau, et dans le prolongement de ce cadre thorique quintervient lanalyse trifonctionnelle (trifunctionalia), triklienne, spcifique au domaine de linformation et de la communication que nous avons retenu pour servir de cadre scientifique de rfrence aux prsents travaux. Elle offre lavantage de contraindre sextraire dun cadre de rflexion trop souvent et traditionnellement bipolaris, duel, certes riches en changes et en productions dides mais dont les sous-entendus qui agissent au moment des prises de dcisions peuvent tre emprunts dintrts catgoriels, voire idologiques, lesquelles, terme, pnaliseront le systme lui-mme et en premier lieu ceux quil est sens servir. Lapproche triklienne (systmique, cyberntique, constructale) opre en tenant compte des ralits anthropologiques animes phnomnologiquement par les constantes dagression, dinhibition et de fuite (au plus simple des communications interindividuelles et par

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extension du modle lmentaire jusque dans les formes les plus complexes des rouages socitaux quil soient conomiques, politiques et religieux). Cest aux rsultantes de ces transactions comprises dans un cadre trifonctionnel que les structures et les systmes prennent formes et quoprent les structures ducatives. On comprend ds lors tout lintrt que revt lapproche triklienne, notamment de par le fait quelle optimise le champ de vision tout en levant le voile sur les espaces cognitifs que toute culture occulte inconsciemment. Forcer louverture dune zone scotomise est toujours constitutif dun acte iconoclaste. Il met au jour au moins un point de fragilit que le systme, consciemment ou inconsciemment, voudrait laisser en friche. Ainsi par le biais dun autre champ de vision ou de culture ce qui nest pas vu par lun peut ltre par lautre. Cest aussi une faon dviter les drives barbares que cachent les zones en friches afin de permettre aux flux de penses, de marchandises et celui dinteractions socitales de circuler pour le mieux-tre de tous et de chacun. Tout paysan sait que le mot culture est ambivalent et quune rcolte engendre la fois des fruits et de la fumure : les bases de lalimentation mais aussi de lengrais. La culture est un moyen dtre mieux homme et non une finalit ontognique. Ces rflexions ont aussi pour objet dalerter les systmes ducatifs sur les risques que peuvent engendrer une sur ou une sous valorisation de ceux dentre les autres systmes quils se sont appropris. Que ces derniers soient une consquence de lhistoire ou bien de choix, parce qu lexpertise ils apparaissaient comme tant plus performants, tout systme ducatif entre dans un registre paradigmatique. Il est donc important que chaque systme soit en mesure den auditer les atouts mais aussi les points de fragilit afin de compenser ces points de fragilit par ses propres atouts : le cas chant den rtrocder les conclusions au systme initialement emprunt qui sen trouvera enrichi. Il en est des mthodes ducatives comme de la phytothrapie : langlisme des valeurs humanistes, tout comme celle de lcologie, nous ferait oublier que tout est une question de dosage et que tout excs en la matire pourrait bien contenir en germination les maux quils sont senss combattre. Ayons toujours prsent lesprit que les thses cologiques libratrices ont pris souches bien avant les annes 1960 et quelles ont servi de point dappuie des penses extrmes, (dualistes fonctionnant par thse / anti-thse) qui sont alles contresens des valeurs quelles prtendaient dfendre. Au-del de ces ncessaires proraisons, tout systme ducatif doit tre conscient quen imposant au sein de son propre systme un systme extrieur, les rsultats escomptables seront ceux du systme emprunt. linverse tout systme qui se renfermerait sur luimme, dans un monde o le changement devient une constante quasi exponentielle, ne fera que dvelopper en son sein ses propres fragilits au point de devenir terme obsolte et soumis des systmes plus ouverts. Concernant limage du lapin-canard , si mon paradigme me fait voluer dans un environnement o les canards sont absents, mais o sont prsents les lapins, la description que me fera un tranger dun canard sera pour moi celle dun lapin. Et mon niveau dadhsion sa prsentation sarrtera lorsquon me dira quil est possible partir de la frquence dun chantillon en vol de dterminer le peuplement dune colonie ! De mme dans un monde oriental o lcart de temprature est moins important que dans le nord-amricain, rcemment peupl de pionniers conqurants, le paradigme de lindpendance peut savrer momentanment incompatible avec celui de la solidarit, initialement nomade, sous des cieux plus favorables la douceur de vivre, lorsquil sagit de percevoir lintrt pratique des statistiques ! En sorte que linterprtation de graphes, outre le fait quils sont souvent conus pour tre instinctivement et par rflexe lus de gauche droite (gnralement du plus faible au plus fort), peut poser des difficults individuelles de traitement et ncessitera un travail plus collectif pour y parvenir. Or lon sait par lexprimentation quune solution prise en groupe est toujours plus performante et dun niveau suprieur ce que peut en dcouvrir chacun des individus pris sparment, mais aussi que celle-ci se trouve tre suprieure lorsque la dcision est prise lunanimit qu la majorit. Le problme qui se pose alors au paradigme oriental lgard de linterprtation des graphes pourrait bien servir lamlioration des paramtres occidentaux aux fins dlaboration des quations initiales. Alors le problme pdagogique ne devrait pas tre pos en terme dexploitation des rsultats partir des formules importes mais dans celui de lamlioration des paramtrages au niveau des problmatiques initiales qui donnent naissance la formule, cest--dire de celles de la faisabilit

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dune mthode enrichie et peut-tre novatrice o lanalyse des effets pourrait tre vue aussi en des termes plus cyberntiques : plus en volume et moins en surface Percevoir mieux les consquences des effets sur les causes initiales, avec anticipation de la forme future que prendra le systme observ. Tout le monde y gagnerait. Tout cela conduit penser que les changes interculturels ne doivent pas tre fonds sur le respect mais sur lad-miration rciproque, ce qui implique autre chose de plus riche que le compromis : la synergie, qui est une manifestation de cette Immanence laquelle se rfre le Croyant et laquelle contribue tout laque lorsquil place la vrit et lhumanisme conscient au centre se ses proccupations. tre capable dobjectiver sa propre culture est aussi une faon de lad-mirer et dtre efficace. A ces problmatiques interculturelles, inter-paradigmatiques dirions-nous, viennent aussi se greffer celles de la constitution des savoirs auxquelles nous ne pouvons tre insensibles ou occulter car elles ont des consquences non ngligeables, moins pour llve que pour le matre. Le triangle infernal : prescience, science et conscience. Si science sans conscience ne devrait conduire qu la ruine de lme, nous pouvons aussi tre certain que lappel la conscience sans science pourrait bien tre ruine de laction. Il faut donc passer derrire le rideau. La conscience volue par transgressions des tabous. Cest cette transgression, qui lorsquelle aboutit, contraint louverture dune ralit plus large, parfois lmergence dune nouvelle libert et en science celle dun nouveau paradigme. Pour acqurir plus dacuit, il faut au point de dpart faire la distinction entre valeurs acadmiques et valeurs scientifiques. La valeur acadmique repose sur un consensus, les valeurs scientifiques sur lutilit par applicabilit de mmes causes identifies conduisant des consquences prvisibles et mtrologiquement (science de la mesure) contrlables dans une probabilit admissible. Une acadmie nest donc pas obligatoirement par dfinition scientifique, quand bien mme serait-elle universitaire. Elle peut se constituer autour dune prescience du sens dans lespoir de le devenir. Lacadmie serait alors assimilable un signe , un numen. La premire (le signe) repose sur des hypothses communment admises, la seconde (le sens, ou nomisma) sur des conclusions oprationnelles fonctionnant indpendamment de leurs concepteurs. Nomisma indique en grec ce qui est consacr par la loi, nummus dsignant une monnaie de Tarente, une valeur. Situer un paradigme de pense en pdagogie Dans Logiques sociales dans le raisonnement (1993), Willem Doise, faisant rfrence Kelley pour dfinir le modle rationnel, postule que lindividu, disposant de plusieurs informations, organise celles-ci selon un plan danalyse de variances pour dtecter les liens entre causes et effets : le consensus, la constante, la spcificit. Ces paramtres issus des exprimentations de Kelley peuvent tre qualifis de probants puisque toutes les autres composantes tournant autour de la problmatique des logiques sociales dans le raisonnement sont susceptibles dtre intgres et regroupes dans lun ou lautre de ces trois sous-ensembles fondamentaux (ou de leurs interactions). Ce processus de paramtrage effectu par tamisages successifs est celui opr en chimie lorsquil sagit de dfinir un corps complexe en isolant ses molcules essentielles au point de pouvoir le reconstituer (produit de synthse) ultrieurement. Partant de cette hypothse trifonctionnelle nous pouvons retenir consensus, constante et spcificit comme tant les critres fondamentaux (ples inter-agissants) permettant de dfinir les grandes tendances scientifiques. Nous obtenons alors le modle triklien systmique danalyse (non cartsien, non linaire) dune science et des espaces transactionnels que cette dernire peut occuper au long de son histoire, reprsent par le schma suivant :

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SPECIFICITE

CONSENSUS

CONSTANTE

Le triangle (ou trikla) pistmologique se dfinit par : le consensus comme tant un accord pralable de conventions rciproques, dassujettissements accepts, sur des bases consensuelles (unitaires) du simple consentement des parties sans que la manifestation de ce consentement soit soumise, du moins dans un premier temps, aux contraintes de lexprimentation afin dviter les objections. En somme, un accord dunion susceptible de garantir la cohsion vers un sens pressenti (sens unificateur). Le consensus peut tre assimil en pistmologie idiome, et dans sa dimension plus volue un postulat. la constante comme tant une fonction qui donne tous les lments de lensemble de dfinition la mme unit dimage : un axiome. La spcificit comme tant une dysfonction qui fait varier les lments dun ensemble initialement constant rendant instable limage initiale et qui trouble leffet escompt dune constante, constitutif de lois qui recentrent la fois sur la constante tout en ouvrant vers une phnomnologie plus syncrtique.

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En liant consensus et constante, on obtient laxe du modle. En connectant laxe de la constante et de la spcificit, on obtient laxe de la novation et en connectant laxe du consensus et de la spcificit, on obtient le concept. La connexion entre les trois ples, consensus, constante, spcificit, barycentre les interactions en convertissant le modle, la novation et le concept en un systme scientifique oprationnel et prenne (synergie : innovation). Il faudrait donc entendre par systme lensemble cohrent et congruent de concepts, de modles et de novations qui conduisent une innovation, cest--dire une amlioration tangible de la conscience, de la connaissance et de la pratique sur le rel dans le changement. Ce qui permet la construction du modle triklien suivant :

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Selon le plus ou moins grand intrt quune discipline, un auteur ou un chercheur manifesteront un, deux, ou trois des ples, ils interviendront culturellement dans et sur lune des familles de logiques suivantes :

SPECIFICITE (Antithse)

Forme dintelligence analogique

CONCEPT CONCEPT (Relier)

Recherche

Forme dintelligence logique

NOVATION NOVATION (Adapter)

Taxonomie SYSTEME

Formulation

(Dvelopper)Systmatisation

(Synthse)

Acadmie

Normalisation

Production

CONSENSUS (Hypothse)

MODELES (Protger)

CONSTANTE (Thse)

Forme dintelligence normative

La logique des sentiments comme indicatrice des comptences en uvre dans la communication pdagogique Ces logiques scientifiques engendreront des formes cognitives et des sentiments leurs gards auprs des rcepteurs concerns. Ces sentiments peuvent tre assimils un baromtre mesurant des variations de pressions, lesquelles permettent danticiper lvolution dun phnomne non totalement alatoire. Notre langage est riche pour voquer ce que nous ressentons sur nos lieux de travail, dans nos laboratoires, dans nos coles, dans les lieux de culte ou encore au sein mme de notre famille, confronts que nous sommes lincertain de lavenir. On parle volontiers de climat social, de subir ou dexercer une pression, dune ambiance orageuse, ou encore de vide consternant. La liste serait longue dresser. En effet, la diffrence de la matire, lhomme est en capacit dexprimer ce quil ressent des effets dune cause. Ces sentiments doivent tre compris comme des signes indicateurs dun sens

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souhait satisfaisant. Ils ne procdent pas du hasard et, bien y regarder, peuvent aussi tre comparables des formulations chimiques. Le tableau suivant permet, partir dun sentiment (conformisme, opposition, difficult, ennui, etc.) prouv par un rcepteur ou un groupe de rcepteurs lgard dune communication de remonter aux constituantes de la cause en sorte que, en intervenant sur la cause il soit possible aussi dintervenir sur leffet escompt. Au plus simple, une simple observation des attitudes, des comportements des lves dune classe avec, au mieux, leurs ractions propos dun cours peuvent suffire pour remonter leurs causes. En effet, quelle que soit la nature dune communication, quelle soit sociale, politique, religieuse ou encore scientifique, le sentiment de satisfaction prouv par ses destinataires, bnficiaires ou utilisateurs est la consquence : - dune dcouverte opre par le rcepteur grce au contenu original dun message, - dune bonne adquation de ce message aux proccupations et besoins (dsir) du rcepteur ou de la communaut concerne, - dune lisibilit des signes, du discours, du contenu ou du mot dordre , - du talent de lmetteur, quil soit particulier, institutionnel ou acadmique : enseignant, professeur, vicaire, leader politique, artiste ou chef de famille. Toute dficience dune qualit ou de plusieurs de ces qualits escomptes donnera naissance des sentiments insatisfaisants dont la nature en sera la consquence. Ainsi, la varit des sentiments validerait lintuition selon laquelle le signe (empirique) fasse sens, aprs traitement (de et dans la complexit). Une perception commune des signes serait donc constitutive dun consensus dont le traitement par diverses approches complmentaires favoriserait in fine la dcouverte dun hyper sens fdrateur (dogme ou paradigme nouveau intgrs dans la conscience donnant naissance la doctrine dont sont investis les docteurs) : expression dune exploitabilit, dune ralit nouvelle parlante, issue dun message original, dun signe initial transform en sens lisible. Ceci tendrait aussi dmontrer que le sentiment de satisfaction ( son extrme : denchantement) serait la consquence dun message innovant ( diffrencier de novateur), ce dernier dpendant moins du message lui-mme que de la qualit des outils et des processus dchanges mis en uvre entre les metteurs et les rcepteurs au travers dun langage structur (lisibilit construite) par des approches successives (empirique, cartsienne dualiste, cyberntique). Ces qualits qui, lorsquelles aboutissent font, par la systmique, dune intuition une thse satisfaisante pour le consensus parce que les constantes sont isoles et les spcificits matrises. Retour la srnit. Ce serait donc ce stade, et ce stade seulement, quune discipline pourrait tre qualifie dauthentiquement scientifique par le fait quelle est apte satisfaire plus aux proccupations de lenvironnement public vivant le changement quaux honneurs de la chapelle. La qualit dune science se mesurerait donc au degr de satisfaction ou dinsatisfaction, donc dapplicabilit ou non du message quelle gnre (ou co-construit) auprs et ou avec ceux qui en ont lutilit. Ceci sapplique aussi au niveau de lensemble des disciplines scolaires ou universitaires. Le manque dintgration dun ou de deux des trois ples du trikla des familles pistmologiques (voir triangle ci-aprs) entranera immanquablement de trop forts dcalages par rapport la ralit vcue en rfrence celle espre, en sorte que la diffusion dun savoir, dune science, dun rite ou dune doctrine, qui nintgrerait pas ces trois paramtres essentiels, se trouverait confronte des sentiments variables son gard tels quindiqus dans le tableau suivant :

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TABLEAU SYNOPTIQUE DES SENTIMENTS DES RCEPTEURS ET DE LEURS CAUSES

DECOUVERTE (message) ORIGINALITE

UTILISATEUR (rcepteur) BESOINS constantes

EXPRESSION (langage) LISIBILITE spcificits

ACADEMIE (metteur) TALENT consensus SENTIMENTS des utilisateurs

Nappartient pas :

A A B C D AB AC AD BC BD CD ABC ABD ACD BCD ABCD Appartient : ABCD Non Oui Oui Oui Non Non Non Oui Oui Oui Non Non Non Oui Non Oui Oui Non Oui Oui Non Oui Oui Non Non Oui Non Non Oui Non Non Oui

B Oui Oui Non Oui Oui Non Oui Non Oui Non Non Oui Non Non Non Oui

C Oui Oui Oui Non Oui Oui Non Oui Non Non Oui Non Non Non Non Oui

D Conformisme Opposition Difficult Ennui Dception Consternation Dcouragement Irritation Apathie Frustration Mystification Vide Nvrose Incomprhension Nant

Satisfaction

titre dexemple. Un lve ou un groupe dlve manifestent lgard de lenseignement dune discipline un sentiment de dcouragement. On pourrait a priori le lui en attribuer la responsabilit en considrant que le niveau des comptences acquises serait insuffisant pour suivre le droulement de cette formation. Pourtant la lecture du tableau ci-dessus, qui permet de remonter aux causes, nous constatons que ce groupe dlve (rcepteur) se trouve bien en situation de besoin par rapport lenseignement. Les lves taient et restent motivs. D'autre part, le fond de lenseignement nest pas remis en cause, il est lisible, avec un certain effort bien videmment. En ralit le sentiment de dcouragement prouv fait apparatre que les difficults tiennent labsence de talent de lmetteur (en loccurrence celui lenseignant) et labsence doriginalit du message (soit dans le contenu, soit dans sa prsentation). Ds lors la cause de ce sentiment de dcouragement se situe moins au niveau des lves concerns quau niveau de celui de la personnalit de lenseignant, rvlant soit un manque denthousiasme pour la discipline dont il a la charge, soit des comportements par trop introvertis qui nuissent au charisme attendu lorsque lon est conduit sexprimer en public. Ce simple manque nentranerait quun risque dennui auprs des rcepteurs mais il se trouve que ce manque de talent est doubl, au niveau du message divulgu dune absence doriginalit. Celle-ci peut tenir au contenu dj connu des rcepteurs mais aussi la faon de le dcliner, de le rendre vivant, de faire que les lves se lapproprient bien au-del de lacquisition intellectuelle des formules ou des donnes. En somme un

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problme de mise en scne pdagogique. Ceci nous conduit conclure que le niveau de comptences des lves soit moins remettre en cause que celui de lenseignant. Cest ainsi quen isolant les causes des effets observs il est possible de cerner la nature des progrs oprer pour esprer aboutir dvelopper ce sentiment de satisfaction qui est la vritable rcompense quun enseignant peut attendre de son auditoire, lequel peut aller jusqu lenthousiasme en y mettant un peu de lui-mme. Au risque de choquer sur la question relative aux supports susceptibles de permettre lvaluation des comptences des enseignants, nous pourrions dduire de tout cela que les valuations quils portent eux-mmes sur leurs propres lves pourraient bien tre les meilleurs indicateurs qui soient sur ce sujet. Car, aprs tout, les notes donnes sont bien celles que se donne le matre lui-mme sur le fond de son enseignement et les avis quil porte sur les comportements des lves, sur la forme, sont bien la consquence de ce dont il est pdagogiquement la cause ( : psychanalytiquement lexpression dun contre-transfert), condition bien videmment de pouvoir isoler et si possible matriser les interfrences nincombant pas ses responsabilits. Toutefois dans un enseignement culturellement fortement hirarchis, o les enjeux peuvent tre importants pour les lves, linterprtation de leurs sentiments peut tre moins aise car ils peuvent tre plus dissimuls et se manifester par des blocages parfois imperceptibles et dans certains cas en apparence incomprhensibles. Par exemple dans la situation pdagogique prsente prcdemment par le Professeur Omar Rouan de lENSAM propos des difficults dinterprtation des graphes en statistique par des tudiants marocains, non lie des difficults dacquisition des formules, le blocage paradigmatique culturel nentranera pas des manifestations dopposition. En effet nayant pas pris conscience de lintrt pratique et usuel que revtent les statistiques au niveau de linterprtation et du transfert des rsultats des ralits qui peuvent leur paratre trangres (du moins lorsque leurs professions futures ne les conduiraient pas en tre les utilisateurs et les bnficiaires) des situations de blocage peuvent apparatre, comparables en ralit au sentiment dopposition, ce dernier ne se manifestant pas lgard du problme pos mais au regard de soi-mme. Le conflit est alors intrioris et dans certains cas scotomis en cherchant faire bonne figure par des formulations ampoules plaant le tout dans labstraction. Dans ce contexte ni le talent du professeur, ni loriginalit du contenu, ni la lisibilit des formules ne sont remettre en cause. La pierre dachoppement se situe strictement au niveau du besoin des tudiants, du quest-ce que je peux bien faire de tout cela ! . La solution se situe au niveau de la sensibilisation. Cette phase du cheminement pdagogique gnralement campe en amont des apports thoriques peut parfois tre passe sous silence, lenseignant la considrant comme acquise par les lves et ce nest souvent en phase de pratique que ce manque peut savrer handicapant alors que lacquisition de connaissances na pos antrieurement aucune difficult. Le retour cette phase liminaire de sensibilisation ne pourra pas tre obtenu en faisant des retours successifs au contenu thorique ou encore en argumentant force de rhtorique et de forcing. La prise de conscience ne pourra alors que soprer au sein du groupe lui-mme qui devra satteler dbloquer le paradigme qui scotomise les possibilits dexploitation des rsultats et dans cet exemple celle des graphes statistiques : le groupe devant intgrer la mthode par analogie et non uniquement partir du savoir logique: obtenir un consensus autour de constantes bien au-del des spcificits que savent traiter les formules (approche empirique, non cartsienne et non encore cyberntique). Cest la mthode pdagogique quadoptera avec succs le professeur Omar Rouen pour sortir le groupe de cette opposition larve. Parfois le savoir sans le savoir quoi a sert ne peut servir autre chose qu briller en socit. Mais en pdagogie tout est rattrapable. Cyberntiquement le bug pdagogique aura pour utilit de permettre au professeur Omar Rouan de concevoir pdagogiquement une phase de sensibilisation appropries et dterminante quant sa capacit mettre les lves en situation de besoin, voire de dsir dutilit pralable lgard de linterprtation des graphes : susciter un savoir tre pour savoir faire avec le savoir.

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TRIKLA DES INTERACTIONS EPISTEMOLOGIQUES

DU CONSENSUS A LA CONSCIENCE (SCIENCE PARTAGEE ET INTEGREE)

SPECIFICITE ZONE DE (Antithse) SATISFACTION ET DE FORTE LISIBILITE PAR BARYCENTRAGE

DECOUVERTE Nouveau message (originalit). INNOVATION

Approche cartsienne dualiste

Approche systmique : Science nouvelle. (Synthse)

Approche cyberntique

CONSENSUS (Hypothse)

CONSTANTE (Thse)

Approche empirique

Certaines difficults dans lenseignement peuvent tenir la fragilit intrinsque de certaines disciplines tre barycentres pistmologiquement. Ainsi ces disciplines, du fait de leur nature ou de certains de leurs handicapes, ne disposent daucune constante probante autrement quintuitive. Cela aura par exemple pour effet un enseignement qui survalorisera les ples du consensus et de la spcificit, laissant croire par induction, que le ple manquant (constantes) serait acquis. Dans la mesure o ces disciplines tenteraient de se prsenter comme tant authentiquement scientifiques, elles ne pourrait tre admises en tant que telle par les lves qu force de persuasion taxonomiques au regard des sentiments de difficult que gnrera labsence de constantes fiables, identifies et identifiables, caractristique dun dysfonctionnement en lisibilit. Ceci explique que ce type denseignement mette en mouvement interactif les formes cognitives de la logique et de lanalogie en labsence des normatives. Le proslytisme dont devra faire preuve lenseignant sur ces bases, (face des interrogations qui sont en ralit lexpression dun sceptisime) sera scotomis par la crdibilit scientifique des emprunts collatraux faits aux disciplines permettant la mise en valeur de normes: notamment par les statistiques. Ces emprunts aux mthodes statistiques, sil est vident quils puissent extraire des constantes dans la recherche, peuvent ntre, dans lenseignement traditionnel, quun paravent dauto validation faisant que les lves (souvent des littraires) finissent par ne plus percevoir le message (qui perd alors son originalit car les littraires nont pas datavisme particulier lgard des mathmatiques). Le sentiment de difficult initial se transformera vite en consternation ne gardant en positif que le talent de lenseignant et la motivation (besoin) des lves. Vers une pdagogie heuristique constructale . Patrick Kalason

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Ce nest quau terme de lrosion de la motivation (besoin) quapparatra le sentiment de mystification : llve dcouvrant que la discipline dans laquelle il est entr, parfois par vocation, nest en ralit pour lui plus rien dautre quun miroir aux alouettes qui ne repose que sur des emprunts thortiques faits des pres fondateurs dun sicle disparu On aura alors beau jeu, notamment dans un certain monde universitaire, de stonner du nombre considrable dchecs o prs des 2/3 des tudiants quittent luniversit sans diplme, considrant de surcrot quelle serait difficile daccs aux candidats issus des BTS, ayant dcouvert que 90 % dentre eux chouaient ds la premire anne. Or, reconnaissons honntement que ces disciplines tournent en gnral autour dune dizaine de concepts gnriques, dun vocabulaire technique de moins de 500 mots sans cesse malaxs au sein dune dizaines dobdiences thoriques en sorte que les connaissances acqurir dans ces domaines sont accessibles assez aisment toute population qui y est sensible aprs un baccalaurat. Le problme qui se pose alors nentrerait donc que peu dans le registre des difficults intellectuelles mais bien dans labsence de constantes pistmologies. Cette conclusion se justifie aussi par les chiffres, car cest trs exactement pour cette raison que lon enregistre autant dchecs concernant les tudiants issus des BTS la premire anne : ceux-ci sortent dun cursus o justement cest la valeur des constantes et des modles qui fait office. Il faut donc aller chercher la cause non au niveau de la comptence des tudiants, de quelques origines quils proviennent, ni des professeurs enthousiastes mais trs exactement dans celle de la discipline elle-mme insuffisamment barycentre pistmologiquement. Cest de cette manire quelle pourra orienter ses dmarches doptimisation par de la recherche vers des dcouvertes tangibles afin de compenser son ou ses ples dfaillants. Un moyen simple de situer le problme consiste prendre en compte les listes bibliographiques proposes aux tudiants pour situer dans lhistoire de la discipline la priode de rfrence des donnes mises en avant aujourdhui. Dans ce qui nous sert dexemple, certaines sciences dites souples, le rfrentiel se situe entre trente et quatrevingt-dix ans en arrire. difiant de modernit nest-ce pas ? Si nous pouvons douter de la capacit interne de certains systmes se mobiliser, dans cet environnement o la cooptation dmocratique a trop souvent pour objet dassurer la quitude au prtexte de recherches fondamentales, nous pouvons tre assurs que les ponts qui se dressent de plus en plus entre luniversit et le monde social, industriel et financier auront terme des effets salutaires : assurer la dcouverte. Notons aussi que ce diagnostic aurait t impossible au sein dune approche bipolarise et que nous lavons opre partir dune grille de Carroll.

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CHAPITRE II LINFLUENCE DES FORMES COGNITIVES EN PEDAGOGIE __________________________________________________________________________________

valuer les comptences : approche chamanique, cartsienne ou triklienne ? Le choix dune approche triangule (aussi appele triklienne en science de linformation et des communications) qui prside ces travaux nest pas le fruit du hasard mais celui dune dmarche scientifique qui sappuie sur la constante trifonctionnelle qui charpente lensemble des interactions interindividuelles et socitales tel que la dmontr le philologue et acadmicien franais, Georges Dumzil, conformment aux trois grands comportements mis au jour par Henri Laborit : lagression, linhibition et la fuite, dont les expressions archaques prennent les formes structurantes au travers des totems, des tabous et des extasiants (Patrick Kalason : Le Grimoire des rois : thorie constructale du changement et Thorie constructale du lien cultuel, Editions lHarmattan, Paris 2007). Cet outil conceptuel propre aux sciences de linformation et des communications offre lavantage de placer les comportements communicationnels dans un cadre factuel capable de cartographier une problmatique de faon mtrologique (mesurable), ce qui distingue lapproche triklienne de lapproche cartsienne, cette dernire ouvrant plus sur une perception morale, dialectique voire idologique de laction. titre dexemple sur le plan pdagogique une approche cartsienne dfinira les styles pdagogiques partir dune abscisse mesurant la plus ou moins grande pression manifeste par lenseignant envers les rsultats (tche raliser ou savoir acqurir) et en ordonn celle exerce sur les changes internes (garantir la mthode) au groupe dapprenants autour du sujet abord. Quatre grands types danimation apparaissent : la forme directive (forte intervention de lanimateur pour faire passer les connaissances et forte intervention sur les mthodes appliquer pour les dcliner), la forme active (faible intervention de lanimateur sur les modalits opratoires choisies par le groupe dapprenants, mais forte vigilance opre envers la production), la forme non directive (on privilgie lambiance au dtriment de la mthode et des rsultats, crativit dbride), la forme rgulatrice (forte vigilance sur la mthode laissant place une grande libert de production). La rsonance des mots ayant une incidence sur la symbolique, donc sur les reprsentations que nous nous en faisons, aboutit ncessairement ce que des dsaccords naissent. Ainsi, si nous prenons le style directif, ce dernier sera connot comme tant autoritaire voire dictatorial et donc sous-valoris par rapport au style participatif ou rgulateur. Ceci aura pour effet de tendre vers le rejet des mthodes didactiques imposant aux apprenants un effort de comprhension et de mmorisation des savoirs essentiels au profit de mthodes de type QCM (questionnaires choix multiples), non directives, qui ne valident en aucun cas lassimilation des notions mais simplement leur identification par reprage comparatif. On ne fait plus alors appel la logique mais lanalogie. Le savoir est repr mais non assimil. Cest partir de ce mme schma par diagramme que dans les annes 1960 les thories de la non directivit inities par Carl Rogers ont pris le pas sur les mthodes didactiques traditionnelles ouvrant notamment la voie lapprentissage de la lecture par la mthode globale qui part des pratiques de lapprenant et non plus partir de celles du matre. Le matre devient alors accompagnateur et non plus leader, la rfrence imiter. Les consquences fcheuses enregistres sur les lves ne tiennent pas tant la valeur mthodologique compare des deux approches mais la survalorisation de lune au dtriment de lautre, car nous pouvons aisment comprendre quune mthode syllabique puisse tre compltement inapproprie dans lapprentissage des idogrammes chinois alors que les hiroglyphes, comme le dmontrera Champollion, sont, partir dune certaine poque, dcryptables en interface entre une lecture globale et syllabique. En sorte que nous avons bien trois entres dcriture de lectures possibles : logique ou syllabique, normative ou hiroglyphique, analogique ou idographique.

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En ralit les querelles pseudo scientifiques qui on anim les recherches pdagogiques durant la dernire moiti du sicle prcdent sont en ralit sous-tendues par des visions idologiques dont certaines posaient comme pralable le rejet de toute autorit comme tant objet de captation de lnergie cratrice de la masse. Sorte de pdagogie de la libration en absence de toute validation scientifique autre que celle des acadmies qui adhraient ces hypothses consensuelles. Pour comprendre le fourvoiement dans lequel peuvent sengluer des recherches dans les domaines des sciences humaines, dont lenseignement et la pdagogie font partie, il faut oprer un retour lpistmologie. Lobjet des sciences humaines et socitales ne consiste pas dire ce que les choses sont et moins encore ce quelles doivent tre mais ce quoi les choses servent directement et dans certains cas implicitement. En ce qui concerne la dmarche scientifique, le risque est grand dentraver les dcouvertes en plaant lthique idologique en amont de la recherche. lexception de quelques visionnaires courageux les ides qui font appel in extenso aux valeurs sociales nont de dure de vie que celle de lapprovisionnement de nos rfrigrateurs : alors autant sassurer de les remplir plutt que de se quereller sur les recettes culinaires tant il est vraie quelle varient selon les cultures et les possibilits offertes par lenvironnement immdiat. Epistmologiquement la dmarche cartsienne permet disoler par fragmentation les constantes, les molcules dterminantes. Si cette dmarche sopre avec succs dans le domaine des sciences dures (physique, chimie, mathmatique etc.) qui permettent la cration notamment de produits de synthse, celle-ci consiste souvent en sciences souples considrer le diagramme (cartsien) comme tant le meilleur aboutissement possible pour obtenir une vision synthtique dun ensemble au sein dune problmatique. Or il nen est rien car la raisonnement qui consiste faire entrer en contact une thse avec son antithse ne conduit pas une synthse mais un compromis dont on saperoit au final quil na repos que sur des rapports de forces qui nont fait que diffrer le dsaccord des fins dapaisement. Cest une vision errone de croire que notre structure mentale fonctionnerait bipolairement car nous lavons voqu elle est limage de notre structure socitale qui est de type trifonctionnel tant et si bien quun raisonnement de nature bipolaire vince de la problmatique non 1/3 des donnes ncessaires son traitement mais en ralit 2/3 des interactions prendre en compte au niveau de la problmatique : cest souvent en les occultant quune organisation parvient vincer lintrt collectif et les perspectives de sa finalit au profit dintrts catgoriels au prtexte (conscient ou inconscient) de prservation des acquis, sous couvert de valeurs intermdiaires qui ne sont souvent que celles du pass. En cherchant la stabilit dans un fauteuil, alors que le mouvement se droule devant soi, on a de fortes chances davoir des rveils douloureux Alors lpistmologie nest pas quune discipline intellectuelle ! Ainsi pour esprer tre efficace faut-il dterminer auprs de lmetteur ainsi quau niveau du rcepteur quelles sont les triangulations fonctionnelles (trikla) qui interagissent ainsi que celui de lenvironnement qui les anime, les dirige mais aussi les sanctionne. Cest au terme de la dfinition des 7 styles dmission, croise 7 styles de rception, le tout insr dans 7 types denvironnements culturels, quune cartographie des transactions peut tre visualise. Ce nest quau terme de ce travail prliminaire que lon peut exploiter lintrt des approches cartsiennes, parce que des dominantes socio-affectives en manent, desquelles lthique (sens) peut merger. Les thoriciens de la complexit pourraient objecter que cette approche puisse apparatre comme rductrice sils navaient en devoir de considrer quil ny a de science que dans la mesure o le systme puisse contenir une certaine unit pour ne pas verser dans lentropie. Ils ne doivent pas non plus oublier que 7 notes de musique suffisent crer des symphonies, trois couleurs donnent naissance toute la palette des 7 couleurs de larc-en-ciel et que la matire entire de lunivers sest constitue partir des interactions entre trois lments simples et enfin que deux quarks up et un quark down, en interagissant sous laction de la force lectronuclaire forte, cest simplement la naissance dun proton. Enfin sil faut comprendre de leur part que cette approche serait par trop dterministe et quil faille en dduire que la complexit gnrerait de lintrieur des systmes une phlogistique libratrice

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quils aillent y voir du ct de Lavoisier qui, plus de deux sicles avant, dmontra que la combustion nest pas contenue dans la matire mais est directement lie loxygne en suspension dans laire. La forme est une question de flux. Constructivisme ou constructalisme ? Un dtail qui fera la diffrence. En ralit le systme social nest pas fractal mais constructal tout comme se constituent les formes dans la nature. Cette constructalit gnre les formes partir de modles simples. Pour les systmes communicationnels humains cette forme lmentaire est trifonctionnelle. Elle permet la circulation et loptimisation des flux: flux de penses, flux de marchandises, flux montaires, circulation des hommes, etc. Cest au sein de cette circulation, en ouvrant ou fermant une ou plusieurs des vannes, dont notre modle trifonctionnel dispose, que nous exerons une certaine forme de libre arbitre, la lisire entre nos intrts et la prennit de nos systmes, et plus largement de notre humanit. Cest dans ce cadre quil est possible dinterprter au mieux les textes qui structurent et encadrent l'effort national au Maroc de rforme de lducation et de la formation, invitant la mobilisation des nergies afin de mettre en avant des concepts des mthodes et des outils pdagogiques cohrents et novateurs. Mais cest plus profondment un changement de posture pdagogique quils invitent le monde de lenseignement plus qu la recherche de quelques coups de gnie. Il sagit en ralit douvrir les angles de vision des anciens substrats thoriques et autres prsupposs socitaux, non pour en inventer dautres mais au contraire pour optimiser le passage des flux internes des systmes traditionnels lorsque ceux-ci se trouveraient inhibs dans lexpression de leurs comptences, de leurs intuitions, de leurs nergies. Plus globalement, ces textes font implicitement appel une pdagogie non foncirement base sur une vision constructiviste mais constructale. Cette nuance apporte est de nature anticipative tant et si bien quil faille maintenant non pas parler de gestion des comptences mais doptimisation de la circulation des flux de comptences. Cest--dire non pas uniquement se charger de les identifier mais mieux encore de les faire circuler de faon rpartir le plus quitablement possible les nergies de la dimension la plus grande la plus petite, une sorte de rvolution culturelle de nature conomologique, capable de mettre en corrlation conomie et cologie (tant entendu que le mot cologie est comprendre au sens thologique du terme, cest--dire dun dveloppent viable et mieux encore vivable (prenne)). Cela signifie tre en mesure doprer le passage dune vision cumnique (tymologiquement : le monde habit qui par extension implique une attitude dominante de lhomme sur la nature ainsi que conscutivement sur dautres hommes) une vision anthropocumnique (tymologiquement lhomme habit). Trs concrtement cela signifie que des modifications doivent tre apportes lancien systme dont force est de reconnatre honntement que son bilan a t porteur dvolutions salutaires dans le cadre historique qui a t le sien. Capables que nous sommes dintervenir sur et au cur de la nature, le pari est maintenant de considrer lhumanit comme un cosystme : lhomme habit. Cela implique donc quil faille, sans abandonner la diffusion des savoirs, mieux situer ce en quoi lapplication de mthodes nouvelles dans le quotidien de lenseignement et de la formation peut permettre les rendre plus accueillants de la modernit. La vision prcdente partait du principe que savoir ctait pouvoir, en sorte que les connaissances simposaient comme pralables ladmission de laction. La quantit de savoir tait privilgie et donnait naissance une lite capable de lassimiler : critre partir duquel sorganisait la slection. Toutefois, il savre que si la transmission du savoir se suffisait elle-mme, dans un environnement antrieur peu volutif fonctionnant selon des valeurs physiocratiques de quantit et de qualit, elle savrerait obsolte lorsque les savoirs doivent tre crs in situ afin de rpondre aux impratifs du changement. On quitte alors le monde de laccumulation des savoirs pour passer celui de leur recherche avec obligation de dcouvertes : la mthode prend alors le pas sur la connaissance sans pour autant devoir ni pouvoir sen passer. Il sagit maintenant de savoir fconder le savoir avec le savoir-faire : une affaire de savoir tre. Dans ce contexte nouveau, nous comprenons toute limportance que revt lautoformation, le co-apprentissage par lcoute et la prise en compte des comptences et des pratiques. Le savoir devient de plus en plus une affaire de coconstruction tant et si bien que lenseignement ne peut plus se concevoir sans quil soit mieux orient vers l'apprenant et sur lchange dexpriences entre les comptences du matre et celles de

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lapprenant, afin que, dans ces interactions pdagogiques pour ne pas dire managriales, lidentification et la rsolution de situations-problmes permettent daboutir des rponses adaptes et pertinentes Cette rorientation impose de penser les finalits de l'activit et dadapter les mthodes ces finalits alors que la pense prcdente pensait en terme daccumulation de quantit de savoirs en mettant en parallle la quantit de moyens : par exemple que 80 % dune classe dge doit tre en possession du baccalaurat ; cette orientation ayant pour consquence des moyens quantitatifs en rapport ; construction de lyces et collges, enseignants supplmentaires, quipements et engorgement de filires universitaires offrant des dbouchs professionnels incertains. Dsillusion dun humanisme bat lorsque les finalits sont entrevues sous la forme de buts idaliss et non par le biais dobjectifs ralistes ! Sentiment de mystification : talent des metteurs de vux pieux au sein dun effet dannonce qui rend originale la dmarche, mais au final absence de lisibilit sur lavenir et besoins des rcepteurs non satisfaits. Villes engorges, peuple cultiv, campagnes dsertes. Fracture sociale. Consquences des constructions par la quantit : la qualit finit par lui chapper. En thermodynamique une source de chaleur plus froide absorbe toujours lnergie de la source chaude : ce seront les dlocalisations ; lnergie se trouve ainsi mieux rpartie sur la surface, mais quel prix pour celui qui la perd et jusqu quand pour celui qui la reoit ? Nous atteignons l les limites des approches constructivistes. Cest partir de cette constations que dans le domaine des sciences de linformation et des communications qui est le mien et que dans celui dune science plus dure, celle de la physique thermodynamique, nous sommes arrivs, avec Adrian Bjan, penser les systmes interagissant au sein dune thorie nouvelle autant quinnovante, la thorie constructale. Ayant de mon ct dans les annes 1980 mis au jour, en collaboration avec Pierre Lebel, la cohrence dun modle trifonctionnelle applicable lensemble des systmes communicants dont traitent les sciences souples de linformation et des communications, je rejoindrais Adrian Bjan, chercheur luniversit de Duke aux tats-Unis, qui du sien, dans le domaine de la thermodynamique des formes donnera naissance en 1990 la Thorie constructale (verbe latin construere (construire). La thorie constructale (consulter pour plus de prcision lannexe pistmologique) d'optimisation globale des formes sous des contraintes locales que nous dveloppons dans chacun de nos domaines explique de manire simple l'mergence de nombreuses formes naturelles, en particulier des structures arborescences, telles que les fentes de dessiccation, les mandres de rivires, les poumons, les arbres, ... L'ide constructale est que les architectures de flux naissent d'un principe de maximisation de l'accs aux flux, dans le temps, compose avec leur capacit se transformer. Cette thorie commune permet de concevoir des systmes optimiss en rpartissant au mieux les invitables rsistances internes du systme. En sciences humaines la forme simple est de nature trifonctionnelle ( Thorie constructale du changement. Patrick Kalason, Editions LHarmattan. Paris 2007). Un des principes importants de notre thorie constructale est de considrer que tous les systmes sont destins demeurer imparfaits du fait de l'existence invitable de rsistances internes (frottements, interactions, etc.). D'un point de vue constructal, le mieux que nous puissions faire est de distribuer de manire optimale ces imperfections, et c'est prcisment de cette distribution optimale des imperfections que la forme du systme merge spontanment. On peut lanticiper. En particulier l'une des faons de distribuer de manire optimale ces imperfections consiste distribuer le rgime le plus rsistant du systme l'chelle la plus petite du systme (alors que dans certains systmes sociaux la tendance est les rassembler au point darrive des flux dans le systme). Le principe est le suivant : Pour qu'un systme fini puisse persister dans le temps, il doit voluer de manire offrir un accs facilit aux flux qui le traversent . La Loi constructale est le principe qui gnre la forme parfaite , qui est, en fait, la forme la moins imparfaite possible. Le systme devient ainsi prvisible et sa forme peut tre anticipe. Cest ainsi que le principe constructal d'architecture de flux arborescents a permis de prdire de manire totalement dterministe de nombreuses lois Vers une pdagogie heuristique constructale . Patrick Kalason

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allomtriques empiriques, par exemple : la loi de Kleiber de proportionnalit entre le taux mtabolique q0 et la masse corporelle M leve la puissance 3/4, la proportionnalit entre les priodes respiratoires et de battement du cur t et la masse corporelle M leve la puissance 1/4,la proportionnalit entre la surface de contact de transfert A et la masse corporelle M, la proportionnalit entre la vitesse optimale de vol Vopt (en ms 1) des corps volants (insectes, oiseaux, aronefs) et la masse M (en kg) leve la puissance 1/6, etc. La loi constructale savre tre gnralisable jusque dans la comprhension de formes que prennent les flux climatiques de la plante Adopter une dmarche constructale consiste, tout comme cela est actuellement le cas en thermodynamique (voir www.constructal.org) considrer quune source de chaleur ne peut tre quitablement rpartie sur lensemble dune surface donne et que nous sommes condamnes chercher la moins mauvaise solution pour tendre y parvenir, donc constituer les formes les mieux adaptes la circulation des flux sachant que cest au point de fragilit du systme que la nouvelle forme mergera sur les bases du modle initialement simple. Par analogie lart pdagogique est comparable loliveraie de la Menara Marrakech : tous les oliviers sont irrigus quitablement selon un mme modle constructal quelque soit sa proximit ou son loignement de la rserve deau dont lcoulement est dpendant de la nature de la pente et du systme douverture des vannes. Au final toute loliveraie progresse, en mme temps quelle se constitue un cosystme favorable sa prennit. Il en est de mme pour les interactions humaines si lon a conscience quanticiper la forme future cest viter laccumulation des flux qui inexorablement jailliront au point de fragilit du systme qui prtendait les contenir. Le concept de constructalit vient en cho celui de fractale labor par le scientifique Benot Mandelbrot partir du verbe latin frangere (briser) pour dcrire ces nouvelles formes gomtriques, dont le motif, de plus en plus petit, se rpte l'infini. Ce mot fractal suggre, selon nous, une mauvaise direction: les choses ne se fragmentent pas, mais s'agrgent, se construisent, du petit vers le grand. Il est donc prfrable de parler de constructalit car lvolution nest pas fractale mais constructale. Le secret des formes qui sadaptent consiste assurer la distribution optimale des flux au point de fragilit du systme. La contructalit repose sur un principe doptimisation. La comptence pdagogique par les styles de communication de lenseignant Cest donc par lintermdiaire de ce jeu des vannes, quil est possible denvisager lirrigation des savoirs, savoir tre et savoir faire en sorte que lappel une vanne unique serait une utopie coupable et le premier rservoir cest le monde de lducation. Louverture de la formation permanente sur luniversit par la reconnaissance de lexprience professionnelle est une donne nouvelle dans lenseignement. On peut raisonnablement parler de rvolution en ce sens que la relation traditionnelle sen trouve sur le fond et la forme profondment modifie et terme trs certainement les contenus. En effet le savoir, et le statut que confrait un corps professoral le fait de le dtenir, lorsquil ne se trouvait que confront une jeunesse peu oprante sur le transfert de la vracit de lenseignement aux ralits de la vie, mis au contact maintenant dadultes expriments, est susceptible dtre revisit, tant dans les contenus des cours que dans la faon de professer. Le savoir sen trouve amlior, plus insr dans limmdiatet des dcouvertes. Cest ainsi que lappel trop frquent aux pres fondateurs ne peut plus tre plus le seul critre de validation de certaines matires. Dans ce contexte nouveau la recherche a pour obligation de dcouvrir, ce qui a pour consquence dexposer en premire ligne ceux qui hier se rfugiaient derrire les honneur set lintrieur des tours divoire qui abritaient leurs titres. Larrive de lentreprise dans le monde universitaire, loin de remettre en cause la recherche fondamentale, lui permet en ralit de gagner en profondeur. Ce mouvement est maintenant dautant fortement enclench que la jeunesse dispose actuellement de multiples sources dacquisitions de connaissances autres que celles venant de lenseignement traditionnel. Savoir ce nest plus exercer un pouvoir, cest le partager avec dautres pour pouvoir encore mieux ensemble.

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Quoi quil en soit de ces changements heureux, les comptences techniques, les savoirs fondamentaux, resteront toujours primordiaux et la pdagogie na pas pour vocation de sy substituer mais de les optimiser. Les pratiques de lenseignement, confrontes la ralit, font vite apparatre quil faut acqurir de nouvelles comptences : des savoir-faire et des savoir-tre complmentaires. Tout enseignant sait, quil soit arriv au pinacle des honneurs par les diplmes ou quil soit autodidacte, tout ce quil doit ceux qui lui ont transfr leurs savoirs. Que ces savoirs aient t acquis sur les bancs de lcole ou de luniversit et dans certains cas sur la planche en bois des galres , lenseignant daujourdhui sait aussi quil devra fournir des efforts dune ampleur plus importante que par le pass pour progresser dans son savoir-faire pdagogique, en cette poque o le fond na de congruence que si la forme y contribue. Si dans lesprit et dans les principes, cela est communment admis maintenant depuis que le magister dixit a atteint ses limites, tous ne sont pas ncessairement conscients des diffrentes formes de comptences que cela implique une fois les bonnes intentions formules. Lexercice dautodiagnostic propos ci-aprs a pour objet de permettre un enseignant ou un formateur de situer la faon avec laquelle il aborde naturellement la diffusion des savoirs. Il est recommand au lecteur de mnager son impatience et de raliser cet exercice avant la lecture des explications qui suivront la grille de dpouillement.

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Exercice dautodiagnostic : le savoir et moi

Consignes : Dans cet exercice vous tes placs dans 16 situations simples de la vie courante. Pour chaque situation vous devrez choisir une ou deux rponses qui correspondent au plus prs ce que vous pensez ou ce que vous feriez dans ces circonstances. Il nest pas obligatoire den choisir deux lorsquune seule vous parait vidente. Soyez spontan, ne cherchez pas la bonne solution, il ny en a pas, toutes sont possibles et acceptables. Vous disposez de 10 minutes pour faire lexercice. I- Ordinateur : Linformatique est devenue indispensable. Des logiciels arrivent rgulirement sur le march pour rpondre aux besoins sans cesse croissants des utilisateurs. Cela a aussi pour corollaire quil faut nous y adapter. votre avis, pour former des jeunes leur bonne utilisation il faut : 1/ Quils fassent dabord les exercices pratiques (souvent interactifs) proposs par le concepteur avant toute tentative dutilisation personnelle ? 2/ Leurs expliquer pralablement selon quelle logique le concepteur a travaill pour dcliner les utilisations possibles ? 3/ De stre pralablement form soi-mme dans la perspective de leurs montrer les modalits opratoires pour quils les effectuent ensuite eux-mmes ? 4/ De faire appel leurs expriences antrieures des logiciels pour faciliter lacquisition des fonctions nouvelles ? II- Livres : Malgr les technologies nouvelles de linformation et de la communication, le livre reste un support privilgi. Mais ranger une bibliothque na rien de forcment conventionnel. Lorsque vous devez faire cette opration pour votre usage personnel, effectuez-vous ce classement : 1/ Par ordre alphabtique des titres ou des noms dauteurs ? 2/ Par collections thmatiques ? 3/ En mettant porte de mains les livres qui vous sont le plus utiles frquemment ? 4/ Sans classement particulirement rigoureux ayant une bonne mmoire des utilisations faites prcdemment. III- Sport : Les vedettes du sport inondent les crans des tlvisions. Sans que les perspectives de lducation sportive soient destines cela, lenseignement des disciplines sportives lcole doit votre avis viser : 1/ Faire connatre les rgles des diffrentes disciplines pour les apprcier et les pratiquer avec intelligence. 2/ A connatre et matriser les gestes, les stratgies et tactiques pour optimiser ses chances. 3/ tre en mesure au moins de savoir arbitrer une partie, un match ou une preuve de faon quitable. 4/ Connatre ses capacits et ses limites pour grer au mieux leffort. IV- Histoire : Chaque pays sest construit sont histoire souvent dans la perspective de mettre en avant ses particularits, son originalit, ses atouts. Pour vous, lenseignement de lhistoire lcole doit-elle avoir pour objectif : 1/De faire mmoriser les dates importantes permettant de situer les grands vnements fdrateurs. 2/ De constituer dune certaine faon un album de famille lintrieur duquel on visualise lvolution du pays au dveloppement duquel chacun doit contribuer sa mesure ?

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3/ De dmontrer, documents lappui, lexistence des faits prsents. 4/ Une comprhension des mcanismes qui animent et mobilisent une collectivit par rapport une autre. V- Sciences : On value souvent une socit son niveau de performances technologiques. Lenseignement scientifique est donc de toute premire importance. Pour que cet enseignement soit efficace, votre avis il faut : 1/ Dvelopper le sens de lexprimentation pour acqurir des savoir-faire capables dextraire des connaissances. 2/ Faire mettre en application une dmarche scientifique rigoureuse. 3/ Faire acqurir lesprit critique. 4/ faire se rfrer des connaissances thoriques solides. VI- Langues trangres : Le monde est de plus en plus ouvert et parler plusieurs langues est ncessaire pour y voluer favorablement. Pour moi lenseignement des langues doit principalement sappuyer sur : 1/ Une connaissance de la grammaire, du vocabulaire, de la syntaxe qui doivent tre mmoriss. 2/ Une succession dexercices qui permettent en variant les situations de faire varier lexpression. 3/ De la pratique rptitive de phrases types servant de rfrence. 4/ Une connaissance des quelques 2000 mots qui suffisent se dbrouiller. VII- Matriel : Vous venez doffrir une console de jeux un adolescent. Lors de sa mise en fonctionnement vous: 1/ Lisez en tout premier lieu la notice dutilisation avec lui. 2/ Lisez attentivement avec lui les rgles du jeu. 3/ Essayez de comprendre avec lui les moyens de jouer gagnant par exemple en cherchant connatre les routines utilises dans le logiciel. 4/ Le laisser faire, aprs tout il sappuiera sur lexprience acquise. VIII- Professeur : Il est toujours heureux davoir, dans sa jeunesse, rencontr un professeur qui a pu tre lorigine dune vocation professionnelle. Pour moi le respect envers un professeur repose sur : 1/ Sa capacit dcliner le savoir pour le rendre accessible. 2/ Son rudition qui en fait un exemple suivre. 3/ Les mthodes prouves quil sait mettre la porte de ses lves. 4/ Sa capacit mettre en contact le savoir avec la vie. IX- Dirigeants : Quils soient issus dune ligne, lexpression dune lite ou du suffrage des lecteurs, ceux qui nous dirigent ont pour mission de mener bien des hommes vers des objectifs. Pour tre respect dans cette fonction importante il faut votre avis : 1/ Matriser les processus de concertation avant dimposer quoi que ce soit de nouveau. 2/ Se rfrer au droit qui est un fil conducteur qui vitera les dviances fcheuses. 3/ Disposer dun bagage intellectuel qui permette le diagnostic. 4/ tre entour de personnalits exprimentes.

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X- Exprimentation : Cest dit-on en forgeant quon devient forgeron. Pour vous lexprimentation sert dabord : 1/ Acqurir plus de souplesse, moins de fatigue et plus defficacit en utilisant moins dnergie. 2/ Samliorer en comprenant aussi comment les autres travaillent. 3/ Valider les connaissances initiales. 4/ Dvelopper les savoirs par dduction. XI- Mythologie : Les contes et les lgendes animent les consciences collectives. Au-del des croyances ils sont : 1/ Des vecteurs de connaissances sur la faon dont les gens peroivent ce qui les environne. 2/ Des faons de donner un sens lexistence. 3/ Une dclinaison des attitudes adopter dans des circonstances particulires. 4/ Un enseignement au-del du savoir acadmique. XII- Salutations : Chaque grand corps de mtiers a sa faon de saluer : on sincline devant le roi, on porte la main droite ouverte vers la tempe dans larme, on se lve quand le professeur entre dans la classe. Dans tous les cas le salut est : 1/ Une manifestation qui correspond des codes qui ont une raison dtre et qui sexpliquent. 2/ Une manifestation constante dans tout le monde du vivant lorsquil y a hirarchie. 3/ Un processus dentre en contact. 4/ Le signe dun classement. XIII- Ouvrages scolaires : Laccs des maisons ddition la diffusion douvrages scolaires est sens dvelopper la crativit pdagogique. Si jai la possibilit de dcider du choix de ces ouvrages, joprerai en privilgiant : 1/ Les ouvrages qui suivent un droulement linaire avec une certaine redondance afin que llve situe sa progression dans les savoirs. 2/ Les ouvrages qui invitent la curiosit sur lextrieur. 3/ Un ouvrage didactique qui dcline bien la logique suivre. 4/ Un ouvrage qui favorise les exercices de lesprit et le sens de la dduction. XIV- Moyens matriels : Pour moi la salle de cours idale dont je rve cest : 1/ Celle o je disposerai des moyens informatiques me permettant de rendre vivant mon enseignement. 2/ Un vaste bric--brac favorisant la crativit. 3/ Une encyclopdie pratique permettant de circuler dans les savoirs, les savoir-faire, les savoir-tre. 4/ Un lieu dexprimentation, un vaste laboratoire. XV- Pdagogie : Enseigner est un art difficile. Pour moi la pdagogie cest lart de : 1/ Faire comprendre par analogie les mcanismes de la vie, de la pense et le monde dans son unit. 2/ Faire acqurir des mthodes qui permettent daccder aux bonnes solutions. 3/ faire que lautre senrichisse de mes connaissances. 4/ Faire que llve devienne suprieur au matre.

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XVI- Acadmie : Si javais une dfinition sur ce que doit tre une acadmie, ce serait : 1/ Une organisation dont lobjet est de faire connatre les moyens et mthodes employer pour divulguer les connaissances dont elle est garante. 2/ Un organisme de validation des savoirs et de slection de ceux qui doivent tre la porte du plus grand nombre dans un monde qui volue. 3/ Un lieu qui fait le lien entre les savoirs et les pratiques. 4/ Un point de contact entre la vie conomique et la vie intellectuelle.

Dpouillement, exploitation et interprtation Il y a 16 cas. Pour chacun, il fallait retenir 1 ou 2 rponses qui vous convenaient. Vous reportez maintenant tes rponses dans la grille d'analyse ci-aprs. Situations I II III IV V VI VII VIII IX X XI XII XIII XIV XV XVI Rponse 1 M L M L A L L L M M L L M L A M Rponse 2 L A M A M A A L M A A A A A M L Rponse 3 M M A M A M M M L L M M L L L A Rponse 4 A A L A L L A A A L L L L M A A

Aprs avoir report vos choix sur la grille de dpouillement ci-dessus, vous faites maintenant le total des L, des A, des M puis la somme des rponses L + A + M= S. Enfin vous calculez au dixime aprs la virgule,

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L/A=

puis M / A=

puis L/S=

puis A / S=

puis M / S

Ensuite sur le triangle (trikla) qui suit : On porte le rapport L/ A sur la ligne des X soit A. On relie par une droite, ce point au sommet M. On porte M / A sur la ligne des Y soit A/M et on relie ce point par une droite au sommet L Les deux droites se coupent en un point qui illustre votre faon daborder les situations pdagogiques : en somme le point qui indique le biais cognitif par lequel vous faites passer les apprenants pour quils intgrent votre enseignement.

L= L/A= L+A+M=S= L/S= % A/S= M/A=

A=

M=

% M/S=

%

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3- LOGIQUE : Dialectique. Prcision. Dductif. Cartsien. Rationnel. Consquent. Discret. Intellectuel. Direct. STYLE ABSOLUTISTE

5- INDUCTION: Instinctif. Flair. Procde par induction. Enthousiaste. Astucieux. Recherche laccord et les affinits slectives. STYLE TECHNOCRATIQUE .

3

5

7- CREATIVITE Ralisation. Dcouvreur. Inventif. Princeps. Esprit de synergie. Guide. Perfectionniste HEURISTIQUE

4- DEDUCTION: Dmonstratif. Expressif. Productif. Argumentation. Tmoin. Raisonnement. Besoin de preuves et fait appel la raison pratique. STYLE REGULATEUR

4

1

6

2

1-ANALOGIE : Audace. Fantaisie. Assimilation par comparaison, association dides. Approximation, extension. Indpendance desprit. Expansif. STYLE NARCISSIQUE

6- IMAGINATION Imaginatif novateur progressiste original rveur, pote.transforme la ralit. Idaliste. combattif. sens des valeurs. STYLE CONCERTATION

2-METHODE: Normatif. Discipline. Conformiste. Applique la mthode. Se rfre aux formules et la marche suivre. Une certaine dpendance. Besoin dassistance. Sens technique. Respectueux. STYLE PATERNALISTE

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Lexercice dautodiagnostic porte sur les formes cognitives (ou formes dintelligences) mises en uvre pour apprhender les savoirs, considrant quun enseignant aura assez naturellement comme tendance valoriser dans son enseignement le ou les points dentres par lesquels lui-mme est pass lors de ses tudes. Paralllement, cet exercice fait apparatre que la logique pure, celle qui fait appel au savoir en se rfrant aux lois, aux thories, au classement, la formule, lquation, nest pas la seule forme dintelligence sur laquelle sappuyer pour esprer que les connaissances divulgues, parfois force de rhtorique et defforts de persuasion, puissent savrer tre la seule efficace pour tre suffisamment prenne dans lesprit de lapprenant aux del de la remise dun diplme : en moins de 10 annes, 80 % de dperdition des connaissances. Moins de 20 % persistent (rsistent) alors que dans le mme temps les connaissances initiales ont doubl ! Cest ainsi que dans notre monde moderne, en perptuel changement, lobsolescence guette chacun, professeurs, lves entrs dans le monde du travail, ainsi qu terme toute une socit qui ninsrerait pas la formation et la recherche permanente comme une constante de sa solidit. Dans cet environnement en volution exponentielle et o la technologie va galopant, lenseignant tout comme le manager se doivent dtre plus quun technicien monolithique, ils doivent tre maintenant polyvalents et qui plus est cratifs. Trois formes dintelligences gnrent sept structures cognitives et induisent sept types de communications pdagogiques (styles): envers chacune delles, lenseignant devra porter une attention particulire mme si la prpondrance de lune ou de certaines dentre elles savre primordiale en fonction de la spcialit enseigne. Les trois cellules souches de la cognition sont : - la logique - lanalogie - la norme On entend par logique lensemble des raisonnements qui permettent, de faon cohrente, de dduire la solution un problme en se rfrant des savoirs partags et acadmiquement admis comme pertinents. On entend par analogie lensemble des processus mentaux qui permettent, par associations dides, par comparaisons de sapprocher de la meilleure solution possible face une problmatique nouvelle. On entend par normatif ladhsion toute mthode, comportement, ou processus qui garantit, dans la mesure o les lments parasites sont matriss, la faisabilit dun rsultat escompt. Les interactions entre ces trois ples souches donnent naissance entre : - la logique et lanalogie, linduction, - lanalogie et la norme, limagination, - la logique et la norme, la dduction, et au barycentre desquels (point central de la triangulation) se situent linnovation, la crativit, la dcouverte de connaissances nouvelles, lesquelles, selon un mouvement cyberntique, viendront alimenter les savoirs antrieurs. Limportance plus ou moins grande quaccordera lenseignant chacune de ces trois res et leurs interactions, tant dans son rapport ses propres comptences qu celles quil souhaite dvelopper chez ses lves