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Rentrée littéraire 2015

Philippe Rey / Rentrée littéraire 2015

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Rentréelittéraire

2015

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Dans les semaines qui ont suivi la mort de sa fille Camille, 16 ans, emportée une veille de Noël après quatre jours d’une fièvre sidérante, Sophie Daull a commencé à écrire.

Écrire pour ne pas oublier Camille, son regard « franc, droit, lumineux », les moments de complicité, les engueulades, les fous rires ; l’après, le vide, l’orga-nisation des adieux, les ados qu’il faut consoler, les autres dont les gestes apaisent… Écrire pour rester debout, pour vivre quelques heures chaque jour en compagnie de l’enfant disparue, pour endiguer le raz de marée des pensées menaçantes.

Loin d’être l’épanchement d’une mère endeuillée ou un mausolée – puisque l’humour n’y perd pas ses droits –, ce texte est le roman d’une résistance à l’insupportable, où l’agencement des mots tient lieu de programme de survie : « la fabrication d’un belvédère d’où Camille et moi pouvons encore, radieuses, contempler le monde ».

En librairie le 20 août 2015ISBN : 978-2-84876-468-9, 14,5 × 22 cm, 192 pages, 16 €

Sophie Daull

Camille, mon envoléeroman

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Questions à Sophie Daull

L’histoire que vous racontez est celle de votre famille. Pourquoi avoir fait le choix du roman et non celui du témoignage ?

Parce que pour moi, faire usage des mots ne peut s’accompagner que d’un geste poétique. Je l’ai appris par le théâtre, par la lecture des « grands z’auteurs » ; donc par une distinction féroce que j’opère presque mécaniquement entre un discours journalistique, informatif, testimonial, et le mouvement de l’écriture.

L’ordonnance des mots, leur musicalité, l’architecture de la phrase organisent un dépassement du réel, même si « ce que l’on raconte » est parfaitement authentique. La littérature engendre un supplément de vie, de la vie ailleurs, de la vie rêvée. C’est à cette seule condition, dans cette unique démarche, poétique et rigoureuse, que ma douleur et le souvenir de Camille pouvaient être partagés ; qu’une sorte de dialogue pouvait se prolonger, dans les librairies, les bibliothèques… Quoi d’autre que le roman aurait permis ça ?

J’emprunte à Philippe Forest, qui me pardonnera, cette magnifique expression qu’il a fondée en écrivant L’Enfant Éternel « J’ai fait de ma fille un être de papier. »

Quelle est la signification du titre de votre livre ?C’est une expression qui se cache dans le texte à deux reprises… et elle a dicté

le titre quand nous le cherchions. Je sentais la nécessité de l’adresse, de la mise en avant de la relation, puisque ce texte est comme une longue lettre à Camille. Et il peut s’entendre dans une double acception : Camille, mon envolée, ma partie-pour-toujours, ma disparue… Mais aussi mon envolée à moi, cet étrange rebond que l’écriture a provoqué depuis le fond du puits de la détresse, comme un élan vers la vie sans elle, comme un envol vers un devenir-écrivain, où se libérerait une force qui me fait consentir à sa perte.

L’humour n’est pas absent de votre texte. Est-ce qu’il s’est imposé naturellement ou bien était-ce une volonté de votre part ?

De façon naturelle ! Je suis une personne qui, je crois, n’a jamais été dépourvue d’humour, et la mort de Camille n’a rien effacé des piliers majeurs de ma per-sonnalité. Mais surtout, l’humour est véritablement la marque des rapports que j’avais avec ma fille, même au plus fort des crises « mère-fille » que l’adolescence avait mises au jour. Nous partagions un nombre incalculable de private jokes et de savantes grimaces. Rire ensemble effaçait toutes les discordes. Et puis, j’ai hérité de ma pratique théâtrale, encore une fois, ce savoir immémoriel : aucune tragé-die n’est plus poignante que quand, au cœur du malheur, un messager essoufflé débarque en se plaignant de son maigre salaire, ou qu’une princesse blonde, au détour d’une phrase qu’elle pense inconséquente, fait chuter tout un empire…

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extrait

Montpellier – 22 janvierDemain, chaton, on sera le 23 janvier, le premier anniversaire de

ta mort, tant qu’on les compte en mois ; ce sera aussi ma première sur scène depuis que tu ne m’y applaudiras plus jamais.

Tu sais, maintenant, je suis obligée de calculer le nombre d’an-nées qui me séparent de la mort de ma mère. Ça fait vingt-neuf. J’ai recompté tout à l’heure.

Je supporte mal l’idée qu’il en sera peut-être de même pour les années qui me sépareront de ta mort – « combien ça fait déjà ? Ah !… Huit ans déjà ? »

Je supporte mal l’idée de te survivre un temps long comme l’oubli de ta mort.

Je supporte mal l’idée de vivre encore au moins un temps long comme ta vie, seize ans. Et pourtant mon espérance de vie statis-tique m’y condamne à coup sûr.

Désormais je vais faire ça : vivre la vie des en-allées trop tôt. Je dure dans trois vies de femmes maintenant, la mienne, la tienne et celle de ta grand-mère jamais connue.

Je vais inventer tes après-16 ans, ses après-45 ans. Oui je vivrai pour trois, mes envolées, je vivrai au cube, je serai l’anti fantôme, l’ultraspectre, la démolie qui vit de vos restes, de vos âmes, en miettes.

Je t’avais dit que je te raconterais les jours qui ont suivi, mais j’ai le temps. Tu n’es pas pressée.

Ça fait quand même bizarre de t’écrire, de te dire « tu », de dire

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« mon chaton », surtout d’ici, depuis cette chambre d’hôtel ; je t’ai si souvent écrit de longues lettres depuis mes chambres d’hôtel quand j’étais en tournée. Enfin, pas si souvent dernièrement, à cause de nos paresses et des « nouveaux moyens de communi-cation », comme on dit. J’ai Clochette-la-bougie avec moi. On se demande qui veille sur qui.

Papa dit des fois qu’on t’a volé ta vie.Il est obsédé par l’idée que peut-être tu t’es foutue en l’air.Parce qu’on ne t’a pas assez aimée, parce qu’on te mettait trop la

pression, parce qu’on était trop exigeants, parce qu’on était trop compliqués. Il délire. C’est ce besoin qu’il a de tout voir en noir, tu le connais. Mais là c’est un noir plus profond que quand l’univers n’existait même pas. Alors je dois le raisonner, faire pétiller tes fous rires dans son souvenir, et alors oui, il comprend que non, tu n’étais pas déprimée, que tu n’as pas volontairement fait faux bond. On a eu des sacrées tranches de rire tous les trois : tu fai-sais « l’ascenseur » devant la télé ou le long du bar de la cuisine, tu avais inventé le détective Didier Menu avec ton ciré bleu et la vieille pipe en ivoire de ma grand-mère, tu faisais la folle chaque jour de ta vie entre 19 h 15 et 19 h 45, et quand tu déformais le vi-sage de tes peluches pour leur donner d’inénarrables expressions, les nôtres étaient tordus de rire. Comment oublier ça ?

Dans cette maison, on s’aimait, on s’engueulait, on riait ; on était délicieusement libres de s’aimer, de s’engueuler, de rire. Ton jeune sang et le nôtre un peu plus épais formaient un fleuve intranquille où l’avenir battait pavillon.

C’est pour ça que je vivrai ta vie, que mon sang aura désormais toujours 16 ans. Tu me regarderas et me guideras, selon ce que tu fus, ce que tu promettais, ce que tu aimais de moi. Je vais exis-ter par en dessous, par soustraction, par extension de toi, dans la copie de ta pudeur contre mon excentricité, de ta réserve contre mon exubérance, de ton repli contre mes tripes à l’air.

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Sophie Daull est née dans l’est de la France.Comédienne, elle vit à Montreuil et travaille partout. Camille, mon envolée est son premier roman.

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Sous le charme, Dave, vigile dans un luxueux magasin londonien, laisse par-tir une jeune voleuse qu’il venait de surprendre. Sa journée terminée, il la dé-couvre dehors, à l’attendre. C’est le début d’une relation complexe, entre deux êtres abîmés, chacun dissimulant un lourd passé. Comment Alena, venue avec tant de projets de sa Russie natale, se retrouve-t-elle à la rue et sans papiers ? Pourquoi Dave vit-il comme en exil à quelques kilomètres de chez lui ? Qu’ont-ils bien pu traverser l’un et l’autre pour être si tôt désabusés ?

Le parcours d’Alena, lié aux réseaux de prostitution, est chargé de compro-missions, de peurs et d’espoirs étouffés. L’histoire de Dave part des cités an-glaises, à l’horizon bien bas, celle d’un garçon aux rêves d’aventure mais trop obéissant et un peu lâche. Page après page, ils s’apprivoisent, se rapprochent – en prenant soin d’éviter leurs zones d’ombre qui, bien évidemment, finiront par les rattraper.

Se gardant des clichés et du larmoyant, Kerry Hudson ne juge jamais ses per-sonnages, elle les raconte, avec leurs fragilités et leurs faiblesses. De Londres à la Sibérie en passant par Moscou, elle tresse un récit d’une grande finesse et livre une moderne et atypique histoire d’amour.

En librairie le 20 août 2015ISBN : 978-2-84876-470-2, 14,5 × 22 cm, 352 pages, 20 €

Kerry Hudson

La couleur de l’eauroman traduit de l’anglais (écosse)par Florence Lévy-Paoloni

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Questions à Kerry Hudson

Vous vous êtes appuyée sur votre histoire pour écrire votre premier roman. Qu’est-ce qui est à l’origine de La couleur de l’eau ?

Tout a commencé à Hackney en observant mon voisin d’en face arroser un triste petit rosier tous les jours. Il avait l’air si solitaire et il est devenu mon « Dave ». Je n’ai toujours aucune idée d’où me sont venues Alena et la Sibérie – je crois que c’est là que la magie de l’imagination l’emporte. Mais j’ai toujours été intéressée par la manière dont l’amour et le besoin peuvent construire ou briser les gens.

Au début, vos personnages sont perdus et le roman les suit alors qu’ils tentent de trouver leur place. Est-ce votre vie à Londres et vos voyages qui vous ont inspirée ?

J’ai grandi en bougeant de ville en ville et c’est quelque chose que j’ai continué à faire une fois adulte, mais avec plus d’entrain. Quand je me pose, c’est toujours à Londres, la parfaite ville de transit selon moi. Mes deux premiers romans et le troisième sur lequel je travaille actuellement parlent de voyages émotionnels et géographiques. Comment l’endroit où l’on se trouve influence notre personnalité et nos sentiments, et inversement.

J’ai été assez chanceuse de recevoir une bourse de l’Art Council England pour voyager à travers la Russie jusqu’à la campagne sibérienne. Honnêtement, sans ce voyage, je n’aurais jamais pu évoquer ces paysages, capturer les minuscules détails indispensables pour que cela fasse « réel ».

Malgré les thèmes sérieux (et parfois très sombres), on finit le livre sur un senti-ment d’espoir, même si la fin ne paraît pas idéale pour les personnages. Comment faites-vous cela ?

Quand je commence un livre, je n’ai que huit ou dix moments clefs en tête. Je savais que ça serait une histoire d’amour et que le ton serait assez optimiste, mais ni mièvre ni banal. Je souhaitais que les personnages triomphent, à leur propre échelle. Je voulais une histoire d’amour. Mais en vérité, la vie reste compliquée et difficile, alors j’ai essayé de trouver un équilibre. Que l’histoire soit assez réaliste pour ne pas être une happy end, mais qu’elle reste porteuse d’espoir. Je pense qu’il est important que le lecteur puisse participer, qu’on le laisse remplir les blancs par lui-même.

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extrait

Alena passa en revue les règles – c’était bien d’en avoir. Règle n° 1 : toujours à l’heure du déjeuner, il y a moins de vendeuses et celles qui restent ne font pas attention, elles ont faim et attendent avec impatience leurs soixante minutes de liberté. Règle n° 2 : les vête-ments n’ont pas d’importance. Sa robe bain de soleil unie en coton jaune pouvait passer pour un vêtement d’une simplicité très coû-teuse. Sauf à remarquer que les bretelles sciaient très légèrement la peau tendre entre ses aisselles et ses seins, personne n’aurait pu deviner qu’elle l’avait trouvée dans le carton de fripes d’un refuge pour femmes. De toute façon, elle avait vu des gens habillés de vieux vêtements hideux sortir de chez Harrods, des sacs brillants dans chaque main, puis monter dans des Bentley, comme si l’ar-gent les dispensait de se conformer aux normes habituelles.

Règle n° 3 : prendre l’Expression. Quelle que soit sa nervosité, elle pouvait toujours croire à l’Expression. Elle pouvait l’invoquer et cela ne lui coûtait rien. Du fait que ni l’argent ni la légitimité ne pétillait dans ses veines comme un champagne particulièrement doré, l’Expression troublait les gens ; elle ne cadrait pas avec ses cheveux coupés à la diable, ses épaules maigres et son air famé-lique. Elle haussa un tout petit peu les sourcils, releva son men-ton pointu, adopta un air indifférent, les paupières tombantes, et observa la vitrine.

Malgré tous les efforts de l’Expression, elle n’arrivait pas à contrô-ler son corps, les grondements de son ventre, son cœur qui battait assez fort pour lui déplacer une côte, ses aisselles poisseuses ; ce corps qui réagit instantanément à l’adrénaline dès l’instant où elle

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poussa la lourde porte en verre et sentit l’air conditionné fendre la chaleur écrasante de l’extérieur.

Il était là, le vigile habituel, beau gosse et inutile, celui qu’on trou-vait toujours dans ces magasins. Vêtu d’un costume noir élégant et d’une cravate, il semblait tout droit sorti d’une publicité pour un whisky, se prélassant devant une cheminée ou peut-être un chaton lové contre sa poitrine nue et huilée, comme sur le poster au mur de sa chambre quand elle avait quinze ans. Elle marqua un léger temps d’arrêt et fit son plus beau sourire supérieur, un salut froid de « petite dame » qu’elle avait un jour vu faire à une femme dans Chelsea. Règle n° 4 : toujours attirer l’attention, ne jamais donner l’impression qu’on entre furtivement.

« Après-midi, très belle. »Voulait-il dire qu’elle était belle ? L’Expression disparut une se-

conde ; le vigile émit un son qui ressemblait à un petit rire et se frotta le front. Alena pensa qu’il rougissait.

« L’après-midi… il fait beau. Désolé, je veux dire c’est une belle après-midi. »

Il avait un vrai accent londonien, un peu rugueux. Elle perce-vait ce genre de choses depuis le temps. Elle ne s’attendait pas à cela de la part de ce beau gosse, ni à sa timidité, à sa façon de se balancer légèrement sur les talons. Elle lui adressa tout de même un regard dédaigneux et monta vite au troisième étage examiner minutieusement les chaussures de luxe pour trouver celles de la photo arrachée au magazine et maintenant détrempée dans le bonnet gauche de son soutien-gorge. Règle n° 5 : elle ne devait jamais se faire prendre.

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Kerry Hudson est née en 1980 à Aberdeen. Très remarquée pour son premier roman, Tony Hogan m’a payé un ice-cream soda avant de me piquer maman, elle confirme son talent avec La couleur de l’eau. Elle a fondé le projet WoMentoring qui offre accompagnement et soutien à des auteures prometteuses.

Une presse britannique enthousiaste :« Le second livre de Kerry Hudson tient la promesse de son merveilleux premier roman, nous donnant un autre conte doux-amer d’amour et de déception tra-gique, imbibé d’alcool et teinté de sexe… Hudson a créé deux personnages atta-chants qui vous prennent aux tripes. » The List« Extrêmement émouvant, étonnamment fin et discret. » The Metro« Hudson reste au sein des classes ouvrières et montre une connaissance impres-sionnante et sensible d’un Londres authentique. » Irish Times« Frais et original… une histoire d’amour non sentimentale. » Harper’s Bazaar

Un second roman attendu après le succès de Tony Hogan...« Un tour de force éblouissant : faire d’une douleur et d’une lucidité sublimées une œuvre littéraire » Jean-Baptiste Harang, Le Magazine Littéraire« Un premier roman nerveux, vif, aux dialogues crus, férocement drôles ou tendres. Fascinant. » Sandrine Mariette, Elle« Dans une ambiance à la Ken Loach et à la Danny Boyle, Kerry Hudson évoque admirablement, avec cet humour féroce so british, les laissés-pour-compte de la croissance. Bingo ! » Marianne Payot, L’Express« À travers les lunettes déformantes d’un enfant, cette vie est tout sauf misérable – et c’est là la grande réussite de ce premier roman signé Kerry Hudson – mais comique, tendre. » Astrid Eliard, Le Figaro littéraire« Un chaos lumineux qui se lit cul sec. » Florence Stollesteiner, Libération

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éditions Philippe Rey7, rue Rougemont75009 Paris01 40 20 03 58

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