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FACULTES DE MEDECINE de TOULOUSE PURPAN - RANGUEIL Physiologie et Séméiologie de l'hémostase Pr. B. BONEU, Dr. Y.CADROY, Dr. J.P. CAMBUS PCEM 2 Purpan, DCEM 1 Rangueil Ce chapitre enseigné en PCEM2 ou DCEM1 selon les facultés fait partie d'une "trilogie" : physiologie et séméiologie de l'hémostase, physiopathologie des thromboses et traitement antithrombotiques, orientation diagnostique devant un trouble de l'hémostase et de la coagulation.

Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

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Page 1: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

FACULTES DE MEDECINE de TOULOUSE

PURPAN - RANGUEIL

Physiologie et Séméiologie de l'hémostase

Pr. B. BONEU, Dr. Y.CADROY, Dr. J.P. CAMBUS

PCEM 2 Purpan, DCEM 1 Rangueil

Ce chapitre enseigné en PCEM2 ou DCEM1 selon les facultés fait partie d'une "trilogie" : physiologie et séméiologie de l'hémostase, physiopathologie des thromboses et traitement antithrombotiques, orientation diagnostique devant un trouble de l'hémostase et de la coagulation.

Edition 2002

Page 2: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

TABLE DES MATIERES

- PHYSIOLOGIE DE L'HEMOSTASE PRIMAIREET PRINCIPAUX TESTS D'EXPLORATION 3

- PHYSIOLOGIE DE LA COAGULATION ETPRINCIPAUX TESTS D'EXPLORATION 13

- LE SYSTEME FIBRINOLYTIQUE ETPRINCIPAUX TESTS D'EXPLORATION 28

- LA CONSULTATION D'HEMOSTASE CHEZUN MALADE QUI PRESENTE UN SYNDROMEHEMORRAGIQUE. LE BILAN D'HEMOSTASE, ORIENTATION DIAGNOSTIQUE 33

- ANNEXE 1 : GLOSSAIRE DE SÉMÉIOLOGIE 39

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L'hémostase fait intervenir des mécanismes complexes dont le

dérèglement peut conduire aux hémorragies ou aux thromboses. Il est d'usage

de décrire les mécanismes de l'hémostase sous trois rubriques : l'hémostase

primaire, les voies endogène et exogène de la coagulation, la fibrinolyse.

Chacun de ces quatre chapitres correspond effectivement à des faits

expérimentaux identifiés: l'hémostase primaire recouvre les mécanismes mis

en jeu pour arrêter l'hémorragie provoquée au cours du temps de saignement ;

les voies endogène et exogène correspondent aux mécanismes de génération

de la thrombine dans l'épreuve du temps de coagulation ou du temps de

céphaline activé (endogène) et du temps de Quick (exogène) ; la fibrinolyse

décrit les mécanismes de lyse du caillot de fibrine.

Ne jamais oublier que, in vivo, ces mécanismes interviennent

simultanément et inter réagissent entre eux. Les examens de laboratoire qui

viennent d'être cités ne donnent qu'une faible idée de la complexité réelle des

phénomènes. Cette séparation en plusieurs chapitres est donc artificielle, mais

néanmoins nécessaire à la clarté de l'exposé des faits physiologiques.

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PHYSIOLOGIE DE L'HEMOSTASE PRIMAIRE

ET PRINCIPAUX TESTS D'EXPLORATION

- RESUME -

L'hémostase primaire correspond aux mécanismes initiaux mis en jeu pour

arrêter l'hémorragie survenant au niveau d'une plaie. Elle implique le

vaisseau, les plaquettes sanguines et des facteurs plasmatiques.

Le vaisseau est constitué de plusieurs tuniques, dont l'endothélium et le

sous-endothélium. L'endothélium est tapissé d'une couche monocellulaire

de cellules endothéliales; il n'est pas thrombogène. C'est le sous-

endothélium, riche en fibres de collagène et en microfibrilles, qui supporte

les mécanismes de l'hémostase primaire.

Les plaquettes sont de petits éléments anucléés, discoïdes et riches en

granules. Activées, elles changent de forme, libèrent leur contenu granulaire

(Ca++, ADP), et un puissant activateur plaquettaire et vasoconstricteur, le

thromboxane A2.

Les protéines plasmatiques impliquées dans l'hémostase primaire sont

essentiellement représentées par le facteur Willebrand et le fibrinogène.

Ces deux molécules sont présentes dans le plasma et à l'intérieur des

plaquettes où elles sont libérées lors de la dégranulation.

In vivo, lors d'une lésion vasculaire, le facteur Willebrand, adsorbé sur le

subendothélium, assure l'adhésion des plaquettes à la paroi.

Secondairement, les plaquettes s'activent et s'agrègent mutuellement par

l'intermédiaire du fibrinogène. Elles servent de support au phénomène de

coagulation, qui intervient simultanément pour consolider ce "clou

hémostatique".

L'hémostase primaire s'explore globalement par la mesure du temps de

saignement (Ivy-incision < 10 min). L'étude plaquettaire (numération et plus

rarement étude qualitative de l'agrégation plaquettaire), le dosage du

facteur Willebrand et du fibrinogène peuvent également être réalisés. Enfin,

aucune méthode fiable ne permet d'évaluer spécifiquement le vaisseau.

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PHYSIOLOGIE DE L'HEMOSTASE PRIMAIRE

ET PRINCIPAUX TESTS D'EXPLORATION

L'hémostase primaire correspond à l'ensemble des mécanismes mis en oeuvre pour arrêter l'hémorragie provoquée au niveau d'une petite plaie telle que le réalise le temps de saignement. Elle fait intervenir le vaisseau, les plaquettes et aussi certains facteurs de la coagulation dont le rôle est de générer localement des traces de thrombine. Cette thrombine précoce active les plaquettes et favorise sa propre formation par mécanisme auto-catalytique.

I - LES FACTEURS INTERVENANT DANS L'HEMOSTASE PRIMAIRE.

A. LE VAISSEAU.

On décrit très schématiquement trois tuniques dans un vaisseau : l'intima, qui correspond à l'endothélium et au sous-endothélium ; la media, qui correspond aux muscles lisses de la paroi grâce auxquels le vaisseau est doué de vasomotricité ; l'adventice, qui correspond au conjonctif péri-vasculaire qui contient les vaisseaux nourriciers.

L'endothélium, le sous-endothélium et les cellules musculaires lisses de la paroi jouent un rôle important dans l'hémostase et la thrombose.

1) L'endothélium

L'endothélium est constitué par une couche monocellulaire qui tapisse la face interne des vaisseaux ; sa surface est considérable, environ 150 m2 chez un adulte. Il sépare les plaquettes et les facteurs de la coagulation du sous-endothélium. Un endothélium sain n'est pas thrombogène. La thromborésistance est le résultat de propriétés passives et actives des cellules endothéliales qui empêchent l'adhésion et l'activation des plaquettes à leur surface et l'activation de la coagulation. Parmi ces propriétés, on peut citer :

la synthèse et la libération de la prostacycline

La prostacycline ou PG I2 est une prostaglandine qui dérive de l'acide arachidonique, possède une action anti-agrégante et vasodilatatrice très puissante. La PGI2 constitue un mécanisme de défense locale de la paroi saine contre la thrombose.

la synthèse et la libération de monoxyde d'azote (NO)

Le monoxyde d'azote est synthétisé à partir de la L-arginine. Il possède une puissante action vasodilatatrice et antiplaquettaire.

le système de la thrombomoduline - protéine C - protéine S

Ce système sera étudié dans un chapitre ultérieur. Par ce système, l'endothélium apparaît capable de réguler la génération de la thrombine. Les déficits congénitaux hétérozygotes en protéine C et S favorisent la survenue des thromboses veineuses.

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les substances héparine-like

L'endothélium est riche en héparan sulfate, glycosaminoglycane proche de l'héparine, activateur de l'antithrombine III. L'antithrombine III neutralise de nombreuses enzymes impliquées dans la coagulation.

la synthèse et libération de l'activateur tissulaire du plasminogène.

Cet activateur, encore appelé Tissue Plasminogen Activator (t-PA), joue un rôle essentiel dans la fibrinolyse dont le rôle est de reperméabiliser les vaisseaux (voir chapitre fibrinolyse). Le t-PA, actuellement synthétisé par des méthodes de biologie moléculaire, est disponible comme médicament thrombolytique.

La cellule endothéliale peut être stimulée et/ou lésée par traumatisme, infection, lésions inflammatoires, immunologiques ou métaboliques.... Stimulée, la cellule endothéliale devient thrombogène par plusieurs mécanismes. Parmi ceux-ci on peut citer :

Le facteur Willebrand

Est une glycoprotéine de très haut poids moléculaire nécessaire à l'adhésion des plaquettes au sous-endothélium. Il se lie aux fibres sous-endothéliales et à un récepteur spécifique sur la membrane plaquettaire. Les malades atteints de maladie de Willebrand ne synthétisent pas ce facteur, ou en synthétisent une quantité réduite, ou une forme anormale ; ces malades présentent donc un déficit de l'adhésion des plaquettes et par conséquent un allongement du temps de saignement en cas de déficit important. L'autre rôle important du facteur Willebrand est de transporter le facteur VIII de la coagulation dans le plasma. Dans la maladie de Willebrand il existe aussi un trouble de la coagulation par diminution du facteur VIII

Le facteur tissulaire

Stimulée, la cellule endothéliale synthétise et exprime à sa surface le facteur tissulaire qui est l'initiateur principal de la coagulation.

Le PAI

Enfin, stimulée la cellule endothéliale libère un inhibiteur de l'activateur tissulaire du plasminogène, le PAI (Plasminogen Activator Inhibitor)

Lorsque la cellule endothéliale est traumatisée, il y a desquamation et exposition du sous-endothélium thrombogène.

2) Le sous-endothélium

Le sous-endothélium constitue plus une zone fonctionnelle qu'anatomique. Il comprend la membrane basale, des fibres de collagène, des microfibrilles et du facteur Willebrand synthétisé par la cellule endothéliale sus-jacente. C'est à ce feutrage fibrillaire que les plaquettes adhérent lorsque l'endothélium est lésé.

3) La media

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Elle est composée, notamment au niveau artériel, de cellules musculaires lisses. Le muscle lisse vasculaire est doté de récepteurs qui lui permettent de se relaxer sous l'effet de la PGI2, et de se contracter sous l'effet du thromboxane A2 plaquettaire. Par l'expression de facteur tissulaire, elles peuvent initier les mécanismes de coagulation et de thrombogénèse. Enfin, elles peuvent proliférer et leur prolifération est sous la dépendance de facteurs de croissance, notamment le Platelet-Derived-Growth-Factor (PDGF) impliqués dans l'athérogénèse.Structure schématique d’une artériole.La paroi d’une artériole est schématiquement composée de trois couches anatomiques. La lumière vasculaire est bordée par l’intima qui se compose d’une monocouche de cellules endothéliales reposant sur la matrice extracellulaire sous-endothéliale. La média, composée de cellules musculaires lisses et de leur matrice conjonctive et élastique, est limitée par les limitantes élastique internes et externes. A l’extérieur, le vaisseau est entouré par l’adventice contenant des fibroblastes et des adipocytes.

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Page 8: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

B. LES PLAQUETTES.

1) Origine, durée de vie, morphologie

Les plaquettes proviennent de la fragmentation du cytoplasme du mégacaryocyte thrombocytogène. Cette cellule médullaire est très originale puisque, contrairement aux autres cellules hématopoïétiques, son noyau se divise plusieurs fois sans que le cytoplasme se divise. Les mégacaryocytes augmentent considérablement de taille et possèdent un noyau polyploïde avec 8, 16 et 32 n chromosomes. A un moment donné de sa maturation, la membrane du mégacaryocyte s'invagine et délimite une multitude de petits territoires cytoplasmiques qui constituent les plaquettes.

Les plaquettes normales et non activées ont une forme discoïde parfaitement lisse ; leur diamètre est compris entre 2 et 4 microns. Dès qu'elles sont activées par contact avec par exemple une surface étrangère, elles émettent des prolongements cytoplasmiques à distance, ce qui augmente considérablement l'espace qu'elles occupent. Les plaquettes sont très riches en granules qui contiennent des substances très actives telles que l'ADP, le calcium et le facteur Willebrand. Elles sont dépourvues de noyau et ont une espérance de vie de 10 jours chez le sujet normal.

2) Fonctions des plaquettes dans l'hémostase primaire

L'adhésion au sous-endothélium.

C'est le premier phénomène qui intervient après la lésion de l'endothélium. Adsorbé au sous-endothélium, le facteur Willebrand se lie aux plaquettes, et joue le rôle de lien entre le sous-endothélium et un récepteur spécifique de la membrane plaquettaire, la glycoprotéine Ib. Une anomalie au niveau du facteur de Willebrand (maladie de Willebrand) ou de cette glycoprotéine (exceptionnelle thrombopathie de Bernard-Soulier) se traduit par des manifestations hémorragiques.

Une fois adhérente au sous-endothélium, la plaquette est activée et elle sécrète de nombreux médiateurs présents dans les granules (ADP) ou synthétisés lors de l'activation plaquettaire (thromboxane A2).

L'activation plaquettaire.

A la suite du phénomène d'adhésion, la plaquette subit un processus d'activation. Elle perd son aspect discocytaire lisse et elle sécrète alors une grande partie du contenu de ses granules dont le calcium et l'ADP, (un agoniste plaquettaire) et le thromboxane A2 (TX A2)

Le TX A2 est une prostaglandine dérivée de l'acide arachidonique qui possède les effets inverses de la prostacycline : effet proagrégant et vasoconstricteur. L'aspirine inhibe une enzyme impliquée dans la synthèse du TX A2 et de la PG I2. L'aspirine est utilisée comme médicament antiagrégant plaquettaire.

L'agrégation plaquettaire.

Sous l'influence de l'ADP, et du thromboxane A2 libérés par la plaquette, du collagène présent sur le sous-endothélium, et de la thrombine générée par l'activation de la coagulation, les plaquettes s'accolent mutuellement. Cette

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agrégation fait intervenir le fibrinogène et une glycoprotéine membranaire plaquettaire, la glycoprotéine IIb/IIIa. Une fois activée, la plaquette devient capable d'interagir avec le fibrinogène. L'absence de fibrinogène ou une anomalie de la glycoprotéine IIb/IIIa entraîne des manifestations hémorragiques. Des molécules développées contre cette glycoprotéine, anticorps (Réopro) ou peptide anti-glycoprotéine IIb-IIIa, sont aussi développés comme médicament antithrombotique. Par ailleurs, la ticlopidine (Ticlid) et le clopidogrel (Plavix) sont des anti-agrégants puissants qui agissent en s'opposant à la fixation du fibrinogène à la membrane des plaquettes activées par l'ADP.

Les plaquettes qui s'agrègent présentent à leur tour un phénomène de sécrétion. Il y a donc ici un mécanisme auto-entretenu.

3) Fonction des plaquettes dans la coagulation

Au cours du processus d'activation, les phospholipides constitutifs de la membrane des plaquettes sont réorganisés. La phosphatidyl serine passe du feuillet interne au feuillet externe de la membrane. La membrane plaquettaire devient alors capable de lier les facteurs de coagulation (vitamine K dépendants) et elle favorise leur interaction. Cette activité catalytique de la membrane plaquettaire explique la focalisation de la génération de la thrombine qui est confinée à la surface de l'agrégat de plaquettes.

C. FACTEURS PLASMATIQUES DE LA COAGULATION.

Ces facteurs interviennent dès les premiers instants de l'hémostase primaire ; ce système physiologique sera étudié dans le chapitre suivant.

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Formation du clou hémostatiqueL'arrêt du saignement au niveau d'une brèche vasculaire est obtenu par la formation d'un clou hémostatique extravasculaire. La section d'un petit vaisseau entraîne une vasoconstriction transitoire, la perte de sang, puis l'adhésion des plaquettes au tissu conjonctif sous-endothélial et l'agrégation des plaquettes. L'initiation de la coagulation va entraîner la formation de fibrine qui stabilise le clou hémostatique et assure l'hémostase.

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Page 11: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

II - MISE EN JEU DES FACTEURS DE L'HEMOSTASE PRIMAIRE.

Pour simplifier et fixer les idées, le modèle que constitue l'épreuve du temps de saignement sera pris comme exemple. Les phénomènes sont difficiles à schématiser car ils interviennent presque simultanément. Il faut cependant distinguer les phénomènes endothélio-plaquettaires et les phénomènes de coagulation associés à l'hémostase primaire.

A. PHENOMENES ENDOTHELIO-PLAQUETTAIRES .

La rupture de la continuité vasculaire et endothéliale entraîne une vasoconstriction réflexe et donc une stase favorable au déroulement des réactions d'hémostase. L'exposition des fibres sous-endothéliales provoque la succession des phénomènes d'adhésion - sécrétion - agrégation - sécrétion-agrégation, etc... Ainsi, se forment un ou plusieurs agrégats plaquettaires qui vont colmater la brèche vasculaire en quelques minutes.

B. PHENOMENES DE COAGULATION ASSOCIES A L'HEMOSTASE PRIMAIRE.

Ces phénomènes ne peuvent être dissociés des interactions endothélio-plaquettaires car ils sont simultanés et intriqués. La rupture de la continuité vasculaire a pour effet de mettre en contact le secteur extra- et intra-vasculaire et donc de favoriser le contact du facteur tissulaire avec les facteurs plasmatiques de la coagulation.

En quelques secondes, de la thrombine est générée en petite quantité.

La thrombine :

- fait apparaître les premiers filaments de fibrine qui consolident l'agrégat plaquettaire ;

- active fortement les plaquettes et accroît la surface catalytique nécessaire à sa propre formation ;

- active fortement deux facteurs plasmatiques de la coagulation (facteurs V et VIII) nécessaires à sa propre formation.

Ainsi, les réactions d'hémostase, une fois initiées, ont tendance à s'accroître spontanément. Il existe des systèmes régulateurs puissants destinés à contrôler la génération de la thrombine: antithrombine III, système de la protéine C...

Cette étude de la physiologie laisse prévoir que la pathologie déficitaire de l'hémostase primaire se traduira généralement par un allongement du temps de saignement. La cause pourra relever : d'une anomalie du vaisseau ; d'un déficit quantitatif ou qualitatif en plaquettes ; d'une diminution d'un facteur plasmatique de la coagulation indispensable

aux fonctions d'adhésion et d'agrégation : facteur Willebrand et fibrinogène.

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III - PRINCIPAUX TESTS D'EXPLORATION DE L'HEMOSTASE PRIMAIRE.

Deux tests dominent en pratique l'exploration de l'hémostase primaire : la numération plaquettaire et le temps de saignement. Dans certains cas, il est nécessaire d'étudier les fonctions plaquettaires, mais il faut alors s'adresser à certains laboratoires spécialisés.

A. NUMERATION PLAQUETTAIRE.

Le chiffre normal de plaquettes varie de 150 à 400 Giga/L. On parle de thrombocytopénie au-dessous de 150 Giga/L. Les thrombocytopénies constituent de loin la cause la plus fréquente des anomalies de l'hémostase primaire.

B. TEMPS DE SAIGNEMENT.

Ce test explore toutes les phases de l'hémostase primaire. Il en existe plusieurs variantes techniques :

1) Méthode d'Ivy-3 points

Cette méthode se pratique à l'avant-bras, tandis qu'un brassard à tension artérielle est gonflé à 4 cm de Hg au niveau du bras afin d'assurer une légère hypertension veino-capillaire. Elle consiste à réaliser 3 blessures punctiformes à l'aide d'une microlance BD. Le temps de saignement normal est de 2 à 4 min, de toute façon < 5 min.

2) Méthode d' Ivy-incision

Cette méthode est identique à la méthode des 3 points, mais ici on réalise une incision de 1 mm de profondeur et de 1 cm de long. Le temps de saignement normal est de 4 à 8 min, de toute façon < 10 min. Cette méthode est la méthode de référence que l'on doit utiliser dans toute exploration fine de l'hémostase primaire. Elle est réalisée à l'aide d'appareils à usage unique.

Le temps de saignement est un test opérateur dépendant et peu reproductible.

Certaines causes d'allongement sont fréquentes et il faut savoir les éliminer :

blessure d'un vaisseau sous-cutanée ; prise récente d'aspirine (jusqu'à 8 jours) ; malade sous anticoagulant à forte dose; thrombocytopénie : l'allongement du temps de saignement est tellement

régulier et attendu chez un malade thrombocytopénique, qu'il vaut mieux éviter de réaliser ce test chez un tel malade si on connaît le diagnostic au préalable. Le temps de saignement peut être dans les limites de la normale quand les plaquettes sont à 100 Giga/L, il est toujours très allongé au-dessous de 50 Giga/L.

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Page 13: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

C. TEMPS DE SAIGNEMENT «   IN VITRO   ».

Le temps de saignement « in vitro » est un nouveau test simple et rapide d’exploration globale de la fonction plaquettaire. Il s’effectue sur un tube citraté à l’aide d’un automate (PFA 100). Il mesure le temps d’occlusion d’un capillaire recouvert de collagène/adrénaline par le clou hémostatique. Le temps d’occlusion est allongé en cas d’anémie, de thrombopénie, de thrombopathie et de prise d’aspirine. Ce test détecte également avec une bonne sensibilité la maladie de Willebrand. En raison de sa facilité de mise en oeuvre, de sa bonne reproductibilité et de son excellente sensibilité, ce test est amené à remplacer le temps de saignement par les autres méthodes. Seuls certains laboratoires le réalisent.

D. ETUDE DES FONCTIONS PLAQUETTAIRES.

L'étude des fonctions plaquettaires est à envisager lorsque le temps de saignement est allongé et la numération des plaquettes est normale. On étudie ainsi l'agrégation des plaquettes en présence de différents agonistes (ADP, thrombine, collagène, acide arachidonique...). L'étude des phénomènes d'adhésion et de sécrétion plaquettaire ne fait partie que du domaine de la recherche.

E. ETUDE DU FACTEUR WILLEBRAND.

Ce facteur synthétisé par l'endothélium est nécessaire à l'adhésion des plaquettes. Des méthodes immunologiques et d'activité biologique permettent de le doser.

F. ETUDE DU FIBRINOGENE.

Outre sont rôle dans la coagulation sous forme de fibrine, le fibrinogène est nécessaire à l'agrégation des plaquettes. Des méthodes simples d'activité biologique permettent de le doser.

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Page 14: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

PHYSIOLOGIE DE LA COAGULATION ET

PRINCIPAUX TESTS D'EXPLORATION

- RESUME -

La coagulation résulte d'une cascade de réactions enzymatiques qui aboutit

à la conversion du fibrinogène soluble en fibrine insoluble pour former le

caillot. Elle met en jeu toute une série de facteurs de coagulation dont

l'action est régulée par des protéines anticoagulantes (Antithrombine,

Protéines C et S).

Toutes les protéines de la coagulation sont synthétisées par le foie. Les

facteurs II, VII, IX, X et les protéines anticoagulantes C et S nécessitent la

présence de vitamine K pour être fonctionnels. Le fibrinogène, les facteurs

II, V, VIII, XIII et l'Antithrombine sont les facteurs consommés au cours de la

coagulation.

Les mécanismes de coagulation interviennent sur des phospholipides qui

focalisent le phénomène et servent de surface catalytique pour l'activation

enzymatique.

In vitro, on distingue une voie exogène rapide et déclenchée par le facteur

tissulaire, et une voie endogène plus lente et déclenchée au niveau des

facteurs contacts. Au laboratoire, la première voie est explorée par le temps

de Quick exprimé par le taux de prothrombine, la deuxième, par le temps de

céphaline activé. La fibrinoformation peut être explorée par le temps de

thrombine. Enfin, chacune des protéines de la coagulation peut être dosée

de manière individuelle.

In vivo, la distinction des 2 voies est artificielle, la voie déclenchée par le

facteur tissulaire est primordiale.

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Page 15: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

PHYSIOLOGIE DE LA COAGULATION

ET PRINCIPAUX TESTS D'EXPLORATION

La seule étape visible de la coagulation correspond à la conversion du fibrinogène soluble en fibrine insoluble qui constitue l'armature du caillot. Cette conversion est la conséquence d'une cascade de réactions enzymatiques à laquelle participent plusieurs facteurs. Chacun de ces facteurs et chacune des étapes de cette cascade peuvent s'explorer par le bilan d'hémostase.

I - LES FACTEURS DE LA COAGULATION.

A. NOMENCLATURE.

La plupart des facteurs de la coagulation ont été découverts et décrits d'après l'observation de maladies hémorragiques congénitales dues à l'absence d'une activité biologique présente chez l'homme normal. Par la suite, ces facteurs ont été isolés, et purifiés. Un chiffre romain leur a été attribué comme cela est indiqué dans le tableau suivant :

I : fibrinogène VIII : facteur anti-hémophilique AII : prothrombine IX : facteur anti-hémophilique BIII : thromboplastine ou X : facteur Stuart

facteur tissulaire XI : P T AIV : calcium XII : facteur HagemanV : accélérine XIII : facteur stabilisant de la fibrineVII : proconvertine (FSF)

B. LES FACTEURS SYNTHETISES PAR LE FOIE.

Tous les facteurs de la coagulation, sauf les facteurs III et IV, sont synthétisés par l'hépatocyte. En conséquence, chaque fois qu'il existe une insuffisance hépato-cellulaire grave, quelle qu'en soit la cause, on observera une diminution globale, de l'activité de tous les facteurs de la coagulation. Il faut toutefois noter que le lieu de synthèse du facteur VIII est aussi extra-hépatique. Ainsi, le taux de ce facteur au cours des insuffisances hépato-cellulaires graves est généralement normal, ou augmenté (syndrome inflammatoire).

C. LES FACTEURS SYNTHETISES EN PRESENCE DE VITAMINE K.

La vitamine K intervient au stade terminal de la synthèse de quatre facteurs de la coagulation : la Prothrombine (II), la Proconvertine (VII), le facteur Stuart (X) et le facteur anti-hémophilique B (IX). Ces facteurs sont purifiés et concentrés dans une fraction plasmatique à usage thérapeutique, le PPSB.

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Page 16: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

La vitamine K est également nécessaire à la synthèse de deux inhibiteurs physiologiques de la coagulation, la protéine C et la protéine S (voir paragraphe "Système de régulation de la coagulation"). En l'absence de vitamine K, l'hépatocyte synthétise et libère des facteurs de coagulation biologiquement inactifs parce qu'incapables de ce complexer avec le calcium et les phospholipides. Les facteurs dont la synthèse dépend de la vitamine K sont très stables et leur activité se conserve bien dans le sang prélevé, même après plusieurs jours de stockage. Les antivitamines K sont des médicaments anticoagulants très largement utilisés.

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Page 17: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

Les facteurs vitamine K-dépendants.

D. LES FACTEURS CONSOMMES AU COURS DE LA COAGULATION.

L'activité d'un certain nombre de facteurs de la coagulation est présente dans le plasma mais absente du sérum après coagulation : les facteurs consommés, sont au nombre de 4 :

- le fibrinogène (I) qui est converti en fibrine ;- la prothrombine (II) qui donne naissance à la thrombine, cette dernière est

rapidement inactivée, dès qu'elle a coagulé le fibrinogène ;- l'accélérine (V) et le facteur anti-hémophilique A (VIII) qui voient leur activité

détruite par la thrombine qui apparaît au cours de la coagulation.

La diminution de ce groupe de facteurs s'observe dans les "coagulopathies de consommation", situation où l'utilisation de ces facteurs dans un processus de thrombose dépasse les possibilités de synthèse par le foie.

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Page 18: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

Les facteurs consommés.

E. LES COFACTEURS DE LA COAGULATION.

L'accélérine (V) et le facteur anti-hémophilique A (VIII) sont dépourvus d'activité enzymatique et jouent un rôle de catalyseur dans certaines réactions enzymatiques de la coagulation. Leur activité augmente sous l'action de traces de thrombine, mais un contact prolongé avec cette enzyme détruit leur activité (facteurs consommés). De même, les facteurs Va et VIIIa peuvent être inactivés par la protéine C activée en présence de protéine S. Leur activité diminue rapidement dans les flacons de sang et il est nécessaire de congeler le plasma rapidement après le prélévement pour conserver au mieux leur activité.

Les cofacteurs.

F. LES FACTEURS CONTACT ET LEURS ROLES PHYSIOLOGIQUES.

Ces facteurs correspondent au facteur Hageman (XII) et PTA (XI). On les appelle facteurs contact pour signifier que c'est leur contact avec une paroi mouillable ou électronégative qui déclenche leur activation puis celle des autres facteurs de la cascade enzymatique que représente la coagulation. Ces facteurs participent à deux autres systèmes étroitement reliés à celui de la coagulation : l'inflammation et la fibrinolyse. Le facteur XII participe à l'activation de la prékallikréine (facteur Fletcher) et du kininogène de haut poids moléculaire (facteur Flaujeac). Le facteur XII participe encore à l'activation du plasminogène, le précurseur de la plasmine qui est l'enzyme de la fibrinolyse.

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Page 19: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

Les facteurs contact.

Un déficit même important en facteur XII, Fletcher (Prékallikréïne) ou Flaujeac (Kininogène de haut PM) n'entraîne jamais d'hémorragie malgré des tests de coagulation in vitro très perturbés. Cette observation montre que les facteurs contact ne jouent pas de rôle dans l'hémostase physiologique in vivo.

G. LES PHOSPHOLIPIDES ET LE CALCIUM.

Les phospholipides constituent une surface catalytique pour l'activation enzymatique des facteurs de la coagulation. Ces phospholipides proviennent de deux sources principales :

- au cours de son activation, la membrane des plaquettes subit des modifications qui accroissent son pouvoir coagulant. Les plaquettes interviennent dans la voie endogène de la coagulation.

- au cours des blessures vasculaires, on assiste à la libération de facteur tissulaire et de phospholipides qui interviennent dans la voie exogène de la coagulation.

Ces phospholipides sont utilisés quotidiennement au laboratoire pour l'exécution de certains tests courants : la céphaline remplace les plaquettes dans le temps de céphaline, la thromboplastine utilisée dans le temps de Quick n'est autre qu'un mélange de phospholipides et de facteur tissulaire.

Le calcium est indispensable à la fixation des protéines de la coagulation sur les phospholipides. Il suffit donc de décalcifier le sang pour le rendre incoagulable ; cette propriété est utilisée pour anticoaguler le sang destiné aux examens d'hémostase.

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Page 20: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

H. LE FIBRINOGENE ET LE FACTEUR XIII.

Le fibrinogène est le substrat final de la coagulation. Il coagule, c'est-à-dire se polymérise sous l'action de la thrombine. Le polymère de fibrinogène est stabilisé par le facteur XIII qui crée des liaisons covalentes entre les monomères de fibrine.

Le fibrinogène est synthétisé par le foie, et son taux normal est compris entre 1.5 à 4 g/l ; il augmente avec l'âge, dans les états infectieux et inflammatoires ; il diminue dans les défauts de synthèse acquis ou congénitaux, à moins qu'il ne soit utilisé en excés au cours d'une coagulopathie de consommation ou d'un processus fibrinolytique sub-aigü.

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Page 21: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

II - MISE EN JEU DES FACTEURS DE LA COAGULATION.

A. LES LOIS GENERALES DE LA COAGULATION.

La coagulation correspond sur le plan biochimique à une cascade d'activations enzymatiques dans un ordre donné. Chacune des enzymes de la coagulation est présent dans le plasma à l'état de précurseur inactif et l'activation correspond à une protéolyse limitée et spécifique. Pour distinguer le précurseur inactif de la forme activée, on lui affecte la lettre a. Ainsi, la prothrombine correspond au facteur II tant que la thrombine correspond au facteur IIa. Deux facteurs de la coagulation sont dépourvus d'activité enzymatique, le facteur anti-hémophilique A (VIII) et l'accélérine (V). Ce sont deux co-facteurs qui accélèrent la vitesse d'activation des autres enzymes.

La coagulation est un mécanisme auto-amplifié : la thrombine qui active les plaquettes et les facteurs V et VIII, favorise sa propre formation.

La coagulation est un phénomène focalisé qui survient à la surface des phospholipides fournis par la membrane plaquettaire ou les autres membranes, cellulaires lésées. Une thrombose se développe donc généralement sur une paroi vasculaire lésée où les plaquettes adhèrent, agrègent et fournissent aux enzymes de la coagulation la surface catalytique qui favorise leurs interactions.

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Cascade enzymatique intervenant dans les classiques voies intrinsèques et extrinsèques in vitro.

B. MISE EN JEU DE LA COAGULATION IN VITRO.

Des expériences simples permettent de mettre en évidence deux voies possibles pour coaguler le sang :

- lorsque le sang natif est recueilli dans un tube en verre, il coagule spontanément au bout de 6 à 8 minutes. Le contact du sang avec le verre suffit donc à initier les réactions enzymatiques de la coagulation. Cette activation fait intervenir le facteur Hageman et d'autres facteurs présents dans le sang sans qu'il soit nécessaire d'y ajouter aucun facteur exogène. Les mécanismes mis en jeu portent le nom de voie endogène de la coagulation. Si le sang est recueilli dans un tube non mouillable, plastique ou verre siliconé, le temps de coagulation est très allongé et peut atteindre 30 minutes. Dans cette expérience, les propriétés de contact entre le sang et le tube ont été modifiées; ceci montre l'importance de la notion de contact et le rôle du facteur Hageman dans la coagulation endogène ;

- lorsqu'on ajoute au sang natif du facteur tissulaire, la coagulation est très rapide et survient en 10 à 15 secondes. Les mécanismes mis en jeu sont ceux de la voie exogène de la coagulation. La cinétique très rapide de cette voie explique qu'elle est impliquée dès les premiers instants de l'hémostase primaire. Par ailleurs, au cours des prélèvements de sang techniquement imparfaits, il y a risque de contamination par le suc tissulaire, ce qui aboutit à une coagulation partielle du prélèvement ; ceci montre le soin tout particulier qu'il faut apporter aux prélèvements destinés à l'étude de la coagulation.

C. LA VOIE ENDOGENE DE LA COAGULATION IN VITRO.

Cette séquence correspond aux réactions qui interviennent "le temps de coagulation" ; ancien test d'exploration aujourd'hui abandonné et remplacé par le temps de céphaline activée (TCA) Dès que le sang natif est au contact du verre, le facteur Hageman (XII) s'active. Cette activation nécessite la coopération des facteurs Fletcher et Flaujeac. Survient alors une cascade d'activation dans l'ordre suivant : facteur Hageman (XII), facteur PTA (XI), facteur anti-hémophilique B (IX), facteur Stuart (X), prothrombine (II). L'activation du facteur X par le IXa et du II par le Xa a lieu à la surface des phospholipides en présence de calcium et soit de facteur anti-hémophilique A (VIII) pour le X, soit d'accélérine (V) pour le II. Ainsi se forme la thrombine, enzyme terminal de la cascade qui va coaguler le fibrinogène.

D. LA VOIE EXOGENE DE LA COAGULATION IN VITRO.

Cette séquence correspond aux réactions qui interviennent dans le temps de Quick, test d'hémostase où l'on ajoute de la thromboplastine, mélange de phospholipides et de facteur tissulaire au plasma. La voie exogène de la coagulation commence par l'activation du facteur VII par le facteur tissulaire puis l'activation du facteur X et du facteur II. Les dernières étapes sont identiques à celles de la voie endogène.

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Page 23: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

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E. LA COAGULATION PHYSIOLOGIQUE IN VIVO.

La distinction des deux voies endogènes et exogènes n'existe pas in vivo. L'initiation de la coagulation survient au niveau d'une paroi vasculaire lésée où le facteur tissulaire est libéré et les plaquettes adhèrent. La première étape de la coagulation est l'activation du facteur VII. Le complexe facteur tissulaire - facteur VIIa active aussi bien le facteur X que le facteur IX. Les facteurs Xa et IXa activent en retour le facteur VII. Le complexe [facteurs IXa – facteur VIIIa- calcium - phospholipide] protéolyse le facteur X en Xa. Il y a ainsi de nombreuses boucles de rétroactivation qui concourent à la génération rapide et explosive de la thrombine (IIa). Dans ce schéma, peu d'importance est accordée à l'activation des facteurs contacts : les déficits en facteurs contacts sont asymptomatiques.

La coagulation in vivo.Ce schéma remplace désormais la classique cascade avec ses deux voies intrinsèque et extrinsèque. L'initiation de la coagulation commence par l'interaction entre le facteur tissulaire (FT) et le facteur VII.L'activation du facteur IX par le facteur tissulaire est l'un des mécanismes d'amplification de la génération de thrombine. On remarquera le rôle accessoire du système contact dont les anomalies perturbent les tests de coagulation in vitro, mais sont asymptomatiques.Les réactions essentielles de la coagulation font intervenir les facteurs VII, X, IX et II c'est-à-dire les 4 facteurs vitamine K dépendants fixés à la surface des phospholipides anioniques par l'intermédiaire du calcium ionisé.

F. LA THROMBINE ET SES FONCTIONS

La thrombine a de multiples fonctions. La thrombine clive le fibrinogène pour former les monomères de fibrine et libèrer 4 petits fragments : les fibrinopeptides A et B. Cela permet la polymérisation des monomères de fibrine qui viennent de se former. La thrombine active le facteur XIII qui stabilise le gel de fibrine en créant des liaisons covalentes solides entre les monomères polymérisés.

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Elle active également d'autres facteurs de la coagulation, notamment les facteurs V et VIII : elle entretient donc sa propre formation.

La thrombine est un puissant activateur des plaquettes. Elle stimule également la prolifération des cellules de la paroi vasculaire, elle est donc impliquée dans les phénomènes d'athérogénèse.

Enfin, la thrombine régule sa propre formation par le système de la protéine C et S (voir système de régulation de la coagulation).

Vu les multiples rôles de la thrombine, on comprend que cette enzyme constitue une cible fondamentale pour la mise au point de médicaments antithrombotiques.

III - LE SYSTEME DE REGULATION DE LA COAGULATION.

A. NECESSITE D'UN SYSTEME DE REGULATION.

Les facteurs de la coagulation sont en excès dans le sang. L'observation des hémophiles montre qu’au-dessus de 15% de facteur VIII ou IX, il n'y a jamais d'hémorragie spontanée. La quantité potentielle de thrombine susceptible de se former dans 1 ml de sang pourrait coaguler un volume au moins cent fois supérieur ! Etant donné le caractère autocatalytique des réactions de la coagulation, l'activation des facteurs se propagerait de proche en proche s'il n'existait pas des mécanismes régulateurs.

B. MECANISMES NON SPECIFIQUES.

La coagulation reste focalisée à la surface du thrombus blanc plaquettaire lui-même adhérant à la paroi du vaisseau. L'excès en facteurs de coagulation activés est dispersé par le flux sanguin. Par ailleurs, la fibrine adsorbe et immobilise de grandes quantités de thrombine.

C. L'ANTITHROMBINE

L'antithrombine, autrefois appelée antithrombine III, est l'inhibiteur fondamental de la coagulation. L'antithrombine se lie à la thrombine et aux autres enzymes de la coagulation et les inactive. Un déficit même modéré en antithrombine constitue un facteur de risque de thrombose important. La vitesse d'inhibition des enzymes activées par l'antithrombine est considérablement accélérée par l'héparine : l'antithrombine est le cofacteur de l'héparine.

D. LE SYSTEME PROTEINE C, PROTEINE S, THROMBOMODULINE.

La protéine C est un inhibiteur de la coagulation, dont la synthèse dépend de la vitamine K. L'activation de la protéine C est assurée par la thrombine liée à un récepteur spécifique au niveau de l'endothélium, appelé la thrombomoduline. La protéine C activée détruit l'activité des facteurs Va et VIIIa en présence de protéine S. La synthèse de la protéine S dépend également de

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la vitamine K. Ainsi la thrombine contrôle sa propre formation. Il existe des déficits congénitaux en protéine C ou en protéine S qui s'accompagnent de maladie thromboembolique récidivante.

Formation de la fibrine et des complexes solubles.

La thrombine (IIa) protéolyse spécifiquement les fibrinopeptides A puis B ce qui aboutit à la formation de monomères de fibrine. In vitro, tant que la proportion de monomères de fibrine formés est inférieure à 30%, ils se complexent avec les molécules de fibrinogène ou ses produits de dégradation (PDF) générés après action de la plasmine sur le fibrinogène. Ils forment alors des complexes solubles qui ne se polymérisent pas. Si la proportion de monomères de fibrine est supérieure à 30%, ils se polymérisent bout à bout et côte à côte pour former le gel de fibrine. La cohésion du polymère fibrineux est assurée par le facteur stabilisant la fibrine activé par la thrombine (XIIIa) qui crée des liaisons covalentes entre les différents monomères.

Certains sujets présentent une anomalie moléculaire du facteur V, appelée Facteur V Leiden, qui rend ce facteur résistant à l'action protéolytique de la protéine Ca. Cette anomalie est l'anomalie génétique prédisposant aux thromboses actuellement mise en évidence, la plus fréquente puisqu'elle est retrouvée chez 3 à 5% des sujets caucasiens.

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Page 27: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

E. L'INHIBITEUR DE LA VOIE EXTRINSEQUE

L'inhibiteur de la voie extrinsèque appelé Tissue Factor Pathway Inhibitor (TFPI) d'une part lie le facteur Xa et d'autre part lie le complexe facteur tissulaire - facteur VIIa et empêche l'activation du facteur X. A ce jour, il n'a pas été décrit de déficit constitutionnel en TFPI.

F. AUTRES INHIBITEURS

Il existe d'autres inhibiteurs au rôle secondaire au regard de ceux précédemment décrits. On peut citer l'alpha 2 macroglobuline qui supporte environ 30% du pouvoir antithrombinique du plasma. Dans certaines conditions pathologiques comme le syndrome néphrotique, la fuite urinaire de l'antithrombine est compensée par une forte augmentation du taux d'alpha 2 macroglobuline dont le poids moléculaire élevé ne lui permet pas de passer le filtre glomérulaire même lésé.

G. LES COMPLEXES SOLUBLES.

Les monomères de fibrine formés après action de la thrombine sur le fibrinogène ont aussi la propriété de se complexer soit avec le fibrinogène soit avec des produits de dégradation du fibrinogène. Ces monomères complexés ne peuvent coaguler (voir schéma sur la formation de la fibrine).

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Page 28: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

IV - PRINCIPAUX TESTS D'EXPLORATION DE LA COAGULATION.

A. NOTIONS PRELIMINAIRES.

Pour étudier les différentes phases de la coagulation au laboratoire, il faut prélever le sang sur un décalcifiant (citrate de sodium) qui bloque les réactions, enzymatiques de la coagulation.

Le prélèvement doit toujours être d'excellente qualité en évitant une stase prolongée (garrot trop serré) et la contamination par du suc tissulaire. Il faut en outre respecter la quantité de sang par rapport au citrate, c'est-à-dire que les tubes d'hémostase doivent être convenablement remplis. Les tubes "adulte" contiennent 0.5 mL de citrate, et les tubes "pédiatrique" en contiennent 0.2 mL. Ces tubes doivent être respectivement rempli avec 4.5 mL et 1.8 mL de sang.

Les examens d'hémostase s'effectuent généralement en parallèle chez le patient et chez un sujet normal de référence appelé "le témoin". Le témoin permet de vérifier la qualité des réactifs de laboratoire, ainsi que de les étalonner. Il existe en effet un grand nombre de marques qui donnent des résultats différents. Le problème de la bonne reproductibilité inter laboratoire n'est actuellement pas résolu.

Aucun test n'est susceptible de couvrir l'ensemble des séquences de la coagulation. Il existe un test spécifique de la voie endogène, un test pour la voie exogène, un test qui explore uniquement la fibrinoformation. Si ces tests de dépistage sont anormaux, on peut être conduit à doser un ou plusieurs facteurs de la coagulation.

B. EXPLORATION DE LA VOIE ENDOGENE : le temps de céphaline activé.

Le temps de céphaline activé (TCA) correspond au temps de coagulation d'un

plasma appauvri en plaquettes par centrifugation à haute vitesse, qui est recalcifié en présence de céphaline et d'un activateur. La céphaline est un phospholipide que l'on substitue aux plaquettes ; l'activateur a longtemps été du kaolin, d'où le terme souvent utilisé de temps de céphaline kaolin. Le TCA explore tous les facteurs de la voie endogène excepté les plaquettes.

Le TCA normal est généralement compris entre 30 et 35 secondes ; on considère que le TCA est allongé lorsqu'il est supérieur à 1.2 fois le temps du témoin.

Le TCA est le reflet de la coagulation globale d'un sujet. Si l'on peut parler avec certitude d'hypocoagulabilité lorsqu'il est allongé, il faut être beaucoup plus prudent pour affirmer l'existence d'hypercoagulabilité lorsqu'il est raccourci. Un mauvais prélèvement est souvent à l'origine d'un raccourcissement.

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UN ACTIVATEUR,DE LA CEPHALINE,PUIS DU CALCIUM

Page 29: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

C. EXPLORATION DE LA VOIE EXOGENE : le temps de Quick.

Le temps de Quick correspond au temps de coagulation d'un plasma que l'on recalcifie en présence d'un large excès de thromboplastine (facteur tissulaire). Sa durée normale est comprise entre 11 et 13 secondes. Il est généralement converti en pourcentage d'activité par rapport à un témoin idéal qui correspond à 100%. Il prend alors le nom de taux de prothrombine, terme couramment employé et source de confusion.

Ce test explore en fait l'activité globale des cinq facteurs (prothrombine, proconvertine, facteur Stuart, accélérine, fibrinogène) qui interviennent dans la voie exogène.

On considère que ce taux de prothrombine est normal lorsqu'il est supérieur à 70 %.

D. EXPLORATION DE LA FIBRINOFORMATION: le temps de thrombine.

La fibrinoformation est la dernière étape de la coagulation et c'est une étape commune à la voie endogène et exogène. La fibrinoformation est explorée par le temps de thrombine qui correspond au temps de coagulation d'un plasma en présence de thrombine diluée. L'apport direct de thrombine court-circuite toutes les phases précédentes et ne permet plus d'explorer que la conversion de fibrinogène en fibrine. Le temps de thrombine est généralement de 18 à 20 secondes. En fait, la durée de ce temps n'a aucune signification physiologique car la fibrinoformation en présence de thrombine concentrée est un phénomène instantané et tellement rapide qu'il est inexploitable en pratique. C'est donc uniquement la dilution de la thrombine qui allonge le temps de coagulation pour l'amener à la zone où l'expérience a montré qu'elle permettait une interprétation correcte.

L'exploration de la fibrinoformation est bien entendu très utilement complétée par le dosage du fibrinogène. Le temps de thrombine est sensible aux variations de taux de fibrinogène. C'est également un test qui s'allonge considérablement en présence

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DE LA THROMBOPLASTINE

ET DU CALCIUM

DE LA THROMBINEUNIQUEMENT.

Page 30: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

d'héparine, médicament anticoagulant fréquemment utilisé.

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Page 31: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

E. DOSAGE SPECIFIQUE DES FACTEURS DE LA COAGULATION.

Ce dosage est effectué lorsqu'un ou plusieurs des tests précédents est perturbé. Pour mesurer les activités des facteurs spécifiques de la voie endogène (XII, XI, IX, VIII), on utilise des tests dérivés du temps de céphaline activée.

Pour mesurer les activités des facteurs qui participent à la voie exogène (VII, X, V, II), on utilise des tests dérivés du temps de Quick.

Les principaux inhibiteurs de la coagulation (antithrombine, protéine C, protéine S) peuvent également être dosés. Il est à noter qu'un déficit en un de ces facteurs ne se manifeste pas sur les tests d'exploration de la coagulation.

Les résultats sont exprimés en pourcentage d'activité, excepté pour le fibrinogène qui est exprimé en gramme par litre.

L'interprétation des anomalies du bilan d'hémostase sera envisagée dans un chapitre ultérieur.

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Page 32: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

LE SYSTEME FIBRINOLYTIQUE

ET PRINCIPAUX TESTS D'EXPLORATION

- RESUME -

La fibrinolyse correspond à la solubilisation du caillot de fibrine par la

plasmine.

Les activateurs du système fibrinolytique sont essentiellement d'origine

vasculaire (activateur tissulaire du plasminogène, t-PA). L'activité du t-PA

est contrôlée par un inhibiteur appelé PAI (inhibiteur de l'activateur du

plasminogène).

La fibrinolyse est un phénomène focalisé car seul le plasminogène fixé à la

fibrine est transformé en plasmine. Toute plasmine circulante libre est

immediatement inhibée par l'2 antiplasmine.

La solubilisation du caillot de fibrine par la plasmine génère la formation de

produits de dégradation dont les D-Dimères.

L'exploration de la fibrinolyse fait encore partie du domaine de la recherche

clinique. Seul le taux plasmatique de D-Dimères est demandé en pratique :

un taux élevé signe la présence de fibrine intra-ou extra-vasculaire tandis

qu'un taux normal exclu un phénomène de coagulation intra-vasculaire,

thrombose veineuse ou embolie pulmonaire notamment.

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Page 33: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

LE SYSTEME FIBRINOLYTIQUE ET PRINCIPAUXTESTS D'EXPLORATION

Ce système est destiné à reperméabiliser le vaisseau obstrué par une thrombose. La fibrinolyse correspond à la solubilisation du caillot de fibrine par la plasmine. C'est un phénomène qui reste physiologiquement localisé au niveau du caillot.

I - LES FACTEURS DE LA FIBRINOLYSE.

A. PLASMINOGENE - PLASMINE.

Le plasminogène est le précurseur inactif de la plasmine. Synthétisé principalement par le foie, le plasminogène possède une grande affinité pour le fibrinogène et la fibrine. La conversion de plasminogène en plasmine peut se faire grâce à de nombreux activateurs.

B. LES ACTIVATEURS DU PLASMINOGENE.

Le principal activateur tissulaire du plasminogène (t-PA), est synthétisé par les cellules endothéliales du vaisseau puis libéré dans la circulation. L'action du t-PA sur le plasminogène est catalysée par la fibrine si bien que le t-PA, en pratique, ne peut activer que le plasminogène fixé à la fibrine et non pas le plasminogène circulant. Le t-PA est actuellement fabriqué par génie génétique et utilisé en thérapeutique thrombolytique (Actilyse).

D'autres activateurs (urokinase, facteur XII) jouent un rôle secondaire. La streptokinase synthétisée par le streptocoque est utilisée en thérapeutique comme médicament thrombolytique.

Représentation schématique des principales réactions fibrinolytiques.Le plasminogène et la plasmine sont représentés avec le site de fixation au fibrinogène et à la fibrine ; le t-PA est représenté avec son site de liaison à la fibrine. L’adsorption du t-PA à la surface de la fibrine favorise l’activation du plasminogène lié à la fibrine.

C. LES INHIBITEURS DE LA FIBRINOLYSE.

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Page 34: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

La fibrinolyse est régulée par deux inhibiteurs principaux, l'2 antiplasmine et l'inhibiteur de l'activateur tissulaire du plasminogène ou PAI.

Dans le sang circulant, l'antiplasmine se fixe immédiatement à la moindre trace de plasmine qui pourrait apparaître, tandis qu'à la surface du caillot la plasmine est à l'abri de l'effet inhibiteur de l'alpha 2 antiplasmine. Il n'y a donc en pratique jamais de plasmine libre dans le sang circulant, excepté à l'occasion des traitements thrombolytiques où brutalement, en quelques minutes, tout le plasminogène est activé en plasmine.

L'inhibiteur de l'activateur tissulaire du plasminogène (plasminogen activator inhibitor ou PAI) est synthétisé par les cellules endothéliales, comme le t-PA. Une augmentation chronique du PAI-1 pourrait être un facteur de risque de récidive d'infarctus du myocarde. Le taux de PAI-1 est aussi augmenté chez l'obèse androïde et chez le diabétique non insulino-dépendant.

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Page 35: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

II - MISE EN JEU DES FACTEURS DE LA FIBRINOLYSE.

A. CARACTERE LOCALISE DE LA FIBRINOLYSE PHYSIOLOGIQUE.

La fibrinolyse est un phénomène qui est localisé à la surface du caillot de fibrine. C'est la conséquence de la haute affinité du plasminogène et du t-PA. La plasmine libre est inhibée instantanément par l'alpha 2 antiplasmine et la plasmine générée à la surface de la fibrine est protégée de l'inactivation par l'2

antiplasmine.

B. EFFETS DE LA PLASMINE : FORMATION DES PRODUITS DE DEGRADATION DE LA FIBRINE

La plasmine solubilise le caillot de fibrine en réalisant toute une série de scissions protéolytiques sur les chaînes polypeptides de la fibrine et génère des produits de dégradation. Parmi ceux-ci un fragment peut être dosé dans le plasma, le Dimère-D. Un taux plasmatique élevé de D-Dimères signe l'action de la plasmine sur un dépôt de fibrine.

La plasmine peut aussi dégrader l'accélérine (V) et le facteur anti-hémophilique A (VIII). Mais, comme il n'existe pas de plasmine libre, l'importance physiologique de ce fait est modérée.

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Page 36: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

III - PRINCIPAUX TESTS D'EXPLORATION DE LA FIBRINOLYSE.

Parmi les très nombreux tests d'exploration de la fibrinolyse, seul un petit nombre possède un intérêt pratique pour le clinicien.

A. LE TEMPS DE LYSE DES EUGLOBULINES.

Dans ce test, le plasma est privé de ses inhibiteurs de la fibrinolyse par précipitation en milieu acide. Ce test explore l'activité globale des activateurs de la fibrinolyse. Normalement, la lyse du caillot d'euglobulines ne doit pas survenir en moins de 1 h 30'. En cas d'hyperactivité fibrinolytique, ce temps est raccourci.

B. LE DOSAGE DU PLASMINOGENE, DE L'ALPHA 2 ANTIPLASMINE, DU PAI et du t-PA.

Bien qu'il existe des méthodes simples pour estimer ces facteurs, l'indication de ces dosages est en pratique exceptionnelle.

C. LE DOSAGE DES D -DIMÈRES .

Les D-dimères peuvent être dosés par plusieurs méthodes. La méthode au latex est abandonnée au profit de la méthode ELISA ou d'autres méthodes plus récentes aussi sensibles que la méthode ELISA mais plus commodes d'exécution. Un taux normal de D-dimères élimine tout processus de coagulation intra vasculaire évolutif ; un taux élevé peut être observé au cours de toute coagulation intra vasculaire, mais également extravasculaire. Ce dosage ne permet pas donc de distinguer la fibrine intra et extravasculaire. De tels dépôts de fibrine extravasculaire existent en post-opératoire, dans les épanchements séreux, autour des foyers infectieux et néoplasiques. L'interprétation d'un taux élevé de D-dimères doit donc tenir compte du contexte clinique. En revanche, un taux normal de D-dimères permet d'exclure le diagnostic de thrombose veineuse ou d'embolie pulmonaire avec un risque d'erreur inférieur à 5% c'est-à-dire avec une valeur prédictive négative supérieure à 95%.

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Page 37: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

LA CONSULTATION D'HEMOSTASE CHEZ UN PATIENT MALADE QUI

PRESENTE UN SYNDROME HEMORRAGIQUE. LE BILAN D'HEMOSTASE

ORIENTATION DIAGNOSTIQUE

- RESUME -

L'interrogatoire et l'examen clinique doivent nécessairement précéder le bilan

d'hémostase. Les hémorragies cutanéo muqueuses sont plutôt en faveur d'une

anomalie de l'hémostase primaire, les hémarthroses sont évocatrices de

l'hémophilie, les hématomes musculaires sont plutôt en faveur d'une anomalie

de la coagulation. Le caractère héréditaire et familial doit être recherché.

Le bilan d'hémostase de première intention associe des examens qui explorent

l'hémostase primaire (numération des plaquettes et éventuellement temps de

saignement) et la coagulation (temps de Quick et temps de céphaline activée).

La combinaison des anomalies observées permet d'orienter vers un diagnostic

qui sera confirmé par des examens complémentaires.

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Page 38: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

LA CONSULTATION D'HEMOSTASE CHEZ UN MALADEQUI PRESENTE UN SYNDROME HEMORRAGIQUE.

LE BILAN D'HÉMOSTASE. ORIENTATION DIAGNOSTIQUE

Un bilan d'hémostase, aussi complet soit-il, ne peut remplacer chez un patient la valeur de l'interrogatoire et de l'examen clinique pour porter le diagnostic d'une anomalie de la coagulation. Nous indiquons ici les principaux motifs de consultation, les renseignements à obtenir de l'interrogatoire, un canevas d'exploration simple qui permet de couvrir la plupart des déficits acquis ou congénitaux.

I - MOTIF DE CONSULTATION.

Le sujet peut être examiné dans le cadre d'un bilan pré-opératoire ou parce que, à l'occasion d'une intervention précédente, il a présenté des manifestations hémorragiques considérées comme anormales. Un autre motif de consultation fréquent est l'enquête demandée pour découvrir la cause de saignements, épistaxis, ménorragies, sans cause locale. Le patient peut encore présenter des manifestations qui attirent l'attention sur un trouble de l'hémostase : ecchymoses provoquées pour des causes minimes et hémorragies persistantes après blessure cutanée. Les hémarthroses sont aussi rares que spécifiques de l'hémophilie grave et elles se voient donc dans un contexte différent. Le purpura pétéchial n'est jamais en rapport avec un trouble de la coagulation, mais doit faire rechercher une thrombocytopénie ou une maladie du vaisseau (voir glossaire de séméiologie à la fin du document).

II - L'INTERROGATOIRE ET L'EXAMEN CLINIQUE.

Le contexte clinique dans lequel se présente le trouble de la coagulation peut être évident : hémopathie, insuffisance rénale chronique, insuffisance hépatique. Mais l'anomalie de la coagulation peut apparaître primitive. C'est alors que prend toute sa valeur l'interrogatoire qui va rechercher le nombre et le caractère des incidents hémorragiques antérieurs. Ces incidents présentent une grande valeur séméiologique lorsqu'ils surviennent au cours d'un certain nombre de petites interventions chirurgicales : amygdalectomie, adénoïectomie, extractions dentaires. Ces interventions, qui sollicitent toutes les ressources naturelles de l'hémostase spontanée, sont souvent beaucoup plus hémorragiques qu'une intervention de chirurgie abdominale type appendicectomie où l'hémostase est chirurgicale. Cependant, dans les autres interventions, si l'acte opératoire peut bien se passer, il n'est pas rare que des hématomes puissent survenir au niveau de la plaie, ce qui entraîne inévitablement un retard de cicatrisation. L'aspirine, qui diminue les fonctions plaquettaires, aggrave généralement les manifestations hémorragiques. C'est une notion qu'il faut rechercher.

Une autre étape importante de l'interrogatoire est bien sûr la recherche du caractère familial du trouble présenté puisque les déficits primitifs de l'hémostase sont en règle héréditaires.

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Page 39: Physiologie et Sémiologie de l'Hémostase

Cependant, il n'est pas rare que l'anomalie de la coagulation apparaisse isolée, parce que la transmission de l'anomalie est récessive ou encore parce que l'anomalie n'a pas entraîné de signe clinique chez les ascendants et les collatéraux ; c'est dire l'importance de l'enquête biologique systématique dans la famille d'un patient qui présente une anomalie constitutionnelle de la coagulation.

Au terme de cet interrogatoire, on peut parfois se faire une opinion sur l'existence ou non d'une anomalie biologique et parfois sur sa nature. Ainsi, les hémarthroses suggèrent fortement une hémophilie, des saignements cutanéo-muqueux orientent vers un trouble de l'hémostase primaire, tandis que des hématomes évoquent une anomalie de la coagulation. Le caractère différé d'un saignement accompagné d'une anomalie de la cicatrisation sont caractéristiques d'un déficit en facteur stabilisant la fibrine (facteur XIII).

III – LE BILAN D'HEMOSTASE

Un bilan d'hémostase, même simplifié, est constitué de plusieurs examens qui recouvrent l'ensemble de la physiologie de l'hémostase.

A. LE TEMPS DE SAIGNEMENT ET LA NUMERATION DES PLAQUETTES.

Ces examens explorent l'hémostase primaire. Le temps de saignement est un examen peu reproductible, opérateur dépendant, et qui ne permet pas de prédire avec certitude le risque hémorragique. Il est de moins en moins prescrit.

B. LE TEMPS DE QUICK.

Il reproduit in vitro la voie exogène de la coagulation. Il exprime en pourcentage par rapport à un sujet normal de référence, l'activité moyenne de la prothrombine (II), du facteur Stuart (X), de la convertine (VII) et de l'accélérine (V).

C. LE TEMPS DE CEPHALINE ACTIVEE.

Il explore l'activité des facteurs qui interviennent dans la voie endogène de la coagulation. Certains de ces facteurs sont spécifiques de cette voie : il s'agit des facteurs contacts Hageman (XII), PTA (XI) et des facteurs antihémophiliques A (VIII) et B (IX). D'autres facteurs sont communs aux deux voies de la coagulation et explorés aussi par le temps de Quick. Il s'agit des facteurs Stuart (X), de l'accélérine (V), de la prothrombine (II) et du fibrinogène (I).

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D. LE FIBRINOGENE.

Il constitue l'armature du caillot ; il intervient aussi dans l'hémostase primaire. Son dosage doit faire partie du bilan de dépistage parce que seuls des déficits importants en fibrinogène seront susceptibles de modifier les tests précédents et parce que le risque hémorragique qu'une fibrinopénie même modérée est susceptible d'entraîner peut être considérable.

E. INTERPRETATION

Lorsque ces examens sont effectués, plusieurs éventualités peuvent se présenter :

1. l'ensemble du bilan est normal : on peut alors raisonnablement éliminer une participation d'un trouble de l'hémostase dans l'étiologie d'un incident hémorragique ;

2. il existe incontestablement une anomalie du temps de saignement, du temps de Quick ou de céphaline: cela oriente vers une maladie de l'hémostase primaire ou une anomalie des facteurs plasmatiques de la coagulation. Des examens complémentaires explorant les fonctions plaquettaires ou les différents facteurs des voies endogènes ou exogènes sont nécessaires ;

3. parfois enfin, les résultats sont tels qu'il est difficile de se prononcer pour savoir s'il s'agit réellement d'une anomalie de la coagulation ou bien de résultats à la limite inférieure de la normale, tant il est vrai qu'il existe un recoupement entre valeurs normales et pathologiques.

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IV – ORIENTATION DIAGNOSTIQUE

A. ALLONGEMENT DU TEMPS DE SAIGNEMENT (TS)

La cause principale reste la diminution du nombre de plaquettes (thrombocytopénie). Il ne faut pas faire de TS à un patient thrombopénique. Si le nombre de plaquettes est normal, il faut rechercher par ordre décroissant de fréquence :

1. Une prise médicamenteuse diminuant les fonctions plaquettaires dans les cinq jours précédents : Aspirine, Ticlid, Plavix.

2. Rechercher une maladie de Willebrand en dosant spécifiquement le facteur Willebrand nécessaire à l'adhésion plaquettaire. Dans ce cas, le TCA est souvent allongé car le facteur Willebrand stabilise et transporte le facteur VIII. Une diminution de facteur Willebrand s'accompagne le plus souvent d'une diminution de facteur VIII.

3. Un déficit des fonctions plaquettaires définissant une thrombopathie constitutionnelle.

B. ALLONGEMENT DU TEMPS DE QUICK ( ABAISSEMENT DU TAUX DE PROTHROMBINE OU TP)

Les causes principales d'allongement du temps de Quick et d'abaissement du TP sont :

1. La carence en vitamine K ou un traitement antivitamine K. Dans ce cas, le taux de facteur V est conservé, tandis que les taux de facteur VII, X et II sont diminués (facteurs vitamine K dépendants).

2. L'insuffisance hépatocellulaire. Dans ce cas, les 4 facteurs (V, VII, X et II) explorés par le temps de Quick sont diminués car synthétisés par le foie. S'y ajoute une diminution du taux de fibrinogène.

3. Les coagulopathies par hyperconsommation des facteurs de la coagulation. Dans ce cas, les facteurs V, II et fibrinogène sont diminués (facteurs consommés ; le facteur VIII n'est pas dosé en routine).

4. Les diminutions isolées en facteur de coagulation sont exceptionnelles, et alors congénitales et héréditaires.

C. ALLONGEMENT DU TEMPS DE CEPHALINE ACTIVEE (TCA)

1. La cause la plus fréquente de l'allongement du TCA est l'allongement du temps de Quick puisque plusieurs facteurs sont explorés à la fois par le temps de Quick et le TCA.

2. Quand l'allongement du TCA est isolé il faut dans l'ordre :

Eliminer la présence d'héparine dans le prélèvement par le temps de thrombine. Le TCA et le temps de thrombine sont très sensible à la présence d'héparine.

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Eliminer un anticorps interférant avec les mécanismes de la coagulation. Ces anticorps sont appelés "anticoagulants circulants". Pour cela, il faut refaire le TCA sur un mélange plasma témoin normal – plasma malade. Si le TCA du mélange est normalisé, il s'agissait d'un déficit ; si le TCA du mélange reste allongé, c'est un anticoagulant circulant dont la nature reste à préciser.

Doser les facteurs de la voie endogène de la coagulation (facteurs XII, XI, IX, VIII). Ces dosages permettent de caractériser un déficit congénital dont les plus connus sont l'hémophilie A (déficit en VIII) et l'hémophilie B (déficit en IX).

Tableau résumant les grandes anomalies du bilan d'hémostase.Diagnostic TS

minTQs

TP%

TCAs

V%

VII-X%

II%

Fibrinogèneg/L

Aspirine/Plavix 15' 12 90 33 - - - -

Willebrand 15' 12 85 46 - - - -

Carence VK - 20 40 48 85 20 25 3

Insuff hépatique - 20 40 50 35 30 30 1

Coagulopathie consommation

- 20 40 50 35 80 35 1

Déficit en facteur VIII, IX, XI, XII

12 90 75* - - - 3

Anticoagulant circulant

12 90 75** - - - 3

*L'allongement est corrigé in vitro par l'ajout d'un plasma normal** L'allongement n'est pas corrigé in vitro par l'ajout d'un plasma normal

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GLOSSAIRE SEMEIOLOGIQUE

I - Le Purpura

Défini par une extravasation plus ou moins étendue de sang hors des petits vaisseaux du derme en général, mais aussi parfois des muqueuses ou des séreuses, le purpura se présente sous trois expressions :

Pétéchies : 

Petites tâches (macules) arrondies et punctiformes (0,5 à 2 mm de diamètre) créées par du sang extravasé de capillaires à perméabilité accrue. Leur couleur varie du rouge foncé au violet mais persiste à la vitro-pression ou à l'étirement des téguments. Ce critère est essentiel et différencie la pétéchie de la "tache rubis" ou de l'angiome plan que la pression ou l'étirement vide de son sang.La pétéchie ne doit pas être confondue avec la trace laissée par la piqûre de parasite siégeant plus volontiers au niveau de la ceinture et des membres.L'apparition des pétéchies est en général spontanée, mais les causes d'hyperpression dans le système capillaire (physiologique ou provoquée) peuvent la déclencher ; elles disparaissent en 5 à 6 jours, par atténuation progressive de leur couleur. On leur distingue différentes caractéristiques séméiologiques : -localisation particulière ou dissémination.-nature de la lésion : plane ou surélevée (elle se "palpe" dans les purpuras vasculaires), voire nécrotique à bords tranchés (dans les méningococcémies).-confluence éventuelle.

Ecchymoses 

Tâches hémorragiques plus étendues de sang extravasé à partir de petits vaisseaux rompus au niveau du derme (les "bleus"), rarement des muqueuses. Leur couleur rouge violacé au début, évolue en fonction de la bilirubinogénèse locale : bleu, vert puis jaune. Elles sont déclenchées : -soit par un traumatisme conséquent dont le patient se souvient en général, sauf les jeunes enfants (Cf les ecchymoses fréquemment rencontrées au niveau des jambes des enfants turbulents), -soit par un traumatisme minime passant inaperçu en cas d'anomalie de l'hémostase primaire. C'est ce type d'anomalie que l'on évoque en présence d'ecchymoses multiples ou fréquentes. Mais il faut savoir que chez certaines femmes, il n'est pas rare de rencontrer une tendance aux ecchymoses sans signification pathologique, car isolées, sans autre manifestation hémorragique.

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Vibices

Stries rouges, allongées, constituées d'une suite de petites pétéchies succédant à un grattage ou siégeant aux plis de flexion. Elles ont la même valeur séméiologique que les ecchymoses multiples.

Au total un purpura, surtout avec expression ecchymotique, évoque un trouble de l'hémostase primaire. Un purpura uniquement pétéchial et sans autre manifestation hémorragique doit orienter vers un purpura vasculaire.

2 - Les hémorragies des muqueuses

Elles sont provoquées en général par une anomalie de l'hémostase primaire incapable d'assurer l'oblitération des vaisseaux de petit calibre lésés par un facteur local minime passant inaperçu, elles semblent donc spontanées.

Selon la localisation on distingue :

Les épistaxis

Saignement de la muqueuse de la cavité nasale (cloison en général) plus ou moins importante, d'apparence spontanée ou provoquée par le mouchage, l'exposition au soleil. Elle s'extériorise quand elle est antérieure mais peut être déglutie quand elle est postérieure (diagnostic différentiel d'une hématémèse). Avant d'évoquer un trouble de l'hémostase primaire la recherche d'une cause locale par un examen ORL doit être systématique, surtout si elle est isolée et atteint une seule narine. La plupart des épistaxis du jeune sont provoquées par une lésion de la tache vasculaire, point de la cloison nasale le plus richement vascularisé.

Les gingivorragies

Hémorragies des gencives spontanées ou au brossage des dents. Elles peuvent être en relation avec une anomalie de l'hémostase primaire si l'on élimine un facteur traumatique (brosse trop dure) ou local (pyorrhée, stomatite).

Les hémorragies buccales

Evocatrices d'une anomalie de l'hémostase primaire. Elles sont de deux types, de valeur séméiologique différente : pétéchies du voile du palais, de la muqueuse labiale et jugale, fréquentes dans les thrombopénies et bulles hémorragiques sous forme de collection sous-muqueuse plus ou moins étendue de sang violet foncé bombant au niveau des mêmes localisations ou de la langue. Ces bulles, synonymes de thrombopénie sévère, seront considérées comme élément de gravité dans les purpuras. Une hémorragie prolongée déclenchée par une percée dentaire avec effraction gingivale particulièrement large est possible chez l'hémophile.

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Le melaena

Correspond à l'exonération fécale de sang ayant subi l'action des ferments digestifs ce qui provoque des selles noires, visqueuses, d'aspect goudron, collant à la cuvette, tachant le linge. Un melena peut être lié à une anomalie de l'hémostase responsable d'un saignement diffus de la muqueuse digestive ; il est d'allure spontanée, sans signes fonctionnels d'accompagnement. Il doit être différencié :

- d'une part de ce qui est du sang en provenance du tube digestif mais secondaire à une lésion locale (cf. gastro-entérologie) ou en provenance d'ailleurs (épistaxis déglutie).

- d'autre part de ce qui n'est pas une hémorragie : la couleur des selles peut être modifiée par des aliments (boudin) ou des médicaments (sels de fer).

Les ménorragies

Hémorragies cataméniales dont l'abondance est excessive. L'appréciation de l'excès est parfois difficile pour la patiente ; on peut l'interroger sur le nombre de changes et retenir comme critères pathologiques un nombre >5/24 h et des caillots intra-vaginaux (normalement le sang des règles est incoagulable).

3 - Les hématomes extensifs

Un hématome est un épanchement de sang créé par une rupture traumatique d'un vaisseau de moyen calibre mais inférieur à 1 mm, où l'arrêt de l'hémorragie repose surtout sur des phénomènes de coagulation plasmatique : son extension anormale indique donc le plus souvent un trouble de ce temps de l'hémostase.

1°) Les hématomes extensifs les plus fréquents sont :

* Musculaires où l'épanchement de sang infiltre progressivement la masse musculaire dont le volume augmente. Sur le plan séméiologique on retrouve une induration douloureuse (muscles superficiels), une position antalgique visant à soulager la tension entre les insertions (flexion pour les muscles inséré de chaque côté d'une articulation : par exemple psoitis pour le psoas). Il faut craindre, à plus ou moins longue échéance, des complications majeures : compression vasculo-nerveuse dans l'immédiat, rétraction tendineuse plus tard (cf équinisme après un hématome du mollet).

* Sous-cutanées où l'épanchement entre la peau et le plan sous-jacent, qu'il soit osseux ou musculaire, est responsable d'une déformation apparente ("bosse") et d'une modification progressive et évolutive de la couleur de la peau par le sang qui diffuse et s'étale dans le tissu cutané ; il faut les différencier des ecchymoses qui naissent et restent dans le derme.

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2°) On peut rencontrer beaucoup plus rarement des hématomes extensifs :

* Intra- ou rétro-péritonéaux : accumulation de sang dans la cavité péritonéale ou l'espace rétropéritonéal, responsable de signes d'irritation péritonéale avec défense musculaire, ileus paralytique, parfois choc.

* Intra-craniens, le plus souvent post traumatique (extra- ou sous-dural) où le trouble de l'hémostase accroit la gravité.

* Pharyngés (avec risque d'asphyxie), orbitaires (avec protrusion de l'oeil).

4 - Les Hémarthroses (en dehors de l'hémarthrose "chirurgicale" par lésion orthopédique)

L'hémarthrose correspond ici à un épanchement de sang intra-articulaire plus ou moins abondant, en général précédé d'une douleur intense d'origine osseuse.

Le plus souvent elle succède à un traumatisme, même minime comme la marche prolongée ; parfois elle est d'allure spontanée, plus spécialement dans les formes récidivantes.

Sur le plan séméiologique elle déclenche successivement une douleur très vive au niveau de l'articulation, une impotence fonctionnelle et en l'absence de traitement hémostatique, un gonflement progressif avec tension plus ou moins prononcée des culs de sac synoviaux accompagné de chaleur cutanée si l'épanchement est net.

Les hémarthroses sont très évocatrices d'une anomalie de la coagulation plasmatique dont l'hémophilie est la plus fréquente.

5 - Les Hémorragies de section

Dans des conditions physiologiques, le délai pour obtenir l'arrêt spontané d'une hémorragie provoquée par une plaie linéaire varie en fonction du calibre des vaisseaux sectionnés : 3 minutes environ pour les vaisseaux de petit calibre (coupure de rasoir superficielle) ou 10 minutes environ pour les vaisseaux de calibre supérieur mais toujours inférieur à 1 mm (incision au bistouri, plaie accidentelle avec un couteau, section traumatique de la peau ou des muqueuses).

Dans des conditions pathologiques lorsqu'il existe des anomalies de l'hémostase, deux tableaux séméiologiques :

* le prolongement du saignement, qui traduit une perturbation de l'hémostase en général (hémostase primaire ou coagulation selon le calibre du vaisseau).

* La reprise du saignement après son arrêt, par élimination du caillot d'hémostase spontanée, défectueux et fragile, de mauvaise qualité ;ceci relève avant tout d'un désordre de la coagulation.

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Ces hémorragies de section succèdent :

* à des plaies accidentelles,* à des plaies opératoires, compliquant la période per- et surtout post-

opératoire des interventions chirurgicales même minimes comme avulsion(s) dentaire(s) ou amygdalectomie. De telles complications doivent faire évoquer un trouble de l'hémostase en général; on les recherche systématiquement à l'interrogatoire en raison de leurs valeurs séméiologiques.

6 - Les hémorragies viscérales

Déclenchées ou accrues par une anomalie de l'hémostase, elles sont de trois types :

* Les hématuries macroscopiques, souvent impressionnantes, donnant au patient l'impression d'uriner du sang pur d'un bout à l'autre de la miction (hématurie totale). Elles apparaissent en général spontanément et seront faciles à différencier d'une hémoglobinurie : les hématies sédimentent assez vite dans un récipient, ce qui permet par ailleurs une appréciation grossière de l'abondance du saignement.

Cette manifestation se rencontre dans l'hémophilie, plus rarement une thrombopénie sévère.

* L'hémorragie cérébro-méningée est évoquée par la clinique :

céphalées, raideur méningée, signes de Kernig ; elle serait confirmée par la ponction lombaire. Elle peut compliquer une thrombopénie sévère, parfois une hémophilie. Son pronostic est grave.

* Les hémorragies rétiniennes sont à rechercher à l'examen du fond de l'oeil où l'on retrouve des hémorragies en flaques. Dans le cadre d'une thrombopénie sévère elles, représentent un critère de risque hémorragique grave.

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