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Journal de pédiatrie et de puériculture 17 (2004) 422–423 http://france.elsevier.com/direct/PEDPUE/ doi:10.1016/j.jpp.2004.10.009 L’allergie alimentaire et l’asthme sont deux mala- dies atopiques qui coexistent fréquemment. L’allergie alimentaire, assez répandue au cours de l’enfance, affecte environ 8 % des enfants. Le dia- gnostic repose sur l’anamnèse, la présence d’IgE spécifiques dans le sérum, de tests cutanés positifs (prick-tests) et/ou de tests de provocation. La place de certains aliments comme responsa- bles d’aggravation d’un asthme a été largement étudiée. Nombreux sont ceux qui attribuent un rôle à certains régimes alimentaires dans le déclenche- ment d’un asthme, mais les explorations dans ce sens, montrent, qu’en réalité, seule une minorité de ces personnes est vraiment concernée. Pour- tant, un nombre considérable de cas cliniques, sur le plan épidémiologique, suggère qu’il existe un lien évident entre un asthme et une allergie ali- mentaire. En effet, un aliment peut déclencher un bronchospasme, et une allergie alimentaire peut elle-même être impliquée comme un facteur de risque mortel chez un sujet asthmatique. Le méca- nisme sous-jacent de ce rapport reste obscur. Pour cette raison, la relation entre allergie alimentaire et asthme est complexe. Les faits suivants illustrent les relations étroites existant entre allergie alimentaire et asthme : 4–8 % d’enfants asthmatiques présentent une respiration sifflante d’origine alimentaire ; environ 30–40 % d’enfants allergiques alimentaires sont également asthmatiques. Près de 40 % de réactions allergiques alimentaires ont une composante respiratoire ; des allergènes alimentaires aéroportés peuvent entraîner des réactions allergiques. Des études portant sur des cohortes d’enfants suivis depuis leur naissance mon- trent qu’une allergie à l’œuf est un facteur de pré- diction d’une allergie respiratoire ; une réaction anaphylactique alimentaire peut mimer l’aggravation sévère d’un asthme qui apparaît presque toujours chez des sujets asthmatiques. De plus, quatre études montrent la relation qui existe entre allergie alimentaire et forme fatale ou presque fatale d’un asthme en particulier. – Dans une étude, quatre enfants (9 %) d’une cohorte de 46 enfants allergiques à l’arachide sont décédés au cours d’une période allant de 2–14 ans. – Une étude contrôlée, portant sur 45 sujets (âge 5–45) ressuscités d’une crise d’asthme, a montré que les accidents anaphylactiques apparaissaient plutôt chez des sujets allergiques alimentaires (odds-ratio [OR] : 3,6), et qui venaient de fréquenter un restau- rant ou un bar juste avant l’accident. – Sur 12 000 patients âgés de 5–45 ans qui ont reçu plus de dix bouffées de bronchodilatateurs, 129 d’entre eux ont présenté une forme fatale ou presque fatale d’asthme. Parmi ceux qui furent contrôlés par la suite, l’allergie alimentaire repré- sentait un facteur de risque important (OR : 5,1). – Une étude contrôlée de 19 enfants ventilés ou bénéficiant de soins intensifs a montré que les facteurs de risque étaient d’abord l’asthme (OR = 9,5), puis l’allergie alimentaire (5,89). FLASH INFO Place des anticorps immunoglobulines E alimentaires pour évaluer le risque de réactions sévères asthmatiques au cours de l'enfance P. Molkhou a a Hôpital Saint-Vincent de Paul, 82, avenue Denfort Rochereau, 75674 Paris cedex 15, France Article rédigé d’après une communication du Dr Gideon LACK à l’occasion du XXIII e Congrès de l’Académie Européenne d’Allergologie et d’Immunologie Clinique à Amsterdam en juin 2004. Adresse e-mail : [email protected] (P. Molkhou)

Place des anticorps immunoglobulines E alimentaires pour évaluer le risque de réactions sévères asthmatiques au cours de l'enfance

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Journal de pédiatrie et de puériculture 17 (2004) 422–423

http://france.elsevier.com/direct/PEDPUE/

doi:10.1016/j.jpp.2004.10.009

L’allergie alimentaire et l’asthme sont deux mala-dies atopiques qui coexistent fréquemment.L’allergie alimentaire, assez répandue au cours del’enfance, affecte environ 8 % des enfants. Le dia-gnostic repose sur l’anamnèse, la présence d’IgEspécifiques dans le sérum, de tests cutanés positifs(prick-tests) et/ou de tests de provocation.

La place de certains aliments comme responsa-bles d’aggravation d’un asthme a été largementétudiée. Nombreux sont ceux qui attribuent un rôleà certains régimes alimentaires dans le déclenche-ment d’un asthme, mais les explorations dans cesens, montrent, qu’en réalité, seule une minoritéde ces personnes est vraiment concernée. Pour-tant, un nombre considérable de cas cliniques, surle plan épidémiologique, suggère qu’il existe unlien évident entre un asthme et une allergie ali-mentaire. En effet, un aliment peut déclencher unbronchospasme, et une allergie alimentaire peutelle-même être impliquée comme un facteur derisque mortel chez un sujet asthmatique. Le méca-nisme sous-jacent de ce rapport reste obscur.

Pour cette raison, la relation entre allergiealimentaire et asthme est complexe.

Les faits suivants illustrent les relations étroitesexistant entre allergie alimentaire et asthme : 4–8 %d’enfants asthmatiques présentent une respirationsifflante d’origine alimentaire ; environ 30–40 %

d’enfants allergiques alimentaires sont égalementasthmatiques. Près de 40 % de réactions allergiquesalimentaires ont une composante respiratoire ; desallergènes alimentaires aéroportés peuvent entraînerdes réactions allergiques. Des études portant sur descohortes d’enfants suivis depuis leur naissance mon-trent qu’une allergie à l’œuf est un facteur de pré-diction d’une allergie respiratoire ; une réactionanaphylactique alimentaire peut mimer l’aggravationsévère d’un asthme qui apparaît presque toujourschez des sujets asthmatiques.

De plus, quatre études montrent la relation quiexiste entre allergie alimentaire et forme fatale oupresque fatale d’un asthme en particulier.

– Dans une étude, quatre enfants (9 %) d’unecohorte de 46 enfants allergiques à l’arachide sontdécédés au cours d’une période allant de 2–14 ans.

– Une étude contrôlée, portant sur 45 sujets (âge5–45) ressuscités d’une crise d’asthme, a montré queles accidents anaphylactiques apparaissaient plutôtchez des sujets allergiques alimentaires (odds-ratio[OR] : 3,6), et qui venaient de fréquenter un restau-rant ou un bar juste avant l’accident.

– Sur 12 000 patients âgés de 5–45 ans qui ontreçu plus de dix bouffées de bronchodilatateurs,129 d’entre eux ont présenté une forme fatale oupresque fatale d’asthme. Parmi ceux qui furentcontrôlés par la suite, l’allergie alimentaire repré-sentait un facteur de risque important (OR : 5,1).

– Une étude contrôlée de 19 enfants ventilés oubénéficiant de soins intensifs a montré que lesfacteurs de risque étaient d’abord l’asthme(OR = 9,5), puis l’allergie alimentaire (5,89).

FLASH INFO

Place des anticorps immunoglobulines E alimentaires pour évaluer le risque de réactions sévères asthmatiques au cours de l'enfance✩

P. Molkhou aa Hôpital Saint-Vincent de Paul, 82, avenue Denfort Rochereau, 75674 Paris cedex 15, France

✩ Article rédigé d’après une communication du Dr GideonLACK à l’occasion du XXIIIe Congrès de l’Académie Européenned’Allergologie et d’Immunologie Clinique à Amsterdam enjuin 2004.Adresse e-mail : [email protected] (P. Molkhou)

Place des anticorps immunoglobulines E 423

Ce lien, confirmé par des études épidémiolo-giques, montre qu’un aliment peut déclencher unbronchospasme et qu’un asthme est un facteuraggravant chez un sujet allergique alimentaire.

Plusieurs études contrôlées ont montré chezl’enfant et l’adolescent le rôle déclenchant del’allergie alimentaire (AA) dans des crises d’asth-me mortelles ou gravissimes, avec l’arachide enparticulier.

Trois explications semblent possibles :la crise est déclenchée par l’ingestion depetites quantités d’allergènes ;une exposition permanente à des allergènes aéro-portés va aggraver l’inflammation bronchique ;la persistance d’une AA comme marqueurd’une réponse immune anormale de l’hôteentraîne une inflammation et un remodelagedes voies aériennes.