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Poids sémantique et "Poids phonique" Author(s): Ivan Fónagy Source: La Linguistique, Vol. 9, Fasc. 2 (1973), pp. 5-35 Published by: Presses Universitaires de France Stable URL: http://www.jstor.org/stable/30248226 . Accessed: 15/06/2014 22:17 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Presses Universitaires de France is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to La Linguistique. http://www.jstor.org This content downloaded from 62.122.79.69 on Sun, 15 Jun 2014 22:17:36 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

Poids sémantique et "Poids phonique"

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Poids sémantique et "Poids phonique"Author(s): Ivan FónagySource: La Linguistique, Vol. 9, Fasc. 2 (1973), pp. 5-35Published by: Presses Universitaires de FranceStable URL: http://www.jstor.org/stable/30248226 .

Accessed: 15/06/2014 22:17

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Page 2: Poids sémantique et "Poids phonique"

POIDS SNMANTIQUE ET < POIDS PHONIQUE >>

par Ivan F6NAGY

I. Selon une regle g6ndrale - trop gin6ralement formulde

pour etre generalement valable - l'accent principal frappe en

hongrois dans les syntagmes nominaux et verbaux le determinant

(l'pithete, resp. le complement adverbial) qui precede le deter- mine. Par opposition & l'allemand o i cet accent frappe le dernier membre du syntagme, independamment de l'importance relative des membres du syntagme >> (Trojan, I961). Le contraste entre les regles accentuelles des deux langues ressort egalement de

l'analyse generative de Kiparsky (1966, pp. 81-84). C'est ce qui explique que, dans certains cas - tels que nagy bdnat /naj Iba:nat/ < grand chagrin a ou nagyon iriiliik /najon I cerylcek/ << je suis trbs heureux > -, la d6saccentuation du determinant est 6prouv6e (et reprouvie) comme << urbain >>, dans le sens de non-autochtone, en tant que germanisme.

L'accent peut quitter cependant le d&terminant en d'autres cas, sans blesser la sensibilit6 linguistique, meme la plus chatouil- leuse. Aucun Hongrois n'objecterait par exemple a la mise en relief du verbe dans vasdrnap megldtogattdik < ils lui ont rendu visite le dimanche >>, ou azutdn 6nekelt<< plus tard il a chante >>. Ces phrases sont senties tout aussi correctes que azutdn inekelt ou vasdrnap Idtogattdk meg (priv6 de son accent, le prefixe est relegue derriere le verbe). Les deux variantes phrastiques sont 6galement cor- rectes, r6pondant cependant B d'autres questions sous-jacentes : << Qu'est-ce qu'il a fait apres ? >, vs. << Quand est-ce qu'il a chantt ? >. La disaccentuation est done parfaitement gramma- ticale des qu'elle participe

' la mise en vedette d'un autre terme

qui est au centre de l'intr&t. Cette fonction culminative de I'accent

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Page 3: Poids sémantique et "Poids phonique"

6 IVAN F6NAGY

peu attestee en franqais, joue un rble essentiel dans le hongrois, aussi bien que dans les langues germaniques et slaves (Jakobson- Halle, 1956, p. 9).

Avant d'entrer dans les details, je tiens a preciser que je consi- dare, avec Andre Martinet (1967, p. 89), l'accent comme << une mise en valeur d'une syllabe >, tout en ajoutant que cette mise en valeur suppose, sur le plan physiologique, un effort supple- mentaire, surtout de la part des muscles expiratoires, et que cet effort se refl6te sur le plan acoustique dans des changements d'intensitd, de duroe syllabique, dans certaines modifications de la courbe de frequence fondamentale et du spectre sonore. La structure acoustique des syllabes accentudes est donc motivie

par rapport a leur production - elle refl6te l'effort - et, en

meme temps, elle est conventionnelle, determinde par des ragles qui peuvent varier d'une langue A l'autre (F6nagy, 1966, pp. 231-244).

En continuant l'exploration des toldrances accentuelles de la

competence linguistique hongroise, on rencontre d'autres exemples qui ddpassent les cadres d'une simple mise en relief. Ainsi, dans le syntagme nagaon hegyes << trbs pointu a, l'accent frappe l'adverbe nagyon << trbs >; dans le syntagme kicsit hegyes < un peu pointu >>, il

frappe, par contre, le qualifid, l'adjectif hegyes. Cette divergence ne s'explique plus par telle ou telle situation concrete, elle relbve du syntagme mime. Ces << exceptions>> sont nombreuses :

Gyorsan dolgozik. Lassankent rendbejottek. < Il travaille vite. >> o Peu A peu ils se sont r6tablis. >>

Barmikor elj6hetsz. N6ha meglitogatta. < Tu peux venir quand tu veux. >> << Ils lui ont rendu visite quelque-

fois. >>

Messzire mentek. Valahol s6tAlnak. << Ils sont allis loin. >> << Ils se prominent quelque part. >>

Le fait que la place de l'accent est d6terminde dans tous ces cas par la structure du syntagme, n'empeche que le syntagme corresponde a telle ou telle situation abstraite, qu'il reponde A telle ou telle question gendrale, catigorielle. La pr6f6rence accen- tuelle pourrait s'expliquer a partir de cette question g6nerale sous-jacente qui vise soit le d6termine, soit le d6terminant. Messzire mentek suppose des questions du genre : << Oh sont-ils allds? > < Sont-ils allks loin ? > Valahol sitdlnak, par contre, repond plut6t

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POIDS SiMANTIQUE ET << POIDS PHONIQUE >> 7

t des questions qui concernent l'activit6 m~me :<< Qu'est-ce qu'ils font ? >> La prdf6rence accentuelle ddpendrait donc, indirectement, de la question catigorielle sous-jacente.

Certaines categories d'adverbe se pretent plus a la desaccen- tuation que d'autres. Ainsi, le complement concessif, le compl6- ment respectif perdent plus facilement l'accent que le complement marquant l'&tat ou le r6sultat.

Vadk6nt iild6zte. Gyermek lktere killt vele.

< II le traquait comme une b6te < Bien qu'il ne soit qu'un enfant, il

sauvage. >> a ose s'en prendre A lui. >>

Darabokra vigta. Szemre impozAns < II l'a coupe en morceaux. >>~ En apparence (litt. : pour les

yeux), c'est imposant! >>

L'accent ne quitte guere l'adverbe interrogatif, mais se detache facilement de l'adverbe inditermine.

Mennyire tudja ? Valamennyire megtanulta. < Jusqu'A quel point le sait-il ? >> Ii l'a appris dans une certaine

mesure. >>

Ces preferences categorielles pourraient s'expliquer 6galement par la direction des questions generales sous-jacentes : << Quel 6tait le resultat de l'activit6 ?>> (compl6ment marquant le resultat). << De quelle manibre, en quel &tat a-t-il execut6 l'action, accompli l'activite ? (compl6ment circonstanciel marquant l'Ftat).<< Qu'est-il arriv6 finalement malgr6 telle et telle circonstance ? >> (compl6- ments concessifs). La question ne peut viser, par d6finition, l'adverbe indetermine; il s'agit d'une classe de mots caracteris'e par l'absence de traits nettement definis. La question est dejA contenue, d'autre part, dans l'adverbe interrogatif.

On pourrait dire egalement que dans le cas de la mise en relief catigorielle, permanente - comme dans le cas d'une mise en vedette actuelle, momentanee - l'accent est l'expression naturelle de l'int6ret que le locuteur et l'interlocuteur portent a telle ou telle partie du message. En jouant sur le sens 6tymologique du terme hongrois d6signant l'accent hangsily << poids phonique >> : le poids phonique du mot, d'une classe de mots, d'une partie du discours semble correspondre en hongrois a son poids semantique.

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Page 5: Poids sémantique et "Poids phonique"

8 IVAN FONAGY

2. Par opposition a l'emphase actuelle qu'on prete a tel ou tel moment, "a un mot, l'accent qui appartient 'a une classe de mots est redondant. Etant lid a la structure grammaticale pr66tablie, il ne peut enrichir le message.

Nous savons cependant que la redondance est indispensable en toute communication et qu'un trait redondant peut devenir essentiel, d&s qu'un bruit recouvre l'a6lment distinctif. Ce << bruit >

dB" 10

300

2004

160bi st an f ut o tt

'bi sto! an f ut o tt FIG. I. - Biztosan futott << I courait avec assurance >>. En haut : courbe de pression

sonore. En bas : changements de frhquence de la fondamentale (cf. fig. 2).

pourrait etre l'homonymie accidentelle de deux sortes de compl6- ments. Ainsi, par exemple, la phrase Azalatt aludt signifie << Ii dormait en dessous >> si l'accent frappe l'adverbe azalatt, mais

signifie << pendant ce temps, il dormait > si l'adverbe perd son accent. La phrase Egyre vdr, accentuee sur l'adverbe, signifie << il (t')attend pour une heure ), accentuee sur le verbe, la phrase pourrait &tre rendue par < I1 n'en finit pas d'attendre >; Alig vdrta

signifie < Il ne l'attendait guere a si l'accent frappe l'adverbe, o I1 attendait impatiemment [que...] a si l'accent frappe le verbe.

Le nombre de ces paires minimales phrastiques est tres 6lev6. Nous avons pu en relever 58 au cours d'une enquete sur les adverbes n'allant que jusqu'h n dans l'alphabet (F6nagy-Magdics, I966).

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POIDS SAMANTIQUE ET (( POIDS PHONIQUE a 9

En contraste avec le rapport simple, transparent, des deux signifiants - un syntagme compos6 de deux mots porte l'accent principal soit sur le premier, soit sur le deuxikme mot (fig. I et 2) -, les rapports semantiques qui existent entre les deux ensembles sont tres varids. La divergence entre les deux significations peut etre tres prononcde, nettement qualitative, comme dans les deux cas cites. Quelquefois, cependant, il n'y a qu'une nuance qui

dB

Hz

200 "

160 -

120 -

,bistofaonf uto tt

FIG. 2. - Biztosan futott < II a couru probablement >> (cf. fig. I)

distingue les deux signifies et celle-ci n'apparait guere qu'au cours d'une traduction de ces deux phrases en d'autres langues. C'est ce qui nous a sugg6r6 l'id'e de faire traduire ces couples de phrases par des Hongrois bilingues en frangais, en anglais et en allemand. La transformation interlinguistique' - la traduction des couples de phrase en des langues non apparenties - permet de saisir sur le vif le passage d'une catigorie grammaticale a une autre, bien qu'il soit camoufl par l'homonymie syntaxique dans la langue de d6part.

I. Lucien Tesnibre (1959) se sert souvent de la traduction, de P'analyse contrastive, pour mettre en &vidence les vrais rapports syntaxiques masques par la structure superficielle.

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Page 7: Poids sémantique et "Poids phonique"

10 IVAN F6NAGY

A

L'accent principal frappe le d6- terminant.

(a) Complement emphatique :

i. Csak kiabilt.

Il crie sans cesse. He keeps on shouting. Der aber briillt und briillt.

2. Csakhogy elfelejtette.

Heureusement qu'il l'a oublie.

Fortunately he forgot about it. Endlich hat er es vergessen.

3. De f.zom!

Comme j'ai froid! How cold I am! Wie mir kalt ist!

4. Hogy fizom!

Comme j'ai froid! How cold I am! Wie mir kalt ist!

(b) Compl6ment de lieu :

I. Addig stMdlok.

Je me promebnerai jusque-lU.

I'll walk as far as there. Ich werde bis dorthin spazieren.

2. Azalatt aludt.

Il dormait en dessous. He sleept under this [tree]. Darunter schlief er.

3. El6tte pihent. Il se reposait devant [cet arbre]. He rested in front of it. Davor pflegte er zu ruhen.

4. Ezen t61 dolgozik. Il travaille au-deld de tel endroit. He works further out than that. Dahinter wird er arbeiten.

B

L'accent principal frappe le de- termin6.

vs. conjonction :

Csak kiabalt.

Il ne fait simplement que crier. He is only shouting. Er briillt ja nur.

Csakhogy elfelejtette.

Oui, mais il l'a oubli6. The only thing is he forgot about it. Nur dass er es vergessen hat.

De fdzom.

Mais j'ai froid. But I am cold. Aber mir ist kalt.

Hogy fdzom.

Que j'ai froid. That I am cold. Dass mir kalt ist.

vs. compl6ment de temps :

Addig sitalok.

Je me promenerai pendant ce

temps-lA. In the mean time I'll take a walk. Inzwischen werde ich spazieren.

Azalatt aludt.

Pendant ce temps il dormait. Meanwhile he slept. Inzwischen schlief er.

El6tte pihent. Avant il se reposait. First he rested. Vorher ruhte er sich aus.

Ezentil dolgozik. A partir de maintenant il travaillera. From now on he works. Von nun an wird er arbeiten.

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Page 8: Poids sémantique et "Poids phonique"

POIDS SiMANTIQUE ET a POIDS PHONIQUE I II

5. Erre tiisszentett.

II a 6ternu6 par-lA. He sneezed upon this.

Darauf hat er geniesst.

(c) Compl6ment de temps:

I. Egyszerre csengettek. Ils ont sonn6 en mime temps. They rang the bell simultaneously. Sie lauteten zu gleicher Zeit.

(d) compldment numeral :

I. Egyszer meglatogatom. Pour unefois j'irai la voir. I will go to see her at one occa-

sion. Einmal will ich ihn [gerne]

besuchen.

I. E16sz6r evett.

C'otait la premiere fois qu'il man-

geait. He ate for the first time. Er ass zum ersten mal.

(e) Compl6ment de lieu :

I. Egyfel61 hallottam.

Je les ai entendus d'une mdme direction.

I heard it from one direction. Ich h6rt/e es aus der gleichen Rich-

tung.

2. Elsj sorban Uilt.

Il etait assis au premier rang. He was sitting in the first row. Er sass in der ersten Reihe.

3. Ezzel szemben epitkeztek. Ils construisaient en face de [ce

lieu]. They were building in front of this

[garden]. Dem gegeniiber wurde gebaut.

Erre tilsszentett.

La-dessus il a 6ternu6. And then he sneezed.

Hierauf hat er geniesst2.

vs. complement de maniere :

Egyszerre csengettek. Tout d coup on sonnait. All at once the bell rang. Plitzlich h6rten sie lauten.

vs. complement de temps :

Egyszer meglatogatom. Un jour j'irai le voir. Some day I will go to see her.

Einmal werde ich ihn besuchen.

E16sz6r evett...

D'abord il a mang6...

First he ate... Zuerst ass er...

vs. complement de liaison3 :

Egyfel61 hallottam.

J'ai entendu dire d'une part...

On the one hand I heard it. Einerseits h6rte ich...

Els6sorban jilt.

Tout d'abord il tait assis. First of all he was sitting. Er sass vor allem (ou :) in erster Linie.

Ezzel szemben lpitkeztek. En revanche (ou : Par contre) ils fai-

saient des constructions. On the other hand they were building.

Im Gegenteil, es wurde gebaut.

2. Le traducteur frangais et allemand interpretant erre atone comme exprimant un rapport de consequence, comme un adverbe de liaison, cf. groupe e.

3. Cf. Les adverbes de liaison de la Grammaire de R. L. WAGNER et J. PICHON (416 f.).

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Page 9: Poids sémantique et "Poids phonique"

12 IVAN FONAGY

4. Azon feltil 6pitkeztek. On faisait des constructions au-

dessus de [cette ligne]. They build it over that [line]. Dariiber wurde gebaut.

5. Azontidl 6pitkeztek. On faisait des constructions au-

del"d. They built even further out than

that. Dahinter liessen sie bauen.

6. Emellett evezett.

Il ramait a cote de (l'ile). He rowerd alongside it. Daneben ruderte er.

7. Ezenkivfil jitszott. II jouait ailleurs. He played outside of it. Er spielte ausserhalb (des Gartens).

8. Mellette dolgozik. Il travaille aupres de lui. He is working with him. Er arbeitet neben ihm.

(f) Complement de maniere :

I. Egyben kirte.

Il le voulait en un morceau. He asked for it in one piece. Er bat (ou wiinschte) es in einem

Stiick.

2. Enn6l fogva hfizta. Il le trainait par (la manche). He drew it by this. Er hat es dabei gezogen.

3. Helyette dolgozott. Il travaillait ai sa place. He worked on her place. Statt seiner hat er gearbeitet.

4. Kiil6nben eliink. Nous vivons mieux (ici qu'ail-

leurs). We live better. Wir leben besser.

Azonfelul 6pitkeztek. Outre cela on faisait des constructions.

And besides that they were building. Uberdies wurde gebaut.

Azont61 dpitkeztek. En outre on faisait des constructions.

Afther that they started building.

Ausserdem liessen sie bauen.

Emellett evezett.

En outre, il ramait. And besides he rowed. Dabei ruderte er.

Ezenkiviil jdtszott. En outre, il jouait. And what's more he played. Ausserdem spielte er.

Mellette dolgozik. En outre, il travaille. Besides this he also works. Dabei arbeitet er.

vs. compl6ment de liaison :

Egyben kIrte...

En mime temps il le priait... At the same time he asked...

Zugleich bat er...

Enn61fogva huzta.

Par consiquent, il le trainait. And consequently he drew it. Er hat es daher gezogen.

Helyette dolgozott. Il travaillait au lieu de... He worked instead... Statt dessen hat er gearbeitet.

Kuil6nben liink. D'ailleurs nous vivons bien ici.

After all we live. Sonst leben wir.

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Page 10: Poids sémantique et "Poids phonique"

POIDS SEMANTIQUE ET < POIDS PHONIQUE > 13

5. Legalibb ketten lesznek.

Ils seront au moins deux.

They will be two at the very least. Es werden mindestens zwei sein.

(g) Compl6ment instrumental :

i. Ezzel 16pett egyet. Il a fait un pas avec cela. He made a move with that. Mit dieser (Figur) schritt er aus.

(h) Complement causal :

i. Azert dolgozik. C'est pour cela qu'il travaille. That's why he works. Er arbeitet dafiir.

(i) Complkment de temps :

I. Kizben aludt.

Il a dormi entre-temps. He slept while it was going on. Er hat inzwischen geschlafen.

(j) Complkment de temps :

i. Addig tanulok.

J'Ctudierai jusqu'd tel moment. I am going to study up to that

time. Bis dahin werde ich lernen.

2. Egykor talilkoztak. Ils se sont rencontres une heure. They met at one o'clock. Sie trafen sich um eins.

3. Egyre vAr.

Il t'attend pour une heure. He is waiting for one thing. Er wartet auf eins.

4. E16bb felderitem a dolgot.

Je l'aurai d6couvert avant lui. I shall sooner clear up the matter

(than you). Ich werde die Sache als erste

kliren.

LegalAbb ketten lesznek.

Au moins ils ne seront pas seuls. So much the better, there will be two.

Wenigstens wird er nicht allein sein.

vs. complement de liaison :

Ezzel l6pett egyet. Le-dessus il a fait un pas. And after that he made a move. Damit tat er einen Schritt vorwart

vs. complement de liaison :

Azert dolgozik. Il n'en travaille pas moins. Nevertheless he works. Trotzdem arbeitet er.

vs. complement de liaison :

Kbzben aludt.

Cependant il a eu le front de dormir. Meanwhile he slept. Dabei hat er geschlafen.

vs. complement de temps :

Addig tanulok.

J'6tudierai pendant ce temps. In the meantime I am going to study.

Inzwischen werde ich lernen.

Egykor talalkoztak. Ils se sont rencontris jadis. At one time they used to meet. Sie trafen sich einst.

Egyre vdr.

Il ne fait qu'attendre sans cesse. He keeps waiting all the time. Er wartet immer fort.

El6bb felderitem a dolgot. D'abord je vais le decouvrir. First I will clear up the matter.

Zuerst werde ich die Sache klaren.

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Page 11: Poids sémantique et "Poids phonique"

14 IVAN F6NAGY

(k) Complement de manihre

I. Alig vArta.

Il ne l'attendait gure. He hardly expected ir. Das hat er (ou Sie) kaum erwartet.

2. Att61l kdrhette.

C'est d lui qu'il a d i le demander. He probably asked her for this.

Von ihm hat er wahrscheinlich

gebeten.

3. Egeszen t6nkrement. Il est tout d fait ruin6. He has gone under completely. Er hat vollig verkracht.

4. Gyorsan irok.

J'6cris d la hdte. I write rapidly. Ich schreibe schnell.

5. Hamar megj6ttek. Ils sont venus rapidement. They came quickly. Sie kamen rasch.

6. Lassan 6bred.

Il met du temps A s'eveiller. He wakes slowly. Es dauerte stets eine Weile bis

er erwachte.

7. Nagyban vAsArolt.

Il achetait en gros.

He has bought whole sale. Er kaufte im grossen (ou) (en

gros) . 8. E16g ostoba (ahhoz).

Tu es assez b6te (pour le faire). Stupid enough... Er ist schon so dumm (umrn...).

vs. compldment de manihre :

Alig vdrta...

Il attendait impatiemment que... He could hardly wait until... Er konnte es kaum abwarten.

Att61 kirhette.

II avait beau le lui demander. He asked but for all that he might

not have.

Na, den hat er darum bitten k6nnen.

Eg'szen tinkrement.

Il en est malade, cet homme. But really, he has gone under. Er ist ganz heruntergegangen (ou)

zusammengebrochen.

Gyorsan irok...

Je vais vite 6crire. I am going to write, soon... Ich schreibe schnell ein Paar Zeilen...

Hamar megj6ttek... Alors ils sont venus... They just came...

Plotzlich kamen sie...

Lassan abred.

Il commence s'dveiller. He is just coming out of his sleep. Allmihlich erwachte er aus seinem

Schlaf.

Nagyban vdsArolt...

II Itait juste en train de faire ses achats...

He was in the tick midst of shoping... Er war eben mitten im Kaufen...

Elg ostoba!

Faut-il 'tre bete! Rather stupid. Dann ist er hald ein Dummkopf.

A ces groupes et groupuscules, refl6tant la complexit6 ddconcer- tante d'un phenombne simple par apparence, s'oppose une classe

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POIDS SIQUE ET (( POIDS PHONIQUE a 15

plus homogbne qui comprend des complements de maniere qui - a la suite de la disaccentuation - perdent leur aspect de determinant.

(I) compl6ment de mani re :

i. AltalAban beszeltek r61a. On en parlait dans les grandes

lignes. They spoke about in a general

way. Man sprach davon im Allge-

meinen.

2. AlapjAban elhibdzott.

Cela peche par la base.

It's radically false. Es ist im Grunde verfehlt (ou)

grund- erfehlt.

3. Biztosan futott.

II courait avec assurance. He ran steadily. Sein Lauf war sicher.

4. Egyenesen rohant.

II courait droit devant lui. He ran straight ahead. Er rannte gerade aus.

5. Egyszeriien irt.

I1 a dcrit tres simplement. He wrote in a simple style. Er hat einfach (schlicht), ge-

schrieben.

6. Arthet6en megmondta. II l'a raconte trWs clairement. He told es understandably. Er hat es verstdndlich gesagt.

7. Fel6lem j6hetett.

I1 venait probablement du lieu

ois j'Ytais. He could have come from my

direction. Er kam wahrscheinlich aus der

Richtung, wo ich stand.

vs. pseudo-complement :

Altalaban beszeltek r61a.

En gingral, on en parlait.

They generally spoke about it.

Im allgemeinen man sprach davon.

Alapjaban elhibazott.

Au fond (ou : A proprement parler) c'est une affaire manquee.

It's false step after all. Im Grunde genommen (ou eigentlich)

ist es verfehlt.

Biztosan futott.

I1 a couru probablement. He must have run. Sicherlich lief er.

Egyenesen rohant.

Et je vous assure qu'il courait. In fact he ran. Er ist geradezu gerannt.

Egyszeriien irt.

II a simplement ecrit. He simply wrote. Er hat einfach geschrieben.

Jrthet6en megmondta.

I1 l'a racont6, et c'est bien normal.

Understandably enough he told us. Es ist verstdndlich, dass er...

Felolem jdhetett.

Quant d moi, il pouvait venir tout d son aise.

For all of me he could have come.

Von mir aus konnte er kommen.

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Page 13: Poids sémantique et "Poids phonique"

16 IVAN FONAGY

8. IgazAn megtehetn6d. Tu pourrais le faire pour de bon. You could really do it. Du solltest es wirklich tun.

9. Kivetelesen j6. C'est hors de pair. It is uncommonly good. Es ist unvergleichbar gut.

Io. Kiilan6s m6don felelt.

Il a repondu singulibrement. He answered strangely. Er hat in einer sonderbaren Weise

geantwortet. i i. Ldthat6an gett.

On voyait qu'il bruilait. It burnt visibly. Er brannte sichtbar.

12. Ldtsz6lag nyugodt. Il n'est tranquille qu'en apparence. He is quiet only on the face of it. Er ist nur scheinbar ruhig.

13. Lehet6sig szerint kezeli.

Il le traite comme il peut. He treats her whatewer way pos-

sible. Er behandelt ihn nach Mdglich-

keit.

14. Mdskeppen jelenti.

I1 l'annonce d'une manihre dif- firente.

He reports it differently. Er meldete es anders.

I5. Mellesleg emlitette.

Il l'a mentionn6 en passant. He mentioned it among other

things. Er hat es nur nebenbei erwdihnt.

i6. Miattam k'shet.

C'est A cause de moi qu'il a dfi arriver en retard.

He may be late because of me. Das ist wohl meine Schuld, wenn

er sich verspitet.

Igazin megtehetn6d. Tu pourrais vraiment le faire.

Really you could do it. Wirklich (ou : Im Ernst) du solltest

es tun.

Kivetelesen jd. Par exception, c'est bon. It is good exceptionally. Es ist ausnahmsweise gut.

Kiilln6s m6don felelt. Par extraordinaire, il a repondu. Strangely enough he answered.

Merkwiirdigerweise hat er geantwortet.

Lithat6an 6gett.

II semblait qu'il brilait. It seemed to burn. Sichtlich brannte er.

Latsz6lag nyugodt. 11 est tranquille A ce qu'il semble. He seems to be quiet. Er scheint ruhig zu sein.

Lehet6seg szerint kezeli.

Si c'est possible, il le traitera. If possible he will treat her.

Wenn es m6glich ist, behandelt er ihn.

Maskeppen jelenti.

Sinon, il l'annonce.

Otherwise he will report it. Ansonsten meldete er es.

Mellesleg emlitette.

D'ailleurs il en a parle. By the way he mentioned it.

Nebenbei, er hat es erwiihnt.

Miattam kishet.

Pour ce qui est de moi, il a pu arriver en retard.

For all I care he can be late.

Meinetwegen kann er sich verspdten.

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Page 14: Poids sémantique et "Poids phonique"

POIDS SEMANTIQUE ET 0 POIDS PHONIQUE > 17

I7. P/ldiul Allitotta.

Il a parld de lui comme d'un cas moddle.

He mentioned it as an model. Er hat ihn als Vorbild (vor Au-

gen) gestellt.

I8. NVekem fizethet.

Il peut payer a moi.

He can pay to me. Mir kann er zahlen.

I9. Tudtommal tAvozott.

Il est parti avec mon autorisation. He left with my knowledge. Er entfernte sich mit meinem

Wissen.

20o. Term6szetesen beszel angolul. Il parle anglais avec naturel. He speeks English quite natu-

rally (in an unaffected man-

ner). Er spricht englisch sehr natiirlich.

21. Viletleniil vesztett.

Il a perdu par hasard.

He lost accidentally. Er hat zufdllig verloren.

Pld6.ul dllitotta.

II pretendait par exemple...

For example he declared... Er hat zum Beispiel behauptet.

Nekem fizethet. En ce qui me concerne, il a beau A

payer. As to me he can pay. (Let him pay if he wants to.) Mir kann er zahlen.

Tudtommal tdvozott.

Il est parti autant que je sache. He left as far as I know. Er ist fort, so viel ich weiss.

Termiszetesen beszdl angolul. Il parle anglais, naturellement. He speaks English of course.

Natiirlich spricht er englisch.

Veletlenfil vesztett. Cette fois, par hasard il a perdu (ou :

Cette fois tu es dans l'erreur, il a

perdu). As it happened he lost. Ganz zufdllig irrst du dich, er hat

verloren.

3. Pour la plupart des phrases du groupe 1, le timoignage des traductions est formel : l'adverbe desaccentud cesse d'etre le determinant du predicat, et au lieu de preciser l'activitd designte par le verbe, il constitue une phrase independante s6parde dans les traductions, souvent par une virgule, par deux points ou d'au- tres indices formels comme l'ordre des mots qui exclut l'apparte- nance de l'adverbe a la proposition que constitue le predicat (<< Otherwise he will report it >, << Natiirlich spricht er englisch >, cf. encore 1 2, 4, 8, 10, 14, 16) ou le choix d'un terme qui ne pour- rait figurer comme compldment du verbe (a He speaks English of course >, < Il a couru probablement >>, I prdtendait par exemple >>, < For all of me he could have come >>).

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Page 15: Poids sémantique et "Poids phonique"

18 IVAN FINAGY

Le compl6ment desaccentud se transforme done au cours de la traduction en une phrase elliptique, ou meme, dans certains cas, en une phrase complhte. Ainsi, par exemple, au syntagme de la phrase 14 se substitue en frangais une phrase composde :<< Et je vous assure qu'il courait. > Pareillement, le syntagme de la phrase 1 6 est rendu par : < II l'a raconte, et c'est bien normal >>; celui de la phrase I I : << II semblait qu'il brfllait>> (<< It seemed to burn >>); la phrase 1 I2 est rendue par << I est tranquille a ce qu'il semble >>; la phrase I 13 : << Si c'est possible, il le traitera >> (<< If possible he will treat her >); la phrase I 14 par << Sinon, il l'annonce>>; la phrase 1 16

par << En ce qui me concerne, il peut bien arriver en retard >>; la phrase I 19 : << Il est parti autant que je sache > (<< He left as far as I know >>).

Les traductions contribuent done a mettre en ividence le caractbre pragmatique, meta-linguistique de la phrase contenue en germe dans le complement desaccentud. Ce quasi-complkment comporte en fait un jugement personnel du sujet parlant sur son

propre enonce. Par opposition au vrai complement du groupe A, les << compl6ments >> du groupe B se rivdlent comme 6tant des enonces << a la deuxibme puissance >>, des inoncis qui caracterisent des enonces. Dans la phrase Biztosan futott, biztosan4 spdcifie la

i st ofla

fut ott FIG. 3. - Schema de la structure

logique de la phrase Biztosan futott a Ii courait avec assurance >>.

manibre de courir d'une personne. La structure logique sous-

jacente est l'intersection (fig. 3). Dans la phrase correspondante Biztosan futott, les deux membres sont independants l'un vis-at-vis de l'autre, ce sont des ensembles disjoints. Ce qui les relie, c'est

4. Le sens litteral de biztosan est << certainement >>, a sans doute >>, dans le contexte actuel, et dans beaucoup d'autres, il exprime cependant l'incertitude, la probabilit6, comme sans doute en frangais.

<< I arrive quelquefois que ce soit en franCais qu'apparaisse sous la forme d'adverbe le contenu semantique que l'on est habitue '

y voir exprimb par un adverbe dclaratif. Ainsi, dans la phrase dicidiment, cet homme estfou, qui signifie bien entendu, non pas qu'il est fou d'une maniere decidee, mais bien que c'est apres mufr examen qu'on est parvenu a se faire cette opinion >> (Tesniere, 1959, 303).

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Page 16: Poids sémantique et "Poids phonique"

POIDS SiMANTIQUE ET << POIDS PHONIQUE a 19

un rapport pragmatique, biztosan suggerant le commentaire du

sujet parlant :<< II est probable que... >> (fig. 4).

FIG. 4. - Schema de la structure logique de la phrase Biztosant futott << I a couru probablement >. (bistola n futott

R. L. Wagner distingue cette sorte d'adverbe par le terme d'adverbe d'opinion (Wagner-Pinchon, 1962, 414). B. Pottier

(1967, p. 20) oppose le compliment franqais correspondant h biztosan disaccentu6 comme circonstance externe a circonstance interne, et illustre leur divergence par une phrase oh le meme adverbe

remplit l'une et l'autre fonction :

Naturellement, il est mort naturellement. C. externe C. interne

Tesnibre rambne le complement apparent h une phrase sous- jacente, en identifiant le << complement externe >> allemand a l'aide de la traduction franqaise oih la structure profonde du

syntagme allemand est & la surface : << er ist schon bekanntlich tod >> -< On sait qu'il est deja morta (1959, 305). Les exemples frangais, anglais, allemands, latins (p. ex. << melius paribimus >> << [Il vaut mieux que nous perissions] >, Tite-Live, I, 13, 3, cite

par Tesnibre) et hongrois montrent clairement que cette homo- nymie syntaxique - masquant une divergence fondamentale - est largement repandue et depasse le cadre des langues indo- europeennes.

Cette explication du pseudo-complement du qualifiant prag- matique (complement externe, adverbe d'opinion) n'est << gen- rale >> que dans l'acception quotidienne, dans le sens faible du terme. Elle n'offre guere d'interprdtation concrete, serrie. La regle proposee - << detachez le pseudo-complkment du predicat pour le transformer en un enonce d'ordre pragmatique qui se

rapporte t l'anonc6 factuel reprisente par le pridicata - n'est

qu'une premiere approximation. Des qu'on tache de depasser ce stade preliminaire, on se heurte a des difficultis considerables.

Il y a pourtant des cas relativement simples, justifiant un cer- tain optimisme. << Termiszetesen beszil angolul >> (1 20) pourrait s'interpreter B l'aide de quatre operations : (I) termiszetesen

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Page 17: Poids sémantique et "Poids phonique"

20 IVAN FONAGY

<< naturellement >> sera d'tache de la phrase originale se r'duisant 'a beszil angolul < il parle anglais >; (2) l'adverbe termiszetesen << natu- rellement o sera transform6 en adjectif par la suppression du

morpheme -en (suffixe modal); (3) cet adjectif constituera, en tant que pr'dicat nominal, la proposition principale : Termiszetes << Il est naturel>>; (4) la proposition beszil angolul << il parle anglais >> sera subordonnee a cette proposition principale et introduite

par la conjonction hogy < que >>. Ce meme procede pourrait tre

applique dans le cas des phrases bErthet6'en megmondta - frthetd,

hogy megmondta < Il est comprdhensible qu'il l'ait racont' >> (1 6). Ldthatdan Igett - Ldthat4 [volt], hogy egett < Il est (6tait) visible que ga brflait >> (l 1I).

Le procede cependant ne pourrait s'appliquer automatique- ment aux autres phrases du groupe 1. Kive'teles, hogy jd (1 9) << il est

exceptionnel que ce soit bon >> ne rend pas intigralement le

message contenu dans ive'telesen j6 (1 9). La conjonction reliant les deux phrases devrait etre de < mais >>, et la premiere proposition serait introduite par bdr < quoique >. En plus, kiviteles devrait etre compl6te par un substantif depourvu de contenu concret, tel que dolog << chose >>, puisque, sans ce socle, la phrase engendree ayant pour pr'dicat kiviteles (Bar kiveteles, de j6) ne serait ni assez claire, ni pleinement grammaticale. Ceci est 6galement vrai pour Kiiliniis mddon felelt (1 Io) - Kiiliins, hogy felelt < c'est curieux qu'il a

repondu> -* Kildniis, de felelt << C'est curieux, mais il a repondu o

-* Kiil6ns dolog, de felelte << Chose curieuse, mais il a repondu >>.

On se heurte a des difficultes d'importance inegale. Une

premiere - qui serait probablement facile ' surmonter - est la transformation du complement adverbial en un predicat, ainsi

lehetodsg szerint << selon les possibilitis >> en lehet o on peut >; < il est

possible > ou tudtdval << au su de X > (1 19) en tudja < il le sait >>, resp. tudta << il le savait a - choix qui n'est pas necessairement determine par le temps du verbe de la phrase manifeste. Une deuxieme tAche, plus embarrassante, est le choix de la conjonction. Ici, le recours a des informations contextuelles, d'ordre lexical, semble inevitable.

En confrontant le texte original aux traductions, il apparait que la difficulte principale consiste dans une interpolation satis- faisante du compliment transform6 en phrase elliptique. Au

complement dltaldban < gendralementa de la phrase (1 I) corres-

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Page 18: Poids sémantique et "Poids phonique"

POIDS SEMANTIQUE ET 0 POIDS PHONIQUE a 2I

pond la proposition sous-jacente dltaldban igaz az << il est vrai

gendralement >>; egyszeriien < simplement > de la phrase (1 5) doit &tre interprete comme egyszerii az egesz < la chose est simple >> ou

egyszeriien fogta magdt il a decidd sans tergiverser >>. Mellesleg << en

passant >> (1 15) suggere : mellesleg jedyzem meg < je remarque en

passant >>; pilddul < par exemple >> (1 17) sera interpr6td comme

pilddul felhozhatom, hogy < je pourrais citer comme exemple >>; maskeppen << autrement >> (1 14) engendre ha mdskipenjdrsz el << si tu

agis autrement >; igazdn < vraiment >> (1 8) donne il ne serait vrai- ment pas si difficile pour toi.

Sans parler des phrases oii il n'y a aucune correspondance textuelle (litterale) entre le complement manifeste et la phrase sous-jacente. Ainsi dans le cas de biztosan < certainement>> (1 3) -+ valdszinii < il est probable o; fel61lem << de ma part >> ou < pour ma part>> (1 7) -+ ami engem illet << pour ce qui est de moi >>;egyenesen << tout droit >>-+ szinte azt mondhatjuk < on pourrait presque dire >> (14).

L'dcart de la regle gendrale est particulierement marque dans le cas de la phrase (1 21). Les traductions sont tres dloquentes et nous offrent meme deux interpretations, l'une moins developpee, indiquant surtout que le compl6ment n'appartient nullement au verbe de la phrase manifeste; et une autre, qui s'dloigne ddliberd- ment de la structure de la phrase hongroise pour expliciter le contenu latent. L'absence d'emphase est l'expression d'un contenu complexe, l'adverbe viletleniil << par hasard >> peut etre interprdte comme :<< Cette fois tu es dans l'erreur. > La traduction allemande explique le rapport entre cette attitude et la presence du mot viletleniil : << Ganz zufdillig irrst du dich [Tu te trompes cette fois par hasard] >>. Le compl6ment viletleniil <<par hasarda ne se rapporte donc pas 'a la perte du joueur, mais

. l'erreur d'une tierce personne,

a celle de l'interlocuteur qui aurait dfi se tromper ganz zufdllig << tout par hasard >. L'absence d'emphase correspondrait

" une attenuation ironique, a la litote. Il1 serait vain d'attendre de la composante syntaxique d'une grammaire de nous fournir cette interpretation, sans l'aide substantielle de la composante lexicale.

Il faudrait donc distinguer entre des phrases oih une transfor- mation serait possible sans recours au lexique, et d'autres, repr&- sentant probablement la majorite confortable des qualifiants pragmatiques, qui exigeraient que des indications precises, indis- pensables

" l'interprdtation correcte, soient marquees dans le

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Page 19: Poids sémantique et "Poids phonique"

22 IVAN F6NAGY

dictionnaire, p. ex. biztosan I. (accentu6) << certainement >>, etc.; 2. (atone) << il est probable que >>, etc.

Le couple de phrase 1 21 nous rappelle en meme temps que l'adverbe accentue peut egalement se ddtacher du verbe et etre

interpretd comme la transformation, la condensation d'un enonce. Par hasard (accidentally, zufillig), du point de vue syntaxique du

complement et du predicat, n'est pas du meme ordre que beau-

coup ou sans sourciller. Il ne qualifie pas la faqon de perdre du

joueur, il constate simplement que le fait que le joueur X vient de

perdre est un pur hasard qui n'a rien a voir avec les qualites morales ou intellectuelles de X; << C'est un (pur) hasard qu'il a perdu (au jeu). >>

Qu'est-ce qui distingue alors la phrase A de la phrase B, comment expliquer l'accent vigoureux de l'adverbe de A qui l'oppose t l'adverbe de la phrase B ? La mise en vedette par l'ac- cent suppose comme antec6dent une controverse, effective ou

virtuelle, sur les causes de cette perte. La phrase B, par contre, met en evidence le fait meme, et suppose une autre controverse

prealable : << Ah, celui-1a, il gagne toujours! >> << Tu as toujours 6td injuste avec lui! Figure-toi, il vient de perdre. >> Quant 'a la struc- ture logico-syntaxique des deux phrases : dans la phrase A oi0

l'adverbe accentue qualifie - sinon le joueur en tant que joueur ou le jeu en tant que safafon de jouer - la perte en tant qu''v&- nement et lui assigne une place particulibre dans l'ensemble des

pertes (pertes alkatoires, pertes dues A la maladresse du joueur, B la malhonnatetd du partenaire, etc.). Le pr'dicat et le compld- ment se situent - malgrd la distance qui les separe - sur le meme niveau factuel, tandis que le pseudo-complkment de la

phrase B est exterieur A l'avenement et resume (d'une maniere

condensee) les prises de position divergentes du locuteur et de son interlocuteur.

4. En d'autres cas, on aurait beau chercher un message dissi- mule - et marque en meme temps - par l'absence de l'accent. Au contraire, les complements atones des groupes e, f, g, h se

distinguent plut6t par une riduction semantique des compldments accentues ayant garde leur signification originale. Cet affaiblis- sement empeche les adverbes de remplir leur fonction de compl&- ment aupres du predicat et les rdduit progressivement a l'tat de copules, d'adverbe de liaison, de conjonction. Les traductions refl6tent cette tendance par le choix de termes vagues, d'adverbes

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Page 20: Poids sémantique et "Poids phonique"

POIDS SIMANTIQUE ET << POIDS PHONIQUE a 23

qui servent en meme temps de conjonctions, ou par une conjonc- tion pure et simple.

Le complement accentue azon feliil << au-dessus >> (e 4), azontul (e 5) << au-delA >> precise le lieu des constructions. Les monemes

qui composent ces deux complements ont garde leur independance, leur integrite simantique - ceci se reflte dans l'orthographe de azon felijl ecrit en deux mots - la signification du complement accentue est, en effet, la somme de celle de ses constituants : az << cela >>, -on << sur >>, feliil << au-dessus >>, resp. tzil << au-del >>. Egyfel'l (e I), en tant que complement accentue, localise une source sonore dans l'espace, grace ? l'autonomie simantique de ces mondmes : egy << un >>, fel'l << venant de >>, << en outre >>, << d'une

part >>. Dans les complements atones, par contre, l'independance des

monemes est fortement reduite, et, en meme temps, au caractere sensuel des complements accentu6s s'oppose la signification non sensuelle (< abstraite >>) des complements atones.

Ceci est vrai de l'ensemble des paires phrastiques du groupe e, et se rapporte egalement au groupe b, oih les compl6ments accen-

tuds maintiennent leur sens originel, spatial, qui s'oppose au sens

figurd des complements atones, ddrivds mitaphoriques des compld- ments de lieu. La s6rie B pr6sente la projection chronologique des relations spatiales indiquies par les compldments de la sdrie A : << jusque-la>> - << pendant ce temps-l a>>; << en dessous >> -<< pen- dant ce temps >; << devant >> --<< avant >> << (temp.) >>; << sur cet

objet >>-+-< lI-dessus (and then) >>. Sans connaitre le terme d'adverbe de liaison suggere par

R. L. Wagner et Pinchon (1962, 416 f.), nous etions amen6, dans la version hongroise de cet article, "a postuler une categorie transi- toire de comple'ments conjonctifs (F6nagy et Magdics, 1966). Jespersen a propos6 le terme particule (<< particle >>) pour une classe de mots comprenant les adverbes, les conjonctions, les prepositions et les interjections pour accentuer << l'Cvidente analogie >> qui existe entre ces quatre categories ([1924], 1968, p. 87).

La mitaphore << quantitative >>, qui transforme progressivement l'adverbe en conjonction, a 6td attestie en beaucoup de langues et

relive probablement d'une tendance paralinguistique6.

5. << Comme il n'y a pas de separation absolue entre les categories grammaticales des particules, il arrive que l'adverbe fasse fonction de preposition, et meme de conjonc- tion >, constatent G. et R. LE BIDois (II, 580 f.).

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Page 21: Poids sémantique et "Poids phonique"

24 IVAN FONAGY

Ces << complements >> hongrois - tout comme les indices

pragmatiques du groupe I- se ditachent du predicat pour le mettre en rapport avec celui de la phrase pricedente. L'op'ration logique qui sous-tend les rapports syntaxiques plus ou moins complexes est dans la plupart des cas la conjonction6. L'adverbe-copule ajoutera cependant, grace a sa signification originale, une certaine nuance, un element pragmatique residuel, t l'operation logique. Cet apport << personnel >> du compldment conjonctif peut n'etre qu'une cer- taine emphase, une mise en relief de l'operation, << d'une part p, d'autre part q>> (cf. e I).

Dans six cas, c'est l'importance inegale des propositions p et q qui est mise en 6vidence : << Surtout p, et encore q. >> Ce jugement de valeur s'exprime dans les traductions par les conjonctions en outre, outre cela, and besides that, ausserdem (e 4, 5, 6, 7, 8). On peut accorder, d'autre part, plus d'importance a la deuxieme propo- sition : << p et surtout q a>. Ainsi dans la phrase ofi le complement est rendu par tout d'abord, first of all. Le timoignage des traducteurs

peut etre contradictoire quant h l'importance accordee aux deux

propositions. Ainsi, le traducteur anglais traduit ezenkiviil (e 7) par and what's more.

Le compldment peut preter 'a la conjonction un caractbre

adversatif qui s'exprime dans les traductions par des conjonctions telles que en revanche (e 3), cependant (i I), d'ailleurs (after all, sonst

f4). Un des complements de temps - en voie d'affaiblissement - est en train de prendre une nuance conjonctive-adversative (j I).

Les compldments de temps du groupe b contiennent tous un

morpheme demonstratif qui met en rapport la phrase avec une

proposition anterieure. Nous avons affaire a des compldments conjonctifs qui ajoutent 'a la conjonction un aspect temporel de simultaneite (b I, 2, f I) pendant ce temps, en mime temps, ou de suc- cession (b 3) avant, (j 4) d'abord (b 5, la-dessus).

La succession dans le temps comporte dans le dernier exemple Erre tiisszentett << l-dessus il a eternua >> un lien causal. La structure

linguistique semble donc admettre une interf6rence de deux

opdrations logiques diff6rentes, la presence simultanee de la

conjonction et de l'implication7.

6. La conjonction (signe : A) est une operation logique qui met en rapport deux propositions p et q. Elle est valable, si les deux propositions p et q sont vraies.

7. << Si p, alors q >> (signe :--). L'implication est toujours valable, sauf si la premiere proposition est vraie et la deuxiame fausse.

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Page 22: Poids sémantique et "Poids phonique"

POIDS S1MANTIQUE ET <

POIDS PHONIQUE > 25

L'implication interfere avec la conjonction aussi en d'autres cas. << La-dessus, il a fait un pas a (g i). La prdsence de l'impli- cation est souvent dissimulde par la complexit6 des rapports. << Au moins, ils ne seront pas seuls >> (f 5). Le complement conjonctif condense trois dnonc's mettant en rapport les deux

propositions : (a) << Tant pis pour p ; (b) << Sip alors q>>; (c) << Tant mieux pour q >. Les deux opdrations se combinent d'une faqon diff6rente dans la phrase h I traduite par << Il n'en travaille pas moins >. Le compl6ment conjonctif nie - par consequent sup- pose - une implication precedente du type p -- q (Si p alors

non-q). La structure logique sous-jacente serait donc :p-> (I1 n'est pas vrai que << si p alors non q >>).

L'implication domine la phrase f 2, oih au complement de liaison hongrois correspondent par consequent, and consequently, daher.

Ces complications et contradictions n'ont rien d'anormal, au

contraire, elles sont inherentes B l'dvolution du langage qui - loin

d'emprunter ses conjonctions a l'inventaire de la logique for- melle - les dlabore par moyen d'une ddmotivation progressive de ses lexemes, puis en tachant d'dpurer ses morphemes des d16- ments pragmatiques residuels pour satisfaire aux exigences posdes par le langage scientifique, tout en prdservant des distinctions

pragmatiques indispensables - ainsi les conjonctions << et >>, << mais >, << pourtant >, qui toutes correspondent

' la meme opdration logique - certaines ambiguitis - celle de la conjonction << ou > qui recouvre deux operations logiques diff6rentes - et surtout des morphemes qui rdsument ou confondent diffdrentes opdrations logiques, sans les nommer et sans preciser leurs rapports.

En hongrois, cette ddmotivation est en plein progrbs, c'est ce

qui rend les contradictions plus aigues, plus apparentes. Les nou- velles ou futures conjonctions se recrutent - comme tant de fois au cours de l'histoire des langues - parmi les compldments de lieu conformiment aux tendances paldologiques latentes qui assimilent les rapports logiques aux rapports temporels, les rapports tempo- rels aux rapports spatiaux (Cassirer). D'autres complements- conjonctifs sont dus a la demotivation de compl6ments de temps et de certains compl6ments modaux.

5. Comment expliquer la contradiction frappante entre la

simplicite du procidd phonetique d'une part, et la complexiti des

rapports simantiques entre les deux phrases distingudes par la

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Page 23: Poids sémantique et "Poids phonique"

26 IVAN FONAGY

place de l'accent principal, surtout si l'on veut tenir compte de l'ensemble des groupes (a)-(l) ?

L'accentuation non marquee en hongrois est sans doute celle oio l'accent principal frappe le d6terminant, premier eldment du

syntagme (x'x x). La deuxieme configuration est marquee par la suppression de l'accent du complement, donc, par un certain retardement de l'explosion accentuelle. Ce changement accentuel se reflite sur le plan synchronique en creant un rapport logique - quasi chronologique - entre les deux schemas, dont le deuxieme sera consid&r6 comme une distorsion expressive du premier. Dans les

langues vivantes, une distorsion est toujours interpr6t6e, c'est-at- dire ramenee au proces mental susceptible de l'avoir provoquee. Un comportement expiratoire-vocal specifique est consid&re comme l'expression d'une certaine attitude. Toutes les transfor- mations semantiques d6clenchees par la desaccentuation resul- teraient donc, en derniere analyse, d'une attitude mentale analogue.

La suppression de l'accent, la diminution du poids phonique selon la terminologie hongroise, devrait &tre considdrde comme I'expression d'une diminution analogue du poids semantique d'un mot, d'une catigorie verbale. Selon un principe 6nonci rdcem- ment par Andr6 Martinet, il y a une tendance dans les langues << faire coincider cofit et information>> (1972, p. 13). L'affaiblis- sement de l'accent, l'absence d'un effort supplementaire peuvent etre considires comme une r6duction sensible du cofit. L'indice

pragmatique, qui n'ajoute rien au message proprement dit, pos- s'de moins de << poids semantique >> que le d6terminant d'un pr6dicat qui contient la partie essentielle du message. Il est evident, meme sans faire des d6comptes, que l'information d'un determinant est sensiblement plus dlevee que celle d'un qualifiant pragmatique, vu le nombre 6lev6 des compl6ments possibles par rapport au nombre tres limit6 des indices pragmatiques8.

En deux cas, I'accent distingue l'adverbe numeral de l'adverbe de temps (d I, 2). C'est l'indication precise - contenue dans

8. Les << lois mecaniques >> de Franz Bopp, formul6es dans l'Introduction de sa Grammaire comparative (1833), sont basdes sur la notion du poids phonique essentiel- lement identique de chaque mot : une racine lourde exige un suffixe lkger, et vice versa.

W. Horn (1923) explique certains changements phonitiques irr6guliers (reduction de la quantitd vocalique au consonantique, la perte d'une ou de plusieurs consonnes) par un changement semantique, fonctionnel du mot correspondant - un lexeme qui se transforme en morpheme, subit une perte de son poids semantique, ce qui entraine une reduction de sa << substance >> de son << corps >> (Sprachk6rper).

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Page 24: Poids sémantique et "Poids phonique"

POIDS SAMANTIQUE ET 0 POIDS PHONIQUE )> 27

egykor << a une heure >> - qui, ici comme ailleurs, exerce plus d'attraction sur l'accent que le geste vague, dvasif esquissd par le

compldment atone - egvkor < some day >>. La transformation des complements de manibre en simples

copules - groupes e, f, g, h - reprdsente une diminution consi-

ddrable de l'information du << poids sdmantique >>. Il semble, qu'il y a, d'une part, une correspondance remar-

quable entre les diff6rences de poids phonique et de poids sdman- tique; d'autre part, une analogie des rapports sur les deux niveaux, celui de l'expression et celui du contenu, crdant un lien de moti- vation diagrammatique (Peirce, cite par Jakobson, 1965, p. 27) entre signifiant et signifid.

Ceci apparait clairement dans le groupe a qui oppose des adverbes emphatiques a des conjonctions.

Les adverbes emphatiques - qui reprdsentent des phrases emphatiques dlmentaires - nous paraissent nettement plus significatives que les conjonctions correspondantes du meme

groupe. C'est le haut degrd d'expressivitd des adverbes empha- tiques et l'absence totale d'expressivitd dans le cas des conjonctions qui expliquent et justifient cette impression, plut6t que des diff&- rences d'information dans le sens technique de ce terme. Le nombre des adverbes exclamatifs 6tant probablement inf6rieur a celui des conjonctions, l'information d'un adverbe exclamatif devrait etre, toutes conditions 6gales d'ailleurs, inf6rieure a celle d'une conjonction9.

Le groupe j oppose des complements de temps accentuds qui ddterminent effectivement le predicat - en pricisant par exemple l'heure < Egyre vr >> (j 3) - a des complements de temps atones qui l'introduisent, le prdparent, sans rien ajouter a son contenu. Leur fonction principale est de crier une certaine attente, de

diriger l'attention vers un denouement : << Egyre vdr [Il ne fait

qu'attendre]. >> << Addig tanulok [In the mean time I am going to

study]. >> Cette fonction musicale, dynamique prime sur la signi- fication. Leurs contours semantiques sont moins precis que ceux des complements accentuds (cf. egykor << a une heure >, vs. egykor << jadis >>, j 2).

Ceci est egalement vrai d'une grande partie des complements

g. Il serait difficile, m&me illgitime, d'appliquer la meme mesure a deux messages qualitativement diffdrents, au message emphatique (ecto-semantique) et au message intellectuel (endo-semantique), cf. MOLES, Paris (1958, pp. 129-170).

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28 IVAN F6NAGY

de maniere atones du groupe k. < Alig vdrta (He could hardly wait until) > o0i l'adverbe atone qui se maintient sur un niveau bas moyen indique et represente en meme temps P'attente de

l'vinement tant souhaite, apportant la solution d'une tension

prolongde (fig. 6). (Le geste mdlodique nostalgique facilite 'inter- locuteur l'interpretation de l'ellipse.) Ce mecanisme - qui est ici mis en 6vidence par l'analogie entre le contenu concret de la phrase

dB 100

350

250 a ! It f l 1

160

120

Ia ii g Va: r t a

FIG. 5. - Alig vdrta << Il ne l'attendait gubre >>. En haut : courbe de pression sonore En has : changements de frequence de la fondamentale (cf. fig. 6).

et le contenu permanent inhdrent a la structure accentuelle - n'est

pas lid ta tel ou tel contenu. Nous retrouvons le mdme schema dyna- mique dans d'autres ayant un contenu fort diffdrent, voire oppose : ( Gyorsan irok [Je vais vite l'6crire] >> (k 4) < Hamar megj6ttek [Alors ils sont venus] > (k 5). L'impricision des contours seman-

tiques se refl'te aussi dans la diversit6 des traductions. Le complement atone fonctionne avant tout comme tremplin :

Egeszen tWnkrement [But really, he has gone under] >> k 3. L'imprd- cision des contours simantiques se reflite aussi dans la diversitd des traductions.

Ce module dynamique permet en meme temps au complement de manibre atone de jouer un r61le aspectuel. Il prate - confor- mement a la signification originale de l'adverbe - un caractere

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Page 26: Poids sémantique et "Poids phonique"

POIDS SAIMANTIQUE ET < POIDS PHONIQUE >> 29

imminent, pricipite '

l'action (k 4, 5), il accentue la phase prd- paratoire qui finit par declencher le denouement (k I, 6) ohi marque, au contraire, le caractere continu, imparfait de l'action

(<< Il tait juste en train de... >>, k 7). 6. Malgrd la grande diversit6 des rapports semantiques qui

relient et opposent les compldments accentuds aux complements atones, on peut relever un << diffirentiel simantique >> constant :

dB

160

120- .

ali g'v a: rt a FIG. 6. - Alig vdrta < Il 1'attendait avec impatience >>, resp. : << I attendait impa-

tiemment que... >> (cf. fig. 5).

la tendance a effacer le contenu concret, a reduire le poids semantique du complement, afin de diriger l'attention vers le pridicat. Cette tendance finit par ditacher le complement du predicat dans beau-

coup de cas, en le transformant soit en copule (groupes a, b, e, f, g, h), soit en indice pragmatique (groupe 1).

La disaccentuation fonctionnelle, contrastive (Martinet, 1968, 141-161), est un reflet, une expression quasi mimetique d'un pro- cessus semantique. Du point de vue prosodique, elle constitue une anacrouse. L'anacrouse est un temps inaccentud, incomplet qui sert essentiellement 'a prdparer l'auditeur au temps effectif, << vrai >>, complet, a la phrase thetique, marquie par l'accent initial. Cette structure dynamique est relativement rare dans la parole comme dans la musique populaire hongroise a cause de

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30 IVAN FONAGY

l'accent baryton de la langue. Dans la parole emotive (et dans le

chant), elle s'associe a certaines attitudes : l'attente, le ddsir languissant (F6nagy-Magdics, 1967). Dans les phrases a compld- ment atone (colonne B), ce schema mdlodique est, semble-t-il, l'expression d'une attitude intellectuelle analogue, celle de la

preparation. Les frontikres entre attitudes emotives et intellec- tuelles sont d'ailleurs flottantes en beaucoup de cas (fig. 5 et 6). Au lieu de se mettre au premier plan, comme les compl6ments accentuds, les compldments atones s'effacent pour mettre en relief le predicat qu'ils prdcedent. On pourrait caractdriser les compl6- ments accentuds par une fliche qui pointe vers le compldment ou vers la phrase prdcddente, le present ou le passe, les compl&- ments atones par une fliche qui pointe vers le futur, la fin de la

phrase. L'anacrouse, en tant que moddle tensionnel, convient mieux

au frangais dcrit et parld. L'oxytonie attire les mots les plus infor- matifs vers la fin des syntagmes et des phrases. Racine se sert de l'anacrouse syntaxique afin de produire, selon Leo Spitzer, des effets de sourdine. < Parmi les moyens linguistiques >, crit-il

([1931], 1970), << qui conftrent aux personnages de Racine leur maintien et leur majestd, tout en assourdissant leurs propos directs, on rel6ve encore les verbes phrase'ologiques, qui expriment les actions indirectement, leur donnent un support psychologique; l'action est ramende a ses motifs : une volontd, un droit, un pouvoir, une

opinion (p. 236) >. Abstraction faite du contenu stylistique, carac-

tdristique de l'anacrouse racinienne, nous retrouvons dans les syn- tagmes tels que daignd s'ouvrir, ose' se ripandre, saurai m'approcher le

module rythmique, tensionnel qui sous-tend la disaccentuation des determinants hongrois. (Je tiens ' remercier Georges Kassai qui m'a rappelk cette etude exquise de Spitzer que j'avais tort de ne

pas relire au cours des deux dernikres decades.) Pour revenir a un exemple cite au debut (p. 6) : on pourrait

penser que l'accent frappe le complement dans le syntagme nagyon hegyes < tres pointu >> par opposition au syntagme kicsit hegyes < un

peu pointu a, puisque l'adverbe nagyon a plus de < poids seman-

tique a que kicsit, ou, que l'adverbe nagyon est plus susceptible de

provoquer l'emphase et d'attirer l'accent. Or, l'accent principal pourrait frapper l'adverbe kicsit et le frappe en effet, chaque fois

qu'on lui assigne la meme fonction grammaticale que joue l'ad- verbe nagyon, des qu'on attribue a kicsit le sens de << peu pointu >>.

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POIDS SAMANTIQUE ET << POIDS PHONIQUE 031

Cette diff6rence fonctionnelle est moins evidente pour le locuteur

hongrois que pour le lecteur franqais qui saisit immediatement le contraste entre peu aigu et un peu aigu, puisque les expressions fran-

gaises sont plus explicites, et, surtout, puisque l'opposition peu plus Adjectif vs. un peu plus Adjectif a une validit6 gendrale, sans 6gard au sens concret de l'adjectif en question. Peu aigu contient un

jugement depriciatif. On pourrait substituer 'a la phrase Ce son est peu aigu cette autre : Ce son n'est pas assez aigu. Ceci ne vaut

pas pour Ce son est un peu aigu, oih tout au contraire, le locuteur se contenterait volontiers d'un son moins aigu. La structure

sous-jacente doit etre nettement diff6rente dans les deux cas.

I) Dans le premier cas, la phrase Le son est aigu subira une transformation negative : Le son n'est pas aigu. En attenuant la

negation, on obtiendra finalement : Le son n'est pas assez aigu. 2) Dans le cas d'un son un peu aigu, l'6nonce de base : Le son est aigu ne sera pas ni6. Un peu est d6motiv6, il figure comme une

petite phrase d'introduction, lC6grement ironique, qui a surtout une fonction < conative >> (Malinovski, Jakobson). On pourrait lui substituer a la rigueur d'autres phrases conatives (telles que Regarde, Tu vois, Ecoute, Hein, une intonation, un geste). Il ne s'agit donc pas d'un adverbe d'intensit6 (Wagner et Pinchon), d'un

compl6ment proprement dit qui determine le predicat, mais d'un < adverbe d'opinion >, d'un indice pragmatique, ou d'une troisibme categorie, encore moins nettement d6finie, d'une sorte de compldment conatif10.

La formule de r6duction appliqude 'a diff6rents syntagmes engendre diverses structures : elle transformera le complement de lieu, le complement numeral en compldment de temps, le

complement de temps en complement de maniere, le compldment de maniere en compl6ment de liaison ou en indice pragmatique.

7. Ceci revient 'a dire qu'une structure transformee peut subir un second affaiblissement, ce qui ne l'empechera pas de reappa- raitre pour une troisieme fois

. l'entree du transformateur pour

subir une troisieme diminution de son poids simantique. Le pro- cessus est re'cursif.

La disaccentuation fonctionnelle est un procedd traditionnel

qui a produit "a maintes reprises de nouvelles structures, de nou-

Io. Dans le hongrois kicsit accentue ne s'oppose pas r6gulibrement a kicsit atone. La phrase Kicsit hegyes <o Peu aigu > est plut6t exceptionnelle, on lui pr f re g6n6ralement d'autres, telles que Nem eleg hegyes << Pas assez aigu >>.

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32 IVAN F6NAGY

velles classes de mots au cours de l'histoire du hongrois. La trans- formation de certains adverbes en postpositions, des postpositions en suffixes, 'tait, selon toute vraisemblance, lide 5a une disaccen- tuation progressive. La plupart des conjonctions doivent leur

origine a une perte de poids semantique, a une ddmotivation ou

plus exactement : a un transfert lexical suivi d'une ddmotivation. La conjonction hiszen << mais puisque >> est une d6rivie de hiszem << je le crois >>. Les << complements affaiblis >> qui figurent dans la

mime colonne B repr'sentent divers stades historiques. La

conjonction de << mais >> (groupe a, 3) resulte de l'affaiblissement simantique et phonetique de l'adverbe emphatique correspondant avant le xIve; de meme, la conjonction hogy << quea (a, 4), issue de l'adverbe hogy << comment >>, est attestee 'a partir du xIIIe sicle. D'autre part, l'affaiblissement de l'adverbe de temps kdzben (i I), en une sorte d'adverbe de liaison, est un phenombne tout rncent.

A la suite du caract&re recursif de l'affaiblissement, nous trouvons c6te a c6te les produits d'une premiere, deuxi'me et troisieme transformation. Ainsi, par exemple, le mot kdzben, en train de se transformer en conjonction, figure comme adverbe de mode et adverbe de temps et s'oppose au substantif kiizben << dans le passagea qui est i l'origine de l'adverbe de lieu. L'ad- verbe affaibli s'integre d'autre part comme prefixe aux verbes jdr << marche >>, kdzbejdr << intervient >>, szol << parle >>, kdzbeszdl < inter- vient dans le discours de q. a, etc. Nous retrouvons done c6te a c6te les quatre phases d'une ddmotivation recursive :

kiz + be (substantif suffix4)

kizbe (adverbe de lieu) (I)

kdzbe (adverbe de tenmps) k6zbe-/prefixe/ (2), (3)

kjzbe (adverbe de liaison) (4)

Les divergences chronologiques se reflitent, bien entendu, sur le plan synchronique. La distance semantique qui separe les expressions de la colonne A de celles de la colonne B sont

g6neralement proportionnelles aux distances temporelles. Selon des tests prialables, de et hogy accentues et atones presentent une

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POIDS SAMANTIQUE ET 0 POIDS PHONIQUEa 33

homonymie dans la conscience linguistique des sujets hongrois. A l'autre extremite se trouvent certains adverbes du groupe k : ege'szen, gyorsan, elig; ici, les sujets arrivent difficilement a distinguer la signification du complement accentue de celle du complement atone.

Dans la plupart des cas - groupes b, c, d, e, f, g, h, i, j, k, I -, les mots figurant dans les deux colonnes A et B sont sentis comme diff6rents, mais apparentes l'un t l'autre".

La desaccentuation - recente ou ancienne - du determinant vient de crier une serie de paires minimales phrastiques. La diminution du < poids phonique>> refl&te dans tous ces cas une diminution correspondante du poids semantique. Malgrd cette analogie, le changement simantique qui resulte de la disaccentua- tion du determinant est gendralement imprevisible. IL doit tre

specifiC, independamment, pour presque chaque complement. On

peut observer cependant une tendance unificatrice qui pourrait transformer les correspondances lexicales en regle grammaticale. Cette regle commence a prendre des formes plus nettes A l'intdrieur du groupe k (transmutation des complements de maniere en indices

pragmatiques). L'affaiblissement des complements de lieu en

compldment de temps ou en complement de mode est d'autre

part conforme aux principes simantiques, paralinguistiques, de la mitaphore grammaticale qui relkve de la mentalite paleo- logique, en l'occurrence, de l'interpritation des relations morales, sociales, ou chronologiques en termes spatiaux. La grammaire hongroise traditionnelle distingue

. l'aide du terme << complement

de lieu image >> les complements issus d'une transformation meta- phorique de compliments de lieu (reel), ce qui permet la formu- lation d'une rbgle imprecise : la disaccentuation transforme le

i i. Les regles du j eu - qui pourrait a peine etre qualifi6 de test - invitaient les sujets, dans un premier temps, 'a placer les deux expressions soit sur les deux bords oppos6s d'une ligne de demarcation, s'ils ne voient pas << lien de parentb >> entre les deux (en proposant comme module les homonymes ig << ciel >> et eg < il bruile >>), soit du meme c6to, si un tel lien est senti entre les deux termes. Dans un deuxieme temps, il fallait situer les mots homologues sur une echelle

. dix degr6s << une distance analogue a celle qui

s6pare les deux significations >>. Les diff6rences moyennes permettent d'opposer des paires telles que egykor (j 2), ezzel (g i) situds tres bas entre I et 2, a els6 sorban (e 2), egyfell (e i), ennil fogva (f 2) legaldbb (J5), egyszerilen (1 5), fel6le (1 7), pelddul (1 17), nagyban (k 7), qui occupent une place moyenne, entre 4 et 6, et, d'autre part, aux paires situ"es entre 6 et 9, telles kdzben (i i), elig (k 8), gyorsan (k 4), egiszen (k 3) Idtszdlag (I 12).

Il serait, a la fois, plus simple et plus rassurant d'exprimer la < distance semantique >> a partir du nombre des traits distinctifs, des semes identiques. En attendant une sbman- tique hongroise qui permettrait ce rapprochement objectif, il faut se contenter des r6sul- tats de l'analyse automatique, preconsciente, des sujets parlants.

L.A I.INGUISTIQUE, 2 2

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34 IVAN FONAGY

complement de lieu en un complement de lieu image correspon- dant. Reste a etablir les r~gles de correspondances.

Les divergences lexicales, grammaticales entre determinants de la classe A (determinants accentues) et ceux de la classe B (determinants ou pseudo-dcterminants atones) sont souvent mas-

ques par des contrastes d'ordre stylistique. La disaccentuation

prate en certains cas une nuance emphatique a l'expression qui s'oppose au caractere neutre du syntagme correspondant (<< att61 ke'rhette >> k 2, << nekemfizethet >> 1 8). Le deplacement de l'accent principal est, d'autre part, ressenti par beaucoup de membres de la communautd linguistique comme une simple deviation du bon usage, une fagon de parler qui caracterise certains milieux, c'est- A-dire soit comme unefaute, soit comme un indice social (ou carac- teristique), et non comme une expression ayant une signification diff6rente. Ainsi, les syntagmes << egiszen tinkrement >> (k 3), << elig ostoba >> (k 8) ou << gyorsan irok (k 4) sont taxes de germanismes et considrers comme des expressions qui se distinguent unique- ment par leur 6tranget6, par leur imperfection, des syntagmes correspondants oui l'accent frappe le compliment << regulibre- ment >, << conformement a l'usage >>.

Dans ces cas-la, et en beaucoup d'autres, la desaccentuation du complement est en effet plus rdpandue dans certains milieux, ce qui prete une valeur 6vocative (Ch. Bally, Traiti et stylistique

franfaise, Heidelberg, s. d., I, 203-249) a ces expressions. Ceci n'empeche que la desaccentuation prete une signification - I~ge- rement ou nettement - diffdrente a la variante << affaiblie >, au moins dans le langage des groupes sociaux oi0 la disaccentuation est frdquente. Ce qui figure comme trait distinctifdans la conscience linguistique des membres de ce groupe, apparait nmcessairement comme un trait stylistique, une marque sociale a I'exterieur de ce groupe. C'est une des contradictions inherentes aux changements linguistiques.

Comme tout changement phonitique ou prosodique, la desac- centuation des compldments dans le hongrois moderne revale le caractere complexe, multi-dimensionnel des signes, l'interfdrence de l'encodage linguistique (principe thesei) et de I'encodage para- linguistique (principe physei). Les imperfections, inconsiquences, et contradictions de la description refl6tent, en partie, le caractbre dynamique d'un systhme en train de se constituer.

C. N.R. S.

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POIDS SAMANTIQUE ET << POIDS PHONIQUE >> 35

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