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1 Politique familiale et redistribution sociale Henri Sterdyniak Economiste à l’OFCE [email protected] EN3S Saint-Etienne 1 juin 2011

Politique familiale et redistribution sociale Henri Sterdyniak Economiste à lOFCE [email protected] EN3S Saint-Etienne 1 juin 2011

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Politique familiale et redistribution sociale

Henri SterdyniakEconomiste à l’OFCE

[email protected]

EN3S Saint-Etienne1 juin 2011

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Le quart des français a moins de 20 ans.

Pour assurer la parité, la politique familiale devrait transférer environ 13% du revenu des ménages.

Le traitement des familles par le système socialo-fiscal est donc crucial pour la redistribution et pour la justice sociale.

Deux niveaux : une distribution satisfaisante des revenus et la lutte contre la pauvreté.

S’y ajoute la conciliation enfants/emploi

Le sujet est essentiellement politique. Comment la société organise la prise en compte des enfants ?

Politique familiale et redistribution socialePolitique familiale et redistribution sociale

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Le rapport Attali (janvier 2008)

Décision 268 : Conditionner les prestations familiales aux revenus des ménages. Cette mesure rendra la politique familiale plus redistributive et permettra de réduire le coût des politiques familiales de 2 milliards d’euros.

La Révision générale des politiques publiques (avril 2008) La politique familiale fait l’objet d’un effort financier de la nation de plus

de 80 milliards d’euros. Il est donc impératif, avant de créer de nouvelles dépenses pour la branche famille, de prendre en compte les besoins de financement récurrents d’autres branches de la protection sociale (dépendance, retraites, santé,…).

Il faut renforcer la lutte contre la pauvreté dans l’évolution de la politique familiale. L’objectif fixé par le président de la République d’une réduction d’un tiers du taux de pauvreté en cinq ans conduit à privilégier l’objectif de redistribution verticale par rapport à celui de redistribution horizontale. Ceci suppose de questionner systématiquement l’intérêt et l’équité de prestations ou de dispositifs fiscaux.

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Projet de résolution de la CFDT (avril 2010) Le barème de l’impôt doit être appliqué aux revenus des personnes, et non plus

à ceux des ménages. Rien ne peut justifier que l’aide fiscale apportée aux ménages par le biais du quotient familial soit d’autant plus importante que leurs revenus sont élevés. Il doit être remplacé par une allocation forfaitaire par enfant.

Convention du Parti socialiste

Afin de moderniser l’impôt et de le mettre en phase avec des évolutions sociologiques importantes, dues notamment à l’accroissement du travail des femmes dans notre société, nous souhaitons aller vers une individualisation progressive de l’impôt et des prestations sociales, qui est la condition nécessaire de l’instauration du prélèvement à la source.

Un impôt citoyen pour une société plus juste (Pierre-Alain Muet, 2010)

Indéniablement, l’existence d’une imposition commune au sein des ménages exerce un effet négatif sur l’activité des femmes, dès lors qu’elle réduit le gain final lié à l’augmentation du salaire du conjoint dont la rémunération est la moins élevée dans un couple. La réflexion devrait également s’engager sur l’opportunité d’un remplacement du quotient familial par un mécanisme de crédit d’impôt d’un montant total équivalent, assurant un effort en faveur des familles indépendant du revenu.

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Pour une révolution fiscale (Landais, Piketty et Saez, 2011)

Il n’existe aucune raison ni du point de vue de l’équité, ni du point de vue de l’efficacité, pour justifier une politique familiale qui donne en moyenne une fois et demie à deux fois plus par enfant aux 10% des individus les plus riches.

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Un point de vue écologique ?Un point de vue écologique ? Le député des Verts, Yves Cochet, propose une solution à

l’actuelle crise économique et écologique.

Un enfant européen ayant «un coût écologique comparable à 620 trajets Paris-New York», il faudrait faire voter une directive baptisée «grève du troisième ventre» qui inverserait l’échelle des prestations familiales.

En d’autres termes, dissuader financièrement les familles qui envisageraient de concevoir un trop-plein d’enfants.«Aujourd’hui, plus on a d’enfants, plus on touche. Je propose qu’une famille continue de percevoir des aides pour les deux premiers enfants, mais que ces aides diminuent sensiblement à partir du troisième».

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PlanPlan

Les principes de la politique familiale.

Les transferts en faveur des familles.

Le traitement des familles par la fiscalité.

Un bilan de la redistribution.

La pauvreté des enfants.

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Les principes de la politique familialeLes principes de la politique familiale

L’entretien et l’éducation des enfants représentent une charge dont le partage entre les parents et la collectivité dépend de la conception que se fait la société du rôle de la famille et de la place de l’enfant.

Modèle individualiste : les enfants sont une affaire privée des parents, qui n’ouvre droit à aucune prestation ou réduction d’impôts. Elever des enfants est un choix privé comme collectionner des timbres.

Modèle collectif : les enfants sont l’avenir de la société ; leur prise en charge doit être en grande partie collective.

La politique familiale française partage la charge des enfants entre parents et société. Ce partage est sujet à discussion. Deux logiques Deux logiques peuvent être mise en œuvre.peuvent être mise en œuvre.

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La logique de l’équité horizontale familiale

 Les familles avec enfants doivent avoir le même niveau de vie que les personnes sans enfant, de même revenus primaires. La politique familiale doit être indépendante de la politique sociale (de redistribution des riches vers les pauvres).

Selon le modèle paritariste, les prestations sociales et la fiscalité doivent assurer que les couples de même niveau de salaire aient le même niveau de vie quel que soit leur nombre d’enfants, c’est-à-dire le même revenu disponible par UC. La politique familiale couvre alors totalement le coût de l’enfant. Mais l’aide augmente avec le revenu des parents.

Par exemple, tout salarié paie 20 % de cotisations familiales ; chaque enfant donne droit à 40 % de salaire supplémentaire (soit 20 % pour le père et 20 % pour la mère). Un couple sans enfant a 160 ; avec un enfant 200 ; avec 2 enfants, 240.

La logique de l’équité horizontale familialeLa logique de l’équité horizontale familiale

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Selon le modèle familialiste, les parents devraient même être rémunérés pour les soins qu’ils apportent aux enfants. La politique familiale doit encourager la natalité. Les prestations doivent aller au-delà de la compensation du coût de l’enfant.

Dans le modèle égalitariste, la société doit fournir la même aide à chaque enfant, quel que soit le niveau de revenu de ces parents. Mais quel niveau d’aide ?

L’aide est alors relativement plus importante pour les pauvres que pour les riches. Les familles pauvres sont plus riches que les couples ou célibataires pauvres. C’est l’inverse chez les riches.

Le système français est familialiste pour les pauvres et tend au modèle individualiste pour les riches.

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La logique de solidaritéLa logique de solidarité

Chaque enfant doit avoir un niveau de vie minimal.

Aux plus bas niveaux de revenu, les familles avec enfants doivent un plus haut niveau de vie que les personnes sans enfants :

1) Les enfants (et donc obligatoirement leurs familles) ont droit à un niveau de vie minimal supérieur à celui assuré aux personnes sans enfant puisque les enfants ne sont pas responsables de la faiblesse des revenus de leurs parents

2) Leurs parents, même sans emploi, exercent au moins la fonction sociale de parents.

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La logique de solidaritéLa logique de solidarité

Dans un modèle de solidarité pure, l’aide aux familles est concentrée sur les plus pauvres, les enfants des classes moyennes et aisées étant à la charge exclusive de leurs parents.

Ce modèle est-il le plus redistributif ?

Le modèle pur a le défaut d’encourager spécifiquement les plus pauvres à avoir des enfants, de décourager les autres et d’induire une triple trappe à pauvreté pour les mères célibataires : elles sont incitées à avoir des enfants, à ne pas travailler et à ne pas se remettre en couple. Finalement, les enfants vivent dans des familles pauvres. Les inégalités de revenus sont accrues.

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Modèle de solidarité : allocations sous conditions de ressources (Complément Familial, Allocation Logement, Allocation de Rentrée Scolaire, SAI, API) ; prestations à prix réduits (cantines, colonies, activités périscolaires).

Modèle égalitariste : les allocations familiales universelles, la gratuité de l’enseignement et de la couverture médicale.

Modèle paritariste : le quotient familial.

La politique familiale française est donc en principe une politique équitable, différenciée selon les besoins des différentes familles.

Le système français effectue un équilibre entre Le système français effectue un équilibre entre ces modèlesces modèles

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Il faut accepter les contradictions entre les objectifs de la politique familiale.

Par exemple, l’équité horizontale induit des transferts en faveur de familles relativement riches, alors que l’objectif de redistribution demande de concentrer l’argent public sur les plus pauvres.

L’objectif de redistribution amène à aider massivement les familles les plus pauvres, celles à 0 ou 1 actif, ce qui rend moins rentable l’emploi, et tout particulièrement celui des femmes, etc.

Une politique trop centrée sur les plus pauvres (les exclus et les précaires) se priverait du soutien des classes populaires et moyennes.

Le système français effectue un équilibre entre Le système français effectue un équilibre entre ces modèlesces modèles

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Les trois piliers de la protection socialeLes trois piliers de la protection sociale

De façon générale, il existe trois types de prestations :

1. Les prestations de solidarité (d’assistance) : elles sont destinés aux plus pauvres pour leur permettre d’atteindre un niveau de vie minimal et de satisfaire leurs besoins de base.

2. Les prestations universelles : elles profitent à tous. La société considère qu’elle doit couvrir certains besoins (éducation, santé).

3. Les prestations d’assurances. Chacun y a droit pour autant qu’il a cotisé.

Les prestations familiales participent de ces trois types de prestations.

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Une question fondamentaleUne question fondamentale

Quelle est l’unité de base de la politique familiale, sociale ou fiscale ?

Est-ce l’individu (mais quid du mariage et de la famille) ?

Est-ce l’individu adulte (mais quid des enfants, du mariage et de la famille) ?

Est-ce le couple d’adultes (mais quid des enfants) ?

Est-ce la famille (mais quid des mauvais pères, est-ce vrai à tous les niveaux de revenu) ?

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La tentation du ciblageLa tentation du ciblage Les prestations d’assistance sont mieux ciblées (donc moins

coûteuses). La tentation du ciblage :

Elle amène à remettre en cause les AF universelles et le QF.

En 97/98, Jospin avait mis les AF sous condition de ressources. On retrouve cet objectif dans le rapport Attali ou la RGPP.

Cela peut être considéré comme une politique de gauche,.. La politique familiale devient une annexe de la politique sociale.

But : faire des économies ou mieux aider les plus pauvres ?

Risque : les prestations ciblées sont socialement fragiles et font courir le risque d’une société à deux vitesses : ceux qui paient et ceux qui reçoivent. Les prestations pour les pauvres sont de pauvres prestations

Effet de seuil + effet de stigmatisation Compléter plutôt que remplacer.

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Politique familiale et natalitéPolitique familiale et natalité

La politique familiale se justifie avant tout par l’exigence de justice sociale qui fonde la société française tant du point de vue redistributif que du point de vue de solidarité.

Le traitement fiscal et social des familles doit être équitable, indépendamment de toute considération nataliste.

Par ailleurs, la France a besoin d’enfants.

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Politique familiale et natalitéPolitique familiale et natalité L’Europe se caractérise par de très bas taux de fécondité : en 2007, 1,25

enfant par femme en Slovaquie ; 1,3 en Hongrie, Pologne, Roumanie ; 1,35 en Portugal, Italie, Allemagne ; 1,4 en Espagne, Autriche, Grèce ; 1,45 en Tchéquie ; 1,6 en Belgique, 1,7 aux Pays-Bas ; 1,85 au Royaume-Uni, Suède, Finlande et Danemark ; 2 en Irlande.

Le maintien de ces bas niveaux, outre qu’il aggraverait le problème du financement des retraites, outre qu’il nuirait au dynamisme économique, signifierait une lente disparition de la civilisation et de la culture européenne.

La France se situe à 2,0 enfants par femme, soit au-dessus de la moyenne européenne ; il faut protéger cet avantage comparatif.

Le natalisme ne doit pas influencer la politique familiale, mais il faut éviter toute réforme qui marquerait que la société n’a pas la préoccupation de la famille.

Les préoccupations familiales devraient être pris en compte dans les politiques européennes. Ce n’est guère le cas jusqu’à présent. La fécondité ne figue pas parmi les indicateurs structurels de l’UE (contrairement à la population des oiseaux des champs).

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Les enfants ont besoin d’une famille. La structure idéale pour la vie d’un enfant est une famille stable constituée par ses parents et plusieurs enfants.

L’élevage des enfants représente une lourde charge pour les parents, en terme financier certes, mais aussi en terme de temps et de perte de liberté. La parenté est un esclavage volontaire. Pour les jeunes adultes, la constitution d’une famille est concurrencée par les soucis de carrière, les exigences de la vie intellectuelle, les charmes des loisirs, les plaisirs du libertinage.

Une société ne peut être fondée sur la coexistence de célibataires ; de couples bi-actifs sans enfants (les dinks « double income, no kids ») et de femmes seules avec enfants.

La société doit à la fois respecter la liberté individuelle, garantir la natalité et promouvoir le modèle de famille bi-nucléaire stable.

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Faut-il d’une façon ou d’une autre favoriser les familles stables, les couples mariés ? Peut-on pénaliser fiscalement un couple qui a divorcé ou une famille où les parents ne sont pas mariés ? La réponse est non. La politique familiale doit rester neutre.

Si initialement, la reconnaissance du couple et de la famille était basée sur les nécessités de l’éducation des enfants, il est conforme au respect de la liberté individuelle de reconnaître aussi les couples, basés sur l’affection et le soutien mutuel, qui n’ont pas cet objectif. C’est ce que permet le PACS, dont les engagements et les avantages doivent cependant être précisément calibrés.

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La société a mis en place le mariage, dans lequel les époux se promettent assistance mutuelle, ce qui, dans certains cas, décharge la société de dépenses de solidarité (RSA, minimum vieillesse).

La gestion publique du divorce garantit cette promesse : si la situation des anciens époux est trop disparate, la justice condamne le plus fortuné à remplir son engagement. De même, elle garantit le traitement le plus satisfaisant possible des enfants.

Certains couples ne souhaitent pas s’inscrire dans ce contrat : la société leur propose le Pacs ; enfin, un statut de concubinage notoire est offert aux plus réfractaires.

Il y a une contradiction entre la liberté que peuvent réclamer certains couples d’organiser leurs relations à leur guise et la nécessité sociale de prévoir des contrats-types, sources de droits

sociaux. 

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Une cote mal taillée a été mise en place.

Pour l’imposition des revenus et les droits de succession, la société reconnaît la communauté formée par le mariage ou par le PACS.

Les pensions de réversion ne sont ouvertes qu’aux personnes mariées.

Pour les avantages sociaux ainsi que pour l’imposition du patrimoine, la société met en solidarité obligée les mariés, les pacsés et les concubins.

Il faudrait sans doute transformer le PACS en Contrat d’Union Civique, ouverts aux couples non-sexuels, avec promesse d’assistance et rupture judiciaire.

Il reste toujours des réfractaires : faut-il imposer la déclaration de concubinage ?

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Politique familiale et travail des femmesPolitique familiale et travail des femmes

Le système français reconnaît la solidarité au sein des couples.

Il traite équitablement les couples où l’un des conjoints travaille et où l’autre ne travaille pas, en considérant qu’ils partagent le revenu du conjoint actif (quotient conjugal) ; en offrant au conjoint inactif une assurance-maladie et une pension de réversion.

Cette organisation ne crée-t-elle pas des situations de dépendance, qui peuvent se révéler dramatique pour le conjoint dépendant en cas de rupture du lien qui l’unit à son partenaire ? Ne faudrait-il pas empêcher que de telles situations se créent en les décourageant fiscalement et socialement ?

Là aussi, notre réponse ne peut être que négative. La société doit respecter les choix individuels.

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Les familles mono-actives ont déjà le plus bas niveau de vie (tableau 1). Peut-on sanctionner le non-travail des femmes pour les inciter à travailler ?

Pierre et Martine décident d’avoir quatre enfants ; Martine s’arrêtera de travailler pour les élever. Nous pouvons trouver ce choix stupide et dangereux pour Martine ; mais, avons-nous le droit d’imposer notre point de vue ? La société peut-elle pour décourager ce choix augmenter les impôts portant sur ce couple, en refusant de tenir compte de l’existence de Martine pour taxer Pierre, en refusant d’ouvrir à Martine des droits à l’assurance-maladie ?

Une personne peut ne pas travailler pour de nombreuses raisons : choix personnel de la vie de conjoint entretenu, éducation d’enfants très jeunes ou nombreux, chômage, maladie ou handicap. Il est impossible pour la société de discriminer entre ces motifs. Peut-elle aider les uns et pénaliser les autres ?

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Niveaux de vie relatifs en 2008Niveaux de vie relatifs en 2008

Source  : INSEE (2010)

Hommes seuls actifs 2,4 mil. 93,9

Femmes seules actives 1,8 mil. 95,1

Femmes actives avec enfants 3,4 mil. 71,7

Femmes inactives avec enfants 0,9 mil. 54,5

Couples mono-actifs sans enfants 1,1 mil. 125,8

Couples mono-actifs avec 1 enfant 1,1 mil 102,8

Couples mono-actifs avec 2 enfants 1,2 mil. 85,2

Couples mono-actifs avec 3+ enfants 2,4 mil. 73,0

Couples bi-actifs sans enfants 5,0 mil. 129,0

Couples bi-actifs avec 1 enfant 6,4 mil. 112,7

Couples bi-actifs avec 2 enfants 9,8 mil. 106,2

Couples bi-actifs avec 3 + enfants 4,7 mil. 100,5

Individus de moins de 65 ans 49,2 mil 100

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Le modèle de la famille à deux actifs à plein-temps, (1+1), avec un nombre restreint d’enfants, devient de plus en plus le modèle dominant en France (tableau 2). Il permet de respecter le désir d’autonomie et de carrière professionnelle des deux parents. Il permet d’échapper à la pauvreté et à la précarité.

Ce modèle pourrait être infléchi : dans un pays qui a généralisé les 35 heures, est-il scandaleux de penser que prendre soin des bébés c’est avant tout la tâche des parents et qu’on devrait la faciliter, par exemple, en offrant aux deux parents, la possibilité de travailler à temps partiel, 30 heures par exemple, les deux premières années ? Le modèle (0,8+0,8) est préférable au modèle (1 + 0,5). Et le modèle (1 +0,8) ?

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A côté de ce modèle dominant, il demeure des cas où la mère réduit ou arrête son activité professionnelle pendant la période où la famille comporte un ou plusieurs enfants en bas âge. Elle peut ensuite avoir de grande difficulté à retrouver un emploi.

Faut-il faire une réforme fiscale et sociale, qui rendrait beaucoup plus coûteux ce choix, ce qui certes pourrait réduire le nombre de femmes qui le font, mais qui dégraderait fortement la situation des familles mono-actives, qui ont déjà un niveau de vie relativement bas ?

Tout emploi marchand est-il socialement plus utile que l’éducation des enfants ?

Est-ce scandaleux de permettre le congé parental, en prenant des mesures pour garantir le retour à l’emploi ?

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Taux d’activité en 2006 (30-45 ans en couple)Taux d’activité en 2006 (30-45 ans en couple)

  Hommes Femmes

Sans enfant 96,2 90,0

1 enfant de plus de 3 ans 95,4 88,4

1 enfant de moins de 3 ans 97,3 82,6

2 enfants de plus de 3 ans 98,2 86,4

2 enfants dont au moins 1 de moins de 3 ans 97,1 62,6

3 enfants ou plus de plus de 3 ans 97,1 68,7

3 enfants ou plus dont 1 au moins de moins de 3 ans

96,9 37,5

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Europe et politique familialeEurope et politique familiale Jusqu’à présent, l’Europe n’a guère eu de politique familiale. La

question est laissée aux Etats. Certains sont réticents à l’idée de politique familiale (Allemagne, Autriche) ; les pays du Sud compte sur la solidarité familiale ; les pays scandinaves sont individualistes ; les pays anglo-saxons sont libéraux.

Au début du 21ème siècle, la situation évolue : certains pays s’inquiètent de leur faible fécondité, d’autres de la pauvreté des enfants.

En matière de protection sociale, la Commission a trois objectifs essentiels : lutter contre l’exclusion et la pauvreté, veiller à la soutenabilité des retraites, assurer des soins de santé de haute qualité accessibles à tous. La politique familiale n’est pas prise en compte.

Il y a 3 MOC : pauvreté, retraites, santé et dépendance. Mais pas de MOC famille. Toutefois, la MOC pauvreté traite la pauvreté des enfants.

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Europe et politique familialeEurope et politique familiale Toutefois, le rapport du Groupe de haut niveau (mai 2004) propose

d’augmenter la fécondité en améliorant les possibilités de conciliation emploi/enfants en Italie, Espagne, Allemagne, Autriche.

La Commission a adopté en mars 2005, un livre vert « Face au changement démographiques, une nouvelle solidarité entre les générations » qui pose la question de la natalité en Europe et insiste sur les contraintes économiques, qui empêchent les couples d’avoir le nombre d’enfants désirés. Mais aucune décision concrète n’a été prise.

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3232

Moderniser les systèmes de protection socialeModerniser les systèmes de protection sociale

Les orientations de la Commission en matière de protection sociale peuvent remettre en cause la politique familiale à la française :

1. Inciter à l’emploi en rendant celui-ci plus rentable.

2. Favoriser l’égalité entre les hommes et les femmes. 

3. Tenir compte de l’évolution des structures familiales.

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3333

La protection sociale et la redistribution risquent La protection sociale et la redistribution risquent d’être subordonnées à des exigences d’emploid’être subordonnées à des exigences d’emploi

Certes, le travail est le meilleur moyen pour échapper à la pauvreté ; les familles ont un niveau de vie plus élevé et courent moins le risque de pauvreté quand elles ont deux salaires qu’un seul.

Mais, la France reste en situation de chômage de masse. Faut-il sanctionner ceux qui ne trouvent pas d’emploi ?

Le souci d’élargir l’écart de revenus entre ceux qui ont un emploi et les autres (rendre la travail rentable) risquent de creuser les inégalités et de s’effectuer en baissant relativement les revenus d’assistance plutôt qu’en augmentant le revenu des familles de travailleurs pauvres.

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1. Pour garantir l’autonomie des femmes

2. Pour les inciter à l’emploi

3. Pour ne pas interférer avec les choix privés des individus

Mais

1. Pèse sur les familles à un actif et les femmes inactives (réversion)

2. Nuit à la redistribution (comment traiter les familles ? les couples à un actif ?)

3. Rend difficilement cohérent le traitement des enfants.

4. Refuse de prendre en compte la solidarité familiale.

5. L’individualisation des droits sociaux peut signifier universalisation ou obligation de contribuer (exemple : santé).

Individualisation Individualisation versusversus familialisation familialisation

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Quatre modèles sociaux en EuropeQuatre modèles sociaux en Europe Après Esping-Andersen, on distingue :

1. Le modèle libéral : les prestations publiques sont faibles et réservées aux plus pauvres. Les autres doivent recourir à l’assistance privée. Le taux d’emploi est élevé.

2. Le modèle scandinave (ou citoyen) : les prestations publiques sont importantes, universelles et individualisées.

3. Le modèle d’assurances sociales (ou corporatiste ou conservateur). Les prestations publiques sont importantes, liées à l’activité et familialisées. Le taux d’emploi est moyen.

4. Le modèle méditerranéen. Les prestations retraites sont importantes. Les prestations publiques, famille et assistance, sont faibles. La solidarité reste familiale. Le taux d’emploi est bas, en particulier des femmes.

La distinction est grossière. Les systèmes évoluent.

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3636

Esping-Andersen propose un nouvel Etat providence pour tenir compte des évolutions sociales et des exigences de la Nouvelle économie. La protection sociale doit être centré sur les enfants, les femmes, l’emploi, l’éducation et non pas sur les malades, les retraités,...

Des investissement sociaux centrés sur les enfants et favorisant l’emploi des femmes. Des systèmes de crèches et d’écoles maternelles, gratuites et universels, doivent permettre de réduire les différences d’héritage culturel et permettre aux femmes de concilier famille et carrière.

L’investissement en éducation et en formation est indispensable en raison des exigences de la Nouvelle économie, de la mondialisation, On ne peut plus se permettre de laisser sortir des jeunes non-formés de l’école. Ceci doit permettre à terme une baisse des dépenses de chômage et de pré-retraites.

Passer de dépenses passives à des dépenses actives. Il faut mieux former ou subventionner l’emploi qu’indemniser l’inactivité (chômeurs, femmes avec enfants, seniors, handicapés).

Il faut moins de transferts et plus de services sociaux. Plus de crèches, d’éducation et d’activités peri-scolaires pour les enfants plutôt que des prestations monétaires.

C’est un programme ambigu qui peut s’inscrire dans la lignée libérale.

Vers un nouvel Etat-Providence ?Vers un nouvel Etat-Providence ?

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3737

Redistribution et incitationRedistribution et incitation

Le système fiscalo-social doit arbitrer entre redistribution et incitation. C’est un choix politique et économique. A tort ou à raison, les préoccupations incitatives prennent de plus en plus d’importance.

Le Taux marginal de gain : TMG= (PW+W(1-t)-PI)/W(1+c)

Le taux marginal de prélèvement : TMP =1-TMG

1. Un chômeur qui recevait 30 de prestation chômage retrouve un emploi payé 100, avec 20 de CSS et 40 de CSE. Son TMG=50/140=36% ; son TMP= 64%

2. Un femme en congé maternité a son salaire maintenu. Quand elle reprend son travail, son TMG =0% Son TMP=100%.

Le modèle d’assurance sociale vise à réduire les TMG (pour réduire les pertes de revenus en cas de chômage, maladie, retraite) ; le modèle libéral à les augmenter (pour augmenter l’incitation à l’emploi).

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3838

1. CNAF : Etat+ LFSS+ gestion des partenaires sociaux (CFTC)

2. Ministère des solidarités et de la cohésion sociale

3. Délégation Interministérielle à la Famille.

4. La DSS dépend de 3 ministères : Travail et Santé, Solidarités et cohésion sociale, et Budget /Comptes Publics.

5. Ministère Budget/Comptes Publics : fiscalité

6. UNAF

7. depuis 2009, Haut Conseil de la Famille présidé par le Premier Ministre.

Qui gère la politique familiale ?Qui gère la politique familiale ?

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3939

En 2010.1. Cotisations employeurs, 5,4 points : 33,4 milliards2. CSG, 1,1 point : 12,1 milliards.3. Autres ITAF (compensation des exo. de CSE) : 4,4 milliards

La CNAF avait un solde de  0,2 milliard en 2007 ; - 0,3 milliard en 2008, -1,9 milliards en 2009, - 2,6 milliards en 2010, -3,2 milliards en 2011.

1% de PIB en moins coûte 0,45 milliards à la CNAF. En 2010, il manque 8 points de PIB

La CNAF va devoir financer la totalité des suppléments familiaux de retraite : en 2008, elle payait déjà 2,4 milliards de la majoration de 10% ; en 2009, 2,9 milliards ; en 2010, 3,6 milliards ; en 2011 4,4 milliards. Elle paye l’AVPF (4,2 milliards).

Qui finance la CNAF ?Qui finance la CNAF ?

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4040

Le financement par les cotisations sociales employeurs est une survivance qui n’a plus de justification sociale ou économique. Un mission a été confié en 2009 au député Yves Bur. Elle n’a pas aboutie.

La logique sociale voudrait un financement par la CSG ou l’IR. Mais, la transition est délicate.

Faut-il un transfert vers les entreprises, en remplaçant les CSE par la CSG ? Non, sans doute..

Faut-il remplacer les CSE par des CSS, puis les CSS par les CSG, ce qui ferait payer moins les actifs et plus les retraités et les revenus du capital ?

Certains ont proposé la TVA sociale (mais ce serait inflationniste) ou la Contribution à la Valeur Ajoutée (asseoir les CSE sur la valeur ajoutée, mais cela ferait payer les profits).

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4141

Comparer des ménages de tailles différentesComparer des ménages de tailles différentes

Pour comparer des ménages de taille différente, il faut définir une échelle d’équivalence, c’est-à-dire d’attribuer à chaque type de famille un certain nombre d’Unités de consommation. (Voir Hourriez et Olier, Economie et Statistique, n°308, 1997 ou Informations sociales, n°137).

Cette méthode n’a aucun fondement théorique. Il n’y a pas comparabilité entre une personne et une famille. Une personne qui se marie et a des enfants change de fonction d’utilité.

Empiriquement il existe trois méthodes : les budgets-types, la comparaison de la part de certains dépenses dans le budget (alimentation, habillement,..), les méthodes subjectives.

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4242

Comparer des ménages de tailles différentesComparer des ménages de tailles différentes

L’échelle devrait dépendre de l’âge.

Elle devrait dépendre des dépenses collectives faites en faveur des enfants. En particulier pour la garde des enfants, l’éducation,...

Ces échelles sont constantes avec le revenu, ce qui suppose que le coût des enfants augmente comme le revenu de la famille. Cette hypothèse est sans doute fausse aux deux extrémités de l’échelle des revenus.

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4343

UC et frais de gardeUC et frais de garde On suppose qu’une femme seule a un revenu de 100. Si elle a un enfant, pour conserver le même niveau de vie, elle doit

dépenser 100 pour elle, 25 pour l’enfant. Supposons que les PS couvrent 25.

Si la garde des enfants est gratuite, elle a besoin de 125 (femme 1). Le nombre d’UC est donc de 1,25.

Si la garde de l’enfant lui coûte 50, elle a besoin de 175. Le nombre de UC est donc de 1,75.

L’Etat peut verser pour les frais de garde 0 (femme 2) ou 25 (femme 3).

le nombre d’UC dépend de l’organisation sociale. Si le statisticien estime que le nombre d’UC est de 1,5, il va estimer

que les femmes 1 et 2 ont des revenus par UC de 83,3 (au lieu de 100 et 60) ; la femme 3 a un revenu de 100 (au lieu de 80). Ce qui est absurde.

Il faut soit compter un revenu hors frais de garde et fixer le nombre de UC à 1,25, soit intégrer les consommations collectives et fixer le nombre d’UC à 1,75.

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4444

Comparer des ménages de tailles différentesComparer des ménages de tailles différentes

L’échelle d’Oxford compte 1 pour le premier adulte, 0,7 pour le deuxième et par enfant de plus de 14 ans, 0,5 par enfant de moins de 14 ans.

L’ancienne échelle de l’OCDE comptait 1 pour le premier adulte, 0,5 pour la deuxième personne et les enfants de plus de 14 ans, 0,3 pour les enfants de moins de 14 ans.

La nouvelle échelle de l’OCDE (ou de l’INSEE) compte 0,5 pour le deuxième adulte et les enfants de plus de 14 ans, 0,3 pour ceux de moins de 14 ans.

Le seuil de 14 ans est arbitraire

L’échelle du RMI est proche de l’ancienne échelle d’Oxford..

Le quotient familial pénalise les vrais célibataires et favorise les familles nombreuses.

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4545

Unités de consommation et parts fiscales*/**Unités de consommation et parts fiscales*/**  

 Echelle

d’Oxford

Anc. OCDE /OCDE -INSEE

Quotient familial

RMI

 Célibataire sans enfant

1,2 1,33 1 1,33

  ... avec 1 enfant 1,85 2/1,80 2 2

  ... avec 2 enfants 2,5 2,45/2,25 2,5 2,4

  Couple sans enfant 2 2 2 2

  .... avec 1 enfant 2,65 2,45 2,5 2,4

  .... avec 2 enfants 3,3 2,9 3 2,8

  .... avec 3 enfants 3,95 3,35 4 3,33

  .... Avec 5 enfants 5,25 4,25 6 4,40 

**ramenés à 2 pour le couple sans enfant ; ** en supposant que 25 % des enfants ont plus de 14 ans.

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4646

Deux définitions

Le système fiscal respecte le principe d’équité horizontale familiale si deux familles de composition différente, mais de même revenu par UC, supportent le même taux d’imposition. C’est l’objectif du QF.

Le système d’imposition et de transfert respecte le principe de parité familiale si le revenu disponible par UC d’un couple est le même, à revenu primaire donné, quel que soit son nombre d’enfants à sa charge. C’est le cas pour le RMI.

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4747

Les Prestations en faveur des famillesLes Prestations en faveur des familles

Les transferts de protection sociale en faveur des familles représentaient, en 2008, 52,8 milliards d’euros, soit 2,7 % du PIB, soit 3 350 euros par enfant de moins de 20 ans. Soit 280 euros par mois. Une nourrice reçoit de la DDASS 1 300 euros par enfant

Soit 23,7 milliards de prestations sans conditions de ressources et 28,1 milliards de prestations sous conditions de ressources

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4848

Les Prestations en faveur des famillesLes Prestations en faveur des familles

Ce chiffre résulte de nombreuses conventions : il inclut uniquement les transferts destinées aux familles avec enfants induits par la présence d’enfants.

Il donc pas les dépenses liées à la maternité autres que la PAJE ; il n’inclut que les suppléments de RMI, d’API et d’allocations logement induit par la présence d’enfants.

Le quotient familial, tant qu’il correspond aux UC, ne fait qu’appliquer le principe de l’équité fiscal familiale  ; ne sont donc incluses que la demi-part supplémentaire à partir du troisième enfant, ainsi que les réductions d’impôt pour frais de scolarisation et de garde.

Il n’inclut pas les dépenses de l’école maternelle (car pourquoi ne pas inclure alors toutes les dépenses d’enseignement ?).

Il n’inclut pas les avantages vieillesse (AVPF, supplément de pension liés au fait d’avoir élevé des enfants), qui ne bénéficient pas à des familles avec enfants.

Une convention plus large pourrait aller jusqu’à 110 milliards, soit 5,7 % du PIB.

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4949

La politique familiale en 2008, en milliards d’eurosLa politique familiale en 2008, en milliards d’euros

Source : Calcul de l’auteur à partir des Comptes de la Protection sociale en 2008 et du PQE Famille (2010).

Valeurs retenues Chiffrage élargiPAJE/ Maternité 0,7 6,8CLCA 2,3Allocations sans conditions de ressources 21,1dont : - Allocations familiales 12,3

- PAJE : garde 4,5- SFT 2,5

Allocations sous conditions de ressourcesdont : -API

9,90,3

10,61,0

Assistance et action sociale 9,6Allocation logement lié à la présence d’enfant/AL Total

5,4 15,5

RMI lié à la présence d’enfants / RMI total 0,9 8,5Dépenses fiscales. Taxe d’habitation 0,7PPE 0,3Quotient familial 0,7 10,0Réduction d’impôt :- pour frais de scolarité 0,4- pour frais de garde 0,8Contribuables ayant eu des enfants à charge 1,7Enseignement pré-élémentaire 12,0Avantages familiaux retraites 9,7 Total pris en compte/Total étendu 52,8 110

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5050

Les jeunes de moins de 20 ans représentent 25 % de la population. En utilisant l’échelle de l’OCDE, c’est 12,5% du revenu des ménages qui devrait être fourni par des prestations familiales pour assurer aux familles avec enfants le même niveau de vie qu’aux personnes sans enfants. Or l’ensemble des prestations sous critères familiaux ne représente que 4,2 % du revenu des ménages. La parité familiale n’est pas assurée.

De 1984 à 2010, le pouvoir d’achat des allocations familiales a diminué de 3,8 %.

La BMAF valait 33,6% du revenu médian en 1984 ; 28,3% en 2000 ; 25,3% en 2009. Soit, une baisse de 24,4% en valeur relative.

Sur le long terme, la dégradation est encore plus nette. Pour avoir le niveau relatif de 1954, les prestations pour 2 enfants devraient être de 495 euros par mois (elles sont de 126) ; pour 3 enfants de 834 (elles sont de 451 avec le CF, de 287 sans).

Cette dégradation marque un recul du caractère redistributif et familial du système français. Les gouvernements préfèrent introduire de nouvelles mesures plutôt que de garantir le pouvoir d’achat des anciennes.

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5151

Pouvoir d’achat des PrestationsPouvoir d’achat des Prestations

Base100 1998 BMAF et API

1984 102,8

1990 101,51998 1001999 100,22000 100,82001 99,22002 99,32003 99,02004 98,52005 98,92006 98,92007 99,32008 97,5

2009 100,3

2010 98,9

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5252

Prestations relativement au revenu médianPrestations relativement au revenu médian En % BMAF API

1984 33,6 51,7

1990 31,1 47,8

2000 28,3 43,5

2001 27,5 42,3

2002 26,9 41,4

2003 26,8 41,2

2004 26,8 41,2

2005 26,4 40,6

2006 25,9 39,8

2007 25,4 39,0

2008 24,8 38,1

2009 25,3 38,8

2010 24,7 37,9

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5353

De 1990 à 2007, la diminution relative des vieilles allocations (allocations familiales, complément familial) a financé la hausse de l’ARS, du CLCA, de l’AGED/AFEAMA. La politique familiale a été dépouillée au profit de la politique de l’emploi, que ce soit pour inciter les femmes à rester au foyer, ou au contraire pour les inciter à travailler.

La part des prestations familiales dans le PIB est La part des prestations familiales dans le PIB est restée stablerestée stable

1990 1995 2000 2008

Santé 9,1 9,7 9,7 10,3

Vieillesse 11,3 12,6 12,4 13,4

Famille-Maternité 2,9 3,1 2,9 2,6

Emploi 2,3 2,3 2,0 1,7

Logement-Pauvreté 1,0 1,3 1,3 1,2

Total 26,5 29,0 28,3 29,3

Part des prestations sociales dans le PIB

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54

Les comparaisons internationales d’effort en faveur des familles sont délicates.

Le champ couvert n’est pas toujours le même : faut-il intégrer les dépenses fiscales, les prestations logement et exclusion, les dépenses de garde, y compris l’école maternelle, les avantages aux retraités ayant élevé des enfants ?

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5555

Dépenses de protection sociale pour les familles 2008Dépenses de protection sociale pour les familles 2008selon Eurostatselon Eurostat

UE15 2,2Danemark 3,8

Suède 3,0

Finlande 3,0

Allemagne 2,8

Autriche 2,8

France 2,5

Belgique 2,1

Pays-Bas 1,8Grèce 1,6

Royaume-Uni 1,7

Espagne 1,5

Italie 1,3

Portugal 1,3

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5656

Dépenses de protection sociale pour les familles 2007Dépenses de protection sociale pour les familles 2007selon OCDEselon OCDE

France 3,7Danemark 3,7

Royaume-Uni 3,6

Belgique 3,15

Suède 3,1

Autriche 3,05

Pays-Bas 2,85

Allemagne 2,8

Finlande 2,7Espagne 1,6Italie 1,4

Japon 1,3

Portugal, Grèce 1,3

Etats-Unis 1,2

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5757

Spécificité du système français de prestationsSpécificité du système français de prestations les allocations familiales sont universelles (12,5 milliards d’euros

en 2009). Mais elles varient selon le rang de l’enfant : 0, 124 ou 159 euros par mois ce qui a une logique en terme de parité de niveau de vie. S’y ajoutent 35 euros pour enfants de plus de 11 ans, 62 euros pour enfants de plus de 16 ans. Elles sont versées jusqu’à 20 ans. Elles ne sont pas imposables. Elles ne sont indexées que sur les prix.

S’y ajoutent un SFT pour le secteur public, de 72 à 109 euros par mois pour 2 enfants (2,4 milliards d’euros).

Le complément familial (161 euros par mois) est versé aux familles de 3 enfants et plus, sous conditions de ressources (1,6 milliard). Le CF et le plafond ne sont indexés sur que les prix. C’est une survivance nécessaire.

L’ARS (par an, 281 euros par enfant de 6 à 11 ans, 296 euros de 11 à 14, 307 euros de 15 à 18 ans) est versé sous condition de ressources (1,5 milliard).

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5858

La PAJE de base (890 euros à la naissance plus 178 euros par mois) est versée sous condition de ressources (4,9 milliards).

Les aides à la garde d’enfant (5,0 milliards pour la GD et l’AM) sont importantes. Pour l’AM, l’allocation est dégressive selon le revenu de la famille de 114 à 75 euros ; s’y ajoute l’exonération des CS. Pour la GD, exonération de 50% des CS, plafonnée à 570 euros.

S’y ajoute une aide fiscale (1150 euros par an pour l’AM, 7500 euros pour la GD pour 2 enfants).

47,5 % des enfants sont gardés (25 % AM, 14,5 % crèches, 6% maternelles, 1,5% GD). Objectif européen : 33%.

La Complément libre choix d’activité (374 euros par mois, soit 552 euros y.c. PAJE, pour un arrêt total) n’est pas théoriquement sous condition de ressource, mais ne peut intéresser en fait que des personnes à faible salaire. C’est un peu moins vrai pour un travail à temps partiel (136/308 euros, de 50 à 80%, ou 235/408 euros, moins de 50%) (2,2 milliards d’euros). Il peut durer 6 mois (1er enfant) ou 3 ans (à partir du 2ème ).

Le complément optionnel de libre choix d’activité (COLCA) est mieux rémunéré ( 612 + 178 / 790 euros), mais pour 1 an.

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5959

Taux d’effort/ Reste à charge/Aide en 2010Taux d’effort/ Reste à charge/Aide en 2010

Coût totalAM

900 euros

GD

2330 euros

Crèche

1247 euros

2 SMIC7,5 %

172/728

36,7 %

839/1491

4,8%

111 /1136

4 SMIC6,7%

284/616

25,8 %

951/1379

7,5 %

321/926

6 SMIC4,4%

283/617

15,4 %

951/1379

5,4%

349/898

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6060

L’Allocation de Soutien Familial (87 euros par mois) aide les mères célibataires dont le père se soustrait à l’obligation alimentaire ou ne peut l’assurer (1,2 milliards d’euros).

L’Allocation de Parent Isolé devenu RSA majoré garantit aux mères avec un enfant de moins de 3 ans un revenu un peu supérieur au RSA : 593 euros au lieu de 461 pour 0 enfant ; 785 euros au lieu de 690 pour 1 enfant ; 985 au lieu de 828 pour deux. (coût 1 milliards).

L’Allocation Logement aide fortement les familles à faibles revenus : 365 euros par mois pour une famille, 1 actif au SMIC, 2 enfants au lieu de 182 euros, sans enfants.

Le RSA augmente avec le nombre d’enfants. Pour un couple, 690 euros sans enfant, 828 avec un enfant,966 avec deux enfants puis 184 euros de plus par enfant.

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6161

Six problèmesSix problèmes

Le système encourage à la fois les mères à travailler et à se retirer du marché du travail. Est-ce un défaut ou une qualité?

Le système des prestations familiales n’a guère de cohérence. La prestation universelle est faible ; les nouvelles allocations sont sous conditions de ressources ; les compléments semblent répartis au hasard. Il n’y a pas de cohérence entre RSA et allocations familiales.

Les prestations ne sont pas indexées sur les salaires, mais sur les prix.

Pourra-t-on maintenir le système avec le développement de la garde alternée et des familles recomposées ?

Trois allocations ont vocation à être mensuelles et à cibler les familles pauvres : le RMI-API-RSA, les allocations logement et la PPE.

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6262

Six problèmesSix problèmes

Faut-il maintenir les bonifications de retraites pour les personnes ayant élevé 3 enfants au plus ? Oui, sans doute car ce sont les familles nombreuses qui permettent un bon niveau de fécondité, qui permet que le système reste solvable ; oui car l’élevage des enfants empêche aux parents des familles nombreuses de faire un effort d’épargne. Mais, les bonifications devraient profiter plus aux femmes qu’aux hommes. Un système forfaitaire serait plus satisfaisant.

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6363

Les prestations doivent-elles être uniformes ?Les prestations doivent-elles être uniformes ? Soit un pays où tous les adultes vivent en couple et travaillent. Le salaire brut,

uniforme, vaut 0,5. 30 % de couples sans enfant (UC = 1), 10 % de familles avec 1 enfant (UC = 1,25), 30 % de familles de 2 enfants, 20 % de familles de 3 enfants (UC = 1,75) et 10 % de famille de 4 enfants (UC = 2).

Le système idéal, qui assure l’équité familiale, le même niveau de vie pour les familles et les couples, comporte un taux de cotisation de 29,8 % et une prestation uniforme par enfant de 0,175. Tous les foyers ont le même revenu par UC : 0,702.

Imaginons que la société refuse un taux de cotisation si élevé et limite ce taux à 10 %. La prestation uniforme par enfant ne peut plus être que de 0,059. Il n’est plus possible d’égaliser les niveaux de vie des couples et des familles. Le niveau de vie des foyers est d’autant plus faible qu’il compte beaucoup d’enfants. L’égalité de prestations se traduit par des différences d’égalité de niveau de vie.

L’ objectif peut être alors de réduire les disparités de niveaux de vie entre les famille. Dans ce cas, il faut des prestations différenciées, 0,03 par enfant pour les familles avec 2 enfants, 0,073 par enfant pour les familles avec 3 enfants, 0,095 par enfant pour les familles avec 4 enfants. Les familles avec 1 enfant ne touchent pas de prestations, leur niveau de vie est supérieur à celui des familles avec enfants.

La différenciation des prestations familiales selon le nombre d’enfants à charge est justifié pour porter l’effort sur les familles nombreuses, qui, sinon auraient un niveau de vie relativement très bas

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6464

UC Part Sans Prestation

Equité familiale

Cotisations limitées

Prestations uniformes

Cotisations limitées

Prestations différentiées

Taux de cotisation 0,298 0,100 0,100

Prestation par enfant

0 0,175 0,059 0/0,03/0,073/0,095

Revenu par UC

Couple 1 30 % 1 0,702 0,900 0,900

Famille 1 enf. 1,25 10 % 0,8 0,702 0,767 0,720

Famille 2 enf. 1,5 30 % 0,66 0,702 0,679 0,640

Famille 3 enf. 1,75 20 % 0,57 0,702 0,615 0,640

Famille 4 enf. 2 10 % 0,5 0,702 0,568 0,640

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6565

Le cas des 20-25 ansLe cas des 20-25 ans

LES AF prennent fin à 20 ans.

Les 20/25 ans peuvent être :

- Étudiants. Ils peuvent alors être imposés avec leur famille jusqu’à 25 ans ou recevoir une Bourse. Ils peuvent recevoir une Allocation logement. Certains travaillent. La plupart sont financés par leur famille. Exonération fiscale des salaires étudiants (limite : 3 SMIC).

- Travailleurs. Aucun droit spécifique.

- Chômeurs. Ils n’ont aucune allocation.. Ils ne sont rattachés fiscalement à leur famille que jusqu’à 21 ans. Pour le RSA, ils sont rattachés à leur famille jusqu’à 25 ans ; leurs salaires sont déduits du RSA familial.

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6666

Le cas des 20-25 ansLe cas des 20-25 ans Une allocation d’autonomie : Désincitation à l’emploi. Coût très important si

donné à tous. Difficile d’aider les étudiants et pas les travailleurs à bas salaires. La suppression du QF ne permet pas de financer l’allocation. Le QF maximum est de 191 euros par mois, ce qui ne rend pas autonome

EVA (entrée dans la vie active). Mesure réservée aux jeunes de familles à bas revenus, financée par la suppression du QF pour les familles des plus riches. Injuste, car de quoi sont censé vivre les jeunes de ces familles ?

Le RSA à 20 ans. Désincitation à l’emploi. Comment vérifier que le jeune est en difficulté, que ce n’est pas un étudiant ? En 2009, le RSA a été étendu aux jeunes ayant travailé 2 ans.

Une allocation d’insertion. Comme le RSA. Réservée aux jeunes, chômeurs, de famille modeste. Il y a 580 000 chômeurs de cet âge (7% des 15-24 ans). Le coût serait au maximum de 3,2 milliards d’euros pour 455 euros par mois.

Augmenter les bourses des étudiants de famille modeste. On ne peut dégager 22 milliards d’euros par rendre autonome tous les jeunes de 20 à 24 ans. Il faut accepter que les jeunes de familles aisées ou moyennes restent à la charge de leurs parents. Il faut concentrer l’aide sur les jeunes étudiants de famille pauvre.

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6767

Débats récentsDébats récents 1. Le rapport Attali propose de mettre les allocations familiales sous

conditions de ressources. Mais le gouvernement s’y est opposé.

2. Le RGPP proposait de concentrer l’aide sur les plus pauvres et remettait en cause le quotient familial. Il faut dégager de l’argent pour la retraite.

3. Il comportait aussi la suppression des tarifs familles nombreuses de la SNCF (gain :70 millions d’euros). Mais le gouvernement y a renoncé.

4. La politique familiale est menacée car le gouvernement veut réduire le déficit public et les dépenses publiques. L’objectif de stabilité des dépenses publiques étendu aux dépenses sociales menace la protection sociale. L’UNAF veille, mais sa vigilance est souvent en défaut.

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6868

La LOLFLa LOLF

La loi organique relative aux lois de finances organise la Loi de finances autour de Programme, d’Objectifs et d’Indicateurs de Performance. Il existe ainsi un programme de qualité et d’efficience « famille » . Quatre objectifs : compensation financière des charges de famille ; aide aux familles pauvres ; conciliation vie familiale/vie professionnelle ; viabilité financière. De nombreux indicateurs de cadrage : 1. Taux de fécondité, descendance finale.2. Masse des prestations, Concentration des PF sur les plus pauvres.3. Places d’accueil des moins de 3 ans (47,5 % en 2010), national et régional.4. Mode de garde : coût pour les finances publiques et reste à charge.5. Nombres de bénéficiaires de l’AL (6,0 millions de ménages).

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6969

La LOLFLa LOLF

Des indicateurs d’objectif :

1. Réduction des écarts de niveau de vie grâce aux PF, impact redistributif des PF.

2. Taux d’enfants pauvres, impact des PF sur la pauvreté.

3. Offre de garde, nationale et régionale, taux de reste à charge, taux d’emploi des femmes selon le nombre d’enfants, taux de CLCA, taux de retour à l’emploi, taux de recours au congé de paternité.

4. Solde de la CNAF, dépenses d’action sociale.

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Famille et fiscalitéFamille et fiscalité

La France est le seul pays à pratiquer le système du quotient familial, qui pourtant est le seul conforme au principe de l’équité familiale horizontale.

Chaque famille se voit attribuer un nombre de part, P et est taxée comme P célibataires de revenu R/P.

Avec le QF, le traitement fiscal des familles ne nécessite aucun arbitrage spécifique : le barème des familles se déduit de celui des célibataires. Une fois en place, il fonctionne automatiquement : il n’est pas nécessaire de le rediscuter ou de l’indexer chaque année  ; il est protégé des aléas de la politique budgétaire.

Le degré de redistribution assuré par le système fiscal, l’équité verticale, est déterminé par le barème, qui définit la progressivité du système fiscal ; celle-ci est la même pour toutes les catégories de ménages.

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Ainsi, le quotient familial est-il une composante logique et nécessaire de l’impôt progressif. Le quotient familial ne fournit ni aide, ni avantage spécifique aux familles ; il garantit seulement que le poids de l’impôt est équitablement réparti entre des familles de taille différente, mais de niveau de vie équivalent.

Le QF n’est pas une aide aux familles qui augmenterait avec le revenu.

La seule critique du système du quotient familial, socialement et intellectuellement recevable, doit-elle porter sur ses modalités et non sur son principe.

Les Parts fiscales correspondent-elles bien aux UC (compte tenu d’une obligation de simplicité) ?

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7272

La famille Durand avec 2 enfants paie 3000 euros d’IR de moins que la famille Dupont. Est-ce un avantage fiscal de 3000 euros  ? Non, car les Dupont sont plus riches que les Durand : ils ont 3000 euros par UC au lieu de 2000. Par contre, les Durand paient autant, par UC, que les Martin qui ont le même niveau de vie.

Revenu par mois Impôt annuel

Dupont Couple 6 000 euros 9 520 euros

Durand Couple + 2 enfants 6 000 euros 6 511 euros

Martin Couple 4 000 euros 4 340 euros

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7373

Certains reprochent au quotient conjugal de défavoriser les personnes seules par rapport aux couples. Ceux-ci n’ont qu’une part fiscale alors qu’un couple en a deux. Or, la vie commune permet de réaliser des économies d’échelle en matière de logement et de biens durables, que le QF ne prend pas en compte.

Individualiser la déclaration n’améliorerait pas la situation des célibataires. Ce n’est pas le choix de l’unité fiscale qui joue ici mais la mesure de la capacité contributive.

Selon les UC retenues par l’OCDE, il faudrait donner 1,33 part aux individus, si les couples en ont deux. Le mariage serait pénalisé par rapport à la cohabitation. Il faudrait réserver le bénéfice de 1,33 part aux vraies personnes seules. Les cohabitants, même ceux qui refusent le mariage et le Pacs, devraient se déclarer comme tels et se verraient interdire le bénéfice de 1,33 part des personnes seules. Ceci n’est envisageable que si les pouvoirs publics se donnent des moyens de contrôle et que si la distinction entre vraies et fausses personnes seules est socialement acceptée. Pourquoi pas ?

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La principale critique faite à la familialisation de l’impôt est de nuire au travail des femmes. L’imposition jointe égalise le taux d’imposition des deux membres du couple. Dans un couple où les salaires sont fortement différentiés, le taux marginal de la femme (supposée la moins bien rémunérée) est supérieur à celui auquel elle aurait à faire face si elle était célibataire. Ceci la découragerait de travailler et la plongerait dans la dépendance. Passer à une imposition séparée permettrait de diminuer le taux d’imposition marginale des femmes et donc augmenterait leur taux d’activité.

L’imposition séparée a un avantage : favoriser l’autonomie des conjoints et trois inconvénients : elle signifie que l’Etat ne reconnaît pas la famille, elle nuit à l’équité horizontale, elle ne permet pas une prise en compte satisfaisant des enfants.

Le taux d’activité des femmes de 25-55 ans est relativement satisfaisant en France. Que le système fiscal français décourage le travail des femmes n’est guère apparent. Les facilités de garde (aides financières pour la garde des très jeunes enfants, école maternelle) permettent de concilier un fort taux d’activité et un niveau satisfaisant de fécondité.

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Taux d’activité des personnes de 25-55 ans en 2008Taux d’activité des personnes de 25-55 ans en 2008En %

  Hommes Femmes EcartEcart en

équivalent temps plein

Finlande 91,2 85,9 5,3 8,1Suède 93,1 87,5 5,6 10,4

Danemark 93,4 86,3 7,1 11,4France 94,5 83,2 11,3 18,2

Etats-Unis 90,5 75,8 14,7 19,7Autriche 93,0 81,7 11,3 20,9

Allemagne 92,9 80,5 12,4 21,1Royaume-Uni 91,7 78,3 13,4 23,5

Belgique 92,2 78,7 13,5 24,0Espagne 92,6 74,7 27,9 24,0

Irlande 91,6 71,9 19,7 28,8Pays-Bas 93,8 81,6 12,2 29,0

Italie 91,0 65,2 25,8 32,9Japon 96,3 70,4 24,9 32,9

Source : OCDE, Statistiques de Population actives (2010)

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L’augmentation de revenu disponible à la suite d’un retour au travail est beaucoup plus fort pour les femmes mariées que pour les femmes seules ; beaucoup plus fort pour les couples imposables (qui ne souffrent que d’un supplément d’impôt) que pour les couples non imposables (qui perdent les allocations logement et parfois le RMI). L’imposition séparée n’aurait donc aucun impact dans les situations où les effets désincitatifs sont les plus forts.

Dans le cas le moins favorable, une femme mariée à un homme à salaire élevé, qui reprend un emploi au SMIC est soumis à un taux d’imposition effectif de 36 % (90 % de 40 %) ; son travail lui rapporte donc 630 euros par mois, nettement plus que les 403 euros, qui restent à une femme seule ou aux 259 euros, qui restent à une femme d’un couple de Rmistes.

L’effet quotient familial compense souvent l’effet quotient conjugal. Exemple une femme gagnant 2000 euros par mois est mariée à un homme qui en gagne 4000. Sans enfant, son taux marginal correspond à celui d’une célibataire gagnant 3000 euros. Mais, si elle a deux enfants, son taux retombe à celui d’une célibataire à 2000 euros.

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Dans un système individualisé, une femme gagnerait plus en reprenant un emploi. Mais, cet effet serait obtenu en augmentant fortement la taxation des familles mono-actives. Considérons un couple dans lequel l’homme gagne deux fois le salaire moyen. Si son épouse ne travaille pas, l’impôt mensuel payé par le couple est de 329 euros par mois. Il passe à 486 euros si celle-ci travaille au SMIC. Avec une imposition séparée, l’impôt mensuel payé par le couple serait de 586 euros dans les deux cas. L’imposition séparée augmente certes le gain au travail (de 157 euros) mais en augmentant légèrement l’impôt du couple bi-actif (de 100 euros par mois) et fortement celui du couple mono-actif (de 257 euros par mois). Or ce dernier a obligatoirement un niveau de vie plus faible. L’individualisation dégrade la redistributivité du système fiscal.

Sur les quinze pays de l’Union européenne, cinq pratiquent le quotient conjugal ; trois pratiquent l’imposition séparée pure ; sept pratiquent l’imposition séparée, mais le conjoint d’une personne sans revenu bénéficie d’un abattement ou d’un crédit d’impôt.

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Comparaison des effets du système actuel Comparaison des effets du système actuel versusversus imposition imposition séparée sur les gains à la reprise d’un emploi au SMICséparée sur les gains à la reprise d’un emploi au SMIC

Système actuel Imposition séparéeFemme seuleSans enfant 413 euros 413 euros2 enfants 541 euros 541 eurosEn couple sans enfantsMari au RMI 294 euros 294 eurosMari au SMIC 753 euros 822 euros + Mari au sal. moyen 778 euros 937 euros +Mari à 2 fois le sal. moyen 712 euros 937 euros +Mari à 5 fois le sal. moyen 616 euros 937 euros +En couple avec 2 enfantsMari au RMI 259 euros 259 euros Mari au SMIC 633 euros 666 euros +Mari au sal. moyen 836 euros 937 euros +Mari à 2 fois le sal. moyen 774 euros 937 euros +Mari à 5 fois le sal. moyen 651 euros 937 euros +

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Landais, Piketty et Saez (2011) prônent l’individualisation de l’impôt : « L’administration fiscale doit cesser de se soucier de qui vit en couple avec qui. D’abord, parce que cela change tout le temps et parce que l’administration fiscale n’est pas là pour récompenser ou blâmer les différentes formes de vie familiale...L’imposition conjointe des couples aboutit en pratique à traiter les femmes comme un revenu d’appoint… Le quotient conjugal fonctionne de facto comme une machine à subventionner les couples inégaux».

Mais ce point de vue moderne oublie complètement les besoins des enfants. Ceux-ci ont besoin d’une structure stable pour leur éducation (et non de parents qui changent tout le temps de partenaire).

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Le système actuel laisse le choix aux couples : se marier et mettre en commun leurs ressources ou ne pas le faire. La fiscalité ne fait que reconnaitre que les personnes mariées mettent en commun leurs ressources. L’individualisation de l’impôt aboutirait au contraire à dénier aux personnes le droit de fonder une famille et de mettre en commun leurs ressources.

Rien dans la législation fiscale actuelle n’autorise à dire que le revenu des femmes est considéré comme un revenu d’appoint ; il est taxé comme tout revenu supplémentaire du couple. Le quotient conjugal fait payer le même impôt aux couples de revenu total équivalent ; il ne subventionne pas les couples de revenus inégaux.

En sens inverse, considérons un couple dont un des membres n’a pas de ressources (il est en mauvaise santé, il est chômeur en fin de droit, il élève les trois enfants en bas âge du couple) ; la fiscalité pourrait-elle imposer son conjoint sans tenir compte du niveau de vie effectif du couple, sans tenir compte du fait que, prenant en charge son conjoint sans ressources, il fait économiser à la société des prestations d’assistance ?

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Trois critiques principales sont faites au système du quotient familial.

1. La plus fréquente est que le quotient familial est injuste car il ne profite pas aux familles les plus pauvres qui ne paient pas d’impôt. Ceci dénote une certaine incompréhension du fonctionnement du système fiscalo-social. La politique familiale comporte un grand nombre d’instruments. Les prestations sous conditions de ressources doivent permettre d’assurer un niveau de vie satisfaisant aux familles les plus pauvres. Les prestations universelles doivent compenser, en partie, le coût de l’enfant pour les autres. La fiscalité ne peut pas aider les familles pauvres plus qu’en ne les imposant pas. Elle doit être équitable pour les autres.

2. La deuxième est que le quotient familiale est une aide aux familles, d’autant plus élevée que la famille est d’un revenu élevé. Mais le QF n’est pas une aide, sauf par rapport à un système d’imposition injustifiable qui ne tiendrait pas compte de la taille de la famille. Monsieur Dupont est célibataire et gagne 4000 euros par mois ; son collègue, Martin, gagne les mêmes 4000 euros, son épouse ne travaille pas et élève leurs trois enfants. La famille Martin n’a pas les mêmes capacités contributives que Monsieur Dupont. On ne peut considérer que la fiscalité normale impliquerait qu’ils payent le même impôt.

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3 La troisième est que le quotient familial serait inapproprié car le revenu ne serait pas obligatoirement partagé de façon équitable entre les différents membres de la famille. Pourtant, dans l’immense majorité des cas, les parents et les enfants partagent le même logement, les mêmes repas, les mêmes vacances. Considérons une famille où le père gagne 4000 euros par mois, la femme (qui travaille à mi-temps) 1500 euros. Cette famille a 3 enfants et touche donc 287 euros de prestations familiales. L’hypothèse de partage équitable est plus réaliste que celle selon laquelle le mari dépenserait ses 4000 euros ; la femme ses 1 500 euros et les enfants vivraient de 97 euros par mois. Par ailleurs, le plafonnement du quotient familial tient compte du fait que la partie la plus élevé du revenu ne sert pas à la consommation des enfants.

Deux philosophie s’oppose : pour les uns, la famille est obligatoirement organisé selon le modèle de l’homme dominant, de Monsieur Gagnepain et Madame Aufoyer ; il faut détruire ce modèle pour promouvoir l’égalité des genres ; la famille contribue à la reproduction des inégalités sociales ; il faut donc collectiviser la prise en charge des enfants. Pour les autres, les enfants ont besoin d’une famille ; celle-ci a évolué vers le modèle de solidarité égalitaire entre les conjoints ; la famille reste la base de la société.

Le système du quotient familial profite aux enfants et à leurs parents (généralement des actifs de 30 à 55 ans). Sa suppression, compensée par une baisse des taux d’imposition, comme l’a proposé, par exemple, Terra Nova, profiterait aux célibataires et aux couples aisés, donc aux plus de 55 ans.

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Le plafonnement des avantages du quotient familial à 2301 euros par demi-part (192 euros par mois) touche les familles avec 2 enfants à partir d’un revenu de 6720 euros par mois.

Pour les femmes seules avec un enfant, le plafonnement est de 3964 euros (330 euros par mois) à partir d’un revenu de 3 934 euros par mois.

Le plafonnement est en soi justifié, mais le montant du plafond est arbitraire ; il peut encore être abaissé demain, comme il l’a été en 1999  où le gouvernement Jospin avait réduit de 33 % le montant du plafond de l’avantage résultant du quotient familial ; en 2000 et 2001, ce plafond a été revalorisé de 14 % au total. Depuis, il suit l’inflation, et non le salaire moyen.

Si le plafonnement correspondait à un abattement d’un demi-SMIC, il devrait être de 0.5*40%*1070 =214 euros.

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Certains avantages donnés aux ménages peuvent être considérés comme des dispositifs dérogatoires (dépenses ou niches fiscales). Ce n’est pas le cas de la demi-part par enfant à charge, ni de la demi-part supplémentaire pour les célibataires avec enfants, ni de la déductibilité des pensions alimentaires. La question se pose pour la part supplémentaire à partir du 3ème enfant (qui coûte 550 millions d’euros) et pour la non-imposition des prestations familiales (2 300 millions).

Ces dispositifs favorisent les plus riches parmi les personnes considérés. 

Mais, les personnes ainsi favorisées sont celles qui perdent le plus relativement en ayant des enfants.

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Certains dispositifs ne sont pas familiarisés et désavantagent donc les familles. C’est en particulier le cas de la décote pour les bas revenus. Aussi, le seuil de revenu imposable est, en prenant comme base 2 pour un couple, de 1,30 pour un célibataire (au lieu de 1 dans le logique du quotient familial) ; de 2,67 pour un couple avec 2 enfants (au lieu de 3) ; de 4,07 pour un couple avec 4 enfants (au lieu de 5).

Les célibataires pauvres sont plus facilement imposables que les familles ; ceci compense le fait que les « vrais » célibataires sont désavantagés par le barème.

La PPE est très peu familiarisée : un couple à 2 SMIC a droit à 1921 euros ; deux enfants à sa charge lui donne un supplément de 72 euros (3,7% au lieu de 50%). C’est le risque de mettre la rentabilité de l’emploi au centre du dispositif.

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D’autres systèmes fiscauxD’autres systèmes fiscaux Les quinze pays de l’UE tiennent compte de façon différencié des

couples et des enfants dans le calcul de l’impôt sur le revenu. 6 pays ne tiennent pas compte de la présence des enfants.

Dans les pays qui utilisent les abattements, l’enfant est considéré comme une charge d’un coût donné, que le couple (ou l’un des parents) a le droit de retirer de son revenu. Le montant de l’abattement est généralement très faible (7% du salaire moyen au Japon). Le système considère que tous les enfants vivent dans la pauvreté et sont donc non imposables. Dans le cas français, l’abattement devrait être de 50% du SMIC.

Le système du crédit d’impôt n’obéit lui à aucune logique. Si le crédit d’impôt est remboursable, il fait double emploi avec les allocations familiales. S’il ne l’est pas, il constitue un supplément d’allocations familiales réservé aux plus riches.

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Traitement fiscalo-social des enfants dans quelques pays de Traitement fiscalo-social des enfants dans quelques pays de l’OCDE en 2009l’OCDE en 2009

  Reduction d’impôt* Allocations familiales*Allemagne Crédit d’impôt remb. 18,0 0

Autriche Crédit d’impôt remb. 18,6 0Belgique Crédit d’impôt 4,2 15,5

Danemark Pas pris en compte 0 10,2Finlande Pas pris en compte 0 9,3

France Quotient Familial 2,5 6,3Grèce Abattement 1,2 0

Irlande Pas pris en compte 0 12,7Italie Crédit d’impôt 6,8 5,1

Pays-Bas Pas pris en compte 0 6,2Portugal Crédit d’impôt 2,8 5,0Espagne Crédit d’impôt 0,8 0

Suède Paspris en compte 0 9,9RU Pas pris en compte 0 6,9

Etats-Unis CI remb. et abattement 10,0 0Japon Abattement 1,5 3,0

Selon OCDE (2010) : Taxing wages ; * en % du revenu disponible d’un célibataire au salaire moyen ; le couple gagne 133% fois le salaire moyen.

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8888

Le système du quotient familial reconnaît que les enfants des familles aisées ont un niveau de vie satisfaisant et qu’ils doivent donc être imposés.

La réforme la plus radicale consisterait à supprimer toute référence au nombre d’enfants dans le calcul de l’impôt et à utiliser la somme ainsi « économisée » à augmenter uniformément les allocations familiales : 60 euros de plus par enfants, par mois.

La réforme peut sembler progressive : on prend aux riches pour donner aux pauvres. Le point délicat est qu’elle aboutit à surtaxer les seuls riches avec enfants, et non tous les riches.

La société peut choisir de ne pas aider les familles aisées; par contre, elle n’a pas le droit sur le plan moral comme sur le plan constitutionnel de surtaxer les familles avec enfants par rapport aux personnes sans enfants de même niveau de vie. Chaque famille doit être imposée selon sa capacité contributive.

Si la société décide de donner 60 euros de plus à tous les enfants, ceci doit être payé par tous les contribuables et pas seulement par les contribuables avec enfants.

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8989

Le système français n’est pas totalement satisfaisant car le poids de l’IR le seul impôt familialisé est trop faible : 2,6% du PIB contre 4,8 % pour la CSG et 10,4% dans la moyenne de l’UE (en 2008).

En moyenne, les familles sont plus pauvres, en revenu par UC, que les couples ou les célibataires. Aussi, sont-elles gagnantes quand l’impôt est progressif ; perdantes quand il est proportionnel.

Augmenter le poids de l’IR rendrait le système plus progressif et plus familial.

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9090

Le rapport de Michel Godet et Evelyne Sullerot : « La famille : une affaire publique » propose de familialiser la CSG en donnant 0,5 part supplémentaire par enfant à charge.

Cette proposition est absurde puisqu’il n’y a pas de part dans le calcul de la CSG.

La question de la prise en compte des enfants ne se pose pas pour un impôt proportionnel.

Par contre, les familles seraient désavantagées si on créait un abattement sur la CSG pour les actifs. 

L’amélioration souhaitable de la situation relative des familles avec enfants nécessite donc la hausse des prestations familiales et l’extension de l’IR (au détriment de la CSG).

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9191

La fusion IR/CSG peut être la meilleure comme la pire des réformes.

La Sécurité sociale perdrait une ressource autonome.

La fusion pourrait rendre la système plus progressif et plus familialisé si la CSG est considérée comme un acompte de l’IR.

Le risque est que l’on passe à un système de retenu à la source, moins précis, moins progressif, moins familialisé (comme le propose Landais, Piketty et Saez, 2011).

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9292

Un projet contestableUn projet contestable

Un des scénarios étudiés par la CNAF :

1. De supprimer les allocations familiales, le complément familial et le quotient familial.

2. Une partie des sommes ainsi dégagées servirait à financer un service public d’aide aux études des enfants des familles pauvres.

3. Le reste financerait une allocation forfaitaire fixe pour chaque enfant complétée le cas échéant par une prestation sous

conditions de ressources pour les familles nombreuses.

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9393

Un projet contestableUn projet contestable

Cette proposition n’est pas acceptable :

1. Les familles ont un niveau de vie plus bas que les personnes sans enfants. On ne peut diminuer les transferts en leur faveur. S’il faut augmenter les moyens de l’éducation nationale, ceci doit être payé par tous les contribuables.

2. Le quotient familial n’est pas une aide arbitraire. On n’a pas le droit de le supprimer et de faire payer le même niveau d’IR aux Dupont sans enfants et aux Durant avec 4 enfants, même s’ils ont le même niveau de salaire.

3. La réforme diminuerait fortement le niveau de vie des familles nombreuses (baisse des AF, augmentation de l’IR). Ce sont les plus pauvres. Et on a besoin d’elles.

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9494

Un projet contestableUn projet contestable

Toute réforme doit tenir compte de la logique fiscale et des niveaux de vie relatifs des familles.

Elle doit respecter l’équité fiscale familiale (deux familles de composition différente, mais de même revenu par UC doivent supporter le même taux d’imposition), tendre vers la parité familiale (le revenu disponible par UC d’une famille doit être le même, à revenu primaire donné, quel que soit son nombre d’enfants) et vers la réduction du nombre d’enfants pauvres.

Ceci suppose le maintien du quotient familial, des prestations familiales différenciées selon le nombre d’enfants et, au minimum, le maintien du niveau relatif des minima sociaux et des prestations familiales.

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9595

Une politique familiale généreuse..mais inégalitaire (Anne Une politique familiale généreuse..mais inégalitaire (Anne Chemin, Le monde 20 octobre 2009)Chemin, Le monde 20 octobre 2009) « La politique familiale française est généreuse mais elle a son talon

d'Achille : paradoxalement, elle bénéficie en priorité... aux familles les plus riches. Selon le ministère de la santé, pour les 30 % des foyers les plus aisés, les transferts annuels liés à la politique familiale représentaient, en 2004, 3 500 euros par enfant, alors que les 5 % des familles les plus pauvres n'en touchaient que 2 800 et les classes moyennes environ 2 000. " Les ménages ayant les revenus les plus élevés sont les plus grands bénéficiaires ", résumait le Centre d'analyse stratégique en 2007.

Cette redistribution à l'envers est principalement liée au mécanisme du quotient familial. Ce système fiscal, qui réduit les impôts des familles ayant des enfants grâce à un système de parts, bénéficie essentiellement à la moitié des Français les plus riches - ceux qui payent des impôts. Il est en outre très inégalitaire : plus la famille est aisée, plus l'avantage fiscal est important. Selon le service statistique du ministère de la santé, il dépasse ainsi 2 400 euros par an chez les 30 % des familles les plus riches, contre... 5 euros pour les 5 % les plus pauvres »

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9696

Réponse : une réforme simple qui rendrait notre Réponse : une réforme simple qui rendrait notre système parfaitement égalitairesystème parfaitement égalitaire

Supprimons les allocations familiales et toutes les prestations sousconditions de ressources (CF, ARS, API, ASF) qui représentent 40 milliardsd'euros ; supprimons le RMI-RSA (8 milliards d'euros) ; supprimons lesallocations logement (16 milliards d'euros). Nous pourrons alors supprimerles cotisations familles (30 milliards d'euros) et l'impôt sur le revenu, si injuste en raison du quotient familial (55 milliards d'euros).

Il faudra certes trouver 21 milliards d'euros. Chaque adulte devra payer un impôt forfaitaire de 360 euros par an ; chaque enfant 180 euros. Le système sera alors parfaitement égalitaire selon vos souhaits.

Par rapport au système actuel, les familles de 2 enfants actuellement auRSA perdront 1420 euros par mois; celles de revenu égal à 2 foisle SMIC perdront 430 euros par mois ; celles de revenu égal à 10 foisle SMIC gagneront 2100 euros par mois. Ceci montre bien l'iniquité dusystème actuel.

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9797

Famille et redistributionFamille et redistribution

Il y a trois manières d’analyser la redistribution : les données globales, la méthode des cas types et la micro-simulation.

Le niveau insuffisant des prestations familiales explique que les moins de 18 ans ont en moyenne un niveau de vie plus bas que la moyenne de la population. Ceci pèse aussi sur le niveau de vie de leurs parents (les 30-49 ans comparé aux 50-59 ans).

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9898

Niveau de vie relatif selon l’âge Niveau de vie relatif selon l’âge

Source : INSEE, enquête Revenus fiscaux et sociaux 2008.

Niveau de vie moyen Niveau de vie médian

  1996 2008 1996 2008

Ensemble 100 100 100 100

Moins de 18 ans 90,9 91,1 90,7 93,4

18 à 29 ans 83,0 89,5 93,6 95,2

30 à 39 ans 98,7 98,3 100,9 101,0

40 à 49 ans 106,8 101,6 107,7 103,5

50 à 59 ans 119,3 115,9 117,2 114,5

60 à 69 ans 107,1 114,4 106,0 106,7

70 ans ou plus 102,6 99,2 101,0 94,0

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99

Famille deux enfants (2,1 UC)

Ménage mono-actifMénage bi-actif

RMI 0.5 SMIC

SMIC 1,5*SMIC 1,5*SMIC 2*SMIC 3*SMIC 5*SMIC 10*SMIC

Salaires 0 525 1050 1 575 1 575 2100 3150 5250 10 500

RSA 820 497 297 98 – – – –

PPE – – – – 165 171 – – –

AF/ARS 46 124+46 124+46 124+46 124+46 124+46 124 124 124

Al. log. 462 462 357 202 205 50 – – –

IR 0 0 0 0 0 0 – 83 – 348 –1647

Total 1328 1654 1 874 2045 2115 2 491 3191 5026 8977

%RM 40,1 50,0 56,6 61,8 63,9 75,3 96,4 151,9 271,2

* 102.6 94,7 97,5 92,2 87,1 79,9 77,1 76,2 75,7

PPE 97 16

Total 1674 1963

Le loyer est estimé à 500 euros. Les enfants ont 7 et 9 ans. * revenu par UC relativement à celui du couple sans enfant.

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100100

Niveau de vie d’un couple selon le nombre d’enfantsNiveau de vie d’un couple selon le nombre d’enfantset la situation professionnelle en euros par mois par UC en 2009et la situation professionnelle en euros par mois par UC en 2009

Personne 1 RSA SMIC** SMIC SMIC 2 SMIC 3 SMIC 6 SMIC

Personne 2 Inactif Inactif ½ SMIC SMIC 1 SMIC 2 SMIC 4 SMIC

Sans enfant 616 915(888) 1 156 1 485 1 972 3 144 5 648

1 enfant 616 909(803) 1039 1263 1673 2687 4812

* 99,9 99,4(90,5) 89,9 85,0 84,9 85,5 85,2

2 enfants 632 892(797) 1007 1 186 1 520 2 393 4 274

Gain euros 202 251(176) 191 117 117 155 252

* 102,6 97,5(89,8) 87,1 79,9 77,1 76,2 75,7

3 enfants 665 900(890) 1037 1 200 1466 2 219 3 958

Gain euros 217 273(272) 288 256 208 205 360

* 105,8 98,4(100,2) 93,6 84,0 75,7 70,6 70,5

En rouge(vert) , les niveaux de vie inférieurs à 788 euros par UC (946 euros)  ; * revenu par UC relativement à celui du couple sans enfant : ** non requérants au RSA

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101101

La méthode des cas types Le tableau peut être lu de deux façons. Soit, on regarde les gains nets procurés par enfant, en supposant

que la réduction d’IR fait partie de ces gains. Les aides par enfant dépendent très fortement du nombre d’enfants : les enfants de familles nombreuses procurent un gain plus important. Les gains présentent une courbe en U. Il y a un trou pour les familles de revenu faible ou moyen (1,5 à 5 SMIC) de 1 ou 2 enfants. Le RSA devrait augmenter fortement l’aide pour les familles à 1 ou 2 enfants, gagnant le SMIC ou 1,5 SMIC. Selon ce point de vue, l’effort doit porter sur les familles, à 1 ou 2 enfants, des classes populaires et moyennes ; on peut économiser sur les aides aux familles de revenus supérieurs, en particulier les familles nombreuses.

Soit on compare les niveaux de vie des familles selon leur nombre d’enfants. Dans ce cas, la parité des niveaux de vie entre familles et personnes sans enfant est assurée au niveau du RMI et du SMIC. Pour les salariés de 1,5 à 10 SMIC, le niveau de vie est une fonction décroissante du nombre d’enfants : à ce niveau, les familles prennent donc en charge une partie du coût de l’enfant. Il n’y a plus de courbes en U. Il n’y a guère de raison de donner plus aux familles avec 1 enfant et moins aux familles nombreuses..

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102102

Les familles avec enfants ont toujours un niveau de vie nettement plus bas que les couples.

Encore, ne tient-on pas compte du fait qu’avoir 2 enfants ou plus oblige souvent la femme à réduire son activité ou même à la stopper.

Globalement, la redistribution est plus forte chez les familles que chez les couples sans enfant : le rapport des revenus disponibles entre un couple qui gagne 1 SMIC et un couple qui en gagne 10 est de 6,2 s’ils n’ont pas d’enfant ; de 4,8 s’ils ont 2 enfants ; de 4,4 s’ils en ont 3. L’existence du quotient familial ne réduit pas la progressivité du système fiscal pour les familles nombreuses.

Il est absurde de reprocher au quotient familial de ne pas bénéficier aux familles les plus pauvres : les plus pauvres bénéficient tous de leur non-imposition et des prestations spécifiques (allocation-logement, complément familial) aident ceux qui ne sont pas imposables.

Toutes les familles, soit touchent l’allocation-logement, soit payent l’impôt sur le revenu, donc sont soumises à un transfert progressif. Le gouvernement dispose des instruments nécessaires.

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103103

La distribution des revenus est plus La distribution des revenus est plus égalitaireégalitaire chez les familles chez les familles

10*SMIC/RMI 10*SMIC/1*SMIC

0 enfant 9,2 6,2

1 enfant 7,8 5,3

2 enfants 6,8 4,8

3 enfants 6,0 4,4

4 enfants 5,7 4,2

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104104

La méthode de micro-simulationLa méthode de micro-simulation(Drees, Etudes et résultats, juin 2005)(Drees, Etudes et résultats, juin 2005)

Les auteurs croient que le QF est une aide aux familles ; ils croient à la courbe à U.

La PAJE aide spécifiquement les parents d’enfants de moins de 3 ans qui n’ont pas de besoin spécifique selon l’échelle d’équivalence. Une autre rupture intervient à 14 ans.

La gratuité de l’école maternelle et la non-gratuité des gardes des 0-3 ans posent problème au niveau statistique.

Effet de structure : Les familles, et spécifiquement les familles nombreuses et les familles monoparentales, sont plus pauvres, en moyenne. Aussi, elles bénéficient de la redistribution horizontale comme de la redistribution verticale.

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Effet des transferts sur les niveaux de vie relatif en 2007Effet des transferts sur les niveaux de vie relatif en 2007

Niveau de vie initial

Niveau de vie final

Célibataires 74 71

Couples 100 95

Famille : C+1 E C+2 E

C +3 E et plus

827451

839665

Famille MP : A+1 E A+2 E et plus

5233

7151

Source : DREES. Champ ménages dont la personne de référence à moins de 60 ans.

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106106

Contribution des transferts à la réduction des inégalitésContribution des transferts à la réduction des inégalités

Contribution en %Efficacité :

contribution/montant

Impôt sur le revenu 33,5 4,6

PPE 3,3 8,2

Prestations sans conditions de ressources

12,9 13,2

Prestations sous conditions de ressources

6,8 8,5

Prestations scolarité 2,7 13,5

Prestations garde 3,0 4,3

Allocations logement 19,4 13,8

Minima sociaux 9,9 14,1

Minima handicap 8,5 14,1

Total 100 7,2

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107107

Le RSA améliore nettement la situation relative des familles de travailleurs pauvres avec 1 ou 2 enfants, mais il a deux défauts. On ne sait pas actuellement si le nombre des non-recourant va effectivement devenir négligeable (en juin 2010 620 000 bénéficiaires sur 1,7 prévus).

Les chômeurs de faible allocation chômage avec 1 ou 2 enfants ne bénéficient pas du RSA. Paradoxe : la création du RSA diminue le taux de remplacement net pour les salariés à bas salaires. Il faudrait que les allocations chômage aient le même statut que les salaires dans le calcul du RSA.

Les résultats dépendent de l’hypothèse faite sur l’échelle d’équivalence, en particulier de celle selon laquelle le nombre d’unité de consommation ne dépend pas du niveau de revenu. Toutefois, les écarts avec la parité familiale sont supérieurs à l’incertitude.

D’une part, la parité familiale n’est pas assurée pour la quasi-totalité des salariés : les familles avec enfants ont un niveau de vie inférieur aux personnes sans enfant. D’autre part, le système fournit des masses relativement importantes aux familles ; il assure la parité familiale pour les bas revenus, une aide sensible pour les familles de salariés à bas salaires, aide qui se réduit en proportion quand le revenu augmente. A aucun niveau de revenu, il n’apparaît de façon évidente de familles trop avantagées ou trop surchargées.

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108108

Nous utilisons maintenant le modèle Misme de l’OFCE, qui décrit la distribution des revenus d’un panel de ménages représentatif de la population française et permet d’étudier les conséquences globales et redistributives de changement de la législation sociale ou fiscale.

Les célibataires sans enfant sont surreprésentés dans le 1er décile (51 % des ménages contre 30 % dans la population) : les étudiants et les jeunes actifs y sont nombreux.

A l’opposé, les couples sans enfants sont surreprésentés dans le dernier décile (44 % contre 28 % dans la population) du fait de revenus plus élevés (travailleurs en fin de carrière, retraités) et de charges familiales moins importantes.

Parmi les ménages avec enfants, les familles nombreuses (célibataires, 2 enfants ou plus ; couple, 3 enfants ou plus) sont surreprésentées dans les premiers déciles : 53,1 % des célibataires avec plusieurs enfants et 42 % des couples avec plus de 2 enfants sont dans les trois premiers déciles de niveau de vie, contre respectivement 10,6 % et 20,9 % dans les trois déciles les plus aisés. Ceci s’explique par la charge des enfants, mais aussi par la baisse d’activité marchande : le taux d’emploi des femmes en couple chute à partir du 3ème enfant.

Les couples avec 1 ou 2 enfants se situent quant à eux peu souvent parmi les plus pauvres et sont surreprésentés dans la classe moyenne (déciles 6 à 9).

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Répartition des familles par décileRépartition des familles par décile

composition familiale 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 TotalAutre 1.0 1.6 1.8 1.5 2.1 2.0 1.8 2.3 1.5 0.9 1.7

Celibataire 51.5 36.3 35.2 35.4 30.7 25.1 22.6 22.2 24.2 20.1 30.3Celibataire, 1 enfant 4.0 5.4 6.1 7.1 5.1 4.9 4.0 4.1 3.1 2.2 4.6

Celibataire, 2 enfants ou + 5.6 5.8 5.5 3.7 3.3 2.3 2.2 1.5 0.9 1.0 3.2Couple 14.3 23.0 22.8 23.1 25.1 26.6 31.3 33.0 36.8 44.5 28.0

Couple, 1 enfant 6.9 8.3 7.7 9.1 14.2 17.5 16.7 16.6 16.7 13.6 12.7Couple, 2 enfants 7.0 10.3 12.3 12.7 13.7 15.8 15.8 15.4 12.9 12.7 12.8

Couple, 3 enfants ou + 9.8 9.3 8.7 7.5 5.8 5.7 5.6 4.8 4.0 5.1 6.6100.0 100.0 100.0 100.0 100.0 100.0 100.0 100.0 100.0 100.0 100.0

décile de niveau de vie

composition familiale 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 TotalAutre 6.0 9.9 10.5 8.9 12.8 12.2 10.9 14.0 9.2 5.6 100.0

Celibataire 17.0 12.0 11.6 11.7 10.1 8.3 7.5 7.3 8.0 6.6 100.0Celibataire, 1 enfant 8.8 11.8 13.2 15.4 11.1 10.7 8.7 9.0 6.6 4.9 100.0

Celibataire, 2 enfants ou + 17.7 18.1 17.3 11.7 10.5 7.4 6.9 4.7 2.9 3.0 100.0Couple 5.1 8.2 8.1 8.2 8.9 9.5 11.2 11.8 13.1 15.9 100.0

Couple, 1 enfant 5.4 6.5 6.1 7.2 11.2 13.8 13.1 13.0 13.1 10.7 100.0Couple, 2 enfants 5.4 8.0 9.6 9.9 10.6 12.3 12.3 12.0 10.0 9.8 100.0

Couple, 3 enfants ou + 14.7 14.1 13.2 11.2 8.8 8.6 8.5 7.3 6.0 7.6 100.0

décile de niveau de vie

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Même forfaitaires, les allocations familiales sont redistributives.

Les familles nombreuses sont en effet en moyenne moins aisées que les autres familles (parce qu’elles travaillent moins et que les transferts sociaux ne compensent pas la perte de niveau de vie lié à l’arrivée d’un enfant supplémentaire).

Ceci se traduit sur le graphique par un montant moins élevé d’allocations familiales perçues pour les ménages plus aisés.

De plus, ce montant correspond à une part beaucoup plus importante du revenu disponible des moins aisés (10,5 % pour les ménages du 1er décile contre 0,8 % pour les ménages du 10ème décile), ce qui diminue fortement les inégalités relatives.

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111111

Montant moyen d’allocations familiales par ménage par Montant moyen d’allocations familiales par ménage par décile de niveau de viedécile de niveau de vie

en euros et en % du revenu disponibleen euros et en % du revenu disponible

0

100

200

300

400

500

600

700

800

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 0%

2%

4%

6%

8%

10%

12%

en euros (échelle de gauche) en % du revenu disponible par uc (échelle de droite)

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112112

Quel devrait être le niveau d’une allocation forfaitaire ? En 2009, le revenu médian est de 1 596 euros par mois. Soit, pour un enfant à 0,35 part d’UC en moyenne (0,3 pour les moins de 14 ans, 0,5 pour les plus de 14 ans), 559 euros, soit un seuil de pauvreté à 60 % de 335 euros. Ne faudrait-il pas réclamer une prestation uniforme de 335 euros par enfants, qui assure qu’aucune famille ne se rapproche de la pauvreté du fait d’un enfant supplémentaire ?

La société garantit un minimum vieillesse de 887 euros (AL compris) aux personnes de plus de 65 ans et aux adultes handicapés. Un revenu minimum enfant de 35 % de cette somme serait de 310 euros. Mais le gouvernement a mis en route une politique de revalorisation du minimum vieillesse qui devrait l’augmenter d’environ 10 % en pouvoir d’achat.

Le RMI (y compris AL) est de 698 euros, ce qui pourrait justifier une allocation enfant de 244 euros, mais le RMI est maintenu à un bas niveau, en dessous du seuil de pauvreté, pour ne pas nuire à l’incitation à travailler.

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113113

Les réformes possibles Les réformes possibles Mettre sous conditions de ressources les AF en écartant les 20 % les plus

riches rapporterait 1,7 milliards d’euros. Ceci permettrait de financer un allocation de 40 euros au 1er enfant.

La suppression du QF rapporterait 10 milliards d’euros. La suppression de la demi part supplémentaire à partir du 3ème enfant rapporterait 550 millions.

Le gain apporté par le QF est plafonné. Ce plafond est-il arbitraire ? Si un enfant coûte 559 euros par mois à une famille moyenne (dont 63 pris en charge par les allocations familiales), il est légitime que la réduction d’impôt pour les familles de revenus moyen-supérieur soit de l’ordre de (559-63)*12*40%=2581 euros, ce qui est de l’ordre du montant du plafond du QF pour 1 ou 2 enfants (2 301 euros), qu’il ne serait donc pas équitable de diminuer.

Par contre, avec ce calcul, le plafond du QF pour les 3ème enfants et au-delà devrait être de l’ordre de (559-161)*12*40%=1910 euros, alors qu’il est de 4 602 euros, montant que l’on peut juger excessif.

Toutefois, compte tenu du plafonnement du QF, un enfant rapporte au maximum 192 euros, deux enfants 255 chacun, trois enfants 352 chacun, 4 enfants 400 euros. Ce 400 euros reste en dessous des 559 euros. On ne peut s’enrichir en ayant des enfants.

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114114

La grande réforme La grande réforme

Remplacer (AF+CF+QF+PAJE de base) par une prestation uniforme à coût constant permettrait de verser 155 euros par enfant.

Elle est préconisée par Piketty et al.

La réforme serait défavorable aux ménages aisés et aux familles nombreuses. Il faut prendre beaucoup aux familles nombreuses pour donner un peu aux autres.

L’allocation uniforme devrait être de 552 euros (35% du revenu médian), 331 euros (35% du seuil de pauvreté), 310 euros (35% du Minimum vieillesse), 244 (35% du RSA sec).

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115115

Les réformes possibles Les réformes possibles La réforme pose trois autres questions :

Pourra-t-on prendre en compte la composition de la famille pour le RSA, les AL, les bourses scolaires et pas pour l’impôt sur le revenu ?

Comment seront calculées les pensions alimentaires si les 155 euros sont censés couvrir le coût des enfants ?

La somme de 155 euros est nettement inférieure au 552 euros de coût moyen d’un enfant : qui paye la différence ? Les parents, bien sûr, et on voit mal pourquoi cette charge ne serait pas prise en compte dans le calcul de l’IR.

Une allocation uniforme doit être forte pour compenser totalement le coût de l'enfant chez les familles pauvres et justifier que les enfants ne soient pas pris en compte chez les plus riches. Les pays qui ont les plus fortes allocations familiales ne dépassent guère 100 euros par mois (112 euros en Suède, 110 en Finlande, 106 en Belgique, 98 au Danemark).

Ce calcul montre l’écart entre les prestations actuelles (155 euros, en moyenne par enfant) et les prestations équitables (331 ou 552 euros). Si la société est prête à donner 552 euros par enfant, elle pourra dire qu’elle prend en compte effectivement la charge des enfants au niveau correspondant au revenu moyen de la population. A 331 euros, la prise en charge ne se fait qu’au seuil de pauvreté. Par contre, 155 euros n’est pas acceptable.

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116116

Impact de la réforme unificatrice (revenu annuel)Impact de la réforme unificatrice (revenu annuel)

Quantile de niveau de vie

Autre CelibCelib, 1 enfant

Celib, 2 enfants ou plus

CoupleCouple, 1

enfantCouple, 2 enfants

Couple, 3 enfants ou plus

Total

1 -86 0 308 156 0 350 399 -511 102 -6 0 395 325 0 355 511 -794 313 133 0 577 525 0 547 412 -1 135 514 145 0 586 632 0 461 457 -1 329 775 108 0 609 793 0 444 537 -1 573 1016 180 0 589 482 0 497 361 -2 200 577 285 0 608 781 0 853 602 -1 972 1808 113 0 527 390 0 872 499 -2 623 1459 -23 0 429 -620 0 591 -395 -4 590 -9510 -26 0 66 -1 102 0 -79 -1 729 -7 061 -522

Total 97 0 505 398 0 523 190 -1 768 6

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117

Il n'y a que deux systèmes possibles : le système actuel reconnait le droit des individus à se marier, à se pacser, à

fonder une famille et partager leurs ressources. La fiscalité des familles n’est pas arbitraire ; elle découle logiquement de principes bien établis.

Un système individualiste où chaque adulte est imposé sur ces ressources et les enfants couverts par une prestation unique forfaitaire. Les personnes mariées ne sont plus tenues de partager leur ressources. Dans ce second système, on renoncerait à toutes les prestations familiales sous conditions de ressources puisque la notion de famille disparaitrait. Le mariage (ou le Pacs) ne donnerait aucun avantage. Il n'y aurait plus de pensions alimentaires puisque la prestation unique forfaitaire serait censée couvrir le coût de l'enfant.

Reste à savoir quel système est le plus protecteur pour les femmes et les enfants.

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118118

La pauvretéLa pauvreté

La pauvreté est définie comme le fait d’avoir un revenu par UC en dessous d’un certain pourcentage du revenu médian : 50% en France naguère ; 60% en Europe. Selon la définition européenne, il y a en France 7,1 millions de pauvres, dont 2,1 millions d’enfants. 1,6 millions d’enfants ont des parents qui vivent du RMI, de l’API, de l’ASS ou de l’AAH.

Global Moins de 18 ans

Seuil 50% 7,1% (4,3 mil.) 9,4 % (1,25 mil.)

Seuil 60% 13,0 % (7,8 mil.) 17,3 % (2,3 mil.)

Taux de pauvreté en France en 2008Taux de pauvreté en France en 2008

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Le taux de pauvreté est plus important parmi les enfants et les jeunes que parmi les actifs et les retraités. Les enfants vivent avec des parents potentiellement actifs, que la Société refuse de trop aider s’ils sont sans emploi pour ne pas les désinciter à trouver un emploi. Le RSA socle ne sort pas ses bénéficiaires de la zone de pauvreté, contrairement au Minimum Vieillesse. Ceci augmente le taux de pauvreté des enfants.

Le taux de pauvreté plus élevé des enfants est une caractéristique générale en Europe : seuls le Danemark et la Finlande y échappent .

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120120

Taux de pauvreté en Europe 2008 seuil de 60 %Taux de pauvreté en Europe 2008 seuil de 60 %Total 0-18 ans 18-24 ans

UE15 16 19 20

Pays-Bas 11 13 20

Suède 12 13 27

Danemark 12 9 34

Autriche 12 15 11

France 13 17 20

Finlande 14 12 26

Allemagne 15 15 20

Belgique 15 17 17

Irlande 16 18 14

Portugal 18 23 18

Royaume-Uni 19 23 19

Italie 19 25 21

Espagne 20 24 20

Grèce 20 23 23

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Taux de pauvreté à 60% en 2008Taux de pauvreté à 60% en 2008

Source : INSEE : enquête Revenus fiscaux et sociaux 2008.

Ensemble 13,0

Moins de10 ans 17,1

De 10 à 19 ans 18,1

20 à 24 ans 20,1

25 à 29 ans 12,4

De 30 à 39 ans 11,0

De 40 à 49 ans 11,6

De 50 à 59 ans 10,8

De 60 à 69 ans 7,8

De 70 à 79 ans 10,1

80 ans et plus 13,8

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122122

Taux de pauvreté des enfants (à 50%)Taux de pauvreté des enfants (à 50%)selon la situation familialeselon la situation familiale

CoupleFamille

monoparentale

1 enfant 5,5 10,8

2 enfants 4,8 14,0

3 enfants 6,0 16,4

4 enfants 12,0 20,6

5 enfants et plus… 27,3 35,0

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123123

Parents nés dans

l’UE

Parents nés hors de l’UE

Parents non ressortissants

de l’UETotal

Taux de pauvreté

50%5,9 11,3 25,9 7,8

Structure 66% 9% 25% 100%

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124124

Où vivent les enfants pauvres ?Où vivent les enfants pauvres ?

% d’enfants % enfants pauvres

Famille 1 enfant 16 8

Famille 2 enfants 39 22

Famille 3 enfants et plus 34 47

Famille monoparentale 8 19

Famille complexe 3 5

Famille à 0 actif 8 31

0,5 actif 2 8

1 actif 38 48

1,5 actifs 11 5

2 actifs 40 6

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125125

Effet des transferts sur le taux de pauvreté à 60% en 2005Effet des transferts sur le taux de pauvreté à 60% en 2005

Avant transferts Après transferts

Total 22 12

Célibataires 23 16

Couples 8 6

Famille : C+1 E C+2 E

C +3 E et plus

121846

99

19

Famille MP : A+1 E A+2 E et plus

4266

2637

Source : DREES. Champ ménages dont la personne de référence à moins de 60 ans.

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126126

Le RSALe RSA

Le RSA socle est nettement inférieur au minimum vieillesse (405 contre 709 euros) Ses bénéficiaires restent en dessous du seuil de pauvreté à 50%. Le gouvernement estime qu’un niveau trop fort de RSA provoquerait une trappe à inactivité en incitant les bénéficiaires à ne pas rechercher un emploi. Il manque en France un dispositif équivalent aux allocations invalidité des pays scandinaves, versées sur des critères médicaux, économiques et sociaux, assurant aux personnes les plus éloignés de l’emploi (temporairement ou durablement) un revenu plus satisfaisant, équivalent à celui du minimum vieillesse.

Le système n’est pas plus généreux pour les Rsistes avec enfants, alors que l’on pourrait souhaiter que les Rsistes avec enfants bénéficient d’une allocation plus favorable, ceci pour trois raisons : les Rsistes avec enfants remplissent un rôle social, celui de parents, que ne remplissent pas les rmistes sans enfant ; les enfants de Rsistes ne sont pas responsables du manque de ressources de leurs parents et ont droit à un niveau de vie plus élevé que celui que la société accorde aux Rsistes sans enfant qui sont, en partie responsables de leur situation ; l’allocation doit permettre aux parents d’élever leurs enfants dans de conditions satisfaisantes.

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L’API-RSA majoré est à un niveau intermédiaire, mais ses titulaires restent en dessous du seuil de pauvreté. Le législateur n’a pas choisi entre deux logiques : les femmes qui élèvent seules de très jeunes enfants ont le droit de choisir de ne pas travailler (mais dans ce cas la prestation devrait permettre de sortir du seuil de pauvreté) ou ces femmes doivent travailler, l’API n’est qu’un filet de sécurité.

Le RMI a connu une légère hausse de pouvoir d’achat jusqu’en 2001, mais son pouvoir d’achat a depuis légèrement diminué. Au moment de sa création, en 1990, le RMI valait 34,9 % du revenu médian. En 2008, il n’en valait plus que 29,7 %, soit une baisse relative de 15 %. En 1990, un Rmiste, qui a droit à l’allocation logement, était légèrement au dessus du seuil de pauvreté à 50 % (à 52 % environ) ; il est maintenant nettement en dessous (à 45 %).

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De même, l’API est passée de 51,7% du revenu médian en 1984 à 43,5% en 1990, puis à 38,2 en 2008. En 1984, compte tenu de l’allocation logement une femme avec un enfant touchait 60% du revenu médian ; elle n’en touche maintenant que 45,5%.

En 1990, le RMI représentait 48,5% du SMIC net (pour 39 heures de travail) ; en 2008, il représente 40,5% du SMIC net (pour 35 heures de travail), soit une baisse de l’ordre de 16,5%. La stratégie de lutte contre les trappes à inactivité axée sur l’objectif de rendre le travail rentable lancé en 2000 s’est traduite, dans un contexte d’économies budgétaires, par une stagnation du pouvoir d’achat du RMI et de l’API, plutôt que par une forte hausse des plus bas salaires.

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129129

Martin Hirsch n’est pas honnête ...Martin Hirsch n’est pas honnête ...

Sous l’impulsion de Martin Hirsch, le gouvernement s’était engagé à réduire d’un tiers le taux de pauvreté d’ici 2012, le faire donc passer en dessous de 8%. Tout le monde avait compris qu’il s’agissait de l’indicateur européen de taux de pauvreté, les % de ménages qui ont moins que 60% du revenu médian et avait salué cette initiative.

En fait, MH veut utiliser un indicateur maison : le taux de pauvreté ancré dans le temps, c’est le % de ménages qui en 2012 auront moins que le seuil de pauvreté de 2005, soit 817 euros par UC en euros constants.

En 7 ans, la croissance du revenu médian est de l’ordre de 11 %. Ceci revient à introduire une norme à 53,8%. En 2005, avec cette norme, le taux de pauvreté était déjà de 8,5%. La promesse du gouvernement est donc très limitée.

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130130

Trois explications à la pauvreté : les familles mono-parentales ; les familles nombreuses, qui souvent mono-actives ; l’exclusion et la précarité (chômage, inactivité, travail à temps partiel, travail précaire).

Pour les couples, le RSA socle ne fait pas sortir du seuil de pauvreté. Il faut environ 50 % du SMIC pour sortir du seuil à 50% ; 120 % pour sortir de celui à 60%.

Pour les familles avec deux enfants, il faut 50 % du SMIC – seuil à 50 % -ou 130% du SMIC (1 actif) –seuil à 60%.

Pour les familles nombreuses, le supplément de RSA ou de prestations familiales est de 220 euros par enfants. Il faudrait 284 euros (pour les moins de 14 ans) ; 472 euros pour les plus de 14 ans (30 ou 50 % du seuil de pauvreté de 946 euros).

Le seuil de pauvretéLe seuil de pauvreté

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131131

Le Royaume-Uni s’était donné comme objectif explicite de faire diminuer le nombre d’enfants pauvres (27% en 2000).

Objectif : 12,5% en 2010 ; 0 en 2020.

Deux stratégies contradictoires :

1. Rendre le travail rentable

2. Augmenter les prestations minimales

… à rendre compatible par le contrôle social.

En 2008, le taux de pauvreté des enfants est de 24 %. Il est stable depuis 2001. En 2009, il est passé à 21%.

Tony Blair, un exemple pour la France ? Tony Blair, un exemple pour la France ?

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132132

Lutter contre la pauvreté - Trois stratégies :Lutter contre la pauvreté - Trois stratégies :

Revaloriser le RSA socle pour garantir à chacun au moins 788 euros (ou 946 euros ?) par UC. En se limitant au seuil de 50%, cela nécessiterait une hausse de la prestation de l’ordre de 13% pour un célibataire, 26% pour un couple et de 23 % pour une famille avec 2 enfants . Ce n’est guère la politique suivie : depuis 1990, le RMI a perdu 15% de sa valeur par rapport au revenu médian. Ceci poserait la question de l’incitation à l’emploi. Il faudrait accompagner la revalorisation du RMI d’une politique de contrôle social : certains devraient suivre une formation ou devraient accepter un emploi à mi-temps ….Que faire en cas de refus ?

Inciter à l’emploi : augmenter la PPE, revaloriser nettement les prestations sociales, étendre le complément familial aux familles de travailleurs pauvres avec 1 ou 2 enfants. Ceci aurait l’avantage de rendre rentable la reprise d’activité au SMIC du 1er actif de la famille et de donner un niveau de vie plus correct à ces familles. Problème : que faire si le chômage de masse persiste ? Que faire pour les familles à 0 actifs ?

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133133

La stratégie choisie par le gouvernement est d’introduire le RSA (revenu de solidarité active), un complément de revenu pour les bas salaires, qui est du type  :

RSA =RMI – (1-x) SAL avec x=62%.

Le revenu du ménages est alors : R=RMI+ x SAL.

Le total RMI/API coutait 6 milliards. Le RSA coûte 1,5 milliards de plus.

Comme la PPE, le RSA est censé augmenter les incitations au travail en le rendant plus rentable. Mais ce n’est pas de manque d’incitations dont souffrent les Rmistes.

Le principal avantage du RSA est sans doute de fournir un accompagnement personnalisé au titulaire. Mais la CAF et les départements en auront-ils les moyens ? Quel sera les plus et les moins ce cet accompagnement par rapport à celui du pôle emploi ?

La crise risque de rendre difficile le lancement du RSA. Les travailleurs sociaux vont se lasser de chercher à insérer des chômeurs non-qualifiés dans une situation d’absence d’offre d’emplois.

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Cette prestation améliorera la situation des travailleurs à bas salaires et rendra rentable le travail à temps partiel. Cependant  :

1) La coexistence avec les autres prestations est compliquée. La PPE est maintenue, mais n’est touchée que si elle est supérieur au RSA. C’est une allocation dégressive comme avec l’allocation-logement.

2) La prestation est familial ; l’emploi individuel

3) Les personnes au RSA sans activité resteraient pauvres (sauf revalorisation, mais celle-ci est peu probable).

4) Elle diminue le gain au passage à temps complet pour les personnes seules (de 342 à 216 euros). Celles-ci sont donc incitées à se contenter d’un travail à mi-temps.

5) Elle diminue l’incitation à prendre un emploi au SMIC à mi-temps pour une personne dont le conjoint travaille déjà au SMIC : dans le cas d’un couple avec deux enfants, le gain passe de 441 euros à 226 euros.

6) La trappe à inactivité est déplacée : pour les personnes seules, elle était entre RMI et demi-SMIC ; avec le RSA, elle passe entre demi-SMIC et SMIC. Pour les couples, elle était entre inactivité et demi-SMIC ; avec le RSA, elle passe entre 1 SMIC et 1 SMIC et demi.

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Le RSA est rend supportable une situation de travail à mi-temps alors que l’on peut penser que celle-ci n’est pas satisfaisante, sauf cas particuliers. Il incite les entreprises à développer des emplois au SMIC, flexibles, à mi-temps, dont le coût sera payé en grande partie par la collectivité (via les exonérations de cotisations sociales et le RSA).

Actuellement, un célibataire a un revenu de 832 euros en travaillant à mi-temps. On peut imaginer que les entreprises aient du mal à recruter à ce niveau. Avec le RSA, ce célibataire aurait un revenu de 958 euros, qui est plus acceptable. Mais qui reste inférieur au 1 174 euros que représente le SMIC, qui était la référence jusqu’aujourd’hui. Le risque est que les entreprises ne proposent plus que des mi-temps.

Le RSA est un progrès puisqu’il va donner 200 euros de plus à des familles de travailleurs pauvres. Pour les familles avec 2 enfants, de 0 à 1,3 fois le SMIC. Certes, elles ne sortiront pas de la pauvreté. Martin Hirsch a survendu son projet, mais c’est une amélioration du point du vue du niveau de vie et des incitations.

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136136

Revenu disponible selon revenu net d’activité –Revenu disponible selon revenu net d’activité –

Couple biactif, deux enfantsCouple biactif, deux enfants

-500

0

500

1000

1500

2000

2500

3000

0 0.25 0.5 0.75 1 1.25 1.5 1.75 2 2.25 2.5 2.75 3

Revenu net d'activité (en parts de smic)

Salaire Revenu minimum garanti (=RMI)

RSA (hors PPE et revenu minimum) Prime pour l'emploi

Prestations logement et familiales Revenu disponible

IR Revenu disponible sans RSA

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137137

CélibataireCélibataireRMI 1/2 SMIC SMIC

Salaires 0 519 1 037

RMI (hors forfait logement) 394 0 0

Prestations familiales 0 0 0

Allocation logement 287 239 58

Prime pour l'emploi 0 74 79

Revenu disponible, situation actuelle 681 832 1 174

en % du seuil de pauvreté* 74% 90% 127%

Gain / Rmi, Situation actuelle / 151 493

Gain / 0.5*SMIC, Situation actuelle / / 342

RSA à 62% (hors revenu minimum garanti) 0 200 3Gain lié au RSA { = max( RSA - PPE ; 0) } 0 126 0Revenu disponible, RSA à 62% 681 958 1 174

en % du seuil de pauvreté* 74% 104% 127%

Gain / Rmi, Situation RSA à 62% / 277 493

Gain / 0.5*SMIC, Situation RSA à 62% / / 216

Source : Fiscalité 2008, calculs de l'auteur

ce qui implique un seuil de pauvreté égal à 923 euros en 2008

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138138

Couple, 2 enfants La situation en 2008Couple, 2 enfants La situation en 2008

* Nous faisons l’hypothèse que le couple a deux enfants de moins de 14 ans ; leur seuil de pauvreté à 60 % est égal à 2 123 euros.Sources : Fiscalité 2008, calculs de l’auteur.

RMI 0.5*SMIC SMIC 1*5 SMIC 2*SMIC

Salaires 0 519 1 037 1 556 2 074

RMI (hors forfait logement) 687 169 0 0 0

Prestations familiales 121 121 121 121 121

Allocation logement 449 449 343 191 39

Prime pour l'emploi 0 80 85 159 164

Revenu disponible, situation actuelle 1 257 1 337 1 586 2 026 2 398

en % du seuil de pauvreté* 59% 63% 75% 95% 113%

Gain / RMI, Situation actuelle / 80 329 769 1 141

Gain / SMIC, Situation actuelle / / / 441 812

RSA à 62% (hors revenu minimum garanti) 0 321 300 103 0Gain lié au RSA { = max( RSA - PPE ; 0) } 0 241 215 0 0Revenu disponible, RSA à 62% 1 257 1 578 1 801 2 026 2 398

en % du seuil de pauvreté* 59% 74% 85% 95% 113%

Gain / Rmi, Situation RSA à 62% / 321 544 769 1 141

Gain / SMIC, Situation RSA à 62% / / / 226 597

Source : Fiscalité 2008, calculs de l'auteur

* Nous faisons l'hypothèse que le couple a un enfant de moins de quatorze ans; leur seuil de pauvré à 60% est égal à 2123 euros

Couple, 2 enfants

couple monoactif couple biactif

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139139

Gain à la reprise d’emploi d’un emploi au demi-SMIC Gain à la reprise d’emploi d’un emploi au demi-SMIC en euros par mois en 2008en euros par mois en 2008

Système actuel Avec le RSA

Personne seule 129 246

+1 enfant 101 247

+2 enfant 202 227

Couple : 1er emploi 80 336

+1 enfant 83 246

+2 enfant 86 246

+3 enfant 89 298

Couple : 2e emploi 360 12

+ 1 enfant 357 15

+ 2 enfant 432 87

+ 3 enfant 410 249

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140140

L’avis du HCF du 29 avril sur les perspectives de la politique familiale française 1) L’avis prend comme point de départ un scénario où les prestations

familiales et le RSA seraient fixes en pouvoir d'achat et donc diminueraient relativement aux salaires et aux revenus médians, ceci pendant 15 ans. La situation des familles se dégraderait fortement et surtout celle des familles pauvres. L’avis accepte cette baisse sans broncher et chercher à s’en accommoder.

2) En 2025, la CNAF serait excédentaire de 6,7 milliards d’euros et l’Etat lui prendrait 9,6 milliards pour financer les prestations vieillesse. Supprimons cette ponction. La CNAF dispose de 15,3 milliards. L'indexation des prestations familiales aux salaires couterait 13,9 milliards. La CNAF a de quoi payer.

3) Le texte propose des réformes arbitraires (suppression du QF, baisse de son plafond, suppression du QC, mise des AF sous conditions de ressources) pour faire supporter aux familles des classes moyennes ou aisées les ponctions sur la politique familiale qu’il faudrait accepter sans réagir. Faut-il réclamer que la Nation maintienne son effort pour la famille ou faut-il essayer de protéger les plus pauvres en commettant des injustices en défaveur de la masse des familles ?

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L’avis du HCFL’avis du HCF5 Le quotient familial est conforme au principe : « chacun doit contribuer aux

dépenses publiques selon sa capacité contributive ». A même niveau de revenu, une famille avec enfants a moins de capacités contributives qu'un couple. Peut-on remettre en cause cette logique, sans entrer dans l’arbitraire, sans surtaxer les familles ? Les réformes étudiés n’ont aucune logique, confondent impôt et prestations. On ne peut remplacer un droit des familles : celui d’être imposé comme les couples sans enfant, de même niveau de vie, par un crédit d’impôt d’un montant arbitraire : 50 euros par mois, qui serait vite érodés par la non-indexation. On ne peut verser un crédit d'impôt à une famille non-imposable. Ces 50 euros ne sont justifiés par rien. Ce serait le partage des dépouilles du quotient familial, tel qu’il a été maintenu jusqu’à ce jour.

6 Protéger les familles les plus pauvres nécessite d’introduire l’indexation du RSA et de toutes les prestations familiales sur les salaires. Une famille avec deux enfants au RSA touche actuellement 1328 euros par mois, soit 40% du revenu médian par uc. Dans 15 ans, il faudrait qu’elle touche, pour maintenir son niveau de vie relatif par rapport au revenu médian, 338 euros de plus. Le crédit d’impôt obtenu en spoliant les familles imposables ne serait que de 100 euros pour une famille avec deux enfants. D’une part, on est loin du compte ; d’autre part, on affaiblit le mouvement familial en cherchant à déshabiller Pierre pour habiller Paul.

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Quelles réformes ?Quelles réformes ?

Indexer les prestations familiales sur le SMIC, de façon à maintenir leur valeur relative.

Créer un complément familial pour les familles de bas salaires avec 1 ou 2 enfants ou réduire les non-requérants au RSA

Donner plus aux adolescents alors que la politique récente a favorisé les 0-3 ans.

Demander plus à l’IR, moins à la CSG

Accorder la gratuité totale des cantines scolaires, des activités extra-scolaires et des soins de santé pour les enfants en dessous d’un certain niveau de revenu.

Garder plus de jeunes enfants : 1,1 million (48%) sont gardés (coût 5 milliards), dont 21% en crèches ou école ; il faudrait passer à 1,6 (67%).

Etendre les allocations familiales aux familles avec 1 enfant (coût : 2,6 milliards) n’est pas prioritaire.

Les réformes ne doivent pas être financées par les familles des classes moyennes (mise sous condition de ressources des AF, suppression du QF).

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La baisse du nombre d’enfants et du nombre de familles nombreuses fait malheureusement que la branche famille ne devrait pas connaître à terme de problèmes de financement.

Il est donc possible d’améliorer la situation des familles les plus pauvres sans augmenter le poids des prestations familiales et sans toucher à celle des plus riches.

Mais les finances de cette branche ont souffert ces années récentes du développement des phénomènes de pauvreté et de bas salaires (qui augmente par exemple, le nombre de titulaires d’allocation logement) et de l’essor des dépenses liées à l’emploi ou à la solidarité. Son excédent potentiel a été utilisé pour financer des prestations nouvelles liées à l’emploi (telles que le CLCA et les PAGE).

Il serait nuisible que la société française oublie, en raison de préoccupations de court terme, que les dépenses pour les enfants sont un investissement fondamental pour l’avenir.

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BibliographieBibliographie Chauffaut D. et H. Paris, 2008 : « Politique familiale et égalité des chances :

quelques pistes pour l'avenir », Revue de droit sanitaire et social, n°7. Elbaum M., 2010 : « La politique familiale : des retours sur investissement qui

dépendent de choix économiques et sociaux », Politiques Sociales et familiales, n°102, décembre.

Fagnani J., A. Math et C. Meilland, 2009 : Comparaison Européenne des aides aux familles, Dossier d’Etude n°112, IRES, Janvier.

Godet M. et E. Sullerot, 2005 : La famille : une affaire publique, Rapport du CAE, n° 57, La Documentation française.

HCF, 2011 : Avis sur l’architecture des aides aux familles, Quelles évolutions dans les quinze prochaines années.

Landais C., Piketty Th. et E. Saez, 2011 : Pour une révolution fiscale, La République des idées, Le Seuil.

OCDE, 2011, Doing Better For Families. LFSS, 2010, PQE Famille. Sterdyniak H., 2011 : «Faut-il remettre en cause la politique familiale française

? », Revue de l’OFCE, n° 116. Thévenon O., 2009 : « Compenser le coût des enfants : quelles implications

pour les politiques familiales », Politiques Sociales et familiales, n°98, décembre.