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Le Secrétaire de Mairie Fasc. 222 Police municipale Pouvoirs de police du maire POINTS-CLÉS 1. – Par ses pouvoirs de police administrative et judiciaire, le maire concourt, à l'exercice des missions de police générale, en qualité de représentant de la commune, mais également en tant qu'agent de l'État et officier de police judiciaire (V. n° 2 à 17). 2. – Le maire est chargé, dans les limites territoriales de sa commune, de la police municipale qui, selon la formule consacrée, a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Les contours de cette notion ne peuvent être cernés que par référence aux solutions jurisprudentielles qui évoluent elles-mêmes avec l'état des mœurs (V. n° 15 à 31). 3. – Les pouvoirs qui appartiennent au maire en matière de police municipale ne font pas obstacle à l'intervention du préfet en cas de carence de l'autorité municipale ou dans certaines situations prévues par la loi (V. n° 32 à 43). 4. – Qu'elles revêtent le caractère d'actes réglementaires ou d'actes individuels, les décisions du maire dont l'application est soumise à des formalités de publicité, font l'objet d'un contrôle de légalité, dans la recherche d'un compromis entre les exigences de l'ordre et celles de la liberté (V. n° 44 à 83). 5. – Les actes de police municipale du maire engagent en principe la responsabilité civile de la commune pour tous les dommages résultant de l'exercice des attributions de police municipale, quel que soit le statut des agents qui y concourent (V. n° 84 à 92). SOMMAIRE Introduction : 1.

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Le Secrétaire de Mairie

Fasc. 222

Police municipale

Pouvoirs de police du maire

POINTS-CLÉS

1. – Par ses pouvoirs de police administrative et judiciaire, le maire concourt, à l'exercice des missions de police générale, en qualité de représentant de la commune, mais également en tant qu'agent de l'État et officier de police judiciaire (V. n° 2 à 17).

2. – Le maire est chargé, dans les limites territoriales de sa commune, de la police municipale qui, selon la formule consacrée, a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Les contours de cette notion ne peuvent être cernés que par référence aux solutions jurisprudentielles qui évoluent elles-mêmes avec l'état des mœurs (V. n° 15 à 31).

3. – Les pouvoirs qui appartiennent au maire en matière de police municipale ne font pas obstacle à l'intervention du préfet en cas de carence de l'autorité municipale ou dans certaines situations prévues par la loi (V. n° 32 à 43).

4. – Qu'elles revêtent le caractère d'actes réglementaires ou d'actes individuels, les décisions du maire dont l'application est soumise à des formalités de publicité, font l'objet d'un contrôle de légalité, dans la recherche d'un compromis entre les exigences de l'ordre et celles de la liberté (V. n° 44 à 83).

5. – Les actes de police municipale du maire engagent en principe la responsabilité civile de la commune pour tous les dommages résultant de l'exercice des attributions de police municipale, quel que soit le statut des agents qui y concourent (V. n° 84 à 92).

SOMMAIRE

Introduction : 1.

I. – Généralités : 2 à 4.

II. – Participation du maire à l'exécution des mesures de police générale : 5 à 17.

A. – Rôle du maire en tant qu'agent de l'état : 5 à 7.

B. – Maire, officier de police judiciaire : 8 à 17.

III. – Champ et domaine d'application de la police municipale : 18 à 43.

A. – Objet et contenu de la police municipale : 18 à 22.

B. – Domaine d'application de la police municipale : 23 à 25.

C. – Autorités compétentes : 26 à 43.

1° Compétences du maire en matière de police municipale : 27 à 31.

2° Compétences du préfet en matière de police municipale : 32 à 36.

3° Dispositions applicables dans les communes placées sous le régime de la police d'État : 37 à 43.

IV. – Caractère des actes de police municipale : 44 à 54.

A. – Contenu des actes : 44 à 48.

B. – Forme des actes de police municipale : 49 à 54.

V. – Application des décisions de police municipale : 55 à 67.

A. – Entrée en vigueur des décisions de police : 56 à 62.

B. – Contrôle administratif et juridictionnel des mesures de police : 63 à 67.

1° Contrôle de légalité : 64 à 65.

2° Contrôle juridictionnel : 66 à 67.

VI. – Exécution des décisions de police municipale : 68 à 83.

A. – Injonction à particulier : 69 à 72.

B. – Sanctions pénales : 73 à 79.

C. – Exécution d'office : 80 à 83.

VII. – Responsabilité à raison des activités de police : 84 à 92.

A. – Régimes de responsabilité : 84 à 87.

B. – Collectivité responsable : 88 à 92.

VIII. – Prévention de la délinquance : 93.

INDEX ALPHABÉTIQUE

Acte Caractère exécutoire, 55. Contenu, 44 à 48. Dispense de transmission, 58. Formalités substantielles, 52. Forme, 49 à 54. individuel, 50 à 51. Inscription au registre, 59. Légalité, 45. Motifs, 50. Motivation, 53. Notification des actes individuels, 56, 61. de police générale, 49. de police spéciale, 49. Publication, 60. réglementaire, 50, 51, 56. Survenance de circonstances nouvelles, 62. Transmission au préfet, 56 à 58. Adjoints au maire, 29. Alsace-Moselle (compétences des communes d'), 31. Amendes forfaitaires, 76, 77, 104. Animaux dangereux, 19. Arrêté V. Acte réglementaire Assainissement, 19. Attroupements, 92. Autorités compétentes, 26 à 30. – investies des pouvoirs de police générale, 4. Baignades et activités nautiques, 19. Boulangeries, 19. Bruits de voisinage, 19, 40, 90. Communes limitrophes V. Préfet Compétence (de police) Délégation, 29. Exercice conjoint, 30. territoriale du maire, 22. Conseillers municipaux (délégations), 29. Contenu de la police municipale, 19. Contrôle de l'activité du maire en tant qu'OPJ, 16. – juridictionnel, 66 à 67. – de légalité, 64 à 65.

Décision de police municipale V. Arrêté Définitions, 2. Demandes d'information et de renseignements d'un magistrat, 15. Édifices menaçant ruine, 19, 81. Égalité des citoyens (principe d'), 48, 86. Esthétique publique, 21. Établissement public de coopération intercommunale, 24. Excès de pouvoir V. Recours pour Exécution d'office, 81 à 83. Jurés de cours d'assises (recrutement), 14. Hauts-de-Seine (compétences des maires des communes des), 43. Huissiers (assistance à), 11 à 12. Illégalité (exception d'), 67. Information des maires, 17. Injonction à particulier, 69 à 72. Légalité des décisions de police V. Actes Limite de la notion de police municipale, 20. Mineurs (restrictions à la circulation des), 82. Ministère public devant le tribunal de police, 13. Moralité publique, 22. Maire Agent de l'État, 5 à 7. Carence, 33. Compétences de police municipale, 26 à 31. Information, 17. Obligation d'agir, 27. Officier de police judiciaire, 8 à 17. Pouvoirs dans les communes placées sous le régime de la police d'État, 41 à 43. Objet de la police municipale, 18. Obligation d'information du procureur par le maire, 10. Officier de police judiciaire V. Maire Ordre public, bon ordre, 19, 28, 33, 34, 40. Paris (cas particulier de la ville de), 42. Police administrative, 3. – d'État V. Régime de la police d'État – de la circulation et du stationnement, 19. – des baignades et des activités nautiques, 19, 23. – des campagnes ou police rurale, 19. – des funérailles et des lieux de sépultures, 19. Police générale, 4. Polices spéciales, 3, 20. Préfet (pouvoir du), 36 à 40. Communes placées sous le régime de la police d'État, 37, 40, 42, 43. Communes limitrophes, 34. Carence des autorités municipales, 33.

Mesures dont le champ d'application excède le territoire d'une commune, 35. Pouvoir de substitution, 32. Réquisition, 36. Prévention de la délinquance, 93. Privilège du préalable, 55. Proportionnalité (principe de), 47. Propriétés privées, 25. Publicité interdite, 81. Rassemblements, 92. Recours pour excès de pouvoir, 66. Régime de la police d'État, 37 à 43. Responsabilité de la commune, 88. – de l'État, 89, 92. – de l'État en cas d'attroupements ou de rassemblements, 92. – en cas de voie de fait, 87. – pour atteinte au principe de l'égalité devant les charges publiques, 86. – pour faute, 84. – sans faute, 85. Salubrité publique, 19. Sanctions pénales, 73 à 79. Sécurité publique, 19. Seine-Saint-Denis (compétences des maires des communes de), 43. Substitution V. Préfet Sursis à exécution, 65. Tranquillité publique, 19, 25, 28, 34, 40. Transaction pénale, 78. Transmission des actes au préfet V. Actes Val-de-Marne (compétences des maires des communes du), 43. Voie de fait, 83, 87. Voies privées, 25.

Introduction

1. – Textes de référence :

• Code général des collectivités territoriales : Livre II : Titre 1er : police, chapitre Ier : dispositions générales (art. L. 2211-1 à L. 2211-5) ;

o – chapitre II : police municipale (art. L. 2212-1 à L. 2212-10) ; o – chapitre III : pouvoirs de police portant sur des objets particuliers : o – section 1 : police de la circulation et du stationnement (art. L. 2213-1 à

L. 2213-6) ; o – section 2 : police des funérailles et des lieux de sépulture (art. L. 2213-7 à

L. 2213-15) ; o – section 3 : police dans les campagnes (art. L. 2213-16 à L. 2213-21) ; o – section 4 : autres polices (art. L. 2213-23 à L. 2213-31) ;

o – chapitre IV : dispositions applicables dans les communes ou la police est étatisée (art. L. 2214-1 à L. 2214-4) ;

o – chapitre V : pouvoirs du représentant de l'État dans le département (art. L. 2215-1 à L. 2215-8) ;

o – chapitre VI : responsabilité (art. L. 2216-1 à L. 2216-3) ; o – Attributions exercées au nom de l'État (art. L. 2122-27 à L. 2122-34) ; o – Transmission par voie électronique des actes soumis au contrôle de légalité

(art. R. 2131-1 à R. 2131-4) ; • Code pénal : sanction pénale des arrêtés (art. R. 610-5). • Principaux textes législatifs :

o – loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et a l'amélioration des relations entre l'administration et le public (JO 12 juil. 1979, p. 1711) modifiée notamment par loi n° 86-76 du 17 janvier 1986 (JO 18 janv. 1986, p. 888) ;

o – loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions (JO 3 mars 1982, p. 730) ;

o – loi n° 99-291 du 15 avril 1999 relative aux polices municipales (JO 16 avr. 1999, p. 5607) ;

o – loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne (JO 16 nov. 2001, p. 18215) ;

o – loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité (JO 28 févr. 2002 p. 3821) ;

o – loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (JO 30 août 2002, p. 14398) ;

o – loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure (JO 19 mars 2003, p. 4761) ;

o – loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (JO 17 août 2004, p. 14545) ;

o – loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance (JO 7 mars 2007, p. 4297).

Bibliographie. – FM Litec, Le Secrétaire de mairie, Fasc. 204-10, 221-50, 222-5 et 222-10. – FM Litec, Formulaire des Maires, Fasc. 525

I. – Généralités

2. – Définitions. – La police, au sens large, recouvre communément deux acceptions : c'est l'ensemble des règles imposées aux citoyens en vue de faire régner l'ordre et la sécurité publiques, mais c'est aussi la force publique chargée de faire respecter ces règles.

Traditionnellement, on distingue la police administrative dont le rôle est essentiellement préventif et la police judiciaire qui est d'essence répressive, bien que les fonctionnaires chargés de l'une et de l'autre soient souvent les mêmes.

Cette distinction a une particulière importance en raison notamment des conséquences sur la nature du contrôle exercé sur l'autorité détentrice du pouvoir de police, sur la compétence contentieuse ou sur le régime de responsabilité.

3. – Police administrative. – La police administrative a pour objet de prévenir les atteintes à l'ordre public par des mesures propres à assurer son respect. Elle se décompose elle-même entre :

– la police générale : pouvoirs confiés, dans une circonscription territoriale donnée, à une autorité administrative qui peut les exercer à l'égard de la généralité des activités des citoyens pour assurer l'ordre public ;

– les polices spéciales : pouvoirs confiés à des autorités déterminées par des textes spécifiques et concernant des domaines particuliers d'activités ou visant des buts autres que l'ordre, la sécurité, la tranquillité ou la salubrité publiques (exemple : police des étrangers).

4. – Autorités investies des pouvoirs de police générale. – Ce sont :

– dans le cadre national, le Premier ministre, en tant que détenteur du pouvoir réglementaire gouvernemental (CE, 8 août 1919, n° 56377) et les ministres dans leurs domaines respectifs ;

– dans le cadre départemental, le préfet (L. n° 82-213, 2 mars 1982, art. 34) ; – dans le cadre communal « Le maire est chargé, sous le contrôle administratif du

représentant de l'État dans le département, de la police municipale, de la police rurale et de l'exécution des actes de l'État qui y sont relatifs » (CGCT, art. L. 2211-1). S'il est évident que le maire dispose d'un pouvoir de police décentralisé, la police municipale, en tant qu'agent de l'État il est également au service des autorités de police de niveau supérieur lorsque les évènements qui se produisent sur le territoire de sa commune ne relèvent pas de sa compétence propre (police générale).

La police rurale ou police des campagnes n'est pas une police spéciale ; elle ne constitue qu'un aspect particulier de la police municipale et son exercice obéit aux mêmes principes. Toutefois, en raison des domaines auxquels elle s'applique, elle fait l'objet d'un fascicule propre (V. Fasc. 222-10).

II. – Participation du maire à l'exécution des mesures de police générale A. – Rôle du maire en tant qu'agent de l'état

5. – Principes. – Le maire est chargé sous l'autorité du représentant de l'État dans le département :

– 1° De la publication des lois et règlements ; – 2° De l'exécution des mesures de sûreté générale ; – 3° Des fonctions spéciales qui lui sont attribuées par les lois (CGCT, art. L. 2122-

27).

Dans ce cas, le maire n'a pas de pouvoirs propres ; il est un agent de l'État placé sous l'autorité directe du préfet qui représente le Gouvernement dans le département. À noter que, dans la pratique, le lien avec l'État n'est pas toujours évident.

6. – Domaines concernés. – Les attributions que le maire exerce au nom de l'État sont très nombreuses (CGCT, art. L. 2122-28 à L. 2122-32). On peut citer les matières suivantes : état-civil, élections, aide sociale, légalisations de signatures, recrutement de l'armée, enseignement. Mais aussi : en vertu des « fonctions spéciales » qui lui sont conférées par la loi : inscription d'un enfant dans une école communale (CAA Bordeaux, 5 juill. 1999, n° 96BX01428), ou encore en cas d'infraction au Code de l'urbanisme (CE, 10 mai 1996, n° 133195 et n° 133352).

7. – Exercice des attributions du maire au nom de l'État. – L'exercice des attributions du maire et des adjoints au nom de l'État se distingue de l'exercice de celles qui lui sont dévolues en tant que premier magistrat de la commune :

– le maire et les officiers municipaux sont placés sous l'autorité de l'État (préfet, Parquet) ;

– en cas de faute, leur mauvais exercice est susceptible d'engager la responsabilité de l'État, c'est-à-dire du ministère au nom duquel ils agissent (CE, 19 janv. 1951, préc. supra n° 6) ;

– en cas de carence ou de refus d'exécution ; ils peuvent être sanctionnés et leur attitude peut alors engager la responsabilité de la commune (CE, 14 déc. 1962, n° 50114) ; dans ce cas le préfet peut se substituer d'office au maire défaillant (CGCT, art. L. 2122-34) ;

– le contentieux n'est pas toujours administratif ; il peut être judiciaire (état-civil, police judiciaire, voie de fait).

B. – Maire, officier de police judiciaire

8. – Principes. – « La police judiciaire est chargée de constater les infractions à la loi pénale, d'en rassembler les preuves et d'en rechercher les auteurs tant qu'une information n'est pas ouverte. Lorsqu'une information est ouverte, elle exécute les délégations des juridictions d'instruction et défère à leurs réquisitions » (CPP, art. 14). Elle est exercée, sous la direction du procureur de la République, par les officiers, fonctionnaires et agents désignés (CPP, art. 12).

L'article 16 du Code de procédure pénale, dont les dispositions sont reprises dans l'article L. 2122-31 du Code général des collectivités territoriales, confère aux maires et à leurs adjoints la qualité d'officier de police judiciaire sans que l'exercice effectif des prérogatives attachées à celle-ci soit subordonné à une habilitation individuelle du procureur général territorialement compétent, comme c'est le cas pour les autres agents auxquels est attachée cette qualité.

9. – Portée et limites de la qualité d'officier de police judiciaire (OPJ). – La qualité d'OPJ donne au maire (et aux adjoints) des responsabilités importantes. Cependant, on s'est beaucoup interrogé (et on continue de s'interroger) sur sa portée pratique, car les pouvoirs qui résultent de la qualité d'OPJ ne sauraient s'exercer pleinement en l'absence de toute formation spécialisée, comme il en existe pour les autres officiers et agents de police judiciaire. L'instruction générale prise pour l'application du Code de procédure pénale invite d'ailleurs, en son article 45, les procureurs de la République à recourir pour l'accomplissement de missions de police judiciaire, plutôt qu'aux maires, à d'autres officiers de police judiciaire

spécialisés en la matière et qui se consacrent exclusivement à cette tâche. En effet, certaines de ces missions peuvent être pour les élus une cause de difficulté avec leurs administrés (Rép. min. n° 39640 : JOAN Q, 18 mai 1992, p. 2240).

À cet égard, il est intéressant de se reporter à la réponse du garde des Sceaux à une question d'un parlementaire qui lui demandait si les maires devaient être encouragés à utiliser leurs prérogatives d'officier de police judiciaire, pour dresser procès-verbal en cas d'infraction au Code de la route ou encore au règlement sanitaire : « [...] La qualité d'officier de police judiciaire que les maires et leurs adjoints tiennent de la loi leur donne compétence pour constater toute infraction à la loi pénale, en rassembler les preuves, recevoir les plaintes ou prêter assistance à toute réquisition judiciaire, même si, en pratique, ces pouvoirs ne sont pas effectivement exercés. Les maires peuvent donc constater par procès-verbaux, dans les limites territoriales de leur commune, les contraventions relatives à l'abandon d'ordures, déchets, matériaux et autres objets ainsi que les contraventions aux dispositions du code de la route, notamment celles relatives à la réglementation au stationnement, à l'éclairage et à la signalisation et aux nuisances sonores des véhicules. Ils peuvent aussi constater les contraventions aux arrêtés municipaux ayant pour objet d'édicter des dispositions complémentaires au règlement sanitaire départemental, en vue d'assurer la protection de la santé publique dans la commune [...]. Il convient toutefois de rappeler que dans ce cas le maire est alors placé sous l'autorité du procureur de la République, qui assure la direction de la police judiciaire » (Rép. min. n° 14240 : JOAN Q, 9 juin 2003, p. 4578).

En conclusion, le maire dispose juridiquement de toutes prérogatives d'OPJ, mais l'usage qui est fait de cette qualité apparaît limité à des domaines bien précis de la vie locale. Il se trouve donc dans une situation très différente de celle des autres OPJ, la jurisprudence lui déniant l'exercice de certaines d'entre elles, comme le droit de se délivrer un port d'armes. Cependant, aucune modification de cette situation qui perdure n'a jamais été envisagée.

10. – Obligation d'information du procureur de la République par le maire. – Si la question de l'exercice des compétences résultant de la qualité reste posée, en revanche, l'obligation faite au maire d'informer le procureur de la République ne souffre aucun doute. Dans le cas où une infraction est portée à sa connaissance par plainte ou dénonciation, le maire est tenu d'en informer sans délai le procureur de la République. S'il constate une infraction, il a l'obligation d'en faire dresser procès-verbal et de le transmettre sans délai à ce magistrat (CPP, art. 40).

De son côté, le procureur de la République doit tenir informé le maire de la suite donnée (V. infra n° 17).

En outre, la loi prévoit un certain nombre de situations dans lesquelles le maire peut être amené à apporter son concours à la justice.

11. – Assistance à huissier pour la notification des décisions de juridictions pénales. – La signification en mairie des jugements des juridictions civiles n'est plus prévue ; en revanche elle est maintenue pour les jugements des juridictions pénales. Ainsi que le stipule l'article 558 du Code de procédure pénale, si l'huissier ne trouve personne au domicile de celui que l'exploit concerne et que le domicile indiqué est bien celui de l'intéressé, l'huissier mentionne dans l'exploit ses diligences et constatations, puis il remet une copie de cet exploit au maire ou, à défaut, à un adjoint ou à un conseiller municipal délégué, ou au secrétaire de mairie. Il informe sans délai de cette remise l'intéressé, par lettre recommandée avec avis de

réception, en lui faisant connaître qu'il doit retirer immédiatement la copie de l'exploit signifié à la mairie indiquée.

12. – Assistance à huissier pour l'exécution des jugements. – En l'absence de l'occupant du local ou si ce dernier en refuse l'accès, l'huissier de justice chargé de l'exécution d'un jugement ne peut y pénétrer qu'en présence soit d'une autorité de police ou de gendarmerie, soit du maire de la commune (d'un conseiller municipal ou d'un fonctionnaire municipal délégué par le maire) requis à cette fin par ses soins. La participation des autorités municipales donne droit à une indemnité (V. Fasc. 239).

13. – Représentation du ministère public devant le tribunal de police. – L'article 46 du Code de procédure pénale prévoit que le juge du tribunal d'instance peut, à titre exceptionnel et en cas de nécessité absolue pour la tenue de l'audience, appeler, pour exercer les fonctions normalement dévolues au commissaire de police ou à un officier de police du ministère public, le maire du lieu où siège la juridiction de proximité ou un de ses adjoints. De telles situations restent assez théoriques, du moins en France métropolitaine.

14. – Recrutement des jurés de cours d'assises. – En revanche, le concours apporté par le maire à la désignation des jurés de cours d'assises constitue une mission bien réelle dont l'exercice se répète annuellement (V. Fasc. 210-60).

15. – Demandes d'éléments d'information et de renseignements. – Le Code de procédure pénale permet également au procureur de la République (CPP, art. 41) et au juge d'instruction (CPP, art. 81) de demander au maire en sa qualité d'OPJ de vérifier la situation matérielle, familiale et sociale d'une personne faisant l'objet d'une enquête ou d'une information et de l'informer sur les mesures propres à favoriser l'insertion sociale de l'intéressé. Tel est le cas surtout des petites communes rurales où ne résident pas d'autres officiers de police judiciaire, et où les maires sont à même d'apporter une aide efficace à l'autorité judiciaire en raison de leur connaissance personnelle des habitants de leur commune.

Enfin, en application de l article 21 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique (JO 13 juill. 1991, p. 9170), le maire a l'obligation de communiquer au bureau d'aide juridictionnelle tous renseignements permettant de vérifier que le demandeur satisfait aux conditions exigées pour bénéficier de l'aide.

16. – Contrôle de l'activité du maire en tant qu'OPJ. – En tant qu'OPJ, le maire et placé sous le contrôle du procureur général et de la chambre de l'instruction de la cour d'appel. En cas de fautes commises dans les fonctions d'OPJ, le maire ou ses adjoints peuvent se voir adresser des observations par la chambre de l'instruction, mais, n'étant pas des fonctionnaires, au sens de l'article 224 du Code de procédure pénale, ils ne peuvent être exclus par cette juridiction des fonctions d'OPJ.

17. – Information du maire par les services de police de gendarmerie et le procureur de la République. – Le maire est informé :

– sans délai, par les responsables locaux de la police ou de la gendarmerie nationales des infractions commises sur le territoire de sa commune causant un trouble à l'ordre public ;

– à sa demande, par le procureur de la République, des suites données aux infractions qu'il a dénoncées ou dont il a été avisé par les services de police ou de gendarmerie en

raison du trouble causé à l'ordre public local (classements sans suite, poursuites ou mesures alternatives aux poursuites, jugements devenus définitifs ou appels : CGCT, art. L. 2211-3 mod. par L. n° 2007-297, art. 1, 2° préc. supra n° 1). Dans le cas précis d'un accident de la circulation se produisant sur le territoire d'une commune, l'information du maire sera liée à différents facteurs : la gravité de l'événement, ses conséquences éventuelles, les circonstances dans lesquelles cet accident est survenu et les répercussions sur l'ordre public (Rép. min. n° 01738 : JO Sénat Q, 6 sept. 2007, p. 1563).

Ces informations sont transmises dans le respect de l'article 11 du Code de procédure pénale.

Ces nouvelles dispositions s'inscrivent dans le cadre du renforcement de la prévention de la délinquance dans la commune.

III. – Champ et domaine d'application de la police municipale A. – Objet et contenu de la police municipale

18. – Objet de la police municipale. – « La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques [...] » (CGCT, art. L. 2212-2).

19. – Contenu de la police municipale. – Le contenu de la police municipale est illustré par les paragraphes 1° à 8° de l'article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales qu'on peut regrouper autour des quatre domaines principaux :

– la sécurité publique : la commodité de passage sur les voies publiques et leurs dépendances : nettoiement, éclairage, enlèvements des encombrements, interdiction des dépôts, la réparation ou la démolition des édifices menaçant ruine ; s'y rattache la police de la circulation et du stationnement sur les routes nationales, départementales (à l'intérieur des agglomérations) et sur les voies communales (CGCT, art. L. 2213-1) ;

– la tranquillité publique : répression des rixes et disputes, du tumulte dans les lieux d'assemblée publique, des attroupements, bruits y compris les bruits de voisinage, rassemblements nocturnes et tous actes de nature à troubler le repos des habitants ;

– le maintien du bon ordre sur les lieux de grands rassemblements : foires, marchés, cérémonies et réjouissances publiques, spectacles, jeux, cafés, églises et autres lieux publics ;

– la salubrité publique : salubrité des comestibles destinés à la vente, assistance et secours en cas d'accidents, fléaux calamiteux tels que incendies, inondations, épidémies, épizooties, éboulements, avalanches et leur prévention, mesures conservatoires à l'égard des personnes atteintes de troubles mentaux.

S'y ajoutent des mesures inclassables :

– la divagation des animaux dangereux ; – l'inspection de la fidélité du débit des denrées qui se vendent au poids ou à la

mesure ;

– le soin de réglementer la fermeture annuelle des boulangeries.

Cette énumération n'a aucunement un caractère limitatif ou exhaustif ; en atteste l'emploi dans la loi de formules telles que « tous actes de nature à compromettre [...] » ou « autres lieux publics [...] ».

Elle se trouve d'ailleurs complétée par les dispositions des articles L. 2213-1 à L. 2213-31 du Code général des collectivités territoriales relatives aux « pouvoirs de police du maire portant sur des objets particuliers » qui ne relèvent pas de ce fascicule :

– la police de la circulation routière déjà citée (V. Fasc. 221-50) ; – la police des funérailles et des lieux de sépultures (V. Fasc. 116-20, 124-21, 135-15,

208-30 et 222-20) ; – la police des campagnes ou police rurale (V. Fasc. 222-10) ; – les polices « portant sur des objets particuliers » :

o • police des ports maritimes communaux (CGCT, art. L. 2213-22), o • police des baignades et des activités nautiques (CGCT, art. L. 2213-23), o • les édifices menaçant ruine (CGCT, art. L. 2213-24), o • la surveillance de l'entretien des terrains non bâtis à l'intérieur des

agglomérations (CGCT, art. L. 2213-25), o • le ramonage annuel des cheminées et des fourneaux (CGCT, art. L. 2213-26), o • la prescription aux propriétaires de clôturer les puits et excavations présentant

un danger pour la sécurité (CGCT, art. L. 2213-27), o • la numérotation des rues (CGCT, art. L. 2213-28), o • l'assainissement des cours d'eau et des eaux stagnantes (CGCT, art. L. 2213-

29 à L. 2213-31) ; – la protection de l'environnement : elle comporte de nombreuses applications et fait

obligation au maire d'intervenir vis-à-vis des décharges sauvages, des épaves automobiles, des véhicules en stationnement abusif, des huiles usagées, des graffitis et des « tags », des installations classées, etc.

20. – Champ d'application de la police municipale – Limites. – Il résulte bien évidemment de ce qui précède que toute question expressément mentionnée par ces dispositions entre dans le champ d'application de la police municipale. Mais le maire peut également exercer ses pouvoirs de police à l'égard de toute autre question, dès lors qu'elle met en cause l'ordre public municipal et que la matière n'est pas régie par une police spéciale. Dans ce dernier cas, il peut seulement prendre des mesures plus restrictives que celles arrêtées par l'autorité compétente, à condition que « des circonstances locales » justifient son intervention (CE, 18 déc. 1959, n° 36835). L'article L. 2212-4 du Code général des collectivités territoriales dispose que « En cas de danger grave ou imminent, tel que les accidents naturels prévus au 5° de l'article L. 2212-2 [V. supra n° 19, al. 4], le maire prescrit l'exécution des mesures de sûreté exigées par les circonstances. Il informe d'urgence le représentant de l'État dans le département et lui fait connaître les mesures qu'il a prescrites ». Les contours de cette notion ne peuvent être cernés que par référence aux solutions jurisprudentielles, qui évoluent elles-mêmes avec l'état des mœurs, et comportent en conséquence une certaine imprécision.

Négativement, il est bien établi qu'une mesure de police est entachée de détournement de pouvoir lorsqu'elle a pour objectif déterminant de favoriser ou de brimer des intérêts privés, ou même de protéger le seul intérêt financier communal.

Positivement, les principales difficultés ont trait à la prise en compte de préoccupations d'ordre esthétique ou moral.

21. – Esthétique publique. – La jurisprudence actuelle paraît exclure l'utilisation des pouvoirs de police municipale à cette fin. Ainsi, le Conseil d'État a jugé illégal un arrêté municipal réglementant le type de monuments que les titulaires de concessions funéraires peuvent faire placer sur les tombes, la conception esthétique de l'ensemble de l'ouvrage n'ayant pas pour objet direct le maintien du bon ordre et de la décence dans le cimetière (CE, sect., 18 févr. 1972, n° 77277).

En revanche, est jugé légal un arrêté municipal interdisant toute publicité sur certains types d'emplacements autres que ceux énumérés par la loi elle-même, afin d'assurer « la protection du cadre de vie » en milieu urbain, qui comporte notamment celle de la santé publique et de l'esthétique (CE, 7 oct. 1991, n° 88383 et n° 88384).

22. – Moralité publique. – Le principe demeure que l'ordre moral ne rentre pas, en tant que tel, dans l'ordre public municipal qui, selon l'expression du doyen Hauriou, doit être entendu comme « matériel et extérieur ». La jurisprudence n'admet exceptionnellement la prise en considération de la morale ou de la décence que lorsque des faits ou agissements sont de nature à provoquer des troubles sérieux en raison des réactions d'une partie de la population (CE, 18 déc. 1959, préc. supra n° 20).

Le Conseil d'État a toutefois estimé que porte atteinte à la dignité de la personne humaine un spectacle de « lancer de nains » proposé dans une discothèque. Le maire peut, même en l'absence de circonstances locales particulières, interdire une telle attraction (CE, ass., 27 oct. 1995, n° 136727).

De même, le juge administratif a estimé légale l'interdiction par un maire d'installation d'un « sex-shop » qui présenterait, en raison des circonstances locales, des dangers particuliers pour la jeunesse ou pour la tranquillité de la population ; et bien qu'en l'espèce les établissements fréquentés par la jeunesse se situaient à plus de cent mètres du commerce projeté et ne tombaient donc pas à l'époque des faits, sous le coup de la loi du 30 juillet 1987, ni de l'incrimination prévue par l'article 227-24 du Code pénal (CE, 8 juin 2005, n° 281084).

B. – Domaine d'application de la police municipale

23. – Compétence territoriale – Principes. – La compétence de police du maire est évidemment limitée au territoire de la commune ; les mesures prises à ce titre par le maire sont sans effet au-delà de ces limites. Dans le cas des communes riveraines de la mer, les pouvoirs de police municipale s'exercent sur le rivage de la mer jusqu'à la limite des eaux (CGCT, art. L. 2212-3).

Par ailleurs, le maire exerce la police des baignades et des activités nautiques pratiquées à partir du rivage, avec des engins non immatriculés, jusqu'à une distance fixée à 300 mètres à compter de la limite des eaux (CGCT, art. L. 2213-23). Un arrêté du 27 mars 1991 (JO 28 avr. 1991) a fixé les conditions de balisage et de signalisation de la bande littorale maritime des 300 mètres.

Lorsque la mesure de police concerne nécessairement deux communes limitrophes (par exemple police de la circulation sur une voie communale dont l'axe délimite leurs territoires respectifs), la réglementation doit être édictée sous forme soit d'arrêtés concordants pris par chacun des maires, soit d'un arrêté unique signé par les deux maires (CE, 9 mai 1980, n° 15533). À défaut, le préfet peut se substituer aux maires intéressés pour exercer les pouvoirs de police (V. infra n° 33).

24. – Communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale. – L'article 163 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 (préc. supra n° 1) a élargi les compétences des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), notamment en matière de police municipale. Le président d'un établissement public de coopération intercommunale peut se voir attribuer certains pouvoirs de police du maire d'une (ou de plusieurs) commune(s) membre(s). Mais le maire reste seul responsable du pouvoir de police générale dans sa commune.

C'est ainsi que les présidents d'EPCI peuvent, par dérogation, recevoir des pouvoirs de police transférés par les maires, dans un nombre de cas limités, à savoir :

– la voirie ; – l'assainissement ; – la collecte et l'élimination des déchets ménagers ; – la réalisation d'aires d'accueil ou de terrains de passage des gens du voyage ; – la sécurité des manifestations culturelles et sportives organisées dans des

établissements communautaires.

Dans chacun de ces domaines, le transfert est décidé par arrêté du représentant de l'État dans le département, sur proposition du (ou des) maire(s) intéressé(s), après accord de tous les maires des communes membres et du président de l'EPCI. Il y est mis fin dans les mêmes conditions. Dans tous ces cas, les arrêtés de police sont pris conjointement par le président de l'EPCI et les maires des communes concernées. Par dérogation, lorsque l'établissement public de coopération intercommunale est une communauté urbaine, le transfert est décidé par arrêté du représentants de l'État, après accord du président de la communauté urbaine et des deux tiers au moins des maires de communes membres dont la population représente plus de la moitié de la population totale, ou de la moitié des maires de communes membres dont la population représente plus des deux tiers de la population totale.

Dans les cas précédents, les arrêtés de police sont pris conjointement par le président de l'établissement public de coopération intercommunale et le ou les maires des communes concernées (CGCT, art. 5211-9-2 nouveau).

Attention Répondant à la question d'un parlementaire qui souhaitait se voir préciser si la gestion et l'organisation de la police municipale pouvaient être transférées à un ECPI, le ministre de l'intérieur a répondu par la négative, en soulignant que les présidents d'EPCI ne sont pas dotés de pouvoir de police générale et n'ont pas la qualification d'officier de police judiciaire (Rép. min. n° 18858 : JO Sénat Q, 28 juill. 2005, p. 2012).

25. – Pouvoir de police et propriété privée. – Les pouvoirs de police du maire s'exercent d'abord sur l'ensemble des biens publics et privés de la commune ; mais son domaine d'application ne s'arrête pas là. Si les pouvoirs du maire sont plus étendus lorsqu'ils s'exercent

sur une propriété publique, ni la propriété privée d'un bien, ni même le caractère purement privé de son utilisation ne sont, par eux-mêmes, des obstacles absolus à l'intervention à leur égard d'une mesure de police.

D'une part, les biens privés ouverts au public peuvent faire l'objet de mesures de police. C'est particulièrement le cas des voies privées qui par nature ou par consentement de leur propriétaire sont ouvertes à la circulation (CE, 15 juin 1998, n° 171786) ou encore des parcs de stationnement ouverts au public (V. Fasc. 231-10). Toutefois, le propriétaire d'une voie privée est en droit d'en interdire à tout moment l'usage au public ; le maire ne peut, sans excéder ses pouvoirs inviter le propriétaire à rouvrir le chemin à la circulation publique (CE, 15 nov. 1975, n° 93815).

D'autre part, le maire peut intervenir, dans certaines hypothèses, à l'égard de biens privés non ouverts au public. À condition que les mesures prises respectent le droit de propriété, le maire peut notamment dans le but de sauvegarder la tranquillité publique, réglementer l'emploi d'instruments bruyants (CE, 2 juill. 1997, n° 161369). En l'espèce, en interdisant l'usage en plein air d'outils à moteur tels que des tondeuses à gazon, dans l'agglomération et dans un périmètre de 100 mètres autour de celle-ci, les dimanches et jours fériés pendant une période s'étendant du 1er mai au 31 octobre. Par ailleurs, en cas de "danger grave ou imminent", la loi autorise, sous certaines conditions, le maire à faire exécuter d'office des travaux sur une propriété privée, ce qui suppose une pénétration dans ladite propriété (CE, 4 déc. 1974, n° 90473).

Attention Des précisions ont été apportées à ce sujet par le ministre de l'intérieur, en réponse à un parlementaire, en ces termes : « il [le maire] peut être amené, dans le cas de péril grave et imminent, à intervenir sur des propriétés privées pour faire cesser une menace pour la sécurité publique et ce, si nécessaire, en l'absence du consentement du propriétaire. Cependant, il convient de noter que cette intervention peut avoir des conséquences sur la responsabilité de la commune, compte tenu du principe de l'inviolabilité du domicile privé [...]. Il appartient donc, dans chaque cas d'espèce, au juge saisi à ce sujet, de se prononcer sur l'adéquation entre les conditions de réalisation de l'intervention du maire et la nature du risque considéré, pour déterminer si la responsabilité de la commune est ou non engagée » (Rép. min. n° 47211 : JOAN Q, 14 déc. 2004, p. 10056). C. – Autorités compétentes

26. – Principe. – La police municipale constitue, par excellence, un pouvoir propre du maire. Toutefois, le préfet détient également des pouvoirs se rattachant à la police municipale, notamment dans le domaine de l'ordre public. Enfin, les pouvoirs de ces deux autorités obéissent à un régime particulier dans les communes où la police est étatisée, ainsi que dans la ville de Paris et les communes des départements périphériques.

1° Compétences du maire en matière de police municipale

27. – Caractère personnel des pouvoirs de police du maire. – Les articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales confient au maire, de façon exclusive, les pouvoirs de police municipale. Le maire ne peut y renoncer. Il en résulte qu'il ne peut pas

les déléguer au conseil municipal : Toute délibération du conseil municipal portant sur la police municipale est, en vertu d'une jurisprudence constante, entachée d'incompétence (sauf si elle s'analyse comme un simple vœu, ou si l'intervention du conseil municipal est prévue par un texte particulier (exemple : destruction des animaux nuisibles, CGCT, art. L. 2122-21, 9°).

À plus forte raison, l'exercice de ces pouvoirs ne saurait être confié, par le biais de conventions, à des personnes privées.

Attention En réponse à une question d'un parlementaire, le ministre de l'intérieur confirme ce principe. Les pouvoirs de police du maire et notamment la surveillance de la voie publique n'entrent pas dans le champ contractuel et par conséquent ne peuvent être délégués à une personne privée. Il s'agit d'une jurisprudence constante du Conseil d'État. Ainsi, lorsque la voirie, à l'intérieur d'une zone industrielle, relève du domaine public communal, la commune ne peut donc pas déléguer à une personne privée la surveillance de ces voies (Rép. min. n° 383 : JOAN Q, 3 juin 2008, p. 4687).

28. – Obligation d'agir. – Les pouvoirs conférés au maire en matière de police ne constituent pas une simple faculté d'agir, mais une véritable obligation : lorsque l'ordre public est menacé, l'autorité de police est tenue de prendre les mesures nécessaires pour faire face à la situation. Son refus est constitutif d'une illégalité, du moins quand le péril ou le trouble en cause présentent un certain degré de gravité.

29. – Délégation des compétences de police. – La compétence personnelle du maire en matière de police ne fait pas obstacle à une délégation à un adjoint, ou même, en cas d'absence ou d'empêchement de celui-ci, à un conseiller municipal. Mais ces délégations s'exercent sous la surveillance et la responsabilité du maire et peuvent être rapportées à tout moment (CGCT, art. L. 2122-18).

30. – Exercice conjoint de certaines compétences de police. – Le pouvoir de police du maire peut être exercé conjointement avec une autre autorité dans les cas prévus par la loi :

– en matière de police de la circulation, des arrêtés conjoints peuvent être pris par les maires de communes limitrophes d'une route communale dont l'axe délimite la frontière entre les deux communes ; ou encore par le préfet et le maire pour la détermination de la priorité de passage aux intersections de routes nationales et communales ; ou enfin par le président du conseil général et le maire, s'agissant de l'intersection d'une route départementale avec une voie communale (V. Fasc. 221-50) ;

– dans le cas de compétences transférées à un EPCI, les arrêtés de police dans les domaines délégués sont pris conjointement par le président de l'établissement et le ou les maires des communes concernées (V. supra n° 24).

31. – Cas particulier des communes des départements d'Alsace - Moselle. – Sur un plan général, en dépit d'une formulation différente et non parfois dénuée de saveur, les missions de police générale dévolues au maire dans les communes des départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin ne diffèrent guère du droit commun : « Les fonctions propres au maire sont de faire jouir les habitants des avantages d'une bonne police, notamment de la propreté, de la salubrité, de la sûreté et de la tranquillité dans les rues, lieux et édifices

publics » (CGCT, art. L. 2542-3 à L. 2542-13). Avec toutefois, quelques particularités, dont l'obligation de recruter au moins un garde champêtre par commune. (CGCT, art. L. 2542-9).

S'agissant du pouvoir du représentant de l'État, le ministre de l'Intérieur a précisé, en réponse à une question d'un parlementaire, que, d'une manière générale, dans les départements d'Alsace - Moselle, les législations prévoyant expressément la substitution du préfet au maire, en cas de défaillance de celui-ci, sont applicables indépendamment du droit local actuellement codifié dans le Code général des collectivités territoriales (Rép. min. n° 446 : JO Sénat Q, 18 nov. 2002, p. 4343).

2° Compétences du préfet en matière de police municipale

32. – Principe. – Pouvoir de substitution. – Les pouvoirs qui appartiennent au maire en matière de police municipale ne font pas obstacle à l'intervention du préfet. En effet, la sécurité et notamment le maintien de l'ordre public constituant le premier devoir de la collectivité envers les citoyens, l'État ne peut rester indifférent à ses atteintes que les autorités locales pourraient y laisser porter sans réagir. C'est pourquoi l'article L. 2215-1 du Code général des collectivités territoriales autorise le préfet à agir en matière de police municipale en se substituant au maire dans des circonstances précises.

33. – Carence des autorités municipales. – Le représentant de l'État dans le département peut prendre, pour toutes les communes du département ou plusieurs d'entre elles, et dans tous les cas où il n'y aurait pas été pourvu par les autorités municipales, toutes mesures relatives au maintien de la salubrité, de la sûreté et de la tranquillité publiques.

Ce droit ne peut être exercé par le représentant de l'État dans le département à l'égard d'une seule commune qu'après une mise en demeure au maire restée sans résultat.

34. – Maintien de l'ordre menacé dans des communes limitrophes. – Lorsque l'ordre est menacé dans des communes limitrophes, le préfet peut se substituer aux maires, par arrêté motivé, pour exercer les pouvoirs qu'ils détiennent en matière :

– d'atteintes à la tranquillité publique ; – de maintien du bon ordre dans les endroits où il se fait de grands rassemblements ; – de police des baignades et des activités nautiques.

Dans les cas précités, le préfet peu agir sans mise en demeure préalable, mais seulement en cas d'absence ou d'insuffisance des mesures prises par les maires des communes en cause (CE, 13 mars 1968, n° 72053).

35. – Mesures dont le champ d'application excède le territoire d'une commune. – Le représentant de l'État dans le département est seul compétent pour prendre les mesures relatives à l'ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, dont le champ d'application excède le territoire d'une commune.

36. – Pouvoir de réquisition du préfet. – En cas d'urgence, lorsque l'atteinte constatée ou prévisible au bon ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publiques l'exige et que les moyens dont dispose le préfet ne permettent plus de poursuivre les objectifs pour lesquels il détient des pouvoirs de police, celui-ci peut, par arrêté motivé, pour toutes les communes du département ou plusieurs ou une seule d'entre elles, réquisitionner tout bien ou service,

requérir toute personne nécessaire au fonctionnement de ce service ou à l'usage de ce bien et prescrire toute mesure utile jusqu'à ce que l'atteinte à l'ordre public ait pris fin ou que les conditions de son maintien soient assurées (CGCT, art. L. 2215-1, 4° inséré par L. n° 2003-239 mod. par L. n° 2007-297 préc. supra n° 1, art. 29). L'arrêté motivé fixe la nature des prestations requises, la durée de la mesure de réquisition ainsi que les modalités de son application. Le préfet peut faire exécuter d'office les mesures prescrites par l'arrêté qu'il a édicté.

3° Dispositions applicables dans les communes placées sous le régime de la police d'État

37. – Principe. – L'institution du régime dit « de police d'État » a pour effet de modifier la répartition des pouvoirs de police, en transférant au représentant de l'État dans le département certains pouvoirs du maire, notamment en matière de la tranquillité publique.

38. – Institution du régime de la police d'État. – L'article L. 2214-1 du Code général des collectivités territoriales prévoit que le régime de police d'État peut être établi dans une commune en fonction de ses besoins en matière de sécurité, appréciés au regard de sa population permanente et saisonnière, de sa situation dans un ensemble urbain et des caractéristiques de sa délinquance.

En vertu du décret n° 96-827 du 19 septembre (JO 21 sept. 1996, p. 14039), sont placées sous le régime de la police d'État :

– obligatoirement, toute commune, chef-lieu de département ; – facultativement, lorsque les deux conditions suivantes sont réunies, les communes

ou ensembles de communes, dont la population, appréciée en tenant compte de l'importance de la population saisonnière, est supérieure à plus de 20 000 habitants et présentant une délinquance ayant les caractéristiques de celle d'une zone urbaine. La commission de certains types de délits (dégradations et destructions volontaires), fréquemment observés dans des zones de concentration urbaine, permet de considérer ces collectivités comme constituant une zone urbaine, critère d'instauration du régime de police d'État (CE, 16 janv. 2008, n° 298480).

Le régime de police d'État est institué :

– par arrêté conjoint des ministres compétents, lorsque la demande émane du conseil municipal ou en cas d'accord de celui-ci ;

– par décret en conseil d'État dans le cas contraire.

39. – Suppression du régime de police d'État. – Le régime de police d'État peut être supprimé sur le territoire d'une ou plusieurs communes, dans les mêmes formes lorsque les conditions posées ne sont plus remplies. Le Conseil d'État a précisé dans un arrêt récent « qu'à supposer que les communes qui constituent le territoire de la circonscription de sécurité publique dont la suppression est prononcée fassent partie d'un ensemble urbain comportant d'autres communes, seul le nombre d'habitants des communes concernées par la décision de suppression doit être pris en compte pour apprécier les conditions de la suppression » (CE, 16 janv. 2008, n° 297648).

Le projet de suppression doit donner lieu à une concertation locale organisée par le préfet, à partir d'une étude d'impact réalisée par l'autorité qui est à l'origine du projet. À partir de l'objet

et du contenu de la mesure envisagée, cette étude doit analyser ses conséquences économiques et sociales, les conditions d'accès aux nouveaux services et les mesures d'accompagnement prévues. À cet égard, le conseil d'État a considéré comme ayant satisfait aux exigences du décret précité, la concertation locale organisée par le préfet avec les conseils municipaux des communes concernées, les responsables locaux de la police nationale, de la gendarmerie nationale et de l'équipement, le procureur de la République, le président du tribunal de grande instance, les organismes consulaires et l'union commerciale et industrielle (CE, 30 nov. 2001, n° 224800).

40. – Pouvoirs transférés au préfet dans les communes placées sous le régime de la police d'État. – Le régime de la police d'État se traduit par un transfert au préfet des pouvoirs de police municipale du maire en matière de tranquillité publique (CGCT, art. L. 2214-4), notamment :

– le soin de réprimer « les atteintes à la tranquillité publique telles que définies au 2 de l'article L. 2212-2 du CGCT », sauf en ce qui concerne les troubles de voisinage. La loi n° 2007-297 (préc. supra n° 1, art. 18) a substitué cette expression à celle de « bruit de voisinage », notion plus étroite, le bruit n'étant qu'une forme de trouble. Il résulte de la combinaison des dispositions des articles L. 2212-2, L. 2214-4 et L. 2215-1 du Code général des collectivités territoriales que dans les communes où la police est étatisée, le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique en ce qui concerne les troubles de voisinage relève du pouvoir de police du maire, tandis que celui de réprimer les autres atteintes à la tranquillité publique énumérées au 2° de l'article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales appartient au représentant de l'État (CE, 27 juill. 2005, n° 257394) ;

– le maintien du « bon ordre » quand il se fait occasionnellement de grands rassemblements d'hommes, tels que cérémonies commémoratives, accueil d'un chef d'État étranger, épreuve sportive à caractère national, concert, « rave », etc.).

À ce titre, le préfet est seul compétent pour interdire une manifestation sur la voie publique de nature à troubler l'ordre public. Le maire est incompétent pour prononcer une telle interdiction, même en se fondant sur les dispositions de l'article L. 131-2-1° du Code des communes en vertu duquel le maire est compétent, même dans les villes où est instituée une police d'État, pour assurer « la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques » (CE, 28 avr. 1989, n° 74018).

Par ailleurs, ce sont les forces de police nationale qui sont chargées d'exécuter les arrêtés du maire.

Enfin, si un dommage survient dans le cadre de l'exercice des pouvoirs transférés, la responsabilité de la commune demeure, mais peut être atténuée en cas de faute d'un agent de l'État (V. infra n° 90).

S'agissant des pouvoirs non transférés, la responsabilité du maire reste entière. Engage donc la responsabilité de la commune, le maire qui commet une faute simple dans l'exercice de son pouvoir consistant à réprimer les bruits de voisinage (CE, 27 juill. 2005, n° 257394).

41. – Pouvoirs du maire dans les communes placées sous le régime de la police d'État. –

Tous les autres pouvoirs de police énumérés notamment aux articles L. 2212-2, L. 2212-3 et L. 2213-9 du Code général des collectivités territoriales sont exercés par le maire, y compris le maintien du bon ordre dans les foires, marchés, réjouissances et cérémonies publiques, spectacles, jeux, cafés, églises et autres lieux publics. Ainsi, à titre d'exemples, relèvent du maire et engagent sa responsabilité : le développement de dépôts sauvages d'ordures et de ferrailles, l'abandon de détritus et épaves de véhicules sur la voie publique, le rejet d'eaux usées incontrôlé aggravé par le comblement des fossés par des débris divers, la prolifération de rats et autres animaux nuisibles, la divagation des chiens, chèvres et poules, les bruits et tapages nocturnes répétés (V. supra n° 41), l'implantation sans autorisation de caravanes servant d'habitations permanentes et dont les occupants troublent le repos des riverains (CAA Nancy, 1re ch., 25 juin 1992, n° 90NC00240).

42. – Cas particulier de la ville de Paris. – Sur le territoire de la commune de Paris, la compétence de police municipale de droit commun incombe au préfet de police (A. des consuls du 12 messidor an VIII mod. – CGCT, art. L. 2512-7, L. 2512-14 et L. 2512-17).

Le maire de Paris ne dispose d'attributions de police qu'en matière de :

– salubrité sur la voie publique ; – bruits de voisinage ; – maintien du bon ordre dans les foires et marchés ; – conservation des dépendances domaniales incorporées au domaine public de la

commune. S'y ajoutent, depuis 2002, les pouvoirs de police de la circulation et du stationnement prévus par les articles L. 2213-1 à L. 2213-6 du Code général des collectivités territoriales. Ces pouvoirs ont été transférés au maire de Paris sous réserve des dispositions ci-après (CGCT, art. L. 2512-14, mod. par L. n° 2002-276, art. 36 préc. supra n° 1).

Pour les motifs d'ordre public ou liés à la sécurité des personnes et des biens ou pour assurer la protection du siège des institutions de la République et des représentations diplomatiques, le préfet de police détermine, de façon permanente ou temporaire, des sites où il réglemente les conditions de circulation et de stationnement dans certaines voies ou portions de voies, ou en réserve l'accès à certaines catégories d'usagers ou de véhicules.

Des dispositions de même nature et à caractère temporaire peuvent également être arrêtées, en cas de manifestation de voie publique à caractère revendicatif, festif, sportif ou culturel.

Dans ces cas, le préfet de police fixe, après avis du maire de Paris, les règles de circulation et de stationnement sur certains axes désignés par décret pour tenir compte des conditions de circulation dans l'agglomération parisienne et en région d'Ile-de-France. Le contrôle administratif et le pouvoir de substitution sont exercés, au nom de l'État, par le préfet de police ; en outre, les pouvoirs conférés par le code de la route au préfet sont exercés à Paris par le préfet de police. L'exécution de ces dispositions est assurée par les fonctionnaires de la police nationale ou, le cas échéant, en matière de circulation ou de stationnement, par des agents de la ville de Paris placés sous l'autorité du préfet de police (V. Fasc. n° 222-5, Personnels de police municipale).

43. – Cas particulier des communes des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne. – Dans les communes des départements de la « petite couronne », le représentant de l'État exerce, en plus des attributions de police exercées dans les communes

placées sous le régime de la police d'État (V. supra n° 40), la police de la voie publique sur les routes à grande circulation en ce qui concerne la liberté et la sûreté (CGCT, art. L. 2521-1).

Sous cette réserve, les maires restent chargés de tout ce qui concerne la voirie communale, la liberté et la sûreté de la voie publique, l'établissement, l'entretien et la conservation des édifices communaux, cimetières, promenades, places, rues et voies publiques ne dépendant pas des voiries nationale et départementale, l'éclairage, le balayage, les arrosages, la solidité et la salubrité des constructions privées, les secours aux noyés, la fixation des mercuriales, l'établissement et la réparation des fontaines, aqueducs, pompes et égouts, les adjudications, marchés et baux (CGCT, art. L. 2521-2).

IV. – Caractère des actes de police municipale A. – Contenu des actes

44. – Caractère des actes. – Les décisions prises en matière de police municipale peuvent avoir le caractère d'actes réglementaires ou d'actes individuels et ces derniers peuvent intervenir même en l'absence de tout règlement applicable à la situation qu'ils concernent (CE, 4 janv. 1935, n° 37911).

Toutefois, l'obligation de respecter la hiérarchie des normes juridiques fait naturellement obstacle à ce qu'un arrêté individuel déroge aux dispositions d'un arrêté de caractère réglementaire.

45. – Légalité des actes. – La légalité interne des mesures de police fait l'objet d'un contrôle particulièrement approfondi du juge administratif dont la jurisprudence illustre parfaitement l'adage : « la liberté est la règle, la restriction de police l'exception ». Dans cette recherche d'un compromis entre les exigences de l'ordre et celles de la liberté, la légalité des décisions de police est appréciée du double point de vue de leurs motifs et des moyens utilisés.

46. – Motifs des actes. Menace grave contre l'ordre public. – Une règle première s'impose : la mesure de police n'est légale que si elle est nécessaire pour conjurer des menaces avérées qui pèsent sur l'ordre public lato sensu et si l'atteinte à la liberté qu'elle comporte est nécessaire pour conjurer la menace qui pèse sur l'ordre public. L'exigence du juge sera d'autant plus grande à cet égard que la liberté en cause sera plus essentielle.

Ainsi, le Conseil d'État n'admet la légalité de l'interdiction d'une réunion publique que si la menace pour l'ordre public est particulièrement grave et risque d'engendrer des désordres auxquels le maire ne pourra faire face avec les moyens dont il dispose (CE, 19 mai 1933, n° 17413, Benjamin).

47. – Moyens. Principe de proportionnalité. – La seconde règle essentielle que doit respecter le maire (ou l'autorité de police) est celle de la proportionnalité : l'acte de police doit être proportionné au niveau de la menace. Le juge appréciera l'adéquation des mesures édictées, avec l'objectif poursuivi et censurera les décisions qu'il estime disproportionnées avec la menace pesant sur l'ordre public (Arrêt Benjamin préc. supra n° 46).

Ainsi, deux types de mesures sont en principe prohibés :

– celles instituant un système d'autorisation préalable ou même de déclaration préalable (CE, 22 janv. 1982, n° 14586). Il n'en va différemment que lorsque la loi prévoit un telle procédure ou lorsque l'activité en cause implique l'utilisation privative d'une voie publique (exemple : bals publics, courses cyclistes) ;

– celles comportant une interdiction générale et absolue, à moins qu'une telle interdiction soit le seul moyen possible de remédier au risque en cause (CE, 28 nov. 1980, n° 4551).

48. – Respect du principe de l'égalité devant la loi et les charges publiques. – Le principe général de l'égalité des citoyens devant la loi et les charges publiques s'applique bien entendu aux mesures de police. Celles-ci ne peuvent en conséquence introduire des discriminations injustifiées entre personnes se trouvant dans la même situation.

B. – Forme des actes de police municipale

49. – Arrêté de police générale et arrêté de police spéciale. – Les décisions de police du maire revêtent habituellement la forme d'arrêtés, mais aucune disposition légale n'impose de formalisme particulier (V. FM Litec, Formulaire des Maires, Fasc. 525). Toutefois, le choix des visas diffère selon qu'il s'agit d'un arrêté de police générale pris sur le fondement du Code général des collectivités territoriales ou d'un arrêt de police spéciale qui se référera toujours à un texte particulier (par exemple au code de la santé publique).

50. – Arrêté réglementaire et arrêté à caractère individuel. – L'arrêté réglementaire ou à caractère général est applicable à l'ensemble des personnes se trouvant dans une situation donnée (arrêté réglementant le stationnement des véhicules), alors que l'arrêté à caractère individuel n'est applicable qu'à la (qu'aux) personne(s) expressément désignée(s) (pétitionnaire bénéficiaire d'une autorisation d'occupation de la voie publique).

Quelle que soit la forme de l'arrêté, les seules exigences en matière de légalité externe résultent de la jurisprudence et de la loi relative à la motivation des actes administratifs (V. infra n° 53).

51. – Conséquences de la distinction entre acte réglementaire et acte individuel. – La distinction entre acte réglementaire et acte individuel emporte un certain nombre de conséquences :

– un acte à caractère individuel ne peut déroger à un arrêté réglementaire ; – l'arrêté réglementaire fera l'objet d'une publication, alors que l'arrêté individuel devra

être notifié (V. infra n° 60 et 61) ; – à la différence de l'arrêté réglementaire, l'arrêté individuel devra toujours être motivé

(V. infra n° 53) ; – l'arrêté individuel devra faire mention des voies de recours et du délai de leur

exercice (D. n° 83-1025, 28 nov. 1983, art. 9, concernant les relations entre l'Administration et les usagers : JO 3 déc. 2003, p. 3492), formalité qui n'est pas nécessaire dans le cas d'un arrêté réglementaire.

52. – Formalités substantielles. – Les formalités regardées par la jurisprudence comme substantielles, c'est-à-dire de nature à vicier l'acte, sont la désignation de l'auteur de l'acte et la signature de celui-ci. En revanche, ni l'absence de visa des textes appliqués, ni l'omission du lieu ou de la date de la décision n'entraînent son annulation.

53. – Motivation des actes. – L'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée (V. supra n° 1) impose la motivation des décisions individuelles qui « restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ».

Il en résulte que les décisions de police ne sont soumises à l'obligation de motivation que lorsqu'elles présentent un caractère individuel ; sauf cas d'urgence absolue – notion à manier avec prudence – ou décision implicite.

En revanche, conformément à une jurisprudence constante, les décisions de caractère réglementaire en demeurent dispensées. Toutefois, la loi a introduit de nombreuses exceptions à ce principe ; tel est notamment le cas en matière de réglementation de la circulation et du stationnement (CGCT, art. L. 2213-2 à L. 2213-5).

La motivation, généralement exprimée sous la forme de « considérants », doit, pour répondre à l'exigence de la loi :

– être écrite ; – comporter l'énoncé des circonstances ou des raisons de fait et de droit qui ont

conduit à prendre cette décision ; – exposer le raisonnement permettant de faire le lien entre ces raisons et la décision.

Les considérations de fait qui justifient la décision doivent être circonstanciées, précises et exactes (CAA Lyon, 8 mars 1994).

Attention Selon le juriste Chapus, l'obligation de motiver est une garantie de « bonne administration », car elle contraint les autorités administratives à examiner attentivement le bien fondé des décisions qu'elles prennent et est ainsi susceptible de prévenir des décisions insuffisamment étudiées ou difficiles à justifier. Elle constitue également un moyen de contrôle de l'Administration : la connaissance des motifs des décisions permet aux intéressés de mieux apprécier s'il y a pour eux matière à réclamation ou à recours. Mais l'obligation de motiver n'a pas que des avantages. Elle soumet l'Administration à des sujétions qui peuvent ralentir la prise de décision et donc freiner son action ; elle peut être à l'origine, quand elle est mal observée, d'annulations d'acte dont la légalité interne est sans reproche. On ne saurait donc trop conseiller de s'en tenir au respect de la loi, en ne recourant à des « considérants » que dans les cas prévus.

54. – Droits de la défense. – Le principe du « contradictoire » en cas de décision défavorable ne s'applique pas aux mesures de police, qui peuvent donc intervenir sans que l'intéressé ait été mis à même de présenter ses observations (CE, 16 oct. 1981, n° 12146). En l'espèce, les arrêtés par lesquels un maire prononce, en vue d'assurer le bon ordre sur les marchés de la ville, la suspension d'emplacement sur un marché puis l'exclusion définitive des marchés de la ville ont le caractère de mesures de police et non de sanctions. Ils peuvent par suite être légalement pris sans que les intéressés soient mis à même de présenter leurs moyens de défense Cette solution n'a pas été remise en cause par l'article 8 du décret n° 83-1025 du

28 novembre 1983 concernant les relations entre l'Administration et les usagers (JO 3 déc. 1983, p. 3492) qui n'est, en effet, pas applicable aux collectivités locales.

V. – Application des décisions de police municipale

55. – Principe. Caractère exécutoire des décisions de police. – Conformément à la règle dite du « privilège du préalable » les décisions administratives sont par elles-mêmes exécutoires. Elles sont présumées légales, sans qu'il soit nécessaire de recourir au juge.

A. – Entrée en vigueur des décisions de police

56. – Obligation de publication ou de notification et de transmission. – Les décisions réglementaires et individuelles prises par le maire dans l'exercice de son pouvoir de police sont exécutoires de plein droit « lorsqu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés, ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'État ou à son délégué dans l'arrondissement » (CGCT, art. L. 2131-1). L'accomplissement de ces formalités constitue donc un préalable à l'entrée en vigueur des actes de police des autorités municipales.

57. – Obligation de transmission au préfet. – La transmission au préfet des décisions réglementaires et individuelles prises par le maire dans l'exercice de son pouvoir de police n'est assujettie à aucune modalité particulière ; elle peut s'effectuer par les voies traditionnelles du courrier, mais aussi par voie électronique selon les modalités fixées par décret en conseil d'État (CGCT, art. R. 2131-1 à R. 2131-4). Pour les décisions individuelles, cette transmission intervient dans un délai de quinze jours à compter de leur signature.

La transmission doit comporter le texte intégral et être accompagnée de toutes les pièces permettant au représentant de l'État d'être à même d'apprécier la portée et la légalité de la décision. Dans le cas contraire il lui appartient de demander à l'autorité communale, dans le délai de deux mois de la réception de l'acte transmis, de compléter cette transmission (CE, 13 janv. 1988, n° 68166).

Le maire certifie, sous sa responsabilité, le caractère exécutoire de ces actes. La preuve de la réception par le représentant de l'État dans le département ou son délégué dans l'arrondissement peut être apportée par tout moyen. L'accusé de réception, qui est immédiatement délivré, peut être utilisé à cet effet, mais n'est pas une condition du caractère exécutoire de l'acte (CGCT, art. L. 2131-2).

58. – Dispense de transmission en matière de police de la circulation. – Sont dispensées de l'obligation de transmission les décisions réglementaires et individuelles prises par le maire dans l'exercice de son pouvoir de police relatives :

– à la circulation et au stationnement ; – à l'exploitation, par les associations, de débits de boissons pour la durée des

manifestations publiques qu'elles organisent (CGCT, art. L. 2131-2 mod. par L.

n° 2004-809, 13 août 2004 et Ord. n° 2005-1527, 8 déc. 2005). Ces décisions sont exécutoires de plein droit, dès lors qu'il a été procédé à leur publication, leur affichage ou à leur notification aux intéressés.

Toutefois, le représentant de l'État dans le département peut en demander communication à tout moment.

59. – Inscription des actes au registre communal. – La formalité de publicité consiste, selon les règles usuelles, en une publication si la mesure présente un caractère réglementaire et en une notification à l'intéressé si elle présente un caractère individuel. L'inscription au registre des délibérations du Conseil municipal n'est pas jugée nécessaire (CE, 15 oct. 1980, n° 16199). En revanche, ils doivent être transcrits par ordre de date, dans un registre spécial de la mairie ou dans les communes de 3 500 habitants et plus, dans un recueil des actes administratifs (CGCT, art. L. 2122-29 et R. 2122-7).

60. – Publication des arrêtés réglementaires. – La publication est constatée par une déclaration certifiée du maire qui fait foi en cas de contestation sur les délais du recours contentieux (CGCT, art. R. 2122-7, al. 1). L'affichage des arrêtés de caractère réglementaire est en principe nécessaire et suffisant pour assurer la publicité voulue par la loi. Il doit s'effectuer en un lieu permettant une information effective des administrés. Dans certains cas particuliers, les arrêtés de police doivent en outre, pour être opposables aux tiers, donner lieu à une forme de publicité adaptée à leur objet. Tel est le cas des arrêtés pris en matière de police de la circulation et du stationnement, qui doivent faire l'objet de mesures de signalisation sur le terrain (C. route, art. R. 411-25).

L'efficacité commande que les arrêtés réglementaires soient également communiqués aux autorités chargées de leur exécution (commandant de circonscription de police, de brigade gendarmerie, service de police municipale, garde champêtre).

61. – Notification des actes individuels. – La notification des actes individuels, y compris des décisions verbales, s'opère par la remise à la personne concernée d'un double de la décision ayant valeur authentique. La preuve de la notification est établie par le récépissé de la partie intéressée, postal ou administratif, éventuellement par procès-verbal ou, à défaut, par l'original de la notification conservée dans les archives de la mairie (CGCT, art. R. 2122-7).

Le refus de la personne en cause de recevoir l'acte qui lui est adressé vaut notification. Certaines décisions doivent être notifiées par lettre recommandée avec accusé de réception.

62. – Survenance de circonstances nouvelles. – Après son entrée en vigueur et jusqu'à son abrogation, l'arrêté de police ne peut perdre son caractère exécutoire qu'en vertu d'une décision du juge administratif : annulation ou sursis à exécution. Dès lors, la modification ou la disparition des circonstances qui ont justifié l'adoption d'un arrêté de police ne saurait entraîner sa caducité.

Cependant, en vertu d'une jurisprudence constante, tout intéressé peut se fonder sur la disparition des circonstances qui ont motivé un règlement municipal pour demander au maire la modification ou la suppression de ce règlement. Au cas de refus du maire, sa décision peut être attaquée devant le juge administratif. Si ce dernier prononce l'annulation de la décision de refus de modification ou d'abrogation par le motif que les circonstances nouvelles ne justifient

plus le maintien du règlement, celui-ci ne pourra plus être appliqué (CE, 25 janv. 1933, n° 27065).

B. – Contrôle administratif et juridictionnel des mesures de police

63. – Principe. – Rappelons que le pouvoir de police du maire ne peut faire l'objet d'aucun contrôle de la part du conseil municipal. En revanche, bien qu'exécutoires de plein droit, les décisions de police du maire peuvent être soumises au contrôle du juge. Mais, depuis la loi de décentralisation de 1982, ce contrôle ne peut intervenir qu'a posteriori, à l'initiative du représentant de l'État dans le cadre du contrôle de légalité ou à la demande d'un administré.

1° Contrôle de légalité

64. – Principe. – Selon l'article L. 2212-1 du Code général des collectivités territoriales, le maire exerce ses pouvoirs de police municipale « sous le contrôle administratif du représentant de l'État dans le département ». Cette formulation, issue de la loi du 2 mars 1982, correspond à une profonde modification des pouvoirs du préfet en la matière. Alors que celui-ci pouvait antérieurement, dans le cadre de la tutelle, annuler même pour de simples motifs d'opportunité, les mesures de police municipale, il ne peut plus désormais que les déférer à un juge pour obtenir leur suspension ou leur annulation, et ce, seulement pour des motifs de légalité.

À noter que l'inscription au registre, la publication ou la notification n'ont aucune incidence sur la légalité de la décision, celle-ci s'appréciant à l'instant même où elle est signée.

65. – Procédure. – Dans le délai de deux mois suivant la transmission de l'acte (V. supra n° 57), le préfet peut saisir le tribunal administratif d'une demande d'annulation et assortir son recours de conclusions à fin de sursis à exécution. L'octroi du sursis par le juge est subordonné à la seule condition que le déféré comporte des moyens sérieux. Le jugement intervient généralement dans un délai de un à trois mois.

Le préfet peut user de la procédure du « sursis accéléré », prévue par le 5e alinéa de l'article L. 2131-6 du Code général des collectivités territoriales, lorsque l'acte attaqué est de nature à compromettre l'exercice d'une liberté publique ou individuelle, ce dont les mesures de police constituent le terrain d'élection. Le juge doit alors statuer dans les 48 heures de sa saisine.

S'agissant des actes dispensés de l'obligation de transmission (V. supra n° 58), il ne peut les déférer au tribunal administratif, dans un délai de deux mois à compter de leur communication, que si sa demande a été présentée dans le délai de deux mois à compter de la date à laquelle les actes sont devenus exécutoires (CGCT, art. L. 2131-3 mod.).

Sur l'exercice par le préfet de ses pouvoirs de contrôle des actes des collectivités locales, voir Fasc. 123-20.

2° Contrôle juridictionnel

66. – Recours pour excès de pouvoir. – Le contrôle juridictionnel peut également être exercé à l'initiative des particuliers, dès lors qu'ils justifient d'un intérêt suffisant, d'ailleurs apprécié libéralement par le juge administratif. Ils peuvent former un recours pour excès de pouvoir dans le délai de deux mois suivant la publication ou la notification de l'acte.

Un tel recours peut être assorti de conclusions à fin de sursis à exécution, mais celles-ci ne seront accueillies que si deux conditions sont réunies : le caractère sérieux des moyens et l'existence d'un préjudice difficilement réparable causé au requérant par l'exécution immédiate de la décision attaquée.

67. – Exception d'illégalité. – Le juge pénal peut interpréter les actes administratifs quels qu'ils soient et en apprécier la légalité lorsque, de cet examen, dépend la solution du procès pénal qui leur est soumis (C. pén., art. 111-5). S'il estime illégal l'arrêté municipal, le juge en écartera l'application, sans toutefois l'annuler. La portée de la décision du juge est toutefois limitée au procès dont il est saisi ; il n'est en effet pas compétent pour annuler l'acte qu'il considère comme illégal. Il peut simplement constater que la procédure lui apparaît privée de fondement juridique et relaxer la personne poursuivie, mais son appréciation n'a aucune incidence en ce qui concerne les tiers. Le maire est normalement informé de jugements de cette nature par le ministère public (Rép. min. n° 13284 : JOAN Q, 20 juin 1994).

Il peut se produire que le juge pénal écarte l'application d'un règlement de police définitif, alors même que le juge administratif en aura admis la légalité.

VI. – Exécution des décisions de police municipale

68. – Principes. – Les décisions du maire étant exécutoires, il lui revient de les faire appliquer par tous moyens de droit dont il dispose. À défaut d'exécution spontanée, trois moyens peuvent être envisagés :

– l'injonction à particulier ; – les sanctions pénales ; – l'exécution d'office.

Cependant, ces moyens ne doivent et ne peuvent être utilisés que dans certaines limites fixées par la loi et la jurisprudence.

A. – Injonction à particulier

69. – Principes. – L'injonction est un ordre formel adressé par le maire à un administré, avant le recours à des procédés coercitifs. Elle peut être prévue par la loi, mais son domaine s'est trouvé considérablement élargi par les tribunaux. En la forme, c'est une décision administrative dont elle suit en principe les règles.

70. – Domaine de l'injonction. – Lorsqu'elle est prévue par une loi ou un règlement, l'injonction peut être obligatoire ou facultative : c'est le cas en matière de salubrité publique (injonction aux propriétaires d'une voie privée de se constituer en association syndicale de propriétaires pour y réaliser des travaux d'assainissement) ou de publicité (injonction d'enlever une enseigne installée en un lieu interdit).

En l'absence de texte, le recours à l'injonction est largement admis par le juge, dans l'exercice de la police municipale pour assurer la tranquillité publique (lutte contre le bruit : CE, 18 oct. 1989, n° 59465), la sécurité publique (injonction de payer pour occupation de la voie publique ou ordre d'enlèvement d'un obstacle sur un chemin rural) ou la salubrité publique (déplacement ou évacuation d'un fumier dont l'implantation n'est pas compatible avec la réglementation sanitaire, CAA Nancy, 5 déc. 2002, n° 97-1575).

71. – Formes de l'injonction. – Hors le cas où la loi le prévoit, l'injonction n'est pas soumise à une forme précise s'agissant d'un acte administratif susceptible de recours, il est cependant préférable qu'elle revête la forme d'un écrit, arrêté, circulaire, note.

L'injonction, acte administratif, n'a pas à être motivée sauf disposition expresse de la loi. Cependant, « la motivation est pratiquement toujours nécessaire » selon GD Marillia, car elle entre dans la catégorie des décisions administratives individuelles défavorables ou à tout le moins qui imposent des sujétions ; et doivent être motivées, à peine de nullité (préc. supra n° 48).

72. – Effets de l'injonction. – L'injonction est bien évidemment exécutoire. Son destinataire devra s'y conformer immédiatement sous peine de sanctions pénales, voire d'exécution d'office. Sauf à demander au juge, dans les délais prescrits, la suspension de son exécution. Pour qu'un tel recours soit recevable, l'injonction doit faire grief. Après quoi, le juge recherchera alors si elle n'est pas entachée par un vice de forme ou un excès de pouvoir.

B. – Sanctions pénales

73. – Principes. – « La violation des interdictions ou le manquement aux obligations édictées par les décrets et arrêtés de police sont punis par l'amende prévue pour les contraventions de la 1re classe » (C. pén., art. R. 610-5). La violation de tout arrêté de police est une infraction. Les arrêtés municipaux, bénéficiant du privilège du préalable, s'imposent d'emblée aux administrés, même si ceux-ci ont formé un recours. Leur méconnaissance, même de bonne foi, constitue une infraction pénale.

74. – Légalité des sanctions pénales. – L'article R. 610-5 du Code pénal précité ne s'applique qu'en l'absence d'autre texte, généralement à des infractions vénielles. Des sanctions aggravées ont été édictées pour réprimer des faits plus graves. Tel est en particulier le cas de certaines infractions à la police de la circulation routière (V. Fasc. 221-50) et du stationnement (V. Fasc. 231-10) qui constituent des contraventions allant de la 2e à la 5e classe. D'autres incriminations résultent de dispositions législatives ou réglementaires spécifiques, notamment dans le domaine de la tranquillité publique (lutte contre le bruit) ou de la salubrité publique. Le fait de ne pas procéder aux opérations de désinfection obligatoire est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 5e classe (V. Fasc. 133-20) ou encore

de la protection de l'environnement. Face à ces sanctions, les personnes poursuivies peuvent exciper de l'illégalité des règlements de police devant le juge pénal (V. supra n° 67).

75. – Procédure. – Toute infraction à un arrêté de police doit être constatée par procès-verbal dressé par un agent ayant qualité pour agir et transmis au tribunal compétent par l'intermédiaire du procureur de la République. Le maire ne peut se constituer partie civile, les règlements de police ayant pour objet l'intérêt général et non les intérêts privés de la commune. L'application de la loi ne peut en conséquence être demandée que par l'action du ministère public. Le juge s'assure que l'arrêté est légal avant de prononcer la sanction prévue par le texte. En cas d'incompétence, de vice de forme ou de violation de la loi, il écartera l'application du texte, sans toutefois prononcer son annulation, comme l'aurait fait le juge administratif (V. supra n° 67).

Cependant, l'encombrement des tribunaux a conduit le législateur à réduire au maximum l'intervention du juge, particulièrement en matière de contraventions, par le biais de l'amende forfaitaire.

76. – Amendes forfaitaires. – Pour les contraventions des quatre premières classes dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État (CPP, art. R. 48-1), l'action publique est éteinte par le paiement d'une amende forfaitaire qui est exclusive de l'application des règles de la récidive. Cette disposition est notamment applicable aux infractions à la police de la circulation et du stationnement, ainsi qu'en matière de protection de l'environnement ou encore en matière de protection ou de contrôle des animaux domestiques et des animaux sauvages, apprivoisés ou tenus en captivité. Toutefois, la procédure de l'amende forfaitaire n'est pas applicable si plusieurs infractions, dont l'une au moins ne peut donner lieu à une amende forfaitaire, ont été constatées simultanément (CPP, art. 529 à 529-2).

Le montant de l'amende forfaitaire peut être acquitté :

– soit entre les mains de l'agent verbalisateur au moment de la constatation de l'infraction, en espèce ou au moyen d'un chèque et donne lieu à la délivrance immédiate d'une quittance extraite du carnet à souches (CPP, art. R. 49-2) ;

– soit auprès du service indiqué dans l'avis de contravention remis au contrevenant, qui mentionne le montant de l'amende due. Le paiement est effectué soit par l'apposition sur la carte de paiement dûment remplie, d'un timbre émis à cet effet par le ministre chargé du budget, qui en établit le modèle et les modalités de délivrance, soit par l'envoi au comptable direct du Trésor d'un chèque joint à la carte de paiement, soit encore par l'utilisation de moyens de paiement à distance, selon des modalités fixées par arrêté.

À défaut de paiement ou d'une requête tendant à son exonération présentée dans le délai de quarante-cinq jours auprès du service indiqué dans l'avis de contravention, l'amende forfaitaire est majorée de plein droit et recouvrée au profit du Trésor public en vertu d'un titre rendu exécutoire par le ministère public (CPP, art. 529-2).

Enfin, il existe un tarif minoré applicable aux contraventions des deuxième, troisième et quatrième classes mentionnées à l'article R. 48-1 (1°) à l'exception des contraventions réprimées par les articles R. 417-1 à R. 417-13 et R. 421-7 du Code de la route relatives à l'arrêt et au stationnement dangereux, gênant ou abusif (V. Fasc. 221-50).

77. – Montant des amendes. – Le tableau ci-après présente le tarif des amendes, dans les différents cas exposés supra n° 76.

Classe Amende forfaitaire

(CPP, art. R. 48-1)

Maximum hors le cas

d'amende forfaitaire

(C. pénal, art. 131-13)

Montant normal

(CPP, art. R. 49)

Amende

majorée

(CPP,

art. 49-7)

Amende

minorée

(CPP, art.

R. 49-9)

5e classe 1 500 euros à 3 000 euros en cas de récidive lorsque le règlement le prévoit

4e classe 135 € 375 € 90 € 750 € 3e classe 68 € 180 € 45 € 450 € 2e classe 35 € 75 € 22 € 150 € 1re classe 11 € 33 € Sans objet 38 € piéton 4 € 7 € Sans objet 38 €

78. – Pouvoir du maire de transaction pénale en cas d'incivilité. – L'article 74 de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 (V. supra n° 1) codifié à l'aticle 41-1 du Code de procédure pénale a accordé au maire un pouvoir de transaction pénale en cas d'incivilité. Cela concerne des contraventions que les agents de la police municipale sont habilités à constater par procès-verbal, conformément aux dispositions de l'article L. 2215-5 du Code général des collectivités territoriales et qui sont commises au préjudice de la commune au titre de l'un de ses biens. C'est ainsi que le maire peut, tant que l'action publique n'a pas été mise en mouvement, proposer au contrevenant une transaction consistant en la réparation de ce préjudice. La transaction peut également consister en l'exécution, au profit de la commune, d'un travail non rémunéré pendant une durée maximale de trente heures. Elle doit alors être homologuée, selon la nature de la contravention, par le juge du tribunal de police ou par le juge de la juridiction de proximité.

Lorsqu'une de ces contraventions n'a pas été commise au préjudice de la commune mais a été commise sur le territoire de celle-ci, le maire peut proposer au procureur de la République de procéder à une des mesures prévues par les articles 41-1 ou 41-3 du Code de procédure pénale. Il est avisé par le procureur de la République de la suite réservée à sa proposition.

La proposition de transaction faite par le maire au contrevenant doit préciser :

– la nature des faits reprochés, leur qualification juridique ainsi que le montant de l'amende et les peines complémentaires encourues ;

– le montant de la réparation proposée et le délai dans lequel cette réparation devra être versée ;

– s'il y a lieu, le nombre d'heures de travail non rémunéré proposé et le délai dans lequel ce travail devra être exécuté, la nature du travail proposé et son lieu d'exécution ;

– le délai dans lequel le contrevenant devra faire connaître son acceptation ou son refus de la proposition de transaction.

Elle indique que le contrevenant a la possibilité de se faire assister, à ses frais, d'un avocat avant de faire connaître sa décision.

Le décret n° 2007-1388 du 26 septembre 2007 (JO 28 sept. 2007, p. 15850) a précisé les modalités d'application de la mesure (CPP, art. R. 15-33-61 à R. 15-33-66). La procédure en est la suivante :

– la proposition de transaction faite par le maire est adressée par lettre recommandée ou remise contre récépissé en double exemplaire au contrevenant dans un délai d'un mois à compter du procès-verbal constatant l'infraction ;

– dans les quinze jours à compter de l'envoi ou de la remise de la proposition de transaction, le contrevenant fait connaître au maire son acceptation de payer la somme demandée ou d'exécuter le travail non rémunéré en renvoyant un exemplaire signé de la proposition de transaction ;

– la proposition de transaction est alors adressée, accompagnée des procès-verbaux de constatation de l'infraction pour homologation selon les cas au procureur de la République, au juge du tribunal de police ou au juge de proximité et que le contrevenant sera alors informé de la décision de l'autorité judiciaire. Si la proposition de transaction est homologuée, le maire adresse ou remet au contrevenant un document l'informant de cette homologation, en précisant le montant de la réparation à payer ou les modalités d'exécution du travail non rémunéré ainsi que le délai d'exécution de la transaction. Dans le cas contraire, le maire communique la décision de l'autorité judiciaire au contrevenant. Si le contrevenant refuse la proposition de transaction ou n'y donne aucune réponse dans les délais impartis, ou s'il n'a pas exécuté ses obligations dans les délais impartis, le maire en informe le procureur de la République.

– en cas d'exécution intégrale de la transaction, le maire en informe le procureur de la République, qui constate alors l'extinction de l'action publique.

79. – Autres sanctions. – Certaines contraventions aux arrêtés de police peuvent être assorties de peines complémentaires obligatoires ou facultatives qui sont prononcées par le juge ou en cas d'urgence par le représentant de l'État, voire à titre conservatoire par l'agent ayant qualité pour agir. Tel est fréquemment en cas d'infractions à la police de la circulation (V. Fasc. 221-50 et 231-10).

Le recours à l'astreinte qui consiste à imposer au contrevenant de payer une somme d'argent, par jour de retard dans l'exécution de la décision de police est notamment prévu dans le cas de certaines infractions au Code de l'environnement ou au Code de l'urbanisme.

C. – Exécution d'office

80. – Principes. – En dépit de l'existence d'un arsenal juridique de sanctions pénales qui peut paraître important, il est des cas où ces moyens s'avèrent inefficaces ou inadaptés à la

situation résultant du refus d'un administré de se conformer aux dispositions d'une décision de police du maire. L'exécution d'office ou exécution par la contrainte répond à cette situation. Mais, en raison de son caractère attentatoire aux libertés publiques et des abus auxquels elle pourrait donner lieu, son emploi doit rester exceptionnel. Aussi est-elle particulièrement encadrée par la loi et la jurisprudence.

Trois idées se dégagent de cette réglementation :

– le recours à l'exécution d'office n'est possible que dans les cas où la loi l'a prévue ; – en dehors de ces cas, la jurisprudence ne l'admet qu'avec de très grandes restrictions,

lorsque certaines conditions sont réunies ; – et si ces conditions ne sont pas réunies, l'autorité administrative commet une « voie

de fait ».

81. – Exécution d'office en vertu d'une loi. – L'exécution d'office ne peut résulter que de la loi, notamment en matière de police :

– dans le cas d'un immeuble menaçant ruine et représentant un péril imminent, et si l'expert désigné à sa demande par le juge d'instance constate l'urgence ou le péril grave et imminent, « le maire, ordonne [par arrêté] les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité et notamment, l'évacuation de l'immeuble. Dans le cas où ces mesures n'auraient point été exécutées dans le délai imparti par la sommation, le maire a le droit de faire exécuter d'office et aux frais du propriétaire les mesures indispensables » (CCH, art. L. 511-3) ;

– en cas de publicité interdite ou irrégulière au regard des dispositions des articles L. 581-4, L. 581-5 ou L. 581-24 du Code de l'environnement, « le maire [ou le préfet] prend un arrêté ordonnant, dans les quinze jours, soit sa suppression, soit sa mise en conformité avec les dispositions légales ou réglementaires » (C. env., art. L. 581-27). Il peut faire procéder d'office à la suppression immédiate de cette publicité. Dans le cas où des travaux ont été prescrits et s'il n'a pas été procédé à leur exécution dans le délai fixé par l'arrêté, le maire (ou le préfet) fait, en quelque lieu que ce soit, exécuter d'office les travaux prescrits par l'arrêté. Les frais de l'exécution d'office sont supportés par la personne qui a apposé ou fait apposer cette publicité. Si cette personne n'est pas connue, les frais sont mis à la charge de celle pour laquelle la publicité a été réalisée (C. env., art. L. 581-29 et L. 581-31).

Même dans le cas où la loi a prévu le recours à la contrainte, la jurisprudence subordonne la légalité d'une exécution forcée à la double condition que l'administré ait refusé de se plier à la décision de police et que les mesures prises se limitent à celles strictement nécessaires pour éviter le danger immédiat qui menace l'ordre public (T. confl., 2 déc. 1902, n° 543).

82. – Extensions jurisprudentielles. – En dehors des cas prévus expressément par la loi tous liés à la sécurité, le juge se montre particulièrement restrictif, « les pouvoirs de police reconnus au maire (CGCT, art. L. 2212-2 et L. 2212-4) ne lui conférant pas, en l'absence d'urgence et de péril imminent, le droit d'agir d'office ».

Deux cas ont été retenus par le juge :

– l'absence ou l'échec d'une autre solution, notamment le recours au juge ;

– l'urgence particulière : danger grave et imminent. Dans le cas plus récent de restrictions à la circulation des mineurs, le juge administratif a validé plusieurs arrêtés municipaux interdisant la circulation des mineurs de 13 ans non accompagnés à certaines heures de la nuit (CAA Paris, 17 déc. 2002, n° 02-1102). La légalité de ces mesures est toutefois subordonnée à la double condition qu'elles soient justifiées par l'existence de risques particuliers dans les secteurs pour lesquels elles sont édictées et qu'elles soient adaptées par leur contenu à l'objectif de protection pris en compte (CE, 9 juill. 2001, n° 235638).

83. – Sanction en cas d'exécution d'office illégale ou irrégulière. – L'exécution d'office d'une décision, même régulière, mais insusceptible de se justifier par un texte législatif ou réglementaire constitue une voie de fait.

C'est ainsi qu'en faisant procéder, en méconnaissance des règles édictées par les textes précités et en dehors de toute urgence, à la destruction d'un véhicule en stationnement abusif sans respecter les délais prévus, et en dehors de toute urgence, la commune a commis une voie de fait. Les juridictions de l'ordre judiciaire sont, dès lors, seules compétentes pour statuer sur la réparation du préjudice qui a pu être causé du fait de cette destruction (T. confl., 4 nov. 1991, n° 02666).

VII. – Responsabilité à raison des activités de police A. – Régimes de responsabilité

84. – Responsabilité pour faute. – Dans l'exercice des pouvoirs de police, la faute peut provenir soit de l'inaction du maire, soit d'un agissement illégal. Toutefois, toute faute n'engage pas nécessairement la responsabilité. Ainsi, une jurisprudence nuancée prend en compte la plus ou moins grande difficulté rencontrée par le maire pour assurer le bon fonctionnement du service de la police municipale. Dans les cas où le service est plus particulièrement difficile à exercer, la responsabilité n'est engagée que par une « faute lourde », c'est-à-dire particulièrement caractérisée. Dans les autres hypothèses, une « faute simple » est suffisante.

À titre d'exemple, la carence à faire respecter une réglementation ou une interdiction n'engage la responsabilité qu'en cas de faute lourde (CE, 14 déc. 1962, n° 50114), alors qu'une faute simple est suffisante au cas de non-édiction de mesures réglementaires nécessaires (CE, 23 mai 1958, n° 35737).

85. – Responsabilité sans faute. – Ce régime trouve sa principale application au bénéfice des collaborateurs bénévoles ou occasionnels du service public de la police municipale. La jurisprudence a en effet posé en principe que, lorsqu'un particulier prête son concours à l'Administration (soit qu'il ait été requis, soit spontanément), et qu'à l'occasion de cette collaboration il est victime d'un accident, les conséquences dommageables doivent être prises en charge par l'Administration. Cette théorie s'applique en particulier au cas d'accidents subis en portant assistance à des personnes en danger (CE, 25 sept. 1970, n° 73707).

86. – Décisions portant atteinte au principe d'égalité devant les charges publiques. – Plus exceptionnellement, la responsabilité pourra être retenue sans faute à raison de décisions de police légales, mais portant atteinte au principe de l'égalité devant les charges publiques, une atteinte dont résulte pour un administré un préjudice anormal et spécial (CE, 22 févr. 1963, n° 50438).

Enfin, l'utilisation par les forces de police d'armes à feu est regardée comme créant un risque exceptionnel justifiant la réparation, même en l'absence de faute, des préjudices causés à des personnes autres que celles visées par l'opération de police.

87. – Voie de fait. – En raison de sa gravité la voie de fait relève des tribunaux de l'ordre judiciaire gardien de la liberté (V. supra n° 83). En conséquence, si un tribunal administratif est amené à reconnaître une voie de fait, il devra se déclarer incompétent pour statuer sur l'indemnisation de la victime.

B. – Collectivité responsable

88. – Responsabilité de principe de la commune. – L'article L. 2216-2 du Code général des collectivités territoriales pose le principe de la responsabilité civile de la commune pour les dommages résultant de l'exercice des attributions de police municipale, quel que soit le statut des agents qui y concourent. Il en résulte que la victime pourra toujours diriger valablement son action contre la commune.

C'est notamment le cas lorsque le préfet agit en vertu de son pouvoir de substitution, ainsi que dans les communes à police étatisée. Mais d'autres collectivités publiques peuvent également voir leur responsabilité engagée concurremment avec la commune.

Par ailleurs, lorsque le maire agit en qualité d'agent de l'État, la responsabilité sera mise à la charge de la collectivité au nom de laquelle le maire a agi, c'est-à-dire selon le cas, la commune ou l'État.

89. – Exercice par le préfet de ses pouvoirs de substitution. – En principe les mesures prises à ce titre par le représentant de l'État engagent la responsabilité de la commune pour le compte de laquelle il est réputé avoir agi (CE, 6 juin 1952, n° 99479).

Toutefois, la commune voit sa responsabilité supprimée ou atténuée, lorsqu'une autorité relevant de l'État s'est substituée, dans des hypothèses ou selon des modalités non prévues par la loi, au maire pour mettre en œuvre des mesures de police (CGCT, art. L. 2216-1). Tel est le cas lorsque le préfet ne se substitue pas directement à un maire, mais prend des mesures applicables à toutes les communes du département ou à plusieurs d'entre elles.

Par ailleurs, la responsabilité de la commune n'exclut pas la possibilité pour celle-ci de se retourner contre l'État si, dans l'exercice de son pouvoir de substitution en cas de carence des autorités municipales, son représentant a commis une faute lourde. La responsabilité de l'État peut également être recherchée à raison de l'absence de mise en œuvre de ce même pouvoir.

90. – Communes à police étatisée. – L'article L. 2216-2 du Code général des collectivités territoriales a posé le principe de la responsabilité civile de la commune, quel que soit le statut des agents qui y concourent. Mais le même texte prévoit expressément que la responsabilité civile de la commune peut être atténuée à due concurrence de la faute commise par un agent de l'État ou du mauvais fonctionnement d'un service placé sous l'autorité de celui-ci. C'est ainsi que le Conseil d'État confirme un arrêt condamnant l'État et la commune à indemniser in solidum la victime de préjudices liés à des atteintes à la tranquillité publique relevant de l'autorité des deux autorités. Tout en mettant à la charge exclusive de la commune la part du préjudice lié au bruit, à raison de la faute commise par le maire dans l'exercice de son pouvoir de police relatif à la répression des bruits de voisinage (CE, 27 juill. 2005, n° 257394 préc. supra n° 40).

Cependant, la responsabilité de l'État ne peut être engagée que si elle a été mise en cause, soit par la commune, soit par la victime du dommage. Si la victime n'a pas dirigé son action conjointement contre la commune et l'État, la commune devra se retourner contre l'État pour être garantie par lui de tout ou partie des réparations mises à sa charge. À défaut d'exercer cette action, elle demeurera seule et définitivement responsable du dommage.

91. – Autres collectivités. – L'article L. 2216-2 du Code général des collectivités territoriales) ne s'applique pas seulement à l'État, mais à toute personne morale de droit public.

Dans un certain nombre d'hypothèses, les services municipaux de police peuvent se trouver aidés ou remplacés, pour l'accomplissement de tâches matérielles, par les services d'une autre collectivité territoriale. Ainsi en va-t-il, par exemple, des services de lutte contre l'incendie.

Si le principe général retenu par la jurisprudence est celui de la responsabilité exclusive de la commune (CE, 19 mars 1982, n° 18744), cette solution sera infléchie dans le sens de la possibilité d'une action récursoire fondée sur la faute de l'autre collectivité.

92. – Responsabilité de l'État en cas d'attroupements ou de rassemblements armés ou non armés. – L'État est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens. Toutefois, il peut exercer une action récursoire contre la commune lorsque la responsabilité de celle-ci se trouve engagée (CGCT, art. L. 2216-3. – V. Fasc. 111).

VIII. – Prévention de la délinquance

93. – Généralités. – La loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 (V. supra n° 1) déclare dans son article 1er : « Le maire anime, sur le territoire de la commune, la politique de prévention de la délinquance et en coordonne la mise en œuvre ». On a pu écrire à ce propos que le législateur a voulu « faire du maire le pivot de la politique de prévention dans la commune ».

C'est ainsi notamment que le maire se voit investi d'un pouvoir de prévention à l'égard des mineurs : il peut proposer un accompagnement parental ou lorsque des faits sont susceptibles de porter atteinte au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité ou à la salubrité publiques procéder a à un rappel à l'ordre d'un mineur. À cet effet, les échanges d'informations entre le maire et les

services de l'État sont développés (V. supra n° 17). Il est assisté d'un conseil pour les droits et devoirs des familles et l'accompagnement parental. Dans les communes de plus de 10 000 habitants ou dans celles comprenant une zone urbaine sensible, le maire préside le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance.

Pour plus de détails, voir Fasc. 123-15.